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Dans leur grande majorité, les séquelles de brûlure sont liées à la cicatrice cutanée, siège d'une réaction inflammatoire et d'une fibrose. Plus rares sont les problèmes
tendineux et articulaires.
Ce sont les cicatrices hypertrophiques et les rétractions cutanées qui sont les séquelles cutanées les plus fréquentes et qui posent le plus de problèmes, tant sur le plan
esthétique que fonctionnel.
Les rétractions cutanées résultent d'une formation anormale de tissus fibreux dans la zone brûlée, ce qui a pour effet de la rétracter. Elles apparaissent en particulier au
niveau des zones de mobilité, à proximité des articulations : cou, épaules, genoux, doigts... Ces rétractions (brides) peuvent limiter nombre de mouvements et entraîner
des déformations.
Au visage, les séquelles prennent des formes diverses. Les plus graves concernent les paupières, avec notamment l'impossibilité pour la paupière atteinte de recouvrir l'œil
(ectropion). Les rétractions des lèvres, également fréquentes, diminuent quant à elles l'ouverture buccale (microstomie).
Toutes les cicatrices évoluent vers une période inflammatoire, inévitable, qui disparaît normalement au bout d'une année.
Mais il arrive que la cicatrice de brûlure suive un schéma différent. Les cicatrices sont alors anormalement rouges et boursouflées, s'accompagnant de démangeaisons. Elles
peuvent mettre un à deux ans pour atteindre le stade mature ; on parle de cicatrices " hypertrophiques ". Celle-ci s'opposent en théorie aux cicatrices chéloïdes, pour
lesquelles les phénomènes d'immaturité persistent indéfiniment.
Evolution cicatrice normale, hypertrophique, chéloïde
3) La fragilité cutanée
Les cicatrices de brûlure sont souvent le siège de plaies survenant au moindre traumatisme (contact, frottement).
L'hypersensibilité est quasi-constante et gêne le brûlé au contact de la chaleur et du froid. Elle s'améliore avec le temps.
Les démangeaisons sont quasi-systématiques, surtout lorsque la cicatrice est hypertrophique. Elles peuvent être handicapantes au point de gêner le sommeil. Elles
s'amenuisent avec le temps et, dans certains cas, à l'aide d'un traitement médical (antihistaminique).
5) Troubles de la pigmentation
Fréquents, ces troubles esthétiques peuvent se traduire par un défaut de pigmentation, surtout chez les personnes de peau noire. Chez les personnes de peau blanche, il
s'agit plutôt de taches brunes ou violacées. Le traitement est à priori chirurgical.
6) La dégénérescence de la cicatrice
L'apparition d'une ulcération chronique sur une cicatrice ancienne de brûlure, sans notion de traumatisme, doit faire rechercher la possibilité d'une cancérisation.
Au moindre doute, il est important de réaliser un examen anatomo-pathologique de la lésion suspecte.
Une mauvaise immobilisation en position non fonctionnelle peut donner, en particulier chez l'adulte, des raideurs articulaires très invalidantes.
B- Traitement des séquelles de brûlures
La prise en charge des séquelles de brûlure doit répondre à deux impératifs thérapeutiques : l'un fonctionnel et l'autre esthétique.
Vêtement compressif.
- Tatouage ou maquillage
Ils présentent un certain intérêt dans le cas de cicatrices dyschromiques (problème de coloration), en particulier sur le visage.
On évitera toute exposition solaire sur une cicatrice de brûlure pendant une année complète (quitte à se protéger par une casquette ou par de l'écran total), afin de ne pas
entraîner ou majorer de dyschromie.
La chirurgie des séquelles de brûlure, qu'elle soit à visée fonctionnelle ou esthétique, ne doit pas être entreprise avant un délai de 6 mois.
En effet, à l'exception de certaines parties du corps (comme les paupières) pour lesquelles on doit intervenir rapidement afin de lutter contre les rétractions, il faut laisser
passer une phase de maturation cicatricielle. Avant ce délai, les cicatrices sont naturellement inflammatoires et continuent d'évoluer. En opérant plus tôt, il est difficile de
bien les travailler et ce serait se priver d'une chance d'amélioration. De plus, ce temps d'attente est providentiel, car c'est une période de deuil pour le brûlé qui doit
apprendre à vivre avec sa nouvelle image et à accepter le regard des autres.
