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« Anticiper, c’est prévoir pour agir »

Sommaire
15 avril 2009

1- Perspective
Eté 2009 : La rupture du système monétaire internationale se confirme
La cessation de paiement des Etats-Unis à l'été 2009 est d'une actualité toujours plus brûlante avec un déficit public
désormais totalement hors de contrôle sur fond d'explosion des dépenses (+ 41%) et d'effondrement des recettes
fiscales (-28%) comme l'a anticipé LEAP/E2020 il y a plus d'un an : pour le seul mois de Mars 2009, le déficit fédéral
s'est monté à près de 200 Milliards USD (très largement au-dessus des prévision les plus pessimistes), soit à peine un
peu moins de la moitié du déficit pourtant record de l'ensemble de l'année 2008... (page 2)
2- Telescope
Quand la Chine prépare sa « Grande Evasion » du piège Dollar pour la fin de l'été 2009
Selon LEAP/E2020, la prochaine étape de la crise sera déterminée par un rêve chinois. En effet, à quoi peut bien
rêver Pékin pris, d'après Washington, dans le « piège Dollar » de ses 1.400 milliards d'actifs libellés en Dollars US ?
D'après les dirigeants américains et leur cortège d'experts médiatiques, à rien d'autre qu’à rester prisonnier et même
à renforcer cette condition carcérale en achetant toujours plus de Bons du Trésor et de Dollars US… (page 7)

Pendant que le G20 s'amuse, les Etats-Unis s'enfoncent toujours plus profondément dans la
crise
Il est évident que pour l'équipe de LEAP/E2020, ce sommet est un échec tragique car il n'a pas du tout traité les trois
problèmes clés que nous avions recommandé d'aborder en priorité. Et donc, selon nos anticipations, ce sommet
n'aura pas permis d'enclencher une dynamique permettant, d'ici l'été 2009, de guider la planète vers une crise courte
(3 à 5 ans) et maîtrisée. Bien au contraire, il aura accentué les tendances conduisant à une crise longue (plus d'une
décennie) et tragique. La fenêtre d'opportunité pour changer le cours des choses se rétrécit dangereusement et,
aujourd'hui, il faudrait vraiment un miracle pour inverser la tendance… (page 12)
3- Focus
Cours de l'or : le paradoxe se dévoile
D'un bout à l'autre de la planète, on assiste depuis des mois à un phénomène paradoxal dont la presse s'est
largement faite l'écho : du fait de la crise, les opérateurs ont fui la plupart des catégories d'actifs (immobilier, bourse,
devises, matières premières, …) et un grand nombre d'entre eux ont investi une partie de leur portefeuille en or,
provoquant même des pénuries de pièces ou de lingots sur de nombreux marchés. Pourtant, et c'est là le paradoxe,
le prix de l'or ne décolle pas d'un cours-pivot autour de 900 USD/once… (page 17)

Trois recommandations stratégiques et opérationnelles


1. Retraite / Epargne / Assurances-Vie : Ce que la crise longue implique
2. La bourse ou la vie ?
3. Risques de change : faire face à une situation sans précédent (page 20)
4- Le GlobalEurometre
Résultats & Analyses
Les sondés sont quasi-unanimes (93%) à considérer que le prochain sommet du G20 devrait questionner le rôle
central du Dollar US… (page 22)

1
Lettre confidentielle ‘GlobalEurope Anticipation Bulletin’ N°34 – 15 avril 2009
© Copyright Europe 2020 / LEAP – 2009 - ISSN 1951-6177 - Tous droits réservés -
1- Perspective

Eté 2009 : La rupture du système monétaire


international se confirme

La prochaine étape de la crise sera déterminée par un rêve chinois. En effet, à quoi peut bien rêver Pékin
pris, d'après Washington, dans le « piège Dollar » de ses 1.400 milliards d'actifs libellés en Dollars US 1 ?
D'après les dirigeants américains et leur cortège d'experts médiatiques, à continuer à être prisonnier et
même à renforcer cette condition carcérale en achetant toujours plus de Bons du Trésor et de Dollars US2.

Pourtant, tout le monde sait à quoi rêve vraiment un prisonnier ? A s'évader bien sûr, à sortir de sa
prison. Aussi, pour LEAP/E2020, il ne fait aucun doute que Pékin cherche sans relâche désormais3 à se
débarrasser au plus vite de cette montagne d'actifs « toxiques » que sont devenus les Bons du Trésor US
et la devise américaine sous laquelle la richesse de 1 milliard 300 millions de Chinois 4 est emprisonnée.
Dans ce GEAB N°34, notre équipe détaille donc les « tunnels et les galeries » que Pékin creuse
discrètement depuis plusieurs mois dans le système économique et financier mondial afin de s'évader du
« piège Dollar » d'ici la fin de l'été 2009. Sur fond de cessation de paiement des Etats-Unis s'ouvrira alors
la période à partir de laquelle le « chacun pour soi » deviendra la règle du jeu international, dans la droite
ligne d'un G20 de Londres dont le communiqué final se lit comme la « chronique d'une dislocation
géopolitique annoncée » ainsi que LEAP/E2020 l'analyse dans ce numéro du Global Europe Anticipation
Bulletin.

Evolution trimestrielle de l'accroissement des réserves de change chinoises - Source : Banque centrale
de Chine / New York Times, 04/2009

1
Si l'ensemble des réserves chinoises est évalué désormais à environ 2.000 milliards USD, la part d'actifs libellés en Dollars US n'est
au maximum que de 70%, ce qui donne environ 1.400 milliards USD. Le reste consiste essentiellement en actifs libellés en Euros.
2
N'oublions pas que ce sont en général les mêmes « experts » qui prédisaient ces dernières années que l'économie mondiale
bénéficierait de la suppression de la régulation des banques, que l'économie de l'Internet ouvrait la voie à une croissance sans fin,
que les déficits américains étaient un signe de force, que les prix de l'immobilier US n'arrêteraient pas de monter et enfin que
s'endetter sans restrictions était la forme moderne d'un enrichissement durable.
3
Le message sur le nécessaire changement de devise internationale de référence que Pékin a adressé au monde entier, et aux
autorités américaines en particulier, à la veille du sommet du G20 de Londres n'était absolument pas un « ballon d'essai » ou une
tentative sans espoir de réussite. Les dirigeants chinois ne se faisaient aucune illusion sur la probabilité qu'un tel sujet soit discuté au
cours de ce G20. Ils ont voulu imposer ce débat dans les couloirs du sommet afin de faire passer un message, un avertissement
officieux à tous les acteurs du système monétaire international : pour Pékin, le système Dollar, c'est fini. Si personne ne veut
préparer un système alternatif en commun, alors, cela se fera autrement. Et leurs actes, analysés dans ce numéro du GEAB,
corroborent cette intention. D'ailleurs, et le hasard du calendrier politique est une rareté à Pékin, dans la même période sort un livre,
intitulé « La Chine mécontente », qui demande une action plus volontariste des leaders chinois afin d'imposer leurs choix sur la
scène internationale. Source : ChinaDailyBBS, 27/03/2009
4
Un lien original pour suivre ce chiffre en temps réel : Chine Information.
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Derrière le « jeu de dupes » londonien, où chacun a prétendu croire qu’une collaboration internationale
« historique »5 était en action, on constate en fait une profonde division du G20 : les Américains et le
Britanniques (suivis par un Japon docile) tentent désespérément de préserver leur contrôle sur le système
financier mondial, en bloquant ou en diluant toute réforme significative donnant un pouvoir plus important
aux autres acteurs du système, sans plus avoir assez de puissance pour imposer leurs objectifs. Les
Chinois, les Russes, les Indiens, les Brésiliens, … essayent de rééquilibrer le système monétaire et
financier international en leur faveur, mais sans pouvoir (ou peut-être même sans vouloir vraiment 6)
imposer une telle réforme. Les Européens (et quand on utilise ce terme il implique de plus en plus une UE
sans le Royaume-Uni) s'avèrent de leur côté incapables de trancher entre les deux seules options qui
s'offrent à eux : sombrer avec les Etats-Unis et le Royaume-Uni en copiant leurs politiques ou bien
remettre fondamentalement en cause le système monétaire et financier mondial actuel en partenariat
avec les Chinois, les Russes, les Indiens et les Brésiliens. Ils arrivent à ne plus suivre Washington et
Londres dans leur reproduction des politiques passées qui ont toutes déjà fait faillite 7, mais ils ne
parviennent pas à oser préparer l'avenir.

