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Alain Musset*
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Introduction
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TRACE n ' l0 I 98 6 Lcsjardins préhispaniques
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r9 86 Lesjardins préhispaniques
TRACE n ' l0
pratiquée..."16.Les jardins d'Ixtapalapa,selon cette Les deuxtextesqui précédentparaissentcontredireles plus beau, le plus frais que nous vîmesjamais: il mesure
lieux de récréation, et seplaisait à dire que les potagers qui affirmations de Solis selonlesquelleson ne trouvait Das
pour tes gensordinaires' Il â.r.tiptiot, sembleraitdonc être deschinampas'Ce deu lieuesde diamètre;une très agréablerivière le tra-
Ihuertasln'étaient bons que les diitingue des jardins précêdents,c'est qu'on les
a de plantesurilesdanslesjardinsnobles,puisqueBeÀal verseet de placeen place,à une portêe de deuxtirs d'ar-
pas mê-
iui sembiaiten effet plus digne desprincesde ne Diaz del Castillo parle de plantesmédicinales,utiles (de
conçus pour créer un paysage'une harmonie, faisant balète,on trouve deslieux de reposet desjardins !ard!
l e r I ' ut ileà I' a g r é a b l e " t r . provecho), et d'arbres fruitiers. Mais on peut penserque
d'eux deslieux autonomesoù I'espacea été soigneuse' nesl très frais, une infinité d'arbresaux fruits divers.de
Il ne faut pourtant pas confondre ces patios fleuris certainsfruits, chargésd'une valeur symboliqueou reli_
des ment élaboré. Nous retrouvons ainsi le même type de nombreusesplantes,des fleurs odorantes.Assurément.
auecles granis parcs aménagésdans le coeur même ja r d in s à Mexi co, avec ceux de Moctezuma: gieuse, pouvaient agrémenterleurs jardins. En ce qui Ia grâceet la grandeurde ce parc sont dignesd'adrrira-
villes, qui sont, comme eux, réservésà la noblesse'mats i'N'oublions pas lesjardins de fleurs Ihuertusdefloresl concerneles plantes médicinales,on verra au contraire tion"20.
que l'in-
dont ils sedistinguent par les dimensions'Ainsi que leur présence est étroitement iiée aux jardins
et les arbresodorants, de toutesespèces,que [Moctezu-
dique Bernal Diaz del Castillo, ce n'est qu'après avoir royaux. Ces jardins, d'ailleurs,ne se retrouventpas
jardins, que les mal posséda.it; n'oublionspas non plus leur harmonie'
uir'i,e t.r maisons d'Ixtapalapa, et leur seulementen ville. On pourrait même dire que les plus
se dirigent vers les jardins véritables' leuis promenoirs, leurs bassinset leurs réservoirsd'eau Bernal Diaz donne ausside Oaxtepecune description
soldats espagnols achevés,les plus complexesaussi,ont été bâtis à I'exté-
douce,dont l'eau [qui lesalimentaitl, venaitd'un côtéet enthousiaste,en specifiantqu,il s'agit du jardin (ruerla)
Ceux-ci sôniles premiersqu'ils visitent, et leur admira- qui s'y rieur desvilles précolombiennes,dans des endroits oar- "le plus beau, orné desplus grandsédifices,et le plus
s'en allait de I'autre; n'oublionspas les bains
tion ne connaît pas de limite: "Après avoir bien vu tout ticulièrementretirés:alors, ils prennentun" uurr" di-
jardin trouvaient, et tous cespetits oiseauxqui vivaient dans admirable à voir qu'on ait jamais contemplé en
,tou, nouu tomrnesdirigésversle vergeret le et aux plantes mension, à la fois dans l'espace,par leur étendue, et Nouvelle-Espagne2l.De ce parc, â I'intérieur duquel a
""1", le regarder, excitait les arbres;quant aux herbesmédicinales
lhuirta y iardinl. S'y promener' pâs utiles qu'or|y rencontrait,c'était une chosedigned'être
dans leur conception, par les motifs qui ont décidé de été construit le centro vacacionalde I'IMSS. il ne reste
.ot.e admiration à un point tel que je ne me lassais leur construction. Ixtlilxochitl, par exemple,nous don-
par- vue; et;our i'entretiende tout cela,un grand nombrede presquerien, si ce n'est, sur une paroi rocheuse,deux
de voir toutes ces variétésd'arbres, de respirer les ne le compteexactde tous lesjardins qu'avaient fait bâ-
les ia.ditti".t. L'ensembleétait construit en pierresde taille gravuresen relief, mal définies,et une cavitétravaillée,
fums que chacun exhalait, de m'émerveiller devant prome- tir les souverainsde Texcoco:Hueitecpan,Cillan, Tetz-
prornenadesornées de rosesl5et de fleurs, les arbres it blanchi à la chaux, aussibien lesbainsque les appelêe"el temazcal". Quelquesstèles,rapportéesdu
cotzingo, Quauhyacac,Tzinacanoztoc,Cozcaquauuh-
et noirs, les salonset lesappartem€nts,lessallesà manger' site "La Malinche" présententdes personnagesdiffic!
