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8 R 151621906-1909

1906-1909
Vannée sociologique
Tome11
BIBLIOTHÈQUE
DE PHILOSOPHIE CONTEMPORAINE

L'ANNÉE

SOCIOLOGIQUE
1'r11l.II~R
;o;ors
I.A
IHIIEI:TlO~
7 PimiËK SOIS LA UlHKCTKiN C "A

DY.

EMILE DURKHEIM
Professeur a la Faculté «les teltre» île ITniverailt île l'aris.

AVt.t: LACdt.f.AliUliATIONl'K MM.

A. MEILLET, pr<if.-«i>ur nu Cullcac ilu Kmii's


BOUGLÉ, t'U&tjit' (ii: t^iurti à la Sdcbutinv
HUBERT >'t MAUSS, 'lir.M<-llr»-ai|j"iot- >t I'KimiIiï ii<'< H.i'Jtc< KlnJ^
TAUCONNET. eluirirû •!« njun « l'L'niwriilc -k Touloiw,
HUVELIN
flt É. LÉVY, pt''ir<ii.-<iMiri a la faculté <lii «tr-Ml du t.ydiu
LAPIE, |*ii|«(>w«f > IL'liinTnit'' île Bonloau;
AUBIN,in'|«it>ir il'.A>-vlômic .i l'onie–
BIANCONI. H. 8OURQIN, MAXIME OAVIO, G. DAVY. GERNET.
HALBWACHS, HOURTICQ. PAROOI. RAY. REYNIER.
F. SIMIAND,atflieis du l'Clliïtr-iti:;
· G. BOURGIN,arcliiùsU:iiilcui.Tapln:. OE FÉL.ICE, LAFITTE-

TOME XI (1906-1909

PAHIS
FÉLIX ALCAN. ÉDITEUR
MMKMKIES KÉtIX ALCAN ET r.i;iLLAI.'MIN ntolES

1*18, BOI'I.EVARI) SUNT-r.KHMAIN-, 108


L'ANNÉE

SOCIOLOGIQUE
xi
~4~

m.
À 51 cli t
FÉLIXALCAN,
ÉDITEUR
L'ANNÉE SOCIOLOGIQUE
l'UBLlliE 9OU8 LA DIRECTIONDE
E.DURKHEIM
Première année (1896-1897). DURKHEIM La prohibition%d»
1 incesteet se» origines. 0. 81MMEL Commentles formessociale» 8emain.
tiennent. Anafym des travaux de du
sociologie,publié» i« juillet 1896au
30 juin 1897.1 vol. in-8 jofr. u
Deuxième année (1897-1898). DURKHEIM De la définitionde»
phénomène»religieux. HUBERT et MAUSS Essai sur la nature et la
fonctiondu sacnlice. Analyse».1 vol. in-8. 10 fr, »
ïïïL\ièï?i>t'Uiai0 08»8-1899). RATZBL Le toi. la société l'État.
RICHARD Los crises sociale»et la criminalité. 8TBINMETZ ClassifU
cation des typessociaux.– Analyses.1 vol., in-8 10fr. »
Quatrième année JA 899-1 900). BOUGLK Romarque»»ur le
régime de» castes. OURKHEIM Deux loti de l'évolution pénale. –
CHARMONT NoteIur les causes d'extinctionde la propriété corporative.
Anatym, i vol. in-8 10 Pr. »
Olnquième année (1900-1901). F. SIMUND Essai sur le prix du
charbon en Franoeet au sis' siècle. DURKHBIM Sur le totémisme.
Analyses,i vol. in-8 10fr, »
Sixième année (1901-1902). DURKHEIMet MAUSS De quelques
formas primitivesde olasaiQcation.Contribution4 l'étude des représentation»
collective8. BOUQLE Revue générale des théoriesrécentes sur la division
du travail. Analyses.1 vol. in-8 12 fr. 50
a.?W*£m9xannée f1?02*1903)- HUBERTet MAUSS Esquissed'une
théorie généralede la magie. – Analyses.i vol.in-8 (g fr. 50
mitiàme année (1903-1904). H. BOUROIN Essai sur une forme
d industrie.La boucherieà Parle au XIX» slôclo, K DURKHEIM Sur
l'organisationmatrimonialedessociétésaustraliennes. Analym. 1 vol. in-8.
11!Pr. 60
Neuvième année (190i-1905). a. «BILLET: Comment les mou
changent de sens. M. MAUSS Kssai sur les variation» saisonnièresdes
sociétésetkimos.Essaide morphologiesociale.– Analyse».1 vol. in-8. 12fr. 80
•SiS, année H905-1906).P- HUVELIN Magieet droit Individuel.
– It. HERTZ Contribution à mie étude sur la représentation collectivede la
mort. E. BOUOLE Note»ur le drott et la catte en Inde. – Analym. i vol.
>n-8 12fr. S0

TRAVAUX DE L'ANNÉE SOCIOLOGIQUE


PubliésmutUtdirectionde M.EmileDUnKUlïli!
ASSÊB SOCIOWGIQUB, Il volumeptn» voirdéKIId-dewu.
BOUOp(C),cbaixéd«eoonà h Borbonne. Basai»«orle régimedes Castes,t vol.In-I».
1908 fr.
ItUBIRTllt.1 at MAUIIS (M.).dlrectluro
eclJaiat.à 1'Coia cIeaHautOl.Î!IudH.
Mfl8Dnl
d'bl8tolre
desnllgt0P8,l %roi.111- 1\109 1 Il fr.
hBVY.eKUM).pr«esmr Il la Sorh"lIae.tee tenetitMmeatate* dam tu MeMMe taM.
neatfet,t v01.
tt.1,
la 8^.t9lU 7 h: 6a

AUTRESOUVRAGES DE M. EMILEDURKHEIM
De Indivision du Travail sooial. 2*édit. 1 vol. ln-8» 7 fr. W
Les Règles de la Méthode sociologique.fi< édit. vol. in-lî 3 fr. 110
Le Suicide (étudetociologiyu), 1 »ol"in^' 7 te. B0
L'ANNÉE :v;

SOCIOLOGIQUE

PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION

D6

EMILEDURKHEIM
Professeur la Faculto des lettres de rUnivei'niW de Paris.

AVECLA COLLABORATION
DE MU,
A. WEILLET,professeurau Collée de Franco;
BOUOIÊ,charge!do cours» la Sorlwnne
HUBERTet MAU8S.dirwtwriMidJoiiit» a l'KeoIe des Haute*-Étude»;
FAUCONNET.clnrgi de court h lUnlvenitédo Tuuliraw¡
HUVELIN et E. LÉVY,profeS«ur.à la FaculU! do droitda tyon
LAPIE, professeura l'L'ulvcrjiliSde honleaui
AUBIN,
Imf «leur il'atadMoa l'oiticri
BIANCONI,H. BOURâlN, M. DAVID,0. DAVY, OEftpET,HALBWACHS, R. HERTZ,
HOURTICQ,PAROOI,RAY,REVNIER, F. 8imUND,isr^fr..lcrl'.m-or«it<
0. BOUROIN.
•reliiritl«-|ili:-o(fraiilie
DE FÉLICE,UFITTE.

TOMEXt
19O6-19O9

PARIS
FEUX ALCAN, ÉDITEUR
LIBIUIRIES fÉHX AJ.C.¡ i-~TGUtt.LAUM~ ItÉUNU:S
t0! 108

~Îv' ~0 O
Tousdroits de tM'tMtiot)et de reproçluetion
r.rvo",
PKÉFACË

Nousinaugurons avec ce volume la nouvelle série de l';l«-


nfe Sociologique. Elle se distingue de celle qui a précédé
par
deux réformes Importantes. D'abord, VAnniene
parattra plus
([uotous les trois nus. De plus, elle ne comprendra plus de
Mrmoiretorûjinunx. Ceux-ci sont dètacliôs et deviennent la
matière d'une bibliothèque distincte. Trois
ouvragesont déjà
paru dans la Collection(les ïvutaux de l'AnnéeSociologique
d'autres sont en préparation.
Cesmodificationsse sont imposées à nous
pour plusieurs
raisons.
Si nous avons dû renoncer à pnraltre annuellement, c'est
afinde pouvoirdonner plus de tempsànos travaux
personnels.
Pendant dix ans, les collaborateurs de l'Année ont été absor-
bés presque complètement par leur tâche
bibliographique.
ils
Certes, ne regrettent pas le temps qu'ils y ont employé. Si
la sociologiea cessé d'être une forme de la littérature
pure-
ment dialectique, si historiens, statisticiens,économistesont
appris à l'estimer, s'ils commencentà se rendre compte que
nous coopérons à la même œuvre qu'eux, nous
croyons pou-
voir dire que Y Annéeest pour quelque chose dans ce résul-
tat. Il n'en reste pas moins que le vrai
moyen de contribuer
à l'avancement d'une science est d'aborder de face les
pro-
blèmes qu'elle pose. 11 devenait donc nécessaire de nous
réserver plus de temps pour les recherches
personnelles.
C'estce qui nous oblige à rendre l'Année
plus intermittente.
D'autre part, en sociologie, le travail original prend
plus
naturellement la (orme du livre que celle de l'article car, en
ces matières où tous les faits sont solidaires et
s'impliquent,
et-où la part de l'inexploré est si considérable,il est difficile
II l'HKKACE

..IIP.. Mè M A »
que l'investigation se renferme dans des cadres trop étroits.
Telle est la raison pour luquelln nous avons fait des Mémoires
o/tyùiaïurl'objet d'une publication séparée. Ce dédoublement
a, d'ailleurs, l'avantage de nous donner plus de place pour la
bibliographie. Comme, en même temps, les dimensions du
volume cousacrô à l'Année sont sensiblement augmentées,
l'étendue des informations que nous mettrons à la disposi-
tion du lecteur n'aura pas à souffrirde notre nouvelleorgani-
sation.
Nonseulement cette transformation n'altérera pas le carac-
tère de VAnnée,mais elle nous permettra de réaliser quelques
améliorations intéressantes.
D'abord, parce que les ouvrages qui s'offriront à notre
choix seront en plus grand nombre, il noussera plus lacile de
choisir. Nousne retiendrons pour être analysés'que ceux qui
auront une véritable valeur. Pour les autres, nous nous bor-
nerons à les meutiouner. La lecture de l'Annie y gagnera en
intérêt.
Ensuite, parce que nous embrasserons dans chaque volume
uue période pi us Étendue,les faits comparésseront plus nom-
breux, plus variés et, par suite, les comparaisons plus ins-
tructives. On peut prévoir que nous serons ainsi amenés il
nous poser bien des questions qui. autrement, nous eussent
échappé. Dès cette année, par exemple, le nombre des
ouvragesqui se rapportent aux sociétés dites inférieures est
tel quenous avons été obligésde ne pas laisser cette rubrique
dans l'état d"i udôtermi nationoù elle était restée jusqu'à pré-
sent. Dans'ce type très général, nous avons distingué des
espèces,etces distinctions, en môme temps qu'elles améliorent
notre classificationssoulèvent un important problème qu'on
trouvera plus loin (p. 28C288i.
Pour la même raison, il nous sera plus facile de détermi-
ner des types de civilisation. Jusqu'alors cette notion était
restée, pour nous, théorique. Nous n'avions pas, en une seule
année, l'occasion d'étudier comparativement un assez grand
nombre de peuples parents pour avoir la matière nécessaireà
la constitution de quelques-uns de ces types. Au contraire,
dès le présent volume, nous serons amenésà parler dola civi-
préface It(
de a.II. J.. n ..i
lisiihonues Banlou, celle des Pueblo,de i >*
celle du Nord-
Ouestaméricain,ete.
Nousnousbornonsà indiquer, à titre d'exemples,ces
quelquesperfectionnements. L'avenirnous en permettracer-
tiiiuementd'autres,si, comme nous en avonsl'espoir, nos
lecteursnous restent fidèleset nous gardent leurs sympa-
thies
E. D.

(l| Les travail* analysés vont du 1» juillet 1900 au 30 juin 1909.


L'ANNÉESOCIOLOGIQUE
1900-1909

PKEMIÈKE
SKCTI11N
SOCIOLOGIE
GÉNtèHALE

M. COXOCI'TIOX I)KLASOCIfJl.OGIK.
GKNIvItAm MlvTIIODOI.OUlK

l'nr .M,M.M'M

F. SZOMLÔ.– Zur Grundung einer beschrelbenden


Soziologie. Berlin, Leipzig, Rothschild, 1909, p. VI-50in-8°.

L'opuscule de M. Szomlô se compose de deux parties


l'une est consacrée ù l'exposition enthousiaste d'un plan pra-
tique, en vue de fonder, avec la collaboration de tous les tra-
vailleurs, une « sociologiedescriptivecomplète l'autre con-
siste dans une discussion théorique sur les principes de clas-
sification des sociétés.
Le projet de AI.S. n'est pas différent de celui de M. Stein-
metz qui, autrefois, proposa au zèle des ethnographes la cons-
titution de ce qu'il appelait un « Brehm » de l'ethnographie,
uue sorte d'encyclopédie ethnographique du môme genre que
l'encyclopédie zoologique qui porte ce nom 'cf. p. 48). Il
s'agirait d'une description aussi minutieuse, aussi raisonnée
que possible, répondant aux exigencesscientifiques du temps
et aux nécessités théoriques que prétendit satisfaire la Dcx-
ci-il)liceSocioloyude Spencer. Des spécialistes seraient con.
sultés sur chacun des groupes de sociétés auquel ils ont cou-
sacré leurs études, et ils répondraient, non sans liberté (§ 9),
aux problèmes poséspar un groupe de savants, sorte d'Institut
central, de 'mtralrttlk, comme on dit en Allemagne. C'est
ainsi qu'il a été répondu autrefois au questionnaire de Postet
K. DniKHEiu. Aunrâ) *w:iol., 1806-1909. I
2 l'as.nkb sociologiquk. duoc.1909

Steiumetz sur le droit des populations africaines et océanien-


ues. A défaut d'une classification rationnelle des sociétés, les
différentes monographiesseraient classéesgéographiquement;
mais, à l'intérieur de chaque monographie, les faits seraient
rangés suivant les principales rubriques de la sociologie. Ce
serait à peu près comme autant de réponses adressées, par
l'histoire et l'ethnographie, à des questions posées un peu à la
façon du grand questionnaire (2512rubriques) de Steinmetz
et Thurnwald.
Les avantages d'une pareille œuvre descriptive sautent auxX
yeux elle permettrait une propédeutique sociologique, qui
serait à la théorie des sociétés ce que la zoologie est à la biu.
logie ellefaciliterait la connaissancedes faits, leur recherche,
leur énumôralion, leur comparaison elle les présenterait en
groupements naturels, de conditions, de rapports, de causes
elle dégageraitceux qui s'imposentà la comparaison, à l'indue-
tion elle fournirait un moyen de recherche en même temps
qu'un moyende vérification. A l'épreuve de cette encyclopédie
colossale des faits sociaux, ne résisteraient ni les problèmes
oiseux, ni les théories fausses, imaginaires, ni les débats méta-
physiquessur des questious malposées. Enfin, elle permettrait
d'atteindre un des buts ultimes de la sociologie, uueclassifica-
tion dessociétés.
Cette question de la classification des sociétés se trouve ici
traitée sans qu'on voie nettement pourquoi. C'est, nous dit
l'auteur (p. 20), à cause de sa très grande importance. iMais
il est bien d'autres questions de méthode qui n'ont pas une
importance moindre. D'autre part, l'opportunité de cette
digression apparait d'autant moins que M. S. ne conclut pas.
Il critique les critères proposés, mais il n'eu propose pas lui-
même. Il n'attend que de cette sociologie descriptive, dont il
voudrait hâter l'édification, le moyen de classer rationnelle-
ment les sociétés. En réalité, toute cette partie de son travail
consiste dans une courte et intéressante discussion des cri-
tères proposés par M. Durkheim. A la classification procinoire
fondée,'en réalité, sur l'organisation politico-familiale, NI.S.
n'objecte au fond qu'une chose elle ne tient pas un compte
suffisantde l'ensemble des faits sociaux caractéristiques d'une
société et des divers moments de son existence, de tout ce
groupe confus de phénomènes que l'on dénote d'ordinaire
sous le nom de civilisation (cf. p. M). Elle choisit arbitraire-
ment certains faits d'ordre juridique pour en faire des carac-
CONCEPTION
IJKSKH.U.K
UKLA SOCIOI.OIHK 3

lèresdominateurs, sans qu'il ait été démontré qu'ils ont bien


le rôle et l'importancequi leur sont attribués.
Certes, noua ne croyons pas que cette classification prori-
nuiresoit déjà déllnitive et soustraite à toute objection. Peul-
ôtre lu sociologie n'est-elle pas eu état de fournir actuelle-
ment à l'histoire des sociétés humaines des critères bien
supérieurs à ceux que les classifications linnéennes hitro-
duisirent eu zoologie et eu botanique. Surtout cette méthode
n'a pas encore été consacrée pur une bien longue tradition.
Kllese justifie pourtant par une importante raison qui parait
avoir totalement échappé à M. Szonilo.Résultat d'une intui-
tion plutôt que d'une démonstration, le principe de cette
classificationprocèded'un sentiment, juste, croyons-nous, de
eu qu'ostla nature d'une société. Tous les faits sociaux que
l'on groupe d'ordinaire sous le nom de civilisation, mêmedes
faits aussi profondément nationaux que lu plupart des phéno-
mènesreligieux, mômeles langues, les dialectes, à plus forte
raison les types d'arts, d'outils, etc., ne sont pas nécessaire-
uieulspécifiques à une sociétédonnée. Tous s'empruntent les
mots, les mythes, les instruments, la monnaie, les produits
voyagent.H u'y a que deux choses permanentes, autour de
quoi les hommes s'agrègent pour s'opposer à d'autresgroupes
un sol, et une certaine constitution de leur groupe, ou bien,
pour réduire tout eu ternies de conscience, le sentimentqu'ils
.suutpossesseurs d'une même terre, de forme et de situation
diHermiuée,et unis par une même organisation. Lusautres
j sentiments, les autres phénomènes sociaux, matériels ou psy-
j chiques, peuvent, au cours de l'histoire, changer, et du tout
I au tout; ceux-là sont lesseuls qui définissent d'une façonappa-
rente une société, pour elle-même et à l'égard des autres. On
<
i nous répondra que les frontières varient, que les constitutions
| changent. C'est vrai. Mais. hors le cas des grands mouvements
migratoires, des grandes altérations morphologiques, qui, la
plupart du temps, eutratuent la dissolution des sociétésainsi
atteintes et la formation de sociétés nouvelles, quand les
frontières varient, c'est seulement en dimensions. Il y a tou-
jours une surface, uu certain emplacement territorial, plus ou
moins permanent, auquel elles s'attachent. Et quand, comme
dans certaines sociétés extrêmement mobiles, Mongols,Sioux
parexemple, cet élément de permanence a manque, une chose
'lu moins restait à quoi se ralliaient ces groupements iusta-
liles le nom et la constitution de la société, de la tribu uu
j
ij
•1 l.'ANSKE 1W6-1!IOU
SOCtOI.OOIljl'E.
nation. Il y a doue des présomptions pour que des critères
empruntés à lu nature des constitutions juridiques soient plus
connexes quaucun autre ù la structure intime, uou seuleineut
du groupe, mats encore de sa propre conscience.
M. M.

lilUDl.NtiS(Fraxklix-IIknhï}. – Sooiology. New-York, Columbiu


l.'uirasity l'iess, 1008,p. M, in-8».
A. liKLM). – Délie condlzioni d'esistenza délia sociologia.
liiv. ital d. social., XIII. p. I8U-193(Détend les principes luôiuus
dont nous nous inspiruns iui).

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EI.LW00I) {CiiAiiiKs
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IIAVKS ;E.C). – Sooiologyandpsychology sociology and geo-
graphy./lwcrr. Journ.ofiiociol.,XIV,|i. U71-IO8.
The relations of the social sciences. A Symposium.Amer.
diversesà unquestion-
Juurn.uf Social..XIII,p. 394-402;Hi"'|johs«s
naire envoyépar Indirectiuiiîle l'Amer.Journ.ofSociol.).
F.). – Sooiology and the other social sciences
IloXIK(ItniiKiiT
a rejoinder. Amer.Joum.of Social.,XII, p. ~M-">(>. (Hcponscà
l'article deSmall
cili; plushaut./
SMAI.L(AmiioxW.). – Are the social sciences answerable to
common prinoiples of method1 Amer.Journalof Sociul., XIII,
p. 1-20,p. 200-224.

il. ÎMIILOSOI'IIIESOCIALK
TRAITÉSOÉ.NÈRAL'X,

L.\mr,Hoihticj,Buvolé,Aïms
Par MM.DïntiHEi»,

MKYBIlfEouARnj. – Geschichte des Altertums, -2e Auilage.



Kinleiluiig. Klemeulelier Anthropologie. Stuttgart, li)07,
p. XII-i50, iu-K».
Ku nous donnant cette nouvelle édition de sa grande et
wtlûbreliistoirede l'iinliquitê, M. Kduard Meyeratenu à maiu-
lenir l'inlroductiou philosophique et sociologitiuepar laquelle
s'ouvrait diijii lapremièreédition. Il l'a mémo développée, en
les spécia-
dépit descritiques que ne lui avaient pas épargnées
listes et elle se préseute aujourd'hui sous une forme plus sys-
0 L'ANNÉE
SOCIOUIlilgUK.
i»0fi-IO09
.1
témutique. L'auteur se propose d'y exposer sa conception de
l'histoire et de l'évolution sociale en général. Il donneà cette
étude synthétique le titre d'anthropologie il entend par là
la science qui étudie les lois généralesdelit mentalité humaine,
telle qu'elle se développedans l'histoire. Mais, commele déve-
loppement historique est essentiellement cullectit, le mot
d'anthropologie ne laisse pas de surprendre. Celui de socio.
logie paraîtrait plus indiqué.
SI. M. appuie ces considérations générales, non seulement
sur son expériencepersonnelle d'historien de
l'antiquité, mais
aussi sur une certaine connaissance de retliuographie. Il ne
craint pas de parler des sociétés inférieures, des clans et des
phratries, des formes primitives de la religion, de la fiimille,
du mariage, etc.Toutefois, il semble bien qu'il n'ait pas une
pratique directe des documents ethnographiques; aussi lais-
serons.nous de côté les propositions particulières qu'il lui
arrive d'émettre sur ces sujets, pour nous attacher de préfé-
rence aux vues d'ensemble et aux conceptions mélhuilologi-
ques.
Uue première idéedomine tout l'ouvrage c'est l'antériorité
de la société politique sur les sociétés diverses qu'elle com-
prend. Le plus souvent, on représente la première comme
une résultante des secondes. L'organisation sociale se serait
faite (le bas en haut, pour ainsi dire elle aurait commencé
par les groupes les plus simples, les plus élémentaires, pour
s'élever progressivement aux plus complexes. Le premier
aurait été formé, sous l'influence de l'instinct sexuel, par le
couple conjugal, l'association de l'homme et de la femme; la
famille eu serait résultée par une expansion toute naturelle.
Ues réunions de faittilles auraient donne naissance aux cluns,
aux villages; des confédérations de villages ou de clans, aux
tribus, aux nations. Tout le livre de M..M. est contre
cette conception. Très justement, il fait observer que, dans
l'elbijographie et dans l'histoire, les familles ne se présentent
jamais à l'observationqu'organisées suivant une forme définie
et qui leur est imposée. Si loin qu'on remonte dans le
passé,
le mariage consiste, non dans un simple et lihre
accouple-
ment du maie et de la femelle, mais dans une union régle-
mentée, soumiseà des conditions positives et négatives dont
il n'est pas permis aux parties de s'écarter, et qui entraîne
pour elles des obligations déterminées. Les enfants qui
naissent de ces uuions ne restent pas simplement attachés ù
TIUITKS OICXICUAL'X 7

1
leurs pères ou à leurs mères par les sentiments naturels que
le petit de l'animal a pour ses parents; ils sout obligatoire-
meut attilbués tantôt au mari, tantôt à ta femme, ou plutôt
soit à lu fiimille de l'un, soit à la famillede l'autre, soit à l'une
et ir l'outre à la fois. De cette attribution résultent, pour l'eu-
fitnt, des devoirs eu même temps que des droits, droits de
copropriété sur le territoire du clan ou sur le patrimoine de
la famille, droit d'héritage, etc. Ces règles hn punitives ue
doivent aucunement des attributs généraux de la nature
liuinuiue, puisqu'elles varient selou les lieux et les temps. 11
n'y avait rien dans la constitution orguuico-psychique de
Illumine qui le prédéterminai à soutenir des relations juri-
diques avec son père a l'exclusionde sa mère, ouinversement;
rien qui prédestinât les atués à jouir dans la famille d'une
situation privilégiée iséuiorati, puisque, dans d'autres cir-
constances, ce sont les plus jeunes qui exercent ces mêmes
prérogatives. C'est dire que la famille et le couple conjugal,
partout où ils existent, ont une organisation (lui leur est
imposée du dehors par un pouvoir qui les domine et les
dépasse: c'est le pouvoir de l'État. Par ce mot, fauteur entend,
uou pas l'organe gouvernemental chargé de représenter la
suciété politique, mais celle-ci dans son ensemble. Elle se
ciinictérise uniquement par la souveraineté qu'elle exercesur
st.'Smembres et par l'autonomie relative dont elle jouit par
rapport aux sociétés ambiantes. En ce sens, elle est un fait
universel; elle existe partout où il y a des hommes. On peut
duiicdire, eu reprenant le motd'Aristote, eu l'étendantmême,
que la société politique ainsi étendue est antérieure à lasociété
conjugale, à la famille et, par conséquent, au clan, au vil-
liige, etc., et même à l'individu. L'homme n'existe pas eu
dehors d'elle. C'est en elle et sous sou action que se sont éla-
borés les groupements plus restreints qu'elle comprend. C'est
elle qui a présidé à leur genèse. Ici comme ailleurs, c'est le
tout qui précède les parties et qui les conditionne.
La forme sous laquelle s'exerce cette actionde la société sur
s(»smembresest triple il y a le droit, les mcuurset la morale.
Entre les prescriptions proprement juridiques et les mœurs,
il n'y a qu'une différence de degré.?. Les unes et les autres
soûl faites de manières d'agir imposées, au besoin, par la cou-
tt-ainte. La seule différence est que la contrainte est ouverte,
formelle, expresse dans le cas du droit, enveloppée et indi-
recte, au contraire, quand il s'agit des mœurs. Quant à la
8 LAX.S'KB SuCIOlOÛIOUK. 19UIMM0U

morale, c'est, en quelque sorte, l'aspect intérieur de cette con-


trainte collective.L'individu u, lui-mémo, conscience « qu'il
ne peut exister eu dehors de la société, qu'il lui est impos-
sible de s'en affruuckir,et que, pour cette raison, il doit se
soumettre aux exigences et aux commandements de la col-
lectivité, quelque vépugiiunœ qu'il puisse avoir, dans les
cas particuliers, pour cette soumission » (p. 35 La morale
est l'ensemble des actes qui sont inspirés par ce sentiment.
Mwurs, droit et morale apparaissent ainsi comme des choses
sociales qui ont une existence en dehors et au-dessus de
l'individu, et l'ou s'explique que la réglementation sociale
ue puisse être dérivée de lu nature de l'individu. Si donc on
s'en tient à la lettre des expressions employées par l'auteur,
les idées qui précèdent semblent ôtre identiques il celles-là
mêmes que nousdéfendonsconstamment ici. Mais, en réalité,
l'accord n'est que partiel il n'atteint pas le fond même des
choses, et voici déjàoù commenceà s'accuser une grave diver-
gence. Quand nous disons que le droit exprime la collectivité,
nous entendons qu'il est lui-même et tout entier le produit
d'une élaborationcollectivo,que la société le fait, qu'il répond
à certaines nécessitésde l'organisation sociale dont il ne peut
être détaché sans perdre toute signification. Pour l'auteur, au
contraire, il existe un droit eu soi, un principe absolu du
droit qui domine tous les codes, et, à l'intérieur de chacun
d'eux, tout le détail des règles particulières dont il est fait.
Cette Idée du droit, chaque peuple la conçoit à sa façon, selon
les circonstances, les conditions particulières où il est placé.
Maiselle lui est donnée il se horne à l'appliquer et à la spé-
cialiser (p. 38-fJil).– Nous verrons tout à l'heure cette pre-
mière divergenceen entraîner d'autres.
Mais, si réelle que soit l'autonomie de chaque État, elle n'est
que relative. Un peuple n'est pas une sorte d'unité absolue,
fermée à toutes les influencesextérieures, séparée du reste du
monde par une solutionde continuité nettement tranchée. De
même que l'individu humain n'existe pas en dehors de la
société de ses semblables, chaque société est en rapport avec
d'autres et vit ainsi dans un milieu inter-social qui l'enve-
loppe. Elle est dans uu devenir, dans uu écoulement perpé-
tuel. D'ellese détachent saus cesse des éléments qui vont se
joindre aux sociétésvoisines, et inversement elle reçoit de ces
dernières des élémeutsnouveaux qu'elle s'incorpore et s'assi-
mile. Il y a non seulementdes échanges do personnes, mais
Tiumis ukxkracx y

des échanges d'idées, de sentiments, de croyances. Chaque


Klat particulier a comme une tendance à s'assimiler aux
autres, a se confondrepartiellement avec eux, dans une même
viecommune. C'est ainsi que se forment, par-dessus chacun
d'eux, des groupements plus vastes qui les comprenrent ce
sont les races, les familles de peuples parents par la langue,
les nationalités en tant qu'elles débordent les frontières. les
cercles decivilisation iKdlaftmVi, lois quele monde musul-
man ou le monde chrétien (§£ 40 et suivants). Mais, bien
entendu, si importante que soit cette tendance à une mutuelle
assimilation, elle n'est pas la seule.11en est une autre, opposée
Ala précédente, qui incline les peuples, au contraire, il se dis-
tinguer les uns des autres, à se faire chacun une physionomie
personnelle. Ou retrouve, d'ailleurs, les deux tendances anta-
gonistesù l'intérieur de chaque société. Chaque individu tend,
pur certains cùtés, à s'assimiler à ses compagnons, et, par
d'autres, à s'en différencier et à s'individualiser. C'est dansle
l'outlit de ces deux tendances que M. M. voit le fait dominant
<l«l'histoire (p. B!h.
.Maisd'où viennent-elles 'On peut expliquer les faits d'assi-
milation par l'instinct d'imitation, par la force naturelled'ex-
piiusionque nous prêtons volontiers aux idées. Si vagues, si
peu analysées que soient ces propriétés occultes, c'est à elles,
suas doute, que M. M.attribue les difïéreutes sortes de confor-
mismesocial ou iuter-sociul et, s'il ne se posepas de questions
à ce sujet, c'est que ce sont là choses qui lui paraissent aller
de soi et ne soulever aucun problème. Il ne sent pas ce que ce
genre d'explications a de scolastique et même de verbal.
Maisreste rendre compte de l'autre tendance? D'où vient
que chaque peuple aune personnalité définie et distinctive
qu'il tend, e'n général, non seulement à maintenir, mais à
fortifieret à développer ?
Ousait comment, pour Hatzel, c'cstle facteur géographique
qui fait l'individualité des Ktats. Mais M. M. repousse cette
théorie Mêmequand il s'agit de faits aussi géuéraux et simples
que le nomadisme et la sédeutarité, la nature et la coufigura-
tiondu sol ne lui paraissent avoir qu'une influencesecondaire.
Suivant ce que sont les peuples, les circonstances géogra-
phiques sont ou ne sont pas, sont totalement ou partiellement
utilisées elles n'ont donc aucune action nécessitante. Tout
dépend, /ion seulement du territoire, mais des dispositions
de ceux qui l'occupent et qui l'exploitent ijfc30i. Cesdispo.
10 l'kXXÈg SUCIOLOOIQPIÎ. l'JOB-1900

sitions, on pourrait chercher à en rendre


compte par la
manière dont la société est organisée, par J'état de la civili.
sation dont elle a hérité, par la nature de la vie collective
qui
résulte et de cette civilisation et de cette
organisation. M.M.
ne s'arrête même pas a cette
hypothèse. Il écarte d'emblée
tous les facteurs extérieurs a l'individu. Les
dispositions de la
société reviennent, selon lui, aux dispositions des membres
qui la composent ip. 174-175;.L'individu, comme tel, serait
doue, en défiuitive, l'unique agent de l'évolution sociale.
Voici, en effet, la conception que s'en fait notre auteur. C'est
de l'individu que tout vient et de lui seul
que tout peut venir;
seul, il est créateur. C'est dire le rôle tout à fait
prépondérant
qui se trouve, par cela même,attribué aux grandes indivi.
dualités historiques. M.11.u'est pas ôtuigué de
penser qu'une
société vaut ce que valent ses grands hommes, est ce
qu'ils la
fout. Sous rinllueuce de causes
qui ue sont ni prévisibles ni
déterminubles,il y a des cerveaux où éclosent des idées nou-
velles; de là, elles se répandent, se propagent, se généralisent.
Parle fait de cette propagation, ellescessent d'être de
simples
événementsde la conscience individuelle pour devenir des
faits sociaux. Mais, par le fait de cette socialisation, elles
subissent une sorte de dégénérescence. Tant qu'elles sont des
états d'un esprit particulier, elles conservent une
souplesse
qui leur permet de se modifier quand les circonstances les y
invitent; une fois qu'elles sont extériorisées, elles se fixent.
se cristallisent, se matérialisent et deviennent ainsi réfrac-
taires au changement. Toute opinion commune, toute tradi-
tion, une fois établie, a une force d'inertie qui résiste à toute
nouvelle évolution. A chaque moment de l'histoire, l'homme
de génie est obligé depercer la
croûteèpuisse des préjugés, des
idées toutes faites de "son temps, pour pouvoir
produire les
sienues au grand jour. Et cependant, il ne se libère de cette
servitude que pour devenir lui.même nu instrument de ser-
vitude pour ses contemporains et ses successeurs. Par une
sorte de nécessitétragique, les idées libératrices, en se
répan-
dant, deviennent oppressivesa leur tour. Les prophètes, qui
se sont insurgés contre les religions constituées, donnent
t naissancea des Églises qui traiteut en ennemi tout nouveau
prophète. Les esprits les plus révolutionnaires, en matière
d'art, de philosophie, fondent des écoles qui s'opposent à la
fondation d'écolesnouvelles (|j 99-104;.
De cette manière de concevoir l'évolution sociale résulte
THAITlfc liÉS'KKAL'X 111
J-.t 144 1* 1 fc
une certaine façon, très particulière, d'entendre l'histoire.
Les sociétés humaines peuvent être considéréessous un
double aspect. Par certains côtés, elles sont homogènes,com-
parables entre elles et, par la comparaison, ou peut dégager
les lois qui les domiuent. La recherche de ces lois est l'objet
de l'anthropologie; nous avons précédemment expliqué la
raison pourlaquelle l'auteur se sert de cette expression. Mais
les Etuts peuvent être étudiés dans ce que chacun d'eux a de
propre, de spécifique.C'est cette étude qui constituel'histoire.
Cette distinction serait irréprochable si elle n'avait, dans
l'esprit de l'auteur, uue signification toute spéciale..Nous
avons vu, en effet, que c'est le facteur individuel qui difïé-
reucie les sociétés, qui fait la spécificité de chacune d'elles.
O'oùil suit que c'est lui aussi qui est l'objet propre de l'his-
toire. Une époque est historique dans la mesure où les indi-
vidus y jouent un rôle considérable. Les siècles qui ont le
plus ce caractère sont ceux où le conformismesocial cède
pour un temps, où surgissent des esprits novateurs qui
battent eu brèche l'état de choses existant. C'est prendre le
contre-pied de la vérité que d'assigner à l'histoire, comme
matière principale, les états collectifs, les phénomènes de
masses 'die Mnisxeiimdieinuugen,Masmirargange, c'est l'in-
dividuel, le singulier, qui constitue sou domaine. C'est, d'ail-
leurs, à cette condition qu'elle peut traiter du devenir,
puisque, suivant M. M le devenir est l'œuvre des seuls in-
dividusijSlOi, 100.,
D'autre part, comme l'individu est un produit du hasard,
il est iuexplicable; il est donc, comme le hasard lui-même,
en dehors de la science p. 172,. Par suite, l'histoireelle-même
ne saurait être uue science, ausens rigoureux du mot les pro-
positionsqu'elle établit restent toujours problématiques; elles
ne peuvent traduire que les convictions personnellesde l'his-
torien (p. 198).Puisque, par hypothèse,les événementsqu'elle
s'efforcede lier suivautdes rapports de causalitésont de ceux
qui ne se répètent pas, puisqu'ils constituent descas uniques,
il n'y a pas de procédé comparatif qui permette de dégager
ceux qui jouent le rôle de causes; c'est au flairdu chercheur à
faire la sélection, sans que les résultats de ces intuitions puis-
sent être vérifiés par aucunepreuve régulière. Lepoint de vue
subjectif est douc nécessairement prépondérautig 113,.Cette
subjectivitéinévitableseremarque mi>niedans la mauièredont
se détermine l'objet de la recherche. Si tous les faits du passé
12 l'JOO-l'.KJ'J
f/.m'ÈK£OC!OI.O(HQ.UB.
ètaieut'cousidéréseommeégalemeuthistoriques, lu matièrede
l'histoire serait iufinid. Cn choix est nécessaire. Ceux làsculs
doiventêtre retenus, suivant <M.M.> qui uut eu sur lu suite
des événements ultérieurs une influence marquée plus spé-
ciulemuut,ceux qui out concouru il faire le présent tel qu'il
est. C'estduprésentqu'il (uut partir; c'est lui (lui doit servirde
critère. puisque c'est lui qu'il faut arrivera expliquer. Cesont
les liens qu'il soutient avec le passé qui permettent de circons-
crire les portions du passé sur lesquelles doit porter l'investi.
gation historique (p. I8b"-lN7i.Maison seutaisénieut, et c'est,
d'ailleurs, ce que l'auteur reconnaît lui-même ($112), tout ce
qu'il y a d'individuel et d'« priori dans ces appréciations
portées sur l'importance des événements,d'autant plusqu'elles
doivent précéder la recherche au lieu d'en résulter. Cesont
les idées du temps, la nnmiùre dont l'auteur se le représente
et le juge suivant sou parti, sa coiilession, son tempéramentt
propre, etc., qui contribuent à déterminerl'objet de la recher-
che, bien loin que celui-ci puisse être fixé objectivement.
Nousavons tenu, pour plusieurs raisons, à exposer icices
théoriesde M..M. D'abord,il est intéressant de voir uu spé-
cialisted'une autorité aussi incontestée reconnaître que l'his-
toire ne se sullit pas à elle-même, mais réclame une culture
d'uu autre genre qui initie l'historien aux lois générales
du développement humain. Cette culture, M. M. l'appelle
anthropologique: maisle mot importe peu à la chose. Au fond,
c'est bien de sociologiequ'il s'agit. Eu second lieu, il est très
instructif de constater, dans ce cas particulier, combien cette
culture indispensable, un historien est incapable de se la
donner lui-même car il est diflicile de ne pas sentir la
contradiction fondamentale au milieu de laquelle se débatla
philosophiede notre auteur. Nul n'a plus que lui lesentiment
de l'hétérogénéitéqui existe entre l'individu et la société.Ne
l'avous-nous pas vu, au début de son ouvrage, montrer, avec
un véritable luxe d'exemples, que l'organisation sociale ne
répond pas à des besoins individuels, mais a des exigences
d'une toute autre sorte? Les institutions sociales lui sem-
blaient être si peu selon la pente de notre constitution orga-
nico-psychique qu'il faisait de leur puissance coercitive le
trait distiuctif et la condition de leur action. L'individu nous
était alors présente comme le produit de la société. Ht voilà
qu'ensuite on nous eu parle comme s'il était l'auteur de cette
société de qui il tient ses attributs essentiels! C'est lui qui
THAITfo tlli.NKIUl'X V.i

ferait ou transformerait ces institutions qui s'imposent à lui


par contrainte. Mais pourquoi cette contrainte, si c'est lui
qu'elles expriment et, si elles expriment autre chose que lui,
comment peut-il les tirer de lui-même Si c'est de lui qu'elles
émanent, elles ne sauraient le dépasser et. inversement, si
elles le dépussent, ce n'est pas de lui qu'elles découlent. Dira-
t.ou que, en se répandant, en. se généralisant, une idée indi-
viduelle devient la chose de plusieurs? Mais elle ne change
pas pour cela de nature. Ue ce qu'elle est adoptée par plu-
sieurs individus, il ne suit pas qu'elle traduise une réalité
plus qu'individuelle. Or, cette contradiction flagrante semble
bien venir de ce que, chez M. il., l'expérience de l'historien
déborde,et de beaucoup, les ressourcesde la cull.ire théorique.
Il a une pratique trop familière et trop étendue (les choses
sociales pour ne pas sentir la force aveclaquelle elles s impo-
sent à l'individu et lui résistent et en ellet, ce sentiment est
manifeste dans tout le cours de l'ouvrage. Mais, d'un autre
cttté, comme il ne soupçonne pas qu'il puisse y avoir une
réalité supérieure à l'individu, il lui est impossible do se re-
présenter d'une manière intelligible cette transcendance des
faits sociaux; et c'est pourquoi il la fait évanouir quand il
cherche à en rendre compte.
On trouvera dans le livre (p. K3et suiv./ une théorie de ta
religion, de sesorigiues et de son évolution, dont nous n'avons
rien dit parce qu'elle n'est qu'un cas particulier des idées qui
viennent d'être exposées. D'autre part, prise en elle-même,
elle est d'un simplisme vraiment excessif. Il est surprenant
qu'un savant qui sait combien il est difficilede faire l'histoire
d'une religion ait pu croire possible d'esquisser en une cin-
quantaine de pages une sorte d'histoire explicative de la reli-
gion en général. E. D.

(ii-sïAVHATZENUOKKK. – Soziologie. Positive Lehre von


den menschlichen Wechselbezlehungen. – Leipzig,
Brockhaus, 1907, p. de XVI-331in*.
C'est une entreprise téméraire que celle décrire, à l'heure
présente, une Sociologie.Mais elle n'était pas pour effrayer le
général Rutzenhofer, dont ce livre est l'œuvre posthume. On
croirait qu'il a pris plaisir il rendre sa tâche impossible en
dépassant volontairement le domaine, déjà assez vaste, de la
sociologie. A son avis, cette science ne doit pas seulement
It l'a.N.NJSB SÙUOI.OIJIQUK. i'JOli-l'JO'J

« classer les relations humaines, découvrir les facteurs de


l'évolutiou sociale » (p. i), prévoir l'avenir et le préparer; elle
doit étudier « ta vie humaine en soi »; elle est la synthèsede
tout le savoir (p. 6).
La synthèse que nous présente Ratzenhofer demeure – on
n'eu sera pas surpris vague et arbitraire. Le nombre des
questions ellleurées est tel qu'aucune solution ue peut être
appuyée sur une collection suffisantede faits ou d'arguments.
Qu'on en juge voici la liste des problèmes abordésdans la
première partie de' l'ouvrage, celle qui est consacrée à la
Sociologiethéorique
I" Élémentsessentiel*de la pennéesociologique.L'évolution
naturelle et le déterminisme universel. Place de l'homme
dans le monde. Phases de l'évolution sociale. Contenusocial
de toutes les tendances humaines. Principales formes des
relations sociales. Origine des instincts sociaux.
2° Facteursde l'étolution sociale. Facteurs physiques climat,
race, milieu. Facteurs physiologiques hérédité, métissage,
sélection sexuelle. Facteurs psychologiques: tradition, assi-
milation, idées directrices. (Hàtzeiihofer accorde une égale
importance à cesdivers facteurs sa théorie n'est pas unilaté-
rate bien que son fils, dans la préface, le présente commeuu
disciple de Gumplowicz, il est loin d'exagérer le rôle des fac.
teurs ethniques.Il soutient que les facteurs physiquesagissent
plus manifestement dans les civilisations les plus simples,
tandis que les facteurs psychologiques interviennent surtout
dans les civilisations plus complexes.)
3*Fonctionssociales.
4° Formations«adule* famille, État, etc.
5° Principes de l'écoliitionsurfait' individualisme et socia-
lisme, intégration et dilïérenciatiou progrès et regrès liberté
et contrainte; égalité et autorité ordre social.
Les thèses auxquelles l'auteur parait le plus tenir sont les
suivantes. Tout vivant tend à déployer sonindividualité. Mais
ce développementdoit avoir des limites. Ceslimites, l'instinct
les fixeà l'animal. Au contraire, l'homme tend à les dépasser.
Pour qu'une société vive, il faut que. chaque individu soit
maintenu dans ces limites normales. La société n'a pas à
étouffer l'individualité pour le plaisir de l'éioufler; sou devoir
est de concilier individualisme et socialisme, liberté et cou-
trainte, égalité juridique et inégalité politique, etc. A la
période de l'évolution sociale que nous traversons, période
THAlTlb
UÈNÉRAl'X 15
munillfi
de « l'épanouissement de tl'industrie
'Î twlItCt tMU
et Htfit! /lri niv*inn#in
du commerce »,
disent ses admirateurs, période d'anarchie et de fièvre, dit
Katzenhofer, chacun tire de son côté. Mais bientôt viendra
une période de stabilité et d'harmonie, où les races supé- 1
rieures ayant colonisé le inonde entier et ayant soumis les
autres races à leur empire, chaque nation produira à peu près
tout ce qui lui sera utile; le régime des entreprises capita-
listes et des échanges commerciaux aura vécu: un se préoc-
cupera moins de gains égoïstes, davantage de l'intérêt social.
Lastabilité sera l'idéal dans la famille commedans la société
économiqueetdaus l'État. Une certaine inégalité régnera, en
ce seus qu'un appréciera à leur valeur les individus qui mou-
treront pour le bien général un souci plus vif. L'autorité de
l'État sera respectéeparce qu'elle sera mise au service de l'in-
térêt général.
Ces vues ne sont ni des plus neuves ni des plus hardies. Ce
livre est un mélauge de conservatisme et de réformisme. Le
uênéral Hatzenhoferprêche le duel, mais souhaite lit réduction
des armements. Ce qui donneà ses idées quelque originalité,
('(.•sinonseulement la verve avec laquelle il les défend, mais
la couleur locale duut il les revôt. Celte « sociologie pure et
appliquée » est un traité de politique autrichienne. On y pro.
clame, entre civilisés, l'égalité juridique, mais ou fait uue
exception eu faveur de l'empereur et de sa dynastie. On y
accordeuue importance capitale à deux questions plus pres-
santes sans doute a Vienne qu'à Paris ou à Londres la ques-
tion russe et la question juive. Il parait qu'une victoire des
Itussesen Europe substituerait à notre civilisation la civili-
sation « chinoise j), tantles Russes subissent eux-mêmes l'in-
fluencede l'Extrême-Orient. Il fautdonc repousser les Russes.
Quant aux Juifs, représentants de uotre âge capitaliste et
commerçant, il ne faut pas les exiler, mais il faut espérer
qu'avec « l'âge de la stabilité et de l'harmonieuse production »
leur rôle cessera ils se fondrout alors dans les autres races,
ce qui, pour elles comme pour eux, sera le salut. Telles sont
les opinions de notre auteur il aurait pu fournir à la presse
des articles piquants; mais c'est un traité de sociologie qu'il
prétendait écrire P. L.

G. DE OREEF. – La structure générale des sociétés.


Paris, Alcali, 1808,2 vol., p. 278 et 304 in-8°.
L'auteur présente cet ouvrage comme un résumé et une
16 l.'ANXKESOCJuloaiyl'K.19i)<j-190'J

conclusion de ses travaux (intérieurs. Il veut définiret expli-


quer les formes générales de la structure des sociétés, eu les
rattachant aux lois générales de la matière soit brute, soit
organisée. Tout agrégat est limite et de même qu'il y a des
zones clitnatériques, géologiques, végétales et animales, il y et
pour toute société des lois de leur distribution et de leur
limitation. Le problème fondamental est donc celui des
frontières.
Qu'est-ce qu'une frontière, et qu'est-ce qui fait changer les
frontières? 1 Insistant sur les modifications incessantes de
celles-ci, l'auteur montre sans peine que la nature n'impose
nulle part aux sociétés des limites fixes, La nation le mieux
enfermée par des limites naturelles, l'Angleterre, dès qu'elle
a eu acquis son unité politique, ildébordé sur le monde entier.
Il n'y a donc pas de frontière naturelle dans le sens ou les géo-
graphes prennent ce mot. Le domaine dans lequel un peuple
s'étend va jusqu'à la limite extrême de sa puissance, c'est-à-
dire de sa force de protection ou d'expansion. La frontière
dépend doue, d'une part, de la structure interne de la société
(suivant qu'elle est plus ou moins dense, par exemple, plus ou
moins centralisée politiquement, suivant le régime de pro-
priété, etc.) et, d'autre part, elle dépend de la résistance qu'of-
frent les peuples voisins. Les frontières ne sont pas des lignes,
mais des régions. Chezles primitifs, qui viventde la chasse ou
de la culture extensive. ces régions frontières sontdes déserts,
ou, si elles sont susceptibles d'être cultivées, les hommes les
abandonnent et les transforment en déserts. De même, le
moyen âge féodal montre le régime de propriété influençant
le mode de souveraineté, et, par lui, déterminant les limites
des fiefsou des États. Dans les sociétéscontemporaines,venues
pour la plupart d'une transformation du régime féodal et
fondées par des conquêtes, le noyau des sociétés nouvelles*a
été souvent une marche militaire, ancienne région frontière
armée contre les invasions. Les régions de plaines fertiles
(par exemple Flandre, Lorraine, vallée du Mioue, Savoie;sont
devenues les frontières toujours mobiles que se disputent les
grands États militaires. On tend à les neutraliser pour des
causes analogues celles qui amenaient les peuples sauvages
à transformer en déserts les régions extrêmes auxquelles
s'arrêtait leur expansion.
L'auteur, en terminant, prévoit une extension progressive
des frontières des Étals actnels, ou plutôt il croit qu'elles
TRAITES
GÉNÉRAUX 17

perdront eu partie leur caractère de barrière et do limite à


l'activité soeiale. Fiastructure interne des États, en particu-
lii'i-lavie économique(capitalisme, machinisme, nécessité d«s
échanges) préparent uu régime de coutrats internationaux
ilcsliiiHà remplacer peu peu le régime international actuel,
iuit de luttes et de déséquilibre. K. II.

(i. SIMMEL – Soziologie. Untersuchungen ttber die For-


men der Vergesellsehaftung. (Sociologie.Recherchessur
In formesde l'association) Leipzig, Dunckeret Humblot,t908,
p, "82 in*.
Dansce volume le lecteur retrouvera, développéesd'ailleurs
et refondues,uu certain nombre d'études publiées par M. S.
dans diverses revues. L'une d'entre elles {Commentles formes
ttifiales se maintiennent i paru dans le tome I de l'Année,
71-111 D'autres out été déjà analysées ici La détermination,
– Supérioritéet mbor-
ilinintitatitf te groupes .1 VII, p. U48i
,l mntion (I, p. lîiii – Le conflit (VIII. p. 181; – l'espace et
/'« dispositionsspatiales îles sociétés(VII, p. 0-i(î).Le reste du
livre est constitue par deux chapitres où M. S. reprend les
thèsesprincipales de son Vebersociale Ui/I'ereiiziening(L'entre-
cmisenientdes cercles sociaiu L'élanjissument du groupe ett
In formationde l'iiuliridmtlité, par une étude sur l.e paum; et
nueautre sur Le secretet h sociétifsecrète.Les chapitres sout
d'ailleurs coupés d' « Excurs » (sur la noblesse,sur l'étranger,
sur la psychologiexorinle,sur Vawdogiedes phénomènes jisycho-
l,,ijiqi(rxet des phénomènessociologiques,etc. i.
Les éléments qu'il rassembleainsi, M. S.ne se préoccupe
p;isde lesordonuer en un tout systématique. Al'heureactuelle,
si-loiilui,le sociologuene saurait fournir que des échantillons. <
Ki!uvariété même des échantillons qu'il rapproche ne peut
que mieux mettre en lumière la spécificité de son point de
vue.
Kten eflet, les études hétérogènes juxtaposées dans ce livre
permettront au lecteur de se faire uue idée plus nette de ce
que M. S. entend par la science des forme»sociales.Klles sont
loin de se réduire à ses yeux aux déterminations spatiales, à
la structure matérielle des groupes, à ce qu'on a propose d'étu-
dier ici sous la rubrique .Vorphologiesociale. De même, elles
débordent le cadre des institutions proprement dites. M. S.
n'accepteraitpas la définitionproposée naguère par MM.Mauss
K. DntKHEiH. Atmi'c swiol., 190G-1WJ. 2
18 190U-19U9
MN.NKE SOCIOLOGIQUE.

et Knnrnnnnl
fit Fauconnet fvnii*
(voir t.t. V
V,np. I134).La
M.4i la enr-inlrirrip nnmupai
sociologiecomprendraautre
chose, selon lui, que des habitudescollectives.Elle a quelque
chose étudier partout où des rapports quelconquess'établis-
sent entre les hommes, partout où une action réciproque vit
de l'un à l'autre. En somme, l'analyse des « interactions », ce
serait. pour M. S. comme pour Tarde(un sait d'ailleurs com-
bien il y a d'aualogies entre les « manières» de ces deux pen-
seurs; l'essentiel de la sociologie. Sans aucun doute elle doit
s'occuper des grandes institutions – Églises, pouvoirs
politiques, organisations commerciales qui dominent les
individus et, une fois constituées, paraissent vivre d'une vieà
part. Mais plus féconde encore est l'étude directe de ce que
Ai. S. appelle l'association « à l'état naissant », à savoir les
relations entre individus, les réactionsqu'ils exercentles uns
sur les autres, et qui expliquent la vie des touts sociaux
comme les réactions physico-chimiqueséchangées entre les
cellules expliquent la vie de l'organisme.
Si cette étude est une étude formelle– comparable en un
sens à la géométrie, ou à la linguistique c'est que ces rela-
tions peuvent être les mêmes, alors que varient les fins que
les hommes associés se proposent, et qui sont comme le con- 1
tenu, la matière de leur 'association. Que les fins d'une asso- I.
ciation soient religieuses, politiques ou économiques, on peut
y voir se former ses partis, se distribuer l'autorité, se diviser
le travail, s'organiser la concurrence entre ses membres. Ce
sont ces phénomènes communs a la vie des associations
diverses que NI. S. s'eflorce de mettre en relief. C'est ainsi
qu'il recherchera abstraitement, et quel que soit le contenu
divers des sociétés, comment les relations des individus y
varient selon que la xufn'rioriti1yestconcentrée dans un indi-
vidu.ou concédée à tout un groupe, ou incarnée dans quelque
principe supérieur aux groupes comme aux individus. De
même, s'il parle de concurrence, ce ne sera pas pour étudier
tel ou tel de ses modes – économique, religieux ou esthé-
tique mais pour rechercher du générall'utilité des conflits,
quelles sortes d'ententes ils impliquent, comment se défend
l'unité socialeconlre les principesde division qu'ils y peuvent
introduire, etc. De même encore, ce qui l'intéresse dans les
Hociftéx«écrites – que ce soient des groupements de conspi
rateurs ou de voleurs, d'illuminés ou de débauchés – ce sont
les relations que, par le fait même qu'elles sont secrètes, ce*
sociétés tendent à instituer outre leurs membres. Le secret
TIUITli<
m'm-ÎII.U'X l'J

est pour elles connueun orguue de protection. Pour que cet


| organe puisse bien remplir sa fonction, il importe que les
) associéspuissent avoir conJluucoles uns clans les autres. Il
importe doue qu'ils aient appris à se taire cet apprentissage
i du silencen'est-il pas pourl'énergie moraleune des meilleures
i écoles' (p. Il importe aussi qu'ils sachent obéir sans
l discuter, voire sans comprendre, sur un tout d'ordre. D'où
l'usage des formules et pratiques rituelles destinées à assou-
plir et à lier les volontésindividuelles. D'où l'organisation du
ceshiérarchies strictes, où les fonctions diverses correspon-
dent à des degrés inégaux d'initiation. D'où le caractère
mécanique, en quelque sorte, que revêtent normalement ces
t associations, les plus «conscientes » de toutes, les plus vou-
lues, par cela même qu'elles sout secrètes i p. 385, 390). Ou
devine, par ces brefs aperçus, la richesse des déductions
psychologiquesdont l'œuvre de .M.S. fourmille.
La sociologie ainsi comprise peut-elle être autre chose
qu'une psychologie?La conséquence, si elle devnit être tirée,
miserait pas pour déplaire à M. S. 11contesse, ou plutôt il
proclameque les interactionsqui lui paraissent les éléments
constitutifs de la vie socialesout des phénomènes psycholo-
piques :p, ii). Et, d'autre part, le concept de psychologie
sociale, dont quelques-uns semblent vouloir se servir pour
délimiter dans le champ des phénomènes psychologiques la
part de la sociologie,lui parait plus uuisible qu'utile, à cause
des équivoques qu'il recèle (p. Jl'JO-iiOa,.(ju'jl s'agisse des
impiilsionsd une foute, desdécisionsd'uni! commission, ou de
l'évolutiondu droit, il est toujours possible de ruoulrer que
les phénomènes dont on attribue lu production à une âme
I collectives'expliquent en dernière analyse par des processus
< qui se déroutent dans les âmes individuelles. Seulement les
les Ames
| phénomènesen question ne se produisent que quand
< individuelles sont en présence, réagissent les unes sur les
autres, s'influencent en quelque manière. C'est cette « Syuop-
sis » seule qui intéresse le sociologue. Ht l'on pourrait dire,
j i'Mreprenant la distinction entre la forme et le contenu dont
ou s'est servi pour séparer la sociologie des autres sciences
socialcs,queceu'estpiusicila forme –les lois selon lesquelles
f s'associentles idées ou se combinent l<*ssentiments – qui est
l'objet de la recherche sociologique. C'est au contenu des
âmesqu'elle s'applique comment ce contenu varie, com-
| mi.'iilchange l'orientation des idées ou des sentiments selon
20 l'ansék sociiii.oniQi'E. i'juo-tooo

la situation que leur 'groupement même fait aux individus.


c'est là ce qu'elle s'efforce de diriger.
Que des phénomènes nouveaux résultent du fait que les
consciences individuelles entrent en relations, c'est ce
qu'il
suflit d'accorder pour reconnaître la légitimitéd'une recherche
proprement sociologique. Et du moment où on nous accorde
cela, nous admettrons volontiers que ces phénomènes sont en
leur fond de nature psychologique. Mais,
parce qu'ils sont de
nature psychologique, suiW-ilpour les découvrir
d'analyser le
contenu de nos consciences et de nous en tenir des déduc-
tions vraisemblables suggérées par l'observation intérieure :?c
Ces nouveautés qui naissent de l'association des
consciences,
u'importe-t-il pas d'abord de les observer dans les faits, c'est-
à-dire daus l'histoire comparée des associations? C'est
pour-
quoi – ou a eu plus d'une fois l'occasion de l'indiquer ici –
nous pensons que la sociologie, pour devenir une
discipline
scientifique, doit faire aux confrontations objectives plus de
place que ne leur eu fout les essais, si suggestifs d'ailleurs, du
brillant « moraliste » qui a écrit la Sociologie. C. 15.

Rusé VVORMS. Philosophie des Sciences sociales. T.


III,
Conclusions des Sciences sociales. Paris, Giard et Brière
inu", p. 230, iu-8<\

Rappelons que les deux précédents,volumes de la PhUoxo-


phie des Sciencessociales, dont nous avons rendu compte
ici même (année 1904, p. 160, et 1905, 178)
p. traitaient, le
premier, de l'objet, le second, de la méthode des sciences
sociales. Le troisième a pour but
d'exprimer les résultats de
ces sciences, les principes les plus généraux
auxquels elles
aboutissent. L'auteur ne veut pas faire œuvre personnelle:
son ambition est que sun ouvrageexprime eu
quelque mesure
l'état des sciences sociales au moment où il écrit
(p. 3) il
veut résumer, dans de courtes pages, ce que
quinze ans de
lectures, d'observations et de réflexions lui ont appris. Le
volume comprend trois parties l°étude des éléments sociaux
le milieu, la race, la population, les groupements sociaux, le
moment, l'individu 2° étude des différentes formes de la vif
sociale vie économique, vie familiale, les mœurs,la religion.
la science, l'art, le droit, la politique et l'État; 3- étude de
l'évolution sociale sa forme. sou moteur, sou processus et
son résultat. Toutes les discussions, toutes les théories géné-
ÏUA1TKS
liKNKlUUX aj
J
] raies qui peuvent ressortir il ces différents titres soiit abor-
dées et résumées chacune eu quelques pages que l'auteur
-J' conclut
par l'exposélie ses vues persounelles; très souvent,
1 d'ailleurs, il adopte les vues d'uu auteur auquel il se réfère
sur lu religion, ce sont les idées qui sont développées habi-
;]
tiK'Ilemeritpar M. Durklieim et son école qu'il expose. Dieu,
c'est la société elle-mêmeapparaissant à ses membres comme
1
J un être transcendant (p. 180 et pass.j de môme sur les
] notions morales, le bieu ip. 271).
| D'unefaçon générata,le livre les qualités qui conviennent
à unbon manuel, à unouvrage élémentaire de vulgarisation
|.1 les divisionsdes chapitres et des paragraphes sont nettes, les
£ discussions résumées d'une façon précise et claire. On peut
') craindre seulement (et peut-être cela était-il inévitable.! que
cette clarté ne soit obtenue qu'aux dépeus de l'exactitude, et
par une simplification un peu excessive de notions fort com-
jilcxes en elles-mêmes. Aussi désirerait-on souvent que les
mn-rageset les auteurs auxquels se réfère M. Worms fussent
cités d'une façon plus précise. Quand il cite, il rappelle seule-
i mentle titre de l'ouvrage quelquefois môme, il se contente
du nom de l'auteur; par exemple (p. 33; « Voir les livres de
i MM.Vacher, de Lapouge,Glosson,Ammon, Muflang. » Des
référencesplus précises seraient utiles à ceux à qui l'ouvrage
di- M. Worms donnerait le désir de connaître de première
,j iimiiiles théories i|u'il résume. A. A.
3
j| lilUDI.MJS (F. H). Readings in descriptive and historioal
¡ sooiology.Xew-York, The MacmillanCo,l'JOO.l v. ia-H",p. 553.

l'iis ADA(A.).– Prinoipios de sooiologia. Madrid.DanielJorro,


l'JUS.
..¡I
il KI.KI;tHKHOPOI.I.OS. DieBedeutung der Soziologie ia Système
dot Wl8sen8oûaften. janvierl'JU'j.
Moicitulirift f. Sozivlogie,
j
Tii.ViO
TAKftBÉ.–Sooiologia générale. Vol. I Prolegomeni
aUasociotogia; vol. II La logioa sociale [un japonais). To-
kyo,mon,2 vol.in-S'.
1 WEUNSDORK. Grundriss d. Systems d. Soziologie u. Anar-
ohismug.
Ii-na. 190i>.in-8", p. IX-104.
.1
j (A.). Prinoipil di sooiologia. Kasr-.:i Napoli.H.
Vi:UHI)ITA
j btabilimento
lipog.l'ausini,IUU6.
22 l'a.NXÉK
SUUIOLUiUul'K.
l'JUO-l'JO'J
COUNKJO ;\l. II, – Sooiologiagênerai. I. Madrid,ll<<rnuiuli.'Z,
\ws, 1 v. in- p. XVI-5C7.
SCIIKKKKK(II. Soziologie und Entwlcklungsgesohichte
der Mensohheit.T. II. Innsbiïkk, Wagner,t v. in-»»,p. 201.
KLEiriïlEKOPOfUJS. Sozlologio.k'nn, Ki»cltcr,1008.
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(il'Ml'i.OWlcZ%). – La conoeaionenaturalistloa dell'universo
e la sociologia./lie. ital. il. m-htugk,XI. p. MO.
I.OUIA[\: – Neceasarismoe voloutarismosociale. Hif.Util.d.
toeiul.. XIII.p. l-li.

III. QUKSTW.NS
liÊ.NÈRALKS
1)1 VKHSKS

l'ai- MM.
Divï,I'akoui,Hui'HTii:g,
F.H'c;oxxkt.
Aniix.

A. VIERKANDT.– Pûhrende Indlviduen bel den Natur-


vœlkern. Xeitxclw. Sosiulwiss.,1908,p. SU-îioi; 0*3-040.
Cet article offre un intérêt particulier eu ce sens qu'il ml»se
propose pas pour unique but une simple étude d'ethno-
graphie. L'auteur déclare vouloir contribuer, par l'observation
des primitifs, à résoudre la question générale du rôle de
l'individu dans la sociétéet dans le propres liunuiiu. Et à la
façon du psychologue qui cherche chez l'aliéné un phénomène
simplifié et .grossi, grâce à son isolement, il s'efforce de
découvrir, dans les sociétés inférieures uù la vie est moins
complexe et moins pénétrée d'iullueuces diverses, la trace
plus apparente du rôie prépondérant d'individualités déter-
minées.
Or ses observations ethnographiques ramènent à croire
qu'il existe, en elM, des personucs singulières destinées à un
tel riMe ce sont. d'une part, les chefs et, de l'autre, les magi-
ciens et les prêtres. Ce serait donc une erreur de ne voir dans
les groupes sociaux rudimentaires que des masses confuseset
^uniformes au sein desquelles aucun r-lêntenl ne se laisserait
UKXKUM.KS
IJUEVI'IUXS DlVtUt<&> '23

dilléreucier. U y a des chefs et sont chefs ceux qui, par


leur audace,leur intelligence, leur habilctéet même leur ruse,
parviennentà s'imposer. Or nous reconnaissons là le rôle et
ii! triomphedes qualités personnelles qui distinguent l'indi-
vidu.Commel'organisation administrative qui caractérise les
sudétés supérieures n'existe pas encore, le chef ne peut béué-
lider de l'autorité qui émane d'elle. Primitivement il n'a
mêmepas pour lui la cousécraliou de l'autorité. II lui fuut
duneôlre l'artisan de sonpropre prestige. Non moins que les
cliufs,les magicienset les prêtres nous offrent un exemple du
file qui revient originairement à l'individualité. Eux aussi
.«mldes personnages d'élite auxquels leur éducation longue
cl spéciale, leursqualitésethabiletés de toutes sortes réservent
une placeet une influence singulières. Souvent leur ascendant
ist tel qu'ils peuvent imposer des vues nouvelles et rompre la
tradition. D'ailleurs, chefs et prêtres doivent à leur initiation
inouïed'être, en un sens, supérieurs à la tradition. Onles con-
sidère connue les agents tout désignés du progrès. Kl ainsi
sur des sociétés encore imparfaitement constituées et par là
inétiie, facilement malléables, l'influence des individualités
est exceptionnellementprépondérante.
Pour illustrer ses vues, l'auteur nous rapporte un certain
nombre d'exemples d'innovations dues, dans des tribus sau-
vages,ù des personnalités déterminées, et, pour appuyer sa
thèse, il se réfère lui-même uux Lecturexon the earlij liixtonj
uj the kingship.Il nous parait, en effet, se rattacher à Fraxer,
et son explication du rote des individus dans les sociétéspri-
mitives semble bien solidaire de la théorie fort contestable
de la magieproposée par Frazer. Toutes les qualités qui font
l'individu influent d'après Vierkaudt, sont aussi celles (lui le
fout magiciend'après Frazer. Iuilueuce individuelle et magie
ni' ilillèrent doncguère l'une de l'autre. Aussi bien avons-nous
vu les magicienscompter parmi les fuliiende Inilieùlucn.Mais
a luis les deux auteurs ne se heurtent-ils pas aux mêmes
objections(cf. Ann.Soc, X, ill-4loi? Et la source de l'auto-
rité et de l'influencede l'individu en général ne doit-elle pas,
commecelle du magicien, être cherchée, plutôt que dans son
habileté personnelle, dans une force qui le dépasse en tant
qu'individu,loin qu'elle soit issue de lui ? Chez les Maoris de
lu Xouvelle-Zélande,pour ne citer qu'un exemple très carac-
téristique (cf. Journal nf the palynesian .Soei'rt; XIH, 87;, les
individus qui ont une autorité suffisante pour imposer un
24 L'ASXÊESOClULuaiyUK. l'JUH-lUUil

« rahui '>,c'est-à-dire uu tabou de propriété, sans recourir aux


rites coutumiers, ne sont ni les plus audacieux ni les plus
habiles, mais ceux qui possèdent une certaine force spéciale
(mana tangala), laquelle n'est point d'esseuce individuelle }.ï
comme les qualités personnelles dout nous parle notre auteur. £
Ces réserves visent principalement ce qui est dit de l'auto- <•
rite individuelle des chefs, de l'ascendant des prêtres ut magi- g
ciens et de leur intlueuce sur l'évolution morale et politique.
Ne faudrait-il pas distinguer plus qu'il n'est fait ici entre une
telle influence et celle des inventeurs dans les divers ordres
de l'art et de l'industrie? Dans des inventions de ce genre,
sans doute des forces dilléreutes entrent eu jeu, et peut être y |
aurait-il lieu de faire, de ce point de vue, une place plus £
grande au facteur individuel. G. D. ?

