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planète
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Trop •
Les technologies de l’information et de la communication
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À qui
18 mois : c’est la durée de vie moyenne
d’un téléphone portable
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• Tension au large du Sénégal
La ruée vers les gisements de métaux et de minerais Les eaux poissonneuses au large des côtes conduisant logiquement à une baisse des
n’est pas un phénomène isolé. Achat de terres fertiles, d’Afrique de l’Ouest sont le théâtre stocks. Aujourd’hui, l’accord de pêche est
pillage des forêts tropicales, monoculture d’arbres à d’un intense combat diplomatique entre dans l’impasse mais les entreprises euro-
l’Union européenne et les pays africains péennes s’abritent derrière des sociétés
croissance rapide, exploitation du pétrole ou encore
concernés. Avec une demande toujours écran : sur les 120 bateaux de pêche
pêche industrielle, le commerce mondial ne conduit croissante en produits de la mer, qui a industrielle dit sénégalais, la moitié serait
pas à un meilleur partage des ressources naturelles déjà conduit à un effondrement des en réalité des sociétés mixtes qui servent
pour tous, mais à leur accaparement par une minorité. stocks de poissons dans les eaux euro- d’écran à des intérêts étrangers. Mais
Pour faire face à la raréfaction, les pays du Nord optent péennes, les chalutiers français et espa- surtout l’essentiel de la production est
gnols sont obligés d’aller pêcher toujours exporté : les conserveries locales sont
pour des stratégies de « sécurisation » de l’accès plus loin. Jusqu’en 2006, l’Union euro- à l’abandon et les pêcheurs artisanaux
aux ressources naturelles plutôt que de remettre en péenne avait négocié un accord d’accès eux-mêmes, se tournent de plus en plus
cause leur modèle de développement. C’est le cas pour que ses navires puissent pêcher vers des petites et moyennes entrepri-
de l’Union européenne qui utilise de plus en plus dans les eaux sénégalaises. Très vite des ses spécialisées dans l’export. Pour les
tensions sont apparues avec la pêcherie ménages sénégalais, il ne reste plus que
fréquemment ce concept pour définir sa politique
artisanale au Sénégal, cette concurrence les espèces de poisson dédaignées par le
énergétique ou d’accès aux métaux indispensables inégale pour l’accès à la ressource consommateur européen.
à ses industries. De plus, les pays riches contrôlent
les institutions financières internationales comme
la Banque mondiale ou la Banque européenne
d’investissement et les orientent vers le financement Le mythe des terres marginales
de projets destructeurs pour l’environnement et les Le 30 décembre 2008, un boeing 747 prévoit de planter 40 millions d’hecta-
communautés locales, qui augmentent la pression de Air New Zealand a effectué avec suc- res de jatropha, de nombreux conflits
sur les pays du Sud : il « faut » exporter, faire entrer * cès un vol test en utilisant, pour l’un de sont apparus entre des entreprises et des
dette écologique : ses moteurs, de l’huile de jatropha. Une agriculteurs. Officiellement, le jatropha
des devises étrangères et rembourser la dette il s’agit de la dette
véritable plante miracle à en croire la est planté sur des terres « dégradées »
économique, même si cela doit se faire au détriment accumulée envers
compagnie car cet arbuste pousse sur ou « marginales », des notions très floues,
les pays du Sud par les
des communautés locales, des services sociaux pays industrialisés du des terres arides et nécessite peu d’eau d’autant plus qu’en Inde comme dans
(de santé, d’éducation) et de leur environnement. Nord, qui ont pillé et et d’engrais. L’huile extraite des graines beaucoup de pays du Sud, le statut fon-
Et, si en réalité, c’étaient les pays riches qui avaient pollué des ressources n’est pas comestible. Sa culture ne ren- cier des terres est loin d’être clarifié. Au
(eau, air, matières trerait donc pas en concurrence avec les sortir des indépendances, les États ont
une dette écologique vis à vis des pays du Sud ? premières) et causé terres fertiles nécessaires pour l’alimen- bien souvent nationalisé ces terres « va-
Comment inverser la situation et soutenir les des dommages à tation. cantes » sans prendre en compte leur utili-
l’environnement
populations locales pour qu’elles puissent décider (dépôt des déchets,
La réalité est tout autre. D’abord parce sation par les communautés locales. Faire
par elles-mêmes de l’exploitation et de la gestion gaz à effets de serre) que sans irrigation et planté sur un sol reconnaître ses droits sur la terre est un
pauvre, les rendements chutent. Les in- processus souvent long et coûteux qui
des ressources naturelles sur leur territoire ? au cours de leur
expansion industrielle. vestisseurs recherchent donc les terres les n’est pas à la portée des communautés
Une bonne partie plus riches. Ensuite, parce que la culture les plus pauvres. De nombreux conflits
de ces ressources, de cet arbuste nécessite d’immenses sur- apparaissent alors, quand l’État confie
non renouvelables ou faces, surtout si l’objectif est de faire voler ou vend ces terres à des entreprises.
surexploitées, sont par les avions ! En Inde, où le gouvernement
conséquent à jamais
indisponibles.