iruitiers et les rosiers, un grand bassind'eau douce' y co, Cuetlachatitlan,Tlateitec,situéssur la terre ferme. à
ot. encore qui valait la peine d'être vue: de et auisi les endroits où ils dansaientet chantaient;il les à déterrniner (l'un des baS-reliefspourrait être une
urii" jardins thuertasl' proximité de la capitale, ainsi que Acatelelcoet Tepet- représentationde Xochiquetzal).
grands "tcanoëspouvaient en effet, depuis la lagune' pé- avait tant de chosesà voir dans ces
zingo, situésau milieu de la lagune: ',Ces parcs et ces
pied à comme partout ailleurs, que nous ne nous lassions
iétrer dans le verger sansavoir besoin de mettre jardins lbosquesy jardinesl étaient ornés de riches oa-
oasd'admirersa grandepuissance"lT'
terre, grâ c e à u n e o u v e r tu r e q u ' ils a va ie n t lais somptueusementtravaillés, avec leurs fontaines, Le dernier de cesgrandsparcs,et peut-êtrele plus cé-
leurs conduites d'eau, des canaux, des bassins, des lèbre, est celui de Chapultepec.Ancien refugedesAaè-
bains, et autres labyrinthes admirables. On y trouvait ques avant qu'ils ne s'installent à T€nochtitlan, cette
plantée une grande diversité de fleurs et d,arbres de colline a ensuiteété aménagée par eux pour en faire I'un
toutes sortes,d'origine locale ou bien venus de régions des plus grands jardins du monde préhispanique.Sous
éloignées"te. la colonisation, Chapultepecest resté un parc, lieu de
promenadedestinéaux nouveauxmaîtresdu pays, com-
rne l'indique Cervantesde Salazar, dans sesdialogues
De tous cesjardins, le plus beauet le plus célèbreétait sur la ville de Mexico:
celui de Tetzcotzingo.Ixtlilxochitl consacredeux pages "-Alfaro: Mais pourquoi le parc lbosquel est-il clos
entièresà sadescription,et insistesur la végétationluxu- de murs si élevés?Pourquoi ne permet-on son entrée
riante et sur les oiseau que I'on pouvait y rencontrerlg. gu'à si peu de gens?
Aujourd'hui encorequelquesvestigesde cesjardins sub-
sistentsur la colline de Tetzcotzingo,à I'est de Texcoco:
les dits "bain du roi" et "bain de la reine", des frag- -Zuazo: Pour empêcherles Indiens, en passant,de
mentsde statue,dont I'une pourrait représenterTlaloc. salir I'eau, et interdire aux chasseursde tuer et de faire
le restedescanalisations qui devaientirriguer lesfleurs fuir tout le gibier qui I'habite,daims, cerfs,lapinset
et lesplantesqui poussaientlà, mais dont ont disparules llevres".,-
espècesfragiles,mal adapté€sau climat de la vallée. Comme on le voit, le parc de Chapultepec,avecla co-
A Oaxtepec,dans l'état de Morelos, Moctezuma I lonisation, resteun lieu fermé, qui maintient de la sorte
avait fait bâtir, lui-aussi,un grand jardin. C'est ce jar- la tradition du chinancalliaztèque.pourtant, si en ap-
din que découvrirent les soldats de Cortès après leur parencele jardin conservemaints aspectsqui étaientles
A : ÀrÊxico ct olkes iordin! fuite de Mexico: "Et à dix heures nous arrivâmes à
(Ch op 0ltê Pec , Èt u1 dê lÔ t Bo&' " ') siensà l'époquedes souverains de Tenochtitlan.c,est
I : Te xco@ êl ouhet lor or 4r
Guastepeque,dont j'ai déjà parlé plus hauti nous nous sur Ie fond que s'est traduit le bouleversementde la
- . ! ,
llm ' Qu o u h v ô : o c ''
Octz@trinc o, Huêir ec pon' Ci
TlotGirGc)
reposâmesdans la maison d'un seigneurdu lieu, située Conquête, c'est-à-d!resur ce qu'il représentaitréelle-
Cætlochotirloî'
iri""--"." C"""quouhco'
dans un jardin lhuertal. Ce jardin est le plus grand, le nent aux yeux de ceux qui les ont conçus.