A. VIERKANDT. – Die Stetlgkett im Kulturwandel,


Leipzig, Duucker et Humblot, 1908, p. XIV-^OSI,
in-«°.
Ceserait peut-être exagérer la pensée de M. Vierkaudt que j.
de traduire sou titre par ces mots application aux civilisa-
tions du principe de la conservation de la force. Pourtant, de
même que ce principe signifie qu'il n'y a rien dans le monde
physique d'absolument nouveau, de même, t'intention princi-
pale de notre auteur est de montrer qu'il n'y u rien dans le
monde social d'absolument nouveau. Ainsi qu'il l'explique
dans une note importante (p. 113), ce qu'il veut prouver, ce
n'est pas, en dépit de sou titre, la « continuité » des change-
ments sociaux, mais leur déterminisme. Il admet dans l'his-
toire de la culture des sauts brusques mais il u'admet pas
que ces solutions de continuité soient sans cause. Toute inno- :,
vatiou, dans le champ de la civilisation, possède une préhis-
toire. Pas plus que daus le monde physique il u'y a, dans le
monde social, de création e nihilo.
Cette proposition est d'abord démontrée par un appel à
l'ethnographie et il l'histoire. M. V. nous offre un choix de
faits curieux prouvant que des inventions importantes, dans
tous les domaines de la vie sociale, ont été précédées de nom-
breuses découvertes ou « trouvailles a qui les préparaient. La
preuve est facile à faire pour les iunovations des époques his-
toriques, qu'il s'agisse de l'invention de l'imprimerie ou de
celle de la bicyclette, qu'il s'agisse des précurseurs des grands
poètes ou de ceux des grands savants. Elle est moins facile à
çcrnioNs tiâNâiuijK diverse* 25

y fournir pour les innovations des âges préhistoriques, qu'il


;J s'agissede l'invention du feu ou de celle de l'agriculture. Mais
M ou peut, d'après des travaux récents, supposer que ces iuven-
lions, comme celles dout nous possédons l'histoire, out été
longuementpréparées. Il est'peu probable qu'un homme ait
J spontanément, dans un éclair de génie, découvert l'art de
$ domestiquer les plantes. De nombreuses générations ont
cueilli, au jour le jour, des plantes comestibles; peu à peu,
i un a pris l'habitude d'eu amonceler des réserves près des habi-
tulious; il s'est trouvé que certains tubercules, ainsi déposés,
J ont germé à ce moment, l'agriculture n'était pas encore
1 inventée, mais une étape était franchie entre la simple cueil-
:¡ lette et l'agriculture. De même, après avoir durant longtemps
i chasséquotidiennement les bêtes sauvages, des tribus ont été
amenées à les parquer dans des enclos sans songer encoreà
|
les dompter phase intermédiaire eutre l'âge de la chasse et
l'âge pastoral. M. V. ne dissimule pas le caractère hypothô-
| tique de plusieurs de ces descriptions. Il lui arrive de signaler,
j sans choisir, plusieurs conceptions possibles de l'histoire
d'uue institution. Mais peu importe ce qui demeure certain,
c'est qu'une description qui nous fait assister à la préhistoire
d'une institution est plus vraisemblable que celles qui tirent
du néant les institutions toutes faites. Le présent est plein du
passé; notre civilisation rationaliste est remplie de survi-
vances irrationnelles nouvelle preuve de la loi de conti-
nuité.
Cette continuité, que révèle l'histoire, a pour fondement
p. lîti une propriété essentielle de l'esprit humain, sa « struc-
ture historique ». Telle est la thèse que, fidèleà la méthode
d'explication psychologique dont il usait déjà dans sou pré-
cèdent ouvrage iXttturtôlker uml Kulturcollier, voir Année
winloiji<iui',1, p. 288;, M. V. veut démontrer dans la seconde
partie de son nouveau livre. 11 ne. lui est pas difficile
de montrer, après maint psychologue, le rôle joué par le sou-
venir dans la perception, et, d'une manière générale, la
marque imprimée par le passé sur nos croyances, nos senti-
ments et nos habitudes. L'activité dite créatrice n'échappe
pus à la loi de conservation M. V. répéterait volontiers que
le génie est une longue patience il n'y a rien, en art, d'abso-
lument nouveau, et les « nouvelles » littéraires s'appellent
ainsi pour la raison qui fait nommer « lucusa'non lucendo».
Maintenant que le fait de la continuité du changementsocial
20 I.'A.V.NKK SOUOLOÛIQI'K. 1'JU6-190'J

est établi par l'histoire et expliqué par la psychologie, reste


à en décrire le « mécanisme » tel est l'objet de lu troisième
partie du livre, de la partie « sociologique». Trois conditions
sont nécessaires pour qu'un changement se produise dans une
(civilisation 1" il faut que cette civilisation soit « mûre «
puur ce changement; £' il faut qu'elle en ait besoin icun-
sciemment ou non) 8° il faut que l'impulsion soit donnée soit
par des individualités dirigeantes, soit par une influence exté-
rieure. Soit à expliquer l'institution récente, eu Allemagne,
des assurances sociales « les bouleversements économiques
des dernières décades, en créant l'insécurité pour de grandes
masses de travailleurs, ont fait naître le besoin de cette légis-
latiou « d'autre part, la société était mûre pour cette réforme,
puisque les moyens de la réaliser étaient découverts; euiln
surgit la puissante initiative de ttistiiurck. Soit il expliquer
l'invention du télégraphe le besoin est créé par la stratégie
de Napoléon l'état de la science rendait possible depuis deux
siècles l'innovation la société était donc mure pour ce chan-
gement euliu surgit l'initiative de Chappe. Aucune des trois
conditions n'est, à elle seule, la condition suflisaute du chan-
gement. La « maturité » (on vient de le voir par l'exemple du
télégraphe, ne su11Hpas nombreuses sont les sociétés qui
possèdent les connaissances techniques suffisantes pour
accomplir un progrès et qui ne t'accomplissent pas cer-
taines tribus emploient le fer pour leurs outils, mais con-
servent des armes de bois. Le besoin ne suDit pas davantage
certaines tribus sont régulièrement exposées à la disette et
n'inventent rien pour y échopper. L'initiative individuelle et
l'exemple de l'étranger ne suffisent pas non plus nombreuses
sont les inventions qui demeurent iuellicaces durant des
siècles; nombreux sout, entre civilisations, les contacts qui
demeurent stériles. Seule la réunion des trois conditions
uécessaires est la cause sulHsanle du changement social.
Parmi les besoins, quels sont les plus importants? Ce sout
les plus modestes. Entendons par là non seulement ceux qui
soutliés à la vie économique, mais d'une manière générale
les tendances égoïstes lit vanité, la crainte ict les formes du
sentiment religieux qui en dérivent;. Les autres tendances,
les aspirations idéales n'agisseut que sur les « individualités
dirigeantes » ou sur les spectateurs désintéressés, mais inertes,
du mouvement social. Encore, chez les dirigeants, les senti-
ments idéaux sont-ils souvent mêlés à d'autres. Jamais un
ynisTlDSS OKNÉHAI.KS D1VRIKKS 27

changement social n'est donc exclusivement déterminé par


les sentiments les plus élevés de l'humanité.
Jamais un chaugemeut social n'est exclusivement déter-
miné par l'intelligence humaine. 11faut réduire le rôle ordi-
nairement attribué aux causes fiuules, aux vastes desseins.
L'homme n'a pas voulu inventer le feu; mais il a tuillé des
silex, et il s'est trouvé que, durant l'opi'ratiuu, une étincelle
sijailli. L'homme n'a pas voulu inventer lu poterie; mais il a
enduit d'argile, pour les consolider, les corbeilles daus les-
quelles il déposait ses aliments; et il s'est trouvéque l'argile
durcissait au feu. L'homme n'a pas voulu inventer le dessin.
mais, eu pulissant des silex, il a tracé des traits sur des roches
tt'iidres, et il s'est trouvé que ces traits formaient (les dessins
géométriques ou semblaient représenter des ligures humaines.
La grandeloi qui explique les inventions, c'est ln loi, énoncée
par Wundt, de l'hétérogenèse des fins, ou, suivant l'expres-
sion préférée par Vierkaudt, de la conversion des mobiles.
Dusmobiles élémentaires, humbles, voire aveugles et incon-
scients, déterminent des innovations utiles; l'homme, après
coup, rattache ces innovations à des aspirations plus hautes.
Il jouit d'un bieu nouveau uvaut de l'avoir désiré, et ne le
désire que pour en avoir joui; quand il croit inventer. l'iu-
vention est déjà faite. Ce sont ses actes, plus que ses idées,
qui déterminent les changements sociaux.
Kst-ceà dire que ces changements soient l'œuvre du hasaYd?r
Non,si le hasard, c'est l'absence de cause le livre tout entier
ii'csl-il pas destiné à prouver qu'il n'est pas de changement
social sans cause Oui,si, par le mot hasard, on désigne uue
causesans relation logique avecson éflet. Soitune tribu isolée,
possédantnue civilisation bienadaptéeàsacoustitutiouetàsou
milieu comment un changement se produira-t-il dans sesius-
titutions? Unetribu jusqu'alorséloignée peut entrer en contact
avec elle; une modification peut se produire dans les condi-
tions géographiques de son habitat le nombre de ses mem-
bres peut croître ou diminuer (p. 18ii. Aucunede ces causes
n'est « adéquate u à l'eflet produit les deux premières sont
toutes extérieures, étrangères à la civilisation qu'elles modi-
lient; et la troisième est du même ordre si le nombre des
habitants est modifié par une épidémie inévitable ou par uue
catastrophe météorologique. Or, cette disproportion de l'effet
par rapport à la cause n'est pas exceptionnelle; c'est, au con-
traire, lu loi générale. Hn ce sens, ou peut dire que les chau-
28 |/a.NER SOCIOUIUIQI'K.1UUU-JUO9

gements sociuuxsont l'œuvre du hasard en ce sens, on peut


J' lombattreles théories rationalistes de l'histoire. Eu histoire,
e même ne s'explique pas par le monte les institutions les
lus nobles out leur source dans les modèles les plus hum-
îles le grand ualt du petit, le contraire de son contraire
(l'absolutisme, en créant des consciences nationales, prépare
l'avènementdu parlementarisme). La loi de la conservation
est une loi tout « empirique » qui ne suppose entre les états
successifsdes civilisations aucun rapport ratiouuel.
Nous nous sommes borné à noter les thèmes priucipaux de
cet intéressant ouvrage. Nous n'avons à faire aucune réserve
sur les faits qu'il contient. Que toute innovation ait une pré-
histoire, que rieu ne naisse de rien, c'est le postulat de la
sociologiecomme de toute science. Et ce postulat est fécoud
nous considérons non seulement comme légitimes, mals
comme heureux tous les eflorts, signalés par M V., pour
trouver des antécédents aux institutions en apparence les
plus primitives. Peut-être aurait-il pu donner de ces faits une
collection plus complète et plus systématique mais ceuxx
qu'il nous offre sont exacts et les hypothèses par lesquelles il
supplée à l'observation sont acceptables.
Son interprétation est-elle entièrement justifiée Tout
d'abord, nous regrettons qu'il explique des faits si nombreux
et si importants par des conditions aussi vagues que « le
besoinou « la maturité d'uue société. Qu'est-ce,au juste,
que cette maturité? Une société est-elle mûre pour un chan-
gementquand elle possède les connaissances ou les croyances
qui en rendent possible la réalisation? C'est, croyons-nous, en
ce seus qu'il faut interpréter la pensée de M. V. Mais le
terme est équivoque.
D'autre part, tout en acceptant la loi de la conversion des
mobiles, on peut trouver que M. V. exagère le caractère
mécanique des inventions primitives. L'homme a d'abord
dessinésans le vouloir les premiers dessins sont des lignes
tracées dans une intention étrangère à l'esthétique. Soit. Mais
s'ensuit-il quel'intelligence n'a joué aucun rôle il l'origine dee
l'art? Encore a-t-il fallu qu'elle distinguât, dans les lignes
préalablement tracées, quelque régularité géométrique ou
quelque ressemblance avec un objet, un animal ou un homme
sinon, d'où serait venu le désir de reproduire ces traits avec
plus de régularité ou plus de fidélité 7 M. V. insiste avec
raison sur l'occasion accidentelle qui se trouve à l'origine des
QCBfTtO.V*(ÎIÎNKUAf.ESDIVERSES 29

institutions; mais encore a-t-il fallu la saisir encore a-t-il


fallu comprendre le parti qu'on pouvait tirer des événements.
Dévastesdesseins n'entrent pas dansla conscience des hommes
primitifs mais rien n'empêche de croire que des fins mo-
destes, des prévisions à très brève échéanceont'été nécessaires
pour amener les premiers progrès.
Enfin, si c'était le lieu, nous discuterions l'opinion de
M. V. sur la causalité sociologique. 11est vrai qu'entre l'in-
novation réalisée et chacune de ses conditionsil n'ya pas de
rapport logique. L'idée de l'inventeur s'altère en se concré-
tisant l'exemple d'uue civilisation étrangère n'est pas exac-
tement copié par la société qui l'imite. Maisc'estque la vraie
cause M. V. ne nous le contestera pas réside dans
l'ensemble des conditions. 11n'est pas interdit de penser que,
si l'on connaissait bien cet ensemble, oi| y lirait reflet. Cette
conception de la cause nous permettrait d'être, plus que.
M V. Iiii-niéme, fidèle au principe de conservation si la
couseet l'effet sont reliés par un rapport logique, dissimulé
il est vrai par la complexité des conditions, les changements
sociaux ne sont jamais que relatifs il n'y a pas de commen-
cementabsolu; il n'y a rien qui naisse de rien. P. L.

fi. CHATTERTONI11LL.Heredity and Sélection inSocio-


logy. I vol.,u7l p., 1007,Londres,AdamaudCli. Black.
On dirait que ce livre, écrit en Angleterre, a été conçu et
s'est développé dans l'atmosphère de discussionset de luttes,
à la fois philosophiques et politiques, de certains milieux
français il appartient il ce qu'on pourrait appeler la littéra-
ture positi vo-tradi tionalisto. C'est nous, d'ailleurs, qui faisons
tous les frais des statistiques ou des exemples relatifs à la
folie, à l'alcoolisme ouaux maladies vénériennes,par lesquels
l'auteur veut établir l'état pathologique des civilisations occi-
dentales. – La thèse centrale de M. Ch. H. est nette, déve-
loppée largement, avec, au passage, beaucoupde renseigne-
ments et de citations intéressantes si la sélection,loi suprême
du monde vivant. est la condition de tout progrès et même de
toute santé sociale, elle suppose sacrifice,ou au moins subor-
dination du plus grand nombre à une élite; par suite, elle
implique chez ce plus grand nombreune raisonde se sacrifier
ou d'accepter des conditions de vie, nécessairesau progrès de
l'espèce, mais défavorables à l'individu. Cette raison ne peut
30 [.ANNÉESOCWUKHyl'B.
tOlKMDOU
être fournie que par lu religion. Série, la religion est uu
prin-
cipe suffisant d'intégration sociale, parceque, seule, elle rem-
plit cette double condition. de favoriser la nécessaireconcur-
rence entre les peuples par le prosélytisme qu'elle
développe,
et d'attribuer un haut prix à la vie, en raison des espérances
ultra-terrestres qu'elle autorise, et de faire par là accepter la
lutte. Le socialisme, au contraire, prétend supprimer la
concurrence, et par suite, allant au rebours des lois natu-
relles, il ne peut produire que stagnation, lâcheté, décadence.
Quant au libéralisme, c'est une doctrine contradictoire qui,
d'une part, vante l'initiative et la libre concurrence, source
d'inégalités et de conflits, et, d'autre part, proclame les droits
de l'homme et l'égale valeur de toute personne humaine, ce
qui mène en droite ligue au socialisme. C'est le libéralisme,
tel qu'il a surtout triomphé en France depuis 89, que l'auteur
rend responsable du désarroi moral contemporain, manifesté
par toutes nos tares sociales augmentation des suicides
(M.Ch. H. use largemeut ici du livre de M. Durkheim), de la
folie, de l'alcoolisme, de la syphilis ou par les sélections à
rebours que produisent, dans les États modernes, laguerre,
le service militaire, l'oisiveté des riches, la fécondité des
classes pauvres et la stérilité des classes élevées, les mau-
vaises conditions du travail industriel, etc.
Les thèses de ce livre ont été maintes fois discutées
déjà à
propos d'ouvrages français. Elles paraissent ici particulière-
ment arbitraires, au point que le lien entre les prémisses et
les conséquences ne s'aperroit môme pas du tout sur plus d'un
point l'Commentla religion, et elle seule,pourrait-elleguérir
des maux tels que l'alcoolisme, ou le militarisme, ou les
inconvénients hygiéniques du travail industriel – * La
valeursocialeattribuéeà la religiondoit elle s'eutendrede toute
religion, ou seulement de telle ou telle, du catholicisme eu
particulier, qui a toutes les sympathies de l'auteur? Car le
prosélytismeconquérant n'est, sans doute, pas de l'essencede
n'importe quelle religion. – 3° Comment la religion, surtout
la chrétienne, pourrait-elle réparer les désastres causés
par
l'humanitarisme et l'idée de la dignité de toute personne
humaine, si ce sont là, de l'avis de l'auteur, des idées d'origine
chrétienne V – 4° Comment concilier les croyances religieuses
et surtout chrétiennes avec la doctrine scientifique de la lutte
aveugle entre les organismes et de la sélection impitoyable'
L'auteur veut-il dire que, si la foi religieuse est utile aux
qCESTIGXS UKXélttUK DIVERSE* 31

peuples qui la conservent, cela doit nous suffire, sans que l'on
ait besoin d'y croire ou de donner à ses dogmes un seus plau-
sible et concordant avec les idées scientifiques dont on s'ins-
pire? Ce serait l'idée de « lit religion bonne pour le peuple ».
si familière à nos truditiouiiulistes; et il aurait valu la peiue
que l'auteur s'expliquât sur ce point. – .> Enfin, le problème
central qui s'imposait, semble-t-il, à M. Cl».H. a été com-
plètement esquivé par lui n'était-ce
pas celui de savoir si la
sélection s'accomplit dans les sociétés selou les mêmes
pro-
cédés ou sous les mêmes formes qu'entre les organismes?
L'auteur dénonce les effets, désastreux pour la race, des
guerres et du militarisme quel est donc le genre de sélection
sociale dont il espère le salut pour les sociétés modernes Il
semble que ç'aurait dû être le but detout ce livre que de nous
l'apprendre; or, ou n'entrevoit même aucune réponse à cette
question.
Le livre s'ouvre par 200 pages de biologie, fort intéressantes
d'ailleurs, où est exposée la doctrine de la sélection d'après
Darwin et Weismann, et où la non-hérédité des caractères
acquis est considérée comme établie, et la sélection, comme
seule productrice des modificationsfavorables et du progrès
ce qui, au foud, ne s'eutend pas du tout, si la sélection
n'explique que la persistance ou la propagation des qualités
avantageuses, et nullement leur apparition. D. P.

A. MUER. – Essai sur les Révolutions. Paris, Giard et


Brière, I90K,303 p. in-8".
L'auteur s'eflorce de dégager les facteurs sociaux des révo-
lutions. Des questions relatives à la vie politique, celle-ci est
sans doute une de celles qui se laissent le moins bien déter-
miner au point de vue sociologique.L'auteur ne saurait
pré-
tendre avoir établi des lois bien précises. Son livre est
plutôt
descriptif qu'explicatif. Souvent aussi il se laisse entralner à
des considérations sans utilité pour son étude. Trouve-t-il,
par exemple, dans les inégalités sociales une cause de
troubles lls'étend longuement sur certaines de ces inégalités,
sans qu'on voied'ailleurs qu'une fermentation révolutionnaire
en doive résulter.
M. Bauer décrit successivementles antécédents des révo-
lutions. les'erises, puis les transformations effectuées. Les
causes sont de deux sortes causes individuelles, qui mettent
32 l'axxiîe sociolouiqck. iuoo-iws

1 fefl • m u *•
dans l'histoire une part de contingence impossibleà résoudre
en lois, et causes sociales. Les causes socialessont tout ce qui
peut amener une rupture d'équilibre dans les besoins des
classes, dans leurs habitudes, et à la suite desquellesl'échelle
habituelle des valeurs sociales se trouve rompue. Les mécon-
tentements résultant d'un trouble apporté à la fonctionsociale
amèneut une fermentation révolutionnaire; dans l'opiuiou
d'une partie de la société, il y a un renversementdes valeurs
morales; les décisions judiciaires ou gouvernementales ne
sont pas respectées la presse, les œuvres littéraires sont
pleines d'attaques contre le régime politique établi. Parfois,
à ces causes sociales internes s'ajoutent des causes venues du
dehors: une guerre malheureuse, par exemple, de laquelle le
prestige et l'autorité des gouvernants sortent diminués, – ou
encore l'agitation révolutionnaire des pays voisins, agissant
par imitation.
Puis l'auteur considère les crises révolutionnairesen elles-
mêmes. Elles se produisent en géuéral au centre politique de
l'État. Un idéal nouveau, exprimant en termes moraux, en
revendications de juslice, les aspirations de la classe révoltée
meut cette dernière. Le succès dépend et de la force du parti
en révolte et de la manière dont l'État réagit.
Enfin, le résultat de la révolution est la stabilisation du
nouvel état social. Les valeurs anciennes, la hiérarchie des
classes, leur situation économique sont modifiées.Le person-
nel judiciaire et gouvernemental, parfois bouleversé, se
recrute d'une autre mauière. En même temps, les idées
morales et politiques se changent peu à peu de manière à
représenter les intérêts de la classe qui a triomphé,et à four-
nir des principes qui légitiment ces intérêts. R. H.

Sociological Papers. Published for the Socinlorjical


Socivtij.
Vol. III, London, Macmillan. 1907.XI-38*p., iu-8».
On peut se demander si, dans l'état actuel des sciences
sociologiques, les travaux d'une société de sociologie,où des
discussions s'engagent entre savants qui n'ont eu commun
aucun principe de méthode, qui se placent aux points de vue
les plus opposés et qui partent de postulats irréductiblement
antagonistes, ne sont pas plutôt propres à augmenter la cou-
fusion des idées qu'à assurer les progrès appréciables de nos
études. Rien ne diffère davantage de l'œuvre d'organisation
GÉNÉRALES
QUESTIONS MVKRÏgS 33

que nous poursuivons ici. Cette remarque s'impose à nous à


Ja lecturedu troisièmerecueilannuel de la SoâologicalSociety,
dont nous n'entendons d'ailleurs nullement contester l'in-
térêt.
Lu moiliûdu volumeest occupée par des travaux et des dis»
eussions qui se rattachent à cette discipline que (laiton a
numiuée Eugénie»(cf. les Social. Papers,1, 1004,et le compte
rendu in .4t);t.Soc., 1~, p. )4'!<et qui est tout particu-
lièremeut eu honneur dans la Société. Cette discipline est
l'étude des influencesqui améliorent les qualités Innées de la s
race, et aussides mesures propres à assurer cette amélioration,
(tans la nation et dans l'humanité. Elle est plutôt biologique
que sociologique.
Ce qui, en somme, est en discussion, dans ce troisième
volume, c'est t'importance respective des facteurs purement
biologiqueset des facteurs sociaux dans l'amélioration pro-
gressive ou dans la régressiondu- type humain. Cette notion
amélioration du type humain, est bienindéterminée. Et cepen-
liant la formule que je viensde donner du débat est trop pré-
rise encore. Nous .assistonsà un conflitde tendances qui est
à peu près le suivant. La tendance que j'appellerai HOtklr,et
qui est uniquement représentéepar A. Thonson iThe saciolo-
ijicalnppeaïto Iriology),consiste à admettre volontiers que les
tares physiologiques, moraleset mentales des individus sont
dues aux conditions socialesdans lesquelleseux ou leurs ascen-
diintsont vécu, et que, par suite, une politique sociale d'inspi-
ration philanthropique, secourable pour les plus mal doués,
pourra largement effacerces tares; cette tendance se mani-
feste encore parla manière dont on oppose les fi us humaines
:iux fins animales, la sélectionsociale à la sélection naturelle,
l:i sociologiea la biologie. La tendance que j'appellerai hiolo-
ni<iueconsiste à nier l'importance des influencessociales daus •
l'améliorutioude la race, et, dune manière plus générale, à
réagir contre les doctrines qui admettent facilement que le
milieu physique même modifiel'individu et produit des modi-
fications transmissiblcs, pour insister au contraire sur l'im-
portance de l'hérédité et des caractères innés; elle se mani-
festeencore par sa défianceà l'égard de la politique sociale,
par sa réaction contre les excès de la philanthropie, par une
certaine impatience à l'égard d'une sociologiequi détourne»
rail l'homme de l'amélioration dutype individuel; elle aboutit
enfin à l'organisation d'une sélection méthodique des indi-
K. Ui'KMiKiu.
– Aimiiesotiul., t'.HlS-IflOU. :i
34 L'ANNÉE 1(100-1909
SOCIOLOUigUK,
vidus les plus sains et les mieux doués, analogue à celle que
pratiquent les éleveurs, à une réglementationde la repro-
duction.
Il faut remarquer que l'idée que tousces auteurs, y compris
Thomson, semblent se faire de la sociologie,est bien confuse.
Elle est poureux quelque chose commeune philosophie de la
vie ensociété enmême temps qu'unart social.Malgré les titres
tie leurs mémoires, ils ne posent pas le problème méthoclolo.
gique des rapports dela biologieet dela sociologie,telque nous
l'avons vu si souvent discuté. D'autre part, il est curieux
de voir la polémique entre biologistes au sujet de l'impor-
tance respective de l'hérédité (ycompris les variations spon-
tanées dans le germe) et de l'adaptation au milieu ou de l'in-
fluence du milieu, prendre lu forme d'un couflit entre biolo-
gistes et sociologues(dans un sens peu précis du mot). Milieu
physique et milieu social sont cependantdeux choses fort dif-
férentes, et l'action du milieu social ne consiste pas princi-
palement, comme on parait le croire, dans les efforts que
peuvent faire certaines sociétés pour agir sur la constitution
physiologique de l'homme par des mesures d'hygiène, par la
lutte contre la folie, la tuberculose ou l'alcoolisme. Quand il
serait établi que le perfectionnement de la race réclame plutôt
la sélection des mieux doués que l'assistance aux dégénérés,
la réglementation de la reproduction plutôt que la lutte di-
recte contre les conditions du milieu social auxquelles on
attribue l'alcoolisme ou la tuberculose, une question impor-
tante, capitale, de politique aura été résolue, mais nous ne
voyons pas en quoi la sociologie, pour peu qu'on ait une
notion nette de son objet et de sa méthode, aurait été subor-
donnée à la biologie.
En dehors de cette discussion nous ne voyonsà signaler que
quelques mémoires.
H.-G. Wells (The so called scienceofsociolngij)conteste à la
sociologiele droit d'exister comme science, parce que la réa-
lité sociale est individuelle et singulière à un plus haut degré
que toute autre réalité, et parce qu'elle ne peut être étudiée
impartialement. Elle ne peut être qu'un art, une philosophie
d'histoire et une utopie. Mrs Sidney Webb fait de brèves
et pénétrantes remarques sur les Méthodesd'inceiliyalion
(enquêtes et interviews, expérimentation, différencedu docu-
ment et de la littérature, valeur et rôle de la statistique).
Enfin Crawley, dans une communication très brève, a traité
(JKXK1UUW
QUESTIONS DIVERSES 33

de l'origine et île la fonction de la religion. Il fait de lu reli-


gion « une certaine qualité de l'organisme nerveux, un ton,
un tempérament ou unediatlièse psychique » qui se manifeste
u dans les crises biologiques de la naissance, de la puberté,
du mariage, de la maladie, de la mort et des funérailles». Elle
mpour origine la voloutéde vivre et sa fonction consiste dans
Fiidlnnation et la consécration de la vie. P. V.

Annales de l'Institut international de Sociologie, pu-


bliées sous lu direction de René Wortns, t. XI. Paris, Giard
et Brière, 1907, p. SS8,in-H".
Ce volume contient les travaux du Congrès international
tenu à Londres en juillet l*J0fi.Le sujet à l'étude était la ques-
tion des « Luttes sociales ». Une première catégorie de mé-
moires n'ont fait qu'envisager la question dans sa généralité.
M.Novicow (ait la critique du « Darwinisme social », tel qu'il
a été formulé par Spencer il conclut que l'extermination des
moins adaptés n'est point indispensable au progrès, que le
vrai facteur du progrès, c'est la lutte coutre le milieu phy-
sique, lutte qui, en uu sens, est l'existence même. M. Lester
Ward rétute M. Novicow, montre que les critiques adressées
au darwinisme social reposent sur une ignorance de la ques-
tion et précise le sens dans lequel il faut entendre cette doc-
trine. M. Xénopol veut montrer, par l'histoire, que, dans le
passé, la guerre a ét<«liée à tous les grands faits de la civilisa-
tion et que, dans l'avenir, elle en restera encore un agent
nécessaire, car, malgré les maux qui l'accompagent, elle est
toujours utile au vainqueur, quelquefois au vaincu lui-même.
M. Gumplowicz examine selon quel principe se forment les
groupes sociaux, les raisons qui poussent ces groupes à lutter
entre eux, et enfin, encore une fois, la fonction de ces luttes
qui sont, d'après lui, un facteur du progrès humain. M. de la
(îrasserie classe les luttes sociales il difiéreuts points de vue
selon les éléments sociaux qui entrent en conflit, selon leur
direction, selon qu'elles sont ollensives ou défensives, selon
leurs moyens (la violence,la ruse ou la justice) il indique en
terminant leur évolution probable dans l'avenir. M. llalpérine
nnalyse la notion de lutte sociale, et donne à son tour une
classification de ces luttes. Tous ces mémoires, on peut le
prévoir par leur sujet même, ne sortent guère des notions très
générales et du raisonnement a priori.
36 l'ANSSk gOUKiLOGIUl'K.
iiHMMIU

Une seconde catégorie de mêmuireg ont envisagé un


sujet
plus précis et ont pu, pur suite, serrer de plus près les faits.
M. tiarrissuu a recherché les causes du caractère
pacifique
qu'eut revêtu les luttes sociales eu Angleterre il croit les
trouver dans les idées morales, religieuses,
pliilauthropiques
très agissantes dans ce pays. AI. Abrikossof, à
propos des
derniers événements de Russie (guerre
russo-japonaise et
luttes sociales concomitantes), étudie la naissance dans ce
pays
du sentiment de la solidarité, phéiiomône
qui, seul, rend les
luttes socialesfécoudes. M. LesterWard étudie, dans un second
article, la « Sociologie des partis politiques », et présente à
ce sujet quelques considérations intéressantes sur les
partis
politiques et leur évolutiou en Amérique et eu Angleterre.
MM.Arcoleo et Garofaloexpriment quelques observations sur
l'évolution politique et sociale de l'Italie. Les mémoires de
MM. Stein et Ad. Landry sont des mémoires
historiques;
Il. Stein expose les idées de Spencer sur les laties
sociales,
leurs causes mécaniques et leurs fonctions; M.
Landry, les
id.'Bsqu'a développées sur le même sujet M. Otto Kfïertz, son
ami et, il le déclare, son maître. Signalons aussi les mémoires
assez longs de M. Kaclionowskisur les meneurs et la
foule,
et celui de M. Lew Philippe qui veut montrer
que l'avène-
meut du collectivisme pur serait nécessairement
éphémère;
malgré leur sujet plus déterminé, ces mémoires ne sortent
guère du raisonnement abstrait.
Dans un troisième groupe, nous rangerons deux mémoires
dont les auteurs sont sortis réellement des
généralités
abstraites et vagues pour étudier des faits. M. Lochtraite de la
lutte pour le travail et de la question du
chômage; son étude,
qui n'a pas d'ailleurs de conclusion dogmatique, renferme
des faits intéressants et. en particulier, un certain nombre
de statistiques sur le chômage à Londreson dans l'ensemble
du Royaume-Uni.M. Niccforodonne le résultat de la
compa-
raison qu'il a établie au point de vue
physique et mental entre
deux groupes de personnes, les unes d'un milieu
pauvre, les
autres d'un milieu aisé, les deux groupes étant nombreux et
déterminés de telle façon que les différences constatées ne
puissent être attribuées qu'à des causes inhérentes à la con-
dition sociale. La méthode est excellente. Seulement les résul-
tats tels que M. Niceforo les rapporte, c'est-à-dire en
gros,
étaient faciles à prévoir il aurait été intéressant de noter
exactement et par le menu les phénomènes constatés, le
yuE^riu.vs r,K.Ni5nAr.E!i oiveiuks 37

résultat exact et particulier des pesées «t des mensurations de


toute espèce qui ont été faites, de consigner d'une façon pré.
cise les statistiques diverses et de'les exprimer au besoin dans
des tableaux ou par des courbes. A. A.

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LIME.NTANI.La prévision©dei fatti social!. Bocca,Milan,1907,
p. VIII-410,in-8".
DL'PRAT (G.I..)- – La solidarité sociale. Ses causes, son évolu-
tion, ses conséquences(Préface par (!. Hiclmrd).Paris, Doin,
1897,p. XVI-354, iu-8".
VANBRL'VSSEL (E.). La vie sociale et ses évolutions. Paris.
Flammarion,1907,p. 390,in-8u.
R1DGWAY ;\V.).– Addresstothe Anthropologioal Section. liri-
tisltAssoc.fortheadeanctmentof Science.Dubliu,1U08.extr., 10p.,
in-8". (Montre,entre autres, l'Importancedes croisements,des
conquêtes,des relationsinternationalespour la formationdeslan-
gues et pour l'établissement,non pas des races, mais des types
humains.]

IV. PSYCHOLOGIE
SOCIALE
ParMM.Boi-glêet David.

W. MACDOUGALL. An Introduction to social Psycho-


loffy. Londres, Methuen, 1908,p. XV-355iu.8°.
La psychologie sociale, selon l'auteur, doit montrer com-
ment, étant donnéesles tendances et capacités natives de l'es-
prit humain, s'élève sur elles la vie mentale des sociétés, et,
inversement. comment cette vie réagit sur le fonctionnement
et le développement de ces mômes tendances et capacités
chez l'individu.
Ce sont ces données natives, sensihlement les mêmes chez
les hommes de toute race, et déjà visibles chez beaucoup
d'animaux, que la présente Introductions'eflorce de définir et
de classer. La psychologiede M.M. 1). est résolument « dyna-
miste » et « volontariste » (p. 10). Il s'élève avec force contre
les postulats de l'utilitarisme qui présente l'homme comme
un animal calculateur et guidé par la seule recherche du
plaisir. En fait, le bonheur est tout autre chose qu'une
somme de plaisirs. Et les instincts sont autrement puissants
I'jYUHOLOUIE SOCIALE 39

que le calcul. M. M. D. appelle Instinct toute disposition


psycho-physique, iuuée ou héritée, qui détermine, en face
d'une catégorie d'objets déterminés, une réaction spécifique,
accompagnée d'ailleurs de représentations et d'émotions
(p. 29). A cause de leur manque de spécificité, il refusera de
classer parmi les instincts proprement dits la tendance à
l'imitation (dont il distingue cinq formes) et la tendance au
jeu. Mais il étudiera, l'un après l'autre, l'instinct de lafuite et
l'émotion de la peur, – l'instinct de la répulsion et l'émotion
du dégoût, – l'instinct de la curiosité et l'émotion de l'éton-
nement, – l'instinct de la combativité et l'émotion de l'an-
goisse, les instincts de soumission et d'indépendance [Self-
iilmsementet SeCfrmertion), – les instincts parentaux et les
émotions tendres, – puis l'instinct grégaire(qu'il distingue de
l'instinct de sociabilité (le buffle n'est rattaché à ses compa-
gnons par aucun lien proprement social cependant, séparé
du troupeau, il est perdu), enfin les instincts d'acquisition
et de construction.
Chez nombre d'animaux, ces instincts se retrouvent. Com-
ment l'homme seul s'élève-t-il à la conscience de soi? Il y est
précisément aidé par l'action de la société. La « moralisation
dft l'individu », dit l'auteur, on pourrait soutenir que c'est
tout l'objet de la psychologie sociale. Il montre ici, par une
série d'analyses ingénieuses, comment de la peur desdiverses
autorités sociales, l'individu a pu s'élever peu à peu, eu rai-
son même de la multiplication des cercles sociaux et de la
diversité de leurs injonctions, au respect de soi, condition
d'une moralité autonome (p. 189-228).
Dans la deuxième section de son ouvrage, M. M. D. veut
établir par quelques exemples l'utilité des recherches aux-
quelles il s'est livré sur les instincts primaires de l'huma-
nité. Ne reconnaît-on pas, à la base des religions, les instincts
de crainte, de curiosité, et de soumission? Dans l'accroisse-
ment actuel des grandes villes. ne faut-il pas voir indépen-
damment des calculs qu'on prête aux immigrants une
preuve de la vitalité des instincts grégaires, libérés seulement
par un mouvement de civilisation qui retire aux coutumes la
plus grande partie de leur puissance localisante? L'instinct
d'acquisition, de même, en poussant l'homme à accumuler
au-delà de ce qui lui est immédiatement nécessaire, a contri-
bué sans doute à la genèse du capital. Qui a compris la force
native de l'instinct de la combativité saura le voir à l'œuvre,
40 L'ANSÉB S0CIOLOOI0UK.1WU.I90Ï

sous des formesdifférentes,à travers toute la civilisation.


(L'auteur,complétantles théories'de Groossur lu fonction
éducativedu jeu, attacheune grande importanceaux senti-
mentsd'émulationqui fout cortègeaux sports c'estun des
leitmotire,bienanglais,de son livre.)
Cequecesexempleslaissentapercevoirde plusclair,c'est
combienIl seraitnécessairede compléter,par unepsycholo-
gie proprementsociale, les explicationsdu genrede celles
queproposeM.M.D. Carenfin, parmi ces instinctsinnés et
universelsqu'il classe, l'auteur reconnaltlui-mêmequ'il en
est qui prennent,à certainesépoques, un développement
inattendu,tandisqu'àd'autres époquesleur rôlese réduit.Et,
en tout cas, ilsrevêtent,pour obtenirsatisfaction,desformes
très différentesselonles tempset leslieux. Lesvariationsne
s'expliqueraient-ellespas par la structure mêmedessociétés
et lesbesoinspropresà l'êtrecollectif'?C'estsur ce pointqu'il
serait tempsdeconcentrerles recherches. C.B.

EDWARD ALSWORTH ROSS. – Social Psychology. An


outlineandsourcebook. New-York,The MacmillauCom-
pany,1909,XVI-372 pp., in-12.
Leshommessont conduitspar leursintérêts àlacoopération
ouau conflitet en viennentainsi à former des groupeset à
inventerdesformessociales.L'étudede cesgroupeset formes
constituela sociologieproprementdite, qui est donc une
morphologie.Les états psychologiquesdes groupes sont
l'objetdela sociologiepsychologique qu'il vaut mieuxne pas
séparerde la morphologie,et qu'il ne faut pas confondre
avecla psychologie socialedont traite le présentlivre.
Cettepsychologie socialeétudieles uniformitésstatiqueset
dynamiques(planesand cvrrenls)qui précèdentet déter-
minentla formationdes groupes,et parmi ces uniformités,
celles-làseulesqui résultent d'actions intennentales,par
oppositionà cellesqui sont directement produitespar le
milieuphysiqueou par la race. C'est une inter-psychologie.
M. Rossse réclamede Tarde dans sa préface et nous
retrouvonsen effet,fortementmarquésde finalité,lesconcepts
très générauxsouslesquelsTardeclassaitles faitssociauxet
Commeilsont étéici mêmeplu-
par lesquelsil les expliquait.
sieurs foisexaminés,nous pouvonsnous contenterde ren-
voyerà cequi en a étédit.
LUS CONDITIONS SOCIUUiGIQliKS DE I.A CONNAISSANCE
4)

â Ce livre, ingénieusement disposé, est à l'usage des étu-


l. (liants chaque chapitre est suivi A'emcku, où se manifeste,
avecl'inteution didactique, la préoccupationd'une
y technique
murale analogue à celle qui iuspirait l'enseignement de
> F. Kauh. u. D.

Sdi'ILUCE(F.). il problema dello psicologie oollettlvaee


y socialee l'opera di Pasquale Rosei. Milauo,PaUrmo,Nupoli,
8 Suiidron,in-8",p. 84.
4 v. HKCHTBRE\V.(\V.).Die Bedeutung der Suggestion im
soaialenLeben. Wiesbadcn,Heritmanii,1905.

| UltAiilllCBSCO.
– Le problème de la conscience.Étudepsydio-
«idologique.Paris, Alcm»,1907,p. 2W. in-8».
if
i
2 V LESCONDITIONS DKLACONNAISSANCE
SOCIOLOGIQUES
jM Par MM.
l'ar MM,E
1:. Dl'rkhkim
!JCRK"p.\
i?tC.BototÈ.
C.80l"¡L~,

Si c'est pour la première fois que la


rubrique ci-dessus
ii apparaît dans VAnnée, il s'en faut que la question qu'elle
pose
;,] nous soit restée jusqu'à présent étrangère. Elle est, au con.
i; Irnire et depuis longtemps, au premier rang de nos préoccu-
z palions. Sans parler de l'étude que nous avons fait
paraître
; ici même sur les Formes de
primitirt» clamfication,de celle
de M. Hubert sur la HeprJtentationdu temps(Hubertet Mauss,
|
£ .Mrlrt«j«d'hutoirt religiemr, p. 18«i, on trouvera, dans chacun
de nos volumes, classés sous le titre
liepn'sentationnn-ligieum
| </V(/eset de phénomènesnaturels, un certain nombrede livres
et («articles qui sont analysés de ce point de vue car,
| puisque
la religion est uue chose éminemment sociale,chercher
quels
fadeurs religieux sont entrés dans notre représentation du
? mondetant physique que moral, c'était bien
essayerde déter-
•: miner quelques-unes des conditions sociologiques de la con-
naissance.Seulement, comme, dans ces travaux, la connais-
.<
:; sauceétait étudiée surtout dans ses rapports avec la religion,
] nous ne pouvions guère les séparer des autres ouvragesqui
; ressortissent à la sociologie religieuse. Cette raison nous a
obligé,cette an née encore,à faire figurer danscette mômesec-
liondes ouvrages, comme celui de PechuelLoeschesurla reli-
jj;
giondesBavili, qui pourtant intéressent directement laques-
'1
42 L'ANNÉE SOCIOLOGIQ'R. 11108.19011

tion des classificationset des catégories.Il y avait pourtant


intérêtà poserce grave problèmeà part de tous les autres.
C'est pourquoinous ouvrons aujourd'hui un chapitre nou-
veau qui, nous en avons l'assurance, ne restera plus vlùo
désormais;car, au moment mêmeoù nous paraissons,des
ouvragesviennentd'être publiésou sont en préparationqui
sont précisémentcousacrésà une étude sociologiquede la
connaissance.

JÉRUSALEM (Wiuiblk). Soziologle des Erkennens.


DieZukunft,1909,p. t%-UG.
Cetarticleest, sans doute,bien généralet bienbref. Nous
croyonspourtantdevoir eu présenter une analyse, d'abord
parcequ'il est intéressant,et aussi parcequ'il va nous per
mettre d'indiquerdans guels termes doit, suivant nous, se
poserle problème.
M.J. part des mêmesprincipesdont nous nousinspirons
ici. 11admetquela sociétéest la sourced'unevie originale.
mi geneiïs,qui se surajouteà celle de l'individuet la trans-
forme.Or, ce pouvoir créateur n'est pas moinsefficacesur
l'intelligenceque sur le sentimentet la volonté.
C'estsurles représentationsreligieusesquesefait le mieux
sentir cette influencede la société. Toutesces conceptions
d'âmes,d'esprits,de démons,de forces mystérieusesdisper-
séesà traversla nature seraient restéesà l'état de fantaisies
sans consistanceet sans durée, elles n'auraient,par suite.
jouéaucunrôledansl'histoirede la pensée,si ellesn'avaient
été rien autrechoseque desrêveries purementindividuelles
Maisles hommesse sont communiquéleursidéeset leurs sen-
timentset,constatantleur accord, se sontmutuellementcon-
firmesdans leurs convictions.En devenant collectives,les
impressionsse sont fixées, consolidées,cristallisées.C'est
cette opérationque l'auteur appelle une « condensation
sociale», tiw>unsinlf Virrlichlung.Voilàce qui a donnéau
mondeimaginaireoù se meut la penséereligieusetoutesles
apparencesde la réalité.
Notre représentationempirique de l'universne s'est pas
forméed'uneautre manièreet a le mômecaractère.Lanotion
que nousnous faisons d'une chose tant que cette notion
n'est pas construite d'après des procédésrigoureusement
scientifiques est d'ordre essentiellementpratique; elk'
LES CONDITIONS Snriii|.OGIQCES DK LA COXNAISSASCE 43

exprime avant tout les réactions motrices que cette chose


| provoque de notre part, suivant la façon dont elle affectenos
tendances vitales. Aussi deux choses qui déterminent des
j
réactions similairessont-ellestout naturellement rapprochées
« ]iar l'esprit; elle « tombentsousunmêmeconcept.Or, chacun
de nous voit commentles autres réagissent en facedes objets
l qui se présentent dans l'expérience et commenousnous imi-
tons mutuellement, il tend à se constituer, par voie d'em-
| prunts réciproques, comme un type commun de réaction qui
j exprime la manièredont lu moyenne s'adapte aux choses de
sim entourage. A ces réactions typiques correspondent des
|
notions qui se trouvent donc être, elles aussi, les produits
« d'une condensationsociale ». Le langage,qui est lui-même
;; une institution sociale, achève de consolider les résultats de
rnllBopération.
]
Mais. à côté du facteur social, il y a le facteurindividuel
dontM.J. est loinde nier l'importance. Dans tousles cas dont
il vient d'être question,l'individu n'agissait et ne pensait que
r d'inie manière moutonnière; il suivait le groupe docilement.
i Or, il n'en peut être ainsi qu'autant que l'individualité n'est
j pasdéveloppée. Au contraire, à mesure que la personnalité
a individuelle se dégage de la massesocialeet se fait une phy-
sionomiedistincte, elle entend aussi penser à sa façon. C'est
<lelà que serait née la pensée scientifiquequi, suivant M. J.,
1 serait la véritable connaissance (p. 243).Jusque-là, on consi-
démit comme vrai ce qui était généralement regardé comme
'< tel c'est l'accord des esprits qui était le signe de la vérité,
y Maintenant,le vrai, c'est ce que l'observationexactedeschoses
I fuit apparaître comme objectif. Le sentiment d'individuation
i estsi bien immanentà la science que, si rien ne le contenait,
il risquerait de se laisser aller à des excès qui la stérilise-
|
raient. Car, pour que les vérités scientifiquessoient ellicaces,
j pour qu'elles puissent se traduire en actes, il ne suffit pas
qu'elles soient proclamées; il faut qu'elles soient reconnues
:(¡ commetelles par la collectivité. Si elles étaient niées, elles
.1 Miraientcommesi elles n'étaient pas; elles resteraient pure-
ment spéculatives, sans effet sur la conduite. II faut donc
1 que le sens social reste présent à la recherche scientifique
et l'empêche de dévier. Mais ce n'est pas la science pro-
prement dite qui peut tenir en haleine ce sentiment et
'1 contenir les outrances du facteur individuel. C'estl'affaire de
¡ la sociologie.
,1
4i l'annkk sociolouiqi'b. juoimuOs

Telle est la thèse. Nous n'avons pas besoin de dire que nous
en admettons le principe. Mais nous craignons que la manière
dont Il est présenté et justifié ne le ruine ou, tout au moins.
n'en affaiblissesingulièrement lu portée.
En effet, si vraiment le rôle que M. J. attribue à la société
est bien le seul qui lui revienne, il faut dire que son inlluence
sur la vie intellectuelle, grande dans le passé, serait destinée
à aller de plus en plus en diminuant. C'est elle qui consoli
derait les imaginations mythologiques en dogmes obligatoires.
en véritésincontestées. C'est elle qui construirait la représen-
tation vulgaire de la nature. Mais la science ne serait pas de
sou ressort; elle serait œuvre individuelle. Nous devrions à
la société les notions simples, grossières mêmes, qui nous
servent journellement à diriger nos mouvements; mais elle
ne serait pour rien dans les représentations plus fines qui
ont, avant tout. pour objet d'exprimer les choses telles qu'elles
sont objectivement, avec toute la complexité de leurs carac-
tères méthodiquement analysés. En définitive, son action ne
serait pleinement normalequ'autant qu'elle ne s'exerceque sur
la pratique, et elle ne se ferait sentir utilement sur la connais-
sance qu'autant que celle.ci est mêlée à l'action et lui est
subordonnée. Mais dans la mesure où les besoins proprement
spéculatifs, cognitifs, deviennent autonomes, c'est par des
moyens d'une autre sorte qu'ils demanderaient à être satis-
faits. Dès lors, le rôle de la société et de la science des socié-
tés se bornerait à contenir la tendance antisociale qui est
inhérente à la spéculation pure, en rappelant perpétuellement
à celle-ci les nécessités de l'action. ·
Mais, en réalité, la science est chose éminemment sociale.
si grande que puisse être la part qu'y prennent los individus.
Elle est sociale parce qu'elle est le produit d'une vaste coopé-
ration qui s'étend non seulement à'tout l'espace, mais à tout le
temps. Elleest sociale parce qu'elle suppose des méthodes,des
techniques qui sont l'œuvre de la tradition et qui s'imposent
au travailleur avec une autorité comparable à celle dont sont
investies les règles du droit et de la morale. Ce sont de véri-
tables institutions qui s'appliquent à la pensée, comme les
institutions juridiques ou politiques sont des méthodes obli-
gatoires de l'action. La science est encore chose sociale parce
qu'elle met en œuvre des notions qui dominent toute la pensée
et où toute la civilisation est comme condensée ce sont les
catégories.I) s'en faut donc que le rôle de la société cesse la
MM CONDITIONS SOOIOLOGIQCES DR LA COXNAISSAXCK 45

oii commence le domaine de lu pure Rpéculatiou car la spé-


eulatloureposesur des bases sociales.
M.J. u'aurait pas ainsi exclu la société de la science, s'il ne
"i s'i'.lait pasmépris déjà sur la part qu'elle prend dans la genèse
î des croyances religieuses et de la représentation empirique
du monde. S'il fallait l'en croire, elle se serait bornée à fixer,
• à cristalliser des représentations individuelles, Celles-ci, en
). devenant collectives, auraient pris plusde loree de résistance,
? plus d'autorité; mais elles n'auraient pas, pour autant, changé
tic nature. Si l'intervention sociale n'avait d'autre effet que de
> fortifier, en les corroborant les unes par les autres, les impres-
sinus des individus, elle n'aurait rien eu d'original et de
» cn-ateur; elle n'aurait pas suscitédes représentations neuves,
l dilïérentesde cellesquerindividupeutélaborer parses seules
i forces. Mais, eu (ait, l'action de la sociétéest autrement impor-
i laulu et profonde. Elle est la source d'une vie intellectuelle
if nui gtneris qui s'ajoute à celle de l'individu et la métamor-
une puissance
] pliuse. La pensée sociale, eu ellet, a, d'une part,
j diction et de création que ne saurait avoir celle de l'individu,
I parce qu'elle estdueà la collaborationdune pluralité d'esprits
| et u une collaboration qui se poursuit même pendant la suite
i des générations. D'un autre cùté, la société est une réalité
nouvelle, qui enrichit notre connaissancepar cela seul qu'elle
î si; révèle aux consciences; et elle s'y révèle par cela seul
qu'elle est. car elle ne peut être que si elle est pensée. Et
comme elle n'est cependant que la forme la plus haute d« la
nature, c'est la nature tout entière quiprend d'elle-même une
j, plus haute conscience dans et par la société.
.1 C'est donc dans le mécanisme spécial de la pensée collec-
;1 tive et dans les caractères spéciaux de la réalité collective
qu'il faut aller chercher la contribution véritablede lasociété
:1 ii la formation de nos idées. Mais nous touchons ici à une
erreur qui est encore trop répandue et que nous considérons
| tuni me la pierre d'achoppement de la sociologie.Oncroit trop
souvent que ce qui est général est social et, inversement, que
le type collectif n'est autre chose que le type moyen. Tout au
¡ contraire, il y a entre ces deux types une distance immense.
1 La conscience moyenne est médiocre, tant au point de vue
intellectuel que moral la consciencecollective, au contraire,
t'st infiniment riche puisqu'elle est riche de toute la civilisa-
j
tion.
E.I).
46 L'AXNKE SOCIOLOGIQUE. IMU-l'JO'J

E. DE ROBERTY. – Soolologle de l'action. La genèse


sociale(lek raison et lesoriginesrationnellesde l'action. Bibl
de philos. couterap. Paris, Alcan, 1908,Xl-366 p. iu-8.
Dans ce nouveau résumé-programme, M. de R. développe
et précise, en les distinguant des conceptions voisinesde l»
sienne, les théories esquissées dans ses divers essais sur « 1»
morale considérée comme sociologieélémentaire » (/,« Socio-
logie, l'Éthique, Le Psychismesocial, – LesFondements
del'Éthique,– Constitution (lel'Éthique,~lfouoeau programme
de sociologie).C'est principalement, en raison môme de leur
vogue, contre les tendances pragmatistes que M. de Roberty
prend cette fois position.
Ases yeux, la morale, en devenantde normativeexplicative,
ne peut plus être autre chose qu'une sociologie|de l'action,
et une sociologie de l'action ne peut être elle-même que
l'application d'une théorie de la connaissancesociale toute so-
ciologieest. en sou fond, une connaissance de la connaissance,
une « gnoséologie» (p. 48i.
Qui dit surorganique, selou M.de R., dit du môme coup
interconscientiel(p. 7j. Les phénomènessociaux sontessentiel
lement constitués par « l'interaction » des consciences les
unes sur les autres.
Le fait de conscience, à vrai dire, peut n'être que bio-psy-
chique. Maisle fait de connaissance est clairement l'œuvre de
la société. C'est seulement par la multiplicité de la continuité
des interactions qu'une expériencedevient possible, qu'une
méthodese constitue, que des sont élaborés. Seule-
ment alors, en môme temps que le moi devient nous, le sujet
devient objet. Toute objectivation suppose une socialisation
préalable. Ce n'est donc pas la conscience et l'intelligence au
sens vulgaire du mot, c'est la connaissance et la raison quii
sont filles de la cité (p. 139),
Par cette théorie qui lie étroitement l'intellectuel et le
social, XL de R. pense avoir trouvé un juste milieu entre
l'école matérialiste, qui considère la psychologie comme un
simple chapitre de la biologie, et l'école idéaliste, qui fait de
la psychologie une science abstraite et commeen l'air (p. 105,.
Cette même théorie lui permettra de réagir contre les tou-
dances pragmatistes, dont il découvre l'origine nonseulement
chez Kant (primat de la raison pratique) ou chez Nietzchc
(exaltation de la volonté), mais chez Comte (synthèse subjec-
DELACUSXAISSANCE47
SOC|OUl(lIG.L<B-<
LESCO.NDITIO.NS

tive suprématie du fait moral) et chez Marx(dominationdu


fait économique; (p. 251). j.
En effet, si l'élément intellectuel se développepar 1 iuter-
eu der-
action des consciences, l'action sociale n'est jamais,
moins
nière analyse, qu'une répercussion, d'ailleurs plus ou –
lointaine en vertu de laloi iepréastiou ou de retard de
ce développement. Les formes de la conduite ne fuut finale-
ment que traduire des progrès de la pensée analytique et
hypothétique, puis synthétique, puis symbolique.
La méconnaissance de ce tréfonds intellectuel, c'est, selon
M.de R., le défaut commun aux théories qui définissent les
faits sociaux par l'imitation ou par la contrainte. C'est tou-
le choix de nos
jours notre conception du monde qui guide
imitations. Et c'est à elle encore que nous obéissons quand
nous nous laissons contraindre.
Les thèses de M. de R. rappellent à notre attention les
tra-
représentations collectives, plus– oumoinsanciennes, que
duisent les pratiques sociales; et sansdoute ce mouvement
de reactiou autipragmaliste n'est pas inutile à l'heure
actuelle. 1)'autre part surtout, et en avertissant que le déve-
l'interaction
loppement de la raison peut 's'expliquer par
même des consciences, M. de R. amorce des recherches
fécondes.Le malheur est qu'il ne fait que des amorces et s'en
tient encore aux programmes généraux, plus qu'il n'arrive
aux démonstrations précises. Caron ne saurait compter pour
telles les passages où il indique brièvement en quel sens
l'interaction a pu agir sur l'associationdes idéeset l'attention
commel'abstraction-
l p.8,9)ni ceux où il présente le totémisme
aucôtreet esquisse, entre son rôle intellectuel et celui que
uu
remplit actuellement le socialisme(p. UH;, rapprochement
Inattendu. Montrer par l'analyse d'un certain nombrede faits
nait de telle
comparés, comment telle habitude intellectuelle
situation sociale, ce serait faire œuvre plus utile que d'allir-
luiTune fois de plus que la raison est fillede la cité.
C. B.

IIOBEHTY (EuiiÉxBub). La genèse sociale de la raison et les


origines rationnelles de l'action. Réponseà quelques objeo-
tions. Rev.desynthèsehht.. XV,p. 1-28.

l'AOANO [K.). La tecria della oonoseeazae le sue attinenze


oon lo studio della sooieta. Rie.M. d. «oew/ XI, p. 227-253.
48 L'ANNÉESOCIOLOaiQCE.190C.1UD9

SCH.NEIDEH(H. Kultur und Deaken der alten Aegypter


(2«édiO. Hntu-iekluugngtsehiehte
(1erMenscli/mit
[Phylogeiieliscl*
l\ .\XXVI.SUSp., in-»".
Psychologie,
INO(V.). Number conoept among the aboriginal tribes of
Formosa. TheJour»,of the Anlhrop,Societyof Tokyo,
sept. 190T.
BAUGE(1,M.). The Early numerals. CkstkalRtvitv. XX s
p. 250-207.

VI. KTHNOURAP1UE,
HISTOIREET SOCIOLOGIE
ParMM.%1,%rss
et1'80UI.

S. R. STEINMETZ. – De Studie der Volkenkunde. L-,


Haye, Nijhoft, 1907. De Beteekenls der Volken-
kunde voor de Studie van Menseh en
Maatsohappil
Nijhofl, l9l)8,4Sp.,in-8°.
Suivant M. S., taudis que la sociologieexplique ce
qu'il
a de plus général dans les sociétés humaines, les conditions
de la vie commune et les divers types de sociétés, la Yoelkn-
kuwtese divise en deux parties l'ethnographie et l'ethnolo-
gie. L'une et l'autre traitent des peuples non civilisés, non
occidentaux. Maisla première étudie chaque peuple
séparé-
ment la seconde compare, de manière à expliquer non seule.
ment les caractères que les peuples ont en commun, mai1
même ceux par lesquels ils s'opposent.
Ces divisions de la science ne nous
paraissent correspondre
qu'à une répartition scolaire du travail, et non à la réalité.
Il n'y a pas deux sciences, l'une qui décrit et l'autre qui coin
pare. On ne peut comparer que des choses que l'on a com
mencé par décrire, et une description qui est étrangère à toute
comparaison risque d'aller au hasard. Encore bien moins
pouvous-nous accepter la distinction si tranchée entre le^
peuples dits non civilisés dont traiterait la Vorlkerkumle, el
les autres qui ressortiraient à l'histoire et à lu
philologie.Est-
ce qu'il n'y a pas une histoire et une étude
philologique de-
sociétés inférieures? En quoi la méthode employéeparces-
disciplines diflèret-elle spécifiquementsuivant qu'il s'agit des
Bantous ou des Romains? Ce qui montre bien les défauts de
cette classification, c'est que M. S. est obligé de mettre lu
civilisation chinoise sous la juridiction de la Voelkwkiuule.
KTHNOGHAfHIB 49

| cûleà cOteavec la civilisationaustralienne. Enfin, si l'ou retire


de la sociologie l'ethnographie comparée ou ethnologie et
l'histoire comparée, nous ne voyonspas en quoi elle peutcon-
ï sjsler. Il y a là une terminologiearbitraire et, sous cette ter-
si îuiiiologic,une coucepliou do la science qui, pour être tra-
l (litiunuelle, n'en constitue pas moins un sérieux obstacle aux
M. M.
l progrès de nos études.
4
XKNOPOL.– La théorie de l'histoire. Paris, Leroux, 1908,
p. 483in-8°.
C'est la réédition, très étendue et remaniée, de l'œuvre
•: parue en 1899 sous le titre de Principes fondamentmir de
y t'Iiittoire.Elle aurait gagné beaucoupà êtreresserrée et allégée
d'un certain nombrede dôveloppementstropfacilesoubanals;
m;:isles idées directrices en sont fermes et précises. Selon
Ai.X., toutes les discussionssur le caractère scientifique de
i l'histoire, sur l'existence, la possibilité ou la nature des lois
il y
j historiques, proviennent d'une confusion fondamentale
i a diins la nature des jbénolnènes qui te rèpHent, parce que
j les forcesqui les produisent agissent constamment dans des
conditionssensiblement identiques;cette répétition, d'ailleurs,
ptMitseproduireàla fois etdansle tempsetdans l'espace: c'est
le mis pour les phénomènes mécaniquesou physiques les plus
i jîL'iiéraux ou bien elle peut se produire dans le temps seule-
irK'iit,les phénomènes étant individualisés dans l'espace
telle la révolution de la terre autour du soleil. Mais d'autres
phénomènesne se répètent jamais et ne font que se succéder,
forcesà l'œuvre y agissentdans des coii-
f puce que les mêmes
dilinus toujours différentes,de sorte que les effets en sont
toujours diversifiés, parfois même s'additionnent les uns aux
autres, si bien (jue les différencesselon les momentsdu temps,
pI non plus les similitudes, sont ici l'élément intéressant et
essentiel..Les sciences théoriques de la nature étudient tes
laits dupremier genre; certaines sciences naturelles, comme
la géologie et tout particulièrement l'histoire, étudient ceux
du second genre. – Cette distinction eu entraîne plusieurs
j autres seules les sciences théoriques peuvent dégager des
i lois proprement dites, c'est-à-dire des uniformités dégagées
i de toute condition de temps ou de lieu; la loi d'ailleurs
la détermination d'une cause, et la
1 u'implique pas toujours
de l'effet la loi ex-
il causeen tout cas est ici contemporaine
K. Draina». – Anm:esoclol., 190M909. 4
50 <9M-ti)()9
l,,A4,.egp 1;0(:IOLOGIQUR.

prime unerelation dout la raison nous échappesouvent, parce


que, si nous la recherchons. nous nous trouvons très vite eu
face des problèmes d'origine première ou d'essencemétaphy-
sique, insolubles ù la science positive,puisqu'ils échappent ù
l'observation ou à l'expérience. Dans les sciences de succes-
sion au contraire, en histoire par exemple, il n'ya pas de lois
proprement dites la cause est nettement distincte de son
effet et antérieure à lui, parce qu'elle exerce sou actiou sur
un ensemble de conditions donné au préalable et sans cesse
variable. M. X. critique dès lors et contestetoutes les préteu-
dues lois historiques qu'on a essayé de formuler sur le type
des lois de répétition. Est-ce donc à dire qu'il n'y ait aucun
élément de généralité en histoire, et aucun genre d'explica-
tion ? qu'elle se réduise ii une juxtaposition de faits pure el
simple? Nullement ce qui, dans les sciencesde succession.
correspondà ce qu'est la loi dans les sciences de répétition,
c'est la srrie c'est-à-dire une suite d'événements liés entre
eux pàrTûïiïlé de leur cause, représentant uu seul et môme
mouvement qui se poursuit, une seule et même évolution. Le
but scientifique de l'histoire, c'est de dégager et d'établir des
séries; et elle peut ainsi, mieux que les sciences théoriques,
déterminer des causes, parce que la suite des influences et lu
répercussion des faits les uns sur les autres peut être pour
suivie indéfiniment dans le passé, saus que nous nous heur-
tions jamais aux problèmes métaphysiques d'origine pre-
mière eu outre, elle ne devient jamais abstraite, parce que
l'explication ou le schème d'une série en enveloppe sans
doute les événements essentiels seulement, mats que ces évé
nements sont toujours datés et individuels. Les séries histo-
riques peuvent contenir, tantôt les divers produits d'une
même cause, ces produits n'ayant pas de relation causale les
uns avec les autres (par exemple les œuvres diverses d'un
même écrivain: tantôt les effetsde la répétition d'une môme
cause lorsqu'ils peuvent s'additionner ou s'influencer l'un
l'autre; tantôt des séries d'évéuemeuts se déterminant mu-
tuellement et de proche en proche, avec ou sans répétition
de l'action initiale. Une telle théorie, selon l'auteur, concilie
le caractère scientifique qu'il faut conserverl'histoire avec
le caractère manifeste d'individualité des faits ou des civili-
sations qu'elle étudie. Telleest l'idéeesseutiellede l'œuvre
mais M. X. y discute amplement, en outre, et d'ordinaire
avec justesse et netteté, tous les problèmes qui se rattachent
KTIIXlUilUl'IUK SI

ii la conception de l'histoire comme science rôle des indivi-


dus, du hasard, de l'iucuusuiuut,etc. Par opposiliou aux con-
dilions, permanentes ou passagères (telles que le milieu, la
race, etc.), il tient à affirmer,d'une manière assez équivoque
el confuse, l'action d'uue cause profonde de variation, et pour
ainsi dire d'uue force interne de renouvellement, qu'il dé-
signe du terme vague A'érohtlion.
Cette théorie de l'histoire prête évidemment à la discus-
sion. Nonque la distinction qu'elle introduit let dont on trou-
verait l'iudicatiou première cuez_Cquruot/ lie paraisse inté-
ressante et exacte; mais elle a le tort d'être exclusive. Car,
toute loi scientifique est abstraite c'est-à-dire qu'il n'y a
jamais efnulle part de répétition intégrale les lois, même
en physiqueou en chimie, ne sont obtenues qu'en nr'jliyeant
certaines différences très petites ou peu agissantes dans les
conditionsdes phénomènes. Pourquoi, dès lors, ne pourrait-
ou pas, à l'aide d'abstractions analogues, dégager, même dans
les faits successifs qu'étudie l'historien, des lois exprimant
les effets que telle du telle cause générale tout à produire
dans des conditions définieset supposées permanentes ? Et,
sans doute, lorsqu'il s'agirait de s'en servir pour l'explication
d'un fait concret quelconque, il resterait toujours à réintro-
duire les effets perturbateurs tenant aux conditions particu-
lières et uniques de ce fait. Ceserait l'office propre de la socio-
logie,en tant que distincte de l'histoire proprement dite, que
d'essayer de découvrir de telles lois. – Quant à l'histoire elle-
même,si elle n'est pas une pure juxtaposition érudite de faits
sauslieu, nous la concevrionsvolontiers sur le type que nous
en propose M. X,, commela détermination de séries de faits,
se coordonnant les uns aux autres, reflétant un même mou-
vementou aboutissant à un même terme. Peut-ètre y aurait-il
lieu seulementde préciser un peu plus, du point de vue objec-
tif et méthodologique, cette idée intéressante de série, dont
M. X. abandonne vraiment trop l'application, en chaque cas
particulier, au bon sens ou au tact individuel de l'histo-
rien. DrP. •

I-'ISHER (II.A. L). A sociologicalview of bistory. Sociol.Hec


1. p. 01-74.

XKNOI'OL (U.). – Sociologiae istoria. HUiilaital. il. Soeio/ X,


p. SiO-S4i.
82 l'an.nke sociolouiquk, IW-ivO'j

~iP~OP01, (D.). La concezionesoientigoadella storig~


iiit,. ilal,
<<.i!<)ei<'f.,Xn,p.Mt-M5.
STEIN(L.). DMProMeminderGesohiehte. – Mer)in,Heimer,
i90!.l,ill-
Fitiï30CliC La psychologie du témoignage en his-
toire. Rec.dexyntl~dacl~iat.,
i9fe,p.'2M-2'
DErXIÈMKSBCTION

SOCIOLOGIE RELIGIEUSE

I. – TRAITESGÉNÉRAUX,PHILOSOPHIERELIGIEUSE

l'ai-MM.
M.u'sset Dvvin

WUNDT(VVaneu). Voelkerpsyohologie. Eine Untemt-


chung der Kntwiehelungsgesetsenon Sprache, Mythut uni
Sitte.
SWp. 11II Bd. Btythus
SJythus and Religion. 11"
and Retigion. II" u. II!" Thei!.
Theil.
Leipzig, Engelmaun, 1907et 1909, p. XHI-181et XII-792,
in-8».

