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Rapport annuel 2009

Rapport annuel 2009

Médiateur de la République

Diffusion La Documentation française 7, rue Saint-Florentin – 75008 Paris 


29-31, quai Voltaire – 75344 Paris Cedex 07 Tél. : 01 55 35 24 24 – Fax : 01 55 35 24 25
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Prix : 16 €
ISBN : 978-2-11-099157-7
ISSN : 0182-7502
Pour contacter le Médiateur de la République
et ses délégués
Le Médiateur de la République
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de la défense des libertés Fax : 01 55 35 24 25

publiques Les délégués du Médiateur de la République


La liste des délégués, leurs adresses, coordonnées et permanences sont disponibles
sur le site Internet de l’Institution :
www.mediateur-republique.fr
Créée en 1973, l’Institution du Médiateur de la République est une Rubrique : Délégués / où les trouver ?
autorité indépendante qui met gracieusement ses compétences au
service des citoyens, personnes physiques ou morales pour amélio-
rer leurs relations avec l’administration et les services publics. Elle
Pôle Santé Sécurité des Soins
traite les litiges au cas par cas, vérifie si l’organisme objet d’une
plainte s’est ou non conformé à la mission de service public dont il
a la charge, relève les dysfonctionnements et rétablit les droits du et www.lemediateuretvous.fr

requérant. Lorsqu’une décision administrative, pourtant conforme www.securitesoins.fr L’espace d’échanges et de réflexions sur les droits

à la règle de droit, vient heurter les droits de la personne, le Média-

@
teur de la République dispose d’un pouvoir de recommandation en
Dialoguer avec le Médiateur de la République
équité. Il peut également faire usage de son pouvoir d’injonction E-mediateur est accessible via Windows Live Messenger
lorsque l’État ne se conforme pas à une décision prise par la justice et Google Talk. Il suffit de l’ajouter à vos contacts
en faveur des administrés. Le Médiateur de la République est éga- et de commencer à dialoguer avec lui.

lement doté d’un important pouvoir de proposition de réformes qui MSN : mediateur-republique@hotmail.fr

lui permet de contribuer à l’amélioration des procédures adminis- Google Talk : mediateur.republique@gmail.com

tratives et de la législation pour que le droit soit adapté aux évolu-


tions de la société et que cessent les iniquités.
L’Institution doit sa réactivité et son efficacité à la qualité de ses col- Pour transmettre votre dossier
laborateurs du siège, à sa présence territoriale assurée par quel- à un parlementaire de votre choix
que trois-cents délégations, à sa souplesse d’action et au travail
en réseau qui la caractérisent. Nommé en conseil des ministres, le Députés Sénateurs
Médiateur de la République, qui dispose d’un mandat unique de six Assemblée nationale Palais du Luxembourg
126, rue de l’Université, 75007 Paris 15, rue de Vaugirard, 75006 Paris
ans, est irrévocable et inamovible. Le Médiateur de la R ­ épublique Tél. : 01 40 63 60 00 Tél. : 01 42 34 20 00
est membre de droit de la Commission Nationale Consultative des Adresses et horaires des permanences : Adresses et horaires des permanences :
www.assemblee-nationale.fr www.senat.fr
Droits de l’Homme.

Médiateur de la République
Responsable de publication : Christian Le Roux
Les données chiffrées de ce rapport portent sur l’année 2009. Conception et réalisation : Polynôme Communication – RCS Nanterre B 398 289 629
Sa date de rédaction est arrêtée au 1er février 2010. Rédaction : les services du Médiateur de la République ; ADH presse
Photos : David Delaporte
Médiateur de la République – 7, rue Saint-Florentin – 75008 Paris Impression : La Fertoise – 72405 La Ferté-Bernard
Tél. : 01 55 35 24 24 – Fax : 01 55 35 24 25 – www.mediateur-republique.fr Dépôt légal : 1er trimestre 2010
sommaire

édito p. 2

FOCUS – La médiation s’élargit au secteur de la santé p. 6

L’ année en chiffres p. 8

tableau des réformes p. 11

Bloc-notes p. 12

l’USAGER ET l’état face à la crise p. 13


Citoyen-administration : la grande incompréhension p. 14
Le citoyen seul face à un cadre mouvant et insécurisant p. 23
De nouveaux liens marqués par la défiance et la suspicion p. 31

pacifier les relations, apaiser les tensions :
la contribution du médiateur p. 39
Des réponses à la demande de « vivre ensemble » p. 40
Des propositions pour un système plus humain p. 47
Les grandes orientations pour 2010 p. 57

un ombudsman à la française p. 63
Les réponses du Médiateur de la République aux grands défis de notre société p. 64
Une expertise au service des droits de l’Homme p. 71
Le Défenseur des droits, un ombudsman à la française p. 75

Portrait de l’institution p. 78

gestion administrative et financière 2009 p. 88

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E

Édito

Défense des droits : une dimension nouvelle


Le constat n’est pas neuf, notre société est fracturée,
mais jamais cette réalité n’a été aussi aiguë. Poste d’ob-
servation privilégié des évolutions sociales, des souffran-
ces des femmes et des hommes, le Médiateur de la Répu-
blique apprécie en effet quotidiennement, au travers des
requêtes qui lui sont adressées, la vitesse et la prégnance
avec lesquelles le sentiment d’injustice se diffuse dans la
société. Il perçoit aussi l’urgence et la difficulté qu’il y a à
contrer ce sentiment, mêlant angoisse et rancœur, prêt à
se déverser dans les pires exutoires.
Le premier fossé entre les citoyens et l’État, c’est celui
que creuse la loi par une complexité croissante, qui met
sa compréhension hors de portée de l’individu. La consé-
quence : les administrés méconnaissent leurs droits, en
mesurent mal la portée et ont souvent du mal à les res-
pecter. Face à eux, des fonctionnaires peinent à appliquer
la loi, à comprendre la finalité de leurs actions. Se consi-
dérant comme de simples pions dans un système qui
les dépasse et leur impose sa force d’inertie, ils cèdent
parfois à la tentation d’une application des textes plus
formelle qu’humaine. Cette rupture est accentuée par
l’agressivité ou la violence, qui prennent peu à peu le pas
sur le respect de l’autre. Des deux côtés, un sentiment
de fragilité et d’isolement qui ne laisse en partage que la
Jean-Paul Delevoye, souffrance.
Médiateur de la République À cet éloignement s’ajoute pour le citoyen l’impression
d’être « ballotté » par d’incessants changements cen-
sés l’avantager, mais qui lui semblent pourtant s’accom-
plir toujours à son détriment. Ainsi de la réorganisation
d’EDF-GDF au nom de l’ouverture à la concurrence, qui a
débouché pour l’usager sur un recul qualitatif de l’offre de
services et a parfois même été source de préjudices. L’im-
pact de la crise est venu aggraver la situation, accroissant
le contraste entre la richesse collective de la France et la
situation des moins favorisés. Jamais le risque de bas-
culer dans la précarité n’a semblé si grand à autant de
nos concitoyens. Les travaux de sociologues comme Éric
Maurin ont récemment rappelé l’immense écart entre
la peur du déclassement, partagée désormais par une

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majorité de Français, notamment les classes moyennes l’usager, par définition difficilement quantifiable. On peut
et supérieures, et la réalité du déclassement qui touche mesurer le délai de réponse moyen, par exemple, d’une
une frange de la société, les plus vulnérables, hélas. institution. Mais est-il possible de mesurer la douleur affé-
D’autant que, face à la détresse d’un nombre croissant rente à ces temps de latence et d’incertitude ? À l’heure où
de citoyens au parcours de vie marqué par des ruptures la transparence s’affirme comme le principal moteur de la
– aussi bien professionnelles, familiales, que géographi- confiance et où les citoyens veulent pouvoir mesurer avec
ques –, les réponses de la société en termes de politiques justesse la qualité des services rendus, un débat s’im-
de solidarité, au travers du RA, de la CMU ou de la loi Dalo, pose sur la validité des indicateurs de performance. Lui
font montre d’une efficacité déclinante. Loin de lisser seul pourra écarter le soupçon d’instrumentalisation qui
les aspérités de la vie, les solutions proposées par l’État pèse sur ces outils de mesure et prévenir le risque d’une
face aux accidents de la vie, inadaptées à des trajectoires nouvelle fracture entre administrations et administrés.
qui ne sont plus linéaires, induisent trop souvent, entre La rationalisation tant souhaitée des administrations est
la naissance d’une situation de détresse et le versement censée mettre fin à la gabegie et optimiser l’efficacité et
d’aides, un décalage temporel pénalisant. Trop distendu, le rendement des organisations du travail dans la fonction
le filet social qui doit atténuer les chocs en vient à infli- publique. Fort logiquement, cette rationalisation se tra-
ger des blessures supplémentaires à ceux qu’il est censé duit d’abord par une standardisation des réponses et un
aider. Il paraît pourtant impératif que les services publics traitement de masse des dossiers appuyé par l’outil infor-
n’ajoutent pas une souffrance évitable à une souffrance matique. Dans le même temps, on constate une demande
initiale. Se pose donc la nécessité d’une réflexion appro- de personnalisation de la part des usagers et un souhait
fondie sur les politiques de solidarité, leurs effets sur le de ne pas être assimilés à un numéro de dossier, pour
comportement, la socialisation et le vécu. une affaire qui est parfois l’histoire de toute une vie, avec
ce qu’elle comporte d’incertitudes et de souffrances. Ces
Dans ce contexte social tendu, il est indispensable de deux tendances, personnalisation et rationalisation, ne
parvenir à une utilisation optimale des deniers publics. sont opposées qu’en apparence et je suis convaincu de la
C’est donc avec raison que le législateur et les services possibilité de trouver des solutions compatibles.
de l’État ont mis en place une politique de lutte contre les
fraudes. Mener cet indispensable combat a cependant Finalement, notre système dans son ensemble se fragilise
conduit à un durcissement du régime de la preuve, qui d’année en année. L’époque où le « vivre ensemble » se
pénalise aujourd’hui les honnêtes gens, qui constituent fondait sur l’existence de règles communes, sur des auto-
la très grande majorité de la population, en les plaçant en rités de proximité les faisant respecter, et sur des citoyens
position de présumés coupables. Si l’objectif est louable, qui les connaissaient et y adhéraient semble révolue. Les
comment ne pas voir dans la méthode la promesse d’une espérances collectives ont cédé la place aux inquiétudes
dégradation des liens entre les administrés et leurs admi- collectives et aux émotions médiatiques. Notre société
nistrations ? Ici aussi, une autorité indépendante comme gère son angoisse par une décharge d’agressivité là où
le Médiateur de la République peut aider à définir un fais- nous attendions un regain de solidarité. J’en veux pour
ceau d’indices acceptables à défaut de preuve et à sécuri- preuve la généralisation et la banalisation des faits de
ser le fonctionnaire chargé du dossier. En s’appuyant sur violence, à l’école, en famille, dans les hôpitaux, envers
ses capacités d’analyse et sa profonde connaissance des la police. Les grandes équations qui permettaient le
lois et des mécanismes administratifs, il faut parvenir à consensus au sein de notre société semblent marquées
trouver un juste équilibre entre défiance et confiance, car d’obsolescence : un diplôme ne garantit plus un travail,
il n’est pas possible de vivre dans un système où l’admi- une intervention étatique ne garantit plus la correction
nistré fait figure d’éternel suspect. ou la suppression d’une injustice. Notre société en quête
Vient s’ajouter un facteur supplémentaire brouillant la de sens se révèle aujourd’hui plus usée psychologique-
situation : la distorsion de plus en plus marquée entre la ment que physiquement. L’individualisme met en exergue
réalité vécue par les administrés et le reflet qu’en donnent l’individu et le valorise dans ses réussites. Il l’isole dans
les multiples indicateurs dont disposent les services de ses échecs et développe alors parfois le mépris de soi qui
l’État. Contractualiser les objectifs, valoriser les résultats, engendre le mépris des autres. Alors qu’il faut réinventer
imprégner l’ensemble de la sphère publique de la culture les modalités comme la finalité du « vivre ensemble » et
de la performance, pourquoi pas ? Encore faudrait-il que enrayer la spirale de l’échec et du mépris lorsqu’elle se
ces indicateurs soient pertinents et n’aient pas pour seule présente, maintenir et développer nos capacités d’écoute
finalité de satisfaire une hiérarchie ou de servir de faire- est primordial. La philosophie qui guide mon action
valoir médiatique. Encore faudrait-il, également, que ces répond précisément à ces défis : aider nos concitoyens à
indicateurs parviennent d’une manière ou d’une autre à adopter un état d’esprit plus positif, en passant de la ges-
intégrer la dimension psychologique de la relation avec tion des peurs à la motivation de nouvelles espérances. La OOO

médiateur de la république 3
édito

OOO reconstruction du « vivre ensemble » ne pourra se faire orienter. La mauvaise première réponse ou l’absence de
sans offrir à chacun une place au sein du collectif, indé- réponse génère de la frustration. La mauvaise orientation
pendamment de sa valeur sur le marché du travail, une génère un coût en temps humain évitable, un encombre-
place où son utilité d’être social soit affirmée et sa dignité ment non avenu, et à nouveau de la frustration. L’accueil
d’être humain respectée. doit être considérablement développé et le personnel
destiné à occuper ce genre de poste qualifié et formé en
Des réponses à la fragilité et à l’insécurité conséquence.
Souvent perçue par les citoyens comme l’ultime recours
pour solutionner leur problème, l’Institution du Médiateur En consolidant mon propre dispositif d’accueil, j’ai néan-
de la République est en prise directe avec la détresse, la moins constaté que l’écoute ne suffisait plus et que, face
douleur et les drames humains, aux ressorts complexes. au désespoir et à la solitude, l’accompagnement de chaque
J’ai mis en place de nouveaux outils pour accroître les administré tout au long du traitement de son dossier s’im-
capacités d’écoute de l’Institution. Sur le plan des nou- posait comme une évidence. En découle la nécessité d’in-
velles technologies, « e-mediateur » est un guichet d’in- venter de nouvelles attitudes administratives, à partir d’un
formation de premier niveau permettant à l’internaute de tryptique : écoute, réponse, conseil – mission dans laquelle
connaître le rôle du Médiateur (ce qu’il fait et ne fait pas), l’Institution se veut pionnière – afin de ne jamais laisser une
de savoir si le Médiateur est compétent pour un problème question non résolue ou une démarche non aboutie. Il ne
donné et d’être réorienté vers un délégué ou bien le bon faut plus gérer un dossier mais accompagner une personne
organisme, de recevoir directement dans sa message- pour l’aider à surmonter une difficulté. Accueillir c’est res-
rie les outils d’information sur le Médiateur, cela via les pecter, accompagner c’est reconstruire.
messageries instantanées Gmail et Msn, à toute heure du
jour et de la nuit, et notamment lorsque les bureaux sont Autre impératif : favoriser le vote de lois créant des droits
fermés (des pics de connexions sont enregistrés la nuit et qui puissent être mis en œuvre sans complexité excessive.
le week-end). Le formulaire de saisine en ligne permet Dans le cas contraire, on débouche sur un texte difficile-
à toute personne de déposer sa réclamation auprès du ment applicable qui alimente la colère du citoyen et se
Médiateur de la République via le site Internet. Contraire- retourne in fine contre le législateur. C’est l’exemple du
ment au système de courriel classique, les dossiers reçus dossier médical, théoriquement transmis au demandeur
par ce biais sont presque en totalité de la compétence de sous huit jours, délai qui, en pratique, se révèle impossi-
l’Institution. Le nombre de requêtes a significativement ble à tenir. Faire converger l’objectif législatif et la réalité
augmenté avec ce nouveau mode de saisine. en s’appuyant sur une meilleure évaluation des politiques
publiques doit donc constituer une véritable ambition.
Du point de vue de l’accueil téléphonique, le basculement D’autant que l’inflation législative peut également créer
des lignes téléphoniques du standard, en cas d’affluence, des difficultés d’application des textes, voire générer des
sur l’ensemble des postes téléphoniques des secrétaires situations d’iniquité. La loi doit susciter des espérances,
vise à réduire le nombre d’appels perdus et les attentes pas des illusions.
trop longues. Pour éviter un recul de la qualité du service public, il faut
Ces outils répondent à deux problématiques voisines, qui tirer des enseignements de la fusion ANPE-Unedic et des
revêtent une importance capitale : celle de l’écoute et celle réorganisations du régime des salariés indépendants
de l’accueil. Notre société développe des moyens d’ex- (RSI). Poursuivre cette démarche impose que les acteurs
pression pour chacun, innovation technologique à l’appui. mettent en place des procédés et des moyens afin d’éviter
Mais quelle place accorde-t-elle aujourd’hui à l’écoute ? Il qu’elle ne se traduise pour l’usager par une dégradation
est toujours plus difficile d’écouter que de parler ! Et pour- de la qualité du service et une plus grande complexité. Se
tant, nous sommes en présence de personnes de plus en pose ici la question de l’accompagnement du changement,
plus nombreuses qui ne trouvent nulle oreille attentive à parfaitement clair dans les objectifs mais trop négligé
leur situation et à leur douleur et qui, la frustration aidant, dans sa conduite effective. Réorganiser les services de
sont de plus en plus déterminées à se faire entendre : les l’État est sans doute nécessaire, mais il faut se garder
séquestrations de patrons, cette année en sont une illus- de la précipitation, se donner le temps de la maturation
tration. Je maintiens que notre société, dont le caractère et définir un véritable mode de conduite de l’action. La
anxiogène n’est guère en passe de diminuer, a plus que dimension humaine du changement est par ailleurs trop
jamais besoin de lieux d’écoute et de décompression. souvent ignorée dans le management, tant de l’entreprise
L’accueil est encore aujourd’hui considéré comme une que des services étatiques. Combler cette lacune c’est
fonction mineure dans les organisations du travail. C’est réduire la souffrance. Il faut aussi intégrer le fait que les
pourtant le point d’entrée de l’usager dans l’organisation carrières et les vies ne sont plus linéaires, et adapter les
et dont les deux missions sont déterminantes : écouter et systèmes à ces nouvelles formes de trajectoire.

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Défendre les plus faibles, portants conflits d’intérêts, peine à convaincre de son
promouvoir le respect mutuel impartialité. Il n’est plus perçu comme le recours contre
Dans la perspective de ce changement, l’action du Média- les injustices, parfois accusé d’aggraver ces injustices et
teur de la République se traduit par des propositions de non plus de les corriger. La loi n’apparaît plus comme le
réforme dans plusieurs domaines, avec une ligne direc- bouclier du plus faible contre le plus fort, mais comme
trice claire : attirer l’attention du législateur sur les situa- une nouvelle arme aux mains du plus fort pour asseoir sa
tions injustes et suggérer des solutions pour y remédier. domination contre le plus faible. Le système légal n’étant
C’est ainsi qu’en 2009, il a émis des propositions concer- plus le calque d’un système juste, la tentation est grande
nant le droit des consommateurs, les accidents médicaux, soit de se diriger vers les systèmes illégaux, miroirs aux
les victimes d’essais nucléaires, les autopsies judiciaires, alouettes promettant une autre justice et cachant les pires
l’indemnisation des victimes de l’amiante et le Pacs, avec exploitations, soit de laisser libre cours à sa colère et son
l’idée qu’il faut garantir à chacun une égalité de traite- exaspération contre le système établi, dans les accès de
ment devant la loi. L’année 2010 verra mes services pour- violence que nous ne connaissons désormais que trop
suivre leurs efforts sur les enfants nés sans vie et la rela- bien. Le soupçon est une gangrène pour notre démocra-
tion travail-santé, la maltraitance des patients, mais aussi tie. Lorsque ce soupçon est nourri par les acteurs publics
les violences et incivilités des patients et de leurs proches eux-mêmes, capables de décrédibiliser une institution
envers les professionnels de santé. Le but est d’agir et de entière pour leur seul dessein personnel, lorsque acteurs
valoriser le respect réciproque par un effort de pédagogie locaux et décideurs centraux s’opposent au sujet de la
et d’éducation. décentralisation et ravivent les anciennes querelles, il
De fait, l’année 2009 aura marqué un tournant dans la convient d’appeler à nouveau à la responsabilité de tous
vie de l’Institution. Les collaborations avec la Cour Euro- les acteurs publics. Comment, à partir d’un service public,
péenne des Droits de l’Homme ou le Défenseur des reconstruire des citoyens et restaurer le politique, voilà
enfants nous ont permis de réunir sur plusieurs dossiers, la vraie question ? Je jetterai toutes mes forces dans ce
comme ceux de la kafala ou des mineurs étrangers isolés, chantier en 2010 dans la réalisation de solides partena-
l’ensemble des interlocuteurs concernés dans une totale riats pour que tous oeuvrions dans le même sens et opti-
indépendance, favorisant une approche transversale de misions notre action.
chaque sujet pour mieux en saisir tous les aspects et y Le politique doit (re)faire les preuves de son efficacité
apporter ensemble une solution globale. Le passage au d’abord. Privilégiant la gestion des carrières à l’innovation
Défenseur des droits permettra de mener encore plus et la prise de risque, le respect des procédures au respect
efficacement ce type de démarche. Il marquera aussi une des usagers, le service public a fini par davantage défen-
nouvelle étape dans l’action pour la défense et la promo- dre la pérennité des structures, le confort de système aux
tion des droits de l’Homme. intérêts des administrés. Il s’agit de rompre avec cette
Sur le plan international, l’action s’est poursuivie notam- culture en replaçant au cœur de l’action publique et de son
ment par le renforcement de l’association des médiateurs organisation le citoyen et en encourageant la prise de ris-
francophones, à présent bien installée dans le paysage, que. Sous couvert de principe de précaution, nous avons
et qui va s’ouvrir aux réseaux anglophone et arabophone. fini par entretenir l’illusion d’une société sans risque et
En 2010 se tiendra la quatrième réunion des médiateurs ainsi un certain immobilisme. On ne nous demande pas de
du bassin méditerranéen en Espagne, avec une ambition : garantir le « risque zéro » mais de s’assurer que les fac-
développer le dialogue là où il n’existe plus. Le partenariat teurs de risque ont été pris en compte.
avec l’Arménie dans le cadre de l’appel d’offres européen Le politique doit enfin répondre à cette quête du sens, en
remporté par la France va se renforcer, de même que la s’interrogeant d’abord sur la finalité, l’efficacité et la lisi-
collaboration avec les services de l’Onu afin d’aboutir à bilité de son action et en y associant les citoyens. Le temps
une véritable reconnaissance du rôle des ombudsmans, d’écoute ne produit pas de richesses immédiates mais il
dont le Médiateur de la République, devenu Défenseur des produit du sens.
droits, fera alors partie. Aider les décideurs politiques à garder du recul et à pren-
dre le temps de la réflexion, concilier l’impatience de
Restaurer la confiance l’opinion et la qualité de la décision : autant d’exigences
et redonner du sens à l’action publique auxquelles une autorité forte et indépendante peut aider
Le doute exprimé par nos concitoyens envers leurs insti- à satisfaire. Plus globalement, il s’agit de trouver, dans le
tutions appelle une réponse forte. nouveau rapport qui émerge entre le collectif et l’individu,
L’excellence et l’exemplarité de l’action publique et des un espace d’équilibre entre l’autorité légale et le respect
acteurs publics, sur les bases de l’éthique et de la transpa- de la personne. Dans ce contexte, le passage du Médiateur
rence, sont les seuls moyens de regagner cette confiance de la République au Défenseur des droits arrive à point
qui fait aujourd’hui tant défaut. Le politique, au cœur d’im- nommé. K E

médiateur de la république 5
focus

La Médiation s’élargit au secteur de la santé

Créé début 2009, le Pôle Santé et Sécurité des Soins (P3S) parachève le champ
de compétences de l’Institution. Saisi notamment sur des difficultés d’accès au droit,
des défauts de soins et des conflits consécutifs à des aléas ou des fautes thérapeutiques,
il exerce sa mission dans un climat nouveau de méfiance entre une opinion en demande
de transparence et un monde médical sous pression.

La loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à ticulier, a valeur pédagogique pour les professionnels : elle
la qualité du système de santé a certes marqué une avan- ne cherche pas à désigner un coupable, mais à permettre
cée significative pour les droits du malade, notamment en une exploitation positive de l’erreur.
instaurant les Commissions des relations avec les usagers
et de la qualité de la prise en charge (CRUQPC). Celles ci La « judiciarisation » croissante des conflits
permettent en effet aux usagers des établissements de Dans ce nouveau cadre, quelles grandes tendances se
santé de rencontrer les personnels médicaux en présence dégagent de l’activité du Médiateur de la République en
d’un médecin médiateur afin de les aider à trouver des matière de santé ? En premier lieu, l’amplification d’un phé-
solutions aux problèmes rencontrés. Dans les faits, cepen- nomène déjà constaté auparavant : l’accroissement des
dant, ces usagers en situation de blocage ignorent souvent demandes d’information concernant l’accès au droit des
la manière de saisir cet interlocuteur, voire son existence usagers et, plus généralement, une exigence plus grande
même. Fort de son expérience sur d’autres terrains de de transparence. En regard de ce comportement nouveau,
conflits potentiels, le Médiateur de la République offre aux les professionnels de santé manifestent parfois une ten-
réclamants, depuis un an, un lieu d’écoute et d’information, dance à la rétention d’informations et au repli.
et à tous les acteurs de la santé des moyens de renouer le Ce phénomène va de pair avec une autre grande tendance,
dialogue là où il était rompu. la « judiciarisation » croissante des conflits. Les personnes
Les missions du Pôle Santé et Sécurité des Soins ne s’arrê- qui s’estiment victimes d’une erreur ou d’un dysfonctionne-
tent pas là. Son rôle de médiation dans des dossiers liés à un ment dont elles ont à souffrir sont de plus en plus tentées
préjudice susceptible d’entraîner des poursuites disciplinai- de porter l’affaire devant les tribunaux, parfois pour obtenir
res ou d’engager une responsabilité pénale, civile ou admi- non seulement réparation, mais une sanction pénale, admi-
nistrative fait de lui un observateur privilégié d’événements nistrative ou civile à l’égard de la personne ou de l’établis-
indésirables graves. Il était donc logique de lui confier une sement estimé fautif. Certes, le phénomène, à l’étranger
mission d’alerte de l’autorité sanitaire. C’est ce qui a été fait d’ailleurs aussi bien qu’en France, dépasse largement le
par le biais de partenariats avec le ministère de la Santé, la cadre des questions de santé : on sait que d’une manière
Haute Autorité de santé, l’Institut de veille sanitaire, l’Afssaps générale, les conflits se règlent de plus en plus dans les
(Agence française de sécurité sanitaire et de produits de prétoires. Le fait est même plus net dans d’autres domai-
santé), le Conseil de l’ordre des médecins et même l’Autorité nes, car le nombre de procès intentés à des médecins est
de sûreté nucléaire. Il s’agit du seul système en Europe qui régulièrement surestimé par le corps médical lui-même.
permette d’assurer, au travers d’un recoupement systémati- Mais il entraîne ici une conséquence grave : il entretient et
que des informations, une veille sanitaire par l’intermédiaire amplifie les situations de blocage. Les professionnels de
des usagers du service de santé. Dans cet esprit, le Pôle santé sont d’autant plus tentés d’opposer le secret, à tout
Santé et Sécurité des Soins cherche à promouvoir un signa- le moins de retenir certaines informations, qu’ils redoutent
lement plus systématique des incidents médicaux, condition des suites judiciaires. À l’occasion de tout acte médical pèse
indispensable à l’identification des dysfonctionnements et à désormais sur les professionnels de santé la peur du pro-
l’amélioration des pratiques. La médiation physique, en par- cès, qui encourage la tentation du repli.

6 rapport annuel 2009


Médiatisation des « affaires » Le défi de la maltraitance ordinaire
et rôle pervers de l’information en ligne Enfin, on ne s’étonnera pas d’apprendre que les recours au
Lorsqu’il y a eu décès d’un patient ou complications graves, Médiateur de la République sont d’autant plus nombreux, et
le médecin justifie souvent son silence par la crainte de ne portent sur des dossiers d’autant plus lourds, que le per-
pas se faire comprendre s’il s’exprime en termes techni- sonnel de santé est sous pression. C’est particulièrement
ques. Mais ce silence, cette rétention d’informations, sont le cas dans les services d’urgences, qui doivent faire face
très mal vécus par la victime ou ses proches, qui réclament à des demandes toujours plus nombreuses, et d’ailleurs
la transparence. Dans le cas d’une personne décédée, la pas toujours fondées médicalement. Le risque d’une
famille ne se contente pas d’une explication en quelques vigilance prise en défaut, d’une mauvaise évaluation de
lignes mais exige la communication de la totalité du dossier, l’urgence ou d’une erreur de diagnostic est d’autant plus
alors que le chirurgien ou l’établissement concerné discute grand. De surcroît, on comprend bien que le droit à l’infor-
le caractère « communicable » des différents éléments. mation préalable du patient en cas d’opération ne puisse
L’attitude hostile des proches se nourrit de ce refus de don- être aussi bien assuré dans le cas d’une intervention d’ur-
ner l’information, refus qui est parfois considéré comme gence. Les conflits dont le Médiateur est saisi trouvent sou-
plus grave que l’erreur médicale elle-même. Ainsi se déve- vent leur origine dans cette pression.
loppe une spirale de l’incompréhension qui débouche sur On en trouve aussi une conséquence dans un autre phéno-
des situations de blocage total. Seule une médiation impar- mène, que le Pôle Santé et Sécurité des Soins du Médiateur
tiale, qui commence par un examen approfondi du dossier considère comme un défi majeur à relever : ce que l’on peut
médical, peut alors permettre de renouer le dialogue. appeler la maltraitance ordinaire dans les établissements
Ces situations de blocage sont amplifiées par deux phéno- de santé. Sur l’ensemble des 4 795 requêtes des usagers
mènes. Le premier est la médiatisation d’« affaires » médi- du système de santé instruites, près de 8 % faisaient état
cales qui amènent l’opinion publique à réagir avec excès : directement d’un fait de maltraitance « ordinaire ». Qu’il
sans remonter jusqu’à celle du sang contaminé ou de l’hor- s’agisse de déficits en matière d’hygiène, d’une prise en
mone de croissance, on se souvient de l’impact qu’ont eu compte insuffisante de la douleur ou des caractéristiques
dans l’opinion le décès d’un petit garçon à l’hôpital à la suite du patient – âge, handicap, isolement, vulnérabilité –, ces
d’une erreur d’ampoule et plusieurs incidents en radiothé- faits ne sont pas toujours à mettre sur le compte d’un défaut
rapie. Précisément, la création du P3S s’est trouvée surve- d’action des professionnels ; ils s’aggravent parfois du fait
nir au milieu de plusieurs de ces « affaires », donc en pleine que le patient est accueilli dans un service inadapté. De
crise de confiance vis-à-vis du monde médical. L’autre phé- telles situations entraînent aussi une souffrance pour celui
nomène qui apparaît manifestement au Médiateur de la qui en est témoin et rendent encore moins supportable le
République est l’influence des multiples sources d’informa- stress au travail. Cette pression vient alors s’ajouter à celle
tions qu’Internet met à la disposition du grand public. Des que subissent parfois les professionnels de santé de la
usagers mal informés, parfois sur la foi de « posts » publiés part des patients ou de leurs proches : incivilités, menaces,
sur des forums sans aucun contrôle scientifique, opposent intimidations, humiliations, violences verbales, voire physi-
au corps médical des certitudes fondées sur des éléments ques. Le rôle du Médiateur, qui dans un cas sur cinq est saisi
de connaissance parcellaires, inadaptés à la situation ou par les professionnels de santé eux-mêmes – notamment
mal interprétés. sur les questions de maltraitance –, est aussi de prendre
Intervenant dans un tel climat de tension, le Médiateur de soin des soignants, sans les stigmatiser, et de promouvoir
la République doit d’abord clarifier la situation en faisant avec leur concours une politique de « bientraitance ». K
la distinction entre trois événements possibles : compli-
cation médicale (due à l’état de santé antérieur du patient),
aléa thérapeutique et accident médical fautif. La tâche, qui
suppose un examen approfondi du dossier et l’écoute des
personnels mis en cause, est rendue plus difficile par une
compréhension paradoxale des aléas médicaux de la part
des réclamants : collectivement, les gens comprennent que
le risque zéro n’existe pas, mais ne l’admettent pas indivi-
duellement. À cet égard, la loi de mars 2002, qui a reconnu
l’aléa et la réparation, n’a pas toujours été bien comprise.

médiateur de la république 7
l’ année en chiffres

Les résultats globaux de l’Institution

En 2009, le nombre d’affaires transmises au Médiateur de la République, services centraux


et délégués, a augmenté de 16 % par rapport à 2008, avec un total de 76 286 affaires reçues.
Les demandes d’informations et d’orientation auprès des délégués ont progressé de 7,5 %
par rapport à l’année précédente. L’Institution a traité 43  481 réclamations dont 13  222
via les services centraux du Médiateur de la République, à Paris.

Saisine directe

Traitées par
les services centraux
(siège de l’Institution)
Nombre d’affaires 11 897
reçues
Réclamations
13 222 (+  88  %)
par l’ensemble (+  84,3 %)
de l’Institution
Saisine indirecte
Traitées par
les délégués 1 625
43 481
(échelon de proximité)
(+  12  %)

(+  24,2 %)

Demandes 30 259
d’informations (+  8,7 %)
et d’orientation
(traitées par les délégués du
Médiateur de la République)

76 286
(+  16,2 %)
32 805
(+  7,5 %)

8 rapport annuel 2009


L’activité des services centraux
• Environ 15 497 appels
Nombre de réclamations reçues téléphoniques au standard
13 222 de l’Institutition
1 669 formulaires web
depuis le 01/09/09
2 387 courriels
• 2 387 courriels de réclamation
13 222
7 176
6 948
6 716
et 1 669
1 669 formulaires
formulaires web
depuis le 01/09/09
web
Services centraux 13 222
9 166 dont 2 387 courriels
2 723 de Pôle Santé 7 176 formulaires web
• 2 8061 669appels
depuis leau centre
6 Sécurité
et 948 des Soins 01/09/09
6 716
d’appel du
7 176
2 387 Pôle
courriels
Services Santé
centraux
6 948 9 166 dont
2006 2007 2008 2009
6 716 et Sécurité 2 723des
et
de PôleSoins
Sécurité
Services
Santé
des Soins
centraux
9 166 dont
2 723 de Pôle Santé
L’évolution du nombre de dossiers traités
2006 par l’institution
2007 2008 mérite
2009desetcommentaires
Sécurité des Soins importants

Le nombre de saisines « papier » est Ensuite, l’évolution du nombre de De même, cette demande potentielle
resté globalement stable d’une année 2006
dossiers 2007
est 2008du rattache-
le résultat 2009 se transforme en demande réelle
sur l’autre. Mais dans le même temps ment du Pôle Santé et Sécurité des à partir du moment où l’institution
tout au long des sept premiers mois Soins au Médiateur depuis le 1er jan- et son réseau de proximité sont de
de l’année, le nombre de dossiers vier 2009. mieux en mieux connus.
transmis par courriels (des deman-
des souvent laconiques ou des dos- Au-delà de ces commentaires « tech- Il convient cependant de regretter
siers incomplets) n’a cessé d’aug- niques », il convient de noter que la qu’un certain nombre d’organismes
menter. Le Médiateur a donc mis en demande potentielle à l’égard de de proximité qui pourraient être à
place à partir de septembre 2009 le l’institution ne peut que croître pour même de répondre, d’orienter, voire
« formulaire » de saisine préformaté, des raisons de complexité croissante de traiter une partie des demandes
qui a remplacé le courriel. du système administratif d’un coté et ou des petites difficultés des usagers
d’une précarité croissante de l’autre. ne jouent plus leur rôle.

7%
Taux de réussite des médiations 13 222
1 669 formulaires web
depuis le 01/09/09
16 % 7 %Médiations réussies 2 387 courriels
84 % 2009
93 % 7 176
6 948
Médiations non réussies
16 % 7% 6 716
Services centraux
9 166 dont Médiations réussies
2008 2009
84 % 93 % 2 723 de Pôle Santé
et Sécurité des Soins
Médiations non réussies
Médiations réussies
2008 2009
84 % 2006 2007
93 % 2009
2008 Médiations non réussies
8%
24,1 % 47 %
Justice
7%
Répartition
11,5 % des dossiers clos par domaines d’intervention
8 %Social
24,1 %
2009 Affaires générales
47 %
13,5 % 7 % Justice
11,5 % 8 %Agents publics - pensions
18,317,5
% % 24,1 % 47 % Social
2008 Fiscal
2009 Justice
17,5 % 14,3 % 13,57%% Affaires générales
Pôle Santé et Sécurité des Soins Social
10,2
18,3% % Agents publics - pensions
2008 2009 Affaires générales
28,6 % 13,5 % Fiscal

18,3 % 14,3 % Agents publics - pensions


Pôle Santé et Sécurité des Soins
Demandes 10,2 %
relatives
17 % 28,6 % 17 % à un service public, dont : Fiscal
25 % 14,3 % Pôle Santé et Sécurité des Soins
Justice
10,2 %
Social Demandes relatives
17 % 17 % à un service public, dont :
25 % 2009 25médiateur
% de laAffaires générales
république Justice 9
31 % 33 % Demandes relatives
11 % 17 % Agents17 % - pensions
publics à un service
Social public, dont :
2008 2009
16 % 84 % 7% 93 % Médiations non réussies

l’année
11,5 % en chiffres 8 %
16 % 24,1 % 7% 47 % Médiations réussies
2008 2009 Justice
84 % 7% 93 % Médiations non réussies
17,5 % Social
11,5 % 2008
2008 8 % 2009
2009
Médiations réussies
Affaires générales
24,1
84%% 13,5 % 4793
%%
Médiations non réussies
Justicepublics
Agents - pensions
18,3 % 7%
17,5 % %
28,6 Social
L’ activité des délégués Fiscal
2008 14,3 % 2009 Affaires générales
11,5 % 13,5 % 8 % 10,2 % Pôle Santé et Sécurité des Soins
24,1 % 47 % 13 222 Agents publics - pensions
18,3 % Justice web
Information – domaines concernés 7 % 1 669 formulaires
17,528,6 %% Fiscal
%11,5 14,3 8%% depuis le 01/09/09
Social
Demandes relatives
2008 17 % 24,1 % 17 %
200910,2 47 %
% 7 176 2 387 Pôle
courriels
à
Santé et Sécurité des Soins
un service public, dont :
Affaires
Justice générales
25 % 13,5725
% %
% 6 948 Justice
17,5 % 18,3 % 6 716 Agents publics - pensions
Social
Services centraux
Social
28,6 % 2008 2009 9 166 dontAffaires
Fiscal générales
2008 17 % 13,5 %
14,3 % 2009 17% 33 % 2 723 Demandes
de Pôle relatives
Santé
Affaires
à unSanté
service générales
31 % et Sécurité
Pôle etpublic,
des Soins
Sécuritédont
des: Soins
25
12 % % 18,3 % 25
11 % % 10,2 % Agents publics - pensions
Justicepublics - pensions
Agents
28,6 % 4 %%2006 2007 2008 2009
Fiscal
Social
4% 14,3 Fiscal
2008 75 % 10,2 % 75 %
2009
Pôle Santé et Sécurité des Soins
Affaires générales
36 % 17 % 35 % 17 % Affaires
Demandes d’ordre privé
relatives
31 % 33 % à un service public, dont :
12 % 11 %
25 % 25 % Agents publics - pensions
Justice
4 %11 % 4 %10 % Fiscal
11 % 10 % Demandes
Socialrelatives
75 %
17 % 17 % 75 %
3 %
25 %Réclamations 3 %
25 %
36 % – répartition par domaines 35 %
àAffaires
un service public,
Justice + d’ordre
étrangers
dont :
privé
2008 d’intervention
2009 Affaires
Justice générales
31 % 33 % Social
12 % 11 % Agents publics - pensions
Social
4%
11 %2008 11 % 4% 10 %2009 10 % Affaires générales + urbanisme
Fiscal générales
2008 34 2009
%%% 39%%%
Affaires
3% 75
31 3% 75
33 Justicepublics
Agents + étrangers
- pensions
12 % 36 % 11 % 35 % Affaires d’ordre
Agents privé- pensions
publics
Social
Fiscal
414%
% 384%
% Fiscal
Affaires générales + urbanisme
2008
11 % 36 75 % 2009
10 % 35 75 %
% 11 % 34 % % 10 % 39 % Affaires d’ordre privé
Agents publics - pensions
3% 3% Justice + étrangers
Fiscal
41 %116%
% 6%
38 %10 % Social
3% 11 % 3% 10 % Dossiers instruits
3%
5% 2008 3%
5% 2009 Affaires+générales
étrangers+ urbanisme
Justicetransmissions
Autres
34 % 39 %
71 % 71 % Agents
Social publics - pensions
Réclamations non justifiées
12% 6%2008
12% 6%2009 Fiscal
3%
41 % 16 %
2008 38 %3 % 2009 7% Affaires générales
instruits + urbanisme
Abandons/désistements
Dossiers
35% 34 %
% Réclamations – suites données 35%
% 39 % Transmission
Agents
Autrespublicsau- pensions
siège
transmissions
(compétence du siège)
71 % 71 % Fiscal
Rejet sans suitenon justifiées
Réclamations
12%41 % 38 %
12% (hors compétence)
Médiations réussies
6 %2008 2008
84 % 6 %2009 2009 93 % Abandons/désistements
3% 3 % 3% 3 % Dossiers instruits
TransmissionMédiations
au siège non réussies
5% 5% (compétence
Autres du siège)
transmissions
19,65 %6 % 71 % 17,65 % 6% 71 %
Rejet sans suite
(hors compétence)
Réclamations non justifiées
12% 3 % 2008
12% 3%
2009
Dossiers instruits
5% 5% Abandons/désistements
Autres transmissions
3% 71 % 3% 71 %
Médiations
Transmissionréussies
au siège
Réclamations
(compétence du non justifiées
siège)
12%19,65 % 11,5
2008
2008 % 80,35 % 12%17,65 % 20098 %
2009 82,35 % Médiations non réussies
Rejet sans suite
24,1 % 47 % Abandons/désistements
(hors compétence)
3% 3% 7%
TransmissionJustice
au siège
(compétence du siège)
Médiations réussies
17,5 % Social
Rejet sans suite
2008 2008 80,35 % 2009 2009 82,35 %
Médiations
(hors non réussies
compétence)
19,65 % 17,65 % %
13,5 Affaires générales
Réclamations – taux de réussite des délégués
Agents publics - pensions
18,3 %
19,65 %28,6 % 17,65 % Fiscal
Médiations réussies
2008
14,3
2009
% Médiations non réussies
Pôle Santé et Sécurité des Soins
80,35 % 82,35
10,2 %%
Médiations réussies
2008 2009 Médiations non réussies
80,35 % 82,35 % Demandes relatives
17 % 17 % à un service public, dont :
25 % 25 % Justice

Social

2008 2009 Affaires générales


31 % 33 %
10 12 % 11 % annuel 2009
rapport Agents publics - pensions

4% 4% Fiscal
tableau des réformes

LES PROPOSITIONS DE RÉFORME satisfaiteS en 2009

Objet Date de clôture

Condition d’inactivité pour percevoir l’AAH (allocation aux adultes handicapés) 07/01/2009
Remboursement anticipé des créances de carry back 23/01/2009
Instauration d’un recours juridictionnel pour les prises de position formelles 23/01/2009
de l’administration fiscale
Reconnaissance en France des unions civiles étrangères 04/06/2009
Satisfaction partielle

Assurance maladie coordination RSI et régime général Sécurité sociale 16/06/2009


Insaisissabilité de la majoration de pension au titre de l’assistance tierce personne 25/06/2009
Automaticité de l’application du solde bancaire insaisissable (SBI) 25/06/2009
Possibilité de conclure un Pacs en Nouvelle Calédonie et Wallis et Futuna 27/07/2009
Procédures disciplinaires applicables aux médecins du service public 19/08/2009
Exonération de la redevance audiovisuelle des téléviseurs loués par les détenus 19/08/2009
Reclassement en catégorie A de fonctionnaires de l’État de catégorie B 18/09/2009
Satisfaction partielle

Extension du bénéfice du capital décès au partenaire lié à un fonctionnaire 07/12/09


par un pacte civil de solidarité

LES PROPOSITIONS DE RéFORME ayant ABOUTI au DÉBUT DE L’ANNÉE 2010

Objet Date de clôture

Création d’un dispositif d’indemnisation des victimes des essais nucléaires français 05/01/2010
Reconnaissance en France des unions civiles étrangères 13/01/2010
Entrée en application définitive

LES PROPOSITIONS DE RéFORME non satisfaites en 2009

Objet Date de clôture

Accès aux derniers indices pour les professeurs de collège 04/06/2009


Validation des périodes d’invalidité au titre de la retraite proportionnelle des non salariés agricoles 25/06/2009
Pension des commandants de sapeurs-pompiers professionnels 28/07/2009
Application automatique de la technique du quotient pour les revenus différés 07/12/2009
Départ anticipé à la retraite de certains fonctionnaires handicapés 07/12/2009
Intégration d’anciens élèves du cycle international de l’Ena 07/12/2009

médiateur de la république 11
bloc-notes

p. 14 p. 49 p. 68
Fiabilité et clarté Mieux protéger Prévenir la maltraitance
de l’information : les consommateurs des personnes vulnérables
le point de blocage Le Médiateur se mobilise depuis dans le milieu médical
pour les citoyens face cinq ans sur la problématique du cré- Ce que l’on peut appeler la mal-
à l’administration dit à la consommation. traitance ordinaire est à placer au
De nombreuses demandent qui par- rang des grandes menaces de notre
viennent au Médiateur ou à ses délé- p. 52 société. Non seulement le Médiateur
gués auraient pu être évitées si les Pacs, améliorer observe une croissance des problè-
services administratifs concernés le dispositif mes liés à ces actes, mais les trouve
avaient joué leur rôle et apporté des Alors que l’on célébrait cette année sous-jacents à de nombreux dossiers
réponses concrètes. les 10 ans du Pacs, les imperfections qu’il traite.
de ce système appellent des modi-
p. 24 fications, notamment au regard de p. 71
Le régime social l’amélioration des droits sociaux. L’expertise
des indépendants de l’Institution sollicitée
en question p. 55 au plan international
Le régime social des indépendants Les expertises médicales Le Médiateur, en association avec le
(RSI), né de la fusion de deux régi- judiciaires Défenseur du peuple de l’Espagne,
mes, illustre bien les difficultés inhé- La qualité des expertises médicales a été choisi par la Commission euro-
rentes aux démarches de simplifi- judiciaires, dans un cadre conten- péenne pour mettre en œuvre un
cation d’une organisation complexe. tieux, fait l’objet de critiques récur- jumelage institutionnel au profit de
Il assure, depuis le 1er janvier 2008, rentes qui mettent en cause à la fois l’Arménie.
une mission d’interlocuteur social la crédibilité de la justice et celle de
unique pour l’ensemble de la protec- la médecine. p. 75
tion sociale des artisans, des indus- Le Défenseur des droits,
triels et des commerçants. p. 67 un ombudsman
L’amélioration à la française
p. 35 de la protection Plusieurs rapports parlementaires
Prudence exagérée des mineurs – la kafala avaient formulé le souhait de voir un
lors du renouvellement Modalité spécifique de recueil d’un certain nombre d’autorités indépen-
des papiers d’identité enfant en droit musulman, la kafala dantes mutualiser davantage leur
La prudence exagérée de l’adminis- est assimilé en droit français à une action. C’est dans ce contexte que la
tration dans la délivrance des papiers délégation parentale. Cependant la révision constitutionnelle de juillet
d’identité des Français nés à l’étran- perception juridique de la kafala en 2008 a crée un Défenseur des droits.
ger, ou dont l’un des parents est né à France et les textes en vigueur posent
l’étranger, est très mal vécue par les de multiples obstacles à la demande p. 78
intéressés. Le Médiateur est inter- des familles françaises ou binationa- Portrait de l’Institution,
venu. les qui accueillent ces enfants. des agents et des délégués
Les domaines de compétence ont été
élargis et la capacité d’écoute ren-
forcée.