c : lilopoloPo
d: Xochimil @
i, f * t r t "e : d6Pnnd. de Tm c h t i t l o h )
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on teoil (pour rcxcoco)
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TI TACE n " l0 r 986 Lesjardins préhispaniques
64 OJ
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Pourtant,la meilleureillustration de ce rôle histori- Cette fonction du jardin entrerait donc, d'une certaine Cettefonctionreligieuse, bienqu,ellen,apparaisse
, pas des,.deruisseaux:.,Da.nsce palais
que du jardin ne setrouve pasparmi lesélémentsdu jar- manière, dans le cadre politico-économiquedu tribut. danslesrécitsdesconquérants, aont l" ,ifrnc" ,u, étaientdisposésdix
Et, de fait, lesjardins de la noblessene doivent pas être jet est particulièrementrévélareur, bassins où I'on élevait toutes les
din, mais bien plutôt dans le jardin lui-même,conçu ""iu_
est cependantinclis- aquatiquesquel,on peuttrouu.. aunr..
îùir"irî
exclus de la politique tributaire de I'entpire, puisqu'ils cuta.ble:les religieux espagnolsne s,y ".pC"",
comme une oeuvre d'art, un joyau, laissêen héritage se sont d,ailleurs p"y, _orliîii
reçoiventune partie de ce tribut sousla forme de plantes a beaucoupet des plus variés, tous
aux hommesde l'avenir, et qui perpêtuela mémoire de T:r":.::ïrf
O.l-que,.àpeinearrivC, t"-" _..i"uiià,
les oiseaux de mer, il y avait des
Ao."rt;qu"r; pori
celui qui I'a fait construire.Tel est le sensde la réponse et de fleurs venues des régions conquises,principale- ils sesont empressés ""
de lesdétruire.txtlilxochifl, u"urinr-Ji"uï'rlËi,
jet-des jardins de Teucotzingo, au sul pour ceux de rivière, des petits
donnêepar Tlacaelelà la proposition de Moctezumade ment celles des terres chaudesde la côte du Golfe: parle de statueset lacs d,eau aou.". nj
"Chaque jour', cesprovincesdevaientpayer en tribut de "d'aurres.choses tempsen temps on les vidait afin d,en
faire graverleurs portraits sur les flancsde Chapultepec' encore,que re p.àie,
ai puison les remplissait
,é.;.;. I. i.;;
quand il lui conseillede mettre en oeuvreles jardins de grandesquantitésde fleurs, travailléeset bien présentées Mexico, don Fray Juan de Z "..r,""1î* à nouveau..."38.,,Et dt;b;;
Oaxtepec:"seigneur, je veux que tu laissesen ce monde en bouquets mêlant mille fleurs différentes, parce que r'"n-ii"nple..,ir",î"olul"ii::ïff;;jJiiTl,J;:: sortait une canalisation: I,eau, se prCcipilant
rochers,tombait en fines éclaboussures sur les
un autre souvenir, non moins digne de louange que ce ces terres chaudesen produisent ênormément, toutes Or ces jardins sont effectivement
dédiés à Tlaloc, sur un jardin de
parfumées, plus belles les unes que les autres, et à Chalchiutlicue,ei autresdivinitésd" fleurs tropicales er parfumées.Hr"
que tu as réaliséjusqu'àmaintenant"3l' f" pfri", a" f,.uî]"i r.upp"iii"îJurl
I'odeur délicate.Elles fournissaienten même temps les de-l:rvégétationen général,commele tant rle f61çsque i'on aurait dit qu,il pizuvait;,;.ï;;;
Intimementliées à cet aspecthistoriquedu jardin' ap- montrent l.r;;;; jeux d'eau artificiels s'ajoutent
paraissentaussi des référencespolitiques. En effet, cer- plantes qui produisaient ces fleurs, avec leurs racines, vestrgesque I'on a pu identifier dans c.rtains etémertsnair]-
lesruines:à ô;i;: rels,
afin de les planter dans les palais des princes. Tout ceci pec, un bas-reliefpourrait représenter la rivière qui traverseles jardins
taines sculpturessont un rappel des alliancesqui régis- Xo"hiq;k"l,; pec. -comme d"ô;;;_
ne setvait de tribut que pour démontrer la grandeur et T€tzcotzingoet à Chapultepec,a",,"urpr*"rii,îiuJoi Le rôle de I'eau, dansce contexte,dépasse
sentlesrelations de pouvoir entre les princes,commeon de simples,,jeux" destinésaux ptaisirs
le cadre
peut le constaterpour'fetzcotzingo:"Un peu plus bas, I'autorité mexicaines,et pour que les Mexicains soient aesrois fi ..nii.
