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Art. 1382 du code civil : « tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage oblige
celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».
Pour que la responsabilité civile soit engagée, il faut qu’il y ait un dommage (c’est différent pour la
responsabilité pénale). Le dommage doit être causé par un fait générateur, fautif ou non, et il faut un
lien de causalité entre le dommage et le fait générateur du dommage.
Ex : je suis en prépa, et deux semaines avant les concours, je fais une mauvaise chute dans les
escaliers. Résultat : j’ai les deux poignets cassés et je ne peux donc pas passer mes écrits. La perte de
ma chance d’intégrer l’ESC Lille est bien réelle et sérieuse. On demandera les bulletins de notes et les
résultats des concours blancs de l’année aux profs pour attester de la réalité et du sérieux de cette perte
de chance.
Ex : mon père est en retard, il sort de l’appartement et, alors que la lumière ne fonctionne pas, il dévale
les escaliers qui sont glissants parce que la femme de ménage vient de passer. Sa chute est brutale, il
est atteint d’un traumatisme crânien et meurt. La victime directe ne peut pas demander réparation
puisqu’elle est morte. Ce sont les victimes par ricochet qui demanderont réparation : sa famille, ses
enfants qui sont bel et bien victimes de dommages matériels (puisque c’est le père de famille qui
ramenait de l’argent à la maison), corporels (le père est désormais mort) et moraux (ils perdent un être
cher, qu’ils aimaient).
Ex : une vieille dame traverse la rue et je la renverse. J’appelle les pompiers, elle est victime d’une
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fracture du fémur. La vieille dame meurt dans l’ambulance qui l’amenait à l’hôpital. Ses proches se
plaignent et demande réparation pour sa mort. Je ne suis pas responsable de sa mort mais seulement de
sa fracture. La conséquence (la mort) n’est pas la conséquence directe du fait qui engage ma
responsabilité.
B. Dommages corporels
Ils sont beaucoup plus difficiles à quantifier. Il s’agit d’une atteinte portée à l’intégrité physique de la
personne : blessure ou mort. L’indemnisation de la victime ne sera jamais parfaite en cas de dommage
corporel. Il faudra réparer le préjudice dû à la douleur physique, à des incapacités physiques, le
préjudice esthétique et le préjudice d’agrément (si, à cause du dommage, on ne peut plus pratiquer un
sport ou un art par ex alors qu’on adorait ça).
C. Dommages moraux
C’est une notion totalement extrapatrimoniale. Le dommage moral appartient au domaine du ressenti.
Il est difficile à réparer car il n’a pas de prix.
Ex : atteinte portée à l’honneur, à la vie privée.
Ex : deux bourgeoises que tout le monde connaît au village flânent et s’arrêtent dans un magasin où
elles effectuent quelques achats. Elles paient et sortent de la boutique. Mais au moment de sortir, les
barrières automatiques retentissent et le videur leur demande d’ouvrir leur sac. Outrées, elles refusent ;
elles sont alors conduites dans l’arrière boutique pour procéder à une fouille au corps. Comme elles
n’ont rien volées, elles sont relâchées. Mais le lendemain dans la gazette, le fait s’inscrit sur une demi-
page. Leur honneur est bafoué, elles ont subi un dommage moral.
Droit civil Les conditions de la responsabilité
1. Elément légal
C’est l’élément qui permet de caractériser la faute.
2. Elément matériel
L’élément matériel peut être :
− Un fait positif : c’est une faute par commission, ce qui signifie que l’on commet un acte fautif
(ex : excès de vitesse)
− Une abstention : c’est une faute par omission, on omet de faire quelque chose et si on avait fait
cette chose, le préjudice n’aurait pas été commis. On distingue deux types d’abstention :
- Abstention pure et simple : je m’abstiens d’agir alors que si j’agissais, je pourrais éviter
un dommage, càd je fais comme si je n’y étais pas (ex : non assistance à personne en
danger). C’est puni. En droit civil, les juges doivent déterminer si l’abstention est
intentionnelle et s’il y avait intention de nuire. Dans ce cas, il y aura punition.
Ex : mon voisin part en vacance et me demande d’arroser son bonzaï. J’oublie une fois, et
le bonzaï meurt. Ici, il n’y avait pas intention de nuire, il n’y a donc pas de punition.
- Abstention dans l’action :
Ex : une vieille dame traverse sur un passage piéton. Si je ne m’arrête pas, il y a
abstention dans l’action. S’abstenir de faire quelque chose peut se révéler tout aussi grave
qu’un fait fautif. Cf l’exemple : les conséquences sont les mêmes que si j’avais accéléré.
Quelle punition pour la faute d’abstention dans l’action ? on se réfère à ce qu’aurait fait un
bon père de famille (un homme raisonnable) pour caractériser la faute.
Ex de faute d’omission : un écrivain écrit un livre sur la V° République et omet de citer
un des personnages clé de cette période.
3. Elément moral
C’est l’élément moral qui distingue la faute civile (qui comporte un élément moral) de la faute pénale.
