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Les morts ne rêvent pas
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Les morts ne rêvent pas

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UNE NOUVELLE ENQUÊTE D’ETHAN BUSH
L’agent spécial de l’Unité d’Analyse Comportementale du FBI, Ethan Bush, traque un tueur en série dans le Nebraska...
UN THRILLER A COUPER LE SOUFFLE
Le monstre vit en chacun de nous. Nous sommes des créatures qui ont appris, au fil des siècles, à se contrôler, à maîtriser leurs instincts les plus élémentaires et à vivre paisiblement en société. Nous sommes, en résumé, des créatures entièrement domestiquées et bien formatées.
Mais parfois, la bête sauvage qui se cache au plus profond de nos entrailles se déchaîne et provoque un monstrueux cauchemar…

Si vous avez aimé « Le silence des agneaux » ou les séries « Twin Peaks » ou « True Detective », voilà l’intrigue que vous attendiez !

LanguageFrançais
PublisherBadPress
Release dateNov 22, 2016
ISBN9781507163832
Les morts ne rêvent pas

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    Les morts ne rêvent pas - Enrique Laso

    Table des matières

    Chapter I

    Chapter II

    Chapter III

    Chapter IV

    Chapter V

    Chapter VI

    Chapter VII

    Chapter VIII

    Chapter IX

    Chapter X

    Chapter XI

    Chapter XII

    Chapter XIII

    Chapter XIV

    Chapter XV

    Chapter XVI

    Chapter XVII

    Chapter XVIII

    Chapter XIX

    Chapter XX

    Chapter XXI

    Chapter XXII

    Chapter XXIII

    Chapter XXIV

    Chapter XXV

    Chapter XXVI

    Chapter XXVII

    Chapter XXVIII

    Chapter XXIX

    Chapter XXX

    Chapter XXXI

    Chapter XXXII

    Chapter XXXIII

    Chapter XXXIV

    Chapter XXXV

    Chapter XXXVI

    ––––––––

    Un monstre vit en chacun de nous. Nous sommes des créatures qui, au fil des siècles, ont appris à se contrôler, à maîtriser leurs instincts les plus élémentaires et à vivre paisiblement en société. Nous sommes, en résumé, des créatures entièrement domestiquées et bien formatées.

    Mais parfois, la bête sauvage qui se cache au plus profond de nos entrailles se déchaîne et provoque un monstrueux cauchemar...

    Chapitre I

    Cela devait bien faire deux heures que ce type promenait son chien, à tenter de tuer le temps et éviter de traîner dans les pattes de son fils et de sa femme qui, à la maison, s’affairaient à la préparation d’un délicieux dîner composé d’une dinde cuite à point, de purée de pommes de terre, d’une sauce aux baies rouges et, en guise de dessert, d’une splendide tarte au potiron. Ce serait ensuite à lui de débarrasser la table et de faire la vaisselle. La répartition des tâches était plutôt équitable, même s’il détestait laver les assiettes. Mais ça valait plutôt le coup. On ne fêtait Thanksgiving qu’une fois par an.

    Il avait parcouru ces chemins desséchés, compactés par les premières gelées automnales, des centaines de fois, et il ne faisait aucun doute qu’il les connaissait comme sa poche. Le fait est qu’il ne s’en lassait jamais, car leur beauté brute l’aidait à oublier un passé chargé d’avenues bondées, de pollution et du bruit assourdissant de la circulation. C’est certainement la raison pour laquelle il s’aperçut immédiatement que les buissons sur la droite du chemin qu’il empruntait étaient légèrement écrasés. La curiosité le poussa à s’y aventurer, imaginant qu’avec un peu de chance, il tomberait sur une saleté de blaireau, un renard apeuré ou un raton-laveur.

