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Une Loi fondamentale pour l'Union européenne
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Ebook589 pages6 hours

Une Loi fondamentale pour l'Union européenne

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About this ebook

The financial crash and lengthy economic recession have tested the institutions of the European Union as never before. Debate about the future of Europe has polarized: Some want no more integration; others campaign for disintegration. Those who believe in deeper unity and a stronger federal Europe have yet to make their case. "A Fundamental Law" does that by offering a prospectus for radical reform. It amends the Lisbon Treaty to make the government of the EU more powerful and democratic. It embraces banking and fiscal union while showing the way forward to a legitimate settlement of Europe's constitutional dilemma.
Ten years after the Convention on the Future of Europe proposed its constitutional treaty, the Spinelli Group of federalist MEPs has drafted comprehensive proposals for an ambitious new treaty. Anyone who wonders how a more united Europe should best be governed should read this. The members of the next Convention will.
LanguageFrançais
Release dateMay 1, 2014
ISBN9783867935753
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    Une Loi fondamentale pour l'Union européenne - Verlag Bertelsmann Stiftung

    Conclusions

    Avant-Propos

    Une Loi fondamentale pour l’Union européenne a été rédigée sous le patronage du Groupe Spinelli, par les membres de son directoire composé d’Elmar Brok, Dany Cohn-Bendit, Andrew Duff, Isabelle Durant, Sylvie Goulard, Roberto Gualtieri, Jo Leinen et Guy Verhofstadt. Un groupe de travail de députés européens a été réuni et coordonné par Andrew Duff.

    Bien que soutenant tous cette publication et considérant qu’il s’agit d’une contribution importante au débat sur l’avenir de l’Europe, l’ensemble des différents articles de ce projet de traité ne saurait engager individuellement les membres du directoire du Groupe Spinelli.

    La rédaction de la Loi fondamentale a fait l’objet de délibérations au sein d’un groupe ne se limitant pas aux députés Spinelli et de l’Union des Fédéralistes Européens. Un certain nombre de fonctionnaires des institutions de l’UE, qui restent anonymes, nous ont aidés par leurs conseils judicieux, tout comme nos collaborateurs: Matteo Adduci, Philip Drauz, Maria Laura Formisano, Daniel Freund, Guillaume McLaughlin, Fabian Pescher, Maxime Rolland-Calligaro, Miriam Schoeps, Pierre-Jean Verrando, Christian Wenning et Sietse Wijnsma. Pier Virgilio Dastoli nous a fait profiter de sa longue expérience dans les milieux fédéralistes. En dehors des institutions, nous remercions Christophe Hillion et René Repasi ainsi que nos nombreux interlocuteurs dans les gouvernements et les parlements, les think tanks et les milieux universitaires qui, parfois sans le vouloir, ont façonné notre vision des choses.

    Nous remercions pour son soutien la Bertelsmann Stiftung qui partage avec le Groupe Spinelli une vision pour une Europe fédérale. Cette Loi fondamentale qui se veut une contribution majeure au débat sur l’avenir de l’Europe, est publiée par la Bertelsmann Stiftung.

    Comment lire le texte

    Le texte de la Loi fondamentale de l’Union européenne se présente comme une révision générale et exhaustive du traité de Lisbonne (2007). Il regroupe, amende et modifie les textes du traité sur l’Union européenne (TUE) et du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Il intègre la Charte des droits fondamentaux (CDF). Il intègre également l’essence du traité Euratom (1957) et du Pacte budgétaire européen (TSCG) (2012). La Loi de 1976 sur l’élection directe du Parlement européen, telle que modifiée, est retranscrite dans un protocole.

    Le texte se compose de 437 articles répartis en huit parties, un préambule et 18 protocoles. Chaque chapitre est précédé d’un court commentaire explicatif résumant ses principales caractéristiques.

    Le première partie (Partie I – articles 1–144) contient toutes les dispositions constitutionnelles et institutionnelles.

    La partie II (articles 145–198) n’est autre que la Charte des droits fondamentaux.

    La partie III (articles 199–217) concerne les finances de l’Union.

    La partie IV (articles 218–246) rassemble les politiques et l’organisation de l’Union économique et monétaire.

    La partie V (articles 247–376) énonce les politiques sectorielles de l’Union.

    La partie VI (articles 377–398) traite de l’espace de liberté, de sécurité et de justice.

