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sur le
numérique
hors-série
Cloud
Computing
Qu’est-ce que
ça va changer ?
ÉDITORIAL
par Éric Boustouller, Président de Microsoft France,
vice-président de Microsoft International.
Cloud
computing
l’informatique
autrement
L’image fait rêver. Celle d’une informatique simple,
décentralisée, débarrassée de toutes ses contraintes techniques.
Une informatique devenue aussi accessible que l’eau
ou l’électricité. L’image prend corps : c’est un nuage.
Une révolution des usages numériques reposant sur l’utilisation
d’Internet et la mutualisation des ressources de calcul
dans de gigantesques fermes de serveurs.
Souplesse, sécurité, économies... vous avez dit révolution ?
Enquête : Pierre Bro.
< enjeux >
T
Joannes Vermorel, PDG de Lokad serveurs distants interconnectés au
et souveraineté avec acuité. sein de fermes de serveurs géantes.
out s’est accé- offre en direction des entreprises, sur la filtre. Rapidement 5 000 fans se présen- Si le nuage a encore une bataille à imposent notamment que l’inté- « Nuage » public
léré en 2006. Plus base d’un service à la carte, qui a ouvert tent, puis 8 000 et finalement 15 000. Le livrer, ce sera celle de la confiance. grité et la sécurité des données On dit d’un nuage qu’il est
de dix ans après la voie à un changement considérable cloud va permettre de redimensionner À partir du moment où les don- soient garanties lors des trans- public quand il est opéré par des
avoir lancé sa des usages. la salle en un claquement de doigts et, nées quittent l’espace clos, connu ferts ». Évidemment, le bon sens fournisseurs de services cloud.
librairie en ligne, surtout, de gérer l’installation de tous et maîtrisé par l’utilisateur (le veut – et c’est d’ailleurs l’avis Le nuage public donne aux clients la
le cybermarchand l’informatique aussi ces spectateurs supplémentaires », siège social de l’entreprise, le site de l’ensemble des experts – que possibilité de déployer et d’exploiter
Amazon a l’idée accessible
que l’électricité explique Vincent Vergonjeanne, fonda- de l’administration centrale, le ces données soient, en réalité, des applications en ne payant
de rentabiliser Quatre ans plus tard, la météorite cloud teur de la start-up Kobojo, spécialisée centre d’hébergement du pres- bien mieux surveillées chez des que pour les ressources utilisées.
son parc de ser- n’a d’ailleurs pas fini de produire ses dans les jeux en ligne (voir page 15). tataire informatique...), il est légi- spécialistes des data centers que « Nuage » privé
veurs, qu’il n’uti- effets. Même si certains veulent y voir L’image est éclairante. Souplesse, qua- time, pour lui, de s’interroger : ces dans des entreprises dont la sécu-
On dit d’un nuage qu’il est privé
lise en effet à pleine capacité qu’à la l’habillage marketing d’une évolution lité de service, réduction de coûts. Voilà, informations sont-elles bien pro- rité n’est pas le métier.
quand il est déployé dans le centre de
période de Noël. Pourquoi ne pas louer somme toute banale de l’offre informa- résumée en trois concepts, l’informa- tégées ? N’y a-t-il pas des risques Pour autant, force est de
données du client – entreprise
ces espaces à des clients le reste de tique, les faits sont là. Les géants de l’in- tique dématérialisée. Une informatique d’intrusion ? de pertes ? de dégra- constater qu’il demeure une incer-
ou administration.
l’année ? Pas seulement pour stocker formatique, déjà rompus au traitement qui deviendrait aussi accessible que dation ? Dans le cas de données titude juridique et réglementaire
leurs données mais aussi pour qu’ils de données à distance – pensez aux l’eau ou l’électricité. gouvernementales se pose égale- dont les États doivent s’emparer. Virtualisation
fassent travailler ses serveurs. Tout ceci quelque 370 millions de comptes Hot- ment, avec une acuité renouvelée, « Le secteur privé ne peut pas Procédé qui consiste à faire
via Internet et à la demande, en pouvant mail gérés par Microsoft – accélèrent la Inventer la question de la souveraineté répondre seul à ces défis. Les pou- fonctionner sur un seul serveur
augmenter en temps réel la capacité de construction de fermes de serveurs de de nouveaux métiers nationale : comment s’assurer voirs publics joueront un rôle-clé, physique plusieurs systèmes
traitement et en ne payant que ce qui plus en plus gigantesques (voir page La standardisation du réseau autour du juste contrôle de données qui non seulement en se servant de d’exploitation et leurs applications
était « consommé ». 10). Les chiffres commencent à donner de la norme Internet, la demande de transitent en permanence entre l’informatique dématérialisée pour et à recréer ainsi plusieurs ordinateurs
Le cloud computing, ce nuage tra- le vertige. Poussé par une croissance plus en plus importante de puissance différentes fermes de serveurs, améliorer ses services et accroître virtuels sur une même machine.
