JEAN-LOUP BEROYS, GUILLAUME PAGES, CREYSSE
LA BACTERIOSE DU NOYER
EVALUATION DE LA
SENSIBILITE VARIETALE
Parmi la panoplie de varétés de noyers existantes en France, clones repérés dans la na-
ture, hybrces eréés par I'TxRA ou introductions étrangéres, onze cultivar les plus ré-
‘pandus fort Vobjet d'un suivi particulier @ la station expérimentale de Creysse afin de
determiner leur sensible intrinséque & la hactériase sur nok Cet article présente les ré-
sultts de cette experimentation menée depuis 2007, qui mettent notamment en évidence
Vingluence synergigue de plusieurs facteurs impligués dans Vexpression de la maladie.
WALNUT BLIGHT : €
OF VARIETAL SUSCE
TIBILITYLaBscréniose ounoven
EVA UatiON OF LA SENSIBLE VARIETALE SUR FRUITS
BIOLOGIE DU PATHOGENE ET
FACTEURS PROPICES A SON
DEVELOPPEMENT
CYCLE DE DEVELOPPEMENT
Le cycle de développement de la bacté-
rose se décline en deux périodes dis-
tinetes:
= une phase de conservation hivernale,
sur le bois, principalement dans les
bourgeons 4 bois et a fleurs fernelles
ainsi que dans les lésions sur rameaux,
Tes chatons, et les fruits nécrosés pou-
‘vant rester sur Tarbre j
‘une phase de multiplication et dissémni-
nation durant la période de végétation
du noyer durant laquelle tous les nou-
‘veaux organes peuvent étre contaminés,
SYMPTOMES ET DEGATS SURLE
NoveR
La bactériose stextériorise de diverses
smanieres
= par développement de chancres sur
les rameaux surtout préjudiciables sur
jeunes arbres en formation ;
par apparition sur le feuillage de taches
jaunes translucides puis sombres qui
nfentrainent pas toutefois de défeuillai
son précoce ;
= par développement de taches hui-
leuses évoluant en nécroses noires sur
les fruits, souvent situées & Vapex (base
des stigmates), qui aboutissent soit & la
chute des noix s'il s‘agissait d'une at
{aque précoce (loraison ou jeune fruit)
soit & un développement incomplet di
fruit, une déformation, voire un cerneau
atteint (noir, sec et trp st la contami
nation a €€ plus tardive.
ROLE DU CLIMAT Lons DES
Parmi tous les facteurs fvorisant Ia
bactériose, le climat serait tts probable-
ment le plus important.
Das le début du printemps, les bactéries
peuvent se multiplier sur Farbre. Les
Contaninations interviennent en cond
tions humides, et sont favorsées pa des
températures dosces jin minimum de
a ag he Whumectatins sevait sé.eo-
sire pour le développement de la ma-
ladie, avec des températures comprises
entre 353.35 °C entre Ia fin de florason
jusquiux fruits agés de 10 semaines
(Aadaskaveg etal, 1994), La bactérie est
séminée par la pluie ou les grains
de pollen contaminés, et les principales
vy sane
eee arta caiar eas
rn
iia de F
‘ies infection sont les stomates ou Tes
blessures.
les situations & risques élevés au sens
large sont donc présentes dsl débourre:
amentetjusqu’t afin de la loaison; une
grande proportion des fleurs femelles
risquent déte contaminées lors de leur
plein épanouissement si les conditions
propices sont réunies. Pa la suite, cst
2edre 2s juin, es organes verts sont
plus matures, done plus résistants, ees
conditions météo deviennent dans Ten-
semble moins humides, do un risque
‘moindre e contaminations, Les orages
a'6e peuvent toutefois raviver Ia bacté-
rose, en cxéant des conditions idéales
de contaminations : plies fraiches sur
arbre, chaleur et humid
AUTRES FACTEURS FAVORABLES
AUX DEGATS
Le type de sol joue un role majeur : les
vvergers implantés en sols squelettiques.
a faible pouvoir tampon, pew profonds,
acides, & fable teneur en matitre orgs:
nique et eapacité Wet i
sent’ d'importants dégits de bactériose.
Ainsi, les sols légers et caillouteux,
contrairement aux sols & texture consis:
tante, favoriseraient la congestion hy:
drique des tissus et de ce fatla diffusion
des bactéries dans la plante, de méme
que des échanges hydrominéraux entre
aes = Txt preteen
Mt jose axe asbeiet | a rma
7588) axe ‘obelet | terminate
- aa
ss : laterales:
eat pee latérales.
Sa +60 axe ao | Surbrnames
Fernette r xa xe Srimanes
Wie eae 2 latérales.
