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NCTE A PROPOS DES DANSES DES CARAJA (1) per Hans LIRTSCHY, Bale traduction I, von Berchem, A la Umite des Etats de Golas et de Mato Grosso, dans le Contre-Ouest brésilien, les colons - gardiens de troupeaux, commergants, petits planteurs =, aiment a chanter le chant de l'Araguaia, Ie fleuve-fron~ tere, Meu Araguaia, vou cantar boleza das tuas praias e brancas areias, Arnoite é bela; de luar banhada ‘ aruang dos Carajae niald (© mon Araguaia, je voux chanter la beauté de tes plages et de ton sable blanc, La nuit est belle; baignée par la lune, la danse des masques des Carajé au village ...) La danse dont il est ici question est devenue célébre sous le nom dM"'aruanf", On V'a photographiée et filmée, En vérite, celui qui en a 46 témoin, de jour, ou surtout de nuit au clair de lune, potrra-t-il jamais Voublier ? La premigre relation un peu précise que nous ayons sur les Indiens Carajé de l'Araguaia parle déjt, semble-t-il, de cette curieuse danse, José Pinto da Fonseca, partant de Golas, était parvenu une premie= re fois en 1774 chez les Carajé de la grande fle de Banonal formée par VAraguaia, Au cours de sa deuxidme visite en 1775, {1 adressait au Gou- verneur dé Goias, du bras oriental du fleuve, deux lettres consécutives @ ct 4 aoit) dont 1a teneur est & peu prés identique (2), Hy décrit habi~ tuelle cérémonte accompagnant larrivéede visiteurs venant dlun autre vil= lage, qui est en tous points semblables a celle & laquelle nous avons encore assisté, ma femme et moi, en 1954 ot 1955 sur le bras occidental du fleu~ ve (3) # débarquement comme lors dlattaque et de contre-at:aque,lutte cor~ porelle et finalement "Pas de deux (correr parelha), Il nest A vrai dire pas expressémont question de masques, mais le fait quo ls danse so place Ala fin de Ia cérémonie, comparé avec le déroulement de i"'arzivée" (ra~ hamena) de visiteurs tel quiil se passe aujourd'hui, permet dlemblée co (1) Ge travail fait partic des résultats d'un voyage entrepris avec Vaide du Fonds national suisse de la Recherche scientifique, Il est tiré, légere~ ‘ment augmenté, de : "Hane Christoffel - Zum 70, Geburtstag", Basler Paychologiache Arbeitegemeinschatt, 1958, (2) Revista Trimensal de Historia ¢ Geographia, t, VII (1846) 2, ed.Riode Janeizo, 1867, p. 376-390; t, 04 (1018), Rio de Janeiro, 1919, py 115 ~125 (3) Hans DUETSCHY : "RAhimena, eine indianische Olympiade im Herzen Brasiliens", Blaukreuzkalender 1956, Bern 1951; ot déja Fritz Krause “fn den Wildnissen Brasiliens", Leiprig 1911, p, 137-141, 914-815 (ne comporte pas le "promier acto", rapprochement, nonobstent le fait que des danses soient parfois dansées ‘Sens masques par des couples analogues. ‘Comment se présente ce "Fes de deux" ? Ce nlest pas le moment de m'étendre sur le réle particulier des danses de masques dans le déroulement de l'année rituelle des Cara~ 34.(1), Mate {1 faut retenir dés maintenant deux choses importantes, Fre~ mitrement, il stagit de couples de masques od chaque couple représente ‘un esprit (idjasso) bien déterminé du ciel ou des abysses, existe donc plusieurs couples de masques, chaque couple possédant un nom dlesprit particulier, Deuxidmement, et cela résulte de ce qui préctde, les deux masques formant un couple incarnent un seul et méme esprit, Diautre part, le besoind'avoir deux fois le méme masque est si fort qulil se reporte mé- me sur les masques "européens", Clest ainsi que les Carajé de Santa Isa~ bel, quf avaient regu de Flo un masque de carnaval blanc, nous demand®~ rent de leur procurer un deuxitme masque blanc ainsi que deux masques lew, Etonné, je leur demandai si ces masques des Tori (les Blancs) é~ talent aussi des esprits, "Cui" fut leur répon En vue de ce qui va sulvre, une remarque doit étre faite & propos d'un article de Francis Gow-Smith (2), On pourrait conclure de cet farticle que les masques de danse des Cerejé représentent uniquement le poisson aruand, L'auteur, en outre, croit avoir découvert une différence entre les deux masques, dont l'un serait le poisson male e: l'autre le pois f50n femelle, Four mon compte, je n'ai pas va de masque portent le nom de fe poisson, Il est vrai que celui-ci est important sux yeux des Carajé car, felon une version du mythe de leurs origines, ils étaient autrefois des poisons sruang (3), Cela ne veut bien entenda pas dire que ce masque lexiste pas, Liexistence du mythe et, éventuellement, du masque, peuvent fexpliquer que dane toute la région il soit coursmment perlé de d:nse arua~ 1g, mode d'expression