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LE STATUT BIOLOGIQUE DE L'EMBRYON HUMAIN

La question du statut de l'embryon humain représente la clef pour établir sur une base
objective et rationnelle les lois qui concernent la protection de cet embryon.

Nous examinerons cette question en voyant successivement :


- les critères biologiques qui permettent de parler d'"être humain";
- la réalité biologique du produit de la conception et la contestation de l'individualité de l'embryon
des premiers jours;
- le statut anthropologique de l'embryon humain, et la contestation du caractère "humain" de
l'embryon des premiers jours.

Document transmis par Mgr J. Suaudeau


Pontificia Academia Pro Vita

le 7. I. 2009

Édition numérique par salettensis@gmail.com

Disponible à
http://www.scribd.com/doc/37846112/Statut-Biologique-Embryon-Humain

On consultera le dossier spécifique


http://www.genethique.org/doss_theme/dossiers/embryon/acc_embryon.asp

Du site de référence http://www.genethique.org/


TABLE DES MATIÈRES

I Les critères biologiques de la définition d'« individu humain »........................................................................................3


A. Les critères définissant l’être vivant..................................................................................................................3
B. Les critères de l'individualité.............................................................................................................................3

II La réalité biologique du produit de la conception.............................................................................................................5


A. Les gamètes et la fécondation............................................................................................................................5
1) La gamétogénèse – 2) La Fécondation
B. Le zygote............................................................................................................................................................7
1) L'organisation du nouveau génome – 2) Le premier processus mitotique aboutissant à l'embryon à
deux cellules – 3) Le zygote :: une nouvelle entité biologique individuelle
C. du zygote au blastocyte....................................................................................................................................14
1) L'activation des gènes de l'embryon préimplantatoire et la transition maternelle-zygotique, MZT... –
2) Les divisions de segmentation –3) La compaction –4) La polarisation – 5) Le stade morula – 6) La
formation du blastocyste
D. Du blastocyte au disque embryonnaire :: la seconde semaine.........................................................................20
1) L'implantation dans la muqueuse utérine – 2) La formation du disque embryonnaire
E. La troisième :semaine et la gastrulation...........................................................................................................22
F. de l'embryon au fœtus.......................................................................................................................................23
G. Le contrôle du processus épigénique...............................................................................................................23
H. Caractéristiques du processus..........................................................................................................................24
1) La coordination – 2) La continuité – 3) La gradualité
E. Les critères d'individualité du premier embryon.............................................................................................25
1) L' "Autonomie" du Premier Embryon – 2) Le zygote se trouve au début du cycle vital de l'individu
G. Conclusion.......................................................................................................................................................26

III La contestation de l'individualité de l'embryon précoce................................................................................................28


A. La nécessité de l'implantation (nidation).........................................................................................................28
B. L'argument de la ligne primitive......................................................................................................................29
C. L'argument de la totipotence cellulaire............................................................................................................29
1) La totipotence des premiers blastomères et la gemellarité monozygotique............. – 2) Le processus
d'hybridation et la création de chimères
D. L'argument du début de la vie cérébrale..........................................................................................................32

Conclusion..........................................................................................................................................................................33

2
I
LES CRITÈRES BIOLOGIQUES DE LA DÉFINITION D'« INDIVIDU HUMAIN »

Il faut distinguer les critères qui permettent de parler d'"être vivant", en général, et les
critères qui spécifient la nature individuelle de cet être vivant.

A. Les critères définissant l’être vivant

Trois critères définissent l'être vivant : le projet (ou finalité), l'autonomie et la capacité
d'auto-reproduction.

1) Le projet ou "finalité"

La première qualité que doit posséder un "objet" pour être reconnu comme "vivant" est
d'être doté d'un "projet"1, c'est-à-dire d'un programme, inscrit dans sa propre structure, et capable
d'accomplir ce qu'il propose. C'est ce que l'on appelle la "finalité" des êtres vivants.

2) L'autonomie

La seconde qualité des êtres vivants qui les distingue des artefacts qu'ils produisent (ceux-ci
aussi possèdent une finalité) est leur autonomie : la structure d'un être vivant ne doit rien ou
presque rien aux forces qui lui sont extérieures, mais est déterminée, jusqu'aux plus petits détails,
par un déterminisme autonome, précis, rigoureux. L'être vivant possède ainsi une "liberté" presque
totale face aux agents et conditions extérieures. Ces conditions peuvent, certes, empêcher son
développement, mais ne peuvent pas le diriger ou lui imposer son organisation.

3) La capacité d'autoreproduction

La troisième qualité qui définit un être vivant par rapport à un artefact ou à un objet naturel
non vivant est sa capacité d'autoreproduction invariable. Les êtres vivants peuvent reproduire et
transmettre ne varietur l'information correspondant à leur propre structure.

B. Les critères de l'individualité

Ces qualités de finalité, autonomie, auto-reproduction ne permettent cependant pas de dire si


cet être est une cellule, un tissu, ou un être individué. Il faut leur ajouter la notion d'individualité,
d'organisme et de cycle vital.

1) L'individualité

L'individualité est l'unité intrinsèque qui caractérise tout être vivant et qui résulte de la
relation mutuelle entre le tout de cet être et ses parties. L'individualité se définit par l'indivisibilité et

1 Jacques Monod, Le hasard et la nécessité, essai sur la philosophie naturelle de la biologie moderne, Editions du Seuil,
Paris, 1970, p. 22.

3
la séparabilité selon la définition médiévale : «Individuum est indivisum in se, sed est divisum a
quolibet alio »2. Est individu celui qui ne peut être divisé sans que cela n'entraîne sa perte et qui se
trouve séparé (ou séparable) de tout autre. Cependant, ces notions d'indivisibilité et de séparabilité
sont relatives : en sens strict, seule la cellule isolée est véritablement indivisible; et un être vivant se
trouve toujours dans un état d'échange de matériel et d'énergie avec son environnement.

2) L'organisme

La notion d'organisme précise indivisibilité et séparabilité 3. L'individualité de l'être vivant


suppose en effet son existence sous la forme d'un organisme, c'est à dire de cette unité biologique
de structure, fonction et reproduction qui constitue et caractérise cet être vivant tout au long de sa
vie4. Cependant, l'organisme d'un être vivant n'est pas quelque chose de statique : l'être vivant
demeure identique à lui-même parce qu'il s'auto-constitue et se réalise continuellement, maintenant
la même forme grâce à la substitution continuelle de la matière qui le constitue.

Une notion importante à préciser en ce qui concerne l'organisme des êtres vivants est celle
du "cycle vital"5. On entend par ce terme la description ordonnée des variations morphologiques et
fonctionnelles qui se produisent au cours de la vie d'un organisme selon un programme intrinsèque
(c'est à dire de façon non accidentelle). Il serait erroné de ne considérer l'organisme d'un être vivant
qu'à partir des caractéristiques de l'individu adulte. Ceci est très clair, par exemple, lorsqu'on étudie
les insectes et leurs transformations successives, depuis l’œuf jusqu'au papillon en passant par le ver
et la chrysalide. L'organisme qui se trouve au début du cycle forme la base de l'unité de tout être
vivant pour toute sa vie et ne peut donc, de ce fait, être exclu du cadre de l'existence de cet être.

3) L'autocontrôle

Le critère ultime qui permet de parler d'un individu devant une unité biologique est celui
d'une existence capable d'autocontrôle6. Si ce critère n'est pas satisfait - comme dans le cas des
cellules somatiques ou des tissus - les entités biologiques ne peuvent être considérées comme des
individus7.
2 L. -M. Morfaux, Vocabulaire de la philosophie et des sciences humaines, Armand Colin,Paris, 1980, p. 167.
3 Definition de Morfaux : "Individu biologique : être vivant indivisible circonscrit dans l'espace, doué d'une unité
intérieure et d'une solidarité fonctionnelle entre ses parties constituantes (organisme), et jouissant d'une relative autonomie
par rapport au milieu ambiant. "
. L. -M. Morfaux, Vocabulaire de la philosophie et des sciences humaines, Armand Colin,Paris, 1980, p. 167.
4 A. Serra, R. colombo, Identità e statuto dell'embrione umano : il contributo della biologia, in «Identità e statuto
dell'embrione umano», Pontificia Academia Pro Vita, Librertia Editrice Vaticana, Città del Vaticano, 1998, pp. 110-112.
5 A. Serra, R. colombo, Identità e statuto dell'embrione umano : il contributo della biologia, in «Identità e statuto
dell'embrione umano», Pontificia Academia Pro Vita, Libreria Editrice Vaticana, Città del Vaticano, 1998, pp. 112-114.
6 Ph. Caspar, Pour un principe d'individuation des êtres vivants, Revue des Questions Scientifiques, 1984, 155 : 423-434,
p. 425.
7 En résumé, on peut parler d'un être vivant, individu biologique, lorsque l'on trouve réunies en lui les qualités suivantes :
. la finalité, c'est à dire le projet de cet être, son dynamisme intrinsèque orienté;
. l'autonomie, c'est-à-dire l'indépendance par rapport aux influences extérieures à lui pour le maintient de sa structure;
. la capacité d'autoreproduction;
. l'individualité (non-divisibilité, séparabilité);
. l'existence sous forme d'un organisme, unité biologique de structure, fonction et reproduction qui constitue et caractérise
cet être tout au long de sa vie;
. l'auto-contrôle, dans la réalisation de son projet-programme.
. le parcours d'un cycle vital, depuis le début de son existence jusqu'à sa mort, passant à travers divers aspects
morphologiques avant d'arriver à la forme pleinement développée de l'adulte;
. l'appartenance à une espèce bien définie, reconnaissable en particulier à la spécificité du génome.

Si une de ces qualités vient à manquer, on ne peut parler d'individu biologique. On parlera par exemple :

4
II
LA RÉALITÉ BIOLOGIQUE DU PRODUIT DE LA CONCEPTION

Tenant compte de ces six qualités de tout être biologique individuel, nous pouvons
maintenant étudier l'embryon humain en vue de répondre à cette question : sommes-nous en
présence d'un simple amas de cellules, d'une vie humaine indéterminée, d'un etre humain
"potentiel", ou bien sommes nous devant un être biologique individuel qui commence à parcourir
les premières étapes de son développement ? Nous allons étudier les trois périodes suivantes de ce
développement :
- du zygote au blastocyste (0-5jours);
- du blastocyste au disque embryonnaire (seconde semaine);
- du disque embryonnaire au fœtus (de le 3 à la 8semaine).

A. Les gamètes et la fécondation

La "conception" d'un individu humain est le point final d'un processus complexe dit
"processus de fécondation", dans lequel les deux cellules germinales ou "gamètes", féminine et
masculine, ovocyte et spermatozoïde, s'unissent pour donner naissance à un nouvel organisme, le
zygote, ou embryon primitif, unicellulaire.

Pour accomplir ce processus, les "gonocytes", cellules germinales mâle et femelle, subissent
un certain nombre de modifications, qui concernent leurs chromosomes et leur cytoplasme, pour
devenir "gamètes", c'est-à-dire cellules germinales en état d'accomplir le processus de fécondation.

1) La gamétogénèse8

Les modifications chromosomiques se font au cours des divisions méiotiques ou divisions de


maturation9.
- d'un artefact lorsqu'il n'y a pas autonomie;
- d'un cristal lorsqu'il n'y a ni dynamisme ni projet ;
- d'une masse de cellules, lorsque manque l'intégration dynamique dans un organisme, et l'auto-contrôle;
- d'un tissu lorsque manque l'autonomie, l'individualité, et l'auto-contrôle;
- d'une tumeur lorsque manque l'auto-contrôle;
- d'un organe lorsque manquent en partie autonomie et auto-contrôle;
- d'un virus lorsque manque l'auto-reproduction; cele-ci dépend en effet dans le cas du virus du parasitage d'une cellule par
ce virus, qui n'est donc pas pleinement autonome.

A partir de ces critères il est possible de juger du statut biologique de l'embryon humain, simple masse de cellules, tissu,
tumeur, organe ou être vivant humain au début de son cycle vital.
8 J. Fulka, J. Motlik, B. Lefèvre, Les cellules sexuelles, La Recherche, vol. 20, n°213, Septembre 1989, pp. 1021-1030.
9 Deux divisions méiotiques se succèdent :
. Pendant la première division méiotique, il y a réplication de l'ADN comme dans une mitose normale, mais les
chromosomes homologues, assemblés par paire, échangent leur matériel génétique en se croisant ( enjambement ou cross
over). Puis la séparation se poursuit et les membres de chaque paire migrent vers les pôles opposés. Il en résulte deux
cellules filles ayant chacune 23 chromosomes dédoublés, avec un capital d'ADN égal à celui de la cellule somatique
normale.
. au cours de la deuxième division méiotique, il n'y a pas de réplication de l'ADN, si bien que chaque cellule qui en résulte
est pourvue d'un nombre haploïde de chromosomes et d'un capital d'ADN réduit de moitié par rapport à la cellule
somatique normale. De la sorte, les gamètes mâle et femelle à maturité comportent 22+X ou 22+Y chromosomes.
. C'est au cours de la première division méiotique que peuvent se produire les anomalies chromosomiques numériques

5
Le nombre des chromosomes dans les cellules de l'organisme est de 46 chez l'homme (23
couples, dont 22 de chromosomes autosomaux et un couple de chromosomes sexuels, identiques
XX dans le sexe féminin, différents XY dans le sexe masculin)(les cellules somatiques sont dites
pour cette raison "diploïdes"). Il est réduit à 23 - la moitié - dans les gamètes qui sont des cellules
"haploïdes" (chaque chromosome ne se trouve dans le gamète qu'en un seul exemplaire). Il est en
effet nécessaire que la fusion entre gamètes mâles et gamètes féminins donne un embryon qui
possède le même nombre de chromosomes que ses parents et non le double.
Ainsi, chacune des deux cellules gamétiques, spermatozoïde et ovocyte, a en elle un
"patrimoine" bien défini, le programme génétique, ou "génome", inscrit dans 23 paires de
chromosomes. Chacune possède ainsi une moitié du patrimoine génétique respectivement aux
cellules somatiques de l'organisme du parent correspondant, et ce patrimoine correspond à une
information génétique qualitativement différente par rapport aux cellules somatiques de l'organisme
paternel et maternel.

