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Université Mohammed 1er

Faculté des sciences juridiques économiques et sociales

d’Oujda

Master : Droit et contentieux des affaires

Sujet sous le thème de :

La propriété intellectuelle et l’art

Sous la direction de : Mr. Fouzi Rherrousse

Réalisé par : Bensassi Oumaia


Dziri Malak
Sfa Anas

Année universitaire : 2016 / 2017


Introduction

La propriété intellectuelle se réfère aux créations de l’intellect pour lesquelles un


monopole est attribué par la loi au propriétaire, les droits de la propriété intellectuelle sont les
droits conférés aux créateurs d’œuvres incluant, la marque de fabrique, le copyright, les
brevets d’invention, les dessins industriels et dans quelques juridictions les secrets d’affaires,
l’œuvre artistique telle que la musique, le théâtre, la littérature, mais aussi les phrases, les
symboles et les designs peuvent être protégés par le droit de la propriété intellectuelle, le droit
de la propriété intellectuelle a évolué au fil des siècles mais ce n’est qu’au 19ème siècle que
le terme propriété intellectuelle fût utilisé pour la première fois et ce n’est encore qu’au
20ème siècle que le terme est a fait son entrée dans le vocabulaire collectif.

La loi anglaises des monopoles (1624) et celle d’Anne (1710) sont considérées comme
l’origine des lois protégeant les droits d’auteurs et ceux des inventeurs.
La première utilisation du terme “Propriété intellectuelle” (Intellectual property) remonte à
l’année 1769 dans un article publié dans le périodique Monthly Review.
La première utilisation moderne du terme date de l’année 1808, lorsqu’il a été utilisé
comme titre dans une collection d’essais.

L’équivalent Allemand fût employé concomitamment à la fondation de la Confédération de


l’Allemagne du Nord qui a octroyé une protection légale solide à la propriété intellectuelle,
par le biais de sa constitution.

Lorsque les secrétariats administratifs établis par la convention de Paris (1883) et la


convention de Berne (1886) ont fusionné en 1893, ils ont établi domicile à Berne et ont
incorporé le terme “Propriété intellectuelle” dans la dénomination vers laquelle ils se sont
inclinés, “Le Bureau International des Nations Unies pour la Protection de la Propriété
Intellectuelle”,l’organisation s’est subséquemment relocalisée à Genève en 1960, a été fondé
par la suite en 1967 l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI).

2
Chapitre I : La propriété intellectuelle en Afrique

Section 1 : Dessein Continental

Malgré leurs différences sur le plan politique, Algérie, le Maroc et la Tunisie constituent
les trois pays de l'Union du Maghreb arabe (UMA) les plus proches à la fois
géographiquement du fait qu'ils se situent au centre du groupe, économiquement du fait qu'ils
entretiennent des relations commerciales depuis fort longtemps et juridiquement du fait de
leur tendance à s'inspirer du droit franco, provenant de leur héritage colonial.
Parmi les pays arabes, neufs ont signé la Convention de Marrakech créant l'Organisation
Mondiale du Commerce (OMC) qui comporte en annexe l'Accord sur les aspects de propriété
intellectuelle touchant au commerce (ADPIC) : Bahreïn, Egypte, Emirats Arabes Unis,
Koweït, Maroc, Mauritanie, Qatar et Tunisie. Six pays arabes ont fait des demandes
d'accession à l'OMC : Algérie, Arabie Saoudite, Jordanie, Liban, Oman et Soudan. Celle de la
Jordanie a été admise le 11 avril 2000. Etant donné que la signature de la Convention OMC
entraîne Adhésion a I ‘ensemble des conventions multilatérales auxquelles appartient le traité
douanier du « GATT 1994 » et l'accord ADPIC, nous pouvons dire que des trois pays du
Maghreb, seuls le Maroc et la Tunisie ont adhéré à cet accord ADPIC, par ailleurs, la Tunisie
a signé et ratifié l'accord Euro-méditerranéen établissant une association entre la
Communauté Européenne et ses Etats membres, d'une part, et la République tunisienne,
d'autre part.
Les Accords que le Maroc et la Tunisie ont ainsi ratifiés engendrent des conséquences
importantes sur le plan juridique et soulèvent la question de leur réception dans l'ordre
juridique interne et leur compatibilité avec les législations nationales relative au domaine de
la propriété intellectuelle. Ainsi, l'Accord sur les ADPIC (TRIPS) fait obligation aux Etats
membres de l'OMC de mettre en harmonie leur législation avec les dispositions de cet
Accord. II leur impose notamment l'obligation d'organiser un minimum de protection des
différents droits de propriété intellectuelle, en leur laissant le choix des moyens pour y
parvenir. Au Maroc et en Tunisie, il est entré en vigueur le 1er Janvier 2000, de même,
l'article 39 de l'accord Euro-méditerranéen entre les Communautés Européennes et la Tunisie
disposent que : « Les parties assureront une protection adéquate et effective des droits de
propriété intellectuelle, industrielle et commerciale en conformité avec les plus grands
standards internationaux, y compris les moyens effectifs de faire valoir de tels droits . » C'est
pourquoi aussi bien la Tunisie que le Maroc a entrepris une réforme législative au niveau des
dispositions du droit de propriété intellectuelle, de son côté, l'Algérie est en train de se
préparer pour accéder à l'OMC et donne harmoniser sa législation avec les dispositions de
l'Accord ADPIC.
Au niveau de la propriété littéraire et artistique :

Sur le plan national, les trois pays d'Afrique du Nord sont dotés chacun d'un organisme de
protection des droits d'auteur et des droits voisins: ces organismes ont un caractère

3
pluridisciplinaire et ont le monopole de la gestion des droits d'auteur sur tout le territoire
national. En Algérie, il s'agit de l'Office National des droits d'auteur et des droits voisins,
organisme public, placé sous la tutelle du Ministère de l'information et de la culture. Au
Maroc c'est l'Organisme chargé de la protection du droit d'auteur et des droits voisins. En
Tunisie, le nouvel organisme de Protection des droits d'auteur est un établissement public à
caractère industriel et commercial (EPIC). Cet établissement bénéficie d'une personnalité
civile et d'une autonomie financière. II est placé sous la tutelle du ministère chargé de la
culture.
II a remplacé la Société des auteurs et compositeurs de Tunisie (SODACT) qui était une
association à but non lucratif et dont le rôle n'a pas été très efficace. En matière de propriété
littéraire et artistique, la législation maghrébine a été, pendant longtemps, largement
imprégnée par l'influence franchise mais certaines dispositions ont tenu compte du contexte
national et des impératifs propres à chaque pays. La Tunisie fut le premier pays maghrébin à
avoir instauré une réforme d'ensemble qui tient compte de révolution de la technologie en
l'occurrence la loi n°94-36 du 24 Février 1994 3. L'intervention de cette réforme ne s'est
cependant pas accompagnée de l'instauration d'une réglementation au niveau des droits
voisins. Cette matière a toujours été ignorée par les législateurs maghrébins.
Mais cette lacune a déjà été comblée en Algérie par l'Ordonnance n°97- 10 du 6 mars 1997
relative au droit d'auteur et aux droits voisins qui a remplacé l'Ordonnance n°73-14 du 3 avril
1973, et au Maroc par le Dahir N° 1-00-20 portant promulgation de la loi n°2-00 relative au
droit d'auteur et droits voisins qui a remplacé le Dahir du 29 juillet 19705 .
Les trois pays du Maghreb ont élaboré un cadre juridique conforme à la plupart des
principes généraux et aux régies fondamentales dégagées par les conventions de Berne de
1886 et de Genève de 1952 auxquelles ils ont adhéré. C'est ainsi qu'ils ont admis le principe
de la protection des œuvres littéraires et artistiques sans formalité de dépôt ou
d'enregistrement. Cette protection est accordée à toute œuvre littéraire, scientifique ou
artistique quel qu'en soit la valeur ou le mérite, la destination, le mode d'expression ou le
genre.
La seule condition de fond exigée est le caractère original de la création. La protection du
patrimoine culturel par le droit d'auteur dans les pays du Maghreb est en général conforme à
l'accord ADPIC tant au niveau de l'objet de la protection du droit d'auteur, de l'étendue et des
bénéficiaires de cette protection ainsi que de l'exercice des droits d’auteur. En Tunisie, des
études sont entreprises pour mettre harmonie la loi relative à la propriété littéraire et artistique
avec les dispositions de l'Accord ADPIC notamment en instaurant une réglementation au
niveau des droits voisins. Les pays du Maghreb ont pris conscience de l'importance de la
politique culturelle et de son incidence sur le développement social et économique du pays.
L'activité littéraire et artistique et plus particulièrement l'activité de production,
d'exploitation et de diffusion des œuvres, mobilise L'attention des milieux nationaux
intéressés. Les industries culturelles et notamment la musique, l'audiovisuel, Perdition aussi
bien de loisir que didactique commencent à acquérir une certaine vitalité dans ces pays. II
faudrait cependant relever que dans ces pays, les régies de protection du droit d'auteur ont
reçu en pratique, une interprétation plus nuancée que dans les pays industrialisés.
L'auteur est certes investi du monopole d'exploitation de ses œuvres mais il ne peut en
abuser : il doit tenir compte des priorités de développement de son pays et de l'immensité de

