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L'AngL’Angleterre anglo-saxonne fut partagée en de nombreux royaumes.

Les quelques
tentatives d'unification ne furent qu'éphémères. Au IXe siècle, Alfred le Grand, roi de
Wessex, réalise l'unification du Sud. Il résiste aux Danois et fonde une dynastie qui se
maintient de 871 à 1064. La conquête du duc de Normandie, Guillaume, établit une
nouvelle dynastie, qui unit Angleterre et Normandie. Son petit-fils, Henri Ier
(1100 – 1135), n'ayant pas eu de fils, désigne comme héritière sa fille Mathilde et lui fait
épouser le comte d'Anjou Geoffroy Plantagenêt. La désignation d'une femme provoque
des révoltes et ce n'est qu'en 1154 qu'Henri II, fils de Geoffroy et de Mathilde, déjà maître
de la Normandie, de l'Anjou et, par sa femme, de l'Aquitaine, est couronné roi
d'Angleterre. La révolte de l'aristocratie écarte Richard II, le dernier Plantagenêt, du trône
en 1399, et ouvre une période de crise dynastique qui dure tout au long du XV e siècle: la
maison de Lancastre et la maison d'York s'affrontent pendant la guerre des Deux-Roses.
La défaite du sanguinaire Richard III à Bosworth permet la solution de la crise et l'arrivée
des Tudors.

À partir de 1485, la dynastie des Tudors établit une nouvelle légitimité monarchique en
Angleterre. En effet, de 1485 à 1688, malgré l'intervalle de la Révolution de 1648, la
succession au trône a été réglée selon une stricte hérédité qui a amené l'union personnelle
de l'Écosse et de l'Angleterre sous le sceptre des Stuarts. La Révolution de 1688 a corrigé
le principe d'hérédité en le restreignant aux seuls princes protestants. D'où, par le jeu des
successions féminines, l'avènement de la dynastie hanovrienne de 1714 à 1837 et l'union
personnelle de la Grande-Bretagne, nom de l'Angleterre et de l'Écosse fusionnées en un
seul royaume, et du Hanovre, électorat devenu royaume en 1815. En 1837, l'avènement de
Victoria a rompu ce lien personnel et a porté la couronne anglaise dans la famille de Saxe-
Cobourg-Gotha, autre dynastie allemande. Cette dynastie règne toujours mais, pour
s'angliciser, elle a pris en 1917 le nom de Windsor. La reine Elizabeth II n'a pas pris le
nom de son mari, né prince de Grèce et de Danemark; au contraire, ce dernier a choisi le
nom anglais de Mountbatten et les enfants du couple royal s'appellent Windsor, leurs
descendants pouvant dans certains cas se faire nommer Mountbatten-Windsor. La dynastie
veut donc, au contraire de sa devancière, paraître exclusivement anglaise.

Les Plantagenêts constituaient une dynastie d'origine angevine qui régna sur l'Angleterre
de 1154 à 1399, c'est-à-dire de l'avènement d'Henri II à la déposition de Richard II et
l'accession au trône des Lancastre (en la personne d'Henri IV de Lancastre, petit-fils,
comme Richard II, d'Édouard III Plantagenêt). Les circonstances de l'avènement des
Angevins, ainsi que la dualité de leurs possessions, françaises et anglaises, ont pesé sur
toute leur histoire.

L'empire Plantagenêt

Ce fut Geoffroi V d'Anjou qui le premier porta le surnom de Plantegenêt (déformé par la
suite en Plantagenêt), sans doute à cause de son amour de la chasse et en souvenir de ses
longues randonnées dans les landes à genêt de son comté. Un mariage heureux et une
guerre de conquête ont permis aux comtes d'Anjou d'unir, au milieu du XII e siècles,
l'Angleterre et la façade occidentale du royaume de France.

Le mariage de Geoffroi et Mathilde


Vassaux du roi, les comtes d'Anjou avaient accru leur puissance au début du XIe siècle
(Foulques Nerra), connu le déclin dans la seconde moitié du siècle (Foulques le Réchin), et
repris le contrôle de leur comté au XIIe siècle, tout en donnant un souverain au royaume de
Jérusalem, Foulques (1131-1143). Le comte Geoffroi, maître de l'Anjou, de la Touraine et
d'une partie du Poitou, épousa Mathilde, fille du roi d'Angleterre et duc de Normandie
Henri Ier; ses fils étant morts, il fit reconnaître sa fille comme unique héritière; ainsi se
trouvèrent fondés les droits des Plantagenêts à la couronne anglaise.

La conquête des héritages


À la mort d'Henri Ier, en 1135, le clergé et le baronnage anglais, ignorant sa volonté,
choisissent comme roi le faible Étienne de Blois. Mathilde en Angleterre, Geoffroi en
Normandie s'efforcent de conquérir leurs héritages; Geoffroi y parvient et laisse à son fils
Henri II une vaste principauté groupant Anjou, Maine et Normandie. Celui-ci s'attaque
alors à l'Angleterre, où sa mère Mathilde n'a pu se faire reconnaître, et, à la suite d'un
accord avec Étienne de Blois, lui succède en 1154. Entre-temps, son mariage avec Aliénor
d'Aquitaine lui a apporté la Guyenne.

L'autorité monarchique d'Henri II


Au cours d'un règne sans faiblesse, Henri II restaure l'autorité monarchique et fait
accomplir aux institutions royales de grands progrès qui donnent à l'administration du
royaume une avance d'un siècle sur les autres États européens. Mais la nature même de
l'Empire angevin (royaume anglais et fiefs français qui dépendent féodalement du roi de
France) pose aux Plantagenêts une série de problèmes et entraîne des contradictions qui, à
la longue, mettent en péril l'autorité monarchique.

