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Intervention d’Elio Di Rupo – Le 18 octobre 2010

Mesdames, Messieurs,

Depuis hier, nous sommes déçus.

A grand renfort médiatique, on nous annonçait une note de compromis.

Malheureusement, nous avons dû constater que le texte de Bart De Wever


contenait une série de propositions qui auraient des conséquences
désastreuses.

Conséquences désastreuses, à terme, pour l’Etat fédéral et donc pour la


sécurité sociale.

Conséquences désastreuses pour l’équilibre qui existe entre tous les


Belges, Wallons, Bruxellois et Flamands.

Conséquences désastreuses pour les Wallons et les Bruxellois car


certaines des propositions de Bart De Wever provoquent automatiquement
une diminution importante de leur niveau de vie.

Il était dès lors de notre devoir et de notre responsabilité de le dire. Et


conformément au souhait de Bart De Wever, nous lui avons transmis nos
remarques.

Je vais vous expliquer dans un moment les raisons objectives de notre


réaction aux propositions du clarificateur.

C’est vrai, j’aurais préféré une autre méthode de travail.

Nous serions dans un tout autre climat si la méthode du clarificateur avait


été différente.

Avant de déposer une note unilatéralement, une discussion à 7 partis


aurait été très utile. En effet, sur base d’un avant-projet de Bart De
Wever, le clarificateur aurait pu entendre les points de vue des uns et des
autres. Il aurait pu mesurer les difficultés et ensuite formulé une
proposition qui aurait certainement été plus équilibrée et donc plus
acceptable.

Les propositions de Bart De Wever sont pour le moment bien accueillies


en Flandre car elles donnent l’apparence d’un compromis. En réalité, c’est
une attaque frontale contre l’Etat fédéral et les francophones.
Le PS ne souhaitait pas réagir hier. Mais la note du clarificateur a été
rendue publique vers 15h15. Bart De Wever a aussi tenu une conférence
de presse à 17h30.

Ce n’est certainement pas la meilleure méthode pour arriver à un


compromis avec ses partenaires.

En effet, tout accord, que ce soit aujourd’hui ou demain, nécessite qu’il y


ait des points de vue partagés entre les partis francophones et
néerlandophones. Toute réforme institutionnelle nécessite d’ailleurs une
majorité des 2/3 au Parlement et une majorité dans chaque groupe
linguistique.

Nous ne comprenons pas pourquoi depuis plusieurs semaines, la N-VA a


refusé que les 7 partis se voient ensemble.

On peut se demander si un des objectifs de cette note n’est pas de


conduire le pays à une impasse et de forcer l’organisation de nouvelles
élections dans un climat de confrontation communautaire. Sachez que le
PS est totalement opposé à l’organisation de nouvelles élections.

Les citoyens se sont exprimés. C’est aux hommes et aux femmes


politiques de trouver un accord équilibré.

Je reste convaincu que c’est possible. Un travail considérable a été réalisé.


La preuve en est que Bart De Wever s’est inscrit dans le périmètre de la
pré-formation. Nous devons continuer.

Mesdames, Messieurs,

La note du clarificateur ne répond même pas aux attentes minimales des


francophones.

Nous espérions une note de compromis. Hélas, ce n’est pas le cas.

La note de Bart De Wever peut apparaître comme un compromis entre les


différentes positions des partis flamands. Après une analyse approfondie,
je pense que beaucoup de Flamands se rendront compte des effets
pervers de ces propositions.

Nous, ce que nous attendions, c’était un compromis entre les thèses des
partis francophones et des partis flamands. Ce n’est manifestement pas le
cas.
Oui, le rapport du clarificateur se base sur le travail effectué pendant la
pré-formation. Mais il ne reprend que les gestes d’ouverture faits par les
partis francophones à l’égard des partis flamands. Par contre, le texte ne
reprend quasiment aucune des demandes francophones, même pas celles
qui avaient fait l’objet d’un accord confirmé auprès des médiateurs.

Pour le dire autrement, les propositions du clarificateur nient


Wallons et Bruxellois. C’est comme si les francophones
n’existaient pas !

Je regrette que les points de vue des 7 partis n’aient pas été rapprochés
mais au contraire éloignés.

Les problèmes majeurs sont :

- Le projet de loi de financement ;

- La Région de Bruxelles-Capitale ;

- BHV ;

- La responsabilisation emploi ;

- Et les allocations familiales.

1. Loi spéciale de financement

Force est de constater, contrairement à ce qui est dit, que le modèle


proposé par Bart De Wever ne respecte pas les 12 principes confirmés par
les 7 partis aux médiateurs et dans le groupe de haut niveau.

En effet, le modèle qui se retrouve dans le rapport est grosso modo celui
de la N-VA.

Il revient à laisser à l’Etat fédéral seulement 30% de ses capacités


fiscales à l’IPP.

Ce modèle étouffe et fait mourir à petit feu l’Etat fédéral, l’instance qui
unit tous les Belges notamment grâce à la sécurité sociale.

