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GEEK

ANATOMIE DU GEEK
REPORTAGE GEEK
Véritable communauté à part entière, les geeks constituent
une «  minorité  » de plus en plus visible sur la toile Internet
mais aussi plus simplement dans la vie quotidienne (IRL, In
the Real Life, comme ils l’appellent) où ils aiment à marquer
leur différence tant par leurs tenues vestimentaires que par leurs
idiomes et leur façon de voir le monde. Mais qui sont-ils vrai-
ment  ? Quelle est la nature de leur différenciation  : est-ce un
mouvement, une communauté ou simplement une tendance ? Il
est important d’identifier cette nature afin de ne pas commettre
d’impairs dans leur mode de consommation.
Par Laura Peltier.
Photos Alban Oujagir.

L
es geeks pourraient se définir comme une sous-culture
apparût il y a 10 ans et liant ses membres autours de la
nostalgie d’anciennes séries télévisées (Goldorak, Capi-
taine Flam) et de films (Conan le Barbare). Cette sous-culture
s’est donc bâtie sur un sentiment affectif vis-à-vis de certaines
références télévisuelles et filmographiques (2001 l’Odyssée de
l’espace, etc.).
Le geek peut s’apparenter au phénomène de l’ « adulescent »
c’est-à-dire à l’adulte qui ne veut pas grandir même si au-
jourd’hui cette sous-culture s’étend à des classes d’âge plus
précoces. Les geeks sont en réalité la continuité des « nerds1 »
dans le contexte d’Internet, des réseaux sociaux et des univers
vidéo-ludiques.

Le profil-type du geek

Le geek typique se reconnaît aux traits caractéristiques suivant :


il porte souvent des lunettes, paraît étrange de prime abord, aime
les comics et les mangas et mène des discussions à l’ancienne,
fasciné qu’il est d’une pseudo-culture médiévale, empruntant
tant à Tolkien qu’à la science-fiction. Il désire l’héroïsme des
odyssées d’antan ce qui se traduit pas son attrait pour l’hé-
roïc-fantasy (cartes Magic, jeu vidéo Final fantasy, jeu de rôle
Dungeon & Dragon, etc.) mais préserve également la fascina-
tion de la technique, propre à « ses ancêtres » (les nerds), qui
se témoigne à travers son grand intérêt pour la science-fiction
(Matrix, Star Trek, Dune, Star Gate, Blade Runner, Battlestar
Galactica, etc.). >>
1. Terme anglais désignant une personne solitaire et intelligente, à la fois socialement
handicapée (mais pas toujours isolée car un nerd peut conserver une vie sociale) et pas-
sionnée par des sujets liés à la science et aux techniques. Aujourd’hui, le terme nerd peut
être employé chez les personnes qui se déclarent geeks sans en avoir les connaissances
techniques. (source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Nerd)

2. Monde virtuel utilisé comme environnement dans un jeu de rôle en ligne sur ordina-
teur. La particularité de ce monde virtuel est qu’il ne s’arrête jamais, il existe et évolue en
permanence, même quand le joueur le quitte, se déconnecte et éteint son ordinateur par
exemple. Ainsi, pendant son absence, d’autres personnes continuent à jouer, et le monde
change. Lorsqu’il se reconnectera, le joueur le retrouvera différent de lorsqu’il l’a quitté.
(source : http://fr.wikipedia.org/wiki/Monde_persistant)
REPORTAGE GEEK
>> Il voue une véritable passion à tout ce qui se rap-
porte aux univers parallèles ; tant dans les histoires de
science-fiction, que dans la possibilité offerte par les
mondes persistants2 de certains jeux vidéos on-line
(notamment World of Warcraft). Le geek est égale-
ment collectionneur, il a remplacé les jouets de son
enfance par les figurines propres à ses univers.
Par ailleurs, le geek fait preuve d’une imagination
débordante et éprouve le besoin de la mettre en scène
à travers des jeux de rôle mais aussi, phénomène plus
récent, à travers des courts-métrages visionnables par
le plus grand nombre sur les hubs de vidéos amateurs
que l’on trouve sur Internet (Youtube et Dailymotion
principalement).

Un profil à multiple facettes.