Le conflit avec la France


Le poids des possessions continentales dans la politique anglaise est en effet considérable.
Henri II et ses fils sont des Français. Ils ne se désintéressent pas de leur royaume, mais, par
goût, ils préfèrent vivre en France; ils sont donc étroitement tributaires des affaires
continentales (relations avec le royaume de France) et méditerranéennes (croisade de
Richard Cœur de Lion, ambitions siciliennes d'Henri III). Entraînés dans un conflit
permanent avec le roi de France, ils ont mis au service de leurs objectifs continentaux les
ressources de leur royaume. Henri II et Richard ont défendu avec succès, mais au prix fort,
leurs fiefs; au seuil du XIIIe siècle, Jean sans Terre a tout perdu excepté la Guyenne. La
tentation de reconquérir ces territoires est dès lors constante: atténuée pendant le règne de
Louis IX, avivée lorsque, au XIVe siècle, les Valois accèdent au trône de France. La guerre
de Cent Ans n'est que la reprise d'un conflit né au XIIe siècle; plus profondément, elle est
une tentative radicale de régler la question, en s'emparant de la couronne de France: tel est
le sens de la politique d'Édouard III.
Le pouvoir royal en question
La permanence et le coût du conflit avec la France ont des répercussions en Angleterre et
posent le problème des rapports du roi et de ses sujets. Sous Henri II, le roi dispose de
moyens importants: administration locale des shérifs; justice omniprésente grâce aux juges
itinérants; armée en partie féodale, mais qui fait appel aux mercenaires soldés; revenus
domaniaux considérables et revenus fiscaux procurés par l'aide financière des vassaux et
tenants en chef libres.

Cette pression constante du pouvoir royal sur la société rencontre la résistance du clergé
(affaire Thomas Becket) et de la noblesse, prompte à saisir le moindre relâchement du
pouvoir pour faire reconnaître ses droits; c'est le cas au XIII e siècle: affaibli par ses échecs,
Jean sans Terre doit accepter la Grande Charte de 1215, qui codifie les privilèges – et non
les libertés – de la noblesse et du clergé.

Le conflit avec Thomas Becket


Le conflit qui a opposé Henri II et Becket, archevêque de Canterbury et chef de l'Église
anglaise, est célèbre: il a fourni un thème inépuisable aux auteurs dramatiques. On en a fait
abusivement le conflit entre la raison d'État et Dieu; c'est plutôt le résultat du heurt de deux
ambitions. Henri II avait fait de cet ami d'enfance son chancelier. Comptant sur sa docilité,
il le pousse à l'archevêché de Canterbury en 1162. Les tentatives d'Henri II pour ramener le
clergé anglais dans la situation où il se trouvait au temps des rois normands, c'est-à-dire
dans une situation de dépendance par rapport à la monarchie, rencontrent la vive
opposition de Becket, alors que la masse du clergé est prête à un accommodement. Isolé,
en butte aux tracasseries du roi, Becket doit s'exiler en France. Rentré en 1170, il est
assassiné dans sa cathédrale. Bien que n'ayant pris aucune part au guet-apens, Henri II en
fut accusé; il dut se soumettre, en 1174, à une humiliante pénitence publique, à Avranches.
Becket fut ensuite canonisé et son souvenir resta vif dans une petite fraction de l'opinion.

Les affrontements entre le roi et les barons


Le conflit entre le roi et les barons caractérise la vie politique du royaume aux XIII e et
XIVe siècle: les barons cherchent à contrôler le pouvoir royal, le roi essaie de s'affranchir
de cette tutelle en développant, parallèlement à l'administration ordinaire, le gouvernement
de l'Hôtel (gouvernement royal). Le Parlement est le lieu privilégié des affrontements. Fort
ou victorieux (Richard Ier, Édouard Ier), le roi s'impose; faible ou maladroit (Henri III,
Édouard II), il subit.
Au XIVe siècle, les derniers Plantagenêts tentent de résoudre la contradiction qui a marqué les deux siè
histoire par la guerre contre la France; elle coûte cher, mais plaît aux barons. Grâce à ses victoires, Édouard
l'essentiel du pouvoir. Mais l'échec ne pardonne pas: Richard II, englué dans les expéditions irlandaises, est
la coalition des barons révoltés et de l'administration hostile au gouvernement de l'Hôtel. Les problèm
affronter les Plantagenêts ne sont pas pour autant réglés: ils ne le seront qu'à la fin du XV
France et la guerre civile des Deux-Roses.
Révolution modèle, la révolution anglaise ne s'est cependant pas faite sans heurts: de 1642
à 1660, les îles Britanniques ont été soumises à un déferlement de violence, ponctué d'idées
utopiques où le sectarisme le disputa à l'inspiration, où la générosité sociale des «partageux» se
heurta à la défense de la propriété. En ce sens, il y a donc bien deux révolutions, la radicale et
la modérée: l'une accouche d'une république, transmuée en dictature par Cromwell; l'autre,
sans feu ni sang, pose les jalons d'un régime tempéré. En tout, deux révolutions sans égales et
sans suite dans une histoire insulaire plus réformiste que révolutionnaire depuis maintenant
trois siècles.

Une révolution en devenir


La Réforme protestante en Angleterre s'étend sur trois siècles. Au XVI e siècle, Henri VIII
rompt avec Rome; puis, sous le règne d'Élisabeth Ire, le pays se dote d'une Église nationale à
mi-chemin de Rome et de Genève par l'Acte de suprématie (1559), ni tout à fait catholique ni
tout à fait réformée. Dans les années 1640, cet équilibre vole en éclats: on finit par abolir
l'épiscopat, tout en prônant l'épuration des doctrines et la rigueur des mœurs. La révolution est
puritaine: elle coïncide avec une vague de ferveur réformatrice.

Le puritanisme
Le puritain est un être hybride: spéculatif et homme d'action, tourmenté en son âme et assuré
de son salut; il manie avec un rare bonheur, et selon les circonstances, l'équerre et le compas.
La Bible dans une main, le glaive dans l'autre, ce protestant intrépide part à l'assaut du monde
avec audace. Le puritain de la révolution, selon une imagerie éprouvée, se voit qualifié de «tête
ronde» – sans doute du fait de la coupe de ses cheveux, ou de ce chapeau rond dont l'affublent
les caricaturistes. Son contraire, royaliste, est le «cavalier», à dessein aristocratique dans sa
mise, défenseur du trône et de l'autel.

Réforme religieuse ou révolution politique?


La révolution est religieuse: la cause royale se confond vite avec le maintien de l'Église
anglicane, la révolution avec la refonte totale des communautés. Une seule Réforme en trois
siècles: au schisme du XVIe siècle, les années médianes du XVIIe siècle superposent leur
immense espérance bafouée d'un monde conforme à la Parole; d'aucuns attendent même le
retour imminent de Jésus-Christ, tandis que certains, songeurs, se prennent à rêver à un monde
d'égalité sociale et de partage. Au XVIIIe siècle, dernier avatar de cette espérance déçue, la
Réforme s'intériorise avec le méthodisme; elle rompt avec la politique.