    Il venait à peine de sortir son smartphone de l’une des poches de son treillis, dans l’espoir de prendre une photo à peu près convenable de ce qu’il allait trouver là et la montrer fièrement à sa famille à son retour, lorsque les aboiements de son chien le firent sursauter. Il était à quelques mètres devant lui, et il semblait avoir découvert quelque chose de vraiment intéressant. Le type se dit qu’il s’agissait certainement du cadavre d’un petit animal, et il s’avança avec un rien d’appréhension. Ces cinq années passées en pleine nature n’étaient pas parvenues à donner à l’homme, qui avait passé vingt ans comme courtier à Wall Street, le goût de la vie sauvage, et son ancien ‘lui’ revenait souvent à la charge pour essayer de prendre le pas sur une vie devenue beaucoup plus paisible.

    - Qu’est-ce qu’il y a, Duke ? demanda-t-il, comme si son minuscule Beagle pouvait le comprendre et lui répondre.

    Le type s’approcha de lui, en souriant et se moquant de sa propre naïveté. Lui revenaient en mémoire les centaines de discussions qu'il avait entretenues avec Duke. Mais tout à coup, une vision d'horreur transforma son insouciance en un mélange de dégoût et de panique qui lui souleva le cœur. Son beagle reniflait une poignée d’os qui, bien qu’il ne fût pas expert en médecine, en paléontologie et encore moins en anthropologie, ne lui laissèrent aucun doute quant à leur origine humaine.

    - Viens Duke, fichons le camp !

    L’homme se précipita chez lui, mortifié par le souvenir de ces restes, incapable de dire comment ils s’étaient retrouvés là mais certain que quelqu’un les avait abandonnés à cet endroit à peine quelques jours auparavant. Qui avait bien pu gâcher ce site idyllique ? Quel genre de monstre avait bien pu se débarrasser de ça à moins d’un kilomètre de chez lui ? Sa magnifique soirée de Thanksgiving venait de se transformer en cauchemar.

    J’imagine que c’est ainsi que tout a commencé. Je n’ai jamais pu m’entretenir avec cet homme car il était tombé dans une profonde dépression avant mon arrivée dans le Nebraska et, d'après son psychiatre, il ne pouvait répondre à aucune question. Certaines personnes ont ce genre de réaction lorsqu’ils sont confrontés à l’immensité du mal, d’autant plus s’ils ont été soumis à un stress permanent dans le passé.

    Et je l’imagine ainsi, même si les rapports que j’ai pu consulter étaient, évidemment, beaucoup plus stériles et aseptisés dans leur description de cette première affaire, parce que j’essaie de me mettre dans la peau de cet homme qui pensait avoir trouvé le parfait endroit pour se reposer et profiter de quelques années de tranquillité bien méritée, au milieu de nulle part, entouré de chênes, en compagnie de sa femme et de son fils. Mais l’enfer peut croiser notre route par le plus grand des hasards et bouleverser nos vies à tout jamais.

    En ma qualité d'agent de l'Unité d’Analyse Comportementale du FBI, j’avais suivi une formation approfondie pour me permettre de vivre aux côtés de ces monstres sans en devenir un moi-même ; mais en tant qu’expert en psychologie, je ne savais que trop que lorsque des individus normaux sont soudainement confrontés directement et personnellement à une sauvagerie de telle ampleur, leurs âmes en sont meurtries, d’une blessure qui ne se referme parfois jamais.

    Chapitre II

    Il me restait une question à régler et j'attendais patiemment l’occasion de tomber sur Peter Wharton, mon supérieur, au siège de Quantico, afin de lui demander l’autorisation et les ressources nécessaires pour résoudre une affaire qui était devenue personnelle. Mon angoisse ne s'était pas le moins du monde atténuée au cours des derniers mois, et j'étais convaincu, avec tout l'égoïsme d'un enfant gâté, que j'avais mérité le droit de m'occuper de l'affaire de mon choix, fut-elle hors de ma juridiction. Ce qui prouve à quel point, à cette époque, j'étais encore suffisant et immature.

    Je ne nie pas avoir essayé, sur les conseils de ceux qui me portaient dans leur cœur, de laisser les plaies se refermer et d'abandonner le passé derrière moi, un peu comme on laisse défiler les panneaux indicateurs en roulant sur la Nationale. Hélas, sur la route de la vie, nous retombons encore et encore sur les mêmes panneaux. J’étais donc parfaitement convaincu que personne ne pourrait m’empêcher de régler de vieux comptes avec le passé.

