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CARRèRE Emilie

Date de création : 01.06.2005


Date de dépôt : 16.06.2005
Niveau : BAC + 4

Le tourisme senior
CARRèRE Emilie

Date de création : 01.06.2005


Date de dépôt : 16.06.2005
Niveau : BAC + 4

Le tourisme senior
SOMMAIRE

INTRODUCTION p3à4

I. Le marché des seniors p 5 à 17

1. Le terme « senior » p5

2. La démographie des seniors : quelques chiffres clés p5à7

a. Dix millions de Français ont au moins 65 ans aujourd’hui p 5 à 6

b. Le vieillissement de la population va se poursuivre p7

3. Modes de vie et consommation p 8 à 11

a. Modes de vie p8

b. Les seniors sont des consommateurs à part entière p 9 à 11

4. Revenus, niveau de vie et patrimoine p 11 à 12

5. Les seniors : un marché à segmenter p 13 à 17

a. Les trois âges p 13

b. La segmentation p 14 à 17

II. Le tourisme senior p 17 à 31

1. Vue d’ensemble du tourisme senior p 17 à 23

a. Taux de départ de voyages effectués


selon les tranches d’âges p 18 à 20

b. Les dépenses des seniors en terme de voyages p 21 à 22

c. Le taux de départ en vacances chez les seniors varie également en


fonction des revenus p 22 à 23

2. Les attentes des seniors en terme de voyages p 23 à 27

a. Où partent-ils ? p 23 à 25

b. Comment achètent-ils ? p 25

1
c. Hébergements et transports p 25 à 26

d. Quand partent-ils ? p 26

e. Les seniors veulent plus d’aventure p 27

3. Les voyages sur Internet : un support à prendre en compte pour


les touristes seniors ? p 28 à 31

a. Seniors et net : quelques chiffres clés p 28

b. Les sites les plus fréquentés par les seniors p 29

c. Les achats en ligne p 29 à 30

d. Les seniors et les voyages sur Internet p 30 à 31

III. Les voyagistes qui s’adaptent aux seniors p 32 à 40

1. « Vacances Bleues » mise sur les baby-boomers p 32 à 34

2. Primavacances p 34 à 35

3. Selectour vient de sortir sa nouvelle brochure pour les seniors


globe-trotters p 35 à 36

4. La France n’est pas le seul pays à s’être penché sur le tourisme


senior p 37 à 40

a. Des exemples à l’étranger p 37

b. L’Espagne : la « Floride » européenne p 37 à 39

c. Mise en place d’un programme d’échanges touristiques entre seniors


français et espagnols p 40

CONCLUSION p 41

BIBLIOGRAPHIE p 42

ANNEXES p 43 à 47

2
INTRODUCTION

Les plus de 50 ans sont actuellement 20 millions en France et devraient être plus de 28
millions en 2030.

Ce vieillissement de la population sans précédent est dû à trois phénomènes : la baisse du


nombre de naissances, l’allongement de l’espérance de vie et l’arrivée massive des baby-
boomers à la retraite. Ces derniers ont profité du plein emploi dans leur jeunesse et de la large
diffusion des grandes innovations technologiques. Ils forment la génération la plus nombreuse
et la plus riche, génération dont dépend l’avenir de nombreuses entreprises.

Cette année et l’an prochain, des millions d’anciens « baby-boomers » vont donc goûter aux
joies de la retraite. Une perspective qu’il faut attendre et préparer avec optimisme. Ils ont la
santé, de l’argent, du temps et ils sont prêts à en profiter. Plus dynamiques et mieux armés
contre les assauts du temps, c’est une nouvelle génération de seniors qui est en voie
d’éclosion.

De plus, les Seniors représentent un poids économique grandissant. Leur pouvoir d’achat,
estimé à 132 milliards d’euros, est un véritable moteur de croissance à long terme pour les
entreprises correctement positionnées sur ce marché.

En outre, les seniors d’aujourd’hui sont plus actifs que leurs parents, ils veulent profiter des
plaisirs de la vie, et ce, notamment à travers les voyages.

En effet, 40,3% des Français pensent en premier aux voyages pour dépenser leur argent. Un
pourcentage qui monte à 48,7% chez les quinquagénaires et la part des plus de 60 ans dans les
départs en vacances a augmenté de 5 points entre 1989 et 1999.

Le tourisme est donc l’un des premiers secteurs concernés par le vieillissement de la
population. Mais la cible Seniors des professionnels du tourisme n’est pas homogène : elle
comprend les jeunes Seniors encore en activité, les jeunes retraités et les personnes plus
âgées.

3
Quelles sont donc les attentes des seniors en terme de voyages ? Celles-ci sont-elles
différentes d’un segment de marché à l’autre ?
Même si beaucoup de professionnels du tourisme disent que les Seniors représentent pour eux
un enjeu, les pratiques et les avis concernant les politiques à mettre en œuvre sont très
diverses.
Les voyagistes adaptent-ils leurs offres aux attentes des seniors ? Si oui, de quelle manière ?
Comment s’y prennent-ils pour attirer cette clientèle de plus en plus nombreuse ?

Afin de mieux comprendre en quoi le marché des seniors représente aujourd’hui un poids
économique non négligeable, nous étudierons de façon globale dans une première partie le
marché des seniors, pour, dans une seconde partie, s’attarder sur le tourisme senior en général
et les attentes de cette cible en particulier, et arriver dans une troisième partie à comprendre
les diverses politiques mises en œuvre par certains voyagistes pour cibler cette clientèle.

4
I. Le marché des seniors

1. Le terme « senior ».

Les Français estiment en moyenne qu’une personne est âgée lorsqu’elle a au moins 70 ans.
Pour les entreprises et les publicitaires, l’entrée dans la catégorie des « seniors » a lieu
beaucoup plus tôt, à 50 ans.
Ce seuil n’a pas de justification véritable sur le plan physique, mental ou comportemental,
mais il permet d’établir une continuité avec la notion traditionnelle de « ménagère de moins
de cinquante ans ».
On observe que la perception individuelle du vieillissement s’est transformée en même temps
que sa réalité biologique : on se sent plus jeune plus longtemps et on est physiquement plus
jeune au même âge que les générations précédentes.
Cette évolution s’est donc traduite par des changements dans le vocabulaire utilisé. Le
substantif « vieux » est devenu socialement, politiquement et commercialement incorrect. Le
terme « ancien » présente l’inconvénient d’être opposé dans l’inconscient collectif à
« moderne ». L’expression « troisième âge » est tout aussi confuse. C’est pourquoi le terme
« senior » s’est popularisé. Dans le Petit Larousse, « senior » est défini comme un mot
d’origine latine qui signifie plus âgé.
Toutefois, ce terme est davantage utilisé par les médias et les publicitaires que par les
Français, qui préfèrent parler de « personne âgée », de « troisième âge », de « retraité », voire
de « mamy » ou « papy ».
Le mot « aîné » pourrait constituer une alternative, à la fois respectueuse des individus, non
liée au statut professionnel et non connotée sur le plan économique et commercial.

2. La démographie des seniors: quelques chiffres clés.

a. Dix millions de Français ont au moins 65 ans aujourd’hui :

12,5 millions de Français étaient âgés d’au moins 60 ans au 1er janvier 2004 (en métropole)
contre 9,5 millions en 1982.

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Leur part dans la population était de 20,7% en 1982 contre 18% en 1970 et 12,7% au début du
20ème siècle.
Les 65 ans et plus représentent quant à eux 16,2% de la population soit 10 millions de
personnes.
Un Français sur cinq est donc âgé d’au moins 60 ans, un sur six d’au moins 65 ans.
La pyramide des âges s’est beaucoup transformée. On comptait cinq jeunes de moins de 20
ans pour une personne de plus de 65ans à la fin du 18ème siècle ; il y en a moins de deux
aujourd’hui.
La structure de la pyramide est de plus en plus déséquilibrée. La proportion de personnes
dépassant 60 ans s’est beaucoup accrue depuis les années 1980, car les classes creuses de
1914-1918 ont eu 60 ans entre 1974 et 1978.
Le vieillissement devrait connaître une nouvelle accélération à partir de 2006 avec l’arrivée à
60 ans des premiers enfants du baby-boom, nés en 1946.

Evolution de la part des personnes âgées de 60 ans et plus dans la population française, par
tranche d’âge (en %) :

25,00%

20,00%

60 ans et +
15,00%
65 ans et +
75 ans et +
10,00%

5,00%

0,00%
1900 1930 1960 2003

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b. Le vieillissement de la population va se poursuivre :

L’accroissement prévisible de la part des personnes âgées est d’abord la conséquence de la


structure de la pyramide des âges. Les générations issues du baby-boom (nées entre 1945 et
1975) vont accéder aux âges élevés ; celles nées juste après la seconde guerre mondiale
atteindront 60 ans en 2005 et 65 ans en 2010, ce qui devrait représenter un nouveau choc
démographique.
Le vieillissement sera aussi induit par la poursuite de l’allongement de l’espérance de vie. A
raison d’une augmentation un peu supérieure à trois mois par an (moyenne de la dernière
décennie), elle passerait de 83 ans pour les femmes en 2004 à 90 ans en 2050. Celle des
hommes se situerait à 85 ans contre 76 ans aujourd’hui.
On pourrait ainsi compter 150 000 centenaires en 2050, contre 9000 en 2003 et 200 en 1950.
Les gains pourraient être encore plus marqués en cas d’amélioration des habitudes
alimentaires et des modes de vie en général.

Outre l’évolution de la pyramide des âges et de l’espérance de vie, le vieillissement est lié à
l’évolution de la fécondité, de la mortalité et des flux migratoires.
Si l’on fait l’hypothèse d’une stabilité par rapport aux évolutions des dernières années, les
personnes de 60 ans et plus pourraient représenter le quart de la population totale vers 2012.
Une poursuite de l’accroissement de la natalité qui a été constaté ces dernières années (taux de
fécondité : 1,7 enfant par femme en 1990 contre 1,9 aujourd’hui) aurait un effet limité sur le
vieillissement global : le renouvellement à l’identique des générations (2,1 enfant par femme
au lieu de 1,9 aujourd’hui) ferait seulement passer la part des plus de 60 ans de 35% à 32% en
2050.

7
3. Modes de vie et consommation.

a. Modes de vie :

L’état de santé des personnes âgées a beaucoup progressé en quelques décennies comme en
témoigne l’allongement de l’espérance de vie.
Les Français vivent donc à la fois plus vieux et en meilleure santé. Pour lutter contre les effets
du vieillissement et se maintenir en bonne forme physique, beaucoup d’aînés pratiquent les
mêmes activités que les plus jeunes.
Les seniors sont donc de plus en plus nombreux à faire du sport : marche, gymnastique,
natation mais aussi tennis et golf.
Ils surveillent leur santé en se rendant régulièrement chez le médecin. Ils s’intéressent à la
prévention, notamment en matière alimentaire. Beaucoup s’efforcent aussi de modifier leurs
habitudes de vie, en excluant par exemple l’alcool et le tabac.
Cette volonté de bien vieillir s’accompagne d’un souci croissant de l’apparence.
Les seniors attachent, en effet, davantage d’importance à leur habillement. Ils utilisent aussi
des produits cosmétiques destinés à lutter contre le vieillissement ou à en cacher certains
effets et n’hésitent pas à recourir à la chirurgie esthétique.

Les seniors privilégient plus que les autres la qualité, la durabilité, la sécurité (physique,
psychologique et financière), l’information, la considération. Ils font preuve d’un moindre
attachement au prix, mais d’une plus grande fidélité aux marques et enseignes.
Ils sont davantage concernés par les produits qui préservent l’environnement et cherchent à
concilier technologie et écologie.
S’ils sont moins sensibles que les jeunes aux effets de mode, ils sont de plus en plus réceptifs
aux innovations. Ainsi, leur attitude à l’égard de l’informatique est de plus en plus ouverte, le
nombre des internautes augmente plus rapidement chez les seniors que parmi les jeunes même
si ils sont encore sous-représentés. Début 2004, les 50 ans et plus représentaient 20% de
l’ensemble des foyers connectés et leur durée de connexion est supérieure à la moyenne.
Ils apprécient la possibilité d’échanger des messages, de s’informer, de trouver des
promotions sur les biens d’équipement ou les voyages.

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Les cyberpapys et cybermamys sont cependant moins nombreux à partir de 75 ans car ils
n’ont pas eu l’occasion d’utiliser un ordinateur au cours de leur vie active.

b. Les seniors sont des consommateurs à part entière :

Si le marché des Seniors est aujourd'hui considéré aux Etats-Unis comme l'un des plus
importants et rentables marché de consommation, on considère en France que c'est un marché
d'environ 120 milliards d’euros de consommations et d'investissements par an.

Dans de nombreux cas, l'évolution de la consommation des Seniors augmente quand celle de
l'ensemble de la population diminue :

Ensemble de la Sexas1
population
Achats de magnétoscopes - 5,3% + 33,3%
Achats de voitures neuves - 9,9% + 18,1%
Yaourts au bifidus - 10,1% + 20,8%
Plats cuisinés allégés - 20,8% + 7,7%
Séjours organisés à l'étranger - 1,8% + 20,4%
Utilisation régulière de lotions capillaires - 2,7% + 12,3%

(Source : Interdeco, Evolution 91 / 93)

Ils consomment plus que l'ensemble de la population et plus que les Seniors des générations
précédentes. Entre 1977 et 1993, leur consommation a augmenté de 64%, alors que celle de
l'ensemble de la population n'augmentait que de 22%.

De plus, ils représentent une part importante de la consommation de nombreux produits : ils
achètent 45,2% des produits de maquillage, 44,7% des voitures neuves, ils réalisent 86,7%
des placements SICAV de plus de 30 000 euros (SIMM 97)...

1
"Sexas" est l'appellation développée par la Régie Interdeco pour désigner près de 10 millions de retraités de
plus de 50 ans en France.

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Poids des Seniors sur
les différents marchés
Le temps de se faire plaisir...
Achat de café pur arabica 44%
Nuits en hôtel 3 et 4 étoiles 45%
Achat de whisky de plus de 100 F 43%
... De consommer des produits sains...
Achat de beurre allégé 41%
Achat de yaourts au bifidus 43%
Achat de plats cuisinés surgelés, allégés 35%
Consommation d'eau minérale 48%
... De s'occuper de soi...
Utilisatrices de crèmes pour les mains 40%
Utilisatrices de crèmes pour le visage 38%
... Et d'améliorer son "chez soi"
Possesseurs d'une cafetière expresso 48%
Lave-vaisselle de moins de deux ans 32%
Cuisine équipée depuis moins de deux ans 43%
Cuisine équipée de plus de 60.000 F 53%
Salle de bains équipée depuis moins de deux ans 43%
(Source : Interdeco / Scanner 1996)

On constate que déjà dans les années 1990 les seniors étaient des consommateurs à part
entière et consommaient davantage que l’ensemble de la population, ce qui se poursuit encore
aujourd’hui.
En effet, les seniors et, notamment les retraités, n’ont souvent plus aucune dette. L’essentiel
de leur revenu est donc disponible à la consommation, d’autant qu’il est régulier, prévisible et
n’est pas soumis comme pour les actifs aux aléas de la vie professionnelle.
Entre 1980 et 2000, les foyers de plus de 65 ans ont plus que triplé leurs dépenses de
consommation, contre deux et demi pour les personnes âgées de 55 à 65 ans.
Plus de la moitié d’entre eux partent en vacances contre 36% en 1975. Ils dépensent de plus
en plus pour l’alimentation, la santé ou les voyages (60% des acheteurs de croisières ont plus
de 60 ans).

