Acte IV, scéne 6
(vers 1225 4 1252)
Prt,
1225 ‘Ah !douleur non encore éprouvée !
AA quel nouveau tourment je me suis réservée |
“Tout ce que ja souffer, mes crainles, mes transports,
La fureur de mes feux, homreur de mes remords,
Bad un refs cruel Pinsupporable injure,
120 N'aitqu'un faible essai du tourment que j'endure,
1s s'aiment ! Par quel charme? anti twompé mes yeux ?
‘Comment se sontils wus ? Depuis quand ? Dans quels:
(lewx ?
“Tule savais. Pourquoi me laisssis-tu séduire**?
DDe leur furtive andeur*ne pouvais-tur’instrire ?
1225 Les at-on vus souvent se parle, se chercher ?
[Dans le fond des forts allaintils se cacher ?
‘Hela is se voyaient avec pleine licence’
Le cel de leurs soupirs*approuvait Ninnocence ;
Ts suivaient sans remonds leur penchant amioureax +
1240 ‘Tous les jours se levaientclairs et sereins pour eux.
[Et moi, triste rebut” de la manure entidre,
Jeme cachais au jour, je fuyais la lumire :
‘La moe este seul Dieu que j'osais implorer.
Sattendsis le moment ob alas expires;
1245, Me nourrissant de fil, de karmes abreavée,
‘Encor dans mon malheur de trop prés obserwée,
Bertie antesaton,
& Evedins teceur
44 Arrour ton secret,
5. Entoue ibere.
. Les marestations de lar move,
7, Coons owecdbgodt.
'
f
az
Jen’osais dans mes pleurs me noyer & lois
‘Je goltais en tremblantce funeste plaisir;
Et sous un front serein dégoisant mes alarmes,
Tl fallat bien souvent me priver de mes lames.
(Quel fruit! recevront-ils de leurs vaines? amours ?
Tse se verront plus.
Ils $"simeront toujours,
PecTUSE MeTHOD LOU]
ees INTRODUCTION
Situation du pessage
‘Taba ox rveruou pala ot Phe werbieaeperenne
be est devenwe complica d'une int
als Cnventtecaacepe Crone Cov wr Ge he
Phécre ooll-c s'est abard tue mais, tensiibe parle omords,
ile sopprttoi 8 rétabir la eit quand un nouvegu Coup Wi est
g296ne- Hippolte, qu'elle eroyeitinsensibe &Farnour ext dis
‘Crest donc une femme rinée par des éenotions successives.
sechirte par des sentiments violents et eontradictores aut
adresse & sa confiderte pout hui faire part de cette insuppor-
foble nouvelle : Phe a une rae, HippolAe en aime une autre
Fe eet pin dt Crone «sme sa vane |
asMouvement du texte
(Ca passage ast constitué dune trade sunse d'un bret dalogue.
La trade se déroule en trois moments
~ Pabord un jeillissement de la douleur (v. 1225-1230), en
fore de roppotds posed
~ ensuite un mouvernont plus whimentiv. 1231-1240) 09
ressentiment se traduit en questions, en images du couple
Hipportw at Aric
= puis un lamenio finaly. 1247-1250); Prodre gémitsur son
son.
_Enfn ntrvimt un coun behang da épliques (v. 1251-1262)
00 S'amoree la dissension entre Phédre et sa confidente.
Axes de lecture
Phodra, squs le choe-de ce quale vient c'anerendra, ast on
Blin tumiule intéigue ; nous verrons, dans un prerrir ternps,
comment s@ manifeste son dgarement, Lé possage Marque
aussi une étepe do ples dans la soutfranco : nous anah-sorons
Ce ox est Ce « now tourrwet » tv. 1226), Enfin, en conton-
tent son propre sox &eolui Hippolye etd vce, Phicre nous
améne 8 distinguer amour de la passion.
mee 1. LEGAREMENT
DE PHEDRE ET
SES MANIFESTATIONS
so seems cupexiced Pan Fa ane cone:
ite mentale et dens son sens moval, Nous voyons glsser vers
ingotitience et somber dans Finjustic.
ineohérence
Le-dorouerent de a tede montre que Phadre ne peut is
‘ipiner son esprit, Sas pansées vont et Vennent sans parvenit
so fiver
ui fast faite un tong détour pare passé avant de
soger la réalté présente «ils s'aiment » ty. 1231)
partic
aa
transition, le ton change. Les questions fusant dans le
les portent tani sur los arours cHippotye ot dio
/ 1221-1232), antOt su attitude 6'CEnone tv. 1233-1734),
faux aux amants (v. 12351298), Les interrogations
boustulent sarslaisser place & o’éventubles reponse, par
mame, eles s’annulent\v. 1236-1237), Et, de fagon peu
‘ies remanent Phodroelle-énha, das une demiere
Gu, on fat, prolenge les propes du début. Ge distours
fabete est celui June femme traumatisée per étonnement
(§. 1218 et ls douiout ty 12301
L'injustice
On assiste gussi@ une otération des sentiments de Priodre
cenwers CEnore,
Tout le début de la sobre montre que la confidente état —
comene: 58 matresse — dans ignorance de Vemour d'Hecahte
pour Avice. Phédre doa en étre conacionte pusque c'est ole qui
Faporend. CEnone incrédule W. 1225). Pourtan, dans: son 6ga-
rement, Phédre accuse (Enone de lui avor tout ssi:
‘Tule savois, Pourquss me tissais-tu séduie Flv. 12331,
‘Ces reproches injusifiés sont une prove fagrente dingrat-
tude. Ace moment. Phédr, ind rente ace quin'estpas son
{tame personnel oubié tut co qu"CEnanwa fait et isqus pour
(fe (cf v. 1227). Cette féure dns ea rappors da Phiske avec
‘cele qu-adtésancurice, pus 3 Seule configenta, annonce les
maléchesons qui, bla fn dela scbne, sceabloront a malheureuse
‘rove.