L'effondrement du commerce international n'a aucun précédent - Evolution annuelle à partir des taux
trimestriels (courbe en trait continu : évolution en cours / courbe en petits pointillés : prévision d'après la corrélation historique
entre le commerce mondial et le taux de croissance des pays de l'OCDE / courbe en gros pointillés : prévision d'après le modèle
d'indicateurs de court terme) - Source : OCDE, Mars 2009

5
C'est en fait Angela Merkel qui a fait preuve de la plus grande clairvoyance en trouvant le mot juste sur la nature du sommet du
G20 à Londres. Elle a dit que c'était une réunion « presque historique » ; et c'est bien le mot « presque » qui résume ce qui s'est
passé à Londres. Les dirigeants du G20 ont « presque » abordé les questions essentielles ; ils ont « presque » défini un programme
commun d'action; ils sont « presque » parvenus à lancer de nouvelles stimulations économiques et une nouvelle régulation
financière mondiale; ils ont « presque » interdit les paradis fiscaux; et ils ont « presque » convaincu » l'opinion publique mondiale.
« Presque », mais, hélas, pas réellement. Et cela fait une belle différence pour la suite de la crise.
6
C'est en effet le dilemme du « jeu international » développé dans le GEAB N°33. A un certain moment, l'intérêt des joueurs qui
montent en puissance est de laisser purement et simplement l'ancien jeu se briser net pour en reconstruire un qui leur convienne
plutôt que de se battre pour transformer l'ancien jeu via une transition longue et incertaine.
7
Notamment l'endettement public à outrance, qui est appelé par Washington et Londres « stimulus économique ».
3
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Les Européens porteront d'ailleurs une responsabilité majeure si, dans la brève fenêtre temporelle qui
reste (moins de six mois désormais), aucune action majeure n'est entreprise pour éviter la crise longue et
tragique qui durera plus d'une décennie8. Ils possèdent à la fois le savoir-faire technique pour aider au
succès d'une devise internationale fondée sur un panier des principales monnaies et une méthode
politique qui permet de gérer au mieux les intérêts stratégiques divers d'un ensemble de pays comme
ceux dont la monnaie serait derrière la nouvelle devise internationale de référence. Pourtant, il existe
aujourd'hui une évidente incapacité des dirigeants de l'UE (et notamment de la zone Euro) à assumer ces
responsabilités, comme si finalement ils préféraient voir le système occidental finir de se briser (tout en
proclamant le contraire) plutôt que de se battre pour en faire un pont vers un nouveau système mondial :
que ce soit un choix (ce que LEAP/E2020 ne croit pas) ou que ce soit le simple résultat de la pusillanimité
de dirigeants européens choisis pour leur docilité (vis-à-vis de Washington et des grands opérateurs
économiques et financiers européens), dans tous les cas, leur neutralité est très dangereuse pour la
planète puisqu'elle empêche le lancement d'un processus efficace permettant d’éviter une crise longue et
tragique9.

Ainsi, dans ce GEAB N°34, nos chercheurs développent plus avant leurs anticipations sur les formes
possibles que prendra la cessation de paiement américaine d'ici la fin de l'été 2009 et que le mois d'Avril
2009 (principal mois de collecte des revenus fiscaux aux Etats-Unis) va rendre désormais impossible à
masquer10. La cessation de paiement des Etats-Unis à l'été 2009 est en effet d'une actualité toujours plus
brûlante avec un déficit public désormais totalement hors de contrôle sur fond d'explosion des dépenses
(+ 41%) et d'effondrement des recettes fiscales (-28%) comme l'a anticipé LEAP/E2020 il y a plus d'un an
: pour le seul mois de Mars 2009, le déficit fédéral s'est monté à près de 200 Milliards USD (très
largement au-dessus des prévision les plus pessimistes), soit à peine un peu moins de la moitié du déficit
pourtant record de l'ensemble de l'année 200811. Et le même phénomène se répète à tous les niveaux de
la structure publique du pays : état fédéral, états fédérés12, comtés, villes13, … partout les recettes fiscales
s'évanouissent entraînant de manière accélérée l'ensemble du pays dans une spirale déficitaire que
personne (Washington en premier chef) ne maîtrise plus.

8
Le G20 de Londres s'inscrit directement dans la direction de cette crise de longue durée.
9
A propos de l'UE, l'équipe de LEAP/E2020 souhaite souligner l'inanité des « analyses » économico-politiques, essentiellement issues
d'éminents économistes et experts proches du Parti démocrate américain, que relayent actuellement les principaux médias
internationaux, et qui se limitent à reprocher aux Européens … de ne pas faire comme Washington. Paul Krugman en tête, ces
« grands amis » de l'Europe, qui l'aiment tant qu'ils pensent savoir mieux que les Européens ce qu'elle doit faire (et aussi ce qu'elle
doit être car les mêmes prônent généralement aussi son extension à la Turquie, voire à Israël et à l'Asie centrale), feraient mieux de
s'occuper de conseiller efficacement leur propre parti et leur nouveau président pour éviter l'effondrement de leur pays, car c'est
bien de cela qu'il s'agit désormais. Enfin, et nous n'y reviendrons plus, il est quand même étonnant qu'un ensemble d'experts qui
depuis des années a tant vanté les mérites d'un système qui aujourd'hui s'effondre sous les yeux de tous, ose encore donner des
leçons au reste du monde. La plus élémentaire décence lui imposerait, au niveau international, la seule voie respectable possible : le
silence. En tout cas, en Europe, ce discours, qui a bien entendu toujours ses relais académiques et journalistiques, ne passe plus car
il vient tout droit d'une époque révolue. Comme le fait d'ailleurs régulièrement remarquer LEAP/E2020, il est bien évidemment
nécessaire et légitime de porter un regard très critique sur l'UE, ses dirigeants et ses politiques ; mais le faire avec comme seul
critère la conformité ou non aux orientations de Washington (ou Londres) est désormais inacceptable. Visiblement, à l'image des
financiers qui n'ont pas encore compris qu'une page était tournée en ce qui concerne leurs stock-options et leurs « parachutes
dorés », nombre d'intellectuels et de politiques n'ont pas encore bien intégré que leurs références, leurs valeurs et leurs analyses
appartenaient désormais au passé. Qu'ils pensent aux élites du bloc soviétique … et ils comprendront comment et à quelle vitesse un
système de pensée peut devenir obsolète.
10
Outre la baisse des revenus fiscaux, on assiste dorénavant aux Etats-Unis à l'extension d'un mouvement de révolte contre
l'utilisation des impôts pour sauver Wall Street et contre l'ampleur des déficits prévus, qui met en cause l'ensemble de la classe
dirigeante américaine. Sources : USAToday, 13/04/2009 ; MarketWatch, 16/04/2009
11
Sources : USAToday, 11/04/2009 ; MarketWatch, 10/04/2009
12
Ainsi en Californie, les premiers jours d'Avril laissent craindre des recettes très largement inférieures aux pires prévisions,
entraînant un déficit budgétaire multiplié par deux pour la Californie par rapport aux prévisions d’il y a seulement quelques mois. Au
niveau fédéral, un processus du même type est en cours, rendant désormais envisageable selon LEAP/E2020 un déficit fédéral
annuel à près de 3.500 Milliards USD, soit plus de 20% du PNB des Etats-Unis. Source : CaliforniaCapitol, 08/04/2009
13
L'exemple de ces villes qui, comme Auburn dans la région de Seattle, doivent interdire leurs grands axes aux poids-lourds faute de
moyens pour les entretenir est éloquent. Source : Seattle Business Journal, 10/04/2009
4
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Evolution des revenus fiscaux de sociétés aux Etats-Unis (1930 – 2009) - Sources : US Department of
Commerce / Réserve Fédérale de Saint Louis (Estimation 2° et 3° trimestres 2009 par EconomicEdge)

Dans ce GEAB N°34, nos chercheurs se penchent également sur le « mystère du cours de l'or ». Pour le
métal jaune, nos chercheurs (non pas d'or, mais d'information) ont identifié quelques pistes très
intéressantes pour comprendre pourquoi14, alors que les acheteurs d'or sont légion et que dans de
nombreux pays on signale des ruptures d'approvisionnement en pièces ou lingots d'or, le cours du métal
jaune ne fait qu'osciller autour du même pivot depuis des mois.

Enfin, notre équipe présente ses recommandations pour se préparer aux prochains mois de la crise en
s'attachant ce mois-ci notamment à l'épargne en général et aux assurances-vie en particulier.

14
Et permettre ainsi d'anticiper les tendances des prochains mois.
5
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2- Telescope

Quand la Chine prépare sa « Grande Evasion »


du piège Dollar pour la fin de l'été 2009

Selon LEAP/E2020, la prochaine étape de la crise sera déterminée par un rêve chinois. En effet, à quoi
peut bien rêver Pékin pris, d'après Washington, dans le « piège Dollar » de ses 1.400 milliards d'actifs
libellés en Dollars US ? D'après les dirigeants américains et leur cortège d'experts médiatiques, à rien
d'autre qu’à rester prisonnier et même à renforcer cette condition carcérale en achetant toujours plus de
Bons du Trésor et de Dollars US.

Pourtant, tout le monde sait à quoi rêve vraiment un prisonnier ? A s'évader bien sûr, à sortir de sa
prison. Aussi, pour LEAP/E2020, il ne fait aucun doute que Pékin cherche sans relâche désormais à se
débarrasser au plus vite de cette montagne d'actifs « toxiques » que sont devenus les Bons du Trésor US
et la devise américaine sous laquelle 1 milliard 300 millions de Chinois ont leur richesse emprisonnée.

Et, comme dans tout récit d'évasion crédible, les candidats à la liberté ne passent pas leur temps à clamer
sur tous les toits qu'ils vont « se faire la belle ». C'est même généralement le contraire puisqu'il s'agit
d'endormir la vigilance des gardiens. Pour notre équipe, la déclaration chinoise du 24 mars dernier
demandant le remplacement du dollar par une monnaie de référence internationale, était en fait à la fois
un sondage et un avertissement : un sondage direct pour évaluer le rapport de force mondial (et
notamment au sein du G20) autour de l'idée d'un basculement dans l'ère post-Dollar 15 et un
avertissement constructif ou destructif (selon la réaction autour de cette idée) à tous les opérateurs
financiers mondiaux. Tout joueur responsable (et Pékin en est un) prévient discrètement les autres
joueurs qui peuvent lui être proches ou nécessaires s'il prépare un « grand coup ». Une « Grande
Evasion »16 ne peut réussir qu'à condition d'être nombreux à la préparer17 et à l'effectuer ; et de s'assurer
que personne de bonne volonté ne risque de se trouver gravement sanctionné faute d'avoir été
prévenu18.

