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Disponible sous forme liquide, facile à utiliser, le pétrole est devenu l’énergie
la plus courante, l’« or noir » du XXe siècle. Mais il a toujours été clair qu’il
s’épuiserait un jour. Comme personne ne savait vraiment quand, le problème a été
mis de côté. L’humeur alarmiste qui règne aujourd’hui parmi les chefs d’Etat
montre qu’ils géraient la question à la petite semaine, alors que continuait de
croître notre dépendance à cette ressource sur le déclin.
Ces coûts croissants rendent le piège énergétique toujours plus dangereux. Obligés
d’acheter aux prix des marchés mondiaux, les pays en développement sont touchés de
plein fouet. Dans nombre d’entre eux, les importations de produits énergétiques
absorbent déjà l’ensemble des revenus d’exportation. En 2005, les coûts du pétrole
se sont alourdis, en ce qui les concerne, de 100 milliards de dollars, ce qui
représente bien plus que l’ensemble des aides au développement octroyées par
toutes les nations industrialisées. Pendant ce temps, les profits des grands
groupes travaillant dans ce secteur ont augmenté de façon astronomique : en 2005,
Exxon Mobil a réalisé un profit de 35 milliards de dollars, Shell de 25 milliards,
BP (ex-British Petroleum) de 22 milliards (2)...
Pour cette raison, des demandes pressantes sont faites auprès des pays producteurs
pour qu’ils augmentent leurs quotas et pour que les réseaux internationaux
d’approvisionnement soient renforcés, même si cela entre en contradiction avec les
objectifs de protection du climat. De même, poussées à se développer, les énergies
renouvelables ne jouent qu’un rôle marginal dans ce genre d’initiatives. Pourtant,
il y a bien longtemps qu’on aurait dû en faire une priorité stratégique absolue.
Ce nouveau secteur industriel a déjà créé cent soixante-dix mille emplois (6).
Aucun programme politique de soutien à l’industrie n’a coûté aussi peu et n’a
atteint autant de résultats en si peu de temps ! Et si le public accepte les coûts
supplémentaires, c’est parce qu’il est en accord avec l’objectif à poursuivre. En
six ans, les coûts d’investissement ont chuté de 40 % du fait de la construction
en grandes séries. Ce changement énergétique a entraîné une diminution des
émissions de CO2 de sept millions de tonnes additionnelles chaque année. Ainsi, la
loi en tant qu’instrument de politique climatique a eu bien plus d’effet que le
marché d’échange des quotas d’émission de CO2 dans le cadre de l’application du
protocole de Kyoto. Et tout cela fut obtenu sans l’intervention d’une
administration tatillonne.
Hermann Scheer.