Ce fut bien au XVIIe siècle «la fortune de l'Angleterre, écrit Guizot, que l'esprit de foi
religieuse et l'esprit de liberté politique y régnaient ensemble». Et l'ancien ministre de Louis-
Philippe de poursuivre: «L'Angleterre entreprit en même temps les deux révolutions.»
Interprétation et choix terminologique
Deux révolutions en une seule, la politique et la religieuse, dans lesquelles on n'a longtemps
vu, en mauvaise part, qu'une Grande Rébellion – interprétation conservatrice – ou une
Réformation – vision puritaine.

Le parallélisme français

Le terme «révolution» est tard venu pour caractériser la période. Il ne s'impose pas avant le
XIXe siècle et repose sur une comparaison explicite avec la Révolution française: radicalisme
social, exécution d'un roi, proclamation d'une république, puis finalement confiscation de
l'héritage révolutionnaire par un général, ici Cromwell, là Bonaparte. Sans compter ces retours
d'exil, celui des Stuarts en 1660, celui des Bourbons en 1814-1815, qui closent la période. Si,
de 1642 à 1660, l'Angleterre expérimente bien un total bouleversement, cette révolution s'est
vu qualifiée diversement. Révolution bourgeoise? Révolution puritaine? Voire révolution
anglaise? Aucune de ces épithètes n'emporte une totale adhésion.

Révolution bourgeoise ou puritaine?

La révolution bourgeoise supposerait un changement économique, à bien des égards


indémontrable. De plus, le conflit entre le roi et le Parlement ne met pas aux prises des classes
sociales différentes. «Révolution puritaine» paraît plus acceptable si l'on se garde d'interpréter
l'événement en termes uniquement religieux. «Révolution anglaise» n'est pas moins inexact
quand on prend en compte l'ampleur du phénomène, qui s'étend à l'ensemble des îles
Britanniques. Une révolte écossaise contre Charles Ier met le feu aux poudres, une insurrection
irlandaise et la grande peur qui s'ensuit rythment l'événement. Enfin, la pacification des trois
royaumes, d'Angleterre, d'Écosse et d'Irlande, sera le fondement de l'ascendant cromwellien.
On parlera donc de «révolution d'Angleterre» pour aborder un phénomène qui ne se limite pas
géographiquement à un seul royaume. Cette dernière a surtout réalisé l'unité des îles
Britanniques au profit du plus peuplé de ses territoires.

La première révolution (1642-1660)


Vers l'unification des royaumes
Le «Bref Parlement» (1640)

Jacques VI d'Écosse gravit en 1603 les degrés du trône d'Angleterre et prend désormais le titre
de Jacques Ier d'Angleterre. Il rêve à l'union des trois royaumes, qu'il ne parvient pas à imposer.
Son fils Charles Ier poursuit la tâche entreprise: en 1637, les Écossais (presbytériens) se
révoltent contre la liturgie (anglicane) qu'on leur prescrit. Depuis 1629, Charles Ier régnait sans
convoquer le Parlement. La guerre avec l'Écosse va précipiter les choses: une première
Assemblée se réunit le 13 avril 1640; elle ne siège que quelques semaines, et se contente de
rappeler avec fracas ses «libertés» et ses privilèges bafoués. Le souverain n'en a cure et renvoie
les députés (5 mai).
Le «Long Parlement» (1640-1653)

Mais ce «Bref Parlement» – Short Parliament – est suivi, à quelques mois d'intervalle, d'un
«Long Parlement» – Long Parliament –, qui siège jusqu'en 1653, au travers de tous les aléas
d'une période troublée. Ce dernier est celui de la révolution.
La volonté réformatrice est immense: l'on s'en prend à la fiscalité, à la justice, à l'Église même,
jugée encore trop catholique dans ses rites ou dans sa doctrine. En novembre 1641, plusieurs
protestants sont massacrés en Irlande: l'indignation est à son comble. On envoie au roi une
Grande Remontrance, qui appelle dans un même souffle à châtier papistes et libertins, et à
honorer les puritains, qui «désirent préserver les lois et les libertés du royaume, et maintenir la
religion sous l'emprise du pays».

La première guerre civile (1642-1646)


En janvier 1642, Charles Ier décrète l'arrestation de six parlementaires, dont Pym et Hampden.
Mais il doit lui-même s'enfuir de Londres. Après plusieurs mois de silence, le 18 juin, le
souverain tente une manœuvre de la dernière chance en prêchant la concorde: la monarchie,
l'aristocratie, la démocratie doivent se compléter dans l'État, assène-t-il. Mais c'est peine
perdue. En août, Charles Ier lève son étendard, en octobre a lieu la première grande bataille de
la guerre civile à Edgehill.

L'émergence de Cromwell

Les royalistes jouissent de l'avantage de la mobilité que leur procure une cavalerie supérieure
en nombre et en adresse. Parce qu'il aime les chevaux et qu'il sait commander aux hommes, un
quadragénaire rougeaud, à la foi impeccable, se hisse à la première place dans l'armée
parlementaire: Oliver Cromwell. Celui-ci, né en 1599, n'a connu jusqu'alors qu'une destinée
obscure. Mais il va doter les puritains d'une remarquable cavalerie. De Marston Moor
(juillet 1644) à Naseby (juin 1645), Cromwell administre à ses ennemis, comme à ses amis, la
preuve de son talent.

Les indépendants

L'Église, pendant ce temps-là, se réforme. Du moins, elle essaie. Les théologiens se réunissent
à Westminster en 1643: les débats ne portent pas tant sur la doctrine que sur l'organisation de
l'Église. Une poignée d'indépendants se détachent: ils prêchent l'indépendance des
congrégations et se méfient du centralisme des presbytériens, adeptes d'une Église nationale
fortement contrôlée. Les indépendants mettent, pour leur part, l'accent sur la conscience de
chaque croyant. Le redouté Cromwell sera lui aussi un indépendant, adepte de la liberté de
conscience. Singulier paradoxe, chez ce militaire épris d'autorité.