Parfois, plusieurs temps opératoires sont nécessaires, espacés par des périodes de rééducation.
La hiérarchie des interventions doit être planifiée dans le temps en accord avec le patient.
Il convient d'établir avec lui un schéma clair et cohérent de l'ensemble de la prise en charge, afin qu'il comprenne les objectifs à atteindre, les contraintes et le temps
nécessaire à leur réalisation. Une demande exprimée par le patient doit toujours être prise en compte, même si elle semble mineure par rapport aux autres séquelles. Les
rétractions du cou et les défauts d'ouverture buccale (microstomies) doivent être corrigés en priorité en raison de la gêne qu'ils occasionnent pour les anesthésies. Les
lésions des mains sont également prioritaires.
Malgré les massages et la kinésithérapie, les cicatrices peuvent développer des brides rétractiles entraînant une gêne fonctionnelle. On peut dans de tels cas recourir à un
traitement chirurgical. Ce traitement a pour but d'ouvrir transversalement les tissus cicatriciels rétractés pour faire apparaître la perte de substance, et de couvrir celle-ci
soit par une greffe de peau soit par un lambeau.
- La greffe de peau
La greffe de peau est le procédé chirurgical le plus simple. Elle est employée lorsque la peau saine à proximité de la rétraction ne permet pas la confection d'un lambeau et
lorsque la perte de substance cutanée laisse un sous-sol bien vascularisé, permettant une bonne prise de la greffe (graisse sous-cutanée, muscle...).
Idéalement, il s'agit d'une greffe de peau totale. Dans ce cas, le prélèvement emporte toute l'épaisseur de la peau (épiderme et derme ). Ce prélèvement est effectué à un
autre endroit du corps, et il est coupé de sa vascularisation. Il va, une fois fixé sur la zone non cicatrisée, adhérer au sous-sol, se revasculariser et combler ainsi la perte de
substance. La greffe de peau offre l'avantage d'être simple et efficace lorsque la prise de greffe est complète. Elle peut néanmoins être le siège d'une rétraction ultérieure.
- Le lambeau
Le lambeau est un transfert de peau qui, à l'inverse d'une greffe, conserve sa propre vascularisation. Il permet une couverture de meilleure qualité que la greffe de peau,
car il apporte une bonne épaisseur cutanée et ne se rétracte pas. Il est notamment utilisé lorsque la libération de la bride met à nu des éléments nobles (nerfs, vaisseaux..)
qui ne peuvent prendre en charge une greffe de peau.
.Les lambeaux locaux viennent du voisinage et sont employés lorsque la peau saine entourant la bride peut être utilisée. Ils permettent de supprimer la bride en intercalant
de la peau saine au sein de la cicatrice. Les plasties en Z, en IC et en trident sont les plus communément employées. La plastie en Z, par exemple, est utilisée en cas de
brides linéaires. Elle consiste en deux lambeaux de peau triangulaires découpés des deux côtés de la rétraction, qui sont ensuite intervertis. Ainsi, la quantité
supplémentaire de tissu de part et d'autre de la bride est utilisée pour allonger la cicatrice.
Technique de la plastie en Z
.Les lambeaux libres prélevés à distance et nécessitant une suture micro-chirurgicale sont utilisés lorsque les autres techniques se révèlent impossibles. Ils permettent une
couverture de n'importe quelle région du corps. Leur réalisation est toutefois plus délicate.
- L'expansion cutanée
La chirurgie réparatrice des séquelles de brûlure consiste essentiellement à remplacer la peau brûlée cicatricielle par de la peau saine. Elle trouve ses limites dans la
quantité de peau saine disponible. Grâce à l'expansion cutanée, il est possible d'augmenter ces réserves.
Elle repose sur la faculté que possède la peau d'augmenter sa superficie lorsqu'elle est soumise à une augmentation de volume sous-jacente : la grossesse en est un parfait
exemple. Cette méthode, développée en France par le Pr Baux dans les années 80, est actuellement couramment utilisée par les chirurgiens de la brûlure.
Un ballon de silicone est glissé sous la peau saine avoisinant la zone cicatricielle.
Il est gonflé toutes les semaines avec du sérum physiologique grâce à une valve placée à distance. La peau saine sus-jacente se distend progressivement.
