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Au sommaire
— à la recherche de kadath, Ivan Verheyden . . . . . . . . . . . . 3
— les orgues spatiales, Robert Dehon . . . . . . . . . . . . . . 8
— notre cahier île de pâques
— journal de bord, Jacob Roggeveen . . . . . . . . . . . . . 12
— adieu, monsieur lacachery . . . . . . . . . . . . . . . . 16
— bois parlants et écriture pascuane, Jacques Dieu . . . . . . . . . 20
— le zodiaque, affaire sérieuse, Jacques Victoor . . . . . . . . . . . 25
— atl, atlas, atlantes, Marcel Holmet . . . . . . . . . . . . . . 29
A la recherche
De kadath
Toujours plus haut s’élevait la lumière et, se mêlant aux orbes du zénith, elle clignotait avec une
lugubre ironie vers les troupes en vol. Le nord tout entier n’était maintenant au-dessus d’elle que
ténèbres épouvantables, ténèbres pleines de rocs, montant d’infinies profondeurs jusqu’a d’infinies
hauteurs. Au sommet de toute cette vision, il n’y avait que ce pâle phare clignotant et inaccessible.
Carter en étudia la lumière plus attentivement, et discerna a la fin quelles étaient les lignes que dessi-
nait, a contre-ciel sur le diadème d’étoiles inconnues, son arrière-plan d’un noir d’encre. Il y avaient
des tours sur ce titanesque sommet, d’horribles tours couvertes de dômes et comptant d’innombra-
bles étages. Elles étaient groupées selon une architecture dont l’habileté dépassait tout ce que les
hommes peuvent concevoir, même au monde du rêve ; bâtiments et terrasses pleins a la fois de mer-
veilleux et de menaces, minuscules et noirs, se détachaient au loin contre le diadème stellaire, qui
brillait avec malveillance a l’extrême limite de la vue.
Couronnant cette montagne démesurée, il y avait un château dépassant toute imagination mortelle, et a
l’intérieur de ce château luisait la lumière blafarde et morbide du démon, faisant planer une sorte de
crépuscule sur ses murailles d’onyx poli. La pâle lueur du phare se révélait maintenant n’être qu’une
fenêtre brillante, allumée vers le sommet de l’une des plus hautes tours. Lorsque l’armée, prisonnière du
2 courant qui la portait, approcha du sommet de la montagne, Carter pensa qu’il avait discerné de déplai-
santes ombres en train de traverser lentement l’espace faiblement éclairé. La fenêtre était étrangement
voûtée, et sa forme n’avait absolument rien de terrestre. Le roc massif avait a présent cédé
la place aux gigantesques fondations du château monstrueux. Randolph Carter comprit alors que sa
quête était terminée, et qu’il apercevait au-dessus de lui le but de tous les voyages interdits et de
toutes les visions audacieuses : le siège incroyable et fabuleux des Grands Anciens au-dessus de
Kadath, la cite inconnue qui se dresse au sein de l’immensité froide…
C’est pourquoi notre revue porte ce nom. — il apparaîtra peut-être que l’idée d’une toujours
lente évolution de l’intelligence, d’un toujours
Déjà, en 1960... long cheminement du savoir, n’est pas une
Avec Lovecraft, nous nous retrouvons en compa- idée sûre, mais un tabou que nous avons érigé
gnie des auteurs du Matin des Magiciens. Car pour nous croire bénéficiaires, aujourd’hui, de
c’est aux efforts incessants de Louis Pauwels et toute l’histoire humaine. Pourquoi les civilisa-
de Jacques Bergier que nous devons de connaî- tions passées n’auraient-elles pas connu des
tre « ce grand génie venu d’ailleurs ». éclairs brusques, pendant lesquels la quasi-
totalité de la connaissance leur aurait été
Attardons-nous quelque peu, car l’aventure de dévoilée ? Pourquoi ce qui se produit parfois
l’archéologie parallèle débute en fait avec le Matin dans une vie d’homme, l’illumination, l’intuition
des Magiciens. On nous reprochera peut-être de fulgurante, l’explosion de génie, ne se serait-il
ressusciter de vieilles chimères. Il nous revient pas produit plusieurs fois dans la vie de
que, voici près de dix ans, au plus fort de la l’humanité ?
controverse, un auteur français bien connu souli-
gnait que ce livre n’avait aucun impact sur la jeu- — nous autres, civilisations, savons maintenant
nesse et que, de toutes façons, il ne s’agissait là que nous sommes mortelles, disait Valéry. Ce
que d’un aimable feu de broussaille. Or, outre le sont les techniques les plus évoluées qui ris-
fait qu’il est actuellement traduit dans la plupart quent d’entraîner la disparition totale de la
des pays, cet essai — pourtant rébarbatif au pre- civilisation dont elles sont nées. Imaginons
mier abord — se réédite encore régulièrement en notre propre civilisation dans un proche futur.
format de poche. Toutes les centrales d’énergie, toutes les ar-
mes, tous les émetteurs et récepteurs, tous les
Rappelez-vous la préface : « Il y avait quantité de appareils d’électricité et de nucléonique, se
sottises dans le bouquin de Pauwels et Bergier. trouvent basés sur le même principe de pro-
duction d’énergie. A la suite de quelque réac- Et notre but s’inscrit en ligne droite dans cette
tion en chaîne, tout explose. Ne restent que les optique.
hommes qui vivaient plus ou moins à l’écart de Selon la devise des Pieds Nickelés, évoquée dans
celle-ci. Les survivants retombent à la simplici- cet essai : « du calme et de l’orthographe ».
té.
Une attitude sans équivoque.
— nous avons de la Tradition, c’est-à-dire de Le grand problème de l’archéologie — et de la
l’ensemble des textes les plus anciens de l’hu- science en général, d’ailleurs — se situe au ni-
manité, une conception toute littéraire, reli- veau de la vulgarisation. C’est à ce moment, en
gieuse, philosophique. Que devient-elle, vue effet, que les savants sont obligés de présenter un
d’une autre façon, et que dit-elle ? « scénario » cohérent. Or, les lacunes sont nom-
breuses, souvent même énormes. Alors, les ar-
1° que la science est dangereuse. Cette idée chéologues, afin de répondre à la curiosité intel-
pouvait surprendre un homme du XIXe siè- lectuelle du public, se voient obligés, entre les
cle. Nous savons maintenant qu’il suffirait diverses pièces du puzzle, de tisser des ficelles.
d’un projectile au cobalt pour effacer la vie Ficelles qui, à certains moments, deviennent de
sur la plus grande partie du monde. véritables câbles. Mais quand l’édifice est trop
2° qu’il peut y avoir des contacts avec des fragile, les faits de l’archéologie parallèle ont vite
êtres non terrestres. Absurdité pour le XIXe fait de l’ébranler. Et c’est ainsi que s’ouvre la brè-
siècle, non plus pour nous. che par où vont s’engouffrer les théories.
