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Notions du référentiel : salaire, coût du travail,

Chapitre : Travail et emploi ,marché du travail , chômage

Fiche 6– La baisse du coût du travail peut-elle


permettre de réduire le chômage ?

Introduction : La distinction salaire-coût du travail

• Les termes salaire-coût du travail ont des définitions différentes :


- Le salaire est la rémunération reçue par le salarié
- Le coût du travail représente les différentes dépenses engagées par l’entreprise pour le travailleur
o Salaire net : la rémunération reçue par le salarié
o Charges sociales de l’entreprise qui se décomposent en 2 : cotisations sociales à la charge des salariés, cotisations
sociales à la charge des patrons

• Ces termes ne sont pas obligatoirement synonymes :


- Dans le cas d’un marché de concurrence pure et parfaite, comme il n’ a pas d’intervention de l’Etat , les 2 termes sont
équivalents
- Pour la plupart des PDEM, notamment la France, où existe une Sécurité Sociale, le coût de travail est différent du salaire

• Ainsi baisse du coût du travail et baisse du salaire peuvent refléter 2 réalités différentes :
- Le salaire peut diminuer sans que le coût du travail baisse, si les cotisations sociales augmentent
- Le coût du travail peut diminuer sans que le salaire diminue, si les cotisations sociales diminuent

Une vidéo d’écodico de BNP Paribas sur la définition du coût du travail : ici

I. La baisse du coût du travail ne permet pas de lutter contre le chômage

A. Les raisons macro-économiques

1. Constat : la courbe de Phillips

Historique de la théorie : Phillips établit en 1958 une relation de corrélation entre le taux de chômage
et le taux de croissance des salaires nominaux au Royaume-Uni durant toute la première moitié du 20°
siècle. La démarche de Phillips est donc de nature empirique; il se contente de constater une
relation inverse entre les 2 variables sans pour autant être capable de l’expliciter et de dire
quelle est la variable déterminante.
Phillips montre donc que la baisse des salaires augmente le chômage

2. Les explications

Explication de l’intérêt des keynésiens pour la courbe de Phillips : Les keynésiens vont se charger
de l’interprétation théorique de la courbe .En effet :
• cette courbe leur permet de compléter une des lacunes de la théorie keynésienne. Keynes a
développé la théorie générale dans un contexte de sous-emploi massif et a explicité que les
entreprises s’adaptent à ce contexte, non pas par la flexibilité des prix et des salaires mais par la
flexibilité à la baisse de la production et de la demande de travail.
• Mais dans les années 50 et 60, le contexte est tout à fait différent : on observe une période de
croissance de la production et des prix ; sur ce plan, la théorie keynésienne semble être prise en
défaut. La théorie de Phillips va permettre de combler les lacunes existantes en montrant qu’il
existe une relation entre l’évolution des salaires nominaux
(et donc l’ évolution des prix ) et la situation du marché du travail .

On passe ainsi d’une démarche de nature empirique à une démarche théorique visant à mettre
en évidence une relation de causalité .
Présentation de la théorie développée par Samuelson : Les keynésiens, en particulier Samuelson,
ont alors montré que, en fonction de la situation régnant sur le marché du travail, le salaire nominal va
évoluer et va déterminer le niveau des prix. Ainsi :

• si l’économie croit à un rythme élevé, que l’on se trouve à une situation de plein emploi (la demande
de travail devient supérieure à l’offre de travail),
• alors les entreprises vont, afin d’attirer la main-d’œuvre correspondant à leurs besoins, augmenter
les salaires nominaux (cela d’autant plus que les syndicats feront pression à la hausse des salaires)
• cette hausse des salaires ses traduit par une augmentation de la demande effective (cf fiche 4 :
analyse keynésienne du marché du travail)
• Les entreprises s’efforceront de répercuter l’augmentation des salaires dans leurs prix
• On constate donc bien que la réduction du taux de chômage se traduit par de l’inflation

Conséquences de la théorie : le dilemme inflation-chômage : Samuelson va, à partir de cela, essayer


d’en déduire des mesures de politique économique. Il considère qu’il existe un dilemme entre l’inflation et
le chômage. La société est donc « mise en demeure de choisir entre :
• un niveau d’emploi raisonnablement élevé associé à une croissance maximale et à une hausse
modérée mais continue des prix d’une part ,
• et d’autre part une stabilité raisonnable des prix mais associée à un degré de chômage élevé » .

