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Pierre-Marie de BERNY
1
INTRODUCTION .......................................................................................................... 3
CONCLUSION ........................................................................................................... 80
BIBLIOGRAPHIE ........................................................................................................ 83
ANNEXES ................................................................................................................. 85
2
INTRODUCTION
1
Des films comme Wag the dog (1997), de Barry Levinson, avec Robert de Niro et
Dustin Hoffman, sont symptomatiques de cette fascination à l’égard des fameux spin
doctors.
2
Pour reprendre l’expression consacrée par l’ouvrage de Patrick Champagne :
CHAMPAGNE Patrick, Faire l’opinion, Editions de Minuit, 1990.
3
impossible le contrôle de l’information par les puissances étatiques,
Internet instaurerait en quelques sortes une grande démocratie directe et
mondialisée qui rendrait le pouvoir aux citoyens.
- Pour d’autres, Internet ne confisque pas leur influence aux médias dits
traditionnels, mais les met suffisamment en danger pour qu’ils soient
condamnés à vivre de plus en plus sous la perfusion financière de l’Etat,
qui ferait ainsi main basse sur le débat démocratique.
Ces analyses ont tendance pour l’une à tourner à l’euphorie et pour l’autre à
alimenter la théorie du complot. Parfaitement antagonistes, elles ont une
conséquence directe sur la façon dont les entreprises cherchent à promouvoir
ou à défendre leurs intérêts. Les actions qu’elles cherchent à mettre en œuvre
en ce sens doivent en effet s’adresser à un pouvoir. Or, selon qu’on adopte le
premier ou le deuxième des postulats que nous venons de décrire, on ne situe
pas le pouvoir au même endroit. Dans le premier cas, le pouvoir est diffus et
partagé. Dans le second, il est centralisé et concentré au sein d’institutions
publiques. Dans la pratique, cette divergence de point de vue se traduit par des
approches opérationnelles très différentes en termes d’influence. Là où le
lobbying concentre son action sur les décideurs publics, la communication
d’influence adopte une approche avant tout médiatique. Entre les deux
fleurissent des offres qui articulent les deux démarches : affaires publiques,
stratégies d’influence …
4
Partie 1
5
INFLUENCE CONTRE PROPAGANDE
Propagande, acte II
Un appétit de radicalité
Cette tendance de fond pourrait trouver une explication en premier lieu dans le
désarroi que suscite chez beaucoup la complexité de la mondialisation. Dopée
par l’émergence des nouvelles technologies de l’information et de la
communication, ce phénomène bouscule nos repères traditionnels, et plus
largement, notre représentation du monde. Il est caractérisé, entre autres, par
une dématérialisation des rapports humains. C’est le paradoxe de la
communication : je suis en pleine conversation téléphonique avec un ami qui
travaille à Hong Kong, à tel point que j’en oublie de saluer mon voisin que je
croise sur le trottoir. Par ailleurs, le formidable développement économique
permis par cette explosion des NTIC est précisément dû à la capacité
aujourd’hui quasiment acquise pour tout acteur économique ou tout individu,
d’être connecté en permanence à travers un tissu de relations en réseau.
Le matin, en me levant, je lis les SMS que j’ai reçus pendant la nuit. Pas besoin
d’allumer mon téléphone, je ne l’éteins plus le soir. Ah tiens ! Une photo de
Guillaume. (Guillaume, c’est un ami rencontré sur Facebook). A regarder sa
tête, je me demande s’il avait encore quelques grammes de sang dans l’alcool
à 3h… Et puis qui est cette fille qui s’accroche à lui ? J’avale un petit déjeuner
et saute dans le métro. Là, je consulte mes mails : comment fait Brigitte pour
6
m’envoyer des messages à 02 h 12 ? J’arrive au bureau et je démarre mon
ordinateur. Ouf, tout le monde est là : mes contacts MSN, mes amis Facebook,
mes adresses mails, les contributeurs de mon forum préféré. C’est parti pour
une journée de zapping relationnel… Tiens, mon collègue Nicolas m’envoie un
mail, sans grand intérêt je dois dire. Mais quand-même, on travaille à cinq
mètres l’un de l’autre, ce serait peut-être aussi simple si on se parlait, non ?
Ce besoin de retour aux sources s’exprime jusque dans les choix alimentaires.
On veut manger des produits naturels, comme au bon vieux temps. Si cet
appétit n’a pas nécessairement pour effet de faire la fortune des petits
producteurs agricoles, il conditionne néanmoins les choix de l’industrie
3
Il est tentant d’opérer ici un rapprochement avec l’enthousiasme qui accompagna la
naissance des mouvements folkloristes du XIXème siècle, en réaction au sentiment de
dilution des particularismes régionaux dans une France uniformisée, issue de la
Révolution.
7
agroalimentaire en termes de marketing (bienvenue dans le monde de la chips
à l’ancienne), et ceux des distributeurs qui abandonnent le développement des
hypermarchés pour favoriser les commerces de proximité.
4
Face à ce phénomène, la Société Générale, partenaire historique du rugby français, à
créé le site www.paramourdurugby.com. Une rubrique destinée prioritairement aux
femmes est dédiée à une découverte des règles du rugby pour les non-initiés.
8
En effet, force est de constater qu’une certaine lassitude se fait jour face à cette
disparition de références collectives.
9
drapeau suisse. Un troisième, d'un coup de pattes, éjecte un mouton noir.
« Pour plus de sécurité », peut-on lire…
La combinaison des deux phénomènes que nous venons de décrire (goût pour
la radicalité et épuisement du relativisme) ne constitue-t-elle pas, finalement, un
terrain idéal pour la propagande ? La question mérite d’être posée. En effet, ce
qui caractérise la propagande est sa capacité à rendre le monde
compréhensible et à aider à faire la distinction entre le bien et le mal. Dès lors,
le besoin de retour aux fondamentaux et la quête de sens que nous observons
chez nos contemporains face à un monde de plus en plus complexe et
dématérialisé exposent nos sociétés aux dangers de la propagande qui apporte
une réponse à ces préoccupations par la diffusion d’une vision simpliste de
cette réalité complexe. Par cette représentation du réel, la propagande a la
capacité de rassurer, de donner du sens et souvent de désigner des boucs
émissaires qui deviennent la cause et l’explication de tous nos maux et de tous
nos malheurs.
En effet, la vision du monde propagée par la propagande repose toujours sur
une idéologie et passe nécessairement par une simplification à outrance du
réel. Dans L’âge des foules, Serge Moscovici décrit parfaitement ce
phénomène :
5
MOSCOVICI Serge, L’Âge des foules, Fayard, 1981.
10
En somme la propagande fonctionne comme une véritable matrice, dont la plus
grande force est de résister au réel.
Tout d’abord, nous sommes tentés de dire que non, parce que le terme
propagande renvoie surtout aux systèmes totalitaires qui ont assombri le
XXème siècle.
