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Voyage lent

Ralentir pour découvrir plus profondément le monde,


mais aussi pour se découvrir soi-même, construire
un état d’esprit particulier, réveiller l’acuité des cinq
sens. Comprendre la manière de vivre des gens qui
nous offrent l’hospitalité, s’adapter au rythme de la
vie locale, s’immerger dans la nature, s’accorder des
moments de contemplation. Et transformer parfois
ses vacances en voyage intérieur… (Bogdan)

ILLUSTRATION: Cristi 1

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2
PHOTOS ET I LLUSTRATION : Blandine

3
Quête aux sensations…
Chacun rherche son pace de silence  remonte par l sensations olfactiv, auditiv,
tactil, à la saveur d chos simpl, dire, naturell, aux souvenirs d’enfance aui…
Ce qui donne un speacle peu banal! Une bande exotique de tourist inhabituels, à l’affût
de la hoto ou de la sensation neuve, remonte l ruell de Tulcea, s’agenouille pour sentir
l fleurs, cueillir d brins d’herbe, ramer l objs l lus hétéroclit…
Puis, le groupe s’oit sur un carré d’herbe pour hanger l imprions…
(Vincent)

4
Au débu
t, j’ai ferm

de l’eau.
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calme, l’odeur de la ville,


une voix

Un silence, une sorte de


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en franç u ivait… s éta is
ais, en es du il l e ta
s’éloigna pagnol, u ffle s ore s. J’é ns
it, puis re so e n o
perdue. venait, je Le ans m les so les s
l’ai d s i s de
Au bout t u va
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Être seul. Le soleil, le vent, le bruit

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de la ville, des oiseaux. Pas une
personne avec qui parler le
bulgare. Être seul.

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Je viens son
à Tulcea pour m’en
aller de Sulina. J’y prends du

Dans une ruelle, un homme en


salopette blue, manches remon-
tées, réparait une vieille Dacia.
Mes parents avaient une Dacia,
alors toute neuve. Les sièges,
le volan, le bord, tout était en
matériel, du papier pour mes

faux cuir, qui brûlait au soleil,


l’été. Je sens encore l’odeur
du faux cuir.
Des pas de gens pr
photos, un jour seulement, ès du port.
Le pas fort, décidé,
depuis vingt ans... Ici le quai le pas
sûr. Alors l’odeur!
est plus haut. Celle du
travail, du fer, de la
poudre, de
l’essence, mais pas
seulement
l’essence.

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Je cherc
fro ns, je ne sais
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repères,
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tou que l’herb s, sen am c haq ur, qu ent j ge, es…
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PHOTOS: Vincent
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6 PHOTOS: Bogdan, Cristiana, Cristi, Eduard, Kiril ILLUSTRATION: Eduard
Sur le dos du grand bateau...
C’est un escargot qui part en promenade sur le dos d’une tortue. Il dit:
« Ouh-là-là, qu’est-ce que ça va vite! » (Philippe) 7
Sulina
Le « vapor » entre dans la ville. On voit d’abord le château d’eau. Rouge brique. Il appartenait aux hollandais.
On dit. On dit qu’une reine de là-bas est descendue un jour, tout proche, qu’elle a demandé un verre d’eau
fraiche. Qu’il faisait chaud. On dit qu’alors un jeune homme est venu vers elle, un gobelet à la main qu’il avait
sorti de sa barque et qu’il a d’abord rempli dans le canal puis qu’il l’a tendu à la reine de Hollande. On dit qu’elle
était si triste, la reine, qu’elle a ordonné de construire ce grand château d’eau. Pour l’eau à boire. (Estelle)

Au débarcadère, une ligne de carrioles et de chevaux tranquilles attachés à elles nous montre leur derrière en
ruminant un peu parfois. Elles attendent les caisses, les frigos, les sacs que les hommes chargent à grand cris.
Il y a du monde sur ce quai qui marche. Et aussi des vélos. Les vaches restent plutôt dans les rues derrière, c’est
plus tranquille et il y a de l’herbe. Les barques, on les voit à peine à cause des feuilles qui tombent. Elles savent
que de toute façon elles vont partir de là. (Estelle)

8 PHOTOS: Bogdan, Claudia, Cristiana, Kiril


Ce qui frappe à Sulina, ce sont les usines en général, celles de construction navale en particulier,
désaffectées, le nombre de personnes au chômage, un niveau de vie très bas et une population qui
tente de survivre du tourisme, de la pêche et de quelques rares industries qui subsistent encore...
(Vincent)