10
Leur surconsommation est sensible dans de nombreux domaines (produits frais, hygiène-
beauté..) et dans les produits haut de gamme en général.
C’est pourquoi ils sont de plus en plus l’objet d’attentions particulières de la part des
entreprises qui s’intéressent, davantage ces dernières années, à ce marché porteur.

4. Revenus, niveau de vie et patrimoine.

Parmi les 55-59 ans, 53,7% sont actifs et 15,2% sont à la retraite. Presque la moitié des
Français ne travaillent plus après 55 ans.
73% actifs payent les retraites de 27% de retraités en 2000.
L’OCDE note qu’en 2050, seulement 47% des actifs devront payer les retraites de 53% des
personnes âgées de plus de 65 ans.
Source : INSEE, 2000

Au cours des Trente Glorieuses (1945-1975), le revenu des inactifs avait profité de la forte
augmentation du minimum vieillesse. Il s’est encore accru de façon sensible jusqu’au début
des années 1990, de sorte qu’entre 1970 et 1990 il a augmenté deux fois plus vite que celui
des actifs. L’évolution a été moins spectaculaire au cours de la dernière décennie, mais les
prestations sociales ont davantage réduit la proportion de ménages pauvres parmi les retraités
que chez les actifs. Par ailleurs, la présence de deux retraites dans le couple est de plus en plus
fréquente du fait de l’activité professionnelle des femmes.
Le revenu annuel disponible des ménages dont la personne de référence est âgée d’au moins
60 ans dépassait 23 000 euros en 2003, en incluant les revenus du patrimoine. Les retraites de
base (sécurité sociale et retraite complémentaire) représentaient plus de 90% du montant des
pensions. Calculé par personne (les ménages de retraités comptent moins de personnes que les
ménages plus jeunes), le revenu des retraités est supérieur d’environ 8% à celui des plus
jeunes, alors qu’il était inférieur de 20% en 1970. Parmi les pays de l’Union Européenne à
quinze, la France est celui dont le niveau de vie des retraités est le plus élevé par rapport à
l’ensemble de la population.

Toutefois, les disparités restent fortes. En effet, le montant moyen des pensions de retraite
était de 1 126 euros par mois en 2001, mais il varie considérablement selon les cas. Les
hommes percevaient en moyenne 1 461 euros et les femmes 848 euros. Cet écart important

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(42%) s’explique par les carrières féminines plus courtes et moins bien rémunérées. 39%
seulement ont pu faire une carrière complète contre 85% des hommes. La différence de
revenu entre les générations de retraités s’est estompée ; ceux âgés de 60 à 64 ans perçoivent
en moyenne 994 euros contre 835 euros pour ceux qui ont au moins 85 ans.
Les écarts sont également importants entre salariés et non-salariés : les premiers perçoivent en
moyenne 1 617 euros en 2001, les seconds 614 euros (parmi ceux qui n’ont qu’une seule
pension). Les anciens commerçants sont les moins bien lotis, avec 483 euros, derrière les
agriculteurs qui perçoivent en moyenne 578 euros et les artisans 678 euros.
A revenu antérieur égal, les fins de vie sont donc financièrement très inégales selon le type de
carrière, avec un avantage considérable aux anciens salariés par rapport aux non-salariés.
Cependant, les écarts sont parfois estompés pour les professions non salariées qui ont
constitué un capital professionnel négociable (commerçants, certaines professions libérales).
Parmi les salariés, les retraités du secteur public sont largement favorisés par rapport à ceux
du secteur privé. Les anciens fonctionnaires civils de l’Etat perçoivent de 1 718 euros à 2 058
euros, les ex-militaires de 1 953 euros à 2 139 euros. Les anciens salariés du secteur privé se
contentent de 1 339 euros à 1 590 euros selon le déroulement de leur vie professionnelle.

Selon le CERC, le niveau de vie moyen des plus de 50 ans est supérieur de 28% à celui des
moins de 50 ans.
Le taux de pauvreté des retraités a considérablement chuté entre 1970 et 1997 : de 28% en
1970 à 7,5% en 1984, il est passé à 4,7% en 1997.
Source : "La pauvreté monétaire des ménages de 1970 à 1997", dans INSEE Première N°761,
mars 2001

A 60 ans, le patrimoine des Français est en moyenne de 143 300 euros pour les salariés (dont
54 880 euros de valeurs financières) et de 364 350 euros pour les indépendants (dont 115 860
euros de valeurs financières et 126 530 euros de patrimoine professionnel exploité).
A 70 ans, le salarié a perdu 5% de son patrimoine et l’indépendant a négocié plus d’un tiers.
Aux alentours de 80 ans, l’écart de patrimoine entre indépendants et salariés n’est plus que de
45 734,71 euros, alors qu’il atteignait 304 898,03 euros à cinquante ans.
Source : INSEE Première N°739 – Octobre 2000.

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5. Les seniors : un marché à segmenter.

a. Les trois âges :

L’âge officiel d’un individu est déterminé par sa date de naissance : c’est l’âge civil.

On peut aussi s’intéresser à son âge biologique, mesuré par l’état d’usure physique ou
cérébrale. Celui-ci peut différer sensiblement entre des individus nés la même année. Il varie
aussi selon les époques. Vers 1930, le mot « vieillard » désignait souvent une personne de
plus de 50 ans. On estime aujourd’hui que les personnes de 75 ans ont des caractéristiques
biologiques comparables à celles des personnes de 50 au début du 20ème siècle.
Les photographies anciennes témoignent d’ailleurs de cette évolution. Celle-ci est apparente
aussi à des âges plus avancés ; les personnes de 80 ans sont dans un état de santé comparable
à celui des personnes de 70 ans il y a vingt ans.
Le niveau socio-économique est un facteur important. On constate, à âge égal, que les
personnes ayant arrêté leurs études à l’école primaire présentent, en moyenne, un
vieillissement avancé de 3 ans par rapport à celles qui ont fait des études supérieures.

Une troisième approche de l’âge est celle de sa perception par chaque individu en fonction de
son caractère, de son humeur, de son état de santé et de l’image que lui renvoie son
entourage : c’est l’âge psychologique.
Cet âge psychologique est le plus souvent inférieur à celui indiqué par la date de naissance et
l’état biologique réel. Ainsi, les deux tiers des personnes de plus de 50 ans se sentent moins
âgées que leur état civil ; le décalage représente en moyenne 15 ans vers l’âge de 70 ans.
Cette rémanence de la jeunesse dans les esprits s’explique notamment par la comparaison
avec les générations antérieures, qui paraissent plus âgées. Elle est surtout liée au fait que les
capacités mentales des personnes âgées sont de mieux en mieux préservées. L’esprit vieillit
moins vite que le corps et le vieillissement s’accompagne moins qu’avant d’opinions,
d’attitudes et de comportements conservateurs ou réactionnaires.
Les nouveaux retraités ont forgé leur système de valeurs à une époque de profonde
transformation de la société, à laquelle ils ont d’ailleurs largement participé. Ils restent donc
plus modernes dans leurs idées, leur perception du monde et leurs activités.

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b. La segmentation :

Le terme « senior » est utile pour différencier cette cible des autres consommateurs plus
jeunes. Toutefois, il ne faut pas considérer les seniors comme un marché homogène mais
comme un marché qui doit être segmenté.
C'est parce que les Seniors ressemblent aux autres Seniors, mais aussi parce qu'ils sont tous
différents les uns des autres que l'on se pose la question de savoir comment les définir.

Fondateur de la Senioragency et du site communautaire Seniorplanet, Jean-Paul Tréguer est


un spécialiste de la cible des plus de cinquante ans. Selon lui, il existe six critères essentiels
pour segmenter le marché des seniors :
o l’âge
o le niveau de revenus
o le fait d’être actif ou non
o l’état de santé
o le temps disponible
o la génération d’appartenance

De cette analyse il dégage quatre segments principaux sur le marché des seniors :
• Les Masters : les 50/59 ans
• Les Libérés : les 60/74 ans
• Les paisibles : les 75/84 ans
• Les Grands Aînés : les 85 ans et plus

Les 50/59 ans appelés les Masters :


Tout est réuni pour faire de cette décennie un des moments les plus épanouissants de
l’existence. En effet, c’est l’âge où l’on atteint l’apogée de ses revenus professionnels, où l’on
a davantage de temps disponible et où la santé est, en général, bonne.
Les Masters sont dans la ligne de mire des entreprises puisqu’ils disposent d’un revenu
disponible considérablement augmenté et ce, pour trois raisons principales :

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- la fin des remboursements des emprunts contractés pour l’achat d’une habitation
- le départ des enfants, ce qui constitue une charge financière en moins
- la venue d’un premier héritage
Ils vont donc se tourner vers des achats qui améliorent leur confort de vie : non seulement au
niveau de leur équipement mais également concernant la qualité de leur alimentation. Ils ont
un comportement davantage hédoniste que celui de leurs parents.
Toutefois, il serait caricatural de penser qu’ils vont dépenser à tort et à travers au gré de leurs
impulsions : conscients de la nécessité de préparer leur retraite, ils sont les premiers clients
des organismes financiers et des compagnies d’assurance.

Les 60/74 ans appelés les Libérés :


Ils sont libérés du travail et de l’éducation des enfants et disposent d’un revenu maximal car
leur désendettement est total.
Ils disposent également d’un maximum de temps disponible qu’ils consacrent aux voyages, à
la découverte des nouvelles technologies comme Internet et à s’occuper de leurs petits-enfants
en permettant à leurs enfants de s’évader, par exemple le temps d’un week-end. Ils sont donc
très actifs dans leur vie afin d’en profiter au maximum.
La santé est également au cœur de leurs préoccupations : attentifs à leur régime alimentaire,
rien n’est laissé au hasard pour s’assurer une vieillesse en bonne santé.

Les 75/84 ans appelés les Paisibles :


C’est à partir de cet âge que le facteur santé devient déterminant. En effet, ils deviennent de
plus en plus sensibles aux changements de climat, la vue et l’ouïe diminuent et les gestes sont
moins précis. C’est également le moment où la vie sociale ralentit, notamment après la mort
du premier conjoint. Ils disposent d’un revenu moins important que les segments cités
précédemment et ils le consacrent essentiellement à l’alimentation et la santé en général.

Les 85 ans et plus appelés les Grands Aînés :


Ce sont souvent la solitude et la dépendance qui caractérisent ce groupe : on comptait en 2000
1,3 millions de personnes âgées considérées comme dépendantes d’une tierce personne pour
accomplir les actes de la vie quotidienne tels que se lever, s’habiller, se laver et s’alimenter.

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La santé devient donc la préoccupation première de cette tranche d’âge. C’est également dans
ce groupe que l’on trouve le plus grand nombre de personnes défavorisées, notamment pour
les veuves qui ne touchent qu’une faible pension de leur défunt mari.

Pour résumer, Jean-Paul Tréguer décrit l'évolution de la vie des Seniors à partir de 3 critères,
parmi les six cités précédemment, qu'il juge déterminants :

Critères Les Masters Les Libérés Les paisibles Les Grands Aînés
50-59 ans 60-74 ans 75-84 ans 85 ans et +
L'argent Un fort revenu Revenu disponible Pouvoir et appétit Nombreux en état
disponible. maximum d'achat plus faibles de précarité,
L'âge d'or de la (désendettement (économique et notamment les
consommation. total) psychologique) veuves
La santé La très grande Encore une bonne C'est la variable la Taux élevé de
majorité est en santé mais la vue plus influente. personnes
bonne santé, continue de Accentuation des dépendantes
même si la vue baisser, l'ouïe problèmes vus
commence à décline, la précédemment
baisser précision des chez les Libérés.
gestes est moins
bonne.
Le temps Du temps de Le plus de temps Beaucoup de Beaucoup de
libre mais en libre. temps libre temps, mais ils ne
quantité Ils sont actifs sortent plus
modérée

(Source : Senior Agency)

En vingt ans, les attitudes et les comportements des personnes de plus de 50 ans se sont
beaucoup modifiés.
Outre les aspects matériels (revenus plus élevés, disposition d’un patrimoine plus important,
confort et équipement du logement), leur état d’esprit s’est transformé dans le sens d’une plus
grande autonomie, d’un moindre conformisme, d’une ouverture croissante au monde
extérieur.

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La césure véritable entre les âges s’est déplacée : elle se situe aujourd’hui vers 75 ans. On
constate à partir de cet âge des problèmes de santé plus fréquents, davantage de solitude, une
vie sociale plus réduite et des opinions plus conservatrices.

II. Le tourisme senior

Qu’ils grimpent sur les sentiers pentus qui mènent au Machu Pichu, qu’ils se baladent sur la
grande muraille de Chine ou plus simplement qu’ils s’offrent une semaine de thalassothérapie
sur les côtes bretonnes ou qu’ils visitent en groupe les châteaux de la Loire, les touristes
seniors représentent une véritable manne pour l’industrie du tourisme et pourraient même,
pour certains professionnels, représenter le futur de cette industrie dans les années à venir...

1. Vue d’ensemble du tourisme senior.

Le tourisme est l’un des premiers secteurs concernés par le vieillissement de la population.
La cible Senior des professionnels du tourisme n’est pas homogène, elle comprend les jeunes
Seniors encore en activité, les jeunes retraités et les personnes plus âgées. Le rapport
qu’entretiennent ces catégories de Seniors avec les vacances et le tourisme varie selon l’âge et
les effets du vieillissement, certes, mais il est aussi « culturel ». Pour beaucoup de Seniors, en
particulier les plus âgés, les loisirs sont une invention récente. L’étude « Les Seniors et le
tourisme » montre que les plus de 65 ans ont été moins habitués à partir en vacances (mais ces
Seniors pensent de plus en plus à eux-mêmes et à leurs loisirs). Les Jeunes Seniors, par
contre, ont un rapport aux vacances et au tourisme qui se rapproche de celui des jeunes.
Les seniors aiment voyager, ils ont le temps de le faire mais voyagent différemment des
jeunes et des actifs qui, eux, sont contraints par le temps.

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a. Taux de départ et nombres de voyages effectués selon les tranches d’âges :

Taux de départ en % Evolution du taux de départ selon l'âge


80

78

76
50-64 ans
74
65 ans et +
72

70 Ensemble de la
population
68

66
1993 1994 1995 1996 1997 1998 1999 Années

Source : suivi de la demande touristique (direction du tourisme/ SOFRES) 1999

D’après ce que l’on peut voir sur ce graphique, le taux de départ en voyages a connu en
France une très forte baisse à partir de 1996. Toutefois, contrairement à l’ensemble de la
population, le taux de départ chez les plus de 50 ans recommence à augmenter à partir de
1998. Il est clair également que le taux de départ chez les personnes ayant entre 50 et 64 ans
est plus élevé que le reste de la population, y compris les plus de 65 ans. Il faut donc imaginer
qu’avec l’arrivée des babys Boomers à l’âge de 60 ans, ce taux va considérablement
augmenter, car ils seront les plus nombreux et auront eu l’habitude de voyager.