En fin d'expansion, dont la durée varie selon les cas (en moyenne 6 à 10 semaines), la prothèse est retirée. La peau brûlée cicatricielle est retirée pour être remplacée par
la peau saine expansée. Cette méthode a l'avantage d'apporter un tissu semblable à celui que l'on désire reconstruire. Elle donne, dans la correction des séquelles
esthétiques, d'excellents résultats.
Prothèse d'expansion cutanée pour cicatrice de brûlure du dos.
La greffe de peau totale donne de bons résultats esthétiques sous réserve d'une réalisation minutieuse. Idéalement, la greffe doit être prélevée à proximité de la zone à
corriger pour que son épaisseur, sa texture et sa couleur soient les plus proches possibles du tissu d'origine. Elle s'avère intéressante et donne de bons résultats
esthétiques pour de petites surfaces, par exemple au niveau du visage et des mains. Elle ne permet pas de gommer une cicatrice mais, greffée en respectant une " unité
esthétique ", elle remplace une zone cicatricielle inhomogène en la transformant en zone homogène plus discrète.
CONCLUSION
La chirurgie des brûlures, et de leur séquelles, exige une parfaite connaissance des divers procédés de chirurgie réparatrice. Seule une solide expérience permet d'indiquer
les résultats à espérer, ainsi que leurs limites, tout en déterminant les solutions qui offrent au patient les meilleures chances de mener à nouveau une vie normale.
La qualité de ces résultats, aussi bien sur le plan esthétique que fonctionnel, repose sur une prise en charge globale. En effet, une intervention chirurgicale sera d'autant
plus efficace qu'elle sera complétée par les traitements secondaires appropriés : vêtements compressifs, kinésithérapie et cures thermales. On ne doit rien négliger de ce
qui peut soulager le patient, améliorer son bien-être et lui apporter un réconfort moral.
Dans cette longue entreprise, où alternent parfois les moments d'espoir et d'abattement, le soutien psychologique est d'une extrême importance, car les étapes du
traitement demandent au patient beaucoup de constance et de persévérance... et presque autant au chirurgien.
Technique chirurgicale
Les techniques de reconstruction chirurgicale dans les cas des défonnités plus ou moins
étendues du corps causées par les brûlures sont différentes, et le succès de chacune prévoit
une approche correcte; parfois l'emploi combiné de plusieurs techniques est nécessaire pour
compléter la correction d'un même type de lésion.
La plastie en "Z", les greffes cutanées, les lambeaux plus récents et plus efficaces sont à
disposition du chirurgien.
Les greffes cutanées les plus souvent employées dans la reconstruction des zones
cicatricielles hyper-trophiques sont des autogreffes simples à épaisseur partielle ou à
épaisseur totale. Si le prélèvement de ces greffes est de petite dimension, il est effectué
à main libre avec le bistouri, s'il est de grandes dimensions, avec le dermatome
électrique. Les zones donatrices sont représentées par les È le résidu cicatriciel est peu
visible. Pour sièges ou les grandes greffes à épaisseur partielle ce sont la partie interne
du bras, la région des fesses et la surface intéro-latérale de la cuisse; pour les petites
greffes à épaisseur totale la région rétro-auriculaire, celle inguinale et supraclavéaire
sont préférées. La cicatrisation de la zone donatrice se fait par réépithélialisation
spontanée dans les greffes à épaisseur partielle; au contraire, pour les greffes à
épaisseur totale, à condition qu'elles soient de petites dimensions, la guérison se fait
par fermeture directe des berges. Toutefois il y a des limites à l'emploi des greffes
comme l'aspect esthétique pas toujours satisfaisant, à cause de la possible hypo- et
hyperpigmentation et la tendance à la rétraction de la greffe.De préférence, nous
utilisons des greffes à toute épaisseur en exploitant la rétraction cicatricielle minimale,
des greffes de petites dimensions pour fermer la zone donatrice avec une suture des
berges.Les zones rétroauriculaires ou supraclavéaires, quand elles sont disponibles,
sont les sièges du prélèvement cutané.
Ces greffes sont des substituts excellents pour la peau des paupières et des lèvres.
Fig. 2A Séquelles de brûlures déjà traitées avec exposition tissulaire de la région cervicale et perte de la
ligne de démarcation du profil de la lèvr inférieure. Aspect de face et de profil.