3° que tout ce qui s’est passé depuis le début
des temps, a été enregistré dans la matiè- Celles-ci sont souvent aussi fragiles que les pré-
re, dans l’espace, dans les énergies, et cédentes, mais leur défaut est ailleurs. Ici, le câble
peut être révélé. C’est une pensée au- est d’emblée présenté comme inaltérable. Par
jourd’hui partagée par la plupart des cher- contre, les assises, qu’on refuse un peu trop vite
cheurs. (2) » de fixer dans la science officielle, on va les placer
ailleurs, c’est-à-dire souvent en sable mouvant. De
Il est étonnant de constater que de nombreux sorte que la stabilité de l’ensemble sera aussi pré-
éléments du Matin des Magiciens : des traditions, caire que dans le premier cas.
des sites, des témoignages d’hommes célèbres,
4 lorsque nous les présentons à nos interlocuteurs, Où situer KADATH dans tout cela ? Nous voulons
— qui s’empressent par ailleurs de dénoncer le faire une synthèse des deux. Tenir compte à la
livre — ceux-ci non seulement ignoraient cet élé- fois des acquis de la science classique et de
ment, mais de plus sont vivement intéressés, et ceux de l’archéologie parallèle. De sorte que
souvent nous demandent de plus amples rensei- nous ne présenterons que des assises stables,
gnements. Etrange retour des choses ! tant les certitudes absolues de la science officiel-
le que les faits incontestables de l’archéologie
Mais le Matin des Magiciens avait donné à beau- parallèle. C’est, je crois, ce qu’il y a de neuf chez
coup, en effet, l’envie d’aller y voir de plus près. nous. (3).
Car Pauwels et Bergier avaient posé de nombreu-
ses questions, sans prétendre apporter de répon- Les ficelles, ce n’est pas nous qui les tresserons.
ses définitives. Et le vide attire. C’est aux faits de les imposer et au lecteur de
relier lui-même les pièces du puzzle. Pour l’y
Surtout ceux qui croient « savoir ». aider, nous ne refuserons pas de citer les ficelles,
de parler des hypothèses avancées. Mais, pour
Ce fut à un point tel, que dix ans plus tard, il fallait notre part, nous croyons que la vérité se situe
rappeler les gens à l’ordre. « quelque part par là », sans que pour autant l’une
quelconque de ces théories puisse être considé-
Souvenez-vous encore, « L’homme éternel : « Le rée comme définitive.
thème de ce livre n’est pas très original. Il a été
utilisé par maints auteurs depuis la publication du Des questions sous-jacentes.
Matin des Magiciens et de la revue Planète. Il Car on nous accuserait vite d’insinuer des tas de
nous a paru cependant nécessaire de le reprendre choses, si dès le départ, nous n’allions pas droit
à notre manière, afin de nettoyer notre propre do- au but.
maine... Il faut jeter beaucoup de seaux d’eau et
balayer fermement ». En fait, il s’agit bien d’une option.
Partout, l’archéologie bute sur trois écueils formi-
Coïncidence ? dables : des connaissances astronomiques ve-
« L’homme éternel » vient d’être édité en format nues on ne sait d’où, des constructions incroya-
de poche (chez Folio). Il a paru le même jour que bles à échelle non humaine, et des traditions fan-
KADATH. tastiques identiques sur les cinq continents.
Pour tout cela, la science a, bien sûr, ses explica- Mais il est temps de reprendre les faits
tions, car elle y est acculée. Donc, dans l’ordre : incontestables et de les juxtaposer. De cet en-
empirisme et tâtonnements pour les connaissan- semble doivent surgir — à la longue — des cons-
ces astronomiques ; esclaves à la pelle et mégalo- tantes, des lois, à partir desquelles on peut pro-
manie d’un roi pour les monuments ; imagination gresser. Tant qu’on continuera à brûler les éta-
débridée et hallucinations pour les traditions. Nous pes, on tournera en rond. La solution, pour nous,
prenons le contre-pied, sans abandonner pour doit se situer, je le répète, « quelque part par
autant la méthode scientifique. Ne peut-on pas, en là ». C’est tout. Le reste n’est que bavardage.
effet, par économie d’hypothèse, faire tout dériver
d’une civilisation originelle, qui aurait été décrite
dans les traditions, douée de moyens Dans la préface à son nouveau livre,
« techniques », et ayant légué ses connaissances « L’archéologie mystérieuse » (4), Michel-Claude
à ses descendants ? Touchard s’explique ainsi : « Ce sont les travaux,
les récits, les hypothèses de cette archéologie mili-
tant pour une histoire ouverte et infinie de l’homme,
Une méthode de travail. et par là même s’opposant à la philosophie généra-
Je crois que notre travail est avant tout de recher- le de notre civilisation actuelle et aux données du
che. Recherche originale bien sûr, dans les limites rationalisme (lui-même militant) que nous avons
de nos moyens. Mais surtout recherche sélective voulu rassembler et analyser dans ce livre. Nous
parmi tout ce qui a été dit et écrit sur les civilisa- l’avons fait en nous gardant de la crédulité, mais
tions disparues. Car on a eu trop souvent tendan- sans nous défendre d’une certaine sympathie.»
ce à sous-estimer les multiples difficultés et les
précautions qu’il faut prendre à chaque pas, pour
Nous aussi. Si l’on veut bien ne pas oublier que
éviter de s’engager dans un cul-de-sac, ou dans le
délire organisé. cette sympathie est sans concession. Car, en fin
de compte, ici aussi, c’est de démocratie qu’il s’a-
Ce que nous publierons c’est, croyons-nous, ce git : le droit à une information complète.
qui mérite d’être retenu et servira tôt ou tard de
pièce dans le puzzle qu’est l’histoire de nos origi- IVAN VERHEYDEN
nes. Si nous retenons un élément, c’est parce que
notre équipe, et les savants qui nous aident, lui
auront donné une cote suffisante de crédibilité. (1) Les cahiers de l’Herne ont consacré à Lovecraft 5
Cela signifie aussi que nous puiserons partout, un numéro spécial en octobre 1969.
absolument partout, sans préjugé concernant ce- (2) Nous pensons que ces considérations sur la
lui qui a fait la découverte ou en a tiré des conclu- Tradition sont à ce point vraies, que nous enta-
sions. Il faut transcender les querelles de person- merons dès le prochain numéro, des études sur
l’Ordre des Templiers, probablement dépositai-
nes, sauf lorsqu’il s’agit de fraude caractérisée. res d’une science perdue.