    La partie VII (articles 399–405) couvre l’association des territoires d’outre-mer.

    La partie VIII (articles 406–437) traite des affaires extérieures de l’Union.

    Pour faciliter la compréhension et la comparaison, notre nouveau traité est présenté dans la colonne de droite tandis que les clauses équivalentes du TUE, TFUE et CDF sont disposées dans la colonne de gauche.

    La présence de points de suspension «.....» de part et d’autre des deux colonnes indique qu’aucun changement n’est apporté au texte initial. Les mots en gras permettent d’attirer l’attention sur les nouveautés et changements les plus importants.

    Au niveau stylistique et sémantique, les «États membres» deviennent des «États», et les «parlements nationaux» les «parlements des États».

    Le texte officiel en français des traités actuels et de la Charte se trouve à l’adresse suivante: http://register.consilium.europa.eu/pdf/

    fr/08/st06/st06655-re07.fr08.pdf

    Enfin, un tableau en fin d’ouvrage permet de faire correspondre les articles de l’ancien traité à ceux du nouveau.

    Une Loi fondamentale pour l’Union européenne: Pourquoi l’Europe a-t-elle besoin d’un nouveau traité constitutionnel?

    Commentaires

    La crise économique et financière a brutalement exposé au grand jour les défauts de la gouvernance de l’Union européenne. La certitude d’une intégration européenne «condamnée à réussir» a été ébranlée. L’espoir porté par l’introduction de l’euro d’une intégration progressive des économies nationales a été contredit. La cohésion de la zone euro et plus largement celle du marché intérieur européen sont en danger. La croissance reste atone, et le moteur d’une compétitivité plus affirmée est enrayé. Les gouvernements n’ont pas eu le courage de porter à leur terme les réformes structurelles qu’ils ont pourtant appelées de leurs vœux. La surveillance nationale du secteur bancaire a échoué.

    Les chefs d’États ou de gouvernements, réunis en Conseil européen, ont tendance à faire «trop peu et trop tard». L’UE, sous la pression des chocs externes, a malgré tout réussi à mettre en place un cadre réglementaire pour les services financiers afin d’empêcher un effondrement du secteur bancaire. L’intervention de bon sens de la Banque centrale européenne (BCE) a jusqu’ici évité qu’un pays ne sorte de la zone euro. Malgré toutes ces mesures de gestion de crise, l’avancée vers une véritable union bancaire piétine et la confiance n’est pas au rendez-vous. L’UE et le FMI ont dû imposer la discipline budgétaire dans des pays qui n’étaient pas en mesure de se l’imposer à eux-mêmes. Cette austérité rigide s’avère improductive, particulièrement en ce qui concerne le chômage des jeunes ou les envolées de la dette nationale.

    Dans de telles circonstances, il n’est guère surprenant que «L’Europe» soit accusée de tous les maux. Il devient difficile, d’aller plus dans le détail et de nommer des «coupables», la gouvernance de l’Union étant diffuse, et opaque. Les citoyens qui se tournent vers l’Europe pour plus de solidarité ne peuvent qu’être déçus. Malgré plusieurs mois de discussions techniques, le débat politique entre dirigeants européens à propos d’un éventuel partage du fardeau entre contribuables européens vient à peine de commencer. La grande majorité des dirigeants des partis nationaux, qu’ils soient au gouvernement ou dans l’opposition, maintient un engagement rhétorique en faveur de l’Union, le Conseil européen a pourtant dû sortir du cadre juridique de l’Union pour sauver la monnaie unique; souvenons-nous du Pacte budgétaire. Accusée de manquer de légitimité, l’Union telle qu’elle est «gouvernée» aujourd’hui semble incapable d’agir efficacement. Pendant ce temps, les courants nationalistes opposés au projet européen et poliment qualifiés d’eurosceptiques se renforcent.

    A l’extérieur, dans un monde troublé, il est attendu beaucoup plus de la part de l’Union européenne que ce qu’elle n’est capable d’apporter. Bien que le Service européen pour l’action extérieure soit opérationnel, les réformes introduites par le traité de Lisbonne en termes de politique étrangère, de sécurité et de défense communes (PESC) n’ont pas entièrement répondu aux attentes.

    Comment une Europe plus unie pourrait-elle être mieux gouvernée?