ditionnellement utilisé par les informa- annuelle que le cabinet américain IDC de calcul, le souci d’économies de la aux quatre coins du globe ? leur transparence, mais aussi en La virtualisation, couplée
ticiens pour désigner l’immense nébu- estime à 25 %, le marché mondial du plupart des entreprises, plaident en Bien sûr, le cloud compu- modernisant la législation pour à l’automatisation des tâches,
leuse du Net, prenait une dimension cloud devrait atteindre cette année faveur d’une telle évolution. Pourquoi ting n’est pas une zone de non- l’adapter à la technologie », rap- sont à la base du cloud computing.
nouvelle. Non que cette informatique, 53 milliards d’euros. Pour la seule un grand groupe investirait-il en capa- droit. Comme le rappelle Arnaud pelait ainsi, en janvier 2010, Brad Open Data
dite dématérialisée, ait été inconnue France, il est évalué à 1,9 milliard d’eu- cités informatiques supplémentaires David, avocat chez August & Smith, vice-président et directeur Mise à la disposition de données
jusqu’alors. Loin de là ! Après tout, ros par Markess international. juste pour absorber des pics d’activité, Debouzy, « les réglementations juridique de Microsoft. D’où son publiques sur des plateformes
la plupart d’entre nous « faisaient du Pourquoi un tel boom ? « Le cloud par exemple au moment de la clôture de européennes et françaises en appel aux pouvoirs publics, et Internet dédiées. Guidée par
cloud » sans le savoir, ne serait-ce computing c’est un peu comme une ses comptes ? Et songez à l’avantage matière de protection des don- notamment à l’Union Européenne, des principes de transparence et de
qu’en utilisant un service de webmail, salle de spectacle modulable en temps pour une PME aux ressources limitées nées personnelles s’appliquent pour mettre en place un cadre stimulation économique, l’ouverture
en stockant des photos en ligne, en réel. Imaginez que Johnny Hallyday de pouvoir accéder aux toutes dernières au cloud computing, et plus réglementaire cohérent dans le des données conduit à la création de
partageant des informations person- ait décidé de faire son retour sur scène technologies, que, traditionnellement, particulièrement, les disposi- cloud, qui garantisse la protection nouveaux services pour les citoyens
nelles sur un réseau social. Mais c’est dans un théâtre prévu pour accueillir à seule une grande entreprise peut s’offrir. tions encadrant le transfert de des données et le respect de leur ainsi que de nouvelles opportunités
le principe consistant à formaliser une peine 1 000 initiés. Mais l’information Et ce, sans avoir à se Suite page 8 >>> données. Ces réglementations intégrité. ■ FLORENCE PUYBAREAU commerciales pour les entreprises.
année 53 milliards
Ces outils (messagerie,
d’un opérateur cloud et ne paie son application, gestion de la relation client…)
que ce qu’elle consomme. la gère en temps réel. lui permettent de mettre
d’euros. Elle adapte sa consommation,
avec rapidité et facilité, au succès
immédiatement, à disposition
des collaborateurs,
de son application. Les pics
les logiciels les plus récents,
à la hausse, comme à la baisse, Intranet
sans se soucier de
ne posent plus de problème.
>>> soucier ni de leur mise en œuvre, leur maintenance.
cœur du nuage
d’avoir un très grand espace car plus le serveurs y est ainsi assuré naturelle- opportunités de développement
centre de données est vaste, plus l’ef- ment via un système de free cooling – considérables. De la puissance
ficacité économique sera élevée : « un l’air chaud soufflé par les machines est mais aussi et surtout des
Au
data center destiné au cloud computing évacué par le toit, constitué d’un simple applicatifs sophistiqués
doit pouvoir héberger au moins 50 000 grillage métallique, et l’air extérieur, plus (notamment en matière de
serveurs. Celui que Microsoft possède frais, est soufflé à travers les machines. CRM ou gestion de la relation
à Dublin a la capacité d’en héberger « Chaque nouvelle génération contribue client) qui leur étaient jusqu’à
environ 100 000. Et le data center que à améliorer le PUE 1 des data centers. présent souvent inaccessibles.
