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=, | | \ | | j \ j j j ; ; i 4 i i j ’ ’ Collection Psychismes La psvchovogie mmorecrive peat ETAT Rose stati rete cchaneny eras nig hile deren porkanique Ee Pgehputlote fread rach Nc Rasa TRAIMBRERE, MLE Bonzo er Rorschach clique nfo [PSYCHANALYSE GROUPALE beawaen “Le Gmape et Vincensiet Linacre gowpal (Bunun et a te Finn A. Cavte “Ls ison psychi aconsiene R Kats 1 Le Groupee eat dhe groupe Ge Pood en o.Kemen "oa Penna nares 1 Cee Tented personae Spwieutameaton ener fa aychaze Une ere de rede Pera ‘ager exon “Le Groupe Manuel de psychnalye de groupe STi ante: Pagchonayee dr er socal Le Mor Peau eres concerts Daweh Leaf Le nse Du Moi pa a Mei pentane G Lavauce L Btwloppe vate du Mot ovenosopiengue psy Saran * Corp él corps imine 1 Ponte fe sori. Pmaginaire et pthalope ULC Espace ef Temps 1 LeReveet fee Une thdori i somatique AcToeweRenatine {e Feumatnne dea mort annoreée Psychoromatque tide cuque 1 Blengenerea = UGrotine narcasique 1 Le Pahologt navctsirue 4. Bensener “a Pasonnaité normale tpathologiqae psychismes 2 Base Golléction dirigée par Didier Anziou tld Peaete meal Aceewen arisen compiz Se ea anit rosie ve trae te St "TMP sour Ti elope ore Ta optic : oe cae Sophie de Mijolla-Mellor his derietetion Pascua ena nae 3 0m cnn dele bie Penser la psychose Sonsini ue far Spec chaie “Whew Ci * ni Ee ne Sarthe Une lecture de Pceuvre La venus Er ts concErTs de Piera Aulagnier asa carun are in de pde de ene C Bannins ‘Les Heroes rawratigues A. Coven M. Lina ‘zone sl ae payee F-chwenan Emre et ilence matermelles H. Pans ‘Brogne mtemate M. Ponisi A. Those Rewarer ‘eats ulimer dels pion de mort ML Panwenes Le Dt eave paychizae Divers A Anew ia Fone rns watt yt Bion ka iets, 1971979 Kats eta : esr pc Homans ier DUNOD Sanat Teich en Egypte Ese andropoege 1 En couverture : Jules Elie Delaunay (1828-1891) La peste a Rome (1869), Musée Orsay, Paris © Photo RMN - Gérard Blot ptorme wien anestrus bee be dacs Son cjeed oltre oro Seu de emmy, a pa oe se cegpec pe enede_poutn ste ona ie de snl ‘irae taTedionee w (BANGER) lsh tw concn! (Sree dope card mete, ‘oslevphotcogiloge ess eppolr dose mit Te Cede cel om ec ted emaction pois lente ae 12 ee ise dele poate pk Sic pean ta por (TER © Dunod, Paris, 1998 SBN 2 10004022 7 ‘Toes ox pret nz a psa ss content ‘Torr on deseo eto yates on Cae de pe Pi seeds A L121) ana ue ncn ar ds ‘seuss sss (tL) kegs mpc et "il mlpr et ese al pec etn popes ‘sifimaten Jere Miglin me, ea (Sipe es dpotin dv ar LBHOSU dentine oe es Tienpoderion pr mpm. TABLE DES MATIERES Avant-propos T- La relation du Je a lui-méme et aux autres LL La RELATION OU JE A L'AUTRE = Le désird°enfant de la mére = Le désird'enfant di pre = Le désird'enfant du couple parental et le groupe social = La rencontre pore par "Autre, que fit infans avec lieméme et le monde 2.LA RELATION DU JE A SON CORPS ~ Le corps, méiateurrelationnet =Lemotion ~ Le corps persécuteur 3.1La RELATION DU eA LUE ~L'ideniification primaire ‘identification secondaire = Le compromi aire Evolutions névrotiques et psychotiques 1 La poremiatié psveuomque = La prédictbiité 1K On ee ee we we Se v Table des madres ~ La ponsée délirane primaire ~ Les points clés dela notion de potentialté psychotique 2.1 scumorménae Non-désiclésir de mort pour Penfant = Le retour du Méme ~ Le morcellement Le pictogramme du rjet — Anistoriité secrete interdit de pensée 3. La PARANGIA = La fonction de fa haine ~ Choisir son camp Le pare et Ia mére du paranofaque 4, ALIENATION ET PERVERSION ~Lanotion alignation Les tats passionnels = Passion et perversion —La structure perverse TIL. Métapsychologie de la représentation |L1L4 Norton 0 RepRésexrATion ~ Les trois « espaces fonctions » La métabolisation 2, Lionicivatee ET Le PICTOGRAMME =DYod vient originare ? = La spécutarité de Pactvié psychiqu =Le pietogramme ~ Laréactualisetion de Voriginare dans la psychose 3. LepRiMaime er Le FANTASME =De'otipinaire au primaire = La anseture relationnelle propre au fantasme =Du primaire au secondaire ignifications primates et sinifications secondaires ‘enrée en scéne de Iimage de mot 4.Le seconpaine er Line ~ Le powvoir identfiant dy langage ~ Origine et place du pensable /eprésemt ~ Violence primaire et acivté de pensée a 46 9 50 32 54 33 36 58 9 e 64 a or n 15 50 88 89 90 92 2 o4 95 7 101 102 0s 108 uM ha hs 120 2 Table des materes IV- Interrogations philosophiques sur le sens et le hasard 1. Le sexs Un sens humain donné & la réalité = La mise en sens comme euvre do Je = La destruction du sens 2. Li HaSARD — Hoasard intéieur, hasard extérieur = Hasand et Weltaunschaung scientifique = La causaltéinterpnétée et le hasard = La notion de rencontre = Lia-sensé de Mindétermination = Investr Ie hasard YV- Temporalité et mémoire du Je Le reves ~ Le positionnement du Je sur Ta Tigne da temps La siivome ~ Le mémarisabl rorhistorisation ~ Inert de mémoire et mémoitedetirante dans ta psychose VI. Réflexions sur la psychanalyse et son exercice La srruation awaby iQue La demande ~ Le savoir ~ La situation analytique avec un patient psychotique Le mansrext = Le transfert est une interpétation ~ Le transfert passionne! 3. Linerskenérarion Elle n'est pas une herménewtique ~ Place de affect dans Minterprétaion iterpréiable = Iner-réaction entre construction et inerpeétation imerprtation dans Ta névrose et la psychose vi 130 Br Br 13 146 150 153 156 159 160 166 166 v0 175 181 182 135 191 206 212 212 24 216 217 219 vilt Table des matieres Smale isason Fe Ee dc en peson ie $.Lissoatis nese aR 1 DU IV’ GROUPE OFLF 2B AVANT-PROPOS “pera etn 2 “Ce Rie tomes dV chou 2 Bibliographie des euvres publiées de Piera Aulagnier 2483, 3 Inde des nteursiés 2 inde des otons 2» . « Pencer la pensée d'un autre, ce qui est encore Is sote mantere de Tui rendre hommage et en reconnatre la valeur, about 8 un travail qui ne eproduit jamais un identique. » Prera Awiagmer, La Violence de Vinterpretaton, p. 203. i Le projet de ce Hivre est né au fil des cours a Vuniversité ou des conférences en France et a I'étranger que j'ai &té amenée a faire sur Focuvre de Piera Aulagnier et des multiples questions qui m'étaicnt alors posées par des auditeurs. Ayant eu le privilége de la connaftre, de travailler avec elle ot de suivre pendant pres de quinze ans I'évolution de ses laborations thé riques il ne m'était pas d'abord apparu que sa pensée, centes profonde, cexigeante ct originale, puisse sembler difficile d’aecés & ceux qui n’en i raient pas familiers et qui pourtant la rencontraient d'embléc: avec ‘enthousiasme. J'ai espoir que ce livre qui ne vise ni A simplifier, nia laguer les questiomements de auteur mais a en faire ressonir [es axes princi- : aux, permettra au lecteur une découverte plus assurée de cet @uvTe ‘majeure. Tl ne saurait cependant 'approfondir qu’avec Ia lecture directe des textes et surtout avec I'écho que trouveront ceux-ci dans son expé= rience personnelle et clinique. Car si Piera Aulagnier est une théoricienne qui labore et remet sans cesse en chantier un ensemble structuré d'hypothéses, elle est plus encore une clinicienne profondément sensible au drame humain que ec e « e « ec ec Ce € Ee Ee Eé Ee Ee « éE « € x ‘Avant propos cconstitue Ia psychose. Les remaniements essentiels quelle effectue & Vintéricar de la métapsychologic freudienne sont l'écho direct de énigme que pose la psychose et des bovleversements qu'elle induit dans I&oute du psychanalyste La réflexion sur et & parts de Ia psychose est done présente dans tous les chapitres de ce livre oi me suis donné pour but 3 la fois de rassembler des thémes travaillés par Piera Aulagnier sur une période de prés de trente ans, de marquer les €volutions due pensée en perpé- tuel mouvement et de fa confronter non seulement & Freud mais aussi cn pattie 4 Lacan, Melanie Klein, Bion on Winnicott. Mon point de vue, nécessairement subjectif, rend compte aussi de l'importance personnelle qu'a eve pour moi I pensée de Piera Aulagnir. Son euvre renouvelle la vision psychanalytique de la relation mére/enfamt, labore tune nouvelle métapsychologie de Ta représentation et ouvre, avec la notion de Je, son travail d'auto-historisation et sa relation aux autres, ‘une maniére de penser la question du sujet et celle du collectif qui tejpint la profondeur philosophique de Freud. Hl | 1A RELATION DU JE A LUHMEME ET AUX AUTRES Je tenterai ei de retrace ce gui consttue axe central de ia réflexion de Piera Aulagnier, cest-dire la notion du Je, son avénement, sa construction et ses femaniements. Bien qu'il sagisse de. mouvement en partie simultanés, on envisagerasuccessivement le Je dans sare tion & Autre, tel qi vient & exister en tant que nouveau-né relié & si_mbre, dans sa relation au corps, qui permet a la psyché d'exister atice aux signes de ve que clui-ciémet et dans esquels ell se refit, ct enfin, dans scation & Iui-méme, tel que le processus identifictoire en assurera autoconstrction permanente. La notion de Je s'avre d'emblée, malgré Ia proximité sémantique clairement distincie du moi freudien. Celui-ci, appelons-e, est une instance compréhensble vis-ivis des autres instances (Ca, Surmoi, etc.) et des exigences dela réalit. Il se pose comme représentant Ge Ja totalité de la personne, mas il n'en est en fait qu'une partic, ta plus extérieure, lapis visibe. Il peut aussi s‘opposer & objet en prenant sa place et en s‘ofirant 3 amour du Ca dans le narcissisme. Vers ta fin de son ceuvre', Freud donner une origine different au Moi, n'en faisant plus une instance psychique ow un précipité ¢ identifications, imais voyant en fui «la projetion mentale dela surface du corps » et done vant tout, un « mci eorporel» drives des sensations, Le Je. chez Piera Aulagnier, n'est pas pour autant celui dela théore lacanienne & laquelle, dans un premier temps elle semble devoir beaucoup, en parti culier autour de ce gui concere le processus d'idenification du Je du 1 Dans Le Ato ete a, 193, 2 Penser la psychose bébé & partir de Ja relation entre sa demande et le désir de sa mére. Néanmoins, sa définition du Je est tout fait diflérente de la notion de sujet divisé chez Lacan, opposée a la conception du sujet issu du Cogito cartésicn, c’est--dire, selon Lacan, ’une pure appréhension du sujet par hi-méme grace 2 le médiation dune autoréflexion (« je pense, done je suis »). Cette critique est opérée par Lacan au nom de Mexpérience de Vineonscient montrant "Autre en nous et done Pimpossibilité de éduire 'idemtité du sujet & une relation de soi & soi. Le J, selon Lacan, s2 forme donc, comme le disait Freud, dans la dialectique de I'ident fication 3 Pautre, mais le sade du miroir lui offre une premigre image tune forme primordiale avant que le Langage ne lui restitue sa fonction de sujet Par identification, Lacan entend «la transformation produite chez le sujet quand il assume une image! ». Le Je i la fois s'y aligne, puisqu’elle lui est toujours extérieure et y wouve une stabilité, voire une permanence. Ce que Lacan apporte par rapport & Freud, c'est abord cete ide de alignation (« {le suet] s‘demiiie, dans son senti- ‘ment de soi, 8 image de autre et image de I'auce vient captiver en luice sentiment? »). Mais dans un second temps, le sujet se médiatisera ans fe langage, renvoyant du méme coup dans I'imconscient ce qui ne ‘passe pas dans le discours, pris ce rappel trop bref — néanmoins nécessaire pour situer & partir de quoi s'est élaborée la notion de Je chez Piera Aulagnier, je vais en développer la spécificté 8 partir des perspectives précédem- ‘ment annoneées 1. LARELATION DU JE A LAUTRE SiPier Aulagnierreprend de Lacan fa notion d' Aurelie en moditie JecontenyenIhstorison, est ir en le eplagnt dans les citeonstan- ces de son avénement.L'suze quo soi ne peut se révler qu’ I'occason ‘out visage humain, positif ou négatif, cause de I'expérience de plaisir ‘bteie avec la mire qu'il projete et anticipe. Mais le contact avec le pire est different, car le bébé réel prolonge l'investissement de ce pare pour un enfant anticipé, conséquence Id aussi de T'enfant edipien attend en vain de sa propre mre. [Lest meson au demearant, de prolonger exe perspective en sintrogeant a reptsenttion que babe ptt avoir do eso e sau epement plas is que fh de lear moi, de lers sonorés et des cones, pafos lado, vee Tuts quils eave voir avec hi, A 8 du se enn des pense on sans reli ave eli, le desi Te sje des Hrs et stu 2 Vga de enfant Sone dnd npr dt xis on iinet | | La relation du Je 3 bibméme et aux autres 7 Cependant, i oi ily @ une sorte de continuité naturelle pour la mire, les choses se présentent différemment pour le pére. La patemité de chair et Ie contact corps & corps avec l'enfant sont liés 8 la patemnité comme fonction, c'est-i-dire dans un registe proche de ce que Lacan ‘ésigne comme le symboligue. La part nouriciére reste, selon Piera ‘Aulagnier, dévolve & la mére et ne sauait die partagée entre les deux parents de maniéze équvalente, ce qui explique pourquoi elle érit que rice qui manque le trait spécifique et différentel (de la rencontre avec qe pete) par opposition la rencontre avec la mare, est que la rencontre paternellene se fait pas dans leregisire du besoin » (V.L, p. 174). Par Th est intoduite la dimension d'un plaisir spécifique, qui n’est pas en tayage dizect avec la satisfaction du besoin, plhisir qu’au demeurant enfant pourra éprouver aussi avec d’ autres et dont il pourra reconna {re la présence dans les relations des parents entre €UX. ‘A cet égard, on est assez oigné de la perspective freudienne fondant ‘comme deus piliess également nécessaires 4 enfant «la femme qui nourrit et homme qui protége », au point de voir dans la nostalgic de Cette protection par le pre, la racine du besoin religieux. Meme si elle Jur rezcanait n désir pour Menfant et en faitune source de plaisir spéci- fiquo, le pére apparat Wai. car Piera Aulagnier, comm {'« U6 de la mére » ou encore Ie ailleurs désiré par ele» ‘A cela l'enfant, le gargon dans I'Gdipe normal, opposera les straté gies qui l"aménerontsimultanément& souhzter séduire et mer son pére. Piera Aulagnier ne modifie en rien 8 cet égard le schéma freudien, mais elle Te souligne en lui donnant une profondeur supplémentaire. Si le pare est un objet & hair pour lenfant (gargon ov fille), c'est parce que ‘2 présence aux c6tés de la mére a été interpre par lui comme l'expli- cation et Ia cause de limpossibilité de conserver sans faille état de plsiei. Eire le pare et enfant, ln rolation ast dane d"abord de rivalité et de limitation du pouvoir jouir, te désir de meurtre n’étant aes iors ‘contenu que par 'image de ia force supérieure du pere rendant vain un tel dési. Piera Aulagnier évoque peu les suites de ces données originaires dans ta elation peeffille,sinon pour dire qu'elle présente moins de rivalits directe, ne serat-ce ailleurs que parce qu'elle ne remet pas en scene ‘our le pére la relation de haine vécue avec son propre pére et qu'elle he prendra pas sa place lorsqu’il mourra. En revanche, concernant la relation pazelfis, le double vew de mort (celui que le pere a eu pour son pare et que son fis pour li) «ne peut te refoulE que grce & fa Tiaison qui s'établit entre mort et succession » (V1. p. 178) Dw coup, la vie du pre prend un autre sens, il est pour le fils, celui aqui occupe la place du tribut & payer 3 1a mort, Congu dans Ta chaine es DP Be BO wwwvewewwvuwvwwww ee. a Penser la psychose des générations, le pare est pour Ie fils non seulement celui qui lui a lonné naissance, mais celui qui mourra avant lui. Réciproquement, la notion de transmission permet au plre-de reconnaitre , comme s'il s'agissait presque dune naissance seconde. Ces facteurs, ‘au nombre desquelsil faut aussi compter ce qu'elle appelle « le langage fondamental » avec ses « énoncés identfiants et sa nomination de Praffect», soit la manigze dont le monde, ii-méme, ses émotions, est ««pirlé » &I'infans, sont d'une importance capitale pour la suite puis que ce sont eux qui sont posés comme responsables de la forme prise par le Je et de la fréquence, voire de Ia gravité des dérives que celui- ci rencontrera dans son devenir. Si"inconscient selon la formule Frew dienne est I« infantile en nous », c'est bien & tener de cemer les méca- nismes de sa constitution que s‘efforce ici auteur. ‘Tout d'abord qu’entend Piera Aulagnier par mre « poite-parole » ? Cette notion est bien sirtrbutaire de accent mis par Lacan surle langage dans Pinconscient et la fonction du discon. lle rappelle ainsi d’entrée de jeu, que « tout sujet vient 2 naire dans un “espace parlant” » et que le Je est «une instance constimée par le discours » (VL, p. 129). Mais surtout, en « portant la parole , In mire effectue une double jonetion : La relation du Je & lukméme et aux autres " 4f'une part, entre les manifestations de infans et fe monde, en les verba- isan eten leurdonnant un sens, et, autre pat, entre fe monde et infans puisguelle se fait pour ce demier délguce d'un oréreextéieur dont ele fui énonce les lois et les exigences. C'est donc aussi la notion de rencontre {qui se vot ii privilégié, elle qu'on la retrouvera aussi bien dans Ia rela- tion hors-angage du Te A son corps et & ses éprouvés. Beaucoup d'auteurs psychanalytiques qui se sont penchés sur la situs tion du nouveau-né ont évoque le fait du portage (cle holding winnicot- tien) el ses conséquences sur la psyché. Que cette « aide » soit nécessuire au nounisson du fait de son Hiflosichkeit, ue & sa prématuration, est en soi une évidence, mais ce que propose Pera Aulagnier T'est beaucoup rnoins. En effet, elle pose que, si