    En réponse à la crise, les fédéralistes mettent en avant qu’en l’absence d’une intégration plus approfondie et plus démocratique, l’Europe risque de s’écrouler. Le statu quo n’est pas une option, mais plus d’Europe telle qu’elle est aujourd’hui n’est pas non plus la solution; un saut qualitatif – fédéral – est nécessaire. La mission historique de l’Europe de pacifier les rapports entre États et d’unir les peuples doit être rénovée. Les réformes ne doivent pas être conduites par les vieux courants nationalistes, rassurants mais dépassés. Non, la réforme de l’Europe doit être portée par un mouvement nouveau; celui-ci réaffirme les valeurs et principes sur lesquels l’Union est fondée, ainsi renforcée par les normes de la démocratie moderne et ouverte, et accompagnée des pouvoirs et des ressources nécessaires pour affronter les défis contemporains.

    Ces défis demandent à l’Europe un ultime effort de réforme de son architecture constitutionnelle. Une structure plus fédérale devrait permettre d’atteindre le degré nécessaire d’unité et de cohérence entre les États membres ainsi que le niveau suffisant de solidarité entre citoyens européens. Par «fédérale» nous n’entendons pas un super-État hyper-centralisé mais une Union constitutionnelle dans laquelle les différents niveaux de gouvernement sont coordonnés et non subordonnés. Le cadre fédéral renforcerait le gouvernement de l’Union pour l’exercice des compétences dévolues par les traités au niveau européen. Une union démocratique et fédérale resserrerait les liens entre ses citoyens et permettrait aux institutions européennes d’être plus en phase avec l’aspiration des peuples qu’elles servent. Ces réformes, s’appuyant sur ce qui existe déjà, et fortes de l’expérience acquise tout au long de la crise, renforceraient l’UE pour le long terme, à l’intérieur et à l’extérieur de nos frontières.

    Le statu quo n’est plus possible

    La réticence de certains à envisager la réforme des traités est parfaitement compréhensible. C’est une tâche ardue et complexe. Beaucoup sont encore hantés par le souvenir de feu la Constitution pour l’Europe, ce projet de fédéralisation entamé à Laken en 2001, avorté en 2005 par les échecs référendaires français et neerlandais, et conclu en 2009 par l’entrée en vigueur du traité de Lisbonne. Mais le contexte dans lequel nous entreprenons l’exercice constitutionnel a changé; la gravité de la crise nous pousse à avancer. Nous devons faire mieux cette fois.

    Bien que beaucoup ait déjà été fait pour répondre à la crise dans le cadre délimité par le traité de Lisbonne, une révision est inévitable pour donner à une Union fiscalement intégrée des bases solides. Un nouveau traité est une nécessité afin de marquer une nouvelle étape de l’intégration européenne dans laquelle la zone euro se transforme en Union fiscale dotée d’un véritable gouvernement fédéral. Ne pas réaliser cette transformation, c’est condamner l’UE à mourir, sinon à vivoter comme elle le fait à présent. Les mesures prises au milieu de la crise ont testé les limites des traités actuels. Bien que nécessaires, ces mesures ont eu pour conséquence de faire de l’Union un organe encore plus détaché et technocratique qu’auparavant.

    En effet, quelle est la légitimité du Conseil européen quand il impose une augmentation des impôts en Espagne ou décide de la diminution des salaires au Portugal? Comment assurer le contrôle politique et démocratique de la Commission quand elle officie comme membre de la troïka aux côtés de la BCE et du FMI? Une telle situation est acceptable dans l’urgence mais la réaction dans les Cours de justice, sur les places du marché et dans la rue sera violente si rien n’est fait pour régulariser la situation à l’aune des critères démocratiques et de l’état de droit.

    Changer les traités: comment faire?

    La méthode pour changer les traités se trouve à l’article 48 du traité sur l’Union européenne. La procédure de révision commence par une Convention constitutionnelle, et se prolonge par une Conférence intergouvernementale. Elle se conclue par une procédure de ratification dans les 28 États membres de l’Union, conformément à leurs règles constitutionnelles respectives. Dans de nombreux pays, soit par convention politique, soit par obligation juridique, cela implique la tenue de référendums nationaux.