15
Les conversations de couloir du G20 de Londres ont bruissé de discussions bilatérales autour du sujet de l'après-Dollar. Notre
propre initiative (Lettre Ouverte aux dirigeants du G20) et ses multiples retours ont permis de le vérifier. Dans ces conditions, nul
doute que le communiqué de la banque centrale chinoise a été au cœur des discussions sérieuses (pas celles du G20 « médiatique»)
pendant et après le sommet de Londres.
16
Le film du même nom, tiré d'un fait réel, ne démontre pas autre chose. Et dans la réalité, c'est le manque de préparation
minutieuse qui a conduit à l'échec partiel de l'évasion.
17
D'ailleurs pour bien se préparer, Pékin vient de lancer un think-tank dédié à la crise économique mondiale pour aider les dirigeants
chinois à faire leurs choix. Outre le trafic fortement croissant venu de Chine (et du Japon, incluant notamment les traductions
spontanées sur de nombreux sites et blogs de nos communiqués publics) qu'enregistre LEAP/E2020 depuis la fin 2008, c'est une
autre initiative qui indique une volonté de s'abstraire des analyses américaines ou britanniques sur la crise et ses conséquences qui
jusqu'à présent constituaient 90% des analyses « consommées » par les experts chinois. Source : ChinaDaily, 21/03/2009
18
D'ailleurs tous les principaux acteurs savent que les flux de capitaux fuient désormais les Etats-Unis au moment même où les
besoins en capitaux étrangers « explosent » du fait des déficits publics gigantesques. En Janvier 2009, le flux net des sorties de
capitaux hors du territoire américain a ainsi été de 150 milliards USD. Source : US Department of Treasury, 16/03/2009.
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Deux estimations de l'évolution des réserves chinoises d'actifs étrangers (en milliards USD) - Sources :
Banque Centrale de Chine / Brad Setser, 01/2009

Toujours est-il que cette opération aura finalement servi à renforcer les autorités chinoises dans une
quadruple conviction:

1. Un grand nombre d'autres membres du G20 soutiennent expressément l'idée du passage rapide 19
à l'ère post-Dollar, notamment la Russie, l'Inde, l'Afrique du Sud, l'Argentine, le Brésil, … Pékin ne
sera pas seul lors du « Grand Bond en avant20 » dans l'ère post-Dollar. Bien au contraire, la Chine
sera très bien accompagnée par une partie importante de l'Amérique latine, de l'Afrique et de
l'Asie. D'ailleurs la mise en place des accords de Swap en Yuan avec plusieurs de ces pays
prépare déjà le terrain21.

19
Et là nos chercheurs estiment qu'on parle en mois et non en années (comme voudraient le croire les experts qui « concèdent »
qu'il y a bien un problème avec le statut du Dollar) car l'immensité des déficits américains désormais incontrôlables fait peser une
menace à court terme sur tout le système monétaire international.
20
Ce grand saut politique chinois de la fin des années 1950 a eu des effets collatéraux désastreux (des dizaines de millions de morts
du fait de la famine induite) ; mais rien aujourd'hui ne peut permettre de penser que la direction politique du PC chinois n'est pas
prête à prendre un tel risque si elle estime que sa pérennité au pouvoir et la stabilité interne du pays sont à ce prix. Les analystes
américains et européens qui prétendent savoir ce que pensent les dirigeants chinois ont la fâcheuse tendance à les penser à leur
image. Or, pour notre équipe, l'entrée dans l'ère post-Dollar (organisée via une nouvelle devise de référence mondiale fondée sur un
panier de devises ; ou chaotique, via une sortie brutale et non négociée hors de l'ère Dollar) est d'abord une entrée dans une ère
post-européenne (ou post-occidentale si l'on considère une spécificité américaine en matière de valeurs fondamentales par rapport à
l'Europe) : et une telle ère réserve de grandes surprises aux européo-centristes ou occidento-centristes. Pour s'en convaincre, il
suffit de lire les propos édifiants du patron de la banque centrale chinoise sur la « supériorité du système chinois ». Source :
MarketWatch, 26/04/2009
21
Après la Corée du Sud, la Malaisie, l'Indonésie, c'est maintenant au tour de l'Argentine d'avoir signé un accord de Swap pour un
montant équivalent à 14,5 milliards USD dans leurs devises respectives. Cela permet aux entreprises des deux pays d’éviter d'utiliser
le Dollar US pour ces échanges et renforce hors d'Asie le rôle croissant du Yuan comme devise-pivot des échanges. Source :
AustralianNews, 01/04/2009
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2. Les Etats-Unis et le Royaume-Uni refusent d'envisager toute évolution en direction d'une ère post-
Dollar. La gaffe de Timothy Geithner, envisageant de discuter la proposition chinoise, a été vite
corrigée par les dirigeants politiques américains mais elle est révélatrice d'une situation
intéressante pour Pékin. Geithner étant l'un des hommes-clés de Wall Street dans l'équipe
Obama, sa « gaffe » illustre combien les milieux financiers anglo-saxons sont finalement prêts à
débattre de toute évolution qui leur assurerait de conserver leurs privilèges financiers, y compris
si celle-ci passe par la fin de l’ « ère dollar ». Le « Mur Dollar » n'est pas très solide quand il est
fondé sur « Wall Street » (la rue du Mur) car les opérateurs financiers sont très peu attachés au
territoire (et cela ne date pas de la globalisation actuelle). Pour le reste, Washington refuse pour
l'instant d'entendre parler du remplacement du Dollar US comme devise de réserve mondiale et
croit aux propos rassurants des experts sur le sujet pour se rassurer sur l'avenir22. On sait ce que
cela a donné pour les subprimes, la bulle financière, les banques de Wall Street, AIG, TARP, la
récession, …

3. Les Européens (hors Royaume-Uni) sont égaux à eux-mêmes et donc incapables de prendre une
décision réellement forte par rapport à leur ancien protecteur américain 23. Alors ils font avec
succès de la résistance pour ne plus suivre les directives de Washington ; mais ils sont incapables
de mettre sur la table les questions qui fâchent les Etats-Unis. En revanche, par leurs multiples
canaux, et de par leur nature structurellement multilatéralisme, il est tout aussi évident que, une
fois l'ère post-Dollar devenue clairement irréversible, ils apporteront savoir-faire et lobbying pour
pousser vers une devise internationale nouvelle, indépendante d'un Etat particulier. C'est bien
pour cela que la Chine a lancé l'idée des DTS 24 comme alternative au Dollar, afin de montrer
qu'elle serait ouverte à une alternative au Yuan (condition clé pour obtenir dans l'avenir un
soutien européen).

4. Par ses effets d'annonce de plus en plus précis et audacieux, mais toujours très progressifs, voire
suivis de vagues infirmations provenant de canaux de moindre poids mais vite relayées par la
presse financière internationale, Pékin gagne une liberté croissante de parole (et donc de
manœuvre car, en manière monétaire, la parole peut être une arme fatale ou au contraire un
baume salvateur) sans pour autant affecter de manière significative les valeurs des Bons du
Trésor et du Dollar US.

Et ce point 4 est bien l'exigence absolue des autorités chinoises actuellement : éviter un effondrement des
Bons du Trésor et de la devise américaines avant de s'être « évadé » du « piège Dollar ». Pour
LEAP/E2020, les mois qui viennent reflèteront en effet le sens exact que la Chine donne à cette exigence :
est-ce un objectif ou est-ce une contrainte ? Si c'est un objectif, alors, Washington, Londres et les médias
financiers internationaux ont raison : Pékin passera par les fourches caudines de Washington tout en
essayant d'accroître son influence sur les décisions américaines. Si c'est une contrainte, en revanche, c'est
notre équipe qui a raison et les dirigeants chinois tentent de se débarrasser des Bons du Trésor et des
Dollars US au meilleur prix tant qu'une telle opération est possible (et ils ont déjà envisagé le « possible »
avant de se lancer dans cette « évasion » du Dollar), c'est-à-dire, en évitant le plus longtemps
« possible » de créer des turbulences risquant de faire baisser significativement les valeurs de ces deux
actifs. Mais, à la différence de la première option, une fois que le champ du « possible » est épuisé, alors,
brutalement, les dirigeants chinois contribueront à précipiter la fin de l'ère Dollar ; ou, plus probablement,
ils annonceront sereinement que pour de multiples raisons indépendantes de leur volonté 25, ils ne peuvent
plus jouer leur rôle de stabilisateur des déséquilibres américains.
22
Cet article du Los Angeles Times, du 03/04/2009, est l'un des plus ouverts en la matière ! Mais il est vrai que la Chine est bien plus
proche de Sunset Boulevard que de la Beltway.
23
Nous disons « ancien protecteur » car le sommet de l'OTAN l'a encore démontré, les Européens et les Etats-Unis ne s'entendent
plus du tout sur la nature des menaces. La guerre en Afghanistan devient de plus en plus une guerre américaine tandis que les
Européens sont surtout préoccupés de réorganiser au mieux leurs relations stratégiques avec Moscou. En résumé, l'Alliance (avec la
France réintégrée, comme d'ailleurs notre équipe l'avait annoncé dès l'élection de Nicolas Sarkozy) n'est plus qu'un club du troisième
âge sans finalités communes autre que passer le temps et prétendre qu'on est toujours aussi liés qu'il y a 60 ans. Mais « la vieillesse
est un long naufrage » comme le disait … Charles de Gaulle.
24
Idée irréaliste en fait car les DTS ont été tués par les Etats-Unis il y a près de 40 ans. Il faudrait lancer une devise vraiment
nouvelle pour espérer avoir une chance de réussite, sans compter qu'avec un nom de cette nature « Droits de Tirage Spéciaux »,
toute popularité est déjà hors de question en-dehors du cercle restreint des experts des questions monétaires.
25
Et dont ils tiendront les Etats-Unis responsables en fait : déficit exorbitant, incapacité à créer la relance, … les causes ne
manqueront pas à la fin de l'été 2009.
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Evolution des achats chinois d'actifs américains et des réserves chinoises par catégories d'actifs
américains (En vert : Bons du Trésor plus dépôts / En bleu : GSE (Fannie, Freddie, …) / En jaune : Actions/Obligations privées /
En rouge : Evaluation annualisée des réserves) - Source : Council on Foreign Relations

Et notre anticipation en la matière se fonde sur des évolutions en cours depuis quelques mois qui valident
nos analyses. En effet, depuis la fin 2008, les autorités chinoises ont entrepris de se « débarrasser »
chaque mois de 50 à 100 milliards de leurs actifs libellés en Dollars US. Profitant des prix historiquement
bas de nombreux actifs nécessaires à l'économie chinoise (mines, espaces agricoles, énergie, parts
d'entreprises européennes ou asiatiques – pas américaines ce qui n'est pas un détail, … ), Pékin fait son
« shopping », respectant ainsi sa contrainte première : valoriser au mieux ses actifs libellés en Dollars …
c'est-à-dire, s'en « débarrasser » en les échangeant contre d'autres classes d'actifs, indépendantes des
Etats-Unis, et permettant d'avancer rapidement sur le chemin de la « Grande Evasion ».