(3) Il ne faudrait quand même pas perdre de vue,
Et c’est ici que nous nous démarquons par rap- par exemple, que sur certains monuments
mayas, la date de construction est gravée dans
port à ce qui a été fait avant nous. Nous ne pré- la pierre !
tendons pas connaître la réponse. Nous croyons (4) Collection « Bibliothèque de l’irrationnel », De-
même qu’il est encore trop tôt pour s’avancer. noël éd., Paris 1973.
Les textes sacrés
entre les lignes
Dans le cadre de cette rubrique, nous proposerons, dès le prochain numéro, des illustrations originales
des textes sacrés les plus insolites. Peintre du rêve et de l’étrange, dans le grand courant des artistes
fantastiques qu’a suscités la Belgique, il était normal que Gérard Deuquet ait été tenté par cette expé-
rience inédite.
K. Et après le Matin des Magiciens ? G.D. Je dirais presque que c’est joindre l’utile à
l’agréable, en ce sens que d’une part, cela permet
G.D. Le livre que j’ai lu peu de temps après, c’est de découvrir et de connaître mieux ces civilisa-
« La Lune, clé de la Bible », de Jean Sendy. De tous tions, et en même temps, de retrouver dans bas-
les auteurs que j’ai lus sur le sujet, je dois dire que reliefs de monuments assez extraordinaires des
c’est surtout lui qui m’a impressionné. Et j’ai toujours choses relativement insolites, comme à Palenque
rêvé d’illustrer ce thème. Dans sa conclusion, Jean ou à Tiahuanaco. Je me suis d’ailleurs inspiré,
Sendy prétend qu’on trouvera probablement lors pour la maquette de Kadath, des bas-reliefs de la
d’une des marches sur la Lune, l’Arche d’Alliance de Porte du Soleil. Le lecteur pourra vérifier que tou-
Moïse. On ne l’a toujours pas trouvée, du moins tes les lettres de couverture et de rubriques sont
j’ignore si on l’a recherchée ; et puis, on n’a encore tracées dans un bloc, avec des encoches analo-
exploré qu’une infime partie de la lune. Mais il est gues à celles du calendrier dit vénusien. Le K
étonnant que Jean Sendy se soit brusquement tu. dans lequel sera illustré à chaque fois le thème
Pour ma part, je me suis souvent posé la question de principal de la revue, est un bloc de matière, un
savoir pourquoi on n’a pas fait descendre un Lem granit énorme se baladant dans l’espace, venu de
dans les environs de toutes ces colonnes qu’on voit l’infini et allant à l’infini.
de haut, les pointes de Blair. On peut y trouver autant
de cailloux qu’ailleurs, et par la même occasion, voir K. Y a-t-il des sites archéologiques qui vous
ce que c’est. Remarquez, ils le savent peut-être de- fascinent particulièrement ?
puis longtemps. Il y avait là quelque chose d’excessi-
vement intéressant, ce peut être n’importe quoi, mais G.D. Ce que j’aurais voulu voir, ce sont les grottes
ne me dites pas qu’ils ne le savent pas... de Lascaux. Malheureusement, elles sont fermées
depuis 1963. Il y a peu de peintres contemporains comme vous voulez. L’être était dans un
qui pourraient arriver à faire quelque chose de nimbe, c’est-à-dire dans une boule de plexi-
pareil, au point de vue anatomie et stylisation. Ce glas, comme les astronautes sur la lune
qui étonne aussi, tout comme à Altamira, c’est actuellement, et il avait un collant au corps.
l’exactitude du dessin de l’être animal quant à
l’être humain qui, lui, est stylisé à l’extrême, bien K. Et les réactions du public ?
souvent avec un manque de proportions. C’étaient
peut-être des hommes en peaux de bêtes, en ce G.D. Aucune, sauf certains qui ne s’attendaient
sens qu’ils pouvaient avoir des raisons d’aller pas à cela, parce qu’ils y cherchaient la forme et
dans des grottes, mais il y a certainement des non le fond. Mais la toile a brûlé dans un incendie
quantités d’autres choses qui nous échappent. et est repartie avec les autres Elohim... Et il n’est
Disons qu’il s’agit là des restes d’une civilisation, pas dit que je n’y reviendrai pas…
comme ce qui resterait de nous après un cataclys-
me, naturel ou autre : quelques sculptures dans K. Un rêve ?
du granit, des choses gravées ici ou là, ou un ber-
ger s’amusant à dessiner dans une grotte. C’est à G.D. Illustrer les premiers versets de la Bible dans
mon avis ce qui s’est passé. une optique non traditionnelle. C’est dans notre pro-
gramme. Je voudrais faire une véritable bande dessi-
K. A-t-on déjà vu dans vos tableaux affleurer des née — un découpage comme un film, avec séquen-
éléments de votre intérêt pour les civilisations ces et tout —, de la vision d’Ezéchiel. La même cho-
disparues ? se en ce qui concerne l’épopée de Gilgamesh, quit-
tant la terre et la voyant de plus en plus petite sous
G.D. J’ai, lors d’une exposition, présenté une lui. Et d’autres encore : les patriarches qui, après un
toile intitulée « L’Archange». Il s’agissait d’un voyage de quelques jours, retrouvent la terre vieillie
être très personnel, inspiré de la vision d’Ezé- de plusieurs siècles. La relativité d’Einstein, quoi !
chiel. J’avais remplacé les ailes par des pro- Nous sommes en pleine science-fiction, mais com-
pulseurs « x » à air comprimé ou à réaction, ment voulez-vous raconter cela autrement ?
« L’archange ».
Pieces a convictions
ROBERT DEHON.
LE PASSE PRESENT
Le document que vous allez lire ouvre notre cahier ou grandiloquentes, mais elles restituent de ce
île de Pâques. Notre intention, en groupant fait l’esprit même de ces jours historiques.
certains articles en un « cahier », n’est pas, bien
sûr, d’épuiser le sujet une fois pour toutes : la Un mot encore. La dénomination exacte du ma-
chose serait d’ailleurs franchement irréalisable. nuscrit est la suivante : « Journal de bord du
Mais nous désirons éclairer un thème sous divers voyage d’exploration de Monsieur Jacob Rogge-
angles qui nous semblent complémentaires. Ces veen, avec ses navires Den Arend, Thienhoven
articles, nous les voulons exhaustifs, le thème et De Africaansche Galey, au cours des années
non. C’est pourquoi il y aura dans l’avenir encore 1721 et 1722 ». Voilà. Il ne nous reste plus qu’à
d’autres cahiers île de Pâques ! vous souhaiter un bon voyage. Imaginez... vous
êtes en plein Océan Pacifique, « à mille milles de
Y aurait-il lieu de justifier le titre un peu insolite de toute région habitée ». Une île apparaît à l’hori-
cette première rubrique ? Peut-être... « Le Passé zon. Nous sommes le jour de Pâques 1722...
présent », c’est pour nous une actualisation du I. V.