2) La Fécondation10

Bien qu'à chaque cycle ovarien un certain nombre de follicules amorcent leur
développement, un seul parvient au stade de plein maturité et l'ovulation ne libère qu'un ovocyte.
Les autres dégénèrent et s'atrésient. Lors de la ponte, l'ovocyte est au stade de deuxième division
méiotique. Il est entouré de sa membrane pellucide et de quelques cellules de la granulosa qui se
disposent autour de la membrane pellucide pour former la corona radiata. Il est aspiré par les
franges tubaires et pénètre dans la trompe.
Sur les 200 à 300 millions de spermatozoïdes déposés dans les voies génitales de la femme,
300 à 500 seulement atteignent le lieu de la fécondation, c'est-à-dire l'ampoule de la trompe de
Fallope. Un seul de ces spermatozoïdes est nécessaire à la fécondation. La survie des
spermatozoïdes et de l'ovocyte non fécondé dans les voies génitales féminines est de 24 heures.

Au moment de leur pénétration dans le tractus génital féminin, les spermatozoïdes ne sont
pas capables de produire la fécondation. Ils doivent subir deux transformations : la capacitation et
la réaction acrosomique.
- le capacitation est un temps d'adaptation au tractus génital féminin. Elle dure environ sept
heures au cours desquelles la membrane plasmique qui recouvre la région de l'acrosome du
spermatozoïde se débarrasse de son revêtement glycoprotéique :
- la réaction acrosomique se produit après fixation sur la membrane pellucide de l'ovocyte.
Elle entraîne la libération de hyaluronidase et de substances à effet trypsino-mimétiques nécessaires
au franchissement des membranes ovulaires.

La fécondation s'effectue en trois phases :


- pénétration de la corona radiata de l'ovocyte par différents spermatozoïdes qui peuvent la
traverser une fois achevé le temps de "capacitation".
- adhésion des spermatozoïdes à la membrana pellucida de l'ovocyte, reconnaissance
spécifique de l'espèce entre les gamètes, activation des récepteurs pour les spermatozoïdes présents,

comme la trisomie 21 (Down's syndrome ou mongolisme) : il arrive en effet que la séparation ne se produise pas (non-
disjonction), les deux membres d'une paire de chromosomes homologues ne se séparant pas et se retrouvant dans la même
cellule : une cellule fille reçoit 22 chromosomes et l'autre 24. A la fécondation l'individu résultant aura 47 chromosomes
(trisomie) ou 45 chromosomes (monosomie). Un autre accident pouvant aussi survenir au cours des méioses est la
translocation : les chromosomes peuvent en effet se fracturer et le fragment rompu peut s'attacher sur un autre
chromosome. Parfois encore le fragment rompu reste libre. Il en résulte des trisomies ou des monosomies partielles comme
dans le syndrome du cri du chat où un fragment du chromosome 5 est manquant.
10 J. Tesarik, J. Testard, La Fécondation, La Recherche, vol. 20, n°213, Septembre 1989, pp. 1008-1019.
. P. M. Wassarman, The Biology and Chemistry of Fertilization, Science, vol. 235, n°4788, 30 january 1987, pp. 553-560.

6
et réaction acrosomiale dans le spermatozoïde qui lui permet de traverser la membrane.
- fusion des membranes cellulaires de l'ovocyte et du spermatozoïde. Le premier
spermatozoïde qui atteint l'étroit espace perivitellinique, situé entre la zona pellucida et la
membrane plasmatique de l'ovocyte voit sa membrane se fusionner avec celle-ci, ce qui aboutit
immédiatement à la syngamie, c'est-à-dire à l'englobement du spermatozoïde, tête et queue, dans
l'ovocyte, la membrane cellulaire étant abandonnée au-dehors de la surface de l'ovocyte.

La pénétration du spermatozoïde dans l'ovocyte déclenche immédiatement une chaîne


d'activité, qui indique que les deux gamètes ne fonctionnent plus comme des systèmes
indépendants, mais qu'il s'est constitué un nouveau système, qui agit comme une unité. Une cascade
d'événements se produit qui culmine dans le démarrage du développement embryonnaire :
1) réaction corticale, qui rend la membrane pellucide de l'ovocyte imperméable aux autres
spermatozoïdes, par inactivation des récepteurs spécifiques pour l'espèce de cette membrane et par
durcissement de celle-ci. Ceci empêche la polypenétration de l'ovocyte par différends
spermatozoïdes, et donc la polyspermie. De plus, le durcissement de la membrane isole et protège le
nouvel être qu'elle renferme et qui démarre alors son cycle vital.
2) Achèvement de la seconde division méiotique de l'ovocyte. Une des cellules filles reçoit
très peu de cytoplasme, c'est le deuxième globule polaire, l'autre est l'œuf définitif, qui contient le
spermatozoïde, et dont les chromosomes (22+X) se rangent dans un noyau d'aspect vésiculaire, le
pronucleus femelle.
3) Activation du métabolisme de l'œuf, qui déclenche les modifications cellulaires et
moléculaires contemporaines du début du développement embryonnaire.
4) Pendant ce temps Le spermatozoïde se rapproche du pronucleus femelle. Son noyau
grossit, formant le pronucleus mâle. Sa queue se détache et dégénère. Les deux pronucleus, qui
deviennent toujours plus semblables morphologiquement, se décondensent et se rapprochent l'un de
l'autre pour se fusionner, perdant leur membrane nucléaire. Il s'est formé une nouvelle cellule : le
zygote ou embryon unicellulaire.

Les conséquences de la fécondation sont :


1) la restauration d'un nombre diploïde de chromosomes, moitié provenant du père, moitié
provenant de la mère. Ainsi le zygote comporte une nouvelle combinaison chromosomique,
différente de celle de chacun de ses parents;
2) la détermination du sexe chromosomique du nouvel individu. Un spermatozoïde X
produira un embryon de sexe féminin (XX); un spermatozoïde Y produira un embryon de sexe
masculin (XY).
3) l'amorce de la segmentation.

B. Le zygote

La cellule, ou "zygote" qui se forme lors de la fécondation, et qui est ainsi "conçue"
(conception) comme résultat de l'union des gamètes est l'embryon unicellulaire (one-cell embryo). Il
s'agit d'une cellule d'un type nouveau, différente des gamètes maternel et paternel qui l'ont
constituée par leur union. En su interior se está produciendo la energía que corresponde a un
proceso biológico de una gran intensidad, lo que manifiesta a todas luces la vitalidad del cigoto.

Parmi les multiples activités :coordonnées qui se développent dans cette nouvelle cellule,
durant une période de 20 :à 25 heures, les deux plus importantes sont :
1) l'organisation du nouveau génome, qui représente le principal centre informatif pour le

7
développement du nouvel être humain et de toutes ses activités ultérieures
2) Le début du premier processus mitotique qui porte de l'embryon unicellulaire à l'embryon à deux
cellules (two-cell embryo)

1) L'organisation du nouveau génome

a) La reprogrammation épigénétique de l'ADN dans le zygote ::

Le zygote est unique au regard de toute autre cellule à cause du remodelage épigénétique
auquel est soumis son génome. On appelle "épigénétique" les changements qui interviennent dans la
fonction de certains gènes, et qui ne sont pas dus à une modification dans la séquence de l'ADN lui-
même11. Cette "reprogrammation" de l'ADN, au sein du zygote, va permettre aux gènes nécessaires
au développement de s'exprimer de la façon voulue, et en temps voulu au cours de ce
développement12. Ce remodelage affecte essentiellement l'état de méthylation de l'ADN 13. C'est la
11 Le terme "épigénétique" désigne les facteurs non génétiques (non liés à la séquence de l'ADN) qui influent sur le
phénotype. L'expression est couramment utilisée aujourd'hui en référence à ces changements qui interviennent dans la
fonction de certains gènes, qui sont héritables, et qui n'impliquent pas un changement dans la séquence de l'ADN. Quand
on parle de "reprogrammation épigénétique" du noyau on entend cette reprogrammation qui n'affecte pas la séquence de
l'ADN dans le noyau, mais la façon dont cet ADN se trouve plié par l'intervention de protéines spécifiques (les histones), et
l'état d'activité ou de mise au silence des différents gènes dans cet ADN. La régulation épigénétique est le mécanisme par
lequel la fonction génétique est ainsi sélectivement activée ou inactivée dans les cellules (M. Nakao).
. R. Holliday, The inheritance of epigenetic defects, Science, October 9 1987, vol. 238, n°4824, pp. 163-170.
. R. Holliday, Epigenetics : an overview, Developmental Genetics, 1994, vol. 15, n°6, pp. 453-457.
. C. T. Wu, J. R. Morris, Genes, Genetics, and Epigenetics : A Correspondence, Science, 10 August 2001, vol. 293,
n°5532, pp. 1103-1105.
12 Dans les cellules somatiques différenciées, le répertoire des gènes exprimés par une cellule donnée est limité. Cette
limitation est liée aux mécanismes régulateurs épigénétiques qui maintiennent au silence certains gènes par l'assemblage de
complexes nucléoprotéiques répressifs dans le noyau. Cela met en jeu l'assemblage de formes spécialisées de chromatine
répressive, en particulier linker histones, protéines du groupe Polycomb, et methyl-Cpg-binding proteins. Ces structures
compartimentent la chromatine en un certains nombre de domaines fonctionnels et maintiennent la stabilité des différents
états au travers des divisions cellulaires. Les modifications épigénétiques qui portent à la reprogrammation du génome
consistent en des changement de la méthylation dans le génome, l'assemblage d'histones et de variantes d'histones dans les
nucléosomes (les histones sont ces protéines qui sont responsables du pliage des molécules d'ADN et de l'empaquetage des
nucléosomes ainsi formés), et le remodelage d'autre protéines associées à la chromatine comme les linker histones, les
protéines du groupe polycomb, les nuclear ascaffold proteins, et les facteurs de transcription.
. W. M. Rideout III, K. Eggan, R. Jaenisch, Nuclear Cloning and Epigenetic Reprogramming of the Genome, Science, 10
August 2001, vol. 293, n°5532, pp. 1093-1098. See p. 1093.
. M. Nakao, Epigenetics : interaction of DNA methylation and chromatin, Gene, 31 October 2001, vol. 278, n°1-2, pp. 25-
31. .
13 La méthylation de l'ADN est une des modifications épigénétiques de l'ADN les mieux étudiées dans les organismes
unicellulaire et pluricellulaires (W. Reik, W. Dean, 201) Chez les mammifères et autres vertébrés, la méthylation se
rencontre principalement au niveau des cytosines, dans les dinucléotides symétriques CpgS (Y. Gruenbaum et al. , 1981).
Environ 50 à 80% des CpGs dans le génome des mammifères adultes sont méthylés (A. Razin et al. , 1984). La
méthylation de l'ADN est associée avec des changements dans la structure de la chromatine et la mise au silence du gène
correspondant (S. Eden et al. , 1998, P. L. Jones et al. , 1998). Le type de méthylation d'ADN ainsi fixé est rigoureusement
conservé dans les tissus normaux (S. Kochanek et al. , 1990, A. Behn-Krappa et al. , 1991). Cet état de méthylation de
l'ADN se maintient dans les cellules somatiques lors de la réplication de l'ADN et la division cellulaire. La découverte de
la DNA méthyltransférase (T. H. Bestor, 2000) a permis de mieux comprendre comment des types spécifiques de
méthylation imposés au génome à des moments particulier du développement, dans les cellules précurseurs (souches)
peuvent se maintenir dans les descendants de ces cellules. Les motifs de méthylation de l'ADN dans les cellules
somatiques différenciées sont pour cette raison généralement stables et héritables (W. Dean et al. , 2001). C'est ce qui
explique que les motifs assurant la différentiation cellulaire puissent se maintenir dans les différentes populations de
cellules spécialisées. . W. M. Rideout III, K. Eggan, R. Jaenisch, Nuclear Cloning and Epigenetic Reprogramming of the
Genome, Science, 10 August 2001, vol. 293, n°5532, pp. 1093-1098. See p. 1093.
. W. Reik, W. Dean, DNA methylation and mammalian epigenetics, Electrophoresis, August 2001, vol. 22, n°14, pp. 2838-
2843.
. Y. Gruenbaum, R. Stein, H. Cedar, A. W. Thorne, Methylation of CpG sequences in eukaryotic DNA, FEBS Letters,

8
déméthylation de l'ADN suivie de de novo reméthylation qui rend un gène actif ou le met au
silence. Un gène hyperméthylé est a priori silencieux, un gène hypométhylé s'exprime.
Le cycle de reprogrammation qui affecte l'embryon pré-implantatoire se caractérise par une
déméthylation active du génome paternel dans le zygote14, suivie d'une déméthylation passive des
allèles venus de l'ovocyte maternel, durant les premières étapes de division de cet embryon, et d'une
de novo méthylation aux environs du temps de l'implantation ou immédiatement après
l'implantation 15. La déméthylation "efface" les motifs de méthylation spécifiques des gamètes,
hérités des parents. Ce processus pourrait être une pré-condition pour la formation des cellules
souches pluripotentes qui sont importantes pour le développement ultérieur (Y-K. Kang, 2001) 16. Il
est aussi lié au phénomène des empreintes parentales où une des deux copies de certains gènes se
trouve mise au silence, en fonction de son origine, paternelle ou maternelle. Il aurait un rôle
important dans le contrôle de l'expression des gènes au début du développement17. La suppression
de ce processus de déméthylation-reméthylation de l'ADN, par exemple par des mutations affectant
les gènes responsables des methyltransferases, aboutissent, chez la souris, à la mort de l'embryon
après implantation18.

February 9 1981, vol. 124, n°1, pp. 67-71.


