S’il est un hommage à rendre ici, c’est bien à Marc Fromager, figure de ces catholiques de
combat devenus trop rares dans l’Eglise. Ce laïc, père de six enfants, assez lucide pour
mesurer les dangers de l’islamisme mais assez courageux pour le combattre, s’est
littéralement mis au service de sa foi. Né à Nouméa en 1968, les longues années qu’il a
passées au Proche-Orient lui ont permis de mesurer la vulnérabilité des communautés
catholiques en de nombreux points du globe, mais aussi la fragilité de l’islam, dont un
nombre croissant de fidèles sont, soit indifférents à leur religion, derrière apparences et
simagrées, soit tentés en secret par la foi catholique. Son parcours est impeccable : directeur
en chef de la revue « L’Eglise dans le monde », il fut un directeur très actif de l’association
AED (Aide à l’Eglise en Détresse) et entreprend à présent d’amplifier les actions de Mission
Ismérie qui vient en aide aux musulmans convertis. Chapeau !
PMC – Le monde musulman est partout conquérant, mais il semble aussi qu’un nombre
croissant de ses fidèles doute – aussi bien dans les pays à majorité musulmane que dans
les communautés musulmanes d’Europe ; quel est votre sentiment sur ce point ?
Marc Fromager – Il y a quelque chose d’assez paradoxal dans ce qui se passe au sein de
l’islam aujourd’hui. On a à la fois cette impression de force conquérante, ne serait-ce que
sur le plan démographique, et en même temps des signaux très clairs de profonde crise.
On pourrait parler d’un colosse d’argile. Pour schématiser, on pourrait catégoriser la
communauté musulmane en trois parties : une première, minoritaire mais très engagée,
qui se radicalise dans une dynamique de sécession ou de conquête, parfois les deux à la
fois ; une seconde, de plus en plus répandue, de distanciation par rapport à la religion, en
voie de sécularisation voire d’athéisme ; une troisième enfin, qui est plus ou moins à la
recherche d’une autre proposition religieuse, en général le christianisme. Cette
catégorisation assez large s’applique tout autant à la population musulmane présente en
Occident que dans les pays à majorité musulmane. Dans les deux cas, on cherchera
souvent à mettre en avant la partie la plus radicale parce qu’elle est plus visible et qu’elle
fait parler d’elle, mais en réalité, un mouvement de sécularisation est partout à l’œuvre.
Et cette remise en cause peut aller jusqu’au rejet le plus profond – même s’il reste discret.
Dans beaucoup de pays à majorité musulmane, la population essentiellement jeune
supporte de moins en moins la théocratie avec son lot de muttawas (police religieuse) et
d’ayatollahs. Internet est une vitrine sur le monde extérieur et sert de catalyseur à cette
profonde remise en cause.
PMC – Dans l’Histoire, les conversions de musulmans à la religion chrétienne n’ont pas
été rares, à commencer par la belle figure d’Ismérie, princesse musulmane du XIIe siècle,
fille du sultan d’Égypte, qui se fit chrétienne après avoir rencontré des chevaliers que son
père l’avait envoyée convertir. Pour reprendre une de vos expressions habituelles, un bon
nombre de musulmans français sont aujourd’hui ‘’en chemin vers le Christ’’ ? D’après
vous, quelles sont les motivations les plus fortes, et celles sur lesquelles nous pourrions
agir le plus utilement ?