Nousavons analysé dans le tome X de l'Année,(p. 210-219;le


tome premier de Mylhusuni Religion, dont la dernière partie
était consacrée à l'analyse du Mythe en général. Les deux
volumes que nous présentons aujourd'hui à nos lecteurs ont
pour objet de classer les différentes sortes de mythes et de
suivre leur évolution depuis leurs formes les plus élémentaires
jusqu'au moment où ils donnent naissance à la religion pro-
prement dite.
En rendant compte du tome premier, nous avons eu déjà
l'occasion de dire combien la théorie générale du mythe que
l'on y trouvait nous paraissait flottante. Il nous semble donc
inutile de rappeler à nouveau la manière très imprécise dont
M. W. essayait de caractériser la fantaisie mytho-poétique.
Lemieux est d'aborder tout de suite l'analyse des différentes
espèces de mythes, telle qu'elle nous est présentée dans les
tomes suivants. C'estencore de cette façon que nous pourrons
le plus facilement arriver à déterminer les conceptions géné-
rales de l'auteur.
M. W. distingue deux grandes sortes de mythes. Il y a
d'abord le mythe simple, nous dirions volontiers le mythe
élémentaire auquel est cousacré le tome II. Il y a ensuite le
iVaturmythusqui est l'objet du tome III.
84 L'ANXiiKSOCIOI.UUIQUG.
WMDU'J

t. Le* Mythessimpleset lesmites quin'y mllue fient. –« Les


mythes que nous appelons simples sont ceux qui sont cons-
truits immédiatement avec les .impressionssensibles qui se
produisent directement chez le primitif. et avec les sentiments
et associations d'idées qu'éveillent ces impressions ». Cesont
les premiers produits de l'activité mythique ce sont au fond
les croyances, celles qui ne sont pas d'ordinaire l'objet d'Iiis-
toires, de mythes développés l'objet du livre est de les clas-
ser et de les passer en revue en commençant par les
mythes
qui supposent les représentations les plus élémentaires, les
moins élaborées pour passer progressivementà de
plus com-
plexes, à de plus éloignésde la donnée fondamentale.
La manière dont est exécutée cette idée n'est
pas sans sur-
prendre. Un mythe, si simple qu'il soit, est un tissu de repré-
sentations c'est donc essentiellementà l'activité représenta-
tive que doit se prendre une étude qui porte sur les
mythes.
Or, en fait, il arrive très souvent à M. W. de substituer aux
croyances les rites correspondants. Sans doute cette substitu-
tion est parfois nécessaire car certaines de ces
représenta-
tions ne sont pas facilesà atteindre en dehors des
pratiques
qui les réalisent. C'est le cas, par exemple, des croyances
relatives à l'Ame elles ne se traduisent généralement
pas en
formules définies, observables, et il est difficile d'arriver
à les déterminer autrement qu'à travers les rites des funé-
railles, etc., où elles viennent s'exprimer. II u'en reste pas
moins que, quand on est obligé de prendre ce détour, on est
dans d'assez mauvaises conditions pour étudier la
pensée
mythique, puisque, dans ce cas, ou ne la counall pas en elle-
même, mais seulementù travers des intermédiaires qui peu-
vent ne pas la refléter fidèlement. Si M. \V. ne sent
pas ce
grave inconvénient, c'est que, pour lui, le mythe domine le
rite le second ne serait que le premier mis en acte, traduit
en mouvements,et, par conséquent,il n'yaurait pas a craindre
que la traduction altérât l'original. Mais, s'il est exact qu'il
n'existe pas de rite que n'accompagnequelque
représentation
mythique (II, p. ûi», 4S3i, il ne s'ensuit pas que l'un ait sur
l'autre une socte de primauté. M. W. croit établir cette
pri-
mauté eu fai&antremarquer que s'il n'y a
pas de rite sans
mythe, il y a, au contraire, des mythes qui ne viennent pas
se traduire dans les rites ai, p. 228,339).'Mais de ce
due le
mythe est susceptible de se dissocier du rite pour évoluer
avec une certaine indépendance, il ne s'ensuit
pas du tout
ïluiîiU uÉxÊitAi'x &

que, dans le complexus normal formé par l'association de


ces deux élémeuts, le premier joue le rôle essentiel et préé-
minent. M. W. reconnaît lui-même que, quand le mythe
se détache aiusi de ses prolongements actuels, il tend plutôt
versle conte, l'épopée, etc. (I, p. 23ÏJ) c'est reconnaître que,
dans la même mesure, il dégénère. Si, donc, il est normale-
meut inséparable du rite; ou n'est pas fondé à lui attribuer
uneantériorité et, par suite, une action prépondérante
que
rien n'établit.
(Juoiqu'il en soit de cette question de méthode, voicidans
quel ordre se seraient constituées les principales représenta-
lionsmythiques.
La première, logiquement et chronologiquement, la seule
qui ait existé au fond de tous les rites, jusqu'ù ce qu'au des-
susd'elle se soit forméela notion du démon, la plus
simpleet
la plus fondamentale est la notion d'âme. Et cependant, elle
i:stdéjà, de l'aveu de M. W., d'une extrême complexité.
L'âme, eu effet, telle qu'elleest conçue dès le début de l'his-
toire, est double.Il y a, d'abord, l'àme corporelle. C'est le prin-
cipede vie, répandu daus tout le corps et qui ne l'abandonne
que lentement à la mort les longueurs rituelles des fuué-
railles ont précisément pour objet d'en opérer progressive-
mentla séparation. Mais l'âme, ce sont aussi les organesqui
lui servent spécialement de siège les reins, le
sang, les
excréments, les excroissances (ongles, cheveuxy, le regard.
C'estainsi que prit naissance l'idée des âmes d'organes,
que
nous trouvons encore dans la psychologie d'Homère (II, 37
p.
etsuiv.j.
Maisà côté de cette âme qui se confond avec le corps, il en
est une autre qui eu est distincte et indépendante c'est l'âme
comme principe de la personnalité morale c'est la Psyché
(diap. ni, £ I,8a et b). Mais la Psyché elle-même n'est pas
simple elle se résout en deux éléments contradictoires. C'est
d'abord l'âme-souffleou Psyché proprement dite et, d'autre
part, c'est l'ombre, l'tttti).ov, la »-ia. L'àme-souffleest plus
prochede l'àme corporelle elle est ce qui s'exhale à la mort,
ce qui risque de s'échapper daus l'éternuement, ce
qui part
dans le baiser, dans la voix du magicien. C'est elle
qu'une
partie des rites funéraires a pour objet de concilier aux sur-
vivants. L'ilme-ombre, c'est la Psyché vagabonde dont les
promonadesà travers l'espace causent ou plutôt constituent
le rêve. C'est elle qui rêve. Elle est aussi le mort qui
apparatt
30 L'ANNÉESOCIOLOGIQUE.
iUOG-l'jQ»

au rêveur (p. 93) elle est donc le double du vivant et du


mort. Uneautre partie des rites funéraires a pour fonction de
l'écarter.
Des éléments divers ont servi a former cette notion du
double. Le contraste que la mort présente avec la vie éveille
l'idée de quelque chose qui est parti. L'apparition des morts
dans les songes, les voyagesque le dormeur croit faire tuudis
qu'il rêve, confirment et précisent cette idée d'un double qui
sort du corps et survit à l'àme terrestre. Deux groupes de
faits viennent accroître la vivacité de cette première représen-
tation. En premier lieu, il y a les phénomènes de la visiou à
distance, de la révélation ou de l'inspiration, soit pendant lu
veille, soit pendant le sommeil.En second lieu, les phénomènes
de l'extase volontaire ou spontanée, de la possession, du sha-
munisme donnent aux âmes de certains individus uu prestige
particulier. Sous leur lutluence, l'idée d'àme tend déjà vers
celle d'esprit ou même de démon. On voit que la façon dont
M.W. explique la genèse de cette représentation n'ajoute rien
d'essentiel aux théories en cours; elle est exposée aux mêmes
critiques. La notion d'àme est présentée comme unesorted'hy-
pothèse précipitée, destinée à rendre compte de certains faits
d'expérience. On voit mal comment le caractère sacré dont
elle est marquée partout où on l'observe pourrait s'expliquer
ainsi.
Une fois construite, cette notion d'àme aurait donné nais-
sance à trois formes de cultes qui se seraient successivement
développées la magie, le fétichisme, le totémisme. D'ailleurs.
à mesure que ces différents cultes se constituaient, la notion
d'àme évoluait et se transformait.
Si M. W.rattache la magie à l'idée d'àme, c'est que, pour
lui, l'àme est l'instrument de toute action magique. Il dis-
tingue, en effet, dans la magie proprement dite et primitive
comme deux couches superposées. Il y a, d'abord, la magie
des souffles (H, p. 4Get suiv.) c'est le cas du médecin
qui
aspire ou suce la maladie la voix elle-même n'est qu'un
souffle et, par conséquent, toute influence exercée par la voix
n'est qu'une forme de la magie. Or le souffle, c'est l'àme,
comme nous l'avons vu plus haut. JI y a, en second lieu,
l'action magique à distance; M. W. range sous cette rubrique
tous les rites analogiques étudiés par M. Frazer (voir, à ce
sujet, une bonne discussion de la division des rites on sympa-
thiques et en mimétiques, II, p. 180, p. 190, n. 2j. Et, selon
THA1TKS
UKSKIUl'X 57
lui, l'action à distance se fait par émission d'ornes. – Rieu
nu nous parait plus arbitraire et moins conforme aux faits
que cette genèse de la magie. C'est à M. Preuss que M. W.
emprunte sa conception de la magie des souffles mais, dans
le souffle, M. Preuss voyait, avec raison, non une âme person-
nelle, mais au contraire une force abstraite, anonyme, une
forme de manu. Il s'en faut qu'en magie tout se passe entre
;imes individuelles, D'ailleurs, quand même il serait établi
i|ue la notion d'aine est l'unique matière de la magie, il reste-
rait encore à cherche pourquoi la magie proprement dite
sost formée, c'est-à-dire pourquoi on ne s'en est pas tenu
«ux seuls rites funéraires et aux précautions concernant les
morts. Finalement, il semble bien que l'idée que M. W. a de
la magie est assez indécise. Voici, en effet, comment il la défi-
nit Est magique toute action exercéemystérieusementpar un
hommeou un dieu fit, p. 154). Or, les rites religieux rentrent
dans cette définition aussi bien que les rites magiques.
L'autre culte où vient s'exprimer l'animisme primitif,
c'est le fétichisme. Ce qu'il y a de nouveau dans le fétichisme,
c'«sl que les âmes ou esprits auxquels il s'adresse, au lieu
d'être sans domicile attitré, sont attachés à des objets déter-
minés, permanents, toujours les mêmes, qui gardent leurs
caractères distinctifs en dehors des rites qui les mettent en
n'uvre. De plus, tandis que la magieest faite de pratiques iso-
lées, temporaires, employées à l'occasion de circonstances
passagères, le fétichisme est un culte véritable, régulier,
habituel, qui se célèbre conformément à des coutumes col-
lectives. Aussi implique-t-il de véritables institutions so-
ciales il existe des sociétés organisées de féticheurs, tan-
dis que la magie est l'œuvre d'individualités privées. D'un
autre côté, il se distinguerait des cultes proprement reli-
gieux par le caractère arbitraire de ses choix (II, p. 207). Le
fétichisme constituerait donc une entité nettement définie.
Mais uous craignons que M. W. ne soit arrivé à ce résultat
Hu'au moyen de distinctions assez artificielles. La magie a,
tout comme le fétichisme, son coutumier et sa corporation
d'agents professionnels. D'autre part, quoi qu'on en ait dit, le
fétiche n'est jamais un objet quelconque, choisi arbitraire-
ment mais il est toujours déterminé par le code de la magie
et de la religion. Aussi bien, est-ce la conception même du
Mtichismecomme uu culte à part qui nous parait ne corres-
pondre à rien de défini.
68 l'ANSKB SOCIOLOGIQUE,
1906-1909

De la magie seraient enfin sortis deux autres groupes de


faits; le culte des ancêtres ou mauisme, et l'animalisme ou
culte des animaux. Du premier, nous avons peu à dire pour
l'iustuut; car, suivaut M. \V. lui-môme, si le culte de l'âme
mèueau culte des ancêtres, c'est seulement à lu suite d'une
longue évolution sociale qui ne peut produire tous ses fruits
que dans une organisation sociale très développéeill, p. 380).
Maisil u'eu est pas de môme de l'uulmulisiue dont le type le
plus répaudu est le totémisme.
Lu raison pour laquelle M. \V. voit dans le totémisme une
forme dérivée et nou pas une forme primitive de l'animisme
tieut à une des idées qui dominent toute sa doctrine. Le toté-
misme est solidaire d'uue organisation sociale déterminée,
l'organisation duclan (II, p. ï~i; cf. I, p. S00).Or, pour notre
auteur, toute organisation sociale est un fait dérivé, qui sup-
pose autre chose que lui-même. Ce qui est vraiment primi-
tif, c'est ce qui nait de la masse inorganisée des individus. La
notion d'âme remplit cette condition; c'est pourquoi elle est
la souchede toute l'évolution mythique
La manière dont M. en déduit les croyances et les pra-
tiques totémiques rappelle singulièrement les théories bien
connuesde Tylor et de Wilkeu. Nous ne savonstrop pourquoi,
les hommes seraient arrivés à croire que, au moment de la
mort, l'àme s'échappe sous la l'orme d'un des animaux que
l'on aperçoit alors dans le voisinage du mourant, principale-
ment sous la forme d'un ver ou d'un serpent. Aussi SI. W.
appelle-t-il cesdeux sortes d'animaux, ces Il animaux-âmesx.
« des totems universels », sans, d'ailleurs, donner aucune
preuve à l'appui de sou assertion. On aurait commencé par
rendre un culte à ces animaux, puis à d'autres puis on se
serait élevé à l'idée qu'une action magique pouvait être exer-
cée sur les totems ainsi constitués, en vue d'assurer la multi-
plication de l'espèce totémique c'est ainsi qu'auraient pris
naissanceles intkhùtma australiens.– Au totémisme, M. W.
rattache la notion du tabou. Le totem est l'objet d'un respect
qui donne naissance à des interdits, et c'est sur le modèle de
ces interdits que se seraient formés tous les autres tabous.
L'idée n'est pas sans quelque fondement, bien qu'elle soit
présentée sous une forme qui la fait paraître assez téuue.
Le système des interdits n'a rien de spécialement
totémique
il se retrouve partout où il y a religion.
C'est au cours de l'évolution qui a fait sortir le totémisme
THAITtiS ufelftUCX S1*
li

de la magie et du fétichisme que la notion d'arae est devenue


eellu de démon. La diflérence entre l'une et l'autre, c'est que
le démon est un être permuueul, chargé d'attributions déter-
minées et régulières, tandis que l'âme est une puissance
vniiue, sans fonctions propres. Mais on passe de l'une a
l'autre par une série continue d'intermédiaires. M. W. en
compte trois principales. Il y a d'abord les Spukddmonrn,reve-
iiiiuts, nains et fées, esprit3 des déserts et des montagnes,
gi-îuitset ogres. Ce ne sont encore que des âmes, bien que ce
ne soient pas toujours des âmes d'hommes, ayant vécu une
vie humaine. Après viennent les dénions de la maladie, de la
possession et de l'ensorcellement. Ils sont l'objet d'uue forme
de magie supérieure à celles dont il a été question précédem-
ment c'est la médecine, la sorcellerie et la contre-sorcellerie.
Eiilin, une troisième et dernière classe est constituée par les
ili'inousde la végétation. Déjà, ils sont a la base de certains
rik"i totémiques, de ceux qui s'adressent à des totems végé-
taux. Peu à peu leur personnalité se dégage et se détermine.
Leur intervention n'est pas accidentelle commecelle des dé-
mons de la maladie; elle est, au contraire, régulière comme
les choses uaturelles auxquelles ils sont préposés.Aussi sont-
ils l'objet de rites périodiques, c'est-à-dire d'un culte. C'est
dire qu'ici nous touchons à une phase nouvellede l'évolution
mythique, phase qui n'est directement étudiée par M. W. que
dans le tome 111de sou ouvrage.
II. Le Nalurmythus. Cette phase nouvelle est celle du
Xuturmythiupour employer la terminologie, si difficileà tra-
duire, de M. W. Ce que notre auteur appelle de ce nom,
i.t sont les récits, plus ou moins cohérents, daus lesquels
chaque peuple ditla manière dontil se représenteet comprend
lt">divers phénomènes naturels. Certains des êtres qui jouent
un rôle dans ces récits ne diflèreut pas eu nature de ceux
«tout il a été précédemment question ce sont des esprits et
des démons. Mais ils sout employés à rendre compte de la
vie cosmique et surtout car c'est là ce qui caractérise le
plus ce genre particulier de mythes au lieu que, jusqu'à
préseut, ces êtres n'étaient l'objet que de croyancesfragmen-
taires, affirmant l'existence de telle ou telle puissance démo-
niaque, nous avons cette fois affaireà de véritables histoires,
« des suites d'événements enchaînés.
Sous ce dernier rapport, la distinction n'est pas sans fon-
dement. Dans ces mythes développés où est racontéel'histoire
UU I/AN.NBE 1900-19011
SOCIOlOOigUB.
de la nature, il y a quelque chose de particulier qui ne s.-
retrouve pas dans les simples représentations religieuse.
d'êtres naturels ou y trouve ua effort d'explication, uu tr.i
vail d'esprit qui ue se borne plus à traduire symboliquenifin
des images isolées, inaisqui les coordonne, les lie, s'elïorean;
même de comblerles vides qui les séparent. La pensée liuiuaiin;
commenceà se dégager des purs mouvements de l'affectivité,
et à se constituer d'une manière indépendante. Seulement, !•
meilleur moyeu d'exprimer cette différenceeut été de réserva
le nom de mythes pour ces récits circonstanciéset explicatifs,
et d'appeler représentations ou croyauces élémentaires, par
exemple, ces notions frustes et non systématisées dont il étai'i'
traité eu premier lieu. De plus, il est tout à fait arbitraire à-
séparer radicalement représentations élémentaires et mythes
plus ou moins systématiques au point de rapporter les uns e'
les autres à deux stades différents de l'évolution mythique
D'abord, il n'y a pas de société qui soit limitée à des croyance-
fragmentaires; toutes ont leurs mythologies oùelles essayent
de s'expliquer à elles-mêmesleurs croyances. Par conséqueut.
la distinction ne correspond à aucune réalité historique.
Ensuite, ilarrive, tout au moins très souvent, que les simple-
représentations sont des éléments intégrants (le récits my-
thiques dont elles sont inséparables. Commentdétacher, sinon
par une pure abstraction, par un artifice de méthode,l;i
notion de tel animal comme totem du mythe qui commeute
cette notion? Il est tout à fait abusif, par exemple, de séparer
le conte du buffle chez les Pawuee de l'idée qui est à la baV;
du culte dubuflle (V. Dorsey, The Paimee;
iheir Miitlioloyu,l,
p. 125,480,.
Il y a, il est vrai, une autre différence qui parait séparer
plus nettement les mythes complexes des représentations été-
mentaires. Celles-ci sont l'aine de rites efficaces; elles déter-
minent des mouvementsqui sont destiués à agir sur les choses
elles ressortissent donc à la vie réelle et sérieuse. Au con-
traire, les mythes complexes sont de la sphère de la poésie
on ne les prend pas, ou ou ne les prend pas complètement auii
sérieux. Alors qu'autrefois on voyait dans le conte une foran;
tardive et dégénérée du mythe, pour M. \V., au contraire, \v
mythe commence par être un conte, un conte plaisant, des
tiné à faire rire, à amuser; et, par là, il aurait joué un rôl>-
important dans le développement de la pensée. C'est lui qui
aurait affranchi l'esprit de la brutalité des notions animistes,
TIUITKSUHNKftÀL'X ut

en lui ouvrant une sphère où l'imaginationpouvait jouer eu


saus être asservie à la réalité. Voilà à quoi auraient
? liberté
'l servi la licence comique des contes primitifs, les aventures
grotesques prêtées aux animaux et aux ancêtres. En déflni-
tivi".c'est par le conte que l'homme aurait fait sa première
f envolée vers l'idéal. La
remarque est partiellement exacte.
l Qu'onappelle contes ou mythes les récits australiens qu'ont
i collectionnés -M.Strehlow ou Mrs. Parker, on sera frappé de
i la place qu'y occupent les épisodes romanesques et gro-
ï toques. Mais M. \V. ouhlie que ces mêmes épisodes sont
| l'objet de rites totémiques; on les mime au cours de certaines
| vi-rémonies;les formules que l'onchante les racontent. Pour-
? quoi rattacher ces formulesaux notionsanimistes et supposer
i au contraire que ces récits sont à un stade supérieur de l'évo-
liitimi? La vérité est que ces distinctionsne correspondent à
rien dansles choses. La pensée mêmelu plus primitive n'é-
tait pas exclusivement brutale et directementexpressive; elle
êliiit.à la fois, brutale et comique, serve et libre, sentimen-
tale et intellectuelle. Tout est mêlé; les caractères les plus
I opposésse confondent, sans qu'on soit fondé ù les dissocier,
au point surtout d'en faire des momentsdifférents de l'his-
toire.
Mais les Naturmulhcn sont, eux-mêmes,d'après notre au-
teur, un genre qui comprend deuxespèces. Il y a d'abord les
coulesmythiques, les ilythenmtïirhendont il vient d'être plus
spécialement question. Parmi ces contes mythiques, .M.W.,
i avt'cce besoin intempérant de divisions ou de subdivisions
qui le caractérise, distingue cinq variétésprincipales.
Il y a les contes d'aventures, (llùcksmttrchen,que M. \V. a
f le mèritedeconstitueràl'état de typedistinct. Viennentensuite
luscontes d'animaux., Thiermnnhen,que très justement il rat-
"111lâcheau totémisme ce sont ces contesoù l'on voit l'homme
l, tantôt traiter avec l'animal d'égal à égal, tantôt le respecter
cutnme un être supérieur et sacré, se marier avec l'animal,
J se
métamorphoser lui-môme en bête pour redevenir ensuite
uu homme, etc. Les contes sur les plantes, Pflansenmà'ichen,
j sontceuxdont les plantes, plus particulièrementl'herbe médi-
j raie, le bâton magique, fournissent lesthèmes. La quatrième
] catégorieest constituée par les contes célestes, llimmekmfir-
chou(contes de la montée au ciel, mythes solaires, thème des
|
jumeaux, etc.) très justement, M. W. remarque que ce genre
île mythes reste très pauvre tant que n'est pas formée la notion
¡
62i-) I.XXÉK SUUIUI.OUIQCK.l'JOC-HlO'J

desdieux et des héros, 1- v_


car le ciel n'est guère que le théâtre di-
leurs aventures. Kuflu les contes sur la civilisation, Kullur-
mûrchen, qui concernent les origines des arts, des techniques,
de l'organisation sociale, etc.; ils touchent déjà à un cycl->
plus élevé et nous introduisent dans une nouvelle sphère.
III. Leshéros, les</<mr,la religion.– Jusqu'à présent, enliv
les différents êtres mythiques dont il a été question il n'y avait
que des différencesde degrés. Armes, animaux totémiques,
démons, tousétaieut des puissances impersonnelles,aux trait
indécis et qui se confondaient plus ou moins complètement
avec les phénomènes essentiels qui leur étaient attribués e-
dont ils n'étaient guère que lit forme symbolique. Mais nou,
allons maintenant avoir affaire à des êtres d'un tout autre
genre. N'oublionspas, eu ellet, que le but dernier de l'ouvrage
est de montrer. commentl'humanité est passée du mythe à 1;,
religion, c'est-à-dire à l'idée de Dieu qui en est la caractéris-
tique. C'est là, dit M. W., le problème psychologique de h1
science du mythe et de la religion <III, p. 331;. Or, entre le>
dieux et les animaux totémiques ou les démons, il y a uiir
véritable solution de continuité. Les dieux ne sont plus dans
la nature, mais en dehors: ils sont transcendants; ils ont « un
séjour séparé ». Tandis que les démons sont solidaires des
phénomènes qu'Us incorporent eten suivent les 'vicissitudes.
tandis que, par exemple, les démons de la végétationmeurentl
avec les plantes annuelles, les dieux 'sont, sinon éternels, du
moins immortels Enfin, ils sont de véritables personnes qui
n'animent plus les choses, mais les dominent, les règlent par
leur volonté. L'esprit, pour s'élever du démon au dieu, aurait
donc eu à faire un bond. Ce qui a facilité ce ,passage selon
M. W., c'est la formation d'une notion intermédiaire, celle
du héros, à laquelle les Kallurm/ïrchenpréparaient déjà, mais
qui ne se constitue définitivement que dans la légendeou la
Sage.
Leconte mythique étaitdétacbé de toute condition de temps
et de lieu. L'être dont on contait l'aventure n'avait existé
qu'à une époque ou dans des endroits très vagues; il dispa-
raissait après avoir agi; il n'avait rien d'individuel. Le héros
au contraire, présente des caractères opposés. On raconte de
lui, non pas seulement un événement, mais toute une série

I. M.WiiihHconnaîtbienles jiiytfn-ssurla mortdes diuui,iiiuisilj


du Mruset «lel'idéi;di-dieu.
voilun uii'laiigedela lêigendb
TKAlTfa
UÉNÈltACX 03
d'Iristoires; sa naissance et su mort sont l'objet de croyances
quasi historiques. On passe ainsi du mythe isolé tjîinset-
mytlms/nu cycle mythique dont M. \V.rattache très ingénieu-
sementl'origine à la notion du héros civilisateur (III, p. 477).
Les éléments qui servirent à former lu notion du héros peu-
vent être puisés à trois sources dillérentes le mythe, l'his-
tuire, la poésie. Sans doute, eu général, ces trois éléments
coexistent, mais suivant des proportionsvariables. C'est tan-
tôt l'un et tantôt l'autre qui est prépondérant de là trois
types de Saga des héros le type mythique 1 Héraclèset les
Argonautes;; le type historique les Kiehelungrn);le type poé-
tique (l'Iliade), dans lequel le héros tend déjà à deveair le
dieu.
La dilléreuce entre le héros et le dieu, c'est que le second
joue uu rôle dans la nature et un rôle permanent, tandis que
l'action de l'autre est éphémère et se fait surtout sentir dans
l'histoire des hommes. Le dieu se déliait par rapport à la
cosmogonie <III, p. 339). C'est lui qui a fait le monde et il
reste l'agent de la vie cosmique. Sans doute, M. W. convient
qu'on trouve, dès les sociétésles plus primitives, les commen-
cemeuts de la représentation des dieux i III, p. 393 et suiv.).
Maisil croit pouvoir établir que partout où la notion de dieu
s'est formée, il y a « idéalisation » nond'un démon, mais d'un
héros. Contrairement à ce que racontent les légendes, ce ne
sont pas les héros qui descendent des dieux, mais ce sont les
dieux qui sont filsdes héros Mil, p. 427).
C'est sous l'influence du culte que se serait produite cette
transformation qui a donné naissance à la vraie religion.
Sans doute il y avait dès l'origine des systèmes d'actions
rituelles; les âmes, les fétiches, les totems, étaient l'objet de
rites, mais qui n'étaient que des pratiques préreligieuses.
Trois caractères, en ellet, sont nécessaires pour qu'un culte
puisse être dit spécifiquement religieux, (III, p. oi)oet suivj.
1' Le premier est « l'attachement{Gebundenheil),k à une collecti-
vité plus ou moins vaste » c'est, eu d'autres termes, le carac-
tère social du culte. Il faut qu'il soit pratiqué, non par des
individus, mais par uu groupe. Par cela même, il cesse d'être
un ensemble de recettes facultativesmises à la disposition des
particuliers et devient un système de normes qui s'imposent.
ii'Lesecoud critère est le caractère plus compréhensif de la
fin poursuivie; celle-ci se rapporte aux besoins les plus géné-
raux de la vie que l'on cherche à satisfaire en se conciliant
64 L'ANNEE l'JOfM'JO»
«OC10l.OGIQ.UB.
la laveur d'êtres surhumains. 3' Enfin, les actes rituels se
réfèrent, dans leurs motifs comme dans leurs objets, à un
monde supra-sensible. En d'autres termes, les rites préreli-
gieux seraient dirigés vers des fiusà la fois toutes spéciales et
toutes matérielles satisfaire tel appétit, réussir à la chasse
ou à la pêche, écarter tel maléfice, et ils y tendraient directe-
ment, brutalement, par les voiesde la magie. par des actions
exercées sur des esprits plus ou moins semblablesà 1'liomnie.
Toutes ces formes inférieures du culte ue tendent à rien au.
delà de ce monde tel qu'il apparaît aux hommes à travers les
fumées du mythe. Au contraire, dansles cultesvraimentfeli-
gieux, l'idée desintérêts communsdugroupe s'estfait jour. Par
suite, les buts poursuivis prennent uu caractère plus général.
De plus, ces buts, ou ne cherche pas à les atteindre directe-
ment on s'adresse pour cela à des personnalités supérieures
à l'homme, qu'elles aient ou non un corps, à des dieux. Désor-
mais l'action du culte u'est plus directe; c'est par les dieux
qu'elle doit passer pour être etricace. Or les dieux sont des
êtres idéaux, supra-sensibles. C'est pourquoi, à leur image,
motifs, objets, thèmes du culte, tout s'idéalise. Ce n'est plus
la santé, la richesse que l'on recherche; ce sontdes biens tout
idéaux. L'acte rituel lui-mêmeperd de sa force magique pour
prendre une « valeur symbolique »; il s'intellectualise. La
part de la vie intérieure, de la pensée,de la réflexiondans le
culte va en croissant. L'attachement à la communauté reli-
gieuse (die Gebuniknheit),devient un attachemeut intérieur
{die innere (lebundenheit).
On aimerait à savoir ce qui a pu donner naissance à cette
révolution que M. W. situe à peu près au cinquième siècle
avant notre ère et dans le monde antique. La seule cause qu'il
lui assigne, c'est la civilisation (III, lai\ et, plus spécialement
le développement de l'agriculture. C'est, saus doute, parce
que l'agriculture est une forme d'activité essentiellement liée
à la formation des grandes collectivités, et parceque, de plus,
elle a un rythme régulier qui devait se communiquer et s'im-
poser aux pratiques rituelles. Toutefois,les sémites pasteurs,
les nomades surtout, auraient eu leur part dans ce grand
changement. Comme« ils étaient restés plus près des croyan-
ces primitives à l'Ame », c'est à eux que serait do le respect
de l'ancêtre, chef de famille, qui se serait transmis au dieu,
maltre de la morale 'III, 630).Dela lutte de ces deux cultes,
culte agraire et culte des pasteurs, se dégage la notion du
TIU1TÉS
(iKKKIUt'X OS
5 dieu sauveur opposée a celle uu dieu de lu nature, notion
tli'Ilnitivenientvictorieuse lorsque se formera« la légendecul- l-
tuelle » des grandes religions.
IV. Coneltisiim-– Nous nous sommes efforcé de retracer,
d.ins ce qui précède, le plan géuéralde l'ouvnige. el les lignes
les plusessentielles de la doctrine. La tâche n'était pas lou-
jmirs aisée. Oua pu se rendre compte, eu effet, que la pensée
? de M. \V. se perd souvent dans un labyrinthe de divisions.
l di' sous-divisions, de distinctions où il n'est pas facile de la
l suivre. JJ'nutrc part, les notions les plus essentielles, comme
•j cullesdedieu, de héros, de démon,de Mythux,de Natunittithux.
di' Sage, etc., sout, pour la plupart, posées d'une manière
1
l synthétique et confuse plus qu'elles ne sont analysées métlio-
A iti(|uemeDt il est rare qu'une définitionun peu précise en soit
duuuée; on a, par suite, quelque mat à s'en saisir, il en
marquerles contours, à en déterminer le rôle, Enfin il arrive
que les raisons pour lesquelles M. W. enchaîne les faits
.j! dans tel ordre plutôt que dans tel autre ne sont pas explici-
?
j teinent indiquées ou mêmene sont pas apparentes ou dirait
'| qu'il procède par intuitions qui doivent, d'autorité, s'imposer
au lecteur; ce qui n'est pas sans dérouter celui-ci.
j Certes, il est impossible de ne pas admirer la hardiesse rie
] l'œuvreet le savoir encyclopédique mis au service de l'eutre-
.4 prise. Celivre n'est pas un traité de philosophie idéologique;
A ce n'est pas une analyse de l'idée de religion, plus ou moins
4. bit- exempliliée à l'aide de quelques données historiques.
;ij Bien que M. W. ait subi, croyons-nous, et avec excis. l'in-
îj tlunneedecertaines idées préconçues,bien qu'il ne se soit pas
il sullisamment affranchi de ses croyances personnelles, il est
•] cependantincontestable qu'avant de spéculer sur lu religion,
;3 il sVstastreint à considérer en historien les religions. En iiii>iiii*
M tiiiips, dans le choix des sources multiples qu'il a du cou-
q siilliir, il a fait preuve d'un rare discernement. Knftu, on tnm-
j vitîi. dans cet ouvrage, nombre de vues intéressantes et sug-
i jjfstives,qu'une analyse sommaire ne saurait mettre toutes en
relief. Cependant, et surtout après la lecture du tome trni-
.1 siêmc où nous espérions voir la pensée de l'auteur sur la
; religion se préciser et s'éclairer, nous nous demandons si
j l'importance des résultats obtenus est en rapport avec IVnor-
milé (Id l'effort.
J
Tout le livre est dominé par la distinction, si radicale, entre
_| le mythe et la religion. Le mythe et les cultes qui en sunt
| K.DniKiimu. – Ann«:i"
Miviiil..i'.iOii-l'WJ.
66 L'ANNÉE SOCIOLOGIQUE.l'JOIM'JO!!

solidaires. animisme, fétichisme, totémisme, c'est ce qui tieut


lieu de religion à l'Immunité primitive; mais ce n'est pas In
religion proprement dite. Alors que le mythe et les rites qu'il
inspire ne dépassent pas le monde physique, ne visent que
des fins individuelles, utilitaires, la religion, au contraire,
est chose collective, obligatoire; elle se meut dans un cercle
de purs idéaux elle poursuit des lins morales.C'est pouravoirl'
méconnu cette différence fondamentalequ'ethnologues, sociu-
logues, historiens ont entassé erreurs sur erreurs (III, p. W
730). Les débuts philosophiques s'éternisent, tournent en
cercle, parce qu'on s'obstine ou à revêtir la religion des ori-
peaux du mythe pour pouvoir la critiquer abusivement ou ;i
prêter au mythe une valeur morale qu'il u'a pas. – Mallieu
reusement, nous craignons fort que cette opposition, à laquelle
M. W. tient tant, ne corresponde à rien dans les faits.
Le culte le plus priniltit que nous connaissions est le toté-
misme car l'antériorité que M.W. attribue à la magie et au
fétichisme est purement'imaginaire. Nousne connaissons pas
de peuple qui ait été réduit à la magie et nous avons
déjà dit
que le fétichisme n'a jamais constitué une entité religieuse.
Or, le totémisme présente déjà tous les caractères de la reli
gion proprement dite. Il est le culte d'un clan; il se rattacha
donc à une collectivité déterminée. Toute la tribu mômeest
intéressée à ce qu il soit régulièrementcélébré et, parfois, elle
témoigne de cet intérêt par des actes positifs. En raison menu'
de son caractère social, le totémismeest soumis à des règles
définies; il comprend des fêtes périodiques qui sont des-
tinées à assurer le renouvellement régulier de l'espèce ani-
male ou végétale qui sert de totem. Enfinles rites s'adressent
à des forces que l'homme, sans cloute, ne se représente pn-
sous les espèces d'êtres personnels, qu'il ne peuse que confu-
sément sous la forme d'énergies dilluses, mais qu'il conçoit,
en tout cas, comme nettement supérieures à lui. Dès re
moment, par conséquent, le fidèlese sent en rapport avec un
monde d'idéaux qui relèvent au-dessus de lui-même, D'ail-
leurs, inversement, est-ce que les religions, môme les plu;
élevées, ne cherchent pas à agir sur les chosesde cette terri.'
Dire que le totémisme a son idéal, n'est ce pas dire, du même
coup, qu'il implique une vie intérieure, des convictions
intimes? Sans doute, elles sont moius réfléchies et raisonné^
que celles d'un protestant libéral d'aujourd'hui. Mais, si dis-
tantes que puissent être ces deux formes de la mentalité reli-
TK.Uïfe tit.MlU.UX 07

lieuse, il n'y a aucune raison de supposer qu'il y ait eutro


elles autre chose qu'une différence de degrés.
M- W. a eu assurément raison d'admettre quela notion duai
divin n'est pas essentielle aux cultes primitifs mais ce n'était
pas une raison pour leur refuser le caractère religieux. Carae-
l( riserla religion par l'idée de Dieu, c'est attribuer à celle-ci
une importance démesurée et que rien ne justifie. La divinité
n'est qu'une des formes multiples qu'ont revêtues, au cours
des temps, les forces religieuses. C'est, par conséquent, réduire
la religion à ce qu'elle a de plus conceptuel, c'est confondre
la réalité religieuse avec la manière dout l'ont pensée certains
peuples, que la définir par ce concept. Nous touchons ici à ce
qui fait peut-être le plus défaut au livre de AI.VV.11 n'a pas
h sensation de ces vagues énergies, de ces forces anonymes
cl impersonnelles dont l'idée, le sentiment constituent pour-
taut la substancemême de la vie religieuse et que les person-
nalités divines, même dans les religions les plus avancées.
n'out jamais réussi à s'incorporer totalement. M.\V. répondra
que ces forces ne sont pas spécifiquement religieuses, puis-
qu'elles ne différent pas en nature de celles qu'étudient les
scienceset que manient les techniques laïques. Les croyances
qui les concernent lui paraissent donc être plutôt des pro-
dromes de science que de religion » (Hl, p. •%>•>)• Mais de ce
que certaines conceptions religieuses ont servi à former des
conceptionsscientifiques, elles ne laissent pas d'avoir été reli-
gieusesà leur origine.
Ce qu'il y a peut-être de meilleur et de plus fécond clans
l'œuvre de M. W., c'est la manière dont il a mis en relief
l'existence spécifique du conte, jeu libre de représentations.
et de la légende qui peut être crue comme uue vérité histo-
rique, sans pourtant se traduire eu pratiques religieuses '111,
p. 17 et suiv.i. Il a aussi un sentiment très vif et, croyons-
nous, très juste de l'autonomie du mythe. Il a bien montré
comment le mythe n'est exclusivement à la remorque ni des
rites, ni des contes et des légendes, mais peut emprunter des
théines soit aux uus soit aux autres comment il vit de sa vie
propre sous l'influence combinée des des prêtres et
du peuple ri II»p. 83i; comment il peut, plus facilement que
le culte, se détacher de toute base nationale, émigrer, s'em-
prunter, voyager, etc. Sur tous ces points. SI. W. a été bien
servi par ce qu'il y a de trop unilatéral dans sa conception
fondamentale. 11tabien vu ces aspects de la penséemythique,
M i.'axn'èk sooioi.oiiiguK.Iuuwmo»

précisément parce qu'il sent très vivementce qu'elle 11de fan-


taisiste, d'imaginaire, de poétique,c'est-à-dire, en nomme, ce
qu'elle a de moius religieux. M. M.

li. MARKETT. The Threshold of Religion. Londou,


Lougnmns, 1909,lll-fil) p., in-S».
Ce petit livre est un recueild'articles dont plusieurs ont éti-
signalés ici-même. Trois d'entre eux sont postérieurs au der-
nier tome de VAnnremiolagique une leçon, The
concept«/
Mana un article..1 xoeiologiralrime of eoinjmnttireJHiyinn
(paru dans Sorioloy.Un,, 11I08,p. W-liÛ.:enfin, uue coutri-
hution aux Mélanges Tylor, h talion fi négative
mtujic? l'ue
courte préface (p. vii-xixj répond à quelques-unes des
objec-
tions qui ont été faites auxidées de l'auteur1.
Sur la notion de mana (p. 1 15et suiv. ), M.Marrett
exprime
les idées que nous avons eu souvent l'occasion
d'exposer ici
il cite les mômes exemples. Lui aussi, il attribue cette notion
plus d'importance qu'à celle de tabou ou de sacre; il la con-
sidère plutôt comme équivalenteà l'idée de pouvoir, d'efïicace.
et il la propose comme l'élément essentiel et le critère de ce
que Tylur appelait « un minimum de religion » en menu-
temps, il y voit une sorte « de catégorie subconsciente de la
philosophie primitive ». Nous nous félicitons de constater
celte parfaite concordauceavec les théories que nous
pro-
fessons. Xous croyons, toutefois, que l'auteur n'attache
pas une sullisante importance au rapport que soutienl
l'idée de mana. d'orenda, avec celle de valeur et d'autorité
sociale.
A la notion de mana, M. Marrett rattache celle de tabou.
Le tabou, c'est du mana négatif ip. llli. Ce n'est
pas simple-
ment de la magie négative.L'action sympathique,
par laquelle
M. Frazer caractérise la magie, n'est pas l'essence du tabou
qui suppose avant tout un pouvoir qu'il faut empêcher de
s'échapper. Rien n'est plus juste, et nous accédonsvolon-
tiers à la réponse opposéepar M. Marrett à M. Frazer. Mais
est-il sûr d'avoir, par cette réponse, beaucoupavaucé la ques-

i. A<:•propos,nous(li.-vuii-,
à M.MurrifU uneii-ctilicalluti.
lians lit iiiV-
laceil.-nus Mêlimgt*
<l"hiihirertiyîeune(Tnivaux !• l'Annie
nousavonsparuprunier «mitravailh'romspelttu prayerxocioloi/iuiif,
romini'il-:r.
vantdu nntrn.Ennialit. il,71.-siinili'-penilant
nousle savions,i-l il'iiil
leurs,nousl'avionsilil[Aiméenm-iol..VIII,p.ïl»,.
THUTli*
(JKXÉHAL'Ji «9

lion ? L'iuterdictiou rituelle (ou suit que nous préférons ce


motà celui de tabou qui, duus les langues polynésiennes, ne
dé.sigueprécisément que les interdictions relatives au mnr,
au religieux xtrietu sensu, et non pas au inugiqtiu<suppose
toujours du niuiia. Mais il n'y a rien lu qui ne soit impliqué
dans la notionmôme de l'interdit. Qui dit rite dit précisément
croyanceau maiiu qui dit rite négatif, interdiction, dit iuter-
diction concernant du raana, scrupule collectif en fuce de
quelque munu. L'analyse du tabou, de l'interdit, des causes
des rites négatifs, suppose cette série d'évidences acquises.
Maiselles n'ajoutent pas graad'chose à ce que contiennent
li's définitions préalables par lesquelles doit débuter toute
l'Hchercbe.
Toutesces théories de religion comparée sont pour M. Alar-
relt des éléments de psychologie sociale, et il attribue à ce
madère psychologique de nos recherches la plus grande
importance.Nouslui rendrons facilement raison. Et peut-être
fil ellet, préoccupésde montrer ailleurs les liens direct* qui
unissentles phénomènesde morphologie aux phénomènes de
psychologiesociale, avons-nous paru accorder aux premiers
uue importance exclusive. Mais il n'a jamais été douteux, ni
pour M. Durkheitn, ni pour aucun d'entre nous, que la plu-
part des problèmesposésconcernaient exclusivement des faits
de conscience,donc des faits psychologiques. Seulement, à
trop insistersurle caractère psychologique de nos recherches.
un risque de méconnaître ce que cette psychologie a de spé-
Sans doute, les pkéuomènes sociaux et, par conséquent,
les phénomènesreligieux sont, pour partie, des phéuomèues
psychiques, réalisés citez des individus, car personne n'a
jamais prétendu qu'ils fussent réalisés ailleurs, Mais puis-
qu'il est bien entendu que, par le fait de se passer en même
tt.'inpsdans un certain nombre de consciences, certains phé-
nomènesprennent, dans ces consciences, non seulement uni*
complexité plus grande, mais même une nature tout autre.
nous croyonsqu'il vaut mieux parler de sociologietout court.
L«'sprocédésemployés par lu science des religions, les faits
qui en relèvent sont si différents de ceux de la psycbologie
individuelleque, môme maintenant où lus écoles de psycho-
logie sociales'accordent pour souligner ces caractères diffé-
rentiels, il est encore préférable de no pas les atténuer par ta
terminologiequ'on emploie.
M. M.
"0 I.'ANXÉK
SdCluLOUIQl'K.
l'.PIMi-l'JO'J

F. MOKRCHEN-– Die Psychologie der Heiligkelt, Kine


ndujioimcmemtcluifilkhi'siwti?. Halle, C. Marhold, I9ÙS,
47 p.. in-8».
Ou ne sait. après avoir lu cette curieuse brochure, si l'au-
teur se fait une idée bienjuste de ce qu'est la sciencedes reli.
gions, ou de la religion, comme on dit eu Allemagne. Il est
évident qu'il croit scientifique son point de vue, puisqu'il
l'oppose à maintes reprises au point de vue théologique et
n'entend, d'ailleurs, entrer en conflit avec aucune doctrine
dogmatique< p. i)i. Sansdoute, M. M. a pris une attitude vrai-
ment positive et philosophique, comme on dirait dans les
langues où le mot de philosophiea gardé son sens de savoir
désintéressé. Maisle problèmequ'il traite est très particulier
et très limité Il prend l'expérience religieuse comme objet
de recherches purement psychologiques. Bien qu'il ne nie
pas l'importance d'uue considération « psycho-sociolo-
gique » ip. 34), celle-ci n'intervient que quand il s'agit de
juger, de critiquer, de mesurer « l'effet utile », de la notion
de sainteté, de critiquer, de juger, de hiérarchiser les diverses
sortes de saints que l'histoire nous fait connaître. On le voit.
au problème de la psychologiede la sainteté, d'une théorie
de la formation de la notion du saint, M. M. substitue uue
théorie des rapports de cette notion avec certains caractères,
avec ceux des individus que les églises, les peuples, les tradi-
tions ont appelésaints. C'est un tableau des qualités du saiut,
et, comme M. M. est psychiatre, c'est uue appréciation des
qualités qui font le véritable saint, le saint normal ip. 43,44
Cette dissertation est manifestement inspirée par les tra-
vaux de James, que l'auteur discute; elle aussi a un but
pratique (p. 30;, et sa méthode, relève encore plus de la
psycho.palhologie que de la psychologie normale. Seulement
comme, croyons-nous, la psychiatrie, sur laquelle M. M.
s'appuie, est plus fine, plus avancée que celle de M.James.
ses résultats sont plus intéressants. H distingue entre le<
saints qui étaient sûrement des vésaniques, des fous. et les
autres ip. 182et sq.j, et par suite, refuse, avec raison, de rap-
procher par trop l'état d'rtme de ces derniers des forme<
diverses delà mentalité religieuse morbide. Sansdoute, la sain-
teté peut se concilier avec certains troubles mentaux. Xfais.!>
plus généralement, le saint est tout simplement un homme
normal, dont le caractère, domina par un idéal, prend uu
ÏMAlTÈililî.NKlUUX 71

autre équilibre que celui du commun. M. M. admet, comme


M.James, que le trait essentiel des saints, c'est l'ascétisme.
la tendance à lu domination absolue de l'esprit sur le corps
qi. ii sq.j. Mais, taudis que James s'attache à démontrer la
cijiitiuuité des états pathologiques avec les états normaux,
M. M. s'attache, au contraire, sans nier cette coutiuuité, à
séparer les uns des autres Marguerite-Marie,fondatrice du
Sacré-Cœur, sainte Thérèse (p. 39;, Suso, ue trouvent eux-
mêmes pus grâce à ses yeux le surascélisme de l'un, les
transpositions de sentiments de l'autre, l'épilepsie de la troi-
sième,lui paraissent des faits bienétablis. 11n'y a sainteté véri-
table,normale,que là où il y a exultation des vertus religieuses;
mais où cette exaltation est sans aucune « tliéopatliie »,
sans rupture avec le milieu social, sans faiblesse intellectuelle
sans « désadaptation », dirions-nous. Ilfaut qu'il y ait « adap-
tation et effetsocial utile » (p. 37; sans cela il n'y a pas véri-
tablesainteté. L'homme le plus saint possède la plus saine
piétéip. 4G,47). M. M. n'ose pas dire que la santé intellec-
tuelle, c'est la sainteté, peut-être le pense-t-il ? Il se borne à
dire qu'il faut « la sauté spirituelle, un développement par-
fait de l'esprit, pour que la religiosité s'exprime sous les
formesles plus hautes et les plus précieuses ». Ses conclu-
siunssout singulièrement ratiouualistes si on les compare à
cellesde M. James.
Seulement cela est loin de la science des religions. Oncroi-
rait lire une édition faite par un neurologiste théologien du
chapitre du l'entateuque où l'ou enseigne la façon de décou-
vrir les vrais prophètes d'entre les faux. Cette curieuse bro-
chure contient des vues ingénieuses sur les rapports entre le
caractère et l'idéal religieux, l'ascétisme que celui-ci impose
au caractère, et la notion de sainteté dans laquelle ces rap-
ports s'expriment. Mais, parce que l'origine sociale, exté-
rieure à l'individu, de cet idéal, et de cette notionest mécon-
nue, les idées semées restent Iragnieulaires et médiocre-
mentutilisables. La psychologie du saint et de la sainteté ue
peut être faite que dans la mesure où la théorie sociologique
île l'un et de l'autre est déjà avancée. M. M.

A. LAN'G.– The origins of Religion and other essaye.


'Kalionalist Press Associations Londres. Watts, 15)08.liX
pp., gr. in- 16.
Desdouze « essais » contenus dans ce petit volume, le der-
"li I.AXXKK S0C)01,()(lll.ll'K. l!lO().|Ull'.l

mer seul est ttieuit Ihi-ortexoj the urujtini nf n'iujion ipp. 107
\iX-. L'auteur y coûtasse une « hérésie anthropologique
(p. III.
La religion primitive, sulou lui. ne pas en
croyauces amiuistes, comme l'a enseigne M. Tylor malgré
le rôle considérablede ces dernières, une forme plus ancienne
encore de la religion serait lu croyance en un être suprême
uu supérieur, en un Père des èlte&iAUFuthen, d'essence nul-
lement spirituelle. C'est cette croyance que M. L. retrouve
chez certaines sociétés australiennes (Mungan-ngaua des Kur-
Hai, etc.), où elle est, peuse-t-il, d'origine iudigèue et m-
résulte pas du contact avec les missionnaires. A ce sujet il
accuse de parti pris M.Mauss (Aitm'eSocial.,vol. IX, p. 180/
l'informateur kuruai de M. Howitt avait été initié seize ans
uvaut l'établissement des missions (est-ce bien décisif'/i. Si
Muugan-ngaua,en tant que divinité murale, n'était qu'une
adaptation du Dieu chrétien, ou ne comprendrait pas, suivant
M. L., pourquoi il n'est pas objet de prière, ni pourquoi les
femmeset les entants eu ignorent les attributs (p. 121).Mais
l'inllueuce européenne n'a-telle pu contaminer lu concep-
tiun primitive, sans pour autant lui faire perdre tous ses
caractères – Ce n'est pas ici qu'on pourra reprocherail
M. L. son infidélité à l'animisme classique. Mais, bien qu'il
refuse de décider (p. lia; si cette croyance en un Pèresuprôiw-
est antérieure ou non à la « philosophie évolutiouniste » des
Arunta tels que MM.Spencer et (Jilleu les ont observés), nous
sentons à notre tour citez lui (Voir notamment p. 119; un
parti pris, dorigiue théologique, eu faveur du caractère pri-
mitif dune telle croyance. C'est elle qui serait lit source de la
couceptiuu prophétique, monothéiste de Iahveh(p. \iit.–
Notons. â propos de l'iuterprètatiou des croyances bibliques,
l'hypothèse, curieuse, sinon probable, qui fait d'tëloliim, pri-
mitivement, un équivalent du mélanésien mmuiet des autres
termes de la même famille (pp. 100-1J Oi. M.D.

S HKINACH.– Orpheus, histoire générale des reli-


gions. Paris, Alcide Picard, M)09, XXMWopp.,in-IO.

Orpheus est un manuel de' l'histoire (les religions c'est


même un manuel de poche destiné au grand public.
L'nchapitre d'introduction expose de quelle façon l'auteur
conçoit la religion et ses origines. Les idées qui y sout expri-
ÏIHITHS liKXBUAl'X 73

mécsl'out été déjà dans les trois voluniesdes r«//c«, Mtjlltruet


Ikliyiaus dont nous avons signal» la publication en temps
voulu.La religion est uu enmuble de scrupulci
qui entravent
l'activité luimaiue. Ces scrupules ce sont les Inbou* tabou
scrupule. Scrupules cl'uue part, animisme de l'autre, telles
mjuI tes deuxsources de la religion. Le système des tabous
trouve son développement le plus beau dans letoVinimne,
qui
est délini comme uue htjpfrlni\>hirifc l'imtincl mini. L'aui-
inistneinspire Itimagiequi est lu .ilrat&jtednt'animUmi'.Sous la
rubrique magie, M. H. comprendtout le rituel, Cesformules
suiit iugéuieuses et spirituelles à les discuter, ou eu gâterait
lV'dat fragile. Les lecteurs de l'.l nnc'eSoriologiffuesavent, au
surplus, que uous ne les trouvons pas exactes et qu'elles sout
Inin de convenir à l'ensemble des phénomènes religieux.
Dans les chapitres suivants, M. R. passe en revue les
religions 1° des Égyptiens, Babyloniens et Syriens; 2" des
lliudous et des Perses 3° des tir-ïcs et des Romains 3« des
Celtes,Germains et Slaves Î3-des Chinois,Japonais,Mongols,
lïuuois, Africains, Océauieus,Américains, tous fort mal par-
liii^és G"enfin des Musulmans.
Plus de la moitié du livre est consacré à la religion des
Hébreuxet au Christianisme.
Le livre déjà été beaucoup luet le sera davantage,il n'avait
pas encore d'équivalent chez nous. L'écrire était rendre un
sisjimléservice au public lettré. H. H.

WILLIAM Wilsd.NKI.WA.XC. The socialfonction of religious


belief ;TIm-l.'niversilyuf MissouriSUidii-s,.Soc.se. st-r.Il 190S,
I vol.. IU3|>|i.,in-ll
Transactionsof the third international,Congress for the his-
tory of religions. – OxforU.Cluramliml>iwss.1 .vol., l'JUS.
|i. XI.tîT ut io7. in-8".;<Jnni: jieul remlrc uuiupleiI'iiik*i.-iiuv-
'Iii|n-di(;nous ne pouvonsiIoik;ijito MUiiak-rcc du
cuiii|iIimtii<1u
iiialaivl'iiitiiti-til(;lieuucouptins i:oiiiliiunii.Mliuiis
'Mii);ri.'S, qui y
»nliH>J l'iiili;s.)
JKVii.VS(K.-lt.; – Anintroduction to the study of comparative •
religion, Lumlnïs,Mm-iiiillan, IWi, MO\> in*
HAliKHT 0.). – L'histoire des religions et la méthode sooiolo-
gique. Annale*de philosophie chrétienne.I'JU8,pp. Iil5-ii38.
Mil.TAl'iW.1..– Ueber fehlerhafte Methoden der jetzigen ver-
gleiohendenReligionsgeschichte. l'mutischeJohrhikhei:luun
p. 114-133.
1\ i.'ansiîe soi:iiii,oiiigi"K. iwe-ifto'j

LOTIS M). – Deux manières de concevoir l'histoire des reli .


gions. Annales de philosophiechrétienne, octobre I9U».
lUtAl(i – Der Ursprung der religioesen Vorstellungen und die |
Phantasie. Htligion (mil Kunsi, XXXV11I,
a" 23. t

SCHM1DT (Le P. W). L'origine de l'idée de Dieu dans les sy-- :;ï
tèmes modernes de l'Histoire comparée des Heliidons. Élude lii
torico-crilique et positive. Antliropos, '1908, p. 12S, sq., p. 3:i<i >,
p. 859, p. 801, p. 1081; !90y, p. 207, SOS.(Nous reviendrons sm |
cette Olude quand elle sera termiuéf.) |
SCHAAltSCHMIDT (C). Die Religion. Kinfûhrung in ihro Eut- f-
«•icklungsgeschiciile. Leipzig, Piirr, in-8".
PFI.EIOKKEK(().). – Religion und die Religlonen, 1V07. k
HL'BEHT(II.) et MAL'SS(M.) – Mélange»d'Itistnive desreligions(7Vt ji
taux de l'Annie Sociologique) Paris, Alcali. 1909,p. XLII-23U(Hecui.il U
de travaux déjà parus, précédé d'une préface où sont exposées b: ty
idées duut nous nuus inspirons ici.;

l.'SE.NER(H.).– Vortraege und Aufsaotze. Leipzig. Teuhner f\


1907, p. 239, in-8". a
'i
FARNBLL[l. R.). Inaugural lecture of the Wilde lectures in j
natural and comparative religion. Oxfurd, lilackwell, VM' j
p. 31, in-8". (;|
Die Ekstase. Kin Ueilrop?.. Psychol. u. Voelkcrkuwli» ^J
liad Saclisu i. IL, llaucki^r.

HBAL'N'(Th.). – DiereligioeseWahnbildung.Kine "|


l'nler»uchunu
Ttibingeii, Molir, p. IV-74,in-8IJ. ê
MAYEH .E.-W.). Ueber ReUgionspsyohologie. Zeitehrift /«
|
Théologieund Kirche, 1908, pp. 293-:»24. '4

SCHM1UTDie vorsohiedonen Typen retigioeser Erfah- h


rung und die Psychologie. (ifiicrsloli, c. Itcrtelsmannn, I'jun. rj
IV-31*p., in-8".
I
HAST1NGS(H.). Encyolopaedia of Religion and Ethics. Edii
burgli, Olnrk;i. Co.. 1908. 1909 [m cours de publication, conlii-m
nombre d'articles excellents-. i.]
|
HAHItlSON(i.-K; – The influence of Darwinlsm on tbe study
Of religions >.xtr. de Darwin incmoiinlculmne], 18 p., in-S".
SV«TÈUK< WaiiilKCX DES SUUIKTÊS ISUJMU'HK-. 75i)

11.– SYSTEMES
HiaiUlKUX
DESSOCIÉTÉS
INFERIKUKKS.

Jusqu'à présent, nous réuuissions assez confusément sous


ce titre toutes les religious qui uesont ni nettement natio-
nalesni universalistes. Mais c'était cataloguersousune même
rubrique des systèmes très disparates. Au point de vue de ta
structure politique, de l'organisation juridique, on ne con-
fond pas les sociétés d'Australie, cellesde l'Amériquedu Nord,
et enfin des royaumes comme le Dahomey.Des distinctions
parallèles doivent être introduites dans la classification des
systèmes religieux. C'est pourquoi, parmi les religions des
sufiétés inférieures, nous distinguerons désormais celles qui
sont proprement et essentiellement totémiques et que nous
appellerons religions totémiques de celles où le totémisme,
tunt en subsistant, est pourtant eu train de donner naissance à
uneforme religieuse nouvelle. Ou y trouve encoredes totems
attachés à des groupements familiaux, phratries ou clans;
mais le culte des totems ou se modifieou s'efface pour faire
placeau culte d'esprits et mômede divinités proprement dites.
Même les clans, restant parfois reconnaissables, les sous-
yroupes religieux prennent un aspect nouveau, une nou-
velle organisation ce sont les confréries si souvent et si
improprement appelées sociétés secrètes. Nous appellerons
«s religions que l'on observe notammentchez les Indiens de
l'Amérique du Nord, Kfligion*inférieum à totémismefrôlai1.
Kllesnous rapprochent d'un système religieux plus élevé et
•lui pourtant ne saurait être rangé sous la même rubrique
ipie les grandes religions nationales. De cette espèce tel est,
«illuminent, la religion des Ewlie qui estétudiée plus loin. Ici,
il n'est plus question de clans, ni de phratries; la
religion
<'st devenue tribale et nous lui donnerons ce nom. Mais une
tribu, quoiqu'elle puisse parfois atteindre d'importantes
dimensions, n'est pas encore une société assex hautement
organisée pour mériter d'être appelée une nation. 11y a une
distanne entre un État comme l'Egypte ancienneet les plus
grands royaumes de l'Afrique occidentale naturellement elle
si!retrouve entre les religions
correspondantes.
Cette innovation dans notre nomenclature a l'avantage de
mieux marquer les intermédiaires qui rattachentle lolémisme
îwx types religieux les plus perfectionnés. Plusieurs des
lu
l/ANNÈESuilKil.fMlIQl'K. l««li-|!iWi

analyses qu'on va lire ont précisément pour objet de mai'


quer quelques-unes des étapes de cette évolution.

A. – U'xjixthitctotèmii/ui'.
I'ar MM.
Dihkiikhi et M.irss
C. STftEHLOW. – Die Aranda und Loritja-Staemme Jn
Zentral-Australien. Krankfurt ani Maiu, Joseph Huer.
liHl" et l'JOK;deuxfascicules, I. p. 104(VI pl.i;H.
p.N'
in-'r.·.
Les livres de M. S. sur les Aruuta étalent attendus avtr
impatience..M. Thomas les avait annoncés non sans éclai
(voir Année,X, p. W» M. von Leouliardieu avait donné dis
extraits sensationnels dans le (ikhm (190U,XCI1,ir 18H
XCIII,il- 11;.Onlaissait entendre que les travaux de Spencer
et «illen allaient être, sur certains points essentiels, révo
quéseu doute. Maintenant qu'une partie notable de l'ou-
vrageest publiée, uous pouvons juger qu'il n'a pus la portée
révolutionnaire qu'ou lui attribuait par avance, mais qu'il ne
laisse pas d'être hautement instructif.
M. S. a une supériorité sur ses devanciers il parait avoir
une connaissance pratique de la langue Arunta que ne
pos
sédaieut pas au môme degré Spencer et (Jillen. J)e plus, il
saitleLoritju queceuxci ignoraient ce qui lui a permis de
nous apporter des documents tout nouveauxsur celte tribu
que Spencer et (jillen rattachaient auxAruiila. mais qui, par
sa langue et certains de ses mystères lient tout autant des
Dieri et des Urabunua..Mais, outre que cette connaissance
n'est peut-être pas très scientifique là eu juger d'après de
gnivesdissentimentsavec.M. WetleugeldonllJlanerta résumé
les travaux dans ZeUnchr.{. Elhn., l!)08,AitstmlisctieFar*-
c/i««(/p/i,1, Aranét grainmatik), M. S. a sur les précédent;,
observateurs une grave infériorité. Il n'a pas été, commeeux.
initié à la tribu; arrive récemment, il a surtout conféré avec
des. vieillards agrégés à la mission d'IIerriuannsburg il ne
parait pas avoir directement connules groupements lointains
de I'Kst. De plus, c'est un missionnaireet ou lui a sûrerncul
tu bien des choses qu'on avait dévoiléesà Spencer et Oillcii.
Les variations que l'on constate au cours de su
correspim
danceavec M. Leouliardi montrent qu'il n'a pas eu tout de
suite connaissance des meilleures traditions,
SVSTÈMKS
IIKLIUIKCX
OK>siji:||Itks I.NTKHIEUHKS 77

] Ijmijsl'exposéqui va suivre, uous uousboruerous à indiquer


le* données nouvelles que nous apporte M. S. soit qu'elles
|
1 complètent,soit qu'elles paraissent contredire celles que nous
] devionsà Spencer et lîilleu.
Kmpremier lieu, nous apprenons que les deux phratries
in--ioiitpas anonymes, comme le disaient Spencer et Gillen.
|
Chacune a un nom et, vraisemblablement, avait un nom ï
-|
| l'uneest celle de rpiiu, l'autre celle de lu terre il, p. 0). D'après
le môme mythe, l'une et l'autre occupaientprimitivement des
i districts territoriaux différents. Il est vrai que, d'après le î
imniie mythe, chaque couple de classes matrimoniales 'le
j
couple forme par la classe du père et celle du fils* aurait eu
jj l'jçiilemeutuue hase géographique. On a quelque mal à se
représenter comment c'est possible; car il y a un couple de u
j classes de ce genre clans chaque groupe lotémique et chaque
i groupe totémique a sa localité distincte i cf. mythe du même «
] genrepour les Loritja, 11,p. 'h.
{ Sur deux points importants, M. Slrehlow apporte uue cou- ï
firniationà des hypothèses, que nous avons souvent exposée.*
|
1 11.:1.
Contrairementà M. Frazer, à Spencer et Gilleu eux-mêmes. li
¡ nous avons soutenu que certaines particularités de l'organisa- l
1 lion aruuta, loin d'être caractéristiques du totémisme primi-
j tif, constituaient, au contraire, des anomaliescurieuses, mais
| tiinlives, et nous avons attribue ces auomalies lebranle-
j meut que détermine la substitution de la filiation masculine
j à la filiation utérine (Antv'e,V, p. 82 et suiv.i. Différents iu-
j dires nous avaient amenés à supposer que, chez les Arunla,
la seconde avait précède la première. Le fait est aujourd'hui
établi. En effet. Strchlow nous apprend que, maintenant
encore, chaque enfant a deux totems: celui qui lui est per-
sonnel et celui de sa mère. Ce dernier est l'objet de certains
J interdits, joue le rôle de génie protecteur. C'est donc qu'il y
eut un temps où il y avait un autre mode de filiatiou que
celui qui est actuellement eu usage, où le totem se trausmet-
lait par les femmes (11,p. ÏÎ8,60-151 >.
D'autre part, comme nous l'avions supposé >Ann<!i;VI.
p. 28}, les tutems sout beaucoup plus nombreux que ne le
disaient Spencer et fJillcn. M. Strnhlow compte U2 totems
animaux, 2GUvégétaux. 145autres, df natures diverses, chez
les seuls Arunta de l'Ouest. En définitive, tout ce qui n'est
pas poison,sinistre, démoniaque, est objet de culte totétnique,

i
78 I.ANNKE
SUCIULOOlyL'K.
l'JOO-l'JOU
et tout ce qui n'est pas objet de culte est arunkultu, e'est-à- ji
dire siège d'uue puissance magique mauvaise. 11semble qu>
nous ayons allaire à une sorte de dualisme naissant,
Voici mainteaant par où les observations s'opposent ou
semblent s'opposer à celles de Spencer et (îilleii. f
Ceux-ci avaient nie qu'il y ait un grand dieu chez le ï
Aruuta. Il semble bien aujourd'hui que cette négation n'est i
pas fondée. Les Arunta connaissent un être, doué û'uu<
sorte d'éternité, qui vit au ciel; tes étoiles marquent ses eam
lienieiits i'l. l-2i. Il n'y a rieu là qui puisse surprendre, puis s|
que bien d'autres sociétés australiennes croient à l'existeiav
de divinités de ce genre. Ce grand dieu est, d'ailleurs, étroi
leinent rattaché au système totémique, nou seulement par la |
forme sous laquelle il est représenté, mais aussi par le nom |
qu'il porte. Il s'appelle Altjira; or, c'est aussi le nom du |
totem maternel (11, p. iify. D'ailleurs, il est remarquable que [:
cuntrairement à Baiaiué, Daramulun, etc., il ne joue aucun
rôle dans le culte.
C'est sur la question du cliuringa et de la réincarnation qui-
la divergence est, en apparence,la plus grave entre M. Streh
low et ses prédécesseurs.
Le churiuga (M. Strelilow écrit tjuruuga) est une pièce de ?
bois ou une pierre sur laquelle des imagos totémiques sont
gravées; il est l'objet d'un respect religieux et de rites impor-
tauts. Suivant Spencer et Gilleu, chaque cliuriuga servi-
rait de résidence t une âme d'ancêtre. Suivant Strehlow, ci*
serait seulement ou le corps de cet ancêtre ou une image d<- [
ce corps (il, p. 70, 77, 84/. Il en serait de mômede ces arbres
et de ces rochers que Spencer et Gillen appelaient nanja cl
qui sont censés s'être formés partout où un ancêtre est venu
s'abîmer daus le sol. Eux aussi ne serviraient de réceptacle à >'
aucuu esprit ils seraient les corps mêmesde l'ancêtre, pétri
fiés, des doubles du churinga, par conséquent. – Nous
avouons que la différence entre les deux versions nous laissa
indifférent. De part et d'autre, on reconnaît que le churinga
est sacré ainsi que l'arbre nanja que l'un et l'autre soutien-
nent un rapport étroit avec les ancêtres. La lettre du mythe |;
par laquelle l'indigène essaie de se représenter ce rapport.
varie seule suivant les observateurs. La divergence est tout
à fait secondaire. Il est possible que l'interprétation mythique
varie avec les localités, les individus. Le fait qu'elle exprime
est, en tout cas, constant.
SVSTÈMKB
[IKI.iniKI.'X DE'i SUC1IÎ1 IC* INKÉHIEl'UE* 79

L'écart parait plus considérableen


•«ni>t rinrvilt nliitt PïinsirlmMhlfl ce fini
pu pf> concerne 1»
qui flnneerne la tlll'O-
tliôo-
iii*de ta réinourauliou.
Suivant Spencer et Gilleu,chaque naissance serait due à la
iviucamation d'une àme ancestrale qui, du churinga ou de
l'arbre naujn, passerait dans le corps d'une femme qu'il fécon-
derait. Strehlow nie formellement qu'il y ait réincarnation.
Suivant lui, l'unie, une foislibérée du corps, s'en irait à l'lie
des morts, où, au bout d'un certain temps, elle serait anéan-
tie il lui serait doncimpossiblede se réincarner (I, p. 18-16).
S:tnsdoute, pour lui aussi, la génération, chez les Arunta,
serait attribuée à des opérationsmystiques, mais d'une autre
nature. Il y en aurait de deux sortes. Sur chaque arbre ou
rocher nanja (Strehlow dit ngarra), vivent des embryons
d'enfants, appelés rntupa, qui sont du même totem que l'an-
ciHredont l'arbre représente le corps. Cesont ces embryons,
qui out à la fois un corps et une dîne, qui, en s'introduisant
chezles femmes qui passent à leur portée, seraient la cause
de la conception. Dansd'autres cas, c'est l'ancêtre qui inter.
vient en personne. 11sort de terre et lance sur la femme un
petit churinga spécial,appelémmatum. Le churinga pénètre
diiiis le corps de la femme et y prend forme humaine. Ce
seraittrès exceptionnellementqu'il y aurait incarnation pro-
prement dite et un mêmeancêtre ne se réincarnerait jamais
qu'une seule fois (II, p. SI et suiv.).
Commenous devons, dans un prochain ouvrage, discuter de
près cette interprétation, nous ne nous arrêterons pas à l'exa-
miner longuement. La seule analyse qui précède doit suffire
à donner le sentiment qu'ici encore le désaccord porte sur la
forme plutôt que sur le fond.Le rnlapa qui pousse sur l'arbre
nanja, c'est-à-dire sur le corps de l'ancêtre, en émane évi-
demmentet l'exprime; c'est donc quelque chose de l'ancêtre
qui se réincarne. Et le churingaprocréateur ne tient pas de
moins près à l'être uucestral. 11est donc manifeste que l'en-
tant est, dans un cas comme dans l'autre, une émanation de
l'ancêtre et c'est toutce qu'implique le dogme de la réincar-
nation. Les contradictions que l'on a prétendu relever entre
Slrehlow, d'une part. Spencer et Gillen, de l'autre, ont douc
i'Ié Kraudement exagérées.
C'est à la mythologieque ceslivres apportent la contribu-
tion la plus neuveet la plus importante. Dans les ouvrages de
Spencer et Gillen, les mythes Arunta tenaient très peu de
place ils étaient à la fois rares et maigres. Au contraire, les
80 I.ASNÉK SuUKiLOUlUl'K. IWMî-IW)

documents réunis par Strehlow, et dont quelques-uns non


sont donnés clans l'original avec une traduction juxtalluènin*.
fout apparaître une abondante mythologie totémique, et qui
présente des caractères très définis.
Ou y remarque notamment l'existence de véritables cycle.-
mythiques qui se retrouvent dans les différentes tribus. Le
mythe Loritja des émous coïncide de tous points avec le
mythe Arunta sur le môme sujet il, n" 17 et 11, n" 10; c'est
le même formulaire, ce sont les mêmes épisodes, lu tn<>nic
histoire des sous-cluns, etc. Mythes et cultes. par conséquent
(car les formules du mythe accompagnent des cérémonies
commencent donc à prendre un caractère inlernational.
D'autre part, l'histoire légendaire que racontent ces mythes
nous apparaît sous un nouvel aspect. C'est, comme on sait.
l'histoire des premiers ancêtres, animaux et hommes à la fois.
que ces peuples mettent ù l'origine de leur civilisation D'après
Spencer et Gillen, ces troupes mythiques formaient des masses
impersonnelles, sans chef, sans individualités distinctes, cl
qui n'accomplissaient que des actes d'une extrême généralité.
A travers les récits que nous rapporte Slrehlow. nous voyons.
au contraire, que chacun de ces groupes a à sa tète un chel
ou plusieurs et que la troupe est formée de jeunes initiés.
Nous savons môme souvent leurs uoms, leurs relations di1
parenté qui reproduisent les rapports entre totems et sous-
totems. On nous dit ce qu'ils faisaient ce sont des cérémo
nies totémiques qui ont pour objet d'initier les jeunes gens.
de réaliser le totem, de fonder des places totémiques. Ainsi
les chefs de l'eau fabriquaient la pluie, le tonnerre, les éclairs,
la grêle, les sources en chantant et en dansaut les uns autour
des autres il, p. âii. Il semble même que la mythologie
Arunta ait abouti parfois à la formation de personnalités
divines on va jusqu'à nous parier de déesses il, n* 11 et 12 1.
A vrai dire, nous croyons qu'il y a là une illusion: il s'agit
simplement de « dames «, sorte de fées totémiques, « tantes »
aveugles qui donnèrent la vue et la liberté aux kangourous et
aux émous. Ce ne ne sont pas plus des déessesque les ancêtres
mythiques ne sont des dieux. Les mêmes remarques s'ap-
pliquent à la mythologie Loritja.
Cette mythologie nous apporte, de plus. des renseignement-
précieux sur le rituel -que M. Strehlow doit, d'ailleurs. étu-
dier directement dans un prochain fascicule. Xousy trouvons.
en effet, le formulaire d'uu grand nombre de cérémonies
SYSTÈMKS HKMMKLW UKS SUCIÉTÉ4 IStiWKfREi» 4 !Si

',7. n.a~-
lulûmifjues. Nous pouvons uiusi nous figurer, mieux que par
le passé, les rapports entre la formule et le rite manuel, entre
ta représentation tolémique, le rite oral et le mythe auquel
la formule sert en quelque sorte de rubrique sommaire enfin
nous connaissons la structure môme de ces formules, leur
sens littéral, leur prosodie.
A ce recueil de mythes relatifs aux ancêtres des totems, et
qui se distinguent par leur caractère sacré, la manière ésolé-
rique dont ils se transmettent, la foi qu'ils inspirait,
M. Strelilow ajoute et M. Leonliardi oppose (II, l'réf. p. H) de
courts recueils de contes ce sont des traditions que l'on
raconte aux femmes et aux enfants et qui, par leur contexte,
semblent indiquer que les conteurs mystifient ceux auxquels
ils s'adressent II, p. 101). Les plus importants sont des des-
criptions éxotériques de l'initiation, du cluiringa et de ses
usages. Maintenant la mystification est-elle si complète que
l<;s non initiés ne croient à rien de ce qui leur est dit ainsi,
c'f;st ce qui ne nous parait pas établi. M. Leouhurdi a raison
d'être embarrassé par ce fait que certains vers d'une de ces
légendes Loritja sont composés en langage secret, et sacré
If, p. 40,11.1)'. l, E. D.etM. M.