Nous soulignons la rapidité du processus. Malgré l'opacité des méthodes impliquées (condition sine qua
non pour éviter une chute du Dollar et des Bons du Trésor avant le terme souhaité par Pékin), les
excellents travaux conduits par MM. Brad W. Setser et Arpana Pandey et publiés en Janvier 2009 par le
Council of Foreign Relations, permettent d'explorer la très opaque comptabilité des réserves chinoises de
change et de situer à plus de 2.300 milliards USD leur valeur totale fin 2008 (soit plus de 50% du PNB
chinois26), dont près de 1.700 milliards en actifs libellés en Dollars US (900 milliards en Bons du Trésor,
environ 550 milliards en bons des GSE (Fannie, Fredie, ..), près de 200 milliards en actifs privés et 40
milliards en dépôts à court terme). L'auteur conclut fort logiquement qu'il n'est plus du tout dans l'intérêt
de Pékin de continuer à amasser ces sommes gigantesques qui sont de plus en plus risquées du fait des
choix financiers et économiques réalisés par les Etats-Unis pour répondre à la crise 27 ; et pour lesquelles
les ressources vont désormais manquer du fait de l'effondrement des excédents commerciaux et des flux
d'investissements étrangers.

26
A ce propos, notre équipe souhaite souligner que malgré les discours enthousiasmants des dirigeants chinois, la situation
économique de la Chine n'a aucune chance de s'améliorer substantiellement dans l'année à venir. Entre l'effondrement des
exportations, la bulle immobilière à la veille d'exploser et le chômage qui enfle, le PNB chinois va probablement rester stationnaire
en 2009 (ou avec une maigre hausse de 2% à 3%). Cette situation ne peut que renforcer la volonté de Pékin de tourner le dos au
plus vite aux stratégies qui ont conduit le pays dans cette impasse … et le bouc émissaire est tout trouvé. Sources : Financial Times,
13/04/2009 ; Chinaview, 02/04/2009 ; New York Times, 02/04/2009 ; ChinaDaily, 19/03/2009
27
La question par exemple de la notation AAA pour les Etats-Unis est vraiment une farce comme le décrit cet article publié dans
SeekingAlpha le 30/03/2009. Tout le pays, entreprises, ménages, institutions publiques, est en train de passer en junk bonds … mais
pas le sommet, le gouvernement fédéral ! Les agences de notation (toutes américaines) ont bien mérité de recevoir plus de 400
millions USD du gouvernement fédéral pour l'aider à évaluer les actifs toxiques qu'il va racheter aux banques pour 1.000 milliards
USD … actifs qu'avaient noté bien entendu AAA pour la plupart ces mêmes agences de notation il y a seulement deux ans. Mais
Pékin a bien saisi désormais, comme le reste de la planète d'ailleurs, l'escroquerie en cours sur ces valeurs. Source : BusinessInsider,
07/04/2009
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En haut : Evolution des réserves chinoises de change et de la part des actifs américains / En bas :
Evolution des mêmes valeurs en pourcentage - Source : BCA Research, 12/2008

En toute logique, Pékin entreprend de se débarrasser au plus vite dorénavant de cet immense excédent
de réserves de changes qui maintient les dirigeant chinois prisonniers des décisions américaines sans plus
y trouver d'intérêt pour leur pays comme le décrit admirablement Rachel Zembia dans un article publié
dans RGE Monitor du 21/02/2009 : prêts à taux préférentiels aux pays de l'Asean 28, accords de swap,
autorisations à 400 grandes entreprises chinoises de commercer en Yuan avec les pays d'Asie 29, prêts aux
états africains et à la Russie, négociation de tarifs préférentiels à long terme sur le pétrole avec les états
du Golfe persique, prêts aux compagnies pétrolières du Brésil et d'Abou Dhabi, parts d'entreprises
européennes et japonaises (pas américaines ce qui n'est pas un hasard), ... L'auteur souligne ainsi que
ces accords impliquent apparemment une garantie d'accès à ces ressources pour les compagnies
chinoises. Cela illustre la nature fondamentale de l'opération : contrairement aux apparences, Pékin tente
seulement, sans le dire publiquement, de se débarrasser au plus vite de ses Dollars et Bons du Trésor US
contre des actifs dont le pays a besoin à long terme et qui sont à des prix historiquement bas … tout cela
tant que le reste du monde accepte encore les Dollars et que les Bons du Trésor ont encore une valeur
significative.

Pour ce qui est des Bons du Trésor des Etats-Unis, la Chine, qui n'en achète plus beaucoup désormais (le
montant des achats a baissé de 146 milliards USD au premier trimestre 2009 par rapport à la même
période l'année dernière, représentant un accroissement de seulement 7,7 milliards USD 30 !), n'achète
dorénavant plus que des Bons à court terme (trois mois)31 !

28
Source : MarketWatch, 12/04/2009
29
Sources: ChinaDaily, 12/04/2009
30
Source : ChinaDaily, 11/04/2009
31
Comme l'indique Brad Setser, en 2008, la Chine a absorbé près de la moitié des achats étrangers des Bons du Trésor émis par les
Etats-Unis.
10
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Entre la quasi-cessation de ses nouveaux achats de Bons du Trésor et ses « courses mondiales » qui
semblent évoluer à un rythme croissant dépassant les 50 milliards USD/mois (en intégrant les accords de
Swap), entre la fin 2008 et la fin de l'été 2009, la Chine aura donc écoulé près de 600 milliards de ses
réserves libellées en Dollars US ; et elle aura refusé d'acheter un montant compris entre 500 et 1.000
milliards de nouveaux Bons du Trésor US que l'administration Obama commence à essayer de placer sur
les marchés internationaux pour financer les gigantesques déficits publics. Pour LEAP/E2020, ce sont ces
deux sommes qu'il faut additionner pour évaluer l'impact de Pékin sur l' « ère Dollar » à la fin de l'été
2009, à la fin de l'année fiscale américaine : à elle seule la Chine représentera un « trou » allant de 1.100
à 1.600 milliards USD dans les besoins de financement des Etats-Unis. Ben Bernanke va devoir multiplier
les Dollars pour tenter (en vain) d'éviter la banqueroute du pays.

Evolution de la base monétaire des Etats-Unis - Source : Réserve fédérale US, 03/2009

Sachant que, lorsque Ben Bernanke annonce que la Fed va acheter elle-même des Bons du Trésor US, la
valeur de ces actifs perd 10% en une journée, soit 140 Milliards USD, par rapport aux autres devises
mondiales, nul besoin d'un grand effort d'imagination pour penser que les dirigeants chinois considèreront
comme acceptable le sacrifice de 400 ou 500 milliards USD.

De toute façon, selon LEAP/E2020, à ce stade, ils estimeront avoir poussé au maximum « possible » la
contrainte de valorisation de leurs actifs libellés en Dollar. Ensuite, autant faire partie de ceux qui
« appuient » sur le bouton, ou qui ne font rien pour l'en « empêcher ». La « Grande Evasion » de la Chine
hors du Dollar passera alors à sa seconde phase, qui dépendra en partie de l'attitude des autres acteurs
clés : vers l'ascension du Yuan comme devise internationale de réserve parallèlement à l'Euro, au Yen, au
Rouble, au Real ou bien vers l'accélération de la mise en œuvre d'une nouvelle devise référence fondée
sur un panier de ces devises. Le Dollar sera alors hors course et le G20 réduit à un G18 (sans les Etats-
Unis et le Royaume-Uni, mais avec le Japon qui dans ces conditions ne pourra plus désormais échapper à
l'orbite chinoise) ; sinon ce sera la dislocation géopolitique généralisée, comme décrite dans le scénario de
la crise longue et tragique dans le GEAB N°32, autour de blocs économiques fondés chacun sur des
devises références spécifiques.

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Pendant que le G20 s'amuse, les Etats-Unis
s'enfoncent toujours plus profondément dans la
crise

Pour ceux qui ont lu notre lettre ouverte aux dirigeants du G20 publiée dans le Financial Times du 24
Mars 2009 (et très largement diffusée dans de nombreuses langues sur Internet), il n'y a pas besoin
d'être grand clerc pour deviner notre analyse des résultats du sommet de Londres 32. Cependant, nous
devons reconnaître que les résultats en question sont encore pires que ce que nous imaginions. Les
participants occidentaux au G20 (Américains, Européens et Japonais) ont ainsi été particulièrement
remarquables pour réaliser deux choses essentielles : s'assurer qu'aucune ligne directrice commune ne
sortait de cette réunion ; et veiller à ce qu'aucune mesure annoncée ne puisse réellement faire l'objet
d'une mise en œuvre sérieuse à court ou moyen terme. Ils ne peuvent évidemment pas tout faire à la fois
: d'un côté se convaincre de leurs propres communiqués de presse annonçant une sortie de crise
prochaine, et de l'autre veiller à éviter une crise longue et tragique pour le monde. Pourtant une chose est
certaine pour LEAP/E2020, sur fond de crise mondiale33, les Etats-Unis s'enfoncent chaque jour un peu
plus dans une dépression sans équivalent dans l'histoire de ce pays qui commence à s'approcher de
points de rupture politiques et sociaux.