En effet, si l’on compare le taux de départs par génération, on constate que ce sont les
générations nées après la guerre qui ont le plus tendance à partir en voyages. Cette croissance
des départs chez les quinquagénaires est spectaculaire, d’autant que les années 40 ne
représentent que le début du Baby Boom. Plus les générations avancent et plus le taux de
départ est important. Les seniors partent donc davantage en vacances que l’ensemble de la
population et ce, qu’il s’agisse de n’importe quelle année. Les changements évoqués dans le
chapitre précédent comme l’amélioration de l’état de santé, les revenus plus importants et une
plus grande habitude à voyager expliquent cette progression spectaculaire.

Toutefois, le taux de départ global des plus de 65 ans (71,2 %) est encore inférieur à
l’ensemble de la population (73,3 %) mais la différence est infime lorsque l’on sait que cette

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génération n’a pas été habituée à voyager mais a appris à voyager ; la distinction entre ces
deux notions est importante car elle permet de comprendre pourquoi ce taux sera
probablement supérieur à l’ensemble de la population dans les années à venir.

Comparaison des taux de départ entre l’ensemble de la population et les 65 ans et plus selon la
durée du voyage :

Taux de départ en % 65 ans et plus Ensemble de la population


Voyages personnels toutes durées 71 ,2% 73,3%
Longs voyages personnels 66,9% 65,7%
Longs voyages personnels en France 62,4% 60,1%
Longs voyages personnels à l’étranger 23,5% 19,4%

Globalement, pour les voyages personnels toutes durées, ce sont les plus de 65 ans qui
voyagent le moins, à en juger par les données du tableau et du graphique. Mais la différence
est infime (2,1 points). Toutefois, les seniors de plus de 65 ans font plus de voyages de longue
durée (66,9%) que le reste de la population (65,7%). Et il est normal que leur taux pour les
voyages de courte durée soit inférieur à celui du reste de la population, car il ne faut pas
oublier que les actifs ou même les étudiants ont des contraintes de temps. Eux aussi aiment
voyager mais ils disposent de moins de temps pour le faire, ce qui fait qu’ils privilégient les
voyages courts. Cette tendance s’accentuera sûrement à l’avenir, car les 35 heures favorisent
cette tendance. Avec les 35 heures, les actifs possèdent plus de temps libre, ils partent moins
longtemps en vacances mais privilégient davantage les départs en week-end qu’ils étalent tout
au long de l’année.

D’après ce qu’il vient d’être dit et de ce que l’on peut constater d’après le graphique, la
proportion des plus de 50 ans à voyager est plus forte que le reste de la population. Sachant
que leur nombre va augmenter compte tenu de la démographie et de l’arrivée à l’âge de la
retraite des premiers babys boomers, le tourisme des plus de 50 ans représente déjà et va
continuer à représenter un marché énorme dans les années à venir. D’autant que non
seulement ils sont plus nombreux à partir, mais en plus ils partent en moyenne plus souvent
que le reste de la population.

19
En effet, si l’on procède à un découpage de la population par tranche d’âge, on peut dresser le
tableau suivant :

Nombre de voyages par tranche d’âge par an :

Tranche d’âge Nombre moyen de voyages


20 – 30 ans 2,15
30 – 40 ans 2,05
40 – 50 ans 2,05
50 – 55 ans 2,20
55 – 60 ans 2,40
60 – 65 ans 2,45
65 – 75 ans 2,30

Ce tableau montre très clairement la tendance à partir plus souvent en voyages chez les
personnes de plus de 50 ans. Ce sont les seniors âgés de 60 à 65 ans qui partent le plus
fréquemment. Cela s’explique par l’arrivée à l’âge de la retraite, ce qui leur donne du temps
en plus pour se faire plaisir et donc voyager. Les 55-60 ans voyagent également fréquemment
puisque certains d’entre eux sont en pré-retraite et, pour les autres, ils n’ont plus d’enfants à
charge ce qui leur donne plus de temps et de moyens pour partir en vacances. A partir de 65
ans, le nombre de départ en vacances est un peu moins fréquent mais reste tout de même plus
élevé que chez les 20-65 ans ; on peut, entre autres, l’expliquer par des soucis de santé plus
présents à partir de cet âge et par l’envie moins présente de s’ouvrir au monde. Le tableau ne
donne pas le nombre de départs pour les plus de 75 ans, ce taux aurait sûrement été bien
inférieur à celui des seniors plus jeunes du fait des problèmes de santé plus récurrents à partir
de 75 ans et parce que cet âge marque une césure véritable avec les générations précédentes
car ils n’ont, pour la plupart, pas été habitués à partir en voyages au cours de leur vie.

De plus, des études menées par l’Insee montre l’évolution du nombre moyen de séjours entre
1989 et 1999 selon les âges :

Le nombre moyen de séjours entre 1989 et 1999 : +20% entre 50 et 54 ans, +26% entre 55 et
59 ans, +20% entre 60 et 64 ans, +26% entre 65 et 69 ans et enfin +20% après 70 ans, alors
que pendant la même période le nombre moyen de voyages chez les 30–50 ans augmentait
seulement de 5%.

20
b. Les dépenses des seniors en terme de voyages :

Il est d’abord utile de préciser que le tableau ci dessous représente les dépenses par
générations uniquement pendant les vacances d’été. Ces données proviennent de l’étude faite
par l’Insee sur la condition de vie des ménages et cela ne traite, malheureusement, pas des
dépenses de voyages répartis sur toute l’année. Mais comme on peut le voir dans le tableau
suivant, d’une façon générale, les seniors dépensent plus que les jeunes.

Séjours d'été

100%
> 2287 €
80%
1372-2287 €
60%
610-1372 €
40%
305-610 €
20%
< 305 €
0%
s s s s s s s s
âge an an an an an an an
s 5 9 9 9 9 9 9
u e2 25
-2
30
-3
40
-4
50
-5
60
-6
70
-7
To -d

Enquête sur la condition de vie des ménages, Insee, 1999

D’une manière générale, quelque soit la génération, les gens dépensent entre 610 et 1372 €
pour leurs voyages, sauf chez les moins de 25 ans qui, eux, dépensent moins de 305 euros.
Mais, et c’est là où la différence se fait, les seniors sont plus nombreux à dépenser au dessus
de 1372 €. C’est à partir de la quarantaine que l’on commence à consacrer un budget
important. Mais ce que l’on constate avec ce tableau, c’est aussi une évolution dans les
dépenses. En effet, avec les années, il y a une homogénéisation dans les budgets. Et les
explications sont simples. Quand on est jeune, on ne possède pas beaucoup d’argent, que l’on
soit étudiant ou jeune actif. L’argent pour les vacances n’est pas la priorité car il y a des
dépenses de la vie courante qui sont plus importantes, et les emprunts sont plus nombreux
(foyer, voitures etc.). De plus, quand on est jeune, on est beaucoup plus modulable, on fait
beaucoup moins attention au confort, ce qui prime c’est d’être avec ses amis pour passer des
bons moments. Quand on vieillit, le confort devient un élément de plus en plus important pour
passer des vacances agréables, et donc certaines activités comme le camping, très fréquent
chez les jeunes, est moins apprécié par les seniors. Pourquoi devraient-ils se priver de ce

21
confort alors qu’ils ont la capacité financière de se le payer ? Comme on l’a vu dans le
chapitre précédent, lors de la retraite, les traites se font plus rares, ce qui permet de consacrer
son argent à d’autres choses ; les seniors aiment voyager et ils ont du temps pour le faire, leurs
dépenses en matière de vacances sont donc plus conséquentes. D’après le graphique ci dessus,
ce sont les 50-69 ans qui sont les plus dépensiers (suivi de près par les personnes des
générations suivantes : 69-79 ans), or avec le Baby Boom, on va assister à l’arrivée massive
de personnes à ces âges, ce qui sous-entend une croissance rapide du chiffre d’affaire dans les
années à venir.

c. Le taux de départ en vacances chez les seniors varie également en fonction des
revenus :

Les seniors ne sont pas tous égaux devant la richesse. Ce n’est pas une population homogène.
Ils ne réagissent pas tous de la même façon mais surtout comme pour toutes générations, ils
existent des différences dans les revenus. Ces disparités sont même plus fortes à l’âge de la
retraite. Actif, plus on est riche plus on reverse de l’argent pour payer les retraites. Mais ce
qui est une perte d’argent durant la période d’activité représente une plus value à la retraite en
règle générale (sans détailler toutes règles concernant le système de retraite, répartition et
capitalisation). A cela il faut ajouter les revenus du patrimoine, véritable facteur différenciant
les catégories sociales. Pendant la période d’activité les différences sont déjà fortement
marquées entre les catégories sociales, mais toutes ces particularités du revenu, à l’âge de la
retraite, font que ces différences se retrouvent amplifiées à cette époque de la vie, notamment
pour les veufs ou veuves qui ne touchent qu’une seule pension de retraite.

D’après des études menées par l’observatoire national du tourisme en association avec la
Sofres, la tendance à partir en voyage est davantage influencée par le revenu que par les autres
facteurs, comme l’âge ou, ce qui lui est lié, l’état de santé…

22
Taux de départ en voyages personnels (%) par âge
105 et selon le revenu
95
85
Moins de 50 ans
75 50-64 ans
65 65-69 ans
55 70 ans et +

45

5€ 52
5
28
7
04
9
81
1
et
+
91 1 2 3 3 1
< 5à 5à 7à 9à 38
1
91 15
2
22
8
30
4

Source : Observatoire National du Tourisme/Sofrès

Ce graphique montre très clairement que le revenu conditionne le départ en voyages. En effet,
plus le salaire est élevé et plus les gens partent en voyage. Rien d’étonnant, plus on a d’argent
plus on peut se faire plaisir et ce, à tout âge. Mais cela se vérifie encore plus à la retraite avec
la disparition des différentes formes de contraintes précédemment citées.

2. Les attentes des seniors en terme de voyages.

Pendant longtemps, les saisons touristiques étaient réglées comme du papier à musique. On
partait l’été sur les plages et l’hiver à la montagne. Toutefois, compte tenu du vieillissement
de la population, l’organisation et les rythmes des départs en vacances ont évolué depuis une
quinzaine d’années.

a. Où partent-ils ?

40,3% des Français pensent en premier aux voyages pour dépenser leur argent. Un
pourcentage qui monte à 48,7% chez les quinquagénaires.

Selon L’Echo touristique, 18% des 50-64 ans passent leurs vacances à l’étranger contre 11%
des plus de 65 ans. La part des plus de 60 ans dans les départs en vacances a augmenté de 5
points entre 1989 et 1999. (Source : INSEE, Economie et statistique n°345 – 2001)

23
Destination France :

40% des plus de 50 ans choisissent la France pour voyager.

D’après l’Observatoire national du tourisme, les régions préférées des seniors sont, dans
l’ordre :

• La région Paca : elle représente 27,3% des nuitées en 1995


• La région Rhône-Alpes qui représente 23,1% des nuitées la même année.
• Le Languedoc-Roussillon : 18% des nuitées.
• La Bretagne : 15,3% des nuitées.
• L’Aquitaine : 14,2% des nuitées.
• L’Ile-de-France : 13,1% des nuitées.
• Les Pays de la Loire : 13,1% des nuitées.
• Les Midi-Pyrénées : 11,1% des nuitées.
• Le Poitou-Charentes : 8,5% des nuitées.

61,7% des seniors aiment voyager dans les régions françaises. Le terroir demeure, en effet,
une valeur forte pour 25,9% des seniors.

40% d’entre eux voyagent en couple ou en famille. (Source : Etude Scanner 2000)

Voyages à l’étranger :

Pour les plus de 50 ans, les explorations lointaines, sauvages ou organisées, s’effectuent plutôt
vers les Pays Scandinaves avec 15,2%, les Etats-Unis avec 10,1%, l’Australie avec 8,1% et
l’Afrique Noire avec 6,2%.

Les plus de 50 ans représentent les deux tiers (66,6%) de la clientèle touristique qui est partie
plus de deux fois en circuit ou en club au cours des deux dernières années.

Selon l’étude Scanner 2000, les seniors ont privilégié, dans l’ordre, les destinations
suivantes :

 L’Espagne
 Les DOM-Tom
 Le Maroc (10,3% d’entre eux)
 Les Etats-Unis (10,1%)
 Le Canada (7,9%)
 L’Egypte (7,6%)
 La Thaïlande (3,6%)

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D’une manière générale, les seniors recherchent des vacances qui ont du sens : ils privilégient
la découverte, la culture, les contacts avec les habitants.

b. Comment achètent-ils ?

61,1% des plus de 50 ans manifestent un goût particulier pour le tout compris.

Mais partir informé reste le maître mot des seniors. En effet, les plus de 50 ans mettent
beaucoup de soin à préparer leur voyage : ils ont besoin d’être clairement informés sur la
destination de leur choix, sur l’hébergement, le climat, les animations proposées…..

28,5% d’entre eux se renseignent auprès d’offices du tourisme, 23,5% achètent des guides de
voyages et, plus de la moitié des seniors lit la presse généraliste ou spécialisée dans les
voyages, compare, interroge et recoupe les informations avant de faire leur choix.

Les seniors entre 50 et 69 ans refusent, pour la plupart d’entre eux, les voyages entre seniors
exclusivement. Quant aux seniors plus âgés, ils ont besoin d’une plus grande prise en charge
et voyagent volontiers en groupe.

Les babys boomers apprécient davantage l’indépendance mais sont lucides quant à leur
avenir : si 73% d’entre eux refusent actuellement les voyages entre seniors, ils savent que
l’âge venant, ils en accepteront plus facilement le principe.

c. Hébergements et transports :

34% des plus de 50 ans sont hébergés par la famille ou par des amis lorsqu’ils partent en
vacances, 30,5% ont une résidence secondaire, 15% résident dans des hôtels, 6,9% louent une
maison ou un appartement et 3,8% font du camping, selon l’Observatoire du tourisme et la
SOFRES. De plus, un quart des plus de 50 ans qui sont grands-parents partent avec leurs
enfants ou petits-enfants durant l’été.

Concernant le transport :

o Les seniors entre 50 et 70 ans privilégient la voiture pour se rendre sur leur lieu de
vacances en France (près de 49%)
o 77,2% des seniors se rendent à l’étranger en avion
o 37,6% des plus de 50 ans ont pris le train au cours des deux dernières années

25
o 10,7% des plus de 50 ans possèdent une carte senior SNCF afin de bénéficier de
réductions lors de leurs déplacements en train
o 24,3% prennent le TGV pour partir en vacances en France et 6,7% l’Eurostar pour
se rendre en Angleterre.

d. Quand partent-ils ?
34% vénèrent le soleil en hiver. Les plus de 50 ans représentent 58,1% des voyageurs se
déplaçant hors vacances scolaires. Mais ils aiment tout de même se promener toute l’année
avec une prédilection marquée pour le printemps pour 40% d’entre eux.