4
ses besoins en matériel éducatif et de formation. II ne peut s'opposer, sans raison valable, a
Utilisation de ses œuvres car il doit contribuer à la diffusion des connaissances et du savoir.
Ainsi, dans ces trois pays, le droit d'auteur, tout en assurant une protection efficace des
créateurs, comporte certaines limites d'origine légale et d'origine extra légale. Concernant les
limites légales, les législations des pays du Maghreb, comme toutes les législations même les
plus favorables aux créateurs intellectuels, apportent des restrictions aux droits exclusifs de
reproduction et de représentation de l'auteur, eu égard : au caractère d'ordre privé et non
lucratif de l'utilisation de l'œuvre , a la qualité particulière de l'utilisateur (organisme de
production radiophonique et télévisuelle) à l'exposition permanente de l'œuvre dans un lieu
public. A l'exposition permanente de l'œuvre dans un lieu public. Aux fins d'information. Aux
fins culturelles et éducatives. Cette dernière limite est spécifique aux pays dont les besoins en
matériel didactique sont importants. Elle se rapporte notamment: aux reproductions par des
organismes de recherche ou d'enseignement
Les législateurs tunisiens et marocains reconnaissent à certaines institutions éducatives ou
de recherche le droit de reproduire les œuvres littéraires, scientifiques ou artistiques dans les
limites des besoins de leurs activités. Les législateurs algérien et marocain prévoit cette
exception au profit des bibliothèques et centres d'archives en la limitant à des objectifs biens
précis.
De plus, le législateur algérien la limite à un seul exemplaire (article 47 d’Ordonnance) et le
législateur marocain à des exemplaires isolés (article 16 de la loi 2000). - Aux reproductions
sous forme de citations : II est admis dans les législations des pays du Maghreb , comme dans
toutes les législations nationales sur le droit d'auteur, qu'il est possible pour quiconque de
relever des passages figurant dans une autre œuvre à condition que ces citations et emprunts
soient conformes aux bons usages, qu'ils soient justifiés par un but scientifique et critique, un
but d'enseignement ou d'information et enfin que ces citations soient accompagnées de la
mention de la source et du nom de l'auteur. L’Utilisation des couvres destinées a
l'enseignement: Les législations des pays du Maghreb permettent les représentations ou les
enregistrements et reproductions sonores ou audiovisuels des couvres littéraires, scientifiques
ou artistiques déjà radiodiffusées ou non, à des fins d'enseignement.
Ces utilisations ne donnent en général pas lieu à rémunération de l'auteur. Par ailleurs,
l'Ordonnance algérienne prévoit, dans les articles 33 à 40 et dans le respect des engagements
internationaux de l'Algérie en la matière, le remplacement du droit exclusif de reproduction
ou de traduction par des licences obligatoires lorsqu'il s'agit d'une œuvre littéraire ou
artistique produite sous forme imprimée, radiophonique, audiovisuelle ou toute autre forme,
destinée à l'enseignement scolaire ou universitaire Les exceptions apportées aux droits des
auteurs par les législations maghrébines semblent, en majorité, avoir été justifiées par l'intérêt
du public a accéder à la culture, au savoir et à l'information. Cependant, les lois maghrébines
n'en demeurent pas moins des lois fortement protectrices de l'auteur et propices à la
stimulation de l'activité créatrice.
Mais il faudrait relever que, dans ces pays, les règles de protection du droit d'auteur ont
reçu : en pratique, une interprétation et une application de la portée qu'elles auraient pu avoir.
Concernant les limites extra légales, parmi les problèmes majeurs auxquels sont confrontés
les pays maghrébins, il faut signaler le phénomène de la piraterie notamment dans le domaine
phonographique et vidéographique. Ce phénomène n'est, certes, pas propre à ces pays mais il

5
n'en demeure pas qu'il constitue un facteur de blocage de l'action d'assainissement menée
dans le cadre des organismes de gestion des droits d'auteur.
Par ailleurs, la protection de l'auteur demeure parfois théorique faute d'informations
suffisantes. Le manque d'expérience et la faible position de certains créateurs intellectuels
sont à la base de leur exploitation abusive et constituent un fléau pour la créativité et
l'épanouissement de la culture nationale. Ces créateurs adoptent souvent une attitude
d'indifférence envers leurs propres droits, attitude due parfois à une certaine ignorance du
contenu de leurs droits et du monde des affaires en général. C'est donné par eux qu'il faudrait
commencer une campagne de revalorisation du droit d'auteur. Par ailleurs, le manque de
formation des cadres administratifs et judiciaires en ce domaine constitue un frein à
l'application appropriée de la loi. C'est pourquoi, l'accent doit être mis sur l'importance de
l'enseignement du droit d'auteur. II est vrai que le poids de la tradition et la routine des
programmes universitaires jouent, a cet égard, un rôle négatif important. II faut ajouter à cela
la pauvreté du support bibliographique et l'insuffisance de formation du personnel enseignant
dans le domaine. En outre, certaines matières obtiennent leur place au programme sur le
fondement de critères pragmatiques qui tiennent compte par exemple d’Utilité
professionnelle attribue à chaque discipline. II en est ainsi des matières qui sont choisies en
raison de la fréquence et de la valeur économique des litiges qu'elles génèrent. Mais il
convient de remarquer que le lien entre l'importance attribué a une matière et la fréquence des
litiges relatifs à celle-ci crée un dilemme :

d'une part, tant qu'une matière n'est pas considérée comme assez importante pour être
enseignée, la motivation des intéressés tels que les praticiens , les juges, avocats se réduit au
minimum et d'autre part, le manque de motivation n'est pour de nature à accroître le nombre
des litiges et par voie de conséquence réduit l'importance attribué à la matière. Mais le plus
important c'est de rechercher des moyens pour dépasser ce cercle vicieux et en sortir. Ainsi,
parmi les pays du Maghreb, la Tunisie est le pays qui a la plus longue tradition en matière
d'enseignement du droit de la propriété littéraire et artistique.
Cela s'est traduit, sur le plan pratique, par une prise en considération de cette matière au
sein du palais de justice et par l'intérêt croissant que les juges et avocats tunisiens accordent
aux litiges relevant de ce domaine.

Section II : Le droit et les œuvres digitales

Sous-section I : L’œuvre numérique : une œuvre comme les autres ?

Aborder le domaine du droit lorsqu’on parle d’art, et notamment de l’économie liée à ce


secteur, est une nécessité. Dès lors qu’une œuvre est achetée, exportée, transmise, donnée,
reproduite ou téléchargée et que l’artiste décide de vendre, de se lier à une galerie, de prêter,