le soma connait la prématuration, Ia psyche, en revanche, Ignore. Ce parallBle suppose tout d'abord de consi- Aire que Ta psych, comme le corps, a des «besoins > au sens vital de ce term!, et nous verrons & propos du « besoin de causalité » que celui- cies finalement qu'une suite du besoin de se représenter. Mais. 2 ement ax besoins du comps qr le aowveau-né est ineapable de satisfaire ‘seul, aux besoins psychiques répond demblée la représentation sous ses ies originares (pictogramme) ox primaire (Fantasme) Toutefois il est évident que la production didées, qui ne peut exister sans les mots du langage, n'est pas encore accessible au nouveau-né ‘La mire « porte-parole » s'insére donc prévisément av fiew de ce rmangue et comble espace lissé vide par la prématuration psychique ‘Aussi fout-il ne pas prendre au pied de a lettre I'affirmation de I'auteur selon laquelle fa prématuration n’existerait pas pour la psyché. Non seulement elle existe au niveau de I'idée, mais les deux autres types de représentations ne peuvent fonctionner que si la psyché de la mére a ous efficacement son role de prothése, c'esti-dire d'« aide » pour le ‘«désaide » (Hilflosichkeit) psychique primitive. Que fait la mére ? Elle fagoans les objets qui vont se présenter 3 la psyehé de Vinfans, c'est-i-dire quelle les lui offre en leur donnant un fens libidinal, L'offre de nouriture, de chaleur, de caresse ou de Confort, comme le jouet tendu vers le regard du bébé qui e suit des TT Ge qi par exemple René Spite « mont 8 propos de Posie, este de [aut de mse Tel dans ese eoavent les bfs azxguels des soins corprels ont doves mais sas tention beers besos aes e psyehiqoes. Qu levels de oninucr& vivre pubse eve asi ef eres asi ime para income ‘eet peutantfeconna ce que mosee aussi expérence de Fredric M de Prusse ‘Dun sre leer des tbe ote de les mica Faia, sans eur arssr fa pole or voile lange iis depterietspontatment tes ses mores de exee- Fence ea gestion pou ensemble des neuvea-nés ainsi csr 2. Of Chopie 32 (a Lciginae ot fe itogamme») et 33 («Le prima et le ‘same ») pour ub développement conser les nods de cate rerésetaion. Say @ OU. eewuevvuvwwvvwwewe 2 Penser la psychose _yeux, ou le bereernent et les sonorités dela voix en paroles ou en chin- sons, ont un sens pour la mére cu tout autre sujet qui est en relation avec lenfant, Tout ce qui est présenté au bébé est d'abord modeté, consciemment ov non, par ses désirs, ses attentes, voire ses craintes. ‘Bile substitu &asensé d'un rél qu ne pout avoir de statt dans a psyché, une ralité humaine parce que investic par 1 libido materell, ‘alté qui avestremodelable par Voriginaie et I primaire que grice 8 ce iraval préalable.» (Vi, p. 134) Sur ce point capital pour penser Ia relation au monde et qui marque ‘comment celle-ci est d'abord tributare de Ia elation & autre, la mére en occurence, Piera Aulagnier souligne simultanément sa dete & Jacques Lacan et sa proximité avec W. Bion, dont par aileus elle s'estimait assez loignés. «On econnaraI'apport dla théorie de Lacen: on pouraiten effet dire «ue Foot n'est métabolisable par Macivitépaychique de Pinfans que si, et tant que, le discourse fa. mére I'a dové d'un sens dont sa nomination témoigne. Dans ce sens “avalé" avec objet Lacan vera intojection origi- rire d'un signifint, Vinscription d'un trait naive.» (V.L,p. 132.) Quant Bion, elle souligne sa proximité avec lui & propos de W'idée un objet quia W°abord séjouné dans « Maire matemelle » et qui sera ensuite métabolisé par I'infans en une pure représentation de son propre rapport au monde (ibid). En revanche, elle se détache aussi bien de Lacan que de Bion en analysant les conséquences de cette fonction prothétique de la psyché de la mare, en termes de « violence ». A cot égard, on peut considérer ‘que cette notion qui a priori surprend lorsqu’on parle des relations imeterbebé, fui est venue d’ailleurs et, en occurrence, de cette autre ‘iolence qui marque le lien entre la mére et enfant futur psychotique, essenliellement le schizophiene. En quoi la mére porte-parole opére-telle une violence vis-a-vis de Vinfans ? 1 faut tout d'abord se débarrasser de Iidée qu’entraine la ‘notion de violence, c’est-2-dire celle d'une haine ow d'un désir de mort {que la mire aurat pour Minfans. Ce désir, nous dit Piera Aulagnier avec simplicié, non seulement existe mais, parce qu'il est général, il ne peut avoir de valeur causale. «C'est une tutologie que de rapper que tout objet paricalérement invest ‘eat conjointement celui dort la. perc possible coneétse les sentimen's ‘tangoisse du sujet, celui augael, sans le sve, on ne pardonnera ps de faire ‘court sq, et done, cei dont on peut inconsiemment soubaiter la mort out epi, cu se pun, 'untop-d'amour qu'il susie » (VL, p. 136) Qn ne confondra donc pas cette donnée universelle qui tent au fat rméme de l'investissement, ni avec les diverses formes de rejet maternal, i | 3 i i i 4 i i i i La relation du Je & uieméme et aux autres B pid’ailours avec le surinvestssement défensif que celui-ci peut induie. apparatt dans la préoccupation maternelle et nest pas étranger au fait ‘que la mére parvienne 3 équlibrer ses investissements entre ses enfants cet a les différencier de celui por ‘Alors 3 quoi tent la violence ? Uniquement au décalage entre ce que Ja mire projette sur 'infans et ce qu’l se révéle ére, ou plutst ce qu'il se révélera, Avec 'idée d'un solifoque que a mére entetient avec I'« ombre- parlée » de Vinfans, Piera Anlagnier matérialse, si l'on pout dire, cette Situation et jusifie e terme de violence qui devien dés fos Higa ait que Tinfans ne’ coincide jamais avec ombre en question. La violence, 1i ‘encore, est une affaire de rencontre et se lie & la nécessité d’tablir un tenant-liew de sujet ("ombre-pariée) 130d il n'y @ encore que des poten tialités. Mais, du coup, e sujet & venir, le Te, adviendra dans un espace préforme par une atente quin’est pas la sienne. Violence nécessaire done, ‘mais violence tout de méme sion considére tout ce que la mére va trans- mettre el imposer de ce fait. Mais, pas plus qu'il n'y a de tabula rasa en ‘génétique, il ne peut y aver de sujet humain sans cette préforme et c'est écart entre F'infans et Pombre qui permetra de sepérer unc violence’ Comme on le verra ci-dessous, la relation que le Je va avoir avec Iuj-miéme, les demandes qui sont les siennes ex par lesquees il s"auto- identifi, sont préparées par Ioffe matemelle qui répond elle-méme dabord 3 ce qu'elle projette sur 'enfant. ‘Toute la problématique de I'idéal se trouve ii résumée + idéaux parentaux qui vont guider non seulement leur attitude éducative, mais plus profondément (outes les relations qu'ils auront avec l'enfant ct les jdéaux que celui-ci va & son tour former en 6ponse & ce qui estattenda de lui et ce qui lui est offer. 2. LA RELATION DU JE A SON CORPS Le corps, médiateur relationnel ‘Si nous avions voulu suivre ordre subjectif de la découverte par le nouveau-né de Iui-méme et du monde, nous aurions di commencer par la relation gui I'unit & son propre corps 1. Taos, parseoslement, gue I vi par Mécut maison conve par I soumission tole do ‘Thisowe fate ot In sage » allege de Venfnce des fuss psychos, sngeste qui second avec I lene. 4 Penser la psychose scAvant que Te regard ne rencontre un autre (ox une mere), écrit Piers ‘Rulagnet. a psyche se rencontrect sereflte dans les signes de we gu éret bon propre corps.» (C4 p. 199) De plus, la référence au comps, fondamentale cher. Piera Aulagnier, cst prvente Bs le début de V'euvte puisgu’elle conditionne toute sa féflexion sur la représentation. Par « corps » elle entend non pas le téservoir pulsionnel, ou dv moins sa part somatique, mais, plus large- ment tout ce qui réfre A Mexpérience sencorille. Cette experience Consiitue une premiére modalité de la connaissance, si l'on considére qu'elle va en préformer les linéaments. auteur se monte 1 proche de Freud, lorsqu’i! souligne ta place dda moddle sensoriel visei-vis de activité naissante du jugement, qui ‘ya remplacer le refoulement et price dla nézation, pouvoir représenter ‘equ a éié auparavant exclu du représenlable!. Cependant, 8.08 Freud ‘ésgne de maniére métaphorique une origine, Piera Aulagnier va tCaltacher &retracer les conditions d'une naissance. C'est essentielle- nent Tidée d'un emprunt fait par Ia psyché au modle’ sensoriel qui ‘tablit I jonetion avec Ie corps selon elle, mais on peut se demander Si son propos ne Va pas au-delh et si ce nest pas dun seul et mie fonctionnement qu'il s'agit Concemant le « prendre en soirejeter hors soi», ce « langage des motions pulsionnelles les plus anciennes », selon Freud, elle note, ce Gui est nouveau par rapport a ce demier, que « ces deux activités Faccompagnent d'un travail de métabolisation du “pris” qui le trans- forme en un matériau du corps propre, les résidus de cette opération tant expulsés du corps (VL. p. 54). Le comps, comune Ia psyché, savbrent done essentillement comme des consommateurs vis-2-vis de ta éalitéextérieure qui va éte vue, entendue, gottée, et, et ce fisant, donner lieu simultanément & la satisfaction des besoins fussi a la perception de sensations de plaisir/déplaisiret 3 V'émergence G'affects et de représentations. ‘Tous les processus a Peeuvre dans le corps ne suscitent pas des sensations mais d2s instant oi ils le Font, c'est & une véritable costes cence d'affecis et de représentations que I'on assist, TG Free (190, eFonmatins sr los aut princips do cours des eves Tots Rs es, prtnes ep. 13509 co La tion >, Ri, reel Lids «Exprine dana tps des moons psonacti es ph anes, rans: ej eat le mane inj veut fe rach. [Ie aonse ‘Spleen epee sb, wet que Geta, owe, le él et prise adebors neptune ra ES SSS ta relation du Je a luiméme et aux autres 15 Pera Aulagoier stinserit en faux contre une conception de la tnéorie freudienne qui ferait de Ia relation d’étayage' entre besoin ff pulsion 'équivalent d'une coupure. IH ya ene ces deux entités, Geritelle, « une dépendance effective et persistante dans le registre du représenié » (VL, p. 57). Fonds représentatf ot activité organi- gue vont aller de pair tout au long de la vie, méme si l'on ne peut ercevoir que de fagon exceptionnelle les effets du second sur Te premier, Si le corps occupe cette place fondamentale vis-i-vis de Ia psyché, il apparalt aussi indissociablement lié A Pidentité du Je, dont i constitue le bien inalignable. En 1985, Piera Aulagnier répondant& invitation d’Alain de Mijolla ct Jacques Cain, pafticipa aux IV" Rencontres psychanalytiques dAix- tr-Provence sur'« Corps et histoire», theme qui allait lui permettre de remettre en forme-cette dogble préoccupition fondamentale dans son ‘eure : le donné que constitue e comps et le construit que le Je établit vee sa propre histoire. Initulé « Naissance dun corps, origine dune Hsnire!» le texte issu de ces Rencontres envisage lz corps comme un onédiateur et un enjeu relationnel entre deux psyches et entre Tn ayehé et le monde » (op. cit, p. 100). Dis le début vient en avant la Totion de réalité et les manisres dont le sujet se 1 représente au cours de son propre développement. 11 favi, en effet, rappeler, ce que fait Piera Aulagnier & Ia suite de Freud, que Ia réalité n'a d’existence au début que confondue avec cet ‘espace originel biface, psychigue ct somatique. Si 'activité représen fative 2 ses débuts confond réalité et activité sonsorielle au point de faire de Ja réalité ce qui est engendré par le sensoriel, c’est une autre maniére de dire que fe corps constitue pour a psyché la seule réalité gui n'est done jamais extérieure. En parlant d'«aulo-engendrement » et non pas seulement d'« engendrement », Piera Aulagnier souligne qu'a ce stade, psyché, corps et réalité constituent un méme conglomérat, puisque 1s notion TL Rappelons a défnion quen donne Fewt in’ st ps une coupe mais y wy abuts elton orgnlle ds palsions eselles t dex pusions Gu mol «Les ‘sion slucles euvet ae premlrs ces en tyag sr les walevtsrecomnaes abr pelsons ur out conve es remieessatsfon exes Son éprouvést rer petnee or les Tonaions corporelle: nécesaies 8 I conservation Ta Vie.» (ayebologe de ave mouse, 1912, 9.57. 2. Se Sniper hiuare (coll) in «Contents psyehoralytiues », Paris, Les Bells oases 1986. 8 — ~~ we ewe ww we wy ww 16 Penserla psychose améme d extérioité, nécessaire pour compler jusqu’’a deux et done pour ‘engendrer, n'a pas encore d’ existence’ ‘On ne s’étonnera pas dés lors de constater que les différentes formu- Tations selon lesquelies le sujet se donne une définition de la réalité conviennent aussi pour caractérser la connaissance que la psyché a du corps: le corps apparat dabord comme ce que nous en apprend l'acti- vité des zones sensorielles. Puis, une fois reconnue lexistence de Vavtre, ce qui conceme le corps est pereu comme témoignant du pouvoir imputé au désir (celui des autses mais aussi celui du suet). Enfin, le corps est conn & travers ce qu’énonce le discours et le savoir dominant de la culture & laquelle appartient le sujet. Ly a Ia tois conceptions causales du corps, mais aussi de ce qui lui arrive, et ces conceptions s*équilibrent en un compromis généralement parlagé par les suets dune culture donnée, sans quoi les autres formes 4de compromis apparsiiront atypiques et seront décrétées comme patho- logiques. La référence au culturel revét ici une importance crucial et Piera A.ulagnier souligne & cet égard comment le discours scientifique modi- fie la relation au corps telle qu'elle était consue 3 parti du discuurs religicux. Succédant ou dui moins se surimposant& lexplication famtas- ‘matique en termes de désir, ces perspectives oprent une sorte d'accul: turation de celleci. Pour le discours religious, le désir continue avoir place, mais c'est celui de Dieu. A I'inverse, le discours scientifique qui se confronte & un corps non seulement fiagmenté (dissection) mais cavisagé dans ses composantes comme un assemblage de celvles, ‘modifie fondamentalement Ia vision de homme sur son corps, ct il evient impossible au sujet de poser un désir comme cause et organi: 'aleur de son fonctionnement somatique. Reste alors Ia possbilité de Conserver simultanément diverses visions de.ce corps, faute de pouvoir récuser en bloc celle de la science, ce qui exclurait le sujet de son espace social et du consensus qui lui est propre. 1, Toi apace prchiue et espace somatina ret indsocibls, om gu'acun ston exrieur na peut re conn comune ie. ot ve gu fete py, ‘qf odie sex propes tprousts,repomtra oy sed pu! eT outoagenivemene In pryeké inpntera 9 acts des zones senile le povoir engender ses bropres rome (plair ou souftance) se proper movements vetseen Ot le dsinvestsement de ca la veale “idence” pune eater ence eave op itp. 102). 2. Roposion gue cs farulatons, mene si elles spprisseotsuccsivemeat das le ‘eps sont pas des stages ence qu’eles Se apenas excl les ptt 3. Que Fon prseen pacers incomprehenson quis abi necessienent og Sagi de signer des sujet d'anes clues qu ont dels rekon a corps une cone tin ease gue Signae ignore. La elation du Je a kuiméme et aux autres 7 ‘Quoi qu'il en sot, individu n'est jamais seul face a son corps : non seulement il interpréte ce qu'il en pergoit & travers le prisme des discours, mais plus fondamentalement, ce corps qui est le sien a été précédé par un corps imaginé par la mére lors de sa grossesse. Celle ci aanticipé une image & laquelle 'enfant-éet s'est trouvé confronté lors de sa naissance. Ce préinvestissement, qui est similaire & la fonc- tion de porte-parole dans le décalage temporel qu'il implique, est nécesstre mais compore aussi toujours une part de risque si écart avec ce qui était attend par la mére s"avére trop important , pou le sujet, le somatique précéde le relationnel puisqu’l ne saurait yy avoir de relation sans reconnaissance de Mextéririté, en revanche le ‘corps du sujet existe avant méme sa naissance, dans une histoire portée par un adulte, et iva dans fa suite lui appari & travers cette médation, reconna ou ignoré dans ses manifestations et, de toute manire, interpre ‘et verbalisé par un discours et en fonction de eroyances et de connaissan- es propres & une famille et & un milieu culturel donné. Cette place de « médiateurrelationnel » propre au corps permet de comprendre comment la relation Je-corps peut venir se substituer & Ja relation Jautre ct, locas échéaut ex reprouite les confits. I ne s°agit pas i de considérer le corps comme enjeu relationnel entre le sujet et autre, mais de s‘interroger sur le cas oii la relation & autre étant impossible, le Je n'a plus que son propre corps pour lui permet, comme 'écrit Piera Aulagnier, de « garder le signe “relation” dans ses “alphabe's”, signe indispensable & I organisation de ses constructions du primaire et du secondaire » (op. cit, p. 114). L'auteur examine le cas ob cette substitution du corps & autre 5 ® 5 40 Penserla psychose tient précisément & leur polyvalence, ce qui n'est pas le cas en philo- Sophie ob les auteurs ont une perspective plus unifiante De ce fait, rien n'est jamais acquis au théoricien en psychanalyse et il lui faut sans cesse remettre sur le métier ses hypothtses pour ajouler d'autres cordes a T'are d'une notion, de maniére & la faire vibrer én hharmonie avec le reste de la théorie, elle-méme confrontée aux épreu- ves de la pratique. est Ia raison pour laquelle j'adoptera pour aborder cette notion de « potentialité psychotique », une perspective historique au travers de Veuvre de Piera Aulagnier, tout en marquant autant que possible comment elle se démarque ou non de Frend & cet égard, et quelles