Sur dix clients des cures thermales et thalassos hors vacances scolaires, sept sont des seniors.

Même si la plupart des vacanciers hors vacances scolaires sont des seniors, ce phénomène
tend à diminuer notamment chez les seniors les plus jeunes (babys boomers) qui ne veulent
pas être « ghéttoïsés ». En effet, voyager hors période scolaire signifie se retrouver largement
entre seniors, ce que refusent la plupart d’entre eux.

Les babys boomers sont davantage attirés par un tourisme intergénérationnel qui leur permet
de se retrouver avec des personnes plus jeunes afin de ne pas se sentir « vieux parmi les
vieux ». Etre entouré de personnes âgées fait ressentir qu’on l’est soi-même alors que pour la
plupart des personnes «avançant dans l’âge », elles se sentent plus jeunes que l’âge qu’elles
ont en réalité. C’est à partir de 69-70 ans que les seniors préfèrent partir en groupes et,
souvent hors période scolaire.

Il y a donc bien une différence entre l’âge biologique et l’âge psychologique. En effet, comme
vu dans le chapitre précédent, cette rémanence de la jeunesse dans les esprits s’explique
notamment par la comparaison avec les générations antérieures, qui paraissent plus âgées.
Elle est surtout liée au fait que les capacités mentales des personnes âgées sont de mieux en
mieux préservées. L’esprit vieillit moins vite que le corps et le vieillissement s’accompagne
moins qu’avant d’opinions, d’attitudes et de comportements conservateurs ou réactionnaires.

26
e. Les seniors veulent plus d’aventure :

Les touristes plus de 50 ans sont maintenant plus aventureux qu'ils ne l’ont jamais été et
évitent les vacances traditionnelles sur la plage pour choisir des voyages long-courriers,
indique une récente étude de la société NOP World.

NOP World, une société d’étude de marché, a récemment interrogé 1.000 Britanniques et a
constaté que deux tiers des plus de 50 ans estimaient jouir pleinement de leur vie. Environ
65% voudraient aller faire un safari et 60% songent à prendre du temps afin voyager dans le
monde.

L’étude a également constaté que les personnes les plus admirées par les plus de 50 ans sont
Richard Branson, 54 ans pour sa soif pour de nouveaux défis, Mick Jagger, 61 ans pour sa
jeunesse éternelle.

La société « Saga Holidays » qui a commandé l’étude, propose des vacances spécifiques pour
les plus de 50 ans.

Peter Bettley, un dirigeant de Saga, a indiqué qu'il y avait eu un changement important dans
les attitudes de voyage des plus de 50 ans.

"Nous avons souvent l’image des vacanciers âgés se reposant en promenade ou tricotant,"
explique-t-il. "Maintenant ils veulent visiter des pays éloignés, voyager au Népal ou aller en
safari. Environ 20% de nos clients veulent des vacances d'aventures comparé à environ 2% y
a cinq ans."

Peter Bettley explique que les personnes de 50 ans et plus ont habituellement un degré élevé
de revenu, souvent parce qu'elles ont fini de rembourser les emprunts, mais il croit également
qu'elles ont des attitudes différentes de celles de leurs parents.

« Plusieurs de ces personnes sont nées dans les années 50 et ont grandi pendant la révolution
des années 60. Les valeurs sociales du début des années 70 ont beaucoup changé et les plus de

27
50 ans aujourd'hui ne veulent pas adopter le stéréotype de la personne plus âgée qui reste à la
maison et passe tout son temps avec ses enfants et petits-enfants »

3. Les voyages sur Internet : un support à prendre en compte pour les


touristes seniors ?

Selon les dernières statistiques de Médiamétrie, les seniors occupent une place de plus en plus
importante au sein de la population des internautes. La population française comptait 7 869
000 internautes en 2000, soit 2 527 000 internautes de plus qu’en 1999. Ces internautes sont
majoritairement des hommes âgés de 18 ans à 24 ans. Néanmoins, les seniors prennent de plus
en plus goût au web. Si les plus de 65 ans ne représentaient, l’année dernière, que 0.5% des
surfeurs, ils sont aujourd’hui près de 1,9% à se connecter régulièrement sur Internet. Afin de
mieux comprendre le comportement des seniors sur Internet et, notamment celui de l’achat de
voyages en ligne, il est utile de répondre aux questions suivantes : Quels sont les sites les plus
visités par cette catégorie de la population ? Sont-ils prêts à effectuer des achats en ligne et,
précisément des séjours touristiques ?

a. Seniors et net : quelques chiffres clés :

A première vue, les seniors paraissent un peu moins intéressés que les plus jeunes par les
possibilités de communication qu’offre Internet (77% contre 80%). Mais, à bien y regarder,
on constate que 81% des seniors se connectent tous les jours pour communiquer, alors que les
plus jeunes sont seulement 64% (25% des 26-50 ans ne se connectent qu’une fois par semaine
pour communiquer). 76% des plus de 50 ans utilisent le mail (contre 64% des 35-49 ans) et
plus surprenant, 22% l’audio-vidéo ; à l’inverse, ils se servent peu du chat (7,5% d’entre eux)
ou des jeux (0,4%), applications qui semblent réservées aux plus jeunes. Spontanément, la
première raison évoquée par les seniors (surtout les plus âgés et ceux vivant seuls) pour
expliquer leur venue sur Internet est la possibilité de communiquer. De plus, l’anonymat
visuel de la plupart des communications par Internet tend à éliminer les stéréotypes liés à
l’âge et favorise les échanges culturels intergénérations.

28
b. Les sites les plus fréquentés par les seniors :

Top 10 des sites les plus fréquentés par la cible 50 ans et plus :

Fréquentation des
Nombre de visiteurs
Sites plus de 50 ans
(en milliers)
(en %)
Notre Temps 236 64,34
seniorplanet.fr 192 53,46
cnav.fr 237 52,68
GeneaNet 160 52,43
notrefamille.com 183 52,17
Lavasoft 172 44,66
IncrediMail 334 39,57
Symantec 448 38,34
cvf.fr 184 37,32
Adobe 659 35,8

Source : Médiamétrie//NetRatings, janvier 2005

Les seniors sont attirés par les sites d'informations consacrés à leur préoccupations : Notre
Temps, SeniorPlanet, GeneatNet et le site de la Cnav (Caisse nationale d'assurance vieillesse)
réalisent les plus fortes audiences sur la cible des 50 ans et plus.

Fort logiquement, ces sites obtiennent plus de 50 % de leurs visites sur cette tranche de la
population des internautes. Plus étonnant, les seniors fréquentent assidûment les sites des
éditeurs de logiciels : Adobe et Symantec réalisent de bons scores auprès de cette audience, en
partie grâce aux outils de retouche de photographies ou aux antivirus.

c. Les achats en ligne :

L'Association pour le commerce et les services en ligne publie son étude annuelle, et annonce
que 2004 a connu une hausse des achats en ligne de 64,8%. Les traits majeurs de cette étude
révèlent des habitudes de consommation et des profils de consommateurs spécifiques. Les "
plus de 50 ans " entrent de plein pied dans le commerce en ligne, dont l'augmentation du
volume de vente ne se dément pas. Fait nouveau, les petites entreprises bénéficient de la
croissance du secteur. Enfin, les augmentations des ventes les plus impressionnantes se font
dans les domaines du numérique, du voyage et, plus étonnant, du prêt à porter.

29
Les " plus de 50 ans " achètent en ligne :
C'est la classe d'âge des " seniors " en particulier qui comble le retard important des années
précédentes en la matière. Pour la tranche d'âge des "50 ans et plus", et pour la fois, les
acheteurs seniors sont proportionnellement plus nombreux que les internautes seniors. Chiffre
révélateur de ce nouvel engouement pour l'achat sur Internet, Médiamétrie annonce que 47%
des seniors internautes achètent en ligne. De même, au sein de la communauté des internautes,
les plus de 50 ans représentent désormais 20% des 23,7 millions d'internautes, soit 4,8
millions fin 2004. Cette population est en progression de 19% par rapport à 2003. En
comparaison, on constate que le nombre global d'internautes a augmenté « seulement » de 9%
entre 2003 et 2004.

d. Les seniors et les voyages sur Internet :

Même si les internautes seniors sont, chaque année, de plus en plus nombreux, qu’ils
commencent aussi à passer à l’acte d’achat sur Internet, cette population, en terme de
consommation de voyages en ligne, reste quand même en deçà des chiffres de la moyenne
nationale.

Comme le souligne la récente enquête menée par la SOFRES pour le compte de


lastminute.com, un français sur six achète son voyage sur Internet. Si les 50-64 ans se
rapprochent de cette moyenne, chez les plus de 65 ans, ils ne sont que 4% à acheter leur
voyage en ligne.

Il reste donc encore un fort décalage et, l’on peut penser que sur les deux ou trois prochaines
années, ce sont surtout les 50-65 ans qui vont assurer une bonne partie du développement des
ventes de voyages en ligne. En effet, les seniors issus du baby-boom ont été davantage
habitués à utiliser un ordinateur au cours de leur vie professionnelle, ils sont donc plus à
même de comprendre Internet et d’utiliser cet outil comme moyen de s’informer sur leurs
prochaines vacances et d’acheter leurs voyages en ligne sur des sites sécurisés.

Les plus de 65 ans, quant à eux, ont besoin d’être informés clairement, ils ne maîtrisent pas
forcément Internet comme leurs enfants ou petits-enfants et sont donc plus réticents à acheter
des voyages en ligne. Ils aiment le contact humain et privilégient les agences de voyages afin
de pouvoir discuter de leur séjour avec un vendeur, ce qui les rassure.

30
L’achat de voyages en ligne chez les seniors se développe mais davantage chez les 50-65 ans
que chez les plus âgés. Toutefois, dans les années à venir, ce phénomène va prendre de
l’ampleur avec les générations issues du baby-boom qui ont des comportements différents de
ceux de leurs aînés. Les sites de voyages en ligne ne doivent donc pas négliger cette
population qui va représenter un fort potentiel de développement des achats de voyages sur le
net.

Certains sites comme lastminute.com essaient donc de mettre en place plusieurs solutions afin
d’attirer cette clientèle : ils proposent des voyages en groupes mais qui ne sont pas forcément
réservés aux seniors afin de ne pas trop les « ghéttoïsés », ils développent également des
produits bien spécifiques comme les croisières ou la thalasso.

Conclusion : l’avenir du tourisme senior :

Même si certains estiment que le marché des seniors dans le domaine du tourisme est
surestimé, l’arrivée des baby-boomers à la retraite est un fait. Ils ont, pour la plupart d’entre
eux, un pouvoir d’achat plus conséquent, du temps libre et n’ont généralement plus d’enfants
à charge. Les attentes des seniors, globalement différentes de celles des plus jeunes, sont tout
aussi hétérogènes. On peut penser que leurs exigences quant au contenu des vacances à savoir
découverte, santé, forme et nature vont se renforcer dans les années à venir.

Les séjours « intergénérationnels » sont aussi promis à un bel avenir. Il s’agit par exemple de
permettre aux grands-parents de partir en vacances avec leurs petits-enfants.

Autre attente : des « vacances intelligentes et ouvertes sur le monde ». Il peut s’agir de
voyages associant sport, découverte et culture. Certains voyagistes aux Etats-Unis proposent
ainsi des universités d’été pour les seniors.

L’aménagement des structures d’accueil est également une nécessité qui semble encore sous-
estimée. Le vieillissement de la population des baby-boomers sera assez brutal. Dans une
quinzaine d’années, ils auront des besoins particuliers, notamment dans le domaine de
l’hôtellerie. Le groupe américain Choice, en avance, propose déjà des chambres spécialement
adaptées aux besoins des plus de 60 ans sous le label « Premium ».

31
III. Les voyagistes qui s’adaptent aux seniors

Même si beaucoup de professionnels du tourisme disent que les seniors représentent pour eux
un enjeu, les pratiques et les avis concernant les politiques à mettre en œuvre sont très
diverses. Une partie des tour-opérateurs ne veulent pas directement cibler les seniors, d’autres
visent au contraire explicitement cette cible. C’est le cas de Sélectour et de Vacances Bleues.

Des entreprises comme Mercure ont beaucoup travaillé sur le marché des seniors avec la mise
en place d’une « cellule de réflexion ». Actuellement, cette chaîne d’hôtels propose un
programme de réduction aux plus de 55 ans intitulé : « Venez à deux, payez pour un ». Dans
le domaine de la location de voitures, Avis propose une carte spéciale de réduction et de
services aux seniors. Depuis 2002, Europcar a développé une offre senior qui permet aux plus
de 55 ans d’obtenir 20% de réduction.

Parmi les sociétés de tourisme qui ne mènent aucune politique particulière pour cibler les
seniors, on trouve principalement Havas, Club Med et Fram. Ces entreprises ont des
réflexions sur les attentes des seniors mais leur stratégie est volontairement de ne pas les
cibler ouvertement.

1. « Vacances Bleues » mise sur les baby-boomers.

L’arrivée à l’âge de la retraite de la génération des baby-boomers est le nouveau défi de


Vacances Bleues. Les désirs en matière de vacances de ces personnes nées après 1945 ne sont,
en effet, ni ceux des seniors traditionnels, ni ceux des familles. D’où la naissance d’un
nouveau concept « Faites-vous Plaisir ! » pour répondre aux attentes spécifiques de cette
tranche d’âge.

Née en 1971 à Marseille, l’association Sud Vacances prend le nom de Vacances Bleues (VB)
en 1979. En 1973, elle concrétise ses premiers partenariats avec des Caisses de Retraite pour
la gestion de leurs établissements de vacances. Vacances Bleues devient ainsi le spécialiste
des vacances des seniors. Son offre hôtelière « historique » a été élaborée en conséquence.

Vacances Bleues occupe une position de leader national dans le domaine des vacances des
seniors en Hôtels-Club. Sa clientèle s’est également élargie aux familles : dès les années 80,
les seniors ont en effet pris l’habitude de partir en vacances avec leurs petits-enfants et leurs

32
enfants. Chez Vacances Bleues, les séjours intergénérations sont une réalité depuis plusieurs
années et l’offre produit s’est vite adaptée aux besoins des familles.

Le baby-boomer est un défricheur que tout intéresse. Il peut passer d’une marche sur les
chemins de Saint Jacques, à un séjour dans une ville d’art avant une cure de balnéothérapie.
Tout est envisageable pourvu qu’il y ait du plaisir à la clef. Le concept Faites-vous plaisir, né
en 2004, va dans ce sens. Il est conçu comme une porte ouverte sur tous les possibles, une
occasion de réaliser ce dont on a envie depuis longtemps avec des professionnels sélectionnés
et dans des conditions optimales. Des séjours axés sur l’action, l’insolite et la rapidité : 5 jours
pour s’initier au pilotage de planeur, 3 jours pour découvrir l’envers des courses de chevaux, 4
jours de via ferrata dans les Écrins, 3 jours de pêche au gros à Hyères. Ou encore un trekking
au Népal...