J. ËYLMANN. – Die Eingeborenen der Kolonie Sttd-


Australien. Bertin, Relmer, 1908, 28-494 p., iu4".

Au contraire du travail de M. Strelilow, le livre de M. K.


n"r;st pas le produit d'observations approfondies, portant
I. Lus travail* uu M. Strelilow ont déjà suscité toute um- llllvraturc..M.
Il utland iC'oii.vmj Ilixt. o/te/i; I. p. ïï-ii) u essayé île réduire lu pcn-tt-i-
il' » doeumenlsconcernant ïaltjim. M.(.une (.W«n,10(18. »• Uct l'.NMi,n«î3)
ni ii est, uu contraire. CMiipun:pour tuainli-nir so< idées sur le caractère
l'iiiiiitif d(; lu noliuii du i>runil dieu et sur le caractère secondaire «V.
nul unis (cmeurniiiit lu nMntamtliun. Le 1>.Sclimlill est r-nuliTin-iit inti-r-
v.-iiu dans lu débat illie Sh-Uuiifi der Araiula maler tien ituntniliiclie»
>l'in>men, in Zeitschrift fiti1 Hlliiuttiigir, 1!IO8.p. S6.'is<|. et. L'origine ('«•
l'i'h-e »//• Dieu, in Anlhropm, III. p. SUS,IV. p. 2ii7j il ml justf du rccnii-
n,ui|v i|u< ihttis ms nrlirliis, il nbundoiiiii*li' tun a]iolugt"-ti>|Li<ltit>olu^!l<|u<-
'•! pi-rsonDi'li|ui lui est routimiii'i1.
>'nus uuti.'i humons il <rs indiruliniis..iim.s entrer dans li- dûtail dt I"
•!i-rus>'mn. La i|Ufstion ilélmltui' est duulih'. Il s'apit, d'almid. di; savoir
i rurxnuisuUoii Arunla est primitive du mm. Sur ce
point. nous avims
|iii> position depuis longtemps cl nous avons plaisir il con«iaii-r <w. l'opi-
l'Miiiqui' m/us avons souleiiue ici dés l'uiiwini: est acri-pti-i- aussi bien |i»r
M. llartland i|iie par M.Lang et M.Si'linililt, nd versaiivs par aill><ur>.Sur
'.i i|iiestiuu du grand dieu nous avons indii]ui'- plus liuut qui-lle itsl nnliv
iiHilnili'. i|iii' nous eoinploiis justilier plus rimipléli'tm-nl (lan> l"»u\raiî.-
nnnuwt! ri-d«ssus.
K. OniKiiKiM.– Annèi' Mjciul-, l'.iUii-Hiuri. ii
82 )9IM»-tU0»
l'AXXÉE SOCIUUlOIQl'IS.

sur un groupe de populations australiennes bien déterminé.


C'est le fruit de deux randonnées ethnographiques à travers
ce coutiueut, depuis Palmerstou et Port-Darwin au nord
jusqu'à Adélaïde au sud. Nulle part l'auteur n'a longuement
séjourné il n'a nas été initié aux secrets des tribus; il n'a pu
se passer du secours des interprètes ou des missionnaires. De
plus, les sociétés avec lesquelles il est entré eu contact plus
ou moins fugitif. il ne les a atteintes qu'auprès des stations,
auprès des éleveurs de la brousse, et des missions protestantes
ou catholiques. 11est vrai que ses constatations à ce pro-
pos (chap. xx et xxn out au moins cet intérêt elles itou»
apprennent l'état réel, actuel des sociétés australiennes du
centre, infiniment plus attaquées, ruinées, altérées par l'in-
fluence européenne qu'on ne le croit d'ordinaire. C'est par
unetïort d'abstraction légitime que MM. Spencer et Gfllen.
M. Strehlow lui-même, nous représentent les Tjingilli, le>
Arunta, les Warramungu comme vivant encore à l'état où il,
pouvaient être, il y a une trentaine d'années, avant les mis
sions, les fermes, la petite ville d'Alice Springs, les mines, \v-
rôdeurs, les fonctionnaires européens. – D'autre part, l'uni'
des expéditions de M. E. a été faite avant la publication de*
livres de Spenceret Gillen, et en lutte; l'autre a consisté tuitl
au plus en une vérification également hâtive des donnée.
antérieures, dont M. E. avait pris connaissance, et auxquelles
il fait de targes emprunts.
M. K. a adopté, comme bien d'autres ethnographes, uni-
méthode sociologique d'exposition. Les faits qu'il a décou-
verts ou qu'il enregistre comme venant d'autres auteur*,
sont rangés sous des rubriques logiques, et non pas par
groupes ethnographiques. Comme il s'agit de 10 tribus au
moins icf. p. H»3', aussi éloignées que les Narrinyerri des
environs d'Adélaïde,et les MaladeMalack. l'on goPongo, de*
environs de Port-Darwin, cette disposition permet de dresser
des sortes de caries des phénomènes sociaux. C'est ainsi qui
M. E. a pu déterminer faire d'extension de certaines arme-
telles que le boumeraug. Mais ce procédé le désavautapi-
de dissocier brutalement les faits appartenant à une mènx'
société. Onne peutplus se représenter ce qu'elle est que par
un travail da recouslruction, qui n'est pas facile. On ne peu1
plus, surtout, marquer les limites du savoir de l'observateur
et critiquer aisément ses conclusions.
(vuce qui concerne la religion. M. të. ajoute peu de clnw
·
iViTKUKS ItKLIiilKl'X I>KS>Di.-|hlTKS INFKHIKI.'nK-! 83

à ce que nous connaissons par tes travaux antérieurs. Xous


citerons, entre autres contributions des compléments à la
mythologiedu dieu Narruuderre chez les Narrioyerridu Sud
(p. 182i, et son rôle remarquable de psyehopompe(p. 189j
des faits analogues au Nord. Awarai, Larakia (ci. p. à2uj
dis remarques tort justes sur ce qu'il faut entendre par léti-
ihisme en Australie'p. lW),sq.)etsur le nombre relativementL
considérable des mauvais esprits lAruuta et autres, p. 184,
mj.i.– t'ourles pratiques religieuses, l'attention de M. E.
ue s'est portée que sur trois groupes de faits l'iutichiunia,
l'initiation, tes cérémonies funéraires. L'intichiuma est à tort
rangé parmiles pratiques magiques; l'influence de Spencer
otiiillen se lait sentir là aussi ip. 208,sq. A ces faits connus,
l'auteur n'ajoute guère que quelques renseignements complé-
mentaires sur les iutichiuma des tribus du lac Kyre et leur
caractère ascétique (cf. p. 113;. Chezles Wuhvangu du Nord,
dans une des sociétésoù, jusqu'ici, ou croyait que l'intichiuma
n'existait pas, on trouvera un curieux début de sacrifice
(p. -2\\). – Pour l'initiation, à tort détachée de la religion
q>.-MO,sq.i, presque tous les faits sont du type commun eu
Australie,et l'une des seules données nouvelles est l'interpré-
tation indigène des cicatrices infligées aux divers membres;
elles seraient destinées, dit-on, à augmenter l'habileté de ces
j membres (cf. p. 118, -llflj. –Quantaux cérémoniesfunéraires,
1 letableau qu'en dresse l'auteur est suffisammentclair et coin-
j pld. 11marque, d'une façonintéressante, le caractère à la fois
i volontaire, conventionnel, traditionnel, d'une part, et dtili-
} raut, hallucinatoire et passionnel des macérations que les
i Ȕkiisen deuil s'y infligent 'cf. p. 113,114i.M. K.ne parait pas
| avoir toujours comprisla signification du doubleenterrement.
,| 'analysedes croyances concernant l'Aine, celle des rites
'.{ et des notions magiques, celles des interdictions saut, au
5 cinilraire, souiiliaires à l'excès. C'est d'autant plus surpre-
1 uîint, eu ce qui concerne surtout tes interdictions aliumu-
:| tiiircs,que l'auteur accorde toute son attention a la nourri-
,| tnre et aux arts quis'y rapportant. Aproposdes rites curatifs.
j nousnoterons que les connaissancesmédicalesdes Australiens
j semblent beaucoup plus étendues qu'on ue le croit tl'onii-
naire ip. iii et suiv.. 440et suiv.j.
:j Non seulement M. K. n'a étudié que les peuplades qu'on
1 imminencedéjà à couuattre et quiavoisiiicut la longue chaîne
;| ili.'sstations européennes fondées autour de la ligue télégra-
H i.'an'nkk socim.oiiiQUK. îuutt-ttwi

nhirfiift.de In
plnque, fie la rnnto.
route, nnnpt-inno.nnuc
pourrions-nousilî,*a
dire, iH<i>,anAiiiir.A.
Iriinscoutinentuli'.
niai», de ces sociétés elles-mêmes, le tableau qu'il noustruc'
est fugitif et incomplet. Sur l'organisation sociale, les classa
matrimoniales en particulier ip. 150, sq.) il ne fait qiu
suivre, avec quelques additions (totems Narriuyerri, p. ltîii.
totem» Turra, p. ÎIHS,.les renseignements donnés. Sur le-
débuts de l'art, ses observations ne portent guère que sur \c-
arts plastiques, bien étudiés ceux-là, taudis que le corru
boree, les arts musicaux sont très brièvement traités. Kn lin
guistique, il reproduit des documents anciens, une courte
grammaire Dieri due à un missionnaire, des vocabulaire-
écourtés. -On trouvera ça et là ip. 201. 2O2i des renseigna
ments très curieux sur le rapport entre les instruments <!
culte et la monnaie.
Sur un point cependant, les qualités de l'auteur ont <M-
utiles et lui ont permis d'abondantes et neuvesobservation»
Ses connaissances physiologiques,
psychologiques et médi
cales ont suscité des réflexionssur l'importance du
rythme ,:
de la répétition dansies arts de ces peuplesfp.3), sur la natuiv
de la sensibilité, de la suggestibilité (cas Je l'art, p. 417-4IS;
influence suggestive des vieillards, p. 170. 174 cas de th;>
natomanie, p. 220-221 importance du rêve, p. ii\). Toute
ces données peuvent être utiles quand ou tentera décousu
tuer la psychologie collectivede ces groupes. qui représentai'
ceux que nous pouvons nous figurer comme les
plus primitif
parmi les groupes humains. M. M.

N. «'. TIIt)1I~1S.-Native Tribes of Anstralia..1'utirr 1/11"


o{ thr Dritish Empire. London. Constable, l!)0lî, XIl-lM
p.. iu-8".
Lelivre de M. Thomasest un simple livrede vulgarisation
clair, intéressant. Maison se tromperaitsi on ne le considérât
pas comme un travail de savant.et d'un homme dont l'érudi-
tion, concernant lestribus australiennes précisément, est dis
plus étendues et s'alimente aux sources mêmes. Chacun rl-s <
chapitres suppose une sorte de bibliographie exhaustive. nu
travail de sociologiedescriptive, dont l'auteur n'a donné
qm«
le résumé, dont il n'a extrait que les faits les
plus curieux,
les plus clairs, les plus propres à éveiller l'attention d'un li <
large public. Leschapitres concernant la technologie ?iv, v.
paraissent avoir été.l'objet de soins tout particuliers l'étu-le
«VSTèUK*IIHUlilEl'X 1>H9SOCIKTK<IXFKHIKUHKS H$

ilil canotet du boumerang sont particulièrement soignées.


Peut-être, pourtant, la part est-elle faite un peu large aux
hypothèsesqui rendent compte des phénomènes sociaux au
moyeud'emprunts (exemplo, p. 138;.
Sur la religion, ou trouvera d'intéressants résumés..Nous
«iuiialons,eu particulier celui des notions australiennes cou-
«yrnautla nature, le moude i p.ki, sq.> il est fort exactement
rmigésouslit rubrique Science.11lie faut pas, en eflet, oublier
i|iie la mythologieixvi, et la magiesoutbieu ce qui mérite le
nomde science daus ces tribus. Celui qui est cousacré aux
ilmiseset auxchauts (p. 119, sq.j, est sobre et juste daus sou
¡ (.usemble;le tableau succiut, mais exact dans sa répartition
Ê'-mirale,des cérémonies d'iuitiation et des rituels funéraires
mériteégalement d'être sigualé. Sur la nature religieuse des
rites et des croyances totémiques, sur l'existence de la notion
dus grandsdieux, leurs rapports avec les totems et phratries,
leurs mythes, M. T. s'exprime avec prudeuce; mais il classe
Us ialiehiumaparmi la magie.
L'organisationsociale, les phénomènes juridiqueset écono-
miquessont plus sommairement décrits, et c'est peut-être sur
ceschapitresque nous trouverions le plusà dire. Par exemple,
comment comprendre, même après avoir lu l'autre ouvrage
j deM.T. (ci. plus loin que le système Kamilaroiest un renver-
sèment du systèmedes classes (p. lOÎJj.alorsque, précisément,
j
les tribus Kamilaroi sont celles où il est le plus nettement
eu usage.
i Mestaussi ôtouuaut qu'avec toute la prudeuce et la critique
j que M. T. applique à ses travaux, il laisse échapper des
j 'illirmatiouscomme celle de la généralité de l'épilation de la
:| barbe, en Australie ceutrale (p. 15"ou des hypothèses comme
j «.-Ilede ladate récente de l'invention des appareils à feu (p. 61;
prouvée par l'existence d'une légende sur leur origine des
J classementscomme ceux des combats réguliers, mensuels, au
| ijuiienslaud,sous la rubrique jeux, classement cause par une
j trop grande foi dans les auteurs. M. M.

VISSCIIEU. ,11,.– Religie en gemeenschap btyde Naturvolken.


j
j I, l'treuht,Huys,iu-8«,7-23«p.
III.HEUl^M.). – Notes sur les religions dites primitives. lu eue
,¡ drl'L'nieeratté
tte liraxellex,191),J,
p. !i5t-!)5S.
j
liltdSA.). La religion des peuples non civilisés. Paris, U-
Uiinlloux, 1907,iu-S«,p. XXII1-300.
86 i-'an.nék .<ui:iuLoniQt'K. l'J0tt-l«09
n.
.MATIIEWS :H.-II..– The totemistio system in Australia. Am-r.
r
AHliquiiriaii,J9U0,XXVIII.
3.
LA.MiA.. – Animal nainesof Australlan « Class » divisions
Mail.i'JOO,iv 13.
LAXt!A. Quœstiones Totemioae.Slau, îwo, n«n. (béït;ml
>
théorie«outreliiirtltind.

VAX A\ – Totemism.Kiîponseà M. l.aii({..Van, Hmi).


ilENNKI1
n'y».
I-AXGA.. – QuwstionesTotemic». Areply lo Jf. VanOenm'p.
iWrt»,
l'JOO.nlJ112.
TuL'TAIXJ.. – L'Histoire des religions et le totémisme. /ht
delllîsl. ik*HeliyioHi,
I'JU8.LVII,p. ;(:):)-:<!iV.;Uiscutn
les tiiêorî.
de M.Heinuuhqu'il iJentilicavoc les nôtressans aucune raison
VAXUE.NXKI':A.. – Totémisme et méthode comparative. Rcv.
l'HUt.desMillion*,19us.LVIII,p. aî-7G.(Képouseù l'article pr<
cMc.nl.}
BHuWXA. S:. Therellgion of the Andaman
Islanders. Folk-
l.ore,\WJ,p. -257sij.|.

Jî. – Systhnn reliijk'iu à tolêmUmercoluè.

l'ar M.M.Cr»s.

A.-G. HADUONlet ses collaborateurs i.– Reporta of the


Cambridge Anthropologieal Expédition to Torres
S trait s. Vol. VI. Soeinlom/, Magie and Heliginn
oj Ih-
Eastern hlnmlm. Cambridge, L'uiversitv Press, 1908
XX-»l«pp.,in.8«.
Ce volume est, curamele précédeut"cf. Année
Hocioloijiqm-.
IX, plutôt une sériede travaux coordonnés qu'un livre métho-
dique. Cependant, cette (ois, tout ce qui coucerue la religion
a été rédigé par AI. Haddou, avec la collaboration,
pour
le culte de liomai-ilalu et pour tes rites funéraires, de
M. Myers.
C'est aux gens des îles de l'est du détroit de Torrès
<\w
M. Haddo» et ses collaborateurs,M. Rivers, le
regretté Wilkin
son, M. Ray, se sont attaqués. M. Haddon les couuaissaii
depuis sa première expédiliou de 1888.Il les revit en lSJHi,
mieux équipé, secondé par une escorte de collaborateurs avi-
.«Y*TftM8*lUiUOIRl-XDK8SOCIÉTÉ
IXFÉmKtnB* 87
Mi»;il l\lll tit*iifi du
put prolUer toi*travail
stu ltt«ii»<i!l
fait dans f<.ïi .1 H* i it •«
l'intervalle par M.Iluut
.cl. AnnéeSoc VI), des connaissances
approfondies qu'avait
iicquises M.Bruce, le gouverneur anglais de ces îles (cl.p. xx;
dos documents entiers appartiennent eu
propre à ce dernier
jj. iU,26li,etc. i, desprogrès intellectuels réalisés par certains
i indigènesqui pureut remettre des manuscrits entiers à M.
le liuguiste de l'expédition (cf. Ray,
Itep. Cnmbi: AV/w/. Tnn-et
l Mr.,111,UmjwMies, par M. Hay, p. 300. ete.i.i.
¡ Seulemeut, dans l'intervalle, la décadence des institutions
suciales s'est accentuée, peut-être encore
I plus qu'aux Iles
i occidentales.Les gens des Murray, ceux
sur lesquels porte, de
¡ préférence,1'observatiou, sont chrétiens depuis plus de viugt-
j t-iuq ans (p. 200, p. 81li. La plupart des sanctuaires et des
(.-tichesn'étaient plus, il y a dix ans,
1 que des reliques, encore
| précieuses,d'anciens cultes (p. 219) Ou leurattribuait encore
| quelqueforce, quelque valeur, mais ou ne s'en servait
plus
pour les usages auxquels ils étaient destinés. Certainsdurent
t'ire reconstitués artificiellement. Aussi nos auteurs
s'ex-
priment-ils d'ordinaire à l'imparfait. Les cérémoniesaux.
quelles011tes fit assister furent remises en vigueur après de
¡ longuesannées de désuétude. D'autres sout devenues
Mêmele grand culte national, celui de la société desdes jeux.
j hommes
à Mer,let plus importante des Iles, le culte de
Homai-Malu,
bien qu'il eut pour subsister toute l'autorité
j que donne
;> I organisationpolitique et religieuse, était déjà caduc il y a
,1 vingt ans. C'est donc à une reconstitution, à une restauration
l -cf. les planches XXIX et XXX que l'ou nous fait assister
I -Nousconvenons qu'elle est faite avec
prudence, ingéniosité,
,j habileté, à l'aide des rneilleurs auteurs indigènes. Maisnous
1 nous demandons si tant de travail n'eût
pas mieux été
1 à
appliqué observer des tribus moins éloignées de leur état
j uatif ».
) Quoi qu'il en soit, que les faits soient établis
plutôt par
J induction que par expérience directe, ils n'en sont
pas moins
| importants pour uue théorie générale de l'évolution religieuse,
<-tde la décomposition du totémisme. Nous
!)1 assistons, eu effet,
» l'aide des travaux de M. Haddou et de ses collaborateurs.à
"ue véritable expérience telle
que nous n'aurions osé en ima-
pilier une « pviori. Xous avions indiqué, eu
reiwlaut comptedu
volumeV, que les Insulaires occidentaux
(Mafouiag,Muralug,
i-tc.inous semblaient présenter des
I plu-nomiMiescurieux qui
j nous permettaient de concevoir le
passage des cultes loté-
8& I.'A.V.VIJK SUUlOl.tiiilgl'K. l'JOlMUOU

miques il ceux du héros national. Le culte de kwowin, les


mythes de Sida, de Uogai, qui réapparaissent ici, nous seui-
blaieut assez près des cultes toténiiques dont ou consultait,
d'ailleurs, l'existence'de façon assez timorée, il estvrai mais,
en même temps, ils uous paraissaient assez éloignés de ces
mêmes cultes pour pouvoir être rapproché? des grinds dieux.
L'évolutioncommencée là-bas s'est achevée ici. Les habituais
des lies orientales n'ont plus de totems, ils n'eu ont plus qui*
des traces. Ils ont un culte national, celui de Bomai-Mulu.
beaucoup plus développé, et, à lit suite de MM. Haddou et
Hivers, on peut donner de ce fait une explication.
Litdécompositiondu totémisme • – D'abord que reste-t-il du
totémisme M. Durkheim, plus loin, dira ce qui en subsiste
au point de vue juridique. Au point de vue religieux, il eu
persiste assez pour que nous soyious sûrs que les Mirium en
particulier l'ont connu aussi développé que dans les Iles de
l'Ouest, et que dans les tribus de la Nouvelle-Guinéeaux-
quelles, d'ailleurs, ils sontindubitablement associés. Outrou-
vera les faits bien discutés par M. Rivers fp. 172, sq.j par
M. Haddou (p. 253 et suiv.j. 11y a mêmedes phénomènes du
classification (p. 187, 202 C'est déjà ce qu'avait glguah*
M. Hunt et nous lie croyons pas que, sur ce point, ses observa-
tions soient controuvées. Mais le seul cas de parenté directe
entre animaux et groupeshumains qui survive encore est celui
d'une sorte de totem à la fois funéraire et sexuel hommes et
femmes deviennent, après la mort, des lumar, des esprits,
mais qui ont une forme animale, différente pour chaque sexe
fp. â»71.Un autre cas est celui de la forme animale du grand
dieu. Bornai,qui est, comme lu première de ses confréries, uu
crocodile, lie ham ses gens s'appelleut eux-mêmes des
beizam. Mêmeon dit à M. Haddon, dans le jargon oit on lui
transmit la plupart de ses documeuts*. Ikizatn soyo belomjur
<p.i't't). Nous ue doutons donc pas que le culte national ne
se soit développé à partir de celui d'un totem tribal peut-être
est-ce celui de la société des hommes Notrehypothèse est
assez différentede celle de MM. Haddon et Hivers qui pensent
que le culte de lieizam et celui de Dogai, par ta manière dont
ils s'opposent et se balancent p. 17-4,î~2), semblent plutôt
être d'anciens cultes de phratries. Mais, en réalité, ces deux
explications ne sont pas tout à fait incompatibles l'une hv«:
l'autre; car, en général, les totems tribaux sont d'anciens
totems de phralries. En tout cas, il est bien certain que tous
<Y<TÉMKSIIGLIIHEL'X UM SÛCIÉTli* IXI'ÉIUEL'KRS 89

W<membresde la confrérie des beizam, bieu que recrutés dans


(W< clanslocaux différents, seconsidèrent tous commeparents
ils sont tous des crocodiles. Cette parenté est établie, et par
lo< ri tesfuuùraires,et pur les cérémouies du grandculte Hoinai-
Miilu,et pur divers pouvoirs que ces gens possèdent, notam-
un'iitcelui d'imposer des tabous de propriété il forme de ero-
finlile.L'association du nom animal et du culte des animaux
sembledonc n'avoir persiste d'une manière durable que dans
!i.'< formes les plus récentes, le? plus évoluées du totémisme,
lii i>ùelle eût du disparaître, si les phénomènes sociaux
régressaient suivant ta même loi que les phénomènes psy-
i'liii[ties.
Maissi peu de chose subsiste qui mérite à quelque degréle
mumde totémisme, au contraire bieu des croyances, bieu des
institutions ues'expliqueut, surtout chez les Miriain,que par
lulutémisme.La plupart sont rangées, arbitrairement, sous la
ruliri(jue magie (chap. \w i, simplementparce quel'action des
rit'-s y est « intrinsèque » M.Haddousuit ici la définition de
M.l'razer que, par ailleurs. il n'admet pas. Lespratiques ainsi
cataloguéessont des actions exercées par des clans locaux dé.
terminéssur des piaules et des animaux qui sont appelés leur
ni'jiiou leur nijiul. Ce dernier mot est identique à ï'auguil des
\\v<de l'Ouestet siguifie totem. Le zotjo, c'est, dans les dia-
leiMesdes lies orientales, ce (|ue font les membres de la cou-
Itvtïe (appelés sogni, laquelle est d'ordinaire recrutée dans
des familles, quelquefois dans des villages d'un district ou de
dUlriclsassociés. Les zoijnce sont aussi les charmes; le même
mut désigne le caractère des mots et des formules qui sont
employés dans les rites et qui portent le nom de zoijo mer
ip ^Di.M. Haddou, qui sent toute l'importance de ces notions
abstraites et confuses, remarque lui-même l'analogie du znya
fivci! le hazede Lifu et le »i«;ta inalayomélauo-polyuésien
[>-i");. C'est le pouvoir sur, les choses, tel qu'il se manifeste
(huis les iutkhiuinn australiens. Ou retrouve même le méca-
nisme de l'intirl~iuuur presque intact. Ainsi un ~ogo <M~de
l'Imergali, qui appartient à un sous-groupe religieux de Mer,
s'i'Xprimeainsi « Pluie, mon zogo, dounemoi vie ». Et il est
lii'-uspécifiéque c'est tel groupe local qui possèdela cérémo-
nii-. soit par droit de naissance, soit qu'il l'ait reçue d'un
autre groupe. Un exemple concret fera mieux comprendre
l'intérêt ducesfaits. Le mmim zntjn,ou charme des tortues, est
fort important dans ces tribus dll, p. iil; VI, p.il, 213,
9U I.ANNKK suclULOiilUI/K. i'M-Vm'j

i'M, 245) il est pratiqué put1 les gens d'un seul village. i
charme, dresse sur la plage, consiste eu une elllgie de toten
maie et une autre de femelle; ce sunt des Inmur, des esprit".
auxquels les gens de lit confrérie s'adressent et, grâce au
paroles prononcées, les tortues, dans lu mer, vont s'aeeoupl»r
et se reproduire. Le mythe raconte que, seul, celui qui leu:
avait parlé put les prendre, et c'est encore grâce à ces riti->
que les tortues, aujourd'hui, se laissent prendre ou partum.
On voit qu'eu défiuittve, les pratiques et mêmele mythe loti
miques subsistent seul le cadre dans lequel elles se dévelo|i
peut a changé. Le clan est remplacépar la confrérie.
D'autres zogo nous semblent occuper une place iutenix
diaire entre les cultes totémiques et les cultes agraires. L>-
zogo des ignames lève, lors de la récolte, le tabou dont ceti
piaule était frappée p. 211). D'autres servent à tabouer lespn>
priétés, les jardins, les plantes pointant la période de croi-
sance. Uncertain nombre de ces rites sont même de simple
fêtes agraires, par exemple l'Alag des prunes let. p. î%); <•
sout des courses, des visites d'esprits, des danses. Le culte ti-
rétoile de Dogaitient à la fois au totémisme, au culte agraii >•
et au culte astronomique icf. p. 290, 1-43,et 2U'Ji.Mômenou-
nous étonnons que M. Hackloun'ait pas vu le parti qu'il v
avait à tirer de ces faits pour s'expliquer cette décomposition
du totémisme, que M. Hivers ip. 174j rattache à la pln-
grande densité de la population, à la proximité des villages, i
la prédominance de l'agriculture. L'agriculture et la fort'-
densité socialesont normalement incompatibles, eu effet,avt-
le totémismequi suppose une vie sociale moins intense, et ili–
préoccupatiousplus variées, moins dépendantes du temps<
des saisons.
Le mile national. C'est le culte du héros national appel"
(p. 44-45;Bornai(nom secret i, Malu fnoin très secret/, lk'izai
(le crocodile).Il est célébré au sein d'une société d'hoiniin'-
uuique, pour toute l'lie de Mer en particulier. Mais ceti-
société est organisée d'une manière très particulière qui tralci
ses origines totémiques. Elle se divise eu plusieurs confrérir-
dégradesdivers, maisferméesles unesatixau très. Sansdoul<
les représeutatious ainsi que la majeure partie de PiuitiatiiMi
se célèbrent eu commun; mais les préparatifs de cjuicpi

1. Nouslï'tmisson.-
<lan>
nuirei-v|in.-i;
ili-sii-iiM-iuni'incril»
i|iicM.Il>
ilnn.pur siiili-<!<><•<
cxn'vi^ .livi-iotis.»li^|n-r-i'~ciilivilillri-.
-i,1-
eliapilivs.
SYSTÈUKS
HKLliilEl'X
DK»SWJIKÏl!»
INKKKIKCHK» 'ji

groupe religieux se fout eu secret. Même,dans quelques cas,


la conclusion du rite, une brève apparition de masques, est
Mulepublique. Cesconfréries, que désignele mot de le (frèresj
ne sont pas mutuellement perméables on ne peut pas passer
du l'une à l'autre il u'y a pus d'avancementdanslu hiérarchie,
contrairement ce qui se passe d'ordinairelà où il y acoufiv-
rieshiérarchisées. Ouualt lirizam boui, membre de la coufrérie
des Beizam, ou membre des Zagareb, parce qu'on est ué dans
tel village, tel district, et même, semble-t-il, tel versaut de
lile. Tout cela est, il notre avis, un effet des anciens clans
tutéiniquesqui se partageaient les pouvoirsdes Miriamsur la
nature, il semble bien, d'ailleurs, quand ou analyse de plus
près le recrutement de ces confréries, qu'elles se réduisent
finalement à trois. (.'ne seule d'entre elles a uu rôle vraiment
actif. C'est le groupe du Beizam (crocodile/,avec ses divers
ordres; gens du 'mjo île masque;, du kepar (la ilèche, et du
Imiter(la masse d'armes), du chien, du pigeon,etc., du greyore
oiseau de Nouvelle-Guinée i regardéconnue blason par toute
la société ces derniers noms sout évidemmentdes vestiges
d'aucieus totems. Il y a, eu second lieu, un groupe mi-partie
actif, mi-partie spectateur, qui joue peu près le rôle qui, dans
d'autres tribus, revient à la phratrie spectatrice d'une céré-
monie oflerte par un claii de l'autre phratrie; ce sont les
Zuyareble,gens du tambour et du citant, qui chautent. battentt
la mesure, fout la musique. Ce sont enfinles Telnul,les amis,
qui u'out aucuu rôle sinon de nourrir les liturges. De ces con-
fréries, aucun homme de Mer n'est exclu, sauf les étrangers.
Le rituel consiste en manifestation et port de masques (il y
eu u un ou plusieurs selon les confréries,. Les plus impor-
tants sontà forme de crocodile et derequini v. lig. ;>!)et suiv.
Il y a, de plus, adoration d'une sorte d'autel dig. \ii qui
semble avoir donné naissance à une sorte de culte épigone,
indépendant ip. 2(i!)et suiv. dauses, mimiquesdes diverses
confréries des Beizam uoai. Ces danses se fout de village en
village, comme une sorte de pèlerinage qui retrace les aven-
tures de Botnai Malu. Quant au mythe, it est intermédiaire
cuire celui d'un animal totémique qui tiendrait du requin et
ilu crocodile (avec êtres subsumés, p. iîiîi, àofiet 3S,n. I et 2/,
celui d'une constellation qui règle une partie de la vie agricole
el humaine (p. 209et suiv. i, et celui d'une divinité héroïque,
humaine, symbole de la force guerrière des Miriain. Les épi-
sodes du mythe, comme les diverses cérémonieset les dillc-
W i.'axnkk soi:ioi.ogk>(.'b. l'JOii-liiiw

reuts ordres des Beizam, sont partagés entre les villages.


Suivant M. Hitddcm,ce culte serait d'importation étrangère
il croit trouver une preuve de cet emprunt dans les voyages
que le mythe prèle au héros. Le culte d'un dieu individuel,
anthropomorphique, serait venu de la Nouvelle-Guinéedans
les lies de l'ouestet, de là, daus celles de l'est où, par suite de
la prospérité qui y règne, il aurait balayé letotémisme. Il n'est
pus '( priori impossible que les chosesse soient passéesainsi
l'extension rapide de ces grandscultes, mal définis, s'observe
même en pays de totémisme, en Australie comme en Amé-
rique. Maisil nous parait douteux que le cas de Bomal-Malu
soit un fait de ce genre. Sans doute, d'après le mythe, Bornai
est veuu de l'ouest et, peut-être, de la Nouvelle-(juinée,Mais
cela peut tout aussi bien signifier que lesMiriam out emporté
ce culte avec eux dans leurs émigrations d'abord vers le sud
(Iles de l'ouesli, ensuite vers l'est. En tout cas, nous aperce-
vous plus de différence que de parenté entre le culte et le
mythe de Kwoiawet celui de Bomui-Malu même ce dernier
nous parait avoir plus de rapports avecles mythestotémiques
du requin et ducrocodile à Vain. Si donc la vague qui apporta
le culte national à Mer et daus les Iles Murray a vraiment
passé sur les Iles de l'ouest, elle y a certainement laissé peu
de traces. Et il ne faut pas tenir un compte exagéré du
mythe le mythe de Malu n'est pas historique, selon nous,
mais descriptif. II nous parait donc préférable d'y voir le
produit d'une évolution indépendante. Ktautdonnées surtout
les marques manifestement totémiques de ce culte, il est tout
nature) de supposer que Bornai-Malu-Beizamest un ancien
totem, peut-être de phratrie, qui, pour une raison quelconque,
a été amené il prendre uue place prépoudéraule. La sociéli'
des hommes, qui. à l'origine, se confond avec le système
des clans totémiques, se serait donc concentrée tout entière
autour de ce culte qui aurait absorbé les autres ou se les
serait subordonnés. Nousaurions ainsi, dans ce cas privi-
légié, un moyen de nous figurer comment ou est passé du
totémisme uéo-guiuéen aux formes religieusesplus avancées
des Iles de l'ouest, et linalemeutâcelles, plus évoluéesencore.
<lalest.
Nous ne parlerons que brièvement de la magie à laquelle
M. Huddou rattache nombre de zogo que nous avons rangés
dans la religion, aiusi que des pratiques (lui se rapportent ou
au totémisme finissant ou aux débuts du culte agraire. Môme
SV.-ÏKMK'i
HKUlilEUX
I>K<
SOUIKTKS
IXHiMKURK- <J,i
on dirait qu'une partie de la magie inaléficiaire et presque
toute la nécromancie ressortissent à lit confrérie de Beizam
buai, tandis que ce sont les XagarebIf, qui seuls fournissent
les médecins. – Par une assez curieuse inconséquence,
M. Hiiddun, qui rattache la divination à la magie, n'en purle
qu'à propos de la religion 'p. 261, sq.), pour nous signaler,
entre autres choses, un bien curieux procédé de divination k
l'aide d'une sorte d'autel-carte ip, itiûi où le mouvemeut des
animaux épiés décèle le mouvement des événements.
Les rituels funéraires sont ceux du double enterrement,
dans le cas des adultes seulement. Une partie eu est presque
toujours collective, parce qu'elle nécessite lu présence de
toutes sortes de parents, et des visites de presque toutes les
confréries qui honorent la mort de leurs rites et de leurs
chants. Ces faits sont vraiment superposahles aux honneurs
rendus par leTubuan et le Duk I)uk en certaines parties de ta
Mélnnésie.
Nous ne faisons que mentionner d'intéressants cultes secon-
daires tp. 4*14,sq.), et la collection de contes et de mythes
Quelques-uns n'ont pas été, à notre avis recueillis avec assez
de soin la fin du conte 3 (p. 5) pourrait être rendue com-
préhensible en renversant l'ordre de certaines phrases.
M. M.

Il. PARKINSON. – Drelssig Jabre in der Sttdsee. t.nwl


nuit LeI/Ir,'Sillell M)~Cfh)'«(tc~'int I3ïr;trucrcl, 10,,1
Arol~ilrel
nitfden DeulschenSulomoinxelii.Stutlgart.Strecker, Schrûder,
1907, XXII-876p., iu-8".
M. Parkinson est depuis longtemps connu par ses observa-
tions sur les Mélanésiens,ceux du sud du Xouveau-Mecklem-
bourg. («//«.«.Nouvelle-Irlande), ceux du nord de la Nouvelle-
Poméranie (alias, Nouvelle-Bretagne: car on sait que le
gouvernement allemand a éprouvé le besoin de changer des
noms consacrés par un usage géographique de plusieurs
siècles). H a publié aussi un travail sur les Iles allemandes de
l'archipel des Salomon. dont nous avons rendu compte ici
(. inné', III, p. 8-Wl.Le présent ouvrage recueille et ces obser-
vations anciennes, et celles que M. Parkinson y a ajoutées.
Surtout il s'efforce d'arriver à un tableau d'ensemble des
sociétés mélanésienneset des quelques sociétés d'origine poly-
uésieune ou micronésienne qui peuplent les possessions alle-
91 l.INXfiK SOCIOLOiiigriî. i UOU-i «

mandes voisines de la Nouvelle-Guinée archipel Bismarck,


lies de l'Amirauté, ilet>orientales et occidentales, Nouveau-
Hauovre, Buku et Bougaiuville dans l'archipel des Salu-
mon, etc.
Le savoir de M. Parkinson sembles'être plus étendu qu'ap-
profoudi. Il fournit plutôt des points de repèrepour des obser-
vations futures, que des monographies exhaustives sur les-
quelles le sociologue puisse édifier ses théories, 1I est plus
préoccupé de dresser une sorte de carte ethnographique; tic
trancher des problèmes d'origines et de migrations, que de
bien observer même une seule tribu. Mêmeles habituais du
nord de la presqu'île de la Gazelle,parmi lesquels M. Parkin-
sou a, depuis trente ans, un établissement, dont il semble
connaître le langage, nu moins pratiquement la connaissance
théorique lui vieut des travaux de M. Brown, M. Couppé.
M. Blijy, cf. p. lio, sq.), n'ont pas été étudiés à fond. Nous
serions même embarrassé de dire le nom des principales
tribus entre lesquelles ils se répartissent, tandis que uous con-
naissons ceux des tribus voisines.C'est que, sous l'influence
des ethnographes allemands avec lesquels il correspond
depuis des années, des récents voyagesscientifiquesqu'il aida
à accomplir, mû lui-même d'ailleurs par un zèle admirable
de collectionueur, pressé de visiter le plus grand nombre
de tribus, et de rapporter le plus grand nombre d'objets,
actuellement richesses de nombreux musées, M. Parkinson a
plutôt fait une série de soudagesethnographiques(cf. p. (>5'»>,
que des observations qui demandent la connaissance parfaite
d'un peuple et lu conliance de ce peuple daus l'observateur.
Cependant dans ce domaine si vaste,après un si long séjour,
il a fait une abondante moisson de faits, encore insuffisam-
ment connus, même après son travail, mais trop intéressants
pour n'être pas signalés en détail. – Les plus neufsconcernen t
les sociétés secrètes, comme on dit, elle totémisme.
I. Le Titlniikme. – Faisons abstraction de la théorie qiu-
.M. Parkinson essaie d'en donner ip. liTîii. Klle consiste à
déduire le totémisme de l'un de ses signes, l'exogamie; les
clans ainsi construits auraient pu choisir ip. liîffi entre la
descendance utérine et la masculine. Pareille théorie a peu de
chances de succès. Il suffit de l'énoncer.
Ce qui est plus important, c'est le nombre des cas cietoté-
misme que M. Parkiuson rencontre. Ousait que M.Codrington
eu avait nié, à tort, l'existence en Mélanésieicf. p. (572)
SY<TÈJIK< IlKLIllIKUX DK* suCIKTK* ISPÉHIKL'RK* 95

M. Pnrkiusou n'a pas de peine à démontrer que les faits mêmes


cités par Codringtou constituent tout autre chose que de
simples traces de totémisme. Nonseulement, comme l'avaient
indiqué déjà Itibbe et Woodford, ou trouve aux Salomon
,]). 4K4,UlH),(itiÂideuxtotems de phratries ice qui ne veut pas
dire, d'ailleurs, qu'il n'y en ait pas d'autres qui apparaîtront
uu jour à l'observatiotn, et, dans certaines lies, des totems
de clans à descendance utérine, notamment àBougainville;
mais encore ou peut dire, et ceci était certainement moins
facile à prévoir, que, dans toutes les tribus mélanésiennes
observées, on a constate l'existence de totems il n'y a
il exception que pour les pays qui ne sont qu'administra-
tivement rattachés à l'archipel Bismarck et qui, en fait, sont
occupés par des populations d'origine polynésienne oa micro-
nésienne. L'endroit où le totémismesemble avoir été le plus
développé, c'est l'archipel de l'Amirauté (p. 392, 8!)i) qua-
torze clans, dont plusieurs avec des sous-totems, se partagent
l'une des fractions de la population, les Moanusde la côte.
Malheureusement, les connaissances que le noir Po Sing a
transmises à M. Parkinson doivent être maigres sur ce
point, alors que. selon toute vraisemblance, on doit trouver
de ce côté des faits variés et curieux. Ainsi le chant du
dan de l'apitalai-Lolu, descendants du crocodile Maint
p. iU8j, nous montre avec netteté le clan s'identifiant avec
sou crocodile ancêtre et possesseur du pays (p. 7l2,i; un
mythe ressemble curieusement à ceux qui commentent les
cérémonies par lesquelles les clans augmentent le nombre des
iiuimaux totems.
M. Parkinsou est naturellement mieux informé sur le toté-
misme du nord-est de la presqu'île de la (îazelle et du Nou-
veau-Mecklembourg. Aux Iles de l'Amirauté, l'emblème –
jusqu'à nouvel ordre- ne semblaitpas jouer un rôle très con-
sidérable: ici, au contraire, les peintures de guerre, surtout
chez les Sulka cf. p. 0!)", uu mythe sur l'activité magique
des blasons ont une certaine importance. Pourtant, à iler-
k'rtshohe même et dans quelques autres lieux. les noms cles
phratries, qui subsistent chez les tribus apparentées du Xou-
veau-Mccklembourg méridional, ont déjà disparu. On ne dit
plus que « eux » et « nous > pour désigner les deux sections
île la tribu. Mais, ou ce qui concerne les clans, nous n'hési-
terons pas à supposer que certaines cérémonies de la société
<leshommes, de1 lngiet, dont nousparlerons pius loin, sont, ou
90 I.'aXSIÎK
SOi:|OI.H(ilQL'K.
r.Hlli-l'.O'l

ontété, descérémonies totémiques proprement dites 'p. «OB'


elles consistent en drames et dnnsesde masques où se traus-
mettent les secrets et les vertus du IhiIiiipigeoni, du ijulr^
(palme, etc.). Ouest doncfondé à sedemiimlersielles nïUuicui
pas faites par des gens des totems correspondants. Ku(ait.
d'ailleurs, les deux groupes de tribus qui sont directenii'iii
apparentées à celles-ci, celles du Nouveau-Meeklembouri:
méridional, les Sulknde la presqu'île de la (iazelle, les Bainiir-
de l'intérieur de la Nouvelle-Pnméranie,doivent avoir un totc
misme très développé. AuNouveau-Mecklembourg,ou trouvi
les deux phratries, Pikalaba, et Maramara, avecleurs totems.
deux espèces de mante religieuse,non'.révêrées,parait-il, et de-
clans totémiques, avec connubiumassigné entre clans déter
minés et culte desanimauxtotemsi p.l>l2).Partout dans ceth'
lie, aussi bien dans la région de Siria celle on l'on trouvent
sûrement uu jour les faits les plus curieux que dans U--
autres et dans les Iles avoisinantes, existent des séries d>'
sculptures, déjà bien connues, mais dont M- Parkinson nou>
donne enfin la clef. Elles représentent les iiiainr, les oiseaux
totems du mort, souvent idéalisés, stylisés, compliqués de
l'histoire du mythe (p. (51*7p. GK3î,des espèces de blason
complets, souvent d'un art très relevé {cf. la belle reproduc-
tion d'une sculpture turn turu, table 49, p. 768/.Là, les totem
sont tous des oiseaux, mais la plupart out des animaux subor
donnés (p- 6881, représentant surtout les mauvais esprits sur
lesquels ils ont d'ailleurs pouvoir exemple nouveau d'uni'
division des êtres en totems et sous-totems, et de l'opposition
des totems aux choses mauvaises comme celle qu'on trouv*
chez les Arunta ici. p. 6553 1.nous faut aussi signaler rj11
les clans semblent, eu partie se recruter, ou peut-être simple-
ment se subdiviser en sous-clans, non pas suivant la seul'-
hérédité, mais aussi d'après des procédésde divination propre
signes du corps nu lignes de la main <tfr.).Les Sulk'-iont deux
phratries, à neuf branches chacune (p. 178),évidemment loti-
ni if] nés On trouvera mythes totémiques bien carneli-
risôs 'p. 704,708. p. 701:i unenfantsorti d'une sorte de roseau
en porte le nom). Même un mythe Sulka 'p. 6f)7)est un de-
plus typiques que nous connaissionspour démontrer la vaU'tu
surnaturelle attachée, particulièrement en temps de guern-
à l'emblème que porte le bouclier. Quant aux Baining. p;n
une singulière erreur d'expression, M. Parkinsou, à In suit'-
du P. Rascher (p. \»9). les croit sans l'ombre « dune super
SYSTÈMES RBMOIKUX DliS SOCIÉTÉS I.NPélUECBKS 07

stition », IIn 1ne nous en décrit


.1I.I_L
pas moins, à l'aide du P. Raseher
lui-môme, les grandesdanses masquées des diverses époques
et des divers degrés, dont quelques-unes ont un caractère
totémique bien marqué, comme d'ailleurs uue bonne partie
des cultes dessociétés dites secrètes, auxquels nous arrivons.
II. Le* xoeirtà xeerHn. M. Parkiusuu u été l'un des pre-
miers à les .signaler,Il y a plus de vingt ans, à l'Ile de Mioko
il a été sûrement, sinon initié, du moins largement admis à
l'une d'elles, au Duk-Duk, dont les affiliés occupent le sud et
le nord des deux principales îles de l'Aroliipel. 11a été le
premier à étudier le Kuk-Ruk de Nissan, aux îles Salomon
allemandes. Néanmoins, il s'exprime avec prudence sur les
renseignements qu'il a pu rassembler. et il hésite encore plus
à fournir une théorie (p. 508, sq.). Les emprunts importants
et à longue distance, emprunts incontestables, lui font appu-
raître la plupart de ces sociétés comme des phénomènes
récents, qui relèvent plutôt de l'histoire que de la sociologie.
Il ne sait si elles sont de nature politique et commerciale ou
de nature religieuse. Il est sur qu'elles ont ce triple aspect.
il ne croit pas qu'elles dérivent du culte des morts; il est bien
plus frappé de la part qu'on y fait à la magie et à la façon
dont on y dresse le jeune homme à se protéger coutre le
maléfice. LVpareil laugage doit, natut-elleiiient, nous impo-
ser beaucoup de réserve. Nous ne nous en permettrons pas
moins quelques brèves hypothèses.
Eu fait, il ne semble pas y avoir, daus ces îles, de société
secrète proprement dite, sauf dans quelques endroits très net-
tement délimitésdes Salomou et du centre de l'Archipel. Par-
lotit ailleurs, à uotre avis, les faits rassemblés par M. Parkinson
se rapportent, non pas à dessociétés secrètes, mais à la société
des hommes,avec laquelle le Datei(uk coexiste au sud du Xou-
veau-Mecklembourget au nord-est de la presqu'île de la Ga-
zelle. A Bougainvilleet Nissan, il semble, il est vrai, que les
deux sociétés secrètes, le Ituk /«fret le Kokorra aient éliminé
du culte public, tout au moins de la partie connue de ce culte,
l'action de la société des hommes. Mais rien ne prouve que
les Matnmm,nom que l'ou donueaux candidats à ces sociétés
ue comprennent pas tous les hommes libres de la tribu ou du
village; même le fait que ces candidats ne reçoivent femmes
qu'une fois leur stageaccompli,ferait plutôt croire qu'il s'agit
d'épreuves auxquelles tous les jeunes hommes, indistincte-
.nient, sont assujettis. Par conséquent, on peut considérer, à
K.Di'iikheiu.– Amirésuciol,,l'jUiJ-l'JOO. 7
98 l'axnke socwuouiyUE. MOO-JWJ
.1. .1
lu rigueur, ces sociétéscomme des sociétésd'hommes. Le seul
cas de société secrète pure reste donc celui de l'urclripel Bis-
marck. Maison dirait, eu somme, que chez les tribus parentes
qui peuplent le nord de l'une et le sud de l'autre des grandes
lies, il y a eu un mélange de deux organisations aux orga-
nismes normaux de la société des hommes, la société secrète
serait venuese superposer, soit par inventionpropre, soit pur
emprunt aux usages des Satomon. Le Duk duk serait un
moyen d'accumuler l'organisation des Salomouavec celle de
la société locale..Eu raison même de son isolement, le fait ue
prend d'intérêt que si, comme M. Parkinson lui-môme (p. COi
sq.), onle rapproche des cas similaires de la Mélanûsieorien-
tale, étudiés par M. Codrington. Autrement, il paraîtrait
extraordinaire, aberrant. M. Parkinson, il est vrai, parle des
sociétés secrètes en Nouvelle-Calédonie(p. 8I5Û;,mais nous
ne savons sur quoi s'appuie cette assertion probablement
errounée. Il y a plus même quand on tient compte de ce
rapprochement, le (ait ne nous parait pas avoir l'importance
qu'on serait teuté de lui attribuer, après les travaux de
Schurtsc. Car il ne faut pas oublier que, à côté du Duk-duk
qui est la plus forte de ces sociétés secrètes, la société
des hommes, l'Iugiet, subsiste avec sou sanctuaire, le Mara-
wot, et qu'elle est d'uu accès plus difficile elle a quelque
chose de plus sacré.
11nous parait, d'ailleurs, vraisemblalyleque le nombre ik-
ces sociétés, où s'observent ces phénomènesde secondeforma
tion que sont les sociétés secrètes, est destiné il se restreindra
à mesure que les observations seront plus approfondies. I3oi.
nombre de sociétés secrètes ne sont que des confréries, de
nature souvent tolémique. C'est que, quand on n'est pas trù>
averti, on peut aisément prendre un clau ou uu groupementt
de clans, chargé d'un culte dans la sociétédes hommes, pour
une société secrète; car, à l'intérieur de cette société, qui est
déjà mystérieuse par elle-même, il forme un sous-grau pc
fermé, encore plus mystérieux. L'aventure est arrivée a
M. Boas chez les Kwakiull ainsi qu'à Mrs Stevensonchez lu-
Zufiilv. plus loin, p. 1 19 j. Eul'espèce,il nous est impossible
de voir quelle différence il y a entre l'Ingiet et les céiv
monies, épreuves iuitiatoires, droits variés que créent le-
clans totémiques dans la société des hommes, partout ou
celle-ci a existe. C'est donc que l'lngiet est bien un grou-
pement de clans totémiques. Sous ce rapport nous uolerun*
SÏÎ.TÊUBS
IIKI.IlilKUX
D8*SOCIKîfo
I.VrélUKCUK* 'J'J
li
comme purlieulièremeulintéressants les deux faits suivants.
D'abord, c'ust sûrement dans ces cérémonies régulières
de l'lugiet que se transmet le maua, puisque les gens
de ringietsont dits des ««/«a le, par opposition aux « muun,
tfeus de rien. gens du la plébe, .sans parents qui puissent les
introduire et les initier. Le mot d'Ingiet lui-même veut
dire charme (p. liOU,(iU6).Kusuito le muim, c'est-à-dire ce
«lui fuit l'autorité. I» virilité, la puissance, doit comprendre
la série des pouvoirs bons et mauvais qui appartiennent aux
totems probablementles charmes de magie blanche qui ont
pour objet d'écarter les mauvais esprits ip. OUI, 6(Jlijet qui
consistent surtout eu danses totémiques (p. 003/ plus suru-
meut les charmes de magie noire, de mort, comme on dit,
dont les plus importants sont, chose remarquable, des plan-
chettes peintes, symboliques du nom du porteur, de son
totem, de ses ancêtres. Cesont de véritables « diables a que
l'ou fait résonner, tandis qu'a lieu l'incantation ip. 003 cf. les
Uibtitabu des Publications du Musée de Dresde. Tout cela
montre bien l'étroite connexion de l'Iugiet et des clans toté-
miques.
D'autres pratiques, d'autres organisations que l'ou trouve
dans les autres tribus sont, au fond, du même goure. Chez
les Sulka et dans presque tout le reste de la Nouvelle-Pomé-
ranie, les représentationsmasquées n'ont rien de secret elles
su suivent en cycles commecelles des confréries totémiques.
Maiselles se compliquent,comme probablement les cérémo-
nies du l>ukduk lui-même, des premières ébauches du culte
agraire. Chezles Bainiiig,que M. Parkinson cousidère comme
la société la plus primitive qu'il ait rencontrée, les danses
masquées dont le P. Rascher lui communique la description
sont sûrement rattachées Mdes cultes agraires. (.Elles servent,
dit-il (p. tiiOj, de réjouissances lors de la maturité du taro u
(cf. p. 031;. Les plus importâmes cousisleut en phallophories
d'un type assezbanal, mais dont certains rites expriment bien
la relation à l'agriculture i p.fil 7). D'autres représentent des
sortes do luttes contre les esprits de la forêt, tout à fait com-
parables aux conjurations des esprits de la brousse chez les
Ewhc, que nous signalons ailleurs. Même au sud de la Non-
lit relation entre la circoncisioact l'iuitiatiou
d'une part, et les cultes agraires de l'autre, nous semble pro-
bable: car cescérémoniesont lieu à une époque déterminée,
eu rapport avec les rites agraires. 11 est probable que, en
iVQ 190U-1909
I.'a.S.VÉE SOUIOtOGIOl'fi.

Mélauésie, commeeu beaucoupde sociétés arrivées à ce stade


religieux et technique,les clans non encore clispurus, le culte
agraire qui unit, et le culte des morts qui est franchement
développé, se môleutet se combinent eu une sorte de compro-
mis. C'est ce qu'expriment précisément ces cultes de con.
fréries que nous retrouvons également dans
l'Amérique du
Nord eoiiinie dans certaines parties de l'Afrique et
probtt-
bleraeut dans quelques-uns des grands cultes des
population,
asiatiques et européennes de l'antiquité. Eu tout cas, uoiis
sommes frappé de la coïucidenceentre certains luits la con-
fusion des esprits des morts avec ceux de la végétation et des
clans semble avoir été générale et liée à une
espèce de reli-
gion qui est celle de ce type de sociétés. Ainsi, ce n'est pas.
croyons-nous, un fait sans intérêt que les danses soient faites
en l'honneur des morts et soieut en même
temps liées aux
cultes de cesconfréries. Il est très probable que Ribbe avait I»
sensation de ce fait fcf..1nnr'eSociologique,VIII, 261
p. quand
il confondait, aux Salomon, totems, sociétés
secrètes, et culti-
des morts.
S'il en est ainsi, l'institution du Duk duk et des autres
sociétés secrètesen Mélanésie ne paraîtra plus
occuper dan-
la constitution des tribus mélanésiennes la
place que, à lu
suite de MM. Parkinsonet Codrington, on était tenté de leur
attribuer. Le Duk duk, même dans la péninsule de la Gazelle,
n'est plus que l'une des confréries. Elle se recrute
par cooptu-
tion et achat de places, au lieu de se recruter par la naissaucu.
et là est toute sa spécificité.C'est comme une confrérie
qui si-
serait détachée des autres et qui recruterait ses
mystes dan.
tous les clans, mais en les triant par une sorte
d'adoption
volontaire. Quant à sou activité, elle consiste surtout en uiif
cérémonie où est représentée symboliquement l'arrivée
mys
tique d'homrhes-casoars(p. 582i il ya a unedanse de l'oiseau~j
chef, qui est censé pondre le jeune initié et les autres oiseaux.
On dirait l'arrivée d'une confrérie qui
représenterait di>
esprits soit des champs, soit des bois, et des oiseaux. Maisen

i. Cequi \v (trouve,r'urt .|uiî, danslu presqu'îledulu Gazellelii ii'Ji.>


l es
s.ulv.|. mas.[ucs ,|ui sci-venldui.>l<:< .lansiw.«1111fuiU nvoc'di's'cpii•
II n«nest j,asîle même., il«sivrai,aux Mm(Janlner,Sumlwielimi
du Nouveau-UuonburK ii"
<p.64li;maisumh savonsqui:I1.3.lun.scsv 1.
tentle m.Miicnomf(U«danslupresqu'île <k<lu (JsïcIIcet (iu«cenom (»,•-•
iJunsi-s
langeaislgnifli; un l'Iionneurdesmorts.Cf.plushaut 11H3sur1
actesfunéraires, lerappruch«niHnt enlr»!<•Uuk.luket Ittcuiifreri.iHoiM:;
AltttU»
SYSTÈMKS
nEI.HSmrXDESSfiCMÏTK.-î I.VKKHIKUIIES 101

tout cas,
S, cette
cotte confrérie
confrérie reste moins
reste moins forte que la
forte que société des
la société des
hommes, l'ingiet, oit les hommes apprennent la magie et les
grands secrets de la tribu. Si, comme le suppose M. Parkin-
son, le Duk duk était d'âge récent, et emprunté au rituel
des !les Salomon, nous irions même jusqu'à dire qu'il est
un phénomène relativement superficiel. Mais il est possible
qu'il soit au contraire fortement. et depuis longtemps, im-
planté dans les mœurs. – Kn tout cas, sou importance reli-
gieuse reste eu question.
Sou importancejuridique et économique ;iu contraire, res-
sort de l'exposé de Al. Parkiiison mais elle ne semble pas
différer de celle que prend, dans les antres sociétés mélané-
siennes, l'organisation de la société des hommes. Elle estl'or-,
gauismepolitiquequi remplace le chef, militaire, législateur,
administrateur de la justice. Hlle est surtout l'organe décon-
centrationet de redistribution des richesses qu'elle accumule.
Mllelèvedes tributs, que les membres des grades supérieurs
redistribuent au cours de fêtes qu'ils offrent au reste de la
société.Il y a là une sorte de systèmede l'échange obligatoire.
Mais, sur ce point, des observations plus précises eussent été
nécessaires. Nous craignons que M. Parkiusou n'ait commis
quelques confusions, et attribué tantôt à l'Inglet, tantôt au
Duk duk, des fonctions qui appartiennent au clau, aux hié-
rstrchies diverses (cf. p. 57, Si),p. ONelsuiv.i. Au Duk duk
ne semblent revenir en propre que ces levées d'impôt sur la
masse des non initiés, et l'échange des tributs
réciproque
ainsi levés entreles tuba na lulman (propriétaires des masques
chefs)et lestabuna Dukduk (nomdonné aux simples initiés).
A la société des hommes semble, au contraire, se rattacher
tout un enchaînement de prestations par les chefs (dedans ?)
qui initient leurs fils, marientleurs filles, prestations rendues
ensuiteavecusure par les hommes libres. Il est probable que
nous avons ici alïuire à une institution du genre de celle des
jiollatch au Nord-Ouestaméricain, lier, commelà-bas, à l'exis-
tence d'une monnaie, dedans, et de confréries, entre lesquels
l'échange des richesses s'établit, non pas à la façon (l'un
simplecontrat, mais suivant un rite qui équivaut à un con-
trat.
t. M. M.