Conclusion : La politique économique doit donc choisir entre 2 objectifs contradictoires : soit l’expansion
dans la stabilité des prix obtenue par un chômage important, soit la réduction du chômage au prix d’une
inflation élevée .

B. Les raisons micro-économiques : la théorie du salaire d’efficience ( 15 p 122 )

Cette théorie :
• s’oppose à celle de Keynes, en insistant sur la rationalité des entreprises, ce qui relève d’une
analyse typiquement néo-classique. J.Généreux écrit ainsi : « Si toutes les entreprises baissent le
salaire en même temps et que ce mouvement général soit reconnu par les salariés » alors
l’entreprise peut baisser le salaire, sans avoir à craindre, en contrepartie une réduction de l’effort de
ses salariés. Les effets négatifs de la baisse du salaire sur la demande ne sont pas envisagés
• En revanche, la théorie du salaire d’efficience reprend de Keynes l’idée que « le chômage est
largement involontaire, qu’il est engendré par le fonctionnement même de l’économie de marché » (
D.Clerc) . Dans ce cadre d’analyse, les chômeurs, même en acceptant de travailler à des salaires
plus bas n’accroissent pas leur probabilité d’être embauchés ; ils demeurent au chômage , alors
qu’ils font tout pour obtenir un emploi

Rappel de l’analyse néo-classique : Dans la théorie traditionnelle, le salaire est fonction de la


productivité. On considère, en effet, que l’entreprise n’embauchera, que si le coût qu’elle supporte (taux de
salaire réel) est inférieur ou égal au revenu qui lui est apporté par le salarié ( la productivité marginale ) .

Apports de la théorie du salaire d’efficience: Les théoriciens du salaire d’efficience vont prendre le
contre-pied de cette analyse en démontrant (en partant , en particulier de l’étude du marché du travail
dans les PVD ) que ce n’est pas le salaire qui est fonction de la productivité , mais la productivité qui est
déterminée par le salaire : le salarié sera d’autant plus efficace qu’il est bien rémunéré.

Les raisons :
- Comme l’information est imparfaite, l’entreprise ne connaît pas la productivité du salarié et donc :
o Le salarié a intérêt à proposer un salaire de réservation élevé signe de ses qualités et
compétences
o Si l’entreprise propose un salaire élevé, elle peut sélectionner les meilleurs candidats

Pour en savoir plus, cliquez : ici


- Le versement de salaire supérieur à celui du marché présente un autre avantage :
il permet de conserver une main-d’œuvre qualifiée (dont la qualification a été obtenue
dans le cadre de l’entreprise) qui est donc productive .
Un haut niveau de rémunération relatif ( qui permet à l’entreprise d’attirer et de
conserver une main-d’œuvre à fort capital humain ) est donc plus que compensé par les coûts de
mobilité de la main-d’œuvre supportés par l’entreprise en cas de départ de ses salariés les plus
productifs .

Pour étudier l’analyse de G.Becker qui montre l’intérêt d’accroître sa qualification (théorie du capital humain), cliquez ici
Un dossier de l’ENS sur le capital humain : ici

Pour la théorie du filtre et du signalement qui montre ausii l’intérêt de la formation sur l’emploi, cliquez ici

Sur le blog de P.Askenazy, , un article montrant que le coût du travail n’est pas élevé en France : ici

II. Selon les libéraux , la baisse du coût du travail peut permettre de lutter contre le
chômage

A. La critique de la courbe de Phillips par M.Friedman

le contexte : On doit distinguer deux phases :


• cette courbe de Phillips a très bien fonctionné jusqu’à la fin des années 60
• Par contre, on se rend compte qu’à partir des années 70, le dilemme inflation-chômage ne semble
plus d’actualité, puisque l’inflation et le chômage augmentent simultanément : on parle alors de
stagflation .

