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NICOLAS TEULADE ANNÉE 2005-2006

Cours de gestion
Psychologie des investisseurs

JEAN-MICHEL LOUBERE ECOLE DE PSYCHOLOGUES PRATICIENS


Derrière des atours très stricts et rigides la finance est sur certains points plus souples qu'on ne pourrait
le croire au premier abord. De même certains éléments que l'on pourrait croire consécutif aux respects
de règles, normes ou modèles économiques très aboutis et stables semble être lié à des réactions plus
instinctives qu'autre choses.
L'article de La vie financière sur la psychologie des investisseurs permet de faire un rapide tour
d'horizons sur les éléments qui conduiraient les investisseurs à avoir des conduites inappropriées dans
le cadre d'un investissement ou d'un placement boursier.

Issu du constat que les Krach boursier ou les bulles spéculatives, malgré des antécédents, avaient
tendance à se reproduire, les travaux de finance et d'économie comportementale apportent un éclairage
intéressant sur ces événements macro-économiques et leur origine.
Malgré ce que l'on pourrait penser, ces erreurs de jugement ou ces comportements ne sont pas les seuls
faits des boursicoteurs amateurs, mais peuvent aussi être dû aux professionnels, même s'ils y sont
moins sensibles.
A la question, comment se prémunir contre l'irrationalité de la Bourse, La Vie financière propose
d'informer le lecteur sur les mécanismes à l'oeuvre qui nous conduisent à des comportement excessifs
où la logique n'a plus sa place. En effet dans un certains nombres de cas les investisseurs se laissent
influencer par leurs émotions, les rumeurs, les manipulations ou les fausses certitudes.

Faisons le point sur les différents schémas mentaux soulevés ici.

L'aversion pour les pertes

Cet élément mis en lumière par Kahneman et Tversky dans le cadre de l’économie comportementale
traduit le fait que pour une moins value x, le sentiment de désagréabilité sera deux fois plus élevés que
le satisfaction que l’on aura pour une plus value x. Ce facteur ici clairement mis en chiffre rejoint
certains éléments déjà souligné dans d’autres courants de la psychologie, notamment la tendance
naturelle de l’individu à se souvenir plus facilement des critiques et événements de vie difficile plutôt
qu’aux éléments positifs. Ce phénomène s’observe également dans un certain nombre de cas, parfois
dramatique, lorsque des personnes se refusent à faire évoluer la situation dans laquelle ils sont, habitués
qu’ils sont au cadre dans lequel ils évoluent, et craignant que la situation nouvelle à venir soit pire que
ce qu’ils connaissent.

Les comportements moutonniers

Ces comportements consécutifs d'une valorisation des réactions d'autrui au dépend de ses propres
constatation et analyse, relève quand à lui d'un déficit de confiance en soi. L'idée sous jacente est que
l'investisseur qui suit l'action pense que celui qu'il copie dispose de plus d'informations que lui le
conduisant à ce choix. Cette démarche n'est pas sans rappeler la soumission à l'autorité explicité par
Milgram dans son expérience ou le conformisme (mis en exergue par Asch) qui conduit une minorité
de personne à suivre ce que font une majorité d'autres personnes. On peut penser que dans notre
situation c'est la combinaison des deux facteurs qui conduit à une cascade d'événements. Quelques
personnes estimant que l'un des investisseurs est plus à même de disposer d'informations pertinentes
vont suivre son action, jusqu'à atteindre une masse critique, conduisant ensuite bon nombre à suivre
une majorité obtenue.
Au demeurant cette tendance à suivre la majorité ou les leader apparaît dans d'autres domaines que
l'économie, et il est fréquent que les gens ayant une position divergente n'osent pas l'affirmer, préférant
suivre le mouvement.