Dans les années 1989 -2000, c’était comme un désert. Après, petit à petit, le tourisme est arrivé. S’il
n’y avait pas le tourisme, ici à Sulina on pouvait mourir sans que personne ne s’en aperçoive.
(Liviu)

9
La fille du roi!
Un roi avait une fille si belle que tous les hommes rêvaient de
l’épouser. Mais le roi voulait la marier à celui qui percevrait la vraie
nature de sa fille. Il soumettait chaque prétendant à une épreuve.
Il l’emmenait dans une serre et lui montrait dix mille fleurs, toutes
plus belles les unes que les autres. Mais parmi ces dix mille fleurs,
il n’y en avait qu’une qui était une vraie fleur. Les neuf mille neuf
cent quatre vingt dix neuf autres étaient des fleurs artificielles. Le
prétendant devait trouver en moins de cinq minutes la vraie fleur.
Certains essayaient de reconnaître la vraie entre toutes les autres
fausses fleurs... Mais il leur aurait fallu plus de cinq minutes. D’autres
entreprenaient de sentir chacune des fleurs, mais il leur aurait fallu
plus de cinq minutes. Un matin, un jeune homme s’est présenté.
Dans un petit pot, il avait capturé une abeille. Il a libéré l’abeille dans
la serre, l’abeille en quelques secondes l’a amené vers la vraie fleur...
10 et à la fille du roi. Et leur amour a été doux comme du miel. (Philippe)
PHOTOS: Claudia, Cristiana, Kiril 11
La cucina et le tourisme lent
Buridda (antica ricetta genovese)
1,5 Kg. di pesce assortito , 1 spicchi d’aglio,
1 cipolla tritata, 1/2 bicchiere d’olio d’oliva, 2 acciughe sott’olio, 1 ciuffo di prezzemolo
tritato, 3 grossi pomodori maturiri tagliati a pezzi, 1 bicchiere di vino bianco secco, 1
foglia di alloro, fette di pane abbrustolite, sale.
Pulite il pesce, tagliatelo a pezzi e lavatelo bene.
In una casseruola di terracotta fate soffriggere con l’olio lo spicchio d’aglio intero e la ci-
polla; quando l’aglio è colorito, toglietelo e unite le acciughe, il prezzemolo e, in ultimo,
i pomodori. Versare il vino nella casseruola e quando sarà evaporato, aggiungete il
pesce, l’alloro e il sale (salate poco se usate il baccalà).
Fate cuocere lentamente per una ventina di minuti e servire la buridda direttamente nel
recipiente di cottura con fette di pane casereccio abbrustolite o in graticola o al forno.

Ciorba de peste
, (ca la Sulina)
(

Un ardei verde, un gogoşar, 1/4 ţelină, 400 g. cartofi, un morcov mare, ceva peşte,
o ceşcuţă de orez, câţiva ardei iuţi, un plic de borş, 3 ouă, leuştean, pătrunjel, o cutie
mică de smântână. Se spală orezul şi se pune la fiert în 5-6 litri de apă şi se adaugă
legumele curăţate şi tăiate mărunt. După 20 minute adăugăm peştele spălat
şi curăţat, lăsându-l să fiarbă 10 minute, apoi punem borşul după gust, batem ouăle
cu smântână şi le adăugăm ciorbei împreună cu puţină sare. Stingem focul
şi presărăm verdeaţă din belşug. (Sabina)
12
Slow travel soup
Sabina ’s old recipe)
1 barrel of curiosity, 2 spoons of tolerance, all you know, 1 full cup of sense of adventure,
1 mirror to look at yourself through the others, 1 bowl of intuition, a handful of willingn, some
body language, a bit of this, a bit of that… For the perfe slow travel soup you cannot simply take
your traditional ingredients, blend them with the new on and eat it on the go. There are rul that
differ, and flavors and sens of flavor: the blend has to sink in slowly, naturally. Take all the ingredients,
mix them as the good sense would tell you, and take your time. L it cook with a low flame until you
can rognize that typical flavor you were looking for en you dided to cook in the first lace, but
now you are mistaken!: it don’t taste of baccalà, it’s the gogoşar (peer in a fish soup??? y, pep-
per in a fish soup. Actually, it’s rather nice...). Open up all your sens, de-structure any mouth-
ful you take, rognize at you already know, discover yourself through at it’s new.
Discover your new self. We are at we eat. Add your “ciorba de peşte” personal-
ity to your buridda one and be leased with the uncountable surpris
that slow travel can bring you. Just be careful, it tak
some time to digt… (Sabina)

ILLUSTRATIONS: Claudia, Cristi 13


Un morceau d’eau
Je voulais revoir la Mer Noire
La dangereuse
Ici la tempête te prend sans te prévenir
Ta barque calme
D’un coup se retourne
Et tu dois tenir le bord, toujours
Plus fort qu’ailleurs.