Par ailleurs, outre le fait qu’il est difficile de taxer nos démocraties occidentales
de totalitaires, il est évident – et les deux phénomènes sont incontestablement
liés – que les modalités permettant à un pouvoir de maîtriser l’ensemble des
canaux et des flux de communication ne sont plus réunies. La dernière élection
présidentielle iranienne nous en a fourni un exemple probant. Le pouvoir a en
effet cherché, en vain, à imposer un véritable silence médiatique sur la
répression sanglante des manifestations d’opposition à la réélection de
Mahmoud Ahmadinejad. Les médias nationaux ont été muselés et les
journalistes étrangers ont été assignés à résidence. Cela s’est avéré inefficace
puisque les photos et les vidéos des violences policières se sont répandues
comme une trainée de poudre sur Internet et que les réseaux sociaux comme
Twitter ont permis à l’opinon internationale de suivre presque en temps réél les
événements. Certains, comme Lev Grossman, ont néanmoins cherché à
tempérer l’euphorie générale en montrant que ce contournement de la censure
grâce aux nouveaux médias ne constitue pas pour autant un remède miracle
contre les régimes autoritaires :
11
«Twitter isn't a magic bullet against dictators. As tempting as it is to think of the
service as a purely anarchic weapon of the masses, too distributed to be
stoppable, it is theoretically feasible for a government to shut it down, according
to James Cowie, CTO of Renesys, a company that collects data on the status of
the Internet in real time. While Iran has a rich and diverse Internet culture, data
traffic into and out of Iran passes through a very small number of channels. It's
technically relatively trivial for the state to take control of those choke points and
block IP addresses delivering tweets through them. The SMS network is even
more centralized and structured than the Internet, and hence even easier to
censor. »6
6
GROSSMAN Lev, « Iran protests : Twitter, the medium of the movement », Time.com,
2009, http://www.time.com/time/world/article/0,8599,1905125,00.html
12
qu’occupait autrefois la régulation normative, et substituèrent les relations
publiques au commandement. »7
7
BAUMAN Zygmund, La société assiégée, Le Rouergue/Chambon, 2005, p.55.
13
saxons8. C’est le phénomène bien connu du halo médiatique : la visibilité de
l’événement apportée par les médias amène celui-ci à la conscience publique.
Ainsi, l’événement n’existe qu’à travers sa médiatisation et il est susceptible de
toucher ou non le public.9 Le rôle des agences de presse par exemple, comme
l’AFP, AP ou Reuters, est décisif dans la sélection de ce qui fera ou non
l’actualité, parmi une immense quantité de faits et d’événements.
C’est que dans une société interconnectée où le développement des NTIC rend
quasiment impossible tout contrôle des flux d’informations, nous avons vu qu’il
devient difficile d’imposer des dogmes. Le pouvoir consiste donc plutôt à
8
« Agenda making »
9
BAUDRILLARD Jean, L’ère de la facticité, in Technologies et symboliques de la
communication, Presses Universitaires de Grenoble, 1990.
10
HUYGHE François-Bernard, « Du bon usage du cerveau d’autrui », Huyghe.fr, 2009,
http://www.huyghe.fr/actu_247.htm
14
imposer des priorités. Dans la pratique, cela peut consiste aussi bien à susciter
une dépêche en attirant l’attention d’une agence de presse par un coup
médiatique, qu’à mettre en œuvre des stratégies de référencement sur Google.
Cette dernière pratique devient l’un des points clés de la capacité à créer de la
visibilité sur le web. Certaines agences spécialisées proposent leurs services
pour optimiser le ranking des sites de leurs clients sur les moteurs de
recherche. Les offres de formation aux techniques et aux stratégies de
référencement fleurissent sur la toile.
Rhétorique
15
dimension universelle d’une religion en prétendant en proposer une déclinaison
nationale. L’oxymore a une double utilité en termes de communication : il peut
satisfaire - ou plus exactement rassurer - des parties opposées pour se
soustraire à une réaction hostile de leur part et peut facilement devenir un
slogan qui, inlassablement repris et répété, créé chez celui qui y est
régulièrement exposé une catégorie mentale qu’il finit par adopter. Si la
technique est bien connue des professionnels du marketing, la communication
politique n’est pas en reste. Qu’on songe à « la force tranquille » de Jacques
Séguéla pour la campagne de François Mitterand en 1981, qui a été depuis
détourné dans des expressions comme « la rupture tranquille » ou encore « le
changement dans la continuité ».
Langue et sémantique
16
Si les Anciens avaient compris le pouvoir des mots en démocratie, les
promoteurs des idéologies totalitaires du siècle dernier ont franchi un cap en
passant maîtres dans l’art qui consiste à imposer par la langue un mode de
pensée et de perception du monde à tout un peuple. Orwell, dans 198411, décrit
l’utilisation cynique d’une telle stratégie en vue d’imposer définitivement un
pouvoir totalitaire par l’enfermement des masses dans une idéologie.
En effet, comment concevoir et diffuser l’idée de liberté politique s’il n’y a pas
de mots pour l’exprimer ?
11
ORWELL Georges, 1984, Gallimard, 1991.
12
THOM Françoise, La langue de bois, Julliard, Paris, 1987.
17
Toute entorse à ce politiquement correct de la langue est qualifié de dissidence
et provoque l’exclusion, la marginalisation, ou pire…
18
sans rien donner en échange, donc sans compensation ni récompense. Certes
l’influence peut être relayée par la puissance ou l’autorité : l’imposition de
certains vocables peut s’accompagner de sanctions ou être décidée par ordres
et décrets, mais cela ne change rien au pouvoir d’influence intrinsèque de la
langue. »
Et Huyghe de préciser :
«L’influence peut porter aussi bien sur le contenu (imposer une conviction ou un
comportement à l’influencé, le faire adhérer à une proposition) que sur le code
(intégrer des catégories mentales ou des attitudes générales qui poussent à
penser et à agir comme le souhaite l’influent). De la même façon, les mots
agissent par leur agencement habile qui produit l’effet de croyance désiré, mais
aussi par leur simple présence ou absence dans le vocabulaire de l’influencé.
Ils manifestent leur puissance à travers des règles qui gouvernent leur emploi et
qu’il peut intérioriser ».
De même, dans nos démocraties, la prise de parole publique obéit à des règles
lexicales tacites dont il est dangereux de s’affranchir. C’est ainsi qu’un aveugle
devient un non-voyant, un clochard un sans-abri puis un SDF. Si une part de
ces évolutions linguistiques obéit à une volonté de pudeur (excessive ?) vis-à-
vis de réalités douloureuses (un infirme ou un impotent devient un handicapé
puis une personne à mobilité réduite), certaines sont en revanche tout à fait
volontaires et cherchent à faire accepter des réalités qu’on refuse d’assumer ou
qu’on cherche à atténuer. En changeant de nom, les faits – ou plus exactement
ceux qui en sont responsables – cherchent à s’acheter une virginité. Les
bombardements se muent en frappes aériennes puis en frappes chirurgicales
19
qui ne font plus de victimes civiles mais des victimes collatérales, voire des
dommages collatéraux. Il est vrai que des frappes chirurgicales causant des
dommages collatéraux sont plus faciles à avaler que des bombardements qui
tuent des femmes et des enfants…
Pour faire accepter une opération militaire par les opinions internationales,
l’armée américaine recourt à des outils sémantiques parfois très efficaces. Tout
le monde se souvient de l’opération Tempête du désert, nom sous lequel le
Département de la Défense américain a chassé l’armée irakienne de Saddam
Hussein du Koweït lors de la première guerre du Golfe, en 1991. Le nom de
l’opération a été choisi pour rendre la plus acceptable possible l’intervention
américaine et a été dévoilée après un plan de communication destiné à
diaboliser le régime irakien. Les médias sont friands de ces noms d’opérations
qui donnent du relief à une triste réalité et qui permettent de la raconter au
public qui se sent impliqué. Le nom de l’opération est donc continuellement
répété par toutes les télévisions, les radios les journaux et devient familière
dans l’opinion. Or, qu’évoque Tempête du désert pour chacun de nous ? Du
sable, du vent, un grand territoire vide de population. On se représente
parfaitement cette guerre du désert, au milieu de nulle part, dans un océan de
sable agité par le vent, images à l’appui. A croire que l’armée américaine se bat
héroïquement contre… des dunes. Cela fait oublier la réalité de cette guerre :
bombardement des villes, « dommages collatéraux » et autres atrocités.