. A. Razin, H. Cedar, DNA methylation in eukaryotic cells, International Review of Cytology, 1984, vol. 92, pp. 159-185.
. S. Eden, T. Hashimshony, J. Keshet, H. Cedar, A. W. Thorne, DNA methylation models histone acetylation, Nature, 27
August 1998, vol. 394, n°6696, p. 842.
. P. L. Jones, G. J. Veenstra, P. A. Wade, D. Vermaak, S. U. Kass, N. Landsberger, J. Strouboulis, A. P. Wolffe, Methylated
DNA and MeCP2 recruit histone deacetylase to repress transcription, Nature Genetics, June 1998, vol. 19, n°2, pp. 187-
191.
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17 M. Monk, M. Boulebik, S. Lehnert, Temporal and regional changes in DNA methylation in the embryonic,
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9
Ce seraient les difficultés de la reprogrammation de l'ADN :dans le noyau transféré qui
expliqueraient en partie les échecs du clonage 19. La déméthylation de l'ADN y serait en particulier
inefficace, empêchant un développement normal de l'embryon20.

b) La mise en activité des premiers gènes du développement

La reprogrammation du génome dans le zygote s'accompagne de l'activation précoce de


différents gènes21 impliqués dans les premières phases du développement embryonnaire (zygotic
gene activation)22. La liste de ces gènes reconnus actifs au stade zygotique ne fait que s'allonger
avec l'amélioration des techniques d'investigation. On a ainsi mis en évidence dans le :zygote
humain l'activité des gènes suivants : SRY, ZFY, XIST, HPRT, APRT, GADPH, DK, GPI, MPK, α-
globine, OCT4, IGF-1R, IGF-2R, IGF-II, CSF-1, SCF, HLA-G, β-actin, CD59, SNRPN, UBE3A,
PEG1, HOXD8, HEX, HOXD1 et OCT1. C'est donc dès le stade zygote que le génome
embryonnaire commence à prendre en charge la direction du développement.
Au cours de ces dernières années, la constitution de cDNA libraries, c'est-à-dire de
collections de gènes repérés par leur activité, à partir d'embryons humains pré-implantatoires à 2-
cellules, 4-cellules et 8-cellules a permit de reconnaître un nombre toujours plus important de gènes
intervenant dans les stades très précoces du développement embryonnaire. C'est ainsi que l'on a
montré la présence à ces stades de gènes dits "homéotiques", c'est-à-dire de gènes qui renferment
une séquence d'acides aminés très particulière, appellée "homeobox" ou "homeodomaine", séquence
hautement conservée de 60 amino-acides, qui n'a pas changé au cours de l'évolution de la vie, et qui
est par conséquent commune à de nombreuses espèces dans le règne animal. Ces gènes
homéotiques codent pour des protéines-clés qui servent de facteurs de transcription pour de très
nombreux gènes. Ils jouent de ce fait un rôle important dans le controle et l'orientation du
développement : il s'agit des gènes HOX, HEX et OCT : HOXD8, HEX, HOXD1 et OCT123.
Ce catalogue de gènes en état d'activité dès les premièrs stades du développement de
l'embryon pré-implantatoire ne doit pas faire illusion : peu de chose est encore connu sur ce qui
détermine et contrôle ce début de la vie humaine. La recherche de gènes impliqués spécifiquement
dans ce contrôle n'a pour l'instant mis en évidence que peu de candidats. L'un de ces candidats,
OCT-4 24, code pour Oct-4, un membre de la famille des facteurs de transcription POU qui semble
19 Y-K. Kang, D-B. Koo, J-S. Park, Y-H. Choi, A-S. Chunk, K. -K. Lee, Y-M-Hahn, Aberrrant methylation of donor
genome in cloned bovine embryos, Nature Genetics, June 2001, vol. 28, n°2, pp. 173-177.
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20 W. Reik, W. Dean, J. Walter, Epigenetic Reprogramming in Mammalian Development, Science, 10 August 2001, vol.
294, n°5532, pp. 1089-1093. See p. 1091.
21 A. Serra, The human embryo : a disposable "mass of cell" or a "human being" ?, Medicina e Morale, Gennaio/Febbraio
2002, vol. LII, n°1, pp. 63-80. Voir p. 71.
22 R. M. Schultz, Regulation of zygotic gene activation in the mouse, Biœssays, August 1993, vol. 15, n°8, pp. 531-538.
23 J,Adjaye, M. Monk, Transcription of homeobox-containing genes detected in cDNA libraries derived from human
unfertilized oocytes and preimplantation embryos, Molecular Human Reproduction, August 2000, vol. 6, n°8, pp. 707-711.

24 Oct-4 est une protéine (octamer-binding protein) exprimée chez la mère et codée par le gène de la souris Oct-4. On la
trouve dans les ovocytes non fécondés, dans les cellules germinales primordiales de l'embryon pré-implantatoire et dans la
masse cellulaire interne du blastocyste. Le développement de l'embryon chez les mammifères est réglé par un certain
nombres de gènes régulateurs, dont certains agissent en contrôlant la transcription d'autres gènes. Ces gènes régulateurs
activent ou répriment des figures d'expression génique qui déterminent les changements phénotypiques observés lors de la
différentiation cellulaire. Plusieurs familles de tels gènes de contrôle du développement embryonnaire ont été identifiées.
La famille POU (Pit-Oct-Unc) est un groupe de facteurs de transcription de structure voisine, renfermant un type
particulier de domaine biparti liant l'ADN (bipartite DNA-binding domain). Les membres de cette famille présentent des

10
jouer un rôle important dans ces premières phases du développement. Son expression a été trouvée
dans l'embryon pré-implantatoire humain à tous les stades de son développement, commençant au
stade 2-cellules25. Oct4 joue un rôle essentiel dans le contrôle du développement de la pluripotence
cellulaire 26. La perturbation ciblée (targeted disruption) de Oct4 chez la souris entraîne la mort de
l'embryon par différentiation vers le trophectoderme des cellules qui auraient normalement du
donner naissance à la masse cellulaire interne du blastocyste (M. Pesce,2000) 27. Les embryons de
souris qui manquent du gène Oct4 se développent jusqu'au stade de blastocyste mais les cellules de
la masse interne n'y sont pas pluripotentes : elles sont réduites à se différencier en lignée
trophoblastique extraembryonnaire28. Ces embryons meurent après implantation (J. Nichols et al. ,
1998, A. Bortvin et al. , 2003)29.
Une partie des échecs du clonage, avec mort précoce des embryons implantés, pourrait être
modes d'expression particuliers durant le développement embryonnaire. Deux membres de cette famille POU, Oct-4 (aussi
connu comme Oct-3) et Oct-6, s'expriment très tôt dans l'embryon pré-implantatoire. En :contraste marqué avec ce qui se
passe pour d'autres gènes codant pour des homeodomain, Oct-4 est exprimé dans les cellules pluripotentes et totipotentes
de l'embryon pregastrulatoire. Oct-4 est le premier facteur de transcription décrit, à avoir été reconnu comme spécifique
pour les premiers stades du développement de l'embryon de souris. L'expresion d' Oct-4 commence au stade 4 à 8 cellules,
et se trouve par la suite restreinte aux cellules de la masse interne du blastocyste, puis à celles de l'épiblaste, qui sont les
cellules fondatrices de l'embryon proprement dit (Palmieri, 1994). Son expression est associée au développement du
phénotype cellulaire indifférencié (cellules souches embryonnaires pluripotentes) dans l'embryon précoce de souris. Elle
diminue d'ampleur lorsque ces cellules se différencient en endoderme et mésoderme, ce qui suggère que le rôle d'Oct-4
concerne de façon spécifique les premières étapes du développement de l'embryon. L'expression d'Oct-4 diminue à partir
du 8° jour suivant la fécondation et se limite alors aux cellules primordiales de la lignée germinale, commençant au jour 8.
5 (Yeom et al. ,1996).
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25 J. Adjaye, V. Bolton, M. Monk, Developmental expression of specific genes detected in high-quality cDNA libraries
from single human preimplantation embryos, Gene, 17 September 1999, vol. 237, n°2, pp. 373-383.
26 Le facteur de transcription Oct4 est très particulier car son expression semble définir quelle cellule doit devenir
totipotente. La totipotence se réfère à la capacité d'une portion d'un organisme de générer ou régénérer un organisme entier
nouveau. L'isolement de cellules souches pluripotentes embryonnaires à partir d'embryons de souris (M. J. Evans and M.
H. Kaufman, 1981) a donné un nouvel intérêt à cette question. Vue la capacité des cellules souches embryonnaires de
générer virtuellement tout type de cellule dans l'organisme, des efforts intenses ont été fournis pour mettre à profit le
potentiel réparateur de ces cellules. En dépit de l'intérêt considérable suscité par ces cellules souches, ce qui fait leur
totipotence et ce qui pousse ces cellules souches embryonnaires à se différencier en types cellulaires spécifiques reste peu
connu. Les travaux plus récents montrent qu' Oct4 est exprimé presque exclusivement dans les cellules souches
embryonnaires. L'expression d' Oct4 se restreint en effet au cours du développement aux cellules de la masse cellulaire

11
liée à un manque d'expression d'Oct-4 dans l'embryon issu de ce clonage30.

2) Le premier processus mitotique aboutissant à l'embryon à deux cellules

Inmediatamente después de su formación empeza en el cigoto el proceso fundamental que


llega a la reorganización del genoma, a su autoduplicación, y a su nueva distribución, ordenada en
dos células idénticas o "blastómeros", que tienen el mismo material genético.
Trois à six heures après l'incorporation du spermatozoïde commencent à s'organiser, à partir
du centrosome paternel (près de la base de la tête du spermatozoïde) des microtubules qui se
disposent en éventail. Vers la 15 heure suivant la fusion, le centrosome se divise et, à partir des

interne du blastocyste. Une atteinte ciblée (targeted disruption) d' Oct4 chez la souris a produit des embryons sans masse
cellulaire interne, ce qui montre qu' Oct4 est nécessaire à l'acquisition et au maintien de la pluripotence. Les cellules
souches qui ont un niveau d'activité normal d'Oct4 demeurent pluripotentes. Le niveau d' Oct4 dans les cellules souches
commande trois types de devenir pour ces cellules : une augmentation d'expression inférieure à deux fois sa valeur entraîne
une différentiation en endoderme primitif et mésoderme. La répresion d'Oct4 amène la pete de la pluripotence et la
dédifférentiation en trophectoderme (H. Niwa, 2000). Oct4 apparaît donc comme un maître régulateur de la pluripotence
qui contrôle l'affectation des lignées cellulaires.
. J. Nichols, B. Zevnik, K. Anastassiadis, H. Niwa, D. Klewe-Nebenius, I. Chambers, H. Scholer, A. Smith, Formation of
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27 M. Pesce, H. R. Schöler, Oct-4 : control of totipotency and germline determination, Molecular Reproduction and
Development, April 2000, vol. 55, n°4, pp. 452-457.
28 M. Pesce, H. ,R. Schöler, Oct-4 : Gatekeeper in the Beginings of Mammalian Development, Stem Cells, 2001, vol. 19,
n°4, pp. 271-278.
29 J. Nichols, B. Zevnik, K. Anastassiadis, H. Niwa, D. Klewe-Nebenius, I. Chambers, H. Schöler, A. Smith, Formation of
pluripotent stem cells in the mammalian embryo depends on the POU transcription factor Oct4, Cell, 30 October 1998,
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reactivation of OCt4-related genes in mouse embryos cloned from somatic nuclei, Development, 15 April 2003, vol. 130,
n°8, pp. 1673-1680.
30 M. Munsie et collaborateurs (2002) ont examiné la réactivation des gènes reporter LacZ dans des embryons de souris
issus du transfer de noyau de cellules adultes cumulus transgéniques. Ils ont trouvé que l'expression de ces gènes, qui vient
de l'intégration et association fonctionnelle de l'expression du gène reporter avec les gènes endogènes Oct-4 ou OCB54,
apparaissait bien en temps voulu, mais restait réduite. Cette réduction pouvait indiquer indiquer un échec dans la
reprogrammation de l'expression des gènes dans ces embryons. Dans une étude faite par M. Boiani et al. (2002),
l'expression de Oct-4 était observée au cours du développement d'embryons clonés à partir de cellules cumulus contenant
un transgène Oct-4 GFP. Les cellules de ces embryons présentaient un début d'expression de Oct-4 au stade correct du
développement, mais montraient une expression spatialement incorrecte dans la majorité des blastocystes. L'expression de
Oct-4 était soit absente, soit réduite dans la masse cellulaire interne, ou bien exprimée de façon ectopique dans les cellules
du trophoblaste de l'embryon cloné. Le gène n'était trouvé correctement exprimé, au niveau correct, dans les cellules
appropriées, et au moment voulu que dans un embryon sur dix. Les auteurs trouvèrent que la viabilité des embryons clonés
correspondait de façon étroite avec l'activité du gène Oct-4 dans ces embryons. Une telle expression anormale de Oct-4
indique qu'il y a eut défaut dans la reprise du programme génétique. L'expression anormale de Oct-4 peut être associée à
des expressions aberrantes d'autres gènes cruciaux pour le développement, aboutissant à des anomalies à différents stades
du développement embryonnaire. L'expression anormale de Oct-4 dans les embryons clonés pourrait être une des
explications de l'échec fréquent des embryons obtenus par clonage. Dans une étude plus étendue, A. Bortvin et coll. (2003)
ont examiné la réaction de onze gènes voisins de Oct-4 dans des embryons clonés obtenus par transfer de noyau de cellules
cumulus. Ces gènes avaient été choisis parce que leur mode d'expression dans le développement est voisin de celui de Oct-

12
pronuclei, se forme un fuseau bipolaire de microtubules, le "fuseau mitotique".
- Pendant cet temps, dans les deux pronuclei, maternel et paternel, qui sont haploïdes (ne contenant
que la moitié du capital en ADN d'une cellule), s'est produite une réplication de l'ADN. Sitôt
achevée cette réplication, avec la fusion des pronuclei et la perte de leur membrane nucléaire, les
chromosomes venus du pronucléus mâle et ceux venus du pronucléus femelle :se condensent
séparément et se mettent en place sur le fuseau mitotique. Ils s'alignent à l'équateur du fuseau. Les
23 chromosomes maternels et les 23 chromosomes paternels (à double capital d'ADN maintenant)
se clivent longitudinalement au niveau du centromère en vue d'une division mitotique normale. Les
chromatides qui en résultent se déplacent vers les pôles opposés de la cellule, selon une distribution
ordonnée, et la division de la cellule, elle aussi programmée et guidée, se produit; deux cellules
apparaissent, chacune dotée d'une copie de tout le génome du zygote. Ces cellules restent unies
l'une à l'autre, formant l'embryon à deux cellules31.
On peut donc dire que le zygote en tant que cellule stable, possédant un noyau unique avec
dans ce noyau un matériel génétique qui serait lui aussi stable et réparti sur 23 chromosomes,
n'existe pas : il y a un premier zygote à deux pronuclei qui n'est pas encore le zygote proprement
dit, mais simplement une étape dans l'union des gamètes, et le zygote à noyau unique qui se trouve
immédiatement engagé dans le processus de sa division.