Explications de l’échec de la courbe de Phillips selon Friedman :la théorie du taux de chômage
naturel Milton Friedman , théoricien monétariste , a proposé une explication qui permet de rejeter le
modèle keynésien de la courbe de Phillips et donc d’expliquer la stagflation . Friedman considère qu’il
existe un taux de chômage naturel, c’est-à-dire un taux de chômage de plein emploi en fonction des
caractéristiques régnant sur le marché du travail, en particulier en fonction des éléments accroissant sa
rigidité (salaire minimum, action des syndicats, allocation chômage ...). Le taux de chômage naturel est
donc, selon Friedman, un taux de chômage d’équilibre (attention il n’est pas nul) qui ne pourrait être
diminué que si le fonctionnement du marché du travail se rapprochait du modèle de cpp .

Conséquences de la théorie : Friedman explique alors que si l’on veut réduire le taux de chômage
observable sur le marché en l’amenant en deçà du taux de chômage naturel, on ne peut l’obtenir :

- qu’au moyen d’une augmentation des prix, et que cette amélioration sur le marché du travail ne
sera que transitoire,A court terme , il peut en être autrement
• les ménages étant trompés par la politique monétaire expansionniste du gouvernement, n’ont
donc pas anticipé l’augmentation de l’inflation, vont accroître leur demande de biens, car ils se
croient plus riches suite à l’augmentation des salaires nominaux,
• ce qui va inciter les entreprises à produire plus et à embaucher.
• Le chômage diminue donc grâce à l’augmentation des prix, mais cela n’est que provisoire.
• En effet , à terme les ménages se rendent compte que l’augmentation des prix a compensé
l’augmentation des salaires nominaux ( pouvoir d’achat constant ) , ils vont donc réduire leur
demande afin de la ramener au niveau de départ , la production va chuter et le chômage revenir
à son niveau d’équilibre : le taux de chômage naturel .

- Ainsi à plus long terme, on reviendra toujours au taux de chômage naturel.


• En effet, conformément à la gestion keynésienne de la courbe de Phillips, pour réduire le
chômage il faut augmenter les salaires et accepter un peu plus d’inflation
• Les ménages voyant leur pouvoir d’achat stagner ne devraient pas accroître leur demande
• et dès lors, conformément à la théorie quantitative de la monnaie, la sphère monétaire n’a pas
d’impact sur la sphère réelle (on parle de dichotomie des sphères réelles et monétaires),
• donc l’augmentation des prix ne devrait pas entraîner de réduction du chômage dans le long
terme

Conclusion : La politique keynésienne n’a donc pas eu d’effet sur la situation du marché du travail : elle
s’est seulement traduite par plus d’inflation ( qui peut d’ailleurs réduire la compétitivité des entreprises du
pays et donc générer des effets pervers ) .

B. Les solutions proposées par les libéraux

Les mesures à mettre en œuvre : Friedman considère alors qu’il faut rechercher un taux de chômage
qui est compatible :
• avec un niveau stable des prix ( NAIRU : Non Accelerating Inflation Rate of
Unemployment)
• ou avec une croissance du salaire réel égale à celle de la productivité ( NAWRU : Non
Accelerating Wage Rate of Unemployment )
• et qu’il faut appliquer des politiques structurelles permettant de réduire les rigidités sur
le marché du travail qui sont seules capables de réduire le taux de chômage naturel : il
faut revenir à un marché du travail en concurrence pure et parfaite ( cf : fiche 7 : analyse
libérale )
La politique économique qui va découler des préceptes de Friedman est une politique de désinflation
qui aurait dû à terme permettre de sortir de la stagflation et donc de réduire le chômage

Relativisation de la théorie du taux de chômage naturel : En réalité, on constate aujourd’hui


qu’il n’en a rien été :
• on a bien obtenu une désinflation mais celle-ci a été obtenue au prix d’un chômage
croissant.
• On assiste donc à un retour de la courbe de Phillips: la désinflation a été permise par une
compression des coûts salariaux qui ne pouvait être imposée aux ménages que par un
recours à un chômage croissant.

Un article d’ A.Euzéby sur l’intérêt et les limites de la suppression des charges sociales : ici

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