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see N° N10-83.771 F-P+B 2387 cr 27 AVRIL 2011 IRRECEVABILITE cassation M, LOUVEL président, REPUBLIQUE FRANCAISE ‘AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS. LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son ‘audience publique tenue au Palais de Justice & PARIS, le vingt-sept avril deux mile onze, a rendu Farét suivant Sur le rapport de M. le conseiller MONFORT, les observations. do la société civle professionnelle ROGER et SEVAUX. et de Me BOUTHORS, avocats en la Cour, et les conclusions de M’avocat ‘général BERKANI ‘Statuant sur les pourvois formés par ~M.Rains - M.Jean-Etienne Cohen-Séat, ~ Lasaciété Calmann-Lévy,civlement responsable, ‘contre Tarrét de la cour gappel de PARIS, chambre 2-7, en date du 20 mai 2010, qui, pour diffamation publique envers un particulier, a condamas chacun des prévenus & 1 000 euros d'amende, ata prononeé sur les intéréts civls -Jolgnant les pourvois en raison de la connexité Sut la recevabilté du pourvoi de M. Cohen-Séat et de la société Calmann-Lévy ‘Attendu que le pourvo, fomé le 26 mai 2010, plus de trois Sang nenes de eet conraktore, est irecevable comme tana, &n application de Fericle $9 de a loi du29 juillet tet ‘Sur le pourvoi de M. Rainsy Sam ‘Vu les mémoires produits en demande et en défense Ailend quit résuite de rarrétattaqué et des places de la Caiman Gal suite dol publication, au mois de mai 2008 ace seen fa mere: tB0. aun ouvrage de M. Rainsy Sam, ins “Des eee on penteme ans lequel Tautou raconte son retour au Camboore es on Fa aeces Kier ouges’, et cle de Foscupaionvitnamianss ree sosestensabiltés poitaues quil a alors assumées usqus eon Sich ‘Attend que les juges du premier degr6, relevant que cette reaee nS visait M Namnong Hor. et aus M Rainey Sem nace Taman Benétice de ls Benne foi, font condannd une eat Famende ; que celuiciainterjeté appel du ugemert En cot état ur le promior moyen de cassation, pris de a violation des articles 29 of $2 de ta lol du 29 juilet 1881, 391 of 599 ta one ee procédure pénate, défaut de réponse a conclusions, détaut do motifs fer manque de base légale; “aux motits qu'il résulte des pidces du dossier que ‘M, Namhong Hor a été nommé ministre a’Etat, ministre dos affaires Srangeros du gouvernement royal du Cambodge lo 30 novembre 1998, soit » quolques années » aprés le départ de M. Rainsy Sam di gouvernement en 1994 puis vice-premier ministre, ministre aes affalhoe Strangéres fe 15 juillet 2004 ; qu'il résulte de ces Slémonts que, bien Ei talt pas 610 nommément ou expressément désigné, Ml. Namhond Hor était identifiable, @ tout le moins par un corcle restrelnt d'initieg, Constitué par les personnes s'intéressant & la vie. poltique da Gambodge et par les résidents cambodgiens en France ; qu’en outro, jnterrogé par ta cour qui lui demandait si ses propos viseien Mt. Namhong Hor, M. Rainsy Sam no pas démenti; quily allow on consequence, de contirmer le jugemont sur le caractare dittameteye a égard do la partie civile, du passage poursuivi; “1) alors que, pour que la diffamation soit caractérisée, la désignation de ta personne visée par les propos contestes ne dot laisser place @ aucune incertitude ; que les propos en cause vieent ga ministre des affaires étrangeres nommé quelques années apros lo depart en 1994 de M. Rainsy Sam, la cour qui, sans davantage s'en expliquer, a ainsi considéré que lesdits propos visalent assurément M. Namhong Hor, lequel n’avait toutetois 66 nommé ministre dec atlalres étrangeres qu'en 1998, n'a pas, en état do ce default de moira, Etabli de manidre certaine le caractére Klentitiable do la partic vile ‘comme étant ia personne visée par les propos en cause ; inditféronte; quo, dés lors, lacirconstance quo M. Rainsy Sar saurait fonder la décision de la cour retenant quo celle-c! était la Personne visée par les imputations diffamatoiros” « ‘Attendu que, pour confirmer le jugement, et retenic que les ‘propos incriminés comportaient des imputations visané M. Namhong Hor "arr attaqué reléve que celui-ci a été nommé ministre dial, ministre des affaires étrangéres du gouvernement coyal du Cambodge