C’est tout simplement hors normes ! Imaginez un bâtiment grand comme quinze terrains nous avons ouvert l’année dernière à Le PUE d’un site de troisième généra- C’est d’autant plus crucial que
de football, où des dizaines, voire des centaines de milliers de serveurs gèrent l’informatique Chicago est encore plus grand », précise tion comme celui de Chicago est ainsi bien des PME frôlent le point
en nuage. Comment ces data centers assurent-ils l’hébergement, la protection et la sécurité Bernard Ourghanlian. de 1,22. Avec la quatrième génération, de rupture lorsqu’elles ont une
des données des utilisateurs dans le respect de l’environnement ? nécessité urgente de ressources
nous visons un PUE inférieur à 1,125 »,
Des nouveaux data centers informatiques supplémentaires
précise Bernard Ourghanlian. Avec en
L
automatisés
pour accompagner leur croissance
es data centers, simples hangars c’est d’abord être assuré de pouvoir les par des moteurs qui font chacun la ligne de mire, une équation énergétique
et qu’elles n’ont pas les moyens
à machines comme on le pense connecter, de disposer de circuits de taille d’un immeuble de deux étages », Arrive déjà une quatrième généra- idéale dans laquelle chaque kilowatt
de se les offrir. Et puis, souligne
souvent ? Pas si sûr. Garants de refroidissement performants, de proté- explique Bernard Ourghanlian, le direc- tion de data centers, dont la grande livré au data center n’est utilisé que
Patrick Bertrand, président
la bonne marche des nuages ger les installations et d’avoir plusieurs teur technique et sécurité de Microsoft différence avec ses prédécesseurs est pour faire fonctionner les serveurs. ■
de l’Association française
informatiques, ils sont conçus pour systèmes énergétiques et informatiques France. d’être entièrement constitué de contai- F. P.
des éditeurs de logiciels,
assurer la disponibilité permanente et la qui, en cas de panne du système princi- ners modulaires remplis de serveurs. 1. Le PUE (Power Usage Effectiveness) est le « le cloud va pousser les éditeurs
sécurité absolue des services et infras- pal, seront capables de prendre le relais. Plus de 50 000 serveurs Chaque container renferme entre rapport entre l’énergie apportée au data center à proposer des plateformes
tructures qu’ils hébergent. L’enjeu est « Pour nos services cloud, disponibles C’est pourquoi si, de l’extérieur, le 2 500 et 4 500 serveurs configurés au et celle réellement utilisée par les serveurs.
de services qui satisferont en
de taille quand on sait, par exemple, que via notre plateforme Windows Azure, centre de données ne montre pas préalable en usine, et est directement un seul point d’entrée tous les
les services Windows Live (Messenger, toutes les données sont enregistrées beaucoup de signes distinctifs, en connecté au réseau dès son arrivée besoins des entreprises, en terme
Hotmail…) enregistrent, dans le monde, trois fois. Nos centres sont également revanche, sa conception, son aména- dans le centre. Ce modèle permet de d’infrastructures et de logiciels
près de 2,5 milliards de connexions équipés de deux niveaux successifs de gement et son utilisation répondent à réduire sensiblement les délais de applicatifs ». De quoi simplifier
chaque jour ! redondance énergétique, l’un assuré des critères très précis qui ne sont pas déploiement et le coût d’exploitation : leur activité informatique et
Héberger et faire fonctionner des par des batteries pour lesquelles des sans rappeler ceux requis pour les cen- « il a fallu 18 mois pour que le centre de surtout faire baisser et leurs
milliers de serveurs informatiques, salles entières ont été dédiées et l’autre trales nucléaires. Le choix du site se Dublin soit entièrement opérationnel. coûts et les prix. ■ P. B.