appeléset considérés"seigneursde tout ce qui vit", aus- Hormis cessculptures,qui lient étroitement le.souci constant des Mexicains de
il y avait trois bassins,Trois grenouillesêtaientsculptées . le jardin renouer ;";;Ë;;
si bien sur I'eau que sur la terre"33. à ta penseeretigieuse,.ii"uin", o.rigines,mythiquesou non, en exaltant
sur lesbords de celui du milieu. Le bassinsymbolisaitla a., Cairi.", ..iiuiiï lu
Le jardin peut alors apparaîtrecomme un microcos- étaient bâtis sur les hauteurs,et dominaient séed'une sortede .,paradisterrestre,,qu. "i;;;j",;:
lagune, et les trois grenouilles les capitales de t,";.";;; relier au jardin fleuri de Tlaloc-diviiiù
t,on pou..ît
I'empire"3z.Les trois capitalesauxquellesseréfèrelxtli- me de I'empire, où l'on restitue, sur un espaceréduit, des.jardins: .,au sommet de ce parc,
on avait bâti des I'eau. *;d;';;
xochitl sont cellesde la triple alliancequi unissaitMexi- l'ensembledes conquêtes- chaquerégion étant repré- maisons,commedestours',, indique
I*tfif"o.f,itfi.. à.,
co. Texcocoet Tacuba, pour I'exercicedu pouvoir poli- sentée,symboliquement,par les plantesqui la caractéri- maisons construitesà la manière
de t..r;;;;;.;;;; Le jardin: paysaged'un paysage
tique dansla vallée de Mexico, aprèsla chute d'Atzca' sent. Vetencourt signale à cet égard que Mociezuma être, tout simplemelt, des pyramides
<f" t"r*. Oriou
potzalco;le bassin dont il est questionici est sansaucun "possôdaiten dehorsde la ville d'autresjardins compo- e.srsouventemployépar Cortésou gernal
niau aei Cas_ De le jardin semble principalement
doute celui que I'on appelle maintenant "le bain du sês de toutes les fleurs et arbres odorants que I'on tillo pour désignerles édificesreligieux
aztèq;es). .fait, destiné à
pouvait trouver dans l'empire". La notion spatiale de A cesconstructions,il con,rientà,aj.ui". reproduire un modèle,ou mieux, paysage,
roi", puisqu'il conserveencore,sur un de sesbords, les un celui de la
iË, ,i"u", côte du Golfe (Veracruz,Tabasco),
restestrèsabîmésd'une grenouilleen pierre. Comme on centre, si importante dans la penséeaztèque, semble c3v:mes, naturelles ou non, qui t.ou"nt or: a niuil I,unJ.i_
ler"*ttin", ",
le voit, I'organisation spatialedu jardin et de sesorne- pouvoir se rapporter au jardin, à la fois centre et fusion choisiespour l,élaboration du jardin. ry.1yltye olmeque,que I'on peut considérercomme la
q^ue_la
O" ,;;; ;;ï;; civilisation,,mère" du Mexique.nu",
ments n'est pas neutre. Derrière chaqueélémentqui le des provincesde I'empire, où le prince aime à recevoir caverneest un lieu de cuite, q"i e""q"" u.rr.Cgiorrrliu;
rlËi"" vernentsèche,commeI'esrla valte"
composese cache un symbole, une métaphore,dont le aussibien lesambassadeurs desrégionssoumisesque ses en.mêmerempsque, a" a" frl"t"J,l"
lll:îy:l:"t ryrn-bo_ h^umidedu.Tabascoévoquairsans
sensne peut être découvertque par une analyseprécise amis venus le visiter: "Ensuite se trouvaient les palais nque.le ventrede la mère,surtoutsi
une-uniè."