    Mais le destin fait ce qu’il veut du temps, et ce fut Peter qui me convoqua dans son bureau par une calme et étonnamment chaude matinée de la fin du mois de janvier 2016.

    - Ethan, nous avons une affaire vraiment déroutante à traiter. L’une des pires qui nous aient été confiées ces dernières années.

    - Je vois, répondis-je poliment, pensant à tort qu’il tentait d’obtenir mon avis pour apporter un regard neuf sur une enquête déjà en cours. Mon boss faisait souvent cela, et ça faisait partie de mes attributions.

    - Vous connaissez le Nebraska ?

    Je gardai le silence, en me demandant si je devais répondre à la question. J’en imaginais les conséquences, notamment sur mes projets à venir.

    - Je n’y ai jamais mis les pieds de toute ma vie.

    Wharton se gratta le menton, pensif. Il ruminait, mais j’étais incapable de deviner ce qui pouvait bien se passer sous son crâne.

    - On a découvert les restes de trois corps. En moins de deux mois...

    - J’imagine qu’ils présentent les mêmes caractéristiques, dis-je, bien qu’il fût superflu de mentionner ce point. Aux Etats-Unis, les cadavres poussent comme des champignons dans les forêts après les fortes pluies du début de l’automne.

    - Absolument. Un mode opératoire plutôt singulier. Peter avait appuyé ces mots, en insistant d’une façon qui lui était peu coutumière.

    A cet instant, et pour la première fois dans cette conversation, je restai sur la défensive et mon intuition, bien que tardive, me laissa finalement entrevoir ce qui allait suivre.

    - Singulier ?

    - Ce ne sont que des squelettes. Des squelettes incomplets. Les mêmes os sont manquants et tous les restes sont identiques. Ils présentent de très étranges entailles et, sur chaque fémur gauche, une inscription est gravée.

    - Une inscription ?

    Mon boss me tendit une photo haute résolution d’un fémur. A la surface de l'os immaculé, on pouvait distinguer une série de symboles bizarres gravés, d'une étonnante teinte rosâtre. Je ne pouvais faire le lien avec quoi que ce soit que j’eus jamais vu.

    - La Police du Nebraska a officiellement sollicité notre coopération.

    Je laissai tomber la photo sur le bureau de mon supérieur, tel un barda que j'aurais dû porter sur le dos pendant des kilomètres à travers le désert. A présent, les raisons pour lesquelles on m'avait appelé étaient on ne peut plus claires.

    - Peter... hésitai-je en tremblant comme un petit garçon dont les parents viendraient de lui annoncer qu’ils devaient déménager.

    - C’est un cauchemar cette affaire. Notre type n'est pas un criminel ordinaire, mais je crois que vous le savez déjà. Je vous connais.

    Mais mon boss ne me connaissait pas aussi bien qu’il semblait le croire. La vérité, c’est que je réfléchissais à mes propres projets et autres perspectives d'avenir, et que j'avais le sentiment que le plan que j'avais échafaudé et que je pensais solide comme l'acier se disloquait rapidement sous mes pieds.

    - Eh bien, à dire vrai, je ne sais trop quoi répondre pour l’instant, bredouillai-je, avec le futile espoir que, peut-être, le peu d'enthousiasme que j'exprimais pourrait changer les choses.

    - Ethan, nous avons tout de suite pensé à vous. Je pense que ces gens ont besoin de quelqu’un de spécial. Pour être honnête, nous pensons qu’ils ont besoin de vous. Et de personne d’autre.

    Chapitre III

    Le second cadavre fut découvert pendant les vacances de Noël. Au matin du 26 décembre 2015, deux gamins sur un terre-plein essayaient un ballon de football flambant neuf. C’était l’un des cadeaux que le Père Noël avait déposé sous le sapin pour l’un d’eux.

    Propulsé par la bonne humeur et poussé par l'air frais, le plus costaud des gamins avait réalisé un lancer incroyable et le ballon avait atterri dans un champ de maïs desséché et glacé.