Passé, l’instantané d’une civilisation au moment
de sa découverte. Tantôt sous forme de reporta-
ge, tantôt un document d’époque. C’est ceci que
nous vous proposons aujourd’hui.
(1) Voir l’article dans le numéro 1 de KADATH.
er (2) Et non le 14, comme le prétendent, de concert,
1 août 1721. Trois navires hollandais appareil- Louis Castex et Bernard Villaret dans des livres
12 lent de Texel, une île de la Frise. Ils ont nom Den récents.
Arend (l’Aigle), Thienhoven et De Africaansche
Galey (la Galère Africaine), ayant à leur bord
respectivement cent dix, quatre-vingts et trente-
trois hommes. L’expédition, effectuée pour le
compte de la Compagnie des Indes Occidentales,
est placée sous le commandement de Jacob
Roggeveen. Celui-ci partait en fait à la recherche
du continent austral inconnu, décrit par le Capitai-
ne Davis (1). Ses investigations dans le Pacifique
seront négligeables au vu de la découverte qui
sera associée à son nom : celle de l’île de Pâ-
ques, le 5 avril 1722 (2).
La statue au musée
Les rares visiteurs de la Salle Mercator au Musée J. D.
du Cinquantenaire (7) peuvent y admirer la statue
Hanga One One, don du Gouverneur du Chili. Elle
mesure deux mètres soixante-cinq de hauteur sur
un mètre cinquante de largeur aux épaules. Son
poids est d’environ six tonnes.
19
Gravure de la deuxième expédition du Capitaine Cook, réalisée par William Hodges en 1774. Selon
Henri Lavachery, la statue ramenée par le Mercator serait celle indiquée par une flèche.
ARCHEOLOGIE PARALLELE
21
Tablette « Miro » : 806 signes répartis sur les deux faces. Elle mesure 29 cm sur 19,5 cm.
Comme le fait remarquer Alfred Métraux, les indi- Evolution des recherches.
gènes étaient certainement de bonne foi, et l’in- Depuis le jour où Mgr Jaussen reçut les tablettes
succès des tentatives de traduction est dû aux et effectua ses premières traductions, nombreux
Blancs eux-mêmes. Ceux-ci voulaient absolument ont été les savants qui tentèrent de donner une
leur faire lire les tablettes car ils ne pouvaient signification à l’écriture boustrophédone de l’île de
concevoir une écriture différente de la leur, c’est- Pâques.
à-dire une suite de lettres formant un mot. Il est
intéressant de noter que lorsque le prélat de Tahiti Le couple Routledge débarqua sur l’île en mars
voulut traduire en français les chants de Metoro, 1914 et y vécut seize mois. Leur principale activité
ceux-ci n’avaient aucun sens. Les mots étaient était de recenser les statues : debout ou cou-
polynésiens mais n’avaient aucun rapport entre chées. Mais ils eurent également l’occasion d’as-
eux. Le chant ne racontait pas une histoire. sister en ses derniers moments sur terre, un hom-
22 me extrêmement âgé, nommé Tomeniko. Il put
La façon dont Metoro a chanté les tablettes de- encore leur murmurer quelques mots et dessina
vant le vicaire apostolique a été suspectée depuis sur un feuillet de l’administration chilienne quel-
le début. Cela semblait trop facile. S’agissait-il ques signes. Ceux-ci, selon Mrs. Routledge, res-
d’un farceur ayant voulu mystifier son évêque ? semblent beaucoup plus à un code mnémotechni-
Ce dernier justifia en 1893 sa pensée à ce sujet : que qu’à des mots ou des phrases. Et l’anthropo-
Avant de mourir, Tomeniko put encore murmurer quelques mots, et dessina à l’intention de Mrs. Routled-
ge, ces quelques signes sur un feuillet de l’administration chilienne.
logue conclut : « lorsque vous faites un nœud à carbone certains sites archéologiques des îles
votre mouchoir, personne d’autre que vous ne Marquises : la datation révèle que 2000 ans avant
peut savoir que c’est pour vous rappeler votre J.-C., ces îles étaient déjà habitées !
prochain dîner ou encore de ne pas oublier de
payer votre assurance-vie ! Une autre théorie, celle d’un continent polynésien,
fait sourire la plupart des savants. Ce continent —
En 1920, parmi les documents archéologiques MU — aurait été le point de départ de toutes les
mis à jour à Mohenjo-Daro et Harappa par l’ar- civilisations. De nombreuses colonies sur les
chéologue anglais John Marshall, on retrouva continents asiatique, européen et américain dé-
des centaines de signes hiéroglyphiques d’une pendaient directement de MU. Une écriture a pu
écriture non encore déchiffrée. Les ruines de ainsi être transmise dans ces colonies.
Mohenjo-Daro font partie d’une ville de l’Indus, Après l’effondrement du continent, cette écriture a
qui aurait été il y a six mille ans le centre d’une pu se développer, se transformer durant des mil-
civilisation importante. C’est un savant hon- liers d’années. De Hevesy signale également que
grois, Wilhelm de Hevesy, qui eut l’idée de les signes gravés sur les briques de Mohenjo-
comparer les signes trouvés avec ceux de l’île Daro sont bien moins parfaits. L’écriture de l’île de
de Pâques. Cent trente signes pouvaient Pâques serait-elle antérieure à celle de l’Indus ?
s’identifier à ceux des kohao rongo rongo. C’est ce que pensait le professeur Rivet :
Plusieurs savants réfutèrent cette comparai- « Comme les signes des bois parlants (Ile de Pâ-
son. Le professeur autrichien Heine-Geldern ques) sont nettement mieux stylisés que ceux de
considère que le nombre de signes différents l’Indus, il y a tout lieu de supposer que la migration
de l’écriture pascuane étant plus élevé que polynésienne, qui aurait apporté à l’île de Pâques
celui des signes identiques (un cinquième), ces premiers documents, aurait quitté l’Asie méri-
une filiation directe entre les deux écritures est dionale à une date antérieure à l’époque d’Harap-
douteuse. En général, on estime que les deux pa et de Mohenjo-Daro. En un mot, que l’alphabet
civilisations n’ont jamais été en contact. Vingt de l’île de Pâques est encore plus ancien que ce-
mille kilomètres séparent l’île de Pâques du lui de l’Indus ». (4)
site de Mohenjo-Daro. La civilisation de l’Indus
était déjà très avancée. Les gens vivaient dans « Mais, comme le fait remarquer le professeur
des cités, connaissaient la poterie et les mé- L.C. Vincent, ce qu’il importe surtout de conclure,
taux. Ils n’auraient pas pu entretenir des rela- ce n’est point que l’antique civilisation de l’île de 23
tions commerciales avec les Polynésiens de Pâques (ou de MU), reconnue comme blanche et
l’âge de la pierre ! pré-aryenne, provient de l’Indus, de l’Iran ou de
Sumer, suivant les auteurs... mais bien, puisqu’el-
La réplique peut être valable, mais d’autres théo- le est antérieure, qu’elle s’est rendue, effective-
ries y répondent. Nous avons la théorie officielle ment, du Pacifique sur l’Indus, en Iran, à Sumer,
des migrations polynésiennes : ils venaient de etc. Alors, tout s’explique et devient clair ».
