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B 258
Dystrophie musculaire
de Duchenne
Syndrome de l’X fragile
Épidémiologie, génétique, diagnostic
Dr Stéphane PINSON, Pr Henri PLAUCHU
Service de génétique, Hospices civils de Lyon, 1, place de l’Hôpital, 69288 Lyon cedex 02.
UFR, Rth Laennec, Université Claude-Bernard, Lyon I.
3. Macro-orchidie post-pubertaire nière éventualité n’est pas obligatoire mais semble surve-
Elle s’observe dans 80 % des cas. Elle est généralement nir avec une probabilité dépendant de la taille de la pré-
importante, supérieure à 30 mL et isolée, sans anomalie mutation. Plus la taille de la prémutation portée par la mère
endocrine. Des signes de dysplasie du tissu conjonctif peu- est importante, plus le risque d’avoir un enfant avec une
vent s’associer (hernies). mutation complète est grand (une prémutation de grande
taille, 90 CGG et plus par exemple, entraîne un risque de
• Femmes conductrices transformation en mutation complète supérieur à 50 % pour
Elles ont un morphotype normal mais 40 à 60 % d’entre chaque grossesse avec l’X pathologique).
elles ont un retard mental, léger, dominé par un retard 3. Retard mental léger avec site fragile FRAX-E
du langage. Un second site fragile, beaucoup plus rare, FRAX-E a été
récemment décrit chez des familles avec un retard mental
Génétique de l’X fragile léger. Il est localisé au même endroit (Xq27.3) et présente
le même biais maternel de transmission de l’expansion. Il
La fragilité caractéristique de l’X fut individualisée grâce
est caractérisé par l’existence d’une expansion identique
à l’analyse du caryotype en milieu révélateur pauvre en
au niveau d’un gène voisin récemment identifié : FMR2.
acide folique. Le site fragile « FRAX-A » est localisé en
Le retard mental est modéré et les filles en général, ne sont
Xq27.3.
pas atteintes.
1. Défaut moléculaire
Il correspond à l’amplification anormale d’une séquence Diagnostic de l’X fragile
instable de trinucléotides CGG localisés dans le premier La découverte de la mutation responsable du syndrome X
exon (non traduit) du gène FMR 1 entraînant l’inactivation fragile a modifié le conseil génétique permettant le dia-
de ce gène. Ce gène code une protéine cytoplasmique asso- gnostic de la maladie, la détection des personnes à risque
ciée aux ribosomes pouvant lier des ARN. Elle pourrait de la transmettre et le diagnostic prénatal en l’absence de
jouer un rôle dans la régulation de la traduction de certains traitement. On utilise, actuellement, l’analyse de l’ADN
ARN messagers. Ce nouveau type de mutation instable per- afin de faire le diagnostic (prélèvement de sang périphé-
met d’expliquer le mode inhabituel de transmission, avec rique, de villosités choriales ou de cellules amniotiques).
augmentation du risque de développer la maladie au cours Deux stratégies complémentaires peuvent être utilisées :
des générations successives dans une même famille (phé- l’analyse directe de la mutation et l’analyse indirecte par
nomène d’anticipation). La taille de l’amplification étude de la transmission de marqueurs polymorphiques liés
influence l’expression phénotypique. L’amplification évo- au locus X fragile. L’analyse indirecte est nécessaire pour
lue différemment selon le sexe du parent transmetteur. Chez l’interprétation fine du résultat d’analyse directe, particu-
le sujet normal, la répétition est polymorphique (n = 6 à 50 lièrement en cas de contamination maternelle d’un prélè-
CGG). Les mutations complètes correspondent à des vement de fœtus féminin (voir : pour approfondir / 1).
expansions importantes allant de 230 à plus de 1 000 CGG 1. Analyse directe
et sont associées à une méthylation anormale de la répéti- • La technique de Southern-Blot permet la mise en évi-
tion CGG et des séquences d’ADN environnantes. Ces phé- dence des mutations et prémutations par analyse de la
nomènes entraînent un retard mental chez 100 % des migration de l’ADN après l’action d’enzymes de restric-
hommes, et 40 à 60 % des femmes hétérozygotes. Les pré- tion. Elle permet de connaître la taille de l’expansion et son
mutations sont des expansions intermédiaires (60 à envi- état de méthylation, mais cette méthylation est absente au
ron 200 CGG) non méthylées. Elles n’entraînent pas la terme gestationnel habituel d’un prélèvement sur villosi-
maladie mais semblent la « préparer ». Elles sont retrou- tés choriales. Les allèles normaux et les petites prémuta-
vées chez les hommes « sains » transmetteurs et chez la tions peuvent être analysés par amplification génique
majorité des femmes vectrices sans retard mental. On (PCR) de la zone où se trouve la mutation. Cela permet
remarquera la difficulté d’interprétation des zones inter- d’exclure la présence d’une mutation complète par la détec-
médiaires pour lesquelles les connaissances restent incer- tion de l’allèle maternel normal chez un fœtus masculin,
taines (de 50 à 60 CGG et de 200 à 230). ou de voir une hétérozygotie chez un fœtus féminin (la