12 rapport annuel 2009


L’USAGER ET L’ÉTAT FACE À LA CRISE

Si l’épicentre de la crise que nous avons connue cette année est à situer
dans la sphère financière et économique, l’onde de choc a quelque
peu secoué la sphère publique, par ailleurs relativement épargnée.
La crise joue alors le rôle de révélateur de difficultés latentes dans
la relation qu’entretiennent les usagers avec leur administration, tan-
tôt invisibles car profondément enfouies, tantôt visibles mais copieu-
sement ignorées. Sont alors pointés du doigt la lutte pour obtenir des
informations claires, rapides et fiables au même titre que le déficit
d’accompagnement lorsque le monde autour change brutalement,
notamment lorsque les institutions et la législation elles-mêmes
changent. La crise, rendant tangibles ces problèmes, les rend plus
insupportables : on observe alors la tension monter chez les protago-
nistes, jusqu’au point de blocage et parfois d’affrontement.

•••

Citoyen-administration : la grande incompréhension p. 14


FIABILITÉ ET CLARTÉ DE L’INFORMATION : LE POINT DE BLOCAGE
POUR LES CITOYENS FACE À L’ADMINISTRATION p. 14
DES ADMINISTRATIONS EN MAL DE REPÈRES p. 19

Le citoyen seul face à un cadre mouvant et insécurisant p. 23


UNE INFLATION LÉGISLATIVE QUI CONTRIBUE À L’INSTABILITÉ DE LA NORME p. 23
UNE RATIONALISATION SOURCE DE DYSFONCTIONNEMENTS p. 24
LES DOMMAGES COLLATÉRAUX DE L’OUVERTURE À LA CONCURRENCE
DU SECTEUR DE L’ÉNERGIE p. 24
LES CONSÉQUENCES PRATIQUES DE LA RÉORGANISATION
DES SERVICES DÉCONCENTRÉS DE L’ÉTAT p. 25
DES DOSSIERS « polymorphes » p. 26

De nouveaux liens marqués par la défiance et la suspicion p. 31


PAS DE « PRÉSoMPTION D’INNOCENCE » POUR L’ADMINISTRÉ p. 31
DES RÉPONSES DE PLUS EN PLUS VIOlENTES DE PART ET D’AUTRE p. 34

médiateur de la république 13
L’USAGER ET L’éTaT FACE À LA CRISE

Citoyen-administration : la grande incompréhension


Que ce soit entre elles ou en direction de leurs publics, les administrations éprouvent de nombreuses
difficultés à offrir une communication efficace et harmonieuse. En résulte bien souvent pour le citoyen
une absence de réponse à ses demandes ou des explications insuffisantes, voire contradictoires.
Face à ce qu’il perçoit comme un mépris à son égard, l’usager éprouve de surcroît le sentiment d’être
ballotté et même malmené par des services administratifs dont les comportements lui apparaissent
désinvoltes. D’un côté comme de l’autre, ce type de situation est générateur de fortes insatisfactions,
de stress et de tensions.

Fiabilité et clarté de l’information :


le point de blocage pour les citoyens face à l’administration

C’est un sentiment diffus que les En témoigne le cas de Madame C., Sur le terrain, un peu plus de 50 %
citoyens sont de plus en plus nom- masseur-kinésithérapeute, qui lors des 62 000 demandes traitées par
breux à ressentir, dans un éventail d’une visite à domicile, a laissé son les délégués du Médiateur de la
de situations large, et plus spécia- véhicule sur un emplacement « livrai- République ne sont pas des récla-
lement lorsqu’ils ont affaire à la son », croyant que sa qualité d’auxiliaire mations envers les services publics,
puissance publique : celui d’être médicale l’y autorisait. Elle a été verba- telles que les définit la loi de 1973,
face à un vertigineux empilement lisée et a acquitté sa contravention. Elle mais des besoins d’éclaircissement
de lois et de règlements, dont ils a ensuite saisi le Médiateur de la Répu- de la part de personnes perdues
n’arrivent à savoir qu’avec diffi- blique, non pour contester l’amende dans la complexité des procédures
culté lesquels s’appliquent à leur mais, ne sachant où se renseigner, pour ou qui ont le sentiment de ne pas
situation particulière. Au travers être informée des conditions dans les- avoir été accueillies et écoutées.
des dossiers qu’ils examinent, les quelles les auxiliaires médicaux pou- Ces administrés entrent en contact
services du Médiateur de la Répu- vaient stationner à Paris lors de leurs avec le réseau de délégués de l’Ins-
blique constatent très souvent visites à domicile. Le Médiateur de la titution parce qu’ils ne savent plus
que, devant cette impénétrable République l’a informée de la création à qui s’adresser ou n’ont pas obtenu
nébuleuse normative, les citoyens par le conseil de Paris de la carte de les réponses souhaitées par les ser-
sont avant tout demandeurs d’in- stationnement « Sésame soins à domi- vices administratifs concernés. Une
formations, d’un guide les aidant à cile » pour les professionnels de santé grande partie de l’activité du réseau
trouver leur chemin dans la masse intervenant dans la capitale. Il lui a pré- consiste donc à écouter ces person-
des textes et d’un mode d’emploi cisé le coût de la carte, les possibilités nes, à leur expliquer les démarches
leur permettant de déterminer où de stationnement offertes par celle-ci à accomplir, à les informer de leurs
trouver le renseignement qui leur ainsi que le lieu et modalités d’obten- droits et à les réorienter. De nom-
sera utile. tion de ce document. breuses demandes qui parviennent

14 rapport annuel 2009


aux délégués auraient pu être évi-
tées si les services concernés avaient
apporté des réponses concrètes. Dans
ces cas, l’Institution donne simplement
aux administrés les outils nécessaires
pour débloquer leur situation et rede-
venir maîtres de leurs démarches.
Quand il s’agit d’informer une vic-
time des suites données par la justice
à son dépôt de plainte, l’intervention
du délégué permet d’atténuer le
sentiment d’injustice, qui augmente
devant la lenteur et le silence de la
justice.

Monsieur J. a été victime en août


2007 d’une chute de vélo occasionnée
par un chien non tenu en laisse. Devant
le refus de la propriétaire de l’animal
de donner les coordonnées de son
assurance pour le remboursement
des dégâts sur son cycle (plus de 1 000 Médiateur de la Répu­blique a donc Le Médiateur a expliqué à Mon-
euros), il dépose une plainte. La gen- pour rôle de clarifier et rendre plus sieur L., agent de la fonction publique
darmerie qui instruit cette affaire n’a lisibles les textes et décisions qui le territoriale, qu’il était dans une situa-
pas réglé le dossier un an plus tard. concernent. tion différente de celle des salariés
Monsieur J. demande au délégué de uniquement indemnisés par la Sécu-
l’aider. Ce dernier contacte la gendar- Monsieur L., sapeur-pompier pro- rité sociale pour lesquels la loi fiscale
merie et il apprend que la procédure fessionnel, a été victime d’un acci- prévoyait expressément une exonéra-
a été transmise en avril 2008 à la jus- dent du travail entraînant un arrêt tion avant la loi de finances pour 2010.
tice en vue de l’engagement de pour- de plusieurs mois. Il a interrogé son
suites. Un appel au ministère public centre des impôts sur le régime fis- Le besoin d’informations du contri-
confirme que la plainte sera évoquée cal applicable aux indemnités jour- buable ne répond pas seulement à la
à une audience du tribunal… en 2009. nalières perçues à ce titre. Dans complexité des textes, mais aussi à
un premier temps, on lui a répondu son besoin de sécurité. En effet, le
Le besoin d’informations du citoyen que ces indemnités n’étaient pas système fiscal français, parce qu’il
est particulièrement net, et légitime, imposables puis, dans un second repose en grande partie sur le prin-
dans une matière complexe comme temps, le service des impôts lui a cipe de la déclaration contrôlée, qui
la fiscalité. Il est d’autant plus grand affirmé l’inverse. Il a alors consulté comporte ultérieurement la possibi-
qu’il part d’une profonde incompré- un autre centre des impôts qui lui a lité de rectifications, suppose que le
hension car, il faut bien le dire, dans confirmé le caractère non imposa- contribuable soit entouré de garan-
la plupart des cas soumis au Média- ble de ces sommes. Il a également ties. Sachant exactement quels sont
teur de la République, le contribua- saisi le conciliateur fiscal de son ses droits et obligations, il doit pou-
ble ne comprend pas son dossier. département, qui lui a précisé que voir être sûr du bien-fondé de la posi-
À cette complexité fiscale répondent le traitement alloué aux fonctionnai- tion adoptée par l’administration fis-
deux nécessités : un besoin de péda- res atteints de maladie devrait être cale. C’est à cette condition qu’il peut
gogie et un besoin de garanties. considéré dans sa totalité comme un prévenir tout risque de contentieux.
Il faut cependant nuancer en gardant revenu imposable. C’est particulièrement vrai lorsqu’il
à l’esprit que pour une part, cette Ces réponses contradictoires, source s’agit d’une entreprise qui a un projet
complexité est le corollaire de la jus- d’insécurité juridique pour le récla- d’investissement, ou d’un profession-
tice et de l’équité fiscales : pour assu- mant, l’ont conduit à solliciter le nel libéral qui installe un cabinet.
rer l’égalité de tous devant l’impôt, la Médiateur de la République afin d’ob- S’il est nécessaire au contribua-
loi est souvent obligée d’entrer dans tenir une explication sur l’existence ble de s’entourer de garanties pour
le détail de nombreux cas et s’efforce des différents régimes fiscaux appli- prévenir tout contentieux avec l’ad-
de prévoir toutes les situations pos- cables aux indemnités journalières ministration fiscale, il lui est tout
sibles. Vis-à-vis du contribuable, le d’accident du travail. autant indispensable de comprendre OOO

médiateur de la république 15
l’usager et l’état face à la crise
citoyen-administration : la grande incompréhension

OOO pourquoi un redressement lui est que celui de satisfaire le besoin réel Ayant souvent créé une activité
éventuellement appliqué. Or, sur ce d’informations du contribuable. Le indépendante ou libérale sans avoir
point, dont l’application peut paraî- Médiateur de la République a alors un compris tous les modes de calcul,
tre évidente, il reste des progrès à rôle important, puisqu’il peut deman- ils sont désorientés par les cotisa-
accomplir : malgré la loi du 11 juillet der à l’administration de motiver plus tions variables, les calculs sur des
1979 sur la motivation des actes précisément sa décision. bases forfaitaires avec régularisa-
administratifs, en l’espèce l’article tion a posteriori. Finissant par ne
L. 57 du Livre des procédures fisca- Le citoyen perdu dans plus rien comprendre à ce qui leur
les, le contribuable n’est pas toujours le labyrinthe des cotisations est demandé, ils ne gardent au fond
en situation de bien comprendre et Dès que l’on touche au domaine qu’un sentiment d’injustice face aux
de faire valoir ses droits. Souvent, social, on ne compte plus les assu- injonctions qui leur sont faites.
l’administration respecte la lettre rés qui se plaignent de ne pas com- Derrière de nombreuses réclamations
de la loi, mais se borne à des motiva- prendre les modes de calcul des adressées au Médiateur de la Républi-
tions techniques, parfois laconiques, cotisations qu’on leur réclame. Les que se cachent des drames humains,
parfois au contraire surabondantes, explications qui leur sont données, comme ceux de familles se retrouvant
voire purement formelles. Il arrive quand ils parviennent à en obtenir, sans indemnisation pendant l’étude
même dans certains cas que cette sont nettement insuffisantes et les de leur dossier, à l’instar de Monsieur
motivation soit tellement imprécise conduisent bien souvent à saisir le et Madame X., en situation de grande
que l’on puisse l’assimiler à un défaut Médiateur de la République pour les précarité financière, qui ont déposé
de motivation. aider à interpréter correctement les une demande de revenu de solidarité
Lorsque ces réclamations sont recon- demandes des organismes sociaux. active (RSA) auprès d’une caisse d’al-
nues fondées, on constate davantage Les affiliés au Régime social des locations familiales (Caf).
le souci de l’administration de répon- indépendants (RSI) sont particu-
dre aux exigences qui lui sont impo- lièrement nombreux à se perdre Ce couple, dont les revenus attei-
sées par la loi et la jurisprudence dans les subtilités de leur régime. gnaient à peine 300 euros par mois,
était sur le point de se voir couper
l’eau et l’électricité dans les plus brefs
délais, faute de pouvoir honorer ses
factures. En effet, depuis la fin de
contrat de Monsieur X., deux mois
s’étaient écoulés pour l’instruction
de son dossier de chômage auprès de
la division chômage de l’armée. Vu la
situation du couple X., les services du
Médiateur de la République ont traité
son dossier en cellule d’urgence. Ils
se sont rapprochés de la division pour
une prise de contact auprès des ser-
vices de la Caf concernée ainsi que de
la personne en charge de la demande
de RSA. L’intervention du Médiateur
de la République a permis de décou-
vrir qu’une attestation de chômage
manquante était la cause du retard de
traitement et de porter à la connais-
sance des différents interlocuteurs
l’existence de cette pièce, débloquant
ainsi l’ensemble du dossier.

Le contexte de crise économique


accentue leur sentiment d’être
traités de manière injuste, inégale,
discriminatoire, quand les admi-
nistrés ont respecté les procédures
et se sentent pénalisés sans raison.

16 rapport annuel 2009


Grande alors est la tentation d’es- Des ministères encore plus tangible que face au savoir des
sayer de passer outre et de forcer la aux abonnés absents médecins, acquis au cours d’études
main d’une administration dont ils Quand l’organisme concerné ne se longues et réputées difficiles, les
considèrent qu’elle a mal traité leur rend pas aux arguments du Média- particuliers ont l’impression que se
dossier. Il faut également prendre en teur de la République pour apporter dresse devant eux un infranchissable
compte la tendance, de plus en plus une solution ou une réponse, ce der- mur de la connaissance. Depuis que
répandue chez certains assurés, de nier remonte la chaîne de décision la structure qui fonctionnait au sein
choisir à la carte les prestations les étape par étape, jusqu’au ministre de la Haute Autorité de santé (HAS)
plus avantageuses. Face à ces com- s’il le faut, afin d’attirer l’attention a rejoint les services du Médiateur
portements se pose une question : la au plus haut niveau sur un refus de la République sous le nom de Pôle
politique d’information en la matière de modifier son interprétation des Santé et Sécurité des Soins (P3S),
est-elle suffisante au regard des textes. Il peut suggérer au minis- un accroissement flagrant de deman-
droits potentiels des assurés, mais tère un nouveau texte (règlement, des d’informations concernant l’ac-
surtout, est-elle encore adaptée ? circulaire, décret) pour préciser de cès au droit des usagers du système
Certes, le droit à l’information des façon claire l’application de la loi et de santé est à noter. Pratiquement
citoyens est devenu incontournable et contourner la résistance de l’orga- tous les dossiers qui lui sont soumis,
les efforts de communication des ins- nisme. Le Médiateur de la Républi- notamment en matière d’accidents
titutions publiques se sont renforcés que peut également demander la médicaux, se doublent d’un pro-
pour se rapprocher au mieux du quo- position du ministère sur le texte blème d’accès aux informations. La
tidien des usagers. Les citoyens ont qui fonde la saisine et l’ensemble de phrase-type du réclamant est : « J’ai
également davantage pris conscience l’affaire. Il faut cependant s’armer de essayé de savoir, mais on ne m’a
des devoirs que l’administration a patience, car les délais de réponse pas répondu ». Lors de la surve-
envers eux. Mais la lente montée de peuvent être assez longs, notam- nance d’un accident médical, cette
l’individualisme et la plus récente ment lorsque les demandes sont demande forte de transparence peut
mais néanmoins brutale irruption adressées au ministère du Travail, se heurter à une certaine rétention
de la crise ont modifié les compor- des Relations sociales, de la Famille d’information, voire au déni, en par-
tements. Le résultat ? Une exigence et des Solidarités et au ministère de tie par peur, par réaction d’autopro-
chaque jour plus forte pour que la l’Agriculture, voire de certains éta- tection. Ces comportements peuvent
loi et la règle soient mises au profit blissements publics. Lourdeur du déboucher sur la rupture totale de
des intérêts particuliers. À divers processus, lenteur et pesanteur de dialogue, voire un conflit, avec de la
degrés mais toujours avec force, c’est la hiérarchie… L’absence de réponse part du patient ou de ses ayants droit
ce qu’expriment certaines réclama- ne traduit pas seulement une volonté une réelle volonté de le judiciariser.
tions adressées au Médiateur par de ne pas répondre, mais parfois une Il s’agit là d’un phénomène nouveau,
des citoyens devenus peu à peu des incapacité à le faire. Si cette situa- dont on perçoit la montée en puis-
« consommateurs » de service public. tion, déjà pointée par les services du sance.
À cet égard, la qualité et l’efficacité Médiateur de la République en 2008, Cependant, les personnes qui, soup-
du site « service-public.fr » semblent a paru s’améliorer début 2009, cette çonnant une erreur médicale ou
montrer la voie à suivre. Il resterait apparente réactivité n’a pas duré et thérapeutique, contactent le Média-
cependant à inventer, au bénéfice le silence est redevenu une réponse teur de la République, reconnaissent
des usagers qui ne maîtrisent pas les courante aux demandes de l’Insti- souvent n’avoir pas posé de question
technologies de l’information et de la tution. au médecin ou au chirurgien qui les
communication (TIC), un équivalent avait prises en charge, encore moins
en termes d’accueil physique. C’est la L’information médicale, saisi le médecin médiateur de l’hôpi-
demande formulée depuis plusieurs une denrée rare tal. Cette médiation existe pourtant,
années par le Médiateur, qui souhaite Dans le domaine de la santé aussi, du moins en théorie, dans tous les
que soient créés des centres d’accès l’information des citoyens reste établissements hospitaliers depuis
au droit à plus large échelle. insuffisante. Ce déficit est d’autant la loi de 2002 sur les droits des OOO

médiateur de la république 17
l’usager et l’état face à la crise
citoyen-administration : la grande incompréhension

OOO malades, qui a également créé les le chirurgien, par son intervention, a contentait de fixer un délai maximal
Commissions de relations avec les déclenché une hémorragie massive de quinze jours à un mois, il serait
usagers et de la qualité de la prise qui n’a pu être maîtrisée et a abouti à possible d’exiger sa stricte applica-
en charge (CRUQPC). Souvent, le la constitution d’une hémiplégie gau- tion et de mettre ainsi un terme à
praticien ou l’établissement aurait che définitive. des frustrations de part et d’autre.
pu leur fournir une réponse satisfai- Devant l’incompréhension générée Pour la communication des dos-
sante, mais ils n’ont pas voulu, ou pas par la survenue d’un tel drame, Mon- siers médicaux, des progrès restent
osé, commencer par cette étape. On sieur F. et sa famille ont saisi le Pôle à accomplir dans un cas : lorsqu’il
se résout difficilement à exprimer Santé et Sécurité des Soins. En effet, concerne une personne décédée.
son mécontentement à un médecin, il avait seulement été informé d’une On constate alors de la part des
car en ce domaine, les tabous sont exploration parfaitement bénigne et établissements une certaine inertie,
encore forts. Par ailleurs, dans une banale de sa gorge pour un « gan- un comportement que le Médiateur
petite ville qui possède un seul hôpi- glion », sans qu’il ait été fait mention de la République qualifie d’« atten-
tal, certains se demandent comment des risques possibles liés à l’acte tisme précautionneux ». Il ne porte
y retourner après un litige. Le droit chirurgical. Une analyse minutieuse pas sur le délai de communication,
de poser une simple question n’ap- du dossier a été entreprise par les ni à proprement parler sur le prin-
paraît pas toujours naturel. Même médecins du Pôle, ce qui a permis de cipe même de cette communication,
vis-à-vis du médecin médiateur de délivrer une information intelligible mais sur le caractère communicable
l’établissement, les patients n’ont sur les circonstances de la survenue des documents.
pas en effet un sentiment d’indépen- de cet accident médical.
dance totale. Restée 24 heures sur un brancard
Les interventions du Médiateur de la Si ces demandes d’informations ini- aux urgences avant d’être hospitali-
République concernent aussi les cas tiales sont en hausse, l’Institution se sée, Madame S., finalement opérée,
de complication mal comprise, atten- réjouit d’avoir en revanche observé est décédée pendant l’intervention. La
due ou non par le corps médical, après une baisse des réclamations portant famille de Madame S., notamment son
une intervention chirurgicale. Son sur les difficultés d’accès au dossier mari et sa fille, a été reçue par le chef
rôle est alors de permettre au patient médical par l’usager. Cette amélio- de service des urgences quinze jours
mécontent de faire la différence ration fait suite à l’intervention du après son décès pour évoquer les
entre complication attendue et non Médiateur de la République auprès du « errances diagnostiques » de son
attendue, et de surmonter l’opposi- ministère de la Santé et des directions équipe, leur formuler des excuses et
tion entre deux points de vue : le sien d’hôpitaux, motivée par les nombreu- les assurer que le dossier médical
(« On ne m’avait pas expliqué » ou ses réclamations dont il avait été saisi. était à leur disposition. Malheureu-
« On m’avait expliqué, mais d’une Elles portaient en particulier sur le sement, après maintes réclamations
façon qui ne me permettait pas de non-respect des délais de communi- de ce dossier durant trois mois et rup-
comprendre ») et celui du praticien, cation des dossiers médicaux. ture de tout dialogue avec l’hôpital,
qui affirme avoir délivré une infor- On sait que la loi du 4 mars 2002, Monsieur S. a décidé de saisir le Pôle
mation loyale et complète. dite « loi Kouchner », sur le droit des Santé et Sécurité des Soins de l’Ins-
malades, permet au patient l’accès titution.
Monsieur F., 79 ans, a consulté à direct à son dossier médical. Pour L’article L. 1110-4 du Code de la santé
l’hôpital un chirurgien oto-rhino- une hospitalisation qui remonte à publique prévoit que le secret médical
­laryngologiste (ORL) pour une gêne moins de cinq ans, l’établissement ne fait pas obstacle à ce que les infor-
de l’arrière-gorge avec raclements dispose d’un délai de huit jours pour mations concernant une personne
permanents. L’ORL a constaté une le communiquer. Or, le délai moyen décédée soient délivrées à ses ayants
tuméfaction de la paroi postérieure constaté était de trois mois, avec droit dans la mesure où elles leur sont
du larynx qui s’étend au pharynx et a des écarts d’un à neuf mois ; il n’est nécessaires pour leur permettre de
décidé de réaliser une fibroscopie, qui désormais plus que d’un mois en connaître les causes de la mort, de
a confirmé le diagnostic. Le praticien moyenne. Il faut cependant recon- défendre la mémoire du défunt ou de
a alors décidé d’effectuer, étonnam- naître que dans de nombreux cas faire valoir leurs droits, sauf volonté
ment sans autres examens préalables ce délai légal est impossible à tenir : contraire exprimée par la personne
(scanner ou IRM), et sous anesthésie pour peu que la personne soit pas- avant son décès. La direction du Pôle
générale, une exploration de cette sée dans plusieurs services (urgen- Santé est donc intervenue auprès de
tuméfaction en vue de réaliser des ces, réanimation, soins intensifs, la direction du CHU pour rappeler les
biopsies. Celle-ci s’est en fait révélée chirurgie), il est vain d’imaginer que textes et ainsi permettre la récupéra-
être une malformation vasculaire de son « parcours » puisse être recons- tion du dossier médical.
l’artère carotide interne gauche, et titué en si peu de temps. Si la loi se

18 rapport annuel 2009


Des administrations en mal de repères

Une mise en œuvre tardive prise, après enquête, par le minis- louables, force est de constater qu’il
des dispositions législatives tre chargé des anciens combattants. faudra encore au minimum 20 ans
Concernant la lenteur des admi- D’après les derniers chiffres fournis pour venir à bout de la totalité des
nistrations à faire appliquer une par le ministère de la Défense dans dossiers ! Le Médiateur de la Répu-
législation, l’exemple de la mise en une note du 23 avril 2009, 55 757 blique a dès lors interrogé le minis-
œuvre de la loi de 1985 sur la men- dossiers ont été traités, tandis que tère de la Justice sur la possibilité
tion « mort en déportation » est les historiens estiment que 115 000 d’apporter des allégements à la pro-
emblématique : 24 ans après son à 160 0 0 0 per son nes ser a ient cédure d’instruction actuelle, ren-
adoption, moins de la moitié des concernées. Le Médiateur de la due inutilement longue par la dou-
dossiers ont été traités ! Selon cette République s’est inquiété auprès ble intervention du ministère de la
loi, la mention « mort en déporta- des ministères compétents des dif- Défense et des tribunaux lorsqu’un
tion » est portée sur l’acte de décès ficultés d’application de cette loi. En acte de décès doit être préalable-
de toute personne de nationalité réponse, le ministère de la Justice a ment établi. Un amendement en ce
française, résidant en France ou sur adressé une circulaire (datée du 29 sens sera proposé au Sénat dans le
un territoire antérieurement placé octobre 2008) à tous les parquets, cadre de l’examen de la proposition
sous la souveraineté, le protectorat afin de clarifier certains points de de simplification et d’amélioration
ou la tutelle de la France, qui, ayant procédure et de favoriser un traite- de la qualité du droit.
fait l’objet d’un transfert dans une ment uniformisé des dossiers. Par
prison ou un camp de concentra- ailleurs, le ministère de la Défense a Des lois mal appliquées
tion, y est décédée. La même men- indiqué avoir augmenté les moyens faute d’instructions claires,
tion est portée sur l’acte de décès des services compétents, afin d’ac- longues à obtenir
si la personne a succombé à l’occa- célérer le rythme des régularisa- Parmi les raisons expliquant parfois
sion de son transfert. La décision tions, qui pourrait atteindre 3 000 l’inaction des services de l’adminis-
de faire apposer cette mention est mentions par an. Malgré ces efforts tration s’en trouve une quasi impa-
rable : l’absence de décret d’applica-
tion ou de circulaire. Dans la plupart
des cas, même avec la meilleure
volonté, les administrations concer-
nées ne peuvent appliquer le texte
incriminé sans ce « mode d’emploi ».
La circulaire, par les précisions
qu’elle fournit, évite des erreurs
qui pourraient être préjudiciables
aux administrés. Le Médiateur de
la République doit donc fréquem-
ment exposer ces considérations
aux citoyens qui l’ont saisi et qui ne
comprennent pas qu’on leur refuse
le bénéfice d’un texte pourtant voté
par le Parlement.
Encore faut-il que la circulaire,
lorsqu’elle existe, soit effectivement
diffusée à tous les agents concernés.
Elles sont toutes consultables sur le
site : www.circulaires.gouv.fr. OOO

médiateur de la république 19
l’usager et l’état face à la crise
citoyen-administration : la grande incompréhension

OOO Monsieur M. a été victime d’une usur- courrier et ses différents contacts Madame A. a pu mesurer combien
pation des plaques d’immatriculation téléphoniques, il s’est adressé au peut être long le traitement d’une
de son véhicule. Il n’a pas rencontré délégué du Médiateur en mars 2008. demande. Déclarée en incapacité
de difficulté particulière pour faire Le dossier de Monsieur M., détenu par d’au moins 80 % en octobre 1975,
reconnaître qu’il n’était pas l’auteur de la préfecture, étant clair, le délégué elle a pu, par téléphone, bénéficier
l’excès de vitesse constaté en octobre est intervenu auprès du correspon- à ce titre du dispositif de départ à la
2006 puisqu’à cette date, il était en dant du service des cartes grises. retraite anticipé et a donc fait liquider
vacances en Corse avec son véhicule Celui-ci, qui connaissait parfaitement sa pension de vieillesse du régime
et que le véhicule flashé était d’une ce dossier, indique au délégué qu’un agricole le 1er juillet 2006, à l’âge de
autre marque que la sienne. courrier en réponse était en prépara- 57 ans. Puis, le 29 juin 2007, elle a
L’officier du ministère public chargé tion et qu’il devait aller dans le sens sollicité de la Mutualité sociale agri-
du contrôle automatisé l’a d’ailleurs de la demande de Monsieur M.. Après cole (MSA) l’attribution de la majora-
mis hors de cause pour l’infraction deux relances téléphoniques, il est tion de pension, laquelle concerne
commise en novembre. confirmé au délégué qu’un courrier a les assurés titulaires d’une retraite
Après avoir déposé plainte, Mon- été envoyé à l’intéressé. anticipée au titre du handicap, selon
sieur M. demande néanmoins par Ce courrier, du 8 avril 2008, précise les textes découlant de la loi n° 2005-
précaution le changement de l’imma- que le remboursement est autorisé 102 du 11 février 2005. La MSA l’a
triculation de son véhicule. Le service par l’application d’une circulaire du informée qu’elle ne pouvait accéder
des cartes grises n’autorise ce chan- ministère de la Justice qui n’avait pas à sa demande, car elle attendait des
gement qu’à condition d’acquitter une été diffusée en préfecture et qu’il est précisions du ministère. Sollicité,
taxe de 46 € correspondant à un cheval accordé nonobstant le classement le Médiateur de la République a, en
fiscal. Monsieur M. procède au chan- sans suite de la plainte de l’intéressé. juin 2008 et mars 2009,attiré l’at-
gement, s’acquitte de cette somme Le chef du bureau précise au délégué tention du ministère sur le fait que
mais, conformément aux indications qu’il regrette cette mauvaise commu- Madame A., ainsi que beaucoup
portées sur le formulaire de requête nication entre ministères. d’autres assurés susceptibles de
en exonération joint au procès-verbal, Monsieur M. remercie le délégué du bénéficier de ce dispositif, étaient
il dépose aussitôt une demande d’exo- Médiateur de son intervention, qui pénalisés. La caisse centrale de la
nération auprès de la préfecture, afin a permis « de trouver une solution en MSA l’a informé le 21 août 2009 que la
de se faire rembourser les frais de moins d’un mois pour régler un problème circulaire du 3 août 2009 donnant les
changement de carte grise. N’ayant qui n’avait pas trouvé de solution malgré instructions nécessaires avait enfin
obtenu aucune réponse à son dernier une lutte acharnée de deux ans  ». été transmise et que, par conséquent,
le dossier de Madame A. pourrait être
prochainement traité, près de quatre
années et demie après le vote de la
loi et deux ans après sa première
demande…

Au-delà de la complexité des tex-


tes, il faut aussi chercher la cause
de cet état de fait dans l’instrumen-
talisation de la loi. Au fil des ans,
les parlementaires ont été appelés
à examiner un nombre croissant
de lois dont l’objectif n’était que
de répondre à la préoccupation du
moment. Les citoyens, eux, n’en
continuent pas moins à demander
l’application de ces lois, expression
de la souveraineté nationale. Autre
point de blocage qui revient souvent
dans les réclamations : le cloisonne-
ment volontaire dans leur domaine
des différents acteurs et de leurs
représentants, qui ne daignent par-
fois même pas donner à l’usager

20 rapport annuel 2009


l­’information qui lui serait utile sous droits à la retraite leurs agents nés manière, on sait que certaines per-
prétexte que cela ne relève pas de entre 1957 et 1959, comme les textes sonnes appellent abusivement les
leur compétence. Avec le sentiment les y invitaient. pompiers, qui ont d’ailleurs décidé
grandissant d’être traité comme de lancer une campagne d’informa-
quantité négligeable par l’admi- Les urgences tion à ce sujet.
nistration, l’administré en vient à au bord de la congestion Les professionnels de l’urgence
questionner la notion même de ser- Au chapitre des services publics travaillent sous une telle pression
vice public, même s’il ne mesure pas désorientés, il faut également évo- qu’ensuite, il est difficile de soutenir
toujours bien le manque de moyens, quer, dans le domaine de la santé, les qu’ils auraient mal fait leur travail.
notamment humains, qui perdure délais de prise en charge trop longs Dans la très grande majorité des cas,
de l’autre côté du guichet. dans des services d’urgences hospi- incontestablement, ce travail reste
taliers sous pression permanente. bien fait. Le Pôle Santé et Sécurité
Une interconnexion On retrouve ces délais jugés abusifs, des Soins du Médiateur de la Répu-
des systèmes inefficace avec parfois des conséquences très blique a eu cependant à connaître
Depuis les lois de 2003 réformant les graves, au cœur des griefs formu- des cas où la notion d’urgence avait
régimes de retraite, le droit à l’in- lés par les usagers. Comment pour- échappé à la vigilance du médecin,
formation s’est nettement amélioré rait-il en être autrement dès lors que voire de comportements tout à fait
(création du traitement informatisé les urgences sont « embolisées » par fautifs : un malade que l’on n’a pas
relatif aux échanges interrégimes des demandes toujours plus nom- daigné examiner, une complication
de retraite par le décret 2009-1553 breuses ? Le recours au service des mal anticipée, une douleur (par
du 14 décembre 2009). S’il fonc- urgences d’un hôpital n’est pas tou- exemple thoracique ou abdominale)
tionne efficacement et fournit une jours fondé, même si les personnes mal évaluée.
information sûre et complète pour qui s’y présentent ont l’impression
la plupart des assurés des régimes que c’est bien le cas. De nombreuses Madame B., 53 ans, se plaint de dou-
de retraite légalement obligatoires, personnes, par exemple, s’adressent leurs abdominales d’apparition bru-
des difficultés subsistent autour à lui pour des affections bénignes au tale. Après intervention du médecin
du régime de la fonction publique lieu de consulter tout simplement traitant, une occlusion intestinale
d’État. Une administration centrale leur médecin généraliste. aiguë est évoquée et il procède à son
comme celle de l’Éducation natio- On rencontre en amont les difficul- transfert rapide aux urgences hospi-
nale, par exemple, peine à réaliser tés de la régulation par le Samu, un talières pour avis chirurgical. À l’arri-
les reconstitutions de carrière. Le service très exposé qui devient le vée, Madame B. est rapidement prise
problème n’est pas tant de calculer réceptacle de la demande sociale, de en charge par un médecin urgentiste
le montant des pensions de retraite, la misère, en même temps qu’il doit qui établit les mêmes constatations
la période de référence considérée traiter de véritables urgences néces- cliniques mais conclut à une constipa-
étant celle des six derniers mois sitant une prise en charge médicale tion sévère à partir de la radiographie
de traitement, mais plutôt la vali- immédiate. On trouve là toute la de l’abdomen. Madame B. va alors
dation du nombre de trimestres problématique de l’accès aux soins passer près de 24 heures aux urgen-
effectués. En effet, d’une académie des personnes vulnérables, celles ces sur un brancard avant d’être hos-
à l’autre, la faible compatibilité des qui relèvent par exemple de la psy- pitalisée. Moins de 12 heures après
systèmes informatiques et le man- chiatrie et appellent trop facilement son hospitalisation, son état de santé
que d’interconnexion constituent le Samu. Le service finit par connaî- va rapidement se dégrader. En dépit
un frein majeur à la circulation de tre et repérer quelques « habitués », d’une intervention chirurgicale réa-
l’information. Avec l’autonomie des qui téléphonent deux ou trois fois lisée en urgence, elle décédera le
universités, le problème risque fort par nuit, au risque de ne pas retenir lendemain. Aux termes de l’analyse
de s’amplifier. D’ores et déjà, nom- l’attention du permanencier quand du dossier médical, il est apparu que
bre d’établissements universitaires leur appel relèvera un jour d’une la prise en charge initiale par le ser-
ont été incapables d’informer sur les « véritable » urgence. De la même vice des urgences du CHU n’était pas OOO

médiateur de la république 21
l’usager et l’état face à la crise
citoyen-administration : la grande incompréhension

OOO conforme aux données acquises de la


science médicale et que le diagnostic
d’occlusion intestinale aiguë avait été
beaucoup trop tardif.

L’affluence aux services d’urgen-


ces est aussi, on l’a dit, cause d’une
information insuffisante : un méde-
cin, un soignant sous pression ris-
que forcément de consacrer moins
de temps et d’attention à l’échange
avec le patient.