sont Jes réponses originales qu'elle apporte. La notion de potentialité psychotique apparait dds le début de Peauvre,sil’on considére que La Violence de 'interprétation, para en 1975, reprend certains points essentiels avancés auparavant en leur donnant la structure que permet seule Iéerture d'un livre. Cependant, Je terme de notion et la résonance théorique du terme de potentialté ne doivent pas nous fate oublier la familiarté de Vinterrogation ainsi ‘signée Tout analyse, au cours d'une analyee at plus encore au début decelle-ci, est amené fare, avec certains patients, Mexpérience d'une limite dans son écoute, lorsque apparaissent dans le diseours du patent es éléments auxquels V'analyste sent gu'il 3 du mal 8 s'identifier ow diu moins, que cette identification exige de li un aval de déconstruc- tion par rapport & ses repres spontans et habituels Liidée d'une poteniatié psychorique n'est pas le résultat d'un diagnostic qui pourrait tre posé en fonction de eritresrepérables, mais €'est d'abord un sentiment contre-transférente, fa ite ou la sllic tation ressentic comme range, voire dangereuse, d'une empathie dans écoute de Vanalyste Ce qui est important ic, c'est le caractére pariel de ce processus, comme sa psych du pationt pouvaitfonctionner de manidre normale, ‘est A-dire sans contradiction majeure avee {a logique communément adoptée par les auires sujets de méme culture, et en méme temps onporter ds zones ob wn fonctonsement tlement ifn, oii nal, ait mis en cuvee Dans Je texte «Du langage pictural au langage de Iinterpréte » {publig dans te recueil Un interpréve en quéie de sens), éerit pour le séminaire de Sainte-Anne en 1979, Pera Avlagnier donne une illustra jon clinique particuligrement frappante de ce processus tel qu'il appa- raft analyste non seulement comme un blocage de sa propre capacité interprétative, mais aussi comme une sidération du patient Evolutions néwosques et psycroiques 4 ‘La seule manuvre acessble pendant wn instant a sujet est ce temps ‘Parr cet at de eration sideration de ute dans Vimmobil. Et puis- {uel pare de figuration une image rendra comple de ce que j'entends eefie d'un homme qui découvee rasquemen que ses pas Pont porte au tor d'un goutfe pendant que dene lui ure explosion Tui a eoupé toute posible de erat, Avant que le verge pe Finsalle et ne le ripe {fans fe gout un tet sujet e pourra que reser psi, vide de toute fens, suspendan tout ace, vee espir d aéterdefntvement out pas fers Movant ou vers [arite Je ne pretends pas que ces « moments» ce type d'expéience annoncent Teno un passage 3 Tact ov Teds diss ua Ronen (nd, ent en € le signe prodromiqu, ls peuvent, comme nous fe prouve Kear évemuale urvenve dans la nbwoce ce rscberspontanénent, Mais ‘on ari fort de sus-estimer le danger quis reprézentent pur le fnetion- tementpayhigue: pour peu que ces eapérences se rpRIet OW 3 appro- tent le Je quilts subit met tout en euvre pour les fi. Or, sion exclut Fappel 8 one couslitédlirante ou Iimpusion autodestutice usc, la sede Tite possible, la seule défense accessible, corssiera 8 désnvestir, 3 txclre de Fespace de pensée, tl theme el ype de reneonte affective, el type de station relationnll.» (Op. cit, p. 348) Dans ce cas précis, on n'a pas directement affaize & une potetialté psyehotgue mas & apparition une fall, une fissure alleurs souvent parle comme tlle par les patents, vis 2-vis de laquelle la potenilité syehtique pourra éte able et avoir alors une fonction de défense, La pensée délirante primaire Jen viens maintenant la notion ééveloppée par Piera Aulagnier dans La Violence de l'interprétation, comme la « potentialté psychotique » qu'elle donne comme équivalent de ta « pensée délirante primaire », est -dire « Miniexprétaion que se donne le Je de ce qui esi cause des crigines » (V.1, p. 223). Nous reverrons plus loin importance cruciale de cette référence & la pensée des origines, elle permet ici de situer Ia potentialté psychotique comme «le résultat de Ienkystement dime pensée délirante primaire qui a pour fonction de tenter d'opérer Ia reconstruction d'un fragment manguant dans le discours de U'Autre.» WL appara ds lors quel potentialité psychotique est une « solution » & un conflitrenconté par le sujet dans I'enfance. Conflit trop précoce et trop intense provoguant un excés de souffrance qui rend « insensé » le avail psychique que comport le fait de se préserver vivant. pas a seule. Piera Aulagnieren souligne trois Cotte « solution » n% autres = le choix de Ia mort, 42 Penser ta psychose ~I’éclosion d'un autisme infantile, = la tentative de fuir toute pensée, tout désir qui raménerait au confit cause de l'excés de souffrance, c"est-a-dire une mutilation partielle qui ne présente pas une construction comme le délire psycho- tigue. Crest parce qu'il y a cette toisiéme possibilté que la notion de potentalté psychotique dépasseI'opposition enfance/age adulte, Plutét que de mettre en place ds I'enfance une pensée déirant, le sujet peut tenier de mettre du blanc partout od il y aurait de la souffrance et du confit. Mais cet évitement est porteur aussi de ce qu'il évite, c'est-3- dite de la « solution »délirante, laquelle peut s‘offrireomme la solution préférable au suicide, La potenialité psychotique, c'est donc non seule- ‘ment la mise en place précoce d'une pensée délirane primaire évoluant en psychose & T'ge adulte, mais aussi cette fille née de la mise & distance de la « solution délirante », faille qui constitue un appet au délire toutes les fois que la situation de conflit sera réactivée par des Evénements divers. 1 faut ici marquer un temps damét pour un rappel de quelques €léments de théorie sur la psychose afin de micux situer 'originalité et apport conceptue! de cette notion de potentialité psychotique. Lincapacité d'un sujet 3 fonctionner dans une logique commune, nnon délirante, ne relive pas d'un déficit mais d’un « en-plus » répon- dant & la nécessité de faire appel a Ia Togique détirante pour tenter de résoudre ce qui n'a pas pu l'étre autrement. Comme le symptéme en ‘général, le délire est une tentative d’auto-guérison, un remade contre tune souffrance. Cotte perspective soutenue par Piera Aulagnierest la méme que celle de Freud qui montre dans Manticle de 1924 (Névrose et psychose") comment I'appe! au délize est une tentative de réparation, de recons- truction & la suite de la rupture entre le moi et la réalité. Cette rupture, selon Freud, tient au « non-accomplissement ’un de ces désirs ina: tiles étemellement indomptés ». Contrairement & ce qui se passe dans la névrose od Ia réparation s'effectue aux dépens du Ca, dans la psychose, elle se fait aux dépens de Ia relation & Ia réalité : ‘La psychose, éerivil, emprumte une voie plus atocratique, elle erée une nouvelle rélité & laquelle, & la difference de celle quia éé abandonnée. on re se heurte pas. » (Op. ci) 1 fe Méwrave prycsee perversion, Pais, PUR 1973 | Evolutions névrotiques et psychotiques 43 Mais 1 ob Piera Aulegnier se sépare de Freud, c'est en ce qu'elle ne situe pas le confit au niveau du désir mais au niveau du pensable, c'est- adire finalement en des termes qui concement I'identfication du Je. A origine des conditions de possibilités pour que s*établisse la potentialité psychotique, qui deviendra ou non une psychose avérée, il ya une situation particuliére qui impose au sujet un interdit Vou une obligation 8 penser quelque chose qui cst en contradiction avec la logi- ‘que du discours de ensemble. Ce n'est pas l'entourage gui transmet le contenu de ces pensées, elles résultent d'un compromis qui permet de continuer a investir so-méme, fa réalité, les objets d’amour. Ce sont autant de « pare-désinvestissements », terme forgé par Piera Avlagnier sur le mod8le du « pare-excitation ». Dans ces cas extrémes, le choix est réduit: soit la mort réelle, soit la mort psychigue, le désinvestise- ‘ment comme victoire de Thanatos, soit la reconstruction délirante, Pour résumer le point de départ de la potentialité psychotique telle que la définitPiera Aulagnier, on peut dire qu’lly a, 8 Vorigine de fa pensée détirante: — d'urie part une frustration intolérable dune signification qui est relative & la question de V'origine du sujet. du monde. du plssi. etc. : = ot d'autre part, un désir indomptable, qui refuse d’étre réduit au ce, qui porte sur le besoin identficatire propre au Je Depuis ses premiers textes jusqu’aux demiers, Piera Aulagt souligné Maspect fondamental de ce besoin en ces termes : tout Je a besoin de penser que son existence fait sens, qu'elle n’est pas, comme le dit Shakespeare, une « histoire pleine de bruit et de fureur contée par un idiot», Si cette signification manque dans le discours du porte- parole ou dans celui du pire, la pensée délirante primaire va teater @'opérer 1s reconstruction de ce fragment manguant. Eile le fera de ‘maniére illusoire mais conforme aux demandes identficatoires du Je. La définition de la potentialité psychotique est dés lors fa suivante = «La présence de ce préalable (pensés délirante primaire) est pour nous syonyme de ce que nous défnissons parle concept de potentialitépsycho- Ligue. Non pas une possibilitéIntente qui serait commune & tout set mais bien une orgerisatio dela psyché qui peut ne pas donner liew& des symp: t6mes manifestes mais qui monte, chaque fois qu'on peut 'analyser, ta présence d'une pensée délirante primaire enkystée et non pas refoulEe. » WL, p. 23). Par rapport a la psychose proprement dite, a notion de potentialité psychotique apporte un élément capital du point de vue de 'étiologie. En effet, tous les facteurs généralement rendu responsables de 'appa- rition d'une psychose (double-bind, etc.) sont nécessairement réduc- cs ce ce ce ce c e 4 ce Ee e (=4 Ee i e e 4 Se We We Os Gs We Gs We Vow Sw www > 44 Penser la psychose teurs parce qu'ls impliquent une causalité simple, une relation cause/ effet, qui n'existe pas dans la psyché. La nation de potentialté psycho- Ligue introdut & T'inverse un espace intermédiaire entre les conditions réputées psychotisantes et la psychose avérée. Ces facteurs eréent des conditions de possibilité, mais Iactualisation, toujours imprévisible, sera différeate dune réponse passive, préformée, En fait, toute entrée dans Ia psychose dépendra du destin de ce kyste de la pensée délirante primaire, « kyste qui peut réussir faire élater sa membrane pour déverser son contenu dans T'espace psychique : quand cela arrive on passe du potentil au manifeste » (VL, p. 223) La pensée détirante primaire, on I'a dit, est la eréation parle Je d'un noneé mangvant dans Ie discours du porte-parole ou du pére suc la {question des origines. Enoncé manquant ou énoncé manifestement faux et contradictoite et de ce fait inacceptable. Piera Aulagnier compare cette situation & celle d'un mathématicien devant accepter un postulat contraire aux autres (comme 2+ 2= 5)et devant, de ce fait, tot recons- twuire pour réaccorder Ie reste avec ce postulat et Ini enlever ainsi son caractére contradictoire, Pourquoi cette élaboration a--elle un caractere de nécessité ? Pour pouvoir penser, certes, mais aussi pour pouvoir cconserver comme objet libidinal celui ou celie des parents, qui a imposé cet élément hétérogéne ou I'a rendu nécessaire. « Interpréer la. violence, la reli une cause qui ménage la mére comme ‘support libidinal ncessaire, tl est Mexploit que réusst la pensée délrente primaire. » (V1, p. 245) Ainsi, par exemple dans la schizophrénie, I'injonction du porte- Parole pourrait s'exprimer ainsi: « que rien ne change », que cet enfant soit la réduplication du méme, c'est-i-dire de la relation de la mére vee sa propre mére, tout apport paternel étant nié dans ce contexte Que I'enfant ait néanmoins la capacité de parler, ce qui, comple tent: de la condition ci-dessus, nc s'accompagnerait pas dun pouvoir penser ui risquerait toujours de le désigner comme étre autonome. Dans la paranofa, la situation est différents ot la nécessité consiste & pouvoir penser la haine et la destruction comme origines du Je, ce qui est a-sensé. En projetant le conflit & Iextérieur et en en faisant une ‘gle générale des relations entre sujets, le paranoiaque s'efforce de résoudre cette contradiction: le postulat a-sensé sur lorigine est devenu un dogme : pour qu'il y ait un existant et pour qu'il y ait un ‘monde, il faut qu’ entre les deux le confit puisse ne pas s'épuiser, rice A quoi lofire de haine égale lott de vie. Dis La Violence de linterprétaion (1975), la notion de potentiaité psychotique est d e dans sa position de clé de Votte de la Evolutions névrotiques et psychotiques 45 théorie de la psychose. Avant d’évoquer la prise de position épistémo- Togique du point de vue de fa psychanalyse que constitue cette notion, je donnerai une idée de Mévolution de cette notion au travers de ensemble de Pccuvre de Piera Aulagnier. On pourrait tr8s schémati- quement la résumer ainsi + 1975, La Violence de linerprétation : fa potentialité psychotique vy est définic en termes d’enkystement dune pensée délirante primaire. Cette notion de pensée délirante primaire est centrale dans Ta relation entre Ie Je et Je porte-parole, celui qui impose la violence primaire et, en occurrence, un excts de violence eréateur d'un a-sensé. + 1979, Les Destins du plaisir: ta potentialité psychotique va étre reprise dans Jes mémes termes mais en insistant sur le conflit entre idemtfiant ot V'sdentifé. Et surtout, alors que dans La Violence de Uinterprétation Valternative& a potentialté psychotique était la mort, la mort psychique, autisme précoce ou désinvestissement, dans Les Destins du plaisir, we autre voie se dessine: celle de Palignation. + 1983, séminaire du 12 février, intulé « Le potentit, le possible, impossible: catégories et reptres du champ clinique »' . Piera Aulagaier fait 1h une sorte de point théorique comme elle en fera autres pour bien fixer I'état de sa réflexion en ce domaine et voir ‘quelles modifications cela implique par rapport & sa théorie. Par paren- thse, on pourait dire que lexigence propre au Je que son existence fasse sens, le théoricien la reprend sous la forme de l'exigence que sa construction soit cohérente, ce gui implique la nécessité de ces réexa- mens densemble. Ainsi que je Tai dit av début, Piera Aulagnier, comme Freud, nous offre fun modéte du souci de rigueur intellectuelle ne se contentant jamais des effets de suggestion et de facilis. + 1984, L’Apprenti historien et le Mattre sorcier: lanotion de poten- lialité se voit envisagée du cOté de Meffet de renconire et de ce que ceci implique vis-i-vis de la question de la réalité. Dans cetle méme année cst publié un article important: « Quelqu'nn a tué quelque chose »?, dui reprend ces mEmes thémes. + 1990, « Voies d’antrée dans Ja psychose », sa demitre conférence, prononcée Bordeaux trois mois avant sa mort, of elle rappelle & rouveau que « toute possible analyse de la psyehose passe par celle des conditions responsables de cite mise en pensée par le Je de sa relation 4 lui-méme et au Je de Vase ». [L Pablcaioa pothume dons Tapiqe, n° 62, 1957 2, 195. p. 359 99 46 Penser la psychose Sans entreprendre une analyse détaillée de I'évolution de cette notion e potentialité psychotique & travers ces moments de leeuvre, on peut ‘néanmoins en signaler les poinis-clés, Les points clés de ta notion de potentialité psychotique + Les issues du confit identifiantidentifé, La reprise de cette question dans Les Destins du plaisir va amener Piera Aulagnier&souligner la place 4eIidéaisation du Je de V'nfans par le porte-parole dans la formation de Ja potentials psychotique. Elie évoque la rage meurtrire que peut éprou- var le sujet face & ce Je idéalisé qu'il n'est pas. La « solution » psychot qe, en substituant un identiié grandiose (le Christ, Napoén, et.) & Ia {ois obgit& 'injonetion matemeile (Gre tout de suite et non pas devenir en difféé un « grand» personnoge) et la nie. Citons & nouveau cette rosopopée du psychotique oi I'émotion est poignante: «Jone suis pas ce Je que vous voyer, je ne suis pas ce Je que vous pouvez enfermer, exchue, interes, je suis ui identifiant auguel on a impose un ‘dentifié qui a’est pas son euvre, » (DP., p34) ‘L'ialisé est un non-Se, un impossible et en ce sene, autre issue, celle de alignation est plus « rEussie» que celle de la psychose, méme si elle témoigne aussi de ta concession A I'égard de Thanstos. Il ne S'agit pas d'un désir de non-désir mois d'un désird’asservissement 3 ‘a puissance alignante tendant vers un état a-confliciuel. Ce destin-li pose par « Big Brother», et Piera Avlagnier s'est ues souvent référée 8 1984 d’Orwell, destin qui, pour peu qu'il parvienne sintéprer dans un ensemble, peut se voir assurer d'une certaine stabi Tité. Towtefois, comme pour la certitude délirante, cet édifice peut se Superposer, sans pour autant'anmuler, 8 un doute dramatique le concer- nant, Lissue de Valignation est différente de celle de la potentilité psychotique, mais elle vient en préciser une composante majeure Vidéalisation du Je de Winfans parle porte-parole. * Le potentiel, le possible et l'impossible, Piera Aulagnier détinit le «destin» d'un sujet en fonction d'un ensemble de facteurs internes soumis 4 la rencone d'un ensemble de facteurs extermes. C'est la notion de rencontre qui est ici principale, rencontre entre V'interne et Fextere et surtout le fait que se définisse, en fonction d'une pluralité de facteurs et d'une pluraité de réponses excluant toute causalité linéaire, terme & terme. La potentialité, psychotique ow autre apparait As lors comme « l'ensemble des défenses que le