« Les vacanciers sont de plus en plus zappeurs, prennent leur décision à la dernière minute,
raccourcissent leur durée de séjours tout en multipliant les départs, partent de plus en plus à
l’étranger, tout compris et moins chers. Des nouveaux comportements qui incitent Vacances
Bleues à faire preuve de souplesse et d’ouverture. » explique Christian Carassou-Maillan, le
directeur de VB.

Le tour opérateur qui a réalisé, en 2004, un chiffre d’affaires de 67,5 millions d’euros (soit
10,6% de plus qu’en 2003) veut diversifier son réseau de distribution.
Jusqu’ici, ses produits (70 destinations de voyages à l’étranger et 26 résidences de séjour en
France), étaient vendus en direct grâce à un important fichier et, appuyé par un catalogue
général tiré à 400.000 exemplaires.
Depuis deux ans, Vacances Bleues multiplie les expériences multicanaux. D’abord avec la
grande distribution (70 points de vente Leclerc Voyages) et le réseau Jancarthier et souhaite, à
moyen terme, réaliser 10% de son chiffre par l’intermédiaire des agences et 5% par Internet
(contre 1% actuellement).

33
Vacances Bleues développe ses positions dans le domaine de l’immobilier avec deux projets
dans des régions et pays à fort potentiel touristique où elle n’était pas encore présente :
Divonne-les-Bains et Marrakech :

- Divonne-les-Bains Les Longs Prés : ce projet dont Vacances Bleues est le concepteur sera
opérationnel en janvier 2006. Il s’organise autour d’un hôtel de 90 chambres, avec restaurant,
centre de balnéothérapie, salles de séminaires et d’une résidence de tourisme dont les
appartements ont été vendus à des particuliers.

- Marrakech Douar-Lazrak : Vacances Bleues lance dans la palmeraie de Marrakech un


Village-club prestige avec un hôtel sous forme de deux bâtiments et 180 villas proposées à la
vente. Proches de nombreux golfs, doté de grandes piscines, tennis, restaurants, ateliers
d’artisanat, il offrira un lieu de séjour exceptionnel. Il permettra, notamment, de capter une
clientèle de jeunes seniors en quête de séjours dépaysants, avec prestations haut de gamme et
fort contenu culturel et sportif.

2. Primavacances.

Depuis 1967, AG2R, premier groupe interprofessionnel français de prévoyance et de retraite


complémentaires des salariés et des retraités, développe avec la création de Primatour
(structure associative) une action sociale en faveur des vacances pour ses retraités.

Aujourd’hui, avec sa filiale Primavacances qui bénéficie du statut d’agence de voyages,


AG2R s’adresse principalement aux seniors mais aussi au grand public. Primavacances
dispose, en effet, d’une licence depuis 2000 et vient de lancer son catalogue Printemps-Eté
2005 dans lequel sont proposés des voyages, des séjours et des croisières en France et à
l’étranger.

Disponible sur simple demande, la nouvelle édition du catalogue propose des formules de
vacances (28 destinations en France, 13 à l’étranger et une vingtaine de croisières maritimes
et fluviales) aussi bien dans des hôtels traditionnels que dans des villages de vacances.

Primavacances souhaite se distinguer des autres acteurs du marché par une offre
spécifiquement adaptée aux seniors, aux familles ou encore à l’intergénération.

34
En effet, précédemment nous avons constaté que les seniors partent davantage en France qu’à
l’étranger et que cette cible privilégie plus les croisières que le reste de la population.
Primavacances, en proposant 28 destinations en France et plus de vingt croisières différentes,
s’adapte bien aux attentes de cette cible.

En outre, les jeunes seniors partent volontiers en voyage intergénérationnel (c’est-à-dire qu’ils
aiment se mélanger aux tranches d’âge plus jeunes) et partent de plus en plus avec leurs
petits-enfants ; ce que Primavacances a bien compris puisque cette agence propose des
« voyages intergénération » notamment dans des villages de vacances où les animations sont
davantage présentes que lors des voyages entre seniors exclusivement.

Le catalogue Primavacances existe depuis 5 ans mais la nouveauté est le lancement de deux
éditions par an depuis cette année. La première en février pour les périodes du printemps et de
l’été et la seconde en septembre pour les périodes de l’automne et de l’hiver.

Primavacances cherche à cibler essentiellement les jeunes seniors qui ont entre 58 et 65 ans
avec les offres citées précédemment (voyages intergénérationnels et croisières
essentiellement) mais également les seniors de 65 à 80 ans avec des offres qui leurs sont
adaptées à savoir principalement des voyages organisés entre seniors où la prise en charge est
totale.

En 2003, plus de 35 000 vacanciers sont partis avec Primavacances dont 28 000 en France,
près de 5 000 à l’étranger et 2000 en croisières.

3. Selectour vient de sortir sa nouvelle brochure pour les seniors


globe-trotters.

Le voyagiste Selectour, qui édite une brochure spécifiquement dédiée aux seniors depuis 1997
vient de sortir sa nouvelle édition printemps-été-automne 2005, destinée aux "seniors globe-
trotters" et présentant dix-huit offres déclinées en séjours, circuits et croisières

Outre les destinations et les avantages tarifaires proposés, cette nouvelle brochure se veut
également informative grâce à un lexique de conseils pratiques visant à bien préparer son
voyage. Deux rubriques principales sont proposées à cet effet : « Savoir profiter des
réductions » et « Pour partir l’esprit tranquille ».

35
Selectour suggère par exemple, à chaque départ en vacances, de faire garder sa maison par un
couple de retraités, de ne pas indiquer sur son répondeur téléphonique que l’on est absent, de
faire ouvrir les volets de temps en temps par un voisin, de vérifier que votre assurance
responsabilité civile couvre les dommages que votre animal de compagnie pourrait
occasionner durant sa garde… Bref que de bons conseils qui sont destinés à rassurer les
seniors quant à leur départ en vacances.

Toutefois, on regrettera le choix du voyagiste quant à la taille de sa brochure « format poche


». Certes, elle est pratique et peu encombrante mais elle est difficilement lisible, surtout pour
des yeux fatigués ou presbytes. Tous les textes, qu'il s'agisse de conseils ou des descriptions
des voyages sont écrits en petits caractères, ce qui est un peu dommage lorsqu’on s’adresse
aux seniors et notamment aux plus âgés d’entre eux.

En ce qui concerne les destinations 2005, Selectour propose en circuit : la Russie, l’Espagne,
le Portugal ou le triplé Liban-Syrie-Jordanie ; en séjour : la République Tchèque, la Corse, les
Baléares, l’Île Maurice, la Martinique et la Guadeloupe ou encore la République Dominicaine
; en croisière : la Méditerranée, l’Andalousie, l’Egypte et l’Europe du Nord, sans oublier les
séjours intergénérations en France au Futuroscope de Poitiers ou à Eurodisney.

Enfin, le voyagiste rappelle que des tarifs avantageux sont proposés sur de nombreux
voyages, notamment à l’occasion de célébrations d’anniversaires de mariage (20, 30 ou 40
ans) pour bénéficier d’une réduction de 5% cumulable avec les réductions accordées par les
voyagistes.

Crée en 1970, Selectour se veut le premier réseau d'agences de voyages indépendantes avec
550 points de vente en France. Il annonce un chiffres d’affaires pour 2004 de 1.3 milliard
d’euros. Avec la nature des offres proposées par ce voyagiste, les seniors doivent y trouver
leur bonheur puisque celles-ci correspondent globalement aux attentes de ces derniers.

La brochure Senior globe-trotters est disponible dans les agences Selectour et sur leur site
Internet.

36
4. La France n’est pas le seul pays à s’être penché sur le tourisme
senior.

a. Des exemples à l’étranger :

L’office du tourisme chilien a développé, il y a dix ans, une offre spécifique pour les seniors
afin de revitaliser le marché hors saison touristique. Selon un récent rapport, ce concept aurait
permis de dégager plus de trente millions d’euros de bénéfices sur quatre ans.

La Chine, dont 10% de la population a plus de 60 ans, tente elle aussi de développer le
tourisme des personnes âgées dans la ville de Dalian. Elle espère même, malgré son lourd
passif avec le Japon (notamment les récents évènements anti-japonais qui ont eu lieu à
Beijing) inciter les seniors nippons à venir passer quelques mois de l’année dans son pays.

A Toronto, au Canada, ElderTreks (agence de voyages) propose depuis une quinzaine


d’années des voyages d’aventures pour les plus de 50 ans. En petits groupes, les clients
peuvent sortir des sentiers battus : Kenya, Mongolie, Antarctique, Kilimandjaro…

Au Japon, Nippon Travel, spécialisée elle aussi dans ce type de clientèle, surnomme ces
voyageurs quinquagénaires les « E-age ». Ce tour opérateur est souvent choisi par les baby-
boomers qui souhaitent s’installer à l’étranger pendant des périodes de deux ou trois mois ou
qui décident de se fixer définitivement dans un autre pays. L’agence propose désormais, en
plus de ses voyages, des programmes de perfectionnement et d’entraînement à la pratique des
langues étrangères et prévoit une forte demande pour ce genre de produits dans les années à
venir.

b. L’Espagne : la « Floride » européenne :

En 2003, l’Espagne dépasse les Etats-Unis en destination touristique derrière la France, et


dépasse la France au rang des recettes générées par le tourisme (2ème derrière les Etats-Unis).
L’Espagne prend une option touristique clairement orientée vers le tourisme des Seniors. Les
investissements publics et privés se multiplient.

37
Cinquième en effectif de personnes âgées de plus de 65 ans dans l’Union Européenne et selon
les Nations Unies, pays à venir le plus vieux du monde en 2050, l’Etat espagnol a décidé
depuis 1985 de développer deux secteurs de son économie : les services aux personnes âgées
et le tourisme.

Annonce du 29 septembre 2004 : le ministère du Travail et des Affaires Sociales augmentera


de 13% les places du programme 2004/2005 vacances pour les retraités, le chiffre des
bénéficiaires étant de 680 000 personnes. On attend une création de 50 000 emplois. Le
programme mobilise un budget de 55, 8 millions d’euros.

Ce programme, très prisé en Espagne par les personnes de plus de 65 ans, est développé par
IMSERSO c’est-à-dire l’Institut des personnes âgées et des affaires sociales, dépendant du
ministère espagnol du travail et des affaires sociales. L’objectif de ce programme est
d’améliorer la qualité de vie des personnes âgées tout en maintenant l’emploi dans le secteur
touristique en basse saison, soit d’octobre à mai, en concentrant les efforts sur l’activité
hôtelière.

Sur les 680 000 places, 18 900 sont réservées aux Espagnoles résidents à l’étranger, dont
14 000 pour des citoyens espagnols résidents en Europe.
Les destinations concernent principalement le littoral méditerranéen : les Baléares avec
186 000 places, l’Andalousie avec 153 300 places, la Catalogne avec 102 600 place et les
Canaries avec 27 000 places. Le gouvernement développe aussi des circuits culturels (22 000
places) et une offre de tourisme de nature (4 000 places).

Le programme se déroule entre les mois d’octobre et de mai pour la Péninsule et les Baléares,
et entre avril et juin pour les Canaries, les circuits culturels et le tourisme de nature.
Les prix des séjours par personne varient de 125 à 257 euros pour 8 jours en pension complète
et voyage inclus (en car, mais aussi en avion).

Pour être bénéficiaire de ce programme, les personnes doivent avoir 65 ans, être retraitées du
système public espagnol ou en préretraite, et avoir plus de 60 ans. Le conjoint n’est pas tenu
de remplir les mêmes conditions et un enfant s’il est déficient peut être accompagnant.

38
Les demandes se font auprès des mairies, des centres du troisième âge et des services sociaux
de l’IMSERSO. L’effort est mis cette année pour faciliter l’accès de ce programme en
augmentant les points de vente, surtout en zone rurale.

Déjà en 2001, l’Etat avait lancé un plan d’investissement de 24 millions d’euros pour
améliorer l’accessibilité des plages espagnoles pour les retraités et les handicapés. En 2004,
des programmes de thermalisme ont aussi été subventionnés.

Dans le secteur privé, les projets immobiliers se développent aussi. Selon une étude publiée
en janvier 2005 par le consultant espagnol immobilier IREA, la mode des « Seniors resorts »,
complexe résidentiel pour seniors comme aux Etats-Unis, arrive sur les côtes espagnoles.
L’évolution démographique est estimée en 2020 à 80 millions de personnes en Europe qui
auront plus de 65 ans, un marché intéressant de clients potentiels pour ces « seniors resorts ».
L’acquisition de ces logements sera réservée aux seniors de plus de 55 ans.
Les résidences situées essentiellement sur le littoral méditerranéen, comptent attirer des
espagnols mais aussi des étrangers, comme les nombreux européens du nord qui séjournent
habituellement en Espagne. Des habitudes ont été prises chez les Anglais et les Allemands
dans la décennie 90, ce qui a permis de développer le secteur hôtelier dans ces années.
Actuellement, 155 000 étrangers de plus de 65 ans résident en Espagne.
Actuellement 14 projets sont en cours, 2 établissements fonctionnent et les autres devraient
ouvrir entre 2006 et 2007. Au total, 4000 logements seront proposés. Ces établissements
présentent des installations communes en incluant un édifice central, un centre médical, une
aire culturelle, une aire de restauration, un gymnase, un centre commercial et un centre de
remise en forme.

Une nouvelle industrie se construit autour des services vers le troisième âge, qui
conjointement avec le secteur du tourisme va acquérir un poids considérable dans l’économie
en Espagne. En 2010, les visiteurs étrangers seront 75 millions d’étrangers représentant 16%
du PIB. L’Espagne deviendra “la Floride” de l’Europe.

39
c. Mise en place d’un programme d’échanges touristiques entre seniors français et
espagnols :

La secrétaire d’Etat aux affaires sociales espagnoles AmparoValcace et le ministre français


chargé du tourisme Léon Bertrand ont signé, fin mai 2005, un accord de principe visant à
mettre en place un programme d’échanges touristiques entre les seniors de ces deux pays.

Ce premier pas devrait être concrétisé lors d’une rencontre qui aura lieu prochainement à
l’ambassade d’Espagne en France. Selon M. Bertrand, cette coopération vise à augmenter les
flux de personnes entre les deux pays.

De son côté, la secrétaire d’Etat espagnole a indiqué que la France s’était montrée
particulièrement intéressée par la politique de l’Imerso (institut des personnes âgées et des
services sociaux), l’idée étant que l’hexagone collabore lui aussi avec la péninsule ibérique.

Chaque année, 680 000 personnes âgées profitent du programme de l’Imerso, l’objectif étant
de faire partir les aînés en vacances mais aussi de réduire les conséquences de la saisonnalité
de l’industrie du tourisme sur l’emploi de ce secteur.

Le but est également d’agir sur un vieillissement actif par le biais d’activités saines dans des
zones où le climat est plus agréable entre le mois d’octobre et le mois de juin.

En conclusion, le ministre français a déclaré que ce programme de vacances pour les seniors
s’avère être non seulement une réponse sociale et sanitaire (puisque selon lui lorsque les
personnes âgées partent en vacances elles consomment moins de médicaments) mais aussi
une action bénéfique pour l’économie en général et pour l’industrie du tourisme en particulier.