Le principe fondamental de cette technique c'est qu'on peut disposer, dans la région
immédiatement voisine du placard cicatriciel a supprimer, d'une quantité de peau
suffisante de la même texture et la même coloration qui permet de recouvrir sans
traction la zone d'exérèse.
La technique consistera dans un premier temps opératoire de placer sous la surface de
la peau saine juxta-cicatricielle un bollonet gonflable (ou prothèse d'expansion)
approprié. Celui-ci sera alors gonflé progressivement de façon à obtenir une exposition
de la peau saine qui viendra recouvrir dans un deuxième temps opératoire le déficit
cutanée créé par l'éxèrese du tissu lésé.
Le choix des prothèses d'expansion résulte de l'étude de la perte de substance a
recouvrir, de ses dimensions, de la localisation du terrain vasculaire des cicatrices
éventuelles pré-existantes et de la prevision du tracé du lambeau d'expansion.
Fig. 4A Cicatrice hypertrophique de la région Fig. 4B Aspect à la fin de l'expansion conduite par
cervicale en face et de profil. deux prothèses.
Discussion
Les séquelles les plus graves d'une lésion thermique sont la formation des cicatrices
rétractiles, hypertrophiques et des chéloïdes. La rétraction n'est pas limitée à la
brûlure de troisième degré. Celle de deuxième degré aussi, qui intéresse seulement
l'épaisseur partielle de la peau, se retire pendant la cicatrisation. La rétraction sera
majeure dans le cas des paupières, des lèvres, des joues, du cou et dans les surfaces
articulaires.
Fig. 4C Aspect un an après l'intervention en face et de profil.
Pour réduire les déformités cicatricielles dans ces sièges, il est necessaire, dès les
premiers mois, l'emploi de remèdes médicaux et physiothéra peutiques. Pour un
traitement chirurgical correct, d'abord on fait une recherche soigneuse sur le temps et
l'évolution de la cicatrice; ensuite un examen objectif qui évalue l'épaisseur, la couleur
et la souplesse de la cicatrice, son extension, sa profondité et son siège anatomique;
enfin on évalue le déficit esthétique et fonctionnel qui en dérive. Les techniques
chirurgicales dont nous disposons sont différentes et parfois, pour terminer la
correction de graves déformités, il est nécessaire d'en utiliser plusieures. Dans nos
expériences l'emploi des greffes est limité aux phases précoces de la brûlure et dans les
stades tardifs il trouve son application dans les cicatrices rétractantes des paupières et
de la lèvre inférieure. La tendance à la rétraction, la couverture insuffisante des plans
profonds, l'aspect esthétique pas toujours satisfaisant, parfois avec des hypo- et
hyperpigmentations, sont les désavantages et les limites des greffes. Les plasties en "Z"
sont un très bon instrument pour les cicatrices rétractantes linéaires pour en obtenir
un allongement et un changement de direction.
Les résultats que nous avons obtenus dans l'emploi de cette méthode pour les
cicatrices rétractantes du pilier antérieur de l'aisselle et de l'articulation du coude ont
été très satisfaisants.
Leur avantage a été celui d'avoir réduit le déficit fonctionnel en récupération totale de
l'aspect morphologique et esthétique.
L'utilisation de lambeaux locaux à vascularisation "random" ou axiale, transposés,
tournés et avancés, requiert un tissu de bonne qualité tout près de la cicatrice. Ces
lambeaux sont indiqués pour recouvrir des pertes de substance de petites dimensions.
Si le placard cicatriciel est très étendu, nous utilisons l'expansion cutanée, technique
récente qui nous permet de gagner de la peau de la même couleur et texture à
suffisance pour couvrir sans tension la vaste zone d'exérèse.
Le choix du nombre, de la forme et du volume des prothèses résulte de l'étude de la
perte de substance à recouvrir, de la peau proche et de la prévision du tracé du
lambeau d'expansion.
Encouragés des bons résultats obtenus, nous préférons cette dernière méthode à
d'autres, plus traditionnelles, quand il est possible.
SUMMARY. A survey is made of the formation and surgical treatment of pathological scars, which are
the most serious complication in burn patients. The surgical techniques to eliminate these scars are
described - Z-plasty, skin grafts and flaps. Skin expansion is very useful for the surgeon as it provides
him with a sufficient quantity of skin of the same texture and colour.
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