EDITION NATIONALE
DE MUSIQUE CLASSIQUE
Ne 5474
ALFRED CORTOT
Edition de Travail
des CEuvres de
LISZT
ETUDES
D’EXECUTION TRANSCENDANTE
Volume I
ETUDE nv : Preludio
nell:
n°lll: Paysage
— n° lV: Mazeppa
TRAVAILLER, non seulement le passage
EDITIONS SALABERT
22, rue Chauchat-Paris
Printed in Frence
“Tous dein deadeaion publique de thadiction, de production et iurangementsrserés pour tou pareETUDES D'EXECUTION TRANSCENDANTE
de FRANZ LISZT
AVANT - PROPOS
ne semble pas que Yon ‘tre tax darbitraire en assimilant le procédé d¥inancipation artistique dont tém
trvis nidactions successives de ces Etudes, devenues sous leur forme définitive Tun des monuments Tes plus universellement
deta literature panisiqus a Texemple de 1volution physiologiae dnt le regne animal nous fourntt un surprenant spéctmen
sans les espéces du cocon, de la chrysalide et du papillon dant Ws tranformations ne représentent que les aspects suceessifs
dun méme principe organique .
Le premier état de cette incomparable"somme” des ressources matérielles de Vinstrument.auxquelles vjennent parla sti.
te sadjoindre les imaginatives donnces de la suggestion pittoresque . voit le jour en 1826 sous le fitre « d'Etudes pour le
Pianoforte en 48 Exercices, dans tous les tons majeurs et mineurs, par le jeune Liset". Appellation des plus justifies
puisque eelui-ci,a cette époque, west agé que de quinze ans.
Des quatre livraisons de 12 Etudes chaque, promises par Tintitulé de cette collection juvénile,une seule devait
tre, renfermant, a titre embryonnaire et traites selon les principes techniques de Hummel et de Ctémonti. les éléments 1]
tiges des 2 Htudes dont deux editions uiteieures obit mélamorpboser les timides donndes pédagngtaues dorigineen les
revétant des attributs de 1a plus audacieuse virtuosité et en les dotant, dune signification musicale qui lear vaudra: de
compter parmi les cuvres les plus representatives de Vapport de Liszt a la production pianistique du XIX° siecle.
Cette serie quasi enfantine ainsi limitée & douze exercices (les trente-six autres wont jamais été rédigées), éditée
ar Boisselot & Marseille, se voit dédice a Mademoiselle Lidia Garella, avec laquelle “Le petit Lite” peur employer
forthographe ef ls proneniation dtectucses de son nom, qui prévalaient alors et n'ont cesse’,en France tout au moins
el jusqih ce four, U8ire employées dans certains milieux dont on spas & exclure To milieu musical - avait eu en
1825 Loccasion de jouer & quatre mains au cours de son séjour daus.ta cité phocéenne.
On aura Po je revenir a maintes reprises sur cet essai,au cours des commentaires consacrés & chaque étude
dans la présente édition; ne fit-co que pour en Wentifier Les germes mélodiques ou pour démentir quelques-unes des
assertions tendancieuses ou erronnées contenues dans un article singuliérement incompréhensif de Robert Schumann
wee qui wétait pas sa maniére accoutumee - relatif & la parution de 1a seconde version de ces “Bxescices? pour employer
Texpression qai définit am mieux le caractére et Ia tendance de ces ébauches du jeune ago.
Cost en 1889,et apres avoir déja attesté duno manitre sensationnelle, par la rédaction des“Six Etudes de bravoure
dyes les Caprice de Waganini” la hardiesse et la nouveaute do ses conceptions planistiqus quo Lise, ant les fudrey
ants succts s¥galaient & ceux du violoniste magicien dont il renouvelait les exploits en les transposant au clavier, en-
{reprend In refnte totale ef lo Acveloppement genézeux de ce, esguisses rudimentaires qui, rendues @ peu prés mécon-
aaissables - et méme pour Schumann comme on le verra plus loin encore que les arguments génerateurs en alent été pres.
ue intégralement coaservés dans Ia nouvelle mouture - paraissent en 1839 chez divers éditeurs qui s'en disputent In pré-
sentation simultanée dans plusieurs pays, sous le titre une fois encore trop prometteur de "24 Grandes Etudes pour le piano”
cl sédaction des douze dernitres étant demeurée a Yétat de projet . dédices Carl Cerny, en témoignage de, reconnais.
sance et de respeclueuse amiti¢, par son éleve Franz Lisct ”
Crist un monde de musique de technicité gui sépare cette seconde version de sa pucrile devancére Il ne sti pas
ic @Exerces, au Sens péergtf du mot, mals de frémissanis on Aramaligues compositions dnt certeacsportnt ej des
filres érocateurs, telles les 3° et 8¢8* = dénommées respectivement “Mazeppa” et*Pandaemonium™, et de méme que les
tudes dupres Paganini, dctentrices de toutes les audacieuses recherches d'une. stupéfiante virtuosite.