Je peut mobiliser, son “seuil de tolgrance” aux excitations, que la source en soit le monde ‘extérieur, le Je des autres ow son propre ga. Plus précisément, la Evolutions névrotiques et psychotiques a7 potentialité est I totalité des réponses que le Je pevt mobiliser face a toute épreuve psychique qui met en danger son fonetionnement et done par IA son existence. Mais surtout, dans ce méme texte ot elle reprend la métaphore du Je comme un puzzle, Piera Aulagnier itlise précisément le caractére composite du Je pour situer les diverses potentiates les unes par rapport aux autres: psychotique, névrotique, perverse ou persécutive «On rencontre toujours dans Ia constitution (du puzzle du Je) des lignes de fragilité, ou encore ta potentialité d'une fissure. Cette fissure peut se situer 8 intérieur de Isssemblage central : nous aurons affair & a poten- lialité psychotique qui se définit comme je V'ai montré par un confit entre Jdentfiant et identi. Elle se peut se situer ene cet assemblage premier et xs pideegajoutéss qu émoignent de ce qu'stdevenu et surtout de ce ‘que devientindéfiniment le Je. Nous serons li confronts & la potentalité révroique, ov encore 4 un confit entre le Je et se idéaux. Mais un toi sitme risque est possible: les pices du puzzle sont apparemment bien embortées mais Ie consiructeur ne reconnaft pas ian: suf te couvercle et que le puzzle éaitconsé repro- Suire. Nous rencontrons Ii a potentialité perverse ou plut6t persécutrice feeouvrant les manifestations symptomatiques gue jai analysées sous le terme de relation passionelle » (Topique, n° 62, p. 11.) Dans le demier cas, la « solution » consiste soit & décréter I'inter- changeabilité des pites (Solution perverse), sit - et cela peut aller de pair, 3 décréter que c’est le mod2le qui est volontarement trompeur (Solution paranciague) Pourquoi parler de potentialité dans ces trois cas ? Piera Aulagnier apporte la réponse «Parle de poten est postuler que la psych reste capable de signer “on paete de nor-apression caussle réiproquc" ene son premier asemn- tage et ss effets sur In totlté du puzzle, et les puzles ientifieatoires sunquels se rférent el se conforment les Je des ares,» (Topigue, 62, plz) Voici donc ia ptentilitédéfinie en dehors det relation présenvatur comme le germe qui poura ou non s’actualiser. La potentilité est inscrite dans la mukiplicité des éléments d'une structure qui peuvent soit mainteir en équlbre. soit entrer en conflt les uns avec les autres. Si on tient compte du fait que le structure du Je est en elle- mine en interaction avec celle des autres Je, avec lesquels elle compose 3 nouveau une stricture familie ou sociale par exemple, on juge que Ja complexté de ces relations exclue radicalement que Mon puise pazier dtu devenir psychique autrement qu'en termes de potentilité PAMAM A AARRARAARAAARAAA anann tm 48 Penser la prychose Ce séminaire de 1983 contient les éléments qui fgurent développés dans L'Apprentihistorien et le Matire sorcier. On trouve dans ce livre tun chapitre particulgrement riche intitulé « Le concept de potentalté et T'effet de rencontre » (p. 213 sq9.) 03 Piera Aulagnier formule, de maniére lapidaire, 2 nouveau une redéfinition de la nin de potent- alité qu'elle nomme concept ‘Le concept de potentilité englobe tes “possibes™ du fonctionnement du 4Je et de ses positions identificatoires une fois Yenfance close.» (p. 214) ‘Autrement dit, la suite sera fonction des rencontzes mais V'absence de ‘enconlre de citconstances dune nature X fera que la potenialité psycho- tique pourra ou non s'actualiser en symptome ct s'organiser en délie Freud, dans « Un enfant est battu »! écrivait : «Nous pouvons nous contenter d’expliquer ce qui existe et nous sommes en droit de nous soustaire d'une manigre générale au devoir de faire ‘comprendre aussi pourquoi quelque chose n'est pas arivé. » (p. 223) De méme, Piera Aulaghict, daris la demitre conférence qu'elle fit en janvier 1990, rappelait «Sil est vrai done que c'est au cours de enfance que se décide pour tout tun chacun notre destin psychique, il est tout aussi vrai qu’ n'est pas au pouvoir de l'analyste d'isoler, ni chez le suet, ni dans l'environnement familie qui était le sien, une experience ponctuslle qui nous permetrat de dire et voila pourquoi votre fille est psychotique. Le propre dc la relation de caused effer dans la psyché — ce qui earactrise cetie relation dans le registre psychique ~ c'est que e’est effet et lui soul, qui peut donner un satut causal 8 événement, Or cet effet n'est pas fixe une fois pour toutes, ites hi-méme effet une rencontre el sera repris,renégoci, interprets Par expétience qui suit. Ce sera au couts de ce long et difficile waveil de sdinterprétation des expéricnces vécues et des traces du passé qu'un vécu actuelle powvoir de remobiliser. que fe Je va transformer son passé pour ot faire fa source et la cause de son présent.» (x Voies d'entiée dans la psychose », in Topigue, n* 49, pp. 7-31.) Aurdela des considérations métapsychologiques et de la théorie Aanalytique, ces lignes conticnnent un formidable message despoir qui est pas soutenu par une croyance mais par la confiance dans T'effet libératoire du sens tel qu'il peut étre recoisimut dans I'analyse. Le temps passé est, comme tel, imémédiablement perdu, seul le temps Parl historiisé peut se conserver et s'ancrer vivant dans le présett 1. In Wevroe pigchose et perversion, Pais PUR, 1973 Evolutions névrotiques et psychoviques 49 2, LA SCHIZOPHRENIE Piera Aulagnier s'est toujours défendiue, a just tte, de proposer une «explication », méme partielle, rendant compte de apparition de la schizophrénic. Comme pour la psychose en général, son approche étiologique se fait sur deux temps: tout d'abord I'établissement de la potentialité psychotigue, laquelle peut étre schizophrénique ou paranotaque, puis les circonstances de la réalité qui peuvent amener Feffondrement de étifice protecteur ainsi réalisé et donner liew 3 une schizophrénie ou 2 une paranota. A cela, il faut ajouter la eapacité du sujet 4 connate des phases de rémjssion lies I aussi 3 la manire dont la réalité ou un autre sujet va pouvoir se préter la reconstitution du dispostif protee- teur. ‘Cest done & un systéme d’ interactions complexe et imprévisible que nous sommes confronts dans ces siuations oi l'on voit que I'événe- ‘ment rél (maladie, accident deuil mais aussi succ8simprévu, naissance « wxenfant, mariage, ete.) peut précputer, dans un sens ou dans un autre {e-course la vie psychique. On ne saurait pour autant réduire ces modi fications ni & l'événement, visei-vis duguel elles apparsissent lo plus souvent disproportionnées, ni seulement pour autant considérer que tout tait dja, latent, n'atendamt que fe moment de se manifester. Reconstituer un sens par la voie d'hypothéses formées 4 partir du propos tent par le paticnt, qui se voit offrir une écoute neutre dont la seule visée est de l'amener & raconter sa version subjective concernant Sa Vie ct sa maladie, telle est Ia position de Piera Aulagnicr of Ihisto- rique, au sens de 'histoire individuelle, occupe une place princeps. Cela imptique avant tout de tenterd'écouter la spécificié de ce que litle patient. Critiquant la tendance réductrice consistant a identifier les questions posées par Ia psychose au profit d'we question & laquelle it pourrait etre répondu par nme cause (Forclusion du Nom-du-Pere ou identification projetive), Piera Aulagnier s'efforce de reconstruire un parcours singulier répondant aux exigences communes de la psyché (isis nécessaire et sufisant, besoin de cauealité, etc), pour s'inter~ roger sur le moment oli ce parcours a bifurqué vers une voie autre, et {enter, partir dela réponse apportée par cette déviance, de reconstituer hhypothétiquement quel a pu étreI'écueil qui I'a rendu nécessaire. De Ge fait, les écrits concernant les diverses formes de psychose sont 'abord des éerits cliniques, fondés sur des cas longuement relatss sans @xre pour autant I'équivalent de comptes rendus de cures avec des névrosés car Fexplicitation du contenu Vemporte sur Ianalyse des 50 Penser la psychose ‘mouvements transférentiels. Pouvoir ouvrir um espace de parole et pouvoir comtinuer & écouter, c'est-i-dire & investir sans chercher une explication réductrice, tel est Je propos & la fois simple et difficile ‘auquel elle nous convie. Le modéle interprétatifs'élabore ainsi pas a pas et, davantage qu’a des concepts, c'est & des fonctionnements repé= rés comme typiques de telle pathologie, que nous avons affaire dans une approcke od, comme chez. Frevd, le descriptifet le métapsycholo- gique se répondent en permanence. Je donnerai ici quelques jalons qui se réfrent tous &'enfance des patients mais renvoient simultanément ‘leur pré-histote c’est-dire & la manigre dont is ont pu étre attend, accueillis ou rjetés, Comme I'écrit auteur: «« Une des earatéristiques propres au drame psyehorique est de nous rendre incompréheasible la suite des répliques si nous ne r6ussissons pas & imagi- rer ce qui s'est dit et Echangé dans les premies. » (QS., p. 360) Nondé i/désir de mort pour Fenfant icra Avlagnicr insictait toujours sur importance d'entendre, chez tune femme os chez un homme, I'existence éventuelle d’un non-désir «enfant, non pas comme l'expression d'une crainte de ne pas étte capa ble assumes 'événement mais comme le risque d’une désintrication polsionnelle confrontant le nouyeau parent avec sa propre pulsion de mot. Les sujts qui sont dans ce cas apparaissent comme étant parve- rus & une sorte de compromis avec la haine primitivement éprouvée pour leurs propres parents situation qui vient a réapparattre lorsqu'ils sont i leur tour en position de parents. Toutefois, les contenus refoulés Peuvent se médiatiser autrement qu’en visant l'enfant lui-méme. Le sir de mort conceme «un» pee ov «une» mere, voire la «puissance procréatrice » diversement incamée mais, plutét que de reconnafze qu’ ils nourrissent un tel désir poor le nouvel enfant, ils vont Te projeter sur leur conjoint. Ainsi, le désir de mort que la femme aura pour son mari deventipére est-il celui qu'elle pense que son propre pire a cu pour elle, désir de mort rarement agi mais exprimé dans des confits phis ou moins rationalisés: il en va de mme pour le ma avis de sa femme devenue mére Le mécanisme identificatoire est banal et méme normal siI'on consi- dre que a succession des générations constitue un moule formel par rapport 8 ses contenus. En revanche, il est contradictoire dans les termes que la proeréation allie au meurtre. On verra, & propos de la pparanofa, comment ta haine peut apparatre comme fe commpromis par lequel ros continue malgré tout de s'affrmer, le meurtre restant inten- Evolutions névrotiques et psychotiques 51 ton dans un lien d’autant plus solide que ta réalisation est indéfiniment itt Dans la schizophrénie la situation est autre. C'est Lewis Caroll que icra Aulagnier fait appel pour rendre sensible I'hypothése qu'elle formule «J'ai Fimprestion que cela (il s'agit du langage incomprehensible du potme initulé Jabberwocky) me remplit la 18te de toutes sortes ides. [ignore malheureusement quelle sont ces idées! Poutant quelqu’ un até ‘quelque chose: c'est ce qu'il ya de clair li-dedans, en tous cas."» Dans cette imprécision, il convient de remarquer que la victime peut fire indifféremment I'un ou Vautre des personnages de Ia relation de haine ou un tiers t&moin. Ce qui est important, c'est Ia dimension passée et done irrémédiable de I'acte, au contraire de la paranoia ob H'acte est différé entretenant um « suspense? ». est environ dix ans apiés la publication de La Violence de lint prétation, oi elle posait les bases de son approche de Ia schizophrénie que Picra Aulagnier en vient a ce saisissant tableau L'enfant percewa-entendra la scéne comme Ia réatsation d'un meurite saccomplissant. On ne sit pas qui est fe meurtrier et quest la victims permutation est toujours possible, dans ta scéne qui suit le “mort” peut se prdsenter & nouveau comme vivant. Peuimporte un des wots personnages en fin de sone sera chague fois mis A mor. » (LQ, p. 377.) (On peut établir le lien avec ce que lauteur éerivait dans La Violence de Vinterprétation au sujet de Vimpossibilité pour enfant de se repré- senter sa propre origine comme le résultat d'un désir et d'un plaisie uunissant ses deux parents ‘, tout en soulignant clairement qu'il ne s'agit pas RA "une exaceshation mais dun autze type de relation, Le point commun de ces différentes situations tient au fait que l'objet est « devenu pour le Je, source exclusive de tout plisir eta été par lui déplacé dans le registe des besoins » (D.P.,p. 174). Le fait qu'il s’gisse d'un besoin n'est pas lig & une queleorigiic ccutismance, mais au fait que Mobjet soit seul parvenu a permettre au sujet d'oublier, de neutraliser le conflt ident ‘atoire entre lui et ses idéaux. D'autre part, parce qu'il ‘agit de besoin et non de dési, la relation satisfit conjointement les visées d'Eros et de ‘Thanatos, l'autre pouvant faire soufftir, voire faire mouri, s'il refuse la satisfaction avtendue'. Pera Aulagnier considére méme que «la suprématie de Ia souffiance, comme le désir de ne plus soulirr et de ‘ne pas désirer qui peuvent en ésulter, montrent que le choix de objet (dans Ja passion) est plus le fait de Thanatos que d"Eres. » (D.P.,p. 182) __ Cependant, 'alignation passionnelle opére bien une intrieation entre Eros et Thanatos, comune entre les buts sexuels et les buts nareissiques ‘ou entre le fonetionnement de la pensée et celui du corps. Mais le eat ratmaes rameter pape Seri eaters ate reece ina Se SES rete mcr mer Secshen etree cnters aca al Se a ne nba tone crareen cet ces ree ons ‘cay aren x eae ep Evolutions névrotiques et psychotiques B clivage lc plus fondamental que résout momentanéinent le i ration, ces celui qui existe entre a pensée dea réaité et Ia éa elle-méme. ‘eet égaré, Paproche que Pira Aulagnier propose dela txicoma- nic est originale et élairant. Elle souligne que ce qu’ attend le drogu est un phisir quia sa source dans le peasé et qui lui assure une réali pensée et percue, totalement conforme & sa représentation, telle que la {question du vrai et du faux ne fasse méme plus sens. Ce sont les percep- tions sensovelles dues au toxique, ce que Piera Aulagnier appelle la ««sensorialité pensée » du drogué, qui Iui assurent cette conviction et Crestelle qu'il cherchera &retrouver & nouveau en y retournant. La toxi- comanie apparat ds lors comme un « compromis entre le désir de ne plus penser la réalité et le refus ou impossibiité de recourr des cons- tructions délirantes » (D.P., p. 176). De méme, le joueur expérimente la rggation du hasard', en ffirmant qu’it connait la réponse lorsqu'il mise. Cette réaltéréduite au tapis vert ov 4a boule qui toure, il prétend, de ‘manigre mégalomane, Id Contre et « qu'il gagne ov qu'il perde, il Iai faudra également recommencer pour se reconfirmer qu'il peut deviner a Mavance la réponse» (D.P., p. 178). Perspective que l'on pout twulefois iutciruger en se demandant si le joscur n'est pos, plus fonda rmentalement encore, contraint de se confronter au hasard, ce qui est une rmaniére de le nier Comme force anonyrne, de le provoquer comme it provoquerait la mort pour ne pas avoir & se représenter qu'il est néces- sairement désarms et passif vis-&-vis d’elle. Mais I’exemple fe plus probant de la spécificité de I'aliénation est Ia relation amoureuse passionnelle, parce qu'elle permet d analyser, non seulement fe désir d'auto-alignation, mais aussi le désir d’aligner présent chez ceux que Piera Aulagnier désigne comme des « inducteurs de passion ». Co désir W'aligner n'est bien sOr que la rétorsion active dee qui a primitivement été vécu passivement. Le choix de linducteur de passion vise 8 lui permetired’occuper pour lautre Ia place de Fobjet du besoin dont il était lui-mEme dépendant comme infans. Mais étre Pour son partenaire amoureux, la méze ot le pbe, fait partie des échan- bes fantasmatiques habituels entre amoureux, et Freud y voyait méme, pour sa part, a condition de Iétablissement de liens profonds. I! faut done, pour Minducteur de passion, que s'y ajoute une dimension supplé- rmentaire qui est le désir d'asservir, lequel répond a son tour & une nécessité dans son économie libiinale. iera Aulagnier analyse cette nécessité de T'induction de passion chez l'autre, comme répondant, pour le sujet inducteur, & une défense {Le reprenra ps longuement ete question dans le chopive 42. "a Penser ia psychose contre la soutfrance et le devil. Ils vont donc, non seulement devoir anesthésier en cux-mémes toute possibilité d'affect et donc d’enga- ‘gement dans une relation mais, pour mieux s’en assurer, induire chez Tanue ces affects refoulés en eux-mémes. La souffrance de leur ppartenaire en particulier, leur donne la preuve d'une (elle maitrise. Dis lors, ‘induire une passion, c'est réussir A trouver un autre qui prend seul en charge le avail d'investissement qui vous fait exister pour eeli-ci hors de votre absence, » (DP.,p. 240) Dans cette relation Fondée sur le manque, il s'étabit une algbre paradoxale telle que « moins on en donne, moins on en fait, plus on existe » (ibid). Cela n’estévidemment valable qu jusqu’a une certain limite et ce que monte fa clinique des relations passionneles, le plus souvent avec le passionné lui-méme, c'est que celui-ci est réguliére- ment «rattrapé » par son partenaire, toutes les fois que la tension se rele. Cette liberé apparente de l'inducteur de passion nest possible que ‘price 8 un travail permanent qu'il opére