*
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De l’empreinte
écologique à Le seuil maximum correspond à un plafond de consom-
mation au delà duquel on empiète sur l’espace écologique
l’espace écologique Union
Européenne,
de quelqu’un d’autre. Par exemple, en prenant en
compte la capacité d’absorption naturelle de la biosphère,
États-Unis il faudrait que chaque humain n’émette pas plus de
• 2 tonnes de CO2 par an pour contenir les changements
d’Amérique,…
L’empreinte écologique est un indicateur qui permet climatiques. Or, un français émet plus de 6 tonnes de
d’évaluer la surface de sol nécessaire pour produire les CO2 par an et un habitant des États-Unis émet plus de
ressources consommées par une population et pour 20 tonnes de CO2 par an.
absorber ses déchets. Ainsi, un européen a une empreinte
écologique d’environ 4,8 hectares. En multipliant par
le nombre d’humains, on constate que si tout le monde
vivait comme un européen, il faudrait trois planètes !
Entre les deux,
Or, nous n’avons qu’une seule planète et c’est bien là il est possible de
la limite de l’empreinte écologique : à partir de là, que créer des sociétés
faut-il faire ? S’assurer que les plus pauvres n’augmentent soutenables en
* faisant preuve
pas leur empreinte écologique afin que le maintien voire renouvelable :
de créativité et
le renforcement des inégalités nous permette de vivre on distingue les res-
sources renouvelables en s’adaptant aux
tous sur une seule planète ? Une réponse plus juste comme le bois ou le conditions locales.
consiste à introduire la notion d’équité : chaque humain poisson des ressources
devrait avoir le même droit d’utiliser les ressources. non renouvelables
comme les métaux.
C’est le concept d’espace écologique. En pratique, il Il est possible de
s’agit de définir pour chaque type de ressources un seuil gérer des ressources
minimum de consommation et un plafond maximum renouvelables de façon Le seuil minimum correspond à la satisfaction des
durable si l’on ne besoins de base (se nourrir, se loger, se chauffer…).
prenant en compte la capacité de régénération des
prélève pas plus
ressources renouvelables et le stock de ressources non que l’accroissement Cameroun, Il s’agit, par exemple, de garantir à chacun l’accès à
renouvelables. naturel. Le pétrole 50 litres d’eau par jour pour boire ou se laver (d’après
est considéré comme Bangladesh,
l’Organisation Mondiale de la Santé), ou encore à 35
une ressource non Zambie,…
Respecter l’espace écologique de chacun conduit à renouvelable ou fossile kilos de papier par an indispensables pour l’éducation
questionner la façon dont s’organise le commerce car il faut des millions et la vie démocratique (d’après le collectif d’ONG
international aujourd’hui car il conduit directement ou d’années pour le European Paper Network).
former à partir de
indirectement à un accaparement des terres des plus débris de végétaux.
pauvres par les plus riches. Pour autant, si le concept *
d’espace écologique est indissociable d’une relocalisation En résumé, pour que chacun puisse répondre à ses besoins fondamentaux, il est
forte des activités, cela n’est pas pour autant incompa- indispensable de réduire fortement la consommation dans les pays industrialisés
tible avec un commerce international, plus équitable, dans les prochaines décennies et de la rééquilibrer entre les plus riches et les
plus pauvres.
notamment pour certaines ressources inégalement
réparties à la surface du globe.