le 30 novembre 1998, soit ~ quelques années » aprés le départ de M Rainey Sam da gouvernement en 1994, puis vice-premier ministr, ministre. des sfaires Etrangares fo 15 juillet 2004, ot quil résuite de ces éiéments que, bien kil Fait pas été nommément ou expressémert désigns, M. Namhong Hor dealt identifiable, a tout le moins par un cercle raetreintdinitiés constitu par los Personnes sintéressant ala vie politique di Cambodge et par les résidents Ccambodgiens en France ; que les juges ajostent qu'au demeurant, interroge pear la cour qui lui demandsit si ses propos visaient M. Namhong Hor, M. Rainsy Sam ne "a pas démenti ‘Attondu quien statuant sins, la cour fappel a justiié sa decision ; quien effet, lorsqu'une personne est visée par dee propos diffamatores, il importe peu quelle wait pas sé nommément oo ‘ressément désignée,dés lors que son identification est rendue possibie par les termes du discours ou de Téeri, ou par des circorstarce oxtrins6ques qui écleirent et confirment cette désignation de manlére a a rendre évidente Diat it suit que le moyen doit tre écarté ‘Mais sur fe second moyen de cassation, pris de a violation des articles 10 de la Convention européenne des droits de "homme, 29 6t 32 de Ia loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procedure pénale, défaut de réponse & conclusions, défaut de motifs ef manque de base légale Yen ce que Farrét confirmatit attaqué a déclaré MM. Cohen-Seat et Rainsy Sam coupables de ditfamation publique ‘envers un particulier et complicité de co dsl, es a condamnés chacun 4 une amende do 1 000 euros et a prononeé sures intéréts clvils; “aux motifs quo les prévenus excipent de leur bonne fol en soutenant que les quatre conditions habituelloment exigées, la legitimite du but poursuivi, Fabsonce d'animosité personnelle, le ‘sérieux de renquéte ot la prudence dans expression, sont réunioe ; quits mvoquent en outre Yarticlo 10 dela Convention européenne des droits de homme et la nécessité de préserver Ia liberté d'expression lorsqu’est en jou un sujet d'intérét général ; que fa logitimite du but poursuivi n'est pas discutable,s'agissent pour M. Rainsy Sam, député cambodgien, ancion ministre, de denner sa version de histoire ‘récento de son pays ; qu’en dépit de opposition de M. Rainsy Sam aa gouvernement actuel du Cambodge, l'animosité personnelie 4 Pégard de la parti civie n'est pas caractérisée; qu'il est 6tabil et non coniecte ue M. Namhong Hor, diplomate a rambassade du Cambodge a Paris ‘on mars 1970 lors du coup d'état militaire contre le prince Sihanouk a ‘ejoint to tront créé pour soutenir celuisi et était ambassadour ila gouvernement du Cambodge en exil Cuba lors de larrivée au pouvoit {0n 1978 des Khmers rouges ; que ceux-ei ont adressé des télégrammos 4 toutes les ambassades pour proposer aux diplomates un retour au ays et une rééducation de 10 jours ; qu'aprés un passage dans on premier camp, la 616 envoyé a colui de Boong Trabek, dirigé parla Khmer rouge long Sary et divisé en trois sections : 8 30 pour los Studiants, B 31 pour les détonus susceptibles de devenir des collaborateurs du régime et B 32 pour les diplomates diffcilos & ‘r8éduquer ; qu'lla 66 désigné une promiére fois en 1978 en qualité de président du comité des prisonniers de la section B 32, son spouse exereant les mémes fonctions dans le camp résorve aux femmes + que M. Rainsy Sam produit plusieurs documents relatifs au zele doployé, ‘au bénétice des Khmers rouges, par fa partie civile dans Vexercice ae ‘$88 fonctions de président du comité des prisonniers, au préjudice de es demniers :- un entrotien accordion janvier-évrier 2001, on anglais, au périodique Phnom Penh Post par Ianclenne sénatrice: Keo Bunthouk qui affirme : « pour mol, je ne sais pas s'il choisissalt les gens envoyés 2 Toul Sleng (lieu d'oxécution), mais j'ai remarqud que ‘quand ily avait une critique méme toute petite de quolqu'um (émise par Hor Namhong), deux jours plus tard cette personne était emmenés ot ‘nous ne savions pas of elle alait, Hor Namhong dit que ce n'est pas {i qui ordonnait quels prisonnicrs devaient étre envoyés & Toul Sleng mais je ne peux pas