3) Le zygote :: une nouvelle entité biologique individuelle

La cellule qui se forme par la fusion des gamètes est une nouvelle entité biologique, qui
commence à opérer comme une unité, c'est-à-dire comme un être vivant ontologiquement unique,
doté d'une structure informationnelle nouvelle qui constitue la base de son développement ultérieur.

a) Un nouveau programme qui garantit à l'embryon son individualité

Il faut insister sur cette nouveauté du projet-programme résultant de la combinaison des 23


paires de chromosomes de chaque gamète. Les deux programmes des gamètes se fondent en un
programme complètement différent soit des programmes des gamètes, soit des programmes portés
par les cellules somatiques du père et de la mère. Les 46 chromosomes du zygote représentent une
combinaison qualitativement nouvelle d'instructions - un nouveau "génotype".
Cette nouvelle combinaison d'information génétique, ce génome spécifique du zygote, est le
fondement de sa singularité individuelle ou identité, et, en même temps, le fondement de son
appartenance à l'espèce humaine, comme le montre l'examen de ses chromosomes.

b) Autonomie du zygote

4. Les auteurs trouvèrent que seulement 62% de ces gènes s'exprimaient correctement dans les blastocystes. Contrastant
avec cette réactivation incomplète des gènes en lien avec Oct-4, les blastocystes issus d'embryons de contrôle obtenus par
une fécondation normale montraient une expression normale de ces gènes. Les auteurs trouvèrent une corrélation entre le
type d'expression de ces gènes en lien avec Oct-4 et l'efficacité du développement embryonnaire. Ces résultats suggèrent
que l'échec dans la réactivation du gène Oct-4 contribue à la léthalité des embryons clonés.
. M. Munsie, C. O'Brien, P. Mountford, Transgenic strategy for demonstrating nuclear reprogramming in the mouse,
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31 C. Simerly, G. J. Wu, S. Zoran, T. Ord, R. Rawlins, J. Jones, C. Navara, M. Gerrity, J. Rinehart, Z. Binor, R. Asch, G.
Schatten, The paternal inheritance of the centrosome, the cell's microtubule-organizing center, in humans, and the
implications for infertility, Nature Medicine, vol. 1, 1995, pp. 47-52.

13
Le nouveau programme réalisé par l'union des gamètes n'est pas un matériel inerte, une sorte
d'outil au travers duquel il serait possible par exemple à l'organisme maternel d'agir sur le zygote,
comme un architecte se sert d'un programme de travail pour réaliser un édifice : il s'agit d'un projet
qui se construit lui-même et qui est l'auteur et l'acteur de lui-même. Le centre biologique, ou
structure de coordination de cette nouvelle unité de l'embryon unicellulaire est le nouveau génome
dont il est doté.
Il est vrai que ce génome est encore pour sa plus grande partie en sommeil dans le zygote et
qu'il faut attendre des stades de développement ultérieurs pour assister à la première transcription
globale. Mais l'activité, dans le zygote, des gènes propres aux toutes premières phases du
développement, et qui conditionnent en particulier l'avènement de la totipotentialité des blastomères
- comme Oct-4 - témoigne de cette autonomie génétique du zygote.
Ainsi, ce premier embryon possède en lui-même son propre pilote, et ses propres mariniers,
son propre architecte et ses propres ouvriers. C'est ce que l'on qualifie du terme d'"autonomie" (le
développement du nouvel être n'est en rien conditionné par des facteurs extrinsèques).
De l'union des gamètes, qui n'étaient pas "individus", et qui avaient dépendu de l'organisme
entier pour leur développement, naît ainsi une nouvelle cellule, indépendante des facteurs
extérieurs, un nouvel être qui a en lui-même la clé de son futur développement.
Les systèmes informatifs maternels qui ont porté à maturation l'ovule peuvent rester actifs
quelque temps, mais, dès le moment de la fertilisation de cet ovule, ce sont les systèmes de contrôle
du zygote qui entrent en jeu.

c) Autocontrôle du zygote

La troisième qualité que montre l'être vivant du zygote est sa capacité d'auto-contrôle. Dans
l'organisation des complexes moléculaires du génome de l'embryon est inscrit en effet un plan-
programme complet, codifié pour le développement ordonné, rigoureusement orienté et dirigé de
façon intrinsèque du nouvel être. De plus, dans ce programme, se trouve aussi l'"information" pour
une réalisation graduelle et autonome de ce projet.
Ce programme codifié et complet confère au zygote d' énormes potentialités
morphogénétiques, d'auto-construction, qui se réaliseront de façon autonome et graduelle durant
tout le processus ultérieur du développement embryonnaire. Du stade de la première cellule, le
"zygote", au moment des premières cellules qui dérivernt de la division de ce zygote - les
"blastomères" - jusqu'au stade de "blastocyste", où les tissus commencent à se différencier dans la
masse des cellules embryonnaires, le génome de l'embryon contrôle chaque évènement et conduit
de façon harmonieuse cet embryon à son objectif. De l'actualisation de ce programme viendra
réalisé un corps déterminé, possédant une figure humaine déterminée.

C. du zygote au blastocyte

Durant une période d'environ cinq jours succédant à la formation du zygote, se produit une
rapide multiplication cellulaire, sous le contrôle d'un grand nombre de gènes impliqués dans les
différents évènements du cycle mitotique. Le développement de l'embryon préimplantatoire va être
marqué durant cette période par trois évènements singuliers et critiques :
- le début de la transition zygotique amenant la transition maternelle-zygotique (maternal-to-zygotic
transition dans la conduite génomique du développement embryonnaire, au stade 2-cellules chez la
souris, 4-cellules à huit-cellules chez l'homme;
- la constitution d'une adhésion spécifique cellule-cellule, permettant l'établisement de
communications inter-cellulaires intenses, au moment de la compaction, au stade 8- à 16 cellules;

14
- l'apparition des premières cellules différenciées au stade du blastocyste.

15
1) L'activation des gènes de l'embryon préimplantatoire et la transition maternelle-
zygotique, MZT

Les études faites sur les embryons de différentes espèces montrent que le mRNA et les
protéines maternelles héritées de l'ovocyte permettent à l'embryon de passer le cap des toutes
premières étapes du développement, correspondant aux premiers clivages, jusqu'au moment où
l'embryon produit ces facteurs par lui-même. L'activation zygotique des gènes (zygotic gene
activation) a un rôle critique et déterminant dans cette prise en charge de l'embryon pré-
implantatoire par lui-même. Elle gouverne cette transition qui fait passer du contrôle maternel au
contrôle embryonnaire du développement32. Le moment où le génome embryonnaire devient actif se
caractérise à la fois par l'expression des gènes d'origine embryonnaire et par la dégradation des
transcrits maternels hérités de l'ovocyte (Telford et al. , 1990)33.

La transition du contrôle maternel au contrôle embryonnaire du développement, dite


transition maternelle-zygotique (maternal-to-zygotic transition)(MZT)34 ou, mieux, transition
maternelle-embryonnaire (MET), c'est à dire le moment où la transcription embryonnaire
commence et où le mRNA maternel est remplacé par le mRNA embryonnaire, se place à une
période du développement embryonnaire pré-implantatoire variable selon les espèces, mais fixe
dans chaque espèce, et qui est fonction du temps écoulé depuis la fécondation, comme s'il existait, à
cet égard, une véritable horloge zygotique 35.
Quelle que soit l'espèce étudiée, on constate qu'après une phase initiale, zygotique, marquée
par l'état d'activité de certains gènes très spécifiques, comme Oct-4, nécessaires aux premières
phases du développement, succède une phase de répression transcriptionnelle qui précéde
l'activation de l'ensemble du génome embryonnaire, puis la transition MZT. Il semble que le silence
transcriptionnel qui s'instaure dans l'embryon après le stade zygote soit lié à l'état épigénétique de
cet embryon, avec une disposition de la chromatine telle qu'elle empêcherait la transcription
(chromatin-mediated transcriptionally repressive state)36. La fonction de cet état répressif de la
transcription qui précède l'activation serait de dicter le profil approprié d'expression des gènes
conmpatible avec le développement ultérieur de l'embryon37.

32 R. M. Schultz, Regulation of zygotic gene activation in the mouse, Biœssays, August 1993, vol. 15, n°8, pp. 531-538.
33 N. A. Telford, A. J. Watson, G. A. Schultz, Transition from maternal to embryonic control in early mammlian
development : a comparison of several species, Molecular Reproduction and Development, May 1990, vol. 26, n°1, pp.
90-100.
34 G. Flach, M. H. Johnson, P. R. Braude, R. A. Taylor, V. N. Bolton, The transition from maternal to embryonic control in
the 2-cell mouse embryo, EMBO Journal, 1982, vol. 1, n°6, pp. 681-686.
. R. M. Schultz, Regulation of zygotic gene activation in the mouse, Biœssays, August 1993, vol. 15, n°8, pp. 531-538.
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mammalian development, Journal of Biological Chemistry, 22 September 1995, vol. 270, n°38, pp. 22077-22080. . C.
Vigneault, S. McGraw, L. Massicotte, M-A. Sicard, Transcription factor expressing patterns in bovine derived embryos
prior to maternal-zygotic transition, Biology of Reproduction, 11 February 2004, DOI :10. 1095/biolreprod. 103. 022970.
35 R. M. Schultz, Regulation of zygotic gene activation in the mouse, Biœssays, August 1993, vol. 15, n°8, pp. 531-538.
36 :Le traitement des embryos de souris au stade deux cellules par des inhibiteurs de l'histone déacétylase (Histone
acetyltransferases) prévient la décroissance d'expression de deux gènes facteurs de transcription d'origine maternelle, TRC
(transcription-requiring complex) et eIF-1A et inhibe le développement de l'état répressif de la transcription dans
l'expression générale des gènes. L'hyperacetylation des histones ainsi réalisée empêche la segmentation vers le stade 4-
cellules.
. M. Schultz, W. Davis Jr. , P. Stein, P. Svoboda, Reprogramming of gene expression during preimplantation development,
Journal of Experimental Zoology, 15 October 1999, vol. 285, n°3, pp. 276-282.
37 J. Ma, P. Scvoboda, R. M. Schultz, P. Stein, Regulation of Zygotic Gene Activation in the Preimplantation Mouse
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. R. M. Schultz, The molecular foundations of the maternal to zygotic transition in the preimplantation embryo, Human
Reproduction Update, July-August 2002, vol. 8, nd4, pp. 323-331.

16
En ce qui concerne l'embryon humain, l'activation globale des gènes de l'embryon humain se
fait au stade 4-cellules (Braude et al. , 1988) 38 et la transition MZT suit de peu cette activation (entre
le stade 4-cellules et le stade 8-cellules)39. Avant cela, les premiers développements de l'embryon
humain pré-implantatoire seraient assurés par les protéines et les transcrits accumulés dans
l'ovocyte durant l'ovogénèse 40.

Les collections cDNA faites ces dernières années à partir des différents stades du
développement de l'embryon préimplantatoire, montrent qu'un nombre en fait considérable de gènes
sont en activité, et de façon très précoce, dans cet embryon. Ces gènes codent, entre autres, pour des
facteurs de croissance, des protéines de jonction, des transporteurs membranaires d'ions, de
molécules d'adhésion cellulaire. M. S. H. Ko et coll. (2000)41 avaient ainsi identifié 9718 gènes dans
l'embryon préimplantatoire de souris. Ce nombre a été porté par la suite à 11. 483 (J. L. Stanton et
D. P. L. Green, 2001)42, puis à 15. 700 (J-A. L. Stanton et al. ,2003) 43. A chaque stade du
développement de cet embryon se produisent de profonds changements dans l'expression de ces
différents gènes, ce qui suggère que ce développement est conduit sous l'action de différentes séries
de gènes s'exprimant de façon spécifique en fonction des stades atteints44.

2) Les divisions de segmentation

Durant son développement préimplantatoire, l'embryon, confiné à l'intérieur de la membrana


pellucida, ne peut augmenter de volume. L'augmentation du nombre de cellules résultant de la
rapide division cellulaire qui s'y produit aboutit à une diminution de la taille de ces cellules, ce qui a
donné origine au terme de "divisions de segmentation"(cleavage stages) pour désigner les différents
stades que l'embryon parcourt ainsi.

Aproximadamente treinta horas después del encuentro de los gametos, el cigoto empieza a
dividirse para dar los dos primeros blastómeros, de tamaño igual a la mitad del huevo fecundado;
38 P. Braude, V. Bolton, S. Moore, Human gene expression first occurs between the four- and eight-cell stages of
preimplantation development, Nature, 31 March 1988, vol. 332, n°6163, pp. 459-461.
39 N. A. Telford, A. J. Watson, G. A. Schultz, Transition from maternal to embryonic control in early mammalian
development : a comparison of several species, Molecular Reproduction and Development, May 1990, vol. 26, n°1, pp.
90-100.
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Molecular Reproduction and Development, December 1997, vol. 48, n°4, pp. 442-448.
40 Ceci est montré par la possibilité qu'a l'embryon humain de se diviser jusqu'au stade quatre cellules, en présence de
l'inhibiteur de transcription á-amanitine.
. P. Braude, V. Bolton, S. Moore, Human gene expression first occurs between the four- and eight-cell stages of
preimplantation development, Nature, 31 March 1988, vol. 332, n°6163, pp. 459-461.
41 M. S. H. Ko, J. R. Kitchen, X. Wang, T. A. Threat, X. Wang, A. Hasegawa, T. Sun, M. J. Grahovac, G. J. Kargul, M. K.
Lim, Y. Cui, Y. Sano, T. Tanaka, Y. Liang, S. Mason, P. D. Paonessa, A. D. Sauls, G. E. DePalma, R. Sharara, L. B. Rowe,
J. Eppig, C. Morrell, H. Doi, Large-scale cDNA analysis reveals phased gene expression patterns during preimplantation
mouse development, Development, April 2000, vol. 127, n°8, pp. 1737-1749.
42 J. L. Stanton, D. P. L. Green, Meta-analysis of gene expression in mouse preimplantation embryo development,
Molecular Human Reproduction, June 2001, vol. 7, n°6, pp. 545-552.
43 J-A. L. Stanton, A. B. Macgregor, D. P. Green, Gene expression in the mouse preimplantation embryo, Reproduction,
April 2003, vol. 125, n°4, p. 457-468.
44 M. S. H. Ko, J. R. Kitchen, X. Wang, T. A. Threat, X. Wang, A. Hasegawa, T. Sun, M. J. Grahovac, G. J. Kargul, M. K.
Lim, Y. Cui, Y. Sano, T. Tanaka, Y. Liang, S. Mason, P. D. Paonessa, A. D. Sauls, G. E. DePalma, R. Sharara, L. B. Rowe,
J. Eppig, C. Morrell, H. Doi, Large-scale cDNA analysis reveals phased gene expression patterns during preimplantation
mouse development, Development, April 2000, vol. 127, n°8, pp. 1737-1749.