accélérateur Un
Un million
et demi
LOKADAnalyser les ventes
pour ajuster les stocks
d’innovation
d’emplois Joannes Vermorel a du nez. C’est analyser plusieurs millions de
en Europe utile lorsque l’on se lance dans chiffres ! D’autant que la durée
L
les effets du cloud computing sur
l’économie européenne et celle des le traitement de plus en plus fin façon beaucoup plus précise.
e droit à l’erreur. Quel de faire le tri dans les offres cloud pour d’estimer à l’avance le succès qu’une différents États-membres de l’Union. des données, rendu possible
meilleur atout dans les choisir la mieux adaptée ». En d’autres nouvelle application va rencontrer Selon son analyse, l’adoption rapide par les capacités de traitement Absorber les variations
mains d’une entreprise termes, c’est tout un écosystème qui va auprès de leurs membres. Sous-dimen- du cloud computing sur le Vieux informatique toujours plus acces- de charge
qui souhaite créer de nou- se mettre en place pour que le cloud soit sionner la capacité informatique d’ab- Continent pourrait permettre la création sibles, offrait des perspectives Le recours à une solution de cloud
veaux produits ou services, totalement efficient. sorption du nouveau trafic généré, c’est de centaines de milliers de nouvelles commerciales considérables. computing s’est donc très vite
surtout lorsque celle-ci est s’exposer à des dysfonctionnements entreprises et par conséquent Certes, la prévision statis- imposé. « Nous avons parfois
toute jeune et dispose de S’adapter avec souplesse meurtriers sur le plan marketing. La sur- d’au moins un million et demi d’emplois. tique n’est pas une science nou- besoin de traiter en à peine une
faibles moyens financiers et humains ? C’est d’autant plus décisif que le dimensionner peut dramatiquement « Le premier et principal bénéfice velle. Elle date de plus d’un siècle. heure, des données qui arrivent
L’une des clefs de l’innovation n’est-elle cloud constitue une ressource irrem- saler la facture. Avec le cloud, les pics de l’informatique en nuage, Ce qui est plus original, c’est la en fin de journée, afin que notre
pas cette possibilité de tester en gran- plaçable pour tous les créateurs. Une à la hausse – comme à la baisse… – ne c’est l’accès pour les PME façon dont Joannes Vermorel va client puisse décider des produits
deur réelle une idée, sans que cela relève ressource peu coûteuse bien sûr, mais posent plus de problème. à des ressources technologiques aborder cette discipline lorsqu’il à charger dans les camions qui
à chaque fois du quitte ou double ? « Les surtout s’accommodant parfaitement à coût réduit grâce à la mutualisation commence à s’intéresser aux quitteront le lendemain matin
start-up dans l’univers des nouvelles de l’incertitude qui caractérise toute Ce n’est que le début et au partage des infrastructures besoins des sociétés de distri- son dépôt à destination des maga-
technologies ont autre chose à faire que recherche innovante. Prenez l’exemple Simplicité, élasticité, mais aussi rapidité informatiques », précise Federico Etro. bution. Celles-ci, en tout cas les sins », explique Joannes Vermorel,
de se soucier de leurs serveurs et de des réseaux sociaux, dont la plupart de réaction. On sait à quel point la faculté La création de nouvelles entreprises plus grandes, sont bien sûr rom- qui vient d’avoir vingt-neuf ans.
enclencherait ainsi un cercle vertueux
les gérer. L’essentiel pour elles, c’est de sont basés sur des solutions hébergées d’adaptation de l’offre sur ces nouveaux pues à l’exercice de l’anticipation. Aujourd’hui, toutes ces opé-
– stimulation de la concurrence,
pouvoir mettre en œuvre rapidement dans le nuage. Il est toujours difficile marchés est stratégique. Et ce n’est pas Mais sur la base d’historiques de rations sont bien sûr automati-
augmentation de la production,
leur projet », s’exclame Guillaume près de se calmer ! Le développement ventes produit par produit. sées. Trois cent clients de Lokad
baisse des prix – et aurait, de facto,
Belmas, manager de business unit de l’Internet mobile est un vecteur pri- L’idée de Lokad, la start-up envoient régulièrement leurs
un effet positif sur la consommation.