6
de céder une partie de ses prérogatives ou de faire une donation, le droit est présent. L’œuvre
d’art se distingue d’un objet ordinaire par la relation singulière que son créateur entretient
avec elle. Déjà en 1767, Diderot mettait en évidence le lien inaltérable qui lie l’auteur à son
œuvre. Il s’agissait alors de protéger des œuvres littéraires1 et d’empêcher qu’elles soient
dupliquées sans que l’auteur ne reçoive une rétribution. Au fil du temps le législateur a
confirmé ce lien particulier d’où est issu le droit d’auteur. S’il est issu du monde des lettres,
le droit d’auteur s’est rapidement appliqué au domaine des arts pour se révéler incontournable
au fur et à mesure que l’œuvre se détachait de son support et qu’on pouvait la reproduire.
Aujourd’hui, l’avènement du numérique est peut-être à mettre en parallèle avec l’invention
de l’imprimerie.
On sort définitivement de l’objet unique pour dupliquer à l’infini. L’œuvre numérique
n’est pas un objet, il lui faut donc plus que toute autre être protégée par un outil juridique. Si
l’œuvre d’art peut relever de l’espace législatif dans bien des domaines (commerce,
successions, assurances…), c’est le droit d’auteur qui détermine ses spécificités et lui accorde
son seul moyen de protection2.
Une œuvre d’art est une œuvre de l’esprit mais toutes les œuvres de l’esprit ne sont pas des
œuvres d’art. Si le législateur prend soin de ne pas définir ce qu’est une œuvre, il déclare
pourtant que l’objet de la protection par le droit d’auteur ne concerne que les créations de
forme originales. Entendons par là que les idées sont de libre parcours, qu’elles doivent donc
être mises en forme et porter l’empreinte de la personnalité de leur auteur pour être protégées.
Cette empreinte est garante de l’unicité et de l’authenticité de l’œuvre. Deux caractéristiques
dont découle historiquement sa valeur économique. Les œuvres numériques ne dérogent pas à
ces principes mais leur nature « immatérielle » pose un certain nombre de questions au point
que d’aucuns évoquent la possibilité d’un statut particulier.
Quand en 1917 Marcel Duchamp décide d’exposer Fontaine, un urinoir renversé sur lequel
il a apposé sa signature, non seulement il provoque un tollé parmi les organisateurs de
l’Armory Show à New York qui refusent de présenter la pièce, mais ébranle les certitudes
d’un milieu de l’art que les ready-made contraignent depuis quelques années à une réflexion
sur la nature de l’œuvre. Si, pour l’artiste, il s’agit de détourner la signification d’usage d’un
objet de la vie courante et de lui offrir le statut d’œuvre d’art du seul fait qu’il est exposé dans
un musée, force est de constater que si œuvre il y a, elle est conceptuelle, c’est-à-dire dans
l’idée.
Le chemin ouvert par Marcel Duchamp est large et de nombreux artistes et courants s’y
sont engouffrés tout au long du XXe siècle, créant sans nul doute une certaine confusion entre
la notion de forme et celle d’idée.
Un trouble que l’arrivée du numérique n’a fait qu’exacerber. Cette nouvelle technologie
capable de transformer (pour les diffuser plus facilement et plus largement) textes, images
(fixes ou en continu) et sons en une suite de chiffres (0 et 1) a permis de qualifier les œuvres

1
Le droit après la dématérialisation de l’œuvre d’art, Judith Ickowicz, Les presses du réel, 678 pages ;

2
L111.1 CPI.

7
émanant d’elle d’« immatérielles ». L’œuvre3 ne prenant « corps » qu’à travers un support,
mais n’étant pas tangible, certains se sont interrogé sur la réalité de cette nouvelle venue que
seul un code est à même de révéler. Pourtant nul n’oserait remettre en cause la qualification
d’œuvre pour une symphonie ou un concerto alors que son existence physique n’est prouvée
que par des partitions, soit un code parmi d’autres. Malgré ce caractère intangible, les œuvres
de réalité virtuelle de Miguel Chevalier ou celles de Maurice Benayoun sont indéniablement,
à l’instar de sculptures ou de peintures, des créations parfaitement originales portant
l’empreinte de leur auteur. Peu importe donc que l’on puisse ou non les toucher du doigt.
Notons par ailleurs que les pratiques très conceptuelles de certains artistes du Web, comme
Fred Forest, ont posé de nouveau la question de la nature de l’art sans pour autant émouvoir
le législateur qui applique aux œuvres sans corps physique les mêmes règles qu’aux autres.
Précisons toutefois qu’elles ne sont pas toutes identiques (hybride, image fixe, vidéo,
interactive, participative, générative, site Internet) et qu’elles ne sont pas forcément créées
par une seule et unique personne.
En effet, dans le monde numérique les œuvres requièrent des compétences très diverses et
sont donc très souvent des œuvres collectives. Comme pour une œuvre collective « classique
», c’est l’instigateur de l’œuvre qui est investi des droits de l’auteur.
Quand bien même il fait appel à des développeurs, graphistes, musiciens ou autres, l’artiste
n’en reste pas moins l’initiateur, et son œuvre, originale. Comme l’a confirmé la Cour de
cassation4 : une œuvre est originale si elle « émane de la main de l’artiste ou a été réalisée
selon ses instructions et sous son contrôle ».
L’artiste titulaire des droits d’auteur est donc le seul à pouvoir l’exploiter et en tirer profit.
Là encore rien de spécifique à l’œuvre numérique.

Sous-section II : Les usages poussent le droit d’auteur

Le droit d’auteur fait partie de la culture numérique. En l’étudiant à l’aune de la révolution


technologique des dix dernières années, il est possible non seulement de mettre en évidence
ses limites mais aussi les potentialités nées du numérique. « Droit et économie numériques
sont intimement liés.
Le droit est subordonné au numérique. Il est un outil de régulation, qui gère les conflits
d’intérêts, les rapports de force entre les producteurs, les diffuseurs, les ayants droit… Mais
il n’est pas un outil de développement, de stabilisation ou d’encadrement des usages. Le droit
suivra l’économie, j’en suis convaincu »,
explique Jean-Marc Wallet, directeur de la Filiale ULR Valor à l’université de La Rochelle
et spécialiste en droit du multimédia. En effet, l’arrivée du numérique, comme toute autre
invention technologique, et par ailleurs assortie de l’expansion d’Internet, n’a pas pu être
anticipée par le droit. Qui aurait pu, par exemple, imaginer la capacité du Net à devenir le

3
L’œuvre d’art en droit d’auteur – forme et originalité des œuvres d’art contemporaines, Nadia Walravens,
Oeconomica, 521 pages ;

4
Cour de cassation 13 octobre 1993.

8
premier diffuseur mondial d’informations ou anticiper le partage des contenus ? De la même
manière que la technologie pousse les usages, les usages, eux, poussent le droit. Au début, ils
expérimentent en dehors des lois, ils meurent ou au contraire se développent et c’est
seulement lorsqu’ils deviennent majoritaires que sonne l’heure du droit. La régulation est
d’abord économique avant d’être juridique : il faut trouver de nouveaux modèles, permettre la
monétisation des nouveaux services et donc la création des conditions de pérennité de
l’activité.
L’arrivée du numérique a bouleversé des pans entiers de l’économie notamment dans les
domaines de la culture et des loisirs. Les filières de l’audiovisuel, du livre, de l’information,
de l’art… sont en pleine mutation et tentent de relever le défi de la monétisation du contenu
ou celle de l’audience.
Sentinelle du bout du monde, Fred Forest, 2007
Le droit5 pour le moment observe et les juges parent au plus pressé en interprétant les
règles existantes confrontées aux nouveaux usages. Un fossé existe entre la loi et la réalité
des pratiques.
Pour s’en convaincre, il suffit d’observer la diffusion des œuvres sur le Net : la plupart le
sont dans l’illégalité.
Normalement, pour chacune d’entre elles, la personne à l’origine de sa diffusion aurait dû
s’adresser à l’artiste ou à la société qui gère ses droits pour obtenir une autorisation et, le cas
échéant, payer un droit de diffusion.
Il n’en est rien et l’idée de mettre un gendarme derrière chaque internaute a fait long feu.
Les sociétés de gestion des droits, comme l’Adagp (société des auteurs dans les arts
graphiques et plastiques), cherchent les moyens de pallier les usages qui se multiplient sans
pour autant rapporter quoi que ce soit dans leur escarcelle. En 2008, seulement 1,60 % des
revenus de l’Adagp (soit 360 000 euros des 22,5 millions perçus) provenaient des acteurs
d’Internet alors que le Web est aujourd’hui le plus important mode de diffusion.
Dans l’incapacité de tracer toutes les œuvres (le marquage reste cher et la surveillance
exhaustive du Net impossible) et de faire payer les contrevenants (même s’ils sont localisés,
il est actuellement plus simple et moins coûteux de leurs demander de retirer l’œuvre du Web
que de les obliger à payer), les sociétés de droits d’auteur tentent actuellement d’établir des
contrats généraux avec les acteurs dominants comme Google, E-bay, YouTube ou Flikr.
Pour le moment, « seul Dailymotion a accepté de reverser un petit pourcentage de ses
recettes pour permettre la rémunération des auteurs dont les œuvres sont diffusées sur son
site », confirmait fin 2009 Christiane Ramonbordes, directeur général de l’Adagp, la plupart
des sites utilisent pour se défendre la directive européenne de 2001 qui exonèrent de toute
responsabilité ceux qui sont considérés comme des hébergeurs6.
Deux remarques s’imposent : D’une part, les hébergeurs affirment pour leur défense qu’ils
ignorent ce qui est publié sur leur site, pourtant nombreux d’entre eux sont capables de filtrer
le contenu (pas de photos ou de propos racistes, pornographiques, etc.) et de placer des

5
BERTRAND (A), La propriété intellectuelle, livre II, marques et brevets, dessins et modèles, Delmas, Paris, 1995 ;

6
Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains
aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information, alinéa 27).