y croire »; - un témolgnage écrit de deux anciens détenus du camp : leng Kounsaky et son épouse Keo Bunthouk (ancienne sénatrice précitée) selon lesquels «M. Hor Namhong prenait des notes ot faisait des rapports secrets pour I’Angkar que lul seul connait , Nous avons le sentiment que M. Hor Namhong était un ‘serviteur zélé de I’Angkar » Khmer rouge avant de se rallior ensuite on 1979 au régime de M. Hun Sen-Heng Sarin. Ainsi il ost responsable ge la mort de nombreux intellectuels enfermés au camp de Bong Trabek dont if etait le directour en 1977- 1978 »; - des attestations ftablies par fa princess Sisowath Ayravady les 22 octobre 1989, 18 aodt et ter novembre 2008, selon lesquelles épouse de la partic. civilo manitestait une haine incontrslable contre la monarchie, ig bourgeoisie ; dix prisonniers ont quité définitivement fe camp ef ont disparu sous la présidence de M. Hor Namhong ; ce dermior a consciemment ou non ou par pure ambition, activement Spousé la cause des Khmers rouges » ; - différents articles de Is presse ambodgienne, Tun annongant intention du prince Sisowath Thomico de 6poser plainte contre M.. Namhony Hor devant le tribunal eniange de ugerles anciens dirigeants Khmers rouges, Fautre relayant la thece do M, Ralnsy Sam ;- des oxtraits du livre de Ong Thong Hoeung autecr du livre « J'ai cru aux Khmers rouges - présentant la partie vivile manoeuvre et de responsabilité dans los choix effectués par les Khmers rouges notamment sur le choix des détenus exécutés ; que lee {émoins entendus parla cour ont mis en exergue la terreur permanente des prisonniers, absence de pouvoir de docision du président uo amité des prisonniers, simple exécutant dont los attributions stalent lmitées a Fexécution dos travaux détinis par lo chet du camper Ia répartition de la nourriture, 'absence de privilege attache & cata fonction ot limpossibilité pour le président désigné par lo chet Kher fouge du camp, de refuser cette mission, sous peino de mort; que of 2g débats relatifs & Phistoire d'un pays, y compris dans ses aspect {es plus tragiques, sont dintérét général; si les limites de Ia entivoe sont plus larges 4 l'égard d'un homme poitique, lexercice de la litte de recvoir ou de communiquer des informations comporte os dovoirs ot des responsabiltés ot peut étre soumis 8 des restrictions ox sanctions prévues par la loi et nécessaires notamment 4 la protection de la réputation ot des droits d'autrul; quen se fondant exclisrrement ‘sur les documents versés par lui, qui pour la plupart evafent de ete Produits dans le procés en diffamation intente devant le tipunat ‘orrectionnel de Paris parla partie civle Norodom Sihanouk qui avalt feu @ son égard, on termes plus violents, des propos relatifs na mémes faits ot ayant donné lieu & la condamnation du prévenu par Jugement du 23 janvier 1991, M, Rainsy Sam, qui ne pouvaltigncrer compte tenu du retontissoment de cette décision, s'est Iivié'd uno enquéte non contradictoire et fragmentaire,limitée aux seuls éléments sccusatours mats peu detailiés lui permetiant d'stayer sa these, sais procéder @ la verification de exactitude des faits allégues ; que ‘M. Rainsy Sam, en omettant de préciser que M. Namhong Hor Stait détenu dans fe camp de Boeng Trabek,laissant ainsi penser au lectour ‘moyen quo ce demior était investi, du fait de son adhésion 4 un régime dictatorial, do responsabilités ui pexmettant de causor la mort de nombreuses personnes, et en occultant d'une part, les difficultes, rencontrées par les prisonniers pour survivre ot d'autro part, la situation particuligrement délicate de la partie civilo, désignée per le pouvoir Khmer rouge 4 un poste dintermédiaire qu'il ne pouvait refuser sans mettre en jou sa vio ot celle do sa famille, a dénaturé les informations en sa possession ot manqué de prudence dans expression, en utilisant les termes « ancien collaborateur du pouvoir khmer rouge soupgonné d'avoir causé la mort de nombrouses Personnes dont des membros de a famile royale excédant nettemont Js limites adimissibles en matiore de liberté d'expression et dénotant lune absence totale de mesure ; qu'en conséquence los prévonus ne