2. Transmission connaissance des allèles des parents est indispensable).
L’expression de l’anomalie dépend de l’origine parentale 2. Analyse indirecte
de la transmission. Elle repose sur la notion de coségrégation entre le gène
• Quand le père transmet la séquence, elle est peu modi- muté et des marqueurs génétiques polymorphiques (micro-
fiée. Un homme normal transmetteur, donc porteur d’une satellites) situés au voisinage du locus morbide de l’X fra-
prémutation, la transmet, inchangée, à toutes ses filles nais- gile (entourant les répétitions CGG). Il s’agit d’une
sant vectrices. Le risque d’avoir des enfants atteints n’ap- méthode fiable si la famille est informative, nécessitant peu
paraîtra qu’à la génération suivante. d’ADN, et donnant des résultats rapides. Elle permet de
• Quand la mère transmet la séquence, on assiste généra- pister le chromosome X muté maternel et de rassurer rapi-
lement à une augmentation du nombre de répétitions, soit dement quand le fœtus a hérité de l’haplotype maternel
par augmentation de la taille de la prémutation, soit en pas- sain. De rares crossing-over sont possibles expliquant un
sant d’une prémutation à une mutation complète. Cette der- faux résultat qui doit être vérifié par analyse directe. ■
Points Forts à retenir • Cette situation très conflictuelle de la médecine et l’évolution socio-
médicale depuis la loi sur l’interruption volontaire de grossesse de 1975,
ont conduit à une « anti-médecine », le diagnostic prénatal, quand il
conduit à une interruption de grossesse. Celle-ci est alors faite dans le but
La possiblité d’un diagnostic fiable pour l’X de soulager les parents d’une grande souffrance, mais au détriment d’une
fragile est à mettre au service des familles pour vie, c’est une décision éthiquement difficile qui doit être prise directe-
éviter une récurrence en attendant une thérapie ment avec chaque couple.
efficace. Cela oblige à penser à ce diagnostic • Ce diagnostic ne peut pas être une fin en soi mais n’est qu’une étape
temporaire en attendant le succès de la thérapie génique. Comme tout
devant un retard mental, en particulier chez le défaut génétique « constitutionnel » dû à l’anomalie d’une protéine struc-
garçon, et a fortiori devant une forme familiale. turelle, l’espoir thérapeutique repose sur l’utilisation du gène normal,
comme « médicament ». Chaque traitement génétique nécessite l’élabo-
ration d’un vecteur adapté au gène transféré et à son fonctionnement ulté-
rieur. L’immense taille du gène DYS constitue un obstacle majeur à son
intégration dans un vecteur et à son transport vers les cellules atteintes.
POUR APPROFONDIR
POUR EN SAVOIR PLUS
1 / Conseil génétique Cossée M, Moutou C, Biancalana V et al. Le syndrome X
fragile est encore méconnu : efficacité du diagnostic
• La loi de bioéthique du 29 juillet 1994 rend obligatoire la consultation moléculaire chez les proposants avec retard mental. Arch
du conseil génétique avant tout acte de diagnostic prénatal. Pediatr 1997 ; 4 : 227-36.
• Elle exige qu’une information adaptée à chaque cas et comprenant une Forestier F, Schorderet DF. Diagnostics prénatals et bio-
logie moléculaire. Éditions Médicales Internationales,
explication des risques et des limites de chaque examen proposé soit déli- 1997.
vrée au préalable. Mandel JL, Biancalana V. Diagnostic anténatal du syn-
• Et elle oblige, de la part du médecin, de recueillir un consentement écrit drome X fragile. Chapitre 5.
du patient pour lequel est entreprise une étude génétique spécifique. Romana SP, Gérard B. Indications de l’analyse des chro-
mosomes et de l’ADN pour le diagnostic des maladies
• Comme c’est souvent le cas pour les maladies génétiques, les progrès génétiques. Nouvelle question de l’internat, numéro 261.
réalisés dans la connaissance du gène apportent actuellement des possi- Rev Prat (Paris) 1997 ; 47 : 1241-52.
bilités diagnostiques avant de déboucher sur une solution thérapeutique.