40
CONCLUSION

Comme on peut le constater au vu des chiffres mentionnés précédemment, le tourisme senior


représente un marché conséquent pour cette industrie. Même s’il s’est déjà fortement
développé au cours des quinze dernières années, le potentiel de croissance reste important.

D’une manière générale, les seniors recherchent des vacances qui ont du sens : ils privilégient
la découverte, la culture et les contacts.

Toutefois, il est important de bien distinguer deux grandes catégories de touristes de plus de
50 ans. Certes, nous vivons une époque où les générations se côtoient, ce qui ne signifie pas
pour autant qu’elles voyagent de la même façon. Ainsi, les baby-boomers n’envisagent pas les
vacances de la même manière que leurs parents : ils demandent une grande flexibilité et une
aide minimale dans l’organisation de leurs voyages, et sont, davantage que leurs aînés, attirés
par l’aventure, les vacances sportives et la découverte en général.

Les seniors plus âgés ont, quant à eux, besoin d’une plus grande prise en charge et voyagent
volontiers en groupes, d’où une nécessaire adaptation des structures d’accueil et de transport
pour ce type de touristes.

Conscients de cette évolution démographique, certains voyagistes considèrent que le voyage


senior représente l’avenir du tourisme et adaptent leurs offres en conséquence.

D’autres voyagistes, qui ont toutefois des réflexions sur les attentes des seniors, ne mènent
aucune politique particulière pour cibler cette clientèle, considérant que cela pourrait vieillir
leur image.

Alors, qu’ils ciblent les seniors ou qu’ils décident de ne pas s’adresser ouvertement à eux, le
constat est simple : les voyagistes peuvent être certains que les seniors, de plus en plus
nombreux à voyager, représentent et vont continuer de représenter dans les années à venir un
marché considérable pour l’industrie du tourisme. Et il serait sans doute dommage de ne pas
vouloir les intégrer dans la stratégie d’entreprise sous prétexte d’une vieille idée reçue qui
consisterait à dire que cibler directement une clientèle « âgée » induit forcément que
l’entreprise l’est également, à savoir vieillotte et peu dynamique.

41
BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages :

• « Le Senior Marketing » de Jean-paul Tréguer aux éditions Dunod, 1998


• « Conquérir le marché des seniors » de Frédéric Serrière, aux éditions Village
Mondial
• « Francoscopie 2005 » de Gérard Mermet, aux éditions Larousse

Documents :

• « La pauvreté monétaire des ménages de 1970 à 1997 », dans INSEE première


n°761, mars 2001
• INSEE première n°739, octobre 2000
• Suivi de la demande touristique, SOFRES 1999
• « Enquête sue la condition de vie des ménages », INSEE 1999
• INSEE, Economie et statistique n°345, 2001
• Etude Scanner 2000
• Médiamétrie, janvier 2005
• Interdeco, « évolution de la consommation de 1991 à 1993 »
• Etude Interdeco/Scanner, 1996
• Etude de la Senioragency pour la RATP

Sites Internet :

• www.seniorplanet.fr
• www.lemarchedesseniors.com
• www.notretemps.com
• www.insee.fr
• www.tns-sofres.com
• www.mediametrie.fr
• www.interdeco.fr
• www.lechotouristique.com
• www.senioragency.fr
• www.seniorscopie.com
• www.vacancesbleues.com
• www.lastminute.com
• www.selectour.com
• www.primavacances.com

42
ANNEXES

43
Annexe 1 : La pyramide des âges

En 2004
er
 En France au 1 janvier 2004 61, 98 millions
dont DOM 1, 8
 Augmentation depuis 1999 2
 Taux de croissance 0,5% dont les ¾ par excédent de naissances
sur décès, le reste représente l'immigration
 Taux de fécondité 1, 86 (1, 72 en 1999) enfant par femme

En 2002
Français
 En France 59, 8 millions
 Dans le monde 61, 3 millions
Rang
 Union européenne 3e
 Monde 20e

1 • Déficit des naissances dû à la guerre de 1914-1918 (classes creuses)

44
2 • Passage des classes creuses à l'âge de fécondité
3 • Déficit des naissances dû à la guerre de 1939-1945
4 • Baby Boom
5 • Passage de la fécondité en dessous de 2 enfants par femme

En savoir plus: INED

-⇑- FRANCE ACTIVE

45
TAUX DE DÉPENDANCE
des personnes âgées de plus de 65
ans, comparé à la population active
de 15 à 65 ans

Lecture du graphique
• En France en 2000: 25 %
• En France en 2050: 47 %

Explications
• Pour 100 personnes actives, on
compte en France et en l'an 2000
de l'ordre de 25 personnes âgées
de plus de 65 ans
• Et en se projetant en 2050, il y en
aura pratiquement 50

En gros
• En 2000, il y a 4 personnes
actives pour 1 retraité et 2 pour 1
en 2050
Financial Times -Thursday August 28, 2003

46
Annexe 2 : Actions en faveur des seniors

La population des seniors va connaître une augmentation importante dans les prochaines
années. Malgré une approche plus autonome du tourisme et des vacances, les personnes
âgées sont fragiles et sujettes à l'isolement et à la rupture avec tout lien social.

C’est pourquoi, à l’occasion du Comité Interministériel sur le Tourisme du 9 septembre


2003, il a été décidé de renforcer l'offre à destination des seniors en développant des
produits touristiques répondant à leurs attentes (thématiques adaptées, accessibilité des
stations, des sites, des moyens de transports…) ainsi qu'à leurs moyens (offres tarifaires
adaptées).

En mettant en œuvre cette politique, les objectifs du ministère délégué au Tourisme sont
doubles : développer et organiser un marché en pleine expansion, et prévenir de la rupture
du lien social.

C’est pourquoi, une opération de grande ampleur initiée par le ministère délégué au
Tourisme et mise en œuvre par l’Union nationale des associations de tourisme (UNAT) a
été engagée. Appelée « vacances-seniors 2005 », cette opération a pour objectif de rompre
l’isolement des personnes âgées en leur permettant de renouer des liens sociaux et de
prolonger la saison touristique des équipements touristiques normalement fermés.

Pour la première phase expérimentale, de janvier à juin 2005, 11 destinations sont


proposées et pour la deuxième phase, de septembre 2005 à décembre 2006, 18 destinations
seront proposées pour 10 000 personnes.

L'Espagne a proposé par ailleurs un échange avec la France sur la base de 5000 séjours par
an, pour les seniors français et espagnols. Les modalités pratiques de cet échange sont en
cours d'étude, et un partenariat effectif devrait aboutir en fin 2006.

Sur le plan de l'accueil, "la charte d'accueil des seniors", destinés aux prestataires
touristiques et en particulier aux hébergeurs, a été soumise à la signature du ministre
délégué au Tourisme et devrait être très prochainement co-signée par nos partenaires, avant
d'être largement diffusée dans les établissements.

Source : www.tourisme.gouv.fr

47
Licences Creative Commons
Quelle est la qualification juridique des documents-type Creative Commons ?

Les documents Creative Commons sont des contrats-type qui permettent à l’auteur de
communiquer au public les conditions d’utilisation de son œuvre.
Ce sont des offres ou pollicitations, l’offre étant définie comme la « manifestation de volonté
(…) par laquelle une personne propose à une ou plusieurs autres (déterminées ou
indéterminées) la conclusion d’un contrat à certaines conditions » (1).
On peut qualifier ces offres de contrats à exécution successive et de concession de droit
d’usage. Elles sont fournies à titre d’information gratuitement par Creative Commons et
n’impliquent aucun transfert des droits de propriété intellectuelle (2). Elles ne peuvent donc
pas être qualifiées de vente ou de cession.
La qualification de prêt à usage ou de commodat adresse les biens qui doivent être restitués,
ce qui n’a guère de sens dans le cas de biens immatériels.
Le louage de chose incorporelle ou licence (location d’un meuble incorporel en droit de la
propriété intellectuelle) est défini à l’article 1709 du Code Civil comme «un contrat par
lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps, et
moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer ». Le prix à payer n’entraîne ici
aucune rémunération, mais les obligations qui pèsent sur l’Acceptant laissent à penser que la
personne qui offre une œuvre sous de telles conditions en retire des avantages.
Le respect de la destination et l’usage de la chose louée en bon père de famille fait partie des
règles communes aux baux des maisons et des biens ruraux.
La qualification de licence, sous-catégorie de contrats, est traditionnellement réservée à la
propriété industrielle (licence de brevet ou de marque) et aux logiciels, et n’est pas employée
en propriété littéraire et artistique. Cependant, ce terme est communément utilisé pour
nommer les Creative Commons licenses, sous l'influence du terme américain et du concept de
"licences libres" : licence GNU GPL, Licence Art Libre...
La nouveauté de ce type d’offre peut enfin amener à la qualification de contrat innommé.

Quelle est la validité des licences Creative Commons au regard du formalisme


français des contrats de droit d’auteur ?

Le formalisme des contrats de cession de droits de propriété littéraire et artistique (CPI L.


131-3) peut s’appliquer aux licences ou autorisations d’utilisation (3). Celles-ci doivent
décrire de manière précise le domaine d'exploitation, soit l’étendue, la destination, le lieu et la
durée des droits concédés.
L’article 3 des licences Creative Commons énumère l’étendue des droits proposés :
« la reproduction de l’œuvre seule ou incorporée dans une œuvre dite collective, comme une
publication périodique, une anthologie ou une encyclopédie », au sens de l’article L. 121.8 du
CPI, voire modifiée en vue de former certaines « œuvres dites dérivées : traductions, les
arrangements musicaux, les adaptations théâtrales, littéraires ou cinématographiques, les
enregistrements sonores, les reproductions par un art ou un procédé quelconque, les résumés,
la distribution d’exemplaires ou d’enregistrements » desdites œuvres, au sens du CPI, article
L. 122-4, seconde phrase.
La durée (toute la durée légale de protection de l’Œuvre, telle qu’elle est définie aux articles
L. 123, L. 132-19, L. 211-4…) et l’étendue (le monde entier) sont également identifiées.

Quant à la destination, elle est clairement repérable dans l’intention de l’auteur de contribuer
à un fonds commun en autorisant certaines utilisations gratuites de son œuvre.
La cession des droits de reproduction et de représentation à titre gratuit est permise à l’article
L. 122-7 du CPI.
On précisera que les sous-licences sont explicitement interdites dans les documents Creative
Commons, être titulaire d’un droit d’usage ne confère pas au bénéficiaire d’une licence
Creative Commons le droit de céder ces droits. Le bénéficiaire ne pourra distribuer l'oeuvre
ou la communiquer au public que sous les mêmes conditions sous lesquelles il l'a reçue.
Le terme « bénéficiaire » et non pas le terme « licencié » a été retenu pour désigner dans la
traduction française la personne qui accepte l’offre. Ce choix marque une volonté de
confirmer cette interdiction et peut ainsi favoriser ainsi le consentement éclairé de l’acceptant.

L’article 3 de la version originale prévoit que « Les droits mentionnés ci-dessus peuvent être
exercés sur tous les supports, médias, procédés techniques et formats, qu’ils soient connus
aujourd’hui ou mis au point dans le futur. »
L’article L. 131-6 accepte « la clause d'une cession qui tend à conférer le droit d'exploiter
l'oeuvre sous une forme non prévisible ou non prévue à la date du contrat. ». Elle « doit être
expresse », ce qui est le cas dans la version originale des licences. Mais étant donné qu’elle
doit également « stipuler une participation corrélative aux profits d'exploitation », la phrase a
été écartée de la version française, à l’instar de la solution retenue par les traducteurs
allemands conformément à l’article 31.4 de la loi allemande sur le droit d’auteur de 1965, plus
stricte, qui interdit l’exploitation sous une forme non prévisible.

Si les cessions peuvent être consenties à titre gratuit, l’article L131-3 du CPI prévoit que les
adaptations audiovisuelles doivent prévoir une rémunération.
Cependant, la jurisprudence (4) a admis la validité d’une cession des droits d’adaptation
audiovisuelle même si aucune rémunération n’était stipulée, la contrepartie étant fournie par
la publicité faite à l’ouvrage, œuvre préexistante. L’intention de l’auteur d’obtenir une
diffusion et une distribution de son oeuvre sous Creative Commons plus large peut être
interprétée comme le souhait d'une plus grande notoriété grâce aux copies et aux diffusions
qu'effectueront les Acceptants, sans exiger une exploitation conforme aux règles spécifiques
d’un contrat d’édition, ni être lié par un contrat d'exclusivité avec un producteur.

L’autorisation d’adaptation audiovisuelle ne doit-elle pas figurer dans un contrat écrit distinct
de celui qui autorise les autres actes ?
D’après l’article L113-4, « l’œuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée,
sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre préexistante ».
L’article L131-4 alinéa 3 stipule que « les cessions portant sur les droits d’adaptation
audiovisuelle doivent faire l’objet d’un contrat écrit sur un document distinct du contrat
relatif à l’édition proprement dite de l’œuvre imprimée ». On peut se demander si le choix de
l’option qui autorise les modifications ne contraindrait pas à recourir à deux contrats Creative
Commons séparées, de manière à respecter cette disposition qui vise à protéger l’auteur en lui
faisant prendre conscience du fait qu’il s’agit de deux actes de cession bien différents.
La réponse est non car les licences Creative Commons ne sont pas assimilables à des contrats
d’édition au sens de l’article L132-1 du CPI : elles ne prévoient pas d’obligation pour le
bénéficiaire correspondant à la charge pour l’éditeur d’assurer la publication et la diffusion
des exemplaires dont la fabrication est autorisée.

Quelle est la validité des offres Creative Commons vis-à-vis du droit général des
obligations ?

L’absence de signature n’est pas le signe d’une absence de consentement ou d’information sur
l’objet et la nature de l’engagement contractuel. Il est en effet obligatoire d’accompagner
toute reproduction ou communication de l’œuvre d’une copie ou d’un lien vers le texte
Creative Commons qui la gouverne. Il est précisé dans l’objet du contrat que l’exercice sur
l’œuvre de tout droit proposé dans ladite offre vaut acceptation tacite de celle-ci, à l’image
des licences d’utilisation de logiciels qui prennent effet à l’ouverture de l’emballage du disque
d’installation. On peut inférer de l’article 1985 du Code Civil relatif au mandat que le
commencement de l’exécution du contrat proposé par le destinataire de l’offre « révèle » son
acceptation (5).
La personne qui propose de contracter, l’auteur au sens de l’article 113 du CPI, garantit dans
l’article 5a qu’elle a bien obtenu tous les droits nécessaires sur l’œuvre pour être en mesure
d’autoriser l’exercice des droits conférés par l’offre. Elle s’engage à ne pas transmettre une
œuvre constitutive de contrefaçon ou d’atteinte à tout autre droit de tiers (autres titulaires de
droits ou sociétés de gestion collective qui auraient pu être mandatées, ou tout autre tiers), et à
permettre une jouissance paisible à ceux qui en accepteront les termes.
Cependant, la version originale 2.0 des textes Creative Commons (notre travail de traduction
et d’adaptation portait jusqu’en mai 2004 sur la version originale 1.0) prévoit que cette clause
de garantie deviendra optionnelle. Une telle exclusion de garantie pourrait être jugée sans
valeur en cas de dommage. La responsabilité délictuelle étant d’ordre public, elle aura
vocation à s’appliquer par défaut, même sans mention explicite : la responsabilité de l’offrant
est alors définie par la législation applicable.
Enfin, proposer des textes en langue française n’est pas seulement plus commode pour les
utilisateurs français, mais répond également à l’impératif d’utiliser la langue française dans le
cadre de relations avec des salariés ou des consommateurs (6) dans un contexte professionnel
privé ou public.