La seconde guerre civile (1648-1651)


La première guerre civile s'achève sans que l'on trouve la moindre issue politique ou religieuse.
Cet attentisme inquiète. L'armée se révolte en 1647. Les hommes demandent les arrérages de
leurs soldes et échafaudent mille projets. À l'automne, un gigantesque débat s'engage: on ne
tarde pas à qualifier de «niveleurs» ces «partageux» qui souhaitent en finir avec les inégalités
de fortune et de condition.
Une deuxième guerre civile se déroule en 1648. Cromwell écrase les Écossais, alliés du roi, le
17 août à Preston, dans le Lancashire. Mais que faire de ce roi vaincu? Comment apaiser
l'armée? Quelle attitude adopter face au Parlement qui s'aperçoit de plus en plus que le destin
de «sa» révolution lui échappe? Cromwell sera l'homme de la situation. Il a su se tailler au
combat une réputation d'intrépidité qui convainc les hommes; son élocution malhabile fait le
reste: on ne sait jamais ce qu'il pense, ni s'il pense vraiment. Les radicaux se tournent vers lui.
Il les rassure, il saura les réprimer par la suite.

Naissance d'une République

La fin de Charles Ier

Le sang du roi va sceller la nouvelle alliance. Charles Ier est exécuté le 30 janvier 1649
(1er février selon le calendrier en usage sur le continent). Cette mort succède à un procès qui
permet à un peuple, par procuration, de juger d'un roi. Charles Stuart échange, dans la mort,
une «couronne périssable» contre une «couronne incorruptible». Les royalistes ont le sens du
martyre; ils vouent au souverain mort un culte qu'ils ne pouvaient lui rendre de son vivant. Le
pays est exsangue, assoiffé de légitimité, en un temps où l'on ne pouvait rendre la justice qu'au
nom du roi.

La pacification de l'Irlande

La république remplit ce vide: elle est proclamée en mai, alors même que Cromwell, contrit,
fait couler le sang des niveleurs. En septembre, le massacre de Drogheda, en Irlande, offre
enfin aux Anglais quelques motifs de diversion. Dieu, conclut Cromwell à part soi, «condamne
justement les pauvres imbéciles qui ont trempé leurs mains dans tant de sang innocent». Ce
requiem pour quelques Irlandais perdus se répète en octobre à Wexford, dans le sud de l'île.
Mais l'on ne pacifiera l'Irlande que par des mesures radicales: expropriation des terres,
déportation de populations sont les pièces fortes d'un arsenal répressif qui équivaut à une
authentique «révocation agraire», selon l'expression d'Emmanuel Le Roy Ladurie.

La chute de l'Écosse

Les Écossais persistent dans leur lutte contre les Anglais, et le 3 septembre 1650 ces derniers
écrasent à Dunbar leurs remuants voisins, non sans entonner le psaume 117: «Louez l'Éternel,
vous toutes les nations.» La victoire ne sera cependant totale que le 3 septembre 1651, à
Worcester. Souhaitée par la monarchie, réalisée par la république, l'unification des îles
Britanniques s'accompagne d'un formidable tonus commercial. Un Acte de navigation
protectionniste d'octobre 1651 inquiète durablement les Hollandais. Ce sera la guerre de 1652
à 1654.

Cromwell, «Lord Protector» (1653-1658)

Le pays a besoin d'un pouvoir fort. Le 16 décembre 1653, Cromwell prête serment à
l'«Instrument de gouvernement», seule Constitution écrite de l'histoire insulaire. Le Lord
Protector est devenu respectable; il traite avec les rois. Sur le plan intérieur, renouant avec
l'usage monarchique, Cromwell convoque un premier Parlement du protectorat en 1654, puis
un second en 1656. Les relations entre le dictateur et l'Assemblée sont toujours très tendues.
Les parlementaires, sélectionnés avec soin, sont les défenseurs d'un ordre moral puritain,
souvent intransigeant, appliqué à traquer et à punir tous les déviants: blasphémateurs,
fornicateurs, personnes adultères sont les cibles toutes désignées d'un ordre moral, aussi
pointilleux qu'inefficace.
La révolution a vécu. Il ne reste plus d'autre espérance que spirituelle. À une première vague,
très sociale, de radicalisme réprimée par Cromwell succède dans les années 1650 un courant
inspiré, le mouvement quaker, adepte du tutoiement, de la non-violence et du non-paiement de
la dîme ecclésiastique. Des chrétiens sans pasteurs et sans sacrements qui, à l'idolâtrie du
pouvoir qu'on leur propose, ne répondent plus qu'en évoquant le Christ intérieur, enfoui dans le
cœur de chaque croyant.
Les Anglais, cependant, font des affaires. Ils concurrencent les Hollandais, s'en prennent à
l'Espagne – à laquelle ils ravissent en 1655 la Jamaïque. Mazarin se félicite. Une alliance
offensive avec la France est conclue en mars 1657. Cromwell décline la couronne quelques
semaines plus tard, mais accepte sa solennelle investiture. Tandis que les troupes franco-
anglaises célèbrent leurs victoires sur les Espagnols, le Lord Protector s'éteint en
septembre 1658. Son fils, Richard, lui succède.

La Glorieuse Révolution (1688-1689)


Contrairement à son aînée, qui se prolongea pendant vingt ans, la Glorieuse Révolution ne dura
que quelques mois. Voltaire devait commenter, laconique: «Le malheureux Jacques II [...]
perdit son royaume sans qu'on pût dire comment la chose arriva.»

La restauration des Stuarts


Vingt-huit ans plus tôt, en 1660, une foule en liesse avait pourtant célébré le retour des Stuarts.
On déterra les restes de Cromwell pour les pendre, on exécuta pour la forme quelques
régicides... Le pays évita soigneusement toute terreur blanche. Même Milton, un temps
secrétaire de Cromwell, put méditer sur le Paradis perdu et sur la chute des révolutions en ce
bas monde.
Sous le règne de Charles II (1660-1685)
Charles II, homme de plaisirs, était catholique au fond de son cœur: il se convertit sur son lit
de mort. Son frère Jacques II, qui lui succéda en 1685, professait ostensiblement la «vieille
religion», ce qui lui valut de perdre son trône.
Un roi catholique pour un peuple protestant: cela tenait de la gageure. L'année 1685 fut assez
sombre: Monmouth, fils bâtard de Charles II, débarque dans l'ouest du pays, où il dirige une
insurrection qui se termine dans le sang. Comme si cela ne suffisait pas, Louis XIV révoque en
octobre l'édit de Nantes, qui garantissait l'existence légale de ses sujets protestants,
appartenant, comme l'on disait à l'époque, à la RPR, la «religion prétendue réformée».
Jacques II en recueillit tout le discrédit. Comment prouver désormais que la coexistence
pacifique entre catholiques et protestants n'est pas une chimère? La Glorieuse Révolution naît
en partie de la honteuse révocation. Elle en est la réciproque inversée: Louis XIV, catholique,
révoque les privilèges de ses sujets protestants, tandis qu'outre-Manche les protestants
révoqueront leur roi catholique.
Jacques II, le bouc émissaire
Un pays divisé