Quand résorber des inégalités


conduit à en créer de nouvelles
Jusqu’en 2003, l’essentiel du droit
aux avantages familiaux des fonc-
tionnaires prévu par le Code des
pensions était ouvert aux seules
femmes. Après un arrêt de la Cour
de justice des communautés euro-
péennes (CJCE) pointant une dis-
crimination, la France a entrepris de ou professeurs ayant accouché ou tre fonctionnaires, agents du sec-
réformer le régime de la bonification adopté pendant les vacances scolai- teur privé et contractuels du secteur
pour l’éducation des enfants par la res sans prendre de congé de mater- public (qui relèvent pour la retraite du
loi du 21 août 2003 portant réforme nité ou d’adoption… droit privé).
des retraites. Désormais, la boni-
fication pour enfant est attribuée Madame L., enseignante et mère En outre, malgré une jurispru-
aux fonctionnaires tant homme de deux enfants adoptés en 1984 et dence qui évolue positivement, des
que femme, mais à condition qu’ils 1992, a pu s’en rendre compte. Elle a imprécisions demeurent, pour le
justifient d’une interruption d’acti- contesté le fait que, dans le cadre du cas de jumeaux ou d’adoption dou-
vité continue d’au moins deux mois, calcul de sa pension de retraite, un ble. Le Médiateur de la République
dans le cadre d’un congé statu- seul de ses enfants avait été retenu a étendu le champ de sa proposition
taire. Elle a par ailleurs été étendue au titre de la bonification pour enfant. de réforme afférente aux adoptions à
aux femmes ayant accouché avant En effet, pour son premier fils, l’adop- l’ensemble du dispositif de bonifica-
leur prise de fonction, sous certai- tion ayant eu lieu à l’approche d’une tion pour enfant dans la perspective
nes conditions. En apparence plus période de vacances scolaires, elle du chantier des retraites de 2010 et
égalitaires, ces textes ont toutefois n’avait pas sollicité de congé d’adop- d’une éventuelle remise à plat de
généré de nouvelles iniquités. Ainsi, tion. Le Médiateur de la République l’ensemble. K
les nombreux cas dont a été saisi le a attiré l’attention du ministre de la
Médiateur de la République laissent Fonction publique sur les inégalités
apparaître que les nouveaux textes de traitement engendrées par cette
ont finalement conduit à exclure les loi, mais la proposition de réforme
hommes du droit à la bonification au faite à ce sujet n’a jamais été prise en
lieu de les en faire profiter. En effet, compte.
la condition de suspension d’activité Madame L. a saisi le tribunal admi-
continue durant deux mois est en nistratif, mais ses chances de voir sa
général remplie pour les femmes qui situation rétablie sont quasi nulles,
ont bénéficié d’un congé postnatal, sauf, peut-être, si étaient mises en
dont la durée est supérieure à deux œuvre, dans le cadre du rendez-vous
mois, mais rarement pour les hom- de 2010 sur les retraites, les préconi-
mes... Les nouvelles dispositions ont sations du Médiateur de la République
également conduit à en priver cer- ou toute autre disposition qui serait de
taines femmes qui en bénéficiaient nature à corriger les disparités, tant
auparavant, femmes institutrices entre fonctionnaires entre eux qu’en-

22 rapport annuel 2009


Le citoyen seul face à un cadre mouvant
et insécurisant
Face à l’empilement ininterrompu des textes législatifs et réglementaires, les citoyens
ont l’impression croissante d’être en butte à une véritable jungle administrative. Le citoyen se trouve
souvent seul, sans aucun mode d’emploi auquel se référer ni interlocuteur auquel s’adresser.
Dans ce contexte, forte est la tentation de considérer que les dispositifs publics censés protéger
les citoyens sont défaillants et ne remplissent plus leur fonction première de service au public.
Beaucoup finissent par se figurer que le système se protège plus qu’il ne protège les administrés.

Une inflation législative qui contribue à l’instabilité de la norme

Que se passe-t-il quand la loi change remettait en cause sa date potentielle titre de la période d’apprentissage ne
entre le moment où un administré de départ à la retraite. permettait la validation que de deux
s’en prévaut et celui où elle est effec- Le Médiateur de la République a pu trimestres pour l’année 1966, au lieu
tivement appliquée ? Monsieur R. a lui faire savoir que, en application des quatre inscrits par erreur par la
découvert le problème avec surprise des dispositions réglementaires en Crav. Par ailleurs, pour les assurés
lorsqu’il a voulu prendre sa retraite. vigueur à la date du versement des nés comme lui en 1952, le nombre de
cotisations arriérées, son rachat au trimestres requis pour l’ouverture du OOO

Né en 1952, il a commencé sa car-


rière professionnelle à l’âge de
14 ans. Fin 2007, après un licencie-
ment, il a entrepris des démarches
auprès de la caisse régionale d’assu-
rance vieillesse (Crav) pour bénéficier
des dispositions relatives au départ
à la retraite anticipé pour carrière
longue. Ne disposant que de 161 tri-
mestres cotisés sur les 168 requis à
l’époque pour avoir droit au dispositif à
l’âge de 56 ans, Monsieur R. a procédé
auprès de l’Urssaf, le 13 mars 2008,
au versement des cotisations permet-
tant la régularisation de sa période
d’apprentissage du 1er juillet 1966 au
31 décembre 1969. Informé, dans un
premier temps, que ce rachat permet-
tait la validation des sept trimestres
manquants, il s’est ensuite entendu
dire que le rachat ne concernerait
finalement que cinq trimestres, ce qui

médiateur de la république 23
l’usager et l’état face à la crise
Le citoyen seul face à un cadre mouvant et insécurisant

OOO droit à une retraite à taux plein à l’âge le changement, c’est bien celui des milieu du gué. Facteur d’insécurité
de 60 ans a été porté à 164 trimestres, retraites, qui dépend par ailleurs pour les administrés, qui ont de plus
ce qui a entraîné une modification des beaucoup de la situation finan- en plus de difficultés à anticiper leur
conditions leur permettant un départ cière des caisses. Ainsi, la vague de situation et ses modifications, cette
anticipé pour carrière longue. départs anticipés qui avait découlé frénésie législative est d’autant plus
de la loi de 2003, et qui avait été sui- préoccupante que la question est
S’il est un domaine qui évolue, d’un vie d’une évolution réglementaire encore loin d’être tranchée.
point de vue législatif, plus vite que plus restrictive du droit en la matière,
la capacité des administrés à suivre a laissé de nombreux citoyens au

Une rationalisation source de dysfonctionnements

Face à la multiplicité des organis- de toute l’information nécessaire merçants. Ainsi, un seul avis d’appel
mes et des administrations, des à son orientation dans le nouveau de cotisations est envoyé aux assu-
entreprises de rationalisation de l’or- dispositif et à la compréhension des rés. Cet objectif de simplification
ganisation administrative sont régu- règles qui lui sont applicables, de est malheureusement difficile à per-
lièrement menées dans différents nombreuses réclamations montrent cevoir tant les dysfonctionnements
secteurs. Réduire les délais de trai- qu’il s’est bien souvent senti victime consécutifs à la mise en place de la
tement des demandes, simplifier le de la rationalisation plutôt que béné- convergence des systèmes infor-
parcours de l’administré, diminuer ficiaire. matiques du RSI et des Urssaf sont
le nombre d’interlocuteurs et de Le Régime social des indépendants nombreux et complexes à résoudre.
démarches à effectuer… Les objec- (RSI), né de la fusion des deux régi- Pour les personnes pâtissant de ces
tifs de ces opérations sont simples mes de retraite des artisans et des retards, les rares explications, trop
et clairs : faciliter les rapports des commerçants et du régime d’assu- techniques ou incomplètes et dans
citoyens avec leurs administrations rance maladie des professions arti- lesquelles le mauvais rôle échoit
et accroître l’efficacité des processus sanales, commerciales et libérales, commodément à l’informatique, sont
pour le bénéfice de tous. L’introduc- illustre bien les difficultés inhéren- perçues au mieux comme de l’indif-
tion de l’informatique dans les roua- tes aux démarches de simplification férence, sinon comme du mépris
ges de l’appareil d’État a permis des d’une organisation complexe. En alors même que le personnel du RSI
avancées non négligeables au service effet, le RSI assure, depuis le 1er jan- a une réelle volonté d’assurer au
de cette ambition. Mais le recours vier 2008, une mission d’interlocu- mieux la mission de service public
aux outils technologiques a parfois teur social unique (ISU) pour l’en- qui lui est dévolue.
été la source de nombreux tracas. semble de la protection sociale des
Quant au citoyen, faute de disposer artisans, des industriels et des com-

Les dommages collatéraux de l’ouverture à la concurrence


du secteur de l’énergie

Les grandes mutations de structure services publics s’est brouillée : République n’a pu que constater
ou d’organisation engagées, ou sur erreurs de facturation, mauvais la défaillance des centres d’appel
le point de l’être, dans les servi- contact (voire absence de contact) chargés d’assurer le traitement des
ces publics souffrent souvent d’un avec les services clients ou cour- réclamations et l’insuffisante infor-
accompagnement insuffisant en riers sans réponse ont poussé de mation des clients. De nombreux
matière d’information et d’accueil nombreux usagers à solliciter l’aide exemples en témoignent.
du public. L’ouverture à la concur- des délégués. Grâce aux relations
rence d’EDF-GDF en est un exemple établies par l’Institution avec le Madame A. a constaté, durant le
significatif. médiateur de GDF, plus récem- dernier trimestre 2007, que GDF avait
L’ouverture à la concurrence du ment avec celui d’EDF et celui de prélevé sur son compte des montants
secteur de l’électricité et du gaz a l’énergie, les délégués ont pu réta- qui ne la concernaient pas, l’adresse
parfois eu des effets néfastes sur le blir entre les fournisseurs d’énergie mentionnée étant erronée. L’intéres-
quotidien des clients des deux prin- et leurs clients un contact parfois sée a sollicité le service clients durant
cipaux fournisseurs d’énergie. La interrompu pendant plusieurs mois. plusieurs mois. N’obtenant pas de
bonne image de ces deux anciens Une fois encore, le Médiateur de la réponse, elle a saisi un délégué du

24 rapport annuel 2009


Médiateur de la République. En mars 2008. Or, depuis cette date, la fourni- Le service d’EDF concerné (installé
2009, ce dernier a contacté GDF, qui a ture effective du gaz n’a pas été mise dans l’Isère) téléphone au délégué du
pris en charge la réclamation, instruit en place et l’intéressé a tenté sans suc- Médiateur un mois plus tard pour lui
le dossier et fait procéder à la régula- cès d’obtenir une explication par télé- faire connaître la difficulté à laquelle
risation et au remboursement, atten- phone. L’assistante sociale du secteur il est confronté : le téléphone de Mon-
dus depuis plus d’un an, des sommes a également tenté d’entrer en com- sieur G. n’est plus en service (effec-
indûment prélevées. munication avec le service d’EDF, par tivement, l’abonnement a été résilié
téléphone, en vain. De ce fait, durant pour défaut de paiement) et donc,
Pour bénéficier des services d’EDF la période hivernale, Monsieur G. a dû EDF est dans l’impossibilité d’entrer
dans la Meuse, il faut avoir le télé- recourir à l’utilisation d’un chauffage en contact avec lui pour fixer un ren-
phone ! électrique d’appoint, en l’absence de dez-vous pour la mise en service de
Monsieur G., 58 ans, est invalide du gaz. Il saisit le délégué du Médiateur l’installation. Autrement dit, EDF ne
travail et vit seul. Venant d’être relogé, le 20 janvier 2009 lors d’une visite en contacte le client, pour l’installation
à la suite d’une expulsion locative, il préfecture. Ce dernier passe aussitôt du gaz, que par téléphone ! Le rendez-
rencontre des difficultés pour obtenir plusieurs appels téléphoniques à la vous a été ultérieurement pris par
l’exécution d’un contrat de fourniture direction régionale d’EDF et confirme l’intermédiaire de l’assistante sociale
de gaz, qu’il a signé avec EDF, en mars sa demande par courrier. du secteur.

Les conséquences pratiques


de la réorganisation des services déconcentrés de l’État

En termes de compréhension par le politiques publiques (RGPP) dans cipalement dans les départements
public, des problèmes d’envergure les départements. Ce grand chantier mais aussi les régions, ne restera pas
risquent de se poser avec la mise en de réorganisation complète des ser- sans conséquence pour les usagers.
œuvre de la Révision générale des vices déconcentrés de l’État, prin- Les directions départementales
traditionnelles, comme Jeunesse
et Sports, Équipement ou Agricul-
ture, seront totalement fondues
dans de nouveaux organigrammes
qui ne correspondront plus à ce que
connaît le public. L’ensemble des
appellations, sigles, interlocuteurs
et coordonnées seront modifiés.
Même si cette réforme est réalisée
pour gagner en efficacité et offrir un
meilleur service, dans un premier
temps les habitudes seront profon-
dément bouleversées, avec de pro-
bables dysfonctionnements.
Le Médiateur de la République craint
que ces modifications n’aient pas été
suffisamment accompagnées d’in-
formations et d’explications pour le
public. Il est normal que l’adminis-
tration ait commencé à travailler OOO

médiateur de la république 25
l’usager et l’état face à la crise
Le citoyen seul face à un cadre mouvant et insécurisant

OOO en interne pour gérer les problèmes nications nationales ont bien été d’informer les administrés sur les
d’organisation. Mais dans un second réalisées sur le thème de la réforme, conséquences concrètes des réfor-
temps, il semble essentiel que les mais aucune ne fournissait d’expli- mes entreprises, le ministère de
services s’adressent directement au cations pratiques. Ces dernières ne l’Économie et des Finances compte
public pour les informer des chan- pouvant être réalisées qu’au niveau parmi les institutions ayant réalisé
gements opérés, tant le succès d’une départemental, le Médiateur de la le plus de progrès, notamment à pro-
opération de rationalisation repose République aurait souhaité que les pos du paiement des impôts.
sur sa capacité à être comprise par préfets reçoivent des consignes très
les administrés. Quelques commu- précises. Quant à cette nécessité

Des dossiers « Polymorphes »

Le constat est alarmant : les situa- touchent douloureusement les per- logement social. L’intervention du
tions de détresse dans lesquelles sonnes les moins favorisées. C’est Médiateur de la République a per-
les citoyens perçoivent l’Institution ainsi que de nombreuses réclama- mis dans plusieurs cas de surseoir à
comme leur ultime recours repré- tions en lien avec la loi Dalo (droit l’expulsion en attendant qu’une pro-
sentent une proportion croissante au logement opposable) lui sont position ait pu leur être faite. Un par-
des réclamations. Poste d’observa- parvenues, émanant la plupart du tenariat vient également d’être signé
tion privilégié des grandes évolu- temps de locataires en passe d’être entre le secrétaire d’État chargé du
tions de notre société, le Médiateur expulsés. Éligibles au droit au loge- Logement et de l’Urbanisme et les
de la République est aussi devenu un ment, ils n’en risquent pas moins de délégués du Médiateur pour garan-
baromètre du climat social, souvent se retrouver sans logement avant tir l’accès effectif aux droits fonda-
confronté, par son contact perma- qu’une solution d’hébergement ne mentaux des populations les plus
nent avec toutes les couches de la leur soit proposée, eu égard aux précaires (voir page 46).
population, aux problématiques qui longs délais d’attente en matière de Mais cette tâche demande mesure
et vigilance, car face à la hausse des
loyers et à la détérioration des situa-
tions économiques individuelles, la
question du logement est rarement
simple. La protection des droits de
chacun s’y révèle parfois épineuse
et d’un équilibre délicat, les proprié-
taires étant parfois eux aussi dans
une situation financière précaire et
les locataires pouvant faire preuve
de mauvaise foi. Il faut également
compter avec celles et ceux qui,
demandeurs d’un logement social,
se sont installés dans une logique
d’accumulation des démarches,
vues comme moyen de pression et
de négociation vis-à-vis des admi-
nistrations, et qui, une conception
erronée de l’Institution en tête, sai-
sissent le Médiateur de la Républi-
que en imaginant ainsi faire accélé-
rer les procédures.
Leurs requêtes reflètent l’évolu-
tion d’une société qu’ils perçoivent
comme de plus en plus injuste et
dans laquelle tous les recours sont
bons pour tenter de rééquilibrer une
situation défavorable. Il est à noter
que certains saisissent le Médiateur

26 rapport annuel 2009


de la République en sachant perti- responsabilité du ministère de l’Inté- un véritable réexamen de la situa-
nemment que leur demande n’est rieur. Aussi le Médiateur de la Répu- tion fiscale.
pas recevable, dans le seul espoir de blique a-t-il saisi le Premier ministre Cela étant, le développement des
ralentir des procédures judiciaires. afin que celui-ci arbitre. La saisine est contestations globales semble trou-
en cours d’examen. ver sa source dans des compor-
Complexité et opacité tements administratifs litigieux,
du système : des tendances Des litiges globaux révélateurs critiquables ou appréciés comme
à inverser de dysfonctionnements illégaux par le Médiateur.
Les dossiers dont est saisi le Média- L’analyse des litiges portés à la Parmi ces comportements critiqua-
teur de la République concernent de connaissance du Médiateur de la bles, cinq lui ont paru, cette année,
plus en plus souvent un nombre d’ac- République, notamment dans le mériter un examen plus particulier :
teurs important, ce qui donne lieu à domaine fiscal, traduit une évolu- • lorsque l’administration applique
un traitement long et complexe. Le tion vers des contestations revêtant sa doctrine de manière rétroac-
cas des litiges autour des infractions un caractère d’ensemble. Certes, il tive : elle bouleverse les prévisions
routières, où les multiples interlocu- a encore à connaître d’affaires dans des contribuables instaurant ainsi
teurs peinent de surcroît à coordon- lesquelles le réclamant pointe un un climat d’insécurité juridique
ner leurs actions, illustre bien com- dysfonctionnement très précis ou se et de défiance vis-à-vis de l’action
ment l’on peut rapidement arriver à fonde sur un point de droit très parti- administrative ;
des situations kafkaïennes. culier, mais elles ne constituent plus, • lorsque l’administration participe à
et de loin, la majorité des dossiers. l’instabilité normative : par exem-
Monsieur F., circulant sur un cyclo- Cette situation tient pour une part ple dans le domaine d’actualités
moteur, a commis une infraction au au développement par l’administra- des crédits d’impôt en faveur des
Code de la route. Alors même qu’un tion fiscale d’organes de médiation énergies renouvelables. Les pom-
permis de conduire n’était pas néces- propres, tel que le conciliateur fiscal pes à chaleur air/air ont en effet
saire pour le véhicule qu’il conduisait, départemental, chargés de régler été successivement exclues du
il s’est vu retirer plusieurs points de les litiges à l’amiable, et pour une crédit d’impôt (arrêté du 1er février
son permis de conduire. Ayant été sol- autre part au développement de l’ad- 2005), puis réintégrées à condi-
licité pour faire un stage de sensibili- ministration en ligne (échange de tion notamment de présenter un
sation destiné à récupérer les points courriels avec le centre des impôts, niveau minimal de performance
perdus, il a dû s’acquitter de la somme déclarations par Internet, souscrip- (arrêté du 1er décembre 2005).
de 235 euros. À la suite de l’interven- tion de formulaires en ligne, etc.). L’administration a ensuite exigé
tion du Médiateur de la République Le Médiateur de la République, qui par voie d’instruction qu’elles
auprès du ministre de l’Intérieur, les accompagne ce mouvement depuis comportent des unités intérieures
points retirés à tort par l’administra- 2004, se réjouit d’ailleurs de la équipant l’ensemble des pièces de
tion ont été rendus à Monsieur F. Res- poursuite de cette évolution et de vie (instruction du 18 mai 2006)
tait toutefois en suspens le problème son inscription dans le long terme. pour finalement exclure ces unités
du remboursement des frais de stage. Cependant, la véritable garantie du de la base du crédit d’impôt (ins-
Or, le ministre de l’Intérieur a indiqué contribuable tient à la possibilité de truction du 11 juillet 2007) ;
au Médiateur de la République qu’il faire réexaminer sa situation fiscale • lorsque l’administration demande
n’entendait pas y consentir dès lors par une autorité indépendante avec une preuve exagérément for-
que la demande de remboursement les moyens appropriés. En interne, maliste, en particulier dans des
résultait d’une erreur d’un service en effet, le conciliateur fiscal dépar- cas d’usurpation d’identité (voir
placé fonctionnellement sous la res- temental confirme le plus souvent aussi page 32) qui l’ont conduite
ponsabilité des autorités judiciaires. la décision du service local et son à attribuer à un contribuable des
De son côté, le ministère de la Justice intervention conduit fréquemment à revenus qu’il n’avait pas perçus.
estime que la réparation relève de la un abandon des pénalités plutôt qu’à Si l’on peut comprendre qu’elle OOO

médiateur de la république 27
l’usager et l’état face à la crise
Le citoyen seul face à un cadre mouvant et insécurisant

OOO soit naturellement soupçonneuse, En deuxième lieu, on peut citer muler une proposition de réforme
il est regrettable qu’elle attende comme comportement pouvant être tendant à autoriser l’établissement
les conclusions d’une enquête de apprécié comme illégal le fait que d’une taxation séparée en cas de
police, alors même que la percep- l’administration ajoute parfois des revenus différés, à rendre plus équi-
tion des revenus en cause suppo- conditions supplémentaires à celles table l’imposition des trop-perçus et
serait des conditions matérielles que prévoit la loi. Cela n’entre pour- à limiter la pratique des interrup-
manifestement impossibles à rem- tant pas dans ses attributions et a tions de prescription abusives. Il a
plir : un chiffre d’affaires à l’évi- pour effet de restreindre le nombre également suggéré que la Charte du
dence irréaliste compte tenu des de bénéficiaires. L’Institution a eu contribuable soit désormais rendue
moyens matériels et humains mis à connaître de nombreux cas de ce opposable à l’administration.
en œuvre, ou encore deux emplois type, notamment des crédits d’im-
à temps plein censés être tenus pôts relatifs aux énergies renouvela- Des parcours de vie
simultanément à plusieurs centai- bles, à la mobilité professionnelle ou qui ne sont plus sécurisés
nes de kilomètres l’un de l’autre ; à la garde de jeunes enfants. Le Médiateur de la République
• lorsque l’administration a recours En troisième lieu, certaines déci- constate que, pour un nombre crois-
à des constructions juridiques sions administratives conservatoi- sant de ses concitoyens, les rapports
contraires à la réalité, qui, par res apparaissent comme abusives avec l’administration sont de plus en
exemple, entraînent l’imposition dès lors qu’elles sont destinées plus marqués par des ruptures, qui
de revenus non perçus. Tel a été le à prolonger la période pendant touchent souvent les plus fragiles.
sort réservé aux indemnités ver- laquelle un contribuable peut être Résultat : des trajectoires indivi-
sées à certains retraités des Char- redressé. duelles susceptibles de connaître à
bonnages de France ; Dans le cas soumis au Médiateur tout moment une « sortie de route ».
• lorsque l’administration fiscale de la République, l’administration, Accentuée par le contexte de crise
prend des mesures d’application qui disposait d’un délai de trois ans économique, l’angoisse de l’accident
tardives. Ainsi, le Médiateur de la pour corriger une déclaration, a qui pénalise ou exclut prend de plus
République a été saisi d’un certain notifié juste avant la fin de ce délai en plus souvent la forme d’une inter-
nombre de dossiers dans lesquels un redressement, en contestant vention de l’administration dans des
une mesure favorable à une caté- une déduction à l’aide d’une moti- parcours de vie qui ne connaissent
gorie de personnes était prise, mais vation quelconque dont le seul but plus la sécurité.
sa concrétisation tardait à venir. était visiblement de faire repartir le
On peut citer le cas des déchar- délai à zéro et se donner ainsi trois ➜ des retraites
ges de responsabilité solidaire ans de plus pour trouver la bonne difficiles à liquider
lorsque, après une séparation, motivation. Or, ce délai de trois Ce peut être le cas d’une personne
l’ex-mari organise son insolvabilité années constitue normalement désireuse de liquider sa retraite,
pour échapper à ses obligations et une garantie pour le contribuable, au terme d’une vie professionnelle
laisser à l’ex-épouse, qui en outre qui doit pouvoir, au terme de cette passée pour partie à l’étranger. Dans
conserve souvent la charge des période, s’estimer définitivement en les cas où les caisses de retraite
enfants, la responsabilité de rem- règle. Cette garantie s’est trouvée étrangères, notamment d’Algérie
bourser les dettes fiscales. ici contournée puisque c’est seule- et des pays d’Afrique, ne répondent
ment au bout de douze ans, après pas aux demandes de la caisse fran-
Par ailleurs, sans s’immiscer dans un second changement de motiva- çaise, la reconstitution de carrière
le champ de compétence du juge, le tion, que le contribuable a pu enfin est impossible, ce qui empêche la
Médiateur a été amené, au vu de plu- savoir pourquoi sa déclaration était liquidation de la retraite ou ne l’auto-
sieurs dossiers révélant des dysfonc- contestée. rise qu’à taux réduit. Le Médiateur
tionnements, à apprécier comme Le Médiateur de la Répu­blique a saisit alors ces caisses et en informe
illégaux certains comportements également observé qu’en cas de le médiateur du pays concerné –
administratifs. contrôle fiscal aboutissant à une quand il y en a un. La démarche,
Il en est ainsi, en premier lieu, du taxation d’office des résultats d’une cependant, n’est pas toujours assu-
recours à la procédure de rectifica- entreprise, l’administration avait rée du succès. Et malgré les fré-
tion imposée à des personnes ayant tendance à exagérer les évaluations quentes interventions des services
bénéficié à tort de l’aide à la mobilité alors qu’elle a pourtant l’obligation du Médiateur de la République sur
dans le cadre de la politique de l’em- d’approcher au plus près la réalité. ce type de dossiers et la collabora-
ploi, obtenue à la suite de la sous- Enfin, le traitement des réclamations tion développée récemment avec la
cription d’imprimés déclaratifs obli- reçues en 2009 a d’ailleurs conduit Cnav et les Cram, une solution défi-
gatoires mal conçus et incomplets. le Médiateur de la République a for- nitive reste à trouver.

28 rapport annuel 2009


➜ des cotisations à régulariser
Il arrive même qu’en remplissant
son devoir de citoyen, l’administré
se retrouve lésé et peine à se faire
rétablir dans ses droits.

C’est ce qui est arrivé à Madame L.,


qui a rempli la fonction de juré devant
la Cour d’assises de la Gironde du
6 octobre 1997 au 2 avril 1998. Comme
tout salarié, son contrat de travail a
été suspendu pendant cette période
et elle a bénéficié d’une indemnité qui
n’était pas soumise à cotisations. Ainsi,
sa retraite a été liquidée en calculant
un salaire de base égal à la moyenne
de ses 22 meilleures années, au nom-
bre desquelles figurent les années
1997 et 1998 amputées de la période
où elle avait été jurée.
Le Médiateur de la République a pris
contact avec la caisse régionale d’as-
surance maladie, l’Arrco, ainsi que
l’Urssaf pour chiffrer le préjudice subi.
Les organismes ont donné l’ensemble
des éléments chiffrés, sans qu’il soit
pour autant possible d’obtenir l’éva-
luation des cotisations à acquitter
pour l’assurance vieillesse de base ;
l’Urssaf a en effet indiqué que ce dos-
sier ne saurait être régularisé dans le culé par les services du Médiateur, lui ➜ une mise en disponibilité
cadre de la procédure des cotisations soit proposée. À partir de ce cas indi- d’office pour raisons de santé
arriérées d’assurance vieillesse, son viduel, une proposition de réforme a qui pénalise
activité de juré n’étant pas analysée été formulée afin que soit procédé au L’Institution est régulièrement solli-
comme une activité salariée. prélèvement des cotisations et contri- citée à propos de mises en disponi-
Le Médiateur de la République a alors butions sociales sur les indemnités bilité d’office pour raisons de santé
saisi conjointement le ministère de la versées aux jurés d’assises. À la suite d’un agent public. Théoriquement, la
Justice ainsi que celui en charge des de multiples échanges, le ministère de mise en disponibilité est décidée par
Relations sociales, afin que soient la Justice a accepté, dans l’hypothèse l’administration lorsqu’un fonction-
définies les modalités d’une éven- considérée, la mise en place du dis- naire a été déclaré inapte à repren-
tuelle régularisation exceptionnelle. positif suivant : paiement par ces per- dre ses fonctions par le comité médi-
Après de nombreuses relances, la sonnes de leurs propres cotisations cal et qu’il a épuisé tous ses droits
Chancellerie a accepté, au regard du sociales puis remboursement par statutaires à congés. Typiquement,
caractère particulier de la situation de le ministère sur justificatifs, assorti le Médiateur de la République est
Madame L., qu’une indemnité égale d’une indemnisation. Une circulaire saisi de la situation d’un agent en
au montant du préjudice, tel que cal- est en attente. fin de congés statutaires et dont OOO

médiateur de la république 29
l’usager et l’état face à la crise
Le citoyen seul face à un cadre mouvant et insécurisant

OOO l’aptitude médicale à exercer ses peuvent parfois se retrouver privés de l’imposition des non-résidents. Il
fonctions, du fait de lenteurs inhé- de toute rémunération entre leur s’agit toutefois d’une situation bien
rentes au système ou de carences dernier traitement et leur reclasse- particulière, et assez exceptionnelle
de l’administration, n’a pas pu être ment ou, le cas échéant, le paiement dans la mesure où, d’une manière
établie en temps opportun. En effet, de leurs arrérages de pension, voire générale, l’administration fiscale
tant que le comité médical et, le cas leur licenciement (avec les indem- fonctionne bien. Dans ce cas précis,
échéant, la commission de réforme, nités de chômage associées). Après cependant, on peut lui reprocher des
ne se sont pas prononcés sur un avoir été frappés par la maladie, ils retards, des défauts de réponse, des
niveau d’invalidité et sur les éven- se retrouvent donc en situation de erreurs d’homonymie non corrigées,
tuelles adaptations à réaliser pour précarité, ce qui est ressenti comme sources de litiges, lesquels se pro-
rendre au fonctionnaire son poste, une violence injustifiée à leur encon- longent parfois sur une durée inac-
ce dernier se retrouve placé en dis- tre. Le Médiateur de la République ceptable, comme en témoigne le cas
ponibilité d’office pour raisons de intervient donc régulièrement pour de Monsieur C..
santé. Échouer dans ce « no man’s tenter de démêler ces situations pré-
land » administratif est d’autant occupantes et rappeler aux adminis- Il s’est installé sur l’île de Madagas-
plus problématique que, malgré les trations que la mise en disponibilité car en 2005 et dépend donc du centre
textes lui garantissant une rémuné- d’office pour raisons de santé doit des impôts des non-résidents. Il a
ration, il arrive que la personne mise toujours s’accompagner d’une rému- reçu le 15 novembre 2007 une notifi-
en disponibilité ne perçoive alors nération. cation d’avis à tiers détenteur sur son
plus aucune rémunération. Même compte bancaire pour une créance
si la réglementation est strictement ➜ les non-résidents ou l’erreur d’impôt sur le revenu au titre des
appliquée, la variabilité des durées fiscale récurrente années 1998 et 2001. Or, Monsieur C.
de procédure et le caractère parfois Il est un service fiscal avec lequel affirme avoir payé l’intégralité de ses
contradictoire des décisions médi- le Médiateur de la République ren- impôts pour l’année 1998 et a produit
cales font que les agents concernés contre des difficultés : celui chargé son avis de non-imposition pour l’an-
née 2001. Il a constaté que sur le for-
mulaire d’avis reçu apparaît le nom de
Madame D., en qualité de destinataire,
à côté du sien. Or, le réclamant affirme
ne pas connaître cette personne.
Après avoir adressé sans succès
une réclamation auprès du cen-
tre des impôts des non-résidents et
constaté une saisie sur son compte
bancaire pour le montant total de la
créance, Monsieur C. a saisi le minis-
tre du Budget ainsi que la présidence
de la République. Il n’a reçu que des
courriers accusant bonne réception
de sa demande et lui indiquant que
son dossier était transmis au centre
des impôts des non-résidents pour
instruction. Monsieur C. a alors solli-
cité l’intervention du Médiateur de la
République, qui a saisi à son tour le
centre des impôts des non-résidents.
Or, il se trouve toujours actuellement
dans l’attente de la réponse de ce ser-
vice administratif. K

30 rapport annuel 2009


De nouveaux liens marqués
par la défiance et la suspicion
À force de s’inscrire dans la durée, les ratés et autres imperfections du système,
dont le fonctionnement s’est grippé en plus d’avoir été perverti, ont amené les usagers
et les administrations à adopter de nouveaux comportements. Face à cette nouvelle situation,
le droit a commencé à céder le pas à la force de part et d’autre, induisant une modification
en profondeur des rapports entre les usagers et leurs administrations.

Pas de « présomption d’innocence » pour l’administré


En matière de droit, la question de la bilistes sont peu nombreux à remet- les contrevenants à éteindre l’action
preuve est essentielle. Elle fonde la tre en cause la réalité de l’infraction, publique en procédant au paiement
légitimité d’une demande de la part se pose en revanche la question de la de l’amende forfaitaire minorée, ce
de l’administré. Mais il est des preuves contestation du montant de l’amende qui vaut reconnaissance de l’infrac-
impossibles à apporter si un dispositif forfaitaire. En ce domaine, le pro- tion. Elles tendent, de plus, à les dis-
de faisceau d’indices n’est pas admis. blème est qu’un grand nombre d’en- suader de former un recours par le
À cet égard, l’Institution a été saisie tre eux affirment n’avoir jamais reçu mécanisme de l’obligation de consi-
de nombreux cas de contraventions l’amende initiale, envoyée par lettre gnation du montant de l’amende en
majorées, alors que l’intéressé assu- simple, et qu’ils n’ont par conséquent cas de contestation. Par ailleurs, le
rait n’avoir jamais reçu le premier avis, pas payée, et se plaignent de recevoir Médiateur de la République a été
et même dans certains cas, avoir été une amende majorée, celle-là par amené à appeler l’attention du Garde
dans l’impossibilité d’utiliser son véhi- lettre recommandée. Les services des Sceaux sur la propension de cer-
cule aux lieu et date mentionnés. du Médiateur de la République ont tains officiers du ministère public
À force de voir sa bonne foi remise pu constater que la bonne foi mani- (OMP) à se prononcer directement
presque systématiquement en cause, feste de ces automobilistes n’était, le au fond sur les contestations sans les
l’administré en vient à se demander plus souvent pas prise en compte par transmettre au juge lorsque les condi-
si la valeur de la présomption d’in- l’administration. Les lettres simples tions de recevabilité sont réunies. En
nocence ne varie pas selon les par- n’étant pas sécurisées, la preuve de réponse, une circulaire du 7 avril
ties en présence et ne tourne pas, la non-réception de l’amende initiale, 2006 relative à la politique pénale en
par principe, en sa défaveur en cas qui se trouve à la charge du contreve- matière de contrôle automatisé de
de conflit avec une administration nant, est quasi impossible à apporter. la vitesse a rappelé cette obligation
jugée toute-puissante. Dès lors, la Chez nos voisins d’outre-Rhin, où le imposée aux OMP par l’article 530-1
méfiance s’installe dans ses rapports niveau de contestation est nettement du Code de procédure pénale (CPP).
avec les services publics et fragilise plus faible, l’amende initiale est tou- Enfin, les réclamations adressées
les liens entre État et citoyens. jours envoyée par lettre recomman- au Médiateur ont également mis en
dée… Attaché à l’efficacité de la lutte lumière des distorsions de traitement
L’automobiliste contre la délinquance routière mais des paiements selon que ceux-ci sont
est toujours coupable soucieux qu’elle ne fasse pas obsta- effectués en ligne ou par voie postale
En ces temps de lutte contre l’insé- cle au libre exercice des droits des au regard des délais imposés par le
curité routière, le nombre de procès- citoyens, le Médiateur de la Répu- Code de procédure pénale (CPP)
verbaux relatifs aux infractions de blique a par ailleurs constaté que dans la mesure où les paiements
circulation a explosé. Si les automo- les procédures en vigueur incitent effectués par cette voie ne sont pris OOO

médiateur de la république 31
l’usager et l’état face à la crise
De nouveaux liens marqués par la défiance et la suspicion

OOO en compte qu’à la date de leur trai- Admis depuis le 1er janvier 2007 à Toutes ces pièces, auxquelles s’ajou-
tement par le centre de Rennes. Il a faire valoir ses droits à la retraite, tent divers documents administratifs
donc en conséquence formulé une Monsieur I., de nationalité algérienne, officiels et attestations d’employeurs,
proposition de réforme tendant à la demeure dans un foyer Sonacotra à sont adressées à la Cram pour démon-
prise en compte, au nom du respect Martigues alors que sa famille réside trer que le réclamant est la victime
de la loi et de l’équité, de la date indi- en Algérie. En septembre 2008, la d’une fausse déclaration, d’autant que
quée par le cachet de l’opérateur pos- Cram du sud-est, qui est l’organisme l’hypothèse d’une utilisation fraudu-
tal comme preuve de règlement sous payeur, cesse le paiement de sa pen- leuse des documents officiels perdus
réserve de présence du timbre fiscal sion au motif qu’une enquête est dili- ne peut être écartée. Grâce au dossier
dans l’envoi ou de l’encaissement gentée pour fraude. Cette décision fait monté avec l’aide du délégué, l’inter-
ultérieur du chèque. À cet égard, il a suite à la réception par l’administra- ruption de paiement (qui était due à un
noté avec satisfaction que l’Assemblée tion d’un acte de décès établi en Algé- acte de décès adressé à la Cram par
nationale vient d’adopter en première rie aux nom, prénom, date et lieu de une personne dénonçant une usurpa-
lecture un amendement instituant naissance de l’intéressé. tion d’identité en Algérie) a été levée.
l’article 14 bis de la proposition de loi Nonobstant de nombreuses démar-
de simplification et d’amélioration de ches aussi bien personnelles que par Prouver ses droits à la retraite
la qualité du droit n° 1890 modifiant l’intermédiaire des services sociaux L’administration manifeste aussi un
en ce sens l’article 530 du CPP. de sa ville de résidence, le réclamant niveau d’exigence particulièrement
ne peut arriver à prouver qu’il est bien élevé au sujet des reconstitutions
L’usurpation d’identité, le titulaire de la pension qui lui a été de carrière en vue de la liquidation
un phénomène mal pris délivrée par la caisse régionale d’as- d’une retraite. La problématique la
en compte, qui rend surance maladie. Après sept mois plus souvent rencontrée est celle
les citoyens méfiants de pérégrinations administratives où une caisse de retraite rejette la
Les particuliers se retrouvent parfois infructueuses, il saisit le délégué. demande d’un administré au motif
dans des situations kafkaïennes dans Ce dernier s’emploie à reconstituer qu’aucune cotisation ne lui a été
leurs rapports avec la police ou la jus- la carrière et le parcours de vie du versée, à charge pour l’administré
tice. Les cas d’usurpation d’identité, requérant. Il rassemble tout un fais- de produire l’ensemble des pièces
qui font l’objet de nombreux dossiers ceau d’éléments tendant, d’une part, justifiant de sa situation et de ses
traités par l’Institution, en sont le sym- à apporter les preuves de l’identité et droits. Or, il peut parfois s’agir d’une
bole. Selon un rapport du Centre de de l’état civil du réclamant et, d’autre absence de versement des cotisations
recherche pour l’étude et l’observation part, à authentifier son existence. par un employeur rencontrant des
des conditions de vie (Credoc), publié Pour cela, il se réfère à deux faits difficultés économiques. Apporter
en octobre 2009, un Français a plus marquants de la vie de ce retraité : des preuves relatives à des périodes
de risques de subir une usurpation le premier concerne l’existence d’un de travail remontant souvent à plu-
d’identité qu’un cambriolage ou un frère jumeau qui aurait toujours vécu sieurs décennies relève du tour de
vol de voiture. Le coût pour la société en Algérie et dont le décès, survenu force. Mieux vaut donc, pour chaque
d’un tel phénomène frôle les qua- en février 2007, serait à l’origine salarié, conserver précieusement ses
tre milliards d’euros. Chaque année de la mesure prise par la Cram. Le bulletins de salaire et s’assurer régu-
en France, plus de 210 000 person- deuxième est la perte en février 2006 lièrement de la réalité du versement
nes sont victimes d’une usurpation par Monsieur L. de son certificat de de ses cotisations en demandant à
d’identité. Conséquence directe de la résidence algérien ainsi que de son l’Assurance vieillesse un relevé de
sophistication des services, l’usurpa- passeport. carrière, notamment lorsque son
tion d’identité peut frapper n’importe Pour preuve de son existence physi- employeur a fait l’objet d’un redresse-
qui, notamment par l’obtention des que, son médecin traitant ainsi que ment ou d’une liquidation judiciaire.
coordonnées bancaires. Ce délit peut son bailleur acceptent d’attester que Il n’est malheureusement pas tou-
avoir des conséquences extrêmement l’intéressé est bien en vie. L’authentifi- jours évident de rassembler les fiches
néfastes. Le recours à la justice consti- cation de son état civil est obtenue par de paie sur près de 40 années de vie
tue difficilement une réponse, puisque la délivrance d’un certificat de vie éta- professionnelle, notamment pour
de nombreuses plaintes n’aboutissent bli par l’officier de l’état civil du consu- les administrés ayant perdu tout ou
pas. Les délégués du Médiateur de la lat général d’Algérie à Marseille et la partie de cette documentation dans
République ont souvent été appelés vérification des données inscrites sur un sinistre. La règle veut alors que
à intervenir pour des cas considérés son passeport algérien et celles de le demandeur prouve avoir payé ses
comme insolubles par les victimes, son certificat de résidence algérien cotisations en produisant des pièces
principalement dans les domaines fis- établi par les services de la préfec- probantes et concordantes consti-
caux et routiers. ture des Bouches-du-Rhône. tuant des présomptions raisonnables

32 rapport annuel 2009


de la réalité de son activité profession- est aussi possible dans certaines cir- fois et prennent des décisions illéga-
nelle sur les années litigieuses. Mais constances mais cette procédure se les. Celles-ci doivent en principe être
l’intransigeance des règles imposées révèle très onéreuse. La lutte contre retirées mais certaines d’entre elles
par les administrations est telle que la fraude, qui s’est intensifiée ces der- ont créé des droits au profit de leur
des administrés n’hésitent pas à par- nières années, a sa part dans cette bénéficiaire. Le Conseil d’État a donc
ler de « présomption de culpabilité » situation. Si sa nécessité n’est plus à encadré cette possibilité de retrait
à leur égard, alors même qu’ils sont démontrer, elle fait aussi des dégâts dans sa jurisprudence et considéré
victimes d’un cas de force majeure. collatéraux importants, essentielle- que les décisions individuelles créa-
En cette période de tension sur le ment chez les citoyens les plus faibles. trices de droits ne pouvaient être
marché de l’emploi, les assurés s’ef- Quand le manque de vigilance d’une retirées que dans un délai de quatre
forcent du mieux qu’ils peuvent de époque est compensé par la sévérité mois. Sur ce fondement, le Média-
produire tous les documents à leur accrue de la suivante, ce sont souvent teur de la République a pu intervenir
disposition dans l’espoir d’obtenir eux qui en paient le prix. sur de nombreux dossiers, comme
une retraite plus avantageuse. Cer- celui de Madame D., qui a appelé son
tes, une régularisation demeure pos- La problématique des attention sur un litige concernant le
sible, notamment en réunissant un décisions à objet pécuniaire remboursement d’une dette de son
faisceau de présomptions de verse- créatrices de droits défunt mari.
ment ou au moins de précompte des Face à la complexité des textes et à la
cotisations. Un rachat ou une régu- diversité des situations individuelles, Celui-ci, ingénieur des travaux
larisation de cotisations prescrites les administrations se trompent par- publics, avait bénéficié d’un congé de
longue durée (CLD) à plein traitement
du 7 juillet 2002 au 6 juillet 2005, puis à
demi-traitement à compter du 7 juillet
2005. Cependant, lors du renouvelle-
ment du CLD, les services du ministère
lui avaient accordé le bénéfice d’un CLD
avec plein traitement du 7 janvier au
6 juillet 2006 par un arrêté du 25 nov-
embre 2005 et ce n’est que par arrêté
du 11 juillet 2006, soit plus de 7sept
mois après, que l’erreur a été rectifiée.
Les dispositions de l’arrêté du 11 juillet
2006, modifiant l’arrêté du 25 novembre
2005, étaient donc tardives et le titre de
perception, d’un montant de 6 154,34 €
émis le 29 novembre 2007 à l’encontre
de sa veuve, se fondait ainsi sur des
dispositions illégales. Sur ces motifs,
le Médiateur a demandé et obtenu l’an-
nulation du titre de ­perception.