L'excès de confiance

Cette tendance à surestimer ses capacités conduit la personne à croire qu'elle maîtrise mieux les
événements qu'elle ne le fait réellement. Au lieu d'analyser avec rigueur les informations en sa
disposition, elle tend à traiter celle ci de manière moins rationnelle, en faisant une moins bonne
utilisation, pariant sur du trop court terme. Ainsi « les investisseurs les plus actifs [affichent] des moins
bonnes performances ».
Cet tendance me renvoie à deux comportements que l'on peut observer en psychologie, d'une part les
obsessionnels. Ceux ci bien qu'étant très méticuleux, ayant accès à beaucoup d'informations ne la traite
pas de manière pertinente, la retraitant sans cesse, refaisant les choses, brassant ainsi beaucoup
d'informations sans résultat ou avec de moindre résultats que ce qui pourrait être attendu. Dans un
autre registre, cette surestimation de soi, me fait penser aux adolescents, qui pour certains ont des
conduites ordaliques, se mettant plus ou moins gravement en danger par leur comportement,
comportement qui leur permette de se rassurer sur le fait qu'ils sont bien vivants, qu'ils contrôlent la
situation et qu'ils ne craignent rien. Dans les deux cas c'est quelque chose lié à la personnalité de
chacun, comme c'est dit dans l'article (« biais psychologique structurel », renforcé par le contexte.)

Le statu quo

Cela elle est lié à une réticence au changement, à se séparer de ses titres, même si les résultats ne sont
pas corrects ou en chutes, l'investisseur garde l'espoir d'un rebond. Par ailleurs ce qui est déjà acquis
possède une valeur psychologique et subjective supplémentaire. Cette tendance au statu quo n'est pas
propre à l'économie, et on sait que de manière générale l'individu est réticent au changement qui lui
apparaît comme possiblement dangereux. La prise de décision demande un certains courage, il est en
effet parfois nécessaire de se faire violence et de faire face à ses craintes, si un certains nombres
d'éléments objectifs soutiennent notre position. C'est le même problème qui se pose lorsque face à
l'insatisfaction que donne un salarié son supérieur se refuse à le réprimander ou à le licencier, pensant
qu'il va s'améliorer, laissant parfois la situation pourrir, se protégeant ainsi de la peur qu'il a de la
réaction de l'autre ou de prendre une mauvaise décision. Cet élément est ici à mettre en lien avec
l'aversion pour les pertes présentée plus haut.

La confirmation

Cette tendance est naturelle. En effet chacun possède un cadre de référence théorique de par son
éducation, sa formation et ses expériences. La tendance de chacun est de vérifier ce cadre de référence
et de le consolider pour s'assurer que nos choix, démarches et activités sont légitimes... et ce souvent à
n'importe quel prix, tant la peur d'échouer peut être importante. Ainsi on sera plus sensibles à des
informations qui vont dans notre sens qu'à des informations qui s'y opposent. Ce biais, bien connu des
scientifiques pour avoir conduit à quelques erreurs ou dérapages se retrouve dans de nombreux
domaines, que ce soit au travail, au sein de la famille ou dans d'autres activités.

L'ancrage

Le fait de se focaliser sur une donnée servant de support à toute l'analyse, me renvoie ici aussi aux
personnalités obsessionnelles, qui focalisant sur un élément peuvent passer à coté de chose plus
importantes et pertinentes. Cela relève encore une fois d'un mode de fonctionnement sur lequel il est
difficile d'intervenir. On peut le limiter en en étant conscient, mais comme tout trait de personnalité il
est malaisé d'en faire abstraction sauf à faire un travail pour comprendre son origine.

La comptabilité mentale

Le fait que chaque investisseur raisonne selon son propre référentiel de temps le conduit à rechercher
un équilibre voire une progression de ses moins values et de ses plus values selon son propre
référentiel. Or on sait que de manière globale, la bourse progresse sur du long terme, et que c'est bien
souvent sur du moyen terme (plusieurs mois) que l'on peut savoir si une action est intéressante et
rentable. Aussi ce ne sont bien souvent pas les investisseurs qui vendent et achète le plus qui font les
meilleurs placements, passant à coté des évolutions du marché sur une plus longue période.

Après avoir repris ces différents éléments soulevé dans l'article et les avoir explicité quelque peu nous
allons reprendre les grandes lignes de ce qui est dit et voir en quoi cela nous intéresse.