    Le succès de cette entreprise cosntitutionnelle dépendra de son niveau d’ambition, mais aussi de son degré de préparation. Le Groupe Spinelli publie cette Loi fondamentale afin, justement, de contribuer à cette préparation. Nous tirons les conclusions des précédentes révisions des traités et n’hésitons pas à suggérer des ajustements au traité de Lisbonne dans notre quête d’établir une Union mieux gouvernée.

    Nous attendons avec impatience de découvir les autres contributions au débat constitutionnel européen, celles promises par la Commission européenne notamment, mais pas uniquement.

    Nous savons déjà que le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance budgétaire (aussi connu sous le nom de Pacte budgétaire) devra être incoporé dans le cadre juridique de l’Union d’ici à 2017, une clause dudit pacte le prévoyant expressement. De même, certains des éléments les plus ambitieux de l’union bancaire et fiscale devront nécessairement être accompagnés de bases juridiques que les traités actuels n’offrent pas.

    La pression en provenance des Cours de justice va aussi accélérer l’exercice de révision. La Cour fédérale allemande déjà se fait entendre, soucieuse de voir le projet européen renforcé du point de vue démocratique à l’heure où l’Union pénètre des domaines autrefois exclusivement réservés aux parlements nationaux – on pense ici au domaine budgétaire, notamment.

    Nous prenons aussi note des intentions du Premier ministre britannique, David Cameron, de renégocier les termes de l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union. Le gouvernement anglais est déjà en train de passer en revue, ministère par ministère, l’impact de l’Union sur les politiques britanniques, ayant en vue le rapatriement de certaines compétences à présent dévolues à l’Union. Cette tentative de renégociation nécessite une réouverture des traités. Un référendum a d’ailleurs été promis à l’horizon 2017, il portera très probablement sur le résultat de cette renégociation et donc sur un nouveau traité.

    Nous pouvons donc nous attendre à ce que, dès le printemps 2015, une fois le Parlement et la Commission renouvelés, s’ouvre une nouvelle Convention ayant pour objet de rédiger un nouveau traité. Les points principaux à l’agenda de la Convention seront à n’en pas douter: de codifier au niveau du droit primaire de l’UE les éléments d’une gouvernance économique renforcée, de rectifier certaines dispositions du traité de Lisbonne, et de répondre à la question britannique.

    La Convention sera constituée de représentants du Conseil européen, de la Commission européenne, du Parlement européen ainsi que des parlements nationaux. Elle se réunira pendant plusieurs mois afin de poser un diagnostic, de consulter largement et de considérer les différentes propositions de réforme. La Convention fonctionnera par consensus, et le fruit de son travail sera envoyé aux États membres dans l’espoir que l’unanimité puisse être trouvée. La tenue d’une Convention, en elle-même, donne à l’entreprise un caractère légitime et démocratique, dénote du sérieux juridique requis pour la réécriture d’un traité. Au sein de cette assemblée, les gouvernements nationaux et leurs parlements parleront d’égal à égal avec les institutions européennes.

    Une nouvelle forme pour de nouvelles fonctions

    Afin de simplifier la compréhension, appelons notre nouveau traité constitutionnel «une Loi fondamentale pour l’Union européenne». Fusionner le traité sur l’Union européenne (TUE) et le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE) en un seul et unique document nous permet de raccourcir l’ensemble, d’éliminer les doublons et de réarranger (réorganiser) les chapitres de façon plus logique et harmonieuse.

    Nous nous affranchissons de certains freins posés à l’action de la Commission, au pouvoir du Parlement européen et à la juridiction de la Cour de justice, rendant ainsi le système de gouvernance plus permissif et, de fait, plus efficace. Le nombre de procédures d’élaboration de la loi est réduit. Les clauses dites de passerelles, les minorités de blocage, les freins d’urgence, les accélérateurs automatiques sont supprimés. Tous ces instruments juridiques insérés dans le traité de Lisbonne afin de ménager les gouvernements sont subtils et intelligents, mais ils ont conduit en pratique à une complexification des procédures ne facilitant pas la compréhension des citoyens.

    Dans le même esprit, sont effacés d’un trait de plume les 37 protocoles et 65 déclarations attachés au traité de Lisbonne destinés à préciser son interprétation ou cherchant à en amoindrir la portée.

