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Nicolas Barakat

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François Coulombe
06 246 219
Pascal Déry
07 203 433

Interprétation de source historique


Cartouche dont le titre est « Québec comme il se voit du côté de l’est »
de Jean-Baptiste-Louis Franquelin, 1688

Travail présenté à
Monsieur Serge LAMBERT

Dans le cadre du cours


HST-19898
Méthodologie du travail en histoire
(Section A)

Département d’histoire
Université Laval
Automne 2007
INTERPRÉTATION DE SOURCE HISTORIQUE
CARTOUCHE INTITULÉ « QUÉBEC COMME IL SE VOIT DU CÔTÉ DE L’EST »
DE JEAN-BAPTISTE-LOUIS FRANQUELIN, 1688

ANALYSE
Ce cartouche nous plonge à Québec, en Nouvelle-France au XVIIe siècle,
plus précisément en 1688. Québec est une ville royale et son importance au
sein de la colonie s’accentue à partir de 1663, année où la Nouvelle-France
est reprise en main par la monarchie1. « Le roi nomme le gouverneur, crée un
office d’intendant et il établit une cour de justice souveraine à Québec 2 ». À
cette époque, en 1688, à Québec, Jacques-René de Brisay de Denonville est
le gouverneur (1685-1689) et l’intendant est Jean Bochart de Champigny
(1686-1702)3. Le fonctionnement de la ville est presque totalement entre les
mains de différents fonctionnaires royaux. Québec est aussi, à cette époque,
une capitale catholique d’une colonie catholique et une ville refuge où
plusieurs pauvres y vivent4. La ville fondée par Samuel de Champlain est une
ville militaire où il y a un fort (fort Saint-Louis), sa garnison, son gouverneur
particulier et ses gardes bourgeoises5. C’est aussi une ville où la vie
marchande est présente grâce à « ses places publiques, ses marchés et ses
habitants jouissant de privilèges déniés aux forains 6 ». Par ailleurs, son
réseau de rues nous fait penser aux villes du Moyen-Âge et les espaces vides
servent à l’agriculture7. Sur le cartouche, on peut voir que la ville est divisée
en deux parties distinctes, la Haute-ville et la Basse-ville. En Haute-ville, on
retrouve surtout les institutions religieuses de la ville8 comme le couvent des
Ursulines, le Séminaire et l’Église des Jésuites9. En Basse-ville, « les
commerçants et artisans s’entassent sur l’étroite bande de terre au pied du

1
Rémi Chénier, Québec : ville coloniale française en Amérique : 1660 à 1690, Ottawa, Ministre des
Approvisionnements et Services Canada, 1991, p. 21.
2
Idem.
3
Ibid. p. 260-261.
4
Ibid. p. 26.
5
Idem.
6
Idem.
7
Idem.
8
Michel Gaumond, « Une ville au bon endroit? », La revue d’histoire du Québec : Cap-aux-diamants, hors série
(2004), p. 18.
9
Rémi Chénier, op. cit., p. 26.
cap 10
». À cette époque, il n’y avait pas de murailles d’ériger pour protéger la
ville. Ainsi, Québec portait le titre d’une ville, mais le concept d’une ville
française se définissait par une ville qui était entourée d’une muraille…
L’auteur de ce cartouche se nomme Jean-Baptiste-Louis Franquelin,
« un cartographe et un hydrographe du roi à Québec 11 ». Il est venu au
Canada en 1671 et il est mort en France en 1712. En 1674, il abandonne le
commerce et s’adonne à la cartographie. Entre 1674 et 1693, ses cartes
étaient envoyées, avec les lettres des intendants et des gouverneurs, en
France pour montrer le développement de la ville de Québec. Franquelin était
le seul homme de la ville de Québec possédant le talent professionnel pour
dessiner une carte avec de la couleur. En fait, ses cartes étaient les plus
belles du Canada du XVIIe siècle sur le plan artistique.
Le but et le destinataire de ce cartouche étaient de montrer au roi de
France, Louis XIV, le développement de la ville de Québec et les endroits les
plus importants de celle-ci. Enfin, le document à l’étude est un cartouche qui,
dans un dessin ou une carte, constitue l’emplacement réservé au titre, à la
légende.