Après plusieurs années d’évolution


vers des solutions plus favorables
à la sécurité juridique des admi-
nistrés, notamment l’assimilation
des ­d écisions non formalisées à OOO

médiateur de la république 33
l’usager et l’état face à la crise
De nouveaux liens marqués par la défiance et la suspicion

OOO des décisions explicites, le Conseil tage, n’a pas le caractère d’une Peut-on admettre que l’administra-
d’État a néan moi ns précisé le décision accordant un avantage tion puisse verser des émoluments
12 octobre 2009 la distinction entre financier et constitue une simple sans l’avoir préalablement décidé,
décision créatrice de droits et sim- erreur de liquidation ». Dès lors, il fût-ce implicitement ? Le Conseil
ple erreur de liquidation ce qui, devient difficile, pour l’agent desti- d’État vient de répondre positive-
pour certains, pourrait s’apparenter nataire d’un titre de perception émis ment à cette question en renvoyant
à un revirement de jurisprudence. à son encontre par l’administration, les effets préjudiciables au régime
En effet, il précise dans son arrêt de savoir comment répondre. Soute- de la responsabilité pour faute. Pour
que « le maintien indu du verse- nir l’existence d’une décision créa- l’administré, l’incertitude redevient
ment d’un avantage financier à trice de droits ? Mettre en cause la la règle et l’action contentieuse obli-
un agent public, alors même que responsabilité fautive de l’adminis- gatoire. Un travail de partenariat est
le bénéficiaire a informé l’ordon- tration ? Soulever la responsabilité en cours sur ce sujet, visant à amé-
nateur qu’il ne remplit plus les pécuniaire du comptable qui n’a pas liorer la situation.
conditions de l’octroi de cet avan- vérifié le bien-fondé de la dépense ?

Des réponses de plus en plus violentes de part et d’autre

Il a été noté plus haut que dans le y a décès du patient ou conséquences ticulier Internet et ses forums. Des
domaine médical, une demande morbides importantes. usagers surinformés, poly-informés,
d’explication de la part du patient ou Dans les échanges qu’ils ont avec mais le plus souvent mal informés,
de sa famille pouvait se traduire, si la le Pôle Santé et Sécurité des Soins opposent au corps médical des élé-
réponse est jugée insuffisante, par la (P3S) de l’Institution, les médecins ments de connaissance scientifique
rupture totale du dialogue. Dans de se justifient souvent en expliquant parcellaires, inadaptés à la situation
tels cas, l’on assiste de plus en plus qu’ils craignent de ne pas se faire ou mal interprétés, donc des certi-
fréquemment à un double comporte- comprendre, ou d’être mal compris, tudes non fondées.
ment générateur de violence, verbale s’ils utilisent des termes techniques. Si la violence gagne sans cesse du
et parfois physique : d’un côté, des Cette attitude peut aller jusqu’au terrain dans la société, les lieux où
professionnels de santé qui s’enfer- développement d’attitudes de repli l’on soigne la personne, qui devraient
ment dans des attitudes d’autopro- sur soi, de réelle rétention d’infor- par définition en être exempts, ne le
tection, de l’autre des usagers dont mations, voire de déni, qui, loin de sont plus : compte tenu des phéno-
l’incompréhension se transforme en les protéger, ne font que renforcer mènes qui viennent d’être décrits,
agressivité. Il est important de noter l’agressivité du demandeur. ils sont eux aussi de plus en plus fré-
que la rétention d’informations de La situation s’aggrave avec un quemment le théâtre d’altercations,
la part du corps médical est vécue deuxième phénomène dont le Média- voire de confrontations physiques,
par le patient comme une transgres- teur de la République a pu observer qui soulignent de façon dramatique
sion encore plus grave que l’accident l’émergence : la volonté des patients la nécessité d’une bonne médiation
médical lui-même. de judiciariser les conflits. La peur conduite à temps.
Pourquoi ce comportement de la part du procès pèse désormais sur les
des professionnels ? Dans les cas dits professionnels de santé avant tout Dans le cas d’un décès consécutif
des EIG (événements indésirables acte médical. Pourtant, si les dem- à une mauvaise prise en charge aux
graves), sur le principe, ils admettent andes d’indemnisation sont effecti- urgences, le discours de la famille,
tous le « devoir de vérité », mais pas vement de plus en plus fréquentes, empreint d’une grande violence et
nécessairement un devoir de vérité les actions au pénal sont très loin menaçant de s’en prendre physi-
intégrale. Dans la majorité des cas, d’atteindre l’importance imaginaire quement au médecin urgentiste, a
quand une complication liée aux que leur prête l’opinion publique amené le Médiateur de la République
soins est survenue, les médecins puisque l’on observe une dizaine de à prévenir le praticien mis en cause
affirment qu’ils donnent une expli- procès par an. via sa direction du risque potentiel
cation ; mais ils vont en minimiser Enfin, un dernier phénomène, lui d’agression à son encontre. Dans un
l’aspect iatrogène (provoqué par le aussi de plus en plus apparent, contri- deuxième temps, l’équipe médicale
médecin, le traitement ou les médi- bue à cette tension, voire à cette vio- du Pôle Santé et Sécurité des Soins
caments), ne pas décrire clairement lence, entre le corps médical et le a analysé l’ensemble de la prise en
l’existence d’une erreur. Le profes- patient ou sa famille : c’est l’influence charge du patient car celle-ci posait
sionnel est d’autant moins précis des multiples vecteurs d’information de nombreuses questions quant à sa
dans les informations fournies qu’il à destination du grand public, en par- pertinence. Une médiation a été fina-

34 rapport annuel 2009


lement organisée entre la famille et le avait été injustement privée des tion du Médiateur de la République, la
médecin, qui arguera des difficultés indemnités qui lui étaient dues et elle préfecture a consenti à suspendre sa
d’exercice aux urgences face à une a obtenu gain de cause. demande de restitution dans l’attente
demande toujours croissante. d’une décision du ministère de la Jus-
La famille n’a pas souhaité porter Ce type de litige se rencontre aussi tice, ce qui s’est révélé après coup jus-
plainte mais faire appel à la CRCI pour avec les établissements publics tifié. En effet, ce dernier a considéré
obtenir une expertise médicale et hospitaliers, mais dans le cas des qu’ils étaient effectivement français
pour que soit établi ou non le carac- conseils généraux, l’intervention du et a demandé au tribunal d’instance
tère fautif de cette prise en charge. Médiateur de la République butte de leur délivrer un certificat de natio-
sur un point majeur : lui opposant le nalité française.
En cas de mauvaise volonté principe de libre administration des
Si les organismes se cachent parfois collectivités locales, certains vont Si la décision de l’administration
derrière les procédures en cours ou jusqu’à ignorer les rappels à la loi et n’avait ici rien d’illégal et si aucun dys-
l’examen du dossier par une juri- ne laissent à l’usager comme issue fonctionnement n’est à relever, elle n’en
diction pour justifier leur absence que la voie contentieuse. constituait pas moins un drame pour
de réponse, il leur arrive également ce couple et ses enfants. Pour justifier
de jouer la carte de l’intimidation L’excès de zèle, son empressement et sa sévérité, l’ad-
envers l’administré, par exemple en source de préjudices ministration se réfugie derrière la loi
recouvrant abusivement des créan- Dans certains domaines, l’adminis- et le zèle nécessaire à la lutte contre la
ces, comme Madame O. a pu s’en tration a développé une tendance à fraude. D’autant que le principe préva-
rendre compte. l’hyperréactivité qui se manifeste lant en matière de document sécurisé
parfois par des décisions tellement est d’accorder une attention des plus
Elle s’est vu confier la garde de ses rapides qu’en limitant drastique- vigilantes lors de leur établissement
deux petites filles en qualité de tiers ment les possibilités de réaction de et d’appliquer les mêmes règles aux
digne de confiance, dans le cadre de l’administré, elles en deviennent demandes de renouvellement.
l’exécution de jugements en assis- préjudiciables pour lui. Bien que récente, cette prudence
tance éducative rendus par le juge des exagérée de l’administration dans
enfants de C. et, à partir de mai 2003, Monsieur et Madame N. en ont fait la délivrance de documents d’iden-
par celui de P. Durant la période où elle l’expérience lorsqu’ils ont voulu tité tend à se généraliser, comme
a résidé dans l’A., elle n’a jamais été obtenir du tribunal d’instance la en témoignent les courriers reçus
informée que, en tant que « tiers digne délivrance d’un certificat de natio- par l’Institution émanant de Fran-
de confiance », elle pouvait percevoir nalité française pour leurs enfants çais nés à l’étranger ou dont l’un des
des indemnités d’entretien. Elle n’a eu mineurs. Le tribunal d’instance leur parents est né à l’étranger. Pour les
connaissance de leur existence que a notifié un refus. Les parents ont personnes concernées, bien souvent
lorsqu’un autre département les lui a alors formé un recours auprès du françaises de naissance, cette remise
servies sans qu’elle ait eu besoin de ministère de la Justice, comme le leur en cause de leur nationalité, compo-
faire une quelconque démarche. Fin permet ­l’article 31-3 du Code civil. Or, sante essentielle de leur identité,
2006, elle a sollicité auprès du dépar- à la suite des décisions de refus et est très mal vécue. CEla génère le
tement de l’A. le paiement rétroactif avant même qu’il ne soit statué sur ce sentiment d’être méprisé, de voir sa
des prestations auxquelles elle esti- recours, Monsieur et Madame N. ont situation fragilisée mais aussi d’être
mait avoir droit depuis 1998. N’ayant reçu un courrier de la préfecture leur stigmatisé et « ostracisé » en raison
été indemnisée que partiellement et demandant de restituer les cartes de son nom ou de ses lointaines ori-
faisant valoir qu’elle avait été mal ren- nationales d’identité (CNI) sécurisées gines, sans oublier une vive incom-
seignée sur ses droits, elle a sollicité et les passeports en cours de validité préhension puisque posséder une
l’aide du Médiateur de la République. précédemment délivrés. Sensibilisée CNI implique d’avoir, lors de son éta-
Ses services ont estimé que Madame O. sur le recours à l’étude par l’interven- blissement, prouvé sa ­nationalité… OOO

médiateur de la république 35
l’usager et l’état face à la crise
De nouveaux liens marqués par la défiance et la suspicion

OOO Autant de raisons pour le citoyen demment sous administration fran- connaître l’état de traitement de sa
de nourrir du ressentiment à l’égard çaise et les rapatriés d’Afrique du demande et d’adapter son compor-
de la puissance publique. Si les illé- Nord ainsi que celles nées en France tement et ses plans en fonction de
galités sont relativement rares, les de parents étrangers entre le 26 jan- ces informations.
comportements soit désinvoltes soit vier 1889 et le 1er janvier 1976.
trop pointilleux de certaines admi- Le manque de promptitude peut
nistrations ont néanmoins pour effet Toutefois, il apparaît, à la lumière également se manifester dans le
de malmener quelquefois les liber- des réclamations reçues, que cer- domaine judiciaire, plus particuliè-
tés individuelles, d’autant que sont tains services continuent à adopter rement sur les suites données à une
parfois exigées des preuves presque une interprétation très extensive plainte. Si le Médiateur de la Républi-
impossibles à apporter, comme les de la notion de doute et demandent que ne peut intervenir dans les pro-
actes de naissance des parents, des systématiquement la production cédures juridictionnelles en cours ni
grands-parents, voire des arrière- d’un certificat de nationalité avec les connaître des litiges entre personnes
grands-parents, qu’il faut obtenir contraintes qui s’y rattachent pour privées, il peut cependant être saisi
des autorités judiciaires de pays où les usagers. Le Médiateur entend en matière de plaintes. En effet, les
les fichiers d’état civil de certaines réexaminer ce problème avec les personnes qui déposent plainte doi-
époques n’existent plus... Ici, le rôle services concernés et il est possible vent impérativement être informées,
du Médiateur de la République est qu’un texte d’un rang supérieur à la conformément aux dispositions du
d’informer les administrés sur les circulaire soit nécessaire. Code de procédure pénale, des suites
voies de recours, mais aussi sur les données à ce dépôt afin de garantir
différentes modalités d’obtention La lenteur leurs droits. C’est par exemple la date
de la nationalité française. À noter facteur d’insécurité de notification d’un classement sans
qu’ à la demande des sénateurs des La loi du 12 avril 2000, relative aux suite qui fera courir le délai d’exer-
Français de l’étranger, le Médiateur droits des citoyens dans leurs rela- cice d’autres recours, comme la cita-
de la République a mis en place en tions avec l’administration, prévoit tion directe, la saisine du procureur
2009 un délégué dédié aux Français que le silence gardé pendant deux général, la plainte avec constitution
de l’étranger. mois à la suite d’une demande vaut de partie civile.
Il est également intervenu à ce sujet refus de celle-ci. Mais dans les faits,
auprès du ministre de l’Intérieur. Il compte tenu du volume de dossiers Au cœur des libertés individuel-
lui a été indiqué qu’une circulaire et des délais de traitement que cela les se trouve la liberté d’épouser la
en date du 24 septembre 2007 rela- induit pour des administrations sou- personne de son choix. S’il suffit
tive aux conditions de délivrance et vent surmenées, il faut souvent bien de se rendre à la mairie de sa com-
de renouvellement des CNI, avait plus de deux mois pour fournir une mune dans la plupart des cas, le
été adressée aux services préfec- réponse aux administrés, sans que formalisme et les règles régissant le
toraux chargés de l’instruction de ce silence traduise forcément un mariage se compliquent lorsqu’un(e)
ces demandes. Ses termes ont été refus. Pour l’administré, cependant, Français(e) désire épouser un res-
rappelés dans une circulaire du cette lenteur dans la prise de déci- sortissant étranger dans un autre
2 décembre 2009. Celle-ci précise sion et l’absence d’informations sur pays. La loi du 14 novembre 2006,
que la détention d’une carte dite l’avancement du processus créent de entrée en vigueur le 1er mars 2007,
« sécurisée » dont il est demandé le l’insécurité et peuvent devenir pré- a introduit l’obligation pour tout res-
renouvellement constitue une pré- judiciables. Que faire en attendant ? sortissant français désireux de le
somption de possession d’état de Un recours en considérant qu’il y a faire de se voir délivrer par les auto-
la nationalité française sauf si un eu une décision implicite de refus ? rités consulaires françaises com-
élément du dossier est de nature à Rien, au risque de voir un refus arri- pétentes un certificat de capacité à
introduire un doute. Elle indique ver plus tard ? Il est des projets qui mariage. Ce document est délivré
également que peuvent entrer dans ne peuvent souffrir plusieurs mois après l’accomplissement des forma-
le champ d’application de la dis- d’attente pour être menés à bien… lités de publication des bancs préa-
pense du certificat de nationalité À titre d’exemple, la Commission lables au mariage.
par application de ce même concept de recours contre les refus de visa En pratique, à la suite de la demande
de possession d’état de français les (CRV) met en moyenne quinze mois de publication des bancs, les autori-
personnes nées à l’étranger pouvant à instruire un dossier, du fait de l’af- tés consulaires, après instruction du
justifier de leur possession d’état flux des demandes et des effectifs dossier, les publient et délivrent le
et de celle d’au moins un de leurs affectés à ce service. Dans ce cas certificat de capacité à mariage avec
parents, les personnes nées dans de figure, l’intervention du Média- la possibilité d’ordonner au préalable
un département ou territoire précé- teur de la République permet de l’audition des futurs époux qui se

36 rapport annuel 2009


fera, pour le conjoint français, par
l’intermédiaire de l’officier de l’état
civil de sa commune de résidence.
Au cours de l’entretien sera vérifiée
la réalité de l’intention matrimo-
niale des futurs époux par le biais de
questions relatives essentiellement à
la connaissance réciproque des élé-
ments de vie de chacun d’eux. En
principe, le respect de ces démar-
ches facilitera, après le mariage, sa
transcription sur les registres d’état
civil consulaires français et l’obten-
tion du visa de conjoint français. Le
Médiateur de la République a pour-
tant été saisi d’un certain nombre de
cas dans lesquels les futurs époux ter la transcription sur les registres situation aboutit bien souvent à une
avaient rencontré des difficultés, soit d’état civil en France et l’obtention impasse. Le dialogue est alors rompu
pour obtenir le certificat de capacité du visa pour le conjoint du ressortis- et le renouer devient particulièrement
à mariage, soit après la célébration sant français, tel n’est pas toujours le difficile, malgré les efforts constants
du mariage pour obtenir un visa de cas. Les services du Médiateur de la du Médiateur de la République en
conjoint français. Répu­blique ont eu à connaître de plu- ce sens. S’il est toujours possible
sieurs dossiers laissant à penser que de tenter de rétablir le contact, par
Monsieur G. a entrepris, au mois de la délivrance de ce document n’ex- l’intermédiaire des correspondants
mai 2009, toutes les démarches en vue clut pas des difficultés ultérieures. du Médiateur de la République dans
de son mariage au Maroc avec Made- Dans au moins deux cas, le certificat différents organismes ou encore via
moiselle Y. Après l’audition des futurs de capacité à mariage a été délivré, les autorités de tutelle, il faut bien
époux, les autorités consulaires leur non par le consulat lui-même, mais à souvent attendre la fin de la procé-
ont indiqué que le certificat leur serait la suite d’une décision du procureur dure invoquée par l’administration
délivré dans un délai de deux mois. Le de la République de Nantes, inter- concernée pour justifier son blocage.
mariage est donc organisé pour la fin rogé par les autorités consulaires qui Le cas de Monsieur B., confronté à
du mois d’octobre. Sans nouvelles de avaient émis un doute sur l’intention cette situation, est éclairant.
leur dossier début août, Monsieur G. matrimoniale. Une fois sa réalité éta-
se rapproche des autorités consulai- blie par une instruction, le certificat Bénéficiaire de la carte de résident
res, qui lui apprennent que, un doute a pu être délivré et le mariage a eu algérien, Monsieur B. a sollicité auprès
existant sur la validité du mariage, son lieu. Pourtant, dans les deux cas, les de la caisse d’allocations familiales
dossier sera soumis à l’appréciation du autorités consulaires ont à nouveau (Caf) le versement des prestations
procureur de la République de Nantes. émis des doutes au moment de la familiales pour ses trois enfants titu-
En réalité, il ne sera transmis au par- transcription à l’état civil et, tout en laires, depuis le 18 novembre 2003, du
quet de Nantes qu’en octobre 2009… sursoyant à transcrire, ont de nou- document de circulation pour étranger
Compte tenu de ce délai, la célébration veau saisi le parquet de Nantes. mineur (DCEM). La Caf lui ayant opposé
du mariage a dû être annulée et repor- un refus, il a saisi, le 12 décembre 2005,
tée à une date ultérieure. Du silence la commission de recours amiable
à la rupture du dialogue (CRA) qui, en date du 7 février 2006,
Si la délivrance préalable d’un cer- Lorsque l’administration se réfugie a émis un avis favorable à l’ouverture
tificat à mariage est censée facili- dans le silence, justifié ou non, la des droits aux prestations demandées OOO

médiateur de la république 37
l’usager et l’état face à la crise
De nouveaux liens marqués par la défiance et la suspicion

OOO en se référant à la jurisprudence de est pas favorable et vont jusqu’à met- mation avant tout acte et se montrer
la Cour de cassation selon laquelle le tre en cause l’action des magistrats plus rigoureux. Pour l’organisation
DCEM validait la régularité de l’entrée ou des avocats. C’est pourtant oublier du colloque singulier qui permet de
et du séjour des enfants en France. l’article 11 de la loi de 1973, qui inter- délivrer toute l’information néces-
Cette décision a toutefois été annulée dit au Médiateur de la République saire et d’éclairer le choix du patient,
par la Direction régionale des affaires « d’intervenir dans une procédure les chirurgiens pourraient prendre
sanitaires et sociales (Drass), le 24 engagée devant une juridiction, ni exemple sur les consultations de pré-
mars 2006. Monsieur B. a alors contesté de remettre en cause le bien-fondé anesthésie, qui apparaissent mieux
cette annulation devant le tribunal des d’une décision juridictionnelle ». organisées. Le Pôle Santé et Sécurité
affaires de sécurité sociale (Tass) et des Soins a eu à connaître de cas où
saisi le Médiateur de la République. En matière médicale, le refus la réaction du patient était d’autant
Aux objections de l’Institution, la Drass de l’aléa thérapeutique plus violente que ce colloque singu-
a opposé une fin de non-recevoir en Dans le domaine médical, les ten- lier avait été tenu par un chirurgien
expliquant que, l’audience étant fixée sions entre réclamants d’une part, alors que l’intervention avait finale-
au 5 juin 2009, elle ne pouvait interve- établissements hospitaliers et pra- ment été réalisée par un autre.
nir dans ce dossier avant la décision de ticiens d’autre part, deviennent Pour le Médiateur de la République,
la juridiction. d’autant plus vives que la tolérance la loi de mars 2002 n’a pas toujours
vis-à-vis du risque diminue. été bien comprise, alors qu’elle éta-
À noter qu’à partir du 5 avril 2010, le Le risque zéro est malheureusement blissait l’équité en reconnaissant
silence cessera d’être une réponse aussi impossible à atteindre en ce l’aléa et en organisant sa réparation.
dans au moins un domaine : celui des domaine qu’en d’autres. Or, si cette Sans doute peut-on déceler dans
visas. Un règlement communautaire réalité est admise collectivement, elle cette incompréhension la lointaine
obligeant les autorités compétentes ne l’est pas au plan individuel, en face conséquence de l’affaire dite du sang
des pays de l’espace Schengen à d’un cas personnel concret. Lorsque contaminé : depuis lors, l’expression
motiver les refus de visa de courte le patient ou sa famille réclame une « responsable, mais pas coupable »
durée et répondre dans les quinze médiation, quel qu’en soit le niveau, est considérée à tort comme un
jours sera effectif à partir de cette elle passe nécessairement par une refus d’accepter les conséquences
date. Les services du Médiateur de étape : faire la différence entre com- d’un accident. La notion de respon-
la République prévoient, malgré plication et aléa, entre aléa et acci- sabilité sans faute, qui fait pourtant
cette avancée, que de nombreuses dent médical fautif. Un écart entre ce partie de notre droit, n’est pas com-
réclamations sur cette question ne qui était attendu par le corps médical prise, et donc mal acceptée.
manqueront pas de lui parvenir, et ce qui a été compris par le patient Il faut, enfin, noter que la média-
le temps que les administrations ne constitue pas un accident médical. tisation croissante des accidents
concernées appliquent systémati- Pourtant, ces différentes notions se médicaux, phénomène relativement
quement la nouvelle disposition. confondent dans l’esprit des récla- récent, alourdit le climat. Sans doute
mants, qui ne retiennent que leur ne déplore-t-on pas aujourd’hui
Des jugements dommage. Le Médiateur de la Répu- davantage d’accidents qu’aupara-
de plus en plus contestés blique est par exemple souvent saisi vant, mais les médias et l’opinion,
Depuis plusieurs années, la société par des personnes qui se plaignent aussitôt alertés, ont tendance à sur-
française se judiciarise. Le recours de complications, parfois il est vrai réagir. Là encore, on peut y voir la
au procès est entré dans les mœurs : des inflammations sévères, liées à la conséquence d’affaires comme celle
les citoyens demandent avec une radiothérapie qu’elles ont subie, alors du sang contaminé ou de l’hormone
insistance grandissante à la justice même que grâce à ce traitement elles de croissance, ou encore d’incidents
de trancher des litiges portant sur les ont guéri d’un cancer. Ces personnes plus récents en radiothérapie. K
moindres aspects de leur vie et sont expliquent alors que, si elles avaient
de plus en plus nombreux à pousser connu ce risque de complications,
les portes des tribunaux en exigeant elles n’auraient peut-être pas accepté
que l’État leur donne raison. Mais de la radiothérapie.
là à l’acceptation des décisions de jus- Les services du Médiateur de la
tice, il y a un pas qu’ils sont nombreux République notent ainsi un retard
à n’avoir pas encore franchi. Certains dans l’information des usagers sur
n’hésitent pas à saisir le Médiateur de le caractère évitable ou non évitable
la République en arguant d’un dys- d’un événement, particulièrement
fonctionnement du service public de dans ce domaine de la radiothérapie.
la justice quand un jugement ne leur Il faut à cet égard améliorer l’infor-

38 rapport annuel 2009


PACIFIER LES RELATIONS,
APAISER LES TENSIONS :
LA CONTRIBUTION DU Médiateur
Écoute, accompagnement et pédagogie : face à la détresse, à la vio-
lence, à la solitude, au sentiment d’injustice, à la défiance, la démarche
du Médiateur de la République, empreinte d’humanité, constitue déjà
une première réponse. Son rôle est aussi d’agir et d’inciter à l’action.
Alors que les politiques publiques consistent de plus en plus souvent
à gérer les peurs et à privilégier le terrain émotionnel, le Médiateur
de la République met à profit sa position privilégiée d’observateur de
la société pour explorer et analyser le champ public, afin de proposer
sans relâche au législateur des pistes d’évolution et d’amélioration
des dispositifs existants.

•••

Des réponses à la demande de « vivre ensemble » p. 40


LA MÉDIATION POUR FAIRE PRÉVALOIR L’ÉCOUTE ET LE DIALOGUE p. 40
RENFORCER LES PARTENARIATS AU BÉNEFICE DE L’ADMINISTRÉ p. 44
LA MÉDIATION GAGNE DU TERRAIN p. 46

Des propositions pour un système plus humain p. 47

Les grandes orientations pour 2010 p. 57


QUELQUES NOUVELLES PROPOSITIONS DE RÉFORME À SUIVRE EN 2010 p. 57
LE NOUVEAU RENDEZ-VOUS SUR LES RETRAITES p. 58
LE SUIVI DE LA BONNE EXÉCUTION DES PROPOSITIONS ABOUTIES p. 58
LES EFFORTS À POURSUIVRE EN 2010 p. 59

médiateur de la république 39
PACIFIER LES RELATIONS,
APAISER LES TENSIONS :
LA CONTRIBUTION DU Médiateur

Des réponses à la demande de « vivre ensemble »


Paradoxalement, la montée de la défiance envers les pouvoirs publics et les institutions qui
les incarnent s’accompagne d’une demande des citoyens toujours plus forte pour davantage
de protection et de régulation de la part de l’État. Le Médiateur de la République, autorité neutre,
a développé une expertise considérable dans les domaines législatif et réglementaire et acquis
une connaissance profonde du paysage administratif français qui font de lui un acteur essentiel
de la sphère publique et lui permettent de contribuer efficacement à réduire les tensions sociales,
à recréer de solides liens de confiance entre administrations et administrés et à recentrer l’action
publique sur l’intérêt général.
L’Institution bénéficie, pour ce faire, d’un outil humain sans équivalent : celui des 281 délégués
bénévoles qui la représentent sur l’ensemble du territoire. Pour apaiser les tensions, rien ne vaut
l’écoute d’une personne physiquement présente et disponible. L’usager parle de ses difficultés
à une personne qui l’accueille et lui consacre tout le temps nécessaire à son affaire.
Qui plus est, ce délégué a lui aussi créé un réseau de correspondants dûment identifiés et facilement
joignables dans chacun des organismes avec lesquels les usagers rencontrent des difficultés.
Réintroduire une dimension humaine dans les rouages administratifs est la clé du succès
de la médiation.

La médiation pour faire prévaloir l’écoute et le dialogue

Il est intéressant de noter que le ce type a été rencontrée par l’ensem- accorder une autorisation d’occupa-
Médiateur de la République est sou- ble des services du Médiateur de la tion transitoire jusqu’au 31 octobre
vent obligé de mener une « médiation République. 2007, dans l’attente de la réponse du
globale ». L’exemple type en est les maire de Paris sur la délimitation des
contestations de contrôle fiscal, qui Au lendemain de la publication de la zones de stationnement supérieur à
représentent une part importante des loi n° 1772 du 30 décembre 2006 sur un mois.
dossiers du secteur. Dans un cas parti- l’eau et les milieux aquatiques, Voies Le projet de délimitation de ces
culièrement éclairant, le règlement du Navigables de France (VNF) a consi- zones restant toujours à cette date
litige soulevait à la fois un problème de déré que la reconduction tacite des à l’examen, VNF a décidé de pro-
procédure, un défaut de preuves et un titres d’occupation du domaine public roger ces autorisations jusqu’au
défaut de motivation des pénalités ; il fluvial était entachée d’illégalité. 30 janvier 2008 pour les uns, et au
appelait donc une médiation globale. VNF a ainsi proposé à l’ensemble des 31 mars 2008 pour les autres. À l’issue
Loin d’être limitée à la matière fis- propriétaires de bateaux-logements, de ces échéances, le maire de Paris
cale, la nécessité d’une médiation de jusqu’alors autorisés à Paris, de leur n’ayant toujours pas délivré son avis,

40 rapport annuel 2009


VNF a considéré que les propriétaires été pénalisés par l’absence d’avis Élargir la médiation
des péniches stationnaient irréguliè- du maire de Paris sur les zones de sta- En 2009, le Médiateur de la Répu-
rement et a décidé de leur facturer des tionnement de bateaux-logements, blique et ses services ont adopté
indemnités d’occupation majorées, avis requis par les textes, même les mêmes méthodes de travail que
conformément à l’article L. 2125-8 si c’est VNF qui délivre et gère les celles pratiquées quotidiennement
du Code général de la propriété des conventions d’occupation du domaine sur le terrain par ses délégués afin
personnes publiques. Ce n’est qu’une public. de prendre davantage en compte le
fois l’accord du maire de Paris reçu, au besoin d’écoute et de dialogue dans
début du mois de juin 2008, qu’il leur a À l’inverse, le règlement amiable d’un chaque action de médiation. Ainsi,
été proposé des conventions d’occupa- litige individuel acquiert parfois une la médiation physique, c’est-à-dire la
tion temporaire valable du 1er juin 2008 portée d’ensemble. Bien que la déci- rencontre effective du réclamant par
au 31 mai 2013 et qu’il a été mis fin aux sion individuelle prise par l’adminis- un représentant du Médiateur, ou de
redevances majorées. tration à l’initiative du Médiateur de plusieurs personnes en conflit sous
À l’issue de l’action du Médiateur la République ne puisse faire juris- son arbitrage, a eu une importance
de la République, et notamment prudence – puisqu’il n’est pas une ins- particulière sur certains dossiers. Si
de la médiation physique réunis- tance judiciaire –, la réponse se révèle elle a parfois permis de trouver une
sant, au printemps 2009, les ser- valable pour tous les contribuables solution, elle a d’abord et avant tout
vices de VNF et ceux du Médiateur, placés dans la même situation. Aussi le permis de recréer des liens entre les
VNF a décidé de proroger jusqu’au Médiateur demande-t-il au ministre, administrations concernées et de
30 juin 2008 les dispositions tran- au nom de l’équité, d’aligner la situa- réunir en un même lieu les protago-
sitoires que lal société avait prises tion de toutes les personnes concer- nistes d’une affaire autour d’un but
pour l’application des articles 69 et nées sur celle du requérant qui vient commun bien identifié, condition
70 de la loi du 30 décembre 2006, et d’être modifiée. C’est ce qui s’est par préalable à toute reprise de dialogue.
de proposer des autorisations de sta- exemple produit dans le cas déjà cité Si la médiation ne permet pas tou-
tionnement aux occupants concernés de la prime à la mobilité : le ministre a jours de trouver une solution immé-
sur la base desquelles une nouvelle donné des instructions pour que l’en- diate et concrète au problème sou-
facturation non majorée serait émise, semble des rectifications, qui concer- levé, elle n’en parvient pas moins à
entraînant ainsi l’annulation des naient plusieurs dizaines de milliers remettre les difficultés de l’adminis-
créances nées de l’occupation sans de personnes, soient abandonnées. Il tré au centre des préoccupations de
titre jusqu’au 30 juin 2008. en est allé de même dans le cas des chaque administration, ce qui est
Ainsi, les occupants réguliers du mineurs retraités, avec cette fois plu- déjà une victoire en soi.
domaine public fluvial n’ont pas sieurs milliers de cas.
Alors qu’elle était mineure, Made-
moiselle X. a hérité de son père d’une
société A., qui exploitait un chantier
de déchirage de péniches et a été
mise sous tutelle. Le décès de son
père était survenu alors qu’un projet
de renouvellement de la convention
d’occupation temporaire (COT) du
domaine public fluvial était en attente
de signature avec VNF. Une autre
société B., partenaire de la société
A., a rapidement fait savoir au notaire
en charge de la succession son sou-
hait de pérenniser l’exploitation du
site. Celui-ci a alors pris l’attache
des responsables de VNF pour obte-
nir la reconduction de la convention
d’occupation ainsi que l’agrément
d’exploitation afin de céder la société
A. à la société B.. En l’absence d’avan-
cement du dossier de reprise, malgré
les multiples démarches du notaire,
de la société B. et du président du OOO

médiateur de la république 41
PACIFIER LES RELATIONS, APAISER LES TENSIONS : LA CONTRIBUTION DU MéDIATEUR
Des réponses à la demande de « vivre ensemble »

OOO conseil général de la Seine-Maritime, A. étant de nouveau engagée avec les sieur P., qui a ainsi obtenu satisfaction
ce dernier a été dans l’obligation d’en communes, le Médiateur de la Répu- et a renoncé à son intention de saisir
référer au juge des tutelles, le retard blique a adressé une recommanda- le tribunal administratif.
dans le traitement du dossier de tion en équité au président de VNF en
reprise engendrant des conséquen- vue d’obtenir la remise gracieuse des Renforcer la complémentarité
ces extrêmement préjudiciables aux redevances d’occupation sans titre entre les dispositifs existants
intérêts de Mademoiselle X.. Malgré réclamées à Mademoiselle X. et la S’il est un domaine où la médiation
cela, la société A. ne s’est toujours pas prise en charge de la remise en état physique a su s’imposer avec succès,
vu délivrer de COT ni d’agrément d’ex- du site par VNF. c’est bien celui de la santé. Le Pôle
ploitation, empêchant ainsi la reprise Santé et Sécurité des Soins (PS3) du
de son activité par la société B.. En privilégiant le contact direct Médiateur de la République a déve-
En outre, un procès-verbal d’infrac- avec les parties en cause, l’Institu- loppé une activité soutenue d’orien-
tion a été dressé à l’encontre de la tion parvient souvent à éviter des tation des usagers vers les structures
société A. pour occupation sans droit contentieux, comme en témoigne de médiation locales (les CRUQPC,
ni titre du domaine public fluvial et il a l’exemple ci-dessous. Commissions des relations avec les
été réclamé à Mademoiselle X., en tant usagers et de la qualité de la prise en
qu’héritière, 52 181,81 € d’indemnités Monsieur P., exploitant agricole en charge) et régionales (CRCI, Com-
d’occupation. Par ailleurs, le préfet a Ille-et-Vilaine, fait part à la déléguée missions régionales de conciliation
informé Mademoiselle X. de sa res- d’un désaccord l’opposant à la mairie et d’indemnisation). Environ 30 %
ponsabilité pour ce qui concernait la de B. depuis la signature d’un arrêté des requêtes parvenues au P3S ont
remise en état du site. Les dernières interdisant la circulation des véhicu- été aussitôt traitées par son centre
démarches du notaire et de l’avocat de les de plus de 3,5 tonnes sur le che- dédié car elles consistaient en une
Mademoiselle X. ne recevant aucune min d’exploitation menant à l’une de demande d’informations ou d’orien-
réponse, Mademoiselle X., devenue ses parcelles. Or, cette interdiction, tation vers ces instances.
majeure et privée d’un actif qui se sollicitée par des habitants de la com- Pour les affaires plus complexes,
transformait en un passif conséquent, mune, avait pour conséquence l’im- le Médiateur de la République, sol-
a sollicité l’intervention du Médiateur possibilité pour le réclamant d’accé- licité par les usagers – et, il faut le
de la République. à l’occasion d’une der à son champ afin de l’exploiter, au souligner, dans 15 % des cas envi-
première réunion, VNF a précisé que risque d’entraîner des pertes écono- ron par des professionnels de santé
l’appel d’offres pour la reprise du site miques pour son exploitation. (directeurs d’établissement de
était rédigé mais qu’il ne pouvait rai- Il avait fait part au maire de cette soins, médecins, etc.) –, s’emploie à
sonnablement être publié dès lors situation, mais celui-ci confirmait sa les régler de façon rationnelle et non
qu’il avait peu de chances de suc- décision en expliquant que cet arrêté passionnelle avec un large recours à
cès. En effet, la difficulté du dossier avait été pris pour assurer la sécurité la médiation physique. Lorsqu’une
résidait dans le fait que le site était dans le village et précisait qu’un autre conversation téléphonique, souvent
enclavé et que les documents d’urba- accès au terrain de Monsieur P. était longue, avec le patient n’a permis
nisme des deux communes concer- possible. de conclure avec certitude ni à une
nées n’étaient pas très clairs sur la Or, Monsieur P. affirmait que ce complication courante ni à l’évolu-
possibilité de maintenir à cet endroit deuxième accès comportait des inter- tion normale de sa maladie compte
une installation classée pour la pro- dictions relatives au transport de pro- tenu des antécédents, les médecins
tection de l’environnement, d’autant duits polluants, ce que l’intéressé se du P3S de l’Institution demandent
que les communes semblaient plus devait de respecter, et que cette pro- copie du dossier pour mener une
se diriger vers un projet de « parc position ne pouvait être retenue. analyse approfondie à partir de piè-
vert ». Toutefois, à l’occasion d’une La déléguée demande alors un ren- ces médicales. Après instruction du
deuxième réunion, à laquelle ont par- dez-vous au maire. Ce dernier lui dossier et avec l’accord du patient
ticipé les communes concernées, il a confirme de vive voix les raisons de ou de la famille, le Médiateur de
été convenu que VNF, qui a pour projet cet arrêté, en particulier la protec- la République prend contact avec
de réhabiliter le site en vue d’un chan- tion des usagers. Toutefois, il se dit l’équipe médicale concernée et lui
tier naval modèle, établisse un cahier prêt à réunir les parties en cause afin propose une médiation médicale.
des charges strict avec maîtrise des de trouver une solution et à tenir la Faisant part des interrogations qui
nuisances sonores ainsi qu’un dia- déléguée informée des suites qui en ont surgi sur la prise en charge de
gnostic de pollution et que les com- découleraient. Peu de temps après, ce patient, les services du Médiateur
munes examineraient ce projet. La il lui fait parvenir copie d’un nouvel de la République proposent d’en-
discussion relative à l’avenir du site arrêté modifiant le précédent et per- voyer sur place le médecin coordi-
anciennement exploité par la société mettant l’accès au champ par Mon- nateur et un spécialiste du domaine

42 rapport annuel 2009


concerné pour discuter avec l’équipe de diagnostic prénatal ainsi que la sitions sont la source d’une iniquité ou
du dossier et analyser toute la prise nécessité de recourir à des collègues d’une injustice manifeste, soit parce
en charge. Cet échange doit permet- plus expérimentés dans des situations qu’elles laissent subsister un vide juri-
tre de repérer d’éventuels dysfonc- jugées difficiles; pour rappeler, enfin, dique, soit parce que leurs effets ont
tionnements, de dégager les points que si le dépistage des cardiopathies été mal évalués. Loin de se contenter
à améliorer et les axes de progrès à ne semble pas encore aujourd’hui de dénoncer le dysfonctionnement,
mettre en œuvre pour qu’un incident améliorer la survie et la qualité de vie la proposition de réforme émise par
similaire ne se reproduise pas. des enfants à naître, il permet au moins l’Institution détaille aussi précisément
Cette première médiation physique un entretien prénatal approfondi avec que possible le dispositif qui doit se
est vécue par les professionnels des parents informés, qui peuvent substituer au texte existant.
de santé non comme une nouvelle ainsi espérer être accompagnés dans Outre l’autosaisine, les demandes de
source de contraintes, mais comme leur choix d’une interruption médicale réforme transmises à l’Institution pro-
une opportunité d’apprendre et de de grossesse ou d’une prise en charge viennent de différents horizons de la
s’améliorer : c’est l’exploitation posi- optimale à la naissance. société civile. Le service des réformes
tive de l’erreur pour progresser. peut être sollicité par des parlemen-
La première médiation physique a taires, des magistrats, des avocats,
Madame V., 37 ans, a donné nais- aussi pour but d’en préparer une les administrations elles-mêmes ou
sance à une petite fille. Très rapide- seconde, cette fois avec le patient ou des associations. Mais ce sont bien
ment, le nouveau-né a présenté des sa famille. Pour aboutir, cette ultime souvent les délégués, qui permettent
troubles cardiaques graves en rap- rencontre ne peut être organisée que de repérer des dysfonctionnements
port avec des anomalies majeures du s’il y a eu au préalable discussion et grâce à leur présence sur le terrain,
cœur gauche. L’enfant décédera après remise en cause collective entre pro- ou les secteurs d’instruction au tra-
cinq jours de vie des suites d’une car- fessionnels de santé ; à ce moment vers des réclamations individuelles
diopathie congénitale extrêmement peut se dégager une vision du dossier impossibles à faire aboutir.
grave. Les parents de cette petite fille commune et partagée entre le Pôle Une fois alerté, le secteur des réfor-
ont saisi le Pôle Santé et Sécurité des Santé et Sécurité des Soins (P3S) mes procède à des investigations à
Soins du Médiateur de la République du Médiateur de la République et une analyse juridique et technique
pour non-dépistage échographique l’équipe médicale concernée. C’est à poussée. Reste ensuite à convaincre
de malformation cardiaque fœtale. cette condition qu’une action correc- les décideurs politiques, afin que la
L’analyse du dossier obstétrical a été tive pourra être ensuite proposée à la proposition de réforme connaisse
confiée à l’équipe médicale du Pôle. victime ou à sa famille. un prolongement législatif ou régle-
Il a conclu que l’examen du cœur fœtal Le P3S a ainsi mené à bien plus de mentaire.
n’avait pas bénéficié de toute la ri- soixante médiations physiques au Dans cette optique, le Médiateur de
gueur méthodologique exigée et d’un cours de l’année 2009. la République s’appuie de plus en
médecin échographiste qui, confronté plus sur un travail en réseau. Face
à des difficultés dans la réalisation de La place croissante du travail aux difficultés rencontrées pour
l’examen, avait omis de faire appel à en réseau pour conduire faire prendre en compte ses propo-
des tiers plus compétents. Le dépis- les propositions de réforme sitions de réforme (non-réponse des
tage anténatal des cardiopathies reste Les propositions de réforme émises ministères, enlisement des groupes
encore aujourd’hui difficile, et 20 à par le Médiateur de la République de travail interministériels, irrece-
40 % des cardiopathies congénitales visent un texte législatif ou réglemen- vabilité financière des amendements
graves échappent au diagnostic écho- taire, voire une circulaire, qui posent parlementaires, etc.), le Médiateur
graphique. L’équipe médicale du P3S a des difficultés dans leur application de la République a choisi de diver-
donc rencontré le médecin concerné auprès du public ou encore le fonc- sifier ses modes d’intervention pour
pour rappeler les recommandations tionnement d’une administration, faire aboutir ou, à défaut, porter
du Comité technique de l’échographie lorsque ces comportements ou dispo- à la connaissance d’un plus grand OOO

médiateur de la république 43
PACIFIER LES RELATIONS, APAISER LES TENSIONS : LA CONTRIBUTION DU MéDIATEUR
Des réponses à la demande de « vivre ensemble »

problèmes existant pour les enfants


Proposition de réforme : recueillis en kafala, ou encore le bilan
de la naissance à l’adoption de la réforme du recours subrogatoire
des tiers payeurs sur le montant des
indemnités allouées aux victimes de
1. La demande de réforme dommages corporels. Il a également
­– Toute personne (physique ou morale) est susceptible de saisir
organisé des groupes de travail sur le
le Médiateur de la République d’une demande de réforme.
­– Le Médiateur de la République dispose d’un pouvoir d’autosaisine
régime des enfants nés sans vie, les
en la matière. Celui-ci est notamment alimenté par les cas traités améliorations de la législation sur le
par les secteurs d’instruction ou par les délégués du Médiateur. Pacs et l’accès des personnes attein-
tes de déficiences psychiques ou
2. Instruction de la demande d’affections chroniques aux services
par le secteur des réformes, avec deux issues possibles. d’accompagnement à l’emploi.
• Élaboration d’une proposition de réforme, en cas :
­– de dysfonctionnement récurrent d’une administration
ou d’un service public ; Dans la même perspective, des collo-
­– de conséquences inéquitables résultant de l’application ques ont été organisés par le Média-
d’une norme réglementaire ou législative. teur à l’Assemblée nationale sur les
• Clôture négative de la demande : thèmes de l’expertise médicale judi-
lorsque le Médiateur estime, après examen, que la demande ciaire, de la réparation amiable des
de réforme qui lui a été adressée est injustifiée.
accidents médicaux ainsi que sur le
3. Envoi de la proposition de réforme à l’ensemble problème du crédit à la consomma-
des ministres concernés tion et du malendettement.
Afin de promouvoir ses propositions
4. Envoi aux parlementaires et de partager son expertise, le
 orsqu’elle est de niveau législatif, la proposition de réforme
L Médiateur de la République a éga-
est également communiquée aux présidents des commissions
lement rencontré régulièrement les
parlementaires concernées et aux rapporteurs des projets ou
propositions de loi susceptibles de l’intégrer. ministres au cours de l’année et a
été entendu par des groupes de tra-
5. Le comité interministériel de suivi vail et des commissions parlemen-
 e Médiateur peut demander l’inscription d’une proposition de réforme
L taires. Il a ainsi été auditionné sur
à l’ordre du jour d’un comité interministériel placé sous la présidence le projet de loi portant réforme du
du ministre chargé de la réforme de l’État.
crédit à la consommation ; pour la
6. Clôture de la proposition de réforme préparation de la loi portant réforme
Lorsque la proposition de réforme est satisfaite par une mesure de l’hôpital et relative aux patients,
adéquate ou, plus rarement, lorsqu’elle fait l’objet d’un rejet justifié à la santé et aux territoires ; à pro-
de la part des pouvoirs publics, le Médiateur procède à sa clôture. pos du projet de loi instaurant un
dispositif d’indemnisation des victi-
mes des essais nucléaires français ;
OOO ­ ombre d’interlocuteurs les problè-
n gnostic et de dégager des pistes de dans le cadre des débats relatifs à
mes qu’il soulève. Il s’efforce d’orga- solution qui seront ensuite soutenues la prise en charge des victimes de
niser lui-même le débat en mettant ou acceptées par les participants. l’amiante ; sur la modification des
en présence les différents acteurs droits des personnes liées par un
concernés (associations, organismes L’année 2009 aura donc vu la tenue Pacs ; dans le cadre de la révision
publics, magistrats, avocats, parle- de tables rondes présidées par le des lois bioéthiques, dans le cadre
mentaires, représentants des minis- Médiateur de la République, notam- de la préparation à la création du
tères…) afin de faire émerger un dia- ment sur le statut juridique et les Défenseur des droits.