    Rien qu’en apportant ces quelques changements en apparence cosmétique, nous débloquons le potentiel de l’UE et nous nous débarrassons du sentiment d’instabilité qui entoure les traités. Cette révision-là est faite pour durer: la Loi fondamentale doit donner au citoyen l’assurance que les fondations constitutionnelles de la gouvernance de l’Union sont solides et permettent d’envisager clairement les évènements à venir.

    La Loi fondamentale implique que le pacte d’Union soit renouvelé, sur une base ouvertement fédérale. Ceux qui souscrivent à ce pacte s’engagent à construire une entité fédérale ayant une capacité accrue d’action dans les domaines jugés plus efficacement traités au niveau européen. L’appartenance à l’euro, socle fédéral, est considérée comme acquise une fois les critères de convergence remplis. Dans cet esprit les pays restés dans l’antichambre de la monnaie unique, mais résolument déterminés à la rejoindre, doivent être associés aux décisions relatives à l’euro, leur monnaie future. Le domaine des dérogations est considérablement réduit. Les États de l’Union devront se conformer aux lignes décidées ensemble d’une diplomatie européenne aujourd’hui balbutiante. Il en sera de même du développement de l’espace de liberté, de sécurité et de justice.

    Soucieux de préserver l’intégrité du droit de l’Union existant, notre nouveau traité est une évolution des traités actuels, construit dans le cadre de ces derniers, mais enrichi de l’expérience de la crise. Le but de cette Loi fondamentale est de fournir un cadre constitutionnel solide à l’intérieur duquel le gouvernement de l’Europe fédérale ainsi que son législateur seront capables de faire des choix de politique européenne plus efficaces et plus démocratiques.

    Dans le même temps, l’Union et ses institutions doivent être dotées des pouvoirs et des ressources nécessaires pour relever les défis de demain, en matière budgétaire et fiscale, comme l’a violemment révélé la crise, mais aussi dans le domaine de l’énergie; aussi intégrons-nous le traité Euratom à la Loi fondamentale.

    De la solidarité

    L’innovation majeure de la Loi fondamentale est la création, dans sa partie IV, d’un gouvernement économique chargé de piloter l’union budgétaire et fiscale. Il deviendra alors possible de développer, au niveau de l’Union, une politique économique commune en complément des politiques économiques nationales. La zone euro est placée en état de coopération renforcée permanente, cette disposition du traité permettant à certains États une accélération dans la voie de l’intégration. Les pays de l’euro bénéficieront par exemple d’une capacité budgétaire propre, à côté du budget général de l’UE, leur permettant de créer des effets de levier contra-cycliques et de donner une capacité d’action à leur politique économique.

    Le ministère de l’économie et des finances de l’UE est alloué à la Commission européenne dès lors doté d’un «trésor européen» permettant l’emprunt et l’accès aux prêts. Un nouveau poste de ministre du Trésor est créé dont la fonction est de stabiliser les comptes de l’UE et d’en redistribuer les richesses. Les économies européennes étant interdépendantes, une réforme économique ou fiscale dans un État affecte le reste du bloc. Par conséquent, les plans nationaux de réformes doivent être discutés en amont pour éviter les effets pervers. Afin d’assurer le bon fonctionnement du marché unique et d’éviter les entraves à la concurrence, l’UE peut adopter des lois, selon la procédure législative ordinaire, afin d’harmoniser l’imposition directe ou indirecte.

    La Loi fondamentale permet au mécanisme européen de solidarité d’opérer sur les marchés primaires et secondaires. Elle codifie également les nouveaux pouvoirs de supervision de la Banque centrale européenne, pierre angulaire de l’union bancaire, mais donne la possibilité légale, dans le futur, de créer une autorité unique de contrôle des services financiers. La Loi fondamentale permet de même la mutualisation progressive d’une portion des dettes des États et lève l’interdiction – sous certaines conditions strictes – faite à l’UE d’emprunter. Une base légale est créée pour l’instauration d’un mécanisme unique de résolution et d’un système unique de garantie de dépôts.

    La Loi fondamentale codifie aussi dans le droit primaire de l’UE les éléments clé du «six pack» et du «two pack», cet ensemble de directives renforçant la capacité de l’UE à contrôler et surveiller les économies des États membres. Le Parlement européen se voit attribuer de plus grands pouvoirs dans l’élaboration des lignes directrices en matière d’emploi et de politique macroéconomique. Ce même Parlement ainsi que ses homologues nationaux peuvent intervenir dans l’application de la procédure pour endettement et déficit excessifs. Une décision de la Commission plaçant un État sous cette procédure sera présumée valide, à moins que les membres du Conseil ne s’y opposent à une majorité élevée.