sourceiaillitau
doure un'uerit"ùi."flriut
que le roi possédaitdans le parc. Ils se composaientde fond. A oaxtepec le temazcsl, a*, treu de délices,où I'eau ne manquait
du contexteoù se situe le jardin' ,.". ;".uir, oJi".
plusieursgrandes salles,cabinetset boudoirs, dont parlê, jouait sans doute ce rôle. fruirs, les ptanres,abonàai."i;il;d
D'autre part, et toujours dans le cadrede cesréféren- ""Jrr'jeîî
.A f.,-"rr*î", ii"
,n*.:, lg:
besoind,irrieuerer de prorégert., ptont",ionr.ïfinî.f;i
cespolitiquesil est necessaire de rappelerque mêmes'ils I'une, immense,et précédéed'un patio, lui servait à re- grotte creuséeau flanc de la colline,
au suà, mrelx reproduire ce modèle,il etaii
sont deslieux de récréation,lesjardins n'oublient pas le cevoir les rois de Mexico et de Tlacopan, et d'autres aménagéepar la main humaine, serait "Ote "tli-
celle q"i ; ir;L;;_ aonc inaispensablJ
grands seigneurs,quand ils voulaient se divertir avec gé le-jeune Nerzahualcoyorl, de.fairevenir dans la valléeies arbres
caractère belliqueux de ceux qui les ont élaborés. Iorsqu,ilfuyaii ilr-;i;;;, et 1", n;;;;;;i:
de Maxrta,roi de Culhuacanr.I"i nairesde la côte du Colfe, desrerres
Nombreux sont les symbolesguerriers qui ornent les lui"la. tropicales(on a vu
l.'ffiË, plus.haut qu'une partie du tribut
rochersmis à nu. commecesdeux tigresde Tetzcotzingo l'historiqueet le religieuxsetrouvent "n""i'., d"
étroitementimbri_ sistait justement en fl eurs). Ixrlilxochitl
".r;;;;il;;;;:
qui, selonIxtlilxochitl, laissentsortir de leur gueule"de qués. iàrfir.r-
Ainsi le jardin est-il un espaceaux fonctions mul- La grotte, qui s,enfonceau coeur de orrgm€.tropicaledes fleurs desjardins ".",t"
I'eauet du feu". Or on sait que le glypheAtlachinolli .. la terre, est un a" f"tr"otring;
tiples: il est souventdifficile de distinguerce qui appar- lieu privilégié pour entrer en conracr quand il par.led,un jardin composé ,.toutes
(eau-feu)est une métaphorenahuatl caractéristiquequi avec les dieux. De de
parfumeesdes reres chaudesiao.pi"go pr.ui-i.r-ili" les fleuï
la guerre. tient au politique ou à I'historique,surtout quand les nombreuses illustrationsnousmontrentde, gue.ri.rs
symbolise ou lui-aussisur ce point, en évoquanI
Dans certains cas, Ie choix du site où I'on va cons- deuxélémentssetrouventmêlésà la fonctionreligieuse, des nobles y faire desretraitesspirituell* la constructiondu
qui régit I'ensembledesjardins royaux et leur donne une le codex Nuttal où I'on voit Huit_Cerf, i;;;;;; ,-111,1..1. r"*,.oec: .,{JepenseJ qu,il serajusreel agré_
truire le jardin sembled'ailleurs correspondreà descon- revêtî;,rrrre aorequepour ta récréation,
géopolitiques: il s'agiraiten ce sensde mar- unitédépassant lescadres"nationaux", imposêspar les assisdansunegrorte, représenrée ton repos,ainsiqueceui de
sidérations l^ïd^. ]"*l*, par un tes successeurs,
frontièresd'êtat; en effet, si Tetzcotzingoexalteles ver- Iepeu sur la gauche).pourtant, t,Cle*ent tu fassesconstruireun grand réservoir,
quer le domaine conquispar une présenceconstantedu ,ouvert aomi_ g.-9. bassin,où I'on pourrait
tus des rois de Texcoco, et si Chapultepecest chargé nanr de ceuefonctionreligieuse faire mont.. route
conquérant,auquelle vaincudoit sesoumettre,notam- du jaidin .J;;;r;;- I:neauqu'll serapossible,afin de la recueillir
d'honorer ceux de Tenochtitlan,ce sont pourtant les testeI'eau; omniprésenle,
ment en entretenant les jardins qui ont été édifiés sur souveraine, c,es[elle qui or- Ie plus de_terre
er d,irriguer
mêmesdieux oue I'on vénèredans les deux cas. ganiseIe paysage,par rour un j"u que I'on pourra.Ensrite,.nnoyonsïia
son territoire (à Oaxtepec,ou à Atlixco, par exernple)' a" uus.inr,à.îrJ"_ provincede Cuetlaxtla,où gouverne
en ton nom pinotl.