17
ordinariamente quedan unidos para formar el embrión de dos células. Este es el proceso de la
segmentación, que es el más rápido y el primero. Este proceso dará lugar, al cabo de poco tiempo, a
un ser con un número de células igual al del adulto : hasta el momento del nacimiento se producirán
41 generaciones celulares, y muy pocas más tendrán lugar desde el momento del nacimiento hasta
el final natural de la vida. Por eso, la velocidad del proceso de segmentación es progresivamente
menor. La primera división se realiza entre las 24 y las 30 horas; después, habrá una división cada
10 o 12 horas. Se podrán observar 2 blastómeros a las 30 horas; 4 blastómeros a las 40 horas; 8
blastómeros a los 2 o 3 días (fenómeno de compacción); 16 blastómeros (estado de mórula) a los 3
días; 32 blastómeros a los 4 días; 64 blastómeros a los 5 días (estado del blastocisto que entra en la
cavidad uterina); e implantación en la pared uterina entre los días séptimo y noveno a partir de la
fecundación.

En cinq jours, on a donc une intense multiplication cellulaire 45, sous le contrôle d'un grand
nombre de gènes.
Il apparait de plus en plus que certains de ces gènes contrôlent en même temps le rythme du
développement et le degré de fragmentation de l'embryon. Un rythme de développement rapide
avec un faible degré de fragmentation est indicatif de la bonne qualité de l'embryon. On trouve en
activité, dans l'embryon préimplantatoire, aussi bien des gènes qui stimulent le développement et la
multiplication cellulaire, que des gènes qui interviennent dans la mort cellulaire programmée
(apoptose)46. Ceci fait supposer qu'il existe dans l'embryon préimplantatoire un méchanisme
homéostatique par lequel les gènes contrôlant la survie cellulaire et les gènes contrôlant la mort
cellulaire agissent de concert et déterminent ainsi la viabilité de l'embryon.

3) La compaction

Les cellules qui se forment dans cette division-multiplication ne sont pas indépendantes
entre elles, mais, à partir du stade de 2 à 4 cellules, sont reliées entre elles grâce à des microvilli et
des ponts cytoplasmiques intercellulaires, qui facilitent la transmission des signaux de cellule à
cellule, absolument nécessaire pour une croissance ordonnée.
Jusqu'au stade de huit blastomères, ces cellules forment une masse cellulaire lâche. Après la
troisième division, au deuxième ou troisième jour après la fécondation, se produit le phénomème de

45 Durant toute cette période, et jusqu'au stade de blastocyste, en dépis de l'importante augmentation du nombre des
cellules, l'œuf conserve un diamètre qui demeure identique, vosin de celui de la cellule-œuf originaire (110-150ì). Le
phénomène s'explique si l'on tient compte du fait que la segmentation s'accompagne d'une diminution progressive de
volume des blastomères. Il est du à ce que l'œuf fécondé est entouré de sa membrane de fécondation, résultant de
l'épaississement de la "membrane pellucide".
46 Un gène Ped (preimplantation embryo development) a été identifié (L. Wu et al. , 1998) chez la souris qui contrôle le
rythme des segmentations de l'embryon pré-implantatoire, influençant la rapidité du développement et la survie
consécutive de l'embryon. Un autre facteur antiapoptotique, Survivin (K. Kawamura et al. , 2003), un membre de la famille
IAP, qui peut se lier aux caspases et moduler leurs fonctions, est trouvé dans l'embryon préimplantatoire de souris à tous
les stades de son développement. Inversement, les gènes codant pour les protéines des deux familles contrôlant l'apoptose
cellulaire, les familles des gènes Bcl-2 et caspase sont présents dans l'embryon préimplantatoire de souris. On a montré que
le système Fas-Fas ligand (L)(K. Kawamura et al. , 2001), qui représente une des voies majeures de signaux intervenant
dans le mécanisme de l'apoptose, est actif dans l'embryon préimplantatoire du rat et del'homme.
. C. M. Warner, G. E. Hexley, A. S. McElhinny, C. Tang, Genetic regulation of preimplantation mouse embryo survival,
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rat and human préimplantation embryos, Molecular Human Reproduction, May 2001, vol. 7, n°5, pp. 431-436.

18
la compaction : les espaces intercellulaires se resserrent étroitement, les cellules adhèrent entre
elles plus fortement, augmentant au maximum l'aire de contact entre elles et établissent entre elles
des jonctions de communication :(gap junctional communication)47 qui favorisent un transport
rapide intercellulaire d'ions et de molécules-signaux. On voit se former des jonctions locales étroites
(focal tight junctions)48 et on assiste à la formation d'une matrice extracellulaire par dépot de
protéines spécifiques (laminines)49. Accompagnant ces changements, les membranes cellulaires
deviennent si fortement apposées qu'il en résulte un applatissement intercellulaire 50, avec la
médiation du systeme d'adhésion uvomoruline (E-cadhérine) dépendant du Ca2+ 51. Ces
changements ne sont pas simplement importants sur le plan morphogénétiques, mais aussi pour ce
qui est de l'initiation de la diversification cellulaire52. Ce phénomène de compaction isole les
cellules centrales - qui communiquent entre elles par de larges espaces interstitiels -, des cellules
47 C. W. Lo, N. B. Gilula, Gap junctional communication in the preimplantation mouse embryo, Cell, October 1979, vol.
18, n°2, pp. 399-409.
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48 T. Ducibella, D. F. Albertini, E. Anderson, J. D. Biggers, The preimplantation mammalian embryo : characterization of
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49 I. Leivo, A. Vaheri, R. Timpl, J. Wartiovaara, Appearance and distribution of collagens and laminin in the early mouse
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50 T. Ducibella, E. Anderson, Cell shape and membrane changes in the eight-cell mouse embryo : prerequisites for
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51 F. Hyafil, C. Babinet, F. Jacob, Cell-cell interactions in early embryogenesis : a molecular approach to the role of
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n°2, pp. 153-163.

19
périphériques. Ce phénomène de la compaction se présente comme programmé, ordonné et dirigé
par les gènes de l'embryon lui-même, sans intervention des transcrits maternels résiduels53.
Il apparait clairement aujourd'hui que cet évènement de la compaction est crucial dans le
processus de réorganisation de l'organisation cellulaire et d'interaction cellule-cellule qui advient au
stade 8-cellules54. :
Ce contact étroit entre les différents blastomères de l'embryon préimplantatoire est demandé
par les exigences du développement.

Les transcrits des gènes Wnt, Wnts3a et Wnt4 ont été identifiés dans l'embryon
préimplantatoire de souris dès le stade 2-cellules55. Les gènes Wnt sont connus pour régler les
interactions cellulaires et il est donc probable qu'ils jouent un tel rôle durant le développement de
l'embryon préimplantatoire.

4) La polarisation

Aux alentours du quatrième jour après la fécondation, on assiste au processus de la


polarisation : Les cellules polaires se placent à la périphérie de l'embryon pour donner la couche
cellulaire périphérique ou ligne cellulaire trophoblastique, qui va former le trophoblaste qui entrera
dans la constitution des formations extra-embryonnaires de l'œuf (cavité amniotique et placenta);
les cellules apolaires se placent au centre de l'embryon pour donner le bouton embryonnaire qui va
donner origine à la ligne cellulaire embryoblastique, qui formera l'embryon proprement dit.

5) Le stade morula

Au troisième jour suivant la fécondation, une nouvelle division de segmentation, qui porte à
16 le nombre des blastomères, donne la morula (ainsi appelée à cause de son aspect de"petite
mûre"). A ce stade, le contact entre les cellules devient très fortement adhésif.
En este período las células están muy trabadas entre sí, por la compacción :y compresión entre ellas,
y desarrollan también las características morfológicas que permiten que, desde entonces, se puedan
distinguir dos poblaciones celulares.

A mesure que la segmentation procède, l'œuf est transporté par les mouvements péristatiques
de la trompe et par les mouvements ciliaires de l'épithélium tubarique vers la cavité utérine. Il entre
dans cette cavité 3 à 4 jours après la fécondation, au stade de morula, avec 8-16 blastomères.

6) La formation du blastocyste

Vers le moment où la morula entre dans la cavité utérine, au cinquième jour après la
fécondation, (sixième et septième cycle cellulaire), commence la formation du "blastocyste", formé
d'environ 64-128 cellules. A l'intérieur de la masse des blastomères apparaît une fissure semilunaire
qui sépare progressivement les blastomères les plus internes de ceux plus périphériques. Cette
fissure, appelée blastocèle, se remplit d'un liquide albumineux et s'élargit rapidement, distendant les
52 J. B. Levy, M. H. Johnson, H. Goodall, B. Maro, The timing of compaction : control of a major developmental
transition in mouse early embryogenesis, Journal of Embryology and Experimental Morphology, June 1986, vol. 95, pp.
213-237.
53 G. M. Kidder, J. R. McLachlin, Timing of Transcription and Protein Synthesis Underlying Morphogenesis in
Preimplantation Mouse Embryos, Developmental Biology, December 1995, vol. 112, n°2, pp. 265-275.
54 J. B. Levy, M. H. Johnson, H. Goodall, B. Maro, The timing of compaction : control of a major developmental
transition in mouse early embryogenesis, Journal of Embryology and Experimental Morphology, June 1986, vol. 95, pp.
213-237.
55 S. Lloyd, T. P. Fleming, J. E. Collins, Expression of Wnt genes during mouse preimplantation development, Gene
Expression Patterns, June 2003, vol. 3, n°3, p. 309-312.

20
couches des cellules périphériques. Ces cellules forment une paroi constituée d'une seule couche de
cellules, le trophoblaste. Les cellules centrales, de l'embryoblaste, prennent l'aspect d'une
accumulation sphéroidale.

D. Du blastocyte au disque embryonnaire :: la seconde semaine

Durant la seconde semaine du développement embryonnaire, au cours de laquelle


s'accomplit la nidation, le développement de l'œuf fécondé aboutit à la constitution de l'embryon
proprement dit (disque embryonnaire) et de ses annexes (futur placenta) et à la formation de la
cavité amniotique.

1) L'implantation dans la muqueuse utérine

L'implantation du blastocyste dans la muqueuse utérine, ou "nidation" de l'œuf fécondé,


commence au septième jour suivant la fécondation et est achevé au 9jour.

a) Le dialogue mère-embryon prépare l'implantation

L'implantation comporte une série complexe d'étapes qui commence avant que le blastocyste
ait atteint la cavité utérine et se soit attaché à l'endomètre. Pour arriver à cet évènement, il se produit
un "dialogue mère-embryon" dans lequel l'embryon et l'endomètre induisent des changements l'un
dans l'autre afin de promouvoir le développement embryonnaire d'une part et la réceptivité de
l'endomètre d'autre part56. La fonction endométriale, les secrétions embryonnaires et les interactions
embryon-endomètre demandent en effet un "dialogue" continu et synchrone entre les deux
partenaires (endomètre et embryon) non seulement au niveau endocrinine mais aussi au niveau local
(paracrine/autocrine)57. Il a été montré que l'état d'activité du blastocyste influence la "fenêtre"
d'implantation dans l'utérus réceptif58. L'expression de GnRH (gène codant pour gonadotrophin-
releasing hormone) par les cellules de la massse centrale interne du blastocyste induirait ainsi la
synthèse de gonadotrophine chorionique HCG et sa secrétion par le trophectoderme embryonnaire59.
Les progrès dans la connaissance des cytokines et des facteurs de croissance permettent de
mieux comprendre comment se prépare l'implantation 60. EGF et CSF-1 sont exprimés dans
l'épithélium endométrial. EGF induirait la prolifération celulaire qui rend l'endomètre plus attractif
pour l'embryon en voie d'implantation. L'embryon lui-même secrète deux de ces cytokines qui ont
un rôle décisif dans l'interaction entre embryon et endomètre : il s'agit de LIF et IL-161.
Les intégrines jouent aussi un rôle important dans le mécanisme de l'implantation en

56 S. I. Tazuke, L. C. Giudice, Growth factors and cytokines in endometrium, embryonic development, and maternal :
embryonic interactions, Seminars in Reproductive Endocrinology, August 1996, vol. 14, n°3, pp. 231-245.
57 C. Simón, A. Pellicer, M. L. Polan, Interleukin-1 system crosstalk between embryo and endometrium un implantation,
Human Reproduction, 1995, vol. 10, Supplement 2, pp. 43-54.
58 B. C. Paria, Y. M. Huet-Hudson, S. K. Dey, Blastocyst's state of activity determines the "window" of implantation in the
receptive mouse uterus, Proceedings of the National Academy of Sciences, USA, Novemebr 1993, vol. 90, n°21, pp.
10159-10162.
59 J. P. Hearn, A. A. Gidley-Baird, J. K. Hodges, P. M. Summers, G. E. Webley, Embryonic signals during the peri-
implantation period in primates, Journal of Reproduction and Fertility, suppl. , 1988, vol. 36, pp. 49-59.
60 Quatre de ces cytokines/facteurs de croissance ont plus particulièrement retenu l'attention dans l'étude des évènements
qui précèdent et préparent l'implantation : EGF (epidermal growth factor), CSF-1 (colony-stimulating factor), LIF
(leukaemia-inhibiting factor) et (IL)-1 (interleukin).
. M. L. Polan, C. Simon, A. Frances, B. Y. Lee, L. E. Pritchard, Role of embryonic factors in human implantation, Human
Reproduction, December 1995, vol. 10, suppl. 2, pp. 22-29.
61 M. L. Polan, C. Simon, A. Frances, B. Y. Lee, L. E. Pritchard, Role of embryonic factors in human implantation,
Human Reproduction, December 1995, vol. 10, suppl. 2, pp. 22-29.

