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Congédiés les credo, congédiés les écoles/ Lisbon Story, ici, du haut de la colline d’où nous arrive la foule des bateaux, de Cacilhas à
Cais de Sodré, le Tage absorbe maintenant toutes les rues.
Ayant pris mesure exacte d’eux sans mépris mais avec du recul ». On
par Mathias Trivès n’apprend pas à faire de la poésie. La poésie est buissonnière, on la rencontre par Pierre Hunout
en marge des codes. Langue irrégulière, fidèle à nos profondeurs, prenant Plus bas, une maison se dresse encore, une autre s’est écroulée. Et toutes
en charge notre « négativité ». Langue étrangère inventée, pour symboliser les pierres gardent leurs secrets, Lisbonne résiste et se refuse encore,
On est pris, entre les angles d’un réel insupportable, que l’on se « l’Informulable », avec laquelle tant d’auteurs nous ont bouleversés, en A Lisbonne, il serait facile de mettre ses pas dans ceux de Wim Wenders, Lisbonne à reculons, des femmes aux fenêtres surveillent le nada, tout est
surprend à accepter, sans faire de vagues, abaissant le regard et la voix. transformant leur « Mal » en beauté. d’aller au petit matin voir passer les tramways ou de déambuler dans figé, tout est mouvement pourtant, et quand le chaos de la nuit s’échappent
En recherche d’assurance, nous sommes aussi source de frontières, de Si la poésie est libre, elle rayonne d’une liberté de protestation dans le Alfama à la recherche de Teresa Salgueiro. Une image projetée, comme du film, une horde de taxi remonte l’Almirante Reis, il est quatre heures du
plus en plus marquées, à mesure que s’épaissit notre peau d’angoisse. présent. Contestation canalisée dans un acte créateur, pour briser le à côté de l’écran. Lisbonne sur la pellicule, Lisbonne hors du temps, matin et personne n’a sommeil, bientôt un autre tramway cahotera jusqu’à
Et pour monter un peu plus haut les murs, rajouter du ciment aux ressassement d’un passé et l’illusion fade d’un bonheur à venir. Et peut- Lisbonne qui contemple le flot des touristes et se laisse traverser. La Graça où nous irons voir le soleil renaître et nous évanouirons ses cendres
silences qui nous séparent, on se sert de nos craintes pour mieux vanter être éviter de voir, la brutalité d’un Ça sans médiation, banalisée et ville est blanche, éblouie, Alain Tanner ne s’y était pas trompé, et nous entourés de voiles noires.
les mérites d’un tout sécuritaire. Soigner les symptômes, effacer la racoleuse, surgir et se vendre aux premières heures d’écoute. sommes nous-mêmes en train de rejouer ce film.
dissidence, telles sont les directives, pour préserver une surface, calme Lisbonne où rien ne se finit, Lisbonne sous les projecteurs n’a jamais
et sans surprises, terre de profit. Alors quelle place pour une activité Il faudrait prendre un taxi et se perdre avec lui, ou aller voir de l’autre commencé.
non rentable comme la poésie ? Quel rôle peut-elle jouer en ces temps côté du Tage, prendre un peu de recul, voir Lisbonne à l’arrêt. Puis
d’inquiétudes économiques et de crispations sociales aux lourds échos avis aux auteurs revenir, grimper jusqu’à la Senhora do Monte, faire le tour de la ville en À voir
nationalistes ? dixit quelques pas, lui parler à voix basse et lui confier tous nos amours
est actuellement à la recherche de manuscrits inédits, ainsi
– vem além de toda a solidão* –, contenir toutes nos passions, sous le Alain Tanner, Dans la Ville blanche, 1983.
Monde libéral, il n’y a pourtant jamais eu autant de censure qu’à notre n’hésitez pas à nous faire parvenir vos textes à :
collectifdixit@gmail.com soleil lénifiant du Portugal. Wim Wenders, Lisbon Story, 1994.
époque : formatage des sons, lissage des mots, culte de l’image. Et
Eugène Green, La Religieuse portugaise, 2009.
c’est justement en réaction à cette uniformisation des masses, que ou à l’adresse suivante :
la poésie s’insurge dans un élan d’être, par une délocalisation de la association dixit, 6/8 Place du Pont-Neuf, 31000 Toulouse, France. Revenir sur ses pas, revenir sur soi car toute la ville nous y *
“viens au-delà de toute la solitude”, paroles extraites de la chanson Vem du groupe
pensée et un exode des mots. Les versets de Walt Whitman me
Votre envoi vous sera réexpédié s’il est accompagné d’une enveloppe suffisamment affranchie pour le retour.