ANALYSE CRITIQUE DU CONTENU

BASSE-VILLE
En observant attentivement le cartouche de Franquelin, il est possible
de distinguer un thème principal qui est la Basse-Ville de Québec. En effet,
on peut voir de multiples maisons et il est clair qu’il y avait un phénomène
d’entassement à cette époque. Dans l’ouvrage de Pierre-Georges Roy, un
extrait d’un exposé de l’intendant de Meulles exprime très bien ce
phénomène : « […] parce que cette basse ville de Québec est extrêmement
serrée de la côte et par conséquent qui ne peut jamais s’accroître […]12 ».
Toutefois, l’année où le cartouche a été dessiné, soit en 1688, « le
10
Michel Gaumond, loc. cit., p. 18.
11
Dictionnaire biographique du Canada en ligne, (page consultée le 3 décembre 2007), [En ligne], adresse URL:
http://www.biographi.ca/FR/ShowBio.asp?BioId=34910&query=Jean-Baptiste-Louis%20AND%20Franquelin.
12
Pierre-Georges Roy, La ville de Québec sous le régime français, Imprimeur de Sa Majesté le Roi, Québec, 1930,
p. 441.
gouverneur et l’intendant parlent d’un autre projet […] qui consisterait à
fermer et à étendre la Basse-ville à l’aide de plates-formes13 ». Les dirigeants
de la ville de Québec avaient réalisé ce problème urbain et il fallait y
remédier au plus vite.
De plus, dans la légende des places les plus remarquables de la ville,
Franquelin a écrit la lettre a qui correspond à la rade. Celle-ci constitue un
« vaste bassin protégé, ayant issue libre vers la mer [ou le fleuve] et où les
navires peuvent trouver un bon mouillage14 ». C’est à cet endroit que tous les
navigateurs et colons en bateau, provenant de l’Europe, apercevaient les
terres de la belle ville de Québec. Il est à noter que Franquelin a écrit « La
Rad » en vieux français de l’époque et qu’aujourd’hui, on y ajoute un e.
En b, Franquelin note un cul-de-sac qui se trouve à l’ouest de la
majorité des habitations. Ce lieu était un port où les barques venaient se
radouber et il était fréquenté par la population durant l’été15. Durant la saison
d’hiver, il s’agissait d’un refuge contre les glaces pour toutes sortes de
navires16.
Ensuite, en c, le cartographe note la place forte. Il s’agit d’un
ensemble cohérent de fortifications visant à protéger non seulement le
terrain enclos, mais aussi le terroir environnant et un territoire situé en
arrière de la place.
En d, Franquelin a illustré la Place Royale. « Elle portait indifféremment
le nom de Place, de Grande Place et de Marché ou Place du Marché17 ». C’est
à cet endroit qu’on exécutait les criminels. En 1682, un incendie détruit la
Basse-Ville. Suite à cet incident, la reconstruction des maisons se fit en
pierres. La place des marchés a reçu le statut de Place Royale en 1688, avec
l’érection d’un busque en bronze du monarque français de l’époque, Louis

13
Rémi Chénier, op. cit., p. 57.
14
Définition venant d’Antidote.
15
Louis Beaudet, Québec : Ses monuments anciens et modernes, La Société historique de Québec, Québec, 1973, p.
12.
16
Ibid. p. 13.
17
Louis Beaudet, op. cit., p. 16.
XIV18. Toutefois, il faut dire que le périodique n’est pas très véridique, car
selon l’ouvrage de Pierre-Georges Roy, le buste aurait été installé le 6
novembre 1686 à l’intention de Jean Bochart de Champigny, intendant de
Québec à cette époque19. Effectivement, on voit très bien l’emplacement du
buste sur la carte, soit en e.
Par ailleurs, Franquelin indique en f, la côte de Lamontagne qui doit son
nom, paraît-il, à un homme nommé Lamontagne qui n’habitait pas très loin
de celle-ci20. Dans les débuts de la colonie, on se servait beaucoup de cette
rue afin de monter les matériaux qui servaient à la construction du fort Saint-
Louis21. À la suite de l’incendie de 1682, les colons ont élargi la rue qui monte
vers la Haute-Ville22.
Pour conclure avec la Basse-Ville de Québec que Franquelin nous
illustre dans sa carte, en h, le cartographe nous indique l’emplacement du
premier cimetière de Québec. Cet endroit a servi de champ pour le dernier
repos des premiers occupants de la colonie. En effet, entre 1608 et 1609,
après la fondation de la ville de Québec, « la plupart des hivernants, 20 sur
28, moururent du scorbut » et tous ces gens furent enterrés dans ce
cimetière23. Selon l’ouvrage de l’abbé Louis Baudet, jusqu’en 1688, le
premier cimetière de la ville de Québec a été le cimetière commun de la ville
et, par la suite, « le terrain passa à Mgr. De St-Vallier qui l’unit à celui de
l’évêché. 24
»