Evolution du taux de chômage aux Etats-Unis (1994-2009) (en bleu : U3, chiffre retenu par les autorités / en
jaune : U6, chiffre intégrant une population plus conforme aux statistiques internationales / en vert : la différence entre les deux
chiffres) - Source : Chris Puplava / US Bureau of Labor Statistics , 03/2009

32
Le titre de ce chapitre du GEAB N°34 fait référence à la comédie musicale allemande « Le Congrès s'amuse », sortie en 1931 et
réalisée en trois versions linguistiques (Allemand, Français et Anglais – un peu comme GEAB en somme) qui décrit les à-côtés du
Congrès de Vienne, qui organisa l'Europe post-napoléonienne.
33
Ce remarquable article de Johann Hari sur Dubaï, publié dans The Independent du 07/04/2009, illustre parfaitement comment la
crise détruit les fictions de richesse et de pouvoir sur lesquelles la globalisation de ces dernières années avait fondé sa crédibilité.
12
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Pour ce qui est de l'analyse des résultats du G20, nous serons brefs. Il est évident que pour l'équipe de
LEAP/E2020, ce sommet est un échec tragique34 car il n'a pas du tout traité les trois problèmes clés que
nous avions recommandé d'aborder en priorité35. Et donc, selon nos anticipations, ce sommet n'aura pas
permis d'enclencher une dynamique permettant, d'ici l'été 2009, de guider la planète vers une crise courte
(3 à 5 ans) et maîtrisée. Bien au contraire, il aura accentué les tendances conduisant à une crise longue
(plus d'une décennie) et tragique. La fenêtre d'opportunité pour changer le cours des choses se rétrécit
dangereusement et, aujourd'hui, il faudrait vraiment un miracle pour inverser la tendance. Or, l'équipe de
LEAP/E2020 ne croit pas aux miracles en la matière.

Nous avons déjà détaillé dans l'introduction de GEAB N°34 le jeu lamentable des acteurs occidentaux du
G20 et les conclusions qu'en avait tiré la Chine notamment. Analysons ici rapidement les « résultats »
annoncés. Tout d'abord, il ne s'agit pas de résultats, mais seulement d'annonces car dans la plupart des
cas, soit il s'agit de mesures déjà prises, soit il s'agit de mesures dont d'autres doivent encore décider. Au
total, aucune décision réelle36 n’est en fait sortie du sommet du G20 de Londres.

Ainsi, le millier de milliards de stimulus économique est obtenu en ajoutant allègrement les plans déjà
lancés ces derniers mois à d'autres encore à l'état de projet. A cela il faut ajouter que comme d'habitude,
personne ne s'est préoccupé du financement du millier de milliards annoncé, un « détail » sûrement.

Ainsi, l'augmentation des réserves du FMI reste à faire valider par les pays concernés (quand ils ont été
clairement identifiés) ou même reste à doter tout simplement. L'exemple le plus intéressant reste celui
des Etats-Unis, puisque c'est le Congrès qui décidera in fine de l'apport de 100 milliards ou non au FMI
annoncé par Barak Obama. Or, étant données l'impopularité du FMI au Congrès américain et la réticence
croissante de ses membres à signer des chèques de centaines de milliards de Dollars, la partie est loin
d'être gagnée. Au passage, on peut remarquer que personne ne semble s'inquiéter du fait que si le G20
souhaite augmenter de 750 milliards USD les réserves du FMI, c'est peut-être parce qu'il compte les
utiliser … et que donc que de nombreux Etats vont sombrer dans la cessation de paiement dans les mois
à venir et que l'économie mondiale va continuer de s'enfoncer dans la crise.

Ainsi de la lutte contre les « paradis fiscaux » s'est quant à elle transformée en farce quand, une semaine
après sa parution, la liste noire de l'OCDE censée servir de référence (et pourtant déjà très incomplète)
s'est retrouvée vierge car tous « les paradis » avaient promis de se soumettre aux réglementations. Et,
bien entendu, nous sommes censés croire cette fable.

Ainsi de l'aide au commerce mondial d'un montant de 250 milliards USD qui intègre essentiellement les
aides à l'exportation existante et ne constitue en fait aucun soutien nouveau.

Ainsi de la réglementation financière internationale qui a comme caractéristique que rien de précis n'est
défini concernant la rémunération des dirigeants d'établissements financiers, la transparence des hedge
funds, etc. La seule chose qui en résultera, c’est que chaque région ou acteur principal (à l'image de l'UE)
va accroitre ses propres contraintes réglementaires… accélérant en cela le processus de dislocation
mondiale.

34
La différence entre le drame et la tragédie, c'est que dans la tragédie les personnages ont conscience du destin qui les entraîne
vers une fin malheureuse. Dans le drame, ils en sont inconscients. Pour l'équipe de LEAP/E2020, ce sommet de Londres a ressemblé
à une pièce de théâtre où sur la scène se jouait un drame dont seuls les spectaurs dans la salle avait conscience qu'il était une
tragédie dont eux aussi faisaient partie.
35
Et nous ne mentionnons même pas la taille et structure du communiqué : neuf pages pour édicter une liste d'intentions sans
aucune cohésion.
36
C'est-à-dire suivie directement d'effets tangibles.
13
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C'est d'ailleurs la vraie logique qui a sous-tendu ce sommet de Londres. Loin de ralentir ou de prévenir la
dislocation géopolitique mondiale, par son absence de résultats concrets et son incapacité à dégager une
direction commune, il contribue en fait à accélérer ce processus. Le rendez-vous éventuel que se sont
donnés les dirigeants du G20 à New-York en Septembre prochain, à l'occasion de l'Assemblée générale
annuelle des Nations-Unies est ainsi emblématique. Ils n'ont même pas fixé une réunion spécifique, par
crainte sans doute de devoir rendre des comptes sur leurs annonces de Londres et par certitude de ne
pas pouvoir y dire autre chose que ce qu'ils ont déjà dit à Londres37. Dans le cadre des Nations-Unis, le
G20 passera inaperçu. Et ils se réunissent inconsciemment à New York, en Septembre, à l'épicentre de la
crise actuelle, à deux pas de Wall Street et de Ground Zero, tout un symbole pourtant … Selon nos
anticipations, ils ont toutes les chances, non pas d'empêcher la dislocation géopolitique mondiale, mais
d'être aux premières loges pour assister aux débuts chaotiques de l'ère post-Dollar.

Evolution du déficit fédéral des Etats-Unis (1980-2009) - Source : US Congress, 02/2009

37
Nous rappelons que, pour LEAP/E2020, il sera impossible qu'un sommet du G20 produise des résultats utiles pour maîtriser la crise
tant que ces sommets se tiendront aux Etats-Unis et au Royaume-Uni. La géographie des sommets internationaux est déjà en soi
une partie des solutions que ces sommets sont censés apporter.
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A New-York, en Septembre 2009, les dirigeants du G20, tout comme les autres dirigeants qui participeront
à l'Assemblée générale des Nations-Unies, ne pourront que constater la gravité accrue de la crise dans
laquelle s'enfoncent les Etats-Unis38. Au-delà de la misère sociale (pourtant terrible quand un américain
sur deux se dit à seulement deux mois de salaire de la ruine) 39, de l'aggravation des violences urbaines40
et des tueries41, de l'aggravation de la récession économique déjà bien sensible dans les rues de
Manhattan42, nul doute qu'ils se focaliseront sur l'échec du plan de relance de l'administration Obama
prise en otage volontaire par les financiers de Wall Street 43 et sur des déficits publics devenus
incontrôlables du fait des effets croisés de la hausse des dépenses et de la baisse des recettes fiscales,
comme décrits ailleurs dans ce GEAB. Car c'est bien ce phénomène qui les affectera directement le plus
via la crise monétaire internationale induite par la cessation de paiement américaine et la crise du Dollar.

Evolution du cash-flow net des sociétés américaines - Source : US Department of Commerce / Federal
Reserve of Saint Louis, 03/2009

Nous nous concentrerons ici sur la forme que pourra prendre ce phénomène. Il nous apparaît en effet
inutile dans ce numéro de continuer à accumuler les sources et les références décrivant la spirale
infernale dans laquelle s'enfonce la société américaine : même les principaux médias s'en font maintenant
l'écho chaque jour, c'est dire.

38
Ils pourront même s'offrir une visite de « Wall Street ruinée » s'ils le souhaitent. Source : Slate/BigMoney, 06/04/2009
39
Source : MarketWatch, 20/03/2009
40
Entre les coupes sombres dans les budgets des forces de l'ordre et la soudaine clémence forcée du système judiciaire pour cause
du coût désormais trop élevé des emprisonnements, la sécurité dans les rues américaines n'est pas en voie d'amélioration. Source :
USAToday, 17/03/2009
41
Les maires américains s'inquiètent du nombre croissant de tueries qui affectent le pays dans l'indifférence du pouvoir fédéral.
Source : USAToday, 09/04/2009
42
Cette promenade de Tom Engelhardt dans son quartier du centre de Manhattan est particulièrement instructive. Source :
AsiaTimes, 26/03/2009
43
Deux journaux à l'opposé du spectre médiatique américain décrivent remarquablement cette situation : d'un côté, le respectable
mensuel The Atlantic dans son édition datée de Mai 2009 ; de l'autre, le magazine musical RollingStones dans un article du
19/03/2009. De son côté, BusinessInsider du 23/03/2009 détaille déjà comment les banques et les hedge funds vont piller le TALF
(le programme d'achat des actifs toxiques lancés par le Trésor US).
15
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Cette cessation de paiement pourra prendre plusieurs formes selon son degré d'anticipation par les
autorités américaines et les principaux créanciers des Etats-Unis. On peut en retenir quatre principales qui
peuvent se combiner entre elles. Les deux premières constituent des processus organisés tandis que les
deux autres sont des processus chaotiques.