1o02 exe See | eur brnattes
i ereeatas
1908 axe xo panel
Tor brnaies
1007 746 aa Brn
ae pierclel
oe 1997 7x6 ove ao
arbre et le sol irréguliers et donc stres-
‘ants pour lenoyer.
Les techniques culturales peuvent per
‘mettre de diminuer la sensbilité inhé-
rente de la parcel, Parmi les facteurs
propices au pathogéne, on reléve notam-
‘ment une fumure azotée excessive ou
trop tardive, des irrégularités ou des ex-
cts dapports d’eau, ou encore une taille
inréguligte qui affecte la circulation
de Tair et maintient une atmosphere
umide dans Je feuillage, ainsi qu'un
éclairement insuffisant défivorable
activité photosynthétique.
EVALUATION DE LA SENSIBILITE
VARIETALE A LA BACTERIOSE
SUR FRUITS.
DISPOSITIF EXPERIMENTAL ET
METHODE
Ceteessaia été mis en place en 2007 afin
évaluer la sensibilité de plusieurs cult
vars d'ge équivalent (arbres adultes,
Tableau 9), ous gielTés sur portergeelTc
classique Juglans regia et situés dans les
‘mémes conditions pédoclimatiques (sol
Jimono-sableux & pH neutee, taux de
MO =15 34).
“Trois noyers par variété sont suivis (un
seul pour Feradam, Ferbel et Ferouette,
toutes hors essai en 2007).[T) eres
Les arbres ne recoivent aucun traitement
chimique Texception du désherbage
sur le rang. Ils bénéficient d'une irriga-
tion au goutte-\-goutte, et les interrangs
sont enherbés et entretenus par broyage.
La fertilisation minérale est adaptée a la
variété (type de fructification, vigueur)
et la densité de plantation. Une tonne]
hha de carbonate de chaux est apportée
tous les ans, et une tonne/ha de matitre
organique tous les deux as.
Les noix chutées & cause dela bactériose
(fruits supérieurs a 10 mm de diamétre)
sont dénombrées chaque semaine de
Ja nouaison (stade Gf} jusqu’a la ré-
colte, sur une biche au sol s'étendant
un métre de part et dautre du trone et
jusqu’a Vaplomb de la frondaison au ni
vveau du rang. Ala récote, Ie rendement
de chaque arbre est mesuré, et les pertes
liges 4 la bactériose sont ainsi pondérées
en fonction du potentiel de chaque va
rigté qui varie selon le type de fructf
cation,
Le développement de la maladie né-
cessiterait une concordance entre la
période de sensibilité maximale de la
variété et les conditions climatiques fs
vorables aux contaminations. A ce titre,
les stades phénologiques pour chaque
‘variété sont relevés et corrélés & des va
lables climatiques (pluviomeétrie, durée
d'humectation et température moyenne
journaligres) & partir des données four.
nies par une station météorologique au-
‘omatique présente sur le site.
PAS D'EFFET PREPONDERANT
DES FACTEURS CLIMATIQUES SUR
VEXPRESSION DE LA MALADIE
La comparaison interannuelle du pour
centage de chute des fruits nécrosés
souligne la variabilté des résultats selon
les années,
2007, année de forte pression bactériose,
a permis de discriminer les variétés (Fi:
gure 1) : Franguette, Lara, Parisienne
et Marbot se sont révélées les plus sen-
sibles avec plus de 40 % de chutes de
rnoix nécrosées. A Vinwerse, Fermette est
notamment apparue la moins touchée,
avec peine 20 96 de chutes.
En 2008 et 2009, limpact de la make
die a €4é nettement moins important
quen 2007, alors que la climatologie
fut davantage propice & Xaj pendant le
stade de sensibilité maximale des. va-
riétés ; Vabondance des_précipitations
durant Pété 2007 qui a causé une vague
ACHES ETENDUES AU SOL POUR L
Sores
o 888 8 8 8
Peres, Ao
de chutes tardives début aodt devrait en
{tre Fexplication. A un moindre degré,
Ies tendances entves les variétés restent
toutefois similaires malgré des résultats
variables pour Marbot et Fernor ; Fer
jean atteste pour sa part d'une sensibi
Lig intermeédiaize
En 2010 et 2011, les conditions clima:
tiques tres séches lors de la floraison
Ge la majorite des cultivars: eludiges
ont fortement limité Yexpression de la
sensibilité varigtale 4 Xj. Les variétés
testées apparaissent assez peu sensibles
car elles niont pas subi de risque de
contamination marqué, si bien qui est
difficile de pratiquer une discrimination
fiable entre les varietés.