Puis,a nouveau amondées,stylisees et promues en quelque sorte au rang de“Tableaux musicaux” dont une palette sonore,
incroyablement riche en effefs instramendanx de tous ordres,s'ingénic a diversifier,a ativer le coloris, deseriptif,ce sera en
1852,et feisant Fobjet dans le catalogue de ses aavres dune déclaration semblatle celle dont s'accompagnait Ja publica.
tion des Etudes d'aprés, Peganint sorte dexcommunication des versions antérieures et dont ila été ahondamment question
dans Vition de travail de cette e wuvre . La parution de F'édition definitive chez Breitkoff, sous le titre « Btudes
Execution transcendante”, la dédicacc & Carl Czerny s'y voyant maintenue
Cest celle-ci dont le texte est intégralement reproduit dans le présent volume ,mais et de méme que pour les Etudes
dupris Paganini one oe fera pas fake dlempronter aux deux versions antérieures tous les éléments de comparaison
qui peuvent contribuer a en rendre l'étude plus instructive ou plus profitable et,en soulignant la nature ou Timportance des
Tetoiches successives,a accroftre les raisous d’admirer si pleinement justifiees par les persévérantes retouches dun esprit
créateur inlassablement animé par un plus heut souci dexpression masicale.
Ge west gus ans on Tdi nie entendre non ans surprise, que Schumann eareisie dans wn article daté
de 1839, les caractéristiques de le métamorphose laquelle donne lieu Yéloquente amplification des arguments de Tere
de jeunesse et lear utilisation en tant qu’léments générateurs de Ia version plus ambitieuse qui les remet en cause, repré
sentant Le second aspect de Ivtonnant effort de renouvellement instrumental qui,em 1851, rencontrera son moyen de réali -
sation definitive.
‘Tout sersit i reproduire de cos Lignes malencontreuses qui témoignent de la part de Vardent initiateur de ce Davids
bund. ennemi déclaré de tout académisme - dine curieuse inaptitude & pénétrer les féconds mobiles dont s'inspire Ix
“réinvention™ lisztienne de 1839.(On se borners a en dctacher les passages les plus significatifs,en accordant cependant & Vexorde do cet article le bébé -
fice dune citation textuelle : “Nous’ commencerons”. dit Schumann’ -“par faire part aux Iceteurs d'une découverte qui
fera qvaugmenter Linterét qu'il doit accorder & ves Etudes. Nous venons,en effet, de prendre connaissance dun premier
torn rédité par Hmester sous Ie ttre oeuvre I et désigné comme “Travail de jeunesse”, puis d'un autre paru cher
Haslinger sous le titre de Grandes Etudes”.
“dy un examen plus attentif nous 4 permis de constter que Ja plugart des pitess du second recuei> ne sont que des. 18.
maniements de celfe ouvre de jeunesse & laquelle nous faisons allusion, parue & Lyon” (Ce qui est inexact, car iL s'agit
de Marseille, comme on W'a dit au début de cet Avant-propos) “ily # deja longtemps, une vingtaine d'snnées pent-étre
ef qu etait demeurée en quelque sorte ignorée en raison cu peu dimportance de ls firme éitrice initiale,et qu vient d8ire
réimprimée en Allemagne.” i" -
Si done on ne peut considérer comme proprement original le recueil qui vient de voir le jour chez Haslinger il doit
au moins a raison de cette similitude que je viens de dire, garentir un double intérét pour le pianiste professionnel qui
aura ainsi Toceasion de le comparer & Ia version primitive
“De cette comparaisen, en effet ,ressort tout dabord 1a
férence quily a,dans la maniéxe de jouer du piano, entre cette
Suge ef aujortbsotcombien J nouele anit sh ‘cveloppée au point de vue de Ia richesse des procs, sefforee
porous tes moyens & renchétiren élat et en abondanco sus Yancienne;tandis que, daulre part lanaiveté naire ql
penctrait in{imement la premiéro effusion de la jeunesse. parait fire étouffée dune manieve irrémédiable pet Ta forte
Acluelle de Pouvre. Bt le nouveau travail fournit amples matiéres & eonsidération sur la maniére de penser et de sentir
feTartste qu sifficme aujourdbui toate renforcée de prétentions et vous met & méme de regretter que Thome ne jes,
fifie pas les promesses de Henfant.” :
En véritén epoit rBver en trouvant sous 4a plume de Florestan ces remarques sentencieuses empreintes da conformism;
le plus déterming,et qui ne seraieat admissibles qu’émanant de la bouche de Maitre Raro,le dacte Magister du Davidsbund,
-auguel est dévolu,dans le conception schumannienne, le rile ingrat du comptempteur né . 2
Et Leutenr de eiseriana dinsister,en déuongant dans les Tignes suisanes les Yextrvagantsartfius de virtuosité.