chez Wygwam, un bureau d’expertise vilégié pour l’innovation. Là encore, la créée par notre mathématicien statistiques pour des prévisions
Rien qu’en France, on pourrait assister,
technologique. Mais attention, pré- souplesse du cloud va permettre d’of- en 2007, est beaucoup plus ambi- à échéance d’une semaine, d’un
vient Patrick Bertrand, président de C’est tout frir à des millions d’abonnés de nou-
d’ici à cinq ans, à la création
de 9 000 à 48 000 entreprises
tieuse : « nous avons construit nos mois ou même d’une année. Les
l’Association française des éditeurs de
logiciels : « il est illusoire de penser que un écosystème velles applications, d’avoir des feed-
backs instantanés pour éventuellement
et de 30 700 à 154 400 emplois. ■ F. P. modèles pour analyser les données
de ventes de produits, “ dans la
dix ingénieurs qui composent
désormais l’équipe de Lokad
tout pourra se faire systématiquement
à distance et sans le moindre contact.
qu’il va falloir ajuster le tir, sans que cela nécessite des
investissements considérables. Gilles
largeur ”, c’est-à-dire en utilisant
toutes les corrélations pour affi-
sont assez fiers de leurs perfor-
mances : le taux d’erreur de leurs
Les prestations de cloud, qui seront de mettre en place Babinet, cofondateur de la start-up Cap- ner les prévisions. » En d’autres clients, c’est-à-dire l’inadaptation
plus en plus sophistiquées, devront,
pour fonctionner le mieux possible, être pour que le cloud tain Dash (voir p. 14), résume à sa façon
l’impact du phénomène : « l’informatique
termes, il s’agit de croiser les
informations concernant tous les
du stock dans les magasins par
rapport aux ventes qui se réali-
accompagnées soit par des spécialistes
chez le fournisseur lui-même, soit par
soit totalement dématérialisée, c’est une formidable
opportunité offerte aux tout petits de
produits, dans tous les points de
vente, sur une période donnée.
sent, a diminué en moyenne de
35 %. Pas mal. Et très rentable.
des intermédiaires spécialisés à même efficient. pouvoir très vite voir très grand. » ■ P. B. L’algorithme de Lokad peut ainsi ■ P. B.
Le nuage
>>> 3 QUESTIONS À NATHALIE WRIGHT
«
à l’utilisation du nuage ont été estimées entre 25 et 50 %. Saisissant ! les moyens technologiques de l’État sans pour autant
abandonner aucun territoire. Plus besoin d’infrastruc-
tures informatiques lourdes et complexes, rarement
Les services fondés sur Élément stratégique central de électroniques de la ville de Carlsbad, en exploitées au maximum de leurs possibilités. Une
le cloud computing vont cette politique : le cloud computing. Californie, au stockage de l’ensemble simple connexion Internet suffit pour améliorer les
révolutionner la manière « Fragmentation, mauvais suivi des des données nécessaires à l’unité de services rendus aux citoyens et leur proposer de nou-
dont les nouvelles tech- projets, poids des systèmes dépas- l’armée de l’air chargée d’encadrer les velles applications en ligne dans tous les domaines
nologies fonctionnent, mais également sés mais toujours utilisés : ces fac- missions de la NASA, à Cap Canaveral. possibles (santé, éducation…). Avec le cloud compu-
permettre d’économiser les dollars des teurs ont longtemps empêché le Ses résultats sont saisissants : en ting, l’informatique gagne en agilité au service d’un dans laquelle elle pourrait puiser à volonté et trouver Nathalie
contribuables américains. » Cette petite secteur public de bénéficier des gains moyenne, les dépenses informatiques renouveau de la relation avec le citoyen. un modèle de site prêt à l’emploi, personnalisable en Wright,
phrase aux allures de programme a été de performance liés aux nouvelles de ces agences ont diminué de 25 à fonction de ses besoins. Les démarches lui seraient directrice
secteur
lancée dans le débat public outre-Atlan- technologies, alors que le privé en béné- 50 %. Darell West, vice-président de Concrètement, comment cela pourrait-il se considérablement facilitées ! Voilà, à travers deux
public de
tique il y a désormais un peu plus d’un ficiait. [Le cloud] a le potentiel de [les] la Brookings Institution et signataire traduire ? exemples très simples, un aperçu de tout ce que le
Microsoft
an – elle a, très précisément, été publiée réduire », précise-t-il dans un grand de cette étude, liste quelques-uns des Prenons l’exemple d’une petite mairie. Aujourd’hui, la cloud computing peut apporter.