Renforcer les partenariats au bénéfice de l’administré

Afin de remettre l’humain au cen- constituent le paysage administra- sionnent, les services du Médiateur
tre des rapports entre administra- tif français s’est imposé au fil des de la République entretiennent et
tions et citoyens, renforcer les liens années comme une priorité pour développent un réseau d’interlo-
du Médiateur de la République Jean-Paul Delevoye. Au gré des cuteurs, concluent des partena-
avec les différents organismes qui dossiers et des contacts qu’ils occa- riats, avec l’idée que ces rapports

44 rapport annuel 2009


privilégiés permettront d’apporter de retraite complémentaire des naires désireux d’utiliser leurs Cesu
plus rapidement des réponses aux salariés) s’est elle aussi révélée fruc- pour régler leurs frais de crèche ont
citoyens qui saisissent le Médiateur tueuse. L’année 2010 devrait offrir de rencontré des problèmes pour les
de la République. nombreuses occasions d’intensifier faire valoir auprès de certaines crè-
Parmi les partenariats qui ont mar- et de consolider les liens avec l’Ins- ches, notamment municipales, qui
qué l’année 2009, celui conclu par titution. Elle permettra également ont purement et simplement refusé
convention le 21 octobre avec le d’approfondir la collaboration avec ce moyen de paiement. Pour justi-
Pôle Emploi figure en bonne place. l’Agence centrale des organismes de fier leur position, les élus locaux ont
Avant la fusion des Assedic et de sécurité sociale (Acoss) et la Caisse argué du fait qu’il leur était néces-
l’ANPE au sein du nouvel organisme, d’assurance maladie des industries saire d’adhérer au centre de règle-
le Médiateur de la République dis- électrique et gazière (Camieg). ment du Cesu pour pouvoir accepter ce
posait uniquement d’un réseau de Les équipes du Médiateur de la mode de paiement, solution génératrice
correspondants efficaces et iden- République ont pu, pour la première de coûts qu’ils refusaient d’assumer.
tifiés dans les Assedic. Pour faire fois en 2009, s’appuyer sur le réseau Après une intervention infructueuse
face aux difficultés rencontrées des Caisses régionales d’assurance auprès du ministère des Finances et
lors de la mise en place du nou- maladie (Cram) pour faire avancer sans réponse de celui des Affaires
veau réseau de correspondants, il les demandes relatives aux retraites sociales, l’Institution a entrepris de
a été décidé de formaliser les liens impliquant des caisses de retraite se rapprocher du réseau des caisses
entre le Pôle Emploi et l’Institution. étrangères. En vertu d’un accord d’allocation familiale (Caf), qui sont
Signée le 21 octobre 2009 par Jean- avec le Médiateur de la Républi- les partenaires principaux des crè-
Paul Delevoye et Christian Charpy, que, la Caisse nationale d’assurance ches par le biais de conventionne-
directeur général du Pôle Emploi, la vieillesse permet au secteur social ments, dans le cadre de leur action
convention de partenariat redéfinit de solliciter l’appui des Cram pour sanitaire et sociale. L’Institution a
également les pouvoirs du médiateur traiter ce type de dossier, dont le proposé d’inclure l’exigence d’ad-
national du service public de l’emploi nombre va croissant, et parvenir à hésion au centre de règlement du
et les modes de collaboration avec des reconstitutions de carrière plus Cesu dans le renouvellement des
le Médiateur de la République. Elle rapides. conventions. En parallèle, la Caisse
prévoit également que les délégués Des partenariats de fait peuvent nationale d’allocations familiales a
disposent, dans chaque région, d’un également se nouer lorsque les ser- mis le Médiateur de la République
correspondant. vices du Médiateur de la République en contact avec l’Agence des servi-
sont amenés à se pencher sur un ces à la personne, qui est devenue
L’année 2009 aura également vu dossier particulier. De nombreux un véritable partenaire avec lequel il
le renforcement et l’approfondis- agents de la fonction publique béné- a agi pour débloquer la situation. En
sement des liens entre les services ficient, de par les œuvres sociales de janvier 2009, leur action commune
du Médiateur de la République et la leurs administrations, de primes de a permis de faire exonérer de frais
Caisse interprofessionnelle de pré- crèche. Dans le cadre du dévelop- de traitement les Cesu attribués par
voyance et d’assurance vieillesse pement des services à la personne les Caf aux personnes en situation
(Cipav). En revanche, les saisines a été mis au point un chèque emploi critique dans le cadre du plan de
reçues par le Médiateur de la Répu- service universel (Cesu) dont le relance de l’économie. Poursuivant
blique ont montré que les rapports préfinancement est assuré par l’em- leur travail sur ce dossier toute l’an-
de la Cipav avec ses affiliés n’avaient ployeur. Le ministère de la Justice née, le Médiateur de la République
pas connu la même amélioration. et le ministère de l’Agriculture se et l’Agence des services à la per-
La collaboration avec l’Agirc (Asso- sont rapidement situés parmi les sonne ont réussi à obtenir l’adop-
ciation générale des institutions de administrations ayant le plus œuvré tion d’un décret interministériel le
retraite complémentaire des cadres) au succès de ce mode de prise en 19 octobre 2009 exonérant toutes les
et l’Arrco (Association pour le régime charge. Cependant, des fonction- crèches des frais relatifs au Cesu. OOO

médiateur de la république 45
PACIFIER LES RELATIONS, APAISER LES TENSIONS : LA CONTRIBUTION DU MéDIATEUR
Des réponses à la demande de « vivre ensemble »

OOO Les relations avec le Régime social nale et du ministère de l’Économie, En matière de droit au logement,
des indépendants (RSI) ont, elles trouve une pertinence renouvelée. le Médiateur de la République et le
aussi, connu un nouvel essor en 2009. Ce partenariat devra permettre de secrétaire d’État en charge du Loge-
Pour la première fois, l’ensemble des définir un vade-mecum commun à ment et de l’Urbanisme ont signé
correspondants du Médiateur de la toutes les administrations dans la un protocole d’accord fin décembre
République au sein du RSI ont été gestion des situations génératrices 2009 pour garantir l’accès effectif
réunis au siège de la Caisse nationale d’indus ou de trop perçus afin d’of- aux droits fondamentaux des popu-
du RSI, en compagnie de l’équipe du frir aux administrés davantage de lations les plus précaires. Ce disposi-
secteur social et du directeur général sécurité juridique vis-à-vis des déci- tif fait des délégués du Médiateur les
de l’Institution. Après la désignation sions des administrations. interlocuteurs des associations et du
de ces correspondants en 2008 et Un pas supplémentaire a été franchi référent unique (personne chargée
leur entrée en fonction cette année, dans le sens des attentes du Médiateur de suivre chaque SDF) pour lever
l’année 2010 devrait permettre d’en- puisque lors de la dernière réunion du les freins à l’accès effectif aux droits
richir les liens avec le Médiateur de la groupe de travail le 1er décembre, il a fondamentaux des personnes les
République et de développer de nou- été convenu qu’une réforme législa- plus exclues (prestations sociales,
veaux axes de collaboration. tive était nécessaire afin qu’une règle prise en charge des soins, droit au
claire soit posée pour distinguer l’er- logement, domiciliation…).
En matière de décisions à objet reur de liquidation du fait générateur
pécuniaire créatrices de droits, le de droit, fixer le délai de contestation Enfin, le Médiateur a également
travail en commun, engagé depuis et caractériser la bonne foi du fonc- signé une convention avec la Cham-
le printemps 2009 à l’initiative du tionnaire. Il est également prévu de bre nationale des huissiers de justice
Médiateur de la République et des traiter les incidences fiscales des trop à la mi-décembre.
médiateurs de l’Éducation natio- perçus de rémunération.

La médiation gagne du terrain

Le rôle de l’Institution est de s’adres- La mise en œuvre du programme est C’est l’exemple de Monsieur R.,
ser à toute la population, y compris quasiment arrivée à son terme. Au détenu âgé de 65 ans, qui a sollicité
aux détenus. La convention signée le 1er janvier 2010, ce sont 58 770 déte- auprès de sa caisse de retraite la
16 mars 2005 entre le Médiateur de nus (dont 3 140 outre-mer), soit liquidation de sa pension en février
la République et le Garde des Sceaux 94 % de l’effectif total, répartis sur 2008. Pour régulariser son dossier, la
a donné le coup d’envoi d’une action 164 sites pénitentiaires, qui béné- caisse lui a demandé sa carte d’iden-
novatrice de l’Institution : la mise en ficient d’un accès direct à un délé- tité, sa carte Vitale et les références
place, à titre expérimental, de per- gué du Médiateur de la République. de son compte bancaire. Après huit
manences de délégués bénévoles Parmi ces sites, 60 disposent d’une mois de délai et plusieurs relances,
dans des établissements pénitentiai- permanence régulière, les 104 il a fini par obtenir sa carte nationale
res. La seule façon de mesurer l’am- autres étant desservis au cas par d’identité et sa carte Vitale. Mais il
pleur des besoins dans ce domaine cas. 149 délégués (soit près de la subsistait un blocage du centre de
était de permettre à l’Institution moitié de l’effectif total du réseau) détention pour l’obtention de la pho-
d’aller à la rencontre des détenus. sont actuellement impliqués dans tocopie de la carte Vitale et l’autorisa-
C’est ainsi que dix établissements ce programme. Le Médiateur de la tion d’ouvrir un compte bancaire. De
pénitentiaires, comptant au total République maintient donc bien évi- ce fait, il ne pouvait toujours pas tou-
7 500 détenus, soit plus de 10 % de la demment l’objectif qu’il avait fixé : cher sa pension. Après l’intervention
population pénale française, ont été assurer, avant le terme de son man- d’un délégué du Médiateur de la Répu-
choisis pour une phase d’expérimen- dat, un accès direct à un délégué du blique auprès de la direction du centre
tation. Cette dernière s’est achevée Médiateur de la République à tous de détention, les deux problèmes ont
en septembre 2006 sur un bilan très les détenus. pu être résolus.
positif. Le Médiateur de la Républi- Dans ce cadre, les délégués sont
que et le Garde des Sceaux ont signé souvent appelés à traiter des dos- Fort de cette expérience de terrain,
en janvier 2007 une convention qui siers variés de détenus, débloquant le Médiateur a été associé à la rédac-
prévoit la généralisation progres- des cas extrêmement divers mais tion de la loi pénitentiaire (voir
sive, d’ici à 2010, de l’accès des déte- ayant pour point commun de placer page 66). K
nus aux délégués du Médiateur de la les détenus dans des situations for-
République. tement dommageables.

46 rapport annuel 2009


Des propositions pour un système plus humain
La montée de la précarité, la fragilisation et la paupérisation d’une partie de la population – constats
partagés par le Médiateur de la République et ses délégués – inspirent fortement les propositions
de réforme qu’il soumet aux décideurs politiques.

La fragilisation et la paupérisation prendre en compte l’évolution de C’est le sens de la proposition de


d’une partie de la population repré- la société dans des domaines aussi réforme relative à l’octroi des allo-
sentent la principale source d’inspi- divers que la famille, les droits des cations familiales aux parents
ration des propositions de réforme consommateurs, le besoin de trans- d’enfants étrangers : le versement
du Médiateur de la République. parence et d’accès au droit. Lorsque des prestations familiales, au titre
L’une des propositions de l’Institu- la loi apparaît lacunaire, ou même d’enfants étrangers, est soumis à un
tion, longuement développée dans inexistante, pour protéger les plus double contrôle visant à s’assurer
son précédent rapport de 2008, est faibles et rétablir un relatif équi- de la régularité du séjour de l’étran-
tout d’abord de renforcer, dans tous libre entre les intérêts en présence, ger demandeur de la prestation et
les services publics, la fonction d’ac- le Médiateur de la République pro- de celle de l’entrée et du séjour de
cueil et d’information de ces popu- pose aux décideurs politiques des l’enfant mineur pour lequel elle est
lations écartées de la technologie. modifications du droit existant ou sollicitée. L’article L. 512-2 du Code
L’Institution s’attache également à de son application. de la Sécurité sociale (CSS) énu-
mère limitativement sept situations
ouvrant droit aux prestations fami-
liales dont celle des enfants entrés
dans le cadre de la procédure de
regroupement familial.

Le Médiateur de la République a été


saisi de nombreuses réclamations
de familles étrangères en situation
régulière dont les enfants dont elles
ont la charge et qui résident de façon
permanente avec elles ne sont pas
entrés sur le territoire conformé-
ment à l’une des situations énumé-
rées par l’article visé ci-dessus. Les
caisses d’allocation familiale oppo-
sent un refus absolu à leur demande
de prestations, ce qui peut être gra-
vement préjudiciable à ces enfants
et à leurs conditions de vie.
Faute d’obtenir une réponse des
pouvoirs publics plus conforme à
l’intérêt de ces enfants, le Médiateur OOO

médiateur de la république 47
PACIFIER LES RELATIONS, APAISER LES TENSIONS : LA CONTRIBUTION DU Médiateur
Des propositions pour un système plus humain

OOO c­ onsidère qu’il y a lieu de modifier mettant de compenser la réduction pleinement contribué à l’améliora-
l’article L. 512-2 du CSS de façon d’espérance de vie des personnels tion du sort des victimes en permet-
à rendre possible la régularisation de l’État dont la santé a été mise tant l’indemnisation des aléas médi-
de la situation des enfants concer- en danger pour avoir participé aux caux et en facilitant les procédures.
nés lorsqu’elle est conforme à leur essais nucléaires français. Néanmoins, ce dispositif nécessite
intérêt. Dans sa réponse à l’Institution, en quelques perfectionnements et un
En proposant cela, il se borne à rap- date du 11 mars 2009, le ministre de approfondissement afin de permet-
peler la position du Conseil consti- la Défense a fait part de son accord tre à un plus grand nombre de victi-
tutionnel (décision du 15 décembre de principe sur plusieurs points, dont mes d’en bénéficier. Dans cette pers-
2005), qui considère qu’il n’est pas la réparation intégrale du préjudice pective, le Médiateur a soumis aux
interdit de déroger à la règle selon subi et le régime unique d’indemni- pouvoirs publics les propositions de
laquelle le regroupement familial sation pour tous ; le renversement réforme suivantes : l’élargissement
ne peut être demandé que pour des de la charge de la preuve au bénéfice du droit d’accès au dispositif par
enfants résidant hors de France à des victimes ; la publication d’une l’abaissement des seuils de gravité
la date de la demande. Il ajoute que liste unique des maladies radio- des préjudices ; la possibilité que la
lorsqu’il sera procédé, dans le cadre induites. Il a en revanche rejeté deux Commission nationale des accidents
de la procédure de regroupement propositions : la création d’un fonds médicaux (CNAMed) puisse user
familial, à la régularisation de la public dédié et celle d’une allocation de son pouvoir de recommandation
situation d’un enfant déjà entré en de préretraite. pour proposer quelques éléments de
France, cet acte de régularisation Un projet de loi visant à instaurer un définition de la notion de « troubles
devra ouvrir droit aux prestations dispositif d’indemnisation des victi- particulièrement graves dans les
familiales. mes des essais nucléaires français a conditions d’existence » (TPGCE) ;
D’autres actions visent à améliorer été ensuite proposé au Parlement. l’amélioration de la prise en compte
les droits des victimes de dommages Jean-Paul Delevoye s’est beaucoup des victimes dites « par ricochet »,
corporels et le fonctionnent des dis- impliqué dans ce débat parlemen- personnes de l’entourage de la vic-
positifs d’indemnisation. taire. Le texte définitif a été adopté time qui subissent les effets de l’acci-
le 22 décembre introduisant, notam- dent médical. Ces mesures apparais-
Victimes d’essais nucléaires, ment, la reconnaissance d’une pré- sent essentielles pour les victimes
d’accidents médicaux somption de causalité entre la mala- d’accidents médicaux qui se retrou-
ou de dommages corporels die et les essais nucléaires, lorsque vent dans des situations souvent dra-
Les civils et militaires dont la santé les conditions prévues par la loi sont matiques.
a été mise en danger par des essais réunies, le respect de la procédure Dans le même ordre d’idée , le droit
nucléaires français pratiqués entre contradictoire et la nécessité pour en matière de dommage corporel ne
1960 et 1996 dans le Sahara algérien le ministre de la Défense de motiver constitue pas aujourd’hui un droit
et en Polynésie française éprouvent ses décisions de rejet des deman- unifié et homogène. Sa réparation est
les plus grandes difficultés pour faire des. Le Médiateur se félicite de éclatée entre de nombreuses procé-
reconnaître leurs préjudices et obte- ces avancées, qui vont dans le sens dures, tantôt juridictionnelles, tan-
nir réparation. À l’occasion du pro- d’un dispositif plus transparent et tôt amiables, faisant intervenir des
jet de loi présenté par le ministère impartial. Il regrette cependant que acteurs variés (compagnies privées
de la Défense pour traiter ce pro- le droit à réparation des proches des d’assurances, fonds d’indemnisation,
blème, le Médiateur de la Républi- victimes pour leurs préjudices pro- juges). Cette organisation engendre
que a formulé plusieurs propositions pres ne soit finalement pas prévu d’importantes iniquités entre victi-
pour parvenir à l’instauration d’un par le texte. Il espère une parution mes et une forte insécurité juridique.
mécanisme de réparation équitable : rapide des décrets d’application et Il est possible de voir deux victimes
l’établissement d’une liste des mala- souhaite que ceux-ci garantissent présentant le même dommage obte-
dies radio-induites par une autorité le fonctionnement indépendant du nir deux indemnisations très sensi-
scientifique indépendante ; une pré- comité d’indemnisation et prennent blement différentes, selon qu’elle est
somption de lien de causalité entre en compte l’ensemble des patholo- décidée par voie juridictionnelle ou
la maladie constatée et l’irradiation gies concernées. amiable, mais également en fonction
nucléaire ; une réparation intégrale de la localisation géographique des
des préjudices par un fonds public Autre sujet majeur d’intervention du victimes ou du type de juridiction
spécifique et indépendant ; un droit Médiateur de la République : l’amé- compétente.
à réparation ouvert aux ayants droit lioration du dispositif de réparation Si l’unification des procédures d’in-
de la victime ; ou encore la création amiable des accidents médicaux créé demnisation actuelles paraît hors
d’une allocation de préretraite per- par la loi du 4 mars 2002. Ce texte a de portée, il semble en revanche

48 rapport annuel 2009


envisageable de proposer des outils Jean-Paul Delevoye a formulé des dure de rétablissement personnel
méthodologiques communs à tous propositions de réforme dont plu- et la composition de la commission
les acteurs de l’indemnisation du sieurs objectifs ont été repris par de surendettement a été élargie à
dommage corporel. à la suite du le projet de loi portant réforme du un membre d’association sociale ou
rapport Dintilhac, qui établissait crédit à la consommation en cours familiale et à un juriste.
une nomenclature de référence dans d’examen au Parlement. S’agissant L’encadrement de la publicité a été
le but d’améliorer l’égalité de trai- de l’obligation de vérification de la renforcé, mais le Médiateur persiste
tement et la sécurité juridique des solvabilité de l’emprunteur, le projet à demander que les risques encou-
victimes, le Médiateur de la Répu- de loi prévoit la consultation, avant rus en cas de retard ou d’inexécution
blique a formulé une proposition de tout octroi de prêt, du Fichier natio- des obligations y figurent aussi. Le
réforme permettant de donner une nal des incidents de remboursement Parlement devrait également ajouter
force juridique à cette nomenclature des crédits aux particuliers (FICP), une disposition relative à l’éducation
et de rendre son utilisation obliga- qui devient obligatoire sous peine budgétaire et financière.
toire. Cette proposition permettrait de déchéance des intérêts. De plus, Le délai de rétractation est porté,
également de créer une base de don- le fonctionnement de ce fichier va en vertu des règles européennes, à
nées nationale de l’indemnisation du être plus efficace, avec une mise à quatorze jours. Le Médiateur de la
dommage corporel, qui recenserait jour plus réactive. Conformément République regrette cependant que
l’ensemble des décisions d’indem- aux souhaits du Médiateur, les le dispositif adopté permette de ver-
nisation, qu’elles soient juridiction- délais d’inscription au FICP ont été ser les fonds et de les utiliser avant
nelles ou amiables, et présenterait harmonisés et réduits à cinq ans l’expiration de ce délai, ce qui le
pour chaque décision les circons- pour les bénéficiaires de la procé- rend en pratique inopérant. OOO

tances de l’espèce, le montant de


l’indemnité allouée et sa répartition.
Le Médiateur suggère également la
création, sous la tutelle du ministère
de la Justice, d’une commission natio-
nale pluraliste qui contribuerait à la
diffusion d’une approche globale de
la réparation du dommage corporel
et exercerait une fonction régulatrice
par la diffusion des bonnes pratiques.

Mieux protéger
les consommateurs
Parmi les autres préoccupations
émergentes au sein de la population,
le Médiateur de la République se
mobilise depuis cinq ans sur la pro-
blématique du crédit à la consom-
mation. Cette facilité de paiement,
qui séduit un public de plus en plus
large et pallie la faiblesse des reve-
nus, possède un revers de médaille
qui plonge parfois le consomma-
teur dans le surendettement. Afin
de protéger ceux qui y ont recours,

médiateur de la république 49
PACIFIER LES RELATIONS, APAISER LES TENSIONS : LA CONTRIBUTION DU Médiateur
Des propositions pour un système plus humain

OOO Pour les contrats de crédit renouve- conventions de compte de dépôt, ratoire et la modération des frais
lable, bien que le projet de loi men- le client devant être préalablement pour les personnes surendettées.
tionne que chaque échéance doive informé de leur modification. Il est En octobre 2009, la ministre de
comprendre un remboursement aussi avisé chaque année, au moyen l’Économie et des Finances a confié
minimal du capital emprunté, ces d’un récapitulatif, du montant des à Marielle Cohen-Branche, magis-
crédits, qui sont les plus dangereux frais payés l’année précédente. trate à la Cour de cassation, une
pour le surendettement, ne sont Néanmoins, dans le contexte actuel mission d’analyse et de proposition
pas suffisamment encadrés. Sans de crise économique, et au vu des sur les relations entre les personnes
requérir leur interdiction totale, le réclamations qui lui sont adressées, surendettées et les banques. Cette
Médiateur estime souhaitable que le Médiateur de la République a sou- mission s’intéressera notamment
leur reconduction ne soit plus tacite haité proposer au Gouvernement à la question des frais bancaires et
mais passe par une demande écrite de nouvelles initiatives plus pro- au fonctionnement des comptes. Le
de l’emprunteur. tectrices des clients des banques. Médiateur de la République espère
Enfin, l’Institution est satisfaite du Ces propositions, fruit d’une longue que ses propositions seront reprises
travail entamé par le ministère de réflexion, portent tout d’abord sur à cette occasion.
la Justice et la Banque de France l’adoption d’un lexique officiel des L’action du Médiateur de la Répu-
concernant la communication d’in- termes désignant les différentes blique a également permis de corri-
formations entre les fichiers des catégories de frais bancaires et la ger une imperfection du décret du
juridictions civiles et ceux tenus par création d’un site Internet gouver- 11 septembre 2002, qui instituait le
les commissions de surendettement nemental permettant aux banques solde bancaire insaisissable (SBI),
des particuliers. Une amélioration d’afficher le montant de leurs frais, permettant à toute personne faisant
de la connaissance des dossiers et sur une base déclarative, à l’instar l’objet d’une procédure de saisie de
une réduction des délais d’instruc- du site « envoidargent.org ». Il est demander à l’établissement teneur
tion devraient en résulter. Au-delà ensuite proposé d’étendre l’envoi du du compte la mise à disposition
de cette connexion, le Médiateur de récapitulatif de frais bancaires aux immédiate, et pour un délai d’un
la République est favorable à un croi- titulaires d’un livret A, celui-ci étant mois, d’une somme à caractère ali-
sement des fichiers entre les com- parfois utilisé comme un compte de mentaire d’un montant au plus égal
missions de surendettement et les dépôt. Il est également suggéré aux à celui du RMI mensuel (à présent
bureaux des hypothèques, afin que banques d’assurer une information RSA). Selon les associations de
les commissions disposent du maxi- préalable du client, par message consommateurs et les rares études
mum d’informations relatives au électronique ou SMS, en cas de pré- disponibles, le SBI demeurait sous-
patrimoine immobilier des intéres- lèvement de frais non récurrent, utilisé du fait notamment de son
sés et évitent, le cas échéant, d’avoir notamment lors d’un découvert, de caractère méconnu et d’une appli-
recours à la vente du bien. De même, façon à faciliter le redressement de cation subordonnée à une demande
l’accès des commissions au système la situation. Concernant les chèques expresse. Le Médiateur de la Répu-
d’immatriculation des véhicules, qui insuffisamment provisionnés, il est blique a donc proposé de rendre
fait état du parc automobile en cir- proposé d’abaisser le plafond des automatique l’activation du SBI, afin
culation, semble souhaitable afin de frais de rejet pour les chèques de qu’il puisse s’appliquer dès la saisie
renforcer la connaissance des actifs montant modique et de supprimer la bancaire, sans demande préalable.
des demandeurs. pénalité libératoire versée au Trésor À la suite de son intervention, un
L’attention du Médiateur de la Public. Enfin, la création d’une caté- amendement à la loi du 12 mai 2009,
République a également été appe- gorie de frais minorés pour les per- relative à la simplification et à la cla-
lée sur certains excès constatés en sonnes surendettées est souhaitée. rification du droit et d’allègement
matière de frais bancaires, en ter- Ces propositions ont été transmises des procédures, a été adopté en ce
mes tant de lisibilité que de mon- aux ministres concernés en juillet sens. Cette mesure est entrée en
tant. La Commission européenne, 2009 en faisant valoir que le mar- vigueur le 1er août 2009.
au travers de l’étude sur les services ché bancaire, où se confrontent les Cependant, une difficulté d’applica-
financiers publiée le 22 septembre, clients souvent en situation difficile tion s’est fait jour, certains réseaux
est d’ailleurs venue appuyer les et la puissance des banques, doit bancaires n’appliquant pas l’auto-
réflexions du Médiateur. Au cours plus que tout autre être soumis à des maticité du SBI en cas d’opposition
des dix dernières années, de nom- règles strictes garantissant la trans- administrative pour une amende,
breux progrès ont certes été accom- parence. Le ministère de l’Économie dans l’attente d’un décret d’applica-
plis quant à la transparence de ces et des Finances s’est montré réservé tion et alors même que les services
frais : les stipulations en matière sur ces réformes, à l’exception de la fiscaux font mention du SBI automa-
tarifaire doivent figurer dans les mesure concernant la pénalité libé- tique dans la lettre notifiant l’oppo-

50 rapport annuel 2009


sition au redevable. Une demande qui, elles, n’étaient pas exonérées de times d’une maladie professionnelle
de clarification a donc été adressée la redevance et la répercutaient sur occasionnée par l’amiante ou qui ont
au ministre compétent par le Média- les détenus. À la demande pressante été exposées à ce risque. Sous réserve
teur de la République. de Jean-Paul Delevoye, le ministre de l’arrêt de toute activité profession-
du Budget a, par une instruction du nelle, celles-ci peuvent, parfois dès
Exonération de la redevance 10 juillet 2009, mis fin à cette injustice 50 ans, bénéficier d’une allocation
audiovisuelle : une injustice en faisant bénéficier les associations de cessation anticipée d’activité des
corrigée au bénéfice socioculturelles de l’exonération. travailleurs de l’amiante (Acaata),
des détenus créée par la loi de financement de
En 2009, le Médiateur a obtenu du Le douloureux dossier la Sécurité sociale pour 1999 et qui
ministre du Budget que soit corrigée de l’amiante est délivrée aux intéressés jusqu’à ce
une anomalie qui portait préjudice à Le cas des salariés victimes de qu’ils remplissent les conditions pour
de nombreux détenus. Des délégués maladies du fait d’une exposition à percevoir une pension de retraite à
intervenant dans les prisons avaient l’amiante a occasionné une mobilisa- taux plein. Initialement prévu pour
alerté le Médiateur, en 2008, sur tion de longue haleine du Médiateur les salariés du secteur privé relevant
une disparité choquante entre les de la République. Depuis 2005, sur la du régime général, ce dispositif a
détenus qui avaient les moyens de base des nombreuses réclamations ensuite été étendu à d’autres sec-
s’acheter un téléviseur et qui étaient dont il a été saisi, Jean-Paul Delevoye teurs professionnels (salariés agrico-
exonérés de la redevance audiovi- appelle avec constance l’attention des les, ouvriers de l’État du ministère de
suelle du fait de leur non assujettis- pouvoirs publics sur les lacunes du la Défense, marins, etc.).
sement à la taxe d’habitation et ceux dispositif spécifique de préretraite Le Médiateur de la République a mis
qui louaient ces mêmes téléviseurs destiné à compenser la réduction de en lumière la disparité des règles
à des associations socioculturelles l’espérance de vie des personnes vic- entre les régimes d’assurance mala-
die servant cette allocation et leur
manque de coordination, aboutis-
sant à traiter de manière très inéqui-
table les victimes de l’amiante. Cette
situation est particulièrement préju-
diciable pour les personnes qui, du
fait de changements dans leur car-
rière professionnelle, sont affiliées
à différents régimes d’assurance.
Par ailleurs, certaines victimes de
l’amiante peuvent être privées du
droit d’accès à l’Acaata, uniquement
parce qu’elles relèvent d’un régime
ne prévoyant pas cette allocation
(fonctionnaires, professions indé-
pendantes, salariés dépendant du
régime minier, etc.) ou encore parce
qu’elles sont employées par des
entreprises sous-traitantes. Ce peut
être le cas d’un salarié travaillant
pour un sous-traitant d’une entre-
prise ayant l’amiante pour cœur de
métier, exposé au danger comme les OOO

médiateur de la république 51
PACIFIER LES RELATIONS, APAISER LES TENSIONS : LA CONTRIBUTION DU Médiateur
Des propositions pour un système plus humain

OOO salariés de cette entreprise, et qui de la loi n° 2006-1640 de finance- En décembre 2007, un parlementaire
n’aura pas la possibilité de bénéficier ment de la Sécurité sociale pour avait alerté le Médiateur sur la situa-
du dispositif Acaata. Par exemple, 2007 du 21 décembre 2006 prévoyait tion de Messieurs G. et B., respecti-
une association a saisi la Halde, que des décrets devaient procéder vement de nationalité américaine et
qui a redirigé sa demande vers le à la révision des conditions d’octroi danoise, vivant à Nantes et ayant préa-
Médiateur de la République. Elle fait de l’Acaata et du fonctionnement du lablement conclu un « pacte d’union »
état de la mutuelle d’une entreprise Fonds de cessation anticipée d’ac- (équivalent du Pacs) au Danemark.
navale dont les salariés ne peuvent tivité des travailleurs de l’amiante Non reconnue en France, cette union
bénéficier de l’Acaata dans la mesure (FCAATA), mais ces textes ne sont civile ne leur permet pas de bénéfi-
où cette mutuelle n’est pas inscrite toujours pas parus à ce jour. cier des droits associés au Pacs ; par
sur la liste des établissements, ports Le sujet ne se trouve pas davantage conséquent, les intéressés souhaitent
et, le cas échéant, métiers, appar- résolu dans la loi de financement de conclure un Pacs. Or, la conclusion
tenant à certains des secteurs d’ac- la Sécurité sociale pour 2009, dont la d’un tel contrat par deux personnes
tivité dans lesquels l’amiante a été seule mesure concernant l’amiante a étrangères est conditionnée à la pré-
utilisée et qui est fixée par arrêté consisté à supprimer la contribution sentation de plusieurs pièces d’état
interministériel. Si cette décision au FCAATA des entreprises « lis- civil, dont un certificat de célibat fourni
paraît fondée au regard de la loi de tées » du fait d’avoir exposé leurs par leur pays d’origine. Ce qui ne peut
1999, il n’en subsiste pas moins une salariés à l’amiante. Les motifs invo- être le cas, leur « pacte d’union » étant
inégalité de traitement manifeste. qués pour cette suppression ont été mentionné. Il leur faudrait, pour obte-
Face à cette situation, les services le faible rendement de cette contri- nir un certificat de célibat, rompre
du Médiateur de la République ont bution et les difficultés qu’elle posait leur « pacte d’union » et perdre alors
émis plusieurs recommandations aux entreprises en cause. Enfin, plusieurs de leurs droits (réversion de
de réforme : étendre le bénéfice à l’occasion du débat sur l’amiante retraite, par exemple).
du dispositif de l’Acaata à toute dans le cadre du PLFSS pour 2010,
personne reconnue atteinte d’une le ministre des Affaires sociales a Pour mettre fin à cette impossibi-
maladie professionnelle causée par annoncé la publication d’un décret lité, l’Institution a proposé, en col-
l’amiante ; inclure le droit d’accès devant exclure certaines indem- laboration avec le ministère de la
à l’Acaata dans l’ensemble des régi- nités salariales des rémunérations Justice, une réforme permettant
mes ; prendre en compte la ques- prises en compte pour déterminer le d’introduire dans le Code civil une
tion de la sous-traitance ; ou encore montant de l’allocation et ce, malgré règle de conflit de lois, comme pour
harmoniser les conditions de prise des arrêts de la Cour de cassation le mariage, reconnaissant que ces
en charge au sein des différents qui vont à l’encontre de cette exclu- partenariats étrangers sont soumis
régimes. Malgré plusieurs rapports sion. Le Médiateur de la République aux règles de fond et de forme de
officiels sur ce drame sanitaire, qui ne peut que déplorer cette conti- la loi du lieu de l’enregistrement. Il
pointaient précisément les lacunes nuelle absence de volonté politique serait ainsi possible d’apprécier la
des différents dispositifs de prise en d’appliquer les recommandations validité de ces partenariats et l’éten-
charge des victimes et formulaient d’amélioration de la prise en charge due de leurs effets sur notre terri-
des propositions d’amélioration des victimes de l’amiante et de met- toire. Bien sûr, conformément aux
(dont celles préconisées par l’Insti- tre fin aux iniquités existantes. Une règles de droit international privé, la
tution), à ce jour aucune suite n’a été lettre adressée à Monsieur Darcos loi étrangère serait écartée si elle est
donnée à ces recommandations par le 19 novembre 2009 reste toujours contraire à l’ordre public français.
le ministère des Affaires sociales. Ce sans réponse. Un amendement en ce sens a été
dernier renvoie tantôt à la négocia- examiné, et rejeté, par l’Assemblée
tion entre les partenaires sociaux, Pacs : reconnaissance nationale en octobre 2008. Après
tantôt aux conclusions d’un nouveau des partenariats étrangers plusieurs démarches, il a finale-
rapport commandé par le Gouver- et amélioration des droits ment été adopté en avril 2009. Cette
nement. Ainsi, au cours du débat sur sociaux règle, inscrite à l’article 515-7-1 du
le projet de loi de financement de la Alors que l’on célébrait cette année Code civil, pose un cadre général,
Sécurité sociale (PLFSS) pour 2010, les 10 ans du Pacte civil de solidarité attendu de longue date par la doc-
le ministre a informé les députés (Pacs), les imperfections de ce dis- trine et les praticiens du droit, qui
qu’il avait saisi l’Afsset (Agence fran- positif appellent des modifications, demande ensuite application par les
çaise de sécurité sanitaire de l’envi- notamment au regard de la reconnais- différentes administrations et orga-
ronnement et du travail), qui devrait sance des partenariats étrangers. En nismes. Deux instructions fiscales
rendre son rapport « dans les semai- effet, plusieurs cas se sont posés sur ont été publiées en ce sens les 29 et
nes à venir ». Pourtant, l’article 119 le modèle suivant. 30 décembre 2009.