Les figures 2A 4 F relatent pour chaque
année d’étude le cumul de précipitations,
ainsi que la durée d'huumectation et tem:
pérature moyenne journaligres percus
par les variétés durant leur période 3es-
pective de sensibilite maximale au sens
large, soit du débourrement (Cf) jusqu’a
Ja fin de la fioraison (Gf). Les résultats
attestent quaucun lien avec Tintensité
des attaques de Xaj est daizeanent eu
Dli pour lensemble des cultivars durant
cet interval, Une étude récente menée 3
CCreysse (Chauvin eta, 2006) avait mon-
tu6 que la sévérité des attaques de Xaj sur
Franguette et Lara était corrélée posit
vement a la pluviométrie cumulée entre
le débourrement et le début de floraisonua acréniose ouNoveR
EvatUanioN ELA SENSIILITE VARIETALE SUR FRUITS
Ed
peer
ee
owsisencera [| Be ee ne
= SUG IAL GES m vi
SAPP TIGL EE
PEPEETELIEE
femelle (Ff) de chaque variété. Dans
essai présent, Ianalyse des données en
xesserrant la « fenétre sensible » propre
A chaque variété, que ce soit entre CEFfi
ou durant la floraison (Ff-FF), ne révele
aucun Tien direct avec le taux de chutes
de noix nécrosées. Lhypothése émise ne
se veifie done pas.
(On constate par ailleurs que, mis 3 part
Franquette, la majorité des variétésdites
plus sensibles affchent des dates de dé.
Dourrement précoces (Chandler) ou as-
sez précoces (Marbot, Lara, Parisienne)
Ferjean fait toutefois exception (Tableau:
2); en outre, Ferbel, plus précoce que
Feradam et Ferouette, semble plus sus-
ceptible aux attaques du pathogéne sur
fruits. On serait alors tenté de mettre en
avant Vhypothse selon laquelle la pé-
Hode critique serait courte, située juste
aprés le débourrement, et que lépoque
précace de levée de la’ phase d'étodor
‘mance de certains cultivars coinciderait
avec un risque bactériose plus élevé en
lien avec des facteurs climatiques favo-
risants ; toutefois, ce postulat nfest pas
corroboré dans le cadre de Tessai
D'autre part, Ia densité de plantation
plus élevée pour les variétés & fructif-
cation latérale que terminale engendre
tun certain confinement influant théo-
riquement sur le taux d’humidité voire
Vhumectation.
La durée @humectation n’est pas le
principal paramétre entrant en jeu
dans le développement de la bactériose,
bien que son r6le ne puisse étre omis
connaissant la physiologie, les modes
de multiplication et de pénétcation
dans les tissus de la bactérie, Au sein
de Tessai, on peut suggérer que ces
mesures d’humectation, effectuées 2
Yair libre, ne sont pas véritablement
conformes aux conditions qui regnent
a Tintérieur du feuillage des arbres.
En effet, Ia densité du feuillage peut
‘empécher la circulation de I'air. Cette
densité des noyers en verger intensif
peut représenter un facteur aggravant
les attaques de bactériose.
INFLUENCE DU CLIMAT ? OUI, MAIS
Mis & part la climatologie, dautres al.
‘ments ont pu contribuer a la faible pres-
sion rencontrée dans Fessai
= Vige des noyers : la bactériose affecte
davantage les arbres jeunes en se ma-
nifestant particulitrement lorsque la
fructification débute, puis siatténue 2
partir du moment oi les arbres devien-
nent adultes et vieilissent; dans Vétude,
les noyers sont bien installés (19-23 ans
pour huit variétés testées, et 148 ans
pour les variétésrécentes Feradam, Fer:
bel, Ferouette) ;
les pratiques culturales : les parcelles
support de Tétude sont conduites de
manigre identique au reste des vergers
présents sur le site : le chaulage, la
fertilisation minérale et organique rai
sonnée, et la taille dentretien régulire
entre autres me sont notamment pas
favorables au développement de la mala-
dic, Les résultats acquis traduisent done
Je niveau de sensibilité moyen des varié-
1és testées dans les conditions de essai
et avec des pratiques culturales jugées
‘moins favorables & Vexpression duu pa:
igeute, Mais ue facleur est nalsisable,
ct il serait ainsi avantageux de pour
suivre Tessai en modifiant Vitinéraire
cultural (« mauvaises » pratiques) pour
acquérir des références sur le méme site
fen conditions plus propices au dévelop-
pement dela bactérie,
BILAN INTERMEDIAIREDeer et
Apres avoir mulkiplié les années d'ob-
servations, et bien que T'nflence des
facteurs cimatiques niait pas été cai
zement mise en évidence, il est possible
selon le dispositif et les conditions de
cet essai de caractériser les varietés étue
diées en fonction de leur sensibilité &
Xa sur nol:
* Franquette est la vardté qui témoigne
de a plus grande sensbilité’ moyenne 2
Ja batériose sur fruits. Parmi les autees
yariétés tradtionnelles rustiques, Mar
bot et surtout Parisienne se révdlent as
sez sensibles alors ques sont réputées
bien plus « résistantes » dans leur ber
«eau dorigine(respectivement en condi-
tions pédoclimatiques des conteforts du
Massif central et du Vercors ; ce constat
tuaduit notamment bien le fait que le cr:
tere « sol» est essentiel en varitésdites
A sensibilté moyenne a forte
= Visawis des cultivars conduits de ma-
nigre plus intensive, lavaritéaméricaine
Chandler, jugée 8s sensible dans les
conditions climatiques frangaites, ainsi
aque Lara, expriment une sensibilité as-
sez prononcte ala diffrence de Ferjean,
Femor et surtout Fernete qui manifes:
tent une bonne tenue dans les conditions
de Tessa et timoignent d'une sensibilité
_moindre a batériose sur fruits.