HAUTE-VILLE
En observant attentivement le cartouche de Franquelin, on constate que les
bâtiments de la haute-ville sont beaucoup plus imposants que ceux de la
basse-ville. Il s’agit généralement d’édifices religieux bien qu’on y retrouve
un établissement militaire et politique, le fort St-Louis.
18
« Place Royale », Vieux-Québec Basse-Ville, (Été 1994), p. 19.
19
Pierre-Georges Roy, Le Vieux Québec, Première Série, Québec, 1923, p. 72
20
Louis Beaudet, op. cit., p. 18.
21
Idem.
22
Idem.
23
Ibid. p. 19.
24
Idem.
Le petit édifice voisin, en g, du cimetière est en fait le premier évêché
de la ville de Québec. C’est en cet endroit que Monseigneur de Laval établit
sa demeure après être revenu de France en 166325. Il habita avec ses prêtres
dans cette maison faite en pierres qu’il appela son Séminaire.
Franquelin identifie en i le fort Saint-Louis. En 1620, le fort de Québec a
été construit pour la première fois puis une seconde fois six ans plus tard,
soit en 162626. De nouveaux travaux sont entrepris en 1636 avec l’arrivée du
premier gouverneur de la Nouvelle-France, Charles Huault de Montmagny.
C’est à ce moment que le fort de Québec change de nom et est rebaptisé le
château Saint-Louis. Plusieurs fois reconstruit et rénové, le château Saint-
Louis est aujourd’hui connu sous le nom de château Frontenac. Nommé ainsi
en l’honneur du comte Frontenac qui l’avait reconstruit en 1692.
Ensuite, en l, le cartographe a dessiné le couvent des Ursulines tout
près du fort Saint-Louis. Le couvent a été fondé en 1639 par Madame de la
Peltrie et il est l’un des plus anciens du Canada. Cet immeuble de trois
étages mesurait 92 pieds par 28 et a été habitable à partir du 21 novembre
1642. L’aile Saint-Augustin prit en feu le 30 décembre 1650 durant la nuit.
Trente-six ans plus tard, durant la construction d’une nouvelle aile (l’aile de
la Sainte-Famille), un nouvel incendie se déclara et brûla l’édifice en entier.
L’agrandissement du bâtiment s’acheva enfin en 1689 et celui-ci offrait le
double du logement que l’on avait en 168527.
Un autre édifice religieux proémine en haute-ville était l’église des
Jésuites, facile à distinguer sur la représentation de Franquelin puisqu’il est,
en m, le plus élevé des bâtiments de celle-ci. Dès 1626, les Jésuites
réunissent une importante somme d’argent qui facilite le commencement de
la construction du collège. Selon le journal des Jésuites, ils commencèrent à
travailler sur les fondements de la chapelle le 11 juillet 1650 et, en décembre
1653, l’enseignement du catéchisme débuta dans la chapelle. Durant l’année
1666, la première pierre fut posée pour la construction de l’église des
25
Louis Beaudet, op. cit. p. 26.
26
France Gagnon Pratte et Éric Etter, Le Château Frontenac, Éditions Continuité, Québec, p. 1.
27
Louis Beaudet, op. cit. p. 53-54.
Jésuites28.
Tout près de l’institution, identifiée par la lettre o, des Jésuites se
trouve la basilique Notre-Dame de la Paix. Sa construction fut débutée le 21
septembre 1647 et, trois ans plus tard, une première messe était chantée.
Toutefois, la cathédrale était loin d’être terminée à cause de manque de
fonds et ce ne fut pas avant 1657 qu’on y fit des offices réguliers. « L’église
était en forme de croix latine, avec un sanctuaire semi-circulaire 29. » Lors de
la conception de la carte par Franquelin, la basilique était en rénovation pour
un allongement de 50 pieds qui fut terminé en 1689.
Puis, deux institutions religieuses apparentées apparaissent à la droite
de l’évêché. En premier lieu, Monseigneur de Laval fondait, le 26 mars 1663,
le Séminaire de Québec30. Celui-ci est indiqué par la lettre p sur le dessin.
Trouvant trop petit le terrain sur lequel le séminaire était bâti, le
monseigneur acheta seize arpents qui agrandissent le terrain jusqu’à l’Hôtel-
Dieu. Le corps de logis fut débuté en 1678 et devint habitable trois années
plus tard31. Le Monseigneur fit entreprendre, cinq années après la fondation
du Grand Séminaire, soit le 9 octobre 1668, l’érection d’un petit séminaire
pour offrir de l’enseignement aux enfants francophones et autochtones32. Dès
1690, le petit Séminaire que l’on peut voir aujourd’hui était bâti. En 1692, le
Monseigneur estimait le coût des constructions du Séminaire à plus de 50
000 écus.
Finalement, à l’extrême droite de la carte de Franquelin, on aperçoit en
r l’Hôpital. Dès 1638, la duchesse d’Aiguillon avait envoyé des hommes pour
préparer le terrain et commencer l’édification de l’Hôtel-Dieu. Deux années
après, un incendie brûla les première fondations. Incidemment, ce ne fut
qu’en 1646 que le corps principal, commencé 8 ans auparavant, a été
terminé. En 1672, l’institution subit beaucoup de modifications avec l’ajout
28
Ibid. p. 61-63.
29
Ibid. p. 69.
30
Pierre-Georges Roy, Ville de Québec sous le régime français, p. 287.
31
Louis Baudet, op. cit. p. 82-83.
32
Pierre-Georges Roy, Ville de Québec sous le régime français, p. 287.
d’une chambre pour les officiers malades et d’une salle des hommes. Sous
Talon, il y eut la construction d’un aqueduc afin que l’hôpital ne manque
jamais d’eau. Finalement, cet établissement pris en charge par des
religieuses33.