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TRACI i n ' l0 l986 Lcsjardin,"préhispanirlut:s
que
xuchina- parle Diego Durân)ae. Le codex Bodianus signale les chroniqueurs semble être une véritable reproduction
I'ordre de faire venir des plantes de cacao et de Comme le fait justement remarquer Birgitta Leander
i'"r.*.. t'irée de cette fleur était utilisée par les nobles d'un pay s age or i e n ra l . C , e s t l e l i c u d ' o ri g i n e p a r
ciztli, des plantes de yolloxuchitl, de cacahuaxochill' ex_ dans son livre In Xochitl in Cuicatl, ces personnages qui
pour r oulug*, la l ati gue qu'c ntr aînai enl l es r es pons abi J i - cellence,le lieu de délices où se rerrouvent tous les morts
d'izquixuciitl, de huacalxuchitl, de cacaloxuchill' et de chantent, et dont des volutes fleuris sortent de la
côte si ié, du eoui.rt.-ent. Clavijero, tui, ajoute "qu'il n'y-a marqués par Tlaloc: les noyés, les foudroyés, les person-
toutès les espècer de fleurs que produit cette les temples de bouche, font irrésistiblement penser aux nobles réunis
de toute rien dJplus commun que cette fleur dans nes décédéesd'une maladie placée sous le signe
chaude: peut-être pousseront-elles à Oaxtepec: àe I,eau dans les jardins de Netzahualcoyotl et qui se
Nouvelle-EsPagne"5o. (bubonneux, syphillitiques, lêpreux, goutteux,
façon cela ne coûte rien d'essayer"ar par Du- hydropi_ re t ro u v a i e n t p o u r c h a n re r e r rô c i re r d e s p o è me s e n
-Conquise Si l'on anatyse en détail les fleurs présentées ques). Tel qu'il nous est décrit par Sahagun,
en 1461 par Moctezuma I, la province de l er r es le Tlalocan I'honneur de Ia vie, de I'amitié, des fleurs. par la poésie,
et les r ân, on consta te qu'el l es pr ov i ennent toul es des est bien I'image d,un paradii tropical, évoquant les
Cuetlaxtla se situe effectivement dans le Tabasco' ont été surtout chantée dans des jardins conçus à I'image de la
pro- chaudes ,le la zone tropicale humide' Elles chaudes terres de I'est: .,C,est un lieu de joie eide paix;
fleurs citées dans le pæsage sont originaires de cette peuvent aussl côte du Golfc, les nobles mexicains recréaient Ie;ert Da_
tres choisies pour leur parfum, mais certaines jamais l'on n'y souffre, jamais
vince. Toutes, pour des raisons diverses, étaient desti-
ne viennent à manouer radis de TlalociJ.