France.
le 15 septembre 2009, sur le blog officiel document programmatique, « State facteurs pouvant expliquer ces diffé- mise à la disposition de ses agents des outils technolo-
de la Maison Blanche. of Public Sector Cloud Computing », rences : « l’étendue et la rapidité de la giques nécessaires au bon exercice de leurs fonctions Dans ce cas, qu’est-ce qu’on fait des outils
Vivek Kundra, son auteur, est le publié en mai 2010. migration, le choix de cloud public ou comme une boîte mail, des plateformes d’échange et et des applications déjà développés ?
« monsieur nouvelles technologies » du privé, le degré de sécurité ou de confi- de partage de fichiers, voire une messagerie instanta- Il est tout à fait possible de faire coexister deux
président américain, Barack Obama – il Réduire les dépenses dentialité des données retenu. » née, est bien souvent complexe. Ces services existent systèmes, l’un traditionnel, l’autre dans le nuage,
porte le titre officiel de « Chief Informa- informatiques
En France, la révision générale des dans le nuage, notre mairie peut d’ores et déjà y accé- ou bien de migrer tout ou partie des applications
tion Officer » des États-Unis, ou « direc- Le CIO des États-Unis ne s’est pas politiques publiques a fixé comme der, via une simple connexion Internet et ne paiera existantes dans le nuage. Dans ce cas, le processus
teur des systèmes d’information », en encore engagé sur un chiffrage précis objectif une baisse de 10 % en trois qu’en fonction de ce qu’elle consommera. Cela permet est plus ou moins long en fonction de la complexité
bon français. En un an à peine, il est des économies potentielles réalisées ans des dépenses de fonctionnement à n’importe quelle petite mairie de donner à ses agents de l’application et de ce qu’on souhaite en faire :
probablement devenu l’informaticien par une migration vers le cloud compu- de l’État et l’application de nouvelles les outils les plus modernes, sans investir lourdement. de la simple externalisation de son hébergement
le plus connu au monde… des non- ting. D’autres, néanmoins, ont passé en règles de gouvernance, au bénéfice À cet égard, le cloud computing permet une égalité à sa transformation complète en service cloud.
informaticiens ! Raison de cette noto- revue les différentes expériences réa- d’une mutualisation des fonctions de traitement entre les agents. C’est, d’une certaine Avec comme bénéfices à la clé : la mutualisation
riété : depuis la Maison Blanche, il a lisées au niveau local, à l’échelon de support. Sans doute des idées à trouver manière, la réduction de la fracture numérique au sein des anciennes applications, leur disponibilité à la
engagé une politique de réduction des villes ou dans certains départements dans le nuage… ■ ANTOINE BAYET de la fonction publique. demande et leurs mises à jour facilitées. Selon le
dépenses informatiques du pays, un d’agences fédérales. La Brookings Poursuivons notre exemple : notre petite mairie degré de confidentialité des informations qu’elles
poste qui pèse 76 milliards de dollars Institution, l’un des think tanks amé- souhaite lancer un portail Internet, sur lequel elle pro- traitent, ces applications pourront être hébergées
par an, dont 19 milliards consacrés aux ricains les plus réputés, a ainsi diffusé, poserait aux habitants de sa commune un ensemble de dans un nuage public – externalisé –, privé – interne
infrastructures. en février 2010, une étude comparant services en ligne (gestion de ses emprunts à la biblio- à l’administration concernée –, ou une combinaison
les économies réalisées dans sept thèque, paiement de la cantine en ligne, demande de des deux. Ce qui compte, c’est que quelle que soit
expérimentations distinctes (Saving permis de construire…). Imaginons qu’elle ait accès l’option choisie, ce soit en totale transparence pour
Money Through Cloud Computing) – à une bibliothèque d’applications informatiques, l’utilisateur final. ■
de la migration des boîtes aux lettres
Tour du monde
des pionniers de l’informatique en nuage
Quand le cloud accélère Partout dans le monde, le mouvement « Open Data » ou « données ouvertes »
commence à faire parler de lui. Son principe : rendre accessible à tous
l’ouverture des
des volumes d’informations qui, parce qu’on ne savait pas quoi en faire
ni comment les traiter, prenaient la poussière sur les étagères
d’administrations. Il trouve, dans le nuage, un partenaire d’évidence.
