L’AVENIR DES CHEFS-D’CEUVRE
be ‘Encore un document — et non des moins
urieux — a joindre aux méfails qu inspire &
des industriels peu scrupuleux mais inventifs,
cette belle conception du « domaine public »,
par laquelle il est Joisible et méme glorieux &
ut le monde, de déposer n’importe quelles
ordures au pied des ceuvres d’un écrivain mort
depuis cinquante ans.
Dans mon dernier article, je vous ai montré
M. A.-F. Cuir, inspecteur primaire 4 Lille,
membre du conseil supérieur de J’instruction
ubligue, réduisant les plus belles pages de fa
Comédie humaine & une série de courtes et ri-
dicules analyses scolaires.,. Vous savez que le
essein de M. A.-F. Cuir est de remplacer la
pensée trop lourde de Balzac par un commen:
aire plus léger et de son cra, & lui, Cuir. De
quoi, un brave correspondant, instituteur & K...,246 LES ECRIVAINS
se réjouit fort, dans une lettre qu’ill m’adresse,
car, dit-il, c’est ainsi qu’on en use avec Moliére,
La Fontaine, Racine, Voltaire et, en général,
avec tous les grands écrivains de France, dans
loutes les maisons d’éducation, dignes de ce
nom. Il me cite le cas de Tartufe o& Elmire se
trouve métamorphosé en un jeune gargon qui
oblige Tartufe 4 confesser qu'il a dérobé des
confitures dans le placard de son bienfaiteur,
Orgon. En expiation de quoi, Je pauvre Tar-
tufe est condamné & réciter douze douzaines de
chapelets... Et il écrit: « Le génie a ceci de
particulier qu’il se préte & toutes les combinai-
sons et adaptations des professeurs, sans rien
perdre — ou si peu — de sa saveur primitive. »
Et plus loin : « Notre tiche, & nous, est de
rendre le génie séduisant et moral. » Et enfin,
il ajoute, cet excellent correspondant, qu'il est
admirable que nous possédions, maintenant,
une édition « lisible » de Balzac, édition véri-
tablement populaire celle-l&, ot les ceuvres de
cet écrivain « inégal, souvent obscur, mais in-
téressant », soient débarrassées de tous les dé-
chets et scories qui l’encombrent, non moins
que des apergus trop élevés qui ennuient le
lecteur, sans I’éclairer... Hl explique, en outre,
un peu arbitrairement, mais avec éloquence, ~
que Balzac serait content de linitiative géné-
reuse prise par M. A.-F, Cuir, car « ces choses-la,
qui sont l’indice de l’immortalisation, n’arrivent
jamais qu’aux ¢crivains de génie ou quiL’AVENIR DES CHEFS-D’ OEUVRE 247
comptent ». Et c’est tellement vrai, argumente-
til que M. Jean Richepin, Jequel n’est ni
inspecteur primaire 4 Lille, ni membre du con-
seil supérieur de linstruction publique, nous
apprenait |’autre jour que Geete n’avait réelle-
ment compris son Faust que dans la traduction
frangaise |... Et comme il leit compris et aimé
davantage, si la traduction avait pu ¢étre faite
par M. A.-F. Guir { Mon correspondant termine
sa lettre par deux beaux traits dont un est jo-
liment agressif, et l’autre infiniment spirituel,
el que je n’hésile pas a reproduire, bien qu'il
en codite X& mon amour-propre : « En tout cas,
voila un honneur comme vous n’en aurez jamais,
yous |... » Et il écrit encore : « D’ailleurs, je
_connais personnellement I’éditeur des ceuvres
de Balzac... C’est un homme de la plus belle
intelligence... Il se moque absolument de ce que
vous et les plaisantins de votre sorte, pouvez
dire de lui... Par la science, par le godt, par le
caractére, A.-F. Cuir est ce qu’on peut appeler
un dur 4 Cuir... n Je le crois sans peine, et
_ comme c’est charmant !...
Mais, aujourd’hui, nous avons mieux, s'il se
peut, gue A.-F. Dur a Cuir, inspecteur primaire
4 Lille, et membre du conseil supérieur de Vins-
truction publique... nous avons beaucoup
mieux.
Nous avons un autre particulier, un homme
libre, cefui-ld, qui ne se rattache & M. Georges
Leygues et au ministre de 1’Instruction publique
Karol Cytrowski, L'Abbé Jules D'octave Mirbeau en Tant Qu'exemple de L'influence de Fiodor Dostoïevski Sur Le Roman Français de La 2e Moitié Du XIXe Siècle
Lucía Campanella, "Le Journal D'une Femme de Chambre" Et "Puertas Adentro" de Florencio Sánchez: Rencontre Interocéanique de Deux Écrivains Anarchisants