52 rapport annuel 2009


Au-delà de cette proposition de
réforme, le Médiateur de la Répu-
blique a préconisé quatre autres
améliorations de la législation sur
le Pacs : la mise en place d’un congé
pour conclusion d’un Pacs dans le
secteur privé, l’attribution d’une
pension de réversion pour le par-
tenaire survivant, le versement du
capital décès aux personnes pac-
sées dans la fonction publique, et
la modification du dispositif des
indemnités de mobilité spécifique
aux militaires (ICM).
Ces propositions ont été envoyées
aux ministres concernés en février
et mars 2009. Après la mise en place
de groupes de travail sur ces sujets,
la première proposition a été ren- tion, obligatoire, est délivré par le homosexuelle, dans laquelle une
voyée à la négociation entre parte- président du conseil général après personne célibataire était engagée
naires sociaux, la seconde sera exa- avis d’une commission d’agrément. lors de l’instruction de sa demande
minée en 2010 lors des débats sur Cette commission se prononce au d’agrément pour une adoption, devait
les retraites et le décret prenant en terme d’une enquête sociale et psy- être prise en compte au regard des
compte les pacsés dans le disposi- chologique qui doit s’assurer « que besoins et de l’intérêt d’un enfant
tif des ICM devrait être édicté début les conditions offertes par le deman- adopté. L’influence de l’orientation
2010. Enfin, le Médiateur de la Répu- deur sur les plans familial, éducatif sexuelle a eu un rôle décisif sur l’ap-
blique salue l’avancée constituée par et psychologique correspondent préciation de la demande, entraînant
le décret du 20 novembre 2009, qui au besoin et à l’intérêt d’un enfant une différence de traitement. Le
autorise les partenaires liés à un adopté  ». Malgré les évolutions Conseil d’État avait statué sur une
fonctionnaire d’État ou hospita- législatives et réglementaires de la requête formulée par une personne
lier par un pacte civil de solidarité procédure d’agrément visant à sa célibataire à l’encontre d’un refus
(Pacs) à percevoir le capital décès généralisation et sa simplification, d’agrément notifié par le président
prévu par l’article D. 712-19 du Code celle-ci continue de faire l’objet de du conseil général du Jura le 26 nov-
de la Sécurité sociale. Jusqu’alors, divergences, notamment jurispru- embre 1998. Or, en février 2009,
outre les enfants du fonctionnaire dentielles. l’orientation sexuelle a une nouvelle
décédé, seul l’époux ou l’épouse de Par un arrêt du 22 janvier 2008, la fois été opposée, de manière impli-
celui-ci pouvait prétendre au verse- France a été condamnée par la Cour cite, à la requérante pour fonder un
ment de ce capital. Européenne des Droits de l’Homme nouveau refus. On ne peut trouver
(CEDH), à la suite d’un arrêt du de justification à ce raisonnement
Le problème de la procédure Conseil d’État, incompatible avec les puisque la loi française ouvre le
d’agrément pour adopter dispositions combinées des articles droit à l’adoption d’un enfant à toute
Le Code civil autorise l’adoption par 14 (interdiction de la discrimina- personne célibataire, sans aucune
un couple marié et par toute per- tion) et 8 (droit au respect de la vie précision sur l’orientation sexuelle
sonne célibataire âgée de plus de privée) de la CEDH. Dans cet arrêt, de l’adoptant ou la nécessité d’un
28 ans. L’agrément en vue d’adop- il a été considéré que la relation référent de l’autre sexe. OOO

médiateur de la république 53
PACIFIER LES RELATIONS, APAISER LES TENSIONS : LA CONTRIBUTION DU Médiateur
Des propositions pour un système plus humain

OOO Face au refus ostensible d’une col- tionnements auxquels ce défaut d’en- d’une nature particulière qui méri-
lectivité territoriale de respecter la cadrement est susceptible d’aboutir. terait quelques dispositions spéci-
Convention européenne, le Média- L’autopsie est la pratique de diver- fiques. L’autopsie constitue en effet
teur a formulé une proposition de ses incisions sur un corps mort dans une atteinte à l’intégrité du cadavre
réforme afin d’introduire dans la le but d’en examiner les organes qui peut être vécue de façon dou-
procédure d’agrément prévue par internes. Elle est dite « judiciaire » loureuse par les familles.
le Code de l’action sociale et des ou « médico-légale » lorsqu’elle est Comme toute autre mesure d’ins-
familles le principe de l’intérêt supé- effectuée sur mandat judiciaire dans truction et d’expertise, l’autopsie
rieur de l’enfant, qui ne saurait être le cadre d’une enquête, notamment judiciaire peut être ordonnée par le
écarté au bénéfice d’appréciations pour déterminer les origines d’un juge d’instruction ou – le plus sou-
subjectives. décès dont la cause est inconnue ou vent – par le procureur de la Répu-
Depuis, le tribunal administratif de suspecte. blique sur le fondement de l’article 74
Besançon a, le 10 novembre 2009, Ainsi que l’a relevé le rapport pré- du Code de procédure pénale. Par
accordé à la requérante le droit senté en janvier 2006 par la mis- ailleurs, comme l’indique le rapport
d’accueillir un enfant, néanmoins le sion interministérielle en vue d’une déjà cité, la médecine légale n’est
besoin de clarification et de préci- réforme de la médecine légale, régie que par un ensemble de cir-
sion persiste. « l’absence de cadre légal ou régle- culaires (huit au total) peu structu-
mentaire est une caractéristique rantes et mal articulées entre elles,
Renforcer l’encadrement majeure de la médecine légale dont les prescriptions n’ont de sur-
juridique des autopsies française ». Les autopsies judiciai- croît guère été mises en œuvre. Ce
judiciaires res, qui constituent une des com- défaut d’encadrement normatif est
Le Médiateur de la République est posantes de cette médecine légale, d’autant plus étonnant que le régime
également appelé à intervenir dans ne font l’objet d’aucune disposition juridique des autopsies médicales
le domaine de l’éthique. Dans ce particulière dans le Code de procé- (menées à des fins thérapeutiques
cadre, son attention s’est portée sur dure pénale, alors que l’on peut esti- ou scientifiques) a été quant à lui
les lacunes du régime juridique des mer que les prélèvements humains clarifié par la loi du 6 août 2004 rela-
autopsies judiciaires et les dysfonc- constituent une mesure d’enquête tive à la bioéthique.
Plusieurs affaires instruites par
l’Institution mettent en évidence
les problèmes occasionnés par cette
carence. Le manque de contrôle sur
les activités médico-légales peut
conduire à des pratiques médi-
cales portant atteinte à la dignité
du corps du défunt, la restitution
du corps étant effectuée dans un
état inconvenant et choquant pour
les proches. Il convient à cet égard
de signaler que l’obligation faite aux
médecins de s’assurer de la meilleure
restauration possible du corps, for-
mulée à l’article L. 1232-5 du Code
de la santé publique, ne s’applique
qu’aux autopsies médicales et n’est
pas expressément prévue pour les
autopsies judiciaires.
Certes, des dispositions juridiques
consacrent le respect dû aux morts
mais il s’agit de principes généraux
qui ne visent pas spécialement la
médecine légale. On observe égale-
ment un manque de précisions sur
les conditions de restitution de la
dépouille, puisqu’il n’existe pas de
dispositions juridiques relatives aux

54 rapport annuel 2009


principes et délais de cette restitu- À la suite de la transmission de ces débattues lors d’un colloque orga-
tion. Le corps reste ainsi à la dispo- propositions aux ministères concer- nisé par le Médiateur à l’Assemblée
sition de l’autorité judiciaire, jusqu’à nés, le ministère de la Justice a nationale le 6 octobre 2009.
ce que sa restitution soit autorisée informé l’Institution par courrier, en Il n’y a pas de bonnes expertises
par ladite autorité. Cette situation a juillet 2009, des initiatives prises pour sans de bons experts. C’est pour-
donné lieu à une condamnation de la remédier aux différents problèmes quoi le Médiateur de la République
France par la Cour Européenne des constatés. Une circulaire a été diffu- a préconisé de renforcer le pro-
Droits de l’Homme (arrêt Pannullo sée auprès des parquets afin d’har- cessus de sélection des experts en
et Forte du 30 octobre 2001). moniser leurs pratiques en matière revoyant notamment les modalités
Enfin se pose le problème du devenir d’autopsies judiciaires et d’appeler d’établissement de la liste nationale
des prélèvements humains. Comme leur attention sur la nécessité de des experts judiciaires, actuelle-
l’a relevé la Cour d’appel de Tou- veiller à la restitution des corps aux ment dressée par le bureau de la
louse dans son arrêt du 28 avril 2009 familles dans un état digne. Cour de cassation. Une commission
sur une affaire particulièrement Il demeure cependant nécessaire de nationale de l’expertise pourrait
douloureuse portée à l’attention du combler certaines lacunes des règles être constituée, associant, outre
Médiateur de la République, « il n’y juridiques encadrant ces autopsies, des magistrats et des experts, les
a pas de disposition légale précise notamment quant au statut des pré- compagnies nationales d’experts,
sur la façon dont doivent être trai- lèvements biologiques placés sous les représentants des principaux
tés les prélèvements faits pendant scellés et à la réponse pouvant être ordres et organismes professionnels
une autopsie judiciaire ». apportée à une demande de restitu- concernés ainsi que des représen-
Ces prélèvements ne sont en effet tion de ces prélèvements. Dans sa tants des particuliers. Cette liste
pas concernés par les articles réponse, le Garde des Sceaux indi- pourrait servir de référence pour
R. 1335-9 à R. 1335-12 du Code de la que qu’un groupe de travail intermi- la désignation des experts méde-
santé publique, qui fixent les règles nistériel, sous l’égide de la Chancel- cins dans un contexte aussi bien
relatives à l’élimination des pièces lerie, a été constitué dans le but de de règlement juridictionnel que de
anatomiques. Ces règles visent uni- définir un cadre juridique pour ces règlement amiable du litige.
quement les organes ou membres scellés de nature particulière.
recueillis à l’occasion des activités de Pour être inscrit sur la liste, le can-
soins ou d’activités assimilées (ensei- La qualité des expertises didat devrait attester ses qualifica-
gnement, recherche et production médicales judiciaires tions et exercer la profession au titre
industrielle dans les domaines de en question de laquelle il revendique sa qualité
la médecine humaine et vétérinaire La qualité des expertises médicales, d’expert. La commission chargée
ainsi qu’activités de thanatopraxie). notamment lorsqu’elles intervien- de l’établissement de la liste natio-
Le Médiateur de la République pré- nent dans un cadre contentieux, fait nale pourrait participer à la for-
conise l’adoption des mesures sui- l’objet de critiques récurrentes qui mation continue des experts, en
vantes : l’extension aux autopsies mettent en cause la crédibilité à la collaboration avec les compagnies
judiciaires de l’obligation faite au fois de la justice et de la médecine. nationales d’experts. La désignation
médecin de s’assurer de la meilleure Au terme d’une réflexion collective par le juge d’un expert en dehors
restauration possible du corps ; la menée avec des personnalités qua- de cette liste ou des listes locales
transposition en droit interne de la lifiées, le Médiateur de la République établies au niveau des cours d’ap-
jurisprudence de la CEDH concer- a soumis aux pouvoirs publics une pel devrait être limitée à des cir-
nant le droit des proches à obtenir la proposition de réforme prenant en constances exceptionnelles et faire
restitution du corps du défunt dans compte chaque stade du proces- l’objet d’une décision motivée. Pour
un délai approprié ; la définition d’un sus d’expertise et préconisant trois les expertises complexes, il convien-
statut juridique spécifique aux pré- objectifs : compétence, indépen- drait d’avoir recours à la collégialité.
lèvements humains. dance, contrôle. Ces pistes ont été Concer na nt la réa l isation des OOO

médiateur de la république 55
PACIFIER LES RELATIONS, APAISER LES TENSIONS : LA CONTRIBUTION DU Médiateur
Des propositions pour un système plus humain

OOO e­ xpertises, la création d’un système Promouvoir la culture que » qui serve aux deux finalités
de contrôle de la pertinence scienti- du signalement dans la santé d’alerte et de surveillance. Concer-
fique des arguments et des conclu- Au-delà des propositions de réforme nant la remontée d’informations de
sions des experts serait plus qu’utile avancées par le Médiateur de la la part du citoyen, le Pôle Santé et
ainsi qu’une évaluation par les République, son action vise aussi à Sécurité des Soins de l’Institution
magistrats de la qualité des répon- améliorer au quotidien le comporte- constitue aujourd’hui la préfigura-
ses obtenues aux questions posées. ment des acteurs. C’est par exemple tion d’un système à guichet unique.
L’expert devrait expliciter sa démar- le cas dans le domaine de la santé, Il est un observatoire privilégié des
che méthodologique et présenter où l’Institution cherche à développer événements indésirables graves et
un pré-rapport soumis à un débat au sein du corps médical une culture des accidents rapportés par des
contradictoire. En effet, le respect du signalement des incidents et acci- usagers. Ces événements signalés
du principe du contradictoire (c’est- dents qui reste encore trop faible. au Médiateur de la République sont
à-dire le fait que dans le cours d’un Cette insuffisance s’explique par dans 40 % des cas liés à un préjudice
procès, chacune des parties a été deux facteurs. En premier lieu, susceptible d’entraîner des pour-
mise en mesure de discuter à la lorsqu’ils effectuent ces signale- suites disciplinaires ou d’engager
fois l’énoncé des faits et les moyens ments, les professionnels de santé la responsabilité pénale, civile ou
juridiques que ses adversaires lui ne disposent pas de mesures de administrative d’un professionnel
ont opposés) bien qu’inhérent au protection, de sorte qu’ils peuvent de santé.
débat judiciaire, semble insuffi- craindre que la transmission de ces Les collaborations avec le ministère
samment mis en œuvre pour les informations ne les pénalise, que de la Santé et des Sports, l’Institut
expertises. Les parties ont souvent la fiche de signalement se retrouve de veille sanitaire, et l’Afssaps, des
le plus grand mal à se faire préciser dans le dossier du patient, voire actions de partenariat avec l’Autorité
la méthodologie et à pouvoir discu- qu’elle soit utilisée par une personne de sûreté nucléaire, le rapproche-
ter les conclusions de l’expert. Les mal intentionnée. ment avec le Conseil national de l’or-
experts eux-mêmes regrettent de L’insuffisance des signalements tient dre des médecins et l’Ordre national
ne pas disposer d’informations sur aussi à la complexité des démarches des infirmiers, l’accord passé avec la
le devenir de leurs rapports et sur à accomplir et à la multiplicité de Haute Autorité de santé sont autant
l’appréciation qui en a été faite par leurs destinataires. Soit l’exemple d’actions qui permettent au Média-
le juge et les parties au procès. Le d’une personne qui dans un hôpital teur de la République de remplir une
Médiateur de la République sug- se ferait opérer pour une prothèse mission de veille et d’alerte d’autant
gère par ailleurs que les expertises de hanche, serait transfusée lors de plus efficace qu’il recueille un grand
soient évaluées à la fin de la procé- cette intervention et décéderait. En nombre d’informations émanant à
dure judiciaire. pareil cas, on peut identifier jusqu’à la fois des professionnels de santé
Afin d’éviter que des conflits d’inté- neuf signalements possibles puisque et des usagers. Car prise indivi-
rêts ne viennent perturber l’exper- l’on pourrait suspecter un problème duellement, une information n’a pas
tise et entacher l’ensemble de la pro- infectieux (à signaler à la Direction de sens ; mais recoupée, elle peut
cédure à laquelle elle se rattache, le des affaires sanitaires et sociales), constituer une alerte pour l’autorité
Médiateur de la République propose ou lié à la transfusion (Établisse- sanitaire sur un événement suscep-
qu’une déclaration d’indépendance ment français du sang), ou encore tible de mettre en danger une autre
soit effectuée par l’expert à l’occa- au matériel utilisé (Afssaps), etc. personne ou d’avoir un impact de
sion de chaque désignation. Cette Par ailleurs, ces signalements doi- santé publique. K
déclaration viendrait compléter le vent être faits à des personnes qui
serment d’accomplir sa mission en ne communiquent pas systémati-
son « honneur et conscience » qu’il quement entre elles, ce qui rend
prête au moment de son inscription. l’analyse de l’accident encore plus
Enfin, le droit à l’expertise dans le complexe.
cadre d’une procédure judiciaire Comme il n’est pas de progrès pos-
civile se trouve compromis par son sible sans signalement des événe-
coût et par la règle obligeant le ments indésirables survenant dans
demandeur à faire l’avance des frais. les établissements de santé, il faut
Une transparence et une relative mettre en place un système assu-
harmonisation des honoraires s’im- rant la protection de ceux qui l’uti-
posent, le niveau des tarifs devant lisent et cohérent pour les acteurs
aussi correspondre à la qualité et au de terrain ; pour les professionnels
niveau de complexité de l’expertise. de santé, une sorte de « guichet uni-

56 rapport annuel 2009


Les grandes orientations pour 2010
En 2010, le Médiateur entend poursuivre son action réformatrice selon quatre grandes orientations :
le suivi des nouvelles propositions, la participation au rendez-vous sur les retraites, le suivi
de l’exécution des propositions satisfaites et une attention particulière à certains dossiers anciens
bloqués ou repoussés.

Quelques nouvelles propositions de réforme à suivre en 2010

L’amélioration des droits et l’autre visant à renforcer les droits ➜ la situation des enfants
des victimes de dommages des victimes dans les différents dis- recueillis en France selon
corporels positifs. la procédure dite de la kafala
Le Médiateur a été alerté par divers Ces propositions font l’objet d’une Ce dossier est évoqué plus avant
partenaires qui mettaient en cause consultation de grande ampleur dans le rapport ; on le résumera ici
plusieurs aspects du fonctionne- auprès des différents acteurs concer- en disant que le Médiateur souhaite
ment du dispositif d’indemnisation nés (associations, magistrats, avocats obtenir des réponses pour améliorer
des victimes d’accidents de la cir- spécialisés, universitaires, assureurs, la situation de ces enfants d’origine
culation, mis en place par la loi du parlementaires). Ces problèmes maghrébine, le plus souvent orphe-
5 février 1985, dite loi Badinter. Le avaient déjà donné lieu à d’impor- lins, recueillis par des familles fran-
Médiateur a d’abord organisé un col- tants rapports, celui de la commission çaises et qui ne bénéficient ni de la
loque sur le dispositif de réparation dirigée par Madame Lambert-Faivre protection accordée dans leur pays
amiable des accidents médicaux sur le droit du dommage corporel d’origine par la kafala judiciaire ni
créé par la loi Kouchner. ou celui du groupe de travail dirigé de la protection accordée par le droit
Fort des ces échanges et de ces par Monsieur Jean-Pierre Dintilhac, français de l’adoption.
témoignages faisant apparaître que président de chambre honoraire de
la multiplicité et l’empilement des la Cour de cassation, ce dernier ayant ➜ l’octroi des allocations
dispositifs génèrent des iniquités apporté un soutien de poids au tra- familiales aux parents d’enfants
pour les victimes, plus ou moins bien vail du Médiateur. étrangers
indemnisées et assistées en fonction Enfin, les propositions du Médiateur Le Médiateur entend obtenir des
du dispositif en cause, il a été décidé rejoignent les préoccupations du Parle- réponses tant juridiques qu’humai-
d’aller au-delà d’une réforme ponc- ment puisqu’une une proposition de loi nes au problème posé par le refus
tuelle de ces dispositifs particuliers a été déposée à l’Assemblée nationale opposé par les caisses d’allocations
pour proposer une réforme plus par Monsieur Guy Lefrand « visant à familiales de verser des prestations
globale et cohérente de l’ensemble améliorer l’indemnisation des victimes à des parents étrangers en situation
des dispositifs d’indemnisation des de dommages corporels à la suite d’un régulière dont les enfants dont ils
dommages corporels. accident de la circulation ». ont la charge sont entrés sur le terri-
Deux propositions de réforme com- toire national en dehors de la procé-
plémentaires sont donc en cours L’amélioration dure de regroupement familial.
d’élaboration, l’une proposant d’uni- de la protection des enfants Il a tout d’abord alerté le ministre
fier les outils méthodologiques utili- Ce thème fait l’objet de plusieurs pro- du Travail, des Relations sociales,
sés par les différents acteurs de l’in- positions en cours d’élaboration ou déjà de la Famille, de la Solidarité et de
demnisation du dommage corporel communiquées aux pouvoirs publics. la Ville, par une lettre en date du OOO

médiateur de la république 57
PACIFIER LES RELATIONS, APAISER LES TENSIONS : LA CONTRIBUTION DU MéDIATEUR
les grandes orientations pour 2010

OOO 11 février 2009 réitérée le 10 avril sui- ➜ fiscalité des successions de la loi du 5 mars 2007 portant
vant sur ce problème et ce, d’autant et donations concernant réforme de la protection juridique
plus que des jugements défavorables les adoptés simples des majeurs pour laquelle le Média-
aux caisses d’allocations familiales Contrairement au régime fiscal teur s’était beaucoup impliqué, il en
sont rendus. Les lettres sont restées applicable à la personne adoptée a effectué un bilan à la lumière des
sans réponse, c’est pourquoi une de façon plénière, dont la situation principales observations, critiques
proposition de réforme a été adres- est assimilée à celle de l’enfant né et réclamations dont il a été desti-
sée au nouveau ministre en octobre au sein de la famille considérée, nataire, s’agissant notamment du
dernier. l’adopté simple est considéré comme contenu des décrets d’application
un étranger sur le plan fiscal vis-à- nécessités par la loi.
➜ la réforme de la procédure vis de sa famille adoptive. Ce dispositif important et complexe,
d’agrément en vue d’adopter C’est pourquoi, à un moment où au sein duquel interviennent de nom-
L’agrément en vue d’adoption, visé une réflexion s’est engagée en vue breux acteurs de la santé, du social et
par l’article 353-1 du Code civil, est de rendre le dispositif français de la justice, mérite à l’évidence quel-
délivré par le président du conseil d’adoption plus efficace et de mieux ques apports complémentaires.
général après avis d’une commission répondre à la grande diversité des C’est l’objet d’une proposition de
d’agrément. situations familiales, le Médiateur réforme qui porte sur les modalités
Afin de mettre un terme aux contro- de la République propose d’appor- de financement de la prise en charge
verses jurisprudentielles et aux dis- ter des aménagements aux règles en des majeurs protégés, le contrôle
parités constatées entre les dépar- vigueur en vue de réduire les droits des comptes de tutelle et les moda-
tements, le Médiateur a formulé de succession que doivent acquitter lités de l’inventaire du patrimoine, la
une proposition de réforme visant à les adoptés simples sans aller toute- situation des mandataires judiciaires
introduire dans la procédure d’agré- fois jusqu’à aligner leur régime sur bénévoles, la qualité de créanciers
ment prévue par le Code de l’action celui des adoptés pléniers. privilégiés reconnue aux majeurs pro-
sociale et des familles le principe de tégés en cas de liquidation judiciaire
l’intérêt supérieur de l’enfant, qui ne L’amélioration de la protection de l’organisme de tutelle, le renforce-
saurait être écarté au bénéfice d’ap- des incapables majeurs ment des moyens des conseils géné-
préciations subjectives. Un an après l’entrée en vigueur raux et des magistrats.

le nouveau rendez-vous sur les retraites

En 2008, le Médiateur avait com- expose de façon détaillée les pro- prise en compte des périodes d’in-
muniqué aux ministres compétents positions du Médiateur de la Répu- validité des non-salariés agricoles,
14 propositions de réforme visant blique. Elles portent sur les points la validation des stages de formation
à enrichir le débat sur les retraites suivants : les avantages familiaux, des chômeurs, la validation des ser-
qui devait avoir lieu cette année-là la retraite anticipée pour carrière vices militaires effectués à l’étran-
conformément à la loi du 21 août longue, la réversion entre conjoints ger ou dans les Tom avant 1989, le
2003 portant réforme des retraites. et anciens conjoints survivants, le volontariat pour le développement,
Dans son rapport d’information cumul emploi-retraite, les surcoti- l’activité accessoire de secrétaire de
sur le rendez-vous de 2008 sur sations pour temps partiel dans la mairie et le droit à l’information.
les retraites, en date du 8 octobre fonction publique, les chômeurs en Le rendez-vous sur les retraites ayant
2008, le député Denis Jacquat, rap- fin de carrière, la prise en compte été reporté en 2010, le Médiateur va
porteur sur l’assurance vieillesse de la dernière année travaillée dans promouvoir la prise en compte par
pour la commission des affaires le calcul du salaire annuel moyen et les pouvoirs publics de ses observa-
culturelles, familiales et sociales, la situation des polypensionnés, la tions et de ses propositions.

le suivi de la bonne exécution des propositions abouties

Le Médiateur de la République exerce C’est notamment le cas dans trois fichiers de police judiciaire réalisée
un suivi des propositions de réforme domaines : la réforme du recours à des fins d’enquête administrative
pour lesquelles il a obtenu satisfac- subrogatoire contre tiers (RCT), (Stic et Judex) et les avoirs non
tion mais qui peuvent faire l’objet de le renforcement des garanties judi- réclamés de l’assurance-vie.
difficultés dans leur application. ciaires pour la consultation des

58 rapport annuel 2009


tuées en 2009 ont permis d’identifier
14 424 contrats et de verser 121 mil-
lions d’euros supplémentaires aux
bénéficiaires (montant à ajouter aux
87 millions d’euros versés en 2009
dans le cadre du dispositif Agira-I
de la loi du 15 décembre 2005).

Le Médiateur suit avec intérêt la pro-


position de loi déposée au Sénat par
Hervé Maurey, qui prône la publi-
cation par les assureurs, en marge
des rapports annuels, de données
statistiques concernant les contrats
et encours détenus et reversés et
relatives aux démarches entreprises
Le recours subrogatoire tes de préjudices et d’une table de pour la recherche des bénéficiaires.
contre tiers payeurs concordance ; les incidences sur la De même, il ne s’interdit pas d’éten-
Le Médiateur a organisé une table conduite des expertises médica- dre le débat aux livrets d’épargne
ronde avec les acteurs concernés les ; enfin, la nécessité éventuelle non réclamés.
en vue d’effectuer un bilan de la d’un complément de réforme.
réforme introduite par l’article 25 La reconnaissance
de la loi du 21 décembre 2006. Ont Les avoirs non réclamés des partenariats civils
été évoqués le problème particulier de l’assurance vie : satisfaction ! étrangers
des accidents du travail et des allo- Le Médiateur se réjouit de consta- Le Médiateur suit l’entrée en appli-
cations temporaires d’invalidité, ter que le traitement du stock des cation concrète de l’article 1er de la
notamment à la suite des arrêts avoirs non réclamés, rendu possible loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de
de la Cour de cassation en date du par la consultation du fichier Insee simplification et de clarification du
19 mai, du 11 juin, et du 22 octobre prévue par la loi du 17 décembre droit et d’allègement des procédu-
2009 ; la nécessité d’une officiali- 2007, est désormais une réalité. Les res, qui a introduit l’article 515-7-1
sation de la nomenclature des pos- 6 millions d’interrogations effec- du Code civil.

les efforts à poursuivre en 2010

Le Médiateur attache une attention des pouvoirs publics, dès 2005, sur article, alors même que la viabilité
particulière à certains anciens dos- la nécessité de consolider et d’adap- constitue l’un des deux critères
siers bloqués ou trop vite repoussés. ter le régime juridique des enfants conduisant à conférer la personna-
nés sans vie, c’est-à-dire des enfants lité juridique au fœtus décédé ; par
Le régime juridique décédés avant la déclaration de ailleurs, le Médiateur a signalé cer-
des enfants nés sans vie naissance à l’état civil. Ce régime est taines conséquences inéquitables
Autre sujet douloureux sur lequel fixé par l’article 79-1 du Code civil découlant de l’acte d’enfant sans vie
l’Institution se mobilise depuis de et souffre de deux principales fai- prévu par le 2e alinéa de cet article.
nombreuses années : l’état civil des blesses : l’absence d’une définition Pour sortir de cette zone d’ombre, le
enfants nés sans vie. Le Médiateur normative de la notion de « viabi- Médiateur de la République a notam-
de la République a appelé l’attention lité » mentionnée à l’alinéa 1er de cet ment préconisé de donner une base OOO

médiateur de la république 59
PACIFIER LES RELATIONS, APAISER LES TENSIONS : LA CONTRIBUTION DU MéDIATEUR
les grandes orientations pour 2010

OOO juridique opposable aux critères de un poids de 500 grammes) mais sur Le don du corps à la science
viabilité à partir des recommanda- la production d’un certificat médi- L’attention du Médiateur de la Répu-
tions de l’Organisation mondiale de cal d’accouchement. Une circulaire blique a notamment été appelée à
la santé (OMS). interministérielle en date du 19 juin plusieurs reprises sur les problèmes
À l’instigation du Médiateur, le 2009 s’efforce de préciser les condi- rencontrés par les familles de per-
décret n° 2008-32 et l’arrêté du tions d’établissement de ce certifi- sonnes ayant fait don de leur corps
9 janvier 2008 ont permis l’octroi du cat, mais le flou de la notion d’accou- à la médecine. Deux difficultés
congé de paternité pour un enfant chement et l’absence de définition particulières ont été identifiées : le
né sans vie (uniquement lorsque de la notion de viabilité posent aussi devenir du corps après traitement
l’enfant décédé a atteint le seuil de de sérieux problèmes pour l’appli- par les établissements donataires et
viabilité). Sous la pression de la Cour cation du 1er alinéa de l’article 79-1 les frais supportés par les donateurs
de cassation, deux autres décrets du Code civil, lequel prévoit la déli- ou leurs ayants droit. En théorie,
(n° 2008-798 et n° 2008-800 du vrance d’un acte de naissance et de l’établissement donataire assure à
20 août 2008) et leurs arrêtés d’ap- décès (donc l’attribution de la per- ses frais l’inhumation ou la créma-
plication sont parus au Journal sonnalité juridique) lorsque l’enfant tion du corps. Cependant, la plupart
Officiel du 22 août 2008. est déclaré « né vivant et viable ». Le des établissements, voire la totalité,
Le premier permet aux couples Médiateur est ainsi préoccupé par la ne pratiquent plus depuis 1998 que
non mariés ne possédant pas déjà persistance d’une réelle insécurité la crémation après utilisation des
un livret de famille de solliciter la juridique, puisque l’on s’en remet à corps.
délivrance de ce document aux fins l’appréciation individuelle des pro- S’agissant des frais supportés, les
d’y inscrire, à titre symbolique, leur fessionnels de santé pour l’établis- établissements en charge de cette
enfant né sans vie. sement d’actes aux conséquences question ont mis en œuvre des pra-
Le second décret et son arrêté d’ap- juridiques lourdes. tiques disparates assorties de tarifi-
plication visent à préciser les condi- C’est pourquoi le Médiateur a décidé cations propres. Ainsi, les donateurs
tions d’établissement de l’acte d’en- de poursuivre l’instruction de cette se sont vu imputer des « frais de
fant sans vie, qui n’est plus fondé proposition de réforme, en soumet- dossier » forfaitaires correspondant
sur les seuils de viabilité définis par tant ce sujet aux députés de la mis- le plus souvent au fonctionnement
l’OMS (22 semaines d’aménorrhée ou sion de révision des lois bioéthiques. du service et plus précisément aux
frais d’incinération, parfois asso-
ciés à l’obligation de souscrire des
contrats d’assurance obsèques dési-
gnant les établissements comme
bénéficiaires, et facturer les frais de
transport du lieu de décès à l’établis-
sement donataire.
Pour remédier à ce phénomène, le
Médiateur de la République avait pré-
conisé la mise en place d’un groupe
de travail copiloté par le ministère
de l’Enseignement supérieur et de
la Recherche et le ministère de l’In-
térieur. Ainsi, il a pu être dégagé
un scénario global de réforme de
la procédure de don de corps, por-
tant notamment sur l’introduction
d’une disposition législative sur
l’encadrement juridique des restes
humains, l’obligation d’une informa-
tion précise du donateur quant aux
traitements et au devenir possible
de son corps et la prise en charge
des différents frais. Ces propositions
ont été transmises en avril 2008
aux cabinets des deux ministères
pilotes (Enseignement supérieur et

60 rapport annuel 2009


Intérieur) et sont encore, à ce jour, Le Code de la Sécurité sociale (arti- pour 2009 a en effet prévu que la vic-
en attente d’arbitrage. Elles ont été cles L. 323-4-1 et D. 323-3) prévoit la time continue de bénéficier de ses
prises en compte par la mission de possibilité pour le médecin-conseil indemnités journalières pendant une
révision des lois bioéthiques. de consulter le médecin du travail au période maximale de trente jours.
cours de toute interruption de tra- Il apparaît nécessaire d’étudier les
Médecine du travail vail dépassant trois mois. Cette mise conditions dans lesquelles cette dis-
et Sécurité sociale : en relation a pour objet de préparer position pourrait être étendue à l’as-
renforcer la collaboration les conditions et les modalités de la surance maladie.
À la fin d’un arrêt maladie, l’insuf- reprise du travail ou d’envisager des Le projet d’accord sur la réforme
fisance de la collaboration entre les démarches de reclassement. de la médecine du travail issu de
médecins du travail et les méde- Si ces mesures paraissent aller dans la concertation entre les partenai-
cins-conseils du service médical de le bon sens, l’expérience a révélé que res sociaux a émis des propositions
l’assurance maladie peut causer de ce dispositif s’avère peu opération- visant à prévenir la désinsertion
graves préjudices pour le salarié. nel en raison de son caractère non professionnelle des salariés en arrêt
En effet, l’interruption du verse- contraignant, puisque la consultation maladie. Ce projet préconisait ainsi
ment des indemnités journalières du médecin du travail par le méde- d’instituer une commission col-
(IJ) prononcée par la Caisse d’as- cin-conseil dépend de la libre initia- légiale composée du médecin du
surance maladie, sur l’avis de son tive de ce dernier. Le Médiateur de la travail, du médecin-conseil de l’as-
médecin-conseil estimant que l’as- République propose de rendre cette surance maladie et, le cas échéant,
suré est apte à reprendre un emploi, collaboration systématique en cas de du médecin traitant, chargée de pro-
peut aller de pair avec la décision du difficultés prévisibles à la reprise du poser au salarié une visite de prére-
médecin du travail d’engager une travail d’un assuré. Deuxième pro- prise. Si, lors de la visite de reprise,
procédure d’inaptitude profession- blème : les imprécisions du décret le médecin du travail déclare le sala-
nelle. Or, pendant la durée de cette d’application du 23 décembre 2004, rié inapte et que le reclassement se
procédure (qui peut durer jusqu’à qui ne fait état ni de la nature des révèle impossible, l’employeur peut
six ou sept semaines), le salarié se informations transmissibles, ni des procéder au licenciement dans un
trouve privé de ressources : il ne modalités de leur communication délai de vingt et un jours suivant
perçoit pas d’IJ, puisqu’il n’est plus entre les médecins. Le Médiateur de la déclaration d’inaptitude. L’ac-
en arrêt maladie ; il ne reçoit pas non la République a donc préconisé de cord prévoyait que, pendant cette
plus de salaire, du fait de l’inexé- compléter ce décret en ce sens et de période, le salarié serait indemnisé
cution de sa prestation de travail. mettre en place une fiche de liaison par l’assurance maladie. Lorsque, à
Afin de remédier à ces incohéren- formalisant la communication des l’issue du délai de vingt et un jours,
ces, le Médiateur de la République a données médicales pertinentes. le salarié n’était pas licencié, l’em-
engagé un travail de réflexion avec la La troisième et principale difficulté ployeur devait reprendre le verse-
CNAMTS, qui a d’ores et déjà débou- est liée au préjudice financier injuste- ment de son salaire.
ché sur des mesures. La CNAMTS a ment subi par le salarié faisant l’objet Face au refus des syndicats d’enté-
ainsi diffusé plusieurs circulaires au d’une procédure d’inaptitude. Comme riner l’accord global sur la réforme
sein de son réseau pour développer il a été vu précédemment, l’intéressé de la médecine du travail, l’initiative
la collaboration entre l’assuré social, ne peut en effet bénéficier, durant appartient désormais aux pouvoirs
le médecin-conseil, le médecin du toute la durée de cette procédure, ni publics. Le ministre Xavier Darcos,
travail et l’employeur, de manière à de sa rémunération, ni de ses indem- qui a présenté le 4 décembre 2009 les
faciliter la reprise du travail après nités pour maladie. Ce problème a axes qu’il entendait donner à cette
un arrêt maladie de longue durée. d’ores et déjà été pris en considération réforme, a prévu, parmi ceux-ci, la
Le législateur est ensuite intervenu s’agissant des accidents du travail ou systématisation des visites de pré-
dans le cadre de la loi du 13 août des maladies professionnelles. La loi reprise et des contacts préalables
2004 relative à l’assurance maladie. de financement de la Sécurité sociale entre médecins. OOO

médiateur de la république 61
PACIFIER LES RELATIONS, APAISER LES TENSIONS : LA CONTRIBUTION DU MEDIATEUR
les grandes orientations pour 2010

OOO Les actes réglementaires en attente

Alors qu’une réponse positive du iatrogènes et des infections nosoco- qué au Médiateur de la République,
ministre ou de l’administration miales (Oniam). Toutefois, le dispo- par courrier en date du 8 octobre
concernés a été transmise au Média- sitif ne sera opérationnel qu’après la 2008, avoir donné des instructions
teur de la République, un certain publication du décret d’application pour préparer un projet de décret,
nombre de propositions de réforme soumis au Conseil d’État et toujours afin de satisfaire la proposition
n’ont pu aboutir faute de publication en attente. de réforme. À ce jour, malgré une
de l’acte réglementaire annoncé. récente relance, le décret annoncé
Sécuriser le régime d’invalidité n’est toujours pas paru.
À quand l’indemnisation des fonctionnaires civils
des victimes de l’hépatite C de l’État ➜ document équivalent
par une transfusion sanguine ? Le Médiateur de la République a émis à l’avis français d’imposition
À l’instigation du Médiateur, l’arti- une proposition de réforme visant à pour les ressortissants
cle 67 de la loi de financement de la éviter que des fonctionnaires civils communautaires
Sécurité sociale pour 2009 a prévu de l’État, radiés des cadres pour La proposition visait à remplacer
l’indemnisation des personnes invalidité par leur administration l’exigence de production d’un avis
contaminées par le virus de l’hé- d’emploi après avis de la commission d’imposition français, pour les res-
patite C à la suite d’opérations de de réforme, se voient refuser par le sortissants communautaires, par la
transfusion sanguine réalisées par Service des pensions l’ouverture du production d’un document équiva-
des structures de droit privé par droit à pension civile d’invalidité au lent, afin de faciliter leurs démar-
l’Office national d’indemnisation des motif d’une instruction défectueuse. ches, d’une part pour l’attribution
accidents médicaux, des affections Les ministres compétents ont indi- d’un logement social et, d’autre part
pour l’obtention d’un « prêt à taux
zéro » soumis à des conditions de
ressources. Un groupe de travail
mis en place sur ce problème sous
l’égide du ministère des Finances a
conclu en juillet 2008 à la proposi-
tion d’édiction d’une instruction fis-
cale toujours attendue. K

62 rapport annuel 2009


Un ombudsman à la française
S’il est une caractéristique des droits de l’Homme qu’il faut répéter
et défendre sans relâche, c’est bien celle de leur universalité. Rien
d’étonnant, donc, à ce que le Médiateur de la République, largement
investi dans les débats de société en France, soit tant sollicité pour
soutenir et renforcer l’action des institutions nationales des droits de
l’Homme à travers le monde. Devenu une référence en ce domaine de
par son expertise reconnue au niveau international, il a entamé l’élar-
gissement de ses pouvoirs et missions et deviendra le Défenseur des
droits en 2010, un véritable ombudsman à la française.