21
fournissant des récepteurs pour les cellules du trophectoderme 62.
Pour finir, le gène codant pour la protéine IGFBP-rP1 (IGF-binding protein-related protein
1) voit son expression dans l'endomètre utérin multipliée par 35 durant la phase réceptive,
comparéee avec la phase préréceptive63. IGFBP-rP1 est donc probablement impliquée dans la
réceptivité de l'endomètre.

b) Le trophoblaste

Les cellules du trophoblaste émettent des microvillosités qui s'insinuent entre les cellules
épithéliales de la muqueuse utérine. Ce trophoblaste va par la suite se développer considérablement
pour donner la partie fœtale du placenta.
Jusqu'à la fin de la troisième semaine les blastomères se nutrissent en utilisant les substances
de réserves héritées de la cellule-œuf et les substances des secrétions avec lesquelles le blastocyste
se trouve en contact. Vers la fin de la troisième semaine le développement des villosités choriales et
l'organisation progressive des capillaires sanguins dans le futur placenta permettent la nutrition de
l'embryon à partir du sang maternel.

2) La formation du disque embryonnaire

Après la nidation, avec une grande rapidité, mais aussi avec une grande précision
chronologique et morphologique dans le déroulement des étapes, témoignant d'un autocontrôle
rigoureux, on passe non seulement à une croissance numérique des cellules, mais aussi à leur
différenciation, pour arriver à la formation des différents tissus.

Guidées par le génome de l'embryon et par l'intermédiaire de signaux qui se transmettent de


cellule à cellule, les protéines formées dans les blastomères viennent se déposer sélectivement dans
les zones appropriées de l'embryon.
Les différentes cellules, toujours commandées par les instructions du programme génétique,
vont assumer dans les zones où elles se localisent les déterminations précises qui leur sont fixées.
Ainsi se différencient les protéines constitutives spécifiques des cellules nerveuses, des cellules
musculaires, des cellules hématiques; ainsi se forment les protéines de reconnaissance et
d'association, de grande importance pour la formation des organes; ainsi se forment les enzymes
dont certains (comme ceux du cycle de Krebs) se trouvent toujours présents et dans toutes les
cellules, alors que d'autres diffèrent en quantité, qualité, moment d'apparition et moment
d'activation.

Aux environs du huitième jour les blastomères du bouton embryonnaire - la masse cellulaire
interne du blastocyste -, qui forment l'embrioblaste, se différencient en deux couches cellulaires
distinctes :
1) une couche de petites cellules polyédriques,l'hypoblaste, futur feuillet endodermique et
2) une couche de hautes cellules cylindriques, l'épiblaste, futur feuillet ectodermique.

62 Les intégrines "de base" (récepteurs pour la fibronectine, á5â1, la laminine, á6â1, la vitronectine, ávâ3) sont
exprimées continuellement durant le développement embryonnaire pré et périimplantatoire. Par contre les mRNA de trois
sous unités d'intégrines, á2, á6A, et á7 ne sont détectés que dans le blastocyste tardif, en correspondance avec la
différentiation de l'endoderme. á1, á6A, á7, qui forment toutes des récepteurs pour la laminine, joueraient un rôle
spécifique dans l'adhésion du trophoblasteA.
. E. Sutherland, P. G. Calarco, C. H. Damsky, Developmental regulation of integrin expression at the time of implantation
in the mouse embryo, Development, December 1993, vol. 119, n°4, pp. 1175-1186.
63 F. Dominguez, S. Avila, A. Cervero, J. Martin, A. Pellicer, J. L. Castrillo, C. Simon, A combined approach for gene
discovery identifies insulin-like growth factor-binding protein-related protein 1 as a new gene implicated in human
endometrial receptivity, Journal of Clinical Endocrinolgy and Metabolism, April 203, vol. 88, n°4, pp. 1849-1857.

22
Les deux feuillets ectodermique et endodermique adhèrent intimement l'un à l'autre et constituent
une structure bilaminaire, au centre de l'œuf, ayant la forme d'un disque aplati, que l'on désigne sous
le nom de disque embryonnaire. C'est ce disque qui va se développer pour donner le fetus.

E. La troisième :semaine et la gastrulation

Durant la troisième semaine du développement, le disque embryonnaire primitif,


didermique, se différentie et se développe.

a) La ligne primitive

La gastrulation commence avec l'apparition de la ligne primitive à la surface de l'épiblaste.


Au début, cette ligne est mal définie mais elle devient bien visible chez l'embryon de 15 ou 16
jours, sous la forme d'une étroite rainure disposée le long de l'axe longitudinal de la plaque
embryonnaire, longée de chaque côté par un léger renflement. L'extrémité craniale de cette ligne,
que l'on appelle le nœud de Hensen, est constituée d'une légère surélévation entourant une petite
dépression. Au pôle cranial du disque se constitue, sous le feuillet épiblastique, la plaque
prochordale.

b) formation du mésoblaste et de l'entoblaste

Entre la fin de la seconde semaine et le début de la troisième, donc autour du 14jour


suivant la fécondation, les cellules qui appartiennent au tiers postérieur du feuillet épiblastique, sur
le disque embryonnaire, se multiplient et migrent vers la ligne primitive. Ce sont les cellules
mésoblastiques. Lorsqu'elles atteignent la ligne primitive, elles prennent un aspect renflé, se
détachent de l'épiblaste et glissent au dessous de lui, entre épiblaste et hypoblaste, C'est ce que l'on
appelle l'"invagination". Un contingent de ces cellules, repoussant l'hypoblaste, va former
l'entoblaste embryonnaire. Un autre contingent, qui se développe entre épiblaste et entoblaste, va
former le mésoblaste. ainsi l'épiblaste, par le processus de la gastrulation, est à l'origine des trois
couches cellulaires de l'embryon tridermique, ectoblaste, mésoblaste et entoblaste.
. L'ectoblaste donnera le système nerveux, l'épiderme et l'oreille;
. Le mésoblaste donnera le squelette, les muscles (muscles du squelette, muscles lisses et
cœur), et l'appareil uro-génital;
. L'entoblaste donnera l'appareil digestif et l'appareil respiratoire;

c) Formation de la notochorde

Au niveau du nœud de Hensen, des cellules ectoblastiques s'invaginent et migrent sur la


ligne médiane, sous le feuillet ectoblastique, en direction craniale, vers la plaque prochordale,
formant le cordon cellulaire du processus notochordal. Lorsque l'hypoblaste est remplacé par les
cellules entoblastiques, les cellules de la notochorde se détachent de l'entoblaste et forment alors,
vers le 18jour, un cordon cellulaire plein, la notochorde définitive. La notochorde suit par en avant
le trajet du tube neural et sert de base de développement au squelette axial, corps vertébraux et
disques intervertébraux.

d) Formation du tube neural

Lors de l'apparition de la notochorde et sans doute sous son influence inductive, le


mésoblaste qui la recouvre s'épaissit et forme la plaque neurale. A la fin de la troisième semaine,

23
les bords latéraux de la plaque neurale se surélèvent, formant les crêtes neurales, tandis que la
dépression médiane forme un sillon, la gouttière neurale. Progressivement, les crêtes neurales se
rapprochent sur la ligne médiane et fusionnent. Cette fusion commence dans la future région
cervivale et se poursuit en direction craniale et caudale. Il en résulte la formation d'un tube, le tube
neural, s'ouvrant temporairement aux extrémités craniale et caudale de l'embryon par les
neuropores antérieur et postérieur.

Avec la fin de la troisième semaine et la constitution des différents tissus se termine ainsi la
phase du disque embryonnaire et commence la période embryonnaire proprement dite.

F. de l'embryon au fœtus

Durant les trois semaines suivantes va se définir, au sein de l'embryon, le schéma général du
corps et vont se former tissus et organes.
Ce développement est si rapide que, à la cinquième semaine, lorsque la longueur de
l'embryon est encore inférieure à un centimètre, sont déjà en place les structures du cerveau, du
cœur, du tractus pulmonaire, les structures gastro-entérique et urinaire, et commence la
différenciation sexuelle. Les membres supérieurs et inférieurs apparaissent sous forme de bourgeons
ayant l'allure de palettes.
A la sixième semaine les sillons des doigts ou rayons des membres apparaissent :à la partie
distale des bourgeons des membres, d'abord aux membres supérieurs, puis aux membres inférieurs.
A la fin de la septième semaine, l'embryon a atteint une longueur de 19 mm. Les doigts de la
main se modèlent. La face et le cou de l'embryon prennent un aspect humain. Les paupières, les
mamelons apparaissent. Les bourgeons faciaux se fusionnent et la lèvre supérieure se forme.
A la fin de la huitième semaine, l'embryon a atteint une longueur de 3 cm et ses formes
corporelles ont pris un aspect définitivement humain. Les membres se sont allongés, les genoux et
les coudes sont apparus, les doigts et les orteils sont libres, le visage est humain. L'organisation est
terminée et l'embryon possède, en miniature, toutes les structures caractéristiques de l'être humain.

- Le cœur commence à battre à la fin de la troisième semaine;


- l'activité électrique cérébrale peut être enregistrée à la fin de la huitième semaine;
- les structures cérébrales sont complètes à la fin de la 12º semaine.

Le nouvel être prend le nom de fœtus au début du troisième mois.

G. Le contrôle du processus épigénique

On peut se poser trois questions devant ce développement morphologique de l'embryon, tel


qu'il a été décrit :

1) Comment tous ces processus, du zygote au disque embryonnaire et au delà, peuvent-ils


survenir avec un tel ordre et une telle régularité dans l'espace et dans le temps ?

2) Qu'est-ce qui induit et dirige la différenciation cellulaire, l'établissement des lignées


cellulaires, l'aggrégation ordonnée des cellules et des tissus dans les différents organes dans des
zones bien définies en sorte que l'harmonie et l'unité soient assurées dans la totalité du corps en
développement ?

24
3) Comment tout l'ensemble d'un fetus peut-il se trouver généré à partir d'une seule cellule,
le zygote ?

Il est maintenant certain que le nouveau génome, qui se constitue dans le zygote, assume le
contrôle de l'ensemble du processus morphogénique, depuis le début. Il est vrai qu'une quantité
importante de produits de transcription (mRNA) et de traduction (protéines), venus des gènes
d'origine maternelle, sont utilisés pour soutenir les tous premiers stades du développement de
l'embryon primitif. Mais ils sont très rapidement substitués par les produits venant de la
transcription et de la traduction du nouveau génome de l'embryon. Comme l'observe G. M. Kidder,
"toutes les phases de la morphogénèse avant la nidation dépendent de l'expression des propres gènes
de l'embryon64.
Les études de ces dernières années ont montré qu'il y a trois principales classes de gènes
dans ce génome embryonnaire qui sont responsables de l'activité hiérarchiquement ordonnée qui
règle le processus du développement embryonnaire : les gènes appelés "positionaux", "sélecteurs" et
"réalisateurs" :
- Les gènes de position établissent la position exacte des cellules ou groupes de cellules le long des
axes antéro-postérieur et dorso-ventral de l'embryon, contribuant ainsi à la définition du plan
corporel général.
- Les gènes sélecteurs règlent la séquence des processus de différenciatioon, dans le temps et dans
l'espace le long des axes;
- Les gènes réalisateurs assurent la structure définitive des organes, avec les différents tissus qui les
constituent.

Il est facile d'imaginer la complexité des interactions entre ces milliers de gènes, complexité
qui augmente avec le progrès du développement, et implique bien d'autres facteurs de régulation et
bien des mechanismes d'auto-contrôle65.

H. Caractéristiques du processus

Il est important de souligner trois propriétés biologiques qui caractérisent ce processus


épigénique : la coordination, la continuité et la gradualité.

1) La coordination

64 G. M. Kidder, The genetic program for preimplantation development, Developmental Genetics, 1992, 13 : 319-325, p.
320.
65 Un processus particulier se répète en de multiples occasions au cours de l'organogénèse : celui de l' induction (ex :
induction de la formation de la chorde neurale sous l'influence de la notochorde, induction du blastème métanéphrogène
par le bourgeon urétéral pour former le rein). L'induction se caractérise par une stimulation d'un tissu ou d'un groupe de
cellules réceptif par un tissu inducteur. On commence aujourd'hui à identifier les signaux qui déterminent ces processus et
les gènes qui en assurent la régulation. Les molécules porteuses de signaux comprennent essentiellement les membres de la
famille dite des TGFβ (transforming growth factors et ceux d'une famille dite des FGF (fibroblast growth factor).
Certaines molécules porteuses de signaux ont une activité morphogénique : elles sont actives en fonction d'un gradient de
concentration sur des récepteurs dose-dépendants. Les morphogènes déclanchent des cascades de réactions dans la cellule-
cible. Dans de nombreux cas le processus initial est l'activation d'un gène à homéobox. Ces gènes codent pour transcription
les protéines régulatrices qui agissent sur l'expressivité d'autres gènes.
. D. Duboule, P. dollé, St. J. Gaunt, Les gènes du développement des mammifères, La Recherche, vol. 21, n°219, Mars
1990, pp. 294-303.
. D. S. Kessler, D. a. Melton, Vertebrate Embryonic Induction : Mesodermal and Neural Patterning, Science, vol. 266,
n°5185, 28 October 1994, pp. 596-604.

25
Dans tout le processus, à partir de la formation du zygote, il y a une succession ou une
interaction coordonnée d'activités moléculaires et cellulaires, guidée par l'information contenue
dans le nouveau génome, et modulée par une cascade ininterrompue de signaux transmis de cellule
à cellule et du milieu extérieur et intérieur aux cellules.
Cette propriété de cohérence exige une unité rigoureuse de l'être qui est en constant
développement. Cette unité apparaît garantie par le nouveau génome, où un très grand nombre de
gènes régulateurs assurent le moment exact, le lieu précis et la spécificité des évènements
morphogéniques.