W. II. R. HIVERS. – Totemism in Polynesla. and Mela-


nesia. Journal n/ IheAnthropoloyieul
liutitute, lflOO,XXXIX,
p. 130-180.
102 LA.NXKK 1UIIO-IU09
JOCIOLMiigi'K.
S'il ne s'agissait ici que de revendiquer pour le totémisme
une province ethnographique où sa présence a été
contestée,
l'article de M. II. serait déjà d'un grand intérêt mais cette
question d'extension n'est, après tout. que secondaire. Enréa-
lité, les faits mélanésiens et polynésiens ont une importance
théorique fondamentale: c'est, en effet, sut- les témoignagesde
Turner, et surtout de Codringtou, que Tylor se fondait princi-
palement pour ôter au totémisme toute signification originale
et pour en faire une simple variété
épisodique de l'animisme.
Déplus, si l'existence dutotémisme comme institution vivante
ou comme antécédent assignable est un fait
acquis en Polyné-
sie, dans un domaine oit l'organisation sociale et politique et
le système religieux présentent, en plusieurs cas. tous les
traits d'une civilisation avancée, nous pouvons nous attendre
à rencontrer des formesdetransition particulièrementinstrue-
tives.
M. R. ne traite pas dans son ensemble ce vaste
sujet. Il
ne fait état, par exemple, ni des données de Ribbe sur Ifs
Shortland, ni de celles, plus récentes, de Parkiuson sur l'ar-
chipel Bismarck, 11s'en tient strictement aux faits recueillis
par lui au cours d'une mission scientifique qui lui a fait visi-
ter la plupart des Iles mélanésiennes comprises entre les Nou-
velles-Hébridesau sud et nie de Choiseul au nord. avec un
crochet sur Fidji, les Tongaet Samoa. S'il fait
appel autémoi-
gnage d'autres auteurs, c'est uniquement pour contrôler ou
compléter ses informations personnelles Quant à la valeur
de ces observations, il est a peine besoin de dire
qu'elles sont
de premier ordre, venant de l'un des
ethnographes les plus
avertis et les plus experts qui soient malheureusement, la
plupart d'entre elles ont été prises un peu hâtivement, en
passant; malgré l'aide précieuse des missionnaires, elles sont
restées fragmentaires et, sur quelques points, tout à fait dé-
fectueuses (en particulier sur les sociétés secrètes, dont 1m
relation au moins possible avec le totémisme
n'échappe pour
tantpasà.M. Il. jcf. p. I73i.
Parmi les tribus dont il est fait mention dans cet article
nous ne trouvons de totémisme authentique et intact
qui-
chez les insulaires de Santa Cruz et de Vauikoro. Les observa
tions concordantes de Joest et de M. R. nous
signalent ici
des clans exogames, sans doute utérins, quoiqu'on m-
nous le dise pas expressément – portant chacun le nomd'uni-
espèce animale (ou, exceptionnellement. d'une classe <W
I%KLI%11%UX Ma ibC.1979S JXFHMRUMA ~03

~tA-tt~t~t~~tt..ït~t~.t-tt-î~.î.t~t
choses matérielles), à laquelle ils doivent leur origine et dont
la consommation ou l'usage leur sont interdits tp, 105,sq.
Le critique le plusexigeant ne saurait se refusera reconuattre
dans cette description tous les caractères distinctifs, à la fois
juridiques et religieux, du totémisme.
Lecas des Iles Salomon centrales est plus complexe et plus
dillleile (p. 107, sqq.). Nous trouvons bien ici indivision de la
de la tribu en plusieurs clans exogames, h'ma et chacun de
ces clans a parmi ses lindalo, ou êtres sacrés, une ou plusieurs
espèces animales qui ne peuvent être mangées et qui sont
môme, du moins à Guadalcauar, l'objet d'un culte fort déve-
loppé (localisation et personnalisation du « totem », consi-
déré comme source de manu, p. 109;. Mais l'animal lindalo
n'est presque jamais épouyme; par coutre, dans un cas rap-
porté par Codriugtou où le clan porte le nom d'une espèce
animale iles Mauukama de Florida), cette espèce peut être
libremeut consommée. Eu second lieu, les animaux sacrés
sont mis sur le même plan que d'autres tintlalo, ancêtres
humains, soleil et lune, images, etc. M. R. ne dissipe pas
l'impression que donnait Codrington d'un foisomiement et
d'un renouvellement indéfinisdes choses interdites. Enfin les
tinrtalo ne jouent aucun rôle dans la vie civile tandis que les
clans exogames se correspondent rigoureusement dans les
différentes Iles et y portent souvent le même nom (p. 170;,la
nature des limtalo d'un seul clan varie dans la même lIe, et il
nous estdit expressément que deux clans non correspondants,
les Vihuvunagi d'Ysabel et les Ohonggo de Savo, dont les
membres peuvent se marier entre eux, ont un seul et même
totem, l'aigle (p. 168, 1(59),II y a donc dissociation complète
entre l'élément juridique et l'élément religieux du toté-
misrne.
En présence de ces faits, M. R. conclut à la présence dans
ces Iles d'un totémisme encore reconnaissable, mais modifié
par l'évolution avec raison, il proteste contre l'interprétation
evhémériste de Codrington et de ses informateurs indigènes
avec raison aussi, il montre que l'instabilité et l'origine récente
de certains tabous totemiques n'ont absolument rien de primi-
tif, mais dénotent plutôt un état avancé et déjà partiellement
décomposé de l'institution (p. M\). Mais M. 11. n'essaie
même pas de résoudre l'auliuomie dont CodrÏLgtou tirait
argument contre le totémisme.Peut-être la difficulté s'éclaire-
t-elle si l'on tient compte des données que M. R. nous fournit
lût (.'ANNÉE.SQC!OLO(ll<|l'K. »!)()«• IUlW

en un autre endroit au sujet de Kiriwina, l'une des Iles Tro-


briand ip. l"l>,sq.). Nous trouvons ici quatre claus exogames
se recrutant en ligue maternelle et pourtant, ce sont les
totems du père qui sont interdits au fils, taudis qu'il peut
librement consommer les totems de sa mère, c'est-à-dire les
siens. En d'autres termes, un individu appartient au clan de
sa mère, tout en participant au culte de son père. La sulisti-
tulion incomplète,limitée au domaine religieux, de la filiation
masculineà la filiation utérine, celle-ci continuant à régirle
groupemeutdomestiqueetmatrimonial, expliquerait, croyons-
nous. la dislocation de l'ancien système totémique et l'état de
choses incertain et flottant qui s'ubserve aux lies Salomon.
Cecisoit dit Htitre de simple hypothèse, dans l'attente d'infor-
mationssupplémentaires.
Nonsans quelque arbitraire, M. Il. classe à part, comme
polynésiens, les faits qu'il a recueillis chez les tribus de l'in-
térieur de Fidji et dans l'lie deTikopia (p. 187, sq.i. Il s'agit
ici de cultes zoomorphiques de tribu ou de district, non
accompagnésd'exogamie ni d'éponymie animale. dont ou
peut dire tout au plus que, très vraisemblablement, ils procè-
dent d'un totémisme antérieur. Les observations qui concer-
nent Tikopia nous instruisent, d'uue façon particulièrement
intéressante, sur la façon dont le totémisme peut répoudre à
des besoinsnouveaux et évoluer vers des (ormes religieusessu-
périeures.L'atlributiou à chacun des groupesqui composentla
tribu d'une plante cultivée qui figure parmi ses alua, l'espèce
de coopération mystique qui s'établit de ce fail entre les
groupes, le rôle des chefs lors de la plantation et de la récolte
(consommation des prémices l'atténuation des tabous ali-
mentaires, sont des faits importants qui, d'une part, rap-
pellent un totémisme très primitif du type Arunta, et qui,
d'autre part, annoncent les cultes agraires (p. 102/. Très
remarquable aussi, et probablement typique, l'histoire de ce
tabou de la tortue, d'abord 'sans doute limité à un clan, puis
étenduà toute la tribu, et qui tend enfin à se resteindre àIji
classedes chefs (p. llil) nous assistons ici, pour ainsi dire,
à l'évolution qui conduit par degrés d'un culte de clau à uu
culte de caste.
II est surprenant qu'un auteur ayant, comme M. R., un
sentiment très vif de la complexité du totémisme et delà soli-
darité de ses diversaspects, puisse vouloirlefaire dériver,soit
de l'institution du tamuniu, animal protecteur et âme exc-
*V*TÉM8SRKUtHgl'X DES SOCIÉTÉSMFËniROnKS 105

rieure de l'individu, soit des croyances relatives à l'incarna-


tion d'un animal dans le sein de la femme, lorsde la concep-
tion. Ces deux groupes de représentations existent côte à
côte dans les Iles de Banks, et la description qu'en fait M. H.
est fort intéressante (p. 173, sqq.). Maisest-il admissible que
les croyances primitives auxquelles le totémisme devrait
ailleurs son origine, soient demeurées intactes précisément
dans les lles qui n'ont jamais connule totémismeou du moins
n'en ont gardé aucune trace? Deplus, M. R. nous dit expres-
sément que, dans les deux cas, la relation entre l'homme et
l'aninial sacré est purement individuelle et ne se transmet
jamais aux descendants (p. 173,178 » comment alors y voir
la souche possible du totémisme Nous n'estimons donc pas
que les faits recueillis par M. R., dans les Iles de Banks,
apportent, comme il le croit, la confirmationde l'hypothèse
de M. Frazer, quiaa été exposée et critiquée dans l'.l nnée,t. X,
p. ii'A sqq. D'ailleurs, ces faits mêmesnous paraissent contre-
dire certaines aftîrmalious de M. Frazer. D'abord,la croyance
qu'un animal ou quelque autre chose exerce uneinfluencesur
la conception, sur le caractère et la destinée d'un enfant,
n'implique nullement que la naissance soit toujours tenue
pour miraculeuse et que le rôle du père dans la procréation
soit complètement ignoré <p. 17-4).En second lieu, nous
voyons qu'une femme de l'lie de Motlav, quand elle désire
avoir un enfant présentant certains caractères, fréquente le
lieu où elle a chance de rencontrer l'animal possédant et pou-
vant, parsuite, communiquer les dispositions désirées (p. 175).
Ainsi les représentations mythiques sur la conception et l'in-
carnation peuvent avoir toute leur force, sans quela naissance
et l'identité religieuse de l'enfant soient abandonnées au
hasard des rencontres, et elles peuventtrès bien coexister avec
un régime de*filiation régulière où le totem de t'enfant est
déterminé à t'avance.
M. R. consacre. en terminant, quelques remarques à la
question des totems multiples ou associés. Les faits dp ce
genre abondent en Mélanésie bien qu'ils soient peut-être de
formation secondaire, ils sont d'un grand intérêt pour l'étude
des classifications (p. 178, sqq. cf. p. IGfl). il. H.

MARZANidb). -Le Totémisme aux Iles Fiji. Anlhropox,


1907,p. Tl»-7àl.
W. Il. R. R1VERS. – Totemism in Fiji.««, K)08.n" 7ÏÏ.
11» l'kXStt SOCIOLOOtgCE.
M0-19Û9

SELIGMAXN.– Note on the Totemism in New Guinea.


Mon,19U8,n" 8'.).
Les deux premiers de ces articles nous montrent avec
quelle souplesse le totémisme s'adapte il des formes sociales
pour lesquelles il n'est pas fait et comment, tout eu gardant
certains de ses traits les plus caractéristiques, il se mue eu
un type de religion supérieur. 11u'y a plus, à Fiji, de clan
totémique des divinités proprement dites y sont adorées.
Mais il y a des groupes locaux tribu ou divisions de la
tribu qui se considèrent comme descendus d'un être
animé que protègent des interdits variés, notamment -des
interdits alimentaires. Les dieux eux-mêmes conservent la
marque de leur origine. Certains, dans la notion desquels il
n'entre plus aujourd'hui aucun élémeut emprunté à l'anima-
lité, ont pourtant le pouvoir de prendre la forme d'un animal
qu'il est alors interdit de manger. – Les plautes semblent
tenir dans le totémisme de Fiji une place beaucoup plus con-
sidérable que dans celui d'Australie.
Hivers et de Marzan signaleut des totems secondaires ou
associés, traces d'anciennes classifications. Seligmaun en a
également constaté l'existence dans la Nouvelle-Guinéeet il
nous en donne un tableau. E. D.

G. Me CALL THEAL. – Hlstory and Ethnography of


Aftica, South of the Zambesi. Vol. I, UiOÎJ-1798. Lon-
don, Swan. Sounenschein, 1907, XXIV-501p. in-8*.
Une histoire de l'Afrique du Sud, même entendue au seus
le plus descriptif, chronologique, ne pouvait faire abstraction
des populations queles Européens ont colonisées, c'est-à-dire
conquises, dépossédées,exploitées. Le livre de Me Call Theal
débute donc par une étude ethnographique générale des divers
groupes ethniques que, lors de leur établissement eu Afrique
du Sud, rencontrèrent les Portugais, puis les Hollandais. On
les divise, depuis Bleeli,en trois groupes Boschiman, Hotteu-
tot, Bantu, et rien n'a encore fait repousser cette répartition
classique que M. T. adopte naturellement.
Passons rapidementsur ce que l'auteur nous dit des Boschi-
man et des Hottentot; il ne les connaît que comme nous
pouvons les connaître(chap. I" par les documentsimprimés,
et ne semble pas avoir eu accès, par ses fonctions d'historien,
SÏ.1TKMIM DE*SOCIÉTÉS
ItKLHilKt'X IXKKH1KUKK< 107
.1_
à des sources manuscrites bien importantes au point de vue
ethnographique. Même ces renseignements sont peu criti-
ques. Ainsi on dirait 'p. 20; que M. T. ignore que Csigu le
grand dieu boschiman n'est autre que la mante religieuse, et
que Tsuni II Goal)(II représente la fameusegutturale aspirée),
le grand dieu hottentot. pourrait fort bien être, non pas une
individualité, mais le nom collectif des ancêtres 'cf. p. 1H
l'histoire abrégée de ses morts et de ses renaissances). Quel-
ques indications de sources difficilement accessibles, de faits
peu connus, Ipar exemple, p. 4i), ablationd'un testicule lors.
de l'initiation^, pourront compenser certaines affirmations
assez invraisemblables, concernant le préhistorique du Sud-
Africain 'cf. p. 14, p. 27 et SOI).
La principale utilité sociologiquedu livre consiste dans les
chapitres iv, v, vr, vu. consacrés à l'étude des Bautu uue
connaissance personnelle des Ama-Xosa(voir p. 99, 108 et
cf. les autres ouvrages de M. T. Knffir Folklore, etc.) leur
donne une valeur particulière.
En ce qui concerne lu religion des Bnntu, nous ne trouvons
à signaler comme nouveauté que ce qui concerne le totémisme
ip. 91). On était habitué à ne pas le rencontrer au sud du
Ziimbesc; mais, chaque jour, soit d'anciens documents qu'on
exhume, soit de nouvelles observations prouvent ou qu'il y
existe encore, ou qu'il y a existé à une date récente. « A quoi
dansez-vous? », « quel animal imitez-vous? métait, parait-il,
une des questions régulières adressées au Bakwena, au
lîatanga, en vue de les identifier. Dos Santos, le prêtre portu-
gais du xvi" siècle, dont M. Me CallTheal a publié ailleurs la
relation I Record*of SouthF.attteruAfriea,IÎ101,VII, indiquait
déjà que les hommes reproduisaient les actes de leur animal
éponyme et interdit, de leur sihoko. Il est donc bien établi
que 1'eflacement du totémisme dans ces tribus est de date
récente. Il jouait, d'ailleurs, un rôle également dans les
interdictions matrimoniales puisqu'il y a exogamie entre
gens de même nom il réglait les cérémonies de la nais-
sance – malheureusement on ne nous explique pas en détail
comment ip. 120). Quant au reste des phénomènesreligieux
nous n'avons remarque qu'un bon exposé de l'initiatiou des
filles chez les Xosn 'p. Il Ci, et la preuve que les cérémonies
de l'allumage du feu nouveau, encore eu usage chez les Ova-
hc.rero, étaient pratiquées, il y a quatre siècles, chez les
Kalanga (p. i)4).
108 l'a.NXKK 80CIO1.OGIQUK.
1900-UIO'J

Sur ce qui touche à l'organisation politique et sociale, aux


phénomènes économiques et à la technique, le tableau de
M. T. est,au contraire, bien incomplet. Vliixloire de la chef-
ierie. celle de la formation des royaumes hantu était cepen-
dant assez intéressante pour pouvoir être suivie, et servir du
thèmes à des développements bien utiles, nou seulement
au point de vue sociologique, mais môme au point de vue his-
torique; la formation, eu partie sous l'inllueuce arabe et
européenne. de royaumes militaires. a joué un rôle; de même,
les modifications de la technique, les transformations d'agri-
culteurs en pasteurs, voire en ouvriers p. -lOïi, suite ou
cause des migrations, tout cela eût pu fournir un thème à des
développements, ou tout au moins entrer pour une part, et
une part nécessaire, dans le résumé qu'a tenté M. T.
Combien peu ces préoccupations l'ont absorbe, c'est ce dont
on se rendra compte eu constatant que c'est dans une note
additionnelle 'p. 172, u. 8> qu'il traite, ou renonce à traiter
des importants ellets de la filiation utérine. il. M.

A. WERNEK. – The Native Races of British Central


Africa. – TheXatite Hacet of lite liridih Empire. Lon-
don, Coustable, l'JOti,XU--294p. in-H\
Lelivre de MrsA. Werner n'est pas une simple compilation
de documents c'est celui d'un observateur, qui longuement
résidé aux missions anglaises de l'Afrique centrale, daus
le bassin du Shiré, gros allluent septentrional du Zambèze.
La plupart de ces observations personnelles portent sur les
Nyanja, mais il est évideut qu'elles n'ont été rédigées qu'après
qu'elle avait quitté ces tribus depuis |assez longtemps. C'est
seulement ensuite que Mrs \V. s'est mise au courant de la
littérature ethnogéographique et anthropologique, et c'est
quelquefois à travers ses connaissances scientifiques qu'elle
entrevoit les faits dont elle a garde la mémoire. Ainsi elle a
été obligée, à cause de sa définition de la magie et de la reli-
gion, de couper en deux la description d'une cérémoniedesti-
née à procurer de la pluie et qui comprend ce qu'elle appelle
un min cluinn (p. 76i et une offrande à Mpambe'p. 801.
Les tribus considérées»ont toutes été soumises à de pro-
fondes altérations; des siècles de guerres et de migrations pu
tous sens ont agi, non seulement sur les institutions, mais sur
les dimensions mêmes des sociétés, dont quelques-unes ont
SVSTKMKS UKSSOCIÉTÉS
HUUUIKI.X l.NKKIUKUMKS l(J0

d'ailleurs, pour ainsi dire, disparu, dont d'autres sont deve-


nues des espèces de tribus uohles au milieu de peuplades
serves, et ne se maintiennent que grâce à une rude auto-
rité. Tels sont les Ngoui, dont Mrs. VV. nous décrit fort
bien la situation encore mal connue (p. 31, 84; cf. p. 279, 290j.
Sur les s Yao, les renseignements qu'elle donne ont cet intérêt
qu'ils nous permettent de vériller ce que Mucdomild en a dit
dans sonlivre, .ifrkanu {i vol., IHHi),où bien des choses parais-
saiuut suspectes. La plupart des autres tribus ue sout étudiées
que d'une façon fugitive.
Les faits religieux les plus intéressants sont les suivants.
D'abord, ce sont de nouvelles traces de l'existence du toté-
misme médecine animale appartenant à un clan (crocodile,
Nyanja, p. 2U;, interdictions alimentaires, par famille, mais
aussi par individu (p. !)i).4Ou sait, d'ailleurs, que le toté-
misme individuel est général chez les Bantu, et n'a, en fait,
jamais été mis en question. Mais ce qui est plus important,
c'est que l'auteur ait tenté de rattacher aux cérémonies de
l'initiation les danses totémiques, et nous parle de masques,
de confréries, de pas dansés autourde tumulus à formeanimale
l.p. 122, 123, p. 9", 98, 1% II est vrai qu'il s'agit surtout des
Yao, et de l'initiation desfilles. Mais, pour qui sait le rôle du
clan utérin chez ces Bantu, le fait n'aura rien de contradic-
toire l'initiation, « nuyago » chez les Yao, « nkole chez les
Nyauja, consiste à être « dansé »; peu importe que ce soient
les filles et les garçons, les garçons, ou les filles seulement,
qui ont été « dansés ». L'important, au point de vue d'une
théorie de l'initiation totémique, c'est que ces danses existent.
Nous prisons moins ce que Mrs. W. nous dit des autres
cultes, des autres mythes, des grands dieux Yao et Nyanja,
Mulungu, Chitowe, etc. (p. SO,sq.). Nous doutons même de
son affirmation (p. 01, 62i, sur l'absence d'esprits méchants
dans ces tribus. Déjà l'âme des morts n'est pas toujours bien-
veillante, et il est extraordinaire qu'une population, à plus
forte raison des populations Bantu « soieut absolument sans
démons ». Sur les faiseurs de pluie, sur les cuites pastoraux,
les rites funéraires, sur la magie, et en particulier l'envoûte-
ment, les faits n'offrent, à notre avis, pas grand'chose de
saillant L'initiation seule est l'objet de développements

(p.42i,un passéeoùlesilûformalions
i. NoussiiîtiuliTiju-i îlesilcjntssont
fiuplovréscomme un ruuyun dvrend™ l'homme sriiiblablt;
à l'animal.
110 L'AX.\KKJOWOUHUijUK.iWMVOU

uom nous venons, a propos du totémisme, de signaler une


partie; il est bon de uoter, bien établie, l'existence d'une
maison des hommes, d'un prytanée, i bwalo », dans chacun
des villages du bassin du Shiré. – Naturellement l'étude,
diHicile mais fructueuse des représentations collectives n'est
pas faîte. On trouvera une remarquable trace de classification
du type que nous avous signalé autrefois (p. SU) une sorte de
tableau des contes et de leur structure littéraire (vers com-
menté, p. 230, sq.j et de leurs thèmes, une petite collection
de proverbes et d'éuigmes (p. 210, sq.j.
Sur l'organisation sociale, au contraire de la plupart des
publications que nuus avons sur les Bantu, les documents
sout abondants et heureusement choisis. Le clan utérin est
bien décrit (p. Ma), et l'existence de chefs-femmes est, ici
aussi, établie ip. 250) la famille maternelle, les règles de la
succession en ligne utérine le sont également (p. 132, 133,; le
régime matrimonial et les rites du mariage, et du divorce le
tabou de la belle-mère qui dure jusqu'au premier né la
situation privilégiée de l'enfant, traité de « sa seigneurie »
(p. 109/, tout cela constitue une aboudaule moisson eu ce qui
touche la famille. Sur l'organisation politique, ou consultera
les passages concernant le chef (p. 26ty, sesaliments réservés,
ses pouvoirs sur ses sujets, la nature, les rites spéciaux à son
enterremeut et à la momification de sou cadavre. Les crimi-
nalistes noteront une bonne étude de l'ordalie et de la cou-
fessioa qu'elle provoque (p. 2G4j la notion du chiropr, ce
« pouvoir mystérieux u que craint celui a commis un meurtre
à l'intérieur du clan ip. 179;. En ce qui concerne le droit de
propriété, on verra (ili.j un curieux usage de fiauçailles du
propriétaire au sol, et un bon tableau de l'esclavage
(p. 280, sq.
Il n'y a que fort peu de négligences dans le livre que
AI.Thomas a eu raison de publier dans sa collectiou. Nous
n'en citerons qu'une page loi. Mrs W.eût bien fait de nous
dire de quel grand-père il s'agit maternel? paternel ?
M. M.

SWANTON (J. R.J. – Contributions to the Ethnology of


the Haida. Publ. Jetu/i tort hPacificExpédition, vol. Y.
partie 1. Mémoire of the American Muséumof Natural His-
tory, lOuîi(paru I9WJ..jLeiden, Bril), New York, Stechert,
1006,iO'J p., grand in-i».
SÏSÏÊJIES UEUGIEUXDE* SOCIÉTÉSJXFBHlKUHËi 1|{
.,mn~, 1
SWANTOX<J.R.). Social condition, Beliefs and Lin-
guistic Relationship of the Tlingit Indians. 20 th.
AniUKtlRepartof the Hurrnu of American Mhnology, 1905.
(publié 1908),p. 301.81: gr. in-4*.
SWANTONiJ. H.J. Haida Texts and Myths (skidegate
Hialech Bulletin iU, Huma of Ammean Mhnologij, 1905
(publié HKM$i,-llKp.,iu-«'.
Les Haida et les Tlingit («te Koloshes, souvent appelés
Tliukits, Thliuquit, etc.; sont les deux nations les plus sep-
tenlrionules de cette grande famille de peuples, qui occu-
pent toute lu côte américaine du nord-ouest du Pacifique. On
sait combien leur art, leur mythologie, leur organisation
compliquée, malgré la vivacitéde formes très primitives, ont
frappé ethnographes et sociologues. Entre autres tribus les
Tliukit avaient été déjà étudiés par Krause, les Haida par
Swau. Mais les récents travaux de M. Swauton nous appor-
tent sur ces deux sociétés de nouveaux et importants rensei-
gnements.
Celui qui est consacré aux Tlinkit est plus sommaire que
celui qui traite des Haida. M. S. ne parait pas avoir séjourné
chez les Tlinkit plus de quelques mois et, quel qu'ait été son
zèle, il est difficile que son enquête ait été très approfondie.
La plupart de ses documents lui vienuent d'un Tliukit de
Wraugell qui paraît bïen informé (p. 405, 411 et suiv.). Les
autres sont des sortes d'auecdotes,des récits, des descriptions
d'indigènes dont la pensée était plus ou moins claire. Il
semble même que l'auteur n'ait pas transmis ces témoignages
sans quelque négligence. C'est ainsi qu'un nom de mois,
ideutique dans ledialecte de Sitka et dans celui de Wraugell,
est traduit de deux façons différentes (p. -411 1.–Quant aux
mythes et traditions Tliukit, la publication eu doit paraître
dans un Bulletindu Bureau of Ethnology.
Surles Ilaida, au contraire, une enquête de dix mois a abouti
à des résultats beaucoup plus certains. Des objets nombreux,
couverts de sculptures.ont été collectionnés.A propos de cha-
cuu d'eux, l'auteur cherchait, avec l'iudigène interrogé, l'in-
terprétation de chaquesymbolisme,de chaque stylisation. Sou
chapitre x sur les représentations du blason dans le mythe et
dans l'art, avec les nombreuses planches publiées, est uu tra-
vail capital pour quiconque voudra étudier les rapports du
totémisme et de l'art et des méthodes très origiuales de repré-
112 l'a.N.NÉK SOCIOLOGIQl'E.
1900.1909

sentutiou. Les longs poteaux totémiques, plantés devant les


maisons nobles, et où s'écartèlent eu.ordre les blasons de la fa-
mille masculine et utérine, les buttes et canots funéraires, les
proues de cauot, les cuillerées sculptées, les peintures sur les
parois du fouddes maisons, surles couvertures et sur les véte-
meuts, sur lespluts, les masques,les plaques de cuivre qui sout
la propriété des clans, tous sont soigneusementdécrits,
expli-
qués, commentés or, on sait le caractèrecompliqué de cet art
qui représente uu animal par un trait schématique de quelque
partie de sou corps(voir p. 149,u"3-9;.SI.S. a été ainsi mis sur
la voiede nombreux mythes, totémiqueset autres, d'annales de
claus.d'histoiresde village, quisont enregistrés dansées docu-
ments figurés. Cesmythes et récits très uombreux, il les a enri-
cuisde notes précieuses suivant parfois un même thème dans
la mythologie du Nord-Ouestaméricain en 'général
{llaiéi,
p. -im, 184, 185|. On regrette seulement qu'il n'ait pas assez
cherché à coordonner les faits ainsi rassemblés(il arrive
qu'un
même mythe se trouve dans trois versions différentes; et
qu'il
ne les ait pas toujours reproduits sans quelque
négligence.
On trouvera, d'autre part, au chapitre xm deux tableaux
des familles Haida rangées par phratries, clans, villes et mai-
sons.
Nous rendons compte plus loin de ce que ces travaux nous
apprennent sur l'organisation sociale et juridique. Nous ue
retenons ici que le système religieux," ramenéà ses notious
fondamentales.
1. – Les études linguistiques que M. S. a faites chez ces
peuples lui ont permis d'étudier le rôle deleurs concepts dans
la mythologie et dans le rituel. Il a été amené ainsi à décou-
vrir chez eux une notion tout à fait analogue à celle de
mana. « Les Tliagit, dit-il, ne divisent pas l'univers arbitrai-
rement en autant de départements régis par autant d'êtres
surnaturels. Au contraire, la puissance surnaturelle leur fait
l'impression d'une grande immensité,une, homogène, imper-
sonnelle, insondable, mais que, chaque fois qu'elle se mani-
feste aux hommes, prend une personnalité, une forme hu-
maine, quelle que soit la forme de l'objet même dans lequel
elle se manifeste. Non pas qui nous pensions que le
Tlingit
raisonne consciemment ainsi. mais tel est sou sentiment
inexprimé. C'est pourquoi il n'a qu'un nom pour ce pouvoir
spirituel, c'est ytk, mot qui est alllxé à toute manifestation
personnelle de cet esprit. Cette énergie spirituelle doit être
SÏSTÈUESREUOJEUXDES SOCIÉTÉSI.NFliilIKL'nES {{3
II Via* J t *« MK J £
soigneusementdistinguée de l'énergie naturelle (p. 451,
Il. 8).»
Unéquivalentde la mêmenotionse retrouvechezles Haida
sous le nomdeagAna(cf. vocabulaireTlingit,p. 479;.Il est
vrai que, dans ce cas, M.S. paraitavoirété un peu dérouté
par un commencement de personnification de cette puissance
impersouuellesous la formedu « Pouvoir des lieux bril-
lants », Sinmjdimyuawai(p. 14; de qui les autres sgâna
tiendraientleur pouvoir.Maisl'emploitrès général du mot
dans les textes notredispositionnousassure que les inter-
prétesde M.S.avaientraisonquand ils traduisaient la syl-
labe sgâpar pouvoir.
H. – Sur le totémismedes Haidaet des Tlinkit, M. S.
apporte un certain nombrede faits nouveaux et intéres-
sants, mais qui demandentà êtrebieninterprétés.
Eu principe,DawsouetKrausenousreprésentaientTlinkit
et Haidacommecomposésde deuxphratriesexogames,qui se
subdivisentelles-mêmes en clansréguliersayant chacunleur
totem.La descriptionque nousen donneM. S. est quelque
peu différente.La répartitiondesprincipaux totemsn'aurait
pas la nettetéque les auteurs antérieurs leur attribuaient.
11cite, en effet,chezl'un et l'autre peuple,nombrede blasons
animaux et d'emblèmesqui semblentcommuns aux deux
phratries. Ainsi,chez les Haida. le poisson-chien,la bête
d'eause retrouvent comme blasonsetdans la phratriedu cor-
beauet dans cellede l'aigle (p. 107 cf. les tableauxdes
pages114et 115/.11se trouvemêmeque, daus la phratrie de
l'aigle,cinq clansont le corbeaupourblason,alors qu'il y en
a seulementdeuxdanscelledu corbeau.Chezles Tlinkit,où
les deux phratriesont pour blasonl'un le corbeau,l'autre le
loup,on rencontredes faits similaires(Tlingit, p. 416/.On
peutdonc se demandersi, dans ces sociétés, le totem, non
seulementdesclansmaismêmedes phratries, est bienhérédi-
taire, s'iln'est pas indépendant de l'organisationeu phratries
et en clans. Delà à conclureque les Tlinkit et les Haida
apportentune preuvenouvelleque le totémisme individuel
est le fait primitifet fondamental,il n'y avait qu'un pas et
M.S. l'a franchi(voirAnnée Soeiol.,X, p. 409;.
Mais,d'abord,il ne faudraitpass'exagérerl'importancede
cesfaitsqui sontrares,commeilressortet des tableauxHaida
et des commentaires qui accompagnent les exemplesTlinkit.
Noussavonsmêmeque, dans quelquescas, ces chevauche-
E. Di-hkhew.– Annciusoeiol., 1900-1006. 8
11* l'asxék sociologiqur. luoe-1909

in un lu ontil
ments sont Jim
dus àA de
J« .i,.i t.
véritables je*
usurpations qui ne sont pas
encore reconnues comme légitimes (//««/«, p. U%. Un clan
qui jouit d'une sufllsante autorité empiète sur les propriétés
mythologiques de l'autre phratrie, sans que nul ose lui résis-
ter. Mais, de plus, il y a de nombreuses causes
qui expliquent
ces chevauchements et ces complications et
qui les fout
apparaître, non comme les conséquences normales du priu-
cipe primitif sur lequel repose l'organisation totémique, mais
commedes perturbations de cette'dernifcre.
Il y a d'abord les mariages internationaux
que Tlinkit et
Haida contractent souvent ensemble. Comme, dans toutes ces
sociétés, les phratries sout strictement exogames, une régie-
.meutation internationale a du établir un système
d'équiva-
lence entre les systèmes de phratries le Corbeau des Tliukit
équivaut à l'Aigle des Haida, le Loupdes premiers au Corbeau Il
des seconds. Par suite, une Tlinkit du
Loup qui se marie avec
un Haida, est considérée comme membre de la
phratrie Haida
du Corbeau,et il euestde même doses enfants,
la descendance
étant.utérine. Toujours en vertudu même principe de filiation,
ces eufauts ont les emblèmes totémiques de leur mère. c'est-
à-dire ceux qu'elle avait dans son pays natal. Mais comme
les totems, dans les deux pays, ne sont
pas repartis de la
même manière entre les deux phratries, il
peut très bien se
faire que certains totems qui ressortissenlàla
phratrie Tlinkitt
du Loup appartiennent, chez les Haida, aux
Aigles. Que cc
soit le cas des totems ainsi importés
par l'étrangère que nous
venons d'imaginer, un même totem se trouvera chevaucher
sur les deux phratries. M. S. nous avertit lui-môme
que le
fait, que nous venons d'imaginer, se présente dans la réalité
illaida, p. 107».De plus.il existe chez les Tliukit un
groupe de
l'Aigle qui n'est ni Corbeau ni Loup, qui est en dehors du
cadre régulier des phratries. Pour cette raison, il
peut si-
marier dans l'une et dans l'autre également. Ce
qui est encon
une source de perturbations.
Mais il yena, à l'intérieur même de chacune de ces sociétés.
Si la descendance est utérine en
principe, cependant le priu-
cipe contraire tend à se faire recotitialtre et à s'afïïrmer. Che?
les Haida, un père qui veut donner à son fils un
témoiguagi
particulier d'affection lui transmet ses emblèmes tolémiques.
Ceux-ci viennent donc se combiner avec ceux
qui ont ét«
transmis au môme enfant par sa mère; et ainsi un mèun
totem se trouve représenté dans les deux phratries uiaiét.
SYSTÈMES RKUltlKCX DES ÉOClÉTlU IXFÉIUKL'IIKS J1S

p. 107). Demême, chez les Tliukit, un homme peut prêter


l'emblème de sa phratrie à sou beau-frère comme le heau-
frère est nécessairementde l'autre phratrie, c'est encore une
occasion de chevauchement. Enfiu, au cours de la vie des
individus et des clans, il y a un commerce de blasons qui
vient s'exprimer dans le potlaleh, cette curieuse institution
dont nous donnerons plus loin une analyse. On perd son
blason au potlnkh ou le perd aussi à la guerre. L'emblème,
le totem sont la source d'un important pouvoir dont chaque
groupement s'efforcede retenir le monopole, mais dont les
autres s'eflorceutde se saisir. Cette propriété religieuse est
celle à laquelle on tient le plus. Les plus forts cherchent à
en accumuler le plus possible. De là des luttes au cours des-
quelles le blason se détache de son clan pour se fixer, à titre
temporaire ou durable, dans des clans différents, même de la
phratrie à laquelle il ne ressortissait pus primitivement i voir
lïiHtjit, p. 4IG, tu lutte pour l'emblème de ta grenouille).
Si donc le lieu qui unit l'organisation totémiqtie à l'organi-
sation sociale et domestique paraît actuellement lâche, c'est
sous l'influencede causes extérieures et perturbatrices, et
l'on n'est nullementfondé à croire que cettfi indépendance
soit uu fait primitif Toutau contraire, des faits prouvent que,
uriginellement, les totems étaient répartis entre les clans
d'après une règle beaucoup plus stricte. D'abord, il importe
de noter que les phratries subsistent avec leurs totems dis-
tinctils dans ce cas, le caractère collectif des totems est
manifeste.Al'intérieur de-chaque phratrie, un trouve parfois
des groupes qui ont chacun un seul totem iTlinyil. p. 416,
•Wl-432,398-iOOi. Enfinsi le nom totémique, dans une certaine
mesure, s'est affranchidu clan, il n'en est pas de même des
prénoms, Ils se transmetteut régulièrement en ligne utérine.
La transmission a lieu, il est vrai, chez les Tlinkil et chez les
lliiïda de façons différentes, selon qu'il s'agit d'un shaniane
uud'un nobleordinaire: mais, dans les deux cas, elle produit
les mêmes résultats. le prénom d'uu sliamane passe directe-
meut à un neveu utérin. Pour un simple noble, la procédure
est un peu plus compliquée, Un fils a, en principe, le prénom
d'uu grand-père paternel. Mais, comme les phratries sont
rigoureusementexogames et que même, en règle générale,
un clan se marie toujours dans un même autre clau. un
grand-père maternel et son petit -(ils sont nécessairement,
puisque la descendance est utérine, de la même phratrie et
110Ii L'aXN'KE soeiOUMHjfK. 1900-180»

du même clan car, les enfantBd'un homme étant obligatoi-


rement de lit phratrie et du clan dont leur père n'est pas, ne
peuvent pas ne pas appartenir it la phratrie et au clan aux-
quels appartient le père de leur père Par conséquent, les
prénoms, même dans ce cas, restent toujours dans la même
phratrie et le même clan, tout en ne reparaissant que toutes
les deux générntious. D'une manière générale, on peut donc
dire que, contrairement aux totems, ils sont attaches à des
groupements familiaux nettement déterminés. Or, un pré-
nom n'est pas un simple signe verbal. Hériter d'un prénom,
c'est hériter de l'esprit de l'ancêtre qui portait ce prénom, du
dieu que cet ancêtre incarnait déjà. L'héritier du prénom est
ce dieu lui-même, il a lé droit d'en porter le masque, de le
figurer dans ces cérémonies. Par cela seul que le prénom se
transmet dans le clan, il y a donc tout un ensemble de choses
sacrées, de pouvoirs, de personnalités mythiques qui sont
attribuées à ce même groupe, qui sont sa propriété. Mahf,de
plus, des rapports étroits unissent ces prénoms aux noms
totémiques très souvent, les premiers ne sont que des spéci-
fications, desdéterminatious particulières des seconds. Ainsi.
chez les Tlinkit, on trouve comme prénoms « le loup qui
crie pour avoir de la nourriture », « le cri du loup », « uue
certaine espèce d'ours » (ce qui équivaut à une espèce particu-
lière de loup, l'ours étant un doublet du loup); « le corbeau
mort », « le reste de la nourriture du corbeau » etc. (Tlingit,
p. 406; Uaida, p. 417).Chezles Haida, le mythe nous présenti;
dans certains cas, un lot de prénoms comme attribué à un
clan: ainsi le clan du tonnerre, qui appartient tout entier à l;i
phratrie du Corbeau, est divisé en un certain nombre <l<
personnes. Les prénoms sont, en définitive, de la menue
monnaie de totems c'est dire qu'ils ressemblent singulière-
ment aux sous-totems d'Australie etde certaines sociétés nord-
américaines, et l'on sait quelle étroite parenté il y a partoui
entre totems et sous-totems. Si donc, aujourd'hui encore,
ceux-ci sont la chose des clans, c'est qu'il eu était primitive-
ment ainsi des totems proprement dits.
Assurément pour que letotem ait pu en venir à circuler de
clan à clan, pour qu'il ait pu servir d'objet d'échange ou d.
présent, il faut que le caractère religieux s'en soit quelque
1. Commelu système<\epaninlûest « elassilieutoire don
»,Ingrand-pure
il s'agiticiest ntiturelli-meiit
unmembri.' du groupedusgramls-|i<Tes.
CV.
vraissemblablnmciit !<dernierdiicédé.
SViTÈMKi IlKMlUKUX DUS SUClKTKi 1NKÉUIKUHES 117i

_n.·. m n.' ..1.1 ..L.I -1:11.& ..r. 1. "'I~_I.


peu eHace. Et eu ellel.cest essentiellement, chez les Tlinkit
comme chez les Haida, un blasou, uu emblème une propriété
religieuse plus qu'une ligure mythique. On y voit beaucoup
moins qu'en Australie môme,ou sur d'autres points de l'Ame*
rique, une espèce iiuimale dont les hommes du clan font par-
tie. On le possède, plus qu'il ne vous possède. On ne lui olfre
guère de culte. Du moins, lu tabou totémique n'est pas res-
pecté. Même le corbeau, espèce de totem-roi chez lesTlinlcit,
n'est pas à l'abri des attaques des propres membres de la
phratrie qui porte son nom illaidu, p. 27*. Chez les Haida,
ou n'adresse aucune prière à l'aigle 'p. 2Hi. Cependant, si
incontestables que soient ces faits, il ne faudrait pas s'imagi-
ner que les clans totéiniques originaires aient été sans culte
aucun. Posséder un totem, c'est posséder, du même coup, une
lignée d'ancêtres qu'on prie (Mijlh*. Itultctin 29, p. 40 qui
vous assistent c'est être propriétaire du chant de la phratrie,
du chant spécial de ta famille et du clan. Ce chaut est une
chose très précieuse, car il vient de l'ancêtre, du génie que
l'individu réincarne, et, aujourd'hui encore, quand ce chant
est répété, c'est le génie qui est censé parier par la bouchedu
chanteur. Réincarner un ancêtre, avoir uu pouvoir spécial
sur une catégorie déterminée d'êtres, dire le chaut qu'il faut
pour réussira lachasse ou apaiser les animaux tués, tout cela
rentre dans la définition même du totémisme considéré au
point de vue religieux. On pourrait môme retrouver des traces
de cérémonies qui rappellent les inliehiuma d'Australie
'v. Tlmgit,p. 455 et suiv.; cf. le mythe du saumon
En résumé, ce qu'on trouve dans ces sociétés, c'est une orga-
nisation totémique ébranlée, décomposée sous l'iullueuce de
causes diverses, mais qui, en même temps retient, avec une
remarquable fidélité, certaines formes très archaïques qui
témoignent de ce qu'elle fut. Les phratries subsistent avec
leurs totems qu'elles ont si souvent perdues en Australie. Les
totemsont cessé d'être la marque distinclivedes clans mais
les sous-totems, sous la forme des prénoms, ont gardé leur
caractère primitif. En définitive, c'est une organisation qui
ne dilîèrc qu'eu degré de celle des Kwakiutl l'une peut
aidera comprendre l'autre.
III. Nous ne pouvons qu'indiquer l'importance des docu-
ments mythologiques rassemblés par NI. S., d'autant plus
que les mythes des Tliukit ne sout pas encore publiés. Maisce
que nous possédons dès à présent suint à montrer les rapports
118 I.'A.VNKB âUCU>U>U!<H'K. ISWO-ltOï

que cette mythologie soutient avec le totémisme et le système


des claus et des phratries.
Ainsi le mythe du Corbeau, Yel, chez lesTlinkit, est mani-
festement un mythe de phratries. Comme dans tout le Nord-
Ouest américain, c'est le Corbeau qui pécha le monde, qui
transforma les premiers êtres surnaturels eu animaux, en
hommes, qui lit un déluge, etc. ("flinrjit,p. '»Î35;llaida, p. 74,
183i.Or, d'après uue lougue version qu'ou raconte à Skide-
gâte, chez les Haida (llaida, p. lit». 147 cf. p. 112, 183, 208j,
aussitôt après le mythe de la terre pèchée, nous voyons inter-
venir l'Aigle, que le Corbeau réussit à lui voler. Dans toutes
ses aventures, le Corbeau est accompagné par « son cama-
rade l'Aigle», qu'il dupe, bafoue, avec lequel il rivalise, dont
il fait sou commissionnaire, etc. Nous retrouvons doue les
phratries et les totems associés dans le mythe comme dans
l'organisation sociale. Nous ne nions pas, d'ailleurs, que, sur
la côte du Pacifique, le Corbeau ne soit devenu un grand dieu:
mais il estd'autant plus intéressant de constater qu'il a été
un totem de phratries qui soutient avec l'Aigleune opposition
identique à celle qui existe entre les totems des phratries
australiennes.
Bon nombre de mythes sont, de même, des mythes des
clans. Ils sont destinés à expliquer l'origine des masques, des
emblèmes, des prénoms. Ce sont des histoires d'animaux
secourables avec lesquels une femme du clan contracte
mariage ou bien auxquels un homme du clau s'allie, par voie
matrimonial. ou autrement c'est d'eux que le clau serait
descendu et aurait reçu ses talismans. M. S., il ebt vrai,
ne rattache expressément à des clans qu'un certain nombre
de mythes ip. 73 et sniv.). Mais nous croyons qu'une ana-
lyse plus serrée ferait apparaître que, d'une manière générale,
ces mythes procèdent des emblèmes dont sont recouverts les
pieux toténiiques, les parois des maisons, beaucoup plus que
ces emblèmes ne procèdent des mythes. Ce qui contribue,
d'ailleurs, à expliquer le caractère totémique de cette mytho-
logie, c'est la remarquable aptitude du totémisme à s'assi-
miler et à absorber toute sorte de choses qui ne sout pas faites
pour lui. Il n'est presque rien que l'art totémique n'arrive à
représenter; c'est ainsi que les Tlinkit trouvent le moyen de
figurer, par des tatouages de la face, une montagne, ses arbres,
ses rocs, les animaux qui la peuplent, etc. Aussi, un grand
nombre de ligures mythiques, qui dépassent le totémisme,
KÏSTÈUK.SABMUIKL'XDKS.MCIÉTKSIXKKUIEUUK.'i i 9f

ont-elles pu prendre place dans les cadres de l'organisation


totémique il uous est expressément dit que, chez l'un et
l'autre peuple, tous les esprits du ciel et de la terre, tous les
dieux, locaux et spéciaux, tous les monstres ordinaires ou
extraordinaires, sont répartis entre les deux phratries. Ou
voit ainsi, comme en ce qui concerne l'organisation, des
formes archaïques persister à côté d'autres très évoluéeset
se combiner sans peine avec ces dernières.
Nous nous bornons à signaler les chapitres sur le shama-
nisme, sur les rites de la naissance et de la mort, et, eu parti-
culier, sur les quatre réiucarualious auxquelles, selon cer-
tains (Haida),le génie de chaque individu, est tenu avant de
résider définitivement au pays des morts ([>.34-35;.Nous
appelons aussi l'attention sur les rituels de la guerre, en par-
ticulier sur celui des femmes de guerriers pendant l'absence
de leurs maris certains de ces rites expliquent la notion du
« fil de vie » qui unit l'abseutà sa maison iHaùlap. 34,3, n. 2
Tlengit,p. 449-451 M. M.

KRAUSE (F.). – Die Pueblo Indianer. Eine hislomch-


elhnographiscluStadie (Nova Acta, Abhdl. d. Kais. Leop.
Carol. Deut. Ak. d. Naturforscher., vol. LXXXVII,n" 1).
Halle (chez Eugelmaun à Leipzig), 1907,260 p., gr. in4°.

STEVENSON(M.C.). The Zufil Indians. Their Mytho-


logy, Esoteric Fraternities and Ceremonies. 23"
Annual Iieport of the Bureau of American Ethnology(pour
1901-1903;,Washington, 1904(.1906;,Gov.Pr. Off.,635p.,
iu4°.

VOTHfH.). – TheTraditions of the Hopi. FieldColumbian


MuséumPitbi, Anthr. Series, IX, 4, 1906, 320 p., in-8°.

KICKHOFF(H.)..– Die Xultur der Pueblos in Arizona


und New-Mexico. Stuttgart, Strecker u. Schrôder, 1908,
70 p., in-8».

Voici, sur les Pueblos du Nouveau-Mexique,touteunesérie


de livres intéressants, quoique de nature et d'importanceiné-
gales. Celuide M. Krause est une étude d'ethnographie géné-
rale qui utilise les travaux antérieurs. Celuide Eickholla
le
même caractère. L'ouvrage de Mrs Stevenson, au contraire,
est le résultat d'observations personnelles poursuiviespen-
120 l'an.nkk socioloqiqus. iuomvou
.11 1
nant près de trente uns et, bien qu'il faille, comme nous le
verrous, s'en servir avec prudence, c'est une véritable mine de
faits. Quant à M. Voth, il nous présente un ensemble de
mythes et de contes Hopi, recueillis surtout ù Shupaulovi et
à Mishongnovi; mais ce sont des matériaux bruts et non
élaborés.
XI.Krause n'a pas prétendu faire un ouvrage définitif. Il
lui.a manqué, pour cela, bien des documents car, quoique
longue, sa bibliographie contient de nombreuses lacunes. Il
n'a connu ni les Zuili Folk Taies de Cushing, ni ses Mnnual
Conrepts,ni tous les travaux de Fewkes sur les Hopi, ni le vo-
lume de Holmes sur la poterie aux États-Unis, etc. Mais il
traite les faits qu'il connaît avec prudence et discernement et
ces faits sont assez nombreux pour qu'on puisse considérer
son travail comme une utile introduction à l'étude des Pue-
blos du Nouveau-Mexiqueet de l'Arizona.
Le grand mérite de ce livre est de nous offrir un tableau
d'ensemble de cette civilisation. Or il est nécessaire de se re-
présenter cet ensemble pour pouvoir se figurer chacune des
sociétés Putblos, et même chacun des faits sociaux qu'elles
présentent. Latrame qui les supporte est si serrée qu'on risque
de les défigureren les isolant. Une longue tradition, une haute
culture, de multiples interférences ont abouti chez les Zuni,
les Hopi, les Teuua, les Kerès, etc., à une sorte de systéma-
tique sociale, à un remarquable effort en vue de coordonner
toutes les institutions, économiques, politiques, militaires,
juridiques, religieuses. En même temps, un conservatisme
surprenant chez ces sociétés, qui sont les plus avancéesde
l'Amérique du Nord, leur a permis de garder le souvenir de
leur organisation la plus ancienne et de leurs croyances les
plus primitives ils emploient encore, au moins pour des
usages religieux, le diable (rhombe des grecs), le boumerang
(Cf.Stevenson, p. lia, n., p. 175),instruments qui correspon-
dent aux premiers stades religieux et techniques de l'huma-
nité. D'un autre côté, de fréquentes émigrations ou immigra-
tions de groupes entiers, combinées avec de remarquables
facultés d'emprunt tont que de véritables institutions sont à
chaque instant importées du dehors. Les Hopi, les Zuîii ont
des cérémonies Navaho dont les unes sont célébrées en forme
de jeu, les autres sérieusement; les Zuni ont des confréries
Hopi; même d'importants rites viennent de populations qui
ne sont pas pueblos. Certains des chants les plus solennels à
SÏSÎKUKS H8M0IKUXDIW SOCIÉTÉS1SKKIUKUHKS ii\

Zuni sont en dialecte de Sia (Stevenson, p. I2o, n.), ou même


en une langue d'une famille tout à fait différente iibiil.,
p. 848.1.Desdieux, des clans étrangers, des confréries tout
entières ont été introduits à des époques plus ou moins ré-
centes Stevenson, p. 275, 412, 413; Votif, p. 47). Des pra-
tiques qui se présentent dans certains pueblos sous forme
très simple out fructifié ailleurs au point d'être méconnais-
sables. On a ainsi besoin de rapprocher tout ce qu'on sait de
chacun des dans, des villages, de chacune des confréries, des
tribus et des confédérations, pour pouvoir comprendre ce qui
s'est passé.
C'est ainsi qu'une curieuse erreur de M. Krause n'a pas été
pour nous sans utilité, parce qu'elle repose sur un rappro-
chement. Il identifie la division des Zuiïi en deux phratries
celle du nord et de l'hiver, d'une part, celle du sud et de
l'été, de l'autre avec la double organisation d'hiver et d'été
qu'on trouve chez les Tehua. Chez ces derniers, en effet, il
existe un peuple d'hiver et un peuple d'été parl'aitement dis-
tincts chacun a ses caciques, ses gouvernants qui alternent
dans l'exercice du pouvoir. De ce rapprochement, M. Krause
conclut que, conformément aux légendes Zufli, la société Zuni
s'est formée par la coalesconce de deux peuples différents,
venus l'un du nord et l'autre du midi. Or,c'est, croyons-nous,
en sens inverse que devrait se faire le rapprochement. Nous
avons dit autrefois quel était, selon nous, le véritable seus de
ces légendes lAnm'e Social.,VI, p. 4844). Elles racontent que
les Zufli, une fois sortis de terre, se séparèrent pour se re-
joindre plus tard. Mais cet épisode ne fait que représenter
historiquement le partage des pouvoirs des phratries sur les
régions et les saisons. On en vient ainsi à se demander si ce
n'est pas le fait Zufli qui explique le fait Teliua, et si la suc-
cession des caciques d'hiver et d'été chez ce dernier peuple
n'est pas tout à fait comparable au rôle respectif des phratries
à Zufli. Cette interprétation se trouve confirmée par ce que
nous disons plus loin sur la manière dont les rôles sont dis-
tribués entre les clans pour les rites du solstice d'hiver et du
solstice d'été, et par lu façon dont les grands prêtres fournis
par les deux phratries du nord et du sud remplissent alter-
nativement des fonctions prédominantes dans ces mêmes
cérémonies. Si donc M. Krause a tiré de sa comparaison une
conclusion erronée, elle a eu, du moins, le mérite d'attirer
l'attention sur un fait important, à savoir sur le rapport qui
122 L'AXXÉKSOUIOLOUIQUE.«0IM909

unit, chez les Zufti, l'organisation en phratries, avec cette


double morphologie d'hiver et d'été, et leur système de clas-
sification mythologique et rituelle.
Le livre de M. Krause a encore l'intérêt de nous donner des
tableaux succincts du rituel, si complique, de la mythologie,
si enchevêtrée d'histoire (notamment chez lesllopi de laMesa
orientale), et surtout de la morphologie sociale (on trouvera.
p. il et suiv., une boaneétudedeia maison;. Maisil a le grave
inconvénient d'être conçu sous uue forme strictement histo-
rique le but que se propose l'auteur, après bien d'autres, est
de retracer l'histoire des divers pueblos. Il se sert pour cela
de données archéologiques, qu'il proclume, justement, insuf-
fisantes, dedouuéesliuguistiques dout il n'est pas très maître
(voir p. 19Cet suiv.), et enfin des traditions qu'il ne connaît,
d'ailleurs, qu'en partie. Or, en réalité, l'histoire proprement
dite de ces peuples n'est possible qu'à partir du xvi"siècle,
parce que nous pouvons alors contrôler les légendes locales
par de.s documents espagnols. Au delà, on a afTaireà des lé-
gendes de villages, de clans, de confréries qui, sans doute, ont
un fondement historique, mai» qui, cependant, se sont enri-
chies de mythes, de déformations volontaires de la vérité,
destinées à rehausser la gloire du peuple ou du groupe qui
les raconte (voir Voth, nu 101; p. âil). Prendre ces récits
pour des documents historiques, c'est s'exposer à des erreurs
comme celle que nous avons signalée plus haut, ou comme
celle que M. Krause commet quand il considère les peuples
mythiques du feu et de :'eau comme ayant réellement existé.
Le travail de M. Eickhofl, à peu près aussi documenté
que
celui de M. Krause, a une utilité du même genre. Peut-être
même est-il plus prudent. Il ue se pjse pas l'unique et iuso-
luble question de savoir d'où viennent les Pueblos. L'étude
8omalologique y est plus poussée que dans le livre de
AI.Krause en revanche.les mythes et les phénomènessociaux
y sont moins bien analysés
Mythologie. On sait quel intérêt présente, en général, la
mythologie des Pueblos. Leur organisation sociale s'y reflète
très exactement.
11est rare qu'un groupe ait fait un effort aussi suivi pour

I. Nhussignaleronsaussile livredu A.J. Pin»,TheamericanIiittimit,


a*a prorluct»f enviroiimenl uillt the spécialrefermer*In IhePutlilos.
Nousn'avuiispu i|uel'etiln-vulr;"misIl nousu paruqui.-c'étaitsurtout
unlivreiiu vulgarisation
vl it'uutliru|iugiso|(ra]ilii,
SVSTKUKSIIKUHIEUXBKSSOUKTËSi.STÉMKUHKS 123

arriver à se représenter à lui-même, ce qu'il est, ce qu'il fait,


comment il vit,et pour établir surcette mythologie toute une
morale, tout un rituel, toute une mentalité. Or, le travail de
Mrs. Stevensoneteelui dé li. Vothconstitueiitdeuximportantes
contributions à l'étude de cette mythologie. Les 70 premières
pages du livre deMrs. Stevensonsont consacrées à uu tableau
systématique des mythes. Suit ù proposdes principaux rites,
soit à propos des principales confréries, l'auteur nous donne
des renseignements plus ou moins détaillés sur les mythes
qui justifient cesrites et ces organisationsiv. p. 03, Iti3, 407).
Le livre de M. Voth n'est qu'un recueil de textes Hopi il n'a
rien de l'ordonnance que Mrs.Steveusoua tenté d'introduire
dans les mythes de Zuni. D'abord il contient à la fois des
mythes et des contes, dont un certain nombre ont même été
racontés par des femmes. Ensuite, les traditions locales sont
rapportées sans être ajustées les unes aux autres; et cepen-
dant, un travail d'ajustement eût été, ici, plus nécessaire
qu'ailleurs. La mythologie Hopi se présente, eu effet, tout
autrement que celle des Zuni. Zuni ne contieut plus qu'uu
seul pueblo de plus, le travail des prêtres et des confréries,
poursuivi pendant deux siècles,a unifié en quelque sorte les
faits uue tradition suffisamment uniforme a été établie.
Clans et confréries organisés ont harmonisé leurs mythes, et
eu ont fait disparaître les contradictions les plus graves. 11
n'en a pas été de mêmechez les Hopi,dansla régionde Tusayan.
Là il y a encore cinq puehlos, repartis sur trois plateaux, sur
trois mesas. Si l'un d'eux, Oraibi,tend à devenir prédominant,
ce n'est que depuis une date récente. Chaque pueblo, nous
al lions dire chaque ville, chaque clan dans chaque pueblo, se
dispute cette sorte de prééminence religieuse à l'appui de
laquelle vieut le mylhequ'il racontede lui-même. Les variantes
locales des mythes et des rites des mêmes confréries et des
mêmesclans, répandus dans les différentsvillages,présentent
de notables divergences encoreaccrues par ce fait quephratries
clans et confréries ne sont pas égalementreprésentés dans les
cinq pueblos. D'autre part, les Zuni ne sont pas seulement
concentrés et uniformisés: ils sont encore, autant qu'on peut
e u juger, établis, depuis fort longtemps,à la place qu'ils occu-
pent; leur géographie mythologique a eu le temps de se fixer.
Leurs lieux sacrés de pèlerinage sont nettement déterminés,
chacun pour un but particulier. Les Hopi, au contraire, ont
à peine terminé leurs principales migrations. Cette relative
124 L'ANNÉE SUCIOLuUigUK. 19UIM909

mobilité de la population, jointe au peu d'iutimité qui règne


entre les différents groupes en dépit d'une unité sociale in-
contestable, tout cela a contribué à empêcher la mythologie
de s'orgauiser et de s'unifier comme à ZiuM.
Les quarante premiers récits de M. Volhsont certainement
des mythes. Vingt-cinq sont des mythes d'Orutbi une quin-
zaine ont été racoiités à Shupautovi, le reste à Mishouguuvi.
Ou peut assez aisément les classer. Les uus constituent une
véritable cosmogonie,que nous pouvons comparer à celle des
Zufli. – Lesautres nous retracent l'histoire des clans. Ils sont
du type suivant un clan se détache de la masse des Hopi
après que ceux-ci sont sortis de dessous la terre, va dans
telle direction, il a telles et telles aventures, rencontre d'autres
clans, d'autres tribus, prend tel nom, se subdivise de telle
manière, adopte tels et tels dieux, tels masques, tels cultes,
s'organise en confréries, s'établit dans tels villages où il
admet successivement soit comme hôtes, soit commeassociés,
tels autres clans, pourvus d'autres dieux, d'autres totems,
d'autres confréries. C'est le caractère historique de ces contes
qui a trompé M. Krause et, avant lui. M. Fewkes; comme ils
ont une allure terre à terre, on dirait qu'ils retracent des évé-
nements réels, alors qu'un certain nombre de thèmes histo-
riques ne font que justifier des rites et des mythes. Ils reflè-
tent toute une théorie religieuse car si uu clan vient du nord,
ce n'est pas seulement parce qu'il eu est venu effectivement,
c'est surtout parce qu'il devait en venir, étant donnée la na-
ture de ses attributions et de ses fonctions. D'autres mythes
rapportent les aventures de personnages déterminés, les Kat-
ciuas, ces dieux qui sont en même temps des héros et des
ancêtres, génies des individus et des claus, dont les danses,
qu'elles soient individuelles ou collectives, constituent un des
traits les plus importants du rituel. Ces génies sont, à chaque
moment du temps, personnifiés par des individus qui les
réincarnent, qui en portent le masque dans les cérémonies, et
les mythes nous expliquent le rite, les chants que le masque
va répétant de temple en temple, de maison en maison, les
courtes comédies qu'il exécute sur les places publiques avec
ses associés; ils nous racontent aussi les différentes incarna-
tions du dieu. Nous n'avons pas de documents semblables
pour les dieux inférieurs du Zuni. Et ces documents sont
d'autant plus précieux qu'ils éclairent toul un côté de l'art
dramatique religieux. Les contes sont tellement influencés
SVSTAUKH UK.*
IIKUUIKI/M INnSiUKUKKS I 2ïi
<ni:|lh'K4

par ces mythes, qu'il e,st parfois difficile de les en dilléreu-


cier. Ainsi, l'uu des coutes du coyote (n«70), de ses relations
avec le blaireau, est composé de chants, de toute une série
de drames et explique au moins la « médecine-coyote » contre
les fourmis. Il en est très peu qui soient écologiques; ils ont
alors la forme d'un drame chanté (n° 83). Presque tous se
passent entre êtres anthropomorphiques qui ont leurs kivas,
leurs dauses, de telle sorte que ce sont, au moins en puis-
sance. des mythes de Katcinas (p. 219, 220), et même de cou-
f rériesou de clans (p. 228;.
Reste ce qu'on pourrait appeler la mythologie nationale.
Ici, les travaux de M.Voth rejoignent ceux de Mrs. Stevenson.
Sur ce point, en effet, les mythologies de Zuiii et des Hopi se
superposent assez aisément, comme les cultes celle de Zuîii
parait seulement mieux ordonnée et plus grandiose, cette des
Hopi plus disjointe, plus incertaine et aussi moins poétique.
Ainsi. sur le mythe cosmogonique des Zuîli, les documents de
Mrs. Stevenson s'accordent au fond avec ceux de Cushing; au
contraire, les deuxversions hopi du mythe d'origine fn°"1 et i)
que M. Voth a entendues à Oraibi et à Shupaulovi sont, eu
partie, contradictoires à Oraibi, il y a deux déesses créa-
trices, à l'Est et à l'Ouest à Shupaulovi, il n'y en a qu'une.
Tandis que, dans une sorte d'épopée, d'une véritable valeur
littéraire, nous voyons les Ashiwi, lesZufii primitifs, monter
de monde en monde jusqu'à celui d'en des%us, chercher eu-
suite avec anxiété le « milieu », la place solide autour de
laquelle tout tremble, l'ascension des Hopi à la surface de la
terre, sous la direction des deux dieux de la Guerre et de la
Femme-Araignée (identique elle-môme à la terre), est racon-
tée avec une certaine platitude et avec une sorte d'hésitation,
de confusion d'autant plus sensible que le nombre des thèmes
mythologiquesest plus nombreux(mythe d'Oraibi, Voth n" 4,
de Shupaulovi, n° 3).
Outre une mythologie des grands corps de la nature, air,
terre, monde souterrain, ciel, soleil, etc., mais où l'eau et le
soleil jouent le rôle fondamental, nous avons, à Tusayan
comme à Zufii, une mythologiedes cultes agraires, particuliè-
rement du culte du maïs avec laquelle la mythologie naturiste
a d'ailleurs, des relations naturelles. C'est l'histoire del'arrivée
desdemoiselles-maïs.deleurs fuites, dela manière dontellesout
été fréquemment reconquises (Zufti,p. 30et suiv.: Hopi, p. 104
etsuiv.i. Mais ce mythe est moins 'développé chez les Hopi
<2C L'A.N.NÉBSOClUUJillgl'E. f90G-t»U9

que chez lesZuiU, taudis qu'au contraire l'histoire de lu lutte


des dieux-héros de la guerre contre le monstre
aquatique,
détenteur des eaux, est plus claire chez les premiers que dira
les seconds. Demôme, lu divinité du (eu, Musnuuwu, « sque-
lette », sembleôtre iudigèue chez les Hopi Il n'y a qu'un mythe
Zufti dont nous ne trouvions vraiment aucun équivalent dans
le recueil de M.\'oth c'est celui de la lutte contre les
esprits
malfaisants qui avaient capture les dix grands dieux auces-
traux et que lesZufii vainquirent, grâce siJ'aide des deux petits
dieux de la guerre Cp.36 et suiv. Nous ne le comprenons.
d'ailleurs, guère; nous entrevoyonsseulementqu'il a des rap-
ports avec la mythologie du maïs
Mais un fait qui prime tous les précédents en importance
est celui que Mrs. Stevenson croit avoir découvert lesZuiïi
auraient une notion générale de la divinité. Ils concevraient
une espèce de substance universelle, un souffle, un esprit,
plus ou moins confondu avec l'atmosphère (p. ii, 25i. Cette
divinité androgyne, ce Pau spirituel porterait le nomd'Àwona-
wilona. D'elleseraient sortis la Terre-mère et le Soleil-père.
Mrs. Stevenson la fait fréquemment intervenir. Chaque fois
que le rituel prescrit une inhalation, une exhalation, une
prière (p. 301, 310;, elle l'interprète, probablement à la suite
de ses informateurs indigènes, comme une invocation à Awo.
nawilona, une communion avec Awonawilona. A vrai dire,
l'idée d'une divinité neutre androgyne nous parait bien étran-
gère à ces mythologies, et nous sommes surpris que, dans les
formules qu'on nous dit adressées à Awonawilona, son nom
ne soit pas meutionné 'p. 88, MOi. Il est pourtant possible
que des prêtres plus intelligents soient, d'eux-mêmes, arri-
vés à cette conception
Mais voici la grande lacune de ces travaux. On sait com-
ment Cushingdécouvrit chezles Zufiiun curieux système intel-
lectuel qu'il appelait mytho-sociologique(voir. Annéexoctol.
VI, p. 40 et suiv. A cette manière de penser, il reliait tout ce

1. I,atu'comli'glu feua Zuîii»vrattache, d'ailleurs,olle-méiue.


aucullodu dieuImpil'osliyalmnki. et à lu confrériedu «rfriienomdiez
lesilopi [Zulii,p. UU7<:tsuiv.).
i. Lumytheestdramatisédeuxfuisdanslurituel(|j.U8i*1il'i.
3. Lumut«iro«oslgniliutuulu(p. 88j.Nuserait-ilpuspossible de rap-
prochi.-rAwonuwiluna de- cvtt<-
ruule'lui<'st,u n(,'ùniiral, purla
synitiolisi'-u
liRm'droite«jm- lespn'-ln-straientà l'autel,dantsleursmurclins, ainsiqui-
sur lesitiasquiis
c[lesfaci'Sd««gens c'asllu rouledu saluil,lu voii;droite
la loideshumilies, ci-lli-<Wsnidin-.Il enest1ressouventpurlé.
SYSTÈMESR8MGIEUXpES SOCIÉTÉSI.N'FKHIRL'IlKi {'11

qui concernait et les rangs du peuple, et l'architecture et les


procédés du tissage, de In poterie, de lu décoration tManual
Concept»,in AinericanAnthropnloijiHt, 189(5 TheUroirthofl'ot-
tery, in Mil"1 Hep.Bar. Ethn.). Il signalait des liens entre la
nomenclature familiale, la division des clans, les notions de
l'espace et du temps, les totems et les causes, puisque c'était
le perroquet macaw qui amenait Tété, et le corbeau l'hiver
(cf. Powell, prêt, à Gushiug, XuTiiFolk-TaiesU.Il y avait ià un
ensemble de faits dont ladécouverte constituait une date dans
l'histoire de la sociologie.Or, cette question capitale est omise
non pas seulement par M. Votli, ce qui, à la rigueur, pour-
rait se comprendre, maisencore par Mrs. Stevensonqui, pour-
tant, entend nous donner un tableau d'ensemble de la civili-
sation Zufii. Elle se borneà dire que « le rôle que joue l'orga-
nisation des clans à l'aurore de la vie rituelle des Zufii reste
encore à déterminer » (p. 008). Quand on remarque qu'elle
évite systématiqueinentde prononcerlenomde Cushing,même
aux endroits où elle le critique (p. 17, 26, 33, Cushing est con-
fondu avec nometcrilen), on se prend à se demander si elle
n'a pas tu le problème parce qu'il l'a traité. Maisalors elle eut
dû, à tout témoins, ne pas nier, pour ainsi dire, le fait dans
une courte phrase incidente (p. 608) où elle déclare que « pour
un long espace de temps, le recrutement des confréries a été
indépendant des pareutèies de clans ». Négationd'autant plus
extraordinaire qu'elle est presque aussitôt contredite par cette
restriction énigmatique « Cependant, dans certains cas, la
succession aux fonctions dans les confréries dépend des
clans ». Par un tel silenceet un tel langage, on semblait révo-
quer en doute l'authenticité des documents que nous devons
à Cushing.
Certes, nous convenonsque Cushing a pu mettre quelque
chose de lui et surtout de son style dans les mythes et les
contes qu'il rapportait d'une façon un peu dramatique et
artistique. Il n'est pas douteux qu'il a été parfois imprudent,
et il nous serait facile d'indiquer quelques erreurs qu'il a
commises mais elles portent sur des détails. Il se trouve
même que la rectificatiou d'une de ces erreurs, rectification
que nous devons à Mrs. Stevenson, a pour effetde confirmer
nu des faits les plus importants sur lesquels il ait attire
l'attention.
1.OnIrouvuru clan*celteiiréfacuw très heureusecsi|uisscJusMOus
c|ueM.ilewiltdevaitdévelopper plustunlsur l'oreiuluini.|iiuis.
138 L'ANNÉESOClOlOGÏOUg.«00-1 «