que les Cerejé sdoptent eux-mémes dans Is conver~ setion evec les Blancs, Stil s'agissait vrsiment ici d'un mesque masculin fet d'un masque féminin, 20 sujet de quoi j!simerais exprimer un léger dou te, ce couple de meeqies ne semblerait gubre de mise dens une danse de rencontre, Et c'est de celle-ci qu'il va maintenant tre question, (W) Volr & ce sujet ; Hans DIETSCHY, a) "Geburtehatte und "Mannerkind~ bett" bei den Karaja", Verh, Naturf. Ges, Basel, 67, No, 2, Easel 1956 p. 129, b) "Kultur als peychobygienisches System", ‘dans :’Bettschart, Meng, Stern (ed), Seeligche Gesundheit, Bern 1959, p, 277; ¢) "Das Hauptlingswesen der Karajé", dans "Mitteilungen aus dem Museum far ‘Volkerlcande in Hamburg", XV, 1959, p, 173, (2) Francis GCW-SMITH : "The Arawana, or fish dance, of the Caraja In Gians of Matto Grosso, Brazil", Indian Notes, publ, quarterly by the ‘Museum of the American Indian, Heye Foundation, New York, vol, 1, No, 2, 1925, p, 98-89, (8) Voir : 0,X, de BRITO MACHADO = "Os Carajés"', Rio de Janeiro 1947, p. 42; Varuand eat lOsteoglossum bicirrhesum Vand, | | | | | | derritre la rangée de maisons du village bordant le fleuve, Seuls les hommes sten revétent pour danser, Bt les doux hommes ou les deux Jeunes gens qui, céte a céte et a main dans la malt, se dirigent vers le village en exéoutant le pas de danse correspondant & V'esprit considéré, sont souvent des amis perpétuels (wali) qui se comportent comme des fré- res de sang ~ne pouvant notamment épouser leurs soeurs réciproques- ct sont tenus de stentraider, Cette amitié institutionnelle raft peu & peu de Ja danse en commun au cours de la formation dans la maison des hommes, mais elle nlest pas confirmée par une cérémonie spéciale, Le couple se dirige donc en dansant et en chantant vers le village, revient en arritre, dansant toujours, poursuit Ia danse sur place suprés de la maison des hom mes et stapproche une geconde foie des huttes du village, LA sont accrou- ples - pas toujours, mais dans certains cas ~ une rangée de femmes etde Jeunes filles, Au moment of les esprits s'approchent pour la seconde fois, eux dlentre elles vont a leur rencontre, mais elles rectlent rapidement et craintivement pour les éviter, car le contact dlun masque est mortel pour elles, Significatif est le motivement des mains des danseuses : tandis quielles avancent puis reculent, elles rement avec les mains, leur impri- mant un mouvement de roue de moulindirigé vers lebas du corps, Ce ges= te est parlant, Et, de fait, les femmes confitrent & mon épouse lors dt une felle occasion gue ce sont avant tout les jeunes filles désirant un mari ou les jeunes femmes désirant avoir ub ehfant qui se décident & cette dan= tse de rencontre, Il est dlautre part signiticatitque la premitre danse (idjas~ Sowona) quiexécute un nouveau maitre de cérémonies des danses de mas~ ‘ques - un "maitre des esprits" = se fait, exactement comme les quatre grandes fetes de masques (anahekt) qu'il doit diriger, en honneur de ses enfants, Et pour cette premitre danse, le mdre du nouveau "maftre" va chercher lee nouveatsx magques en compagnie de jeunes femmes qui, cette fois, préctdent les masques en dansant, A V'entrée du village, un sorcier cenduit les pieds des jeunes femmes et des porteurs de masques dlun liqui= ‘de contenu dane une calebasse, A ce propos, on peut aussi signaler que Toraqu'un couple nowvellement marie est arrive devant la sutte de lx Han = cée, il est dane les attributions d'un beau-frére du fiancé ée laver le visa~ ge de l'homme et de la femme, ce qui n'est évidemment pus possible stils font des masques La signification de la danse paraft claire + il slagit de fertili- +46 ou méme de mariage, 1 faut pourtant se rappeler qulun rite a générale- ‘ment gon pendant dans tin mythe, et que celui-ci ne s'exprime pas toujours par son reflet direct maie souvent par son antithese "dialectique'’, Qu'en fest-il chez lea Carajé ? Le pendant existe effectivement chez eux dans la Tégende des premiers temps, dans les deux mythes du "grand incendie" et de Waventure des deux frbres" dont Herbert Baldus a récemment donné dee versions en se bagant sur ses propres recherches et sur celles d'au~ tres auteurs (1), Deux vicillerds puissants se disputent, ils font un grand feu dans lequel tous les Carajé meurent, & exception des deux vieillards ) "Karajé-Mythen", dans : Tribus, Stuttgart 1952/ (Q) Herbert BALDUS + "Engaios de Etnologia Brasileira", Sio Paulo 1937, 53, p, 210 = 218; b) p. 216-219, 226-28,

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