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Plus d’un jeune adulte sur cinq vit encore chez ses parents. Ces « nouveaux Tanguy » adoptent le
plus souvent l’« hôtel familial » par nécessité. En cause, l’allongement des études, la précarité de
l’emploi et le logement de plus en plus cher.
Comment les baptiser ? Des vieux enfants, des jeunes adultes, des postadolescents ? Aujourd’hui, un jeune sur
deux entre 21 et 24 ans, et un sur cinq entre 25 et 29 ans restent toujours scotchés chez leurs parents, et
parfois même en couple avec leur petit(e) ami(e) ! Le film Tanguy, en 2001, racontait l’histoire d’un jeune
portant ce doux prénom et vivant encore chez ses parents… à 28 ans, avec un diplôme de l’Ecole normale
supérieure en poche. Le succès du film avait popularisé ce phénomène. Mais alors qu’à l’époque les jeunes
restaient chez leurs parents par choix et par plaisir, ils le font aujourd’hui par pure nécessité, crise oblige. Pour
la première fois depuis la guerre, cette génération sera en effet plus pauvre que ses parents.
Et cela ne s’arrange guère : plus les années passent, plus l’échéance recule. On croise désormais des
trentenaires qui ont un emploi et qui séjournent encore chez papa-maman ! Et dire que leurs parents soixante-
huitards, eux, n’avaient de cesse de faire leurs valises et de gagner leur autonomie, synonyme de liberté, dès le
bac en poche…
Ce phénomène des « nouveaux Tanguy » n’est d’ailleurs pas franco-français. L’Italie fait encore mieux : c’est le
pays européen « où les jeunes sont les plus vieux ». De cruelles statistiques attestent que presque 5,5 millions
d’Italiens entre 18 et 34 ans vivent encore chez leurs parents. Ce qui englobe en somme pas moins de 69,7 %
de cette classe d’âge. A une lointaine époque, en 2007, le ministre de l’économie Tommaso Padoa-Schioppa
rugissait dans les médias : « Les fils à maman à la porte ! » Son avis a été massivement ignoré…
Flore, 30 ans : «Je souffre de ma situation»
Flore a 30 ans aujourd’hui et elle souffre de sa situation. « Il y a trois ans, j’avais bien quitté le domicile
parental pour me mettre en ménage avec mon ex-petit ami, mais on a rompu. Je me suis rendu compte qu’un
appart type F3, cela coûte très cher pour une seule personne. Et qu’un appart type F2, cela coûte encore trop
cher pour une seule personne. Plus petit alors ? Mais je me suis dit : je ne travaille tout de même pas pour
vivre dans un F1 ou un studio ! » raconte Flore. « C’est pourquoi mes parents m’ont gentiment proposé de
m’héberger le temps que je me refasse une santé financière. Seulement voila, la santé financière est là, mais le
chômage a pointé son nez également. Mes parents ont 70 ans, je suis la petite dernière d’une famille qui
compte trois frères et une sœur. Moi, 30 ans, niveau BTS (Brevet de technicien supérieur.), huit ans d’expérience
professionnelle, me situant dans la classe moyenne des Français au niveau salaire. Ah, j’oubliais… célibataire
sans enfants », poursuit Flore. « Le paradoxe est là. Mes parents sont à la retraite et désirent être tranquilles,
et moi, jeune femme adulte, désirant refaire sa vie professionnelle et personnelle avec toute l’énergie et la
“fougue” de mon âge. » La cohabitation se révèle de plus en plus difficile. « Ma mère, se sentant à nouveau
investie de son rôle suprême de mère, ne cesse d’être sur mon dos. Elle se sent rajeunir pendant que je prends
un coup de vieux à mesure que je me bats pour ma reconnaissance en tant qu’“adulte”. J’aimerais vraiment
partir mais le prix des apparts flambe, le pouvoir d’achat est au plus mal, je suis désormais au chômage et, s’il
y a un travail, ce sera période d’essai ou intérim de plusieurs mois proposé. Enfin, et d’après ces deux derniers
critères, quel est le propriétaire ou l’agence immobilière qui louerait un appart à une chômeuse ou une
intérimaire, ou une personne qui vient de trouver un emploi depuis quelques semaines seulement ? »
Sébastien : «Ce n’est pas une vie de rester chez ses parents»
Sébastien, à 28 ans, habite chez ses parents, à Francheville (69). Détenteur d’un bac + 5, il a suivi des études
de comptabilité à Lyon. Il a commencé à travailler en 2004, dès la fin de son cursus, en suivant des cours du
soir. « Je n’ai jamais cherché d’appartement, car je suis resté à Lyon. Je n’ai jamais eu des raisons de partir,
car je m’entends bien avec eux. Je n’étais ni intéressé par une colocation ni prêt à payer un loyer de 500 € qui
m’aurait bouffé la moitié de mon salaire. Mon objectif, c’était de rester chez mes parents tant que c’était
supportable et de mettre de l’argent de côté. » Il ne leur a jamais payé de loyer, et reçoit un salaire brut de
1.800 €. Il reconnaît que, même si ses parents sont plutôt « cool », il doit se caler sur leurs activités pour
inviter des amis. « Je ne fais pas comme si j’étais chez moi non plus. » Il a réussi à acheter un appartement,
grâce à un apport important. « Je commençais à en avoir envie. J’ai bientôt 30 ans, ce n’est pas une vie de
rester chez ses parents. Avec les filles, c’était difficile. » Il a hâte de s’installer. Ce sera chose faite au premier
trimestre 2011. Tous les soirs, ils mangeaient tous ensemble, alors il avoue : « Dîner seul, ça va me faire
bizarre. Au départ, la télévision sera ma meilleure compagne. »