20
promoteurs de ce droit d’adoption est la création et la diffusion du terme
homoparentalité. Cette trouvaille est doublement efficace :
- d’autre part, elle met un mot unique et nouveau sur le concept. Ce mot
unique permet à la fois de faciliter la discussion sur le thème de
l’adoption d’enfants par des couples homosexuels en évitant de longues
périphrases et de susciter la curiosité par sa nouveauté. Par conséquent,
il a été rapidement adopté par les journalistes et les différents acteurs du
débat, y compris ces opposants. Pour l’anecdote, l’une des figures de
proue de cette contestation, Béatrice Bourges, a même écrit un ouvrage
intitulé L’homoparentalité en question, devenant ainsi, malgré elle, le
vecteur de diffusion et d’acceptation de ce concept…
13
Conférence au Festival du mot, La Charité-sur-Loire, juin 2008.
21
chinois : que l’ordre politique dépend des dénominations. Et que celui qui
décide des secondes contrôle le premier. Ce n’est pas une petite victoire que
d’avoir imposé « développement durable », « ingérence humanitaire », « droit
au logement opposable » : le mot a entraîné la norme et la norme parfois la
chose. De même dans les organisations internationales, ce n’est pas un enjeu
négligeable que d’obtenir que l’on dise « Golfe Persique » ou « les autorités qui
sont au Nord de l’île de Chypre ». »
Nous avons vu que la propagande n’était rendue possible que par une maîtrise
de l’ensemble des canaux et des flux de communication par un pouvoir. Les
institutions démocratiques et l’explosion des NTIC rendent impossible un tel
contrôle dans nos sociétés.
Néanmoins, nous avons montré que le sentiment de maturité de l’opinion vis-à-
vis de la communication est trompeur : qu’il s’agisse de la communication qui
se voit ou de la communication qui ne se voit pas, notre attention est dirigée sur
certains sujets plutôt que sur d’autres et l’efficacité des techniques rhétoriques,
sémantiques et de manipulation de la langue gardent toute leur force de
conditionnement. Ces techniques, dont certains régimes autoritaires ont usé en
conscience afin de soumettre des peuples entiers, inspirent à présent l’action
d’influence des groupes d’intérêts économiques ou idéologiques sur des sujets
variés.
22
La victoire de l’influence sur la propagande
Pour leur part, les partisans du non s’activent et appellent à la résistance contre
un parti unique et une Europe de « bureaucrates ultralibéraux ». Leurs rangs
sont écartelés entre des positions politiques qui sont parfois à l’opposé les unes
des autres. Pourtant, ils parviennent à créer un mouvement du non, hétérogène
et éclaté mais déterminé. On ne peut s’empêcher de penser au village d’Astérix
où l’empoignade entre congénères est un sport national, mais se calme dès lors
qu’il faut résister à l’envahisseur romain… Dans ce très disparate camp du non,
il n’est évidemment pas imaginable de déterminer une stratégie commune. Les
opposants au Traité constitutionnel entrent donc dans une logique de guérilla.
Contre un visuel institutionnel et froid, on oppose une forte capacité créative :
des dizaines de caricatures, de photomontages et de slogans circulent sur
Internet et sont déclinés sous forme d’autocollants ou de tracts. Car le facteur
14
Cf : annexe 1
24
clé du succès du non en 2004 a été la capacité à utiliser les ressources
immenses du web.
15
Cf : annexe 4
25
L’intensité de la mobilisation du camp du non a bien été déterminante dans la
construction d’un rapport de force qui s’est soldé par le rejet du traité par la
majorité des électeurs français.
C’est la première fois que le web tient cette place de premier ordre dans une
campagne politique française.
En somme, nous constatons que sur le fond, les procédés de l’influence sont
les mêmes depuis des siècles. Là où l’innovation est la plus remarquable, c’est
dans les modalités et la forme de leur mise en œuvre, dans le contexte d’une
révolution structurelle rendue possible par le développement des nouvelles
technologies de l’information et de la communication.
26
DEMOCRATIE D’OPINION ET REDISTRIBUTION DE L’AUTORITE
Le droit ne suffit plus, loin s’en faut, pour conférer sa légitimité à l’autorité, nos
démocraties d’opinion fonctionnent sur d’autres modes : « veilles citoyennes »,
« agences de notations », « alertes », etc. Sur la scène du débat public, exercer
27
l’autorité dans le strict respect du droit peut même se retourner contre le
pouvoir légitime. Ainsi, quand l’association des Enfants de Don Quichotte, un
an après l’installation de tentes au bord du Canal Saint-Martin, annonce dans
les médias que l’opération va être reconduite en bord de Seine, en plein cœur
de Paris, le choix de l’emplacement n’est pas neutre. Les forces de l’ordre ne
peuvent permettre à l’association de s’installer dans ce lieu central et touristique
de Paris et provoquer des troubles à l’ordre public. C’est précisément la raison
pour laquelle les Don Quichotte ont choisi un tel endroit et ont accompagné ce
choix d’une communication provocatrice à l’égard du gouvernement. Ce qu’ils
cherchent à faire alors n’est pas d’installer une nouvelle fois un campement de
fortune mais bien de convoquer les journalistes à un spectacle médiatique : des
CRS sans pitié qui dispersent manu militari les défenseurs des SDF. L’opinion
ne saurait tolérer une telle lâcheté à l’encontre des défenseurs des plus
démunis. Cela ne manque pas, l’opération est parfaitement préparée et
scénarisée. Malgré le calme et la prudence des gendarmes, les militants jouent
les martyres, chutent dans les escaliers et feignent d’être jetés dans la Seine.
La comédie ne tarde pas à produire ses fruits : le jour même, les images font le
tour du web et des émissions de télévision, on demande des comptes au
Ministère du Logement et on invite le Président des Enfants de Don Quichotte,
Augustin Legrand, sur les plateaux. De l’autre côté de l’écran, à la veille de
l’hiver, les téléspectateurs s’indignent de la passivité du gouvernement face au
drame des sans-abris. Dans ce cas précis, une petite organisation militante a
su provoquer une action légitime de maintien de l’ordre et la retourner contre
l’Etat pour le décrédibiliser et ainsi faire avancer une cause.
28
Facebook, aux sites de partage de photos comme Flickr, via un blog ou sur un
site Internet. C’est ainsi que les images d’un fait marquant font le tour du monde
non pas en 80 jours mais en 80 minutes. Le premier événement qui a fait l’objet
d’une telle diffusion d’images fut le crash du Concorde en 2000, à Gonesse.