Jacques II a eu un mérite essentiel: il a réalisé la quasi-unanimité du pays... contre lui. Rien ne


garantissait au départ la bonne entente des divers courants issus de la Réforme: une Église
établie, fidèle à sa confession de foi anglicane et à la hiérarchie épiscopale, toisait avec mépris
une importante minorité de non-conformistes, presbytériens, indépendants, baptistes ou
quakers, qu'elle considérait comme une poignée de républicains séditieux et de fanatiques
sectaires. Les catholiques, largement majoritaires dans le royaume d'Irlande, ne sont qu'une
poignée en Angleterre, environ 60 000 sur une population évaluée à un peu moins de
5 millions d'habitants, soit autour de 1 %. Anglicans, presbytériens et baptistes ou
indépendants avaient au moins en commun leur appréhension de la menace «papiste» – ainsi
que l'on qualifie alors les catholiques. Ce papiste est, du reste, l'un de ces boucs émissaires ou
de ces souffre-douleur que s'inventent périodiquement les sociétés en mal de consensus. Entre
le papiste réel et celui de l'imagerie populaire existe un véritable gouffre, creusé par la
fantasmagorie protestante. De paisibles gentlemen, de robustes artisans sont suspectés de
dissimuler en leur sein les légions de l'Antéchrist, prêtes à fondre sur les honnêtes Anglais pour
les égorger durant leur sommeil ou incendier leurs maisons.

L'Angleterre, donc, n'avait jamais été aussi divisée. Jacques II, comme Charles II avant lui,
tente d'imposer à ses peuples une politique d'indulgence. Le terme est à retenir, car il
correspond à la liberté de conscience garantie par l'arbitraire, ou du moins par ce bon plaisir du
roi perçu comme arbitraire par les contemporains outre-Manche. L'indulgence suppose une
exception juridique: la non-application d'une loi discriminatoire envers tous ceux, catholiques
ou protestants, qui ne se rallient pas à l'Église établie.

Une Déclaration d'indulgence

Jacques II, le 4 avril 1687, promeut une Déclaration d'indulgence, dans laquelle il avoue
benoîtement: premièrement, son attachement à la religion catholique («Nous souhaiterions que
tous nos sujets fussent membres de l'Église catholique»); deuxièmement, sa volonté d'en finir
avec les persécutions («Il ne faut pas contraindre les consciences»). Il s'agit, en fait, d'en
terminer avec le monopole ecclésiastique anglican. Même si l'Église d'Angleterre demeure la
seule établie, on ne peut plus être poursuivi pour ne pas avoir respecté ses rites. L'indulgence
est, littéralement, une mesure de bienveillance ou d'équanimité envers les non-conformistes. La
clémence d'Auguste reçoit un accueil mitigé: pendant un an, cependant, des messages d'espoir
affluent de l'ensemble du pays. Les presbytériens de la capitale adressent, dès le 29 avril, leurs
remerciements au roi qui «restaure l'empire de Dieu sur les consciences». La politique de
Jacques II finit cependant par échouer. Le 27 avril 1688, un an plus tard, le roi renouvelle sa
Déclaration, et le 4 mai il ordonne que le texte en soit lu dans toutes les paroisses du royaume.
Sept évêques, dont Sancroft, primat d'Angleterre, se dérobent à l'injonction. Jacques II
n'accepte pas leur insubordination: mis en accusation, les sept prélats sont acquittés fin mai. La
crosse et la mitre l'emporteraient-elles sur le sceptre et la couronne? Jacques II a échoué: une
mesure d'apaisement se transforme en son contraire. L'anticatholicisme est à son comble: au
milieu des toasts portés aux évêques anglicans, on brûle le pape en effigie.

Naissance d'un fils


Un nouvel événement survient alors. Le 10 juin, Jacques II a un fils. Dieu a entendu sa prière:
le catholicisme anglais est désormais assuré de la pérennité dynastique. L'opinion protestante,
inquiète, laisse percer ses doutes sur la réalité d'une naissance qui contrarie autant ses projets.
Une légende se fait jour: l'enfant a été apporté à la dérobée dans une bassinoire, et glissé auprès
de la reine pour laisser penser à un accouchement. Avec causticité, on se gausse de cette
naissance miraculeuse, non sans égratigner au passage le dogme catholique de la virginité
mariale: «Dans sa conception miraculeuse, la mère de Dieu l'a manifestement secourue.»

Une révolution dans la paix


Guillaume d'Orange
Le 30 juin, Guillaume d'Orange, gendre de Jacques II, est exhorté par plusieurs notabilités
d'intervenir directement dans les affaires insulaires. Le 10 octobre (le 30 septembre d'après le
calendrier en usage outre-Manche), il s'adresse, depuis les Pays-Bas, aux Anglais qu'il souhaite
aider: «La paix publique et le bonheur d'un État ou d'un royaume sont en danger dès lors que
les lois, les libertés et les coutumes établies par l'autorité légale sont ouvertement bafouées ou
transgressées, particulièrement lorsque l'on tente de subvertir la religion pour introduire une
autre religion, contraire à la loi.»
Le 5 novembre, Guillaume débarque dans l'ouest du pays, afin de voler, proclame-t-il, au
secours de la religion protestante et des libertés parlementaires. Puis il se dirige vers Londres;
en fin tacticien, il souhaite mettre Jacques II en échec sans carnage inutile. Le roi, trahi, est de
plus en plus délaissé par les siens. John Churchill, un ancêtre de sir Winston, abandonne son
roi en lui demandant avec bonté de considérer sa trahison sans excessive malveillance.

La Déclaration des droits (février 1689)


Un mois plus tard, à la veille de Noël, Jacques II s'enfuit à jamais de son royaume perdu.
Guillaume d'Orange aura ainsi évité de transformer 1688 en une réplique de 1649. Jacques II est
moins dangereux, dans son royal exil à Saint-Germain-en-Laye, que s'il était resté pour affronter
ses bourreaux. La révolution emprunte alors, tout naturellement, la voie d'une restauration.
Comme en 1660, une convention se réunit. Les parlementaires élaborent un texte célèbre entre
tous, la Déclaration des droits, le 13 février 1689, qui devient le fondement de la séparation des
pouvoirs exécutif et législatif. La révolution est terminée. Jacques II ayant «abdiqué», le trône
«vacant» est confié à Guillaume et à Marie, conjointement roi (Guillaume III) et reine
(Marie II) d'Angleterre, d'Écosse et d'Irlande; mais il reste à asseoir pleinement la légitimité de
ce nouveau régime.