2) La continuité

La seconde propriété est la continuité. Si les conditions requises sont présentes, le nouveau
"cycle vital" qui commence à la fécondation procède, sans interruption, dans une succession
contunue d'évènements :
- multiplication cellulaire;
- détermination cellulaire;
- différentiation des tissus;
- formation des organes.
Ces différents évènements, comme la mutiplication cellulaire ou l'apparition des différents
tissus et organes, peuvent nous apparaître comme consécutifs dans le temps; en fait, chacun d'entre
eux est l'expression finale, à un instant donné, d'une succession ininterrompue d'évènements
reliés l'un à l'autre sans solution de continuité. Le premier cycle ne se termine pas au disque
embryonnaire, pas plus qu'un autre cycle ne commence à partir de ce stade morphogénique. C'est
toujours le même individu qui se trouve acquérant sa forme définitive.

3) La gradualité

La troisième propriété est la gradualité. Dans la formation de l'organisme pluricellulaire, cet


organisme acquiert sa forme finale au travers d'un passage graduel de formes simples à des
formes toujours plus complexes. Cette loi de l'acquisition graduelle de la forme finale au travers
de multiples étapes partant du zygote implique et exige une régulation qui doit être intrinsèque à
tout embryon singulier et maintient le développement orienté en permanence dans la direction de la
forme finale.
Cette gradualité du processus se comprend mieux aujourd'hui à la lumière des études sur les
gènes du zygote. Le programme contenu dans le nouveau génome, qui spécifie le plan corporel des
organismes détermine aussi la séquence et la temporisation des évènements épigéniques. Le
développement normal demande l'expression coordonnée de milliers de gènes. Parce que le contrôle
indépendant de chacun des gènes structuraux conduirait à un développement cahotique, il y a des
gènes de contrôle (gènes "homéotiques") qui règlent l'activité coordonnée de groupes de gènes
structuraux.

E. Les critères d'individualité du premier embryon

1) L' "Autonomie" du Premier Embryon

En résumé, le développement de l'embryon tel qu'il vient d'être décrit montre les
caractéristiques fondamentales suivantes :

26
- détermination programmée,
- continuité sans interuption ni ralentissement
- autoproduction
- autodirection du programme tant à l'intérieur du génome lui-même qu'à l'intérieur de l'embryon.

Tout ceci se résume en un mot :"autonomie" : l'embryon est indépendant du milieu qui
l'entoure. Il n'est pas une "partie de la mère", il ne dépend pas d'autres êtres vivants.

L'autonomie dont nous parlons ici n'est pas une autonomie au sens absolu du terme, car
celle-ci n'existe pas, même après la naissance : même l'adulte n'est pas autonome de façon absolue
puisqu'il dépend de son environnement (atmosphère, alimentation, conditions d'humidité,
d'ensoleillement, de température,etc. . ). Il s'agit donc ici d'une dépendance extrinsèque analogue à
celle que l'adulte a vis-à-vis de son environnement : l'environnement maternel fournit nutrition et
oxygène, et élimine les produits du métabolisme qui peuvent être toxiques. La qualité, la
détermination et la direction du développement, par contre, ne dépendent pas de l'organisme
maternel mais du génome de l'embryon lui-même.
La plus belle démonstration de cette autonomie de l'embryon est donnée aujourd'hui par le
résultat des fécondations in vitro.
Une autre preuve de cette autonomie par rapport à l'organisme maternel-support est donnée par la
possibilité de développement de blastocytes transférés dans des organes (foi, rein, rate, cerveau)
d'individu de sexe mâle jusqu'à un stade embryonnaire avancé. Des embryons de souris implantés
sous la capsule rénale de souris mâles ont pu atteindre le stade de fœtus66.

2) Le zygote se trouve au début du cycle vital de l'individu

Du point de vue biologique, vu que le développement est programmé, continu,


intrinsèquement autonome, il n'y a pas de différence substantielle mais seulement une différence de
développement entre le zygote, qui apparaît immédiatement après la conception, et le nouveau-né à
la naissance. Ce que sera l'adulte est déjà compris dans ce qu'est l'embryon, prêt à s'exprimer
lorsque le projet-programme lui en donnera l'ordre. On ne peut donc pas l'exclure, comme le fait N.
M. Ford, du cadre de l'existence de cet être. Depuis le début il s'agit déjà d'un organisme, avec sa
propre organisation-intégration de structures et de fonctions. Il est le premier du nouvel organisme.
Le cycle vital qui commence au moment de la fusion des gamètes n'est rien d'autre que le cycle vital
de l'organisme du futur adulte. Le zygote est le point de départ, dans l'espace et dans le temps, de ce
cycle vital.

G. Conclusion

En conclusion, on doit reconnaître que la nouvelle entité qui apparaît à la fusion des
gamètes répond à tous les critères retenus pour la définition d'un individu humain :
. finalité, marquée par un dynamisme intrinsèque orienté;
. autonomie;
. capacité d'autoreproduction;
. individualité;
. existence sous forme d'un organisme, unité biologique de structure, fonction et reproduction qui
constitue et caractérise cet être tout au long de sa vie;

66 W. D. Billington, C. F. Graham, A. McLaren, Extra-uterine development of mouse blastocysts cultured in vitro from
early cleavage stages, Journal of Embryology and Experimental Morphology 1969, 20 : 391-399.

27
. auto-contrôle, dans la réalisation de son projet-programme.
. parcours d'un cycle vital, depuis le début de son existence jusqu'à sa mort, passant à travers divers
aspects morphologiques avant d'arriver à la forme pleinement développée de l'adulte;
. appartenance à l'espèce humaine, reconnaissable à la spécificité du génome.

L'embryon, depuis le moment de la fusion des gamètes, doit donc être considéré, sur le plan
biologique, comme un individu humain. C'est ce qu'affirme l'Instruction sur le respect de la vie
humaine naissante et la dignité de la procréation, publiée en 1987 par la Congrégation pour la
Doctrine de la Foi :
«Cette doctrine est. . confirmée par les récentes acquisitions de la biologie humaine, qui reconnaît
que dans le zygote dérivant de la fécondation s'est déjà constituée l'identité biologique d'un
nouvel individu humain»(Donum Vitae, I,1)

La nouvelle entité qui apparaît au moment de la fusion des gamètes masculin et féminin
constitue ainsi un individu humain qui, entrant dans la vie et dans l'histoire au moment de la
conception, procède dans son cycle vital prédéterminé, durant lequel, si les conditions nécessaires et
suffisantes sont présentes - il réalisera de façon autonome toutes les potentialités dont il est
intrinsèquement doté. Cela le portera à devenir successivement zygote, blastomère, embryon, fœtus,
nouveau-né, enfant, adolescent, adulte, vieillard et l'amènera à la mort naturelle. C'est ce qu'exprime
la Déclaration sur l'avortement provoqué de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi (1974) :
«Dès la fécondation, est commencée l'aventure d'une vie humaine dont chacune des grandes
capacités demande du temps pour se mettre en place et se trouver prête à agir» (12-13)

28
III
LA CONTESTATION DE L'INDIVIDUALITÉ DE L'EMBRYON PRÉCOCE67

Cette notion de l'individualité de l'embryon humain, supportée par les données de


l'embryologie, a été perçue, en des temps récents, comme un obstacle aux législations favorable à
l'utilisation des embryons humains précoces, soit pour la reproduction assistée, soit pour la
recherche, soit pour la thérapeutique (utilisation de tissus ou d'organes embryonnaires). Le moment
du début de la vie humaine individuelle a donc été soumis à certaines reconsidérations. Par
exemple, selon le rapport du "Comité Warnock", en Angleterre (1984) 68 on pourrait disposer de
l'embryon humain, à fins d'expérimentation, jusqu'au 14º jour suivant la conception, laissant
clairement entendre que, jusqu'à cette date le caractère d'individu humain de l'embryon ne peut être
reconnu.
Divers scientifiques, comme A. McLaren 69, et théologiens comme le Rev. Norman M. Ford
de Melbourne (Australia)70 soutiennent en effet que, jusqu'au 15jour suivant la fécondation ou au
moins jusqu'au moment de l'implantation - qui commence environ au 5-6 jour - l'embryon
humain ne peut être considéré comme un individu. On parle donc dans cette perspective de "pré-
embryon"71 pour désigner le produit de la fusion des gamètes jusqu'au 14 jour suivant la
fécondation. En faveur de cette opinion sont présentés différents arguments contre l'individualité de
l'embryon précoce :

- l'argument de l'implantation
- l'argument de la ligne primitive;
- l'argument des jumeaux monozygotes;
- l'argument de la totipotentialité;
- l'argument de l'hybridation;
- l'argument du début de l'activité cérébrale.

A. La nécessité de l'implantation (nidation)

C'est en 1979 que, pour la première fois, la question du 14jour suivant la conception a été
introduite dans la discussion sur le statut de l'embryon, par l'Ethics Advisory Board (DHEW) des
Etats Unis, qui a donné comme argument que le 14º jour correspond au moment où l'implantation
de l'œuf est achevée (la nidation de l'œuf a lieu entre le 6º et le 7º jour et est complète au 9º jour; au
14º jour la paroi endométriale est déjà reconstruite par dessus l'embryon implanté).
La DHEW s'est appuyée, dans son argumentation, sur le fait que, tant que l'œuf fécondé ne
s'est pas bien implanté, il peut être éliminé de la cavité de l'utérus. Seule l'implantation, avec le

67 E. Sgreccia, A proposito del "pre-embrione" umano, Medicina e Morale, gennaio-marzo 1986, Nº1, pp. 5-17.
68 Report of the Committee of Inquiry into Human Fertilisation and Embryology : Cmd 8314 (HMSO, 1984).
. M. Warnock, «A Question of Life», Warnock Report on human Fertilisation and Embryology, Basil Blackwell, Oxford,
UK, 1985.
. Embryos and Ethics. The Warnock Report in Debate, M. de S. Cameron ed. , Rutherford House Books, Edinburgh, 1987.
69 A. McLaren, Prelude to embryogenesis, in The Ciba Foundation, Human Embryo Research, Wes or No ?, London/New
York, Tavostock, 1986, 5-23, p. 12.
70 N. M. Ford, When did I begin ?, Conception of the human individual in history, philosophy and science, Cambridge,
Cambridge University Press, 1988.
Pour la critique, voir : A. Fisher, Individuogenesis and a recent book by Fr. Norman Ford, Anthropotes, vol. 7, nº2,
Dicembre 1991, pp. 199-244.
71 R. A. McCormick, Who or What is the Preembryo ?, Kennedy Institute of Ethics Journal, March 1991, pp. 1-15

29
début de la nutrition de l'embryon à partir de la circulation maternelle, donne à cet embryon la
possibilité de survivre.
On peut répondre que ce n'est pas la nidation qui fait de l'embryon son "être embryon", de
même que ce n'est pas le lait maternel qui fait de l'enfant son "être-enfant". Il suffit de rappeler que
le développement de l'embryon in vitro peut se poursuivre bien au delà du stade correspondant à
l'implantation.

B. L'argument de la ligne primitive

En 1984 la commission Waller en Australie a proposé comme seuil d'humanisation le 14º


jour en donnant comme raison que la linea primitiva de l'embryon se forme à ce stade. L'apparition
de la linea primitiva indiquerait que les cellules destinées à construire l'embryon proprement dit se1
seraient désormais différenciées des cellules qui formeront les tissus placentaires et les enveloppes
protectrices.
Cet argument fut proposé initialement par la scientifique bien connue A. McLaren,
spécialiste de l'embryologie de la souris. Selon elle, ce qui advient entre la fécondation et le 14
jour suivant cette fécondation est une simple préparation des systèmes protecteurs et nutritifs du
futur embryon, requis par le développement ultérieur de l'embryon lui-même. Ce serait seulement
au 15 jour suivant la fécondation, lorsqu'apparaîtrait la strie primitive, que l'on pourrait parler
d'une véritable entité, définie dans l'espace par le disque embryonnaire72. A cet argument on peut
répondre73 que la ligne primitive ne représente que le point d'arrivée d'un processus ordonné de
façon séquentielle, sans solution de continuité, qui a commencé au moment de la formation du
zygote. Au moment où se préparent les systèmes nutritifs et de protection il y a déjà quelques
cellules présentes d'où se développeront les feuillets qui constitueront la strie primitive
embryonaire. Celle-ci n'apparaît pas à l'improviste, séparée du processus de développement, mais
fait au contraire partie de ce processus. Il est donc difficile de faire de cette apparition un stade
principal, initial, dans le développement du futur enfant. On pourrait tout aussi bien, et tout aussi
arbitrairement, prendre un autre "stade" chronologique comme "point de départ" de l'embryon
"véritable".

C. L'argument de la totipotence cellulaire

D'autres auteurs fixent aussi le 14º jour après la conception comme le moment où l'embryon
peut être considéré comme être humain individualisé, parce que le 14º jour serait la limite au delà
de laquelle les processus de division gémellaire ou d'hybridation, permis par la totipotence des
blastomères, ne seraient plus possibles.

1) La totipotence des premiers blastomères et la gemellarité monozygotique

La question de la gémellarité monozygotique est liée à cette question de la totipotence des


premiers blastomères. Si accidentellement, à cause de la fragilité de la membrane du zygote,
survient au stade de l'embryon précoce, dans un des blastomères, une division cellulaire qui n'était
pas programmée par le génome de l'embryon, les éléments résultant de la division peuvent donner
72 A. McLaren, Prelude to embryogenesis, in The Ciba Foundation, Human Embryo Research, Wes or No ?, London/New
York, Tavostock, 1986, 5-23, p. 12.
73 voir : D. Gareth Jones, B. Telfer, Before I was an embryo, I was a pre-embryo : or was I ?, Biœthics, vol. 9, nº1,
January 1995, pp. 32-49.

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lieu à autant de nouveaux projets évolutifs, et donc d'individus. Le résultat peut être la formation
d'une nouvelle cellule qui aura le caractère totalement indifférencié d'un nouveau zygote, avec la
possibilité de commencer un programme nouveau et complet, qui amène le développement d'un
second embryon, en plus du premier.