l’Asie ! Les dates sont souvent confuses, mais l’on
cite communément le premier siècle de notre ère Parmi d’autres chercheurs, nous citerons encore
comme étant la première époque des migrations. le Dr. Imbelloni (comparaison des écritures de l’île
Or, l’Américain Robert C. Suggs a daté au radio- de Pâques, de Ceylan et de celle des Lolo en Chi-
ne méridionale) ; le Dr. Koenigswald (signes pas-
cuans et dessins sur tissus de l’Indonésie) ; Wer-
ner-Wolf « a pu reconnaître certaines analogies
entre les hiéroglyphes pascuans et ceux de l’an-
cienne Egypte » ; et finalement Thomas S.
Barthel.
Premiers résultats.
En 1953, Thomas Barthel décide de rouvrir le dos-
sier « Tablettes Kohao Rongo Rongo — Ecriture
Indéchiffrable ». Il se familiarise avec les systèmes
de déchiffrement des écritures primitives, puis
avec la culture polynésienne. Ensuite, il rassemble
tout ce que l’on possède de l’écriture pascuane. Il
obtient ainsi 12.000 signes à analyser. Chaque
25
« Il y a plus de choses dans le Ciel et sur la Terre, la date de sa naissance, placée sous tel ou tel
Horatio, que ne peut en rêver votre philoso- « signe ». De même, l’on vend des colliers, des
phie » (Shakespeare, Hamlet). pendentifs, des calendriers, des posters décorés
de signes du zodiaque. Quelle que soit la valeur à
Dans l’esprit de la majorité des gens, le terme attribuer à ces horoscopes et à ces talismans, il
« zodiaque » est fortement entaché de supersti- est bon de faire remarquer combien l’idée même
tion. La plupart des journaux publient quotidienne- du zodiaque est profondément ancrée dans notre
ment des horoscopes, qui permettent à chacun de culture. Peu de personnes sans doute, dans notre
consulter les prévisions établies à son sujet selon pays, ignorent sous quel signe elles sont nées.
Lorsqu’on parle du zodiaque, il faut aussi dire un Cette graduation, c’est le point vernal, c’est-à-dire
mot de l’astrologie. La plupart des savants et des l’endroit de notre ruban où se lèvera le soleil de
gens cultivés considèrent l’astrologie avec un l’équinoxe de printemps (21 mars) qui est la date
mépris total, justifié par le manque de sérieux de où la durée du jour égale la durée de la nuit. Que
cette discipline pratiquée habituellement par des va-t-il se passer maintenant ? Au fil des 365 jours
« mages » ou des « pseudo-scientifiques » qui se de l’année, nécessaires pour arriver à l’équinoxe
livrent, par le canal de la presse parlée ou écrite, de printemps suivante, la roue zodiacale va défi-
ou par voie de consultations, à une sorte de ler lentement devant le lever quotidien du soleil
psychothérapie destinée aux gens simples ou aux pris comme aiguille fixe, pour revenir au bout d’un
crédules. Mais je ne suis pas diseur de bonne an, à peu près au même point. Mais c’est cet
aventure et mon propos est ailleurs. « à peu près » qui fait toute la différence. Car,
dans son mouvement apparent, qui est dû en
Que représente le zodiaque en réalité ? Une sub- réalité au mouvement réel de rotation terrestre, le
division très concrète du ciel, basée sur les mou- Soleil va prendre, au bout d’un an exactement, un
vements relatifs du Soleil, de ses planètes et de retard de plus ou moins 0,0138 degré d’angle sur
certaines constellations. Il s’agit là d’un véritable la roue zodiacale. Autrement dit, le Soleil reparaî-
tour de force réalisé par des astrologues à une tra au point vernal tous les 365 jours, 5 heures,
époque extrêmement lointaine, et retransmis jus- 48 minutes, 49,6 secondes, alors que la terre met
qu’à nous par les Chaldéens. Ce passé remonte- un souffle de temps en plus pour faire le tour du
t-il aux légendaires Elohim de la Genèse, qui, au zodiaque.
quatrième jour de la Création, « placèrent les lumi-
naires au firmament du ciel pour éclairer la Terre, Le Soleil est, en quelque sorte, en retard au ren-
pour présider au jour et à la nuit et pour séparer la dez-vous. Donc, chaque année, le point vernal
lumière des ténèbres » ? Il est bien difficile de glissera sur la roue, de 0,0138° vers la droite. Ce
répondre à cette question. phénomène se nomme « précession des équi-
noxes ». Il faudra donc au point vernal une durée
Toujours est-il que, à l’autre bout du monde, les de plus ou moins 2.160 ans pour balayer 30°
Mayas pratiquaient également l’astrologie. Cepen- d’angle, c’est-à-dire pour changer de signe, et de
dant, leur calendrier divinatoire ne tenait pas plus ou moins 25.920 ans, soit 12 fois 2.160, pour
compte du mouvement des astres. C’est pourquoi faire un tour complet de la ceinture d’Eurydice.
26 on a cru longtemps à une création entièrement
originale de ces peuples. Et pourtant, devant cer- Il n’est pas aisé d’exposer en peu de mots un
taines analogies, on ne peut plus curieuses, des phénomène aussi complexe ; en guise d’exem-
historiens et archéologues envisagent une influen- ple, disons qu’au temps de l’Ancien Empire
ce chinoise très lointaine, issue elle-même de la d’Egypte, le point vernal (c’est-à-dire le lever du
science chaldéenne, et qui se serait propagée de Soleil le 21 mars) se trouvait inscrit dans le Tau-
proche en proche jusqu’au Mexique, en passant reau, qu’au temps de Moïse (Nouvel Empire), il
par les îles du Pacifique. s’inscrivait dans le Bélier, au temps de Jésus-
Christ dans les Poissons. Depuis 1950 environ,
J’ai dit que la mise au point de ce système de notre point vernal se situe au début du Verseau.
mesures était un tour de force : le meilleur moyen Dans plus de deux mille ans donc, lorsque le
de le démontrer est d’exposer en bref, et de ma- Soleil aura accumulé un retard de plus de deux
nière relativement simple, les données de base du mille fois 0,0138°, nous entrerons dans le signe
calendrier zodiacal. suivant, celui du Capricorne.