    Dans la troisième partie de la Loi fondamentale, le système de financemcent de l’UE est radicalement transformé. La logique dite du juste retour, par laquelle chaque État essaye de retirer du budget européen autant que ce qu’il y apporte, est abolie et le budget de l’UE sort progressivement du système de dotation des États. Des revenus basés sur la taxation directe ou indirecte viendront peu à peu alimenter le budget européen. Nous supprimons la règle de l’unanimité pour les décisions concernant les ressources propres de l’UE et le cadre financier pluriannuel. La procédure budgétaire annuelle change elle aussi puisque le Conseil partage désormais avec le Parlement la responsabilité de conclure un accord. Le nouveau système de financement de l’UE devient alors tout à la fois juste, transparent et stable.

    Un gouvernement démocratique

    Dans notre Loi fondamentale il est explicite que le Parlement et le Conseil forment le pouvoir législatif de l’UE, et que la Commission en est le gouvernement. De nombreuses compétences exécutives, encore détenues par le Conseil, sont transférées à la Commission, ces compétences pouvant être «rappelées» par le législateur (c’est à dire être rapatriées par lui en cas de mauvaise exécution). Cette séparation plus nette des pouvoirs devrait accentuer la responsabilité politique de chaque institution, chacune étant jugée à l’aune des tâches qui lui sont conférées.

    Le rôle du Conseil européen est ajusté afin de diminuer le risque de confusion avec la Commission, clairement identifiée comme détentrice de l’autorité gouvernementale. Au lieu d’élire une personnalité extérieure comme président permanent du Conseil européen, les chefs d’États ou de gouvernements choisissent l’un des leurs pour présider leur réunion pour une période de deux ans et demi. Le Conseil européen est chargé de diriger et coordonner les affaires du Conseil des ministres. Les chefs d’États ou de gouvernements ont la possibilité de siéger en formation «Conseil général».

    Reflétant son rôle de seconde chambre, la présidence tournante du Conseil est remplacée par l’élection, dans chacune des formations du Conseil, d’un président parmi les ministres eux-mêmes, et ce pour une période de deux ans et demi. Le président du Conseil des affaires économiques et financières («ECOFIN») est aussi le président de l’Eurogroupe. Ces changements ont pour but d’assurer la continuité des travaux du Conseil et d’en augmenter la qualité, les présidents des différentes formations étant choisis inter partes pour leurs capacités à présider.

    Le Parlement européen, représentant directement les 508 millions de citoyens européens, joue un rôle central dans la légitimité des décisions. A travers la Loi fondamentale, la codécision entre le Parlement et le Conseil remplace la capacité actuelle du Conseil à agir seul. Ce changement affecte, notamment, les règles de fonctionnement du mécanisme européen de solidarité et la mise en place des lignes directrices en matière d’emploi, de politiques sociales et macroéconomiques.

    La responsabilité de la Commission européenne face au Parlement européen est renforcée. Le président élu par une majorité au Parlement a le pouvoir de définir la taille et la composition du collège des commissaires, tous devant être auditionnés par le Parlement. Tout laisse présager que la Commission sera plus réduite que l’aéropage actuel. Ce changement de logique permettra d’avoir un exécutif européen plus efficace, moins dépendant des gouvernements nationaux et plus à même de définir et promouvoir l’intérêt général européen.

    En ce qui concerne le Parlement européen, sa visibilité et sa légitimité sont renforcées par la création d’une circonscription paneuropéenne pour l’élection d’un certain nombre de députés issus de listes transnationales établies par les partis politiques européens Une telle réforme électorale devrait transformer les partis politiques européens en ce qu’ils devraient être: de véritables machines électorale destinées à faire campagne dans toute l’Europe, alimentant le débat public sur des sujets européens et établissant un lien plus direct entre l’élu européen et son électorat. Le Parlement obtient aussi un pouvoir de codécision sur la délicate question de son siège. Il obtient également le droit de voter l’ouverture et la conclusion d’accords internationaux et donne son aval à l’élargissement de l’Union à de nouveaux États membres.