La famille royale de Hanovre remonte à Welfe, comte en Souabe et en Bavière, mort en 825.
Un de ses descendants, Ernest-Auguste, duc de Brunswick-Lüneburg, devient Électeur de Hanovre
en 1692, puis roi d'Angleterre à la suite de son mariage avec la petite-fille de Jacques Ier Stuart; il
acquiert de ce fait des droits au trône britannique pour la maison des Hanovre. De 1714 à 1837, les
Hanovre régneront conjointement sur l'État de Hanovre et sur l'Angleterre; en 1837, à l'avènement de
la reine Victoria, les deux couronnes seront séparées, car les femmes ne peuvent pas régner sur le
Hanovre.

George Ier
Il est né à Hanovre en 1660. Électeur de Hanovre en 1698, il devient roi d'Angleterre en 1714 en
vertu de l'Acte d'établissement de 1701. Avant tout Hanovrien et Allemand – il ne parlait pas
l'anglais – il laissa les whigs, Stanhope d'abord, Walpole ensuite, gouverner le pays. Il meurt près de
Hanovre en 1727.

George II
Fils du précédent, il naît à Herrenhausen en 1683. Roi d'Angleterre en 1727, il abandonne le
gouvernement intérieur à la reine Caroline et aux ministres Walpole, Newcastle et Pitt. En fait, le
pouvoir appartient au Parlement, qui l'exerçe au moyen du Cabinet. Un vote de défiance des
Communes à l'égard du Cabinet et son remplacement par les chefs de parti qui l'avaient fait tomber
annonceront la naissance du régime parlementaire. George II est mort à Kensington en 1760.

George III
Fils du prince de Galles, Frédéric, qui mourra en 1751, il est né à Londres en 1738. Il devient roi
d'Angleterre à la mort de son grand-père George II, en 1760. Son long règne, un des plus importants
de l'histoire de l'Angleterre, a été marqué, à l'intérieur, par d'importantes mutations économiques,
sociales et religieuses et, à l'extérieur, par la guerre d'Amérique et les guerres contre la France
révolutionnaire et l'Empire napoléonien. George III est mort à Windsor en 1820.

George IV
Fils de George III, il est né à Londres en 1762. Il est régent en 1811, puis roi d'Angleterre en 1820.
Le gouvernement du Cabinet s'est accentué sous son règne, servi par de grands ministres:
Castlereagh, Canning, Peel, Wellington. George IV est mort à Windsor en 1830

Guillaume IV
Il est le frère de George IV. Né à Londres en 1765, devenu roi d'Angleterre en 1830, il laissera
s'accomplir de grandes réformes: réforme électorale (1832), abolition de l'esclavage (1833),
diminution de la journée de travail. Guillaume IV meurt à Windsor en 1837.

Victoria Ire
Petite-fille de George III, elle naît à Londres en 1819 et accède au trône à dix-huit ans, après la mort
de son oncle Guillaume IV; elle sera reine de Grande-Bretagne et d'Irlande de 1837 à 1901, et
impératrice des Indes à partir de 1876. Son règne fut le plus long de l'histoire d'Angleterre et
correspondit à l'apogée de la puissance du pays.
Malgré son inexpérience politique, la reine Victoria se montre dès le début respectueuse des règles
du régime parlementaire, mais s'efforce de toujours faire prévaloir ses vues, surtout en matière de
politique étrangère. Elle épouse en 1840 son cousin, le prince Albert de Saxe-Cobourg-Gotha, qui est
pour elle un excellent conseiller. Par la conscience élevée qu'elle a de ses devoirs, elle confère à la
monarchie britannique un prestige qui va assurer la continuité de l'institution au XXe siècle, alors que
les bouleversements de l'histoire balaieront la plupart des trônes.
À partir de 1867, conservateurs et libéraux alternent régulièrement au pouvoir, avec deux grands
Premiers ministres: Gladstone et Disraeli. Si Victoria n'a pas de sympathie pour le premier, elle a
beaucoup d'affection pour le second, qui la fait proclamer impératrice des Indes.
La souveraine jouit jusqu'à la fin de son règne d'une immense popularité; après sa mort à Osborne,
dans l'île de Wight, en 1901, son fils Édouard VII lui succédera.
Déchue au Hanovre en 1866, la dynastie – qui prend le nom de Windsor en 1917 – règne toujours
sur la Grande-Bretagne.

La famille royale des Stuarts régna sur l'Écosse de 1371 à 1714, et, conjointement, sur l'Angleterre
de 1603 à 1714. Elle s'éteignit en 1788 à la mort, sans postérité, de Charles Édouard, dit le Jeune
Prétendant, petit-fils de Jacques II d'Angleterre.

C'est au XIIe siècle qu'un Fitzalain, noble d'origine normande, alla se mettre au service du roi
d'Écosse, dont il reçut le titre de stewart (sénéchal), qui allait devenir le patronyme de la famille
jusqu'en 1542. L'un des descendants de Fitzalain épousa, en 1315, la fille du roi d'Écosse Robert Ier
Bruce, et son fils devint roi en 1371; il fut le fondateur de la dynastie. À la mort sans enfant
d'Elizabeth Ire Tudor (1603), les Stuarts devinrent roi d'Angleterre en la personne de Jacques VI
d'Écosse (Jacques Ier d'Angleterre), car son arrière-grand-mère Margaret, épouse de Jacques IV
Stuart, était la fille de Henri VII Tudor.

Marie Stuart
Marie Ire Stuart (1542-1587), petite-fille de Jacques IV, était la fille de Marie de Guise et de
Jacques V. Née une semaine avant la mort de son père, elle régna sous la régence de sa mère, qui lui
fit épouser, en 1558, le dauphin de France, le futur François II; élevée à la cour des Valois, elle y
reçut une brillante éducation.