Les contrats Creative Commons sont-ils compatibles avec le droit moral, norme
impérative ?

Droit à la paternité

N’est-il pas obligatoire de choisir l’option Paternité ? (On notera que l’option Paternité
devient obligatoire à partir de la version 2.0.)
On pourrait en effet penser que l’option Non Attribution, qui n’imposait pas d’indiquer la
paternité de l’œuvre, ne pouvait pas être choisie en droit français car le droit à la paternité,
prérogative de droit moral, est inaliénable. La même question est soulevée par l’article 4.a qui
permet à l’Offrant de demander à l’Acceptant de retirer de l’Œuvre dite Collective ou Dérivée
toute référence au dit Offrant.
Effectivement, un contrat qui imposerait à l’auteur de renoncer définitivement à son droit au
nom, en échange d’une contrepartie financière ou non, serait nul. La jurisprudence relative
aux contrats dits de « nègre » où l’auteur réel écrit un ouvrage pour autrui, et s’engage à
renoncer à être identifié comme auteur auprès du public, est stable : l’auteur réel pourra
toujours se faire reconnaître comme auteur (7).
Les documents Creative Commons n’imposent pas une renonciation définitive, mais
permettent une renonciation provisoire et une clarification (8). L’auteur pourra toujours faire
reconnaître sa paternité.
En revanche, ce droit à l’anonymat ne doit pas donner lieu à de fausses attributions de
paternité, notamment dans le cas où l’utilisateur-auteur indiquerait un autre nom que le sien,
ou s’approprierait indûment la paternité d’une œuvre. Le principe général étant la
présomption de titularité au bénéfice de celui sous le nom duquel est divulguée l’œuvre, le
système Creative Commons ne permet pas plus que le cas général d’authentifier la paternité
des œuvres. La paternité indiquée dans une offre Creative Commons reste soumise à la bonne
foi des utilisateurs.

Droit au respect

Autoriser à l’avance les modifications n’équivaut pas à aliéner le droit au respect. Le droit
d’adaptation, traditionnellement cédé à l’avance, n’implique pas d’autoriser les modifications
qui porteraient atteinte à l’intégrité de l’œuvre ou à l’honneur et la réputation de son auteur.
L’auteur qui aurait mis à disposition son œuvre sous une offre Creative Commons autorisant
les modifications et la création d’œuvres dites dérivées, se réserve toujours la possibilité d’un
recours fondé sur droit au respect, en cas d’utilisation ou de dénaturation de son œuvre telle
qu’elles lui porteraient préjudice.

Droit de retrait

Le droit de retrait, lui aussi d’ordre public, pourra toujours être exercé, même si le parcours de
l’œuvre rend son application encore plus difficile sur les réseaux. Celui qui propose l’offre de
mise à disposition se réserve à tout moment le droit de proposer l’œuvre à des conditions
différentes ou d’en cesser la diffusion (article 7.b), dans le respect des offres précédemment
consenties. L’auteur qui met fin au contrat Creative Commons devra respecter la bonne foi (9)
des personnes qui auront dans l’intervalle appliqué le contrat qu’il proposait.

Droit de divulgation
Le titulaire des droits sur l’œuvre conserve le contrôle du moment et des conditions de sa
divulgation et de sa communication au public, non pour s’assurer de la réservation des droits
exclusifs, mais pour rendre l’œuvre libre de certains droits.
Certains pourraient se demander si la condition de Partage à l’Identique des Conditions
Initiales ou ShareAlike ne constitue pas une atteinte au droit de divulgation de la personne
qui, ayant accepté une œuvre sous de telles conditions contractuelles, la modifie en apportant
une contribution originale, et acquiert elle-même le statut d’auteur de la nouvelle œuvre dite
dérivée.
Le nouvel auteur conserve ses prérogatives et décide du moment de la divulgation de la
nouvelle œuvre. Il ne lui est pas interdit de la divulguer sous des conditions différentes, mais
c’est à la condition d’obtenir une autorisation écrite de la part de l’auteur de l’œuvre
préexistante, comme dans le système juridique classique, hors Creative Commons.

Le contrôle de l’utilisation après divulgation en vertu des options Partage des Conditions
Initiales à l’Identique (Share Alike) et Pas d’Utilisation Commerciale (Non Commercial)
n’est-il pas incompatible avec le principe d’épuisement des droits ?

L’épuisement du droit de distribution prévu en droit communautaire établit qu’une fois


l’original de l’œuvre ou sa copie mise en circulation sur le territoire communautaire avec le
consentement du titulaire de ce droit, par exemple après la première vente, il ne peut plus
exercer ledit droit. Le titulaire ne peut donc exercer ce droit de propriété intellectuelle qu’une
seule fois, il ne peut pas l’exercer à nouveau dans un autre Etat-membre. L’épuisement ne
concerne que la distribution physique d’exemplaires matériels, de supports, à l’exclusion des
services en ligne et des copies licites en découlant (Directive 2001/29/CE sur l’harmonisation
de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information,
article 4.2 et considérant 29). Le titulaire conserve ses autres droits patrimoniaux.
L’article 2 des contrats Creative Commons stipule bien qu’ils s’appliquent sans préjudice du
droit applicable, et ne visent donc en aucun cas à restreindre ce type de prérogatives. On peut
toutefois se demander si le fait de restreindre les conditions d’utilisation après la première
mise à disposition respecte l’épuisement.
Tout d’abord, les options Partage des Conditions Initiales à l’Identique (Share Alike) et Pas
d’Utilisation Commerciale (Non Commercial) ne conduisent pas à interdire formellement
toute modification qui ne serait pas proposée aux mêmes conditions ou toute utilisation
commerciale, ce qui reviendrait à imposer des conditions de distribution. Elles se contentent
simplement de réserver les droits non proposés, qui continuent à requérir l’autorisation du
titulaire des droits, à l’instar du droit d’auteur classique.
Enfin, on peut rappeler que la notion d’épuisement est utilisée en droit communautaire à des
fins de régulation économique. Elle est utile dans les situations où un ayant-droit abuse de son
monopole pour affecter le commerce et la concurrence en interdisant la commercialisation ou
en imposant des restrictions quantitatives à l’importation ou des mesures d’effet équivalent.
Les objectifs du Traité de Rome sont de lutter contre le cloisonnement du marché intérieur et
les abus de position dominante. Sont visées d’un côté les entraves à la libre circulation des
marchandises constitutives d’obstacles à la commercialisation sur le territoire national de
produits régulièrement mis en circulation sur le territoire d’un autre Etat membre, et de l’autre
la faculté de contrôler les actes ultérieurs de commercialisation et d’interdire les
réimportations. Certaines restrictions ont d’ailleurs été admises par la Cour de Justice des
Communautés Européennes ; ainsi, l’arrêt Cinéthèque (10) valide comme conforme au droit
communautaire la loi française sur la chronologie des médias (11) qui impose un délai entre
l’exploitation des films en salle et la vente ou la location de supports.
Quelle sera la loi applicable en cas de conflit ?

Il n’y a pas de clause déterminant la loi applicable et la juridiction compétente dans les
contrats Creative Commons. Les règles de droit international privé prévalent, et, pour choisir
la loi applicable, le juge saisi déterminera le lieu d’exécution de la prestation caractéristique
du contrat, ou le lieu du dommage ou du dépôt de la plainte.
Les contrats Creative Commons prévoient à l’article 8c que si un article s’avère invalide ou
inapplicable au regard de la loi en vigueur, cela n’entraîne pas l’inapplicabilité ou la nullité
des autres dispositions, l’article en question devant être interprété de manière à le rendre
valide et applicable.
Les clauses abusives sont réputées non écrites si le contrat conduit à établir des rapports
déséquilibrés entre les droits et obligations entre un professionnel et un consommateur (12).
Un raisonnement a fortiori permet de déduire que les offres Creative Commons satisfont ces
exigences, ainsi que les exigences de prudence et d’information.
Un auteur peut se retourner contre la personne qui utilise son œuvre sans respecter les
conditions qui lui sont attachées. L’auteur qui estimerait qu’il y a eu atteinte à ses
prérogatives patrimoniales pourrait toujours demander au juge une révision du contrat.
Le bénéficiaire du contrat pourrait également se retourner contre le donneur de contrat qui a
transmis une œuvre contrefaisante.

Notes

1. Dir. Gérard Cornu, Vocabulaire Juridique Association Henri Capitant, PUF Quadrige 4ème
éd. 2003.

2. Voir Christophe Caron, Les licences de logiciels dites « libres » à l’épreuve du droit
d’auteur français, Dalloz 2003, n° 23, p. 1556 et Melanie Clément-Fontaine, La licence GPL,
mémoire de DEA, Université de Montpellier, 1999. http://crao.net/gpl/
Contra en faveur de la qualification de cession, Cyril Rojinsky et Vincent Grynbaum, Les
licences libres et le droit français, Propriétés Intellectuelles, juillet 2002/4, p. 28.

3. Cass.1ère civ. 23/01/2001, Communication Commerce Electronique avril 2001 & A. et H.-
J. Lucas, Traité de la Propriété Littéraire et Artistique, Litec, 2ème éd. 2001, n° 482.

4. CA Paris, 1re ch. B, 21-09-1990 : Jurisdata n. 023403, in Lucas, Traité de la Propriété


Littéraire et Artistique, note 280.

5. Dir. Michel Vivant, Lamy Droit de l’Informatique et des réseaux, par. 875.

6. Loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française dite loi Toubon.

7. Cour de cassation, Civ.1, 4 avril 1991, affaire Béart, Revue Internationale du Droit
d'Auteur, octobre 1991, p. 125 (cassation de l’arrêt d’appel ayant admis que l’auteur de
thèmes musicaux renonce, par contrat, à être identifié comme tel auprès du public).

8. Hubert Guillaud, http://lists.ibiblio.org/pipermail/cc-fr/2004-January/000039.html


9. Comportement loyal que requiert notamment l’exécution d’une obligation (Vocabulaire
Capitant, op cit)

10. Arrêt de la CJCE du 11 juillet 1985, Cinéthèque SA et autres contre Fédération nationale
des cinémas français, Aff. jointes 60/84 et 61/84, Rec. 1985 p. 2605.

11. Loi n°82-652 du 29/07/1982 sur la communication audiovisuelle, JORF du 20/07/1982, p.


2431, article 89.

12. L132-1 Code de la Consommation


Licences Creative Commons
Quelle est la qualification juridique des documents-type Creative Commons ?

Les documents Creative Commons sont des contrats-type qui permettent à l’auteur de
communiquer au public les conditions d’utilisation de son œuvre.
Ce sont des offres ou pollicitations, l’offre étant définie comme la « manifestation de volonté
(…) par laquelle une personne propose à une ou plusieurs autres (déterminées ou
indéterminées) la conclusion d’un contrat à certaines conditions » (1).
On peut qualifier ces offres de contrats à exécution successive et de concession de droit
d’usage. Elles sont fournies à titre d’information gratuitement par Creative Commons et
n’impliquent aucun transfert des droits de propriété intellectuelle (2). Elles ne peuvent donc
pas être qualifiées de vente ou de cession.
La qualification de prêt à usage ou de commodat adresse les biens qui doivent être restitués,
ce qui n’a guère de sens dans le cas de biens immatériels.
Le louage de chose incorporelle ou licence (location d’un meuble incorporel en droit de la
propriété intellectuelle) est défini à l’article 1709 du Code Civil comme «un contrat par
lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre d'une chose pendant un certain temps, et
moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige de lui payer ». Le prix à payer n’entraîne ici
aucune rémunération, mais les obligations qui pèsent sur l’Acceptant laissent à penser que la
personne qui offre une œuvre sous de telles conditions en retire des avantages.
Le respect de la destination et l’usage de la chose louée en bon père de famille fait partie des
règles communes aux baux des maisons et des biens ruraux.
La qualification de licence, sous-catégorie de contrats, est traditionnellement réservée à la
propriété industrielle (licence de brevet ou de marque) et aux logiciels, et n’est pas employée
en propriété littéraire et artistique. Cependant, ce terme est communément utilisé pour
nommer les Creative Commons licenses, sous l'influence du terme américain et du concept de
"licences libres" : licence GNU GPL, Licence Art Libre...
La nouveauté de ce type d’offre peut enfin amener à la qualification de contrat innommé.

Quelle est la validité des licences Creative Commons au regard du formalisme


français des contrats de droit d’auteur ?

Le formalisme des contrats de cession de droits de propriété littéraire et artistique (CPI L.


131-3) peut s’appliquer aux licences ou autorisations d’utilisation (3). Celles-ci doivent
décrire de manière précise le domaine d'exploitation, soit l’étendue, la destination, le lieu et la
durée des droits concédés.
L’article 3 des licences Creative Commons énumère l’étendue des droits proposés :
« la reproduction de l’œuvre seule ou incorporée dans une œuvre dite collective, comme une
publication périodique, une anthologie ou une encyclopédie », au sens de l’article L. 121.8 du
CPI, voire modifiée en vue de former certaines « œuvres dites dérivées : traductions, les
arrangements musicaux, les adaptations théâtrales, littéraires ou cinématographiques, les
enregistrements sonores, les reproductions par un art ou un procédé quelconque, les résumés,
la distribution d’exemplaires ou d’enregistrements » desdites œuvres, au sens du CPI, article
L. 122-4, seconde phrase.
La durée (toute la durée légale de protection de l’Œuvre, telle qu’elle est définie aux articles
L. 123, L. 132-19, L. 211-4…) et l’étendue (le monde entier) sont également identifiées.

Quant à la destination, elle est clairement repérable dans l’intention de l’auteur de contribuer
à un fonds commun en autorisant certaines utilisations gratuites de son œuvre.
La cession des droits de reproduction et de représentation à titre gratuit est permise à l’article
L. 122-7 du CPI.
On précisera que les sous-licences sont explicitement interdites dans les documents Creative
Commons, être titulaire d’un droit d’usage ne confère pas au bénéficiaire d’une licence
Creative Commons le droit de céder ces droits. Le bénéficiaire ne pourra distribuer l'oeuvre
ou la communiquer au public que sous les mêmes conditions sous lesquelles il l'a reçue.
Le terme « bénéficiaire » et non pas le terme « licencié » a été retenu pour désigner dans la
traduction française la personne qui accepte l’offre. Ce choix marque une volonté de
confirmer cette interdiction et peut ainsi favoriser ainsi le consentement éclairé de l’acceptant.