9
propositions commerciales relatives, ou ayant un rapport direct, avec ce qui s’affiche à
l’écran. Les hébergeurs ne sont donc pas si aveugles.
D’autre part, il faut signaler que les contrats généraux s’attachent à la rémunération liée à la
diffusion en faisant passer au second plan le droit exclusif de l’auteur c’est-à-dire le pouvoir
d’autoriser au préalable ou de refuser la diffusion de son œuvre et d’obtenir une rémunération
proportionnelle aux utilisations. Pour le moment les sociétés d’auteurs refusent les solutions
globales tel que le prélèvement d’une taxe sur les abonnements Internet ou sur chaque
terminal car elles ne sont pas prêtes à accepter la disparition du droit exclusif et de la
demande d’autorisation, ce qui, selon Christiane Ramonbordes, équivaudrait à ouvrir une
sorte de « grande boîte de Pandore où personne ne contrôlerait plus rien ». Et d’ajouter : «
Mais j’ai bien peur qu’on y arrive parce que, quelque part, il n’y a pas d’autres moyens. »
Ce constat d’impuissance face à la montée des usages impossibles à contrôler, du moins pour
le moment, se double d’un autre danger : la difficulté à contrer des initiatives de mise à
disposition en masse de contenus telle que la bibliothèque numérique de Google.
Le 13 novembre 2009, une nouvelle version de l’accord entre le géant de l’Internet et les
auteurs et éditeurs américains a été dévoilée. Il ne s’applique plus qu’aux œuvres enregistrées
au bureau américain du copyright et aux pays anglo-saxons qui partagent « un même héritage
juridique » avec les Etats-Unis et des pratiques similaires dans le monde de l’édition
(Royaume-Uni, Australie, Canada). Si les éditeurs français ou allemands ne sont donc pas
concernés, Google n’a pas renoncé à son souhait de numériser l’ensemble des livres de la
planète et a l’intention de contacter directement les ayants droit à l’étranger pour essayer de «
rendre les contenus accessibles dans le monde entier.7 »
Google a déjà numérisé quelque 6 millions de livres épuisés mais n’a pour le moment pu
qu’en montrer des extraits. La compagnie espère vendre des abonnements à sa bibliothèque
digitale, ainsi que des copies individuelles des livres. Le verdict du juge fédéral Denny Chin
concernant cet accord, qui devait intervenir le 18 février, a été remis à plus tard, alors qu’une
nouvelle plainte a été déposée, cette fois émanant de l’American Society of Media
Photographers et d’autres associations représentant des illustrateurs et artistes visuels.
Même si un projet de bibliothèque numérique européenne existe (Europeana, quelques
dizaines de milliers de documents numérisés à ce jour et qui envisage d’emblée des liens avec
Google et d’autres services en ligne réputés comme Wikipedia), on observe une capacité de
mise en œuvre et une volonté d’avancée hors du commun de la part de Google8.
Il est évident que pendant qu’en France et en Europe on se pose des questions sur le
monopole9, le droit d’auteur et l’accès universel à la connaissance, l’Américain aura mis à la
disposition du public un véritable trésor… en langue anglaise ! Qui alors de la littérature
française ou allemande et donc du rayonnement de nos cultures et spécificités ? Qu’arriverait-
il demain si Google décidait de créer le plus grand musée numérique du monde ? Les artistes

7
Le Monde du 15 novembre 2009 ;

8
Le droit après la dématérialisation de l’œuvre d’art, Judith Ickowicz, Les presses du réel, 678 pages ;

9
L’intervention du professeur Annette Kur lors d’une audition de la Commission de la culture, de la science et de
l’éducation du Conseil de l’Europe en date du 9 décembre 2008).

10
contemporains français y seraient-ils représentés ? Comme le souligne Christophe Geiger
dans un rapport rédigé pour la Commission de la Culture, de la Science et de l’Education de
l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, visant à éclairer les travaux
du Conseil dans le cadre de la préparation d’une recommandation sur l’avenir
du droit d’auteur en Europe (juillet 2009, version révisée en octobre 2009) : «
On peut estimer que c’est l’aptitude du droit d’auteur à intégrer des logiques
antagonistes mais complémentaires qui attestera de sa pérennité dans le futur et
de sa capacité à s’adapter à un nouvel environnement économique,
technologique et social. » Pour résumer, le droit d’auteur doit continuer à être
une protection et une source de revenus pour les créateurs mais en évitant de
devenir un frein à la diffusion de leurs œuvres auprès du grand public, au risque
de demeurer dans l’ombre.
Attaqué pour sa bibliothèque, Google a ouvert immédiatement un autre «
front ».
Le géant de l’Internet a confirmé le lancement en juin prochain de sa librairie en ligne dans
six pays, dont la France. Les internautes pourront ainsi acheter des ouvrages numérisés à lire
sur des terminaux comme l’e-book Kindle d’Amazone, l’iPad d’Apple ou encore la future
tablette numérique de… Google ! 30 000 éditeurs proposeront leurs ouvrages contre 65 %
du chiffre d’affaires généré par le service10.
Parallèlement, 400 librairies française ont annoncé qu’elles s’apprêtaient, elles aussi, à
vendre des livres numérisés.

Sous-section III : Des nouvelles possibilités nées du numérique

L’utilisation conjointe du numérique et d’Internet a permis à certains artistes de se passer


d’intermédiaires pour rencontrer leur public.
Nombre d’entre eux ont décidé d’abandonner tout réflexe protectionniste et de jouer la carte
de la diffusion maximale en créant des sites personnels, en déposant des œuvres sur des sites
de partage, en créant leur profil sur Facebook, en échangeant des informations sur des sites
participatifs… Certains sont même allés plus loin en cédant d’emblée tout ou partie de leurs
droits. Inspirés par les licences libres et l’open source, sont nés les contrats « creativ
commons » qui se présentent ainsi : « Simples à utiliser et intégrées dans les standards du
Web, ces autorisations non exclusives permettent aux titulaires de droits d’autoriser le public
à effectuer certaines utilisations, tout en ayant la possibilité de réserver les exploitations
commerciales, les œuvres dérivées ou le degré de liberté (au sens du logiciel libre). Ces
contrats d’accès ouvert peuvent être utilisés pour tout type de création : texte, film, photo,
musique, site Web…11 »

10
Www. abondance.com ;

11
http://fr.creativecommons.org;