Parmiles dix-neufclansdont, suivantlui, est composéelu


sociétéZufli, il eu est uu, le dix-neuvième,qui occupeune
situationsingulière.D'unepart, il étaitdit qu'il est forméde
représentantsde tous les clans et pourtant,ou mômetemps,
Cushinglui attribuaitcommenomet commetotem le perro-
quet macawqui, d'après un mythe,aurait été Je nom et le
totemd'uneseuledesdeuxphratriesprimitives,laphratrie du
sud (voirAnnée Soeiol.,VI,p. 43-U).Il y avaitcontradictionà
ce qu'un clan, qui représentaitla tribu tout entière, ait été
dénomméd'après uneseuledesdeuxfractionsde cettetribu.
Le fait était embarrassantet avait embarrasséCushinglui-
même.Or, MrsStevensonconfirmequ'il existebien, à ZuAi,
un clan du milieu qui est hors rang, mais elle nous apprend
en mêmetempsqu'il n'a pas pour titre le perroquetmacaw
son totemest l'arbre à chien (cornusstolonifeni).Mais, de
plus,il comprenddeux sections l'une a pour nomle corbeau
kdkd-kwe, qui, d'aprèslemômemythe, parait bien avoirété
le totem de l'anciennephratriedu nordet de l'hiver l'autre
s'appellele perroquetmacaw,commela phratriedu sudet de
l'été. Les noms mêmesque portele clan du milieu démon-
trent doncque, commel'avaitdit Cushing,il est commeun
diminutif,une miniaturede latributoutentière. N'ayantpas
aperçuque ce clan centralétait composéde deux divisions,
il a donnéau tout le nomqui n'appartenaitqu'à une de ses
parties en quoi il s'est trompé. Maiscette erreur une fois
dissipée,loind'ébranlersa thèsefondamentalesur la hiérar-
chiedesclans, nousendonneunepreuvenouvelleetinespérée
et, par cela même, vérifiela valeur des documentsdont il
s'estservi.
Lerituelet l'organisation religieuse. Onne peut ni résu-
mer un ouvrage exclusivementdescriptif,comme celui de
Mrs.Stevenson,ni rendre compted'unrituel et d'une orgaui-
sation religieusequi atteignentun tel degré de complexité.
Nousne pouvonsqu'indiquerlesprincipesles plus essentiels
Mrs.Stevensona certainementbeaucoupobservéet ellerap-
porte avec précisionbeaucoupde ses observations.Un des
points qu'elle a le plus heureusementmis en relief, c'est
l'existence,chez les Zuîii, d'une véritabledogmatiquedu
rituel.Ainsiil est certainqu'ilspossèdenttouteune doctrine
du sacrifice,en particulierdu sacrificedu daim, et de la ma-
nière dont les gibiers fontaux Zufiil'abandonde leur chair
(p. 441,n. a. et p. 13) unedoctrinede l'efficacitéde la bonue
ViMÙIKS IUSUiIIKL'X DES MiUKTËi INCKHIKt'HK.'i 129

,1 1
intention, do la pensée non formulée (lui ne se traduit pus
seulementdans le mythe actuel, mais dans le rituel lui-même
(p. Gli.j.La plus grande importance est attribuée ta pureté
du cœur, à la vérité ;p. I", M, 141, 7» n. f. Il y a également
toute une théorie sur les rapports des rites avec les semences,
les pluies, lit médecine,les souilles.
Ce qui manque le plus à ce livre, ce n'est ni lit fidélité dela
description, ni lu pénétration des détails c'est plutôt l'art de
maîtriser le sujet, d'apercevoir l'ensemble du rituel, les rap.
ports de,s cérémonieset des diverses organisations les unes
avec les autres c'est, eu un mot, l'eflort pour comprendre.
Nous ne saurions, pour cela, nous substituer à l'auteur. Nous
nous boruerous à marquer lit place de quelques-unes des
choses les plus essentielles.
L'organisation religieuse est capitale chez les Zuiii, comme
dans toutes les sociétés uord-utnéricalues. Klle coïncide avec
l'organisation politique elle-même le corps des grands prêtres
est, en même temps, le principal organe de gouvernement
(p. iHUel n. Ij.j. Toutl'essentiel de la vie religieuse du Zuni
consiste à s'acquitter de sa fonction, à jouer son rôle. Cemot
de rôle doit être entendu dans soit sens étroit et spécial car
le caractère dramatiquede tout le rituel est des plus pronon-
cés. Les rites oraux sont des séries de dialogues dont il faut
connaître demandes et réponses les rites manuels, des séries
de danses, de courses, de circuits, de mimesdont il faut cou-
naître l'agencement et la mise eu scène. Il y a des directeurs.
des spectateurs, pour empêcher les fautes des hérauts pour
informer les groupes certains préparatifs reviennent aux
femmes et aux enfants. Une activité religieuse incessante
implique une extrêmedivision du travail. Comment ces rôles
sont-ils donc assignés? Pour Mrs. Stevenson,ce serait l'œuvre
de ce qu'elle appelle des « confréries ésotériques » ip. IXi.
Klle ne les appelle pas des sociétés secrètes, – ce qui est un
progrès – mais elle les conçoit à peu près sur le modèle de
ces dernières. Voyousce qu'il faut peuser des principales de
ces confréries.
La plus importante est celle qu'elle appelle la confrérie
mythologique ip. 'il M),celle des dieux, le Kotikili Ko est un
préfixe qui siguilic divin .tikili veut dire corps de gens d'un
marne groupe). En réalité, c'est la société des hommes de
'win. Tout mâle y est obligatoirementintroduit nninl l'âge de
quatre ans, la cérémonie se répétant de quatre eu quatre
të. IliliKiiKW.
– Amitr-uriul..1!IGIM!IU!I. il
430 l'a.NSEKSOCIOMJUJOKB.
lUUO-lUWI

années. Cette initiation est fuite à la fois pur les grands dieux,
par les génies de l'eufaut, et par un grand serpent à plumes,
le kolootvhi, espèce de grande tarasque que l'ou promène et
qui insuffle une aine à l'enfaut. A de certains moments, ou
emploie le boumerauget l'ou fait souner des « diables u. Par
là, cette initiation se rapproche de celles qui sont eu usage
en Australie, en même temps que, par le nombre de person-
nages, la grandeur des mystères, elle rejoint les plus grandes
des cérémonies de ce genre qu'aient pratiquées les peuples
antiques. Cetteinitiation parait conférer au jeune garçon deux
sortes de droits. Désormaisil peut prendre place à l'intérieur
des six Kitvilsine des Kira de Cushing et des auteurs, les
estufas des auteurs espagnols qui les confondaient avec les
maisons à bains de vapeur des autres Indiens; ce soûl les
temples souterrains des six régions, des six clans fondamen-
taux, pensons-nous, Par cela môme, il a, suivant son grade,
sou rang de uaissauce dans sou clan, le droit de figurer tel ou
tel dieu avec lequel il se confond 1. En second lieu, il lui est
permis dès lors de s'iiiitier à l'une des confréries, ou de deve-
uir uu des prêtres de Zufù.
Les confréries proprement dites sont de deux sortes qui;
Mrs. Stevenson a confondues à tort. 11yaa lieu, en eflet, de
distinguer entre les quatre coufréries primitives qui. au moiii*
« théoriquement », se recrutent dans les clans, et celles où
l'on entre volonlairemeut, à la suite d'une initiation qui res-
sortit plutôt au shamanisme, à la magie, à la « médecine »
qu'au rituel public. Ce qui peut expliquer la confusion de
Mrs. Stevenson, c'est uueespèce de chasse-croisé qui s'est pro-
duit. D'une part, certaines grandes confréries primitives se
sont érigées en « ordres de médecine ». Elles n'ont pas voulu
perdre le bénéfice d'une profession lucrative et du principe
qui prescrit aux malades guéris de se faire adopter daus la
confrérie dout ils ont reçu les soins, elles sont ainsi descen-
dues au rang des autres. D'un autre côté, les autres ont.1.
presque toutes, sauf les plus récentes, sauf aussi leurs ordres
inférieurs, réussi à faire leur chemin dans l'estime religieuse
des Zuùi elles se sont introduites dans le culte public, son
vent parce qu'elles importaient un culte qui jouissait ailleurs
d'un grand prestige(voirp. 549, 511;. lieu est, enfin, qui son'

1. Cesgrippesdodicut sont,pour la plupart,MonlI(|Uuf>aux knleimi


des Hopi,commelu disaientCostiinget Pewkes:maisces auteurs k-
avaientconfondusà lorUvwriu phratriedu corbeauip. iil, n. 1M.
SVSïèURS HBI.MIKl,1*DB< SOOIÉÏÉS INFlilIlKL'lIKi 131

arrivées à faire coufoudre leurs pratiques avec celles des cou-


fréries primitives, sans que, d'ailleurs, ces dernières aient
résisté. 11y avait donc de grandes dillleultés à distinguer les
unes des autres ces différentes organisations. Mais la distinc-
tion n'est pas douteuse. Le mythe la fait nettement. Auxcon-
frôries primitives qui furent instituées par les dieux de la
guerre en même temps que les totems, les cluus, le culte des
régions, il oppose celles qui ne sont pas d'origine diviue, qui
ne furent établies que par Poshaiyanki, le héros civilisateur,
introducteur des cultes; des confréries et des danses nou-
velles d'origine étrangère (p. 400 et suiv.). Les premières sont
étroitement eu rapports avec les quatre clans primitifs, cou-
formément à la thèse de Cushiug' c'est ce que les docu-
ments mêmes de Mrs. Stevenson permettent d'établir. Ainsi,
l'une de ces confréries a précisément le nom d'uu des clans oit
Cushiug dit qu'elle se recrutait la confrérie des chasseurs
porte le titre de coyote ip. 400. 438;. Celle du bois a bien le
recrutement que lui assignait Cushing et possède effective-
mentles pouvoirs qu'il lui attribuait sur l'hiver, les pluies
froides, la conservation des semences, eu môme temps qu'elle
i'st chargée de veiller sur les fétiches du nord (p. 444, 381.
L'identification entre ces confréries et ces clans est même
toile que les clans actuels sont présentés comme le produit
d'une segmentation des confréries (p. 40, ùSij. Nous serions
souvent embarasséde dire si, dans les rituels solennels, c'est
comme membresdu clan ou comme représentants de telle ou
l>dle confrérie que les individus apparaissent et jouent leur
rùle.
peut, d'ailleurs, entrevoir les raisons qui ont empêché
Ou
Mrs. Stevensond'apercevoir les relations étroites des confré-
ries et des clans. 11existe un groupe, un collège de prêtres,
i[iie notre auteur a, d'uilleurs, eu le tort de prendre pour une
confrérie ce sont les Asliiwauni, les six grands prêtres des
six régions, propriétaires héréditaires des fétiches de la pluie
et des semences avec leurs acolytes. Ils se recrutent bieu
pur région, et par conséquent par groupe de clans, puisque
chacune de six régions correspond il un groupe de trois clans.
Seulement leur fonction se transmet en ligue masculine, de
pure en fils, alors que le clau Zufii est à descendance utérine

1. MaisCusInïiH n i'iiluturldVleiiilii- toutes li's i-unl'rOrii.'s


suIhforft in.
<li>liiirli'iui>ti(CréationSIylits,\i. :!Tu.3S7-3Sti).
iZuiii
lïï I-'AXXKK .sOilIOLUOIQfK. HIU«-19U'J

il. 1 1 1
le père u'étuut pus, pur suite, du clan de sou fils, cette fonc-
tion sacerdotale passe, suivant le hasard des naissances, d'un
cIhuà l'autre, cequi parait justifier tes négationsde Mrs.Ste-
vensou. Maisautre chose est ce collègede prêtres, autre chose
une confrérie. Si les prêtrises, eu effet, ne sont pas attachées
à des claus déterminés, il en va autrement des objets sacrés,
des fétiches ils resteut toujours dans lu maison de la mère
et, par conséquent, ils ne changent pas de clans. Et comme
c'est le cas pour les quatre fétiches principaux de Zuùi, même
les grands prêtres se recrutent en dernière aualyse, en ligue
utérine, et par claus. D'autres perturbations du même genre
ont lieu dans les confréries proprement dites et ont pu con-
tribuer à entretenir Mrs. Stevenson dans son erreur. Si ou
est du clan de sa mère, on n'est pas étranger au clan de sou
père on est dit, l'expression mérite d'être remarquée, « fils »
de ce dernier clan. On entend désigner par là une sorte de
filiation et de parenté inférieure. Or, ce titre donne droit à
certains grades dans le clan paternel ces grades, eux aussi.
sont donc répartis indépendamment des clans puisque le
principe suivant lequel ils se transmettent n'est pas celui
suivant lequel les clans se recrutent. Mais ce sont là des com-
plications secondaires qui n'empêchent pas la règle fonda-
mentale d'être bien cellequ'a vue Cushing
Lerituel est un système combiné d'actions auxquelles par-
ticipent les clans, les confréries, les corps des prêtres. Nous
nous bornerons à en marquer le caractère général. Déjà nous
avons signalé dans un volume qui fait partie des Trnrmu-<h-
l'Anne?Sociologique(Hubertet Mauss, .WltiHgexd'histoire reli-
gieuse,p. xxui] l'intérêt qui s'attache à quelques-uns des rite-:
sacrificiels, qu'ils soient ou non toté.miques. Mais l'élément
central de ce rituel est ailleurs. Il consiste dans une série <l>;
représentations dramatiques où sont figurées la marche des
dieux, leur arrivée à Zuni, celle du soleil qui vient faire !'
feu du nouvel an, le solstice d'hiver, la distribution, par de<
personnagesdivers, dessemetrcesetcles uuurritures.Cesont<t)".
mascarades, des rites sympathiques fort simples, des cons-
tructions d'autels symbolismes et à fétiches compliqués, de
I. Vnnautrecuilsi;di'IVrrvur(Minimise parMrs.Stcvi'iisuii, rVnlquVIi.
u pris [jourili* c'OnMries <tcuvunlrui militaiivs.les «ai'lus,ko»liit>r<
(iiic\iu:tr;iiR'nl
««aigries ù deuxxrou|i<-s
par Oislilnjr, i!i-cluiis,XuHi'.Yi-.i-t
Hun.Vyllts, p. S71ie t li; île
item lu l'nufrérlvde l'un1.l*s premiers>••
ceuxi|ui ontlu>-un ennemi,mais«unsra|i|iofli:rl«si'iilp:Iijssecond» -i.
ut'iit<|uil'uniru|i|)Ortir.
SÏSTftSB* RBMOIlil'X »K<t SOCIÉTÉS INPKHIEORBS 133

véritables œuvres d'art de peinture, de sculpture et de poterie.


Cesont des peleriuages à des autels éloignés où résident les
dieux de lu guerre ou les dieux du grain, au lac des morts
faiseurs de pluie; ce sont des courses et des jeux de hasard.
Cequi en fait le fond, c'est un culte qui s'adresse à la fois aux
dieux de la nature, aux puissances de lu végétation,aux morts
et aux totems des clans où l'on a tenté l'impossible pour tout
d'été (p. U><>
garder et tout confondre. Ainsi la fête du solstice
et suiv.) comporte d'abord des offrandes individuelles de
tout Zufii elles consistent en plumes-prières d'un type fort
se retire
répandu. Puis, tandis que le grand prêtre du Zenith
de la pluie,
pour méditer sur les autels symboliques du soleil,
des farines, les autres représentants des dieux vont visiter le
lacdes dieux, Kothluwaluwa, où habitent les dieux ancêtres,
maîtresdes eaux d'en dessous; ilsy fout des ofïrandes au nom
de tout Zufti, leur adressent des prières à eux et aux tortues
i[ui les incaruent et qu'on sacrificie. Sur uue colline voisine,
on allume un feu par friction, puis on revient tandis que l'un
des dieux met le feu au gazon et garde ses brandons allumés
feuet des
jusqu'au retour à Zufii. Suit une série de danses du
dieux, le tout mèlè à un culte des tortues, sorte de totem
funéraire de tout Zufli.
On voit le mélange remarquable de thèmes rituels, où les
dans et les confréries sont étroitemeut associés. Rites1d'un
rites raffinés,
symbolisme direct, rites directement efficaces,
àla
prières et incantations, se retrouvent côte à côte. On est
fuis tout près de l'intichiuma australien, et du rituel le
mieux agencé des grandes religions antiques. M. M.

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et î. Chicago VM, Vill-wSp., in*. XII, 55-1*8,p. în-8".

Cet ensemble de recherches sur les organisations sociales


et religieuses et sur les grands cultes solaires des Indiens des
Prairies ont été poursuivies de concert par les différentes
134 I-'aNN'ÉK SMCIOLUUIgUK. l'JÛClWJ

institutions ethnographiques américaines. Rites sont pré-


cieuses à plus d'uu titre. D'abord par le tableau exact et
détaillé d'une organisation politico-religieuse de ces grandes
tribus, ou plutôt d'une fraction de ces grandes tribus. On y
remarquera les arrangements et rénrrangemeuts successifs de
la tribu, surtout chez les Cheyeuues, en bandes, groupes
locaux, clans, confréries et ordres militaires. Enfin ou verra
toute cette tribu en mouvement daus le grand culte tribal.
La « danse du soleil », de date relativement récente, a en effet
remplacé la dause de l'esprit, dont Moone.vdécrivit si bien
la rapide extension chez tous les Indiens des Prairies. Elle a,
commecelle-ci,une sorte de teinte philosophique, symbolique,
fort remarquable (cf. I)orsey, p. 57). Celle des Arapalio du
Sud a été décrite antérieurement, (cf. Année Soc, VI, p. 560/
celles des Arapaho du Nord a été en partie observée par
M. Kroeber (p. 298, sq.) celle des Cheyeuues est décrite avec
soin par M. Dorsey. On y verra en particulier une descrip-
tion fort exacte des extraordinaires tortures infligées(p. 178,
sq.), des rites de sortie bien nets (p. 163, I6ai. etc.
Le travail de M. Kroeber porte aussi sur les autres cultes
Arapaho (p. 319, sq.) il sera très utile pour une théorie du
matériel, des objets du culte. JI contient une description fort
détaillée, non seulement de l'objet mais aussi de son symbo-
lisme (cf. p. 411, sq.) et des valeurs qui lui sont attachées. On
remarquera combien l'auteur eut raison de classer la plupart
des jeux parmi les faits religieux et une excellente descrip-
tion des procédés, de l'initiation, de la révélation, de l'arsenal
magique de l'homme-médecine p. 418, sq.,j. M. M.

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DELAKOSSK iMaubicki.– Le peuple Siénà ou Sénoufo.
Hi'euftin Miule* Muayntphitiue*i-tSoeiul., 1008, 19(Ji).
Nous réunissons dans cette étude, plusieurs livres qui se
rapportent à des sociétés, très éloignées les unes des autres.
de l'Afrique occidentale. Elles ressortisseut toutes à des
groupes de peuples a peau franchement noire, cheveux cré-
pus, membres allongés, qui, seuls, méritent le nom de nègres
proprement dits. Knlre elles, il n'y a pas seulement unité de
race, mais de civilisation; leurs langues sont de la même
fiimille.(V. Westermann. Klre Urnmmnlik, p. 4>. Toutes sont
encoreassez proches du totémisme pour en avoir conservé des
traces importantes; mais, eu même temps, elles en sout déjf'i
assez loin pour être arrivées il former les grandes nations
monarchiques d'Aclianli, de Dahomey, les grandes tribus
SYSTÈMESIIRMUIKI'XUKS SllCIÈTlUIXFftlIKCiUS 137

commerciales et diplomatiques, Mandingues, Hnoussa, etc.,


des villes, des agglomérations considérablescomme Yoruba,
Ueniu, Abeokuta, Kayes, etc. Kutre leurs institutions reli-
gieuses, morales, juridiques, entre leurs techniques même,
il y a uu air de parenté qui rend les comparaisons particuliè-
rement instructives.
De tous ces travaux, le plus important nu point de vue
sociologique est aussi un modèle de science descriptive et
d'exactitude philologique c'est le livre de M. Spieth sur les
Ewhé du Togoallemand. Onsait que les Ewhé sont un grand
groupe de populations qui comprend la plupart de» tribus du
Togo et toute la nation Dahomey. Les observations de
M. Spieth portent plutôt sur la tribu des Ho, voisins immé-
diats de lit mission de Misahiihe où des générations de mis-
sionnaires allemands, dont quelques-unsétaient des linguistes
et des ethnographes distingues, ont rassemblé,avec la collabo-
ration de nègres intelligents, de précieusesarchives. La gram-
maire et le dictionnaire de M. Westermann, la grande
enquête de M. Spieth sont la synthèse de toutes ces recherches
accumulées. La publication en Ewhe de la plupart des docu.
ments importants, en face de la traduction allemande, donne
îiii travail une incomparable solidité, en même temps qu'elle
permet le contrôle des résultats et des interprétations qui
nous sont proposés.
Les travaux de M.Desplagnesportent sur les Habbé du pla-
leau de la boucle du Niger. Bien qu'embrouillés d'hypothèses
sur les origines de la civilisation Habé,ils lie sont pas sans
valeur descriptive. Quant au major Léonard, il a observé les
Iho et autres tribus du Has-Nigeranglais à l'extrômeorient
du delta. Bien que. connue nous le verrons, ses observation»
aient été inllueucées par des idées préconçues, il a fait un
louable eflort pour trouver, comme avait lait déjà Denuett
pour Bénin et les Bantu, ce qu'il y a a derrière la tète du
noir.
C'est au livre de M. Spieth que nous allons nous attacher.
•S'ilno nous révèle pas des faits aussi neufs que les récentes
expéditions australiennes, il n'en constitue pas moius une
*(irte d'événement sociologique il va servir à nous montrer
le chemin qu'a pris la pensée religieuse eu évoluant, en
môme temps que l'importance de certaines nations et de cer-
tains types d'action.
Lu nation ileihô. Parmi ces notions, nous remarquerons
138 L'ANSÈg SOCIOt-Onmt'R. lOOD-IDW

avant tout celle qui domine la magie c'est celle de dzù Ce


mot veut dire force magique, plus exactement feu et magie.
Un curieux chant eu l'honneur du plus grand des dieux,
oppose le dzc'«aux Irii, aux cultes des dieux, plus spéciale-
ment des dieux terrestres. Il est certain, en effet, que, comnu*
les Nigritiens, les Ewhéont fait un effort considérable pour
bien séparer leur religion de leur magie. Ils opposent même
l'une et l'autre et vont jusqu'à définir la magie par souopposi-
tion à la religion.
La notion de dz<'> semble donc bien être identiques celle de
mana; seulement ce serait un maua purement magique. Les
puissances proprement religieuses seraient d'une autre
nature. Mais, malgré la manière systématique dont les Ewhé
ont essayé d'organiser leurs idées, il est possible de montrer
que, eu réalité, cette notion n'est pas si étroitement circons-
crite'à la magie, qu'elle s'élend au domaine de la religion.
Tout d'abord, il y a des informateurs indigènes qui avouentt
qu'elle n'a pas la précision que d'autres lui attribuent. « Le
sens dumotdzn, écrivit-on d'Abutia 'p. îlOii, n'est pasdu tout
clair». Ailleurs, chez les Kpenoe et les Tuwiewe, on dit for-
mellement que chaque dieu, que chaque prêtre a son dzô
et qu'il faut passer par la magie pour arriver à la religion
(p. 680, 723j. Il y a même quelques dieux, quelques trô, qui
sont expressément des dzA, des magies. C'est le cas notam-
ment de certains dfilii, des dieux venus de l'étranger (v., p.
444,les renseignements généraux cf. Matse, p. 804,800,etc.)
Les tiôde» sociétés étrangères et les troxi, leurs prêtres, sout
pour elles des puissances religieuses et amies; ce sont, pour
les gensdu lieu, des forces magiques et hostiles. Est magique.
tlzôce qui n'est ni nimnt ni trâ; est religieux ce qui n'est pas
magique.
Maisil y a surtout lin cùlé par où le dzo rentre dans la reli-
gion, c'est le côté juridique, l'institution de l'ordalie. Un des
plus grands dieux des Ho,Dzoha, dieu du roi et de la capitale.
n'est autre chose qu'un dieu du vin de palme, de la propriété
et des contrats; il a pour fonction de sanctionner leur action
magique, le dsothidu ly. Westermann, Etre Veut. Worter., fi.

I. Oxyton,i|Q°iltoutbiendistinguerde (ho, bary(oncl qui vuutrlii


paraître.Cnderniermol 'Titrantdansci-luidodioght.nomdonnéd uni-
dosformesilr>l'iiiiie,pourraitjm'terà An confusionsliicheusi's
«t « ili-,
interprétationserrnnnées. l.i-itons.danscm laii|!<l<">,
uniuneimportant'
sOBi'cnl
ègaiiià ci'lleilesli.'tlrrs.
XÏSTÈUKSHKUISIKUXWi nOCIÉTÊsIKFfllUKL'KKS 13»

v. p. 89 et 84, n° M).Or. si la magie noire est sûrement extra-


religieuse, si la position de lu magie blanche est incertaine,
ce qu'on appelle assez improprement la magie judiciaire, en
particulier celle des épreuves juridiques et des charmes des
contrats, ressortit à la religion, Ausurplus, même dans l'em-
pire de leur magie, de leurs ckô, les religions Ewhe ne gar-
dent pas toujours leur belledivision théorique. Non seulement
les candidats aux fonctionsde prôtre-slnnnaiie sont obligatoi-
rement des risoiluamtlo, mais ceux-ci jouent un rôle considé-
rable dans les cérémonies publiques. Lors des fêles de l'ex-
pulsion du mal dont nous parleronsplus loin, on voit, avec les
prêtres, apparaître lestholoico(p. 304-308j.Un grand nombre
de dieux, de trô, portent le titre de dzoihne. Il s'agit proba-
blement d'un double aspect des dieux; mais le fait qu'ils puis-
sent avoir une seconde face montre bien que la notion de dz6
déborde la magie et, par conséquent, que la ressemblance
avec la notion de niaiia est encore plus complètequ'il pouvait
sembler au premier abord.
Lu notion d'âme. – La seconde notion sur laquelle nous
voulons attirer l'attention est la notion d'âme, telle qu'on la
trouve chez les Ewheet les Nègres du Bas-Nigerqu'a observés
M. Léonard. Ce qu'elle a d'intéressant, c'est la façon dont le
langage et la mythologie se sont ingéniés à trancher par de
multiples concepts les contradictions intellectuelles et senti-
mentales des rites et des idées qui se rapportent à l'âme, îl
résulte que la notion abstraite d'âme se résout eu uue multi-
plicité désordonnée d'idées concrètes,mais qui, par la manière
dont elles se recouvrent les unes les autres trahissent leur
parenté et leur unité fondamentales.
Ces différentes âmes se répartissent en deux groupes fou-
damentaux
Il y a d'abord celles qui tiennent plus ou moins étroitement
iiu corps même de l'homme c'est l'ombre, l'image, le luico.
Mais il y a deux sortes de luivnou d'ombre. L'une, grande,, ne
quitte pas le corps: c'est l'ombre du jour; l'autre, plus petite,
i;st susceptible tJe s'éloigner et elle est éternelle (p. 810. On
peut ranger daus la même catégorie la forme que prend l'âme
la mort; elle porte le nom de noli. C'est au tïoli que s'adres-
sent les rites funéraires. Il se confond très souvent avec le
grand luwo.
Il y a, en second lieu, des âmes qui sont tout à fait indé-
pendantes du corps des êtres qui sont li côté de lui et qui
140 l'année sociitumitH'K. luue-lW»

jouent plutôt le rùle des génies protecteurs; ce sunt les nu-


nutvo rad. nu, être à côté de;. II eu est de deux sortes lu
distinction est indiquée pur M. Spieth lui-même ip. 68'J.
Les uns restent daus l'au-delà; ils représenteut l'essence
éternelle et perpétuellement réincarnée en même temps que
le sort qui t'attend dans la vie. L'au-delà, qui porte le même
nom que la ville originaire des Ho.celle d'où ils sont sortis,
à la tête des natious, c'est Amethowe(Ami'signifie homme et
rfîfl,apparaître), C'est l'endroit où, après les rites funéraires
retournent certains des nunuwo qui assisteut l'âme sur cette
terre. C'est là que s'en va le nuli. II n'y pas moins de trois
génies qui atteudeut l'homme dans l'au-delà, qui veillent sur
lui on le tourmentent taudis qu'il vit sur terre. Il y a d'abord
la mère spirituelle, nolimeno, celle qui vousaccouche comme
itoli, en tant que mort destiné à revenir sur terre. Car le uoli
ne se réincarne qu'après une nouvelle gestation. Toutefois,
c'est une personnalité assez secondaire. Nous ue voyons
même dans le travail de M. Spieth qu'uu sent texte, et dubi-
tatif, qui dise qu'il y en a une pur individu. Si l'on remarque
que la nolimeno est censée tuer très souvent dans l'eufance
l'être même qu'elle a mystiquemeut accouché, on se prend à
se demander si cene serait pas une hypostase mauvaise, dans
l'au-delà, soit de la terre mère, soit des pouvoirs féminins
générateurs du ciel, hypostase destinée à expliquer le phé-
nomène si angoissant pour le Nigritien, de la mortalité
infantile. En second lieu, quand l'esprit qui va se réincar-
ner quitte Amedzowe, il fait à ses compaguons la promesse,
ubetsi,de reveuir a telle ou telle date après avoir fait ceci ou
cela. Son sort se trouve par cela même fixé. Le gbthi reste
dans l'au-delà. C'est la promesse cristallisée, substautiflée, et
veillant à sa propre réalisation. C'est lui qui termine la vie
quand le moment marquées! venu. C'est donc le sort person-
uilié de l'individu; seulement, c'est unsort que ce dernier Il
déterminé lui-même par un contrat qui, une fois formé,le lie.
Enfin, il y a un troisième génie qui veille jalousement sur
l'individu c'est celui de ta femme dont il fût l'époux dans
une existence antérieure. Car, commechez les Eskimo, lesindi-
vidus, ainsi que les génies correspondants, vont par couples,
éternellement lixés. Il y a pour chaque homme une femme
dans l'au-delà; pour chaque femme, il y a un homme et
chacun doit à son conjoint mystique un culte curieux.
Parallèlement ces génies de l'au-delà, il y ceux qui, sur
SÏSTKUK?! BKI.IOIKt'X 1)K< <O«IÉTl!s ISKéHIKl'HBS Ul

terre, entourai!, du dehors. l'homme. C'est Yaklama, !'m/wet


Imlzaylit.L'iikliunasemblele plus important. Il est éternel. 11
préexiste à l'homme, Il est le fils cadet du dieu du jour do
naissance. Il est la cause de lu • nature », de lu (açoii d'être,
d'apparaître, de la moralité de chaque individu il est son bou
sens, sou honnêteté. Il peut aussi entraîner l'individu à corn-
mettre des fautes; mais, ensuite, il les lui reproche et l'en
punit. D'un autre note, il habite aux champs et il en cause 1»
fertilité (p. 303 1,unculte spécial lui est reudu'à ce titre; un
jardin lui est réservé. Mais il est, eu même temps, le pouvoir
géuérateur de l'individu et, après la mort de ce dernier, il
repart au ciel pour revenir ensuite sur la terre. Son culte est
très important il arrive mômequ'il est confondu avecMawu,
le grand dieu (p. 873i. Ceque Vnklamaest aux champs. Vmliv
l'est par rapport la foret c'est le dieu personnel qui accom-
pagne l'individu dans la brousse, à la chasse. Mais, taudis
que Vttklavinsemble toujours garder forme humaine, dans
bien des cas, ï'adec est un diablotin d'aspect simiesque:
c'est memequelquefoisunanimal proprement dit fp. 8u0i. –
Eulln, en dehors de ces deux nmuwo personnels, concrets,
il en est un troisième qui est une sorte d'être abstrait. C'est
le dzoybe, le jour de naissance. Le ihaghe soulève un impor-
tant problème du calendrier ewhe' il s'agit du rapport entre
les individus et les dieux de la semaine dont ils portent les
noms et qui sont les premiers hommes. Chaque homme a, en
effet, parmi ses noms, celui de son jour de naissance; et celui-
ci est. son sort. son destin, son dzogliu.On voit tout de suite
l'analogiequ'il présente avec leghetxi qui semble bien n'Otre
que son aspect dans l'au-delà et avec lequel, d'ailleurs, il est
souvent confondu9.
Mais il faut se garder de voir dans ces divers principes
autant d'entités spirituelles, distinctes et indépendantes. Kn
réalité, elles chevauchentles unes sur les autres et se confon-
dent en totalité ou en partie. Nous venons de voir que le
fcagbeest souvent pris pour ie~<) et réciproquement: e"'11

t. Aproposde cecalendrii'i*,nousnousbornvrun» à signaleri|U°ilailnmi


deuxscmiiiniisl'uni;<luquatrejouisavi-i:sabbatle quatrièmei|j. Slli:
l'autreîle sept,qui i-st liûrumenld'importation Il si-mlili-,
iMiropûi-mir.
d'uHleurs,qu'ily itvuil aussiuni;
priiiiilivi'iiuitit divisionpur décade.
î. Nousmentionnerons simplement iiu-uiiilcuv dieupiMvonin'1 dontlu
est
pbysionomie trup falotlcpour qu'ily ait liimd<-la di.VrirurV.-th-
« Kwdiou ili-spierres», celuiqui cuui|ili-les jik'mif-amiiMs,d'oidinuin1
à si;pl,nouslinsavonspouniUui.
liiuilêvs
li2 LAXX4BSuCIULOOKil'U.
I90U-HIO'J
est une autre forme. D'autres textes l'idedtlfleut au
koli, âme
du mort sous sou aspect mauvais, et même à
l'akkma. Mais
laklama n'est qu'un avatur de lWw' c'en est
une spécifi.
cation plus récente et, probablement, moins
générale. D'un
autre côté, nous avons vu que Vnkkmase confond d'ordinaire
avec le petit km, le grand kwo avec le noli.
tous ces termes sont substituubles les uns aux Finalement
autres d'une
manière directe ou indirecte. On pourrait établir la
série •
=
dzogbe glieM^dkkmn = aire = petit luwo =
;«ro. Il n'y a, en dehors de cette série, mli^gnaû
que la nolimeno et
l'esprit du de
conjoint l'au-delà mais ce sont là évidemment
des génies d'une espèce très dillérente et
qui ne symbolisent
pas à la personnalité de l'individu. Quant aux autres
tions,ellesue font que traduire les aspects différents decoueep- rame.
Il y a dans l'âme de l'homme
quelque chose de permuneut
d'éternel, et quelque chose de passager,
la même unie qui se réincarne, il a la puisquec'est toujours
y substance immortelle
dont elle est faite, la forme
temporaire qu'elle prend à chaque
génération il y a un côté par où elle exprime
simplement
homme, un côté par où elle le domine la
mythologie a
hypostasté ces multiples aspects, les fonctions variées
sont attribuées à l'âme dans ces divers états. De lil qui
l'extraor-
dinaire complicité de ces notions en même
temps que leur
mutuelle pénétration.
On a pu entrevoir chemin faisant
que cette théorie de l'Ame
est solidaire d'une doctrine de la réincarnation.
Celle-ci est
même d'une particulière netteté (cf.
AnndeSoc, IX, p. 208i'i.
Un certain nombre de prénoms et d'âmes
sont affectés a
chaque groupe familial ,p. «G,. Que ces groupes soient
des familles proprement dites ou des clans, il
l'instant. Ces noms reviennent et ces âmes n'importe pour
se réincarnent
périodiquement. La relation que nous avons eu souvent l'oc-
casion de constater ici entre les notions
qui concernent l'Ame
et celles qui concernent la
génération, la famille, l'organisa-
tion juridique et religieusese retrouve donc en
pays Kwhe Le
Tu Uarcelhu trit est vrai en Afrique
guinèenne commeil était
vrai à Rome.
Sur ce point, le livre de M. Léonard
rejoint et confirme
celui de M. Spieth. La doctrine de la
réincarnation par
1.A le C!lmC'"eci|t'v*4 lilliaut0»1-
;l!fowity !° ll'«"«notionR.nr-
niiue-tulenvc-luppr- touteslesaulr«sàm« coniuu-
rnaispcut-tn.n.~n~i.<.(i.t.d)<,du..u <l«s™>iw«mBïS'•
ù utiuÎllllu"IIt:IJ
.u,.o'
SYSTÈMESUEUÛIEUXDES SOCIÉTÉSINFÉniKUHKS 143

familles – groupes indivis d'aguatsou clans, nous traiterons


plusloiu tu question -existe ici commeen puysHafoé, comme
eu pays Ewhé (v. Léonard, p. 149,UiU,ili, etc.; cf. Desplaguetf,
p. 233). Voicien substance ce que lsikewe, un iudigôue intel-
ligent a raconté à M-Léonard. Il existe, pour chaque famille,
un lot déterminé d'Ameset du corps.Il fautque Vànieue reste
pas trop longtemps dans l'au-delà où elle finirait par s'afïai-
blir ip. '2Hi-iHÏ>)il faut qu'elle vieune reprendre force sur
terre (p. 180, 2701, Puis, il faut qu'elle aille à nouveau daus
l'au-delà reprendre la force spirituelle qu'elle use ici-bas.
Peudaut qu'elle séjourne ainsi au pays des morts, son génie,
qui u'est qu'un autre aspect d'elle-même, haute certaines
espèces animales; c'est là qu'il renouvelle les qualités occultes
et supérieures qui sont nécessaires à la vie spirituelle de
l'ame. Quand il, choisit des espèces végétales, c'est qu'il ne
veut plus se réincarner ip. 2'2'A).
Cette affiuité de l'âme pour le règne animal et végétal est
très vraisemblablement une survivance totémique. D'ailleurs,
la notion d'un principe vital, propre à chaque famille b» dout
émanent les âmes individuelles (p. 270-280;,lu nécessité pour
celles-ci de se réincarner alln que la famille reste forte, et,
pour la famille elle-même, d'assurer sa force eu fournissant
aux ancêtres le nombre nécessaire des corps, tous ces traits,
bien marqués par M. Léonard, dérivent certainement du
totémisme; mais notre auteur va plus loin; il croit pouvoir
observer des faits de totémisme proprement dit. Nous ne
croyous pas qu'en ces termes le fait soit exact. 11 existe des
génies protecteurs à forme auimale (culte du crocodiled'Oùi-
tsha, etc.» il existe également des dieux à « emblèmes spé-
cifiques»i p. Wti),et, comme nous venons de le voir, des sortes
(le totems mortuaires individuels ip. 197, 290-300. L'intee,
l'esprit de la brousse chez les Ewhé, a également une origine
totémique. Mais de totems de clans nous ne connaissons
qu'un cas authentique et sur; les habitants d'uu petit district
sont appelés geus du léopard et rendent un culte à cet animal
qui, d'ailleurs, est révéré partout, et spécialement par la con-
frérie qui porte sou nom. Ce n'est pas à dire certes que les
nègres n'aient pas connu le totémisme. Tous ces cultes ani-
maux ne semblent guère explicables autrement. Il y a,
d'ailleurs, de nombreusessociétés nègres où il est encore très
vivace. Onle rencontre, en particulier, chez les tribu de la
rivière de la Croix, qui ne sont.pas très éloignées du Bas-Niger.
Hi l'anskk s»i:i(ii.wii',iCK. muii-l't)»

Là, M. Partridge a constaté des tambours et des poteaux


totémiques, curieusement analogues aux instruments simi-
laires de Mélanésieet d'Amérique. Noussavons même quelle
forme prit le totémisme, en pays nègre, quand il céda le pas
aux cultes agraires et à des dieux qui. d'ailleurs, ne sont
quelquefois que les chefs d'une espèceanimale où Ils se sym-
bolisent. Ce qui aservi de transition, e'esl l'usage qu'où cons-
tate dans toutes les grandes sociétésdu Niger français, des
lanti (v. Uesplagnes, p. 152et suivi. Les tuna sont des inter-
dictions, mais ordinairement conçues sous la forme suivante
pour des raisons diverses, guerre, mariage, services reudus,
révélation, miracle, accident, etc., un individu contracte
alliance perpétuelle avec un animal auquel il s'interdit et
interdit à tous ses descendants de toucher iLéouard, p. -Il)'),
200, 800, 334».M. Delafosse nous signale, chez les Sieua ou
Senoufo, des totems sous-tribaux de ce genre. Maissi siguili-
catifs que soient tous ces faits, il faut convenir que. chez les
nègres, le totémisme ne se présente, là où on le rencontre,
que sous une forme très évoluée et que les autres phéno-
mènes religieux tendent, de plus eu plus, à le recouvrir1.
le rulle agraire. Nousn'exposerons pas- le résultat de
tous ces travaux sur les cultes des Nigritiens. Ils font défini-
tivement évanouir cette malencontreuse notion du fétiche,
que nous avons si souvent critiquée. Ceque nous rencontrons
chez tous ces peuples, c'est une abondante et très complexe
mythologie. Chezles Ewhé, nous voyousdes séries de grands
dieux, célestes, moraux mous parlerons plus loin d'un dieu-
loi,, des dieux terrestres, quelques-uns d'un type connu.
comme la terre-mère, quelques autres, d'une sorte assez rare,
comme le dieu des marchés,de lacuisiue, etc. chez les Habé.
nous voyons, outre une foule d'esprits plus ou moins toté-
miques, figurés ou non dans les fêtes par des masques (Des-
plagnes, p. 270et suiv.), une triade divine, Père-Mere-Fils.
tout à fait analogue à celle que l'on trouve à Ashanti et que
l'on a crue d'origine chrétienne. Chezles IIm et au Bas-Niger,
c'est, depuis l'arbre aucestral où résident les lares aquatiques

t. Avantt\<:<|uilUir les tliwnii'S


relativesïi l'inie, sipnalons
un faiti|ili-
imu»trouvonsilun>le livred«.M.Lëunaril.Uansuni;ivrluiuumesure.
l'Ainedépenddu statutr»U|(lriix «t im'im-civil tir l'individu.U- striVnli'-
porrlsonliiiiu (p. I8ii,260,li&i riiuniniellnn. seul,unu uii« liiOi. un
voitla relation(luiunit!<•iium,leti'rvclt-citoy«uaux jîi'itif*(|i.
iiriilvrt>iii<
uta Vàme.
SYSTÈMRSRBLroiBVX DKS SOCrÊTfc WÉIUECRES |4S

(encore une trace de totémisme), jusqu'aux grands dieux


mâles et femelles, toute une floraison de personnalités
diviues'.
Non seulement ces peuples possèdent une mythologie très
remarquable et déjà coordonnée mais encore il existe citez
eux tout un ensemble de cultes, de temples, de prêtres, de
confréries, de sociétés secrètes, de grades d'origines diverses.
Il y1a, eu outre, toutes sortes de petits temples de clans, de
roitelets. de chefs, de rois, dont les shamanes, serviteurs du
dieu, possédés par lui, se disputent la clientèle publique. Ils
nous donnent une idée de ce que devaient être les cultes des
jwji, des quartiers clans les ville%latines. Bien certainement,
s'il est un mot qui couvieune à tout ce rituel, c'est celui
d'idolâtrie plutôt que celui de fétichisme.
Mais ce qui est frappant, c'est à quel point le culte public
est essentiellement agraire. L'existence des grandes « cou-
tumes » royales, des grands sacrifices humains à Bénin, au
Dahomey,à Ashanli, inclinait à faire penser que les grands
cultes nègres se réduisaient à une sorte de grand culte des
aucèlres royaux. Or, nous avons maintenant à notre disposi-
tion des sortes de calendriers nègres. Nous connaissons le
tableau des fêtes au Bas-Niger, en particulier it Onitsha (Léo-
nard, p. -434et suiv) elles se groupent toutes, sauf une,
autour du cultede l'igname et de la végétatiou. Voicila liste
1"Fêtedu dieu père, c'est-à-dire des pouvoirs générateurs de
la nature et de la végétation (cf. la fête d'Agbasia chez les
Ewhé, Spieth, p. 380,830).-2- Fête des premiers fruits. 3»Com-
muniondes nouveaux ignames. 4° Fête de la société des chas-
seurs ou guerriers (Léonard, p. 178) c'est la seule qui nesoitt
pas agraire et encore on verra que, chez les Ewhé, la fête de
la chasse se rapporte au culte agraire. o° Fête de l'expulsion
du mal avec victime expiatoire humaine elle est certaine-
ment rattachée à l'expulsion des restes des anciens ignames.
() Fête des miettes d'igname, des ignames eu pâte (p. 411).
7"Grandetête des ignames rôtis.
Nousavons aussi le calendrier du culte de l'igname chez
les Hoet dans quelques autres tribus Ewhé il domine égale-
mentle culte public. Deux des plus grands dieux, celui de la
terre, Agbasia, en particulier, lui sont directement rattachés

1 Noussignaleronsen particulierla romarqualjledéessede la cuisine


ilonll'âme«stle réceptacledesâmesdes femmes(Léonard.]i.4SI,431).
lv. OiukiiEm. Anniii- «iciul., )90li-l9û'J. 10
140 1(1(10-1WJ
L'AXSÉE SOCIOLOGIQUE.
.1 .« 1 .1.~
(Spieth, p. 307,445440). Le second grand dieu, Dzoha,dieu du
vin de palme, est relié à Agbasia, le dieu-père (v. Westermaun,
s. v. p. 91,col. 2). 11n'est pas de dieu à qui on ne rende quelque
culte, soit à la fôtede l'entrée des ignames, soit le jour de l'ex-
pulsion du mot, c'est-à-dire du génie de l'ancienne récolte.
On dirait que ce sont autant de cultes agraires rivaux. Un
trouvera, d'ailleurs, dans Spieth (p. 399et suiv.) un tableau
complet du culte de l'igname incendie solennel de la brousse,
ouvrage à la fois rituel et technique d'assolement, chasse
rituelle(comparable à celle des Zuùi) lûtes des semailles (où
sont remarquablement confondus le grand dieu et l'aklama,
génie individuelet dupropriétaire du champ et du champ lui-
même:; fêtede l'expulsion du mal, fôtede l'entrée des ignames
que l'ou approche solennellement et progressivement d'abord
du seuil de la ville, puis du quartier, puis de la maison, enfin
des pénates domestiques; grande communion, etc. D'autre
part, dans tout le calendrier Habé (Desplagnes, p. 208 sq.j,
nous ne voyousqu'une fête qui échappe à la règle commune:
c'est une fête des morts, sorte de Toussaint.
Nous ue pouvonsexposer ici tous les faits que contient le
beau livre de M. Spieth. Nous signalerons pourtant l'impor-
tance de la monographie consacrée aux rites fuuéraires et au
culte des morts (p. 255 et suiv.) Les quatre modes d'enterre-
ment normal et les huit modes d'enterrement accidentel (à la
suite de suicide, de crime, de sortilège magique, de telle ou
telle maladie, etc.) nous montrent à quelle complexité peut
parvenir le système des funérailles et combien, par suite, il
faut être prudent en matière de théories sur cette question.
Un autre point sur lequel il peut y avoir intérêt à appeler
l'attention, d'autant plus qu'il aéchappé à M. Frazer, concerne
ce qu'on désigne communément du nom assez impropre de
prostitution sacrée. M. Frazer a vainement cherché dans le
livre de M. Spieth des renseignements sur cette question. Il
est certain, eu effet, qu'une regrettable pudeur semble bien
avoir fait taire à M. Spieth des usages importants (on a un
exemple de cette réserve à propos de la traduction de Bablu-
xagii, p. 460;. Cependant, même à travers ces réticences, des
faits significatifs apparaissent. Môme chez les Ho, Agbasia
n'est pas le seul dieu qui donne des enfants aux femmes sté-
riles, à qui ces enfants sont ensuite voués; et dont ils portent
le nom (p. âitj. Presque tout dieu est ainsi un générateur.
Puis toute fille qui est censée avoir cette origine est obliga-
SVSTKMBSRELIGIEUXDBS iSOUIBTKSINFÉRIEURES 147

toirement l'épouse du prêtre du dieu ou de quelqu'un de


ses parents; tout garçon est son esclave, jusqu'à ce qu'il
soit échangé contre une petite fillede la môme famille. C'est
bien la preuve que, dans tous ces cas, une obligation sexuelle
résulte de la naissance. En dehors des Ho, nous trouvons des
pratiques similaires. AMatse ip. Mi), les enfants divins sont
procréés par le prêtre lui-même, et l'acte sexuel dont ils sont
le produit est éminemment religieux. Dans la même tribu,
<p.790),lafemme qui eu ce commerce peut ensuite avoir des
rapports avec un homme quelconque, sauf avec sou mari. A
Akowiewe, l'acte sexuel (des esclaves du dieu, sans doute)
n'est permis qu'à la ville, mais il est interdit à la brousse par
déessede la la terre
Après avoir exposé les différents cultes et les principales
croyances que l'on observe chez ces peuples, il nousreste à
dire uu mot d'un intéressant effort qu'a fait M. Léonard pour
lits réduire à l'unité. Suivaut lui, le fond de la pensée reli-
gieuse, au moins chez les nègres du Bas-Niger qu'il a plus
spécialement observés, serait une sorte d' « animisme aveu-
gle », unenotion de l'àme universelle ou de pouvoirs spiri-
tuelsde nature tout à fait impersonnelle. Ces forces vagues et
anonymes ne s'individualiseraient que parce qu'elles sont
obligéesde se chercher des lieux de séjour, des corps où elles
résident, qui leur prêtent leurs formes propres et leurs ser-
ventd'emblèmes. Lesdieux particuliers, les êtres sacrés de
toutes sortes seraient dus uniquement à cette nécessité qui
poussel'àme universelle à s' « emblémiser »; c'est pourquoi
l'auteur voit dans l'«embléraisme » le procédé par excellence
de la spéculationprimitive sur les chosesspirituelles fp. i">).
Le fétiche, l'âme du mort, le tonnerre ou la pluie, le corps du
vivant, le corps de l'animal qu'une ville ou une tribu révère,
tout cela ne serait qu'emblèmes. Nous craignons fort qu'il
n'y ait dans cette manière de présenter les choses un excès de
systématisation. M. Léonard a longtemps vécu dans le sud de
l'Inde. Il y a connu la doctrine de la transmigration et du
Karman il a voulu en retrouver l'équivalent sur les bordsdu
Bas-Niger(p. 220). L'importance des cultes phalliques est

I. Kn(initiantlelivredi-.M.Spieth.nousmi-ntionneroiisunelacuno il
v'-siù|iuinequestionA»»suciiHûs secrètes.Surlu langue•!•lu grandecr>n-
iri'Tii'
iuli.'rn&tionulc
du Yurv«,v. Westermimn, Wûrlerlt.p. ai.(introuvera
li- ri'iiseiRnemenU suri-ppointdans Monurdiji.323et suli#.|,r-ldansl<-
ir.ivailplusancienduKluio,lieulscliTuyo.
U8 LASXKK iûaOLOlilgCK. I90G-WJ

pour lui, la preuve d'une sorte de Vishuouismt;nègreip. U)i-


103i.11a été ainsi ameué à attribuer ù la pensée nègre, qui
est concrète en même temps que systématique, un pouvoir
d'abstraction qu'elle u'a pas. Ou n'est pas cependant sans sea-
tir l'analogie qu'il y a entre cette notion de l'âme universelle
et celle*de nmna et il est curieux qu'un observateur, non pré-
venu, ou plutùt prévenu par de tousautres principes, y soit
arrivé de lui-même. M. M.

BOGORAS(W.i. – The Chukohee. Il, Religion.The Jesup


North Pacillc Expédition. Meinoinpf the AmericanMwie-um
for Mtttral History. Vol. Vil. Il. New-York,Stechert, 1907.
p. i7li-53ti, gr. iu-4".

JOCHELSON(W.).The Koryak. 1.Religionand Mytfa.Jes


N. P. Expedit. Jfrm. Amer.Mus..\u(. VI, I.-New-York,
Stechert, 1TO5(190«i382 p., gr. iu-4».

La Jemp Er\tedilion a étendu ses investigationssur l'autre


côté du détroit de Bering, sur les populationsqui, autrefois.
étaient seules à couvrir l'extrémité nord.orientale de l'Asie.
M. Jochelson et Bogoras ont été chargés de cette enquête. Ce*
deux observateursont longuement pratiqué les tribus de cette
région. Toutefois, dans le cas présent, leurs informations oui
une valeur inégale. M. Bogoras nous parle des Chukchee qu'il i)
avait déjà étudiés antérieurement et dont Il couuatt bien 1«
langue et les mœurs, tandis que M.Jochelson s'est attaclu
aux Koryak qu'il ne connaît pas de longue date et avec les-
quels il n'a pu communiquer que par interprètes. Maiscomnii
ces tribus sont parentes, malgré leur hostilité traditionnelle,
comme M. Bogorasa communiqué sesdocumentsà M.Juche)
son et qu'il a visité lui-même les établissements koryak, le-
insuffisances philologiques de l'enquête de M.Jochelson soin
réduites au minimum.
Comme les volumes où sera décrite l'organisation social,
de ces peuples ne sont pas encore parus, des éléments nmi-
manquent qui nous aideraient à bien comprendre leur vî«j
religieuse. Cependant, nous savons dès maintenantque le cliin ii
totémique y est remplacé par un clan local et une joint-
ftimilij très forte où le futur époux doit travailler longtemps
avant de.pouvoir emmener sa femme. Noussavons aussi qu••
chacune de ces uations se divise en deux parties distincte-
SKTÈMKS HKI.1UIKI.'X DKS SOCIÉTKS IXKKHIKUHKS U9

qui mènent une vie très différente. Il y n des Chukcheeet des


Koryak maritimes; d'autres qui habitent l'intérieur et vivent
surtout du renne, soit domestique, soit sauvage tchukehee,p. î,
17). Cette différencecorrespond à des différencesconsidérables
dans les préoccupations do ces fractions de chacun des peu-
ples. Toute ta vie dépend, ici, du renne là, des animaux
marins, surtout des cétacés. Nous verrons ces dilléreuces
affecter le culte.
Nous ne pouvons dire encore si ces deux nations' ont des
régimessociaux, l'un d'hiver, l'autre d'été, commeles Kskimo.
Il semble hien pourtant que l'été soit une époque de noma-
disme, surtout pour les chasseurs de rennes qui, à ce moment,
s'éloignent parfois beaucoup de leur tente familiale. Eu tout
cas, les phénomènes religieux différent suivant les saisons.
L'hiver est la saison religieuse. Les trois fêtes fondamentales
sont celles de l'entrée, du solstice et de la sortie de l'hiver.
II y a plus; l'opposition de l'hiver et de l'été semble affecter
la représentation du monde spatial. La gauche et la droite
semblent changer de caractère avec les saisons. En hiver,
c'est la gauche qui est faste, et la droite néfaste, dans cer-
tains procédés de divination (C.hukchee,p. 487490/. Et il
e«t permis de croire que ce renversement correspond à une
véritable inversion dans la façon de concevoir le monde car,
chez les Koryak (p. IIOj, dans le monde d'en dessous, c'est
également la droite qui est sinistre, contrairement a ce qui
se passe dans le monde d'en dessus. De même, aux funé-
railles, on met gauche la mitaine de droite, et inversement.
JI semble que l'on ait ici uu curieux cas de fusionentre des
notions opposées deux à deux et créées les unes pour figurer
l'espace, les autres pour figurer le temps, les unes et les
mitres coïncidant avec une espèce de classification inspirée
pur les saisonset les institutions socialesqu'ellescommandent.
Nous nous garderons, sans doute, d'insister davantage sur
une hypothèseque l'état des documents ne permet de risquer
qu'avec beaucoup de réserve. Toujours est-il que, dans ces
populations de l'Extréme-Asie arctique, la relation entre les
phénomènes religieux, les phénomènes économiques et les
phénomènes morphologiques et saisonniers parait être des
plus typiques.
t. Nousdisonsnation4 causede l'espacefonsiilûralilc
Ciiusi'du diltJVede la pu|iuluUun. «itH|k!plus<|u'à
lJ'upivsJochulsonai, iîl, il y a
T:io Koryak.
180 1906-1909
I.ANNKKS0CNH.OUIQUB.

Les autres phénomènes religieux rentreut davantage dans


les cadres connus. Même nous supposerions volontiers qui'
bon nombre de croyances et de pratiques ne sont plus guère
que des survivances mal organisées, fortement ébranlées par
l'influence européenne et l'action des indigènes convertis.
Nous irions jusqu'à soupçonuer les auteurs d'avoir recons-
titué un certain nombre d'entre eux sans les avoir vus en
action l,
On s'explique ainsi une particularité de la mythologie
koryak dont M. Jochelson a publié un recueil des traditions
orales. Aucun de ces contes ne lui a été répété par un
homme. Les hommes, dit-on à M. Jochelson, ont autre chose
à faire. Ce sont les femmes qui sont seules dépositaires des
récits, pris fort peu au tragique, considérés plutôt comme des
amusettes, vis-à-vis desquelles l'homme reste sceptique, bien
qu'en somme bon nombre de ses croyances y soient enregis-
trées et que même la récitation de certains de cescontes passe
pour pouvoir arrêter la pluie ou déchaîner l'orage. Nous
aurions donc affaire à une (ribu dont la mythologiepropre-
ment dite serait ravalée au rang de simple conte érotérique.
conte de femmes, sans mystère, sans sainteté, sans portée
réelle.
Les ancêtres dont cette mythologie nous raconte les geste*
ne sont pas les esprits qui jouent un rôle dans le culte. Le-
contes mythiques nous parleutd'un grand créateur, appelé le
corbeau, le grand corbeau, qui a une femme, des enfants. Il
n'eu est pas question dans les rites (Koryak,p. 82).Les Koryak
ont bien un être suprême qui préside aux réincarnations, mais
qui ne semble jamais confonduavec le grand corbeau. Chez
les Chukchee, il y a, semble-t-il, une notion abstraite ù<-
puissance, d'existence (tairgit, cf. la formule n° 8, p. îiOlj,
mais qui n'est pas toujours concrétisée dans cellede l'être d'en
haut qui reçoit les morts (Chukchee, p. 828]. Il y a dour
divorce entre la mythologie et les véritables dieux. Le fait
mérite d'être remarqué; nous ne saurions décider s'il est 1>'
fruit d'une évolution ou d'une régression.
Quoi qu'en disent nos auteurs, les croyances propremuui
religieuses, ainsi distinguées des croyances semi-religieusc-
des contes des femmes, ue paraissent pas avoir une parenl.-

1. 1,'ohwvations'a|i]illf|ui;riM'inci
k M. Honorasqui. |iurexuniplr.u.-
connaîtquepar uiïi-ilitules rili-sfiiniîraJivs
ijui rluivcjil
être faitsiju.ui
lemortn'estpas «nterrr-danssu localitrip. 3351.
IlliUUiKrxPKASOCIÉTÉS
SYSTEM!» ÎN'FÉHIKL'RES 151

plus directe avec les mythologies de l'Amériquequ'avec celles


de l'Asie. Voicieu quoi elles consistent. Toute chose, pour les
Chukchee comme pour les Koryak. a son euvel'sspirituel le
monde animé et inanimé est double dans toute son étendue:
tout parle, pense, agit comme la partie spirituelle de l'homme,
coinine les esprits (Roi,y(ik,
comme 1.), Chukéte, p. 330).Mais Il
(Kovytik,pp.. 22, il n'y
n'y
a rien là qui ressemble ni à l'idée Esklmude Vinua, de l'être
humain, qui,possède individuellement chaque chose, qui se
révèle quelquefois comme la figure derrière le masque, ni à
l'idée américaine de l'animal-homme, chef de l'espèce toté-
mique. Pour rencontrer quelque chose d'équivalent, c'est
plutôt du côté de la mythologie Ghiliak que nous cherche-
rions M. Steruberg a signalé chez ceux-ci une systématisa-
tion du même genre.
Au-dessus de ces esprits naturels des choses, qui n'ont pas
de rôle particulièrement actif, il y a « les esprits agissants »
qui sont de deux sortes, les bons et les méchants. Sous l'in-
flueuce du shamanisme et de ses deux fonctions, magie
blanche et maléfice, les Koryak etles Chukcheesont arrivés il
une sorte de dualisme. Les esprits bienfaisants sont appelés
tairgit {Chukchee,p. 313), tahùjinn (Korynk,p. 2lj;ce qui veut
dire êtres. Citezles Chukchee, ces êtres sont classés et systé-
matisés beaucoup mieux que chez les Koryak. Ce sont les
différentes directions, au nombre de vingt-deux (celles de
l'ouest sont exceptées; elles sont le domaine des mauvais
esprits); les différents moments de l'aurore rattachés aux
directions, ou distingués selon les cas; les entités vagues.
mi-partie génériques et mi-partie individualisées auxquelles
s'offrent les cultes pastoraux ou ceux des chasseursmariti mes
enfin les divinités de la lente et de la maison, celles du feu
domestique. •– Chezles Koryak, apparaît, plus nettement que
citez les Chukchee, une classe très générale d'esprits « gar-
diens », préposés à la protection de l'individu, de la famille
et môme de la localité. Cesgardiens sont d'ordinaire symbo-
lisés par la planchette à feu, à laquelle, comme chez les
Chukcliee, on offre un culte au moyen du tambour et d'une
espèce de pieu, qui représente le fondateur du lieu ou de la
maison. Ce pieu s'appelle le Kamak. Sur le Kamak do sa
maison, le Koryak plaute, tournés dans le seus des (lircrlinns.
les nombreux chiens qu'il sacrifie à ses esprits.
Aces êtres bienfaisants s'oppose la hordedes Knlau fKoryak
ou des k'i'let (Chukcheei: ce sont les esprits malfaisants du
152 l'axxée soeioLoaiyuE. «oo-iiiou

shamune, ceux qui assaillent I homme,le malade, le voya.


geur, l'Amesur le chemin du pays des morts. Nousne savons,
il est si, chez les Koryak. la troupe des Kalau est si dis-
tincte des autres esprits que l'a cru M.Jochelson. En (ait, dans
une formule (p. u'8et 200)uous les voyons se confondreavec
les esprits gardiens. Ailleurs, ce sont ces derniers qui prennent
des formes mauvaises (p, 234, 200 La distinction est peut-
être plus nette chez les Chukchee, où les Kêlet sont spéciale-
ment situés à l'ouest et réservés plus spécialement au service
des sliunianes.
Le culte ue se rattache que par un lien assez lâche à cette
mythologie, déjà bien vague elle-inôme. On dirait que ces
tribus, dispersées sur une énorme superficie, n'ont réussi ni
à systématiser leurs croyances, ni à ajuster leurs croyanceset
leurs pratiques. Le culte public consiste en pratiques d'une
certaine uniformité, qui paraissent obligatoires K'hukchee,
p. 3-10}et qui réunissent des établissements voisins et même
des stations éloignées, convoquées sur invitations. Elles
suivent le rythme des saisons. Déjà, nous avons eu l'occasion
de signaler une saison d'hiver presque entièrement religieuse.
Les fêtes ont un caractère pastoral et cynégétique d'une part,
naturiste de l'autre. Le culte s'adresse conjointement au
gibier, au feu, au soleil, aux directions. Dansles camps de l'in-
térieur, c'est naturellement le culte du renne qui est déve-
loppé il a pour fonction de concilier aux fidèles les pouvoirs,
les entités vagues qui président à la prospérité du troupeau.
Les unes sont identifiées avec le feu, souvent le feu domes-
tique. les autres avec le feu et le soleil à la fois. Dans les frac-
tions maritimes de ces tribus, le culte, qui est également sai-
sonnier iChukehee, p. 38lî et suiv. Koryak, p. 08 et suiv.),
s'adresse naturellement au gibier maritime, notamment à lu
haleine. Le thème rituel sur lequel il est construit est celui
que l'on rencontre dans presque tout le nord-est de l'Asie
l'animal chassé est considéré comme un hôte honorable qui
veut bieu rendre visite aux siens, que l'on reçoit, que l'on fête
et que l'on prie de bien vouloir ou revenir eu personne ou
envoyer de ses parents (Koryak, p. 78, 159,1(50,265;Chukchrr,
p. 406). Il faut rapprocher de ces rites ceux qui sont pratiqués
sur le gros gibier terrestre, rennes sauvages, ours, etc., une
fois abattus; le principe est le même.
Le culte privé est très important. C'est surtout un culte de
la famille, de ses amulettes et du feu domestique. Il est assez
sysTÊHK* HKMIIIKCX DESSOCIÉTÉS I.NFKlUEL'flKS153 3
.n__a__ m_a _1. t_- m.v
important pour affecter le droit ainsi, chez les Chukchee
(p. 380), la femme qui va vivre chez le doit, au préa-
lable, renonçai1solennellement aux nacra familiaux. L'amu-
lette individuelle, qui, d'ordinaire, se transmet surtout par
voie d'héritage, devient rapidement une sorte de palladium.
Mais le plus précieux objet du culte est le tambour qui sert
aux séances de shamanismerudimentaireauxquelles se livrent
les familles, A moins qu'il n'y ait daus les observations de
nos auteurs des lacunes que(nous ne pouvons soupçonner, ce
culte privé se rattache mal au culte des ancêtres. Dans le
rituel de la naissance, nous signalerons seulement le principe
en vertu duquell'eufant réincarne un ancêtre dont il porte le
nom (voir chukrhee, p. 51i, de remarquables anecdotes
Knnjak, p. 5)3, l()0i. Pendant les premiers temps, le génie
réincarné reste fugace, facile à mécontenter; de là, certains
usages concernant l'enfance. – Chez les Chukcliee.le rituel
funéraire contient des traces d'endocannibalisme (p. 817. 528).
Dans les deux tribus, on prépare longtemps d'avance, comme
eu Chine, les habits rituels du mort qui sont destinés à
assurer la vie de son âme {(hukchee.p. Si; Knnjak, p. 110).
Le plus important des faits étudiés à notre avis est encore
le sliatnanisme. Il est Inutile de décrire en détail les princi-
paux des résultats auxquels sont parvenus M. Jochelson et
M. Bogoras. Ils ne se distiuguent pas grandement de ce que
l'on sait du shamanisme sibérien. Toutes ces populations du
nord de l'Asiesemblent vivredans un véritable état de névrose
latente. La famille entière par moments, le groupe entier
quelquefois et presque tous les individus a plusieurs reprises
s'efforcent d'être possédés par des esprits, d'ordinaire des
esprits du mal, Kalnu, et Mlrl*.Les phénomènes de possession
sont fort bien décrits timidité du shamane, scrupules mul-
tiples, mensongesprofessionnels, tours de mains, ventriloquie,
révélations, rêves, crises, accès,départ des esprits et des pou-
voirs, rentrée dans l'état normal, nous avons ici toute une
psychologie du «liamaue K'Itukvhee,p. 421)aq.; Koryak,j>. 49
sq.i. Même les formules Chukcbeeque nous transcritsoigneu-
sement M. Bogoras permettent de comprendre cette puissance
du désir collectif et individuel il la fois la magie écourte les
distances et les temps (Chnkchcc,p. 471), elle grossit en
énormes monstres-gardiens deux tout petits féliches (cf. p. 475
et p. 498). – Enfinon nous signale de nouveaux faits de chan-
gement de sexe ces faits sont nombreux daus l'Amérique
15i L'ANNEE
SOUIOLOMIQUR.
IW-19U9
du Nord et dans l'Asie orientale des sliamaues le plus sou
veut, quelquefois des hommesdu commun,sont censés devenir
des femmes (chukchee,p. 460; Korytd;p. JiO,cf. le conte u'KSj.
Ou dira que ce sont des phénomènes nerveux assez connus
sous le nom de déviations sexuelles, et, pour prendre des
termes de la psychologie la plus récente, des eus de déper-
sounalisation. Nous n'eu doutons pas. Maisil est curieux de
voir comment dans ces cas, précisément privilégiés, le milieu
social produit ses shamanes et ses fous. M. M.

W. H. H. R1VERS.– The Todas. Loudou,Macmillan. '1906,


p. XV-785,in-8g(71 planches et une carte).