•••

Les réponses du Médiateur de la République


aux grands défis de notre société p. 64
Une coopération toujours active avec la CNCDH p. 64
dans la « jungle » de calais p. 65
La question pénitentiaire toujours d’actualité p. 66
Kafala et protection des enfants étrangers : le progrès par la médiation p. 67
Prévenir la maltraitance des personnes vulnérables dans le milieu médical p. 68

Une expertise au service des droits de l’Homme p. 71


L’Europe de la médiation p. 71
Une expertise reconnue au plan international p. 72

Le Défenseur des droits, un ombudsman à la française p. 75

OOO

médiateur de la république 63
UN OMBUDSMAN à LA FRANçAISE

Les réponses du Médiateur de la République


aux grands défis de notre société
Une coopération toujours active avec la CNCDH

Les travaux menés en collabora- Commission en vertu de l’arrêté du port du voile intégral, la bioéthi-
tion avec la Commission Nationale du 1er avril 2009 relatif à la compo- que, la traite des êtres humains, le
Consultative des Droits de l’Homme sition de la CNCDH. La réflexion a « délit de solidarité » et, bien sûr, la
(CNCDH) ont été assez intenses avec notamment porté sur le projet de prochaine instauration du Défen-
le renouvellement de cet organe et loi pénitentiaire, la situation des seur des droits.
la nomination des nouveaux mem- mineurs étrangers isolés (MEI), le Ce thème a d’ailleurs entraîné la
bres en début d’année. Il est à noter droit d’asile, les questions relatives constitution d’un groupe de travail
que le Médiateur de la République à l’immigration, la réforme de la jus- spécifique en septembre. Ce groupe,
est le seul membre de droit de cette tice des mineurs, l’épineux dossier auquel le Médiateur de la République
a apporté une contribution active
et par lequel il a été auditionné, a
notamment entendu M. Beauvois,
président de la Commission natio-
nale de déontologie de la sécurité
(CNDS) ; M. Delarue, contrôleur
général des lieux de privation de
liberté ; Mme Versini, Défenseure
des enfants ; M. Leclerc, président
de la Commission d’accès aux docu-
ments administratifs (Cada) ; et un
représentant de M. Schweitzer, pré-
sident de la Haute autorité de lutte
contre les discriminations et pour
l’égalité (Halde). Ses objectifs : per-
mettre à la sous-commission dont il
dépend de rendre un avis aidant à
définir les contours de l’Institution
qui se substituera au Médiateur de la
République, à préciser ses missions
et ses pouvoirs. La contribution du
Médiateur de la République au sein

64 rapport annuel 2009


de ce groupe de travail s’est en par- ciations, acteurs incontournables à sa conception », expliquent les
tie inspirée des multiples entretiens de la vie sociale, à participer à la services du Médiateur de la Républi-
qu’il a eus tout au long de l’année construction du Défenseur des que. Basées sur le projet de loi orga-
avec le milieu associatif et plusieurs droits, une institution qui sera nique présenté le 9 septembre, les
autorités administratives indépen- pour elles un interlocuteur de réflexions du Médiateur de la Répu-
dantes, comme la Cnil, la Cada et premier plan et avec lequel les blique devraient permettre d’éclai-
le contrôleur général des lieux pri- liens seront d’autant plus étroits rer les futurs débats parlementaires
vatifs de liberté. « L’ambition du et la collaboration d’autant plus sur le Défenseur des droits.
Médiateur était d’inviter les asso- efficace qu’elles auront participé

Dans la « jungle » de Calais

La situation difficile plaintes des riverains, la fermeture difficultés rencontrées par les admi-
des migrants du centre d’accueil de jour géré par nistrateurs ad hoc dans l’exécution
Face à un contexte politique et le Secours Catholique, qui deman- de leur mission.
social en mouvement, la question dait en contrepartie l’ouverture d’un En outre, la détermination de l’âge
des droits de l’Homme prend depuis véritable centre d’accueil pour les étant crucial dans ce type de dos-
plusieurs années une importance personnes vulnérables. Après de sier, le Médiateur de la République
croissante dans l’activité du Média- longues négociations, un protocole a recommandé le développement
teur de la République. En 2009, ce d’accord a finalement pu être signé, de la recherche de moyens de
que les médias ont appelé la « jun- grâce à l’intervention du Médiateur détection modernes afin de ne plus
gle » de Calais a sans doute consti- de la République, qui est parvenu à avoir recours à terme à l’expertise
tué l’une des affaires les plus emblé- recréer des liens de confiance entre osseuse, actuel procédé de détermi-
matiques à cet égard. Dès janvier, la mairie et l’association. Il prévoit nation de l’âge par examen osseux.
Jean-Paul Delevoye, alerté sur la que le local d’accueil du Secours Concernant la demande d’asile du
situation des migrants à Calais, s’est Catholique fermera dès que le cen- mineur, il suggère la présence d’une
rapproché des acteurs de ce dos- tre d’accueil de jour pour les popu- personne compétente en la matière
sier afin de mettre son expertise au lations vulnérables, mis à disposi- et d’un interprète ainsi que la forma-
service de la résolution des aspects tion par la mairie et exploité par le tion des personnels de l’Office fran-
humanitaires de la question. Depuis Secours Catholique, ouvrira ses por- çais de protection des réfugiés et
la fermeture du centre de Sangatte, tes, en mars 2010. apatrides (Ofpra) aux besoins spéci-
en 2002, les associations ont joué un fiques du mineur étranger isolé.
rôle essentiel dans la distribution La contribution du Médiateur Le Médiateur de la République a éga-
des repas, les services de douches de la République lement pris contact avec l’Assemblée
ainsi que la protection et l’informa- Le ministre de l’Immigration, de des départements de France afin
tion des migrants. Cependant, en l’Intégration, de l’Identité nationale de dégager des solutions pour une
raison des difficultés rencontrées, et du Développement solidaire, Éric meilleure coordination des compé-
le milieu associatif a remis en cause Besson, a décidé en mai la mise en tences entre l’État et les collectivités
l’aide qu’il apportait et a demandé à place d’un groupe de travail sur les locales sur la prise en charge des
l’État de prendre part à l’effort. Face mineurs étrangers isolés (MEI) MEI.
au blocage de la situation, le Média- regroupant les ministères concer- Enfin, à la suite du démantèlement
teur de la République s’est attaché nés (notamment l’Intérieur, la Jus- de la « jungle » de Calais, le Média-
à renouer, en dehors des médias, tice et les Affaires sociales) ainsi teur de la République, lors de sa
les fils du dialogue entre les acteurs que le Médiateur de la République visite du 25 septembre au centre
institutionnels et associatifs. Acteur et des associations comme la Croix d’hébergement de Vitry-sur-Orne
neutre et indépendant, il a ainsi pu Rouge Française, France Terre (Moselle), où les mineurs de Calais
amener les parties en présence à des d’asile et Enfants du Monde Droits avaient été transportés, a fait trois
avancées. Si des solutions ont ainsi de l’Homme. Le Médiateur de la propositions.
pu rapidement être trouvées sur la République s’est positionné, lors • L e dispositif exceptionnel mis
distribution des repas, la question des séances de travail de groupe, en place pour les MEI de Calais
de l’accueil de jour et du service des sur différentes problématiques rela- (installé par l’État à hauteur de
douches s’est révélée plus difficile à tives aux MEI, comme leur prise en 700 000 euros) devrait être géné-
régler. La mairie de Calais avait sou- charge et leur protection dès leur ralisé à tous les MEI présents sur
haité, du fait du nombre croissant de arrivée en France, ainsi que sur les le territoire national. OOO

médiateur de la république 65
un ombudsman à la française
Les réponses du Médiateur de la République aux grands défis de notre société

OOO • L’État devrait créer, pour la prise sur les MEI, a apporté son soutien à rapidement mises en œuvre et, pour
en charge des MEI, un solide par- cette initiative, le vice-président de la plupart, inspirées par le Média-
tenariat avec les collectivités loca- la Commission européenne, Jacques teur de la République. Parmi elles,
les afin de remédier aux difficultés Barrot, invité à se prononcer sur la la séparation complète des mineurs
rencontrées par ces dernières dans dernière proposition du Médiateur et des majeurs en zone d’attente ; la
la gestion du dispositif, notamment de la République, a annoncé, dès mise en place d’une permanence, à
au problème posé par les délais début 2010, la présentation par la l’aéroport de Roissy, pour les admi-
d’obtention des ordonnances de Commission européenne d’un plan nistrateurs ad hoc chargés d’ac-
placement provisoire préalable à d’action sur les mineurs non-accom- compagner les MEI non admis sur le
la mise en œuvre des services de pagnés. Source d’un engagement territoire français ; un renforcement
l’Aide sociale à l’enfance (ASE). majeur de l’Union européenne, ce du nombre et de la formation de ces
• Créer un fonds de protection euro- plan d’action a vocation à faire de la derniers. Plusieurs autres proposi-
péen des MEI, considérant que la prévention, la protection et la (ré) tions appelant des consultations
gestion des flux migratoires est intégration, les axes prioritaires pour complémentaires et des arbitrages
une problématique qui nécessite un renforcement des droits de ces ont été mises à l’étude.
une solution européenne. mineurs. Par ailleurs, les réflexions
Si Éric Besson, au travers des du groupe ont abouti à proposer
conclusions du groupe de travail plusieurs actions susceptibles d’être

La question pénitentiaire toujours d’actualité

Fort de son expérience au sein des mes et à l’égalité des chances entre pour enrichir les réflexions concer-
établissements pénitentiaires, le les hommes et les femmes sur le nant l’application des règles péniten-
Médiateur de la République a été thème des femmes dans les lieux tiaires européennes dans les prisons
auditionné en mai 2009 par la délé- privatifs de liberté, et a été sollicité françaises.
gation du Sénat aux droits des fem- par l’administration pénitentiaire L’action de l’Institution à l’égard des
détenus s’exerce également dans son
pouvoir de proposer des réformes. La
loi pénitentiaire a répondu favora-
blement à deux questions, soulevées
par le Médiateur de la République, à
partir des observations de ses délé-
gués dans les prisons. La première
revient à généraliser les points d’ac-
cès au droit (PAD) dans les établis-
sements pénitentiaires. En effet, les
besoins des détenus en matière d’in-
formation juridique, en particulier
dans les domaines extérieurs aux
compétences de l’Institution (droit
de la famille, exercice de l’autorité
parentale, successions, etc.), sont
aujourd’hui constatés par l’ensem-
ble des intervenants. En témoignent
les résultats très positifs enregistrés
dans des établissements comme
Fresnes, les Baumettes ou encore
Meaux-Chauconin, où la qualité des
dispositifs mis en place est reconnue.
Malheureusement, seule une moitié
environ des établissements béné-
ficient officiellement de l’existence
d’un PAD. Cette existence apparaît
même parfois assez théorique lors-

66 rapport annuel 2009


que la prestation n’est pas adaptée des détenus. Les réclamations des joué par les délégués en prison en
aux caractéristiques de l’établisse- détenus pour perte d’objets person- officialisant leur présence dans ces
ment, comme pour la maison d’arrêt nels à l’occasion de transferts, notam- établissements dans l’article 6 de
de Villepinte où, pour 900 détenus, le ment, font partie des sujets pour les- cette loi :
PAD se résumait à une demi-journée quels les délégués sont fréquemment « Article 6 – Afin de permettre
mensuelle de permanence d’un avo- sollicités. Le Comité d’orientation aux personnes détenues de béné-
cat, différent à chaque permanence. restreint (COR) avait recommandé ficier des dispositions de la loi n°
Ces disparités s’expliquent par le fait de rendre obligatoires des inventai- 73-6 du 3 janvier 1973 instituant
que la mise en place des PAD dans les res contradictoires. Cette disposi- un Médiateur de la République,
prisons ne peut se faire qu’à l’initia- tion, qui ne figurait pas dans le projet le Médiateur de la République
tive de chaque Conseil départemen- de loi parce qu’elle relevait d’un texte désigne pour chaque établisse-
tal d’accès au droit (CDAD), dans le réglementaire, peut encore aboutir ment pénitentiaire un ou plu-
cadre de la loi du 10 juillet 1991 modi- dans le cadre des relations suivies sieurs délégués affectés à cette
fiée relative à l’aide juridique. qu’entretiennent l’Institution et l’ad- mission. »
Le second point concerne l’établisse- ministration pénitentiaire.
ment obligatoire d’inventaires contra- On peut également se réjouir du fait
dictoires pour les effets personnels que le législateur ait reconnu le rôle

Kafala et protection des enfants étrangers : le progrès par la médiation

La réponse des pouvoirs publics est abandonné ou ne peut être élevé noncent l’adoption de l’enfant au profit
autour de certaines thématiques par ses parents – ne crée pas de lien du couple, sur la base de cette kafala.
traitées par le Médiateur de la Répu- de filiation entre l’enfant concerné et Monsieur L., ressortissant allemand,
blique n’est pas toujours satisfai- la personne qui en assume la protec- s’adresse aux autorités de son pays,
sante. Pour pallier ce qu’elles per- tion. En droit français, il peut être qui reconnaissent le jugement suisse
çoivent comme une faible volonté assimilé à une délégation d’autorité d’adoption, conférant ainsi la nationa-
de s’attaquer à ces problématiques parentale. Cependant, la perception lité allemande à l’enfant. Madame L.,
qui font leur quotidien sur le terrain, juridique de la kafala en France et ressortissante française, se tourne
les associations ont pris l’habitude les textes en vigueur posent de mul- également vers les autorités con-
de solliciter régulièrement l’Institu- tiples obstacles à la demande des sulaires françaises et engage les
tion. L’action et les propositions du familles françaises ou binationales mêmes démarches auprès du tri-
Médiateur de la République sur le qui accueillent ces enfants et qui les bunal de grande instance de Nan-
sujet de la kafala fournissent une considèrent comme les leurs. tes, seule autorité compétente pour
illustration de ce mouvement. reconnaître cette adoption. Or, le par-
Modalité spécifique de recueil d’un Le couple L. en a fait l’expérience quet de Nantes refuse de reconnaître
enfant en droit musulman, la kafala et a vécu un véritable parcours du des effets, en France, à ce jugement,
est définie comme une mesure de combattant. Monsieur et Madame L. au motif que celui-ci a été prononcé
protection de l’enfance distincte de vivent en Suisse et y ont engagé des sur la base d’une kafala, et que le Code
l’adoption, interdite dans de nom- démarches en vue d’adopter un civil français interdit toute adoption
breux pays de tradition musulmane. enfant. Après avoir obtenu l’agrément d’un enfant dont la loi personnelle (ici
Environ 1 000 enfants seraient dans suisse, ils ont recueilli au Maroc l’en- la loi marocaine) prohibe l’adoption. H.
cette situation en France à l’heure fant H., par kafala prononcée par les ne peut donc être considéré comme
actuelle. Ce recueil légal – qui peut autorités judiciaires marocaines. Un le fils du couple ni se voir conférer la
être prononcé devant un notaire ou an après leur retour en Suisse avec H., nationalité française. Ne comprenant
par voie judiciaire lorsque l’enfant les autorités judiciaires suisses pro- pas cette décision et les différences de OOO

médiateur de la république 67
un ombudsman à la française
Les réponses du Médiateur de la République aux grands défis de notre société

OOO législation existant au sein des divers hors de France, ou pour obtenir un représentants de l’Association des
pays européens, Madame L. saisit le titre de séjour à leur majorité. Elle a départements de France ;
Médiateur de la République, qui a pu également des répercussions sur les • élaborer une circulaire à l’atten-
apporter des explications au couple, droits sociaux des intéressés, qui ne tion des postes consulaires visant
et l’orienter vers d’autres démarches. peuvent prétendre aux prestations à unifier les règles applicables
familiales. en matière de délivrance des
À l’exception des kafalas pronon- À l’initiative du Médiateur de la visas pour les enfants recueillis
cées par les autorités judiciaires République, les différents acteurs en kafala ; étudier la possibilité
algériennes, ces difficultés débutent du dossier (ministères, ambassades, d’étendre la délivrance des visas
lorsqu’un couple demande, au titre associations de parents, magistrats, de long séjour au titre du regrou-
du regroupement familial, à faire parlementaires, représentant de la pement familial à tous les enfants
venir en France le jeune recueilli Défenseure des enfants) ont été réu- régulièrement recueillis en kafala,
par kafala. Au vu des réclamations nis dans les locaux de l’Institution. conformément à la jurisprudence
transmises au Médiateur de la Répu- Ils ont pu établir un diagnostic par- du Conseil d’État ;
blique, ou à la lecture du dernier rap- tagé et sont convenus de poursuivre • c larifier par voie de circulaire
port de la Défenseure des enfants, les échanges pour travailler ensem- interministérielle auprès des
force est de constater que les déci- ble, notamment dans les directions administrations françaises et des
sions de refus de visa demeurent suivantes : organismes sociaux la notion de
fréquentes. Cette situation favorise • consolider le dispositif d’enquête kafala et ses implications en droit
l’entrée illégale de ces enfants en sociale en vue du recueil d’un français en vue de faciliter l’ouver-
France, qui se heurteraient jusqu’à enfant en kafala en lui conférant ture des droits sociaux au profit de
leur majorité à des difficultés liées une base juridique et en détermi- l’enfant ainsi recueilli ;
à cette situation : notamment pour nant l’autorité compétente . Cette • consacrer une séance de réflexion
obtenir un document de circula- réflexion donnera lieu à une réu- à la question de la kafala vis-à-vis
tion leur permettant de se déplacer nion de travail conjointe avec des de l’adoption en droit français.

Prévenir la maltraitance des personnes vulnérables


dans le milieu médical

Autre défi à relever : celui de la mal- vulnérables. Au sein de cette popu- matière d’hygiène, tous les cas où la
traitance. Le Médiateur de la Répu- lation, on voit monter les problèmes douleur n’est pas prise en compte,
blique estime que ce que l’on peut posés par les handicapés, les patients ceux aussi où la personne, faute de
appeler la « maltraitance ordinaire » relevant de la psychiatrie, les SDF, surveillance, et de réponse à ses
est à placer au rang des grandes les enfants obèses accueillis dans les appels, va essayer de se déplacer
menaces de notre société. Non seu- établissements de santé : des gens par elle-même, faire une chute et se
lement il observe une croissance des considérés comme différents, donc blesser. De tels faits se passent très
problèmes liés à ces actes, mais les traités différemment. souvent en gériatrie, mais aussi en
trouve sous-jacents à de nombreux soins de suite, à propos de patients
dossiers qu’il a à traiter. Un adolescent est hospitalisé du fait qui se retrouvent dans des services
C’est la plupart du temps la famille d’une suspicion d’appendicite. Une non appropriés et dont on ne prend
qui sollicite le Médiateur de la Répu- appendicectomie est pratiquée dès le en compte ni l’âge, ni les antécédents
blique, car la personne – quand elle lendemain. Après cette intervention, médicaux, ni l’isolement.
n’est pas décédée – n’a pas la capa- la mère de l’enfant décrira un manque
cité d’appeler, ni de s’exprimer. Beau- d’écoute et d’information de la part du Christophe, 14 ans et demi, est suivi
coup de dossiers relèvent de cette chirurgien. Ce dernier, lors de sa visite par son médecin traitant pour une
« maltraitance ordinaire » dans les postopératoire, fera preuve, sans rai- maladie de Crohn (affection chro-ni-
établissements de santé. Il s’agit d’un son apparente, d’un comportement que inflammatoire du tube digestif).
véritable tabou, celui d’une société extrêmement maltraitant à l’encontre Il est hospitalisé en urgence, après
qui va mal, et dont de ce fait les pro- de ce jeune patient : « Pourquoi je t’ai consultation, devant la suspicion d’une
fessionnels sont aussi sous pression, opéré ? De toute façon, tu es entouré occlusion intestinale aiguë. Après
stressés, violents avec eux-mêmes et de graisse et tu vas bientôt crever ». confirmation du diagnostic, le service
violents avec les autres. Le problème de pédiatrie générale étant complet,
ne concerne pas que les personnes Ce tabou de la maltraitance ordi- Christophe est hospitalisé, en cham-
âgées, mais toutes les personnes naire recouvre tous les déficits en bre seule, dans le service de chirur-

68 rapport annuel 2009


gie digestive adulte, pour y subir
immédiatement une intervention
chirurgicale, en raison d’une menace
possible de nécrose d’une anse
intestinale. Les suites immédiates
de l’intervention chirurgicale sont
simples. Après quatre jours, Chris-
tophe présente des troubles diges-
tifs à type de diarrhées profuses et
de douleurs abdominales. Une fièvre
relativement élevée est constatée
par le personnel infirmier. Un bilan
sanguin est pratiqué, permettant de
confirmer l’existence d’une infection.
Au cours des cinq jours suivants,
l’état général de Christophe va se
dégrader devant l’indifférence des
soignants qui en ont la charge. Les
bilans sanguins se succèdent, confir-
mant une septicémie, mais aucun
traitement antibiotique n’est mis en
route. Christophe est décrit par ses
parents comme un adolescent « fra-
gile » depuis l’annonce de sa maladie
de Crohn. Il est d’un naturel timide,
plutôt craintif et pleure facilement.
Pourtant, le personnel infirmier ne
semble pas prendre en compte cette
dimension pour adapter son compor- Les parents, estimant ne pas avoir que les enfants ne doivent pas être
tement, bien au contraire. Au cours obtenu une écoute attentive et com- admis dans les services adultes ;
des onze jours d’hospitalisation qui passionnelle de la part de la direc- qu’un enfant hospitalisé a le droit
vont précéder son décès, en raison tion et des professionnels de santé, d’avoir ses parents auprès de lui
d’un état de choc d’origine infec- ont saisi le Médiateur de la Républi- jour et nuit quel que soit sont âge
tieuse, les infirmières ne vont avoir que, exprimant l’espoir que de tels ou son état ; que l’équipe soignante
de cesse de le soumettre à des bri- faits ne se reproduisent plus. Une doit être formée à répondre aux
mades, notamment la nuit : « Arrête réunion entre les parents et l’hôpital besoins psychologiques et émo-
de pleurnicher… » ; « Nous ne sommes à des fins de médiation a été orga- tionnels de l’enfant et qu’il doit
pas là pour ramasser ta merde… » ; nisée rapidement et chacune des être traité avec tact et compréhen-
« Pas la peine de réclamer ta mère, parties a pu s’exprimer librement et sion en toute circonstance ;
elle ne viendra pas… ». Christophe se défendre ses positions. Le constat • d’autre part, une réflexion sur la
confiait effectivement à sa mère, cha- dressé, la direction de l’établisse- mise en place d’un recueil systé-
que nuit, avec un téléphone portable, ment s’est engagée à mener : matique des cas de maltraitance
relatant ses douleurs non soulagées • d’une part, une sensibilisation des par les professionnels de santé.
et ses angoisses d’être disputé par soignants sur la notion de « bien- Cependant, un certain nombre de
les infirmières lorsqu’il souillait son traitance », en rappelant la charte facteurs sont cités par les profes-
lit, pris de violentes diarrhées. de l’enfant hospitalisé, notamment sionnels de santé pour expliquer la OOO

médiateur de la république 69
un ombudsman à la française
Les réponses du Médiateur de la République aux grands défis de notre société

OOO maltraitance : leur « souffrance », les constituent eux-mêmes désormais s’impatienter puis à s’énerver. Les
conditions d’exercice contraignantes, une catégorie de victimes « à ris- infirmières d’accueil prennent alors
un encadrement parfois défaillant que ». Il est parfois difficile, pour les le temps de lui expliquer que ces
et une organisation beaucoup trop professionnels de santé, d’affronter deux patientes présentent des critè-
rigide. Ces problèmes ne sont pas une agressivité mal contrôlée, exer- res de gravité et que leur pronostic
toujours à mettre sur le compte d’un cée à leur encontre : incivilités, pro- vital serait engagé en l’absence de
défaut d’action des professionnels pos violents ou obscènes, menaces, prise en charge rapide. L’homme,
et constituent aussi une souffrance intimidations, humiliations et, plus n’entendant rien, commence à les
pour ceux qui en sont témoins ; d’où rarement, coups. menacer, les accuse d’incompétence
un surcroît de stress au travail, par- Au cours des dix premiers mois de et affirme qu’il va tout faire pour
fois de maladies touchant les pro- l’année 2009, les services du Média- qu’elles ne puissent plus exercer.
fessionnels. L’Institution est aussi teur de la République ont recueilli L’infirmière, rapportant ce témoi-
l’endroit où l’on peut prendre soin près de 60 réclamations de la part de gnage au Médiateur de la Républi-
des soignants pour ce qui concerne professionnels de santé qui témoi- que, décrira la fréquence de ce type
la maltraitance, sans les stigmatiser. gnaient ainsi de violences avérées à de situation et sa crainte croissante
De l’ordre de 40 % des réclamations leur encontre. d’être la cible de violences de la part
émanant des professionnels se font Une femme se présente aux urgen- de certaines personnes manifestant
d’ailleurs sur ce sujet. ces obstétricales, accompagnée de de l’impatience aux urgences.
Si le malade, personne vulnérable son mari. Ce dernier, voyant que Ces situations représentent une
par excellence, demeure une vic- deux femmes sont reçues en prio- contrainte psychique majeure, pou-
time « privilégiée », les soignants rité, avant la sienne, commence à vant aboutir au « burn out » (syn-
drome d’épuisement professionnel)
des individus et à des comporte-
ments déviants pouvant mettre en
défaut la continuité et la sécurité
des soins.
Le Médiateur de la République a
l’occasion de constater la lourdeur
de ces questions lors de visites qu’il
mène, de jour ou de nuit, dans des
services hospitaliers. K

70 rapport annuel 2009


Une expertise au service des droits de l’Homme

L’Europe de la médiation

Renforcer les liens le contrôle de l’exécution des arrêts de la jurisprudence de la Cour afin
de la médiation européenne… de la Cour Européenne des Droits de prévenir de nouvelles condam-
Le Médiateur de la République est de l’Homme (CEDH), consolidant nations de la France en cas de non-
un interlocuteur privilégié du com- ainsi son étroite collaboration avec respect de ses obligations au regard
missaire aux droits de l’Homme du le Comité des ministres du Conseil de la Convention Européenne des
Conseil de l’Europe. Ce lien solide de l’Europe, chargé de surveiller Droits de l’Homme. C’est pourquoi
permet des échanges réguliers sur l’exécution par les États membres le Médiateur de la République, en
l’activité de l’Institution et le partage des arrêts de la Cour. Réaffirmant raison de l’expertise reconnue qu’il a
de son expertise sur des thèmes l’importance des arrêts de la CEDH acquise dans les situations de lieux
particuliers. Aujourd’hui, cette rela- et la nécessité de leur exécution en d’enfermement, s’est intéressé à l’état
tion s’inscrit plus que jamais dans droit interne, il a maintenu, en lien d’exécution de l’arrêt Frérot contre
le cadre du projet « Peer-to-Peer », avec la CNCDH, sa vigilance autour France condamnant la France pour OOO

financé par l’Union européenne et le


Conseil de l’Europe, mis en œuvre
par le commissaire aux droits de
l’Homme en 2008-2009 et reconduit
pour la période 2010-2011. Animé
avec l’ambition de constituer un
réseau actif de structures nationales
des droits de l’Homme – en portant
une attention particulière aux États
membres du Conseil de l’Europe qui
ne font pas partie de l’UE –, il prévoit,
via ses différents ateliers de travail
thématiques, de faciliter et de valori-
ser les échanges d’expériences entre
les médiateurs, ombudsmans et
commissions des droits de l’Homme
afin de renforcer les liens au sein du
système européen de défense et de
protection des droits de l’Homme.

… et améliorer le suivi
des arrêts de la CEDH
Le Médiateur de la République a
également poursuivi sa contribution,
comme il s’y était engagé auprès du
Commissaire, qui visait à améliorer

médiateur de la république 71
un ombudsman à la française
une expertise au service des droits de l’homme

OOO violation des articles 3 (interdiction pratiques condamnées par la CEDH CNCDH ont fait part au Comité de
de la torture, des traitements inhu- en matière de fouilles corporelles et leurs observations et recommanda-
mains ou dégradants), 6 §1 (droit de rétention de la correspondance tions relatives à l’évolution du droit
à un procès équitable), 8 (droit au des personnes détenues étaient tou- français, conseillant, entre autres
respect de la correspondance) et 13 jours d’actualité. La France, notam- mesures, un encadrement plus strict
(droit à l’exercice d’un recours effec- ment dans la préparation de son pro- du recours aux fouilles intégrales et
tif) de la Convention Européenne jet de loi pénitentiaire, n’avait donc l’introduction d’un principe de pro-
des Droits de l’Homme. pas pris les mesures nécessaires per- portionnalité afin d’en limiter la pra-
En effet, à la suite des rapports d’ac- mettant de satisfaire aux mesures tique, ainsi que l’adoption d’une défi-
tivité du contrôleur général des lieux générales demandées par le Comité nition élargie de la correspondance
de privation de liberté et de la Com- des ministres, pour éviter la répéti- des détenus.
mission nationale de déontologie de la tion des violations. En conséquence,
sécurité (CNDS), il est apparu que les le Médiateur de la République et la

Une expertise reconnue au plan international

Les multiples sollicitations reçues par pour la sécurité et la coopération en réunion du Bureau de l’AOMF à Paris
le Médiateur pour un partage de son Europe, l’Organisation de coopéra- le 31 mars 2009. Il a soutenu la prépa-
expertise témoignent de la qualité et tion et de développement économi- ration d’une étude sur l’état de l’en-
de l’efficacité du modèle institution- ques et le Programme des Nations fance en francophonie et des méca-
nel français de médiation comme unies pour le développement, est nismes institutionnels de protection
source d’inspiration pour l’action en devenue une institution dynamique, des droits de l’enfant, conduite avec
faveur de la démocratie et de la bonne animée par 45 collaborateurs moti- le soutien de l’Organisation interna-
gouvernance par rapport au modèle vés et très présents sur le terrain. tionale de la francophonie. Son avan-
défendu dans les pays anglo-saxons. Elle a pu, de fait, asseoir son indé- cement a pu être constaté lors du
pendance. Par ses prises de position 6e congrès de l’AOMF à Québec, en
Le jumelage avec l’Arménie, fermes et courageuses, elle s’est bâti septembre. Le rapport de synthèse
une initiative inédite une réputation de sérieux et une cré- de ce travail, présenté à Tunis en
Le Médiateur de la République, en dibilité incontestable qui en font un novembre, a offert à tous les acteurs
association avec le Défenseur du interlocuteur incontournable sur les de la francophonie des pistes de
peuple de l’Espagne, a été choisi par problématiques liées aux droits de réflexion portant sur les développe-
la Commission européenne au terme l’Homme. Ce programme de coopéra- ments législatifs et institutionnels en
d’une procédure d’appel d’offres, pour tion d’un million d’euros, qui a officiel- matière de protection et de promo-
mettre en œuvre un jumelage insti- lement été lancé le 26 octobre 2009 tion efficaces des droits de l’enfant.
tutionnel au profit du Défenseur des en Arménie, doit donc renforcer l’ins- L’AOMF a par ailleurs aidé à la mise
droits de l’Homme de la république titution pour lui permettre de mieux en place d’un Médiateur des enfants
d’Arménie, premier jumelage insti- protéger et promouvoir l’état de droit au Burkina Faso et au Sénégal.
tutionnel financé par l’Union euro- et la bonne gouvernance. Pendant Des sessions de formation ont été
péenne dans ce pays. C’est dans ce dix-huit mois, les visites régulières organisées en mai et décembre 2009
contexte que le Médiateur de la Répu- d’experts des services du Médiateur au Centre de formation et d’échanges
blique s’est rendu en visite officielle à de la République, par ailleurs chef de en médiation de Rabat. En présence
Erevan le 6 juillet 2009, afin de ren- projet, l’organisation de séminaires, d’une vingtaine de participants
contrer son homologue et les ministres de formations du personnel, de visite d’Afrique francophone, d’Europe et
des Affaires étrangères et de la Justice d’études ou de campagnes de com- du Moyen-Orient, des experts de
de la république d’Arménie. Il avait munication permettront le partage l’Institution ont été mis à la disposi-
auparavant été représenté à la confé- des expériences et des pratiques, tion de l’AOMF pour dispenser des
rence organisée par l’ombudsman pour un enrichissement mutuel. enseignements sur les techniques de
d’Arménie sur la liberté d’expression médiation et des moyens d’interven-
et le procès équitable, où un message Un acteur au sein du monde tion du Médiateur.
sur l’indépendance de l’ombudsman francophone Des formations bilatérales ont égale-
avait été délivré en son nom. Secrétaire général de l’Association ment été organisées au Burkina Faso
En 2006, ce pays s’est doté d’un Défen- des ombudsmans et médiateurs de et au Mali sur le rôle des délégués du
seur des droits de l’Homme qui, grâce la francophonie (AOMF), le Média- Médiateur en vue de leur mise en
aux financements de l’Organisation teur de la République a accueilli la place dans ces pays.

72 rapport annuel 2009


Le rayonnement lioration de leurs relations avec les Des liens renforcés
de la médiation reconnu citoyens et du fonctionnement des avec la Méditerranée
par l’Onu services publics, ce projet de réso- et le monde arabe
En marge de la 12e session du Conseil lution insiste sur leur contribution Au premier semestre 2009, les struc-
des Droits de l’Homme de l’Onu à à l’instauration de l’état de droit et tures de la nouvelle Association des
Genève, le 24 septembre, le Média- au respect des principes d’égalité et ombudsmans de la méditerranée
teur de la République a été invité à de justice. (AOM), créée à Marseille l’année pré-
participer à la table ronde qui s’est Valorisant également la place de la cédente, ont été mises en place avant
tenue autour du thème « le rôle des coopération internationale dans l’ac- l’inauguration des locaux du siège
ombudsmans, médiateurs et insti- tivité et l’efficacité de la médiation, de l’AOM le 4 novembre à Tanger. Le
tutions nationales de défense des la résolution encourage les États Médiateur de la République, secré-
droits de l’Homme dans le système membres à mettre en place des taire général de l’AOM, a organisé la
de promotion et de protection des ombudsmans, médiateurs et autres rencontre du conseil d’administration
droits de l’Homme ». Cette rencontre institutions nationales de défense en juin 2009 à Stockholm, en marge
s’inscrivait dans la lignée de l’adop- des droits de l’Homme ou à les ren- de la conférence de l’Institut interna-
tion par la 3e commission de l’assem- forcer, à tout mettre en œuvre pour tional de l’ombudsman. Il a également
blée générale de l’Organisation des faciliter leur action, à mieux les faire co-organisé, les 14 et 15 décembre
Nations unies, traitant notamment connaître des citoyens et à suivre à Athènes, une conférence inter-
des questions relatives aux droits de davantage leurs recommandations. nationale de l’AOM sur le thème de
l’Homme d’un projet de résolution Ce projet de résolution sera présenté « la transparence dans les services
sur ce même thème le 6 novembre à la prochaine session de l’assemblée publics et le rôle du Médiateur ». Une
2008. Considérant qu’ils doivent être générale des Nations unies, en sep- résolution a été adoptée à la suite de
indépendants et autonomes, rap- tembre 2010, et viendra donc consa- l’assemblée générale de l’association,
pelant leur rôle en matière de ges- crer la reconnaissance internationale dans laquelle les médiateurs mem-
tion des affaires publiques dans les du rôle des institutions nationales de bres se sont engagés à développer
administrations ainsi que de l’amé- médiation au sein des démocraties. leur coopération avec l’Onu, notam-
ment en faisant la promotion auprès
de leurs États de la ratification des
instruments internationaux relatifs à
la privation de liberté.
L’expertise du Médiateur de la
République a été largement sollici-
tée, notamment dans le cadre de la
coopération initiée en 2008 avec le
département des droits de l’Homme
de la Ligue arabe et plusieurs pays
arabes, qui s’est poursuivie au pre-
mier semestre 2009. Des relations
privilégiées se sont développées avec
l’Égypte, qui a choisi de s’inspirer du
modèle français pour créer une ins-
titution nationale de médiation. Le
Médiateur de la République a reçu le
président de l’Agence centrale pour
l’organisation et ­l’administration
d’Égypte, à la faveur d’une visite OOO

médiateur de la république 73
un ombudsman à la française
une expertise au service des droits de l’homme

OOO organisée par le programme Sigma d’un médiateur de la République Un accord de coopération va égale-
(programme conjoint UE/OCDE en au Liban – organisé par le Centre ment être signé avec l’institution de
faveur de la bonne gouvernance). professionnel de médiation de l’uni- l’ombudsman brésilien à la suite d’une
Deux rencontres ont également eu versité Saint-Joseph de Beyrouth le visite effectuée en novembre 2009 à
lieu au Caire, avec le ministre de la vendredi 6 novembre 2009 – et est l’occasion d’un colloque international
réforme administrative, en vue de la intervenu lors de la table ronde « Le à Brasilia sur le rôle de l’ombudsman
création d’un médiateur en Égypte. Médiateur de la République, protec- dans le renforcement de la démocra-
Le Médiateur est ensuite intervenu teur des citoyens ». tie participative, dans le cadre de
lors de deux conférences organisées l’année de la France au Brésil.
au Caire, en mai et décembre, respec- Enfin, dans sa volonté de promouvoir
tivement sur la lutte contre la corrup- la coopération internationale entre les Le Médiateur de la République a
tion et la création d’un ombudsman institutions de médiation et de défen- participé en juin 2009 au congrès
en Égypte et sur le thème « l’ombuds- dre la cause des droits de l’Homme, mondial de l’Institut International de
man, le dialogue culturel et les droits Jean-Paul Delevoye a organisé, le l’Ombudsman, organisé à Stockholm
de l’Homme dans une société en 1er février 2010, un colloque interna- à l’occasion du 200e anniversaire de
changement », en lien avec le réseau tional qui réunissait à Paris la Ligue la création de l’Ombudsman suédois.
diplomatique français. des états arabes et le Conseil de l’Eu- Il est intervenu pour présenter à ses
Faisant suite à la coopération initiée rope autour de la Charte arabe des 120 homologues étrangers l’origina-
en 2008 avec le Comité national des droits de l’Homme et de la Convention lité du modèle français de médiation.
droits de l’Homme du Qatar – l’équi- Européenne des Droits de l’Homme. En France, le Médiateur de la Répu-
valent de la Commission Nationale Parmi les thématiques abordées blique a participé, en tant que mem-
Consultative des Droits de l’Homme figuraient la liberté religieuse, bre, à la réunion du conseil d’admi-
française –, une délégation du minis- la discrimination, l’universalisme et nistration du Forum mondial des
tère de l’Intérieur du Qatar s’est ren- le relativisme des droits de l’Homme, droits de l’Homme en vue du choix
due en visite officielle en France où ainsi que leur effectivité. M. Robert du thème et de l’organisation du
elle a été reçue par le Médiateur de Badinter y a traité du thème de l’abo- 4e forum, qui se déroulera à Nantes
la République. Intéressée par la poli- lition de la peine de mort. du 28 juin au 1er juillet 2010.
tique de gestion des flux migratoires
de la France, la délégation a visité Une forte présence À l’occasion de sa visite au Luxem-
le centre de rétention administra- sur la scène internationale bourg, le 24 mars, le Médiateur de la
tive du Mesnil-Amelot. La création Le 10 décembre 2009 à Varsovie, la République a présenté à son homo-
d’un centre de formation à Doha est préparation du projet de convention logue luxembourgeois les méthodes
également à l’étude pour mars 2010 de coopération entre Monsieur Janusz et modalités de la mise en place du
entre le Comité National des Droits Kochanowski, commissaire pour la Pôle Santé et Sécurité des Soins
de l’Homme du Qatar et le Média- protection des droits civiques de la auprès de l’Institution ainsi que la
teur de la République. république de Pologne, et Monsieur réforme constitutionnelle qui va ins-
Le modèle français de Médiateur a Jean-Paul Delevoye, Médiateur de la taurer le Défenseur des droits, insti-
également été présenté lors d’une République française, devrait permet- tution que le Grand-Duché aimerait
conférence internationale organisée tre prochainement le lancement du lui aussi créer. Il a ensuite rencontré
en mai à Ankara sur les droits de réseau de coopération dans le cadre du le Premier ministre et le président
l’Homme et la création d’un média- partenariat d’Europe orientale décidé du Parlement. En mai, une déléga-
teur indépendant en Turquie. Le par l’Union européenne. Ce programme tion de l’ombudsman des Pays-Bas a
Médiateur de la République a éga- de coopération, initiative conjointe rencontré le Médiateur de la Répu-
lement été sollicité par la ministre de ces deux institutions, a vocation à blique pour des échanges autour de
des Droits de l’Homme d’Irak, qui soutenir les institutions nationales de la coopération entre le Médiateur
souhaitait s’inspirer du modèle médiation d’Arménie, d’Azerbaïdjan, de la République et la Commission
français pour mettre en place des de Biélorussie, de Géorgie, de Moldavie Nationale Consultative des Droits
structures de droits de l’Homme et d’Ukraine sur la période 2009-2013. de l’Homme française, en vue de la
dans son pays. Le Liban a lui aussi Cette convention, basée sur une coo- création d’une Commission analo-
demandé à bénéficier de l’expertise pération volontaire des partenaires, a gue aux Pays-Bas. Plus récemment,
française à la suite du vote de la loi pour principal objectif de renforcer les le Médiateur fédéral belge s’est éga-
instaurant l’institution de médiation pouvoirs des ombudsmans et de par- lement intéressé aux délégués du
au pays du cèdre. Le Médiateur de la ticiper à la construction d’une société Médiateur français dans les prisons
République a ainsi participé au col- démocratique en accordant une place avec pour objectif d’installer un sys-
loque de promotion de l’institution importante aux droits individuels. tème similaire en Belgique. K

74 rapport annuel 2009


Le Défenseur des droits,
un ombudsman à la française
Que de chemin parcouru depuis la Depuis de nombreuses années, plu- ce contexte que les travaux de la
loi du 3 janvier 1973 qui institua le sieurs universitaires avaient appelé commission présidée en 2007 par
Médiateur de la République ! L’Insti- de leurs vœux une constitutionna- Édouard Balladur ont abouti à la
tution, dont la création fut à l’époque lisation du rôle du Médiateur de la proposition, d’une part, d’accroître
votée à une voix près seulement, a République. les pouvoirs actuels de l’Institution,
su depuis trouver sa place dans la d’autre part, de permettre la saisine
société, a largement contribué au Par ailleurs, divers rapports parle- directe et, enfin, de regrouper un
débat démocratique et est devenue mentaires avaient formulé le souhait certain nombre d’autorités.
un acteur indispensable en matière de voir un certain nombre d’auto-
de rapprochement de la sphère rités indépendantes mutualiser Le rapport propose « que le Média-
publique et des citoyens. davantage leur action. C’est dans teur de la République voie sa
dénomination modifiée et que
l’existence d’un Défenseur des
droits fondamentaux soit expres-
sément consacrée par un titre de
la Constitution ».