en anticipant en permanence Je détachement, la perte, au point méme que son but, bien plus que [a relation, apparait comme la maitise de la déliaison. A cet égard, comme pour Ic joueur, c'est le hasard que représente laure toujours susceptible de faire défaut, qui se trouve nié, contre-investi par 'anti- cipation du deuil que l'on peut faire de sa présence, voire de son exis- tence. Cotte analyse de la relation passionnelle ouvre des perspectives clini- ques nombreuses, situées & mi-chemin entre la mnaitrise obsessionnelle et le clivage pervers. Par ailleurs, la relation des inducteurs de passion vis @ vis, non des autres, mais de leur propre agir, pose aussi un ques~ inement différent, Ces sujets se définissent essentiellement en fone- tion de ce qu’ils font ou ont fait. Comme I'écrit Piera Aulagnier « Crest e bt atin plaisir prove, la chose accompli, 'inerpréation quis se donnent ces consequences habitulles ou futures de leur apr. qui Tour renvoient en retour leurs énoncés idenifiatoires et cela de manitee conte.» (DP, p. 238) Ly achez ces sujets un refus de prendre en considération tout déca- loge enite fe souhait et la réalisation, ente Pacte et sa caustit y ‘compris ee qui concer un inconscient dont le sujet n’aurait pas connaissance. Cette fermeture au doute, 3 "incerttude et 3 toute possi- bilité de sovffrance, provoqve finalement une alénation d'un autre ordre, en ce qurelle oblige & un travail permanent de mise 2 distance ou de fate en avant. La suction qu'ls opérent et qui rend possible Evolutions névratiques et psychotiques 15 rinduction de passion ne tient pas tant a la réusste de cette autopro- tection, qu’a ce que F autre ressent inconsciemment de fragilité deridre cette cloture narcissique et peut-tre le désir qu'il a d°en percer Ia cara- pace, faute de pouvoir s'en construire une semblable. Passion et perversion Si je propose de confronter ii la perversion aux figures de Ialigna- tion précédemment évoquées, c'est parce que, comme le remarque Piera Aulagnicr, on serait facilement porté 2 voir dans la relation passionnelle un avatar du lien sadomasochiste. En effet, le passionné fest convaincu de son incapacité 8 faire souffrir son partenaire mais & inverse, va mtsurer Pintensité de son propre sentiment 3 I'aune de sa propre capacité de souffrance. Plus il souffte, plus il se révale 8 lui- rméme aimant et, dans gette relation, c'est ls souffrance beaucoup plus aque le plaisir quioccupe le devant dela scEne. J'ai pour ma part mantré ‘comment cette souffrance est lige an gestion du temps dans la passion, entre instant fulgorant et la durée ilimitée de Vattente étayée sur la stance, qu'elle soit gEographique ou de toute autre nature, qui sépare Jes amants'. La complaisance A la souffrance et méme son exaltation Jyrique, constituent des modalités de défense qui, dans Ia cure, peuvent pparaire aussi inexpugoables qu'une conviction détirante mais plus proche en fait dela répétition masochiste et propre & rendre intermina- bie le processus de I'analyse, Piera Aulagnier constate ls présence d'une composante masochique dans la relation passionnelle, mais refuse de I'y réduire (D-P., p. 181). Les raisons qu'elle expose nous engageront & revenir en arriére sur la place qu'elle a donnée dans son ceuvee 4 la question de la perversion’ et & discuter la différenciation entre sadomasochisme et aliénation passionnele La premitre différence entre le passioané et le masochiste tient & absence dun contrat qui lierat les deux parties dans un engagement réciproque. Piera Aulagnier s'appuie i cet égard sur Sacher-Masoch et fait remarquer que le masochiste sat que sa souffrance répond & une 1) «Le iténomtne pasion!» ye Dislopue 96,1987 (atl republi ans fe i 100 feta CGhons& ce gard senllemet eax exes: «pression comme srt» in [Cinconscews 1967 «Aspects targus des perversion nip Sexual humaine. ars, Abies Mongne, 1970. Ces des texas som reroapés sur une période de temps Beve et qu estonia & la publieion de Le Violence de Uinserpéation "1995, Pera Autigniersbordera sea peda sate la question de Ts perversion. ce oonnnnnnnnnnannaAnnaAannfn. 4 SOO Oe GFE DIDS EGO BE BLD DS: 7% Penser la psychose altente de plaisir du partenaire. De ce fait ia le pouvoir de priver son partenaire de cette possibilité de plaisir. A I'inverse, comme on a dit plus haut, le passionné est convaincu que l'autre est hors datteinte et ‘quil lui est impossible de le faire sour. Que le masochiste, dans sa positon d’apparente soumission, dans fa faiblesse qu'il revendique et dont il accable I'aure soit en fit le maitre 4u jeu, nul ne peut en douter. On pourait méme ajouter que ce n'est pas ¢n lui retirant la possibilité de jour de sa souffrance que le masochiste tient le plus solidement son partenaie, mais en ’enfermant dans une posi tion satique. La relation masochiste qui ne nécessite toujours pas un contrat en bonne et due forme consist le plus souvent &aligner autre en Pépinglant& Vimage de tui-méme que lui renvoie le masochiste. Par sa souffrance, ce demieridentifeI'aure dans une position sadique en criant bien haut que celui-ci est seule cause de ldite souffrance. Pi ble car si le partenaire s'avise un peu trop tard du re qu’on ui fit jouer et veut sen défaire, il ne pourrait qu'sccréiter cette image de tortionnare puisgu’l ajouteait 3 la soufrance dela relation celle de abandon. Pera Aulagnier fonde sa différencation entre la relation passionnelle tla relation masochiste sur le fait que le partenaire du masochist est un sallque, equi est loin dre toujours le eas. Réciproquerent, le sadique ne s'adressera pas un masochiste augue! il raindrat bien trop de confier 1e$ tenes de Ie maftrice de la situation. Ecoutons Sade : le Iibestin doit avant tout se garder des passions que l'autre éveille en Iu, les objets du désir sont soumis & une désigniticaion, hui-méme se veut « apathique », ‘estdiredissocié de ses propres pulsions. Par I, le héros sadienanni- hile en lu-méme la puissance od le tent la Nature et, en revanche, affirme qu'il sidentifie& elle, inexorable ct impersonnel comme eclle-» vance métapsyehologique, avec ses exigences spécifiques qui sont, dune par, la cohérence interne des hypothéses les unes par rapport aux autres, et d’autre part, la coexis- tence des trois points de vue : topique, dynamique et économique Crest A une topique de la représemtation que nous convie Piera Aulagnier, en délimitant ce qu'elle appelle trois espaces fonctions dont elle étudie successivement comment le sujet représentant sy situ, les productions spécifiques qui les caractérisent et la relation qurils occu- pent vis-i-vis de extérieur, soit le discours tenu par la mare et par le socius qui I'entoure. Ces tis espaces (originaire, primaire et secon- aire), nous les envisagerons successivement en tentant d’en dévelop- per les implications et en les confrontant avec d'autres approches théoriques, concemant la notion de représentation ‘Un souveisprsonoe me reste ui ills combin Pera Asap vai fo inten sine el joyeuseat a progsesion de propre ech ts exigencs gu i ie, tides a ee d'un sed lun, alors ues pousuivat dans volute, avec “Maurice Dayan et mre adicusion sue vance horque elle vest jo sett sr Ile eco intenoger eile sem sles mimercomioemet es ons6quenees eaasrephiqes ai mena, cle eer hypaite alors en ps tion, des constgeers les que ensemble de Fie mémpsychoogine een ht saat tomb deus dans une vison apealyptiqe igne des Mars rete! e Se e e e e e e ec e Se e = e e e Se e e f. wee, Ss 88 Penser la psychose |. LA NOTION DE REPRESENTATION La notion de représentation implique toujours I'd d'un passage d'un lément dun milieu dans un autre, celi-ci hétérogéne au précédent. La langue allemande permet a Freud une nuance que fe frangais ne rend que trésdiffcitement, en distinguant la délégation, cu sens politique ov diplo- matique, comme Représentanz, et la représentation imaginaire comme Vorstellung. Doi la subtilté de la définition freudienne de fa pusion, concept limite entre le psychique et le somatique, celui-ci tant représenté (Gélégué) dans le psychisme sous la forme de représentation (image) et affect. Toutefois, cette métaphore dela délégation ne suffit pas &expli- citer le phénoméne. La pulsion agit, dit Freud, comme une « excitation pour le psychique , c'esta-dire que, comme dans le modile de Parc réfloxe, une substance décharge vers I'extéreur ce qu’elle a précédem- iment regu, Toutcfois, ce schéma n’est pas non plus adéquat pour décrire "action de ta pulsion dans le psychisme, car excitation proviemt de "intéieur de 'organisme et agit done sur le psychisme, non comme une force d'impact momentanée dont on pourrait se déberrasser par une setion spéeifique, mis camme une foeer comstante Celle soumet fe systéme nerveux 8 des exigences élevées et engage dans des activités compliquées pour arriver & produire la modification qui apportra une satisfaction la source interne des excitations. De ce fait, les pulsions apparaissent, en raison de Mexigence de travail qu'elles imposent au systéme nerveux, comme des moteurs de progrés. Il en est de méme au niveau psychique oi la pulsion va re représentée dans des « représentants-teprésentations », c'est A-dire des images od la pulsion sous sa forme somatique, se trouve « déléguée » dans le psychisme. Parmi ces images, certaines sont des survivances, et Freud, dans une lettre 8 Fless (du 6 décembre 1896) les compare 4 <5 lois anachroniques (fueres) qui continuent d'étre en vigueur dans ‘certaines régions d' Espagne. En 1915, dans Le refoulement, it reprendta et explicitera Midée d'un refoulement originaire qui refuserait la prise en charge dans le cons- Cent du représentant psychique de la pulsion, pour des raisons qu'il ne donnera que plus tard (1926, inibition. symptdme, angoisse) liéss 8 des facteurs quantitatfs comme « une trop grande force de l'excitation et Veffraction du pare-excitation » Avec le refus de prise en charge se produirat une fixation, le ropré- ‘sentant correspondant Ia pulsion subsistant& partir de Ia, lig & elle de fagon inaltéable. Toutefois, cet arét dans le développement nimplique ‘Pas une cessation d'actvité, bien au contraire. Soustaits par le refoule- Métapsychologie de la representation 39 ment 3 influence de la conscience, les représentants de la pulsion vont connaitte, dans une obscurté propice, un développement inattendu «Le refoulement, écrit Freud, n'empéche pas le eprésentant de la pulsion de persister dans Tinconsceot, de continuer 3 sorganiser, de former des rejetons et d°établir des Uaisons [] il prolife [_.) et trouve des formes. expressions extrémes qui une fois quelle sont adultes et ceprésentées au névrosé, non seulement lui apparassent nécessairement comme étran- sgbres, mais méme I'ffraienten lui fournissant image d'une force pulsion- nelle extraordinaire ot dangercuse.'» 1a psyché se voit done soumise a une exigence de travail interne continu, cependant qu'elle abrite un certain nombre de représentations inconscientes, inaceessibles, mais pourtant actives ef productrices. Les trois « espaces fonctions » I1im’est appara nécessdire de rappeler ces éléments bien connus de la théorie freudienne sur la pulsion, parce que Piera Avlagnier s'en réclame directement. Cependant, un ensemble de points I'en éarte ayssl, Tout d'abord une méiaphore originale que Mon euuve sous sat plume, celle de Ia métabolisation qu'elle définit ainsi « > > > > > > 92 Penser a psychose: primitive du sein chez te nourrisson qui peut bien pour un temps se substituer & l'objet de satisfaction mats s'avére inadéquat vis-i-vis du besoin, La réalité, ou plutot ce que le systéme de représentation n'a pas pu métaboliser, revient alors comme un démenti qui s'oppose & Ia représentation que la psyché s'est forgée de sa relation au monde. Crest alors qu'un aute systéme pourra éventuellement prendre en charge ce que leprécédent n'a pu métabolser, mas ceci n'est possible 4478 partir da moment oi es trois sytémes peuvent éie co-présents t fonetionner conjointement. Nous examinerons done a présent le premier de ces systémes originaie. 2. LORIGINAIRE ET LE PICTOGRAMME Dod vient roriginaire ? Catte question paradoxale doit étre posée car si on pouvait imaginer Ie fanctionnement d'un coeps anquel les objets parviendraient automa tiquement en fonction de ses besoins et sans jamais lisser apparaitre de smanque, activité originate de représentation naurait pas lieu 'éue, Un tel état serait semblable a ce que Freud, aprés Basbara Low, rnomme Nirvana, c’esta-dire la disparition des tensions provoquées par les besoins instinctuels (Abrégé de psychanalyse, p. 76) rendant inutile toute démarche pour parvenir & la satisfaction puisque celle-ci serait agji 8, A inverse, c'est du manque que procéde lactivité représen- ative sous la forme de hallucination primitive selon Freud et sous la Forme des productions de 'originaire selon Piera Aulagnier. Le manque est donc le point de départ de toute pensée. L'setivité sensorielle qui ‘amine la psyché a se représenter la rencontre entre lorgané des sens et objet (réel ou hallucind), constitue done le déclencheur de activité ‘sychique originaire, Or, selon Piera Aulagnier, elle en consttue aussi le modale. C'est ce qu'elle nome « l"emprunt fat au mod&le sensor par Pactivité de Voriginaire » (V.1, p. 54), soit, en occurrence, oscillation continue entre le « prendre-en-soi et Je « rejeter-hors- Soi », ce que Freud avait aussi donné comme les linéaments de Mopéra- tion juicatoire qui parvient au jugement d'existence 4 panir dune valuation de ta qualité boone ou mauvaise de I objet. ‘Exprimé dans le langage des motions pulsionnelles les plus anciennes, Get les motions orales “cela je veux le manger ou bien je veux le cracher et en poussant plus avant le ransfert {de sens]: cela je veux."introduire ce moi et cela l'exclure hors de moi. Le moicplaisr originel [..] veut Metapsychologe de a representation 3 ‘Sintojecter tout fe bon et jeter hors de hui tout le mauvais!.» («La négation», Results, idées,problémes 1, p. 137) Si Piera Aulagnicr reprend cette perspective i propos de originale, celle va aussi y adjoindre un élément lourd de conséquences puisqu’il it du postuat de l'auto-engendrement, logiquement déductible, rappetons-le, du fait qu’a ce stade, objet qu'il s'agit de mettre dans ‘0u hors soi, n'est pas extérieur au soi en question, lequel n'est pas rion plus défini surement que comme un ensemble de sensations. De ce fait, éritelle, «vu, entenda, goo seront, ou bien pergus paris psyehé comme une sou de plaisir par elle auto-engendrée et done par excellence faisant partic de ce qui “est pris” & linérieur¢'elle-méme, cu bien comme une source de soufrance A refeter et ce rejet implique que Ia psyché s’automutile de ce ‘ui, dans sa froprereprésentation, mot en scéne I'organe et la zone, source ct sidge de excitation. 4 (VL, p. 55) ‘Nous verrons dans des exemples cliniques les conséquences de cette automutiltion psychique, c’est--dire de la destruction ron seulement de In representation mais aussi une partie de Vappareil sensorit, 11 faut auparavant s'artéter sur une question que. pose Piera Aulagnier selle-méme visevis de la proximité entre le modéle freudien de Pétayage et celui qu'elle propose de I'«emprunt » fait au modPle sensorel par Pacivté de originate. Si elle reconnsit une proximité, ellen’ identiie pas pour autant ces deux notions et on serait méme temté d'etre encore plus radical qu'elle A cet égard. L'étayage opére une «déviation de l'objet du besoin (le lait) vis-d-vis de Mobjet du désir (le sein), ainsi que I'a montré Jean Laplanche. aussi plas qu'un emprunt, C'est une déformation, voire une perversion? qui s‘opire. A Finverse, icra Aulagnier souligne «la dépendance effective et persistante » centre une activité organique, dont on ne pergoit les effets dans le champ psychigue qu'en des moments priviléiés, et le « fond représentatif » sur fequel fonctionne tout sujet ‘On peut penser que 'hypothiése de activité de Voriginaire permet précisément de ne pas penser I'étayage comme un détachement mais ‘quelque chose issu de Mactivité sensorielle laisse sa marque. 1. Ress ides, probes, fas dans Plsions ct destin ds pulsions»,[ otion de cin plas pri» 0 le mo cvnede ae Te Boe et eee (lone se pai) Fe savas 3 elit (p38) 2, Laplante, Vee mart ex paychonaye, Pas, Pammasion, 1970, 94 Penser ia psychose La spécularité de activité psychique ‘Ayant ainsi defini fx forme du pictogramme & panir de Ia du « prendre en soi/tejter >, Piera Aulagnier fit un pas de plus vers la struc- ture noa plus du représenté mais du représentant, soit de la psyché elle- mméie, comme ell le fera de méme vis-i-vis du primaire et du secondaire. Tl s'agit ici de définir des instances autres que celles énoncées par Freud mais qui ne s'y substituent pas, et surtout dont V'origine est diferente puisgu’ls'agit& chaque fois de la réflexion (au sens du reflet) de Pactvité psychique sur elle-méme, On reconnaft ici 'apport de Jacques Lacan sur le stade du miroir mais Piera Aulagnier nen conserve que le mouvement de spéculatisation lui-méme dont ele faitune constante de activité peychi- ueet ce, d2s son origine. « Toute création de Pactivité psychique se donne 3 la psych comme reflet, présentation d’elle-méme » (VL. p. 58). Le processus devient cependant difficile & saisir lorsque la duatité entre agent réfléchissant et Pobjet refléiéa’existe pas encore, mais 12 co d'autres auteurs parteront de fusion, d'indissociabilité, Piera Aula- gnier maintient image spéculare. «Sion admet qu’en cette phase le monde ~le hors payché n'a pas exis. tence hors Ia représentation pitographique que Vimaginaie en forge, il sTensuit que la psyché rencontre le monde comme un fragment de surface sculate, dans laquelle elle mite son propre rete.» (VL, . 