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Quand •
En quelques décennies, la concentration économique
font la loi d’affaire dépasse le produit intérieur brut (PIB) des pays
dans lesquels elles sont implantées. Un tel poids écono-
mique est indissociable d’un poids politique : face à des *
société-mère
États souvent fragilisés par la corruption, les lois n’ont (ou maison-mère) :
Mais elles visent avant tout à faire des
profits ! Et dans de nombreux pays, les que peu de prise sur les entreprises multinationales. Et siège principal d’une
États, faibles ou fragilisés par la corruption, en cas de problème, plus personne n’est responsable. société possédant des
ne jouent pas leur rôle : au lieu de les filiales ou contrôlant
encadrer pour que leurs activités se fassent
Les sociétés-mères s’abritent derrière la responsabilité de façon majoritaire
Les multinationales
créent des emplois, au bénéfice de tous c’est à celui qui impo- de leurs filiales pour éviter d’avoir à rendre des comptes. d’autres entreprises.
des écoles, sera le moins de contraintes sociales ou Les communautés impactées par l’activité de ces multi- L’évolution du droit
des dispensaires environnementales. Et quand l’exploitation n’a pas suivi l’évolu-
et permettent n’est plus rentable, l’entreprise se déplace nationales n’ont bien souvent alors aucun moyen d’obte- tion économique des
aux pays du Sud ailleurs. Les écoles et les dispensaires nir justice. Il est donc urgent de créer une réglementation entreprises et il reste
ferment. Les emplois disparaissent. Et il ne
de se développer.
reste qu’un environnement détruit pour les
internationale contraignante qui encadre l’activité des encore aujourd’hui très
multinationales. difficile de poursuivre
communautés.
devant les tribunaux
une maison-mère en
cas de problème avec
l’une de ses filiales
à l’étranger.
*
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Compenser sa pollution plutôt que la réduire
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Les limites de
Certification : achetez nos OGM et nos pesticides « responsables » !
Une autre technique utilisée par les entre- cependant cultivé sous forme d’immen-
prises pour verdir leur image et pouvoir
continuer à vendre leurs produits consis-
ses plantations, il pompe tellement d’eau
qu’il peut assécher des rivières ! En Amé- la croissance
te à les faire certifier « responsable » ou
« durable ». Ces certifications n’ont pas
pour objectif de remettre en cause les
rique Latine, il est surnommé l’arbre de
la soif. Pour l’huile de palme et le soja
« responsable » c’est la même logique : les
(verte ou non)
problèmes de fond comme l’extension entreprises s’engagent à ne pas raser de
des monocultures de soja, de palmier à forêts primaires et peuvent vendre leurs La solution, c’est la science
huile ou d’eucalyptus mais d’en diminuer produits avec la précieuse certification. et le progrès technique !
les impacts et de présenter cela comme Et cela même si le soja est OGM ou si les Bientôt l’énergie verte
sera sans limite… Euh,… pour alimenter
une amélioration. Ainsi, Carrefour propo- palmiers à huile sont traités au paraquat, nous pourrons continuer les centrales nucléaires,
se une gamme de mobilier de jardin « éco- un pesticide interdit en Europe et aux à nous développer, vous il faut de l’uranium, non ?
logique », en eucalyptus certifié FSC (un Etats-Unis car neurotoxique. Et ces entre- et moi, en utilisant moins Et les stocks sont limités…
écolabel, le Forest Stewardship Council), prises sont d’autant plus à l’aise qu’elles de ressources : le nucléaire, Quand aux agrocarburants,
les agrocarburants,… ce n’est pas mieux.
en expliquant que ce produit contribue participent souvent elles-mêmes à la dé-
Pour en produire, il faut
à la protection des forêts. Certes l’euca- termination des critères de ces labels ! beaucoup de terres,
lyptus ne vient pas d’une forêt naturelle, de pesticides
et d’engrais…
*
forêts primaires :
une forêt primaire est
un écosystème dont le
fonctionnement n’a pas
été perturbé de façon
majeure par l’homme.
Ces forêts abritent une
biodiversité excep-
tionnelle et fournissent
de nombreux services
environnementaux aux
communautés qui en
dépendent (pharma-
copée, nourriture, eau
potable...).
*
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•
C’est un article du Times de janvier 2009 qui a mis le Plus de croissance pour sauver la planète ?
