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LA LÉGENDE DE KANDIRAH

Oyez, oyez braves gens la triste histoire de Kandirah la belle.


Ce pays imaginaire que nul ne trouvera, ne pourra découvrir, mais cherchez,
cherchez toujours, cherchez encore ... peut-être qu'un jour ...

La belle Kandirah était un vaste et splendide pays aux profondes vallées, aux
grandes étendues d'eaux, d'immenses plaines, la nature y faisait la joie de tous, des villes
avaient été aménagées pour être en accord avec cette nature, ni grandes ni petites, des villes
dans la juste mesure, pourrait-on dire ! La population était fière de posséder ses nombreuses
petites villes si bien éparpillées dans tout le pays, si bien adaptées au goût de chacun, car
chaque ville avait son attrait, sa saveur, son originalité, le peuple n'avait qu'à choisir sa ville,
ou plutôt ses villes car on avait doublé, triplé ... certaines d'elles pour que la population ne
s'installât pas en nombre dans une seule et même ville et n'augmentât pas trop la taille urbaine
qu'il fallait respecter.
Le bon peuple de Kandirah vivait donc heureux sans le moindre souci ni la
moindre gêne car la royauté contribuait à l'harmonie des Kandirahiens, c'était un devoir royal
de gouverner avec justesse, équilibre et gentillesse, le pays était si immense que de nouvelles
cités étaient progressivement construites, tout était Paradis, tout était sain. Le Roi Victor et la
Reine Dolcia en harmonie avec leur peuple, étaient issus d'une grande lignée de souverains
justes, bons, pacifistes vivant dans l'amour de leur prochain, vivant pour les autres, le bonheur
du peuple passait avant leur propre intérêt, la royauté après les désirs, les besoins, la vie des
Kandirahiens.
Kandirah, pays qui me semble merveilleux, une lumineuse oasis de sagesse et
d'entente qui avait pourtant la fâcheuse manie d'être un trop beau bonheur pour tous. Le malin,
le monstre, l'ignoble malfaisant qui avait toujours régner à l'extérieur de la belle contrée, un
jour d'ennui, un jour où il n'eut personne à se mettre sous la dent, notre démon s'intéressa à la
belle Kandirah. Par la ruse, et là, cette ruse je ne saurais vous en révéler l'aspect, je ne sais
absolument pas comment il a fait, faire le bien je sais vous l'expliquer, faire le mal, je ne
comprend pas, notre diable s'installa donc à Kandirah.
Oh ! il n'a pas l'air bien méchant. Non ! uniquement un être heureux de voir les
autres malheureux, un bon petit diable qui vous fait un croche-pied pour de rire, pour rire de
vous voir vous étaler de tout votre long, par exemple, un être si malicieux et coquin qu'il prit
l'apparence d'un tout petit problème que le roi et la reine ne purent résoudre qu'avec une bonne
et magnifique astuce (car ils étaient intelligents et savaient aisément tourner le mal par le bien,
par leur façon de faire le bien) : le roi et la reine ne pouvaient avoir d'enfant, ils étaient les
derniers représentants de leur royauté, mais Victor et Dolcia, pour l'harmonie de leur peuple
qui réclamait un successeur, décidèrent d'adopter deux garçons, l'un blanc, l'autre noir, à
l'orphelinat de Gribourg, capitale de Kandirah.