    La Commission garde son droit d’initier la législation de l’UE, maintient la primeur en ce domaine mais en perd le monopole. En effet, le Parlement et le Conseil gagnent le droit d’initier une loi si la Commission refuse de donner suite à une demande de leur part. Le Parlement peut demander la révocation individuelle d’un commissaire. Dans le cas d’une motion de censure collégiale, c’est à dire adressée à l’ensemble du collège, le Parlement européen, sur le modèle de ce que l’on appelle la «motion de censure constructive», doit être en mesure de proposer un successeur au président de la Commission défaite.

    Faire de la citoyenneté européenne une réalité

    En tant qu’entité fédérale, la légitimité de l’Union dérive de deux sources: ses États et ses citoyens. Le préambule de la Loi fondamentale affirme cette double légitimité (populaire et étatique) propre aux systèmes fédéraux.

    Nous améliorons et donnons plus de substance à la citoyenneté européenne en plaçant la Charte des droits fondamentaux de l’UE au cœur de la Loi fondamentale, dans sa partie II. La règle visant à déterminer si un État a ou non enfreint un des droits inscrit dans la Charte est modifiée: la majorité qualifiée est requise au niveau du Conseil, le Parlement ainsi que la Cour de justice ont à présent un rôle à jouer.

    L’accès à la Cour de justice est facilité pour les individus affectés directement par une loi de l’Union. La juridiction de la Cour de justice est largement étendue afin que certains domaines dont elle est pour le moment exclue ne soient plus des zones de non-droit, principalement ceux de la sécurité aussi bien intérieure qu’extérieure.

    Le médiateur européen doit pouvoir défendre au mieux les droits des citoyens, il gagne à cet effet le droit de référer directement certains dossiers devant la Cour de justice.

    L’étendue de l’initiative citoyenne européenne est considérablement élargie, s’écartant de l’approche légaliste – proposer des lois pour investir le terrain politique – définir des objectifs politiques européens.

    Chaque citoyen européen se voit attribuer le droit de voter dans le pays européen dans lequel il réside à l’occasion de chaque échéance électorale, une base légale est insérée dans la loi fondamentale à cet effet.

    Rationaliser la prise de décision

    Les parties V et VI visent à rationaliser et simplifier la prise de décision au sein de l’UE, améliorant ainsi sa transparence et son efficacité. La Loi fondamentale étend largement le champ d’application de la majorité qualifiée aux dépens de l’unanimité trop souvent la règle au Conseil. Ce changement affecte tout particulièrement les clauses dites de flexibilité permettant la prise de décision au niveau de l’Union, dans certaines circonstances, même lorsque les compétences de l’Union en la matière n’ont pas été expressement prévues par les traités.

    La Loi fondamentale réduit à deux le nombre de procédures législatives. La première, la procédure législative ordinaire, reste inchangée. La seconde est une procédure législative spéciale uniformisée remplaçant la myriade de procédures spéciales ayant actuellement cours. Elle consiste en une majorité qualifiée au Conseil et au Parlement européen.

    Puisque les procédures législatives appelant l’unanimité sont quasiment éradiquées dans la Loi fondamentale, les diverses clauses passerelles – ces clauses permettant au Conseil européen d’appliquer la majorité qualifiée là où le traité prévoyait l’unanimité – perdent leur utilité et sont par conséquent éliminées. Les domaines concernés sont: le cadre financier pluriannuel, les affaires sociales, l’environnement, la justice et les affaires intérieures ainsi que la politique étrangère et de sécurité commune. Seules restent la passerelle permettant au Conseil européen de passer de la procédure législative spéciale à la procédure législative ordinaire, et la passerelle facilitant la prise de décision dans le cas des coopérations renforcées.

    Une nouvelle base juridique est créée pour l’établissement de nouvelles agences européennes.

    Des politiques communes revisitées

    La cinquième partie réforme en profondeur les politiques européennes en se concentrant exclusivement sur les politiques qu’il est essentiel de conduire au niveau européen.

    Tout en conservant la libre circulation des marchandises, des personnes, des services et des capitaux, la Loi fondamentale renforce la défense des différents modèles sociaux européens. La politique économique et les politiques organisant le marché intérieur doivent être conduites selon les principes d’une économie sociale de marché ouverte et hautement compétitive. L’Union peut à présent légiférer en matière de liberté de circulation des travailleurs, permettant ainsi une meilleure transportabilité et opposabilité des droits sociaux au-delà des frontières nationales.