Les attentats islamistes des années suivantes connurent un succès encore plus
grand. Le crash des deux avions contre les twin towers à Manhattan le 11
septembre 2001 a été l’événement le plus filmé de l’histoire. Les attentats de
Madrid et de Londres ont fait l’objet de la même diffusion de clichés et de films
amateurs. Lors des attentats de Londres en 2006, tout le centre de la ville est
rapidement bloqué par la police. Les journalistes filment des témoins ou des
blessés mais aucune image des explosions et de la panique dans les sous-sol
du métro n’est disponible. Dans la matinée, la BBC prend la décision d’en
appeler aux contributions amateurs. La chaîne met donc en ligne une interface
dédiée sur laquelle les témoins des explosions peuvent envoyer les photos et
les vidéos qu’ils on pu réaliser avec leurs téléphones mobiles.
29
Or l’opinion fonctionne à l’émotion. Avec cette célérité incontrôlable de la
diffusion d’images, l’Etat perd l’initiative en termes de décision : que deux ou
trois histoires d’enfants attaqués par des chiens dangereux soient rapportées
par les médias, photos à l’appui, et le gouvernement annonce un durcissement
de la législation concernant la possession de ces charmantes bestioles…
Cette affaire est le signe qu’un cap est en passe d’être franchi en termes de
démocratie d’opinion.
16
GUNTHERT André, « Tous journalistes ? Les attentats de Londres ou l’intrusion des
amateurs », Le blog d’André Gunthert, 2009,
http://news.bbc.co.uk/2/hi/talking_point/2780295.stm
30
nos sociétés occidentales et liées au développement des technologies de
l’information et de la communication : d’une part « tout ce qui est caché est
destiné à devenir public » (pour reprendre la formule de Jean-Pierre Beaudoin),
et d’autre part la tendance générale est à la démocratie directe. L’huis-clos et
les jurys populaires n’ont donc pas la cote.
« La justice n'est plus indépendante, c'est sûr. Il reste qu'un débat n'a jamais eu
lieu dans cette affaire : comment ces jeunes en sont venus à perpétrer un acte
d'une telle violence ? Le manque d'éducation ? L'abandon des parents ? La
bêtise ? »
31
Le nouveau rôle du politique
17
PHILIPPI Charles-Henri, L’argent sans maître, Descartes & Cie, 2009.
32
la diffusion d’informations nécessitait de faire appel à plusieurs personnes
travaillant de façon organisée au sein d’une structure. Par exemple : pour avoir
une idée de l’état de l’opinion sur un sujet, une grande entreprise disposait d’un
service de presse qui épluchait quotidiennement journaux et magazines pour en
extraire les articles jugés utiles, puis les collait sur des pages blanches et les
photocopiait pour en faire une revue de presse qui arrivait chaque matin à
10h30 sur le bureau des cadres dirigeants. Aujourd’hui, n’importe qui - ou
presque- peut s’abonner à des alertes Google ou mettre en place gratuitement
son agrégateur de flux rss. Il est ainsi informé en temps réel de l’actualité, sans
avoir recours à personne et sans aucun budget, si ce n’est une connexion
Internet. Avec l’émergence du web 2.0, la diffusion d’informations est
également à la portée de tous.
Pour Charles-Henri Filippi, cela est dangereux parce que tout individu doté
d’une intelligence peu scrupuleuse est en mesure de maîtriser et manipuler à
son profit des informations dont les conséquences peuvent porter de graves
préjudices à ses concitoyens. C’est le cas de l’un de mes clients qui a vu les
compétences d’un dirigeant de son entreprise mises en cause sur Boursorama
sur la base de prétendues révélations tenues de sources sûres, avec pour
objectif de faire chuter le cours de bourse de l'entreprise.
Cela passe, pour le politique, par l’acceptation de devoir être une voix parmi
d’autres. Le politique devient en effet une des composantes d’un jeu
d’influence dans lequel il intervient à armes égales avec le monde associatif ou
scientifique, voire parfois avec des mobilisations ponctuelles d’internautes.
33
« Le pouvoir n’est pas, suivant l’image reçue, monopolisé par l’Etat, et
concentré dans ses instances constitutionnelles (parlement, gouvernement,
etc.). Il est plutôt diffusé à travers toutes sortes d’instances qui forment
systèmes et réseaux […]. Par rapport à cet ensemble, le pouvoir politique
légitime, constitutionnel, est seulement au carrefour des forces et des
influences canalisées dans ces agences. »
En somme, la nouveauté ne réside pas tant dans le fait que le politique soit
condamné à satisfaire la volonté générale chère à Rousseau – on a assez
glausé sur la « démagogie » – que dans le processus de détermination de
l’opinion vis-à-vis du politique : auparavant le citoyen observateur jugeait
l’action du politique dans les urnes à échéances déterminées, mais à présent
le citoyen est lui-même en permanence acteur de la chose publique.
L’expression de sa volonté par le bulletin de vote n’est plus qu’une forme parmi
d’autres de son intervention dans la cité. Il l’a d’ailleurs compris et sait en jouer
pour « adresser des messages » au pouvoir en place, détournant ainsi l’élection
de sa vocation première.
34
est à présent de la légitimer. Dans Contre-pouvoirs, Ludovic François et
François-Bernard Huyghe analysent cette mutation :
« Le politique n’est plus vraiment aux mains de l’Etat et de ses chefs. C’est
avant tout par l’influence que se façonne l’avenir de la Cité. L’exercice de la
politique dans un tel contexte n’est plus une activité de décision. Elle est au
contraire une capacité d’influer sur les différents acteurs par légitimation
collective et à faire une synthèse des courants pour in fine aboutir à une
mesure. […] La démocratie ne consiste plus à désigner des représentants
légitimés par les urnes, qui décideront pendant un temps défini. Elle est
devenue un exercice permanent d’influence et de contre-influence des groupes
qui cherchent à rassembler pour emporter la décision. »18
A tel point qu’il n’est pas rare de voir des politiciens adopter des modes
opératoires qui ont fait leurs preuves dans les milieux associatifs militants. Cette
interpénétration entre communication politique et militantisme associatif est
frappante.
18
FRANÇOIS Ludovic et HUYGHE François-Bernard, Contre-pouvoirs, Ellipses, 2009,
p. 17.
35
une mobilisation citoyenne baptisée « Asnières bouge la ligne 13 » pour
pousser le STIF19 et la RATP à prendre des mesures.
Le dispositif web mis en place par la mairie est intéressant : les usagers ont été
invités à faire part de leur ras-le-bol sur un blog dédié à l’opération en y postant
des commentaires et des vidéos prises avec leurs téléphones mobiles pour
témoigner des conditions de transports qu’ils subissent quotidiennement.
Parallèlement, un camion transformé en studio-vidéo a recueilli pendant dix
jours les témoignages des usagers en colère à la sortie des stations Gabriel
Péri, Agnettes et Courtilles. Une fois à l’intérieur du camion, les voyageurs
avaient trente secondes face à la caméra pour donner leur avis, ou faire part de
leurs attentes.
Et pourtant la mobilisation, lancée le 13 mars, a été bien faible : six vidéos sans
intérêt filmées depuis des téléphones mobiles et trois témoignages spontanés
d’usagers. En revanche, les très nombreuses vidéos tournées dans le camion-
studio constituent de loin l’essentiel du contenu du blog.