La responsabilité civile nécessite un dommage : il faut que la responsabilité civile soit engagée pour
qu’il y ait dommage et donc faute civile. Si la faute est intentionnelle, les tribunaux doivent rechercher
s’il y a eu intention de nuire et qui a eu intention de nuire. Il s’agit d’une recherche au cas par cas,
d’un raisonnement in concreto.
Si la faute est une faute par imprudence, les tribunaux vont faire référence à la norme, celle du bon
père de famille, pour statuer. Ici, c’est un raisonnement in abstracto.
Les juges ont le pouvoir de qualification des faits : fautifs ou non fautifs.
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B. L’imputabilité de la faute
En principe, il faut qu’il y ait capacité de discernement : pour commettre une faute, il faut qu’on
comprenne qu’on la commette. Mais le droit civil écarte quasi systématiquement cette notion de
discernement parce que ce qui compte pour le droit civil, c’est l’indemnisation des victimes.
2. L’attitude de la victime
Très souvent, l’attitude de la victime n’est pas étrangère à la réalisation du dommage. Dans certains
cas, on peut prendre en compte l’attitude de la victime pour s’exonérer d’une partie des
dédommagements. Il faut prouver la faute de la victime, et c’est à l’auteur de l’accident de la prouver.
2. Un fait de la chose
Ex de chose animée : un animal.
Le fait de la chose est le lien de causalité qui existe entre la chose et le dommage : la chose doit être
génératrice du dommage. L’art. 1384 n’est applicable que s’il y a un fait de la chose. Plusieurs choses
sont tout de même à noter :
− Il n’y a pas forcément de contact avec la chose.
Ex : une femme va à Biarritz pendant l’été et assiste à une corrida. Le taureau est
particulièrement en forme ce jour-là, et embroche la barrière derrière laquelle elle se trouve.
Elle n’est pas touchée mais elle a eu la peur de sa vie et tombe en dépression nerveuse. Ici, il
n’y a pas de contact avec la chose mais l’impact psychologique suffit pour causer le dommage
et donc pour parler de fait de la chose.
− Il n’est pas nécessaire que la chose soit en mouvement.
Ex : chez Carrefour, on va faire ces courses et on s’arrête devant le rayon des glaces. On
tombe à cause d’une flaque d’eau et on se casse le col du fémur. La chose est inerte mais elle
n’avait pas à être là.
Ex 2 : on tombe dans des escaliers qui ne sont pas normalement éclairés.
− Peu importe que la chose ait une dynamique propre ou qu’elle soit mue pas la main de
l’homme, il y a nécessité du rôle actif de la chose, la chose doit être l’instrument du dommage.
Une chose n’est pas l’instrument du dommage toutes les fois qu’elle a un comportement
normal.
Ex : si on glisse dans des escaliers bien éclairés et non glissants, ce n’est pas la peine
d’invoquer 1384.
− Il faut prouver le rôle actif de la chose. Mais qui doit le prouver ? La preuve du fait actif de la
chose/ de l’intervention de la chose incombe à la victime.
- Si la chose est en mouvement, et qu’il y a eu un contact matériel avec la victime ou la
chose endommagée : le rôle actif de la chose est présumé. Le gardien de la chose ne
pourra quasiment jamais s’exonérer de sa responsabilité sauf en prouvant la cause
étrangère (mais c’est très difficile).
- Si la chose est en mouvement mais qu’il n’y a pas eu de contact ; ou si la chose n’est pas
en mouvement : la victime doit prouver que la chose est intervenue et qu’il y a eu un rôle
actif de la chose.
B. Le gardien de la chose
1. Existence de la garde
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La garde est nécessaire pour invoquer 1384. La garde de la chose suppose trois caractéristiques : pour
être gardien de la chose, il faut en avoir :
− L’usage ;
− Le contrôle ;
− La direction.
Le propriétaire est présumé gardien de la chose quitte à ce qu’il démontre qu’au moment du fait de la
chose, il n’en était pas gardien, il en avait transféré la garde.
Ex : dans un accident de voiture, j’ai emprunté la voiture de mon père, je suis le gardien de la chose.
Ex 2 : le chauffeur n’est pas le gardien de la chose, c’est le préposé (état de subordination) du
propriétaire de la chose qui décide de la direction. Mais si le préposé s’affranchit des ordres que lui
donne son commettant, alors il devient le gardien de la chose : dès qu’il abuse de ses fonctions, le
préposé devient le gardien de la chose.
Ex : si un livreur de pizza utilise une autre route que celles indiquées sur son itinéraire, pour
faire autre chose que de livrer des pizzas, alors il est gardien de la chose (de son scooteur).
2. Perte de la garde
Le propriétaire de la chose, présumé gardien de la chose, peut parfois s’exonérer de ses responsabilité
en démontrant qu’il en a transféré la garde. Il s’agit alors d’une perte de garde volontaire. Ex : location
d’un immeuble, le transfert du bien est évident.