11
Les auteurs peuvent aussi préciser pour chaque œuvre 12« Some rights reserved », soit : «
Seuls certains droits sont réservés » ce qui est une alternative au fameux « DR » habituel où
tous les droits sont réservés. Il existe également le copyleft : une initiative née dans le milieu
du logiciel libre.
L’auteur donne l’autorisation de copier, d’utiliser, d’étudier, de modifier et/ou de distribuer
son œuvre dans la mesure où ces possibilités ne disparaissent pas ensuite. Les créations
réalisées à partir d’éléments sous copyleft héritent de cette caractéristique. Les artistes
numériques peuvent ainsi reprendre la main sur la gestion de leurs droits. Une perspective qui
n’enchante pas les sociétés d’auteurs.
Ce fonctionnement à plusieurs vitesses crée une forme de confusion, notamment auprès du
public, qui finit par ne plus savoir ce qu’il peut ou ne peut pas faire, et vient encore alimenter
la polémique ; en échange, il offre probablement une alternative raisonnable en permettant la
diffusion et l’utilisation des œuvres dans une perspective d’information ou de création tout en
réservant l’application des droits à la sphère commerciale. A noter que si le numérique a
favorisé la diffusion des œuvres, il a aussi facilité la pratique artistique classique de
l’emprunt.
Une pratique qui est aujourd’hui encore encadrée par les règles strictes du droit d’auteur
mais qui pourrait à l’avenir bénéficier d’une exception d’utilisation à des fins créatives
comme l’envisage le Livre Vert adopté le 16 juillet 2008 par la Commission européenne.
Par ailleurs, le numérique permettrait une gestion plus facile des œuvres grâce aux
métadonnées (ensemble des informations techniques et descriptives ajoutées à un document
numérique pour mieux le qualifier).
Ces informations intrinsèquement liées aux œuvres pourraient faciliter leur utilisation.
Depuis son apparition, le droit d’auteur est non formaliste.
Il n’oblige ni à déclarer une œuvre ni à fournir sur elle des précisions.
Ce qui s’avère dans le monde du papier un casse-tête de paperasserie administrative devient
un jeu d’enfant dans le monde numérique. Fini les œuvres orphelines, les créateurs inconnus,
non localisables et peut-être plus important encore, fini de feindre l’ignorance : les
métadonnées vous indiquent les autorisations à demander, les utilisations possibles, les droits
à acquitter… L’œuvre ne se sépare plus de son histoire, de sa carte d’identité et elle peut être
indexée. Bien entendu, la présence de métadonnées n’est pas la réponse à tout. Il faudrait
également qu’il existe un dépôt électronique des œuvres qui permettrait, d’une part, d’obtenir
un numéro d’authentification et, d’autre part, la conservation d’une description écrite de
l’œuvre que l’on pourrait nommer « notation », comme pour les chorégraphies, et qui
assurerait sa pérennité au cours de ses migrations successives à travers le temps.
Cette notation rendrait compte de l’ensemble des paramètres de l’œuvre et garantirait
qu’aucun élément fondamental pour l’artiste n’a été modifié par le passage d’un format à un
autre.
Elle serait aussi remise à chaque acheteur d’une œuvre numérique. Ce qui est d’ailleurs
déjà le cas aujourd’hui pour certaines œuvres complexes qui sont prêtées ou vendues avec un
« mode d’emploi ».

12
“ Can the World Be Copyrighted ? ”, WIRED, février 2002;

12
Le principe mériterait d’être généralisé et formalisé pour faciliter la circulation, la
protection, l’utilisation et la vente des œuvres numériques et crédibiliser l’ensemble de la
filière.

Sous-section IV : Faire face aux enjeux du numérique

Si l’œuvre numérique est bien une œuvre comme les autres et bénéficie du même arsenal
de protection, il faut admettre que le droit d’auteur est aujourd’hui malmené. L’association du
numérique et d’Internet a multiplié à l’infini les possibilités de diffusion et d’utilisation
(certains vont même jusqu’à s’interroger sur la notion de « copie privée » et se demandent si
elle ne doit pas être remise en cause.
Ne vise-t-elle pas, en effet, un usage de l’œuvre dans la sphère privée – mise à mal par des
téléchargements dont on ne sait jamais d’où ils sont effectués et par le caractère spécifique de
l’œuvre numérique qui, à défaut de copies, possède un nombre incalculable d’originaux).
En outre, le droit à l’information, conséquence de l’explosion d’Internet, est de plus en plus
revendiqué. Pour faire face aux enjeux et aux défis lancés par le numérique, les artistes vont
avoir besoin d’accompagnement.
Qu’ils soient tentés par une position protectionniste et souhaitent faire marquer leurs
œuvres ou qu’ils décident de jouer la carte de la diffusion la plus large, ils vont avoir besoin
au minimum de conseils au mieux d’aide à la gestion de leurs œuvres.
Le droit d’auteur n’impliquant aucun dépôt des œuvres, il est intéressant de se demander :
qui possède l’information ? Aujourd’hui, elle est détenue par les artistes, les galeries, les
institutions… mais il n’existe aucune source centralisée. Certains professionnels de par leur
activité cherchent en permanence cette information et sont capables de l’exploiter. Il s’agit,
par exemple, des grandes agences de photos comme Getty images qui, après avoir recherché
les ayants droit, proposent des photos pour lesquelles ils sont désormais mandatés.
L’information est aux mains de sociétés privées qui peu à peu pourraient proposer aux artistes
de gérer de manière plus souple leurs droits à la place des sociétés d’auteurs.
Par ailleurs, le souhait exprimé de plus en plus couramment de marquer les œuvres pour
mieux les protéger est pour le moment un vœu pieu.
Il est toutefois intéressant de remarquer que les sociétés d’auteurs qui aimeraient apposer
une signature numérique sur chaque œuvre non seulement ne disposent pas des moyens pour
le faire mais ne sont, en aucune manière, capables de les tracer et donc de les protéger. Dans
ce domaine de la « surveillance » de l’utilisation des œuvres des initiatives se développent.
Actuellement, la société Pixtrakk, qui vient de se lancer et observe pour des agences de
contenu photographique l’ensemble de la presse papier, annonce d’ores et déjà un service
identique sur le Web concernant uniquement les sites d’actualité. C’est un début mais si dans
le futur quelqu’un est capable de contrôler l’ensemble des flux il y a fort à parier qu’il s’agira
d’un spécialiste des réseaux, d’un acteur majeur d’Internet comme Google ou Microsoft.
Celui qui pourra contrôler les flux, sera seul en mesure de proposer aux artistes de « protéger
» leurs œuvres.
On peut imaginer alors que ces sociétés proposent aux auteurs des systèmes de gestion des
droits. Exemple : « Prenez une galerie chez nous, nous marquerons vos œuvres et nous en

13
contrôlons les flux. Vous avez accès en temps réel à l’information : vous pouvez savoir
combien de personnes sont en train de consulter votre œuvre, combien l’ont copiée sur leur
ordinateur. Vous pouvez communiquer avec elles, gérer vos droits en direct, les inviter à
votre prochain vernissage… » Un rêve pour les uns, des soucis pour les autres. « Le
numérique n’est pas une remise en cause fondamentale de ce qui existe aujourd’hui, il ne
vient pas remplacer l’existant, il vient développer de nombreuses alternatives. Le numérique,
c’est la diversité. Demain il y aura encore des ventes aux enchères, mais l’artiste aura des
manières extrêmement différentes de vivre sa créativité, d’avoir des relations avec les
intermédiaires et avec le public », conclut Jean-Marc Wallet.

Problématique : La propriété des œuvres de street art, tout un paradoxe


A Paris, des voleurs de street art ont subtilisé, en plein jour, des œuvres de l'artiste Invader.
La mairie a depuis porté plainte, non pas pour "vol" mais pour "Usurpation de fonction". Car
ces vols posent question : à qui appartiennent ces œuvres posées illégalement ?
Graffiti, pochoir, mosaïque, affiche, sticker… autant de formes d’expression artistique qui, si
elles sont apposées » sans autorisation préalable, sur les façades, les véhicules, les voies
publiques ou le mobilier urbain » constitue le délit de dégradation de biens punissable de
3750 euros d’amende et d’une peine de travail d’intérêt général.
Quelle influence le caractère illégal d’une telle œuvre (à la supposer suffisamment
empreinte de la personnalité de son auteur pour répondre au critère d’originalité) a-t-il sur les
droits de son auteur ?
Une œuvre de l’esprit éphémère ?
La jurisprudence en la matière est encore rare mais permet d’ores et déjà d’obtenir
quelques éléments de réponse.
En 1999, dans une affaire où le défendeur assigné en contrefaçon faisait valoir que les
films X qu’il avait reproduits ne bénéficiaient de la protection légale, en tant qu’œuvre de
l’esprit, qu’à la condition qu’ils ne présentent pas un caractère odieux et dégradant pour la
personne humaine, (ce qui caractériserait une infraction pénale), la Cour de cassation a jugé
qu’ « en l’absence de preuve de son caractère illicite, une œuvre pornographique bénéficie
de la protection accordée par la loi sur la propriété littéraire et artistique ».
Certains déduisent de cette décision que le caractère illégal d’une œuvre lui ôterait le bénéfice
des droits d’auteur, ce qui se justifierait par application de l’adage selon lequel « nul ne peut
se prévaloir de sa propre turpitude ».
Cependant, en 2006, la Cour d’appel de Paris a reconnu à des graffiti tagués sur des
wagons de train la qualification d’ « œuvres éphémères » (parmi lesquelles figurent par
exemple les sculptures sur glace ou sur sable, les coiffures originales ou encore les créations
florales). Le qualificatif semble exact dans la mesure où les artistes de street art ont bien
conscience du fait que leur œuvre peut à tout moment être détruite, effacée, la rendant alors
de fait nécessairement éphémère.
Des droits d’auteur limités ?
Le caractère illégal non pas de l’œuvre, mais plutôt de l’acte de sa matérialisation, ne
devrait pas lui ôter de facto le statut d’œuvre de l’esprit mais plutôt éventuellement priver son
auteur de certaines prérogatives dans l’exercice de ses droits.