19
Syndicat des Transports en Ile-de-France
36
Toujours est-il que le 8 avril, le STIF vote à l’unanimité le prolongement de la
ligne 14 pour désengorger la ligne 13. De quoi encourager le politique dans
cette voie.
Pour rendre compte de cette réalité, on pourra préférer, avec Ludovic François
et François-Bernard Huyghe la notion de démocratie d’influence à celle plus
répandue de démocratie d’opinion. A vrai dire, le terme le plus exact serait
démocratie d’influences.
***
Nous voyons donc à quel point une supposée mainmise des décideurs publics
sur le système médiatique apparaît hors de propos, conformément à la
première hypothèse que nous avions formulée. Les politiques sont devenus des
acteurs parmi d’autres du jeu de pouvoir qui s’exerce dans nos démocraties
d’influences. Certains hommes politiques, à l’image de Nicolas Sarkozy,
20
BEAUDOIN Jean-Pierre, Être à l’écoute du risque d’opinion, Editions d’Organisations,
2001, p.39.
37
excellent dans la séduction des journalistes, mais ils n’en sont pas moins
tributaires ; et ils le savent.
38
Partie 2
39
L’ENTREPRISE FACE AU RISQUE D’OPINION
Cela représente donc un risque pour les entreprises de devoir faire face à des
attaques (appel au boycott, grève, etc.) Mais au-delà des conséquences
ponctuelles de ces actions, la réelle force de ces campagnes répétées est
qu’elles finissent par produire des normes, des règles tacites auxquelles
l’ensemble de la sphère économique est tenue de se plier, sous peine de
s’exposer à une mise au pilori médiatique.
40
développement de son entreprise, il va tisser un ensemble de relations avec
divers publics, dont les motivations et les préoccupations diffèrent :
En somme, l’entreprise est un édifice qui repose sur les piliers que sont ses
différentes parties-prenantes. La stabilité de ces piliers dépend de la confiance
qui existe dans la relation entre l’organisation et chacun de ses publics clés.
Cette confiance est le ciment qui assure la solidité de tout l’édifice et lui permet
de résister aux intempéries.
« Cette intervention de l’Etat ne saurait revenir aux formes qui étaient les
siennes jusqu’aux années 1970, mais elle en trouve graduellement d’autres.
Notamment celle de la sanction que représente, pour une entreprise, le fait
d’être, sur la place publique, l’objet d’un jugement, et surtout d’un jugement à
portée morale, de la part d’une autorité d’Etat. »
Et d’ajouter :
21
BEAUDOIN Jean-Pierre, Être à l’écoute du risque d’opinion, op. cit. p. 33-34.
22
Cette méthode est retranscrite en annexe 2.
23
BEAUDOIN Jean-Pierre, Être à l’écoute du risque d’opinion, op. cit. p. 33.
43
La société civile est en effet de plus en plus vigilante aux menaces que peut
représenter l’activité de l’entreprise dans ces domaines.
Cette notion de risque est un facteur déterminant pour l’opinion, qui a en outre
tendance à agir sur un mode plus émotionnel que rationnel. Dans nos sociétés
occidentales développées, la tolérance au risque est particulièrement faible.
D’aucuns parleront même de « sociétés du risque zéro ». Le terrorisme
islamique a bien compris ce phénomène : en tuant quelques personnes, les
djihadistes savent que le spectacle qu’ils jettent en pâture à nos médias
déstabilise fortement nos populations.
44
La nécessité d’écouter
Les phénomènes d’opinion que nous avons décrits montrent une mutation d’un
système de partis politiques vers un système dont les moteurs idéologiques
sont des groupes militants. De plus, les nouvelles technologies de l’information
et de la communication changent radicalement les modalités du débat
démocratique.
Les entreprises sont placées dans un contexte qui évolue rapidement et voit
régulièrement apparaître de nouveaux acteurs. Les rapports de force peuvent
se redessiner en peu de temps. Or, nous l’avons vu, tout cela peut peser sur
l’activité de l’entreprise, voire la conditionner,
- d’abord parce qu’il est important d’y voir clair dans un jeu d’influence
complexe pour anticiper les risques sur l’activité de l’entreprise et se
préparer à y répondre ;
- ensuite parce que pour pouvoir agir sur cet environnement stratégique
afin d’en exploiter les opportunités, il est indispensable au préalable de
connaître et de comprendre le système d’opinion dans lequel on évolue.
24
PATEYRON Emmanuel-Arnaud, Le management stratégique de l’information,
Economica, 1994.
46
Cette méthode s’inspire de celle définie par les Etats-Unis en matière de
renseignement en 1976 et adoptée depuis par la plupart des services de
renseignement dans le monde. Seulement, là où la méthode communément
appelée « cycle du renseignement » à pour vocation de définir le travail de
collecte et de traitement des informations stratégiques dans leur globalité, notre
méthode se concentre exclusivement sur les besoins d’une organisation en
matière d’influence pour un sujet donné.
La phase de collecte
Dans un premier temps, le travail d’analyse se traduit par une vaste collecte
d’informations sur le sujet qui préoccupe l’entreprise. Ces informations sont
obtenues selon deux méthodes complémentaires : le renseignement de
sources ouvertes et le renseignement humain.
47
renseignement humain revêt également des formes très spontanées qui
consistent à contacter des personnes que l’on connaît et qui sont
compétentes sur le sujet qui intéresse l’entreprise pour recueillir leur
analyse personnelle de la situation. Ces personnes peuvent être des
salariés de l’entreprise. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, cette
mine d’or d’informations est très peu exploitée par les entreprises. Les
consultants des cabinets d‘intelligence économique ont coutume de dire
qu’environ 70% des informations demandées par leurs clients sont
disponibles d’une manière ou d’une autre en interne chez ces clients
eux-mêmes.
Les informations collectées, même si l’on est en droit d’attendre qu’elles soient
pertinentes au regard des phénomènes d’opinion qui intéressent l’entreprise,
restent néanmoins des informations brutes. En l’état, elles n’ont qu’une valeur
relative. Dans nos sociétés de l’information, la difficulté ne réside en effet pas
tant dans l’accès à l’information que dans la capacité à en permettre une lecture
pertinente au regard des objectifs poursuivis. Le défi consiste donc, pour qui
veut offrir cette capacité à une organisation, à faire entrer cette dernière dans
une double démarche où l’intelligence synthétique répond à l’intelligence
analytique. L’information brute collectée dans un premier temps est donc
ensuite organisée et synthétisée selon des modèles qui permettront par la suite
de rendre cette information utilisable dans le cadre d’une démarche d’influence.
48
- sphère de l’expertise (intellectuels, scientifiques, « experts »
régulièrement sollicités par les médias, « vieux de la vieille », etc.)
Une fois ces acteurs identifiés, une fiche peut être réalisée sur chacun d’eux, et
synthétisant les informations relatives à leur identité, leur rôle, leur l’histoire,
leur position sur le sujet et son évolution dans le temps, leurs modes
d’influence, etc. :
- Les acteurs qui partagent le point de vue de l’entreprise sans pour autant
s’impliquer réellement pour défendre cette opinion. Ces acteurs
représentent pour l’entreprise des opportunités à exploiter.