À
quelle heure les voies
d’accès aux métropoles
de faire de quel logiciel. Le mouvement Open
Data, largement engagé aux États-Unis,
britanniques sont-elles la maintenance commence d’ailleurs à se développer en
de serveurs
le plus congestion- France (voir l’interview de Jean-Louis
nées ? Et par consé- Missika page 23).
quent : quand ai-je
intérêt, moi, patron mais de proposer Le cloud, facilitateur de l’Open
Data ? Chris Moore, le CIO d’Edmon-
d’une entreprise de transport routier, à de meilleurs ton, première ville à avoir fait le choix du
services aux
faire circuler ma flotte de 38 tonnes ? En développement d’une politique d’Open
Grande-Bretagne, les réponses à toutes Data basée à 100 % sur des technolo-
ces questions se trouvent en ligne. Ou,
plus précisément, dans des données citoyens » gies cloud (voir notre article sur ces
pionniers canadiens page 22), en est
publiques, accessibles à tous, citoyens, Chris Moore, DSI d’Edmonton, Canada convaincu. « Notre métier, ce n’est pas
scientifiques, entrepreneurs… de faire de l’informatique, encore moins
Lancé le 21 janvier 2010, data.gov.uk de créer de nouvelles opportunités de de la maintenance de serveurs. Mais de
regroupe plusieurs milliers de jeux de business, assurait de son côté Stephen saisir tout le potentiel de la technologie
données qui, habituellement, prennent Timms, le ministre britannique du pour proposer de meilleurs services aux
la poussière sur les étagères d’adminis- Numérique. L’industrie va pouvoir uti- citoyens », explique-t-il. Edmonton a
trations. Il s’inspire du précédent des liser ces données de manière créative, ainsi choisi d’héberger les données et
États-Unis, où l’administration Obama pour développer de nouveaux services les applications hors des serveurs de la
a initié, quelques mois plus tôt, un chan- et en retirer une valeur économique. » ville. « Nous voulions aller vite ! », sou-
tier similaire, avec le site data.gov. L’ob- ligne Chris Moore, qui explique que,
jectif premier, évidemment, est bien de Transformer grâce à cette solution cloud, trois petites
développer la transparence, raconte, les
données en data semaines seulement ont été néces-
dans une tribune-programme, publiée Collectivités territoriales et autres saires à la publication des premiers jeux
dans le Guardian,Tim Berners-Lee, l’un agences de développement écono- de données. « Le choix d’infrastructures
des pères du web, qui a largement ins- mique sont évidemment parmi les propres aurait été beaucoup trop long et
piré la réflexion ayant conduit au lance- premières concernées. Détentrices fastidieux. Le cloud nous a semblé une
ment du site, en janvier. Les internautes de milliers de données non exploitées, solution naturelle, une manière logique
peuvent y consulter toutes sortes de parfois diffusées depuis de longues d’étendre notre écosystème en ligne.
données, depuis la performance des années mais dans des formats relati- Tout cela était vraiment presque décon-
établissements scolaires jusqu’au taux vement inadaptés à un travail de pro- certant de facilité... » ■ A. B.
de criminalité comté par comté. Ils sont grammation, elles doivent en faire de
également largement invités à les diffu- véritables datas. Comprenez par là des
ser, à les publier. données informatiques exploitables à
Mais l’enjeu citoyen n’est pas le seul partir d’un programme informatique,
ayant conduit à cette mise en ligne : avec une publication dans un format
« Publier ces données, c’est l’occasion standard, utilisable depuis n’importe
de l’Open Data ?