parfum' être consommées, notamment dans les boissons Ies epis de maTstendre, les calebasses,les plants
appréciées par les nobles aztèques (pour.leur (xuchinacaztli' iz' d,ama_ Cest ainsi que, peu à peu, s'érablir un double ieu de
nées aux nobles, comme le chocolat rante, les piments verts, les tomates, Ies haricots
leur beauté, leurs vertus réelles ou supposees)' curatives' et en miroir entre le jardin, senséreprésenter le Tlalocan. ct Ie
d'un ouixuchit[t. Plusieurs ont des vertus gousse et les fleurs. Et là vivaient les
La xuchinacaztli 0a fleur d'oreille) provient (yollo' dieux appelés Tla_ Tlalocan, représentation idéalisée des terres trooicales
à Ia p.ru.tt pi"nd." le rang de plantes médicinales loque"5l. Un peu plus loin, Sahagrin préciæ I'univers
arbre tropical dont la fleur, selon Rémi Siméona2' quatre d'entre de Veracruz et de Tabasco. ll y a là comme une mise en
bois- xuchitl, cacaloxucàila). Enfin, au moins du ïalocan, ênumérant plantes et animaux typiques
fois belle et à I'odeur suave, servait à parfumer les religieuses de abîme du paysage: celui-ci s'élabore à partir d'une
elles ont des significations symboliques ou la côte du Golfe: ,,Là poussent Ie cacao, le tiànàcaztti,
matrice commune, d'un espaceidéat, que les architec(es
sons. huqc al x uc hi tl , i z qui x uc hi tl '
la ta- ivoltoxuchitl, et le caoutchouc. Là poussent le magnolia et toutes
La yolloxuchitl /fleur de coeur), identifiée avec pas, bien enten- sor- et les jardiniers mexicains tentent de mettre en forme _en
Cette iacaloxuchitl). Cette typologie n'exclut tes de fleurs. On y trouve toutes sortes d'oiseaux
lauma mexicana43 est une sorte de magnolia' par aux ce sens, plus qu'un lieu dc rêcréation, le jardin est un
de du, les inter fér enc es ' pui s que I'i z qui x uc hi tl '. plumes précieuses, le Taquon, le rlauhquechol,
fl"ur, ,re, blanche et très parfumée, s'ouvre en forme aussl une le te- lieu de re-création.
pour exemple, qui symbolise la vie et le mais, est oquechol, le xiuhtototl.
coeur. d'où son nom. On faisait infuser sesgratnes On y trouve le perroquet et Mais en tant que recherchede cet espace idéal qu'est
planti que I'on peut consommer, mélangée avec du cho- I'oiseau quetzal"52. Le teonacaztli (variété de la
combattre l'épilePsiea. sociale xochi- le Tlalocan, on peut se demander si lejardin n'est
iotut. dn constatera de même que Ia hiérarchie nacaztli dont nous avons dêjà parlé) est une fleur troDi- ;as la
elle' est
La cacahuàxochill (la fleur de cacao)' quant à de fleurs mise à plat d'une des méraphores fondatrices de la nen_
la poésie des jardins se trouve confirmée par les espèces c al e, de c oul eur j au n e , e r rrè s p a rf u mé e . O n I , u t i l i s à i t
une fleur sacrée, qui revient sans cesse dans réservees sée mexicaine: la métaphore otepett
1l.eau, la
hu- rassàmblees à Oaxrepec, qui sont exclusivement pour aromatiser le chocolatJr.
mexicaine, où elle joue le rôle d'enjôleuse du coeur euant aux oiseaux aux montagne), qui symbolise la ville, et que Sahagûn rcnte
aux nobles. plumes précieuses,il s'agit aussi d'oiseaux
main (c/ la chanson en encadré45)' tropicaux: le d'expliquer dans son Histoire Cénérale des Choses tle
tlauhquechol et le reoquechol sont en fait le même la
ani_ Nouvelle-Espagne.. ..Les anciens habitants de cette terre
mal, une sorte de canard renommé pour la splendeur disaient que les rivières sortaient d'un endroit appeti,
de
sesplumes rouges;le xiuhtolot!, lui, est fameux oour ses Tlalocan, qui est une sorte de paradis rerrestre (...) Ils
Et cacao
floreciente La neurdccacao plumes verles; et le :aquan, ou mieux le
Yeehuava zasuàntototl. d i s a i e n t a u s s i q u e l e s mo n ra g n e s re p o s a i c n t s u r l u i . r. t
Ti|lriii,llill"t," v""ntiW EmbrieS| mi corozôn Enivre mon coeur
pour s on pl um age j a u n e e t b ri l l a n t . O n l e v o i t .