49
- Enfin, les acteurs défavorables au point de vue de l’entreprise et
fortement mobilisés sur le sujet. Ces opposants représentent un réel
danger. Dans ce cas : s’il est possible de dialoguer avec eux, il faudra
les rencontrer en espérant être suffisamment convainquant pour parvenir
à lever tout ou partie des oppositions. Si leur posture est purement
idéologique, dialoguer sera peine perdue et il faudra cantonner autant
que faire se peut leur influence ou la mettre en balance en faisant
intervenir des alliés.
La phase de diffusion
Dès lors que les informations collectées ont été analysées et mises en
perspective à travers les méthodes que nous avons décrites, il est nécessaire
d’aider les publics de l’entreprise à appréhender et comprendre le jeu
d’influence ainsi analysé.
Ainsi, il est utile de livrer aux décideurs les six graphiques d’environnement
(sous la forme la plus ergonomique possible afin d’en faciliter la lecture).
Un deuxième mode de cartographie des acteurs peut être mis en place : une
carte géographique. Si son utilité est moindre en termes de conception de la
stratégie, elle est néanmoins appréciée des publics internes car elle donne aux
acteurs une réalité à travers leur ancrage géographique (il est par ailleurs très
important d’y faire figurer systématiquement les photos ou les logos des parties
50
prenantes). Dans le cadre de projets internationaux, la carte géographique
permet également de présenter une typologie de l’état de l’opinion par zones
géographiques.
La phase de surveillance
Dès lors qu’un tableau de bord est mis en place, il est nécessaire de suivre
attentivement l’évolution de l’environnement ainsi cartographié. Une veille doit
être mise en œuvre. Fondée sur les mêmes principes que la phase de collecte
– renseignement de sources ouvertes et renseignement humain – elle peut faire
appel en complément à des outils de veille automatisés : alertes automatiques
de moteurs de recherches, agrégateurs de flux RSS, outils de crawling
spécialisés, etc.
51
recueillies. Cela se traduit dans la pratique par une mise à jour du tableau de
bord qui devient un outil évolutif, ainsi que par la rédaction d’un rapport de veille
mensuel, trimestriel ou semestriel en fonction de l’intensité de la problématique.
52
Prendre le risque à bras le corps
53
exclusivement axée sur les produits, la communication dite corporate étant
l’apanage d’un dirigeant lui-même pétri de cette culture technologique.
Chez les managers, cette politique de l’autruche peut se traduire par divers
comportements allant de la feinte de l’ignorance du risque au dénigrement des
médias, en passant par la relativisation du risque.
C’est la raison pour laquelle les entreprises ont tendance à réagir très tard au
risque d’opinion, en cherchant à se « barricader » derrière un discours défensif.
Or s’il est certain que, face à un risque d’opinion, un discours réactif est
nécessaire, cela ne suffit pas. La capacité de l’entreprise à faire face à un sujet
de société appelle au contraire le management à se préparer, à comprendre ce
que l’activité de l’entreprise apporte à la société, à entrer dans une démarche
proactive. En effet, se préparer à subir les coups est une chose, mais une
54
démarche crédible vis-à-vis de la société civile consiste d’abord à prendre les
devants.
55
l’on n’a pas intégré le fait que la mort de cette personne est irréversible
et qu’il faudra nécessairement continuer à vivre sans elle, on n’est pas à
même de repartir de l’avant. Ce travail prend du temps. Toutes
proportions gardées, le travail d’acceptation du risque par le
management fonctionne de manière similaire : une fois éclairé sur le
risque et les conséquences prévisibles de son accomplissement, chacun
doit en prendre acte pour pouvoir se mobiliser.
Pour réaliser cette sensibilisation interne, on peut par exemple faire le choix
d’organiser des réunions par petits groupes, au sein de chaque service, afin
d’exposer en une vingtaine de minutes la nature du risque, ses conséquences
possibles, la position de l’entreprise et la manière dont elle compte traiter ce
risque. L’idéal est que ces réunions se terminent par une discussion ouverte :
questions-réponses, débat, idées, etc.
Cet effort auprès des publics internes permet une prise de conscience rapide
du risque et une mobilisation progressive de la part des différents services.
L’attitude des publics internes vis-à-vis du risque d’opinion identifié peut être
représenté synthétiquement grâce au tableau suivant.
56
PERCEPTION DU RISQUE ATTITUDE CONSTATEE
Une fois le risque d’opinion identifié, mis en perspective et partagé avec les
publics internes, se pose la question de la réaction à apporter. Peu à l’aise avec
le sujet, les entreprises ont tendances à vouloir se doter d’argumentaires en cas
de nécessité, mais pour entrer dans une démarche proactive, nous l’avons vu, il
leur faut franchir un pas culturel important, s’aventurer sur un terrain mal connu.
On le sait, le changement et l’inconnu font peur. Il faut néanmoins accompagner
57
les entreprises dans cette démarche, sous peine de les laisser dans un état de
vulnérabilité vis-à-vis des phénomènes d’opinion.
58
LEVIERS D’ACTION POUR L’ENTREPRISE
Dès lors qu’une entreprise a pris conscience de l’enjeu des risques d’opinion
pour son activité et qu’elle a pris les moyens de comprendre et de surveiller son
environnement stratégique afin d’anticiper ces risques, peut-elle agir sur cet
environnement pour défendre sa vision des choses et ses intérêts ?
Dans nos démocraties d’influence, telles que nous les avons étudiées
précédemment, l’influence est pratiquée par les différents acteurs du débat
démocratique selon trois modèles dominants : le modèle lobby, le modèle ONG
et le modèle think tank.
Cette distinction a ses limites puisque ces modèles ne sont pas parfaitement
exclusifs les uns des autres. Il est d’ailleurs parfois difficile de déterminer
clairement auquel de ces modèles appartient une organisation d’influence
donnée. Néanmoins, cette classification a le mérite d’identifier les grandes
logiques à l’œuvre dans les démarches d’influence.
Le modèle lobby
Le lobby agit sur le terrain des intérêts économiques. La raison d’être d’un
lobby est d’agir sur les processus de décisions publiques pour les stopper, les
infléchir, les faciliter, voire les susciter. Le but visé par le lobby est d’assurer un
59
contexte législatif et réglementaire favorable pour l’activité des organisations
qu’il représente.
Pour cela, les lobbyistes connaissent les finesses des processus de décision
politique dans leur dimension officielle mais également dans leur aspect
de batailles de couloirs. Ils maîtrisent les usages et les codes propres aux
univers ministériel et parlementaire. Concrètement, cette activité peut prendre
des formes aussi diverses que des déjeuners informels, des réunions de travail,
des auditions dans le cadre de consultations officielles, ou même la rédaction
d’amendements pour le compte d’un parlementaire. A ce sujet, une technique
permet de repérer les amendements aux lois directement rédigés par des
lobbies et déposés tels quels par les députés : il s’agit d’identifier, parmi les
amendements déposés, les exposés des motifs identiques d'un député à
l'autre. C'est ce que s'est amusé à faire Samuel Le Goff, assistant d'un député
UMP, à propos de la loi sur les jeux en ligne25. Les résultats sont amusants. On
s'aperçoit par exemple que Charles de Courson (Nouveau Centre) a déposé
exactement le même amendement que des députés communistes sur l'article
50... L'exercice est intéressant pour décrypter le jeu d'un lobby auprès des
parlementaires sur un sujet donné.