    - Punaise, qu’est-ce que tu as mangé au petit déjeuner ?

    - Pas mal, non ?

    - Extra, oui ! Tu l’as lancé hors du Memorial Stadium. Même le meilleur quarterback de toute l’histoire des Nebraska Cornhuskers n’aurait jamais réussi un lancer pareil.

    - Allez viens, arrête de délirer. Allons chercher ce ballon avant que je gèle sur place.

    Les deux enfants se mirent à courir dans la direction qu’avait pris la balle. Ils arrivèrent au point de chute en riant, se poussant l'un l'autre avec désinvolture, convaincus qu'ils vivaient dans un comté où rien de mal ne se produisait jamais. Mais ils s'arrêtèrent net. Juste au bord du champ de maïs aride, on distinguait à peine un tas d’os luisants, blancs et propres.

    - Qu’est-ce que c’est que ça ?

    - Je ne sais pas mais je peux te dire que c’est un truc moche, très moche même.

    - Ce sont peut-être les restes d’un animal...

    - J’en sais rien, mon pote. Ces os m’ont l’air super propres. Quelqu’un a dû les laisser là. Ils n'étaient pas là il y a quelques jours, je pourrais le jurer.

    - Alors on s'en va d'ici.

    - Et le ballon ?

    - On s’en fout du ballon ! Tu as envie qu’on se fasse tuer ? Cours !

    La police du comté avait bouclé la zone moins d’une heure après la macabre découverte. Le légiste avait établi qu'il s'agissait de restes humains, bien qu'une grande partie du squelette fût manquante. En fait, il manquait ce qui aurait pu être le plus utile pour identifier le cadavre : le crâne.

    - Vous avez le moyen de savoir depuis quand ces os sont ici ? demanda le shérif, perplexe. Il fut saisi de terreur, celle-là même dont il savait que toute sa ville serait frappée quelques heures plus tard.

    - Pas depuis longtemps. Et l’un des garçons nous a dit qu’il venait souvent se promener dans le coin et qu’il n’y avait rien quelques jours plus tôt.

    - Mais tout ça, ça date de plusieurs années, vous ne croyez pas ? demanda le shérif en désignant ce qui ressemblait à un tibia. Jamais de toute sa vie il n’avait vu chose pareille. Et cela le perturbait.

    Le légiste leva les yeux vers le ciel grisâtre où des nuages gonflaient, prêts à déverser une pluie torrentielle. Mais l’orage ne serait qu’un moindre mal comparé à ce qui attendait le comté dans lequel il vivait.

    - Je ne sais pas, répondit-il d’un air laconique.

    - Comment ça, vous ne savez pas ? poursuivit le shérif, pour qui la réponse paraissait totalement insensée. On était devant les vestiges d’un squelette. Il ne fallait pas être diplômé en médecine pour déduire que le macchabée, qu’il fut de sexe masculin ou féminin, avait cessé de respirer depuis très, très longtemps.

    - Ces os ont été soigneusement nettoyés. Ils ont été manipulés. Faute de pouvoir les examiner de plus près, pour l'instant, je ne peux pas vous dire si leur propriétaire est mort hier ou il y a dix ans.

    Chapitre IV

    Peter Wharton avait préféré que j’arrive à Lincoln, la capitale du Nebraska, pour y rejoindre immédiatement les lieutenants et les enquêteurs de la police d’état et éviter les on-dit et les doutes. Je lui avais indiqué que je préférais y aller avec Liz, Mark et Tom, mais il m’avait conseillé de tâter le terrain d’abord. J’aurais tout le temps nécessaire pour solliciter l’aide de mon équipe ensuite.

    Pendant mon vol, j’avais passé en revue les aspects les plus importants de l'affaire, sans toutefois m'y pencher dans le détail. Ce faisant, je ne pouvais m’empêcher de penser à Liz et à la façon qu’elle avait eue de me ‘recommander’, en me lançant ce regard plein de reproches qui était sa marque de fabrique, de les examiner en profondeur. Mais pour l’instant, je préférais continuer à suivre mes propres règles, bien souvent mauvaises.