Le peuple veut un roi, il a donc été décidé qu'il y aurait deux prétendants au
trône et seule l'Oracle de la Montagne Verte révélera l'avenir de ces deux enfants royaux, la
mystérieuse magicienne Mina saura, le jour où ils la consulteront, qui des deux sera le roi ?
Pour le peuple se fût parfait : l'un des deux garçons deviendrait Monarque au
moment de la retraite de Victor, l'autre occupera la fonction de Maître de Justice. La
population de Kandirah étant à majorité blanche et noire, le choix était judicieux qu'un enfant
représente chacune des deux couleurs.
Ces petits faits, anodins et insignifiants allaient détruire Kandirah.
Au moment où je commence mon récit, les deux princes viennent de fêter leur
trentième anniversaire, frères d'adoption, frères de sang, frères de jeux, frères dans la joie et
dans la tristesse ... leur trente ans furent fêtés comme si les deux princes étaient de vrais frères
jumeaux, ils ne faisaient d'ailleurs pas attention à la différence de couleurs de peau, le noir et
le blanc se marient parfois si bien.
Une tradition dans le pays de Kandirah donne à chaque personne qui atteint sa
trentième année la possibilité de consulter l'Oracle de la Montagne Verte, une magicienne qui
vit seule, recluse dans sa maison et par son aide vous avez accès à votre avenir, vous pouvez
ainsi par ses conseils arranger votre destin, votre vie selon la paix, le bonheur de Kandirah, la
mystérieuse magicienne est l'âme et la sagesse de Kandirah.
La grande question que tout le monde se posait maintenant c'était lequel des
deux princes serait leur roi, lequel pourrait assurer la succession de leur père, car les deux
princes n'avaient pas du tout le même caractère, l'un était vif comme l'éclair, l'autre prenait le
temps de vivre, l'un était manuel, l'autre intellectuel, l'un savait vous construire tout de ses
mains, l'autre raisonnait et philosophait à tout vent, il résonnait plus son intellect que sa
raison. Seule l'Oracle pouvait départager les avis et rendre fin à l'angoissante question que
tous depuis peu débattaient à en briser l'harmonie si légendaire de Kandirah la belle.
Face à l'Oracle, les deux princes n'osaient pas se regarder, ils se sentaient
soudainement étrangers l'un à l'autre, une parcelle d'animosité s'anima face à l'adversaire. Les
deux complices d'antan, les deux frères de jadis étaient là se demandant qui serait le roi ?
Deux ennemis s'opposaient l'un à l'autre pour une seule et unique fois alors que toute leur vie
ne fût que complicité et complémentarité. Ils revoyaient leur jeunesse, ils étaient toujours à se
partager mutuellement leurs faiblesses et leurs forces pour mieux gagner sur le destin, à deux
on déplace des montagnes.
Les frères allaient enfin savoir à l'instant qui deviendrait le roi.
Mina annonça :
"Vous serez tous les deux rois, l'un de vous sera roi pendant 5 années puis
l'autre lui succédera après sa mort. Le roi sera ..."
Mina ne put terminer sa phrase, elle mourut soudainement avant de révéler
l'avenir des deux princes. Sa voix résonnait encore dans l'air, la question flottait dans le
souffle de leur haleine saccadée, ils se regardèrent suspicieusement. L'idée que le premier
allait mourir en laissant la place à l'autre les fît frémir de terreur, qui devait être le premier, qui
allait donc mourir pour l'avenir de l'autre ? Ils avaient tout partager mais pas cette mort, pas la
mort, non ils ne pouvaient pas partager la mort.
Personne ne pourrait jamais leur donner la fin de l'oracle de Mina ... elle
mourut sans descendance, elle s'était consacrée toute son existence à s'occuper des affaires des
autres, à leur annoncer ce qu'ils seraient, ce qu'ils devaient faire, mais elle ne s'était jamais
occupé d'elle, aucune famille, aucune fille pour reprendre sa place, ses oracles, sa magie, il n'y
aura personne pour achever l'oracle. Elle n'avait jamais songé à avoir une famille et s'assurer
une descendance, plus rien à s'offrir, la dernière magicienne du pays de Kandirah venait de
mourir partant avec son secret, le lourd secret qui provoqua une guerre fratricide entre les
deux princes. Chaos et Mal règnent désormais à Kandirah, chacun des habitants ayant choisi
l'un des deux camps, lui jurant fidélité à la mort et maudissant la partie opposée, que de morts,
que de guerres, que de mal pour éviter une seule mort.

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