Cependant, il existe plusieurs types de geek qu’il


convient de différencier. Le geek se perçoit comme
étant ouvert d’esprit et comme s’intéressant à tout. Il
n’en demeure pas moins qu’il rejette une partie de son
entourage direct (filles, famille, etc.) - et de la société
plus généralement - présupposant de leur naïveté face
à la réalité des choses et de leur impossibilité à com-
prendre ce que lui comprend. Il y a une forme de stra-
tégie distinctive chez le geek qui pourrait s’apparenter
à une forme de snobisme. Le geek analyse les films de
science-fiction et ne partage ses conclusions qu’avec
d’autres geeks qui pourront, eux seuls, le comprendre.
Il croit généralement à un sens dans l’ordre des choses
mais aussi que le monde est contrôlé par les machines.
Il pense posséder une vérité rare et de ce fait appar-
tenir à un petit groupuscule de gens « éclairés ». Il
ne désire pas s’intégrer à la société et se revendique
en marge, contre la marchandisation qui touche sa
culture. Il ne désire pas que les produits constitutifs de
sa culture puissent devenir des produits de consom-
mation de masse. Ils ne veulent pas que leur culture
se rabaisse à celle de grand public jugé incapable d’en
percevoir les subtilités. >>

Il désire l’héroïsme des odyssées d’antan ce qui se


traduit pas son attrait pour l’héroïc-fantasy (cartes
Magic, jeu vidéo Final fantasy, jeu de rôle Dungeon
& Dragon, etc.) mais préserve également la fascina-
tion de la technique, propre à «  ses ancêtres » (les
nerds), qui se témoigne à travers son grand intérêt
pour la science-fiction (Matrix, Star Trek, Dune,
Star Gate, Blade Runner, Battlestar Galactica, etc.).
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>> De ce fait, le geek déclasse certaines œuvres jugées « trop commerciales » telles que Matrix, film
auquel il préférera substituer Ghost in the Shell, film d’animation portant également sur le sujet du rapport
entre l’homme et la machine mais qui se prétend plus ésotérique et moins accessible.

D’autre part, le geek adopte des comportements qui s’apparentent quelque peu à ceux d’un révolution-
naire désabusé. Il est en effet convaincu que sa vision du monde est la bonne et que son monde doit de-
venir un modèle pour toute la société. Il y a donc une logique, non de lutte car le terme est trop fort, mais
de tension entre le geek et la société. Cette forme de combativité s’est manifestée par les « faits d’arme »
qu’ont été la défense des mangas face à l’offensive de Ségolène Royal ou encore la défense des jeux de
rôle face à ceux qui y voient la simulation d’un pouvoir fasciste.

Le besoin d’échappatoire

Du fait qu’il est constamment dans des mondes irréels, le geek subit la pression de la réalité quotidienne.
S’il est jeune, il fait face le plus souvent à l’incompréhension de ses parents par rapport à ses centres d’in-
térêt et à son style de vie ; plus âgé, il fuit les responsabilités du travail et de la famille. Il voue toute son
énergie et son temps à sa passion.
Cependant, on aurait trop vite fait de dire que le geek est un no-life, c’est-à-dire un individu qui ne vit que
par procuration de son ordinateur et qui n’entretient pas de liens sociaux réels. Car il est vrai que les geeks
ont tendance à chercher, ce qu’ils ne trouvent pas dans la vie réelle, dans la vie virtuelle. C’est toutefois
partiellement faux puisque les geeks se retrouvent souvent entre eux physiquement afin de partager leurs
passions (jeu de rôle grandeur nature, etc.) mais aussi plus simplement pour boire des verres, aller à des
concerts ou manger au restaurant.
Ainsi, le geek est une cible marketing à appréhender dans sa subtilité. S’il a des habitudes de consom-
mation facilement identifiables, il est averse à la consommation de masse et manifeste un comportement
consumériste de différenciation à l’égard d’autrui. Pourtant, la majorité des geeks adorent les films de
super-héros qui ont battu des records d’entrées dans les box-offices américains, preuve que les comporte-
ments de consommation de leur communauté, en dépit de ce qu’elle revendique, ne sont pas véritablement
différents du reste de la société.

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