Nous n’assumons aucune responsabilité si un manuscrit est égaré.
invite, fuir, fuir, fuir et s’oublier pour mieux se savoir portugais Madredeus.
un maillon mécanique du système. Dans les sociétés En 2007 Le Grand Incendie crée une collection cousue main, [in vitro],
Garcia Lorca, fascisantes de l’entre-deux guerres, comme dans les sociétés C’est l’incendie, le grand incendie pour des recueils courts. PYRO poursuit sa route de trimestre en tri-
par Clément Gramsch individualistes post-68, l’organisation urbaine a pris le pouvoir. – revue PYRO – mestre et fête ses cinq années d’existence et de combat avec le numéro
L’individu, être de culture, a intégré l’engrenage. Attente sur le quai, 21, réunissant l’essentiel des poétes et artistes ayant participé à l’aventure
accrochez-vous au poteau, stop, descendez. Correspondance... La depuis le début.
foule dense est organisée, elle avance vite comme un seul organisme. Le Grand Incendie est un collectif né en 2002 de la réunion de poètes et L’année 2010 est placée sous le signe de Bashung, et le premier numéro
Aujourd’hui, face à la société qui déshumanise et qui nous systématise, Les primates deviennent des fourmis robotiques. Et Garcia Lorca artistes d’horizons divers, autour d’une même envie : donner à lire, à de l’année, le numéro 22, donne à lire des voix de femmes (entre autres
Garcia Lorca est un talisman. « Sous les multiplications, il y a une goutte de voir et à entendre à tous ceux auxquels le libre accès à la poésie et à l’art Laurence Barrère, Kim Doré...) et donne à voir des images de femmes (la
découvre le bitume, les gratte-ciels, les embouteillages, les officines,
manque. Le collectif doit son nom à la chanson de Noir Désir. photographe portugaise Maria Atalina), autant de variations sur la chanson
sang de canard. Sous les divisions, il y a une goutte de sang de marin. Sous les employés de bureau, « la lumière (…) ensevelie sous les chaînes et
En 2004 sont nées les Editions Le Grand Incendie, ayant pour but de Madame rêve. Un numéro essentiellement féminin.
les additions, un fleuve de sang tendre, un fleuve qui avance par les chambres les bruits en un défi impudique de science sans racine ». Il crie contre la
des faubourgs, qui est argent, ciment ou brise dans l’aube menteuse de New masse du bétail condamnée à l’exécution pour nourrir une autre masse, promouvoir la poésie et l’art contemporain par le biais de publications sur Tout comme dixit, PYRO est une revue indépendante, sans subven-
York ». de travailleurs celle-ci. Et les ouvriers des abattoirs, et les maçons qui les support papier, sous l’impulsion du poète acadien Gérald Leblanc. Arrive tions, un collectif réuni en association à laquelle vous pouvez adhérer, vous
ont construits sont les seuls alliés possibles du poète. Eux savent. Ils savent donc une première publication collective, Pyromanes, le collectif se lance dans abonner,à l’adresse suivante :
Psalmodier Federico Garcia Lorca le matin en métro. Il parle de New York, l’aventure d’une revue trimestrielle, PYRO, où place est faite à de nombreux ar-
l’origine. Ils ne sont pas encore coupés de la nature, du sang vrai, du rouge,
tistes, notamment canadiens francophones. PYRO est une revue francophone
la ville guerrière. Il a quitté sa campagne andalouse. « Je suis venu voir le sang comme le sont les employés de bureaux aux yeux cachés dans une gangue revue PYRO / 13, Rue de la Tour des Dames / 75009 Paris.
de poésie et d’arts alternatifs, où se côtoient poètes, photographes, sténopistes
trouble ». Un sang gris de machines et de béton, « la fange des nombres et hygiéniste. Et Lorca glisse des animaux égorgés à l’exécution à petit feu d’êtres et artistes peintres de tous horizons, de toutes générations. PYRO c’est aussi
des lois ». Escalator, ticket, tourniquet. Gardez votre droite ! La main sur la humains déshumanisés. « Je vous crache au visage ». Et il pouvait. Il avait un une multitude de lectures, de soirées et d’évènements en tous genres, comme
rambarde ! Dégagez au sommet ! Il est neuf heures – Pointez ! siècle d’avance. C’était en 1929. les lieux de notre lutte où désigner des zones de liberté, où éclaircir la poésie
des enregistrements sur CD (notamment avec Les Païens). Des alliances qui
contemporaine sont multiples. Retrouvez [sic] et toute l’actualité de dixit
ne cessent de se poursuivre, avec des lectures et performances accompagnées
Il y a eu La Guerre de Le Clézio, et avant lui Le Poète à New York de Garcia New York Officine et Dénonciation sur le blog de l’association :
par des musiciens (T.V.LA.SUN.OR) et des vidéastes de talent tels Christo-
Lorca. Critique de l’être humain, départi de son état de nature pour devenir L’aurore phe Acker (réalisateur de clips pour Noir désir ou encore Rodolphe Burger). http://collectifdixit.blogspot.com