Cet ombudsman à la française,


Jean-Paul Delevoye l’appelait de ses
vœux depuis longtemps, soutenu
par plusieurs anciens ministres et
d’éminents juristes. Dès 2007, Jean-
Paul Delevoye a demandé à ses
collaborateurs de travailler sur les
pistes d’évolution législative envisa-
geables pour améliorer le fonction-
nement et l’impact de l’Institution.
Ponctuellement assistées par des
constitutionnalistes et des publi-
cistes, les équipes du Médiateur
de la République ont réalisé des
enquêtes, études et questionnaires
afin, notamment, de comparer les
pouvoirs des ombudsmans en place
aux niveaux européen et interna-
tional. Leurs analyses ont nourri les
propositions que Jean-Paul Dele-
voye a portées aux décideurs poli-
tiques pour orienter l’évolution du
Médiateur de la République. OOO

médiateur de la république 75
un ombudsman à la français
le défenseur des droits, un ombudsman à la française

OOO La révision constitutionnelle du l’ensemble institutionnel chargé de En l’état, le projet de loi présente
23 juillet 2008 a officiellement créé la protection des droits et libertés certaines avancées et le Défenseur
le Défenseur des droits en lui consa- plus cohérent et efficace, le Défen- des droits devrait se voir effective-
crant le titre XI bis de la Constitu- seur des droits devrait voir ses attri- ment conférer des pouvoirs et des
tion du 4 octobre 1958. En l’élevant butions couvrir celles exercées par moyens d’action plus importants.
au niveau constitutionnel, la Répu- le Médiateur de la République, et Son pouvoir d’injonction sera d’abord
blique a voulu montrer l’autorité s’élargir à celles du Défenseur des renforcé. Il pourra ainsi enjoindre
qu’elle entendait reconnaître à la enfants et de la Commission natio- l’administration ou l’organisme
future institution, comme l’ont déjà nale de déontologie de la sécurité. concerné de prendre les mesures
fait certains de ses voisins euro- Le Défenseur des droits renforcera nécessaires si les recommandations
péens, tels l’Espagne, la Suède ou aussi ses liens avec d’autres autori- qu’il a formulées n’ont pas été sui-
encore le Portugal. La constitution- tés administratives indépendantes vies d’effet. Le Défenseur des droits
nalisation répond à une volonté de intervenant dans le domaine de la pourra proposer aux parties au litige
lui donner une assise plus grande au protection des droits, notamment de conclure une transaction. Il aura
sein de l’édifice institutionnel et un la Haute autorité de lutte contre la possibilité d’être entendu devant
rang la plaçant davantage au-dessus les discriminations et pour l’égalité toute juridiction afin de présenter
des acteurs politiques et des autres (Halde) et la Commission nationale ses observations dans une affaire en
services publics. En accordant à de l’informatique et des libertés cours, qu’elle soit civile, administra-
chacun la possibilité de le saisir (Cnil), dont il deviendra membre tive ou pénale. Enfin, il pourra sai-
directement, le législateur a égale- des collèges. sir le Conseil d’État d’une demande
ment souhaité ouvrir l’Institution d’avis sur l’interprétation ou la por-
au plus grand nombre et favoriser Ces dispositions restent encore tée d’un texte législatif ou régle-
ainsi un meilleur accès au droit. Le à préciser. Ce sera tout l’objet du mentaire, afin de prévenir les éven-
Défenseur des droits pourra en effet débat parlementaire qui se tiendra tuelles difficultés d’interprétation
être saisi par toute personne s’esti- en 2010 et qui validera définitive- divergente des textes applicables.
mant lésée par le fonctionnement du ment le champ de compétences, Le Défenseur des droits disposera
service public et disposera en outre l’organisation et les pouvoirs du de surcroît de moyens d’inspection
d’une faculté d’autosaisine. Défenseur des droits. Jean-Paul et d’investigation plus développés.
Delevoye poursuit sa réflexion, avec Il pourra ordonner la communica-
La mise en œuvre effective du ses services et quelques experts, tion de toutes informations et pièces
Défenseur des droits nécessite une sur cette nouvelle institution ; il for- et disposera d’un droit d’accès aux
loi organique précisant le statut, les mulera d’ailleurs des propositions locaux administratifs ou privés.
missions et les pouvoirs de cette d’amélioration supplémentaires en Parmi les sujets qui restent au cœur
nouvelle institution. Un premier 2010 lors des auditions parlemen- des propositions du Médiateur, la
texte a été adopté en Conseil des taires qui jalonneront la finalisa- question de la recommandation en
ministres en septembre 2009 puis tion de la loi organique instituant le équité occupera une place de pre-
transmis au Sénat. Destiné à rendre Défenseur des droits. mier plan. En effet, dans le domaine
du règlement amiable, qui constitue
Titre XI bis, article 71-1 de la Constitution du 4 octobre 1958 modifiée le cœur de son activité, le Médiateur
de la République se heurte souvent
« Le Défenseur des droits veille au respect des droits et libertés par
à une difficulté particulière tenant à
les administrations de l’État, les collectivités territoriales, les établissements
la contradiction existant entre deux
publics ainsi que par tout organisme investi d’une mission de service public,
ou à l’égard duquel la loi organique lui attribue des compétences. Il peut être textes législatifs.
saisi, dans les conditions prévues par la loi organique, par toute personne De même, dans le cadre du règle-
s’estimant lésée par le fonctionnement d’un service public ou d’un organisme ment des dossiers proposés par le
visé au premier alinéa. Il peut se saisir d’office. La loi organique définit Médiateur de la République, celui-
les attributions et les modalités d’intervention du Défenseur des droits. ci peut être appelé à émettre ce que
Elle détermine les conditions dans lesquelles il peut être assisté par un l’on appelle une recommandation en
collège pour l’exercice de certaines de ses attributions. Le Défenseur des équité, dans des cas particuliers.
droits est nommé par le président de la République pour un mandat de
Cette notion, mentionnée à l’article 9
six ans non renouvelable, après application de la procédure prévue au dernier
de la loi du 3 janvier 1973 modifiée,
alinéa de l’article 13. Ses fonctions sont incompatibles avec celles de membre
du Gouvernement et de membre du Parlement. Les autres incompatibilités constitue l’un des principaux fonde-
sont fixées par la loi organique. Le Défenseur des droits rend compte ments de l’action du Médiateur de
de son activité au président de la République et au Parlement. » la République. Rarement utilisée,
et destinée à l’être avec parcimonie,

76 rapport annuel 2009


elle vise principalement à permet- connue, voire inconnue – n’est pas tant toute disposition contraire.
tre de solutionner un dossier soit en toujours comprise et acceptée par L’exonération de toute responsa-
l’absence de textes, soit en cas de les divers services publics auxquels bilité, notamment financière, des
conflits de textes de même valeur elle est adressée. La loi organique agents qui exécuteront une recom-
et, enfin, lorsque les conséquences pourrait donc préciser les modalités mandation en équité du Défenseur
de l’application d’un texte créent d’exécution des recommandations des droits devrait également être
à titre individuel une situation par- en équité du Défenseur des droits prévue pour donner toute son effi-
ticulièrement inéquitable. Dans ces afin d’en réaffirmer la primauté. » cience à ce pouvoir si original. Dans
cas exceptionnels, le Médiateur tente Il conviendrait, en effet, de prévoir la même optique, un rapport parti-
de proposer une solution compatible que l’intervention du Défenseur des culier au Parlement sur ces recom-
avec l’esprit de la loi ou du règlement. droits sur le fondement de l’équité mandations à incidences financières
« Une telle recommandation – peu puisse être mise en œuvre nonobs- pourrait être envisagé.

Le Défenseur des droits constitue


donc une avancée institutionnelle
indéniable et répond à la logique
de rationalisation et à la recherche
d’efficacité tant souhaitées. Le pro-
grès le plus sensible se situe à n’en
pas douter du côté des réclamants
eux-mêmes : les personnes s’esti-
mant victimes bénéficieront bientôt
d’un interlocuteur plus aisément
identifiable et pourront le saisir avec
davantage de facilités.
Le Médiateur n’est pas décideur
politique, c’est au législateur de déci-
der du contenu de ce projet de loi.
Le Médiateur garde néanmoins la
liberté d’interpeller le politique sur
certains points et de rappeler quel-
ques principes immuables : quels
que soient le périmètre et l’organi-
sation interne choisis, le Défenseur
ne pourra que conférer à chacune
des autorités indépendantes qu’il
regroupera en son sein des pouvoirs
et des moyens d’action supplémen-
taires. Hisser le Défenseur au niveau
constitutionnel ne peut que se tra-
duire par un « effet d’aspiration
ascendante » pour ces autorités. Les
débats à venir devront privilégier la
défense des causes et des person-
nes par rapport à la sauvegarde des
structures. K

médiateur de la république 77
PORTRAIT DE L’INSTITUTION
Toute l’activité des services du Médiateur de la République tend vers
un objectif : que chaque réclamation trouve une réponse, l’usager
étant guidé dans le labyrinthe administratif. Plus facilement acces-
sible aux citoyens, l’Institution a renforcé ses capacités d’écoute,
notamment en mettant en place un formulaire éléctronique, en ache-
vant sa couverture du milieu carcéral ou encore en favorisant la mon-
tée en puissance du Pôle Santé et Sécurité des Soins. Créé le 1er jan-
vier 2009, ce dernier est venu compléter le champ de compétences du
Médiateur de la République. Forces de propositions reconnues pour
faire évoluer les cadres législatifs, les secteurs de l’Institution ont de
plus inscrit leur action dans la perspective du passage au Défenseur
des droits.

•••

DIRECTION DU DÉVELOPPEMENT TERRITORIAL


Les délégués : des femmes et des hommes proches
de ceux qui ont besoin d’eux p. 79

LE SECTEUR RECEVABILITÉ
Orienter, informer et traiter les urgences p. 80

LE SECTEUR DES AFFAIRES GÉNÉRALES


Une forte technicité dans un environnement en constante évolution p. 81

LE SECTEUR agents publics-pensions


Carrière, précarité, chômage, maladie, pensions :
des réclamations polymorphes p. 82

LE SECTEUR JUSTICE
Orienter le réclamant et faciliter le dialogue avec l’administration p. 83

LE SECTEUR SOCIAL
Pour une meilleure compréhension entre assurés et organismes
de protection sociale p. 84

LE SECTEUR FISCAL
Vers de meilleures garanties pour le contribuable p. 85

LE SECTEUR DES RÉFORMES


Comment engager les autorités à accepter le débat public
sur des questions essentielles p. 86

LE PÔLE SANTÉ ET SÉCURITÉ DES SOINS


Comprendre, intervenir, alerter p. 87

78 rapport annuel 2009


Direction du développement territorial
Les délégués : des femmes et des hommes
proches de ceux qui ont besoin d’eux

Un développement du réseau orienté vers la proximité :


419 points d’accueil permettent à tous les publics de recourir à l’Institution.

À la fin de l’année 2009, 281 délégués accueillent 281 délégués pénitentiaires, bénéficient d’un accès direct à

419 points
le public dans 419 points d’accueil, chiffre en un délégué du Médiateur. 60 de ces sites dis-
constante progression au cours de ces derniè- posent d’une permanence régulière, les 104
d’accueil
res années. Fidèle à sa mission, l’Institution autres étant desservis au cas par cas. 149 délé-
cherche toujours à se rapprocher de ceux qui
ont le plus besoin d’elle, comme les habitants
57 500 gués (soit plus de la moitié de l’effectif total du
réseau) sont actuellement impliqués dans ce
détenus bénéficient
des quartiers sensibles et les personnes handi- d’un accès programme.
capées ou détenues. à un délégué
Un développement harmonieux grâce
210 délégués accueillent aujourd’hui le public à la mutualisation des savoir-faire
dans des structures de proximité comme les Une croissance aussi importante ne doit pas
maisons de la justice et du droit, les maisons se faire au détriment de la qualité des inter-
de service public ou les points d’accès au droit, ventions. Les délégués bénéficient d’une for-
ou encore les structures mises à disposition mation permanente assurée par l’Institution
par les collectivités territoriales. 108 délégués (près de 250 jours de formation assurés en
les reçoivent toujours en préfecture et 33 en 2009). L’ensemble des délégués ont accès aux
sous-préfecture. La plupart des implantations outils informatiques de l’Institution (messa-
récentes résultent du souci permanent des gerie et portail intranet), qui permettent à la
délégués de se rapprocher des usagers : c’est fois un apport documentaire et des échanges
ainsi que les cinq délégués du Gard reçoivent à l’intérieur du réseau.
le public dans douze points d’accueil différents, Enfin, les délégués sont également incités à
ou que certains autres délégués ont dédou- mutualiser leurs savoir-faire par le biais du tra-
blé leur lieu de permanence, comme à Liévin, vail collégial. Aujourd’hui, 226 délégués, issus
dans le Pas-de-Calais, ou à Saint-Denis de La de 73 départements différents, soit plus des
Réunion. La situation des points d’accueil n’est deux tiers du réseau, se retrouvent régulière-
pas figée : si l’activité d’un lieu d’accueil n’est ment pour des réunions de travail qui favori-
pas satisfaisante, la permanence est trans- sent la cohésion dans l’approche des dossiers
férée. C’est ainsi qu’en 2009, celle de Vernon, et leur apportent un appui supplémentaire en
dans l’Eure, a été transférée à Louviers, celle instaurant des échanges réguliers entre eux.
de Vandœuvre-lès-Nancy à Briey et celle de Ces délégués se retrouvent désormais qua-
Saint-André à Saint-Pierre à la Réunion. tre ou cinq fois par an, dans un cadre inter-
départemental, pour des réunions de travail
Une implantation renforcée regroupant une dizaine de participants. Le
en milieu carcéral regroupement se fait sur des critères géo-
La mise en œuvre du programme a été pour- graphiques ou de facilité de transport. Les
suivie à un rythme soutenu et, fin 2009, le régions Centre, Bretagne, Limousin et Cham-
bilan peut être considéré comme satisfaisant : pagne-Ardenne ont découvert ce type de
57  500 détenus (dont 3  140 en outre-mer), soit travail depuis le début de l’année 2009 et la
94  % de l’effectif total, répartis sur 164 sites démarche se poursuit.

médiateur de la république 79
OOO

Le secteur Recevabilité
Orienter, informer et traiter les urgences

La Recevabilité est la plate-forme d’accueil et d’orientation des réclamations qui arrivent


à l’Institution. Toute urgence détectée est traitée par une cellule dédiée. Elle apporte
des réponses aux réclamations non recevables et les dirige vers les organismes compétents.

Le secteur de la Recevabilité remplit deux mis- 6 443 dossiers La deuxième mission de la Recevabilité cor-
sions essentielles. En premier lieu, il récep- reçus (hors Pôle respond à une autre vocation du Médiateur de
tionne l’ensemble des requêtes adressées Santé) la République : incarner un point d’accès péda-
au Médiateur de la République, directement
ou par l’intermédiaire d’un parlementaire. Il
118 dossiers
gogique au droit et un interlocuteur de proxi-
mité. Pour le secteur Recevabilité, une règle
traités par la cellule
examine ensuite les demandes, oriente celles d’urgence, dont 12 d’or est de ne jamais laisser une demande sans
qui sont recevables vers l’un des secteurs issus du traitement réponse. En effet, il s’agit de traiter les récla-
d’instruction du Médiateur de la République et, des formulaires mations non recevables car n’entrant pas dans
le cas échéant, vers le Pôle Santé et Sécurité
des Soins, ou vers les délégués territoriaux. 52,5 % des
son champ de compétence au sens de la loi du
3 janvier 1973. Elles représentent près de la
dossiers adressés
En 2009 a été constatée une augmentation des moitié des demandes adressées au Médiateur
à l’Institution sont
demandes relatives à la nationalité et les pen- non recevables, de la République et concernent principalement
sions pour des ressortissants de territoires soit 3 377 dossiers des litiges d’ordre privé : problèmes familiaux,
anciennement français ainsi que sur les ques- traités au fond rapports entre locataires et propriétaires,
tions d’amendes. par la Recevabilité droit de la consommation, procédures judiciai-
L’année 2009 aura aussi été marquée par un
élargissement des modes de saisine du Média-
2 387 mails
res en cours, etc. Les requérants reçoivent,
après traitement par le service, une réponse
reçus et traités.
teur de la République. En septembre, le sec- 1 669 formulaires claire, complète et utile qui précise pour-
teur Recevabilité a en effet mis en place un depuis le quoi le Médiateur de la République n’est pas
formulaire électronique. En quelques semai- 1er septembre compétent en la matière, quelles démarches
nes, cet instrument a été plébiscité par les 2009, dont 1 342 ont ils auraient dû – ou peuvent encore – entre-
administrés qui, l’utilisant presque autant que donné lieu à la prendre et les coordonnées des organismes à
le courrier classique, ont pratiquement fait
création d’un contacter le cas échéant. La Recevabilité pal-
dossier, soit 80,4 %.
doubler le nombre de demandes transmises lie ainsi la méconnaissance des procédures
au Médiateur de la République. Avantage : il administratives de la part du grand public.
permet d’accélérer les échanges lorsque le Il arrive que la Recevabilité détecte l’urgence
secteur a besoin d’informations complémen- d’une réclamation dès sa réception : menace
taires sur les réclamations, qui peuvent donc d’expulsion, blocage de comptes bancaires,
plus rapidement recevoir une réponse ou par- suppression d’un revenu minimum, etc. Le
tir en instruction. Le succès de ce formulaire très court laps de temps dont dispose parfois
ne le destine néanmoins pas à se substituer l’administré pour déposer un autre recours
au papier, les segments de population visés peut aussi accentuer la nécessité de lui appor-
n’étant pas les mêmes. ter une réponse rapide. 118 dossiers ont été
ainsi traités en 2009 par sa cellule d’urgence.

80 rapport annuel 2009


Le secteur Affaires générales
Une forte technicité dans un environnement
en constante évolution

Énumérer les domaines couverts par le secteur des Affaires générales (AGE) reviendrait à établir
une liste à la Prévert des petits drames quotidiens et des grandes questions de principe qui émaillent
la vie de tout un chacun. Un secteur où rigueur juridique et initiatives se conjuguent pour instruire
utilement les réclamations fondées.

Les chargés de mission du secteur AGE sont 666 dossiers peut imposer de solution. N’étant pas partie
issus des services juridiques des administra- clôturés en 2009 au litige, ni avocat de l’une des parties auprès
tions centrales, des collectivités territoriales
ou des établissements publics. Ils allient leur 782 dossiers de l’autre, ni juge, il poursuit, avec la distance
que lui permet la liberté du service gratuit qu’il
ouverts en 2009
connaissance de la vie administrative à leur offre aux réclamants, la recherche de l’accord
dont
volonté de soutenir utilement les réclamations des parties sur une solution qui clôt le passé
qui méritent une médiation, afin de rechercher 39 % concernent et ouvre le présent. Ce qui suppose de l’écoute
des solutions d’équité, tant dans le respect du les amendes et… beaucoup de temps.
cadre juridique que dans celui des parties en et la circulation De par la variété des dossiers qu’il est amené
litige. Il s’agit là d’un travail rigoureux et créatif, routière à traiter, le secteur Affaires générales connaît
qui ne doit ni mettre en accusation une admi-
nistration ni peser sur la liberté politique des
et 29 % de nombreux interlocuteurs au niveau local
(collectivités territoriales, préfectures, DDE,
l’urbanisme,
élus. Il encourage le cas échéant l’administra- l’environnement, Drire, Drass, etc.) et au niveau national, auprès
tion ou la collectivité à modifier ses pratiques. le domaine public, des ministères, notamment.
Bien souvent, il est nécessaire de « détrico- la voirie et les Les matières abordées nécessitent une forte
ter  » une situation devenue complexe au fil des travaux publics technicité et une mise à jour constante des
ans avant d’arriver à une solution juridique connaissances portant sur les textes et la
équitable. Le Médiateur de la République ne jurisprudence, qui évoluent régulièrement.
Sur les thèmes les plus importants ou les plus
fréquents, le secteur AGE élabore des notes
Domaines couverts par le secteur
techniques et d’actualité mettant en lumière
des Affaires Générales
les axes de réforme à envisager.
Agriculture – Remembrement – Collectivi-
tés territoriales – Marchés publics – Com-
munication & presse – Libertés publiques
– Économie et subventions diverses – Ser-
vices publics – Éducation et formation pro-
fessionnelle – Équivalence de diplômes
– Accès aux professions réglementées –
Culture – Environnement – Expropriations
– Urbanisme – Aménagement du territoire
– Voirie – Domanialité – Travaux publics
– Transports et circulation routière – Tou-
risme – Santé – Responsabilité administra-
tive – Police administrative – Exécution des
décisions de justice prises par la juridiction
administrative, etc.
OOO

médiateur de la république 81
Le secteur Agents publics-pensions
Carrière, précarité, chômage, maladie,
pensions : des réclamations polymorphes

La protection sociale des fonctionnaires est loin d’être parfaite. De même, et contrairement
aux idées reçues, la précarité des emplois et des revenus existe aussi dans la fonction publique
ainsi que chez les contractuels de droit public. Enfin, même si la réforme des retraites de 2003
s’éloigne dans le temps, le thème des pensions reste le deuxième sujet de saisine du secteur,
après les litiges concernant les carrières.

Le secteur Agents publics-pensions (AGP) s’oc- 406 dossiers l’augmentation des contractuels en son sein.
cupe des litiges concernant les fonctionnaires ouverts en 2009 D’autre part, malgré l’aboutissement imminent
des trois fonctions publiques (territoriale, hos-
pitalière et d’État), pour tout ce qui ne relève pas
et302 dossiers d’une des propositions de réforme du Médiateur
de la République pour harmoniser sur ce point
clos
du pouvoir hiérarchique de l’administration qui dont les statuts des trois fonctions publiques, les
les emploie. Il est également saisi des cas des réclamations perdurent concernant les fonc-
agents n’ayant pas le statut de fonctionnaire 32 % de dossiers tionnaires d’État placés en disponibilité d’office
mais qui relèvent d’un contrat public, personnes « vieillesse » pour raison de santé, et qui se trouvent, parfois
de plus en plus nombreuses du fait d’un recours
croissant aux contractuels par les collectivités
et8 % pendant plusieurs mois, sans aucun revenu à
cause des errements de leur administration.
de dossiers
territoriales et les administrations. Le traitement « chômage » Concernant les gestions de carrière et leurs
de ces dossiers requiert à la fois une expertise effets à terme sur les pensions, les saisines
particulière mais aussi toujours plus de poly- 26 % massives de dossiers d’un même type se
valence. En effet, si les aspects concernant la de médiations sont taries depuis fin 2008. Le secteur AGP
gestion des carrières sont soumis aux règles de réussies traite aujourd’hui de plus en plus de dossiers
la fonction publique, les problématiques de pro- complexes, ayant parfois plusieurs facettes
tection sociale et de Sécurité sociale des agents et demandant une expertise juridique affi-
publics convergent de plus en plus vers celles née. à la faveur de cette baisse tendancielle
des grands régimes du secteur privé. des volumes d’entrée, qui s’est poursuivie sur
Le Médiateur de la République est toujours les trois quarts de l’année 2009, on a noté un
saisi d’un nombre important de dossiers saut qualitatif marquant. Les dossiers ont
concernant l’indemnisation du chômage, pu être gérés en flux tendu, permettant un
non seulement parce que certaines structu- contact plus efficace et plus exigeant avec les
res hospitalières ou petites collectivités ter- administrations partenaires. La proportion de
ritoriales connaissent mal les subtilités de médiations réussies a d’ailleurs doublé.
la législation sur ce point, mais aussi parce Les litiges concernant les anciens combattants
que, comme l’État lui-même, elles prati- et les victimes de guerre restent stables, alimen-
quent l’auto-assurance et que le paiement tés par la faiblesse des moyens mis en œuvre
d’allocations chômage qu’elles n’ont pas par l’administration pour absorber les effets des
prévues, donc pas budgétées, représente un décisions politiques généreuses mais nécessi-
surcoût devant lequel elles reculent. Grâce tant une instruction longue et complexe.
à l’action du Médiateur de la République, Enfin, on observe depuis fin octobre un afflux
beaucoup ont compris que le conventionne- de nouveaux dossiers (environ 25 % des entrées
ment avec l’Unedic et le Pôle Emploi deve- de l’année sur novembre-décembre). Absorber
nait une sage précaution face à l’évolution ce nouveau flux en maintenant le même niveau
des emplois dans la fonction publique et à de qualité sera le challenge de 2010.

82 rapport annuel 2009


Le secteur Justice
Orienter le réclamant
et faciliter le dialogue avec l’administration

Le secteur Justice traite essentiellement des questions relatives aux droits des étrangers,
à la nationalité et à l’état civil. En 2009, la répartition par nature des requêtes traitées
a été voisine de celle observée en 2008, avec cependant une légère baisse des réclamations
sur les droits des étrangers.

Le secteur Justice traite les litiges opposant les 591 dossiers Les interlocuteurs habituels du secteur Justice
personnes physiques ou morales au service ouverts en 2009 sont les bureaux des étrangers des préfectu-
public de la justice. Cette activité couvre les trois dont res, le service central d’état civil du ministère
composantes du ministère de la Justice : servi-
ces judiciaires, administration pénitentiaire et
32 % sur les des Affaires étrangères et européennes, les
procureurs de la République et les rédacteurs
droits des étrangers
protection judiciaire de la jeunesse. Elle s’at- du service de la nationalité du ministère de la
tache également aux tâches d’administration et 18 % sur Justice.
judiciaire accomplies par les membres des juri- les questions L’année 2009 voit se poursuivre la généralisa-
dictions ainsi qu’à l’activité des professions qui de nationalité tion des permanences de délégués du Média-
participent aux procédures juridictionnelles :
avocats, avoués, notaires, experts auprès des
537 dossiers clos teur de la République dans les établissements
pénitentiaires, couronnant de succès l’expé-
tribunaux. Le secteur Justice est également rimentation engagée en 2005 pour permettre
compétent pour les affaires liées à l’état civil et d’élargir l’accès de la population des détenus
au droit des étrangers. à la médiation. Dans l’optique pédagogique
Avec près de 32 % des dossiers traités, le qui est celle de l’Institution, il a poursuivi son
droit des étrangers représente la part la plus action en faveur d’un meilleur accès au droit
importante de l’activité et concerne les per- pour les personnes emprisonnées.
sonnes tout au long de leur vie : visa, titre de
séjour, regroupement familial, naturalisation.
Le secteur Justice effectue plus particulière-
ment dans ce domaine un important travail de
pédagogie afin de mieux informer les requé-
rants, notamment sur le « pouvoir d’appré-
ciation » de l’administration, souvent perçu
comme injuste.
Les questions de nationalité (18 %) et d’état
civil (17 %) représentent, en volume, les deux
autres domaines les plus importants parmi
les réclamations traitées. Le reste de l’acti-
vité du secteur est constitué par le traitement
des requêtes touchant au service public de la
justice et aux procédures judiciaires ainsi que
celles concernant les auxiliaires de justice. Si
les délais d’instruction dépassent rarement
quelques mois, les affaires d’état civil, malgré
la grande complexité qui les entoure, peuvent
parfois être résolues en 48 heures.

médiateur de la république 83
Le secteur social
Pour une meilleure compréhension entre
assurés et organismes de protection sociale

Les organismes de protection sociale et les structures gérant l’aide sociale sont de plus
en plus sollicités et peinent à fournir une réponse adaptée à la grande disparité des situations
professionnelles et familiales. Assurances vieillesse et chômage sont les thèmes les plus
fréquemment traités par le secteur Social.

Le secteur Social instruit principalement des 521 dossiers Les très fréquentes évolutions de la législation,
litiges liés aux prestations de Sécurité sociale, clôturés en 2009 particulièrement notables dans le domaine
aux cotisations, aux retraites de base et com- dont social et qui peuvent amener les administra-
plémentaires, aux allocations et prestations
familiales et sociales, aux minima sociaux, aux
33 % dossiers tions à donner des réponses contradictoires,
entraînent un grand nombre de réclamations
pour l’assurance
aides au logement, aux aides à l’emploi et à vieillesse adressées au Médiateur de la République. Leur
l’indemnisation du chômage. instruction est de surcroît compliquée par la
Fournir des explications aux administrés et21 % relative inadéquation des textes aux évolutions
constitue l’un des pans essentiels de l’activité pour l’assurance de la société. Les mobilités professionnelles
du secteur Social. Dans le dédale des procé-
chômage et sociales multiples associées à des régimes
dures et des textes relatifs à la couverture
sociale, les requérants sont souvent désar-
829 dossiers différents sont en grande partie à l’origine de
la complexité croissante des plaintes.
ouverts en 2009
més, et parfois révoltés. Face à des refus Les autres ont largement porté sur la question
d’aide, des retraits de prestations parfois des retraites, un sujet récurrent qui représente
signifiés sans préavis ni explication, voire face une large part de l’activité du secteur Social et
au silence de certains organismes, une sim- promet de le rester en 2010, et au-delà.
ple information peut tout changer. Au cours de
l’instruction des dossiers, le secteur Social a
donc l’occasion, fréquemment, d’expliciter les
règlements sociaux et leur application.
Le secteur Social s’emploie également à met-
tre en place et à développer des réseaux de
correspondants dans les organismes sociaux
et les administrations, qui sont des relais
essentiels pour mener à bien son action. Agis-
sant également en étroite collaboration avec
les délégués territoriaux du Médiateur de la
République, caractérisés par leur proximité
physique avec les administrés, le secteur
Social s’efforce de choisir, selon l’urgence
des cas à traiter, les interlocuteurs et le mode
d’intervention qui conférera la plus grande
efficacité à son activité.

84 rapport annuel 2009


Le secteur Fiscal
Vers de meilleures garanties
pour le contribuable

Les conditions d’application de la réglementation, souvent perçues comme instables


et trop restrictives – donc injustes –, renforcent le désir d’obtenir des informations claires
et de disposer de véritables garanties.

La quasi-totalité des dossiers instruits par 458 dossiers Parmi toutes ces réclamations, il apparaît
le secteur Fiscal concernent la fiscalité de ouverts en 2009 qu’à côté des solutions de compromis, des
l’État ou des collectivités territoriales ou de dont dégrèvements obtenus, des remises gra-
leurs groupements. Ces affaires, très variées
et aux enjeux financiers et sociaux multiples,
26 % concernent cieuses ou des délais accordés, la demande
d’informations face à la complexité fiscale est
un régime fiscal
sont présentées à tous les stades de la pro- dérogatoire de plus en plus importante. Rendre les textes
cédure administrative et contentieuse, depuis ou de faveur plus lisibles et expliquer les décisions qui en
la contestation de la base de l’impôt ou de découlent, notamment la position prise par les
son recouvrement jusqu’au recours devant le 12  % concernent administrations, occupent une place prépon-
juge et même après jugement. Les questions
le contrôle fiscal des dérante dans l’activité de l’Institution. Ce fai-
entreprises
de fiscalité personnelle y tiennent une place sant, le Médiateur aide aussi les administrés à
majeure et portent sur les situations familiales 8 % concernent faire valoir leurs droits.
(divorce, quotient familial, pensions alimen- la transmission Le secteur Fiscal constate aussi que les dos-
taires), professionnelles (frais réels, prime du patrimoine siers fondés sur un point de droit précis et par-
à l’emploi, indemnités de chômage), patri-
moniales (successions, donations, valeurs 15 % des
ticulier ne forment plus une majorité. Désor-
mais, la plus grande partie des cas consiste
dossiers, en lien
vénales, plus-values) ainsi que sur les reve- en la contestation d’ensemble d’un dossier ou
avec la crise
nus exceptionnels et différés, ou les régimes économique, portent d’une procédure. Pour les citoyens, cela signi-
dérogatoires des crédits d’impôt et avantages sur du gracieux fie qu’ils considèrent les comportements de
divers (« niches fiscales »). l’administration et la complexité d’ensemble
Les questions de contrôle fiscal (procédure, 366 dossiers du cadre législatif comme l’origine de ce qu’ils
interprétation juridique des faits, difficultés clos en 2009 perçoivent comme des dysfonctionnements
de recouvrement), principalement des entre- globaux, et que seule une autorité indépen-
prises ­– dont certaines jouent leur survie et dante, le Médiateur de la République, peut
l’emploi de leurs salariés –, concernent envi- alors débloquer la situation.
ron 20 % des réclamations reçues. Le contrôle
fiscal des particuliers résulte généralement
de celui des entreprises dans lesquelles ils
sont dirigeants ou associés, ou de cas d’usur-
pation d’identité. Enfin, les recours contre les
collectivités territoriales intéressent surtout
les augmentations, jugées excessives, des
impôts locaux et redevances, notamment pour
le financement de l’enlèvement des déchets
ménagers ainsi que leurs évaluations cadas-
trales et les cas d’exonération.

OOO

médiateur de la république 85
Le secteur des réformes
Comment engager les autorités à accepter
le débat public sur des questions essentielles

Face à une surenchère de textes législatifs susceptible d’engendrer des difficultés d’application
pour les administrations et des effets injustes pour les administrés, le pouvoir de proposition
de réformes du Médiateur de la République poursuit essentiellement deux objectifs :
la recherche d’une plus grande équité et la suppression des dysfonctionnements du service public.

La loi du 3 janvier 1973, renforcée par celle 12 propositions Les propositions de réforme adressées aux
du 12 avril 2000, confère au Médiateur de de réforme ministres concernés s’attachent soit à cor-
la République un pouvoir de proposition de satisfaites en 2009 riger les dysfonctionnements d’un service
réformes, par autosaisine ou par saisine
directe de la part d’un citoyen, d’un parlemen-
6 propositions public ou d’une administration, soit à réduire
les situations d’iniquité résultant de l’applica-
de réforme non
taire ou de tout acteur de la société civile. Les satisfaites en 2009 tion d’un texte. En 2009, 15 nouvelles propo-
propositions de réforme s’inscrivent dans le sitions de réforme ont été formulées sur des
prolongement logique de la médiation indivi- 55 propositions de sujets aussi divers que les droits sociaux liés
duelle. Celle-ci place en effet le Médiateur de réforme en attente au Pacs, la protection des enfants, l’encadre-
la République à un poste d’observateur des de réponse ment des frais bancaires, l’indemnisation des
réalités sociales qui alimente sa réflexion en victimes des essais nucléaires français ou le
vue d’améliorations législatives ou réglemen- renforcement du régime juridique des autop-
taires. Au-delà, le Médiateur de la République sies judiciaires.
intervient sur des sujets de société : évolution
de la famille, retraites, mobilité européenne,
protection du citoyen, du consommateur et
des populations fragiles, indemnisation des
victimes de drames sanitaires, fonctionne-
ment de la justice et du système de soins, etc.

86 rapport annuel 2009


Le pôle santé
et sécurité des soins
Comprendre, intervenir, alerter

Le plus souvent contacté directement par un numéro de téléphoné dédié, le P3S déploie
des moyens adaptés à la complexité des demandes ­– du simple « aiguillage » du demandeur
vers les structures locales de médiation à l’examen approfondi du dossier en cas de conflit
après un incident thérapeutique – pour préparer une future médiation physique.

Avec près de 6 000 requêtes enregistrées en 60 % des Un grand nombre de cas complexes appellent
2009, le Pôle Santé et Sécurité des Soins (P3S) dossiers sont relatifs de la part du P3S un traitement approfondi.
a démontré son utilité et la pertinence de son à des accidents Destinataire des réclamations des usagers
rattachement au Médiateur de la République. médicaux et en litige avec des professionnels ou établis-
chirurgicaux
Il a innové pour ce qui concerne les moyens sements de santé, le Pôle se fait alors com-
de contacter l’Institution. S’il reste possible de 17 % des muniquer le dossier médical concerné, met
le saisir par l’intermédiaire des délégués du dossiers concernent en œuvre des moyens particuliers pour ana-
Médiateur de la République sur le terrain ou en les infections lyser chaque dossier et reprendre pédagogi-
passant par le standard du siège, près de 75 % nosocomiales quement chaque « histoire ». Tous les quinze
des demandes lui parviennent directement
par le numéro vert dédié que des campagnes
10 % des jours, un staff médical se tient au Pôle avec
un médecin permanent, un autre médecin
réclamations sont
d’information tentent au maximum de porter à liées à des violences à mi-temps, une infirmière, cinq médecins
la connaissance des usagers des services de (contre 2 % en 2008) vacataires (qui sont par ailleurs en activité en
santé. Les appels sont recueillis par un centre hôpital ou en clinique), un médecin urgentiste,
externalisé, qui était déjà spécialisé dans la 8 % des un médecin généraliste, un anesthésiste-
sécurité alimentaire. demandes portent réanimateur et un chirurgien viscéral. Ils
sur l’accès au droit
Près de la moitié de ces appels consistent en consacrent une journée à une journée et
demandes d’informations de la part des usa-
gers des services de santé ou en demandes
5 % des dossiers demie à l’analyse des dossiers, en compagnie
de dix délégués thématiques : personnes de
concernent des
d’« aiguillage » vers le bon interlocuteur. Si accidents liés à référence, professeurs, un radiothérapeute,
ces demandes initiales d’informations sont en l’utilisation d’un un magistrat dont le Pôle sollicite les avis.
hausse, l’Institution se réjouit d’avoir en revan- produit de santé C’est ce travail qui permet au Pôle de mieux
che observé une baisse des réclamations por-
tant sur les difficultés d’accès au dossier médi-
60 médiations comprendre le déroulement des événements
indésirables graves qui lui sont soumis et
physiques en 2009
cal par l’usager. Cette amélioration fait suite à identifier les éventuels dysfonctionnements,
l’intervention du Médiateur de la République 2 723 dossiers erreurs ou fautes médicales.
auprès du ministère de la Santé, motivée par ouverts en 2009
les nombreuses réclamations dont il avait été
saisi. À noter que 15 % des appels sont le fait 1 769 dossiers
clos en 2009
de praticiens, souvent en situation de dialo-
gue bloqué avec un patient : ils sont alors à la 2 806 appels
recherche d’un interlocuteur indépendant et reçus au centre
neutre. D’autres appels signalent des difficul- d’appel
tés dans l’exercice des professions de santé,
voire des déficits pouvant s’apparenter à de la
« maltraitance ordinaire ».

médiateur de la république 87
La Gestion Administrative
et Financière 2009
Moyens budgétaires 11  099  009,00 e Midiss (Mission pour le développement de la médiation,
Charges de personnel 7  274  792,00 e de l’information et du dialogue pour la sécurité des soins)
Personnels du siège* 5  914 792 e a été transférée vers le Médiateur de la République dès le
Délégués 1 280 000 e 1er janvier 2009, ce qui a entraîné une forte progression du
Formation 80 000 e nombre de saisines de l’Institution.
Charges de fonctionnement courant * 3 704 217,00 e Au sein du P3S, l’évolution de l’activité a justifié les recru-
Locaux (dont loyer)** 1 980 700,00 e tements de médecins-experts, vacataires.
Moyens généraux (dont crédits
mis à disposition du budget de l’État) 1 239 517,00 e La stratégie immobilière
Autres services extérieurs 484 000,00 e
Dès 2004, Le Médiateur de la République a cherché à
Investissements 120  000,00 e
diminuer le coût du loyer des locaux où ont été regroupés
* Intégration Midiss devenue P3S ses services centraux.
** 475 000 e de gain de loyer ont permis d’une part de prendre
Le fait que le Médiateur de la République ait réguliè-
en charge le différentiel de dépense constaté lors du transfert de
Midiss vers P3S et de rendre près de 300 000 e au budget de l’État
rement fait savoir que le bail conclu en 2003 ressortait
en fin d’exercice comme onéreux au mètre carré a amené le bailleur non
seulement à prendre à sa charge plusieurs gros travaux
En 2009, les chantiers engagés en 2008 ont été poursuivis, initialement inscrits dans le bail comme étant à la charge
et d’autres initialisés. du locataire, mais surtout à financer, outre les travaux
d’installation d’un ascenseur desservant, enfin, tous les
La poursuite de l’amélioration de l’accueil étages, la réalisation concomitante de travaux permet-
La collaboration avec les services de la Documentation tant de disposer de surfaces complémentaires, notam-
française a été approfondie afin de parvenir à un trai- ment une salle de formation.
tement complet et immédiat des appels téléphoniques Enfin, des surfaces supplémentaires ont été mises à dispo-
qui nécessitent une réorientation vers d’autres services sition des services du Médiateur de la République (à l’ori-
administratifs, en sollicitant notamment le 39 39. gine pour la durée des travaux, elles le resteront jusqu’au
À la fin de l’année 2008, le Premier ministre et le Médiateur terme du bail) pour un montant de loyer revu à la baisse.
de la République ont signé une convention qui a pour objet : Dans sa lettre définitive du 1er septembre 2009, la Cour
• d’améliorer le traitement des courriels et des appels des comptes souligne que des « évolutions favorables »
téléphoniques des usagers, sont intervenues concernant la situation immobilière de
• de faire progresser l’utilisation et améliorer la qualité l’Institution. Elle donne par ailleurs un satisfaicit sur la
des dispositifs d’information générale et d’orientation gestion de l’Institution.
des usagers que sont www.service-public.fr et le 39 39.
L’ensemble de la mise en œuvre de ce processus s’est Personnels en fonction dans les services
étalé sur l’année 2009. du Médiateur de la République
(au 31 décembre 2009)
La création du Pôle Santé CATÉGORIES
TOTAL A B C
et Sécurité des Soins (P3S) Personnels mis à disposition
L’année 2009 a été marquée par l’intégration du Pôle par les administrations 33 24 5 4
Santé et Sécurité des Soins (P3S) au sein du Médiateur de Personnels des caisses
la République. Le P3S est chargé de renforcer le dialogue (CPAM, Urssaf et Cramif) 4 0 0 4
entre les usagers du système de soins et les profession- Personnels détachés 10 7 1 2
nels de santé. Il analyse et traite toutes demandes d’in- P3S 5 4 0 1
formation ou réclamations qui mettent en cause le non Personnels contractuels  35 26 0 9
respect du droit des malades, la qualité du système de
Personnels affectés par le SGG* 13 3 2 8
santé, la sécurité des soins et l’accès aux soins. (dont 10 avaient le statut de personnels détachés jusqu’en 2007)
En effet, à la demande de Madame la ministre de la Santé TOTAL 100 64 8 28
et par Convention avec la Haute Autorité de santé, la * Secrétariat général du gouvernement.

88 rapport annuel 2009


Pour contacter le Médiateur de la République
et ses délégués
Le Médiateur de la République
Un acteur essentiel 7, rue Saint-Florentin, 75008 Paris
Tél. : 01 55 35 24 24

de la défense des libertés Fax : 01 55 35 24 25

publiques Les délégués du Médiateur de la République


La liste des délégués, leurs adresses, coordonnées et permanences sont disponibles
sur le site Internet de l’Institution :
www.mediateur-republique.fr
Créée en 1973, l’Institution du Médiateur de la République est une Rubrique : Délégués / où les trouver ?
autorité indépendante qui met gracieusement ses compétences au
service des citoyens, personnes physiques ou morales pour amélio-
rer leurs relations avec l’administration et les services publics. Elle
Pôle Santé Sécurité des Soins
traite les litiges au cas par cas, vérifie si l’organisme objet d’une
plainte s’est ou non conformé à la mission de service public dont il
a la charge, relève les dysfonctionnements et rétablit les droits du et www.lemediateuretvous.fr

requérant. Lorsqu’une décision administrative, pourtant conforme www.securitesoins.fr L’espace d’échanges et de réflexions sur les droits

à la règle de droit, vient heurter les droits de la personne, le Média-

@
teur de la République dispose d’un pouvoir de recommandation en
Dialoguer avec le Médiateur de la République
équité. Il peut également faire usage de son pouvoir d’injonction E-mediateur est accessible via Windows Live Messenger
lorsque l’État ne se conforme pas à une décision prise par la justice et Google Talk. Il suffit de l’ajouter à vos contacts
en faveur des administrés. Le Médiateur de la République est éga- et de commencer à dialoguer avec lui.

lement doté d’un important pouvoir de proposition de réformes qui MSN : mediateur-republique@hotmail.fr

lui permet de contribuer à l’amélioration des procédures adminis- Google Talk : mediateur.republique@gmail.com

tratives et de la législation pour que le droit soit adapté aux évolu-


tions de la société et que cessent les iniquités.
L’Institution doit sa réactivité et son efficacité à la qualité de ses col- Pour transmettre votre dossier
laborateurs du siège, à sa présence territoriale assurée par quel- à un parlementaire de votre choix
que trois-cents délégations, à sa souplesse d’action et au travail
en réseau qui la caractérisent. Nommé en conseil des ministres, le Députés Sénateurs
Médiateur de la République, qui dispose d’un mandat unique de six Assemblée nationale Palais du Luxembourg
126, rue de l’Université, 75007 Paris 15, rue de Vaugirard, 75006 Paris
ans, est irrévocable et inamovible. Le Médiateur de la R ­ épublique Tél. : 01 40 63 60 00 Tél. : 01 42 34 20 00
est membre de droit de la Commission Nationale Consultative des Adresses et horaires des permanences : Adresses et horaires des permanences :
www.assemblee-nationale.fr www.senat.fr
Droits de l’Homme.

Médiateur de la République
Responsable de publication : Christian Le Roux
Les données chiffrées de ce rapport portent sur l’année 2009. Conception et réalisation : Polynôme Communication – RCS Nanterre B 398 289 629
Sa date de rédaction est arrêtée au 1er février 2010. Rédaction : les services du Médiateur de la République ; ADH presse
Photos : David Delaporte
Médiateur de la République – 7, rue Saint-Florentin – 75008 Paris Impression : La Fertoise – 72405 La Ferté-Bernard
Tél. : 01 55 35 24 24 – Fax : 01 55 35 24 25 – www.mediateur-republique.fr Dépôt légal : 1er trimestre 2010

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