Pouvent bénéficior de la bonne fol; “t) alors que fa iberté d'expression garantie par l'articlo 10 de fa Convention européenne des aroits do homme impose qi'll ‘pulsse étre librement débattu dos tragécfes politiques contemporaines {ello fa dictature des Khmers rouges, des éventuelles responsabllltés individuelies dans la perpétration des crimes qui ont été alors commis, comme du role qu'ont pu jouer durant cette période des personnes aujourd'hui présentes dans los instances au pouvolr, et co afin do permettr les questionnoments nécessaire a 'émergence de la vérité; gu’en écartant néanmoins te fait justiicatit de la bonne fol et en déclarant établi lo délit de ditfamation & raison do propos dont il n'est aucunement constaté qu'ils soient mensongers, et qui felsaient état, sans davantage de commentaires, de la présence dans Ip gouvernement cambodgien actuel d'un responsable dont la mise en Cause pour son rote en qualité de président du comité des prisonniers d'un camp par divers survivants de cote époque puis deputs dans divorses enquétes ot investigations ultérieures est un fait constant, fa cour d'appol a violé Varticle 10 de la convention, les propos en cause n'excédant pas les limites admissitlos en matiore de liborts expression ; “2) alors quo la cour qui a omis d’examiner un nambra important de picos versées aux déba's par M. Rainsy Sam comma da des prisonniers do a division B 32 du camp de Boeng Trabok, avalent depuis é8 étayées avec de nouveaux témoignages of de nowralles investigations, a entaché sa décision de défaut de réponse et n'a pas Justilé de Vexistonce d'une dénaturation exclusive dela bonne tery (3) alors quo ta cour a d'autant moins caractérisé feaistence d'une dénaturation quant au rble do la partie clvle, qu'elle international chargé de juger los crimes commis par les Khmore [2uges, circonstance de nature a établir 'existence de soupgons 9 rencontre de fa partie civile et donc la véracite des propos tonus “4 alors, enfin, que la courn'a pas en Vétat de ses propres ‘ronciations caractérisé 'absonce totale de mesure dont elle a oried 4M. Reinsy Sam pour écarter le fait justficatf de sa bonne for", ‘Vu Farticle 10 de la Convention européenne des droits do homme Afendu que la liberté cfexpression ne peut étre soumise & dos Ingérences que dans les cas ou colles-ci consliuent des mesons névessaires au regard du paragraphe 2 de articie 10 précité. Allendu quiaprés avoir rolevé, & juste tire, fe ceractére eitfamatoire des propos dénoncés parla patie civil, Tarr, pour relecor Io Dénéfice de fa Bonne foi au prévenu, provonee par les mots repre ae moyen Mais attendu quien se déterminant ainsi, alors que le passage {periminé, portant sur un sujet cintérét général relaif& histoire wéeonte aa Gambodge, et au comportement dun personnage important lars ae éxénemenis Wagiques qua connus ce pays do 1975 a 1879, ne dépescat Pas es limites admissibles de la lberté expression dans la cites a {action dun homme politique, la cour cappel a méconnu les texte et principe rod il suit que la cassation est encourue; que impliguant pas {ul soit & nouveau statué sur le fond, elle aura lieu sans renvol, ainsi que le pexmet Fartcle L 411-3 du code de organisation judiclaire Par ces motifs | -Sur le pourvor de M.Cohen-Séat et de la société Calmann- Ley LE DECLARE irrecovabie Sur le pourvoi de M, Sam CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, tarrét susvisé de la cour ¢appel de Paris en date du 20 mai 2010 DIT ny avoir lieu & renvoi ORDONNE rimpression du résent arrét, sa transcription sur les registres du greffe de la cour dappe! de Pari et sa mention en marge ou lla suite de tarrét annulé ; Ainsi jugé et prononeé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus Etaiont présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue a fartcle 567-1-1 du code de arocédure pénale : M. Lowvel Président, M. Monfort conseiller rapporte.r, M. Blondet conseiller de la chambre Gretfier de chambre : Mme Daudé : En fol de quo’ le présent arrét a été signé parle président, Ie ‘epporteur et le green de\chamire.; van |

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