~ Concernant les trois varietés récentes
tna, inserites depuis 2010 au catalogue
frviter, e bilan interannvel fit état de
plusde chutes de noix nécrosées pour Fer
bal, suivi dans une moindre mesure de
Feradam, Cette plus grande sensibilité de
Ferbel confirme les diverses observations
véalisées surd'autes sites; Ferouette reste
en moyenne neltement moins sult aux
attagues de Xj. Ces hybrides étant nou-
‘vesux, un seul arbre adulte par varie
fst disponible sur le site de Creysse pour
rener Itude, ce qui constitue indénia
blement une limite. Les connaissances
restent donc approfondie.
La sensibilté inhérente d'une paxcelle &
la bactériose est lige & sa situation pédo-
climatique, & la sensiblité intrinséque
dela varité,etauxtechiniquesculuurales
‘mises en ceuvre, Le choix variétal reste
‘un crite essentiel avant plantation et il
doit étre conforme & lanalyse du risque
bactériose. Des dispositifs expérimen-
taux. muisites ascoeiant plusieurs
partenaires pourraient ére congus, afin,
‘dévaluer les interactions entre variétés
JEAN-LOUP PéROYS, GUILLAUME PAGES, CREYSSE
Petre
vay a
Remind
Peis)
sono sons BA
Peo
et populations de maladie présentes en
situations pédoclimatiques diverses. A
Tavenircete étude contibuera 3 mieux
‘analyser et quantifier V'influence des
paramétres sobclimatpratiques gui in-
terviennent dans lexpression de la sen-
sibilievariétae la bactérose. A terme,
elle permettra dacquérir des ferences
‘qui orienteront le nuciculteur vers une
vari adaptée & sa situation, ses be
soins, et qui exprimera au maximum
son. potentiel tout en répondant aux
contraintes techniques, économiques et
environnementales.
Des travaux de recherche attestent que
Jeniveau ce sensibilté des varietés Xa)
pourrait provenir dune plus ou moins
france concentration de polyphenols
dans les tssus (Radix etal, 1998 ; Sor
lar et al, 2006). Lopes et al. (2012) se
etnias
Disponible sur
-wwrwefruits-ctlegumes.net
Collection
Le Point Sur
maladies et ravageurs>
Connaissance et
maltrise
de la bactériose
du noyer »
(n° 1- mai 20m)
eco! O8-ave 26-er
oo Wave 30-avr
Ea Obavr (06-mai
o8-mai
05-mai
sont intéressés ila densité des stomates
présents sur les feuilles comme porte
entrée aux bactéres, et les résultats
abondent vers une corzélation positive
entre le nombre de stomates et Ia sens-
bilité variétale au pathogene de certains
cultivars. Ces pistes sont notamment
1 approfondir et pourraient permettce
de miewx appréhender les mécanismes
physiologiques intervenant dans la sen-
sibilie des variétés& la bactériose,
CMe Cs
‘Adasiavea JE. Krkattick BC. Buct-
ber R. Olon B, 1994. Epidemiology
‘and management of walnut. bight
Walnut Research Report 24V/M8, >.
25286.
(Chauvin W, Prunet JP. 2006. Comptes
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‘mentate do Creysa 60.
Rac P, Bastin C, Jay-Alomand C.
Chariot 6. saigie-MuranalF, 1998. The
Influence of sol nature on polyphenols
in wahut fsues. A possible expore”
tion of etferences nthe expression on
walt bight. Agronomic 1p. 627
ee
Solar A Colarle M, Usenkv, Stampar
F, 2006. Seasonal variations of slec-
‘pnual shoots of common walnut Ce
‘lens regi L). Plane Science 170.
455461 >
Lopez G. Frutos C. Frites B, 2012
Xanthomones arboricola pv. jviendis
dlomages in walnut (uolans reoia L)
Ibaves related to stoma oonaty. COST
873 and SHS, Zirh 2012