feu aux poudres : saisir deux requêtes sur le moteur de Aujourd’hui en France, ou plus généra- les importations de bois et de produits
recherche Google consommerait « la même quantité lement dans les pays dits développés, dérivés représentent le deuxième poste
d’énergie que celle nécessaire à faire chauffer l’eau pour on constate que certains problèmes en- de déficit commercial de la France. De
une tasse de thé ». En ligne de mire, l’immense parc de vironnementaux sont progressivement plus, nous importons d’immenses quanti-
résolus. Un exemple classique (mais dis- tés d’huile de palme et de soja, cultivées
serveurs du géant de l’informatique dont le fonction- cutable !) est celui des forêts françaises à la place de forêts tropicales ou de ter-
nement, notamment le refroidissement, nécessite une qui, bien que fortement exploitées au res utilisées par les populations locales
consommation croissante d’énergie. À tel point que Moyen-âge, regagnent aujourd’hui du pour se nourrir. Il serait donc impossible
le fonctionnement des ordinateurs et d’Internet est terrain. Pourtant nous consommons tou- à l’ensemble de la planète de reproduire
aujourd’hui accusé d’émettre plus de dioxyde de carbone jours plus, ce qui laisserait croire que, mé- ce modèle car une croissance infinie dans
que les transports aériens ! La polémique qui a suivi la caniquement, au-delà d’un certain seuil un monde fini n’a pas de sens. La restau-
de développement, les sociétés auraient ration globale des écosystèmes et la libé-
publication de cet article a sévèrement écorné le mythe
la volonté et la capacité de restaurer l’en- ration de ces terres utilisées aujourd’hui
de la croissance verte et de la dématérialisation qui est vironnement (c’est la théorie dite de la pour des cultures d’exportation ne seront
censée, grâce aux nouvelles technologies, permettre « courbe de Kuznets »). C’est nier le fait possibles que si la demande mondiale en
une croissance économique découplée d’impacts que notre modèle économique actuel re- ressources naturelles diminue. Et donc si
environnementaux. pose sur l’accaparement des terres et des nous consommons moins et mieux !
ressources d’autres pays : par exemple,
En réalité, la croissance économique, telle que nous la
définissons aujourd’hui, c’est-à-dire la croissance du produit *
agrocarburants :
intérieur brut, a toujours été couplée à une croissance et non pas « biocar-
de la consommation de ressources et de déchets. Bien burants »… car la
sûr, l’efficacité a été améliorée : il faut aujourd’hui 30 % culture de végétaux
de ressources en moins qu’il y a 30 ans pour produire un pour fabriquer des
carburants n’a rien à
euro de PIB, mais cela ne suffit pas à faire décliner voir avec l’agriculture
la consommation globale de ressources naturelles. biologique.
*
De l’huile de palme dans les moteurs Areva s’installe au Niger : la stratégie de la fuite en avant
Depuis plusieurs années, les forêts d’In- face aux risques environnementaux et Après avoir épuisé les mines d’uranium contamination de l’eau et de l’air par des
donésie et de Malaisie sont ravagées sociaux, l’Union européenne souhaite un françaises, le groupe français Areva s’est poussières radioactives menace la santé
pour laisser place à d’immenses monocul- système de certification : concrètement, lancé à la conquête de nouveaux gise- des ouvriers et des communautés loca-
tures de palmiers à huile. Si l’essentiel de les forêts les plus riches en biodiversité ments à l’étranger. Depuis 40 ans, Areva les. Aujourd’hui, les gisements d’uranium
la production est encore destinée à l’in- sont épargnées mais pour répondre à (ex-Cogema) extrait de l’uranium au du Niger représentent 40 % de l’approvi-
dustrie agro-alimentaire (plats préparés, cette demande mondiale croissante, les Nord du Niger, autour des villes d’Arlit sionnement d’Areva mais pour anticiper
chips, glaces…), le marché des agrocarbu- entreprises certifiées peuvent continuer et d’Akokan. Les retombées économi- leur épuisement, l’entreprise prospecte
rants est en pleine croissance. Lorsqu’en à détruire des forêts moins riches et à ques pour les populations locales sont dans de nombreux autres pays. Une stra-
janvier 2008, l’Union européenne a an- expulser des communautés. Rien qu’en très faibles et contribuent à un climat tégie de fuite en avant pour une filière
noncé son souhait de promouvoir l’uti- Indonésie, plus de 500 conflits parfois d’insécurité croissant dans la région avec qui se félicite d’une politique de déve-
lisation des « biocarburants », le cours meurtriers opposent actuellement des l’apparition de groupes rebelles armés loppement durable sans impact sur l’en-
de l’huile de palme a flambé. Depuis, communautés à des entreprises de pal- cherchant également à tirer profit de vironnement.
les projets de raffineries se multiplient miers à huile. cette exploitation. Autour des mines, la
en Indonésie et en Malaisie. Pour faire
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•
Vers
Le produit intérieur brut (PIB) s’est progressivement
imposé comme l’indicateur de référence pour mesurer
le bien-être
la vitalité d’une économie. La croissance du PIB est
devenue l’objectif prioritaire de la plupart des politi-
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Le réseau « Une seule planète » a été créé par plusieurs
organisations d’Europe et de pays du Sud afin de sensi-
biliser les citoyens et d’interpeller les décideurs sur les
enjeux d’une gestion durable des ressources naturelles
pour le développement de tou(te)s. En France, il est
animé par le Centre de recherche et d’information pour
le développement (CRID).