58) ‘On pourrait penser une pétition de principes lorsque auteur nous demande de considérer un Soi (c'est--dire une instance représentante 4gui n'est encore ni le Moi freudien, ni ce qu'elle définira comme Je) {qui ne peut connaftre de Uextériewr que ce qui se donne comme reflet dy Soi en question et qui ne peut se connaiire lui-méme que comme wia engendré ce fragment qui le reflte li-méme. Toute la ques- tion, si épineuse chez Freud, de la sort du narcissisme primaire se Fetrouve ici, mais [8 encore il convient de ne pas concevoir de manigre réaliste ce qui se donne comme une fietion théorique. Ce qui assure Vissue dans ce jeu de miroir, c'est tout simplement, comme chez. Freud, ta difféence qui existe enize la représent objet et objet réel qui peut apporter la satisfaction du be psyché est donc confrontée, et ce ds le début méme si la description des fonctionnements améne a les évoquer suecessivement, obligation de reconnaitre que le sein est un objet différent du corps propre, qu'il posséde une indépendance et n'est done pas auto-engendé par le soi [Nous verrons que 'illusion d’ormnipoience se poursuit néanmoins dans ‘ace fantasmatique, mais cette fois- av . a > D 3 D > 3 > : 3 12 Penser la psychose ‘qu'en Gerit Freud en 1915 dans Warticle de la Métapsychologie sur Vinconseient! ‘La représentation conseiente englobe la représentation de chose plus ta représentation de mo correspondante, tandis que la représentation incons- cient est Ia repzézeniation de chose seule.» En termes freudiens, la représentation de mot implique un fonction- rnement mental régi par le processus secondaire, & ceci prés que dans le réve les mots vont se voir ramenés & des images et que dans Ia schi- zophrénie ils vont étre carrément traités comme des images par le processus primaire sli, rt Feud, appari a différence décisve ene le tava da sve et Ia schizophrénie. Dans elle ci ce sont les mots eux-mémes, dans lesquels ait exprimée Is penséepréconsciente qui ceviennent 'obet de I'elabors- tion parle processus primaire; dan le r8ve, ce ne sont pas les mots mais les représentations de chose auxquels les mots ont été ramenes. » (Complé- ment métapsychologique, p. 136.) I faut se rappeler es considérations chez Freud pour comprende le sens de la question que pose Piera Aulagnier 8 ce sujet ««Liinsription psychigue de Vimage de mot exigetlle le passage a4 process secondaire ou rtrouve-ton di sa tace dans le fonctiannemeat du processus primaire?» (VL, p- 102.) Primaire et secondaire n'ont pas {a méme signification dans sa théo- rie et dans celle de Freud, aussi doit-on entendre cette interrogation ‘comme ce qui dans le systdme (et non le processus) primaire, peut cons- tituer une précursion de Fimage de mot qui caractérse le secondaire. Crest en fait sur la période qui sépare I'étape « infans » (celui qui ne parle pas encore) de celle d’enfant que porte cette interrogation et on que celle-ci, au cours de laquelle enfant semble comprendre le langage sans pour autant I'uliliser, est relativement protongée. A cette tape de transition, comme "écrit Tauteur, pre Ia jonetion image de chose-image de mot, et impose un nouveat ype d'information de activité psychique alors que garde encore tout son pouvoir fe posculatdéfnissan lz logique du phantasre » (V.L. p. 12). Dece fait, Piera Aulagnier va développer une théorie tout fait origi- nnale autour du passage de l'ouir 8 l'entendre? era Autognir ne ce pr or texte mai un suleulsew:« Le Moi ot G2» 02 cE mine de i peste dans Engine est nouveo epi 2. Dintes ates, Berard This notmment, ont are Tatton sur Finpotance de Neat et de ee qui sy rapper, perspective que Freud « gare unmaslisch wit pas shore, IMetapsychotogie dela représentation 3 “«Liinfans rencontre le langage comme une série de fragments sonores, autribus d'un sein qu'il dove d'un pouvoir de parole.» (V.L, p. 108) Perspective qu'elle confronte avec celle d’Emst Cassirer, qui parle ie la rencontre de homme avec le langage comme une « totalité sous- traite 8 tout arbitrate individvel », pour marquer & Vinverse (et bien centendu e’est une confrontation avec Lacan qu'elle poursuit ici) 8 quel point ce que le bébé rencontre au début est fait de pores sonorités pporteuses ou non de plaisir. J"évoquerai& cet égard un exemple clinique une patiente qui m’avait un jour raconté une anecdote ilustrant cette dissociation du plaisir du son et du sens des mots. Ses parents lui avaient dit, alors qu'elle étsit adulte, qu’ils s'amusaient beaucoup Iorsqu'elle était bébé de la voir se réjouir de les entendre tui dire sur un ton charmeur qu'elle état lade, béte et sale et & linverse, de se mettre & pleurer forsqu'l lui prodiguaient force compliments d'un ton sévére. A posteriori, expérience lui paraissait étrange sans qu'elle S‘offusque davantage de f'abus qui lui avait té ainsi impos Piera Aulagnier monte ainsi le lent cheminement qui va. de la perception d'une sonorté et son investissement & appropriation dt champ aémantique. Mais il faudrait se garder [i encore de abstraction : de méme que le plaisir ressenti au niveau dune zone érogdne irae ailleurs et en totlité, de méme fovir n'est pas parable ‘du voir ou de la sensation de careste, d'enveloppement, etc. Le privi- Iégier ick na de sens que dans la mesure oi i est le passage oblige _ pour l’acquisition du langage et lexpérience de la surdité congénitale rmontre comment des voies adjacentes peuvent étre trouvées pour paler cete absence. En revanche, pour Ienfant entendant, il peut y avoir confusion entre la voix source de déplaisir et I'absence de toute voix faisant dés lors du silence I'équivalent intolérable d'une parole destructrice, comme on le voit dans la psychose. Cette situation s'expli- aque par le fait que la voix interdietrice peut venir tonitrer, lorsque enfant fait Yexpérience d'un plaisir et le faire alors voler en éclats. Le silence, dans ces conditions, devient menace vis-2-vis de ce risque dd traumatisme, impossible & fur car I cavité auditive ne se Inisse pas obturer, comme on ferme Fes yeux ou la bouche. A l'inverse, lorsque la sonorité est investissabe et interprétable comme intention de donner Gu plaisir, elle génére un désir dvi, celi-Ri méme qui fait défaut dans certains phénoménes de suritépsyechique comme 'autisme infan- tle, ta eatatonie et, plus passagerement, dans I'apparente suspension de Pattention fréquente chez les psychotiques. Bien avant le processus secondaire de signification qui accompagne. Ja matrise du langage, se met donc en place un « systtme de significa~ tions primaires » conforme au postulat selon lequel les images de mots 4 Penser la psychose ‘épondent elles aussi au tout-pouvoir du désir de Faure dispensateur de plaisir ou de déplaisir. $'l s'agit de déplaisir, le primaire réussit 2 ne pas en forctore I'éprouvé grice A cette signification qu'il Iui donne comme effet voulu par Pavire. En revanche, cette lopique implique la présence et la tout puissance d'un persécuteur dont objet du pouvoir et de la jouissance est précisément la souffrance du sujet. L’entrée en scfne de Pimage de mot ne se produit pas d'un seul coup car celleci fait pendant ‘out un teraps, partie des significations primaires. Pour que image de mot comme signe linguistique émerge, il faut, éerit Piera ‘Alagnier, que le bébé comprenne que la méme personne puisse Enoncer des signes diférents. Difféents et non pas contradictoires comme dans ‘opposition plisir/déplasi. I va en étre de méme dans l’organisation fantasmatique elle-méme qui, bien évidemment, n'en reste pas au bindme prendre-en-soi/eeter et fait coexister des pulsions différentes relatives A des zones différentes et pouvant se succéder dans lexpé- rience, eréant ainsi un premier accds & la temporalité De méme, I'ace’s au multiple va se marquer par la coprésence de plusieurs appellations pour une méme chose. Avec la reconnaissance du multiple s"ouvre en effet celle de Ia réalité qui n'est pas soumuse au fonctionnement binaire du principe de plaisir. Le fit que cet recon- naissance ne puisse s'acquéri que progressivement se marque par le fait, qu’avant la mise en place du secondaire (et continuant d ailleurs 'exister aprés) ily a un processus priniaiesecondaire oit les idées, formulabies et conscientes, continuent d’éwe régies par le postulat du primaire. Cohabitation transitoire des systémes, métissage, etc. la relation cente le primaire et le secondaire n'est en rien comparable avec celle que ces systémes entretiennent avec T'originaire. Ces hypothéses qui soal, pour le théoricien, M'seuvre du secondaire n'en sont pas moins nécessaires, & sa pensée qui ne saurait se contenter de descriptions ou arguments pragmatiques et demeure en quéte des fondements de son objet: la psyché en I'occurrence. 4, LE SECONDAIRE ET LIDEE Ce qui différencie fondamentalement le secondaire de l’originaire ‘ou du primaire tient A Papprentissage qu'il nécessite. On n'apprend pas 1. Gf beet gard es affrmations cen fis hdres de Sade 2 gad oe [a Mere Naar Mécapsychologie de la représentation ns a pictographier ov A fantasmer, car c'est l'appareil psychique qui produit les représentations correspondantes en les emprintant au vécu propre aux zones érogénes et aux éléments du pergu. L’image de mot cst elle aussi une trace mnésique mais il faudra tout wn temps pour que enfant puisse la relicr & image de chose et I'uiliser. Inlassablement, entourage nomme les personnes, les objets pour le bébé et progressi- vvement celui-ci apprend & dissocier ces phontmes de celui qui les prononce et 8 les rattacher & ce que celui-ci lui désigne. L'adulte les a rnommés pour l'enfant bien avant qu'il ne soit en mesure de comprendre cet ’utliser le langage, et ce sont des éléments de la réalité présentés Te plus souvent parla mére, dotés par elle d'un « indice libidinal» que Ja psyché rencontre. Piera Aulagnier souligne, 8 cet égard, son accord aussi bien avee Lacan (I'intrjection originaire d’un signifiant, sens ayalé » ave objet qui donnera Winscription du « trait unaire »), 4gu‘avec Bion lorsqu’elle éerit que 'infans métabolise & sa manigre un ‘objet qui a commengé par «séjoumer dans I'aire de Ia psyché ‘matemelle » Cependant, alors que originaire et le primaire vont ignorer cette cempreinte puisque 1a métabolisaion s'effectie en fonction de fenrs postulats et seulement dans cette sirite limite, en revanche, avec Te secondaire il va y avoir partage de mots, accord sur des significations pour qu'il puisse y avoir communication. A partir de 1, la réponse de Pautre pourra prendre en comple non seulement le manifesté mais aussi Je demande, Le pouvoir identifiant du engage [Nous avons vu propos du Je la présence et le role de lomibre parlée par la mre et projetée sur Vinfans et plus généralement de In fonction porte-parole de elle-c, nous ny reviendrons done pas (cf chapite 1-1). ‘Cepersdant, avant de développer ce que le secondaire va ouvir avec aces au langage, soit a pensée sous sa forme discursive, i faut &voquer un point clé qui eanceme le pouvoir idemifiant du langage. "importance de cet aspect tient précisément a fut que le secondaire ne constitue pas un registe abstait ob il pourrait y avoir le développement d'un pur processus de compréhension mais que les mots qui vont nommer les affects vont ainsi es transformer en sentiments. Ce demier aspect ‘chappe, si l'on elite & parler de « eprésentaton de chose », comme s'il sagissat d'un objet du monde extéricur et non de Pobscur ressenti d'un affect. LTimage de mot en s’accolant 8 ce demier vale transformer en un sentiment dieible, consciemt pour le sujet qui 'éprouve et commu nicable & Paute le eas échéant a ~—a_annanrmane ean nanaeananana EB ew ee a 16 Penser ia psychose ute Timmportancelibdinale de ce ehamp couvert parle langage, le sujet expérimente l'infini du doute précisément parce qu'il ne peut comme avec un objet du monde extérieur, se limiter & la perception hic frac qu'il en a, ei sat combien ses propres sentiments peuvent changer, se renverser dans le contrare,s'loigner dans lindifférence, ete. Nous verrons, 8 propos de la vérité (chapitre 4-1), comment la ques- tion du doute et de la certitude concernant les sentiments peut avoir la position d'une pierre angulaire, comme Harnlet Poffirmait & Opkéli ‘«Doute que les étciles soient du feu. Doute que le soleil se meuve. Doute de a vérité méme, Ne doute pas que je t'sime. » (W. Shakespeare, Hamlet, acte I, in Euvres complétes, Club frangais du livre, p. 333.) Car, ainsi que le note Piera Aulagnier, ‘cle sentiment, Join de se réduire 8 la nomination d’un affect est une iter= prétaton an sens e plus fort du terme, qui eli un éprouvé en soi inconnais- sable & une cause supposée conforme ce qu'on éprouve. (V.L,p. 163) La coupure du secondaire d'avee l'originair, destiné & demeurer indicible et impensable puisque la cause s'y confond avec 'effet dans {auto engendrement, ee rotrouve aussi vis-B-vis du primaire poise Véprowvé n'est pas seulement effet du désir de I'Aute, ila un nom cf parla rejoint d'autres éprouvés similaires que le suet a pu connattre aniérieurement. Qui plas est, Ia nomination du sentiment assure sa circulation : « Que le mot “amour” vienne 3 étre prononcé entre cux...>, dit la Comtesse & propos de Fabrice det Dongo et de Clélia’. Le mot va assurer une communication universelle par la lecture qui transporte les affects vers des lieux ou des époques inexplorés, mais ot fe sujet y retrouve derechef ce qu'il connait bien: Meet des mots li ot ils manguent et surtout fi oi ils ont manqué, transformer un affect vécu comme une expérience innommable dont la réminiscence est devenue un danger permanent en une histoire dicible, telle est bien la fonction de analyse ou du moins son ambition. Car Jes mots reproportionnent et permettent au vécu, quel qu’it soit, non as de s'effacer mais d'&tre lig, enserré dans un réseau causal exprima- ble au lieu d’étre simplement subi Pour Picra Aulagnier, le confit psychotique réside précisément dans cette incapacité de le mettre en mots. Plus précisément pour elle, "une des origines de la psychose est lige a I ‘transmission dun manque dans les paroles dont a disposé le Je parental et dont disposera le Je de enfant pour se rendre dcibles, maitisables et 1 Stent, La Chorreue de Parme Mecapsychologie de la représentation 47 sensés les affects éprowvés dans leur véeu relationnel » (« L'activité de pensée dans la psychose : des mots qui manquent », Nice, conférence du 17 mats 1989). ‘On sait que le réle de la mére porte-parole est d’apporter & T'infans ces paroles qui vont I'identifie et I’aider 3 faire advenir sur sa propre scéne psychique un Je, dont elle assurera en quelque sorte ta préforme. La mie, avee ses mots qui peuvent nommer le déplasiret lui donner ‘un sens, permet que l'appareil psychique de l'infans ne désinvestisse pas ces expériences, ce qui est le mouvement naturel de Ia pulsion de mort. Or, dans certains cas, infans rencontre l'ineapacité du discours imaternel de lui fourir des mots qui expliquent la souffrance, la décep- tion, la frustration que comport & plus ou moins vif degré tout contact avec la réalité, De méme, ce discours ne semble pas davaniage capable de parler a enfant d'un plaisir qu'il aurait éprouvé ov qu'on aurait partagé avec lui Ce que I"infans va vivee a Pintéricur de li, faute de nomination, va demeurer Snigmatique et de toute maniére hors d'atteinte, purement subi. Piera Aulagnier est ici ts proche de ce que décrit Bion 2 propos des « proto-pensées ». qu'il défint comme des « objets mauvais. dési és et dont il faut se débarrasser par la fuite ou la modification », ce ui souligne ici Ie risque de désinvestissement qui accompagne l'objet brécisément parce qu'il est désirable et pent fsire défaut. C'est activité partagee entre la mére et le nourrisson qui va permettre a réalisation du développement des pensées. La « capacité de réverie » de celle-ci contient et transforme les éléments venus de enfant, permettant & ce dernier de se les approprier en retour. La pensée est alors possible, Cest-icdire la constitution d’un appareil 4 penser les proto-pensées Evoquées plus haut. Sa fonction sera d’unir une préconception avec les impressions des sens appropriges formant alors une pensée qui sera connaissable parle sujet’ Pour Picra Aulagnier, Ia mére apporte par Ja mise en parole des affecis, une causalité et donc T'idée qu'il est possible de tes relier & quelque chose que la mére, enfant ou les deux ls fois, ont le pouvoir de modifier. Que peutil se produire qui rende la mére incapable de cette activité spontanée, tele que ailleurs toute personne qui s'occupe un bébé sans en étre la mare la rotrouve plus ou moins ? Pour opérer une tlle mise en paroles, il faut avant tout que la mére puisse imaginer ce que le bébé éprouve, c'esti-dire quelle puissetrou- 1. Bion W.. Aue src de 'espéience, aris, PUR, 1979p. 103. Ces ses drs somt ‘hs maavais objae pare ls exellent la Convoilse (atalie) tout en eam mangas 11a Penser la psychose ver en ell-méme, dans les traces qu'elle peut conserver de sa propre petite enfance, les éléments qui lui rendent interprétables ce qu’ll mani- feste. Or, vis-i-vis de cela, il peut se produire que la méze soit tellement identifie & son bébé qu'elle ne puisse pas le ressentir comme séparé et que tout ce.qui lui arrive soit ressenti comme Iui arrivant delle. Face ce retour en direct d'un passé aboli, Ia seule ressource