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J’é uillem n pet le t nt qu orce d. Pu is e t si de n d ’ea g ros ,
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tra e sur un jo plat os sa ucem oi en it cha ... Je mme s pet d. Pu orce sous t ava ieux plong tom
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un s le s e me » Je ne en iss rê i se om fac proje ert tr stallin etits no un
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ILLUSTRATIONS: Cristi
14
PHOTOS: Claudia, Eduard
15
Espèces migratrices...

16 PHOTO: Cristiana
Le Danube n’a pas boin de notre corps. Daca alunam…si l’on
glie dans s eaux, il nous redonne le corps. Comme n’importe quel
Dieu, il conserve seulement l’âme, pour se renforcer.
Lorsque votre corps arrivera là où il se croit chez lui, lorsque vous
entrerez dans le rythme de la vie prée, n’oubliez pas que quelqu’un
rpire av votre rpiration l’éternité d’ici.

rter av moi, comme apr chaque départ. (Ilinca)


Le timbre d’une voix, un gte, un mot, une triste, une idée va

PHOTO: Kiril 17
Le dernier slow
Ce n’est pas le moindre des paradoxes que de s’interroger sur le temps
qui passe et le temps que l’on veut contrôler dans le cadre d’une visite
de cimetière (…).

Nous nous sommes retrouvés, là où le temps est suspendu; là où des tas de


gens ont arrêté de courir, de compter les jours et les semaines, là où ils sont
désormais pour une période tellement longue que ce n’est même plus
une période mais un concept: l’éternité.

Nous avons rencontré:


 Des gens qui ont vécu vite et fort et sont morts vite et fort: ce sont ces
militaires de 20 ans, morts pour la cause patrie;
 Des gens qui n’ont pas connu la fureur de vivre… et pour cause, ce sont des
enfants qui sont morts – soit du cholera, soit par noyade, comme ces deux
petites sœurs qui sont mortes noyées en essayant de se sauver l’une l’autre;
 Cette amoureuse impatiente qui a voulu rejoindre son bel amant;
 Ces deux fiancés au rythme amoureux contrarié qui ont décidé de se retrouver

18 définitivement unis dans la mort;


 Ce pirate qui, à contre temps et – contre vents et marées – détourne nourriture et
biens essentiels pour nourrir les pauvres;
 Ceux qui ont vécu pour leur futur et leur postérité en investissant et en faisant
du business ; morts tous jeunes, ces cinq frères reposent ensemble.

Et tous ces inconnus de toutes les religions…


Ils ont en commun l’éternité; ce temps infini.

Il nous reste leur question: à quel rythme vivons-nous, quelles sont nos urgences; le
seront-elles encore plus tard?

Qu’en sera-t-il quand notre temps se sera écoulé, que notre temps aura disparu et
que notre espace ne se réduira plus qu’aux deux mètres carrés de notre tombe?
Qu’en sera-t-il de nous quand notre espace sera réduit et que notre devenir sera
l’éternité?

Avec l’avenir comme éternité, nous n’aurons plus le temps! (Marc)