Les remariages
La mort de François II (1560) fit rentrer Marie en Écosse, qu'elle trouva en pleine effervescence
religieuse, le calviniste John Knox y faisant triompher le presbytérianisme. Marie, qui était restée
catholique, dut, dans ces conditions, montrer beaucoup de souplesse. Elle se remaria en 1565 avec
un Écossais, son cousin Henry Stuart, lord Darnley, mais ils se brouillèrent très vite, Marie refusant
à Darnley le partage du pouvoir. Ce dernier ayant fait assassiner le favori de la reine, l'Italien Rizzio
(1566), il fut à son tour assassiné l'année suivante par le nouveau favori, le comte de Bothwell, avec
qui Marie se remariait trois mois plus tard.
De l'abdication au billot
L'union avec le comte de Bothwell fit scandale chez les catholiques (le mariage avait été célébré
selon le rite protestant) et chez les protestants; une révolte de nobles eut raison de la reine, contrainte
d'abdiquer en faveur de son fils Jacques VI (1567). Marie alla chercher refuge auprès de la reine
d'Angleterre Elizabeth; mais celle-ci s'en méfiait en raison des droits de Marie à la couronne
anglaise et de l'agitation des catholiques, encore nombreux en Angleterre. Elizabeth la garda
prisonnière pendant dix-huit ans; toutes les tentatives pour la délivrer furent vouées à l'échec et, à la
suite d'un dernier complot, Marie fut jugée, condamnée à mort et exécutée à la hache.

Jacques Ier d'Angleterre


Le fils de Marie Stuart, Jacques VI (1566-1625), devint roi d'Angleterre en 1603 sous le nom de
Jacques Ier; il restait cependant roi d'Écosse. C'était un homme très intelligent et très instruit, féru de
théologie, qui avait le goût des sciences et de la poésie. Il écrivit plusieurs ouvrages où il exposait
ses théories absolutistes. Mais il était de caractère faible, sans prestige physique; poltron et menteur,
il avait des tendances homosexuelles qui le guidaient dans le choix de ses conseillers: ainsi Robert
Carr ou George Villiers qu'il fit duc de Buckingham.

Le problème catholique
La Conspiration des poudres (1605), tentative avortée des catholiques pour renverser le roi et le
Parlement, allait précipiter la répression contre les catholiques, dont l'influence ne cessa dès lors de
diminuer. C'est pourquoi la politique étrangère de Jacques Ier (non-intervention aux côtés des
protestants lors de la guerre de Trente Ans, mariage de son fils avec Henriette de France, recherche
de l'alliance espagnole) exaspéra la grande majorité des Anglais. Il ne sut pas non plus établir des
finances saines, augmentant au contraire fortement le déficit laissé par Elizabeth Ire. Vers la fin de sa
vie, il laissa gouverner Buckingham, dont l'incompétence politique était flagrante et qui apparut aux
yeux de l'Angleterre comme le symbole de l'arbitraire royal.
La succession
La cousine de Jacques, Arabella Stuart (1575-1615), avait des droits sur la couronne anglaise; son
mariage avec William Seymour (1610), descendant de Henri VII Tudor, les renforçait. Le roi la fit
emprisonner à la Tour de Londres où elle mourut folle.

La révolution allait éclater sous le règne du fils de Jacques Ier, Charles Ier, qui mourut sur l'échafaud.
Après un bref intermède républicain (1649-1660), Charles II, fils de Charles Ier, monta sur le trône
en 1660 et son frère Jacques II lui succéda en 1685.

L'avènement des Hanovre


La seconde révolution anglaise mit sur le trône, en 1688, Marie (1662-1695), fille de Jacques II,
protestante et femme du stathouder de Hollande, Guillaume d'Orange-Nassau. À la mort de
Guillaume (1702), Anne (1665-1714), sœur de Marie, devint reine; elle avait épousé le prince
Georges, frère du roi de Danemark. Sous son règne fut réalisée l'union organique de l'Angleterre et
de l'Écosse, et l'on prit l'habitude de choisir les membres du gouvernement dans le parti vainqueur
aux élections (tory ou whig).
Les règnes de Marie et d'Anne furent marqués par une profonde évolution de la politique extérieure
britannique: l'Angleterre s'engagea fermement dans le camp protestant lors des guerres qui
marquèrent la fin du règne de Louis XIV (guerres de la Ligue d'Augsbourg et de la Succession
d'Espagne). Anne étant morte sans enfant, et l'Acte d'établissement (1701) réservant la couronne au
plus proche parent protestant de la reine Anne, Jacques Édouard Stuart (1688-1766), catholique, fut
exclu de la succession au trône. La couronne passa donc à la maison protestante des Hanovre,
descendants des Stuarts par les femmes; le premier roi fut George Ier.

L'exti Action des Stuarts


Au XVIIIe siècle, les Stuarts firent plusieurs tentatives pour reprendre la couronne anglaise: Jacques
Édouard, dit «le Chevalier de Saint-George», que Louis XIV avait reconnu sous le nom de
Jacques III, ainsi que son fils, Charles Édouard (1720-1788), dit «le Jeune Prétendant» ou «le comte
d'Albany», encouragés par la France, débarquèrent plusieurs fois en Grande-Bretagne mais ne
réussirent jamais à s'établir durablement dans le pays ni à ébranler le trône.
Après la guerre de Succession d'Autriche, ils s'installèrent en Italie. La branche s'éteignit en 1807,
avec Henri Benedict dit «le cardinal d'York», deuxième fils de Jacques Édouard, qui fut surtout un
homme d'Église.

La famille des Tudors, qui régna sur l'Angleterre de 1485 à 1603, était originaire du pays de
Galles. Du mariage d'Owen Tudor avec Catherine de Valois, la veuve du roi Henri V, naquit un
fils, Edmond Tudor, qui épousa Margaret Beaufort (Marguerite de Lancastre), descendante de
Jean de Gand, père du roi Henri IV.

Henri VII
La guerre des Deux-Roses
Dans la guerre des Deux-Roses, les Tudors avaient pris le parti des Lancastres, ce qui valut à
Owen Tudor d'être décapité en 1461 sur l'ordre du duc d'York. Le fils d'Edmond, Henri (1457-
1509), qui s'était réfugié en Bretagne, débarqua en 1485 au pays de Galles. Il leva une armée
avec laquelle il livra bataille au roi Richard III, qui fut tué au combat. Henri Tudor devint roi
en 1485 sous le nom de Henri VII et, par son mariage avec Élisabeth d'York, la fille
d'Édouard IV, il réconcilia les deux familles des Yorks et des Lancastres, fondant ainsi une
nouvelle dynastie.