dont la témerité dépasse toutes les bornes®, Et,comme conclusion i analyse a laquelle il vient de se fivrer, portant surg:
Is dene versions quit met on pura il while pasa cmsiier Liszt dnt I taent ds eompesiter Ink para encore fi
incertain,de"revenir a la claste,a la simplicitetelles qu’elles se presentent de si agréable fecon dans les Etudes Juvéniles
dent les difficultes deja réelles auraient plotot eu a gagner a se voir alléger plutot que démesurément accrues.”
Suit une confrontation des Etudes de Tuncienne et de la nouvelle collection dont on réserve Tutilisation pour les com
taires dont saccompagne cette édition de la version “ ne varietur "de 1851 . c
Lattitude do Schumann est ici d'utant plus surprenante que nous le verrons,en 1842,rediger en faveur des Btudes
née Listt daprés les Caprices de Paganini, dont los tendances a la virtuosité témoignent dlne témerite encore plus exc
Sive tout au moins dans la version dont i! rend compte . que celles dont on reléve los manifestations dans la rédaction du
tus des 12 Etudes & laquelle s'appliquent les surprenantes remarques qui prétedent.
t-te pas inutile de signaler que, l'époque ob elles se voyaient ainsi formulées, Schumann et Liszt rtm
de contact personnel et que, dts 1640, sles premiers concerts en Saxe du. prestigeux vrtuse is Lappr
des gal personalte le ton change, et que Schumann convent de bane ‘grace que “le démon commenca alors’ exerce
su puissance faseinatrice ”
We retenons done pas cette appréciation hative d'un jeune musicien encore pew favorisé du succt
i fnatsat Jes fules ex mattan a ere do ses ares les dns de prodigiense virtuosité qu
il
ison
surToeuvre d'un ri
Tui étaient départis:¢f
ement par le nature,et duquel il avait besoin sans doute de mieux connaitre les généreuses aspirations pour porte
droit. un jagemest plus équitable.
0n.déji mentionné gie,do méme que pour les Etudes duprés Paganini Liszt déniait aux versions
cendantes toute Légitimité i la représentation de ses véritables intentions créatrices. .
Nous avons le privilége de posstder le manuscrit autographe dune fort importante communication de Liszt an compile 4
‘ear di catalogue de ses ceneres pau on 1855,¢4ez Breitkopf,dans laquelle il précise ses volontés de le manitre suivante:
“edition d'Hofmoister des 12 Btudes (mentionnant “Travail de jeunesse”) nest qu'une simple reimpression des Btudes qu
furent publiges en France lorsque j'avais treize ans. J'ai dés longtemps désavoué ectte édition et Vavais remplacée par unt <
seconde version intitulée “Btudes'dexécution transeendante "(ici les souvenirs de Liszt sont en défaut catte seconde version:
portant Ie titre de “12 Grandes tudes”). B
“Mais cette Bdition elle-méme a ét6 annulée par moi depuis plusieurs années -et » ma demande les Rditeurs wen ont dis
lors retourné les planches et se sont engugés 4 ne plus en metize dexemplaires en vente. 7
“En complet agrément avec eux,jai établi une troisiéme rédaction de mes 12 Etudes et jai prié MM. Wartel dels pub:
avec La note Seale dition anthentiqne revue par Taner
““En eonséquence je ne reconnais que celle-ci comme me faisant justice et je demande qu'il ne soit pas feit mention
le catalogue des éditions antérieures ",
Ces exclusives donnent au reste a Liszt dans la suite de sa lettre, aprés avoir émis les mémes réserves concer
Etudes daprés Paganini et les Rhepsodies Hongroises, Yoccasion de défendre, pour le compositeur de musigue,te dra
fonte ou A Tamendement dteuvres antérieures en se basant sur les nombreux exemples de ce genre fournis dans le domaine lit
vase Mais, aout, est plas effete de procter, ainsi & Teadrot de a mosiqu
‘Autank que cela nous sera permis dans les limites de cette révision entitrement conforms aux exigences de Lisztson
forcera néanmoins & mettre en regard les uns des autres les états successifs dune élaboration qui porte sur un intervalle de plas
25 aus,et dont chaque manifestation, comme ile dit encore dans 1a lettre que Von vient de citer, es¢ Texpression différente dlne
riods particulitre de son individualit€ artistique”, Car on est assuré quune plus parfaite intelligence de celle-oi ne saurat tre
‘ence comme un élément superflu de la tendance pédagogique i laquelle obéissent les caractéristiques de cotte édition de travail
EMS. 8474 A.C,