Il ressort de cet article qu'un certain nombre des types d'émotions et schémas explicités renvoie à des
concepts de psychologie sociale notamment, mais aussi à des éléments de la psychologie développé
dans la prise en charge de la personne ou constaté lors des psychothérapies.
Sans être de la « psychologie de comptoir », les éléments présentés ici étant pour partie étayés par des
travaux universitaires, des enquêtes ou des observations, il ressort une certaine vulgarisation des
concepts, qui les rend accessibles aux lecteurs.
Par ailleurs ces éléments ne sont pas tous spécifiques à la « psychologie des investisseurs », mais sont
bel et bien à la personnalité de chaque individu. Il apparaît cependant que la combinaison de certaines
de ces émotions ou de certains de ces schémas mentaux a plus de probabilité de se faire et de se
rencontrer dans la finance, aussi paradoxale et dangereux que cela puisse paraître pour l'investisseur.
Le fait que les investissements en bourse aient une dimension fortement immatérielle (c'est
essentiellement une représentation intellectuelle des valeurs que l'on possède) et le fait que cela se
rattache à un domaine pour le moins angoissant dans une société où l'argent demeure une valeur
importante explique pour partie le fait que ces différents traits s'agencent à merveille.
Il m'apparaît qu'en finance tout comme en amour, une tendance à opter pour des comportements
irrationnels n'est pas rare. La grande influence des émotions dans ces domaines placés au coeur de nos
vies (l'argent reste un moyen de vivre, de bénéficier d'une certaine aisance sociale, d'une bonne image
dans la société pour beaucoup de gens ; l'amour quant à lui demeure l'un des objectifs de vie de
beaucoup, qui cherchent à constituer un foyer stable dans une société où les repères manquent, et
l'angoisse de mal faire, de perdre son conjoint ou sa compagne, conduisent ici aussi bien souvent à
accentuer des comportements que la personne est moins enclines à avoir dans ses relations classiques)
n'est certainement pas pour rien dans cette similitude. Plus le domaine porte en lui une valeur
fantasmatique et un attachement psychologique, plus les craintes, angoisses, et de manière générale les
différentes émotions, risquent de jouer un rôle dans les comportements et prises de décision de la
personne.
Sachant que dans de nombreux cas ce sont nos traits de personnalité et nos expériences de vies qui
influencent largement nos choix professionnelles ou nos activités extra professionnelles (pour les petits
investisseurs), on peut se demander si ces tendances observées ne sont pas liés au fait que les personnes
dans ce domaine correspondrait dans la majorité à une ou plusieurs personnalité – type sous jacente. En
effet, une personne anxieuse par exemple aura tendance à être plus attiré par des environnements
stables dans nombre de cas, pour autant son anxiété et son envie de réussir peuvent demeurer présente,
et là où la rationalité devrait être le facteur qui leur permettrait de réussir, le besoin de se prouver
qu'elles peuvent y arriver ou la peur de ne pas y arriver, renforcera d'autant plus les comportements
présentés ci dessus.

Bien que n'étant qu'une hypothèse de ma part, je pense que cet article nous interroge psychologues, sur
le lien entre la profession et les activités d'une personne et son parcours de vie qui a conduit à cela. Il ne
me parait pas aberrant en effet, de penser que ce serait effectivement les personnes d'une part les plus
rationnelles et d'autres part les plus émotives (dans le cas qui nous occupent) qui se dirigeraient vers
ces domaines d'activités. Cela répondrait pour les premiers à un besoin de contrôler, de se rassurer sur
leur capacités, et de maîtriser au moins intellectuellement ce qu'ils font (se coupant plus ou moins de
leurs émotions), alors que pour les autres, cela serait plus une fuite en avant, une confrontation à
quelque chose qui les attire et les intrigue, mais les angoisse aussi grandement.
Le domaine de la psychologie de l'orientation et du travail n'a à l'heure actuelle que peu travailler sur ce
champ, espace intermédiaire entre la clinique et la sociale, qui viserait à mieux comprendre les origines
des choix des personnes quant à leurs activités. Aussi au regard de ces éléments, l'article présenté ici
bien que simple, reste intéressant, et explique certaines tendances des investisseurs. Il est possible au
demeurant que les tendances des investisseurs présentés ici comme des schémas mentaux soient en fait
en lien avec la personnalité profonde des individus comme je le suppose, ce qui rendrait dans une
certaine mesure caduque cet article, puisque ce serait alors un travail d'information et
d'accompagnement des investisseurs qu'il faudrait entreprendre, afin de leur permettre de mieux
comprendre les ressorts de leur prise de décision, largement influencé par leur cadre de référence et
leurs expériences. L'article en effet adapte des concepts qui dépassent le seul champ des prises de
décisions des investisseurs, mais se retrouveront souvent dans d'autres domaines d'activités de la
personne.

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