L’article 3 de la version originale prévoit que « Les droits mentionnés ci-dessus peuvent être
exercés sur tous les supports, médias, procédés techniques et formats, qu’ils soient connus
aujourd’hui ou mis au point dans le futur. »
L’article L. 131-6 accepte « la clause d'une cession qui tend à conférer le droit d'exploiter
l'oeuvre sous une forme non prévisible ou non prévue à la date du contrat. ». Elle « doit être
expresse », ce qui est le cas dans la version originale des licences. Mais étant donné qu’elle
doit également « stipuler une participation corrélative aux profits d'exploitation », la phrase a
été écartée de la version française, à l’instar de la solution retenue par les traducteurs
allemands conformément à l’article 31.4 de la loi allemande sur le droit d’auteur de 1965, plus
stricte, qui interdit l’exploitation sous une forme non prévisible.

Si les cessions peuvent être consenties à titre gratuit, l’article L131-3 du CPI prévoit que les
adaptations audiovisuelles doivent prévoir une rémunération.
Cependant, la jurisprudence (4) a admis la validité d’une cession des droits d’adaptation
audiovisuelle même si aucune rémunération n’était stipulée, la contrepartie étant fournie par
la publicité faite à l’ouvrage, œuvre préexistante. L’intention de l’auteur d’obtenir une
diffusion et une distribution de son oeuvre sous Creative Commons plus large peut être
interprétée comme le souhait d'une plus grande notoriété grâce aux copies et aux diffusions
qu'effectueront les Acceptants, sans exiger une exploitation conforme aux règles spécifiques
d’un contrat d’édition, ni être lié par un contrat d'exclusivité avec un producteur.

L’autorisation d’adaptation audiovisuelle ne doit-elle pas figurer dans un contrat écrit distinct
de celui qui autorise les autres actes ?
D’après l’article L113-4, « l’œuvre composite est la propriété de l’auteur qui l’a réalisée,
sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre préexistante ».
L’article L131-4 alinéa 3 stipule que « les cessions portant sur les droits d’adaptation
audiovisuelle doivent faire l’objet d’un contrat écrit sur un document distinct du contrat
relatif à l’édition proprement dite de l’œuvre imprimée ». On peut se demander si le choix de
l’option qui autorise les modifications ne contraindrait pas à recourir à deux contrats Creative
Commons séparées, de manière à respecter cette disposition qui vise à protéger l’auteur en lui
faisant prendre conscience du fait qu’il s’agit de deux actes de cession bien différents.
La réponse est non car les licences Creative Commons ne sont pas assimilables à des contrats
d’édition au sens de l’article L132-1 du CPI : elles ne prévoient pas d’obligation pour le
bénéficiaire correspondant à la charge pour l’éditeur d’assurer la publication et la diffusion
des exemplaires dont la fabrication est autorisée.

Quelle est la validité des offres Creative Commons vis-à-vis du droit général des
obligations ?

L’absence de signature n’est pas le signe d’une absence de consentement ou d’information sur
l’objet et la nature de l’engagement contractuel. Il est en effet obligatoire d’accompagner
toute reproduction ou communication de l’œuvre d’une copie ou d’un lien vers le texte
Creative Commons qui la gouverne. Il est précisé dans l’objet du contrat que l’exercice sur
l’œuvre de tout droit proposé dans ladite offre vaut acceptation tacite de celle-ci, à l’image
des licences d’utilisation de logiciels qui prennent effet à l’ouverture de l’emballage du disque
d’installation. On peut inférer de l’article 1985 du Code Civil relatif au mandat que le
commencement de l’exécution du contrat proposé par le destinataire de l’offre « révèle » son
acceptation (5).
La personne qui propose de contracter, l’auteur au sens de l’article 113 du CPI, garantit dans
l’article 5a qu’elle a bien obtenu tous les droits nécessaires sur l’œuvre pour être en mesure
d’autoriser l’exercice des droits conférés par l’offre. Elle s’engage à ne pas transmettre une
œuvre constitutive de contrefaçon ou d’atteinte à tout autre droit de tiers (autres titulaires de
droits ou sociétés de gestion collective qui auraient pu être mandatées, ou tout autre tiers), et à
permettre une jouissance paisible à ceux qui en accepteront les termes.
Cependant, la version originale 2.0 des textes Creative Commons (notre travail de traduction
et d’adaptation portait jusqu’en mai 2004 sur la version originale 1.0) prévoit que cette clause
de garantie deviendra optionnelle. Une telle exclusion de garantie pourrait être jugée sans
valeur en cas de dommage. La responsabilité délictuelle étant d’ordre public, elle aura
vocation à s’appliquer par défaut, même sans mention explicite : la responsabilité de l’offrant
est alors définie par la législation applicable.
Enfin, proposer des textes en langue française n’est pas seulement plus commode pour les
utilisateurs français, mais répond également à l’impératif d’utiliser la langue française dans le
cadre de relations avec des salariés ou des consommateurs (6) dans un contexte professionnel
privé ou public.

Les contrats Creative Commons sont-ils compatibles avec le droit moral, norme
impérative ?

Droit à la paternité

N’est-il pas obligatoire de choisir l’option Paternité ? (On notera que l’option Paternité
devient obligatoire à partir de la version 2.0.)
On pourrait en effet penser que l’option Non Attribution, qui n’imposait pas d’indiquer la
paternité de l’œuvre, ne pouvait pas être choisie en droit français car le droit à la paternité,
prérogative de droit moral, est inaliénable. La même question est soulevée par l’article 4.a qui
permet à l’Offrant de demander à l’Acceptant de retirer de l’Œuvre dite Collective ou Dérivée
toute référence au dit Offrant.
Effectivement, un contrat qui imposerait à l’auteur de renoncer définitivement à son droit au
nom, en échange d’une contrepartie financière ou non, serait nul. La jurisprudence relative
aux contrats dits de « nègre » où l’auteur réel écrit un ouvrage pour autrui, et s’engage à
renoncer à être identifié comme auteur auprès du public, est stable : l’auteur réel pourra
toujours se faire reconnaître comme auteur (7).
Les documents Creative Commons n’imposent pas une renonciation définitive, mais
permettent une renonciation provisoire et une clarification (8). L’auteur pourra toujours faire
reconnaître sa paternité.
En revanche, ce droit à l’anonymat ne doit pas donner lieu à de fausses attributions de
paternité, notamment dans le cas où l’utilisateur-auteur indiquerait un autre nom que le sien,
ou s’approprierait indûment la paternité d’une œuvre. Le principe général étant la
présomption de titularité au bénéfice de celui sous le nom duquel est divulguée l’œuvre, le
système Creative Commons ne permet pas plus que le cas général d’authentifier la paternité
des œuvres. La paternité indiquée dans une offre Creative Commons reste soumise à la bonne
foi des utilisateurs.

Droit au respect

Autoriser à l’avance les modifications n’équivaut pas à aliéner le droit au respect. Le droit
d’adaptation, traditionnellement cédé à l’avance, n’implique pas d’autoriser les modifications
qui porteraient atteinte à l’intégrité de l’œuvre ou à l’honneur et la réputation de son auteur.
L’auteur qui aurait mis à disposition son œuvre sous une offre Creative Commons autorisant
les modifications et la création d’œuvres dites dérivées, se réserve toujours la possibilité d’un
recours fondé sur droit au respect, en cas d’utilisation ou de dénaturation de son œuvre telle
qu’elles lui porteraient préjudice.

Droit de retrait

Le droit de retrait, lui aussi d’ordre public, pourra toujours être exercé, même si le parcours de
l’œuvre rend son application encore plus difficile sur les réseaux. Celui qui propose l’offre de
mise à disposition se réserve à tout moment le droit de proposer l’œuvre à des conditions
différentes ou d’en cesser la diffusion (article 7.b), dans le respect des offres précédemment
consenties. L’auteur qui met fin au contrat Creative Commons devra respecter la bonne foi (9)
des personnes qui auront dans l’intervalle appliqué le contrat qu’il proposait.

Droit de divulgation
Le titulaire des droits sur l’œuvre conserve le contrôle du moment et des conditions de sa
divulgation et de sa communication au public, non pour s’assurer de la réservation des droits
exclusifs, mais pour rendre l’œuvre libre de certains droits.
Certains pourraient se demander si la condition de Partage à l’Identique des Conditions
Initiales ou ShareAlike ne constitue pas une atteinte au droit de divulgation de la personne
qui, ayant accepté une œuvre sous de telles conditions contractuelles, la modifie en apportant
une contribution originale, et acquiert elle-même le statut d’auteur de la nouvelle œuvre dite
dérivée.
Le nouvel auteur conserve ses prérogatives et décide du moment de la divulgation de la
nouvelle œuvre. Il ne lui est pas interdit de la divulguer sous des conditions différentes, mais
c’est à la condition d’obtenir une autorisation écrite de la part de l’auteur de l’œuvre
préexistante, comme dans le système juridique classique, hors Creative Commons.

Le contrôle de l’utilisation après divulgation en vertu des options Partage des Conditions
Initiales à l’Identique (Share Alike) et Pas d’Utilisation Commerciale (Non Commercial)
n’est-il pas incompatible avec le principe d’épuisement des droits ?

L’épuisement du droit de distribution prévu en droit communautaire établit qu’une fois


l’original de l’œuvre ou sa copie mise en circulation sur le territoire communautaire avec le
consentement du titulaire de ce droit, par exemple après la première vente, il ne peut plus
exercer ledit droit. Le titulaire ne peut donc exercer ce droit de propriété intellectuelle qu’une
seule fois, il ne peut pas l’exercer à nouveau dans un autre Etat-membre. L’épuisement ne
concerne que la distribution physique d’exemplaires matériels, de supports, à l’exclusion des
services en ligne et des copies licites en découlant (Directive 2001/29/CE sur l’harmonisation
de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information,
article 4.2 et considérant 29). Le titulaire conserve ses autres droits patrimoniaux.
L’article 2 des contrats Creative Commons stipule bien qu’ils s’appliquent sans préjudice du
droit applicable, et ne visent donc en aucun cas à restreindre ce type de prérogatives. On peut
toutefois se demander si le fait de restreindre les conditions d’utilisation après la première
mise à disposition respecte l’épuisement.
Tout d’abord, les options Partage des Conditions Initiales à l’Identique (Share Alike) et Pas
d’Utilisation Commerciale (Non Commercial) ne conduisent pas à interdire formellement
toute modification qui ne serait pas proposée aux mêmes conditions ou toute utilisation
commerciale, ce qui reviendrait à imposer des conditions de distribution. Elles se contentent
simplement de réserver les droits non proposés, qui continuent à requérir l’autorisation du
titulaire des droits, à l’instar du droit d’auteur classique.
Enfin, on peut rappeler que la notion d’épuisement est utilisée en droit communautaire à des
fins de régulation économique. Elle est utile dans les situations où un ayant-droit abuse de son
monopole pour affecter le commerce et la concurrence en interdisant la commercialisation ou
en imposant des restrictions quantitatives à l’importation ou des mesures d’effet équivalent.
Les objectifs du Traité de Rome sont de lutter contre le cloisonnement du marché intérieur et
les abus de position dominante. Sont visées d’un côté les entraves à la libre circulation des
marchandises constitutives d’obstacles à la commercialisation sur le territoire national de
produits régulièrement mis en circulation sur le territoire d’un autre Etat membre, et de l’autre
la faculté de contrôler les actes ultérieurs de commercialisation et d’interdire les
réimportations. Certaines restrictions ont d’ailleurs été admises par la Cour de Justice des
Communautés Européennes ; ainsi, l’arrêt Cinéthèque (10) valide comme conforme au droit
communautaire la loi française sur la chronologie des médias (11) qui impose un délai entre
l’exploitation des films en salle et la vente ou la location de supports.
Quelle sera la loi applicable en cas de conflit ?

Il n’y a pas de clause déterminant la loi applicable et la juridiction compétente dans les
contrats Creative Commons. Les règles de droit international privé prévalent, et, pour choisir
la loi applicable, le juge saisi déterminera le lieu d’exécution de la prestation caractéristique
du contrat, ou le lieu du dommage ou du dépôt de la plainte.
Les contrats Creative Commons prévoient à l’article 8c que si un article s’avère invalide ou
inapplicable au regard de la loi en vigueur, cela n’entraîne pas l’inapplicabilité ou la nullité
des autres dispositions, l’article en question devant être interprété de manière à le rendre
valide et applicable.
Les clauses abusives sont réputées non écrites si le contrat conduit à établir des rapports
déséquilibrés entre les droits et obligations entre un professionnel et un consommateur (12).
Un raisonnement a fortiori permet de déduire que les offres Creative Commons satisfont ces
exigences, ainsi que les exigences de prudence et d’information.
Un auteur peut se retourner contre la personne qui utilise son œuvre sans respecter les
conditions qui lui sont attachées. L’auteur qui estimerait qu’il y a eu atteinte à ses
prérogatives patrimoniales pourrait toujours demander au juge une révision du contrat.
Le bénéficiaire du contrat pourrait également se retourner contre le donneur de contrat qui a
transmis une œuvre contrefaisante.

Notes

1. Dir. Gérard Cornu, Vocabulaire Juridique Association Henri Capitant, PUF Quadrige 4ème
éd. 2003.

2. Voir Christophe Caron, Les licences de logiciels dites « libres » à l’épreuve du droit
d’auteur français, Dalloz 2003, n° 23, p. 1556 et Melanie Clément-Fontaine, La licence GPL,
mémoire de DEA, Université de Montpellier, 1999. http://crao.net/gpl/
Contra en faveur de la qualification de cession, Cyril Rojinsky et Vincent Grynbaum, Les
licences libres et le droit français, Propriétés Intellectuelles, juillet 2002/4, p. 28.

3. Cass.1ère civ. 23/01/2001, Communication Commerce Electronique avril 2001 & A. et H.-
J. Lucas, Traité de la Propriété Littéraire et Artistique, Litec, 2ème éd. 2001, n° 482.

4. CA Paris, 1re ch. B, 21-09-1990 : Jurisdata n. 023403, in Lucas, Traité de la Propriété


Littéraire et Artistique, note 280.

5. Dir. Michel Vivant, Lamy Droit de l’Informatique et des réseaux, par. 875.

6. Loi n° 94-665 du 4 août 1994 relative à l'emploi de la langue française dite loi Toubon.

7. Cour de cassation, Civ.1, 4 avril 1991, affaire Béart, Revue Internationale du Droit
d'Auteur, octobre 1991, p. 125 (cassation de l’arrêt d’appel ayant admis que l’auteur de
thèmes musicaux renonce, par contrat, à être identifié comme tel auprès du public).

8. Hubert Guillaud, http://lists.ibiblio.org/pipermail/cc-fr/2004-January/000039.html


9. Comportement loyal que requiert notamment l’exécution d’une obligation (Vocabulaire
Capitant, op cit)

10. Arrêt de la CJCE du 11 juillet 1985, Cinéthèque SA et autres contre Fédération nationale
des cinémas français, Aff. jointes 60/84 et 61/84, Rec. 1985 p. 2605.

11. Loi n°82-652 du 29/07/1982 sur la communication audiovisuelle, JORF du 20/07/1982, p.


2431, article 89.

12. L132-1 Code de la Consommation

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