1. Une intervention du FMI mettant sous tutelle le budget fédéral (comme le fait le FMI partout où il
intervient) et imposant de profondes coupes budgétaires (cela affectera notamment fortement les
dépenses militaires et les programmes sociaux) – Une option hautement improbable à ce stade
pour des raisons politiques, avec un risque quasi-assuré de coup d'Etat à la clé.

2. Le remplacement des émissions de Bons du Trésor US en Dollars par des émissions de Bons du
Trésor US libellés en Euro, Yen ou Yuan. Cela s'est déjà fait (en Deutsch Mark et Yen), à petite
échelle, à la fin des années 1970 lors d'une précédente crise du Dollar (sans comparaison avec la
gravité de la crise actuelle) - La plus douce des options mais probablement insuffisante à ce jour
car elle imposerait l'émission de quantités formidables de titres dans ces autres devises, posant
de problèmes graves aux pays concernés. Cependant, notamment pour la Chine et le Japon, c'est
une alternative possible à la perte pure et simple de 50% minimum de leurs actifs en Dollars.
Cette solution paraît néanmoins liée à une certaine mise sous tutelle, moins visible que celle du
FMI, des dépenses fédérales et très clairement à une mise sous tutelle de la Fed par ses
homologues européenne, chinoise et japonaise.

3. La dévaluation brutale du Dollar US de plus de 50% par rapport aux principales monnaies
mondiales, afin de permettre au gouvernement américain de financer le budget fédéral et ses
obligations financières internationales … en Dollars dévalués - Une option qui placerait Barak
Obama dans la droite ligne de Richard Nixon plutôt que de John Kennedy, mais très certainement
une option largement évoquée à Washington car la moins douloureuse à court terme pour la
politique intérieure américaine.

4. L'échec croissant de ventes de Bons du Trésor US aux investisseurs internationaux imposant à la


Fed d'accroître son programme d'achat des Bons du Trésor et entraînant automatiquement une
dévaluation du Dollar (comme on l'a vu il y a quelques semaines : 10% de baisse en une journée)
qui elle-même réduit l'appétit des investisseurs pour les actifs américains - L'option qui est déjà
en route en fait, la seule question étant de savoir si elle ira jusqu'à l'échéance décrite ici, ou bien
si l'une des trois autres options s'imposera avant.

Les deux premières options demandent une communauté internationale exigeante et ferme dans son
engagement. Le spectacle du G20 ne nous incite pas à l'optimisme en la matière. Les deux autres options
consistent in fine à laisser les évènements suivre la pente de moindre résistance. Cela finit toujours en
catastrophe, mais c'est plus facile pour tout le monde au début.

Il y a bien entendu une cinquième option dont LEAP/E2020 a largement diffusé les caractéristiques. Si
Barak Obama voulait vraiment atteindre la stature historique de son modèle Abraham Lincoln, il aurait pu
s'en inspirer directement. En soi, c'est très simple : il lui suffirait d'annoncer au monde que, les Etats-Unis
n'étant plus en mesure de soutenir à eux seuls le système monétaire et financier mondial, il décide de
lancer le projet d'une nouvelle devise internationale de référence en invitant les principaux pays de la
planète à s'engager dans l'aventure. En une phrase, il entre dans l'Histoire, maintient son pays au cœur
du prochain système international et évite à la planète une tragédie de plus d'une décennie44. Il serait
certes impopulaire aux Etats-Unis dans les années qui suivront45, mais il deviendrait un grand homme de
l'Histoire mondiale, à l'image de Mikhail Gorbatchev.

Actuellement, hélas, rien ne paraît plus improbable qu'un tel scénario, même si un faible espoir existe
encore d'ici la fin de l'été 2009.

44
Il est évident qu'une telle option doit être préparée dans le secret complet, avec uniquement une ou deux personnes de confiance
dans la confidence. Sinon, il n'arriverait jamais devant le micro pour la prononcer.
45
Car une majorité d'Américains lui reprocheront, à tort, d'être responsable de plusieurs années de baisse de niveau de vie ; alors
qu'il aura évité nettement pire.
16
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3- Focus
Cours de l'or : le paradoxe se dévoile

D'un bout à l'autre de la planète, on assiste depuis des mois à un phénomène paradoxal dont la presse
s'est largement faite l'écho : du fait de la crise, les opérateurs ont fui la plupart des catégories d'actifs
(immobilier, bourse, devises, matières premières, …) et un grand nombre d'entre eux ont investi une
partie de leur portefeuille en or, provoquant même des pénuries de pièces ou de lingots sur de nombreux
marchés. Pourtant, et c'est là le paradoxe, le prix de l'or ne décolle pas d'un cours-pivot autour de 900
USD/once.

Dans un premier temps, au cours du second semestre 2008, l'explication communément admise a été que
les exigences de couverture de pertes massives dans les autres classes d'actifs avaient imposé des ventes
importantes d'or à leurs détenteurs, compensant ainsi la demande croissante. Et cela a probablement été
le cas. Mais depuis le début 2009, le paradoxe se maintient sans que cette explication ne puisse
désormais suffire pour expliquer l'état du cours du métal jaune.

LEAP/E2020 a donc tenté de comprendre le « pourquoi » de cette situation et d'en tirer des conclusions
utiles pour les abonnés du GEAB. Rappelons que l'analyse du marché de l'or est particulièrement
complexe car s'y mêlent plusieurs phénomènes qui opacifient son fonctionnement réel :

1. c'est à la fois un marché hautement spéculatif où circulent des informations de toute nature
pour servir telle ou telle tendance du marché ; et un marché de matière première industrielle
(notamment pour l'orfèvrerie)

2. c'est un marché animé par des opérateurs particulièrement convaincus, de manière parfois
idéologique, du caractère « unique » de l'or comme seule base légitime d'une économie et d'une
monnaie saine

3. c'est un marché sous haute surveillance des banques centrales et des Etats qui le perçoivent,
en temps de crise, d'une part, comme un danger potentiel pour les monnaies fiduciaires ; et,
d'autre part, comme une valeur confiscable de la « dernière chance » quand la crise devient
incontrôlable46

4. enfin, c'est un marché qui traite d'un métal identifié à la richesse depuis des millénaires, connu
pour rendre les gens fous !

Donc, pour essayer de comprendre ce qu'il se passe actuellement sur ce marché, la prudence est de mise.
Néanmoins, au sein des zones d'ombres multiples du marché international de l'or, une zone plus sombre
que d'autres semble permettre d'apporter une explication à la situation actuelle du cours de l'or ; et, en
même temps, de pouvoir en tirer des recommandations utiles pour les abonnés du GEAB. C'est la
différence entre les deux types de marché existant pour le métal jaune :

1. le marché physique qui implique une transaction réelle de métal jaune : on y vend et on y achète de
vraies pièces et lingots qu'il faut ensuite stocker soi-même (dans un coffre de banque, dans son jardin ou
sous son matelas47)

2. le marché de l'or-papier : on y vend et achète des certificats qui garantissent la possession d'une
certaine quantité d'or (pièces ou lingots), que le vendeur s'engage à fournir physiquement si l'acheteur
l'exige.

46
Nombreux sont les pays qui ont vu des politiques d'interdiction de possession privée de l'or et/ou de vente forcée à l'Etat à des
cours dérisoires. Les Etats-Unis et l'Allemagne ont ainsi connu de telles situations au XX° siècle. Les Etats-Unis ont même maintenu
une interdiction de possession privée de l'or de 1934 à 1974. Et c'est pour cela que depuis deux ans LEAP/E2020 rappelle
régulièrement à ses abonnés qu'il faut se méfier du marché de l'or et surveiller attentivement les réactions des autorités publiques
en la matière, même si, actuellement, il est utile de diversifier jusqu'à 30% de ses avoirs dans les matières précieuses (or, argent,
platine, …).
47
La dernière option est plus sûre mais plus inconfortable.
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L'aspect pratique du marché de l'or-papier est évident : il évite les problèmes complexes de transport et
de stockage pour les acheteurs de quantités importantes d'or et facilite ainsi toutes les transactions
fluidifiant un marché mondial du métal jaune. Cependant il impose une confiance absolue dans deux types
d'opérateurs au cœur de ce marché :

. les vendeurs
. les régulateurs

Les premiers doivent en effet être au-dessus de tout soupçon et respecter les règlementations qui leur
imposent en général de posséder l'équivalent physique de 90% du montant des certificats qu'ils
négocient. Les seconds doivent être encore plus légitimes puisqu'ils doivent s'assurer que tous les
vendeurs d'or-papier respectent bien la réglementation.

Or, en la matière, le spectacle des établissements financiers mondiaux et des régulateurs des principales
places financières internationales durant les deux dernières années n'incite pas à un grand optimisme : les
premiers se sont comportés (et continuent à le faire) comme des escrocs de haut vol et les seconds
comme les complices des premiers, en particulier à Wall Street et à la City … qui sont, comme par hasard,
les centres internationaux du marché de l'or48.