    Dès le départ, j’étais convaincu que nous nous lancions dans une bataille sans merci contre un individu extrêmement intelligent et diaboliquement organisé. Je souriais ; j’étais déjà en train de composer un premier profil alors que je ne savais quasiment rien. Lors de ma précédente affaire, j’avais été incapable de le faire. Ça m’avait semblé impossible. ‘Ça ressemble plus à ce que tu as déjà connu à Détroit’ me dis-je, en tentant de me trouver quelques qualités pour me préparer avec un peu plus de confiance à la tâche difficile qui, pour sûr, m'attendait.

    Le Lieutenant Randolph Phillips, un bel homme au regard intense, vint me récupérer à l'aéroport.

    - Avez-vous fait bon voyage, agent Bush ?

    Pour moi, cette politesse qui faisait suite aux présentations d'usage était trop formelle. Le lieutenant devait être un parfait bureaucrate ou avoir grandi dans les valeurs d'une famille plutôt conventionnelle.

    - Randolph, j’ai l’impression que je vais rester ici un bon moment. Donc plus tôt nous nous appellerons par nos prénoms, plus tôt nous deviendrons amis, répondis-je avec mon plus beau sourire.

    - Avez-vous fait bon voyage, Ethan ?

    Nous nous mîmes à rire. Au moins étais-je parvenu à briser la glace.

    - Revenons à nos moutons. J’ai parcouru les rapports. Je crois bien que cette affaire va nous rendre fous.

    - Bienvenue chez les dingues, camarade.

    Phillips me surprit en me conduisant dans son véhicule personnel au QG de la Police du Nebraska, à Lincoln. Sur le siège arrière, des peluches étaient éparpillées et je m'imaginais tout de suite une jolie petite vie de famille dans une jolie petite maison de banlieue. Avant que j’aie pu me livrer davantage à mes divagations, nous étions déjà garés à proximité d’un bâtiment modeste à un étage, aux fenêtres austères, qui s'achevait par un liseré bleu tout en haut.

    - Nous sommes déjà arrivés ?

    - Oui, Ethan. Nous sommes juste à côté de l’aéroport.

    - Super. Mais, pardonnez-moi Randolph, c’est ça le QG ? Je tentais de ne pas paraître trop arrogant ni trop regardant, mais il me semblait bien que ce n’était pas l’impression que je donnais au lieutenant.

    - C’est un peu simple, je vous l'accorde. Mais on est comme ça par ici. Nous avons d’autres bureaux dans la région mais, pour répondre à votre question : oui, c’est simple.

    Phillips me conduisit dans le bâtiment. Je ne pus m’empêcher de penser que je m’étais rendu dans les bureaux de shérifs de tout petits comtés qui étaient beaucoup mieux équipés qu’ici. Je le suivis dans un couloir long et étroit qui débouchait sur une porte. En chemin, le lieutenant salua plusieurs personnes, et je me dis que l’ambiance était amicale et familière.

    Nous ouvrîmes la porte sans frapper, à mon grand étonnement, et, assis derrière une table massive, se tenait un immense type aux cheveux gris qui semblait nous attendre depuis une éternité.

    - Capitaine, je vous présente Ethan Bush, agent spécial du FBI. Ethan, Capitaine Frank Cooper.

    Cooper se leva lentement et, arrivé à ma hauteur, me serra la main avec poigne. D’après le regard qu’il m’adressa, je déduisis qu’il s’attendait à voir quelqu’un de plus vieux.

    - Bienvenue, petit. Nous sommes dans un énorme bordel. Nous sommes dans la merde jusqu’au cou, vous voyez ce que je veux dire. J’espère que vous pourrez nous aider à résoudre cette affaire rapidement.

    J’étais étonné que le capitaine me parle avec autant de familiarité et de désinvolture, mais j’essayais de ne pas le montrer.

    - Je vais essayer de tout mon cœur.

    - Vous connaissez les détails de l’affaire ? me demanda Cooper en se réfugiant à nouveau derrière la table.