PHOTOS: Cristiana; ILLUSTRATION: Horia 19


Itinéraire heureux d’une fleur devenue arbre
Jamais je n’aurais pensé qu’un jour, je reverrais le soleil de si près. Nous étions jeunes
et fraîches, accrochées aux rameaux de notre père, un grand acacia. Nous habitions sur
les bords d’un petit cours d’eau qui parcourait les plaines et les prairies que l’on pouvait
voir à perte de vue autour de nous. Mes sœurs et moi étions souvent secouées par des
vents violents, mouillées par les pluies. Certaines d’entre elles n’étaient plus là au matin.
Notre père nous disait, confiant, qu’un jour probablement, avec de la chance, nous les
retrouverions. Par un fort orage, je me suis retrouvée à terre. Je voulais crier pour que
mon père m’entende, je voulais marcher pour le rejoindre et retrouver ma place parmi
mes soeurs. Mais rien de tout cela n’était possible, je n’étais qu’une petite fleur. La nuit
était froide, je me sentais perdue et seule. L’orage dura toute la nuit, et l’eau au bord de
laquelle notre père nous nourrissait d’un seul coup monta, arriva aux racines, passa un
talus et m’emporta. Tout d’abord j’eus peur de me noyer mais le courant était doux comme
une caresse. Et l’eau rafraîchit ma tige. A cet instant, je pressentis que là commençait une
aventure inespérée que de nombreuses fleurs avaient déjà vécue et que beaucoup d’autres
vivraient encore. Ma peur s’en alla et je commençai mon voyage avec enthousiasme et
curiosité. Quelques jours de tempête ont suffi au petit cours d’eau pour avoir assez de
courant et m’emporter loin de chez moi. Les jours qui suivirent, l’accalmie et le soleil eurent
raison de ma patience. Je voulais voir le monde. Mais soudain je sentis le courant prendre
un autre rythme et se précipiter dans un tourbillon causé par un courant plus grand. Je ne
voyais plus les berges de chaque côté mais je rencontrais d’autres navigateurs comme moi
qui parlaient d’autres langues, bâtons de bois, feuilles d’arbres, algues, oiseaux, poissons
étaient tous du voyage. Quelquefois leur chemin s’arrêtaient brusquement, arrêtés à
un obstacle. Je ne souhaitais pas subir le même sort, je n’avais pas encore assez vécu.

20
Un matin, je me sentis fatiguée. Un vieux tronc flottant à mes côtés m’offrit l’hospitalité.
Je montai sur son dos et le poids de mes pétales chargés d’eau s’accrocha à son écorce.
Nous conversâmes longuement tout en traversant plusieurs villes, habitées par les hommes.
Certaines plus petites et d’autres immenses. Je ne savais rien d’elles mais le vieux tronc me
raconta leur histoire. Ainsi nous apprîmes à nous connaître. Les jours qui passaient étaient
trop chauds, mes pétales devinrent secs et cassants. Je me sentais horrible mais je courais
aussi le danger d’être séparée de mon vieil ami car je n’avais plus la possibilité de m’accrocher
à lui. Ce jour fatidique arriva, lorsque nous rencontrâmes un autre grand courant qui mettait
l’eau en ébullition. Le vieux tronc fut retourné et je coulai avec lui, quand soudain, nous
fûmes aspirés dans un trou. Mais bien vite, je m’aperçus que nous étions enfermés. Il faisait
sombre et humide. Une palpitation et un battement se faisaient sentir. J’aperçus une lueur
juste avant de sentir un choc. Nous venions d’être expulsés sur le sol. Une grand oiseau
nous regardait étonné tout en nous exprimant ses plus plates excuses. Ce grand pélican
nous avait confondus avec un poisson. Mais nous voulions savoir où nous étions. Et ce
majestueux oiseau qui peut voir les choses d’en-haut nous expliqua que le grand courant
était un fleuve du nom de Danube, qu’il parcourt des millions de kilomètres à travers de
nombreux pays avant de se terminer ici. Nous étions donc en Roumanie. Je me sentais pleine
d’énergie, nourrie d’une expérience fascinante. Mon corps de fleur qui avait subi quelques
transformations commença doucement à prendre racine dans cette terre riche sur laquelle
nous avions atterri. Plusieurs années ont passé depuis. Je suis devenue mère moi aussi. Mes
petites fleurs regardent le soleil et l’horizon du haut de mes branches. Et si l’une d’elles se
détache, je n’ai pas peur de la perdre. Je sais, pour l’avoir vécu, que le voyage est un bon
enseignement de la vie et que le moment de prendre racine arrive à tout qui sait attendre.
(Milena)

ILLUSTRATION: Claudia, Cristi 21


22
PHOTOS ET COLLAGE: Daniele
23
Participants: Un concept de: Réseau
C������� B���� Européen
pour la Promotion
V������ C����� d’une Economie
G����� C������ Responsable

M��� D� M�����
B������� G��������
D������ G�����
K���� K��������
S����� N��������
Partenaires:
L���� S����������
P������� S������
M����� S������
E����� T�����
A�������� T�������� P������� T����� ARBDD
CIEMD
Organisateurs:
C�������� B�������
Projet financé par:
A���� B�����
E������ C������
H���� C������� Éducation et culture
E��� D������� Éducation et formation tout au
B����� G����� long de la vie
GRUNDTVIG
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PHOTOS COUVERTURES : Blandine, Eduard; ILLUSTRATION COUVERTURES : Aurel, Cristi, Horia

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