Pour LEAP/E2020, dans le contexte actuel de lutte pour la survie des grands établissements financiers et
de crise du système monétaire international, il serait très naïf d'imaginer que les régulateurs du marché
de l'or jouent franc-jeu, dans la mesure où ce jeu se ferait, d'une part, au détriment du Dollar, de la Livre
britannique, et de la plupart des monnaies fiduciaires ; et, d'autre part, au détriment des bilans des
grands établissements financiers, déjà bien mal en point. Nous pensons donc que le marché de l'or-papier
ne fonctionne plus selon les normes édictées et que nombre d'opérateurs sur ce marché ne respectent
plus la contrainte de 90% d'or physique en garantie. Il est impossible de savoir précisément à quel niveau
de couverture ils opèrent mais il est probable qu'il est tombé très bas, en tout cas à un niveau qui
poserait un grave problème si demain plus de la moitié des acheteurs exigeait la conversion de leurs
certificats en or physique49.

Pour mémoire, les Etats-Unis n'ont rien fait d'autre qu'une telle manipulation quand, en 1971, le président
Nixon a brutalement annoncé que le Dollar n'était plus gagé sur l'or : le Dollar d'avant 1971 n'était qu'un
type de certificat sur l'or et les Etats-Unis un vendeur d'or-papier qui n'avait pas respecté les contraintes
de couverture de ses certificats et qui a dû reconnaître qu'il ne pouvait pas honorer ses contrats50.

48
Sources : TraderTech ; Quid
49
Avery Goodman a publié deux articles fort intéressants à ce sujet évoquant deux cas impliquant, d'une part, la possibilité que le
New York Stock Exchange soit déjà en rupture de stocks d'or pour certaines catégories de produits, et, d'autre part, que la Banque
Centrale Européenne soit intervenu discrètement pour éviter un problème de couverture de ce même marché new yorkais (en
l'occurrence le COMEX). Sources : SeekingAlpha, 27/03/2009 ; SeekingAlpha, 02/04/2009
50
Le Royaume-Uni avait fait la même chose en 1931 à cause de la crise économique.
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Evolution 2004-2009 des ventes d'or par les banques centrales de France (rouge), de Suisse (bleu), des
Pays-Bas (vert) et du reste du monde (orange) - Source : World Gold Council / VM Group , 02/2009

Bien entendu, le marché de l'or est également affecté par l'offre de métal précieux. Ces sources sont
essentiellement l'extraction (qui est fondamentalement stable) ou la vente de parts des réserves des Etats
ou d'institutions internationales comme le FMI51. Par des ventes massives (publiques ou discrètes) les
Etats peuvent aisément modifier l'évolution du cours de l'or52. Actuellement, le niveau des ventes
officielles n'a pas particulièrement varié. Et, pour nombre d'Etats européens, qui, du fait de l'Euro, ne
peuvent plus compter sur ces revenus directs des ventes d'or puisqu'ils n'en reçoivent plus que les
intérêts (le capital est aux mains des banques centrales), l'intérêt des ventes est dorénavant marginal. La
tempête monétaire qui s'annonce pour la fin de l'été 2009 risque d'inciter les gouvernements à échanger
leurs réserves en devises, tout particulièrement en Dollars US, contre des réserves en or. Pour ce qui est
des Etats-Unis, ces réserves en or, même valorisées au prix actuel du marché (à environ 300 milliards
USD53), ne constituent qu'une faible fraction des sommes exorbitantes engagées par l'état fédéral dans le
cadre de la crise actuelle (et il existe une grande incertitude sur la quantité exacte des réserves
américaines actuelles54). Cependant l'analyse de LEAP/E2020 et sa recommandation ne portent
absolument pas sur une évolution du cours de l'or, mais sur la sécurité de l'investissement réalisé : que
l'acheteur d'or ait bien finalement de l'or entre les mains au lieu d'un bout de papier sans valeur.

En conclusion, notre équipe recommande à ses abonnés qui ne souhaitent pas spéculer (et donc prendre
le risque de perdre tout leur investissement55) de ne plus investir du tout dans l'or-papier et de se limiter
à des transactions physiques56. C'est bien sûr une contrainte opérationnelle forte, mais à l'approche de la
rupture du système monétaire international à l'été 2009, nous estimons qu'il existe un risque désormais
majeur que les possesseurs d'or-papier se retrouvent totalement spoliés quand les vendeurs devront
reconnaître qu'ils ne peuvent pas honorer leurs contrats face à une trop forte demande.

51
Ce dernier a annoncé mettre en vente 400 tonnes d'or l'année dernière dans le cadre de sa réorganisation. Et les récentes
déclarations du sommet du G20 à Londres sur les ventes d'or du FMI ne sont pas claires du tout. S'agit-il des 400 tonnes prévues ou
de quantités supplémentaires ? Mystère et, de toute façon, c'est l'assemblée générale du FMI qui devra décider. Source : Reuters,
02/04/2009
52
Pour un état des réserves d'or dans le monde : Wikipedia.
53
Source : Watoday, 09/03/2009
54
Depuis quelques années, de fréquents changements de nomenclature dans la classification des différentes composantes des
réserves d'or des Etats-Unis ont généré toute une série de questions sur la quantité exacte des réserves en or du pays. Leur
utilisation par l'ESF (Exchange Stabilization Fund), dont LEAP/E2020 a déjà décrit les interventions sur le marché des changes à l'été
2008, est suspectée d'avoir en fait fortement réduit les avoirs en or du pays contrairement aux statistiques officielles. Source :
MarketOracle, 31/01/2007
55
Nous rappelons à ce sujet que nos analyses et recommandations ne sont jamais destinées à des logiques de spéculation. Et que
ceux qui les utilisent à ces fins prennent le risque que doit assumer tout spéculateur : perdre l'intégralité de son pari.
56
Et donc de transformer leurs certificats actuels, s'ils en ont, en or physique.
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Trois recommandations stratégiques et
opérationnelles

1. Retraite / Epargne / Assurances-Vie : Ce que la crise longue implique


L'échec du G20 de Londres à orienter la planète vers une crise gérée d'une durée de 3 à 5 ans condamne
la planète à être entraînée dans une crise tragique de plus d'une décennie. Une telle évolution a des
conséquences directes très importantes pour les retraites, l'épargne et les assurances-vie. Le paradoxe,
c'est que comme ce sera une crise longue. Il faut donc sortir des placements d'épargne à long terme car
ils n'ont pas du tout été conçus pour un tel environnement. Ils vont devenir des pièges fiscaux à
rentabilité négative.

D'une part, dans les pays à retraite par capitalisation, il est maintenant certain que la durée de la crise
empêchera tout retour des placements boursiers à un niveau permettant de percevoir une retraite
décente. Il est donc urgent, pour ceux qui se trouvent dans ce cas, de vendre, s'ils le peuvent encore,
leurs instruments de retraites placés en bourse afin de les rendre liquide et d'envisager des placements
moins risqués qui permettront au moins de ne plus perdre d'argent.

D'autre part, comme nous l'anticipions dans des GEAB précédents, dans l'ensemble des pays de la
planète, les épargnants vont être « pressurés » pour financer les déficits publics croissants et également
pour tenter d'alimenter le financement du secteur privé. Les produits classiques d'épargne sont donc
condamnés à voir leur rendement tendre vers 0% (après inflation). Non seulement ce type de placement
n'a donc plus aucun intérêt par rapport à un compte-courant ou à un « bas de laine » mais, en plus, il
risque de devenir un piège dans de nombreux pays (notamment Etats-Unis, Royaume-Uni, Asie, …) quand
l'inflation va reprendre fortement du fait du double impact des plans massifs de stimulation et de la crise
monétaire à venir. Il faut être près à bouger vite dans un environnement en changement rapide et
chaotique.

Les assurances-vie, qui sont un placement d'épargne très important et souvent privilégié dans une
optique de retraite, seront incapables de maintenir leur rentabilité au-dessus de 3%, devenant donc un
placement-piège du fait des contraintes de durée et de fiscalisation. Car, à l'instar de tous les placements
d'épargne, les Etats vont partout accroître la pression fiscale pour tenter de renflouer leurs caisses. Ce
phénomène sera surtout sensible en Europe continentale et en Chine (zones de forte épargne individuelle)
; un peu moins en Australie et Nouvelle-Zélande et dans le reste de l'Asie. Aux Etats-Unis et au Royaume-
Uni, il restera faible puisqu'il n'y a plus grand-chose à prendre par l'Etat faute d'épargne individuelle au
cours des dernières années.

Donc pour les mois à venir, sortez des produits d'épargne qui ne vous rapportent plus grand-chose car
bientôt ils ne vous rapporteront plus rien du tout, voire pire. Restez liquide. Après l'été et la crise du
système monétaire international de nouvelles tendances émergeront qui permettront certainement de
pouvoir faire de nouveaux choix.

La situation actuelle est indéniablement inconfortable ; mais personne n'a jamais dit que traverser une
crise systémique globale en y perdant le moins possible était une sinécure.

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Evolution du taux d'épargne des ménages aux Etats-Unis, au Canada, au Japon, en Allemagne et en
France (2001-2006) - Source : OCDE, 2007

2. La bourse ou la vie ?
Nous avions indiqué à l'automne 2008 qu'il fallait rester hors des marchés boursiers et que, au printemps
2009, on ferait le point. Les bourses mondiales ont ainsi continué à chuter depuis l'automne 2008 de 10%
à 20% en moyenne si on considère le rebond du mois de Mars 2009, rebond orchestré en prévision du
G20 et qui déjà se délite sous nos yeux. L'accélération de l'effondrement de l'économie réelle aux Etats-
Unis, comme les récessions en cours en Europe et en Asie, impliquent que les mois à venir seront encore
plus mauvais que les précédents. Et ce ne sont pas les « lueurs d'espoir » qu'aperçoit Barak Obama - telle
sœur Anne perchée sur sa tour - qui y changeront quoi que ce soit. Malgré leurs mises sous perfusion
d'argent public, les banques notamment américaines restent insolvables ; et leurs récentes manipulations
et autres effets d'annonce sans lendemain57 qui expliquent l'essentiel du rebond boursier du mois de Mars
2009, ne changent rien à l'évolution négative de moyen terme. Donc, selon notre équipe, gardez la vie et
continuez à laisser tomber la bourse ! Un seul secteur risque de connaître une réelle croissance dans les
mois à venir : celui de la sécurité du fait du développement progressif du phénomène de dislocation
géopolitique mondial. C'est triste, mais bien réel.