Déterminons d’abord une bande de ciel, un ruban Il est remarquable que dans un passé extrême-
dans lequel s’inscrivent les mouvements appa- ment éloigné, et donc, s’il faut en croire la science,
rents des planètes du système solaire, le lever du à une époque où les moyens techniques étaient à
soleil et certaines constellations. Ce ruban se peu près nuls, l’homme ait pu non seulement
nomme « ceinture d’Eurydice ». Nous voici donc déterminer avec exactitude la durée de l’année,
en possession d’un gigantesque écran de cinéra- mais en plus dénicher dans cette botte de foin le
ma qui couvre 360 degrés, c’est-à-dire un tour minuscule retard annuel du Soleil dans sa course
complet. Cet écran, divisons-le en douze parties vers le point vernal... Faut-il s’étonner dès lors,
égales de 30 degrés chacune et baptisons ces que cette science formidable, héritée ou inventée
douze portions du nom des constellations qui y par l’homme, soit devenue par la suite un objet de
figurent : capricorne, sagittaire, scorpion, balance, vénération accaparé par les cultes successifs ?
vierge, lion, cancer, gémeaux, taureau, bélier, Faut-il s’étonner que dans ses manifestations
poissons, verseau. Il faut à présent définir une populaires, l’astrologie se soit progressivement
graduation de référence, à partir de laquelle nous dégradée pour cause d’incompréhension, et soit
pourrons effectuer des calculs. devenue une pseudo-science à horoscopes ?
Représentation schématique de la roue zodiacale. Le trait transversal près du chiffre 11 représente la 27
position approximative du point vernal actuel (1973) ; ce point glisse donc chaque année légèrement vers
la droite.
Le ciel a toujours représenté pour l’homme l’élé- des « symboles opposés », empruntée à Jean
ment majeur de son destin. Comprendre le ciel et Sendy, nous fournit une excellente illustration :
l’appliquer à la vie même fut une préoccupation
constante de l’humanité. Peu importe, dans le
cadre de cet article, de déterminer à quel moment 1) A l’époque de Noé, le point vernal se situait
et par quel moyen les hommes ont pu mettre au dans les Gémeaux. Le signe opposé de la
point un système de mesures aussi parfaitement roue zodiacale est donc le Sagittaire. Que
adapté à l’écoulement des millénaires. Il reste à nous apprend l’Ancien Testament ? Que
démontrer que le zodiaque est un véritable langa- Dieu, pour marquer son alliance avec Noé,
ge initiatique qui a toujours servi de repère à met son « arc » dans la nue. Et il précise
l’homme pour déterminer l’évolution de sa pensée, bien : « Ce sera un signe d’alliance entre Moi
de sa religion prise au sens strict de re-ligare, re- et la Terre » (Genèse, 9, 13).
lier. Relier l’homme au cosmos, lire la date et
l’heure en interrogeant le firmament, déterminer 2) Plus tard, les pharaons d’Egypte firent sculp-
les saisons et les grandes fêtes de la nature par ter des taureaux un peu partout et adorèrent
l’intermédiaire du ciel, voilà la grande idée. Pour- le bœuf Apis. Or, leur point vernal s’inscrivait
quoi ? Parce qu’il recèle la clé du « D’où venons- dans la constellation du Taureau. Le signe
nous ? Que sommes-nous ? Où allons-nous ? ». opposé étant le Scorpion, nous le retrouvons
Parce que, si réellement, à l’aube de l’histoire, des sur la coiffure de l’épouse du pharaon... jus-
civilisateurs sont venus du ciel, une religion cosmi- qu’au jour où, versant dans l’idolâtrie, c’est-à-
que est seule capable de maintenir le lien magi- dire, perdant momentanément le fil de la Tra-
que de plus en plus ténu qui a pu s’établir en ces dition, le Scorpion de la souveraine fut rem-
temps. placé par un scarabée (signe du Cancer).
Dans ce cas-ci donc, la règle des symboles
Plus près de notre culture, nous pouvons suivre, opposés fut violée.
au fil des millénaires, une sorte d’orthodoxie 3) Moïse naquit dans l’ère du Bélier, à l’époque
zodiacale omniprésente. C’est ainsi que la règle où les prêtres d’Amon-le-Bélier prenaient, en
Egypte, une importance politique de plus en Bibliographie
plus marquée. Libérant les Hébreux d’Egypte, « La Sainte Bible», par A. Crampon. Desclée,
Moïse posa dans le désert les premières assi- 1960.
ses du christianisme à venir, et choisit comme « L’astrologie devant la science », par Michel Gau-
signe adjoint la Balance de la justice. Repre- quelin (Planète-Denoël 1965).
nons la roue zodiacale : la Balance s’oppose « Le christianisme entre les poissons et le ver-
au Bélier. Semper religare… seau », Janus n° 1, avril-mai 1964.
4) Plus près de nous encore est l’époque du « Dans l’ère du Verseau », par Patrick Ravignant,
Christ. Sa naissance se situe au début de l’ère Le nouveau Planète n° 15, mars 1970.
des Poissons. Et que constatons-nous ? Un « Les horloges cosmiques », par Michel Gauque-
Messie présenté par Jean-Baptiste vêtu d’une lin, Denoël 1970.
peau de bélier et annonçant que son ère est « L’occultisme », par Julien Tondreau, Marabout
révolue. Jésus baptisant dans le Jourdain, Université n° 38.
s’entourant de pêcheurs, réalisant une pêche Et les ouvrages de Jean Sendy, surtout :
miraculeuse, calmant la tempête, marchant sur « Les cahiers de cours de Moïse», Julliard 1963 et
les eaux, multipliant les poissons, etc. A partir J’ai Lu n° 245.
de lui, une religion nantie d’un souffle nouveau La lune, clé de la Bible», Julliard 1968 et J’ai
voit le jour et désigne comme adjoint la Vierge, Lu n° 208.
bien sûr, qui s’oppose aux Poissons sur notre L’ère du Verseau », Robert Laffont, 1970.
roue zodiacale !