Les Todas furent, un instant, fameux daus la littérature


sociologique.Les cas de polyandrie et de promiscuité que l'on
avait signalés chez eux avaient attiré sur leur organisation
sociale l'attention de Morgan et de ceuxqui le suivirent. Mais,
depuis quelque temps, l'intérêt était ailleurs. Le livre de
M. R. tire ce peuple très curieux de cet oubli immérité. Il
nous donne, d'ailleurs, de leurs institutions une description
bien supérieure à celles que nous en avions.
Les Todas présentent cette particularité qu'ils sont réduits
à une seule et unique technique l'élevagedu buffle et la lui-
terie. Leurs grains leurs viennentdes Badagas,leur poterie des
Kolas en échange, ils donnent à leurs voisinsles produits de
leur lait. Ils sout aiusi au milieu des tribus avoisinantes, dans
la position d'unecaste au milieu d'autres castes.Même les rap-
ports religieux qu'ils soutiennent avec ces sociétésambiantes
semblentjustifierce rapprochement îvoirp, 039et suiv. l'usage
des salutations;. D'après M. R., cette spécialisation écono-
mique serait due à une régression des Todas qui, antérieure-
ment, auraient eu une plus haute civilisation. Nous ne vou-
drions pas rejeter complètement cette hypothèse.Cepeudaut,
elle ne nous parait pas de nature à tout expliquer. Il se peut
fort bien que ce remarquable exclusivismesoit dû à des pré-
jugés sociaux dont on nous signale au Soudandes exemples.
Breecks ip. C40)rapporte une légende qui a cours dans les
Nilgiri et où le lait est attribué aux Todas. En fait, toute
autre occupation que l'élevage et que la laiterie ip. 713),toute
autre nourriture que le lait et le veau constituent une déro-
gation, non seulement aux usages, mais à cette espèce de
SKTÊMKS
BKUUIKIX
DKSmjCIÉTÉS
(NKKRIEl'IUC* |5S
hiérarchie sociale où les Totlasont une place déterminée par
rapport aux tribus avoisinaules.
M. K. débute à regret, dit-il, par l'étude des phénomènes
religieux. Nous suivrons le même ordre qui s'adapte au plan
mftme de l'Année sociologique.Toutefois, pour être clair, il
nous faut dire que les Todas sont divisés eu deux phratries
endogames Tarlharol (ni est la terminaison du pluriel et
Ttitaliol. Ces phratries se subdivisent eu un certain nombre
de clans exogames (15, d'une part, et 12, de l'autre). Avec
notre auteur, nousdistinguerousdans notre exposéles faits du
culte public et ceux du culte privé.
Les Todas présentent, à notre avis, un cas unique de spécia-
lisation du culte public. Tout le rituel, même la plus grande
partie du culte domestique, est réduit au culte du bullle.
Sûrement, cette situation n'est pas primitive. Les astre;, la
terre, les héros, les ancêtres ont dû être autrefois l'objet de
rites où l'on employait autre chose que des buffles et du lait.
Maiutenaul encore, autour du culte du buille, on trouve des
débris de rites, des vestiges de mythes qui témoignent que le
passé fut différent du présent. Est-ce à dire, comme le veut
M. R., qu'il y ait eu fléchissement de la vie religieuse en
général ? Nousne le croyonspas. Seuls, quelques éléments ont
régressé. Il s'est passé, sans doute, chez les Todas, à un plus
haut degré, une sortede concentration religieuse de réduction
à un seul type de tous les actes religieux. De même qu'au
Mexique ancien les Aztèques en étaient arrivés à se figurer
presque tous leurs sacrifices comme de sacrifices du dieu, de
même qu'en Égypte la figure d'Osiris et celle de Seth avaient
fini par s'imposer à des croyances et à des pratiques qui leur
avaient été complètement étrangères, de même, par une
espèce d'obstination à réduire à un mode leur activité reli-
gieuse et économique, la caste-tribu des Todas a imposé le
culte pastoral à tous ses modes d'actions. Les rites de la
naissancecomprennent essentiellement, outre les purifications
et lestabousordinaires, la miseen contact de la mèreenceinte,
du fœtug,'puis de l'enfant, avec une sorte de laiterie fictive
ip. 318 sq.). Dans les rites funéraires, outre la crémation et
les deux enterrements qui sont nettement séparés, il y a. à
chacune des funérailles, mise en contact de l'individu avec
le buffleattrapé à la chasse et sacrifié, avec les cloches du
troupeau familial,etc. Mêmeon dirait que ce culte exclusif a
abouti à transformer le bullle en une sorte de totem funéraire.
151! l'a.N.NKK l9u(i-19UU
sociuLOUluUK.
s'il n'est pas, comme ou l'a cru, uu totem tribal. Le buffle
n'accornpaguepas seulementle mort dans l'au-delà, il semble
être appelé son père ici. la formule, p. 388) la hutte funé-
raire est une sorte de laiterie. L'enclosfunéraire est un parc
aux buffles,et ainsi de suite.
Le culte du buffle a doue tout envahi. Mais qu'est-il en lui.
même il consiste en uue série de processus de sacralisation,
et de désacralisatiou (p. 231et suiv.). Il s'agit de concentrer
sur un certain nombre de choses,d'animaux, de personnes, la
sainteté du bullle et do ses produits afin que la vente en soit
possible même à des étrangers. Il s'agit de sacrifier ceci pour
qu'il soit possible de profaner cela. Mêmecette concentration
du sacré ne se fait pas seulement sur les êtres et les choses.
mais aussi dans le temps. 11y a des jours où toute transaction
profane ou même religieuse ifôle funéraire, migration, etc.)
concernant les bufil eset le lait est interdit. Chaque clana sou
mailnul jour hebdomadaire d'interdit, son sabbat pastoral
(p. 403sq.; M. fi. en marque fort bien l'analogie avec le sabbat
hébraïque. Par opposition avec ce sabbat, les fêtes propre-
ment dites ont, au contraire, une allure toute positive elles
sont faites de lustrations, de prestations actives. On dirait
que les Todas ont réserve pour les jours imulnolleurs inter-
dictions rituelles et, pour leurs autres, leurs actes positifs.
Les deux formes du culte se sont comme localisées en des
jours différents.
Mais ces fêtes elles-mêmes, ne semblent pas très impor-
tantes ce sont les rites journaliers qui constituent l'essentiel
du culte. Les unes sont occnsionnelles la migration régulière
des buffles, leur transhumance (ch. v), la fabrication d'un
nouveau /w/i (sorte de beurre à levure destiné à faire coa-
guler plus rapidement le lait barrattô), l'expiation d'une faute
rituelle commise par une section d'un clan ''[> 294;. telles
sont les principales occasions à proposdesquelles ils ont lieu.
Les autres sont régulières. Elles se rattachent peut-être à
d'anciens cultes. Ainsi le sacrifice du veau, répété trois fois
l'an (p. 273) est relié, une fois au moins, à la cérémoniedu
feu dont nous avons parlé.
Le culte du buffle consiste donc moins en manifestations
intermittentes, qu'en une sorte d'activité continue c'est
comme un Malus religieux. Il est interdit aux femmes do
s'approcher du buffle et de tout ce qui le concerne. Les pro-
fanes le saluent dès qu'ils l'aperçoivent. Ils ne participent pas
SY.-TÉMBS
HKUlilKl'X
DKSSOCIÉTÉS
INTÉMKl'HK* 157
directementau culte et ne peuventrecevoirles produitsde
l'animalque par les intermédiairesautorises.Toutefois,si la
sainteté restait diffusedans le troupeautout entier, elle le
rendrait inutile on la concentredoue sur certainestêtes.
Tousles ans, une divisiondes buflleseu sacréset en profanes
a lieu dans chaqueclan. Mais,si le bulllepeut-êtreprofane,
certainesdes opérationsque l'on fait sur le lait ne le sont
jamais:ce sont,en particulier,cellesquiaboutissentau beurre
clarifié,principalalimentdes Todasen mêmetempsque leur
principal objet de venteet d'échanges.Demêmela laiterie
est toujours sacrée.Les profanesne peuventen approcher.
Chaquevil-lugea son berger, véritableprêtre. Celui-ciest en
général,obligatoirement,un nombrede la phratrieTeivaliol
il est soumisau moinsà une ordinationet à diversritesà
l'égard des buflles,du soleil levantet des instrumentsde la
laiterie.
Maisde mêmequ'ona pour butles sacréset non sacrés,de
mêmeon sépare les troupeauxsacréslesuns des autres; les
bergers,les bergères,les troupeaux, nesont pas toussur le
mêmeplan; il y a entre eux une hiérarchieainsi qu'entreles
clans, et cette hiérarchiecorrespondexactementà l'impor-
tancedesdiversculteslocauxdu buffle,On trouvera(p.230-
232)un bon résumédes principessur lesquelsreposecette
organisation.Cesprincipessontaussi simplesque lecérémo-
nial paraitcompliqué.Toutesles laiteriessont sacrées,mais
ellesle sont à des degrésdifférents.Suivantla placequ'elles
occupentdansla hiérarchiesainte, les bergerssont astreints
à des initiationsplus ou moinsrudes et soumisà des inter-
dictionsplusoumoinssévères,les prièresrépétéesen facedes
bufllessacréset de la laiteriesont plus ou moins longueset
efficaceslemaniementdu lait, le barattageet la classification
supposentdes précautionsrituellesplus ou moinsgrandes.
En un mot,le grade le plus élevédes laiteriesest celuioù le
caractèresacrédu troupeau, du laitieret du lait, estle plus-
accusé.Il y a cinq ou six gradesde laiteries.Les plusélevées
en dignitésontles ti, qui sont propriétédes principauxclans
dela phratrieTartharol.Leti estentouréd'unenclosoùs'abri-
tent les buflleset les pâtres. Derrièrecet enclosest la cré-
merie avec ses diverses chambres (deuxou trois) dont la
dernièreest réservéeau rituel du berger et aux moments
solennelsde la fabricationdu lait; elle est interdite mêmeà
l'adjointdu laitier. Lebergerdu tt, le/w/o/estobligatoirement
154 I.WNÉB4uUIOlOUIQt!E.
«1)6-!(JOB

de la phratrie Teivaliol. C'est uu personnage hypersacrô


il est môme traité de dieu dans une formule (p. 221 A lui
et à ses prières est attachée la prospérité, non seulement du
troupeau sacré, mais de tous les troupeaux et de tous les
Todas. Aussi est-il soumis à de multiples interdits et à une
surveillance active de la part d'uu des claus privilégiés de
l'autre phratrie.
Un des chapitres les plus importants, c'est celui qui est con-
sacré à ces prières, que, seul, le palol répète chaque fois qu'il
commence uu acte important; les autres bergers ue les réciteut
que sous des formes plus ou moins abrégées (ch. x). La partie
vraimentefficace de ces prières consiste eu une formule, sorte
de litanie, où sont énumérées toutes les choses sacrées de la
laiterie, des buffles, des dieux, des hérosqui s'y rattachent, etc.
Chacun des noms et des épisodesqui se succèdent ainsi est
suivi du mot Ulith qui est, parait-il, incompris, et qui
signifierait à peu près « eu l'honneur de a ou plutôt, croyons-
nous, « à la faveur de >. Nousnous demandons si ce ne serait
pas une traduction en une langue de famille Dravidienne du
sanscrit sidilhi qui est souvent employé en clausule des for.
mules de bénédiction avec le sens de « pour les pouvoirs de,
en l'honneur des pouvoirs de». Ceserait donc une trace des
influences de l'hindouisme qui sont beaucoup plus nom-
breuses que ne le pense M. R. Le rituel oral et même les
rites manuels en sont imprégnés. Jusqu'à présent, les auteurs
étaient partagés sur cette question. Les uns soutenaient l'im-
portance de l'influence hindoue; les autres nous présentaient
des documents, pour ainsi dire, expurgés. Nous craignons
que M. R. n'ait été un peu de ces derniers. M. M.

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importantne nouscsl pus encoreparvenu'.

III. SYSTÈMES
RKMUIKCX
.NATIONAUX

par MM.llmn, »r.Vt.u:r.i>tIli-mr.

LE P. A. JAL'SSËN. – Coutumes des Arabes au pays de


Moab. Paris, Gabalda, 1908, p. VIU-148,iii-8°.
A. MUSIL. – Arabia Petraa. III. Kthnologùcher lieisebe-
richt. Vienne, Kaiserliehe Akademie der Wissenschaften
(Holderl, 1908, p. XV1-8S0,iu-8".
Le cadre géographique de cesdeux ouvrages est à peu près
le même les observations des auteurs ont porté sur les popu-
lations, nomades ou sédentaires, (lu pays de Moab et du
Nedjed. Ce sont deux hous livres, qui se complètent l'un
l'autre. Celui de l'explorateur autrichien se distingue par la
sobriété et la précision M. M., a soin de localiser exactement
ses observations il a recueilli bon nombre de chants et de
poèmes et il les transcrit et traduit intégralement, La descrip-
tion du P. J., moins rigoureuse souvent, est par contre plus
colorée, plus vivante, plus riche en détails concrets ce frère
prêcheur s'est fait vraiment une àme de bédouin; il a le sens
des choses dont il parle. J'ajoute que les deux auteurs
sont également libres de préoccupations tendancieuses ou
théoriques ils ne disent que ce qu'ils ont vu ou entendu eux-
mêmes. Nous reudrons compte icide la partie de ces ouvrages
qui a trait à la religion; les données relatives à l'organisation
sociale et audroit seront analysées plus loin.
Les Bédouins ont été de tout temps réfractaires à la propa-
gande musulmane aujourd'hui même, malgré la conquête
ottomane et malgré les efforts des missionnaires, l'Islam n'a
pu s'implanter au désert. Sans doute la croyance en Allah
est répandue dans toute l'Arabie Pétrée mais elle y reste
assez platonique. Le nom d'Allah revient sans cesse, non
seulement dans les cérémonies, mais dans la conversation
courante; c'est qu'on ne craint point de le profaner; même le
serment prêté devant Allàh est un acte sans grande gravité
et de peu de valeur. Allah est trop lointain, trop universel,
trop dépourvu d'attaches locales pour inspirer une émotion
sVvrÊMK-
HKUiilKl'Ji-NATIO.V.U'X 101

profonde et décisive i J.. )».4S7sq., p. H1 J ;| p. 308 Quant


aux exercices de la piété musulmane, tels que le jeûne, les
prostrations rituelles, lu prière compliquée et restée, ils
répudient aux nomades restés indépendants; ils n'ont que
faire de ces manières étrangères et citadines, de ces con-
traintes humiliantes (J., p iH[i sq.; M., p. 227 sq.). Les
fellahs, aucontraire, s'en accommodent fort bien ils affectent
mômesouvent un grand zèle pour l'Islam ou pour l'une des
confessions chrétiennes; ce qui ne les empoche pas de garder
fidèlement les croyances et les rites de leur ancienne religion
(J.. p. 841 M., p. i»i.r.
Les véritables maîtres spirituels de l'Arabie Pétrée sont les
saiuls, les ancêtres et les djinns. Encore ne faut-il pas exagé-
rer la portée de cette classification. Kn réalité, toutes ces
ligures uutliropomorplik|iies se détachent, avecplusou moins
de relie!, sur un foud commun. L'Arabe, uous dit le P. J..
fp. 360 vit sous l'impression conslanled'une force supérieure
qui l'environne, (lui lui imposele respect d'elle-même,qui le
protège ou lui nuit. Cette force ditluse se manifeste surtout en
des points détcnniui's tombeaux, sommet des montagnes,
sources, arbres, rochers, etc., tous endroits sacrés, protégés
par des interdits, doués de vertus bienfaisantes, marqués pour
le culte. Chaque lieu saint est attribué ù un être personnel,
maître et seigneur de la place m, dispeusateurdesgrâces ce
maître est parfois un véritabVçdieu, héros de l'Islam ou saint
authentique; ailleurs, c'est uu (nort illustre, vaillant guerrier
nu puissant UiauinuturgR; souvent ou secotileute d'un vague
esprit ou d'un saint anonyme à la personnalité pauvre et
abstraite telles les saintes, ou filles, ou fées des sources
'J., p. 302, p. 321 M., p. 330), tels les saints et les espritsqui
« habitent dans les brandies et les feuilles des arbres »
J., p. 332 sq.: M., p. 321sq.). Toujours, c'est la présence
manifeste d'une énergie surnaturelle qui suscite la croyance
en l'être spirituel, sujet de celle énergie.
Pourtant, ces dilïérentes classes de personnes sacrées, si
elles participent d'une même nature, ne se confondent pas
absolument.L'ancêtre, qu'il soit un simple héros ou le père
l'-ponymcdu clan ou de lu tribu, e.sltoujours uni par les liens
du sang à la coinimuiaulé de ses adorateurs, tandis que le
saint a pour dévots les voisins de son sanctuaire ou les pèle-
rins quesa renommée a attirés. Le culte des ancêtres est un
culte de clan; celui des saints a une base territoriale. Aussiles
K. DriikiiKiu. – Amii'i' viri.,1.. t'.iOli-liiU'.l. Il
102 i. axnkk -ociouiiiiijn:, liiuti-i'MW

saints régnent-ils » peu près exclusivementparmi les (cllàlis;


au lieu (tue les Bédouins ue connaissent guère que leur*
anciMres(J., p. 301 si[.; M., p. 1-ÎU8,p. :I21J).L'islamisation
plus avancée des premiers n'est pas ici seule eu euu.se; il
faut tenir compte surtout du caractère différent i|iie prend
l'organisation sociale pur suite du passage de lu vit; nomade,
pastorale et guerrière, à une existence rangée, sédentaire et
agricole
A cette première dillérvuee s'eu rattache étroitement uuf
autre. Le culte des suints duuue l'inipressiou d'une piété
irrégu lière, sporadiqueetanarchique'; au lieu que, chez les
nomades, nous rencontrons, soit à date ll.ve,soit en des occa-
sions intéressant la commuuauté entière, des céri'tnouies
publiques et ollicielles où lu cheikh otlicie pour le compte de
tout le groupe (J.. p. 315 sq., p. 355, p. 388, p. 3(53:M.,
p. ïiï, p. 331 sq., p. UîUsi|.l. Les conditions de la vie au
désert fout (tue la vie collectivea gardé chez les Bédouins une
grande intensité et que l'ancienne ossature sociale y est restée
à peu près intacte. Au contraire, chez les fellahs, qui oui
rompu avec leur mode d'existence traditionnel et cherchent
un appui chez des puissances extérieures à leur société, nous
avons affaire à un système social et religieux en pleine
décomposition.
Quant aux djinns, on nous les décrit cornun; des esprits ter-
restres ou souterrains, malfaisants de nature, apparentés aux
serpents, fréquentant surtout les lieux solitaires et sauvages,
capables de prendre possession des hommes et des bètes ij..
p. 318 sq.. p. 387 M., p. 308. p. 319 sq., p. -413).Ce sont
des forcessurnaturelles insoumises, dont l'homme ne s'occupe
que pour les teuir à distance ou les bannir. Le plus souvent,
les djinns se bornent à terrifier les passants par dessillle-
ments et des apparitions, sans demander ni recevoir de culte.
Aveceux, nous sortons du domaine de la religion pour entrer
dan» celui des contes de fées.
Ainsi les diverses catégoriesd'êtres surnaturels expriment
différentes espèces du sacré elles correspondent à des modo
et à des degrés divers d'intégration religieuse.
Acoté de ces enseignements d'ordre général, ces deux livre?
nous apportent une foule de faits instructifs. -Signalonssim-
plement une description assezcomplètedu système sacrificiel,

Cf.Unlierl..Ihii-
IMmiU'C
t VIII.|i. îiOs.-,|.|.
sïSTftlIKS IlKLIiilRUX .NATKi.N'AL'X 103

caractérisé surtout par l'emploi du smig de la victime iJ.,


p. 'A'il si).), des renseignements intéressants sur les rites
agraires fenlerrement de lu dernière gerbe, « le vieux », J..
p. 2Msq., M., p. HOI procession féminine de la « Morede
la pluie », J., p. Mil sq.. M., p. S sq.) «t sur l'oblation des
prémices(J., p. 304sq. M.,p. âWîsq.j. Dutotémisme,nulle
trace certaine on no saurait tirer argument ni des rares
nomsde tribus à signification naturiste (J.. p. 10", p. 1 10), ni
des interdictions alimentaires(J., p. st\. M., p. liiU sq.y,
ni des croyances relatives aux animaux M p. 278, p. :JK3;
M.,p. li>, p. tei). «. H.

KAHLMAHT1. – Die Religion des Alten Testaments


unter den Rellgrionen des vorderen Orients. Tûbiu^eu,
J. C. B. Aiohr d'au] Siebeckj, 1900,p. VH-X8.

C'est l'introduction du GoinineuUiirede l'Ancien Teslameiil


que M. Marti vient de publier en collaboration avecplusieurs
exégèles allemands. L'auteur y résume révolution de la reli-
gion d'Israël. Celle-cia passé par plusieurs phasessuccessives
qui sont ainsi définies religion des nomades religiou des
paysans religion des prophètes religion de la Loi. Les deux
premières sont en relation étroite avec l'état social et écono-
mique du peuple hébreu aux difîérentes périodes de son his-
toire. La troisième marque la réaction de certaines individua-
lités contre les croyances et le culte collectifs. La dernière
représente une sorte de compromis entre la religion populaire
et celle des prophètes. Kilodoit son triomphe à la crise de
l'exil qui arrêta le cours de la vie normale d'Israël et permit
sa reconstitution sur des bases nouvelles. Pli. dk F.

T. K. CIIKYNR.– Traditions and Beliefs of Anoient


Israël. Londou, A.and G. Black, HI07,p. XX-S'JI.
M. Cheyne s'est constitué le champion de la .VurlhAnibiun
Iheonj, qui prétend expliquer les traditions et la religion
des Israélites par leurs relations avec la race des Yerahméé-
lites, dont l'inlluence s'étendit depuis l'Arabie septentrionale
jusqu'en Clialdée et eu Mésopotamie. A la théorie, au jauni 'nui
classique, qui découvre partout des empruntsfaits a laChaldée
par les Sémites occidentaux, il en oppose donc une exacte-
ment contraire et s'efforce de la justifier par t'élude des
164 i.vnxke >rn:ioi.o(!igt'K. iWo-lui»

bibliques, le sens primitif des noms qu'ils citent et les


multiples corrections qu'il est nécessaire, d'il près lui, de
faire subir aux textes. Nous ne pouvons suivre M. C. dans
les détails de sa crititlue exégétique. Peut-être serait-on eu
eu droit de lui reprocher lu facilite aveu laquelle il inodilie
certains mots, sous prétexte qu'ils ont été déformés par les
scribes et les copistes. Quant à la théorie elle-même, elle ren-
ferme il coup sur une part de vérité. Les réfutions desHébreux
avec les tribus bédouinesdu désert arabique, relations de cou-
tact et de parenté, ont du jouer un rôle dans l'évolution de
leurs croyances et de leur culte. Si grande qu'ait pu être sur
eux l'action des civilisations de Habyloneel d'Assyrie, il serait
faux de négliger entièrement ces autres éléments, sur l'im-
portance desquels M. C. insiste avec raison. Comme toute
réaction, celle-ci va sans doute trop loin. Mais, daus l'état
actuel de nos conuaissauces, il était utile qu'elle se produistt
et préparât la voieil des recherches nouvelles qui seules appor-
teront unesolution définitive. Pu. jjk F.

15.UAKNTSCH. –Altortentalischeruudisraelitischer Mo-


no theismus. Iv'i'kW'ort sur Rectiioiuler Euluirktuiujsge-ïchi-
ehllirhen .luffummyder imulilixrhen Heliyimwjesehichlt.
Tubiugeii, J. C. Il. Molir<l»uulSiebeeki, 1000.
Ce petit ouvrage est une contribution nouvelle à l'étude des
rapports eutre la religion des Israélites et celle des Cbaldéeus.
11porte tout entier sur la comparaison qu'on peut établir entre
le .aonothéisine hébreu et uu monothéisme problématique
iissyro-babylouien. M. li. se demande d'abord si un tel
monothéismea existé. fl ue le trouve ni dans Ja religion popu-
laire, ui dans la religion d'individualités exceptionnelles qui
uflirineut leur piété dans les fameux psaumes de pénitence.
Seule, la spéculation théologique des collèges sacerdotaux
parait avoir abouti à une sorte de doctrine ésotérique qu'on
pourrait qualifier de monothéisme. Pour elle, eu ellet, les
différents dieux ut* constituent pas tant des êtres indépen-
dants que les manifestations partielles de la grande puissance
divine qui s'exerce dans ta totalité de l'univers et plus spé-
cialement dans les lois qui régissent le cours des astres.
M. B. montre ensuite comment le monothéisme des Israé-
lites se distingue nettement du précédent par sou caractère
plus religieux que philosophique, plus pratiqueque théorique.
SYSTÈMES
IlBUtitXl'XNATIONAUX ÎM

Hn'est pas le privilège do quelques initiés, mais une véritable


propriété nationale. Ce monothéisme doit sou origine à la
réforme mosaïque, qui, tout en s'appropiïunt divers éléments
qu'elle trouvait dans les religions contemporaines, leur com-
munique pourtant un caractère spécial que le prophétisme
hébreu accentuera de plus eu plus. Pli. m K.

J. TOFJTAIN.– Les Cultes païens dans l'Empire ro-


main. Première partie Les Provinces latines. I. Les
cultes officiels les cultes romainset gréco-romains, i Biblio-
thèque de l'Ecole des Hautes-Études, Sciences religieuses,
XXl. Paris, Leroux, 1907, V-Mi p.. iu-K".
Dans une courte préface, M. Toutuinofire à la science des
religions l'appui moral de l'histoire des religions, aux lentes
recherches et aux patients détours. Vouésn la première, nous
ne faisons pas fi, bien loin de lu, de ce que la seconde nous
apporte. Puisse l'auteur de ce livre achever de labourer sans
hâte les recueils d'inscriptions! L'wuvre est lente et la mois-
son sera précieuse – (Je que M. T. appelle les cultes
païens de l'empire romain, c'est l'ensemble des cultes non-
chrétiens if n'en faut pas conclure, cela va sans dire, qu'une
part très importante est assignée, dès le début, au christia-
nisme, dans la vie religieuse des provinces romaines. Ces
cultes se divisent en deux séries. Les cultes olliciels sont les
cultes de Rome, de la Triadecapitoline, de la personne impé-
riale et delà famille impériale. Cescultes sont répandus a peu
près égalementpartout, célébrés avant tous les autres par les
pouvoirs publics. Ils ont provoqué des groupements, ils ont
donné lieu à des assemblées dont l'importance a été considé-
rable dansla vie provinciale.Ils furent, dans l'empire, un des
facteurs de la centralisation et de l'unité. M. T. appelle
non officiels les autres cultes, faute d'un meilleur tenue il
est. eueffet, dillicile de dire que le culte de Mars à Homen'ait
pas été un culte ofliciel. La statistique de ces cultes révèle des
particularités provinciales. Le Norique adore Neinesis: la
Uaule, Mercure. M. T. constate sans peine que les magis-
trats romains n'ont pas exercé de pression olficielle eu
faveur-de ces cultes. I'eul-êlre nous montrera-t-il, dans un
autre volume, qu'ils se sont répandusà la façon même de la
langue latine et que la répartition des dieux romains dans
les provinces de l'empire correspond en bonne partie à l'état
Ilili I.VNWKK
MiCliil.tililytK.l'JOU-UHJ'l

antérieur dus cultes uuloclithoues, dont les dieux oui éléaltu-


blésde nomslalins. II. 11,

F. CU.MONT.– Les religions orientales dans le paga-


nisme romain (Annules du Musée(ïtiiiuct, lliblu»tlièi|tte«le
vulgarisation, l. XXlYi.l'uris. Leroux, 190". XXH-333 p.,
in-»".
Nous retrouvons, dans ce petit livre, des leçons que M. C.
a faites au Collège de France eu ÎÏHK-HHK». Il s'y demande
deux choses: ce qu'est devenue danssa sénilité la religionutil
ciellede Moineet ce que sont devenues, sous l'empire romain,
les religions de ses sujets orientaux. La juxtaposition du paga-
nisme gréco latin vermoulu au jeuue christianisme dans uni*
môme société demande explication- Sans aller jusqu'à dire
que le christianisme est le produit de toutes les religions et
de toutes les civilisation» uuies de l'antiquité méditerra-
néenne, on peut reconnaître que. lad illusion, dans l'empire, des
ancienucs religions orientales avait préparéle terrain ({lie le
christianisme a conquis.
M. C. fait remarquer que l'ancienne religion romaine, mal
restaurée par Auguste, n'était pas uue religion de l'empire. Si
l'empire avait uue religion commune, c'était le culte impérial
qui. lui-même, était originaire d'Orient, lui face de la char-
pente vide et hrankinte de la religion romaine, les religions
de l'Asie Miucure, de la Syrie et de l'Egypte restaient vivantes
et florissantes. Non seulement la conquête ne les avait pas
entamées, mais les pays d'Orient n'ont jamais peut-être
connu telle prospérité que sous l'empire romain. Leurs reli-
gions y sont restées aussi vivacesque la souche sur laquelle
elles ont pousse.
Il faut corriger le trop de netteté que M. C. apporte à ce
tableau de la persistance des vieilles religions. Kilos étaient
les mêmes, mais elles étaient autres. Kllus étaient, pour ainsi
parler, dénationalisées, par conséquent aptes à produire des
églises prosélytiques. C'est co qui est arrivé et ce que M. C.
nous décrit. Pour comprendre l'état religieux de l'empire
romain, il faut nous figurer plusieurs églises, vivant côte à
cote, eu assez bonne intelligence, ayant souvent les mêmes
adhérents, et. en face d'elles, une religion ollicielle purement
formaliste. C'est un état religieux analogue ù celui que pré-
sentent, aujourd'hui, la Chine et notre Toukiu.
"Y>TKSIE-; IIKI.UilKU> XATUlNtl.'N I1'7

Comment la religion nllkielli) se coni|i'irl;iiL die il l'égard


ik's ii utres cultes?Klleleuriivnil ouvertlu porte dès la seconde
guerre |iuiiiiiuu, eu iiisUlimut à Hume un mille de la .llybfelu
phrygienne. Sons Sylla, Ifi culte de la dresse unatolieiine,
Mii, sous le nomde Bellone,fut, l'objet d'une semblableinsli-
tutioii. Les cultes égyptiens se glissèrent a Homopar nue lolé-
ranee, qui s'abritait derrière l'analogie (les mesureslégales
(irises eu faveurdescull.es précédents. Lt-s cultes syriens, qui
jouirent d'une très haute faveur, furent autorisés ii'-w /auto
par des fondations ollleielles.
M. C. passe en revueces religions prnselytiques de l'Orient.
Commençant par l'Asie-.Miueure,il arrive ensuite en Kgypte,
puis en Syrie, puis en l'erse. Il trace l'histoire ancienne
de chacune de ces branches de religion, puis il suit leur pro-
pagande dans l'empire. Pour le culte de Millira, il n'a qu'à
se résumer lui-môme. H caractérise fort nettement les parti-
cularités de chacuned'elles, et les ça usesde leur succès. La
l'hrygie apporte à la vie religieuse de l'empire un mysticisme
sensuel et un ascétisme passionné; l'Egypte, avecune dogma-
tique infiniment ténue, flexible et prête à tout. les plus
extrêmes complications et toutes les splendeurs du rituel la
Syrie l'emporte par l'iinpersonnalitû de ses finals qui se
prôlent à l'éclosioudu monothéisme solaire, et aussi par l'idée
île la pureté le tiiithriacisme, par la discipline morale et par
l'attrait dogmatique du dualisme.
A cet expose M. (' ajouteun chapitre sur l'astrologie et
la magie. En ce qui concerne la magie, dont il retrace égale-
ment l'histoire, nous fait le grand honneurd'utiliser beau-
coup un de nos travaux. Xoas eussions préféré qu'il analysât
avec plusde détails ce que les documentsqu'elle a laissés nous
apprennent sur la pensée religieuse. Ils sont nombreux et
'le bonne qualité, tandis que de la religion nous ne connais-
<oiis guèrequel'écorcp. La magie n'est, eusomme. que l'abus
de la religion. La magie d'alors, toute farcie d'images reli-
gieuses et de dogmatisme, toute en purifications, en propi-
Mations,on exercices théurgiques est une instructive contre-
laçon du mysticisme un peu glissant vers lequel semblent
avoir peaciié les aines religieuses.
Pour compléter le tableau tracé par M. C. on lira avec
iriiit le livre de M. \V. Uousset dont nous rendons compte
plus loin.
II. II.
168 l'aNXKK
iiiiHuLo.iigi'K. 1MUK-IWI9
KI.1XDKHS 1»KT»IE.Thé Religion of anoient Egypt. Lundi-
•instable, 1900, p. 78, in-li.

AMKI.INEAt;{K.}. – Prolégomènes à l'étude de la religion


égyptienne. Paris, Leroux, 1908. 53» p.. in-8". Unchapitre sur
!< totémismeen Kyyplc rattaché au culti- des anciMits.)
KIUZKH(J, t; Folk-loreiatheold Testament. Mélange*Tylor,
p. 101-171.
CoiiK(S. A). The religion of anoient Palestine in the second
Millenium B. 0. in Un;light ol' Arcliu'ulufiyand lin; Inscriptions.
Londres,A. Coiislable, JU08,VIJJ-lîl p., in-8".
SKII'WITH ((;. H. The origins of the religion of Israël.
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SCIINKIDKH(H. – Zwei Aufsaetze zur ReUgionsgesohiohte


Vorderasiens. Di<: lindiidrfumj ttrr Jahureligiimumider&ltmemgen:
ilin Entwkkluiijidur lîiluainesclit/iM. l.oipziiti;!1 Scmilist. Studii-n
de Fischer «l /.itiimcrn. Luiptiit, Itiiu-iclis, l'.iuu (rattache aux
phi-noinèni's île migration, |i-s inoililicîitioim du culte ol de In
]i!f,'ende).
MAHtKlt (F;. – Voelkerkundliches aus dem Alten Testament.
ThJ.'se, Erhuigi'ii. IU07.

KIIDMA.NS. – Alttestamentliche Studien II. \'nnietchichte Israël*.


iii«ssen, Tôpeltnaiin.

KAATZS.j. – Das Wesen des prophetischen Judentums. Kk


Ileitr. z. VersIUml.il. Prophète»,llciliu, l'uiipclaiifi', 1U07, 10U,
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in-tS".

VOLKil' – Mose. Eiit Itcilr. z. l'iitersueh, liter die Urspriinye dur


itnul. Hetiy. Tubiujien.Moiir. IWJ7,iu « iulliifiiccsl'-gypliftiities;
a ëli: fini critiqui*}.

JEUF.MIAS.– DasAlte Testamentim Lichte des Alten Orients.


ïv- éd. l.f'i|j-/iii. Ilinrielis, IU00.p. XVI-iiîl,in-8r.

IIOI.TZMAXN A\ – Religionsgesohiehtliohes aus den Monu-


menta Judaica. Arch. f, Helii/iiuiiiritt.,X. IU07.)p. W.) s«j.

KIIIKDUKNUKH(M. – Synagoge und Kirohe in ihren Anfaen-


gen. Iterliu. V,, Kuirner. lOim,XXII-S47p.. in-8".
KHIKi;i:H :i' Hellenismus und Judentumim Neutestament
lichen Zeitalter. Mit eiue-tnOluim-iiri vmiH. Kiltf-1Srlirilt«n di-s
Inntitutum
f)clilz«:liiiiiiuirt *uI.oipui!.1. I. llcfl). l.i'lpzig. J. r. Ilin-
richs, 1008. i7 p., in-S".
SÏSTÈHKSHKUUIKL'Xf.NIVKI^.U.HÏi;- 1119

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K. Leroux.I9U7.V-178 p.. iti-8".
UlItUA.). – Die alte Religion der Tschetschenen. Milnu/w.
l'JOS.III, p 72'Jsrj..p. 1080 s<j.

IV. 8VSTÈMKS
KlvMiiltil'X
UXIVKHSAI.ISTKS
PauMM.IIkiitz«I us I'éi.u:k

WIN01SCI1(H).– Taufe und SUade im aeltesten Chris


tentum bis auf Orlgenes, Kin Hcilrag zur aUchrMlicliea
Ungmengeu-hklttcTflbiugen, Mohr,\'M, VHl-USi p., in-«'.
Les reclicrcliesde M. ont eu pour origine un livre de
Paul Wernle, paru en 1H97,l)?r Chrixt tuut ilic Siinth1hti
l'aulut. Wernle s'y elTon.'iiild'êlablir que, pour saint Paul,
l'élat de chrétien et Je préhé sont strictement hic»rnp«tifj|es.
M. W. reprend à son compte cette llièse hardie et très com-
battue mais il la remanieassez profondément et surtout il
en change le caractère, Il ne se propose pas comme objet
d'étude une constructionsubjective, un paradoxe isolé, dout
il faudrait chercher la raison dans le tempérament exalté
d'un apôtre. Les idées pauliiiiennes font, û ses yeux, partie
d'une tradition: d'autre part, elles sont étroitement liées à
une institution religieuse fondamentale, au baptême. Ce sont
fies représentations traditionnelles el collectives que ce livre
veut reconstituer et suivre dans leur développement.
AI. W. cherche dans le judaïsme le point de départ de
cette tradition. Ala conception populaire cl ritualiste d'une
l"°
i.'axnék soufii.cuiiijti:. iuuii-i9uu

1':l'o" .h.n"H__lt 1 »

pénitenceoucusiimneltuou périodique, i|iii abolit les péchés


particulier» mesure qu'ils sout commis, les prophètes, sur
tout Kzéchiel, opposentl'idée d'une conversion totale et déli
nilive. qui inaugura une vie entièrement conforme à lu Loi
et qui détruit le péché dans son essence, La transformation
radicule du pêcheur eu un juste, quelquefois réclamée des
hommes, est le plus souvent attendue de l'intervention de
Dieu, qui. peu de temps avant le Jugement,donneraà l'homme
uu cœur nouveau et lui rendra son innocence
première. Le
théine d'une pénitence finale, prélude du
replie de Dieu. est
reprise! développépar la littérature apocalyptique il domine
la prédication de Jeau-Uuptiste et de Jésus'lui-môme.
Dans lu chrétienté pauliuieuue. l'utopie
esclmlologique
devient réalité vivante. La mort et la résurrecliou du Christ
ont mis fin au règne de la Lui et du mal l'ère messianiquea
commencé, où le péché u'a plus de place. Les chrétiens,
pré-
mices de la nouvelle Jérusalem, forment une communauté
d'élus, parfaitement innocents commele nouvelAdam qui les
a devancés au ciel sûrs que la lin des
temps est proche, ils
vivent suspendus dans l'attente dune
Ihéopliauie qui con-
sommera leur gloire.
Le baptême actualise pour chaque individu la
puissance de
saint qu'ollre à tous le sacrifice du dieu Les Juifs connais-
saient déjà la vertu purifiante et régénératrice des ablutions
rituelles et du bain des prosélytes. Mais cet acte prend une
tout autre gravité dans une communauté qui ne se recrute
que par l'initiation et qui, par elle, confèreà chaque néophyte
le bienfait de la Passion, Kuentrant dans le
corps des fidèles,
l'initié subit une transformation réelle de tout son
être, un
changement complet de nature, qu'expriment une foule
d'images et de rites d'allure très primitive mort du vieil
homme, renaissance sous les espèces d'un petit pufnnt.
renonciation à Satan, adoption- par Dieu. destruction de la
chair, infusion de l'Ksprit-Saiut, illumination, etc. Au sortir
du baptême, le chrétien participe a l'essence ilu
Christ i| est
littéralement uu saint: il doit et peut l'être.
Ces conceptions survivent à la génération
apostolique qui
les a vues irallre. M. W.les suit à travers la littérature
chrétienne des trois premiers siècles où, sous des formes
diverses, elles sout partout présentes. Chezles grands Alexan-
drins, Clément et Origèue, elles se combinent avec les con-
cepts de la philosophie grecque, en particulier avec la théorie
>wi;su-> HKi.iiitKiA fMVKc.ui.ri;- |;t
a
-luicieuue du KilLW.MflK
U?dfl sage. Mais l:i
lu !lMI'i:i<J:mii<i' ri, ^nrriltllfic iim
^ersislaucr<i. formules nu rfuit
duit.
pas (aire illusion, Lu valeurabsolut.' ntiril tn-e un baptême ne
rorrespoud plusau sentiment que la cuihi iimauté chrétienne
.1 île sunétat et di' soudevoir.l,u dustninti'i; dupéchépar lu
ilhrist, la saintetéparfaite duchrétien,i'i -,< :iuerjl dusthèmes
.1 spéculation théologique, un idéal cnnvi niiouuel d'autant
plus rigoureux qu'il est plus platonique. Si ta mission con-
tinue de s'inspirer d'une doctrine «diiplir à ses besoins, la
prédication,la direction spirituelle des d'inerlisse réclament
de principes dilléreuts.
En effet, la conception radicule du bi1 lénu* pose eu des
termes insolubles le problème du péché du chrétien ou
plutôt, elle le résout d'une manière inaecepUlile. Le fidèle a
puisé, lors du baptême, la miséricorde divine ses péchés
intérieurs lui sont remis, tuais tout péché futur lui est inter-
lil s'il peclie, il a cessé ipwfacto d'être chrétien et l'Kglise
nepeul plus rien pour lui. DéjàPaul rejetait ces conséquences
îles prémisses posées par lui eu présence du chrétien pé-
'litiur, il agissait comme si la grâce de Dieu était inépuisable
"i pardonnait les péchés même après le baptême. La thèse
litroriste parait de plus eu plus intenable, il mesure que la
''Mininutiauléchrélieiiues'étcudetchaugedecarnclère.L'tëglise
i -nonceil imposera tous ses membres une sainteté absolue
"i continuelle: elle se contente, sauf à certains moments
«.innés,d'une pureté relative que les rites renouvellent pério-
diquement ou réparent quand elle a été altérée. Les péchés
v.'iiiels, tenus pour inévitables, sont gtifUsainnientexpiés par
:a récitation quotidienne du Pater et par les bouuesonivres.
ijuoiqu'ulle proclametoujours que le baptême ne peut être
répété sans sacrilège, l'I^lise institue, pour lus péchés les
plus graves, la péuitence solennellequi équivaut à un second
liaplùine.L'ancienne « psychologie» dualiste el rigide, qui
m.1voulaitconnaître que le pécheur et le juste, fait place a
îles conceptions plus souples et complexes le chrétien ordi-
naire n'est plus un saint, c'est un prufiiuo de bonne voloulé
|ui tend versla sainteté sans y prétendre.
\Hmlors, le baptême a cessé d'être la coupure radicale qui
disait succéder il une vie toute charnelle et terrestre une
mire vie purement spirituelle. Pour conserver à l'initiation
:lirélieiino son caractère primitif, il eût fallu la dilléror
jusqu'à la dernière extrémité, la faire coïncideravec la sortie
réelle de ce mondeet IVulrée dans l'éteraité lecommun des
t-S<KK SOlîlOl.tMlyl'K. 1W0-IMIKI

chrétiens se serait contenté de l'état de catéchumènes,


d'aspi-
rants au baptême de {ait, la procmxliHulioImptimiu été
longtemps pratiquée et admise. Mais l'élise a penché de
bonne heure vers le parti contraire elle a
préféré renoncer
au caractère absolu de la consécration
baptismale plutôt que
de laisser la massedes chrétiens eu dehors de su
communion
elle a fait coïncider le baptême avec leutive dans ce monde.
C'était décidémentreconnaître que le
baptême uecoiuiuuuique
pas un état de perfectionachevé, qu'il n'est que le
point de
départ d'un progrfcsindéfini vers un terme inaccessible. La
sainteté intégrale, l'abolition complètedu
péché sont redeve-
nues ce qu'elles étaieut chez les Juifs, un idéal
qui ne peut
se réaliser qu' « à la fin des
temps » ou après la mort de
l'individu.
L'évolution que décrit AI. W. n'est qu'un aspect
particu-
lier de la transformation profonde subie
qu'a la communauté
chrétienne aux premiers temps de son histoire. D'une
petite
secte d'illuminés, tendue vers une
catastrophe mystique,
douée d'une puissance d'expansion formidable, est sortie uue
vaste église qui, à forced'attendre le retour du
Seigneur, s'est
implantée dans le monde profane pour le dominer et le sanc-
tifier. Ce changement survenu dans la structure et la tension
religieuse de la société chrétienne détermine, dans la cous-
cience collective, un changement de
perspective, un déplace-
ment de l'Intérêt le présent, le rée}, le relatif
passent au
premier plan l'absolu s'éloigne dans la région des pieuses
espérances. D'autre part, les préoccupations de la propagande
ne dominent plus seules l'élaboration du
dogme; celui-ci
doit satisfaire aux exigencessouvent contraires de la vieiuté-
rieure de l'Église. Enfin le baptême, en môme
temps qu'il
s'universalise, devient un acte moins fondamental il perd de
son efficacité mystique et impose au fidèle des
obligations
moins strictes.
Peut-être forçons-nous un peu la pensée de l'auteur en
l'exprimant eu ces tenues; mais c'est bien vers une théori.-
sociologique qu'est orienté son travail. M. W. fuirait pu sans
peine donner nue portée plus générale à ses résultats, eu
insistant davantage sur l'étroite parenté
qui existe entre Je
baptême chrétien et l'initiation, telle que la conçoiventh-s
autres sociétés religieuses de la mémo
époque. D'mitro part, il
serait intéressant du comparerles représentations
sur le baptême avec celles qui se sont formées primitives
plus lard au
SVVIKMK- HKUUIEUX CM\|;l! AUSÏKS l":i

^tijet de lVnlrée dans certaines sec'.cs«'urétieniiesou dans les


ordres monastiques. On arrivera'') sa is doute ainsi ù consti-
lueruu type de société religieuse ui'limnent tranché, dout un
des caractères dominants sermt importance primordiale
attachée au rite;d'initiation.
Non seulementht science des reli^ionsa beaucoup à prendre
dans cette « contribution ù l'histoire du dogme chrétien»; mais
même des recherches qui paraissent extérieures a la socio-
logie religieuse y trouveront une ample et profitable matière.
Nous conseillons, par exemple, de méditer cet ouvrage, au'
sociologuequi voudra traiter à sa manière du vieux problème
philosophiquedes rapports de la théorie avec la pratique et
l'expérieuce, de l'idéal avecle réel. l{. II.

HENRI I)E (JKNOL'ILLAC. – L'Église chrétienne au


temps de saint Ignaoe d'Antioche. Paris, U. Uenucliesiie.
1907.
Cet ouvrage est uneintroduction aux épîtres d'Ignace d'An-
lioche, non point une introduction critique, puisque l'auteur
tient leur authenticité pour acquise, – niais uue introduction
historiqueet dogmatique. Nous n'entrerons pas dans ledétail
ilcsquestionsquel'abbé de Genouillacétudie. Il semble préoc-
cupé surtout de démontrer que saint Ignace forme l'uu des
principaux chaînons par lesquels l'Église, telle quele catholi-
cisme l'a constituée, se rattache aux traditions du christia-
nisme primitit. Tant nu point de vue de la fui qu'au point de
vuede l'organisation, il y aurait entre les débutsde la religion
chrétienue et sou état actuel une sorte d'évolution continue.
Cecise vérifierait spécialement pour ce qui concerne ta place
et le rôle de l'épiscopat. Cette thèse générale est entourée
d'une série dedigressions de tous genres sur les sujets les plus
divers, Il en résulte une difficulté très grand» de se faire de
ce livre uneimpression d'ensemble. Les premiers paragraphes,
qui concernent le milieu socialet religieux auquel le christia-
nisme dut s'adapter eu Asie Mineure, permettaient d'augurer
mieux de la méthode de l'auteur. Comme il l'a très justement
renia rqué,après llarnack et d'autres historiens, dans ces pro-
viuces ou la vie municipale était particulièrement intense,
les églises se modelèrent sur le cadre de la cité. C'est là
qu'elles trouvèrent les principaux éléments de leur organisa-
tion et de leur hiérarchie. Ainsi les premières communautés
'•' Il I.'A.\XKE M)i:li)l.milyL"K. l'.IUli lUIj'l

clrn-tienues avaient c'opié les synagoguesjuives; ainsi, plus


tard, le régime poulifit<il romain devait iidoptcr les procédés
nu gouvernement impérial et substituer son autorité à
lu
sienue.
Nous eussions souhaiù qiio M. de C. insistât
sur létal religieux de l'Asie Mineure au début du davantage
n« siècle.
Une étude plus approfondie du culte de lu déesse
syrienne el
des cultes phrygiens éclairerait certainement
plusieurs points
obscurs de l'évolution des croyances et des
pratiques chré-
tienues. Signalonsenfin une légère erreur à la
page iii. M. de
<>.paraît distinguer, dans ce
qu'il appelle « les saints de la
légende païenne », Pérégriims et Protée. 11s'agit, eu réalité,
d'un même personnage, comme il s'en convaincra
aisément
en relisant te traité que Lucien consacre à sa mort.
Ph. m F.
PKLEIDBHKH (0.. Die Entwioklung des Ohristentums..M.iu-
cln'ii, l.elimitnn.1007.IX-a~o
p., in-g1'.
HABlXSolix(M. Le Messianisme dans le Talmud et les
Midrasohim. Paris.UeilT.108p.. in-s-.
1JUNKMAXN (K.). -0esohiohte der Ohrlatentums als Religion
der Versoehnung u. Erloesung. I. >. Di«
Knlstelmncd Ali-
kalliulizismus.Li.-ipzi». l'JO*.
Oietiicli. in-8'.
PIO.NïEK(F. Die katholisohe Kirohe und die haeretisohen
Apostelgeschichten bis zum Àusgange des 6. Jahrhunderts
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lokyo. IflO-ï.IV-71. p. peliliu-1:» HMoir.-,lr-s seclcs <! <lu
dygmel)ouildliii|ueau Jnpnn.)

V. SVSÏKMKSRKUGIËUX
DKS(ilKJII'KSSKUONUAIIIES.
SKCTKs
l'ur MM.
Iliraiim.'I ne\'fuiX.

W. BOUSSET.– Hauptprobleœe derGnosls (Forschunpen.


zur Keligion und Utleratur des Alleu uud Neuen Testa-
ments, 10;. U.ittingeu, Vaudenhoeck und
Huprecht, 1 007
VI3JI8p., in-8".
C'est une image claire ei intelligible du
gnosticisme jiris
dans son ensemble que M. Kousset nous » donnée
dans c-i
sïMlïlIKSKKI.IiilKl'XDUSiinot'1'K» •.KCOXU.UKIis \"<

(«(client livre. Il admet, cola va sans dire, qu'il y a on gno.v


ticUma et guostieisiue il proposemômeune sorte »l«classifi-
cation des doctrines gnosliques, à laquelle il laisse toutefois.
de propos délibéré, quelque iudécisioii. Mais les documents
ol les doctrines particulières qu'ils fout transparaître ne sont
que les manifestations et les témoignais, qui dillereitl sur-
tout les uns des autres parce qu'ils sont isolés et détachés
de leur tige, d'uu même état d'esprit, d'une même vie reli-
gieuse. C'est la tradition, dit il. Uoussel. qui est tout, le fait
particulier n'est pas grand'chose. Lu gnose vit d'un petit
nombre d'idées fondamentales qui reparaissent toujours.
tantôt plus, tiinlôt moins. C'est donc la tradition du gnosti-
cisnie et non ses incarnations particulières (lue SI. Housse!
étudie.
Cette tradition ne l'intéresse pas par les singularités qu'elle
charrie; il veut montrer que, prise dans son ensemble, ratta-
chée à ses origines, analysée en ses éléments et placée dans le
milieu oir elle se perpétue, elle préseutedu sens et de la cohé-
rence. Quelle est la forme intelligible des idées fondamen-
tales du gnosticisnie ? quelle est la pratique religieuse des
uuosliques et quelles en sont les raisons? Voilitles problèmes
capitaux du gnostieisine. C'est l'examen méthodique et l'ex-
plication rationnelle d'un phénomène religieux que M. Bous-
si.'t s'est proposéde faire.
Mais de quelle sorte de phénomène religieux s'agit-il
.Mysticisme,leguoslicisine l'est sans doute. Mais.M. liousset
n'incline pas, ou incline moins encore que les aviiut-deruiers
de ses prédécesseurs, à le traiter commeun mysticismephilo-
sophique de souche platonicienne et alexandriue. C'est une
religion complète qui nous apparaît dans sou livre, religion
embryonnaire ou décadente, suivant le point de vue d'oi'i on
l'observe. C'est une variété religieuse plutôt qu'une catégorie
religieuse; c'est une forme de religion en harmonie avec un
temps et une société plutôt qu'un compartiment de religion à
l'usage des âmes curieuses d'émotions. Le gnosticisme n'a pas
été la religion d'une élite, mais de beaucoup. SI. Housse)
souscrit presque à l'opinion exprimée par Ni. Gruppn (drif-
i-ltmheMytlmUiiiie tuul Iteligionmiescliiclilr,p. 163}sur le grand
nombre des pauvres d'esprit qu'ont dit compter les gnos
tiques.
II est entré daus la composition de leur religion moins de
philosophie que de mythologie et beaucoup moins de uouveau-
ti
1 70 i.'annkk woii-iaoy
sui:n)i.o(iiQi'E.

tés que d'anciennes traditions. M. Bousset n'est


pas le premier
à le montrer et il rend hommage à ses devanciers,
qui, les uns
après les autres, ont déblayéquelque morceau des restes dan-
ciennes religions orientales (lui sont enfouis daus le guosti-
cisme. Celui-ciest le successeur des religions qui l'ont
pré-
cédé dans les lieux où il s'est d'abord étalé. Des découvertes
eucore récentes d'apocryphes, une
connaissance qui gagne en
précision de la religion iiiandéenue ont fourni de nouveaux
arguments. Il est probable que les manuscrits manichéens
trouvés au Turkestan chinois en apporteront d'autres. M.Hous-
se! en a déjà connu lit primeur.
Les doctrines gnostiques ont en commun, et c'est là
peut.
être le trait le plus apparent de leur cosmologie
mythique, la
représentation de sept puissances associées et superposées
dans sept régionsou demeures tHagées. A ces
sept puissances
correspondent les sept planètes, soit qu'elles soient iden-
tiques à ces plauètes, soient qu'elles y soient incorporées ou
renfermées. Cesont des démiurges ou des ordonnateurs de lit
création. Cesont aussi les gardiens ou les agents de la néces-
sité. Aces sept puissances en est ajoutée une huitième
qui est
souvent conçue comme leur mère, commela mère
par excel-
lence. Elle reçoit divers noms esprit, sagesse. Uarhelo,Prou-
nikos, elc.lJiius un livre intitulé Urxpruugde* Viiostinxiium
1807.1;Aniuvsurioloiiiriw; t. 1[, p. «Mi,, M.Anz avait indiqué
que le gnosticisme avait emprunté cette notion à la religion
nssyro-babylonienne, qui comportait un groupe de sept dieux
planétaires, régisseurs du monde. M. «missel, qui prétend
continuer le travail de M. Anz. commence son étude par cette
df l'hebdomade. Chez les Mandéens, les sept
puissances por-
tent précisément les noms babyloniens des planètes. 11 a
y
mieux le gnosticisme coutinuo le développement de ta reli-
gion babylonienne au point où elle était parvenue quand les
Perses s'établirent eu vainqueurs en Mésopotamie. Dans la
religion planétaire, deuxdivinités, à la findu deuxièmeempire
chiildéeu, avaient une position prééminente c'étaient Islilar
Vt;nus,iet Xebo(Mercure/. Ladéesse a grandi au
point de se
séparer de l'hebdomade. Quant au dieu, on sait quel rôle
Hermès a joué chez les gnostiques païens. Mais, observe
M. Bousset, les sept esprits planétaires sout, chez les
gnos-
tiijues, des démons, ou des demi-démons; ils apparaissent,
dans un mythe, qui se trouve très bien
développé dans ta lit-
térature rnandéenne.comme des puissances de ténèbres, vain-
VlftMKSMKI.KilKl.t
UKSiilt«l"l'E<SKi:ciNU.VIItE4 177

eues, fixées dans les planètes et associées par lu volonté du


vainqueur au gouvernement du inonde. Il faut l'expliquer.
Cette déchéance des anciens dieux planétaires est la suite de
la déchéance des Chaldéens vaincus et de leur religion. Elle
u'a pas seulement subi la contamination de la religion des
vainqueurs, mais, dans le syncrétisme qui est résulté de ce
rapprochement, elle a fourni les démons. C'est ainsi que le
dualisme des Persans s'est ajouté à l'ancienne religion eltal-
déeune; les deux éléments réunis forment la base du gnosti-
cisme. Telle est la thèse de M. Housset,
Knce qui concerne la doctrine des sept puissances, elle été
modifiée dans les pays hellénisés. L'oppositiondes esprits du
bien et des esprits du mal s'y est changée en opposition entre
matière et esprit. Les démons planétaires, attachés à la
matière, en sont devenus les démiurges. Ils ont de ce chef
regagné des rangs dans l'échelle des êtres, et, du mêmecoup,
la déesse qui était t\ leur lôtc.
Danscelle-cise sont confondues les grandesdéessesde l'Asie
Mineure et de la Syrie aussi bien que l'Isis égyptienne. Vu du
^es plus curieux avatars est l'Hélène, cette courtisane de Tyr,
dont Simon le Magicien aurait fait sa compague mystique.
M. Boussel croit que des spéculations hellénistiques sur
l'Hélène homérique et sou identité avec Hélène, sur les
voyages d'Hélène et le symbolisme lunaire, auraient collaboré
à la conception de cette singulière déesse Carc'est uue déesse.
Ivllt;estimpliquée dans un mythe de mariagesacre, qui parait
capital et a figuré dans lit liturgie. Enfin, bien qu'elle soit
surtout originaire de l'Asie Antérieure, elle a néanmoins éga-
lement des aflinités iraniennes.
Quant au dieu qui lui fait vis-à-vis, suprême, inconnu.
lumineux, il est surtout perse.
Ces deux dogmes de l'hehdomade et dit coupledivin forment
le principal de la doctrine des gnostiques proprement dits.
iiicolaïles, ophites, téshiens, etc. (p. 3lilsqq.i.
Elle comporte déjà une forte part de dualismepersan. C'est
ce qui la différencie surtout des philosophies de souche
grecque avec lesquelles elle a voisiné. Maisd'autres groupes
de doctrines guosliques ont conservé ce duulisme avec plus
de fidélité. Il se présente sous la forme ahsoluede l'opposition
de deux principes égaux, du bien et du mal, chez Kasilidc,
Hardesaneet Marcion. Mais des atténuations apparaissent et
le dualisme persan, d'autre part, tend à dégénérer en une
B. UMikiiKiM.
– AiiiiCm1sfil'iol.. l!dli-l90i. 13
178 L'ANNÉE
soCHiLOlIlutE.I906-I0OO

opposition du momie de l'esprit et du monde de la matière.


l'un bon, l'autre mauvais. Le dualisme se présente aussi sous
deux formes secondaires, qui ont. l'une et l'autre, des proto-
types iraniens, comme su (orme absolue. Lu première com-
porte un médiateur; tel est le rôle de Milhni. Lu deuxième
subordonne les deux principes opposés à un être qui les
domine: c'est Zenvanakarana, le temps infini. Celle doctrine
a été celle d'une secte iranienne, les Zenvaniles. l'«sl celle
que l'on aperçoit au travers des homélies pseudo-clémentines.
D'autres parties de religion iraiiieune ont «té absorbées par
les jinostiques. C'est, par exemple, la doctrine des éléments.
Les Perses ont passe chez les Grecs pour tulurer les éléments.
Les éléments, au nombre de cinq ou de sept. ont leur place
dans la cosmologiemystique du gnoslicisme.
C'est aussi lu figure du prototype de l'homme, l'rotuulliro-
pos, ou Anlhropos tout court, qui surgit, parfois sans raison
apparente, dans les liste» d'éons ou d'hypostases. Elle est le
reste, devenu inintelligible, d'un mythe mal conservé. Le
mythe en question est le mythe indo-iranien de la création,
par le sacrifice, du premier homme ou du premier être. Doce
premier être un deuxième est issu, qui est le Prolantliro-
pos. Ce premier homme est attire par la matière; il y tombe
et sa chute est le point de départ de l'évolution cosmique.
Puis il fait eftort pour sortir de la matière, dont il se dégage
par un nouveau sacrifice. Pareille suite de représentations
s'est rencontrée sans doute dans les mystères d'Attis. Des
passages obscurs des alchimistes gnostiques. du I'oimnndres
la supposentaussi. Elle apparaît dans ce i|ue l'on sait de la
doctrine des Naasséiiieus.
Cette imuge du premier hommeet de sa chute voisineaver
celle du Sauveur qui doit descendre dans la matière pour en
retirer l'étincelle qui y est tombée. Le mythe gnoslique de la
rédempiion u'a rien à faire avec le domine chrétien. La
rédemption gnostique se fait hors du temps. Klle est un épi
sodé de lu cosmogonie. Il y a d'ailleurs dans les versions du
niylln: un trait constant, auquel les plus uni conservées soul
lidèles le sauveur ne doit pas être reconnu des êtres mal-
faisants au milieu desquels il descend. Le christianisme »
emprunté ce trait au guosticisme, mais le guosiieisme ne l'a
pas pris au christianisme. Dans le cas présent, les prototype*
ne sont,plusperses mais chaldéens. Le sauveur des Maudéens.
d'abord, celui des gnostiques hellénistes, ensuite, sont le>
4V3TÈ1IK* HKI.liilKI'\ »(:* (HtOI.'1'IN *K(:ri.V|)AIHI-> 17'J

héritiers dudieu Marduk, vainqueur des puissances du Clinos.


.lésais tenté de m'étonuer que M. Housse!n'nil pas eonipaiv
à ses descentes aux enfers le poème cliuhléenil'Ishtiir, d'au-
tant plus qu'il est arrivé à la grandedéesse des guosliquesde
jouer 1« rôle de sauveur et même de se trouver parlà, connue
tehtar, eu condition d'être sauvée u son tour. témoin l'Hélène
de Simon le Mage.
Le dernier chapitra traite du culte des gnostiques. On l'a
bien souvent comparéà r:elui des mystèresgrecs. L'initiation
H, parmi les rites d'initiation, te baptême y ont une impor-
tance exceptioniiellle. M. Bousset essaie de montrer(|tie ce
rituel est également asiatique. La démonstration, un peu
maigre, ne nie parait pas porter. Le baptême des gnos-
liquesaquelque chose d'une communion. C'est la coinniu-
uion HVecun des éléments qui est l'eau. Dans les sacrements
^uostiques, l'huile, le sel. le pain sont également employés.
Maisils figurent aussi dans diverses listes d'éléments. Ces
•iicremeuts constituent donc des communionscosmiques.
lieux sacrements symboliques figurent la libération de l'àiue
m sou association avec la divinité, l'un par la représentation
• h- son ascensionà travers les portes giirdées pur los esprits
planétaires, l'autre par celle du mariage .sacré.
Il manque un chapitre an livre de M. Housse! pour être
n.inplel. Mais les éléments de ce chapitre s'y trouvent épars.
.le regrette qu'il n'ait pas exposé e,r /irnft*nuce que l'on sait du
milieu sociid on s'est produit le gnosticisme et ce qu'on peut
-avoir du jfenre de société que formaient les giinsliques. Il
issimile le gnosticisme aux religions syncrétiques à mystères
'le la tin du paganisme, qui ont fleuri sur les ruines des
vieilles religions politiques, «'alimentant dans les basses
'nichesdisla tradition religieuse, faisant remontera leur sur-
liim;.desprofondeurs,les superstitions populaires, nourrissant
•le grossier merveilleux des sociétés désaxées. Dans ces
MXiiétés,se croisaient les restes de peuples divers, de races
diverses qui mehmgeaient, avec leur sang, leurs traditions. Le
.uiostieisme est l'état d'esprit religieux et de vie religieuse
qui correspond à cet état social. Il y a eu certes des sectes
-'itosliqties. maisil était plus large que les sectes. Il ne s'est
lias cristallisé sous la forme d'une religion déliuie. à moins
que le christianisme ne soit la forme cristallisée à l'usage île
l'Europe de ce que contenait le gnosUcisnm.
ti
II. Il
180 L'AX.NliKSumuLuilIvL'K. JfiUO'IliUU

WEUSTKIUH.,1.– Primitive seoret sooieties u sludy in eni-]y


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liliASS ;K. K.– Die russischen Sekten. Il Die weissnn Tauld-n
uiler Skupzun, nnhstjieistlielicu .SkO|izr-ii,
Nimskopzeu u. a. • I,
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lin. HMf.in-S".«0|i.
lil'ONAIirn(l-:j. Lo Onosticismo.Storia di antiche lotte reli-
glosellom«.FiMTiiri.I'.»»:,•«« p..iu-tiu.
SOIIMITT (K. H.). – Die Gnosis-Grundlagen der Weltan-
sohauung einer edleren Kultur. H. Band. Die Onosis des
Mittelalters und der Neuzeit. 1ii-I2u.EuiivnI)ii;doriolis.Ii'-iia.
l'JOI.

vi. – cim.tkssi'i:i:iAi.'x

l'iir M.Jliro.

J. G. FKAZËK. – The Golden Bough. A Sludy i» Mfitfir


and Religion '3" édit.i. l'nrl. IV, Adonis, Attis. Osirls.
London,Macmillaii.l'O", XX»4îi2p.,ia-«u.
Cevolume est uneseconde édition de V.UInni*.Mtix, Osiri.i
paru eu 1906 mais il est destiné it formerla quatrième partie
de la troisième et future édition du liolilni lioitgh, et c'est en
cette qualité que M.Frazer le publie.
.Vousavons rendu complu du livre suus sa première forme
lesthèses principales de M. K.sont restées les uu>mes.Cepen-
dant, sans parler de changements de détails dont ou trouvera
fa liste dans Mail,IÎKJN.n1 ii, la physionomie du travail s'est
assezsensiblement modifiée. D'abord on y trouvera un cha-
pitre nouveau sur Lnt liommi'tet Ici fmiinrxxttenfx,uue nou-
vellesection intitulée luflufHrr delu ile-wiidniiri-Htrrhte xur
h religion, et trois appendices Molnchmi, Le l'inmen rmf\
Coutume*dm insulaires de l'alam. Mais,ce qui est. plus impor-
tant. ce sont les préoccupations nouvelles que trahissent ces
nouvelles études. Dans l'ancien UolilenIlougli, M. F. restait
partisan d'une sorte d'animisme et de naturisme il alliait
Mannliardt et M. Tylor. Il semble maintenant se rapprocher
d'une interprétation moins simpliste de ces faits sociaux, si
compliqués, que sont les phénomènes religieux. Il senihlu
sentir l'insuffisance des notions dont il se contentait jusqu'ici,
notions de l'ame, de la magie, du culte agraire. Il éprouve le
1 ij2 'S~~I': ,.JCIUI,IVU;, 1!IO,i.I~;¡!1

I..
besoin rattacher lu religion aux autres institutions sociales.
L'importance du culte tins déesses lui paraît correspondre
au grandfa i t social quefut lu substitution de la iiliuliuumas-
culine à la (ilhttion utérine. C'est pourquoi, rapprochant les
nouvelles observations de M. liurduu sur les Khasi de l'Assaut
des anciens travaux du Kubury, M.K.a cru devoir faire une
place à l'étude des phénoméues religieux aux Palaos et du
type familial r/u'onyobserve. Ailleurs, c'est lu phénomènede
la prostitution rituelle qu'il metdirectementen rapports avec
le culte agraire, en particulier daus l'Asie antérieure, et avec
les croyances relatives à la réincarnation des ancêtres dans le
clan. Le livre prend ainsi un aspect
sociologiquequ'il n'avait
pas et que nous sommes particulièrement heureux de cous-
t:ller- M. M.

NAi;i-:i.A.i. DerChine8i8cheKUchengott<T<;iu-Kyat)
– Arw.
f. lUIiiiimuirit*.
XI.1007.|i. i'.t sij.

VI KUTIIKISI U DeAjaeia origine, cultu et patria. Aecedun t


':omineitl>itiotieii
//« deAtmtiiiiiilius.
<kl'urneù,<leTtleijumu.l.fîiiiwi,
l.iuhtlioir.1907.in-

HUMA
SZKW.SKA V.i Die politisohe Bedeutung der Religion
vonEmesa. ArchW. lieUyion&uis*.
XI.l'jo».\>.ii'i sq.

STUSCll. Die Propheten Israëls in religionsgesohiohtliche


Wtlrdigung-
(;iil<-i<l«ili, Bi:rl<flsm«nn.
l!Hi? VII-iO9
|i.
f.I.ASfilt H. Ueber die Religiondes Mithras. XtueKireldie»n
Zvituiuj.l'JOi. |ip. KIU2-III7O.

V\i;.MJLAMJ
fi». Die Hellenistisch-roemisoheKulturinihreu
Beziehungen zu Judentum und Christentum. Ihlli, Seiia,
Te*t, 3. KriliotiruMolir.lti|J7 IV-|'JU|i.ia-fi".
l'KISKKIt. Die Boziehungen der Nichtisraëliten zu Jahwe
nni.-lirli.-r Atiscliatimu!
ili-r ullist-.i*-lif Qai!ll<!iis<:lirifli'ii.
TheolUt
ni.