Le modèle qui est proposé pourrait aussi favoriser la spéculation financière


contre nous. L’Etat fédéral serait en effet privé d’une grande partie de ses
capacités fiscales et livré à la merci des spéculateurs financiers.
Par ailleurs, dans le modèle de Bart De Wever, aucune garantie n’est
prévue pour éviter la concurrence fiscale entre les Régions, ce qui va
empêcher le développement économique de Bruxelles et de la Wallonie.

Qu’est-ce que la Flandre pourrait gagner à affaiblir les effets du Plan


Marshall ?

De plus, contrairement à ce que la note laisse croire, les propositions


conduiront à terme un étranglement financier de Bruxelles.

Pour rester constructif, le PS continue à demander de faire calculer par la


Banque Nationale les conséquences financières de différents modèles, tant
celui de la N-VA que celui du CD&V, de Franck Vandenbroucke et des
francophones.

2. Bruxelles

Une série de propositions nous choquent, car elles visent à faire co-gérer
Bruxelles par les 2 Communautés ou par le fédéral.

En fait, Bruxelles en tant que Région est niée. On croirait revenir 30 ans
en arrière, à l’époque où Bruxelles était au frigo.

3. BHV

Force aussi est de constater que la proposition de Bart De Wever


concernant BHV n’est pas équilibrée. La note du clarificateur constitue un
recul considérable pour les droits politiques et administratifs des
francophones dans les communes de la périphérie.

Par ailleurs, et cela nous a profondément choqués, BDW veut scinder


l’arrondissement judiciaire de BHV, en supprimant des droits
élémentaires à des citoyens francophones de Hal-Vilvoorde.

4. Responsabilisation liée à l’emploi

Le PS l’a dit à plusieurs reprises. Nous sommes d’accord avec un système


de responsabilisation des Régions, qui permettrait de récompenser ou
sanctionner les Régions en fonction de l’efficacité des politiques menées.
Comme prévu dans les 12 principes acceptés par les 7 partis, nous
sommes d’accord pour renforcer la responsabilisation des Régions en
tenant compte des situations différentes de départ et en intégrant divers
paramètres.

Malheureusement, force est de constater que le rapport de Bart De Wever


limite cette responsabilisation au seul critère de l’IPP, qui est le plus
défavorable aux Bruxellois et aux Wallons.

Le modèle de responsabilisation du clarificateur ne propose pas de


bonus malus. Il n’a aucun lien avec l’emploi, puisqu’il ne tient
compte ni du nombre de chômeurs ni du nombre d’emplois créés.
Et il repose sur le seul paramètre de l’IPP, alors que les francophones
avaient dit à de nombreuses reprises qu’il fallait tenir compte de plusieurs
paramètres.

5. Allocations familiales

Si la proposition de la N-VA était appliquée, les familles wallonnes


perdraient en moyenne 70 euros d’allocations familiales par enfant. Les
familles bruxelloises perdraient plus de 150 euros d’allocations familiales
par enfant (par an).

En quoi ce type de propostion est-il dans l’intérêt de tous les Belges ?

Mesdames, Messieurs,

Il est également de mon devoir et de ma responsabilité de dire qu’il faut


continuer à discuter.

La situation est certes compliquée. L’incompréhension domine, tant chez


les francophones que chez les néerlandophones.

Mais nous devons continuer à négocier.

Le PS répondra à toutes les invitations à négocier selon les


modalités qu’il revient désormais au Roi d’indiquer.

Pour évaluer la situation, j’inviterai cette semaine les 3 autres


partis francophones à une concertation.
Mesdames, Messieurs,

Que les choses soient bien claires.

Oui, le PS reste favorable à une réforme approfondie de l’Etat, avec des


transferts importants de compétences vers les entités fédérées.

La population flamande souhaite un changement radical de la Belgique,


avec plus d’autonomie pour la Flandre. Nous l’avons bien compris.

J’ai indiqué, lorsque j’étais pré-formateur, que le centre de gravité devait


se déplacer de manière déterminante de l’Etat fédéral vers les entités
fédérées. Pour nous, ce centre de gravité doit se déplacer vers les
Régions, 3 Régions traitées sur un pied d’égalité.

Nous voulons réaliser la 6ème réforme de l’Etat et j’espère que nous allons
le faire ! Parce que je suis convaincu qu’elle peut constituer une
opportunité pour l’ensemble de la population, pour tous les Wallons, les
Germanophones, les Bruxellois et les Flamands. Je reste convaincu que la
Belgique a une valeur ajoutée pour les citoyens et les acteurs socio-
économiques. Construire ensemble la nouvelle Belgique est la seule
manière d’en garantir la stabilité.

Oui, le PS est favorable à une augmentation significative de la capacité


financière des Régions, mais pas si cela menace la sécurité sociale. Les
Wallons et les Bruxellois n’ont pas peur de prendre leurs responsabilités et
de rendre compte de leur gestion.

Oui, le PS est favorable à une solution définitive équilibrée sur BHV.

Nous voulons un accord. Mais pas n’importe comment ni à


n’importe quel prix.

Je continue à croire que c’est possible.

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