14
En pratique, il est rare de voir un auteur de street art revendiquer un quelconque droit, au
risque de se voir poursuivre pénalement pour vandalisme. La poursuite de tels faits
délictueux est toutefois prescrite 3 ans après leur commission (sous réserve de l’existence
d’éventuels actes interruptifs ou suspensifs de prescription) ce qui permet donc à l’artiste de
recouvrer sa totale liberté d’action après un certain laps de temps.
Toutefois, la preuve de sa paternité, là encore en raison du risque pénal encouru par
l’auteur qui divulguerait son identité au moment de la matérialisation de son œuvre, sera
parfois difficile à apporter après un certain temps.
Juridiquement il est également intéressant de se demander si l’on pourrait même envisager
un droit à l’anonymat, corolaire du droit moral à la paternité, permettant à l’auteur
d’imposer que l’œuvre ne lui soit pas attribuée ? Compte tenu du caractère inaliénable du
droit moral de l’auteur, ce dernier ne pourrait quoiqu’il en soit pas renoncer à sa paternité de
manière irréversible.
A considérer l’œuvre susceptible de donner prise au droit d’auteur, le street artist devrait
en toute hypothèse pouvoir, comme tout titulaire de droit d’auteur, s’opposer à la
reproduction de son œuvre, surtout lorsque cette reproduction est effectuée à des fins
commerciales (édition, publicité, produits dérivés par exemple) ou porterait atteinte à l’esprit
même de l’œuvre (association idéologique, détournement etc.)
Il n’est donc en théorie pas légalement possible de reproduire une photographie
représentant une œuvre de street art sans l’autorisation de son auteur et de celui de la
photographie.
Dans certains pays (Allemagne, Espagne, Suisse par exemple), la « liberté de panorama »
autorise, dans certains cas, la libre reproduction de l’image d’œuvres normalement protégées,
dès lors que celles-ci se trouvent dans l’espace public.
Une proposition de loi visant à introduire en France une telle exception au droit d’auteur a
été rejetée l’année dernière.
Quels droits pour le propriétaire du support matériel ?
En cas d’accord du propriétaire du support (autorisation expresse, commande, mise à
disposition de murs dédiés au graffiti par exemple), les œuvres de street art ne soulèvent pas
de problématique particulière en terme de droit d’auteur.
La question est tout autre lorsque le propriétaire du support matériel (un mur, un wagon,
une palissade, un trottoir, un panneau de circulation…) n’a pas autorisé ce qu’il est
légalement en droit de considérer comme une dégradation de son bien.
Or, la propriété du support matériel étant indépendante de la propriété incorporelle de
l’œuvre, comment concilier le droit de propriété et le droit d’auteur dans un tel cas ? Le
propriétaire a-t-il le droit de détruire une œuvre de l’esprit sans l’accord de son auteur, en
violation du droit moral au respect de l’intégrité de l’œuvre ? Un auteur peut-il, sous couvert
de la liberté de création, investir la propriété d’autrui ?
Il ne pourra certainement pas être reproché au propriétaire du support de détruire l’œuvre
réalisée de manière illicite sur son bien, quand bien même cela porterait indiscutablement
atteinte au droit moral de l’auteur au respect de l’intégrité de son œuvre. Le droit moral,
imprescriptible et inaliénable, cédera devant le droit de propriété du support en raison de
l’illégalité de la fixation de l’œuvre.

15
En revanche, la Cour d’appel de Paris a débouté la SNCF d’une demande de faire interdire
la publication de photographies de wagons graffées dans la mesure où, selon la jurisprudence
de la Cour de cassation, le propriétaire ne peut s’opposer à la reproduction de l’image de ses
biens (les wagons) que s’il en résulterait un trouble anormal. Tel n’était pas le cas en
l’espèce.
Ainsi, le propriétaire du support matériel de l’œuvre de street art ne peut en interdire la
reproduction, sauf à démontrer que cette reproduction lui causerait un trouble anormal (un
afflux significatif de personnes venant voir l’œuvre de ses propres yeux par exemple).
Enfin, pour mémoire et de manière classique, le titulaire de droits d’auteur sur une
œuvre reproduite sans autorisation dans une œuvre de street art, pratique largement
répandues en la matière, pourrait tout à fait s’opposer à toute exploitation de cette œuvre
dérivée non autorisée.

16
Chapitre II : La protection de la propriété intellectuelle
et l’art au niveau international

Avoir dans ses accessoires une imitation d’un sac à main d’un grand designer, ou dans son
salon une copie d’une toile d’un grand peintre de renom, peut paraître anodin.
Les acquéreurs de ces produits « contrefaits » sont souvent tentés de croire que leur
démarche ne fait de tort à personne et n’ont pour la plupart pas conscience du caractère
punissable de leurs actes.
Ils portent pourtant atteinte aux droits de la propriété intellectuelle et l’art.
En facilitant les copies et la diffusion des créations, le développement des technologies et
l’accélération des échanges ont largement contribué à la multiplication de ces pratiques au
niveau international.
Quelles sont les protections qui luttent contre ses pratiques ?
Sont-elles assez suffisantes pour protéger la propriété intellectuelle et l’art ?
C’est ce que nous verrons à travers la section 1 et 2 de ce chapitre II

Section I : Les protections internationales de la propriété


intellectuelle et l’art
Dans cette section, nous allons débuter par les différentes protections de la propriété
intellectuelle et l’art depuis le 15ème siècle jusqu’au 19ème dans la (sous-section 1) pour finir
avec la création de l’OMPI et l’accord sur les ADPIC dans la (sous-section 2).

Sous-section I : Les différentes protections de la propriété


intellectuelle et l’art au 15ème jusqu’au 19ème siècle

1) La parta veniziana d’Italie : 1474 13


Le 19 mars 1474, la cité-État de Venise (l’Italie actuellement) a décrété la première loi
servant à breveter une invention, donc à reconnaître la propriété intellectuelle, un concept qui
a fait son chemin partout dans le monde, d’abord utile aux souffleurs de verre de Venise, qui
ont ainsi pu protéger leurs techniques, la loi sur le brevet allait rapidement profiter au secteur
de l'imprimerie, en pleine expansion à Venise.
Comme la loi vénitienne protégeait la machine et non pas le contenu des livres, les
éditeurs, voulant éviter la reproduction illégale des livres, ont fait breveter les polices de
caractères. Ainsi, un imprimeur de Venise a pu avoir le monopole de l'utilisation du caractère
italique.
2) La loi copyright d’Angleterre : 171014

13
Loi sur la propriété intellectuelle adoptée à Venise, en 1474.
14
Loi de la reine Anne, adoptée en Angleterre, en 1710 ;

17
Le 10 avril 1710, le Parlement anglais adopte la première loi de « copyright », connue sous
le nom de Statut d’Anne, cette loi stipulait que tout travail publié serait placé sous copyright
pour quatorze années, renouvelables une fois si l’auteur était vivant, et que tout travail publié
avant 1710 serait protégé pour une durée additionnelle unique de vingt-et-une années.

3) Convention de Paris : 188315


La Convention de Paris constitue le premier accord international en matière de brevets
d’inventions et est l’un des piliers du système international de la propriété intellectuelle, elle
concerne la propriété industrielle au sens le plus large du terme, englobant notamment les
inventions, les marques, les dessins et modèles industriels, les noms commerciaux, les
indications géographiques et la répression de la concurrence déloyale, elle a été conçue pour
aider les habitants d’un pays donné à obtenir que leurs créations intellectuelles soient
protégées dans d’autres pays par des titres de propriété industrielle.

4) Convention de Berne : 188616


La Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques concerne le
droit d’auteur et les droits connexes, elle a pour objet de contrôler à l’échelle internationale
l’utilisation des œuvres originales et d’assurer à leurs créateurs une rémunération.

Elle fait suite au grand développement de l’industrie du livre et des techniques de


reproduction, qui ont accéléré la nécessité de protéger internationalement les œuvres.

L’objet de cette convention était d’aider les ressortissants des États parties à obtenir la
protection internationale de leur droit d’exercer un contrôle sur l’utilisation de leurs œuvres
originales et de percevoir une rémunération à cet égard, qu’il s’agisse :

- de romans, de nouvelles, de poèmes, de pièces de théâtre ;


- de chansons, d’opéras, de comédies musicales, de sonates ;
- de dessins, de peintures, de sculptures, ou d’œuvres d’architecture.