BILAN
Le cartouche de Jean-Baptiste-Louis Franquelin nous apprend beaucoup
de choses sur la société de la colonie française de la fin du XVIIe siècle. En
effet, le premier aspect qui saute aux yeux est le nombre important de
bateaux qui sont présents dans la rade. Ceci prouve que le commerce entre
la métropole et la colonie était très fort à cette époque et ce, surtout en
raison du trafic des fourrures (le castor). Aussi, on peut voir qu’un
phénomène urbain, l’entassement, se faisait sentir en Basse-Ville de Québec.
Effectivement, on aperçoit sur la carte de nombreuses maisons entassées où
vivait la majorité des artisans et des paysans. La population, en 1688,
s’élevait à environ à 1407 personnes selon l’ouvrage de Rémi Chénier34.
Entre 1666 et 1688, « Québec enregistre une augmentation de 860
personnes35 ». Si on effectue un lien entre le nombre de maison et la
population de Québec, on peut comprendre l’entassement que pouvait vivre
la population de la ville de Québec. Par ailleurs, un troisième aspect qui est
difficile de négliger au premier regard de la carte, c’est la Haute-Ville qui se
définit surtout avec la présence de nombreuses institutions religieuses et
politiques. C’est à cet endroit de la ville de Québec qu’on peut apercevoir les
plus belles infrastructures de l’époque de la colonie française. Finalement,
avec tous ces instituions religieuses, on peut dire que Québec était un lieu où
la religion catholique était très importante, car il y avait la présence des
Jésuites (Ordre religieux), des Récollets, des Ursulines (des sœurs) et
quelques autres membres du clergé (Monseigneur et prêtres) qui
s’occupaient de la population (soins médicaux, enseignement, etc.).
33
Louis Baudet, op. cit. p. 98-101.
34
Rémi Chénier, op. cit., p. 57.
35
Ibid. p. 211.
On peut dire que le document de Jean-Baptiste-Louis Franquelin est
véridique, car, selon le dictionnaire bibliographique du Canada, « ces cartes
se trouvaient les plus grandes et les plus belles au point de vue artistique
qu’on ait faites au Canada au cours du XVIIe siècle.36 »

36
Dictionnaire biographique du Canaetda en ligne, (page consultée le 3 décembre 2007), [En ligne], adresse URL:
http://www.biographi.ca/FR/ShowBio.asp?BioId=34910&query=Jean-Baptiste-Louis%20AND%20Franquelin.
BIBLIOGRAPHIE

Ouvrages généraux :
BEAUDET, Louis. Québec : Ses monuments anciens et modernes. La Société
historique de Québec, Québec, 1973, 200 p.
CHÉNIER, Rémi. Québec : ville coloniale française en Amérique : 1660 à 1690.
Ministre des Approvisionnements et Services Canada, Ottawa, 1991,
293 p.
GAGNON PRATTE, France et Éric ETTER. Le Château Frontenac. Éditions
Continuité, Québec, 2006, 111 p.
ROY, Pierre-Georges. Le Vieux Québec. Première Série, Québec, 1923, 300 p.
ROY, Pierre-Georges. La ville de Québec sous le régime français. Imprimeur de
Sa Majesté le Roi, Québec, 1930, 554 p.

Périodiques :
GAUMOND, Michel. «Une ville au bon endroit?», La revue d’histoire du Québec :
Cap-aux-diamants, hors série (2004), p. 18.
« Place Royale », Vieux-Québec Basse-Ville, (Été 1994), p. 19.

Site WEB :
Dictionnaire biographique du Canada en ligne, (page consultée le 3
décembre 2007), [En ligne], adresse URL:
http://www.biographi.ca/FR/ShowBio.asp?BioId=34910&query=Jean-
Baptiste-Louis%20AND%20Franquelin.

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