25
LE GOFF Samuel, « Comment reconnaître un amendement venant d’un lobby »,
Blog : Les cuisines de l’assemblée, 2009, http://blogs.lexpress.fr/cuisines-
assemblee/2009/10/comment-reconnaitre-un-amendem.php)
60
grandes entreprises. Cette structure est inconnue du grand public et ses actions
sont d’une discrétion absolue. Son efficacité repose en partie sur cette
discrétion. La puissance économique que représente cette association (en
2005 : 1 000 milliards d'euros de capitalisation boursière, 1 100 milliards
d’euros de chiffre d'affaires et 4,8 millions d'emplois en France) suffit à donner à
ce lobby pour peser sur les décisions politiques.
Le modèle ONG
1) Les victimes :
Sur le terrain, l’ONG aide des personnes dans le besoin (SDF, victimes
d’accidents de la route, populations pauvres, enfants hospitalisés,
handicapés, orphelins, victimes de catastrophes naturelles…)
2) Les médias :
Très développés dans le monde anglo-saxon, les thinks tanks agissent avant
tout sur le terrain des idées. Leur légitimité est fondée sur leur expertise.
L’activité principale de ces organisations est la recherche, cependant elles sont
vouées à l’influence. Le but des recherches réalisées par un think tank n’est
pas de faire progresser le savoir dans une logique de gratuité, mais bien de
parvenir à orienter des décisions publiques en leur apportant des fondements
scientifiques.
62
2) Proposer une solution « clé en main » s’appuyant sur cette analyse.
Pour être efficace, un think tank doit donc allier une grande expertise
théorique à une forte créativité en termes de mesures politiques, mais aussi
beaucoup d’humilité pour que le décideur politique n’ait pas l’impression
qu’on lui force la main mais qu’au contraire on lui rend service. En outre, la
modestie du think tank permet au politique, souvent guidé par son ambition
et son amour-propre, de s’attribuer les mérites de la mesure préconisée.
Tout d’abord, il paraît difficile pour une entreprise de jouer à elle seule un
rôle de lobby. A moins que son poids économique soit immense et que ses
intérêts ne convergent invariablement avec ceux de l’Etat – et que cet état
de fait ne soit pas remis en cause dans l’opinion – l’entreprise ne peut
prétendre exercer une influence durable sur les processus législatifs et
réglementaire. Quelques très grandes entreprises échappent à la règle :
dans les pays de l’Union Européenne, il est évident qu’une entreprise
comme EADS (leader européen de l’aéronautique, de la défense et de
l’aérospatiale) représente à elle seule un tel enjeu stratégique pour l’Europe
qu’elle travaille souvent de concert avec les gouvernements. Le travail
d’influence réalisé par l’entreprise s’apparente en conséquence à celui d’un
lobby. Mais ce cas reste une exception. La plupart des entreprises ne
représentent pas des enjeux politiques et stratégiques aussi cruciaux et ne
peuvent donc prétendre au statut de lobby.
63
sincères et nobles soient-elles – ne viendra que nourrir une logique
première de rentabilité. L’entreprise est d’abord une recherche de profit,
même si elle a des valeurs, là où l’ONG fonde avant tout son action sur des
valeurs, même si elle est rentable (et parfois très rentable).
Enfin, l’entreprise ne peut pas être considérée comme un think tank. Les
recherches menées par les think tanks ont une dimension
fondamentalement politique. Le think tank peut porter la cause d’un secteur
d’activité ou d’une profession, mais l’entreprise en soit ne dispose pas des
compétences politiques du think tank. La crédibilité des propositions faites
par un think tank reposent sur l’expertise développée par ce dernier. Une
entreprise peu être experte d’un domaine, mais sa dimension économique
rend caduque l’accès au statut d’expert : on ne peut être juge et partie.
Conquérir la confiance
Nous l’avons vu, l’entreprise doit être en mesure d’explorer et d’analyser les
interactions entre les acteurs d’un jeu d’influence dont la complexité peut
dépendre à la fois de la nature du sujet concerné et de la multiplicité des
acteurs en présence.
26
BEAUDOIN Jean-Pierre, L’opinion, c’est combien ?, Village mondial, 2005, p.175.
66
- ses publics internes,
- éventuellement certains adversaires (si leur position n’est pas crispée sur
des préjugés idéologiques interdisant tout dialogue),
Il est important ici de ne pas chercher à aller trop vite. L’erreur consisterait à
vouloir donner une dimension médiatique à la démarche d’influence de
l’entreprise sans avoir pris soin auparavant de se constituer un capital
confiance auprès d’acteurs clés qui seront à même de relayer ou de défendre
les prises de positions de l’entreprise.
Sur le sujet, le célèbre traité de Sun Tzu, l’Art de la Guerre, est particulièrement
instructif :
27
SUN TZU, L’art de la guerre, Presses Pocket, 1993, p.23.
67
L’influence : un processus
28
JULLIEN François, Les transformations silencieuses, Grasset et Fasquelle, 2009, p.17.
68
semestriel ou annuel, permet au management de visualiser cette évolution
continuelle et imperceptible dans l’instant, et de le faire adhérer à la démarche
d’influence.
69
- D’une part, même s’il est content de toucher de l’argent, l’allié peut être
vexé de se sentir traité comme un prestataire. Il peut en effet avoir la
désagréable sensation de devenir le mercenaire d’une cause plutôt que
de se battre pour ses convictions. Cette crainte s’exprime souvent, dans
les milieux militants, par le refus catégorique de financements autres que
ceux des membres adhérents, afin de garder une totale liberté d’action et
éviter de s’attacher un fil à la patte.
« Il y a relation lorsqu'il existe entre deux points une liaison qui permet la
communication, au même titre que l'on parle de relations ferroviaires, routières
ou aériennes. Les relations publiques ont à ce sens pour rôle d'assurer qu'il
existe une liaison en état d'acheminer toute information nécessaire entre
l'entreprise et ses publics: ainsi s'établit la communication. »29
70
En termes d’influence, les relations entre l’entreprise et ses alliés doivent
répondre à la même exigence : la relation doit être pérennisée. Toute
l’animation d’un réseau d’alliés doit reposer sur ce principe fondamental des
relations publiques.
29
BEAUDOIN Jean-Pierre, Relations publiques, l’état de l’art, Syntec-rp.com,
http://www.syntec-rp.com/docs/rubrique/9/SYNTEC%20ETAT%20DE%20L'ART.pdf,
p.6.
71
L’entreprise : coupable, victime ou héros
Les phénomènes d’opinion qui pèsent sur l’activité des entreprises ont souvent
une dimension passionnelle. Or, la démocratie d’influence jette le débat public
dans l’arène de l’immédiateté. Dans son récent ouvrage L’idée qui tue, le PDG
de TBWA / France, Nicolas Bordas, souligne ce point :
A ce titre, un affrontement récent entre un think tank et un lobby est tout à fait
éclairant. L’Institut Montaigne, think tank fondé en 2000 par Claude Bébéar, ne
semble en effet pas faire le poids face au lobby des éoliennes France Energie
Eolienne, qui est une branche du Syndicat des Energies Eoliennes.
En juillet 2008 l'Institut Montaigne avait publié une étude à charge contre
l'énergie éolienne31, inadaptée aux besoins énergétique de la France. Ce
30
BORDAS Nicolas, L’idée qui tue, Groupe Eyrolles, 2009, p.128.