Qui ihuintia noyotlo Enivre mon coeut ce sonr q u ' e l l e s é t a i e n t p l e i n e s d ' e a u , e t re c o u v e rt e s
Embriega mi coraz'n d.unc
Mac ic ninapanliuh Allons' ptês de cette fleul l es m èm es v ar i étés d e f l e u rs e t d ' o i s e a u x q u e l . o n
Con él ande yo adornado couche de terre, comme s'il s'agissait de grandes jarres
Zan no Jeluhcan de même retrouve dans les jardins royaux de Texcoco ou de
Y de iSuol modo taûbién Te_ d'eau, ou des maisons pleines d,eau; si un jour lcs mon-
Ma ica huel latiuh lra mon coeur nochti{lan, et qui font I'enchantement des visiteurs:
Yeehuaya Pueda ir ni corazôn tagnes devaient se briser, ils prétendaient que I'eau
Noyollo pas
iQue ko se marchilen Que ne se fânent "tout le reste du parc, comnre je l,ai déjà dit, était plan_
Mdcq in cuetlahuia Les fleurs! qu'elles contenaient en jaillirair et s'en irail noycr
L6 flores! té d'une grande variété d,arbres et de fleurs odorantes; ia
xochillo terre. C'est de là que yient la tradition d'appeler les villes
et dans ces arbres vivaient mille espècesd'oiseaux, sans où vivenl les hommes a/lep€l/, ce qui veut dire rlonlaqne
compter ceux que le roi tenait enfermés dans des caseset d ' e a u o u mo n t a g n e p l c i n e ri ' e a u ' ' . 0 .
qu'on av ai r fai t v en i r d ' u n p e u p a rt o u t . To u s
cÀ oi. I l e s t a i s é d c v o i r, e n l i s a n t c e re x t e , q u ' i l n ' c x p l i q u e
(bourreria huanito) est elle aussi une En regroupant donc, dans un même lieu, des plantes seaux chantaient de manière si harmonieuse que l,on
L'izquixuchitl ne pas le pourquoi de la métaphore, puisque dans son
tropicales, c'est la côte du Colfe, le pays de l'est' qui est con-
fleur de couleur blanche, qui évoque le mais éclaté, et pouv ai l s 'en tas s ei " ra .
tenu linguistique elle se limite à une description rle la
mis en valeur, et que I'on essaie de recrêer artificielle-
par là symbolise la vie6. Mêlée au chocolat, elle lui don- Si I'on compare ces descriptions avec la fresque dé- montagne, et non à une métaphorisation dc la ville: Ie
ment. entre autre par I'organisation du paysage des jar- couvcrte à Teolihuacan, dans le palais de Tepantitla, on
ne une saveur Particulière- couple atl-tepetl se limite donc à une seule explication
dins, couverts d'une épaissefrondaison où nichent des
La huacalxuchitl (fleur en forme de panier? - de constate que de nombreux éléments contribuent à faire naturelle, physique, qui concerne la structure interne dc
milliers d'oiseaux exotiques.
huacol, qui signifie la hotte) est une variété de de ce paysage une représentation des paysagestypiques la montagne, et n'analyse pas le glissement de sens qui
Or, cette côte du Golfe, reprodrrite dans le jardin, sert
philodendionaT. Selon Hernandez, cette fleur êtait of- de la côte du Golfe; sur les bords d'une rivière oouri.nt permet de passer de cette d€scription à son expression
aussi de "paysage matrice", pour reprendre une termL dc s pl anl s dc m al s et d e c a c a o . d e s f l e u rs e t d i s a rb rc s
ferte aux dieux et aux monarques4s. i ma g é e (l a v i l l e ). I l ma n q u e p a r c o n s é q u e n t u n é l é me n t ,
nologic d'Augustin Berque, c'est-à-dire qu'elle sert de
Enfin, la cacaloxuchitl (fletr de corbeau) - ots Plume- fruitiers. Dcs personnages chantent, d,autres se bai- celui qui permettrait de faire la transition entre Ie pre-
modèle pour évoquer Ie paradis de Tlaloc, le Tlalocan
rio acutifoha, était une plante réservée aux selgneurs' gnent, ou bi en pl onge n t d a n s l , e a u . C e rt a i n s
iouent à la mi e r e t l e d e u x i è me t e mp s d e I a mé t a p h o re . I l n ' e n t rc
pousse (souvent confondu avec le mythique Tamoanchan). Le
comme I'indique Sahagûn, s'il s'agit de celle qui bal l c . ou al or s ehas se n rl e s p a p i l l o n s . D ' a u ; re s e n c o re pas dans le cadre de notre étude de résoudre le prob)ème'
Tlalocan, en effet, tel que nous le trouvons décrit chez
dans les régions tropicales (or c'est bien de celle-là dont choisissent de se reposer à l,ornbre des arbres. posé par cell.e inâdéquation entre le modèle et I'irnagc:
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I 986 Lcsjardins préhispaniques
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