3. Risques de change : faire face à une situation sans précédent


Les trésoriers et directeurs financiers d'entreprises doivent se préparer à une période de rare intensité en
matière de risque de change. Le second semestre 2009, avec la rupture du système monétaire
international, et l'entrée dans l'ère post-Dollar, va certainement être une période de volatilité des devises
sans précédent depuis des décennies. Fournisseurs et clients, aux deux bouts de la chaîne, vont connaître
des variations imprévisibles. Trois paramètres vont donc devenir fluctuants : la parité de la devise de
facturation, celle de la devise de l'importateur et celle de la devise du client. Dans chaque entreprise
concernée, il faut effectuer au plus vite des simulations impliquant des variations atypiques allant par
exemple jusqu'à 1 Euro = 2 Dollars, 1 Dollar = 5 Yuan, … et en tirer dès aujourd'hui des conclusions en
terme de commandes, de fournisseurs et de marché. L'instabilité chronique qui règnera faute d'un
nouveau système stable (du fait de l'incapacité du G20 à discuter de ce problème) impose également de
ne pas prendre de décisions qui engagent au-delà de six mois.

57
Ainsi, Goldman Sachs, qu'on retrouve ces derniers temps à nouveau au cœur des évolutions boursières en cours sur la place new-
yorkaise, a multiplié les effets d'annonce destinés à « vendre » l'idée d'une sortie de crise du secteur financier américain. Pourtant
Goldman Sachs oublie de préciser que, d'une part, ses meilleurs revenus que prévus sont dus à des profits non récurrents
(notamment, les sommes énormes récupérées sur AIG via l'infusion d'argent public) ; et qu'en plus, contrairement aux années
précédentes, la banque ne publiera ses comptes qu'à la fin de l'année et non pas à la fin de chaque trimestre … ce qui permet de
raconter dorénavant n'importe quoi en fin de trimestre. Source : ZeroHedge, 14/04/2009
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4- Le GlobalEurometre 58

GlobalEurometre d’Avril 2009 - RESULTATS

GlobalEurometre 04-2009 Oui Non Ne sait


pas
1. Pensez-vous que l’UE sera capable d’élaborer et d’adopter une
réforme de ses institutions avant les prochaines élections 1% 99% 0%
européennes (en juin 2009) ?
2. Pensez-vous qu’un secrétariat politique et économique permanent
93% 6% 1%
de la zone Euro devrait être instauré ?
3. Pensez-vous que des Sommets de l’Euro devraient être instaurés
88% 5% 7%
chaque trimestre, préalablement à chaque Sommet européen ?
4. Trouvez-vous que le gouvernement de votre pays reflète les
6% 81% 13%
attentes de votre peuple en matière de construction européenne ?
5. Le gouvernement de votre pays reflète-t-il vos propres attentes en
7% 87% 6%
matière de construction européenne ?
6. Pensez-vous que les pays de la zone Euro doivent bâtir leur propre
réponse à la crise globale, indépendamment des autres états 65% 31% 4%
membres de l'Union européenne ?
7. Trouvez-vous que le gouvernement de votre pays répond de
24% 75% 1%
manière adéquate à la crise ?
8. Pensez-vous que la Banque Centrale européenne doit continuer à
4% 78% 18%
diminuer son taux d’intérêt principal ?
9. Craignez-vous de perdre votre emploi dans les prochains mois à
13% 74% 3%
cause de la crise globale ?
10. Craignez-vous de perdre de l’argent dans les prochains mois à
64% 35% 1%
cause de la crise globale ?
11. Pensez-vous que le dollar va continuer à baisser par rapport à
84% 5% 11%
toutes les grandes devises ?
12. Pensez-vous que la crise globale sera terminée en 2012 ? 12% 75% 13%
13. Pensez-vous que les conclusions du G20 vont aider à résoudre la
0% 93% 7%
crise de manière significative ?
14. Croyez-vous que les mesures annoncées à l’issue du sommet du
12% 83% 5%
G20 à Londres seront mises en œuvre ?
15. Pensez-vous que la Chine va tenter de se débarrasser de ses
88% 0% 12%
réserves en Dollars ?

58
Chaque mois, l’équipe de GEAB consulte pour vous 200 leaders d’opinion européens
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GlobalEuromètre d’Avril 2009 - ANALYSE

Gouvernance UE : Crédibilité dorénavant inexistante de la relance institutionnelle de l'UE


avant les élections européennes de Juin 2009 / Stabilité des très fortes majorités en faveur
de la création d'un secrétariat permanent de la zone Euro et de la tenue d'un Sommet de
l'Euroland avant chaque sommet de l'UE / Le décalage entre attentes des peuples et
actions des leaders reste élevé mais se réduit un peu /Stabilisation de la majorité pour une
réponse spécifique de l'Eurozone à la crise globale / Forte hausse des opinions positives sur
l'efficacité de l'action de son gouvernement contre la crise / Maintien d'une forte majorité
pour estimer que la BCE doit arrêter de baisser son taux d'intérêt / Stabilité de la crainte de
perte d'emploi du fait de la crise / Renforcement de la majorité inquiète de perdre de
l'argent à cause de la crise systémique globale
La perte de crédibilité de la relance institutionnelle de l'UE de l'été 2008 est dorénavant totale puisque l'opinion
négative des sondés atteint désormais 99% en ce qui concerne la relance des institutions européennes d'ici Juin
2009 (contre 98% le mois précédent). Les élections européennes de Juin 2009 vont sans aucun doute refléter cette
opinion générale d'un échec flagrant des dirigeants et partis dominants l'échiquier politique européen.
Les sondés en faveur de la création d'un secrétariat permanent de l'Eurozone se stabilisent à un niveau très élevé
(93% ce mois-ci contre 90% le mois dernier). Pour ce qui est de la tenue de sommets de l'Euroland, tous les
trimestres, juste avant les sommets de l'UE, on assiste à un léger flchissement tout en restant à des niveaux très
élevés d'opinions favorables : 88% contre 94% en Mars.
On constate une stabilisation de la majorité de sondés qui estime que la zone Euro doit mettre en oeuvre sa propre
réponse à la crise globale, indépendamment du reste de l'UE. Ils sont désormais 65% à penser ainsi contre 63% en
Mars.
Le mécontentement des citoyens par rapport aux élites communautaires reste de son côté à des niveaux
stratosphériques mais enregistre une petite baisse d'environ 10% par rapport au mois dernier en ce qui concerne
l'action des gouvernements par rapport aux attentes de leurs peuples. L'évolution la plus notable concerne l'action
de leurs gouvernements nationaux contre la crise où, bien que toujours très largement négative, on enregistre
néanmoins une hausse de 22% des opinions positives (soit près d'un quart des sondés). Est-ce un effet induit par
la communication autour du « G20 », ou bien un phénomène durable? Le mois prochain devrait trancher en la
matière.
Une majorité toujours très forte (78%) estime que la BCE doit arrêter sa politique de baisse des taux d'intérêts.
Cela exprime une opposition complète au discours dominant des banquiers, des politiques et des médias financiers,
et aux décisions de la BCE; pour l'instant sans effet sur les décisions de la BCE semble-t-il.
La crainte de perdre son emploi à cause de la crise globale reste stable à un très faible niveau (13% contre 15% le
mois dernier). La peur de perdre de l'argent à cause de la crise repart en revanche à la hausse, en restant
largement majoritaire (64% contre 53% le mois précédent).
Relations UE/Reste du monde : Renforcement de la très forte majorité s'attendant à un
effondrement du Dollar US dans les prochains mois / Accroissement de la majorité pensant
que la crise globale ne sera pas terminée d'ici 2012 / Quasi-unanimité pour estimer que les
résultats du sommet du G20 à Londres ne contribueront pas de manière décisivise à
résoudre la crise / Très forte majorité pour considérer que les décisions du sommet du G20
à Londres G20 ne seront pas mises en oeuvre / Très forte majorité pour estimer que la
Chine va essayer de se débarrasser de ses avoirs libellés en Dollars US
Avec désormais 84% des sondés s'attendant à un effondrement du Dollar US dans les mois à venir (contre 78% le
mois dernier), on constate un renforcement significatif des doutes des Européens sur la valeur de la devise US. Et,
phénomène certainement connexe, on enregistre une forte hausse de la majorité des sondés qui estiment que la
crise ne sera pas terminée d'ici 2012 : 75% contre 54% le mois dernier.
Le sommet du G20 de Londres n'a pas l'air d'avoir convaincu les Européens malgré l'étourdissante couverture
médiatique auquel il a donné lieu. Ainsi, aucun des sondés (0% est un chiffre sans appel pour un tel sommet) ne
considère que les résultats du sommet du G20 contribueront de manière significative à résoudre la crise (et 93%
pensent clairement le contraire). En clair, cela veut dire que les Européens pensent que ce sommet n'a pas abordé
les questions essentielles.
Ces chiffres sont déjà affligeants pour les dirigeants du G20, mais le pire est encore à venir puisqu'ils sont 83% à
penser que les mesures décidées lors de ce sommet du G20 à Londres ne seront tout simplement pas appliquées.
No comment comme on dit à Londres!
D'ailleurs, leur opinion générale sur ce sommet est parfaitement résumée dans le fait qu'ils sont 88% à penser que
la Chine va chercher à se débarrasser de ses actifs libellés en Dollars US. Vu d'Europe, le « chacun pour soi »
semble ainsi avoir commencé à Londres lors du sommet du G20.

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