mums 2. UN NOUVEAU
TOURMENT
Le personage de Phécre es! inséparable du theme de ia dou-
Jour. Ce theme prond ici une acutté parbcubire. En effet, ce ete
‘ent efengrendre correspond, pour Phare, un degre sunpio-
fhantare et, jusque-a incon, de ia soutfranoe. C'est par ran
‘porta son psssé qu'ello prendia mesure du présont.Le passé
‘Comme elle 'avait fait avec CEnone (v. 269-296), puis avec
Hippolye v.67 1-890), Phe récapitule os qu'a 8 88 ve depuis
Jes premiers instants de $8 passion. L’expression « Tout cv Que
Fei soutton » v. 12271 va Bite commentée avec une instance
Presque metide.
Els rappel c'obordt les « crates » (v. 1227) qui ds le début,
‘ont obbgée 8 « cacher » ses « annus » (. 280). Ele évoqus
‘2ussi ses e transports», émois si vilents quils se tacuisaiont
Dr des maiaisas physiques (cf le coup de foucre, v. 273-276)
Elle avoue las fureur de 386 « fene, c'est are un sentiment
vou jusqy'au perenysme qui iors da Taveu & Hiopolyie, a fait
(tat les digues ce ln raison et de la volonté. Elle nous pas
« Tinsupportable injure » v. 1229), ¢8 refus huriant par legquel
Hippolyte @ repoussé son arcu. Mais le pce tourment a sans
oute été « horraurw de 528 « remords mv, 1226), emnords
Favor vehi son epauxet. surtout, Tawi bisob eccusee Hippolee
Tune foute dont lle était seule coupable,
La précision avec loquelie sont détailées les étapes d'un i-
‘rate de plus en plus devioureuscrenforce la foanuie
‘Ah! douleur non encore prose It 1225)
Le présent
Les exclamstions des deux premiers vers expriment praté
Ge la soutfrance. Mais les expressions « dauleur non encore
Eprounde »,« Nawvedu tourment » sont des peichrases', ¢ nme
1 Phadre ne pouvsit pes ou ne voulait pas donner un horn & O°
‘Sentiment incon,
our en discemer la nature, i faut considérer le reppoet qui ie
les vers 1230 1231 :
était qu'un feb essai du taurment que endure,
fs Ssiment |
Lawonstruetion jntapose (en asyndite’leffetet sa cause,
|, La pbphrose est une formulation aul erplace laos exact
ars Fasyndite la sper deux ekrens nest ps ecrrs
Barun mot deacon Lee eugger, avec un efit do ice, palaods
‘est parce quitinpaiyte et Arcie s'siment que Phadre endure
/4 nouveou Tourmént ». Mais3i lla ne prononce pas le mot
x jlousie », elle en éprouve deié les déchirements. Ele est
proie aux affres du douie, Le besoin de connaitre ce qui av
‘sa blessure 9 taduit par des questions febnies :
. ? Dans quals
Comment su sents ? Dapuis cuand ? Dans cua
Co quialo ne sait pss, elle imagine :
(Dans 16 tod des Forts allaiontits 50 each 2 » Iv. 1236)
__ Et peuimporte si es supporitions sont ain de a als: nous
rs Hippo, eu corirake, cast longternps offorcé do
fiir Avice (ct acte I v. 539-546). La jalousie vient de fournir 8
Phodre un nouvel instrument pour se torturer eile-méme,
Mee 3. DE L'AMOUR
ALA PASSION
leeoup du choc qui''s froppde, Phidre réagit en deux
tops Dr Hippie, «Cores. 12a ot Ace,
53 « rvale » (v. 1218}, ont 6t6 dvoqués, nommés séparément
Mais & partir du vers 1231 s‘impose une vision eruaile :
«lls s’aimant | ». Le prenom « Ils» désigne pour la premiare
fois un couple incissociabio, Dans univers mental de Phdre
est une fence nouvelle ee ne connsisseit que ener dune
passion intercit, ele se trouve face dun amour logins. Et inno-
‘ence detcet amour rend plus terble le sentiment de sa propre
culpebilé,
Passion interdite
et amour légitime
Pour Phédre, la passion est marquée pas Finterdit, donc voue
la clandestinité. line peut s'agit, dumoins en est-alie convain-
(ue, que g'une « furtive ardaur » v. 1234) qu'on assaie de déro-
ber aux regards:
Par qual charrna ants wempe mes yeux ? (v. 231)
Mais, tr vite, ele doit se rendre & evidence :
Hiélas ils co woyaiont avee ploine Keonce (v. 1237),
oo