novembre 2010
www.RSLNmag.fr
Microsoft France - SAS
au capital de 4 240 000 euros
- 39 quai du Président-
>>> 3 QUESTIONS À JEAN-LOUIS MISSIKA Roosevelt 92130
Une politique d’Open Data bien menée, c’est un équilibre complexe. adjoint au maire de Paris, chargé de l’innovation, de la recherche et des universités. Issy-les-Moulineaux
Nous sommes allés jeter un œil à ce qu’ont entrepris • Directeur de la publication
les municipalités de Vancouver et d’Edmonton, deux exemples réussis
au Canada, en identifiant trois facteurs-clés de succès. « Un enjeu démocratique Éric Boustouller
• Directeur de la rédaction
et de modernité économique »
Marc Mossé
• Directrice déléguée
Constance Parodi
Une volonté à mener formalisent, noir sur blanc, tiques, en voyant ce genre d’appli-
• Rédactrice en chef
l’une des politiques d’Open Data cations, et les économies qu’elles En juin 2010, le conseil municipal technique et d’utilité. Il s’agit, par exemple,
politique forte les plus ambitieuses adoptées peuvent permettre, sont incités à de Paris a adopté une délibération du catalogue des bibliothèques munici-
Mélanie Daboudet - redaction@
regardsurlenumerique.fr
La scène se passe au conseil muni- par une collectivité locale. David accélérer le processus. Plus de don- consacrant le principe général pales, du plan de voirie, du rattachement • Rédaction Antoine Bayet,
cipal de Vancouver, le 19 mai 2009. Eaves, 35 ans, l’un des rédacteurs nées, ce sont plus d’applications, d’une « diffusion progressive des immeubles aux différents bureaux de Pierre Bro, Florence Puybareau
Dans une démarche alors totale- de cette charte, est un « gourou » du donc plus de start-up mobilisées. Et, des données ». Différents travaux vote... • Conception éditoriale
ment inédite, les élus de cette ville mouvement Open Data au Canada. au final, de meilleurs services rendus devaient être entamés en ce sens. Pour l’instant, ce sont principalement Comfluence - 34 rue
de 600 000 habitants de la côte ouest « L’un des objectifs était, à court au citoyen ! » Où en est-on ? des domaines grand public. Nous procè- du Faubourg-Saint-Honoré -
du Canada, s’accordent pour voter terme, de consacrer un engagement Nous avons engagé un travail de recense- derons à des mises en ligne progressives : 75008 Paris
une « charte » solennelle, consacrant permettant de lancer des travaux Mobiliser ment des données, mené avec une double certains jeux de données vont nécessiter • Conception et réalisation
graphique JBA - 2 rue
l’engagement de la ville à ouvrir ses concrets, et d’aboutir à des réali- dimension : la recherche de bases de don- un petit travail d’amélioration de la qualité
données. Onze « considérants », sations rapidement », explique-t-il.
un écosystème nées techniquement utilisables, et socia- technique, qui n’est pas gratuit. des Francs-Bourgeois 75003
Paris - ph.bissieres@jba.fr
trois grands principes, et six actions Tout cela suppose toutefois une lement utiles. Nous avons progressé rapi-
• Directrice artistique
L’exemple condition de taille : la formation dement et nous avons identifié un certain Quels sont les bénéfices attendus
Virginie Kahn
d’un écosystème de développeurs. nombre de données que nous allons mettre de cette politique ?
par la preuve C’est lui qui, en construisant des en ligne avant la fin de l’année 2010. Le premier enjeu est évidemment démo-
• Secrétariat de rédaction
Dominique Choffel
Même les données les plus triviales applications, jouera le rôle de Ce temps a également été l’occasion cratique. Ouvrir les données, c’est un enga- • Illustrations 500GLS
en apparence peuvent trouver un médiation entre les citoyens et d’une sensibilisation, en interne, à la ques- gement de transparence. Mais si l’on y • Photographie
ce sont plus
Image, 2009
Trash, qui propose aux habitants « À Vancouver, la communauté notamment au regard des contraintes tient : les bases de données, ce sont eux qui • Infographie Didapix
start-up mobilisées. mesure que les habitants utiliseront en conseil municipal, notamment. enjeux, que nous continuons encore à des données, mais de stimuler la com-
Document imprimé sur
papier issu de forêts gérées
Et au final, ce système, l’efficacité des tournées
programmées par la municipalité
Mais nous programmons égale-
ment des réunions, au format ate-
explorer en interne : la sécurité des don-
nées publiées, la question du respect de la
munauté des développeurs, des start-up.
C’est une invitation à innover, à investir.
durablement, avec des encres
de meilleurs
végétales. Point 44 est titulaire
sera renforcée et cela lui évitera de lier, associant à la fois politiques, vie privée, l’anonymat. Aux États-Unis, le marché de l’Open Data de la marque Imprim’Vert®
devoir envoyer des « tournées » de communauté de développeurs et représente plusieurs milliards de dollars.
services rendus ramassage des poubelles supplé- citoyens : tout le monde est invité Concrètement, quelles données Certaines start-up pourront peut-être
qui distingue les entreprises de
l’industrie graphique soucieuses