5) L’arrangement de Madrid : 189117

15
Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle adoptée en 1883 ;

16
Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques adoptée en 1886.

17
Arrangement de Madrid concernant l'enregistrement international des marques, adoptée en 1891 ;

18
A partir de 1891, l’Arrangement de Madrid régit l’enregistrement international des
marques, le système de Madrid offre au titulaire d’une marque la possibilité de la protéger
dans plusieurs pays en la déposant simplement auprès de son office national ou régional.

6) Les BIRPI : 189318

Les Convention de Paris et de Berne ont chacune créée un Bureau international chargé
d’assurer les tâches administratives.
En 1893, ces deux bureaux ont été réunis pour former une organisation internationale
appelée Bureaux Internationaux Réunis pour la protection de la Propriété Intellectuelle
(BIRPI). Avant la Première Guerre mondiale, la ville de Berne avait un rôle international
important en abritant les bureaux des principales unions administratives du XIXème siècle :
l’Union Postale Universelle (UPU), l’Union Internationale des Télécommunications (UIT),
l’Office central des transports internationaux pour chemins de fer, ainsi que les Bureaux
internationaux réunis pour la propriété intellectuelle (BIRPI).
C’est en 1960 que les BIRPI déménagent à Genève, dix ans plus tard, en 1970, à la suite de
l’entrée en vigueur de la Convention instituant l’Organisation Mondiale de la Propriété
Intellectuelle de 1967, les BIRPI devenaient l’Organisation Mondiale de la Propriété
Intellectuelle (OMPI).

Sous-section II : L’OMPI et l’accord sur les ADPIC

L’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI) est une organisation


internationale crée en 1967 par les Etats-Unis, qui a pour vocation de veiller à ce que les
droits des créateurs et autres titulaires de droits de propriété intellectuelle soient protégés
dans le monde entier et à ce que les inventeurs et les auteurs soient ainsi reconnus et
récompensés de leur créativité19.
Cette protection internationale aiguillonne la créativité humaine, repoussant les limites de la
science et des techniques et enrichissant le monde de la littérature et des arts. De plus, elle
huile les rouages du commerce international en assurant un environnement stable pour la
commercialisation des produits protégés par la propriété intellectuelle.
L’OMPI œuvre en étroite collaboration avec ses États membres et d’autres parties
prenantes pour faire en sorte que le système de la propriété intellectuelle reste un instrument
souple et adaptable de prospérité et de bien être, conçu pour permettre d’exploiter pleinement
le potentiel des œuvres créées dans l’intérêt des générations actuelles et futures.

18
Bureaux Internationaux Réunis pour la protection de la Propriété Intellectuelle.
19
Publications de l’OMPI, consultable dans le site :
http://www.wipo.int/edocs/pubdocs/fr/intproperty/450/wipo_pub_450.pdf Consulté le 29/10/2017 à 20:00;

19
L’OMPI est largement autofinancée, plus de 90% de son budget annuel reposant sur ses
systèmes internationaux d’enregistrement et de dépôt largement utilisés ainsi que sur ses
publications et ses services d’arbitrage et de médiation. Le reste des fonds provient des
contributions des États membres20.
En tant qu’institution spécialisée du système des Nations Unies, l’OMPI offre à ses États
membres une enceinte où créer et harmoniser les règles et pratiques qui permettront de
protéger les droits de propriété intellectuelle.
L’OMPI administre également des systèmes d’enregistrement international en ce qui
concerne les marques, les dessins et modèles industriels et les appellations d’origine ainsi
qu’un système de dépôt mondial pour les brevets.
Ces systèmes sont périodiquement passés en revue par les États membres de l’OMPI et
d’autres parties prenantes afin de déterminer comment ils pourraient mieux répondre aux
besoins des utilisateurs actuels et potentiels.
Beaucoup de pays industrialisés ont des systèmes de protection de la propriété intellectuelle
plusieurs fois centenaires.
Parmi les pays nouveaux ou en développement, nombreux sont ceux qui s’emploient
actuellement à créer leurs cadres juridiques en matière de brevets, de marques et de droit
d’auteur et leur système de propriété intellectuelle.
Compte tenu de la mondialisation croissante des échanges commerciaux et l’évolution
rapide de ’innovation technique, l’OMPI joue un rôle fondamental en contribuant à
l’édification de ces systèmes grâce à la négociation de traités, à l’octroi d’une assistance
juridique et technique et à la fourniture d’une formation diversifiée, y compris en ce qui
concerne l’application des droits de propriété intellectuelle21.
L’OMPI s’emploie avec ses États membres à mettre à disposition des informations sur la
propriété intellectuelle ainsi que des instruments de sensibilisation à l’intention de divers
destinataires depuis le grand public jusqu’aux milieux d’affaires et aux responsables de
l’élaboration des politiques afin de veiller à ce que les avantages qu’elle procure soient
notoirement connus, bien compris et accessibles à tous22.
En 1995 entre en vigueur l’Accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui
touchent au commerce (Accord sur les ADPIC), droits de propriété intellectuelle, a ouvert
une ère nouvelle en ce qui concerne la protection et la sanction au plan multilatéral des droits
de propriété intellectuelle, les dispositions de cet accord sont directement complémentaires
des traités internationaux administrés par le Secrétariat de l’OMPI23.

20
Idem, Publications de l’OMPI, consultable dans le site :
http://www.wipo.int/edocs/pubdocs/fr/intproperty/450/wipo_pub_450.pdf Consulté le 29/10/2017 à 20:00.

21
Ibid., Publications de l’OMPI, consultable sur le site :
http://www.wipo.int/edocs/pubdocs/fr/intproperty/450/wipo_pub_450.pdf Consulté le 29/10/2017 à 20:00;

22
Ibid., Publications de l’OMPI, consultable sur le site :
http://www.wipo.int/edocs/pubdocs/fr/intproperty/450/wipo_pub_450.pdf Consulté le 29/10/2017 à 20:00.

20
L’Accord sur les ADPIC exige que tous les Etats membres de l’OMC introduisent dans leur
législation des normes universelles minimales pour presque tous les droits dans ce domaine,
par exemple le droit d’auteur, les brevets et les marques.
Ainsi, tous les membres de l’OMC sont désormais obligés de protéger par brevet, pour une
période de 20 ans minimum, toute invention de produit ou de procédé pharmaceutique qui
remplit les critères de nouveauté, invention et utilité.
Il institue également un mécanisme multilatéral de résolution des différends entre les Etats.
L’accord rappelle que les Etats doivent respecter les traités internationaux de l’OMPI.
Par ailleurs, l’accord impose de veiller, d’avoir dans son arsenal juridique des sanctions
contre la contrefaçon et le piratage.

Section II : Critiques de la protection internationale de la


propriété intellectuelle et l’art

Malgré les différentes lois, conventions, et organisations tenant à protéger la propriété


intellectuelle et l’art internationalement parlant, existe et persiste encore de nombreux
problèmes qui résident dans les nations du monde, les plus importantes sont : le plagiat et le
piratage que nous allons voire dans la (sous-section 1) et la contrefaçon dans la (sous-section
2)
Sous-section 1 : Le plagiat et le piratage

Le plagiat consiste à recopier une œuvre, en partie ou en totalité, sans citer ses sources.
Reprendre l’idée d’un auteur en l’exprimant avec ses propres termes n’est pas du plagiat : les
idées ne sont pas protégées par le droit d’auteur, par contre s’approprier la totalité ou un
extrait d’une œuvre en se faisant passer pour son auteur porte atteinte au droit d’auteur, c’est
pourquoi toute personne souhaitant recopier mot pour mot un extrait d’une œuvre doit utiliser
des guillemets qui indiquent au lecteur que ce qu’il est en train de lire a été initialement écrit
par un autre auteur, la citation doit s’accompagner du nom de ce dernier et de la référence de
l’ouvrage dont elle a été tirée, le copier/coller étant une pratique très largement adoptée avec
le développement du recours à Internet pour les travaux de recherche, des logiciels anti-
plagiat ont été mis au point, ils visent à permettre aux enseignants, notamment, de vérifier
que les travaux que leur remettent leurs élèves ne sont pas de simples copier/coller.
Si le développement des technologies a accru considérablement la capacité à copier les
œuvres relevant du droit d’auteur et des droits connexes (imprimerie, photocopie, etc.), c’est
sans doute dans le domaine de l’informatique que l’impact a été le plus important, à travers le
développement de la contrefaçon numérique, communément appelé le piratage informatique.
Les nouvelles technologies ont entraîné une multiplication des actes de piratage à travers la
copie et le stockage de musiques, de films ou encore de logiciels informatiques, ces pratiques,
anodines pour beaucoup de ceux qui les adoptent, représentent pourtant un important manque
à gagner pour les créateurs et les distributeurs officiels des œuvres d’origine.