est le désin- vestissement partiel, Ja mise distance. L'inaffectivité, la maftrise mécenique des soins donnés au nourrisson et surtout Vineapacité de penser et de mémoriser ce qui lui est arrivé (V’enfance:« sans histoire » des psychotiques), peuvent dés lors re compris comme une défense vis-l-vis de cette absence d’écart que vit la mére éntre son propre corps ct celui de son bébé, La consiruction de Ia cepacité de pensée va done subir des blancs, des vides, toutes les fois que se rencontre une expérience qui dépasse pour la mse la possibilité de Ia mettre en mots. A cet égard, Piera ‘Aulagnier souligne que peuvent étre des facteurs inhibants, aussi bien Vincapacité de la mére de percevoirVaffect que vit 'enfant (on pourrait, ajouter que sa propre ambivalence projetée peut avoir une action dans cecas),limpossibilité de relier leit affect & une cause modifiable (par exemple, la sidération devant un destin qu'elle ne peut que cubir cans ‘mots) que le fat qu'elle ne puisse pas toléter de se penser comme cause de la soufirance de l'enfant ou d'etre devinée tele par lui. On pourrait TR aussi ajouter que bien des sitences sont issus d'une pesée doulou- reuse des avantages et des inconvénients de «18% die, et cela peut concemer toutes sortes de drames familiaux que Ienfant vit mais dont il manifeste suffisamment diserétement ce qu'il en ressent pour que le silence continue de peser. Bien plus tard, ces absences peuvent faire retour de toutes sortes de rmaniéres : comme des blancs ou comme des pensées absurdes que le Je avait tenté d’exclure. De manitre encore plus patente, cette décon- nexion du fien de causalité entre I'affect et I'événement va pouvoir éire eproduit tel quel dans un discours qui d8s lors, ne peut apparatre aqu’étrange voire délirant & interiocuteur Pera Avlagnier apporte exemple, mais on pourrait en trouver mille autres, dela reponse donnée par un patient lorsqu’elletentait de Uaider 8 comprendre la cause de la rage qui était subitement peinte sur son visage. «e"Crest parce que ce matin le conducteus dTautobus portait une easquette vert.” La liaison affect-cause, ajoute-telle a volE en éclats, il n'y a pas de paroles pour la parler. » 1. a Latvié de pense dans la pyehé: des mots i manqnen » Nice coaence 17 ars 1989 (eatyiog) Méxepsychologte de la representation 19 Ailleurs, c'est une causalité absurde, c'est-i-tire répondant & une autre logique que celle de 'ensemble des sujets d'une méme culture, qui va re invoquée, qu'elle conceme les liens de parenté, e fonction. nement du corps ou celui du cosmos. Dans lc cis de ces jlots de non-sens (of ce que nous avons pu en dire 3 propos de la « potentialité psychotique »), on ne parlera pas de dlr carla construction d’ensembie demeure conforme a la logique commune. En revanche, Je dlire comme construction sépond & cette absence, évoquée plus haut, de relation ente le mat et V'afect, «De manitre abrupt, je sera tentée de dite que le délirant, au sens fort du terme, réusst& construire 3 extérieur de Iu-méme ou en son comps, un ‘monde dont organisation redonne sens aux affects qu'il éprouve et, par 1a, lu fournit es mots qui manquaient pour parler ces affects. » (Ce « langage fondamental » qui conceme la nomination des affects (et aussi cele ds liens de paren, perspective que nous aborderons au sujet Ge la mémoire) constitu donc ce préalable nécessaite & toute pensée. Nous envisagerons maintenant de mani8re plus global, la théorisa- tion que propose auteur du suet de Wactivté de pensée, qui constitue done le propre du secondaire. La question de la pensée, des conditions de possiilités nécessaires » A son avénement, des destins qui lui sont ouverts comme des pitges qi la guetent et ples paofondément encore dels relation ular aujee entretient avec sa propre pensée, constituent un repre constant dans - Moruvre de Piera Aulagnier. On y sent aussi ce qu'elle savait donner & entendre de I'affect qui imprégnait pour elle la chose théorique. Plus «une notation posséde ce caractére d'authenticité et de chaleur qui ne lient & ricn d’autre qu’a la présence vivante de celle qui les a écrites, et ces quelques lignes ont presque une valeur de confidence : «<*Savoir qu’on ne sait pas” est la position Ia moins naturelle qui soit pour la pensée, elle est un acquis, bien secondaire, toujours fragile, lacceptation| «une vérté que Von doit its mise en question, dont bien Souvent on 2 Serit passé, d'une certitude qui la précédait.» (DP. p. 66.) 1 encore «Iy aun op 6" du taval dela pensée, un “top 11" des eritésentee- vues concernant fa réalité, un “trop 61" du doute qui assent des traces. De leur lucdité trop précoce parait reser chez certains une cicatrice dovlow- reuse qui les rend & jamais méfiants visi-vis de V'illusoire, du faux- semblant, de la forme apparente des choses et des discours. » (D.P.,p. 206.) Constatations 3 ta fois nostalgiques et combatives qui témoignent de ce que sut réaliser leur auteur une mise en théorie exigeante, sans MAOANAAAAAANAANRANRARAAMRAMHAAMA » , , » > > , ) ’ , ) » ’ j 120 Penser la psychose cesse reprise comme le fut celle de Freud, préte s'attaquer aux ques- tions réputées les plus inaccessibles, en méme temps qu'une pensée allergique au dogmatisme, soucieuse d’éviter les effets de psittacisme que peut provoquer toute construction théorique nouvelle, S'évoquerai de manidre nécessairement breve et subjective, ce qui me semble étre quelques points clés dans cette constrction théorique sur la pensée, ainsi que ce que je pense repérable de commun entre ces points. + Si, contrairement au corps, la psyché ignore fa prématuration, quelle origine et quelle place peut-on y assigner au pensable, qui ne se confond ni avec le représentable, ni avec le figurable ? + Si on peut considérer que la notion de violence est centrale dans Meeuvre de Piera Aulagnicr, comment se conjointlle avec ce qui est la ‘marque et la condition de autonomie du Je, soit son activité de pense ? + Alors que pour Freud il n’existe aucun « besoin inné » de writs, ‘comment comprendre chez Piera Aulagnier des notions comme le « besoin de causalité», la «quite des prouves », V's enigence de vérté» ? Origine et place du pensable /représentable /figurable Cette place est d'abord définie par la coexistence des trois modes par lesquels 1a psyché métabolise information qu'elle tire de sa rencontre avec la réaité: « Tout ace, toute expérience, tovt éprouvé donne lieu conjointement & un pictogramme, & une mise-en-scéne, & tune: mise-en-sens » (V.L., p. 21), Cette notion de métabolisation Conjointe est précieuse car elle apporte une forme de réponse possible Ace point de butée aporgtique que représente en psychanalyse le carac- ire absolu du narcissisme primaire, Nous ne sommes pas 13 face & image d'un enchainement oi les possibles se feraient suite en fonetion dune évolution dont il faudrait rendre compte, mais on ext d'emblée dans une multidirectionalité présente ds l'origine, méme si tous les ppossibles ne. sont pas simultanément mobilsés. Le représentable, le figurable et le pensable peuvent bien « entrer en sone » successi ‘ment, ils ne constituent néanmoins que des traductions différentes d'un meme matériau de base. Cette perspective situe du méme coup les limites du pensable : les productions de Moriginaire sont radicalement hétérogénes la structure ddu secondaire. De méme que le Je ne connaftra jamais du monde physi- ‘que que Ia représentation qu'il s'en forme, de méme la structure des objets de loriginaire lui restera semblablement hors d’atteinte, fondant ainsi la notion d'impensable. Ce méme Je conserve, cependant, Ii sion que activité de pensée vise l'objet en soi, la réalité« tlle qu'elle [Mérapsychologie de la eprésentation lar est, alors que Ia pensée ne saurait forger autre chose qu'une image de la rélité qui soit le dcalque des relations présentes dans le propre espace interne du Je En d'autres termes, le pensable est un schéma telationnel que le Je impose aux éléments, ceux de sa propre réalité inteme, comme ceux du monde extérieur et cette violence a pour but de les rendre conformes et cohérents avec la fogique du discours dont il est lui-méme issu Different, héiérogene et cependant indissociable du représentable et du figurable, le pensable est de méme en continvité avec I'activité du ‘corps parle bis des zones-fonctions érogenes. La fonction d’intellec- tion e présente & la psyché comme une nouvelle zone-fonction érogtne ‘et emprunte pour cela aux auses zones les gains de plaisir qu’elles ont pu realise! ‘On sait que chéz Freud, méme si le Wisstrieb est intimement lié & Practivité des 2énes érogénes et aux pulsions partielle, il faut néan- moins intervention der cet éiément extérieur qu'est l'intéré «pratique » pour le faire démarer. La conception frevdienne, comme Ja conception ferenczienne, font au traumatisme une place prépondé- rane pour que Ia pensés devienne investigarice,rsisomnante el thé ricienne. Pour Piera Aulagnier, le doute occupe aussi ceite place de éclencheur, mais parallélement 3 Turgence ob se trouve mise la ensée, se développe une activité de pensée lige au plaisir qui occupe 1A une place matricielle. On trouve 18 origine de ce que j'ai nommé «plaisir de pensée , diffrent du plaisir du fantasme, car ce plaisi-!a ‘est lig d'abord une interrogation Piera Aulagnier monte fa manire dont s’opére ce passage insensi- ble qui va du plaisir d'ouir au désird'entendre. Ce plaisir d’ouir est inserit d8s Poriginsire «Le propre cri de linfans ov son propre gazouills refont truption dans s3 cavilé auditive comme un son de haine ox d'amour dont un sein-tympan indivisible serait 'émeteur.» (V1, p. 109.) Freud avait centré Vorigine de Mactivité de ta pensée investigatrice sur fe visuel et emprise musculaire, Piera Aulagnier, quant 3 elie, souligne tout au long de son cruvre ia dimension de Pauditf et du vocal. TL Live de Pira Avlagier selon lnquele wn « pais de penser» dot rdeéder un ‘volo > ou un w dsr penser (V1, p. 7) ava renconré pow oi de manitre rstcitrementélarante fs hypotse gu mail wenses 3 propos de Ia tore {e Is sublimation, tele qu'on po fa reconstuer 2 par des testes de. Freud . Miolia‘MetiorS, de, «L'eolton ef notion de fiaion dans Meuvie de ‘Freud , 708 p, thse de Detrat Ett Letues et Sienes Hurmines, 1986, Bio ‘mBsqu'de Universi de Pais VI. 122 Penser la psychose De l'importance de cette perspective émoignent non seulement Ia clini- ue des psychoses (cf In surdté psychique des autistes) mais aussi tes diverses formes d'inhibition intllectuelle névrotique ob le sons véhi- culé par les mots n’est plus repérable, ces demiers s'associant en une bouillic de sons qu'l favdrait ingurgiter de force. Le sens libidinal préctde et ouvre Ia voie a la. signification linguistique : le « pourquoi parie--cle ?», « que veulent dire Foffre ‘ou le refus de sa parole ? » précédent I'interrogation « que dit-elle 7 » Mais 18 aussi le chemin offre de multiples bifurcations possibles : la Voix peut devenir instrument d'atiénation, le plaisir d’outr peut s'ache- terdu renoncement au désird’entendre, comme on le voit dans les psal- rmodies religieuses, les vociférations des dictateurs, I'autohypnose de Ja foule par ses propres cris de haine. Violence primaire et activité de pensée ‘Le porte-parole dans la théorie de Piera Aulagnier est aust un porte nsée. Face & Finconnaissable que représente pour elle Wire de TTinfans, fa mére surimpose son propre espace psychique dans une violence aussi inévitable que nécessaire (cf chapitee 1-1). Rappelons la définition de fa violence primaire comme «action psrchique par laquelle on impose la psyché d'un autre un choix, tune pensée, qui sont motivés par le désir de celui qui 'impose mais qui sétayent sur un objet ui répond pour autre la catégorie du nécessire. » (Wel. 40) Le mouvement nature de I"étayage se voit ici inversé puisque e’est le dsir qui fourit son objet au besoin, opération rendue possible par le fait que le sujet du désir et celui du besoin ne sont pas les mémes. En termes de séduction, de confusion des langues, ce jeu entre désir et besoin a été diversement théorisé. La fécondité particulitre de approche de Piera Avlagnier tient ou fat qu'un méme dispositif est potentiellement -porteur de développement (Fonction porte-parcle- pensée) et d'aliénation (redoublement de la violence primaire). Ajou- tons que la mére bien souvent attend aussi de enfant qu'il devienne son propre porte-paroe, qu'il pense les pensées quelle s'est elle-méme interdites, voire qu'il assume la violence et la révolte auxquelles elle n'a qu'apparemament renones. Jai précédemment rapproché l'approche de Piera Aulagnier de celle dde Bion vis-A-vis de la place de la mére concernant ce que celuicidéfinit comme « capacité de reverie» qui « trate» les proto-pensées de l'infans les convertt de mani & en faice des éléments alpha. Le refus ou -Mérapsychologie de la représentation 123 Tincapacité de Ia mre ce travail de métabolisation est Pautre alterna live possible, mais Pidée que I'«aliment psychique » puisse devenir instrument d'une alignation possible n'apparat pas chez Bion et diffé- rencic en cela notamment la théoristion de ces deux auteurs. Chez Piera Avlagnier en revanche, Ia violence, méme nécessaire, demeure une violence au méme ttre que celle qui fait passer Vaffect&I'éat de sent rent par le biais de la nomination (« Je t'aime »). De plus, Pactivité psychique de Ia mére n’est pas celle d’un fitre ou d'un transformateur Alectique mais d'une prothése, toujours susceptible d"imposer avec son. ésir un ordre qui n'a d’autre référent que ce désir li-méme. ly aun aspect profondément dialectique dans la théorisation de Pieta Aulagnier qui se marque dans le soulignement constant de la concomitance des possibles t du fait que toute determination comporte aussi Pinverse du choix que l'on croyait avoir fst, la mort de ce que Von croyait avoir fait vivre. Il ne s‘agit pas I d'ambivalence seulement, ‘mais de engendrement inéluctable des contraires. Ainsi en est-il du Asie de la mére pour Yactvité de pensée que va manifester Vinfans : ve intelligence devient le defer trol atendu a bereé, éduqué dans espoir qu'il offre & Vactivité de pensés le support optimal. » (Vp. 153) Or, cette attente et ce désir« oublient » ce que la mBre sait pourtant par sa propre expérience, 3 savoir que la pensée est par excellence le Tieu du secret, voire du déguisement des apparences. De ce fat, le but visé par la mére n'est réalisé qu si inverse se produit : en acquérant 1a capacité de pensée soubaité, enfant s'écarte du moule idéal dans lequel on tente de I'insalle, 1! donne la preuve qu'il pense par 'exer- cice de la non-transparence & laquelle il a d&sormais aceds et qui le sépare radicalement de celle qui en avait préparé l'émergence. La od ce renversement dialectique ne se produit pas, ld oD le méme s'auto-engendre indéfiniment ou prétend le faire, activité de pensée ne peut plus remplir son office qui est d’assurer au Je son avtonomie et se pervert en pensée aliénée ou en pensée psychotique. Cette domigre a offert & Piers Aulagnier te fondement de sa théorie de la pensée, En 1976, dans « Le éroit au secret: condition pour pouvoir penser», elle notait «Si nos travau ont pu apporter quelque chose de nouveau sur active de pensée, c'est qu'il nous est appary que c'est A partir de ce que nous enseigne la psychose qu'on peut expérer comprendre les conditions et les présupposés qui ont permis 8 la pensée et au discours des autres dy échapper. » (LOS., p. 224) « € € € € € € € € € € € € € e€ e € é Ee e Ee a e i Dy (WE PY Dy GLO OW SG, &, Bee ow ewe ee 124 Penser la psychose Le pouvoir que confére Ia possibilté de garder une pensée secréte est nécessaire &I'autonomie de a fonction pensante. Il éiablit une ligne de partage entre le lew privé du fantasme, pensée qui trouve en elle- rméme sa propre raison d’éte et fe lieu ouvert de I'idée, de la pensée agie, celle qu se communique et se partage. L’atiaque de la pensée par les conditions propres a la psychose est explictée par Piera Aulagnier ‘non pas en fonction du traitement régressf du mot en chose (Freud) ou dela métaphore en objet coneret (Searles), mais a partir du fait que Ia pensée, constituant un équivalent de zone-fonction érogéne, peut deve- tir objet de mutilations d’amputations en fonction du champ telation- nel dans lequel elle se développ. Jen viens maintenant au pot qui apparat peut-ére le plus current dans les textes de Piera Aulagnier et qui consttue, par 'alliance od it se trouve avec la théorie de Identification, I'un des axes majeurs de sa théorie de la pensée : In question de la vit Exigence de vérité, quéte des preuves, besoin de cavsalité, Piera Aulagnier retrouve 1a une inspiration philosophique, notamment kantienne, parle biais d'Ernst Cassirer qu'elle cite & plusieurs reprises. Mais ce n'est pas vers ce versant philosophique que je me dirigerai, ‘mais vers cette interrogation mayeute, & savoir la modification radicale ui existe entre l'état de plaisir visé par Moriginaire et l'état de plaisir Visé par activité de pensée Deméme que selon Freud le but de la vie est la mor, pas n'importe laquelle cependdant puisque, sion 'en crit, « chaque organisme ne veut ‘mourir qu’ sa manidre », de méme le but de activité de pensée se sésume dans le désir jamais totalement réalisé de soumettre la chose & image de mot et ainsi de s'abimer dans la quiescence de la certitude. Catte certitude, Piera Aulagnier nous montre qu'elle ne pourrait éte atteinte qu’au prix d'une mise & mort de la pensée qui consisterait & s‘elfacer dans Ia pure