    En renforçant la clause sociale transversale, l’Union intégrera plus d’éléments liés à la promotion du plein emploi et de la promotion sociale. Sous le régime de notre Loi fondamentale les libertés économiques ne peuvent pas prendre le pas de façon systématique sur l’exercice des droits sociaux et sur les principes inscrits dans la loi de l’Union et celle des États. La levée de l’interdiction faite à l’Union de légiférer en matière de salaires renforce encore davantage l’aspect social.

    En plus de la nouvelle compétence attribuée à l’Union en matière de sécurité énergétique, avec pour horizon l’établissement d’un véritable marché unique, les dispositions du traité Euratom concernant la sécurité nucléaire sont elles aussi incorporées.

    Aussi bien la politique agricole commune que la politique de la pêche sont modernisées et envisagées séparemment.

    Une nouvelle autorité de la concurrence est créée. Cette nouvelle autorité est séparée de la Commission qui perd ainsi sa compétence en la matière, une Commission faisant office de gouvernement ne pouvant conserver ses pouvoirs quasi-judiciaires.

    D’autres politiques telles que la politique des transports et de l’innovation sont remises au goût du jour. À la politique environnementale sont confiées de nouvelles tâches en matière de lutte contre le réchauffement climatique.

    Enfin, dans la partie VI, les nombreuses interdictions d’harmoniser les législations nationales dans les domaines de la justice et de l’Intérieur sont levées, dessinant ainsi la perspective d’un espace de liberté, de sécurité et de justice plus intégré comprenant une politique européenne d’asile et d’immigration.

    Peser de tout son poids

    Dans la partie VIII, la prise de décision dans le domaine de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) est rapprochée de la prise de décision ordinaire, par un rôle accru de la Commission et du ministre des affaires étrangères de l’UE notamment. Le Parlement européen se voit attribuer la possibilité de consentir à l’action diplomatique, à condition que se dernier agisse dans la limite du temps qui lui est imparti. Le ministre des affaires étrangères, assisté de deux sous-secrétaires délégués, continuera, comme le fait aujourd’hui le haut représentant, à présider le Conseil des ministres dans sa formation affaires étrangères mais prendra plus à cœur son rôle au sein de la Commission (comme le futur ministre du Trésor européen, il sera vice président au sein du collège). Le ministre des affaires étrangères représentera l’Union dans les forums internationaux. La juridiction de la Cour de justice est étendue au domaine de la PESC, la clause de flexibilité est par ailleurs applicable à cette même PESC. Cette dernière se verra aussi appliquer les règles propres à la coopération renforcée. Les pouvoirs et les ressources de l’Agence européenne de défense sont augmentés, tout comme sa responsabilité politique.

    La Commission et le Parlement jouent un plus grand rôle dans la négociation des accords internationaux passés par l’UE. L’approbation du Parlement européen est requise pour toute conclusion d’accords internationaux, y compris dans le champ de la PESC. Le Parlement est aussi consulté sur les aspects opérationnels.

    Prises dans leur ensemble, toutes ces réformes devraient donner l’impulsion nécessaire à l’action extérieure de l’UE. La Loi fondamentale simplifie et clarifie qui fait quoi dans le champ diplomatique et militaire ainsi qu’en matière de commerce extérieur. L’établissement graduel d’une confiance mutuelle au sein du Conseil conduira à l’usage plus fréquent de la majorité qualifiée en matière d’action extérieure et la voie sera ouverte pour l’établissement de groupes d’États agissant dans certains domaines en nom et place de l’UE dans son ensemble.

    Une révolution constitutionnelle

    La Loi fondamentale réintroduit les symboles de l’UE (le drapeau et l’hymne) perdus sur la route allant du traité constitutionnel au traité de Lisbonne. Elle hisse les critères de Copenhague, auxquels doivent se soumettre les pays candidats à l’entrée dans l’UE, dans les dispositions relatives à l’élargissement.

    Il y a deux autres dispositions de nature constitutionnelle et d’importance considérable qui distinguent la Loi fondamentale de tout ce qui a été fait auparavant en matière de traité européen. La première concerne le processus de révision des prochains traités. Nous gardons la méthode de la Convention,

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