21
Les pirates informatiques sont ceux qui tirent profit de la diffusion de copies illégales, mais
aussi ceux qui se contentent de télécharger illégalement des œuvres via Internet, dans les
deux cas il s’agit d’un délit, même si les internautes reconnus coupables de téléchargement
d’œuvres protégées par le droit d’auteur n’ont généralement pas été poursuivis pour vol, et
ont du s’acquitter d’une simple amende.

Sous-section 2 : La contrefaçon

Le développement des techniques a également joué un rôle important dans le


développement de la contrefaçon non numérique, en facilitant la réalisation de copies de
nombreux produits, deux cas de figure coexistent24 :
Le consommateur choisit alors d’acheter ce produit qu’il sait n’être qu’une imitation
uniquement parce qu’il est bon marché25.
Il est conscient que ce n’est pas un produit d’origine, on pense par exemple à la
contrefaçon de sacs ou T-shirts de grands couturiers écoulés sur certains marchés ou à celle
de produits de l’horlogerie suisse par exemple.
L’acheteur se fait gruger, le contrefacteur fait des profits en « volant » la propriété d’un
créateur mais aussi en trompant la confiance de l’acheteur, puisque ce dernier n’est pas
conscient du caractère contrefait du produit dont il fait l’acquisition.
Ceci est un délit dans le cas d’une contrefaçon d’une paire de baskets, mais peut en plus
avoir des conséquences graves pour l’acheteur si le produit contrefait est un médicament.
Ceci explique l’inquiétude du milieu médical face au développement de la vente de
médicaments par l’intermédiaire d’Internet, n’importe quel patient pouvant acheter sur le web
ses médicaments, alors que la qualité des médicaments en question n’est absolument pas
contrôlée.

24
https://run.m0k.org/?paged=10 Consultable le 1 /11/2017 à 21 :12 ;
25
Idem., https://run.m0k.org/?paged=10 Consultable le 1 /11/2017 à 21 :12.

22
Conclusion
Cet aperçu d’ensemble des pratiques des entreprises montre la diversité croissante des rôles
joués par le système des DPI et notamment des brevets. Selon les cas, les entreprises utilisent
ces droits soit pour leur pouvoir exclusif – c’est-à-dire pour s’approprier certaines ressources
intellectuelles – soit plutôt pour leur capacité à « inclure » – afin de sécuriser certaines
transactions marchandes ou relations partenariales, dans leurs activités d’innovation et de
création. Cette dualité se retrouve également, à propos des usages stratégiques des DPI,
concernant la distinction entre les stratégies défensives et les stratégies offensives.
Au fond, si ces clivages schématiques sont nécessaires pour l’analyse, la réalité relève
plutôt du mélange des genres, de l’intrication des rôles car ces différentes dimensions sont le
plus souvent complémentaires dans la pratique. Ceci est aussi le cas pour certains usages des
DPI en matière de « technologies vertes », qui combinent incitation à l’innovation et logique
de partage.
Sur le plan empirique, les éléments de comparaison internationale issus des diverses études
disponibles font dans l’ensemble plutôt apparaître un mouvement de convergence entre pays,
concernant les poids relatifs des différents usages des DPI.
Cette situation se retrouve en particulier concernant l’Allemagne et la France : les pratiques
en question y semblent largement similaires, pour autant que les données empiriques
disponibles permettent d’en juger.
Dans ces deux pays comme dans les autres pays comparables, les usages traditionnels en
termes de protection restent généralement primordiaux mais leur poids relatif tend à
diminuer.
Symétriquement, les diverses pratiques d’ordre stratégique au sens large – c’est-à-dire tous
les autres usages – montent en puissance, bien qu’à des degrés variés.
Il en découle qu’entre des pays tels que la France et l’Allemagne, les différences observées
dans la fréquence du recours aux principaux types de DPI (brevets, marques, dessins et
modèles, etc.) tiennent sans doute essentiellement à des facteurs structurels tels que non
seulement l’appartenance sectorielle, la taille des entreprises et le cadre institutionnel mais
aussi la propension moyenne à innover et le degré de présence sur les marchés étrangers.
Quelles qu’en soient les raisons et au-delà des multiples difficultés de mesure et
d’interprétation, la position relative de la France en termes de recours aux DPI n’est
cependant pas qu’un simple reflet des performances des entreprises françaises en matière
d’innovation, d’exportation, etc.
L’analyse montre en effet que la capacité à gérer les DPI est elle-même cruciale en termes
de compétitivité et, plus généralement, pour le dynamisme d’entreprises cherchant à se
positionner au mieux par rapport à leurs concurrentes ou partenaires.
À travers leurs différents usages, de fait, les DPI permettent non seulement de sécuriser des
positions concurrentielles déjà établies mais aussi d’en créer ou d’en améliorer certaines, sur
des marchés tant nationaux qu’étrangers.
Ce constat, d’ordre microéconomique et portant sur les usages, mérite évidemment d’être
prolongé par une réflexion plus macroéconomique sur les effets induits, notamment dans la

23
mesure où la tendance à la prolifération des brevets pose de sérieux problèmes d’intérêt
général.

24
Bibliographie
Ouvrages :

André CABANIS « La législation anti-fraude en Algérie, au Maroc et en Tunisie », in


Actualités Juridiques Tunisiennes, n°6, 1992, p.21 ;
Le droit après la dématérialisation de l’œuvre d’art, Judith Ickowicz, Les presses du réel, 678
pages ;
L’œuvre d’art en droit d’auteur – forme et originalité des œuvres d’art contemporaines, Nadia
Walravens, Oeconomica, 521 pages.
BERTRAND (A), La propriété intellectuelle, livre II, marques et brevets, dessins et modèles,
Delmas, Paris, 1995.

Articles :
La nouvelle législation tunisienne relative à la gestion du droit d’auteur, Actualités Juridiques
Tunisiennes, 1997, n°2, p.23.
Le Monde du 15 novembre 2009.

Wébographies :

https://run.m0k.org/?paged=10
http://www.wipo.int/edocs/pubdocs/fr/intproperty/450/wipo_pub_450.pdf
Www. abondance.com
http://fr.creativecommons.org
Bureaux Internationaux Réunis pour la protection de la Propriété Intellectuelle.

Conventions internationales :
Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle adoptée en 1883

Convention de Berne pour la protection des œuvres littéraires et artistiques adoptée en


1886

Arrangement de Madrid concernant l'enregistrement international des marques, adoptée


en 1891

Lois étrangères :

Loi sur la propriété intellectuelle adoptée à Venise, en 1474


Loi de la reine Anne, adoptée en Angleterre, en 1710
Directive 2001/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2001 sur
l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de
l’information, alinéa

25
Table des matières
Introduction ......................................................................................................................... 2
Chapitre I : La propriété intellectuelle en Afrique ........................................................... 3
Section I : Dessein Continental ........................................................................................................... 3
Section II : Le droit et les œuvres digitales ........................................................................................ 6
Sous-section I : L’œuvre numérique : une œuvre comme les autres ? ................................ 6
Sous-section II : Les usages poussent le droit d’auteur ........................................................ 8
Sous-section III : Des nouvelles possibilités nées du numérique ........................................ 11
Sous-section IV : Faire face aux enjeux du numérique ....................................................... 12

Chapitre II : La protection de la propriété intellectuelle et l’art au niveau international


........................................................................................................................................... 17
Section I : Les protections internationales de la propriété intellectuelle et l’art ............................ 17
Sous-section I : Les différentes protections de la propriété intellectuelle et l’art au 15ème
jusqu’au 19ème siècle .................................................................................................................... 17
Sous-section II : L’OMPI et l’accord sur les ADPIC ........................................................................ 18
Section II : Critiques de la protection internationale de la propriété intellectuelle et l’art ............ 19
Sous-section I : Le plagiat et le piratage................................................................................ 21
Sous-section II : La contrefaçon ........................................................................................... 21
Conclusion ........................................................................................................................ 23
Bibliographie ..................................................................................................................... 25
Table des matières ............................................................................................................ 26

26

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