31
http://www.institutmontaigne.org/medias/documents/amicus_eolien-bd.pdf
72
rapport n'a pas fait l'objet d'une couverture médiatique notable et a surtout été
connu par les prises de positions de ses opposants sur le web : les blogs, sites
et forums de l'écolosphère sont en effet très vite montés au créneau. Le lobby
éolien a pour sa part immédiatement produit un contre-argumentaire. On a le
sentiment que la vague verte actuelle verrouille encore tout débat, tant les
énergies renouvelables - d'ailleurs toutes mises dans le même panier - sont un
symbole visible de la politique écologique du gouvernement. Etant donné les
dernières percées électorales des écologistes, difficile en effet de ne pas surfer
sur la vague verte. Les anti-éolien sont donc condamnés à nager à contre-
courant. S'ils veulent être audibles, il leur faut dépasser un discours
exclusivement rationnel et accrocher l'opinion en émotionnalisant leurs
arguments. C'est de cette manière que les pétroliers, symboles de l’énergie
polluante s’il en est, ont mis un sévère coup d’arrêt au fabuleux destin des
agrocarburants : pas à travers des argumentaires infaillibles, mais avec un
slogan efficace : "les agrocarburants vont affamer la planète". Cet excellent
slogan a trois vertus fondamentales de la communication publicitaire :
Cette accroche est souvent complétée d’un très bref argumentaire, qui tient en
une seule phrase :
Dès lors, la messe est dite. En outre, la dimension subversive de l’idée lui
donne un air de révélation qui fait le bonheur des médias.
74
Ce procédé de manipulation qui part d’un fait vrai (l’inattention suscitée par une
conversation téléphonique) mais sur la base duquel la réalité est volontairement
déformée est appelée par les Américains la technique du « barbouillage ».
« Les faits sont interprétés de telle façon qu’ils entraînent leur auditeur dans un
courant sociologique irrésistible. D’une vérité habilement présentée, il faut
laisser le public tirer les conclusions évidentes, et il se trouve que l’énorme
majorité tire, en effet, les mêmes conséquences, créant ainsi un courant
d’opinion. Or, pour y arriver, il faut se fonder sur une vérité, exprimable en peu
de mots, et capable d’avoir une certaine durée dans la pensée collective. Dans
ces conditions, l’adversaire ne peut absolument pas remonter le courant, - ce
qu’il pourrait à la rigueur si le fondement était un mensonge, ou s’il fallait une
démonstration pour faire pénétrer cette vérité. Au contraire, l’adversaire acculé,
lui, à une démonstration, ne peut ainsi modifier les conséquences que l’individu
a tirées de la suggestion. »32
Il est donc extrêmement difficile d’enrayer le processus, d’autant que les porte-
parole des associations de sécurité routière sont souvent des personnes qui ont
perdu des proches dans un accident de la route. Leur discours émotionnel a
donc en lui-même une capacité de conviction très forte.
Le rapport de force qui oppose l’entreprise aux acteurs de la société civile est
donc asymétrique. Dans ce contexte, l’entreprise doit privilégier deux logiques
d’action : choisir elle-même le terrain de l’affrontement et gagner le jeu de rôle
médiatique.
32
ELLUL Jacques, Propagandes, Economica, 1990, p.69.
75
Choisir le terrain
Tout d’abord, l’entreprise doit prendre soin de livrer la bataille sur le bon terrain.
Si l’adversaire est à l’aise sur le terrain émotionnel, il faut tirer le débat vers le
terrain rationnel.
Discours idéologique
76
registre émotionnel, par sa capacité de fascination, inhibe en quelques sortes la
vigilance et l’esprit critique du public.
Dans une telle configuration, pour tirer le débat vers un discours rationnel, la
stratégie efficace pour les fabricants de kits mains-libres consiste à déminer le
terrain en dénonçant un débat passionnel parce qu’idéologique, tout en prenant
soin de ne pas remettre en cause la légitimité des associations de victimes.
Pour ce qui est des experts-partisans (ceux qui réclament l’interdiction du kit
mains-libres), la manœuvre consiste à leur opposer d’autres experts, d’autres
études, afin de montrer que ces experts-partisans n’incarnent pas à eux-seuls
le sérieux scientifique et que leur position ne fait pas l’unanimité. Cela permet
de mettre en lumière le parti-pris idéologique qui fonde leur démarche.
Car c’est bien dans la prise à partie de l’opinion que se joue cette bataille. C’est
ce que nous avons voulu modéliser à travers le schéma suivant.
77
78
***
Finalement, s’il est vrai que les entreprises semblent parfois désemparées face
à des mouvements d’opinion dont certains acteurs militants excellent à tirer les
ficelles, il apparaît néanmoins que cette difficulté relève avant tout d’une
barrière culturelle. Nous sommes pour notre part convaincu que ce pas peut
être franchi. Cela demande, il est vrai, un véritable effort de pédagogie de la
part des professionnels des relations publiques envers les dirigeants
d’entreprises.
79
CONCLUSION
La question que nous avons cherché à résoudre à travers notre travail était de
savoir si les évolutions de nos démocraties occidentales laissent encore aux
entreprises une marge de manœuvre suffisante pour faire entendre leur voix et
influencer les décisions publiques qui conditionnent leur activité.
Nous l’avons vu : les décideurs publics ne disposent pas de la mainmise sur les
médias que certains leur prêtent. Nous avons au contraire montré que le
politique est devenu un acteur parmi d'autres du débat public. S'il a ses
logiques de fonctionnement et ses codes propres, il n'est plus pour autant en
mesure d'exercer un pouvoir de nature verticale. En effet, l'émergence des
nouvelles technologies de l'information et de la communication a permis aux
différents acteurs de la société civile d'acquérir une puissance médiatique
suffisante pour jouer un rôle structurant dans le processus de décision politique,
de plus en plus soumis aux phénomènes d'opinion.
80
La question morale
- La vérité exige que tous les messages émis en vue d’influencer un public
présentent une vision exacte de la réalité. Dans les relations avec les
parties prenantes, le souci de vérité bâtit toujours la confiance. A ce titre,
on est en droit de considérer que la valeur de toute communication
repose sur sa vérité. Il serait bien-sûr idéaliste de croire pouvoir faire
l’économie d’une lecture subjective de la réalité. Il faut donc, à défaut de
dire toute la vérité, s’astreindre à toujours dire la vérité et rien que la
vérité.
33
Auteur de nombreux livres et articles sur la communication, Thierry Libaert est
enseignant en sciences de l'information et de la communication.
81
l’intention doit être droite, les techniques mises en œuvre doivent être
justes, et les conséquences de l’action doivent être saines.
Le souci d’agir en cohérence avec ces trois principes nous paraît propre à
guider le professionnel de l’influence dans sa pratique.
Les Américains ont coutume de dire que « l’éthique paye ». Cela est
particulièrement vrai dans la pratique de l’influence. En effet, comme nous
l’avons montré, l’influence repose sur la capacité à construire de la confiance.
Or, sans un réel souci de loyauté, cette confiance ne peut être durable.
82
BIBLIOGRAPHIE
83
MOSCOVICI Serge, L’Âge des foules, Fayard, 1981.
84
ANNEXES
85
Annexe 1
86
Annexe 2
PHASE PREPARATOIRE
5) Définir le discours :
- Message clé
- Q&A
- Catégories sémantiques
87
PHASE D’ANCRAGE
PHASE D’AUTORITE
88