5) Nous entrons à peine dans le Verseau et tout
change déjà : la religion se remanie et cher-
che sa voie. Comme par hasard, Paul VI sup-
prime l’obligation de manger du poisson le
vendredi : c’était là sans doute, un vestige
d’une ère révolue ? Le culte de la Vierge va-
t-il en s’atténuant ? Assisterons-nous à la
naissance d’une religion nouvelle, plus adap-
tée à notre époque ? Ceux qui orientent notre
28 destinée spirituelle choisiront-ils le Lion
(opposé au Verseau) comme signe accompa-
gnateur ? Bref, l’orthodoxie zodiacale sera-t-
elle maintenue ? Il est trop tôt pour répondre
à ces questions. La science d’aujourd’hui se
détache de plus en plus de la religion prise au
sers large de « culte », pour se rapprocher du
mot « religare » au sens strict. En effet, notre
science avancée nous fait plonger de plus en
plus loin dans l’infiniment grand comme l’infi-
niment petit, et nous rapproche sans cesse de
nos origines et du ciel, nous relie, en un mot,
de plus en plus au cosmos et à la matière,
nos deux pôles d’intérêt. Et je ne suis pas loin
de penser, avec Jean Sendy, que les prêtres-
astronomes de l’Antiquité sont les pères spiri-
tuels des chercheurs d’aujourd’hui. Il faut
donc réhabiliter le zodiaque, en qualité de
racine fondamentale de notre civilisation.
Dédaigner cet aspect des choses, c’est pas-
ser à côté d’une mentalité qui a conditionné
jusqu’à nos habitudes morales et religieuses,
et qui continue à le faire. Etudier ces ques-
tions, c’est au contraire retrouver un langage
qui n’est peut-être plus de notre temps, mais
qui contient des vérités premières et fonda-
mentales sur lesquelles nous reviendrons plus
en détail prochainement.
JACQUES VICTOOR.
CIVILISATIONS EFFONDREES
29
La catégorie des génies produisant des grandes Le géant Atlas.
découvertes est celle qui, notamment en laboratoi- Parlons des anciens habitants de la Colombie et
re, multiplie les expériences a priori, qui peuvent du Vénézuéla, parents des Mayas-Quichés, et
ne pas être fertiles, mais qui peuvent aussi, si l’on comme eux descendants de peuples du vaste
ne néglige aucune possibilité, produire enfin des bassin du Mississipi. Les Quichés racontent l’arri-
résultats positifs. vée d’une population venant de l’est, délivrée par
Dieu, qui leur aurait ouvert les Douze Chemins de
Il en est de même pour celui qui étudie les an- la mer. Ils connaissent aussi la « Tour de Babel,
ciennes civilisations : s’il exclut les anciennes où l’on ne parlait qu’une seule langue, et que Dieu
langues sémitiques, il se ferme automatiquement détruisit ».
quelques portes, par lesquelles il aurait pu dé-
couvrir la vérité. Il agirait de la même façon qu’un Dans l’ancienne langue colombienne, Atl signifie
biologiste qui refuserait d’examiner des formules « pays, empire », également « eau», et enfin
chimiques ; sans les regarder, il dirait qu’il sait « Tête de l’Empire ». Remarquez aussi que les
qu’elles ne valent rien. Berbères d’Afrique, qui relient les anciens Mexi-
cains et Colombiens d’un côté, et les Arabes
Si nous considérons la racine Atl de la langue- d’Egypte de l’autre, possèdent aussi le sens
mère, de laquelle dérivent les langues sémitiques, « eau » pour la racine Atl. Si l’on rassemble ces
nous la trouverons fréquemment employée des éléments, n’arrive-t-on pas à l’interprétation sui-
deux côtés de l’Atlantique, et dans toutes les vante : « puissant et noble empire entouré par
mythologies solaires. Cette racine a le sens géné- les eaux » ?
ral de « Empire du Dieu juste, Racine du Monde,
Noble et Indestructible ». Même sans parler de l’Atlantide, il faut se rappeler
que tous les géographes de l’Antiquité ont donné
La même racine signifie « pays » en Egypte. Si on le nom de Libye à l’ensemble de l’Afrique du Nord
rapproche ces éléments dans une seule ex- (y compris l’Egypte), et — est-ce par hasard ? —
pression, on peut donner à Atl le sens de « pays ont prétendu que cette Libye était le pays où le
qui est indestructible par sa grandeur, ou empire dieu Atlas portait le monde sur ses épaules. Dans
puissant ». Qui peut prétendre le contraire, surtout l’ancien Mexique, on connaissait à la même épo-
s’il ne connaît pas les racines arabes ? que un dieu identique qui portait aussi le monde
sur ses épaules ! Certaines coïncidences sont Après être passé entre tant de mains — ou de
vraiment étranges. bouches —, pendant tant de siècles, ce nom est-il
resté intact ? Qui peut dire si sa prononciation
Considérons maintenant la finale as de Atlas. était plus proche d’Atlantide ou d’Atlantilles ?
Dans la même langue-mère que précédemment, Quelle qu’elle ait été, il n’en reste pas moins que
elle signifie « base, principe, fondement ou fonda- les Antilles, elles, existent réellement, et se trou-
tion ». Donc, la « base » utilisée pour la fondation vent exactement en face du pays où l’on trouve
du monde de cette époque, le monde d’Atlas, des centaines de mots commençant par atl.
puissant, noble, indestructible.
N’oublions pas non plus les peuples migrateurs
Une définition de cet élément combiné à ce que dont parle le Codex Tira et toutes les vieilles
nous connaissons déjà, donnerait : Atlas, puissant légendes, et qui — il n’y a pas l’ombre d’un doute
empire, entouré par les eaux et représenté sym- à ce sujet — vinrent de l’est, par la mer, soit exac-
boliquement par un géant nommé Atlas, portant le tement de là où se trouvent les Antilles. Et ces
monde sur ses épaules. peuples migrateurs apportèrent avec eux ces
mots qui commencent par Atl. Une coïncidence ?
Comment prononce-t-on « Atlantide » ? Mais il vaut mieux ne pas tirer de conclusions hâti-
Nous n’avons pas l’intention de soutenir une ves...
thèse, et nous ne voulons pas non plus influen-
cer nos lecteurs. Libre à eux d’étudier les docu- Sûrement d’origine noble.
ments, de les accepter ou de les rejeter. Au Revenons-en à l’histoire. Je me suis souvent pro-
moins aurons-nous essayé d’attirer leur atten- mené sur les bords du Chott el-Djerid, près de
tion sur le problème fascinant des anciennes Tunis. Diodore de Sicile appelle cet ancien lac (ou
civilisations solaires. golfe) Bahr Atala (Bahar signifie « mer » en arabe,
mais ce terme peut aussi qualifier toute masse
A ce propos, voici un autre document extrême- d’eau importante, telle que le Nil ou l’Amazone). Il
ment curieux. Un des plus intéressants codex s’appelait donc « Mer d’Atala ». Il est étrange de
mexicains est le Tira (Le livre des migrations). retrouver ce même mot atala chez les Indiens
Les Mayas qualifiaient les peuples migrateurs à Natchez d’Amérique du Nord. Dans la langue-
l’aide du mot Tira. Si nous avons à nouveau mère, atala signifie « d’origine noble » ; le sens en
30 recours à la langue-mère ou à la langue sémiti- est donc très proche de cet atl que nous connais-
que, nous verrons que la racine tar signifie sons déjà.