    - J’ai parcouru les rapports que vous avez envoyés à Quantico. Mais en réalité, je préfère obtenir des informations directement, pouvoir parler directement à ceux qui participent à l'enquête.

    - C’est froid le papier, pas vrai ?

    Je savais que la question était foireuse, mais je ne savais pas exactement le genre de réponse que cet homme, qui semblait tout droit sorti d’un vieux film sur la Guerre de Corée ou du Vietnam, attendait.

    - Il me manque les nuances, les gestes, le ton de la voix, l’émotion...

    - J’ai parlé à votre boss, Peter Wharton. Je l’ai supplié de m’envoyer l’un de ses meilleurs hommes. Quand je vous ai vu entrer dans mon bureau, je me suis dit que ce foutu bureaucrate de Washington m’avait envoyé un bleu. Vous avez l’air d’un gamin, petit, mais je sais que vous n’en êtes pas un. Je suis certain que ce visage jeune et bronzé cache astucieusement un esprit brillant. Je suis plutôt vieux, plutôt bourru et un rien bordélique, mais on ne me la fait pas. Bienvenue dans l’équipe, Ethan.

    Chapitre V

    On m’avait réservé une chambre au Cornhusker, un élégant hôtel du groupe Marriott sur la Treizième Rue, à Lincoln, en plein centre-ville. D’un côté, je leur étais reconnaissant de leur attention, mais d’un autre, je sentais bien qu’ils voulaient m’éloigner autant que possible de leur QG car il était pratiquement impossible de s’y rendre à pied, ce que j’aurais aimé.

    Après m’avoir présenté aux enquêteurs et aux lieutenants qui bossaient sur l’affaire, ils m’avaient rapidement dressé les grandes lignes des pistes qu’ils suivaient. Jusqu’à présent, ils s'étaient employés à trier les criminels ayant un casier qui vivaient dans les comtés où les restes avaient été découverts. Pour quiconque a peu l'expérience de ce type de formalités, cette étape pourrait sembler trop évidente voire inutile, mais un bon nombre d'homicides et de délits mineurs sont résolus grâce à cette technique simple mais efficace. Hélas, même si de nombreux repris de justice se réinsèrent parfaitement dans la communauté et laissent leurs passés tumultueux derrière eux, beaucoup récidivent, comme si cela était inscrit dans leurs gènes et qu’il leur était impossible de faire autrement.

    J’avais rapporté à l’hôtel une lourde pile de photos des lieux où les vestiges avaient été retrouvés. Beaucoup représentaient les étranges symboles gravés sur des fémurs gauches (les droits n’ayant jamais été retrouvés, comme de nombreux autres ossements appartenant aux victimes). L’un des enquêteurs, une sorte de geek qui portait des lunettes à monture épaisse, à la mode semblait-il, émit l’hypothèse qu’il pouvait s’agir d’une variante d’un langage elfique, car les inscriptions lui rappelaient vaguement l’écriture tengwar, et que l'assassin était peut-être fan du 'Seigneur des Anneaux'. Je me dis que le vrai admirateur de Tolkien et de son œuvre, c'était lui. Sans que personne ne le lui eût demandé, il dessina une inscription sur une feuille et fit immédiatement le rapprochement avec ce qui avait été gravé sur les fémurs. A dire vrai, je n’observais pas tellement de similitudes, mais j’inscrivis ses commentaires sur l’un des quatre carnets de moleskine que j’avais emportés. On ne sait jamais où l’on peut trouver un indice qui nous oriente vers un esprit totalement déséquilibré.

    Le fait que l’individu que nous recherchions, et sur lequel je n'avais aucun doute (que nous ne nous attaquions qu'à une seule personne), répétait un mode opératoire aussi précis nous fournissait quelques indices intéressants sur son comportement obsessionnel. Il s’agissait de savoir ce que ces foutues inscriptions pouvaient bien vouloir dire et quel message il essayait de faire passer à travers elles. Ça m'avait obsédé dès le départ, et maintenant que j'étais plongé au

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