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FRANÇAISE DE L’ALGÉRIE
F. M. Seghir
L’expédition de 1854
En juin 1854 le général Randon, après avoir obtenu la soumission des Aït Djennad, laissa
entendre qu’il allait punir les Aït Idjer. Ce n’était qu’une feinte car Randon avait en fait conçu le
projet de porter la guerre au cœur de la Kabylie et de soumettre les tribus guerrières du Djurdjura.
Le 16 juin 1854 le général Randon donna l’ordre de marche sur les Aït Yahia et traversa les
villages grâce à la complicité de certains notables corrompus par l’or français. Mais l’alerte fut vite
donnée par les villageois et, le soir, les feux s’allumèrent sur toutes les crêtes pour alerter les
populations. La grande Djemaâ fut convoquée et proclama le Djihad; l’organisation de la
résistance fut confiée à Sidi Tahir et à sa sœur Lalla fatma. Des retranchements en pierres et en
terre sèche furent édifiés sur une ligne passant par le village de Tazrout, Akenoun B’ourdja et la
crête des Itsouragh. Le village de Soumeur derrière cette ligne fortifiée, devint le quartier général
de la résistance.
Randon disposait de 13.000 hommes environ. Les forces du général Mac-Mahon furent
scindées en deux colonnes; la colonne du général Maissiat mènerait l’attaque de front pendant
que celle de Mac-Mahon exécuterait un mouvement tournant. Mais les troupes de Maissiat furent
stoppées par un feu nourri; Sidi Tahir avait placé là une partie de ses "Imseblen" (volontaires de
la mort) et c’était là également que se trouvait Fatma N’Soumeur que les Français aperçurent
pour la première fois : "Lalla Fatma, vêtue d’un haïk rouge, est sur un mamelon, entourée des
femmes de la tribu qui excitaient par leurs cris les Kabyles à mourir pour la guerre sainte. Ceux-ci
combattirent avec opiniâtreté". Perret écrit également : "On raconte que c’est à la suite d’un
combat livré en 1854 contre les troupes du général Maissiat que Bû Baghla et Fatma N’Soumeur
conçurent l’un pour l’autre une véritable estime. Lalla Fatma se précipita plusieurs fois vêtue d’un
haïk rouge qui la désignait aux coups de feu de nos soldats, au milieu des combattants. Bû Baghla,
chacun le sait, était brave. Dans l’affaire dont nous parlons, il fut atteint par une balle partie des
rangs du 3e zouave, et passait tout sanglant à côté de Lalla Fatma, quand elle s’écria : Shérif, ta
barbe ne deviendra jamais du foin". Les troupes de Mac-Mahon et de Randon n’eurent pas plus
de succès et, quelques jours plus tard, l’armée coloniale se retira après avoir saccagé et détruit des
villages entiers et dynamité la magnifique mosquée de Taourit montrant ainsi "aux barbares"
comment agissait une "armée civilisée".
L’insurrection de 1856
La France, qui n’avait pu jusque-là s’emparer de la citadelle qu’était la Kabylie, s’employait à
guerroyer contre les résistants par tribus soumises interposées. Avec les goums levés par les chefs
ralliés, la guerre contre l’étranger devint une guerre fratricide. Si Hadj Ammâr, devant cette triste
constatation, souleva toutes les tribus encore indépendantes pour ramener à la raison ceux qui
trahissaient. Cette insurrection devait couvrir trois zones dont l’une était le cercle du Djurdjura
qui fut confié à Fatma N’Soumeur. Les insurgés obtinrent des succès au début, mais les troupes
françaises se réorganisèrent rapidement et reçurent des renforts. Une expédition d’environ 35.000
hommes fut dirigée contre la Kabylie au printemps de 1857.