« voler » (comme un oiseau). Les mots arabes
se déclinent en dix cas, qui apportent parfois L’histoire nous apprend que près du Chott el-
des sens très différents à celui du radical. Le Djerid vivait un peuple très ancien dont nous ne
cinquième cas du mot ci-dessus est tatara, qui savons malheureusement rien. Son nom était Ata-
a le sens de « action que l’on se résigne à rante ou Atalante. Nous retrouvons donc une fois
entreprendre ». On peut dire qu’en général, les de plus (surtout pour la deuxième prononciation)
émigrants ne partent pas de gaieté de cœur ; ils ce mot atala, qui signifie dans la langue-mère
se résignent plus ou moins à leur sort. Le dixiè- « laisser traces d’un fait», « l’éclat d’une épée »,
me cas, istatar, signifie « voler en groupe, se ou « pareil à l’éclair ».
disperser, se disséminer » et, s’appliquant à
des individus, « émigrer ». Enfin, le troisième Ces Atarantes ou Atalantes adoraient Poséidon,
cas, taira, exprime le sens de l’action entrepri- leur dieu principal qui, disaient-ils, était venu de
se. Quelle action ? Précisément celle du pigeon l’ouest. De l’autre côté de l’Atlantique, les peuples
voyageur, le migrateur. Dans la langue des chez qui l’on retrouve atl sont tournés vers l’est et
Mayas-Quichés et en sémitique, la signification maintiennent que leur dieu est venu de cette di-
de Tira est identique. N’est-ce pas encore une rection. En outre, si on étudie les vestiges physi-
coïncidence stupéfiante ? ques de ces peuples des deux côtés de l’Atlanti-
que, on se rend compte qu’ils sont exactement
Si l’Atlantide a vraiment existé, ce ne furent pas semblables.
les Atlantes (en admettant qu’ils se soient nom-
més ainsi) qui nous ont transmis ce nom. Notre A ce propos, servons-nous de notre imagination,
savoir est très limité en ce domaine, mais suivant mais utilisons-la de façon scientifique. Qui nous dit
la tradition, ce fut soit Psenophis, prêtre d’Heliopo- que les Atlantes, s’ils ont jamais existé, s’appe-
lis, soit Sonchis, prêtre de Saïs, qui raconta cette laient Atlantes ? Ceux qui ont pris position en fa-
histoire à Solon, qui la transmit à Critias, duquel veur de l’Atlantide à tout prix diront que si l’Atlanti-
Platon la tient. Platon lui-même n’en a pas parlé de a existé, ses habitants s’appelaient des Atlan-
avant d’avoir vérifié les sources les plus récentes, tes. Tout cela est très bien, mais d’où viennent
c’est-à-dire avant d’avoir questionné Exhenate, ces mots Atlantide et Atlante ? Quel document en
ancien professeur de Démocrite. apporte la preuve ? Je maintiens qu’il n’en existe
pas une seule. En conséquence, personne ne Comment ces « descendants » pourraient-ils avoir
peut établir qu’un grand empire s’étendait autre- découvert l’étymologie à une époque si reculée,
fois dans le nord de l’Europe, bien que tout suggè- bien avant la création de la langue phénicienne, à
re que c’était le cas, ni qu’on l’appelait l’Atlantide. moins qu’il n’ait existé une langue-mère, dont
Capitan parle, du reste, également ? Il déclare en
Il en découle que si — et je souligne le si — les effet que « les hiéroglyphes découverts dans les
survivants de cet empire, des milliers d’années grottes pourraient aussi être des formes simpli-
plus tard, avaient perdu tout souvenir de son nom, fiées de quelque langue ancienne que nous ne
ils auraient fort bien pu avoir l’idée de l’appeler pouvons plus déchiffrer, et dont toutes les traces
Atlantide, ou Atlantide, car la définition grammati- sont complètement perdues ».
cale de ce mot renferme tout ce que contenaient
leurs traditions — noblesse, pouvoir, fierté d’un J’ai mentionné les Pueblos et les Kourganes. Mais
grand empire, foudre dévastatrice au cours de la liste des peuples qui ont existé autrefois et que
cataclysmes naturels, submersion, éruptions vol- nous ne connaissons que sous la désignation que
caniques, tempêtes effrayantes, tout ce qui a pu les savants ont inventée pour eux dans leur propre
concourir à l’anéantissement d’un grand peuple. langue est extrêmement longue. Il y a les Innuits
(c’est-à-dire les Hommes), nom que les Esqui-
maux se donnaient à eux-mêmes après avoir per-
du leur désignation originale dans une effrayante
catastrophe qui engloutit une région et peut-être
un empire entier. Cela aussi, c’est un [ait histori-
que. Et il y a encore les Zends de la Perse méri-
dionale qui, après un incroyable désastre, prirent
le nom d’Ariots, c’est-à-dire « les Vaillants ».
Des membres de notre équipe sont allés sur place : ils ont ramené des centaines de
photographies, réalisées dans un site grandiose et désert, duquel les autorités avaient
écarté les touristes à notre intention.
Nous avons fait des diapositives et un court-métrage cinématographique, qui ont été
présentés déjà dans plusieurs salles de la capitale. Si vous désirez que cette
conférence passe dans des clubs, des maisons de la culture ou des amphithéâtres,
faites-le nous savoir. Nous sommes à votre disposition.
L’essentiel des documents sera publié dans le numéro 4 de « KADATH » : ils concer-
neront non seulement Stonehenge, mais aussi tout le contexte de la région : Ave-
bury, gigantesque cromlech, Silbury Hill, le plus grand tumulus d’Europe, Westbury
avec le cheval blanc de Bratton Down, etc.
Si vous avez des documents, si vous êtes allé vous-même sur place, si vous avez des
suggestions à faire ou des éléments d’information à nous proposer, écrivez ou
téléphonez au plus tôt. Toute pièce valable sera retenue et publiée.
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ABONNEMENTS
DIRECTION - REDACTION - ADMINISTRATION
« PRIM’EDIT », sprl, 6 Boulevard Saint-Michel, B-1150 Bruxelles.
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