La reprise en main du royaume


Henri réussit à rétablir l'ordre dans le royaume, réduisit la puissance des nobles en renforçant la
législation qui interdisait les armées privées et en donnant au tribunal de la Star Chamber (la
Chambre étoilée) une compétence accrue. Sage administrateur et homme d'État énergique, il
rétablit l'économie britannique, encouragea le commerce et la navigation: c'est sous son règne
que les premiers navigateurs anglais débarquèrent sur la côte d'Amérique du Nord. Sa fille
Marguerite avait épousé le roi d'Écosse Jacques IV Stuart et fut ainsi à l'origine de l'accession
des Stuarts au trône d'Angleterre. Son fils Henri VIII (1491-1547) lui succéda.
Marie Ire
Édouard VI (1537-1553) devint roi à la mort de son père Henri VIII (1547). Il était le fils de
Henri VIII et de sa troisième femme, Jeanne Seymour. Son règne fut marqué par
l'affermissement de la réforme protestante en Angleterre.

L'accession au trône
Édouard VI mourut à seize ans et sa sœur, Marie Ire (1516-1558), fille de Henri VIII et de sa
première épouse Catherine d'Aragon, lui succéda. Élevée dans la religion catholique elle subit
dans sa jeunesse, de nombreuses humiliations, qui l'aigrirent considérablement. D'abord écartée
de la succession au trône par son père, elle ne fut rétablie dans ses droits qu'en 1546, mais
derrière son demi-frère Édouard. Pour monter sur le trône, elle dut éliminer une rivale
protestante, sa cousine Jeanne Grey, que soutenait le duc de Northumberland. Peu après, elle se
mariait avec le futur Philippe II d'Espagne.

«Marie la Sanglante»
Elle abolit l'Église anglicane, rétablit l'autorité du pape et des tribunaux ecclésiastiques qui
jugeaient de l'hérésie. Les persécutions contre les protestants furent rudes: plus de trois cents
bûchers s'allumèrent et Marie reçut le surnom de «Marie la Sanglante». Elle s'aliéna
définitivement ses sujets en 1558 quand, s'étant alliée à l'Espagne contre la France, l'Angleterre
perdit Calais, sa dernière possession sur le continent. Marie mourut peu après sans enfant et sa
sœur, Élisabeth, fille de Henri VIII et d'Anne Boleyn, lui succéda.

Élisabeth Ire (1603), qui fut sans doute le plus grand monarque anglais, mourut sans enfants. La
couronne passa aux Stuarts, descendants des Tudors par les femmes.

(Westminster, 1239 — Burgh by Sands, près de Carlisle, 1307). Roi d'Angleterre (1272-1307).
Fils de Henri III, il redressa avec énergie le pouvoir royal que la Grande Charte avait amoindri. Il
soumit le pays de Galles (1283), mais ne réussit pas à assujettir durablement l'Écosse. Il fut longtemps
en lutte contre le roi de France, Philippe le Bel, pour la défense de ses domaines aquitains.

Édouard II (Caernarvon, 1284 — Berkeley, Gloucestershire, 1327). Roi d'Angleterre (1307-1327).


Fils d'Édouard Ier et gendre de Philippe IV le Bel, il laissa gouverner ses favoris, Hugh le Despenser et
son fils. Son règne fut marqué par un net déclin de la puissance royale et la perte de l'Écosse (1314).
Édouard devait être déposé à la suite d'une révolte des barons suscitée par sa propre femme, Isabelle de
France. Celle-ci le fit assassiner peu après.

Édouard III (Windsor, 1312 — Sheen, Richemond, 1377). Roi d'Angleterre (1327-1377).
Fils et successeur d'Édouard II, il se débarrassa, en 1330, de la tutelle de sa mère. Il fit valoir, en 1337,
ses droits à la couronne de France, déclenchant ainsi la guerre de Cent Ans. Il détruisit une partie de la
flotte française, puis vainquit les Français à Crécy (1346), à Calais (1347) et à Poitiers (1356). Le traité
de Brétigny (1360) lui donna, en échange de sa renonciation à la couronne de France, tout le sud-ouest
de ce pays. Mais, la fin de son long règne fut marquée par les revers subis devant Du Guesclin, par la
mort de son fils aîné, par des divisions internes et par la peste noire.

Édouard IV (Rouen, 1442 — Westminster, 1483). Roi d'Angleterre (1461-1483).


Fils de Richard d'York, il poursuivit la lutte contre la maison de Lancastre, à laquelle il infligea une
grave défaite en 1471. Après avoir essayé de relancer la guerre contre la France, il accepta de signer
avec Louis XI le traité de Picquigny (1475), qui mettait un terme définitif à la guerre de Cent Ans.

Édouard V (Westminster, 1470 — tour de Londres, 1483). Roi d'Angleterre (1483).


Fils d'Édouard IV auquel il succéda à l'âge de douze ans, il fut assassiné, ainsi que son frère cadet, par
leur oncle Richard de Gloucester, régent, qui devint ainsi roi sous le nom de Richard III.

Édouard VI (Hampton Court, 1537 — Greenwich, 1553). Roi d'Angleterre et d'Irlande (1547-1553).
Fils de Henri VIII et de Jeanne Seymour, il régna sous la tutelle du duc de Somerset, puis sous celle du
duc de Northumberland. Son règne fut marqué par les progrès de la Réforme, qui prit en Angleterre une
coloration plus ou moins calviniste.

Édouard VII (Londres, 1841 — id., 1910). Roi de Grande-Bretagne et d'Irlande (1901-1910).
Fils de la reine Victoria, écarté des affaires jusqu'à la mort de sa mère, il mena une vie oisive. Après son
accession au trône, il exerça une influence non négligeable en politique étrangère et favorisa,
notamment, la réalisation de l'Entente cordiale (1904).

Édouard VIII (Richmond, 1894 — Paris, 1972). Roi de Grande-Bretagne et d'Irlande (1936).
Fils aîné de George V, à qui il succéda, il fut contraint d'abdiquer, l'année de son couronnement (1936),
devant l'opposition du gouvernement et de l'épiscopat à son projet de mariage avec une Américaine
divorcée, Mrs. Simpson. En 1937, il prit le titre de duc de Windsor, épousa Mrs Simpson et fut
remplacé sur le trône par son frère, George VI. Après son mariage, il effectua un voyage en Allemagne
où il fut reçu par Hitler. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les nazis songèrent à lui offrir la
couronne de Grande-Bretagne, en cas de succès de l'invasion de l'île par l'armée allemande. Pour mettre
fin à ces manœuvres, Winston Churchill l'envoya aux Bahamas en tant que Gouverneur. Il y resta
jusqu'à la fin du conflit et se retira par la suite en France.

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