reprise en écho de la pensée d'un autre. Les traces du crime sont effacées a leur tour price & une opération qui rend impos- ible de se représenter le processus aliénation Iui-méme, comme en (émoigne l'histoire « blanche » des psychotiques. OF, on trouve un détoumement particuliérement troublant de activité discursive attelée& la recherche de preuves toujours limitées dans le cas particulier de utilisation, ou de Vappel& la sensorialité cornme tenant Jiew de-preuve, telle que Sade Tillusie A longueur de pages. Cette « sensoralité pensée ou supposée pensante», Piera Aulagnier en donne |. Je envoe ie le leceur& Pale de Nae Zalman, La pation anarchist » oer, 8, 1979, gl dere es sss eal phone de Toy -Mékapsychologie de la représentation 125 tune approche & partir du vécu du toxicomane, dont elle rappelfe qu'il ne ‘cherche pas, avec la prise de drogue, une excitation sexuelle, mais une certitude qui a trait la pensée. La prise de drogue, écrit-elle, permet au sujet de déléguer aux zones érogénes sensorielles son pouvoir de pensée, danis une contemplation passive de représentations qui se déroulent dans son espace psychique, telles que le Dieu-drogue les Iui offre & penser. Certes, on peut considérer que pouvoir penser sans la pensée, devenir le Fieu d'une révélation est le but inavout de toute démarche discursive. Le raccourci des aphorismes, les effets d'évidence, Ia surprise devant le dévoilement du sens, es Einfalle, es idées subites involontaires, témoi _gnent de ce que jamais aucune pensée ne rejoindra ce court-cireuit de la sensoralité: « Situ sais que c'est une main, alors nous Uaccordons font le reste... », Grit Wittgenstein, Pourtant, ta vérité est bien objet d’un besoin et non le luxe dune quéte abstrate, besoin d’autant plus crucial il est vrai qu'il conceme ce minimum nécessaire au Je pour s'identifier. La relation du sujet & Ia vérité retrace histoire de W'activité de pensée et Piera Aulagnier en définit les. grandes Tignes, ainsi que ta maniére dont te sujet se voit successivement débouté des trois temps de ce qui consttue pour lui le Jugement de vente + Si, en un premier temps, est vrai ce qui est source de plaisir, seule "la nécessité de penser ce qui est cause de souffrance rend impossible den rester Bb + De la méme maniére, la relation conflictuelle, qui ne tarde pas 8 ‘opposer l'enfant & la pensée matemelle, demande que soit, 3 son tour, ‘dépassé le deuxiéme temps : celui ot est considéré comme vrai ce ‘qu affirme ta voix de I'aimé ou de I"idéalisé, Ce conflit est néeessaire pour que l'enfant puisse choisir pour « vrais» ses propres désirs,éprou- vés, etc., sans craindre pour autant la mise 3 mort de une ov l'autre pensée, Le refuge dans Ia vérité révélée constitue une manigre de ne as sortir de ce deuxiéme temps du jugement de vérité + Enfin, le toisitme temps, contrairement aux deux précédents, va tcnir sa stabilité dintégrer le doute comme valeur positive et non d'en pitir comme dun facteur de destruction, perspective dans laquelle stavbre 3 nouveau le caraciBre profondément dialectique de la pensée de Piera Avlagnier. La négativité du doute se formule dts tors comme le maintien d'une ouverture et Ia quéte d'une vérité toujours & renou- veler parce quion a accepté qurelle ne puisse étre que mouvante et partielle dans les objets qu'elle tteint. Cette perspective va dans le sens de la notion de sublimation dans le domaine de Ia pensée, échappant au désir d'une certitude qui mettrait fin au questionnement. C'est la raison pour laquelle, face a cette tentation de quiescence i s’avére tout 126 Penser la psychase aussi nécessaire de rappeer la force que représente cete incapacité de resteren place, cette insatistaction essentielle de la pensée qui lui assure échapper aux destins mortiffres précédemment Evoqués. Jeterminerai ces quelques remarques sur la théorie dela pensée chez Pera Avlagnier en ajoutant trois considérations d'ordre plus général 1. La premiére tient & la constatation que cette théorie, dont on pour- ‘ait montrer comment ell refléte les principaux acquis de la théorisa- tion métapsychologique, occupe une place chamiére vis-ivis de plusieurs directions de investigation psychanalytique. Il est en perma- rence sensible que la réflexion de Piera Aulagnier, comme ¢’ailleurs celle de Freud, s’ouvre simultanément sur le champ singulier de a cure, sur celui de a réflexion psychopathologique, sur celui des phénoménes sociaux ct politiques. Il suffitd’alleurs de rappeler la place qu'elle a donnée ila fiction politico-ltérare de Georges Orwell, 1984, qui n'est pas seulement pour elle un exemple mais un instrument de théorisation et de formation de notions. Par Id aussi s"atteste la richesse dune pensée psychanalytique qui rend inutile l'artifice de I'« application » de la psychanalyse 2 la fitature ou & tout autre champ. 2. Ma deuxltme consideration conceme le tat que cate théoric de "activité de pensée sous-end de manitre organique la réflexion sur les conditions de possbilité de 'intexprétation dans la cure psychanalyti- que. En effet, tout ce que j'ai évoqué des risques d'aliénation que court 1a pensée, vaut aussi dans la relation que la pensée de I'analysant entre- tient avec celle de son analyste, avec la capacité de ce demier de former des interprétations, de se remémorer et de I’accompagner danse lent cheminement de 'élaboration d'un sens qui n'est jamais, rappelons-le, 4urune ré-interprétation (of & ce sujet le chapitre 6). On retrouve cette sméme perspective dans L’Apprentihistorien et le Mati sorcier sen suis venue & penser qu'une vitéaccepée et sans devoir pour cela ni re falsfige ni ve cule, pea servi au meme tine des Tinie, antinomiques. > (AHL-MS, p. (78) ‘Vérité et connaissance peuvent en effet se mettre au service d'Eros, du désir de plaisir ou de Thanatos, de la souffrance et du désir de non desir. Cette constatation sans illusion situe Mefficacité du travail 4 interprétation dans la stricte dépendance de ce qu’en fea Vanalysant. Lae vérié » se defint dans I pprés-coup de la perlaboration et non Vis- dvi des «choses tlle quelle furent» dans une perspective histori- ciste ou vis-i-vis d'une construction, dit-elleéveller la sensation itel- lectuelle de certitude dant pale Freud. 3. Ma troisiéme considération générale porte sur le fat que, grace ssa volonté et & sa capacité de maintenir ensemble les contraires, Piera Métapsychologie de la représenvation a7 Aulagnier rend ceduque l'opposition trop facile entre fe théorique et le clinique en psychanalyse. Face aux poncifs opposant '« intuition clinique » la « rationalitéthéorisamte », elle rappelle combien est vaine Titlusion du psychanalyste qui espérait,eréce 8 de nouveaux éléments apportés &I'éifice théorique, mettre fin 8 tout écart entre les promesses dela théoric ct les résultats de son application dans le champ clinique. Réciproquement, elle sovligne constamment combien le travail de pensée de I'interprte ne tient pas son éventulle pertinence d'un état de participation mystique avec T'inconscient de Pautre, mais du lien entre théorie et analyse personnelle, prolongée par lexercice dum: @'analyste, Nécessaire rappel tant est forte ot permanente la tentation a idéaisr,f- DP, p14) 154 Penser la psychose Cette multiplication des déterminismes va & inverse de Iidée dune cause originaire, et si plusieurs séries dstinctes de causes génératrices peuvent revendiquer fa production d'un méme élément, ce que l'on ‘nomme hasard se rapproche de la notion leibnitzienne de I'infini des ‘compossibles. Rappelons que Leibnit critique la négation de la contin~ gence telle qu'elle se trouve chez Hobbes et surtout chez. Spinoza, pour Jequel tous les phénoménes sont déterminés immédiatement et géorné- triquement par la substance infinie. Mais Leibnitz ne rétal aulant la contingence & la manire des Epicurens, il soutient Ia diffé- rence entre la possibilié absolve et la compossibilité, ce qui implique (qu'une chose puisse ue impossible, non pas par elle-méme, mais parce qu'elle ne peut s'accorder avec les autres éléments de la série of elle doit exister. On voit a I'idée de Pharmonie qui existe entre des subs- tances indépendantes les uns des autres, laquelle dépend dun principe ‘moral qui choisit parmi les événements possibles ceux qui vont pouvoir S'accorder en fonction d'une convenance réciproque. L'indétermina- tion est donc rétablic au nom d'un équilibre, cette « harmonie piéétablie » que ruillera Voltaire. Mais sion enléve la notion dn in- cipe moral qui choisit pour le meilleur et qu'on en reste @ 'idée dun quilibre toujours & recréer entre des eléments hétérogines, on voit une conception du déterminisme ob rien ne peut étre prégéterminé et qui autogéndre ses choix en fonction d'un ensemble. Certes, la perspective de Freud ne s'élargit pas & cette dimension sire, d'une histoire libidinale dans laquelle il poise les causes Ii rendant sensées et acceptables les exigences des dures eéalités avec lesquelles il ful faut cohabiter: le monde exiérieu et ce monde psychique qui, pour une bonne part lu reste inconmu.» (AHLMS., p. 8) Cette «histoire libidinale », comment se construit-elle et quelle place occupe-t-elle vis-i-vis de historique en général ? Quelles sont Jes méthodes de eet « apprenihistorien » face au « mate sorcier» qui est le Ca, échappant & toute hisioire et plus généralement & toute emprise, se jouant de illusion de progres par "ignorance du temps et 1a répétition qui le caractrisent ? 1. Qui west pas son deer aurage publi, mais Un imtrprte en qufte de sens, ans eos ons pl tad reper pcntileman ds wees ances. i 192 Penser la psychose Le mémorisable Par cette expression, il faut entendre que tout n'est pas objet de :mémoire, méme polentiellement, ce qui est conforme & Iexpérience de [analyse mais contradicoire avec les espois des premiers temps de la découverte de la psychanalyse et restrictf vis &-vis de la théorie freu- dienne de la conservation intégrale des traces mnésiques. Ceite restric- tion est, on Ie sait, théorisée par Freud avec Ia distinction entre ««remémoration » et « répétition ». La remémoration est par définition partielle, elle résulte d'un travail qui arache des bribes de souvenir au refoulement, au point que l'on peut identifier le travail de remémora- tion & celui de la Inte contre les résistances du refoulement, le premier disant de maniéce descriptive ce que l'autre exprime d'un point de vue dynamique!. La répétition est potentiellement limite puisque seule Minterpréta- tion va la nommer comme telle parmi tous les actes, les manies d'@re, les aécisions etc. un sujet. Certes, Freud la limite apparemment aux ‘actions qui apparassent inadéquates ‘Te patient sépbte tout ce qui, émané des sourees du rofoulé, imprdgne ji toute sa personnalité: ses inhibitions, ses attitudes inadéquaes, ses traits de carectire pathologiques. » (Remémoration, répéttion et perlabo- ration, p. 110) ‘Mais dans la mesure ol 'on peut aussi fare entrer dans le reste de ses actions le résullat de lattraction par des instances idéales,elles-mémes. issues d identifications précoces, on ne voit pas tes bien ce qui pourrait chapper & ce champ de la mémoire qui est ici cependant une mémoire amésique, celle que Theodor Reik opposat au souvenir en ces termes «La mémoire est esscniellement conservatrice le souvenir est destruct. ‘Chaque souvenir signe done une perforation dela mémoire inconseiente en fam gue tnt eda dan proses de oan par Pacts 3 Cette perspective souligne ce que Freud avait décrit concernant le processus de remémoration du nom de Signorelli : « Le souvenir trop clair des traits du visage du Maftre sur sa peinture palit pew & peu’. » ‘Comme I'a montré Federico Fellini dans une scéne saisissante de son film Roma ob a construction du métro de Rome dévoile, dans leur TS, Feu, « Remémoaon spon e peabraon» in La Techninu canal tiga, Pci, PU, 195,10. ss 1 Pcotog priv, Der, 19%, p13. 3. Sur lemésotme poyesque do ooh» Reza, des, role, 1, Pas PUR, 1984. TOL SSNS Temporalité et mémoire du Je 183 fraicheur qui s'évanouit avec Ia pénétration de Mair, de bouleversantes fresques antiques, Ia conservation des traces dune mémoire out s'efface avec leur mise au jour. Reik nove de méme : \ePendant des millénires les momies égyptiennes profondément enfouies dans la tere se conserve. L'instant oon les détere, o® elles sont & owveau soumises aux rayons solaires et aux autes facteurs atmosphét ques, signe le début de leur décompostion’.» 1 faut done ajouter une nuance & la notion de mémorisable : lorsque celui-ci devient effectivement mémorisé il change de nature, c’est-3- dire que toute Ia part sensorielle, affective, émotionnelle qui s'y atta- che, disparatt petit & petit. On comprend pourquoi: la trace mnésique cat enfouie in statu nascendi, lle a beau te passée, c'est en tant que présente, étemellament présente, qu'elle a été stockée en mémoire. On ali Ia marque de la répétition qui fat retour au présent sans aucune connotation d’appartenance au passé, alors que le ritération, par exem~ ple, celle d'un mot dang une phrase éveille le souvenir d'un passé jmmédiat et crée un sentiment de déplaisir selon adage latin: Bis repetita non placent. In'en est pas de méme pour une répétition ryth- tmique qui envodte précisement, parce qu'elle donne fa sensation dun présent infin. Le mémorisé est donc dune autre nature que la mémoire incons- ciente, c'est une extérorisation toujours partielle et Himitée de celle-i cl, ion en eroit Reik, le but de cee extériorisation est de se débar- rasser de ce stock mnésique encombrant, comme le réve netoie les rési- dus du jour : «La liquidation psychique de toutes nos experiences vécues, érit Reik, est tan idéal dont on ne peut que plus ou moins s"approcher. » On trouve ici, exprimé de maitre plus radical, un point de vue qui estcelui de Freud depuis la notion d’abréaction jusqu’’ la « liquidation des pulsions » geice au travail de la remémoration’. Mais chez Freud, du Léonard 4 Motse, on trouve infassablement rappelée V'importance du travail de mémoire & I'échelle collective Jorsqu'il doit constiuer Pidenité d'un peuple. Reik est en un sens plus cobrent avec fa conception liguidatrice de la mémoire dans ta eure lorsqu’il exprime les conclusions suivantes Lz Pychologue roi op. ct, p 15S id. p57. ‘ Remimortion,répltion et abortion», in La Tecnigue pscenalytigwe, Paris PUP, 1967, p.L12. i i? let Penser la psychose « sais pas » A un « je veun savoir ce que vous saver.» ««Lrobjet du manque, note Vateur, et défnitivemeat locaisé dans V'aute le sestra dans tout le dsfilégressifqu'emprunerala demande.» Ibid. 3.) En effet, la demande ne va pas s'exprimer comme demande de savoir, mais comme demande d'amour, de reconnaissance, etc., au gré des mouvements transférentiels Et pourtant, la fin de la cure fera déboucher lanalysé sur tout autre chose et, avec Ia résolution du transfert, il ne désirera plus « savoir », avec le caractére absolu que cela comporte pour lui au début, mais pourra désirer un autre sujet. Telle n'est pas cependant la position de Tanalysé qui deviendra analyste. Méme si celui-ci, comme le précé- dent, opire une démystification vis-3-vis du savoir idéalisé de son analyste, i reste cependant jusqu’aux demiers jours de sa fonction, désireux de ce savoir! ‘On pourrait s"étonner ici que Piera Aulagnier, alors si proche de Lacan, parle ainsi du désir de l'analyste, supposé sans désir selon ce demier. Aussi, précise-telle utilement, cette absence de désit ne doit 1 Cove secures de Is natin de save nus rane ii directement 3 Lacan, 8055 ‘eons dae Inset de ce capt comment ls prspive de Piera Avlagnier a Gro Sent aad et la cridque quel en fae ANAM ANANNAANANAHRNAAA Aan SO Me We WE WE Ws WS OS OL EW. e. w, 200 Penser la psychose Stentendre que vis-a-vis d'une demande leurrante, Qu'en eét-il par ‘exemple de la demande de guérison du patient ? «A Leatéme limite, écritlle, alors, on peot de que méme la guésison en tant que réponse & le demande thérapeutique ne peut Ere objet de son (Ge Wanalyste) dst: Tonalyste sit que la dspariton des sympiOmes en {ant que réponse sa demande présumde peut n'aveir comme seal but que 4a nom mise en ju de essen.» (bid, p. 5) On voit cependant ici quel sens paricl est donné au terme de « prise au mot», pp. 13-38, 1978, «Le choix des ertéres dans Youve de Freud, Tepique, 9°21, pp. 321, 1979, « Introduction aux jounées scien. ‘ifiques »,Topique, 23, ep. 15-80. 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NMANAANANANAAANAAHRAHAHANAN seccs,ewocouvcgcvuvwesesuvuvuveuvesveevee 252 Rencontre, 3, 11, 69,71,97. 98, 155, 156,169 Répatition, 183 Représentation de chose, 112 Représentation de mat, 112 Rythme, 167 Sadique, 77 Scéne primitive, 61, 104 Secret, 56, 123, Sensoralité pensée, 73, Serials killers, 65 Silences, 118 Solution délrante, 42 Souffrance, 20,72, 75,77, 125, Souvenirs-rans, 187 Spéeulaire, 94 Sentarisaron, 97.99 Stade ds miroir, 27, 54 Sublimation, 150, Sublime, 163, Sujet de inconscien, 109 Systemes, 128 Index des notions T ‘Telescopage, 61,71, 133, 136 ‘Thanates, 72,97, 99, 126, 178 ‘Théorie sexuelle infantile, 61 ‘Toxicomanie, 73 ‘Trait unaire, 115, “Traumatisme de la rencontre, 175, ‘Travail scientifique, 152 Triomphe, 180, v Verbalsation, 82 Vérits 83, 120, 124, 126, 194 Vietimologie, 48 Violence de interpretation, 10, Vrniserblable, 139 w Weltanschawung scientifique, 155 ou0n2- AV) -(05)- OS 8m -NOC- ABS SNEL Grae ve San Vincet 12-4020 Lite “Ta Sao 3465 6D - Fax 93206 3 8 SL Hevar 318 ‘pt Kia ote 198, ute bg rer 2005 prin ca Belique

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