Mais c’est plus compliqué lorsque la perte de la garde est involontaire. En effet, en cas de vol, qui est
responsable ? L’arrêt de principe est l’arrêt Franck (1961) : un jeune homme avait emprunté la voiture
de son père pour aller en boîte mais il s’est fait voler la voiture pendant la nuit et elle a causé un
accident mortel. Le lendemain, le jeune homme s’est fait arrêté par les policiers car il était présumé
gardien de la chose et donc considéré comme responsable de l’accident. La cour de cassation a donc
procédé à un revirement de jurisprudence : à partir du moment où il y a usurpation (ex : vol), le
gardien de la chose est considéré comme ayant perdu l’usage, le contrôle et la direction de la chose.
En principe, il y a un propriétaire de la chose, mais il arrive qu’il y ait des copropriétaires. On doit
alors considérer le caractère alternatif de la garde :
Parfois on ne sait pas s’il y a un ou plusieurs gardiens de la chose.
Ex : accident de chasse, on a observé plusieurs tirs en même temps et il en résulte qu’un homme est
mort. La cour de cassation a disposé qu’en ce qui concernait les chasseurs qui avaient tous tirés en
même temps, ils étaient co-gardiens de la gerbe de plomb et coresponsables. Mais ce principe est
utilisé dans des circonstances précises : à partir du moment où on ne peut pas prouver qui était gardien
de la chose (càd celui qui avait au moment précis de l’action le contrôle, l’usage et la direction de la
chose), le gardien est le propriétaire. Il faut pouvoir prouver le transfert.
3. Cause d’exonération
Le gardien peut-il s’exonérer de sa faute ? Le gardien de la chose est responsable du fait de la chose
qu’il a sous sa garde. Peut-il se dédouaner de sa responsabilité en prouvant qu’il n’a pas commis de
faute ? En principe, non car il ne s’agit pas d’une responsabilité de faute. Oui ssi il prouve qu’il y avait
un cas de force majeure, càd qu’il y a eu un fait extérieur irrésistible et imprévisible.
− Fait extérieur à la chose :
Droit civil Les conditions de la responsabilité
Ex : une grue qui s’effondre une nuit de tempête alors qu’elle était bien arrimée, il n’y a pas de
vice interne de la chose.
− Fait irrésistible : fait qui arrive alors que le gardien de la chose avait fait tout ce qui était en
son pouvoir pour éviter le dommage.
− Fait imprévisible : ex, ne pouvait pas être prévu par la météo.
Quand il y a responsabilité du fait des choses, il arrive qu’un tiers soit en partie responsable. Le
gardien est responsable du fait de la chose sauf si :
− Le fait du tiers n’exonère pas la responsabilité du gardien de la chose ;
− Le fait du tiers était extérieur, imprévisible, irrésistible.
Par contre, le gardien de la chose aura la possibilité de se retourner contre un tiers et de lui demander
des dommages et intérêts : action récursoire. (La victime ne pourra, quant à elle, que s’en retourner au
gardien de la chose).
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servir plusieurs commettants. Que faire en cas de dommage commis par le préposé, si l’ordre
ne vient pas du commettant ?
Ex : chauffeur employé par une autre personne, mise aux ordres d’une autre personne.
Il faut effectuer un transfert du lien de subordination vers le donneur d’ordre, mais il faut
pouvoir le prouver : qui avait la direction effective sur le préposé au moment du dommage ?
− il faut un fait du préposé (le préposé doit faire qch causant un dommage), et pour que le
dommage du préposé entraîne la responsabilité du commettant, il faut :
- un fait illicite
- il faut que le fait ait été accompli dans l’exercice des fonctions du préposé
Problème : où se situe la ligne entre le cadre de mes fonctions et le hors-cadre ?
Il arrive qu’un préposé abuse ou dépasse ses fonctions. Avant 1988, on observait si le
préposé s’était mis lui-même en dehors de ses fonctions. L’arrêt ayant fait
jurisprudence en 1988 est l’arrêt de l’assemblée Phénicie de la cour de cassation : on
ne peut augmenter de telle façon les charges d’une entreprise avec des assurances pour
se prémunir. La cour de cassation a disposé que le commettant pouvait s’exonérer de
sa responsabilité s’il arrivait à prouver que le préposé avait agit :
- sans autorisation ;
- à des fins étrangères à ses attributions ;
- en se plaçant ainsi hors des fonctions auxquelles il était employé.
y-a-t-il dépassement des fonctions ? La cour de cassation estime que quand on
travaille dans un cabinet d’assurance, ça ne fonctionne pas, donc le commettant est
responsable.
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retient la faute de la victime : elle ne s’était pas attachée. Suivant la lecture du juge (gravité de la faute
ou importance du rôle causal), l’indemnisation ne sera pas la même.
On tient toujours compte de l’acceptation des risques. Si les risques sont acceptés, on ne peut pas
demander réparation sur les fondements 1382 et 1384.