Il a été effectivement montré que, au début du développement embryonnaire, existe un


intervalle de temps, variable d'espèce à espèce, où les cellules de cet embryon sont totipotentes,
c'est à dire possèdent la gamme complète des possibilités de développement, pouvant non
seulement se différencier de différentes façons en fonction du milieu où elles se trouvent, mais
encore donner origine à des individus complets. De la première expérimentation de H. Driesch, en
1891, séparant les deux blastomères d'un embryon à deux cellules d'oursin, jusqu'aux tentatives
récentes de clonage à partir d'embryons précoces, qui jouent sur cette possibilité, il a été bien
démontré, principalement sur les souris, les rats et les lapins, la possibilité pour des blastomères
isolés, détachés d'embryons au stade de deux, quatre ou huit cellules, de se développer pour donner
des fœtus complets et viables. Chez la souris et le rat, 65% des blastomères isolés, détachés
d'embryons à dix cellules, sont capables d'un tel développement. Chez la souris, certaines cellules
de l'embryon sont encore totipotentes jusqu'au stade de morula. En 1993 Jerry Hall et Robert
Spillmann74, de la George Washington University (USA) ont effectué une expérience similaire sur
des embryons humains75. Ils ont pu produire, par scission embryonnaire, une série d'embryons
humains génétiquement identiques.

Cette possibilité d'obtenir des jumeaux monozygotes à partir d'un œuf unique fécondé a été
interprétée comme la preuve que le zygote ne pouvait être considéré ontologiquement comme une
entité vraie, un être individuel, puisque ce zygote pouvait devenir deux individus. Certains ont donc
nié pour cette raison l'individualité de l'embryon, au moins jusqu'au stade où se termine la
possibilité de cette séparation des jumeaux76. Considérant la totipotence des premiers blastomères
de l'embryon, on peut être porté à considérer le zygote comme une cellule indéterminée et
l'embryon des premiers jours comme un simple "amas de cellules génétiquement humaines", un
aggrégat d'individus potentiels, chaque cellule de cet embryon devant être considérée, selon
l'expression de N. M. Ford, comme une "entité ontologiquement distincte, en simple contact avec
les autres"77.
Nous pouvons répondre à cette objection78, avant tout, que le phénomène est une réelle
exception : 99-99. 6% des zygotes se développent comme un organisme unique. La division
survient de façon accidentelle, à la suite de l'intervention d'un facteur extrinsèque; elle n'est pas une
conséquence du processus évolutif porté par le génome de l'embryon. Seule une erreur ou un
évènement accidentel pourrait réussir à isoler de l'embryon en développement une cellule ou un
74 J. L. Hall, D. Engel, P. R. Gindoff, et al. , Experimental Cloning of Human Polyploid Embryos Using an Artificial Zona
Pellucida, The American Fertility Society conjointly with the Canadian Fertility and Androloguy Society, Program
Supplement, 1993 Abstracts of the Scientific Oral and Poster Sessions, Abstract 0-001, S1.
. R. Kolberg, Human Embryo Cloning Reported, Science, vol. 262, Nº5134, 29 October 1993, pp. 652-653.
. R. Macklin, Cloning without Prior Approval : A Response to Recent Disclosures of Noncompliance, Kennedy Institute of
Ethics Journal, vol. 5, nº1, March 1995, pp. 57-60.
75 R. Kolberg, Human Embryo Cloning Reported, Science, vol. 262, Nº5134, 29 October 1993, pp. 652-653.
. R. Macklin, Cloning without Prior Approval : A Response to Recent Disclosures of Noncompliance, Kennedy Institute of
Ethics Journal, vol. 5, nº1, March 1995, pp. 57-60.
76 Sur l'argument philosophique, voir : Ph. Caspar, Individuation génétique et gemellité : l'objection des jumeaux
monozygotes, Ethique - la vie en question, Printemps 1992, nº4, pp. 81-90. Traduzione italiana in Medicina e Morale
1994/3, Maggio-giugno 1994, pp. 453-467.
77 N. M. Ford, op. cit, pp. 137-146 :"We are left with the conclusion that the early human embryo is really a cluster of
distinct individual cells, each one of ewhich is a centrally organized living individual or ontological entity in simple contac
with the others enclosed in the protective zona pellucida"(p. 139)
78 cf. J. J. Billings, "When did I begin" by Norman M. Ford. DSDB, Cambridge University Press, Anthropotes, vol. 5,
nº1, Maggio 1989, pp. 119-127.

31
groupe de cellules, qui pourraient alors se développer en marge du cycle vital inital.

Il existe d'autre part une limite au delà de laquelle la cause accidentelle et externe pouvant
provoquer cette division cellulaire perd de son efficacité : la gémellarité n'est possible chez l'homme
que, au plus tard, jusqu'à la fin de la seconde semaine, tant est forte la détermination orientative du
projet.
La totipotentialité des premiers blastomères disparaît rapidement. Elle ne semble plus
exister au stade de 64 cellules. Dans l'expérience de Hall et Spillman, sur les embryons humains,
les seuls embryons qui purent arriver au stade de 32 cellules furent ceux qui átaient dérivés de
blastomères détachés d'embryons à deux cellules. :

Le fait qu'une cellule totipotente puisse éventuellement se diviser en deux êtres individuels
ne contredit pas la continuité du développement de l'embryon. La totipotence, manifestement
présente dans le zygote, ne signifie pas indétermination, mais capacité actuelle d'exécuter un
développement selon un programme déterminé. Lorsque ce plan de développement est exécuté
suivant le programme présent dans le génome des cellules, sans interférence, l'unité fonctionnelle de
l'embryon qui s'auto-organise est le signe évident d'une existence individuelle. Toute cellule de
l'embryon précoce, quelle que soit sa potentialité, se trouve à son poste selon le plan prédisposé
dans le génome, et cela résulte en un processus de développement ordonné, unique et coordonné.

Des études récentes ont, par ailleurs, clarifié le processus sous-jacent au phénomène de la
gémellarité. Elles montrent que, en quelque part de l'embrioblaste, à la suite de quelque erreur,
retard chromosomique à l'anaphase ou crossing-over mitotique79 - survenu entre le quatrième et le
septième jour après fécondation - se détermine un nouveau plan, indépendant, de développement :
un nouvel individu commence ainsi son propre cycle vital. Mais il ne s'agit pas là d'un système
indéterminé qui donnerait origine à deux systèmes déterminés. La réalité est qu'un premier être
humain donne origine à un second être humain. Ceci trouve une forte confirmation dans de
nombreuses observations récentes. Les cas les plus significatifs à cet égard sont ceux où l'un des
jumeaux a un caryotype avec 47 chromosomes, et est affecté d'un syndrome de Down, tandis que
l'autre a un caryotype normal avec 46 chromosomes.

2) Le processus d'hybridation et la création de chimères

Le processus de l'hybridation est l'opposé de celui de la gémellarité. Dans ce processus,


dans les tous premiers stades de développement de l'embryon, deux blastomères peuvent se fondre
pour former une cellule individuelle. La plupart des informations qui existent sur ce sujet viennent
d'études faites en laboratoire, sur l'animal, en particulier sur le rat. Ces études expérimentales
impliquent en général l'aggrégation de deux embryons ou plus n'ayant pas encore atteint le stade de
blastocyste. Il existe, certes, des chimères naturelles, mais elles sont très rares. Cette rareté évidente
du phénomène dans la nature devrait faire observer une grande prudence dans l'interprétation du
phénomène.
Il est clair que cette possibilité qu'a l'embryon précoce de s'aggréger à un autre et de se
fondre en lui, donnant ainsi naissance à un troisième individu, pose des doutes sur l'individualité
d'un tel embryon.
Le phénomène de l'hybridation n'est pas suffisamment connu pour pouvoir faire l'objet d'une
réflexion approfondie; cependant, le fait qu'une forte concordance entre les deux génomes soit
nécessaire, ainsi qu'entre les stades de développement respectifs des deux embryons que l'on veut

79 G. B. Côté, J. Gyftodimou, Twinning and Mitotic Crossing over : Some Possibilities and Their Implications,
American Journal of Human Genetics, July 1991, vol. 49, n°1, pp. 120-130.

32
faire fusionner, suggère que l'individu qui prédomine possiblement dans le processus détruit l'unité
de l'autre. Les cellules du second seraient alors incluses dans le plan de développement du premier.
Le processus d'hybridation ne prouve pas la non-individualité de l'embryon au stade initial.
Il montre seulement que, dans chaque cellule fécondée, il y a un programme bien défini, programme
qui aurait du se dérouler par lui-même, graduellement et sans discontinuité, s'il n'avait pas été
perturbé la cause externe.

D. L'argument du début de la vie cérébrale

D'autres auteurs, principalement philosophes et théologiens, disent que le moment qui


devrait être considéré comme fondamental dans le développement de l'embryon serait celui de la
formation du système nerveux, et du début de la vie cérébrale. Selon ces auteurs, ce serait
l'apparition de l'activité cérébrale dans le futur cerveau 80 qui signifierait le passage de la "période
cellulaire" de l'embryon à sa période "holistique", avec l'unification des différents organes et tissus
en un unique individu humain. Aucun embryon ne pourrait être retenu comme "individu humain"
tant que le système nerveux ne serait pas suffisemment développé et formé, c'est-à-dire vers la 6-
8 semaine de la gestation81.
La proposition de reporter le moment de la reconnaissance de l'individuation embryonnaire à
l'apparition du cerveau, sous l'affirmation que sans cerveau les organes et les appareils déjà en place
dans l'embryon ne sont pas capables de constituer un être humain, se rapporte en fait à la situation
de l'être humain arrivé à la fin de son cycle vital où la mort cérébrale est effectivement vue comme
signe définitif de la fin du cycle. Mais la situation de l'embryon en développement est
complètement différente : on est là en face non pas d'un processus de désintégration mais d'un
processus dynamique unitaire et unifiant. C'est le sujet lui-même en développement qui exige une
différenciation graduelle de ses organes et donc la formation progressive de ses structures
cérébrales. Cette gradualité ne signifie pas un changement dans la qualité (comme le suggéreraient
les théories phylogénétiques) mais seulement un enrichissement dans l'expression des potentialités
déjà inscrites dans le zygote.

80 J. F. Donceel, Immediate animation and delayed hominization, Theological studies, 1970, 31 : 101.
81 J. M. Goldening, The brain-life theory : towards a consistent biological definition of humanness, Journal of Medical
Ethics, 1985, 11 : 204.

33
CONCLUSION

En conclusion, l'embryon doit être considéré comme un individu humain depuis sa


conception, et doit donc jouir du respect du à tout individu humain, ainsi qu'il est prévu dans la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948. De plus, si l'embryon est reconnu comme
individu humain, il doit aussi l'être comme personne humaine, vue que la notion de personne ne
repose pas sur la qualité des actes accomplis mais sur la participation de l'individu à l'espèce
humaine. Ceci est particulièrement important à rappeler aujourd'hui, alors quil a été largement
démontré que les méthodes contraceptives chimiques entraînent des avortements précoces à
répétition, alors que les destructions volontaires d'embryons se multiplient, liées aux abus de la
fécondation in vitro, et alors que les scientifiques se sont accordé le droit de manipuler les embryons
humains à leur bon vouloir, sans qu'aucune limite ne tienne plus devant leurs fantaisies.
Face à toutes ces atteintes portées aujourd'hui à l'être humain dans la personne du futur
enfant, le Pape Jean Paul II a tenu, dans l'Encyclique Evangelium Vitae, à sortir cette question du
statut de l'embryon de son confinement biologique ou juridique pour la replacer dans sa profonde
perspective théologique, celle du caractère sacré de la vie humaine, voulue et aimée par Dieu :
« Depuis le sein maternel, l'homme appartient à Dieu qui scrute et connaît tout, qui l'a
formé et façonné de ses mains, qui le voit alors qu'il n'est encore qu'un petit embryon
informe et entrevoit en lui l'adulte qu'il sera demain, dont les jours sont comptés et dont la
vocation est déjà consignée dans le "livre de vie" »( Evangelium Vitae, 61)

34
TABLE DES MATIÈRES

I Les critères biologiques de la définition d'« individu humain »........................................................................................3


A. Les critères définissant l’être vivant..................................................................................................................3
B. Les critères de l'individualité.............................................................................................................................3

II La réalité biologique du produit de la conception.............................................................................................................5


A. Les gamètes et la fécondation............................................................................................................................5
1) La gamétogénèse – 2) La Fécondation
B. Le zygote............................................................................................................................................................7
1) L'organisation du nouveau génome – 2) Le premier processus mitotique aboutissant à l'embryon à
deux cellules – 3) Le zygote :: une nouvelle entité biologique individuelle
C. du zygote au blastocyte....................................................................................................................................14
1) L'activation des gènes de l'embryon préimplantatoire et la transition maternelle-zygotique, MZT... –
2) Les divisions de segmentation –3) La compaction –4) La polarisation – 5) Le stade morula – 6) La
formation du blastocyste
D. Du blastocyte au disque embryonnaire :: la seconde semaine.........................................................................20
1) L'implantation dans la muqueuse utérine – 2) La formation du disque embryonnaire
E. La troisième :semaine et la gastrulation...........................................................................................................22
F. de l'embryon au fœtus.......................................................................................................................................23
G. Le contrôle du processus épigénique...............................................................................................................23
H. Caractéristiques du processus..........................................................................................................................24
1) La coordination – 2) La continuité – 3) La gradualité
E. Les critères d'individualité du premier embryon.............................................................................................25
1) L' "Autonomie" du Premier Embryon – 2) Le zygote se trouve au début du cycle vital de l'individu
G. Conclusion.......................................................................................................................................................26

III La contestation de l'individualité de l'embryon précoce................................................................................................28


A. La nécessité de l'implantation (nidation).........................................................................................................28
B. L'argument de la ligne primitive......................................................................................................................29
C. L'argument de la totipotence cellulaire............................................................................................................29
1) La totipotence des premiers blastomères et la gemellarité monozygotique............. – 2) Le processus
d'hybridation et la création de chimères
D. L'argument du début de la vie cérébrale..........................................................................................................32

Conclusion..........................................................................................................................................................................33

Document transmis par Mgr J. Suaudeau


Pontificia Academia Pro Vita

le 7. I. 2009

Édition numérique par salettensis@gmail.com

Disponible à
http://www.scribd.com/doc/37846112/Statut-Biologique-Embryon-Humain

On consultera le dossier spécifique


http://www.genethique.org/doss_theme/dossiers/embryon/acc_embryon.asp

Du site de référence http://www.genethique.org/

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