MOHIIV (C. II. -The beginnings of Saint Worship. l>riuceiu«


ilwahigieal
IUiiïm [>.U)n,
pp.S7,s.ï(l|.
KTNIATIgUK-i
i.WiVAXCKS VllU*l'iH'LI.AlllK* l«3

Vil H1TK<
KTl'HVl'igUIvS
CHOYASCKS l'olM'UlUKS

l'ur -M.Hkvxiku.

n. L (JOMMK– Folklore as an historical Science. I vol.,


London,Methuen,1ÎI08, XVI-371p.,in-K'.
Les historiens négligent le folklore, et les folklorisles ne se
préoccupent pas de l'histoire: cependant l'étude de la tradi-
tion populaire peut rendre de grands services à l'histoire,
surtout à l'histoire ancienne. C'est ce que montrent les ou-
vrages de Krazer, Hidgeway, Laug. Miss Harrison, etc. et
M.Comme consacreson premier chapitre Histoire et Folklore)
à l'établir d'une façon plus systématique encore, en faisant
voir, sur des exemples, commentles traditions concernant (les
lieux ou des héros sont liées à des conditions historiques,
commentles contes populaires relienneut des'délails d'orga-
nisation tribale, par exemple, et même d'ûlnls antérieur.
commentl'explication mythologique, arbitraire et trop facile,
doit céder la place à l'explication historique. Les exemples
sont empruntés à la civilisation des Iles Britanniques, mais
les conclusions ont une portée générale.
Seulement, pour que le folklore puisse rendre les services
qu'on attend de tui, il est nécessaire(ju'il soit soumis à une
méthode rigoureusement critique. Voilà longtemps déjà que
M. (j. s'efforced'établir ces procédés méthodiques. Les cha-
pitres qui suivent en offrent un expose. Ce sont d'abord des
règles générales ill, Matériaux et méthodes) nécessitéde bien
définir les faitsde folklore (par exemple mythe, coule, légende
p. 129 sq.i, de les analyser aussi complètement que possible
(p. l.!i9sq.,i pour les mieux comparer et classer,fil pour les
situer exactementdans une aire elle-même définie. Knlin, un
fait isolé étant d'utilité nulle, reste si en établir lus liens orga-
niques avec les autres faits du système auquel il appartient.
A lu vérité, si importante que soit cette dernière règle, il
faut reconnaître que tous les faits de folklore ne sont pas des
faits de simple tradition et n'appartiennentpas toujours à une
aire déterminée. Sous t'influence deconditions psychologiques
analogues aux conditions anciennes ou primitives, il peut
naître au sein d'uni! civilisation dûveloppée des croyances et
pratiques qui ont tout l'air de survivancesfcliap. III, Concii-
l(si l'ax.nkk sui:iiii.iiiiigiK. l'Juo-Hiu'j

lions psychologiques Il importe de les distinguer et chiss-


ser.
D'autre part. la période préhistorique u exercésur les temps
historiques une iuttueuce trop profondepour qu'où puisse se
dispenser de l'étudier, et par conséquent de faire tippel à
l'anthropologie ilV, Conditions anthropologiques:. Mais les
thèses essentielles en sont très discutées il faut prendre posi-
tion. C'est ce que fait M. tî. dans uue série de paragraphes ait
il présente d'ensemble, eu les renouvelant par des réflexions
personnelles etens'ellorçantde les mieux fonder, les idées de
IVeole anthropologique. Il en vient ainsi à s'expliquer à son
tour sur la question controversée du totémisme et de l'exo-
gamie.
La tentative tout entière mérite d'attirer l'attention, et il
y aurait bien des indications à relever. Tenous-nuus cepen-
dant il lu question du totémisme et de l'exogamie. M. <î.
appuie ses conclusions sur une description préliminaire de
l'évolution de l'espèce humaine pendaul ses premières migra-
tions il partir d'un centre unique, et du la formation des
groupes prétotêmiques, qui nous parait très conjecturale(pour
les idées analogues de Laug et d'Alkinson, roy.-ltMi.Soc.VU,
p. 407sq.,X,p. 40(1).Quoiqu'il eu soit, il lui paraitqu'il vades
raisons pour re noncorà considérer comme inséparables exo-
gamie et totémisme. Ils sout nés indépendamment l'un de
l'autre. Quelles sout donc leurs origiues Pour lexogamie,
la question serait simple Uneexogatuie formelle.de règle,
serait sortie de l'exogainie naturelle due à la vie séparée des
mules chasseurs et des femmes'p. ïS»âi.CommentcelaC'est
ce que l'auteur n'explique pas; ou du moins il parait s'en
tenir a l'explication par la persistance du rapt, jointe aux
idées de Westormarck sur les effetsde la cohabitation ce qui
ne laisse pas que d'étonner un peu. – Pour le totéiuisme, la
question est moins claire. Les thèses de l-'razer.de Lang et de
Kaldwin-Speuceriqui est celle de M. Ilnddoni ne sont pas
satisfaisantes. Il est vrai que, commeelles ne se détruisent
pas, on peut espérer eu les unissant et en les complétant arri-
ver ù nue explication acceptable. Voici quelle nous parait
être l'opinion de M. (i. L'origine du totémisme doil èliv
cherchée du côté des femmesdans le groupe pré-totémique
elles sont les ouvrières du groupe; ce sont elles qui domes-
tiquent les animaux, cultivent les plantes, récoltent les
céréales et les fruits, qui s'occupent de ces amis de l'homme
tlttoïASliK-, Kï l'IIATlgl.'K<- WÏKs l'OPl'I.AUl» 185

dont il est nature) qu ou fasse une partie de 1 humanité.


Comme l'homme est généralement absent, sou rôle dans la
•iénération n'appiirntt pas clairement, et on l'attribue aux ani-
mauxet plantes (jui sont toujours là. Al'origiue, le totémisme
n'est nullementen relation avec la cousauguinité ni avec le
mariage. Maisrien n'empêchequ'il reçoive ces développements
postérieurs. Quand la parenté du sang est consciemment
reconnue et entre dans l'usage, le totémisme primitif devient
facilement parenté avec le totem et l'ancêtre totémique, culte
du totem, on tl 11 exognmie tolémique.Si nous entendons bien
M. G., ce dernier fuit se produit quand l'aggrégatiou des
groupes remplace lu ségrégation. Mais cette exogamie n'est
totéiniqueque par accident, pourrait-on dire, et à mesure que
la parenté du sang est plus parfaitement reconnue, mariage
H parenté se détachent du totémisme qui ne subsiste que
comme système de noms. Eu résumé, la pareille du sang, loin
d'avoir donné naissance au totémisme, est précisément ce qui
le ruine.et le totémismedoit s'expliquer par un état du groupe
où la consanguinitéest ignorée ip. iâA-iO\i.r.
Ou voit. siius qu'il soit nécessaire d'y insister, lu part de la
conjecture dans ces déductions. Ajoutons que M. (î. n'a pas
procédé par pure déduction. Comme M. Krazerajugé devoir
modifierses idées sur le totémisme après avoir étudié l'orga-
nisation des Aruntas. de même M. < trouve chez les Aruu-
las uue justification de ses idées 'p. îl\2-i~ Il établit pardes
considérations sur les migrations <p. iiXi son droit à compa-
rer les Arunlnset les Semaiig de la presqii'lle de Malacea(Skeat
et Bhigdeu, cf..l)i/i. Sur. X, p. îMfy.et il confirmesa thèse en
montrant cher,les uus un totémisme sans consanguinité, chez
les autres un totémisme tout semblable auquel s'est super.
posé un système d'emprunt fondé sur la consanguinité. Est-il
légitime de parler d'un totémisme des Semang, de le consi-
dérer connueprimitif, et de considérer l'organisation Aruiila
commeégalement primitive? Nousn'eu sommes pus sur. Le
rapprochement établi par M. (!. n'en est pas moins fort ins-
tructif; et nousa voilons nos préférencespour nueméthode({ai
étudierait totémisme et exogsunie par des inductions ainsi
établies plutôt que par déduction à partir d'un état prétotù-
inique arbitrairement choisi.
Ce long développement sur l'origine et la nature du toté-
misme est largement justifié par l'usage qu'en peut faire la
science du folklore. M. 11.quia étudié dans un ouvrage spè-
1XÛ .v/i:il)[.lli;li,Jl'K l'JilU.I'Jll'J
I.ANM'K

ciul les survivances totémistiques, expose ici. sur de nouveaux


exemples, une méthode pour révéler les traces dit totémisme
du folklore. Ses critères sont ceux de Knizer ip. 28/J).
l'iie coutume ou une eroyauce, avant de devenir des survi-
vances, out été vivantes, c'est-à-dire qu'étroilement jointes à
d'autres. elles faisaient partie d'un système d'autant plus
cohérent qu'il s'agit de sociétés plus avancées dans leunléve-
loppemeut. Cet aspect,des fuit* de folklore relève de la socio-
logie (V. Conditions sociologiques».Nous n'avons pas besoin
de dire que le mutn'a pas uu sens aussi large que celui dont
nous avons l'habitude. L'explication d'un fuit de tradition ne
sera complète que lorsqu'on l'aura rattache par exemple à
l'ensemble du système tribal îles conquérants dont l'organi-
sation est familialeot non localeà l'origlnci, ou du systèmenon
tribal 'les conquis qui deviennent des oullawsi, et qu'o^aum
montrésur quelle organisation sociale (place des vaincusdans
l'ordre .social établi par les vainqueurs;repose leur persistance.
Sous le litre de Conditions particulières au folklore euro-
péen ichap. VI;, M. (î. examine le double aspect des relations
du cliristiauisuie avec les formes religieuses antérieures
l'antagonisme et lu tolérance, et indique ainsi les cadres d'une
étude de leurs effets respectifs.
La distinction d'un régimetribal et d'un régime nontribal,
qui est commune il l'histoire des peuples indo-européens, et
particulièrement importante pourl'histoire d'Angleterre, cor-
respond à une distinction ethnologique(VII,Conditions ethno-
logiques!. Klleest utile et mêmeindispensable à l'uxpliciition
de certaines différences profondes qui apparaissent dans des
faits qui appartiennent à une même aire, ("est une idée que
l'auteur a déjà mise en tuuvre dans sou Ellnuilvijy iu Fotkloir
etappliquée à résoudreles conflits entre les donnéesdu folklore
celtique et du folklore européen eu général. Il voit dans le
culte des eaux des coutumes non aryennes, taudis que le culte
du feu serait aryen. C'est encore par la qu'il compte éclairer
dans uu livre nouveau la communauté de village, que les
méthodes chronologiques lAshley, Seebohin, Fuslel de Cou-
langes' ne réussissent pas à expliquer, ut aussi l'origine des
rites agraires.
On voit par celte analyse encore 1resextérieure combien le.
livre de AI.(î. est riche d'elforls et d'indications. Sou carac-
tère d'exposé systématique des méthodes de l'anthropologie fl
du folklore siillirait à attirer sur lui l'attention. ,1. H.
i:iiuvaxi:i> i:r i'imtivl'k* uitks i'uI'L'i.aihks m;

CHiHlKE,\V.). Natives of Northern India. Xnt. Hncetofthe Urii.


Kuip.Serin.Loniloii,l'.Miisliilili. i'JO", X1V-27O
|i., iu-8".
KKAIJSS$'.$.). – DetVoVMmuni.AUeuuduvue Heitrnge s, Yoll.s-
fomltung.Leipzig.lli'Ut'elii.1 VciliiusakUiMi^sclIsclitiri,
l'JUli.
WIIISTLKli.(<).W.). Local traditions of the Quantooks. t'M-
Lon,l'JUS, p. 31 s.|.
CHOOKK Notes on Homerio Polk-Lore. l-Uk-Lm: l'JU».
|i. 02si)., p. 1D:is<[.
HK.UJVAIS J.j. Notes sur les coutumes des indigènes de la
région de Long-Tcheou. huit. lie. Franc. il'Kctr- •Orient,1907.
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tribus du Kong-Tcheou {Chiu«).Antlirupot, 1908, p. 3«7 si|.

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îles tlmUiichcnMuséums fiir VùlkcrliundeM Uiiiziy. Fuse. I. l,i:ij«ifi.
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J«s \w\"idimagesliislorii|UR<.}

KHAUSS'F.S. – SlayischeVolksforschungen.Aliliaiullun^nûhfii
f.linilicn, ticwonlii'itsrorhti?.Hriiuclii;uiul«li «-(iuslarciilicilt-i1tli.-i
Siul-luven. W.llcims, l'JUS. VI-i;il p. (D.hmiiih-iiI-l'ulklniiquos.

HKYM(iXI)M.).– La sorcellerie au pays deVaud au XV1siècle


.lrc/iiir(W»l((.s<i's
des Tradition* pupulrtii'cx, XII. Il 1.

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mento. Pi.tujjî; l'niuiic tipii^i'alK-a i:nri|ii'ialiva. l'.iOÎ, in-lii.
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M-:ntUJM)lv.MANi;i!K I'. A.). La religion populaire des Turcs.
/(«•(«!de rhùtniredei relii/ioux, 1900. Il, p. iii-71.
J.

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mimoijr.et Hvcinl..J 008. p. 'J0O22iî, p. U'iïa.
NAItliKSIII'IlEItK.. – Aus dem Leben der arabischen Bevoel.
188 I.'AXXÉK SOWiiMNilul'K. IH08-1UIM

kerunginSfax.etc.Vcnl/feittl. d. tiiUi.Mut.f. VûHierk.iuUîpiiy.


II. U'i|»iil{.Vui'ullUiuIvr.
1 «J07 ill-iS"Folk-loti'JeSJ'a.v excelleut,
suî- Ici Aissauuus

VIII. WtuYA.NCKS
KT KITKSUONCBBNANT
LESMORTS
l'ill' M.Ill'IlKllT.

€11.1)KKÊLICK.L'autre monde; mythes et légendes


le Purgatoire de Saint-Patrice. Paris. Champion, H>l)G,
198 p., in-8».

Le Purgatoire de Suiti t-Patrice est un sanctuaire, qui se


trouve dans une Ile du Lough Derg au sud du comté de Done-
gal, en Irlande. 11est le but, encore aujourd'hui, d'un fort
important pèlerinage. C est une porte de l'autre monde en
tout cas. il a été le théâtre de révélations sur l'autre monde.
Décrit pour la première fois par Giraud de Cambrie 'les téiuoi-
SOiagesantérieurs sont relatifs à unautresanctuaire/, la visite
la plus fumeusequ'il ait reçueest celle d'un certain chevalier
Oweiii. dont les aventures, relatées par le cistercien Henry de
Saltrey, ont été fort populaires au moyeu-Age.Le récit de ces
aventures, qui soûl uue descente aux enfers, comporte une
description de ce monde infernal dont M. de H. passe en
revue les données, dans lu deuxième partie de son livre. Ces
données, ce sont les représentations du inonde infernal, qui se
sont élaborées dans les anciennes civilisatiuns de l'Asieanté-
rieure et de l'Europe méridionale. L'autre monde des Chal-
déens et des Égyptiens,celui des poètesgrecs et desorphiques,
ont des traits qui reparaissent dans les visions infernales des
anciens apocryphes chrétiens. Ce sont ces révélations qui ont
inspiré les visionnaires du Purgatoire de Saint-Patrice beau.
coup plus que les traditions irlandaises.
M. de K.se préoccupe des conditions sociologiques de ces
représentations. L'existence de la tradition chrétienne en est
une. Mais il va plus loin. 11 rappelle, par exemple, que la
classification spatiale des clans a eu des effets pour les morts.
Il indiqueque les représentations de l'autre monde dépendent
des rites funéraires et des croyances qui les commandent h*
plus directement. C'est d'ailleurs le cas d'en parler, car te
Purgatoire de Saint-Patrice a les caractères d'un tombeau, Il
ressemble aux tumulus à chambres funéraires qu'ont élevé
tmOYASCBS
KT«ITE'ÎCft.VGKH.NANT
I.B*MOi\T« 189

pour leurs morts les prédécesseurs des Celtes et qu'liabilent


lesTuutha dô Dannuti,lu peuple de la déesse Duuu, les esprits
et les morts, parmi lesquels quelques dieux et dressent
la tôle.Aussi bien, le chevalierOwein semble-t-ilûtre le infime
personnage que le dieu Oungus, le souverain des Tuatlut de
iJatiann.
Le Purgatoire de Saint-Patrice ne donne plus de visions,
s'il en ti jamais donné. Ou n'y vient plus que pour se purilier
de fautes communes, et c'est probablement ce qu'on y a tou-
jours fait. La vision du Purgatoire est le mythe qui corres-
pond aux pratiques du pèlerinage. M. de P. nous montre que
les voyagesnu Pays des morts sont fréquents la mytho-
logie irlandaise, Lorsqu'il développera ce travail, comme il
l'annonce, il nous montrera sans doute que le rituel irlandais
ou ce que nous eu connaissons, comporte la possibilité de ces
allées et venues. il. H.

;IV. – Das Wasserim Totengebraeuohe. Xeitschnfides


SAHTOItl
Veninsfiir Vulkshmde,
l'JOS,p. WÏS-r.ti.
SAKTORI I1.; – Feuerund Lioht im Totengebraeuohe. Zeilschri/t t
des Vereiitxfiir Vuluskamte,l'J07,|i. 3Gl-:i8ti.
STEINMA.N.N (Th.). – DerreligioeseUnsterbllohkeitsglaube.Eine
religionsvergleichende Studie. Ifarichlfdesilwulogisuhou Scini-
uut'tum!id. HrlMerAcnieimli; in (iuudcnfcld,8. Hïfl. Leipzig.K.
Jiiura.1008,Vlll-71p..ii)-8".
THOMAS X. W. – The disposai of thedead in Australia, Folk-
b>re,(908,p. 388sc(.
.MII.UKIN. Burial oustoms of the Wa-Kavirondo in the Ki-
suma Provinces. Alun,10O0,n1'Xi.
CAItSTANlî
;C). – The burial oustomsof anoient Egypt. Lomluii,
Consluble,1907,iu-8«.
TIIL'KSTON (K. – Ethnographie Notes in Southern India.
Death Cérémonies, iladraï.titOti, p. 1:12^3:.in-K1'duulilccnicr-
n:munlen pays diaviilien,etc.).
KI.KINS.). – Tod und Begraebniss in Palaestina zur Zeit der
Tannaiten. licrlin, I.. l.auiin, l'Jiis, luu p., iu-8'.
MIKLKK .11.). – Ein merkwttrdiger Totenbrauch. Zeilschr.f.
Etltiwl, 1908.p. 6'2is<
KKII.HËK<; (H. F.).•- The Corpse Door. l-'oUt-Lwe.
1907.XVIII,
p. 304M\.
19» 1.AXMÎK
SOtilOLOUIOCB.
IWIMHO»
I.A.NO
-A). Death Deeds. /'W/W. 11107,p. :)76s.|.
ASTON AV.(i. Anoestor-worshipin Japan, Mm. l'Jon.n" ï!3.
;AIi>uiici-
île tulti-micvslral
Jjiiij. le sliiiiluisuic.)
HAKUKHI.IX K.. TisuertraohtenundTrauerbraeucheausder
Insol Foehr. Zeilsclnifttte* Venin* fin- Volkxkuuile,
Il'Oil p «61-
281.
I
MOHKT :a.L immortalité de l'âme et la sanction morale
dans l'Egypte ancienne. l'an*, K.Li-mux luo»,40 p., in.js.
Kleinere MitteUungen.Aegyptische Seelenhaeusoben.
««%<
5Kallgeineiii.Zoitauy,
l'JDT,u"189.
IH.'I.I.(K. – The Development of the Idea of Hades in Celtio
littérature. Futk-lore.1U07,XVIII.p. 128s.j.
DAVIS J.
I).. – Thefuture Life in HebrewThoughtduring the
prepersian perlod. l'riiiwtun tlienkgknl lUrkw. 1908 pu »tn.
26«..
WKNKiKH il, – Feralis exercitus. Ardib- fit,-ReliHhnsiiisscn-
ochafl.1907.|i. «1-81.|i. i2y-25O.
KCI'KAil' Zur Genesisder Totentaenze. Slon.l.il.Unwcrtft
Sliiylcrlluclnli' 1907.Si p., in-8".
0LHEHT7. {II. Die Idée der mittelalterUohen Totentaenze.
beat. Gcscliidilsbltltlcr
ck' Tillu.fiollin.I'i-rthcs. |ll)7. VIII,i.

IX. I.A MAiilK


l'ar MM.
SIiwj,HniKiiT
>:• Hkiitz

W. CALANI).– Altindische Zauberei.


Darslelluii" der
«
iilliiiilisclien Wuiiscliopfer •. Vcrlidl.iler Konink.k. r.
Wrlamli.,Amxtnilam,Afdoel. Lellerk., X, I. Amsterdam
J. Millier. 143p.. in-8".
Nous n'avons pas coutume de citer des éditions de texte on
des traductions. Mais celles du Al. f). présente-ut un travail
si eluboré. t%celte iMaboratiouprésente de telles dffliciiltés
pour In védisnnt lui-mêmequi; c'e-l. fournir déjà des maté-
riaux tout prêts pour la science que s'attacher à
besogne
pareille. Cet ouvrage a été précéda d'une monographie dont
nous avons rendu compte (.Imu-VVU.p. à$l»),M.C. persiste à
i..v suoii: loi

appeler magie celle partii; du rituel védiqueot'i le .sucrillce


solennelclo la nouvelleel de la pleine lunese voit utilisé pour
toutes sortes de lins profanes, (ont connue si c'était un rite
magique ordinaire. Mais il n'a pour ««lu d'autre droit que
l'usage ip. iu;el le point de vue européen. Ce qui est exact.
c'est qu'il faut faire, dans l'Inde védique, la part des coudi-
tions où les Hrahmaues out exercé leur religion. Il leurfal-
liiil, quand ils étaient proprement chargésîle la magie, res-
sembler il dos prêtres, et c'est pourquoi le Kuualm sîttrti des
brahmanes de l'Atliarva-Veda, du veda de magie, est ou pré-
leutl être unsrttra régulier. Il fallait d'autre part aux brah-
manes chargés de bénélices, de clmpelleniesde nobles, prêtres
de leur culte régulier, ou détenteurs eux-mêmes d'un feu
sacré, ne pas perdre l'avantage que pouvait leur couférer,
pour la poursuite de fins privées ou mêmesinistres, la pos-
sessioud'un rituel, d'un instrument rituel, la confection d'un
sacrifice. On pourrait également soutenir qu'il n'y a pas de
magie, et que tout ce qui est prive dans le sacrifice védique
«si magique. – On sait comment nous résolvonscette ques-
>>f)»- M. M.

K. H. K. DE JONC– Das antike Mysterienwesen in re-


ligionsgeschichtlicher, ethnologischer undpsycholo
gischer Beleuchtung. Leideu, K. J. Urill. UluSt.X-'AVii
n
iu-N°.
M. de Joug « publié, en I90U.une dissertation intitulée
•<De Apuleio Isiacorum mysterioruni teste ». Nous avons dit
i H/nVSoeialoijiijW1,t. V, p. -MC»la bonne opinion que nous en
avions. L'accueil favorable qu'a nénéralemeutreçu ce travail,
nous dit l'auteur, l'a engagé à composer le préseul livre, où
su retrouve 1 empreintetrès fortement marquée do ses
pre-
mières recherches il y est, en effet, grandement question
«l'Apuléeet d'Isis.
Kmbrasser du regard l'ensemble des mystères eu faisant
converger sur eux l'ensemble des lumières de l'histoire des
religions, del'ethnologie et de la psychologie,c'«sl beaucoup,
«-est peut-être trop à la fuis. Un peu d'histoire et quelques
lionnes cléliiiitious sociologiques, ne fussent-ellesdictées <|ue
par le sens commun, fourniraient déjà sur un pareil sujet
quelques résultats appréciables.
M. de .1. reconnaît que. quand ou parle de mystères au-
192 i.'axnkb suuui.iiiiioi'B. iwm-i'jo'J

tiques, ou donne un même nom il beaucoup de choses dilïé-


rentes. Cesont les vieux mystères grecs, comme ceux d'illeu-
sis, qui font partie des cultes officiels; les innombrables
cultes de petites sociétés d'étrangers, d'esclaves, de prosélytes
de diverses sortes, qui, dans les cités grecques, ont été tantôt
tolérés, tantôt interdits, nuiisqtii, en tout cas, oui réussi ù
y introduire peu à peu des croyances et des pratiques reli-
gieusesasiatiques toutes les variétés de l'orpliisme, les cultes
syncrétiquesde Cybèle, d"Attis, des dieux syriens, des dieux
égyptiens, enfin, sous l'empire romain, le culte de Mithra,
sans compter lu foule des cultes guostiques. Danscette énu-
mération, sans doute, plusieurs espècesou variétés religieuses
se trouvent juxtaposées: mais ou aurait mauvaise grâce à
s'en ollusquer, car ce rapprochement a été d'abord l'œuvre de
la languegrecque et des gens qui l'ont parlée. Lesanciens ont1
certainement trouvé dans tous ces cultes quelque chose de
commun qui justifiait l'emploi d'une même désignation.
Des différences de mystère à mystère, .M.de J. fait à peine
état, préférant attirer l'attention sur leurs ressemblances. Il
se prive parla de tout ce que l'étude des premières pourrait
apporter de clartés il l'explication du phéiiomèue. D'autre
part, il simplifie, presque à l'excès, son tableau eu restrei-
gnant géuéralemeul son oxameu aux mystères de Démêler
éleusinienue, d'Isis et de Alilhra. Son livre est doue un exposé
fort incomplet des mystères grecs et hellénistiques. Mais nous
n'avons quïi le regretter.
Quels sont les traits spécifiques des mystères ? Kst-ce li*
drame rituel qu'ils semblent comporter régulièrement, la
présentation d'objets sacrés, Yrpoptiel'l'raits secondaires, dit
notre auteur.
Lecaractère essentiel des mystères, c'est le caractère ma-
gique. Entre les mystères et la magie avérée, il y a d'étroites
ressemblances. Au fait, Apulée, qui nous décrit si bien les
mystères isiaques. n'a-t-il pas eu à se défendre d'une accusa-
tion de magie? Mystères et magie se ressemblent parleurs
rites, par les préparatifs minutieux qu'ils exigent, par les
lins positives auxquelles ils conduisent. L'argument n'est pas
topique, car on pourrait en dire autant de tout le rituel reli-
gieux. Autant vaudrait donc expliquer la religion par la ma-
gie. Mais personne n'est tentéde dire que la messechrétienne
est magique parce que les magiciens eu ont abusé pour uVs
objetsspéciaux. Religion et magie sont deux choses,qui se res-
l.\ MAUIË {03

semblent, certes, parleurs procédés, mais qui se distinguent


fort bien quand ou considère la société où elles opèrent. Le
langage les discrimine généralement connue peut. S'il faut
tenir compte, dans hi classilication des laits sociaux, des con-
fusions du langage, il faut tenir le même compte de ses clis-
tiuctions.
Mais, en ce qui concerne les mystères, il s'est produit entre
la religion et la magie d'intéressantes et instructives cotilu-
sions, et aussi de l'une à l'autre des formes de passage. Leur
étude à ce point de vue a plus d'intérêt que ne le montre
M. de J.
Les meilleurs documents que nous ayonsà la fois sur la
magie hellénistique et sur les mystères se (.'lassent malentre
lu magie et la religion. Qu'ils proviennent des papyrus, dits
magiques, des livres d'alchimie, qu'on les duvinc à travers
les résumés des écrivains païens ou chrétiens, ils semblent
constituer une liturgie à plusieurs fius, uue littérature mys-
tique dillicile à qualifier. C'est qu'ils émanent de groupes
dont la qualification est incertaine et instable. Les diverses
formes de syncrétisme, qui résultent du même brassage que
les sociétés hellénistiques, out pris corps, soit chez des indi-
vidus qui se sont fait un syncrétisme leur usage, soit dans
de petites sectes, toujours à cotédes anciens cultes, dontl'ap-
pareil subsistait, plus ou moins fidèlement conservé, et des
cultes politiques nouveaux. Ce sont les sectes de gnosliques,
tant païens que chrétiens. Le grand mobile religieux quia dû
grouper les hommes dans ces petites églises, c'est la préoccu-
pation du salut et de la perfection individuelles. Le principe
de choix entre les matériaux de religion qui s'offraient, c'était
le hasardou la fantaisie. Kautaîsied'unepart, préoccupations
individuelles de l'autre, il n'était pas besoin d'autre chosepour
faire osciller cessociétés de la religion a la magie. Purilica-
tiou ou exorcisme à caractère religieux ont servi à toutes les
fius licites et illicites de lu magie. Mais les anciens mystères
grecs pencliaiutil déjà du môme côté que ces mystères dou-
teux. Ils ouvraient à côté de la religion publique un déversoir
à la religiosité individuelle, et le schématisme de leurs céré-
monies suggestives ne devait pas beaucoup brider la fantaisie.
Aussi bien, c'est par desformations ambiguës que les religions
mit dit commencer ou recommencer.
•M.de J., d'ailleurs, nuse contente pas d'assimiler les mys-
tères à la magie.Il nous propose une explication ta fois de
K. Iiiiikiikiu. Aimi'i- sociol.. lUAU-iniKi. It
VA
194 l'axxék snuioLoniQi'K. i'm-\w>

l'uneet des autres, ou plutôt de certains faits qui seproduisent


dausTuueeldauslesautres. Les éléments de cette explication
sont foiiiuis eu bonne partie pur l'etliaugrupiiie, en majeure
partit!|)iif les expériences lies spirites. C'est uue explication
psychologique.
KlI est présentée sous ht forint.' d'un commentaire d'un
texte liturgique fumeux, transmis par Apulée. « Je suis allé
aux portes de lu mort ». t:'est l'extase. « J'ai franchi le seuil
de l'roseipine ». Ce sont les révélations et les visiuus des exta-
tiques'.«J'ai traverse tous les éléments et je suis revenu ». 11
s'agit d'épreuves, de passages par le teu, par l'eau, d'unes-
tuésie durant ces épreuves, de lévitation, etc. « A minuit,
j'aivu le soleil luire d'une lumière étincelaute ». Hallucina-
tions lumiueuses des médiums « J ai abordé les dieux d'eu
bas et les dieux d'eu haut et je les ai priés de proche à
proche u. Simples matérialisations
Mais n'nurait-il pas convenu, avant toute autre recherche,
d'expliquer ce texte en lui-même et rapproché de ses voisins.
C'est do liturgie qu'il est question. Cette liturgie est celle
d'une cérémonie d'initiation, qui comporte le thème coinmuu
de lit mort apparente et de lit résurrection, et aussi d'uu sa-
cremeut, qui mène l'unie à la purification et à leilibération en
lui faisaut parcourir le cercle de la nécessité. L'unie suit le
chemin des âmes. Elle y voit luire le soleil il minuit or, le
chemin des aines, c'est la route du soleil qui le ramène sous
lu terre de l'ouest ù l'est. Elle traverse les éléments. Elle
aborde tour à tour chacun des dieux planétaires. Tel est le
sclième du sacrement. Que les mécanismes psychologiques
attestés entrent en jeu dans la mise en œuvre du sacrement,
c'est possible Mais il comporte aussi des idées et des mythes
Pour œqui est îles matérialisations, qu'on nous permeile de
douter qu'il s'en soit produit souvent û Eleusis. Il y avait trop
de monde et de trop divers. Les apparitions étaient des mas-
ques.
Je crois que ce qui manque surtout au livre de AI.de J
c'est qu'il y ait songé davaotageâ la compositionet à la nature
des églises de mystes.Au surplus, un peu plus d'histoire et de
critique y eussent fait bonne figure. H H.

E. DOUTTÉ. Magie et religion dans l'Afrique du


Nord. Alger, Juurdau. 19011,017p., in-81.
Ce livre, né d'un cours professa à l'École supérieure des
i.a uAuiK n>r>
i

lettres d'Alger, est, dans la pensée de l'auteur, le premier


J'uue série. M. I)., dont l'ln»i£c 11signait';a plusieurs reprises
les excellentes monographies, entreprend d'exposer dans son
ensemble Ih civilisation musulmane du Mughrib. Celte tenta-
tive, qui répond, chez nous. à un besoin pressant. M.I). est
qualilié pour la mener à bien a la connaissance des textes
littéraires, il joint une expérience personnelle des tribus et
un esprit tout pénétré des conceptions et «les méthodessocio-
logiques. Aussi cetteii-'iivre de synthèse ne peut-elle manquer
d'enrichir et de (aire progresser à la foisla science spéciale de
l'Islam africain et la sociologieeu général.
Le présent volume est consacréaux formes les plus simples
<lelu vie religieuse, à celles qui ne font intervenir que des
forces impersonnelles les croyances el les pratiques qui cou-
cernent les êtres authropomorphes. tels que Dieu, les Saints,
lésâmes des morts, feront l'objet d'un autre ouvrage. Cette
livisioun'est pas exempted'arbitraire Allah et tes mara-
bouts, les djiuiiK. des personnalités démoniaques telles que
i-ette curieuse Ounini eç CilyAn,la «mèredes enfants «.jouent
un grand rôle dans la magie et dans la religion populaire et
M. I). leur fait la part assez belle ip. B-t sq., p. 112 sq.).
i!c n'est pas dans (««contenu des représentations qu'il faut
chercher t unité de ce livre, le caractère commun qui relie
filtre eux des phénomènesaussi disparates que la littérature
magique compliquée et savante et les usages du carnaval
uinghrihin. Mais toutes les pratiques dont il s'agit ici présen-
tent ce mêmetrait d'être en marge de lu religion officielle:
réprouvées,on tolérées, ou ignorées par l'opinion orthodoxe,
«lies out pour agent, non la communauté musulmane orga-
nisée, mais « le peuple » notamment celui des campagnes; les
lenimeset les enfants, – ou des groupes sociaux particuliers,
''traugersou aberrants, – ou enlin des individus, poursuivant
leurs lins privées <ch.t et p îlil sq p. fiu-2).
Parmi ces pratiques, il en est qui sont manifestement des
survivances ce sont les débris d'anciens cultes naturistes,
lirincipaletneut agraires. Les uns uni gardé une date fixe dans
le calendrier solaire tels les rites de luslrutiou el de renou-
vellement d'Kuuuîr i Janvier;, les feux snlsliciaux et les bai-
gnades de la 'anr.era.Mais la plupart se sont rattachés a la fête
de 'Achoura qui marque le début de l'année musulmane
lunaire) et est l'occasion de mascaradeset de représentations
burlesques; AI.I). signale le rôle du « vieux « plus ou moins
IW L'AX.NéB«UCIiiLuiilgl'K. UlUIMilU!!
u.II. ~e.
maltraite, la mise à mort d'un dragon. In présencede rites tie
deuil et, rapprochant ces faits des drames sacrés de 'Achoura
eliez les chiites persan», il y voit des traces d'un
antique
sacrifice du dieu <ch.xlet xii-. Acôté de ces
usages, qui out il
peu près complètement perdu leur signification religieuse,
nous trouvons de véritables cérémonies les
plus remar-
quables et les mieux couservêe« sont les rites sympathiques
pour faire tomber lit pluie (p. 382 sq. La religion populaire
fait uu grands usage des sacrifices, qu'on offre aux
djinns et
aux iiiiinibouts icli. x) mais, connue l'auteur est le
premier à
le reconnaître, il s'agit là d'un rituel bien pauvreou bien ver-
moulu dont l'étude emprunte à la sociologie plus
qu'elle ne
lui apporte.
Au contraire, les premiers chapitres du livre,
qui sont con-
sacrés àlamagie musulmane, nous présentent im ensemble de
faits bien enchaînés et typiques c'est que cette
magie tire
la plupart de ses puuvoirsdn lu religion officiellequi,
par suite,
l'autorise plus on moins expressément 'sauf quand elle tra-
vaille à des buts condamnables; et la laisse
s'épanouir à son
aise. M. I)., suit ici de près MM. Hubert et Mauss. et il n'a
pas de peine à retrouver ttu Maghrib les divers éléments et
caractères, qui. comme l'out montré ces auteurs, constituent
toujours la magie. Il n'est pas jusqu'à la notion de manu qui
ne se rencontre, d'une manière, il est vrai. fragmentaire, dans
la croyance populaire des Musulmans. C'estle
pouvoir spécial
dontle magicien esldoué et qu'il projette hors de lui avec sou
souille et sa salive oiefs, roùh'i qui fait réussir ses
opérations
(p. 814 sq.i. Mais en général le mnnn se présente ici scindé
eu deuxnotions spécialisées et contraires c'est, d'une part, lu
harakn, vertu bienfaisante qui émane des personnes,des choses
et desrites et sans laquelle il n'est pas de
prospérité< p. ifiOsq
«9 sq., lui, -m'A,ii'Jid et c'est, d'aulru
part. celte influence
funeste dont le mauvais œil est la manifestation lit plus cou-
rante ip. 317sq.i.
Cfiltftconcordance essentielle n'empêche ««s la magie mu
sulmane de posséder une physionomieoriginale. Kllesedis
lingue par son caractère abstrait, par la prépondérant-
presque exclusive du mot écrit ou parlé. La mystique do
caractères, des lettres, des nombres, des nomsdivins, de-
carrés magiques est ici poussée à l'extrême: les
sociologue*
sauront gré il M. l). d'avoir dépouillé a leur intention uu>
littérature fastidieuse mais instructive, et d'avoir
reproduit cl
I.AM.UUB 197
transcrit non nombre de djrdauelou talismans typiques. L or-
thodoxie s'efforcede ramener toutes ces vertus des signes et
des noms a une source unique et inépuisable, luCoran (p. 211,
2IKsi| p. 344, p.i!tï)j; elle peutainsi, tout en restant fidèle,
du moinsen apparence, à ses principes, donner satisfaction à
des besoins que le monothéisme rigide laisse inassouvis. Il vu u
lu u processus qui n'est pus particulier h l'Islam les religions
tes plus puritaines et spiritualistes de tendance, celles qui
sont le plus préoccupées de sauvegarder l'unité et lu trans-
cendance de Dieu, sont n:iturelluiueut conduites à concentrer
tout le divin dans un Livre révélé, parce que c'est, dans un
tel système, le seul intermédiaire, visible et concret, qui relie
Dieu aux hommes,le sacré au profane. Dèslors, lu pensée et
la pratique religieuses se fixent sur le Livre sacré, la magie
s'en empare on eu vient à prêter à la Parole et à l'Écriture
saintes toutes tes vertus et à en utiliser sympulhiquemeut les
moindres versets.
A la magie, M. I). rattache étroitement la divination
eh. vu etv111 il exposesur ce sujet des vues intéressantes et
justes, un peu trop simples peut-être. Un« présage est à
l'origine autre chose et plus qu'un signe permettant une pré»
vision il est lui-mêmeune force, favorable ou funeste, qui
intervieiitiictivement dans le cours des événements. C'est seu-
lement plus lard que ces représentations magiquessont mises
en forme, systématisées et indéfiniment compliquées par une
spéculation pseudo-scientifique.
Ouest étonné de ue pas trouver, daus <:elivre, un chapitre
sur les interdictions rituelles. Peut-être l'auteur u-t-il estimé
que les faits de ce genre dont il disposait étaient insuffisants;
mais il aurait fallu, du moins. signaler cette lacune et poser
la question. Peut-ôtre aussi .M.I). a-t-il apporte moins d'at-
tention à cet ordre de phénomènes par suite de la conception
qu'il se forme des choses religieuses. Il insiste avec raison
sur la corrélation étroite qui existe entre les forces mystiques
et les espérances ou les craintes de l'homme mais i) est
beaucoup moins frappé de leurcuractère impérieux et sévère,
qui tes fait se retrancher dans un monde ù part et s'opposer
radicalement aux impulsions spontanées des profanes ip. 419
et jumiui); pourtant eu second aspect du sacré n'est pas moins
essentiel que le premier.
Certaines formules, – au cours du livre, et surtout dans la
conclusion, – surprennent chez un auteur qui, eu général, se
IW
i.'ax.vkk socinuiiiiui'K. I9ijr.-i!iii'.i

réclame de lu doctrine sociologique dont s'inspire l'Année.


C'est ainsi qu'il réduit les rites aux
mouvements qui, néces-
saia'meut,accompaguent et traduisent le désir ip.32K,p. oi)8j;
mais entre ces gestes tout spontanés et instinctifs et
les pra-
tiques réglées, traditionnelles, em'cueesque sout les rites. il
y a uue dillérenceesseulielle. De même \amanu et le dieu qui
eu dérive ne seraient pus autre chose
que du désir et de lu
crainte, d'abord matériels, (mis de plus en plus spirituels,
que t'homme projette au dehors, objective et tend ù persouni-
lierip. :«() sq., p. 893 Rq., p. «01 sq. Muis de quelle
espèce de désirs et de craintes s'ugit-il ? Kt. s'ils ne possé-
daient déjà uue sorte d'objectivité et de transcendance, don
vient qu'ils arrivent ù dominer,
jusqu'à l'écraser, l'individu
dont ils sout censés émaner et a s'imposer ù la
croyance de
tout un groupe? M. I). suit que la magie et la religion sont.
surtout à l'origine. des créations collectives i p.(i, p.îM'n mais
on dirait parfois qu'il oublie ou niéconuall cette vérité fonda-
mentale.
Mais ces formules trop simples et trop vagues sont, eu
somme, extérieures ù l'exposé et a riuterprélation des faits;
malgré les réserves qu'elles appellent, l'ouvrage de M. 1).
reste un recueil précieux de dounées bien choisies, bien
classées, et dont l'élaboration sociologique est déjà avaucée.
H. II.
JEVOXSF. U.. –The Définitionof Magie.Themiaufogkal lie rien
I9'«f,I, j). i«:js.|.
LECHAJ. || --MagicandReligion.ThexiicMiiq'hmI
licneii-,190».
H|>. 20sq.
IIADUONA. i: – Magie and fetishism. Uiulou. ConslaMf.
1UII7,U'Jp. 'populaire
HKINKJIANN Fit. Aberglaube, geheime Wissonschafton.
Wundersuoht. I. Kulluriî. u. V.ilksk.Hi-rinvWy«<.)"J07.XVII-
2K)p., in-»-.
I.KI».lilltALHOS. – Enfermedades y medicamentosde los indi-
genas de Tong-King. /l/ittru/i»*.y. il «i|. un pas iMi'•m
lititii'
HOriilKll K Maladies et médecines à Fiji, autrefois et
aujourdhui.Anthi'i»is, liiiC,II, p. iiS-79,p. iiiijiuiw.
HICV.JKTTI-:I.. Ontho medicine-menof the Ton"a.Jmmuil»;
the anthrupoloyiciil
Iiulilulô, I'JU7,XXXVII,y. liiMSSi.
U MMJIK {W

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Among the Indians of South Western United States and
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Wusliiiidun, IUUM.

KHKIÎMKH ,1.. Bijdrage tôt de Volksgeneeskundo bij de


Maloiers der Padangsche Benedenlanden. hijdragcn loi de
Taal-Lauil ai Valkenkunileeau Xedrrlauilxvli litdifi, HUIH,VII"si5!1..
VI, 3 et 4. p i'Hi<([.

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Ilirapus, 1900.|i. V'J-liO.
IKiHLEYC. W.. Kikuyu Medioines. Mu». I9uo. w iii.
SPOKK(II. H. The powers of evil in Jérusalem. F»U;-l.me.
1907. p. !i4 <i|.

TIIOMI'SO.Ndt.i; Semitio Magic. Ils oiiuin mal <lifvi.|<i|um'iit.


I,ondi(.<.l.uziii. IU1IS,l,XVIII-2J>iip.. in-(> II ne s'afiit \n\f seuli-
menl ivriik>uiiifiie le chapitre iv tniili; <lunucrilli: «xpialuii-o cl
le cliapiln.' v iln radiât du pr'inif'i'-m'

AHT 'A. – Die Apologie des Apuleius von Madaura und die
antike Zauberei. (licssiMi.TopjH.'linann.I'.iuk,274 ji.. in-S".

HII.DUI'ItC.IIW. I. – Notes on Sinhalese magie. Journal of the


tliillirnpnhfiknl Institut/ l'JOH.XXXVIII,p. l4it-201i.
TII1:HST().N
(i: – Omens. evil Eye. Charms. animal Supersti-
tions, Sorcery. «tt. Rthnuffraiikic Soles in Soulliern Inttin. Ma-
<lms,<luv. l'iess, l'JUO,ji. ailx-SliS.
DIJKAM) K. M.) –Notes sur les Chams. Uulletii, (h- lÈnde Fr.
(fBjctr.-lMeiit. li)0ii,VI, p.-iT'.isi|.

MACI.KHF.. Formules magiquesde l'Orient chrétien, lier, de


l'hixt. des Heli'iions.190». I.VIII,p. !l-T!i.

PltADKI. ;l' Grieohische und SUditalienische Gebote. lie-


HHi(lieirpte iks Mittrlaiterx. Ih-lir/iiinmjci-di.Vemiche
jte/itrrJi-tliii/t.'ii
«. Vnrarbtiten .lii-rg^. v. Dii-ln'rli. il. Winiscli, III. ii. – (iii'-<(;ii.
Ti'i|)pi']inajili. 1!<I»7,VIll-ITil p. in-S (ri-r.Mifilîle fiilîiiuli- uiaL'i-
qilts (fl liililiittusi-s,ivcili'-iïM-ii
uiiMijiai'ili'SlUilinusau
liuiyiut\ft<-
IIANSKN(Jus.). - Heinrich Institoris. d.-r V.-Hasser drs llc-xr-n-
Immniersuntt siîiin: Tiiliukttil iin tlrv Mn^i-I,im J. liss. W'est-
iteut. Zuitsclir. (iexclt.u. huimt. XVI, i.

WdVIvI.I. 'W. II.. Studien zum abossinischen Zauberwesen.


Ztituchr. (. AugrioL,X.XUI,| 149-184.
SUO I.AX.NKRSOCIULOOIQtîK.
1<JÛ<M9O9

STKWAHTC. T.. Die Entstehung der "Werwolîsglauben.


'eitschrifl tienYm-eiiufur Votkskunik,
lUOt»,p. 30-jI (ritesoùla
peau desanimaux«îuùlrev*lu«).
1IVDK(I).. Thereligious Songs of Connaoht l.ondoii,L'nwin,
IU00.8" grandnombred<-cliarmosi.

X. KITL'KL
l'ur MM.Mtutu, Hi'Ipkrt
et IIkitx.

A. VAN (JKXXEP.– Les Rites de Passage. Paris, Nourry,


19U9,XX-300 p., in-8".
Selon M. V. (ienuep. un très grand nombre de rites sont
composés de rites simples qui se succèdent dans uu ordre
déterminé, suivant des cycles, des alternances, des séquences
nécessaires. L'un de ces groupes de rites serait formé par ce
que l'auteur appelle les rltes de passage il entend pur là
ceux qui préparent, accompagnent, réalisent, consacrent un
chaugeinentd'étut.de position, desituationsoit des personnes
soit des choses.C'est la séquence spéciale de ces rites qu'il
entreprend de déterminer.
Ils comprennent suivant lui trois moments séparation,
marge, agrégation.
Les rites de séparation ou rites préliminaires sont ceux qui
concernent l'exclusion de l'étranger, l'interdiction de la
grossesse, l'enlèvement du jeune initié, la réclusion de la fille
pubère, les isolements des fiancés, etc. Us séparent la chose
ou la personne du milieu dont elles faisaient partie. Sous le
nom de rites d'agrégation. M. V. (i. comprend tous ceux par
lesquels l'être qu'il s'agit de promouvoir à son état définitif
est enfin agrégé, accepté, reçu dans « le cercle magique »
dont il doit faire partie. Ce sont ceux qui consacrent l'entrée
de l'étranger adoption, commensalité, prêt de la femme»
c'est la présentation de l'enfant à lit terre, il lit lune, au foyer;i
c'est l'intronisation aux mem tribaux, stceux des confréries,
le sacre du prêtre, du roi c'est le rituel des funérailles défi-
nitives, etc. Les rites de marge ou liminaires sont intermé-
diaires entre les premiers et les seconds, entre le moment où
l'on s'arrête devant le seuil et celui où l'on est définitivement
admis dans la maison c'est le séjour au bois, au camp des
RITrKC SOt

hommes c'est lu période poudniit laquelle on éprouve le


jeune initié, celle du deuil et îles funérailles, etc.
Mais M. V. G. ue se couteirfe pas de retrouver ainsi ces
séquencesduos des rituels qui tout passer un sujet il'uu état
religieux à un autre et impliquent uue initiation. Il ne voit
partout que passages, avec séparation, marge et agrégation.
Il y a plus, cette loi, suivaut lui, domine toutes les représen-
tations religieuses: c'est la loimême da rythme de la pensée:
c'est l'origine des théories de la réincarnation, des morts et
renaissances de l'individu, de l'initié, de la végétation, du
monde; c'est l'origine des philosophies depuis celle de lu
Grèce jusqu'à celle de Nietzsche, etc. En définitive, ce travail
embrasse à peu près toutes les questions (lue peut se poser la
science des religions.
Kten elfet, en un sens, il est de toute évidence qu'il u'est
pas de rite qui n'implique quelque passage. Comme il n'y a
au monde que du sacré ou profane et comme tout rite positif
est l'acte soit d'un profane qui se consacre, soit d'un person-
nage sacré qui agit au bénéfice du profane, il y a toujours
changement d'étal, passage d'une condition dans l'autre. Si
l'on agit riluellemeul, c'est pour changer quelque chose.
Portée à ce degré de généralité, lu thèse devient un truisme.
Mais l'objet du livre n'est pas d'établir cette conception
générale. Ce que veut avant tout fauteur, c'est déterminer la
séquence propre aux rites du passage Or, a notre avis, la
séquence proposée séparation, marge, agrégation. u'est
pas exacte dans un grand nombre de cas. M. V. G. dit que
« la série type des rites de passage fournit l'armature du
sacrifice)) (p. iti'ij. Nous croyons, sans doute, comme nous
l'avons exposé ici-môme autrefois, que le sacrifice comprend
un prélude, l'entrée un drame, la destruction de lit victime;
une conclusion, la sortie. Maisil est impossible d'admettre
que les rites qui consistent ù préparer lit victime, les instru-
ments, les sacrificateurs et les sacrifiants ue soient que des
séparations. C'est que qui dit consécration dit à la fois sépa-
ration et qualification l'objet ou le sujet consacré acquièrent
une qualité en même temps qu'ils se défont d'une autre ils
sont agrégésen mêmetemps que séparés. La nomenctaturede
M. V. 0. est fautivesurcepoint. Elle nes'appliquepas nonplus
à lit victime, ni aux processus par lesquels ou l'expulse ou on
se l'assimile, ni il plus forte raison à ceux par lesquels on
rentredans le profane. Nous craignons, en un mot, qué ces
202 l'asxke jociuumiQi'R. juoo-iuuu

distinctions ne soient quelquepeu arbitraires. Partoutlessêpa-


ralious et les agrégations, ou, pour parler le langage que
nous employons de préférence, les rites positifs et les rites
négatifs se combiuent d'une manière inextricable. Le sacri-
fiant selustre pour sortir du monde profane; mais il se lustre
aussi pour s'introduire dans le monde sacré. Le jeûne, par
exemple, est un moyen de se détacher du moude vulgaire;
mais il accompagnetrès souvent les grandes cérémonies qui
font pénétrer le fidèle au cœur même des choses sacrées.
La méthode employéeest celle qui est en usage dans l'école
anthropologique. Aulieu defaire porti'rl'aunlyse surquelques
faits typiques que l'on peut étudier avec précision, l'auteur
fait une sorte de randonnéeà travers toute {histoire et toute
l'ethnographie. De même qu'il traite de tous les rites, il
met à contribution tous les rituels, ceux de la Chine, de
l'Islam, de l'Australie, dt l'Amérique, de l'Afrique, de l'Église
catholique, etc. Nous avons souvent dit les inconvénients dp
ces revues tumultueuses. M. M.

A. Le* calendriersrcligietu-et len[Mes.

P. HAUPT. – Purim (Beitiïigezur Assyriologie und Semiti-


scheu Sprachwisseuscliaft, VI, t\. Leipzig, Illurielis, i90<i,
.*i3p.. in-H'.

lia déjà été question dans Y AnnéeSbriologitiuede la fête de


Purim il. V, p. '2oï,.
Comme exemplaire d'un type de fêtes, elle mérite d'attirer
et de retenir l'attention. Dans l'héortologie hébraïque, elle est
aux fêtes sacerdotales, (font le système est exposé dans le
Pentateuque, ce que sont aux grandes fêtes de l'Église nos
fêtes populaires du Carnaval,de la Saint-Jean, de lu Saint-
Martin. Date-telle des origines d'Israël 1 Kst-elle poslcxi-
liqtie ? C'est une question à débattre. Klleest pourvue,d'ailleurs
d'un mythe historique, que raconte le livre iVRxtbei;où se
retrouvent les éléments à peinedéfigurés de mythes véritables
connus sous plus d'une autre forme.
Henucoupde choses se pressent dans la petite brochure du
AI. 1'. H., mais ordre n'en est malheureusement pas facile a
suivre Dans la fête de Purim, fêle du commencement du prin-
temps, coïncidant,,vmo mniln.nvoc.l'éqninoxe de printemps.
on reconnaît t'ancienne tète perse du commencement de l'an-
iiitcki. 203

uée u\aurô;), ot, non moins clairement. la fête mésopota-


inienue, ineutiounée si souvent dans les inscription», par
laquelle s'ouvrait le premier mois du calendrier. La première
d'itilluurs coutinuait Indeuxième. Pendantl'exil, les Hébreux,
qui, en d'autres temps, ont fuit commencer leur aimée eu
automne, ontsuivi l'usagede la faire commencerau printemps.
Il est naturel qu'ils aient fêté leur « jour de l'an » et qu'ils se
soient conformés, ce faisant, à la pratique de leurs voisins.
Mais cette même fête de f'urini est donnée par la tradition
juive conune la commémorationde la grande victuire rempor-
tée à Adasa, le 13a<ltwde 130avant Jésus-Christ, par Judas
Macchabéesur le gûuéralsyrien Nicunor. Peut être la commé-
moration de cettevictoire nationale u-l-elleatliré au I l mlarla
célébration de la fête du printemps. Peut-être cette célébra-
tion se plaçait-elle a In moitié du douzième mois, pour la
même raison que la fête de Pâques se trouvait placée le 14du
mois suivant, Nisan.
Le livre d'Ext/irr est un récit haggadique approprié à la
commémoration de la victoire d'Adasa. Le livre de Judith en
est peut-être un autre. M. H. reconnaît dans les personnages
du livre û'Rilher quelques personnages historiques, mêlés de
près ou de loin aux événements commémorés.Ilaman repro-
duit les traits de N'icauor, Assuérus, ceux d'Alexandre lialas,
Esther, ceux de Cléopdlre, femmede celui-ci, ou d'Irène, favo-
rite de Ptolémôe Philamétor.
Miiiste cadredu récit appartient àlatradition mythologique
et littéraire de l'Iran et de la Syrie. Déjà le grand arabisant
De Goejc a montre qu'ilétait identique à celui qui renferme
les Mille c.(Une naih, et que Scheherazade était une autre
Esther. M. H. en retrouve tes éléments dans l'histoire de
la chute du faux Smerdis et des mages, rapportée pur Héro-
dote (III, 68;.
Los personnages out des prototypes mythiques. Lenon)juif
d'Ksther, Hadassjih, esta peine déformé du nom babylonien,
Cbdilnshihatn, épouse, qui pourrait être un surnom de la
déesse Islitar. Dans les noms d'I/nm'in et de Vaxtlii,ou aperçoit
peut être les noms de deux divinités élamites, chumbabti
elMuiilitt. Strabon (313;,à proposde la fête deSakaiti,qui n'est
autre que la fête chaldéo iranienne du printemps, nomme
deux soi-disant divinités perses, 'îl^avii;et "Aviôsrro,Dansces
noms déformés on reconnaît les pendants de Maman hen-
Kainuie-datha.
204 L'AN.N£K lilOtM'Jl»
SUtilOMllUQUR.
Pour rendre compte delà fêle elle-même, M. H. recourt au
texte des Septante (9,26), qui traduisent son nom
par sorts
(*M?*i).Danstes versions grecques, Purim se trouve transcrit
par*povjiaiou wJfoSn,ce qui conduit à supposer comme pro-
totype perse un mot pardi1,apparente au védique parti, qui
siguille portion. Portion, c'est sort, Vu pareil nom suppose
de ces pratiques de
divination pur tirage de sorts, qui sout
des plus fréquentes parmi tes rites du commencement de
l'aimée. |[ jj

\V. SCllMtOT. – Geburtstag im Altertum


(Religionsges-
chiclitlielie Versuclie und Vomrbeiten,VII,).
Giossen,T<ipel-
muiin, 1908,XIV-130p.
C'est de 1»commémorationdu jour de naissance
qu'il s'agit
daus ce petit livre. Mais la notion du natali* est devenue fort
élastique et elle s'est étendue, dépassant le cercle étroit de la
vie individuelle, à plusieurs sortes de fêtes,
qui n'ont en
apparence rien de communavecson objet originaire et spécial.
Les investigations de l'auteur se sont bornées à
l'antiquité
grecque et latine, JI ne fait pas d'incursions au dehors. Nous
ne nous en plaignons pas. Des recherches limitées à un
domaine déflni, mais aussi complètes que
possible, éclairent
mieux l'étude d'un phénomène social que des feux d'artifices
de citations ethnographiques,
M. W. S. est fort préoccupé de savoir
quelle relation il
Il entre la commémoration du jour de naissance des iudivi-y
rlus et la commémorationdu jour de naissance des
dieux, car
celle-ci est attestée par les plus anciens
témoignages. Ques-
tion mal posée sans aucun doute. mais la
réponse est intéres-
sante.
Elle faitenlrerenliguedecomptelacroyauce. également
répandue chez les Grecs et chez les Homaius,à l'existence
d'un lien de dépendance et de protection entre
chaque indi-
vidu et une divinité, quelle que soit celle-ci. Chez les Ro-
mains, la divinité personnelle est le yenim ou ta
juno; les
Grecs ont des ô*v«''«;y«v«1ws.La célébration du
jour de nais-
sauce est faite en leur honneur. Mais ces
patrons ne sont cer-
tainement pas indifférents.Chezles Grecs,au moins, l'attribu-
tion du patron divin est commandée
par les particularités du
jour même de la naissance. Ils eurent très anciennement la
notion d'une prédétermination analogue
à la prédétermination
astrologique. Or, certains jours du mois et de l'année sontassi-
IIITUEI, 205

gnés à certains dieux, par exemple le 3, le 4, le 7 de chaque


mois, respectivementà Atliémi,Hermès, Apollon.Cesont leurs
jours de naissance. Ceux qui célèbrent à pareille date tour
propre jour de naissance, fêtent est même temps le dieu du
jour. C'est qu'ils se trouvent sous son invocation. A telles
enseignes que cette relation de patronat a pu commander le
choix de leur nom Karnôadeest né le jour desKanieiu. Le
jour de lacommémoration est désigné comme •<>{' x «wûvujwfoç,
sur une inscription de Patmos (p. 34 Jour de naissance,
patronal divin, épuiiyuiiu sont des notions qui s'appellent
l'uue l'autre. Cheznous, la célébration du patron et cette du
jour de naissance sont essentiellement équivalentes.
La raison nécessaireet sullisante pour litcélébrationdu jour
de naissance, c'est le retour, à intervalles périodiques, d'une
même date, date assez critique dans la vie d'un homme pour
que sa destinée y soit rassemblée tout entière. M. W. S. l'a
sans doute cousidérAcomme allant de soi, car il ne s'est pas
occupé de le montrer expressément, Il eut été pourtant utile
de rassembler les textes qui montrent quelle était à cet égard
la façon de penser des anciens. La périodicité de la célébration
était mensuelle ou auuuelle. M. VVS. inclineà penser qu'elle
était mensuelle à t'origine, considérant que, pour la naissance
des dieux les plus importants, manque l'indication du mois
elle était donc secondaire; celle du jour du moisl'emportait.
Mais si lit date elle-mêmecommandait la célébration,cette
date comme toutes les dates de fêtes était sujette à déplace-
ment C'estle résultat d'un pareil déplacement qui embarrasse
notre auteur quand il arrive la commémorationde la nais-
sauce des morts, en Grèce. Les-tWï' sont-elles une comme-
moration privée du jour de naissance d'un individu? Sont-
elles une fête générale du 8 boédromiou, a Athènes?Elles
sont à la fois t'une et l'autre. La date de lit fêtecollective des
Ceuesia, de même que celle des Pairutulia, équivaut exacte-
ment pour chacun des individus tombés dans la masse des
morts à celle de sa naissance individuelle. Demêmeque toutes
les commémorations possiblespour un seul individu tendent
à se grouper en un seul jour, de même toutes les comme-
morations semblables pour une collectivité.
Les natales, de fêtes privées, pour les personnesprivées, sont
devenues fêles publiques, chaque fois qu'il s'est agi de per-
sonues publiques. Un long chapitre '11, p. &-J,sq.i est con-
sacré aux jours de naissances (tes princes successeurs d'A-
200 t'A.NNKK lMUtt-lDO«
SOUIOLOOIUUK,
lexaudre et des empereur» romains. A ce niveau, la notion du
uatulis était facile à détacher de sa signification première.
Toute commémoration, celle de l'élévation au pouvoir entre
autres, devenait un uatulis. Bientôt npris, ce fut celle de la
mort c'est le cas de nos saints.
L'extension du sens ne s'est pas arrêtée la. La notion du
jour de naissance s'est appliquée aux choses. Lu fondation
d'une ville. celle de Rome eu particulier, a été commémorée
comme uue naissance. L'extension totale de la notion de fête
était capable de rentrer dans un pareil cadre. C'est, en effet,
ce qui s'est produit.
A Kome, beaucoup de fêtes spécialement attribuées à des
dieux déterminés sont les nulale» de leurs temples. Eu Grèce.
où le jour de naissance d'uu grand nombre de divinités est
fixé, c'est tout au plus si les Puuathéuées. parmi les tètes des
grands dieux pourraient être considérées comme une commé-
moration de la naissance d'Athena. La liturgie n'a pas suivi
pas a pas le concept même de la fête dans l'évolution qui
l'amenait à se confondre avec celui, du jour de naissance
divin.
La suite de faits que M. W. S. constate dans la religion
grecque et dans la religion romaine s'est produite ailleurs.
Nous sommes à peu près en mesure de suivre la trausforma-
tion de nos fêtes saisonnières en fêtes patrouales. Toute
fête tend à être la fête d'un personnage qui a vécu d'une vie
humaine. Or lit fête d'un homme, c'est son natalix. Ainsi les
Grecs ont inventé le héros no^-iw; dont le jour de naissance
est naturellement le premier jour du mois. H. H.

SRLBR> FOERSTEMAXX (E.), SCUKU-HAS, etc. Mexlean


and Central American Antiquities, Oalendar
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Kspaituuaavanen
el tieinpod« sua inlldelidad.Aullttvpos,J'JUU,
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la
pour preinii!i-n foispur l<?
I ».Sclimidti.
DEJO.WHK;K Lecalendrier mexioaln. Jvunt.Soc.American,
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A. Mot-ci. Paris, K.Lfioux, 1«O7,V-I35p., in-8".
UITUEL 201

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druaa. Wcc,rfe»fit. Ktkaugr.etSoeint.,lUOH,
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1US.
(iUIMMIC
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denkult. M07.iu-«».
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L. VONSCimOEDKR. – Mysterium und Mimas im Rig


Veda. Leipzig, llaessel, 1908, XII-«)0p., in -8°.
M. von Schroeder u été frappé par Jes travaux de M- Heicli
sur le mime, de M. Preuss sur les rapports entre le mime,
les cultes agraires et phnlliques, les origines du théâtre eu
Grèce et dans le Mexique ancien >cl. AiméeSoriol., t. VIII,
[i. MO,Gli3/ il lente l'application de ces théories au rituel vé-
dique et aux usages des anciennes religions curnpik'mifis.
Le Kig Véda, le Véda des hymnes, euulient, en ellet, un
certain nombre d'hymnes dialogues. Or, à ceux qui ont le
plus expressément le caractère de dialogue, la tradition brah-
manique n'attribue pas «l'emploidans le rituel. M. S. Levi,
M. Hertel, après Weber. y uni vu les premières formes cou-
nues du drame dans l'Inde. M. v. S. entreprend d'éta-
hlir qu'il y faut voir, de plus, uuc ancienne forme du rituel,
e

208 L'ANNÉESOCIOLOGIQUE.
ISi18-I90'J

et, eu particulier, du rituel agraire. Dans le Rig Veda.


le dieu est souvent représenté comme dausuul, comme
mimant une action. Encore aujourd'hui, les mystères
que
raconte l'épopée sont l'objet de représentations
scéniques
daus les temples et hors des temples. Ou peut donc
supposer
que, tout eu défigurant savamment le rituel populaire, les
brahmanes en ont gardé quelques usages, notamment ceux
du mime religieux. Ces dialogues ne supposent-ils
pas des
rôles que jouent des acteurs? Le dialogue des Maruts et
d'Indra (11,i) devient intelligible quand on y voit uu court
drame entre dieuxrivaux et associéset quand ou le
rapproche
des danses du sabre et des combats contre le dragon
qu'on
rencontre en pays germanique. Le dialogue du poète védique
et de la vieille femme (R. V., I, 179,s'explique s'il
représente
un rite phallique, un coït obligatoirement pratiqué lors du
solstice d'été pour la fécondationdes femmes et des
chainns
(H, H;.
Les déductions de Al. v. S. paraîtront parfois systéma-
tiques et ses rapprocliemeuts peu justifiés. Le chaut d'Indra,
ivre de Soma (R. V., X, 119) relate l'extase que produit, chez
le buveur, la plante divine intoxicante mais ni le texte ni
l'emploi rituel de l'hymne n'implique qu'il ait été mime
ip. 363). De môme, les hymnes aux grenouilles, productrices
de pluie, ne sont que des incantations religieuses; un n'est
donc pas fondé à y voir un commencement de mime. H
y a, il est vrai, le mime germanique du laubfroseti, mais de
quel droit se servir de ce mime très folklorisè et, par cela
même, obscurci pour interpréter le rite védique, très clair est
lui-même? La pratique de la méthodecomparative ne réussit
pas toujours à M. v. S. On est surpris de le voir confondre
le « mai » et le mût de cocagnequi ne sont pas nécessairement
identiques (p. tâl, 422; ou se servir des mythes crétois pour
reconstituer la mythologie indo-européenne ip. 18 et lis el
suiv.). Encore faudrait-il savoir si les Crétois sont des Indo-
européens.
Mais il reste qu'il a eu le mérite de rechercher dans le
Kig
Veda lui-même les traces des rites agraires, et, eu
particulier.
de ceux d'entre eux qui ont un caractère phallique. Le Véda
rentre ainsi dans un cercle de cultes et de croyances dont hou
nombre d'auteurs voudraient le dégager. De plus, M. v. S
a réussi à montrer de remarquables coïncidences entre
les rites védiques et ceux de l'Europe ancieuue.
Or, si les
IIITl'KI. 209

prétentions de l'aiicienne école philologique ne sont plus


défendables, s'il faut «jouter d'autres méthodes û l'aualyse
indéfinie des noms et des thèmes mythiques, il ne faut pas
oublier 1» parenté certaine. non seulement de ta langue, mais
de lu religion védique avec les formes primitives des reli-
;yons de l'Europe ancienne, tant chez les peuples classiques
que non classiques. M. v. S. va plus loin, il est vrai; il
annonce qu'il est en train de reconstituer la religion indo-
européenne. Sur ce point, il convient d'attendre, avec une
sage réserve, les résultats de sa recherche M. M.

MATHKWS(H.-ll.). Inltiationszeremonie des Birdhawal-


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suiv.
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tion, enterrement'.
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t. Vousn'in^istuns[iixasurludûtuil.Mulson^sltUonuiS dutrouverdans
un livraaussisériouvune plirasrcorntuR ccilu-cia Nousdansionsavant
i|ue nousfussionsdusliotuiucit » (p. SI,n.);oudmaOirmulions peu sûres
commecelluqui attribueun «araclAri» exclusivKinnnl
bouddhisteauv
l.iii.it-s
de»masqui'<tuTlitlioli]>.77).
OrnKiiciu. AnniV -tori'il., CHIOtOWi |(f
iit) I.'a.NNKI-; SOCIUUXilUCG.19U0-t'J09

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I9UQ.
tJOI.DZlIlKH Die Bedeutung der Naobmittagszeit im Is-
lam. Arehic f. IMigionu-iss., louit, IX, p. i'Xi sq. icaractère reli-
tiicux du soir).
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delà forme normaledu Sacrificede Suma dans k culte védique, vol.
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thern Indin., Mmlras,l'JOO, p. !H() si|.

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mit Rttcksicht auf PrlesterundBusser. UipzigerSemi-
iisehe Studinn, 111, I. Leipzig, llinrichs, 1908, XIMI2 p..
in-84.
iutukl 211i
.Io~.I_I_ .·
On no trouvera pas ici un tableau complet du rituel expia-
toire babylonien. Il est à peine question dans te livre des
représentations, personnelles et impersonnelles, que ce rituel
implique, du sitcrifice expiatoire, des rites manuels et des
instruments et substauces qui y sont employés L'auteur se
propose do revenir sur ces différents points; pour le nioineut,
à part quelques considérationssur la fonction du rituel, il se
borne à déllnir avec méthode et précision I» nature et le rôle
des agents humains, prêtre et « pénitent », et à caractériser
les divers rites oraux conjuration, hymne, complainte,
action de grâces.
Le mot, impropre mais commode, de rites expiatoires
désigne, chez les Babyloniens, une masse énorme de pra-
tiques, matière d'une liturgie touffue, domaine d'une classe
spéciale de prêtres, les ashipè. Ceux-ciforment une corpora-
tion fermée, iuférieure en rang à celle des prètres-devins
mais sans doute plus nombreuse, se réclamant du dieu Ea et
secondairement de Mardouk, ayant pour centre mystique la
ville sainte d Éridu. Uashipu réunit eu lui des personnages
divers; il est magicien, médecin, purificateur officiel, exor-
ciste il intervient dans les rites funéraires et le culte des
morts. Toutes ces pratiques, depuis la simple contre-sorcelle-
rie jusqu'aux lustralions solennelles des palais et des temples,
out pour commun objet de « délier », c'est-à-dire d'éliminer
un mai pour remettre les choses ou les gens en leur état nor-
mal.
La spécialisation avancée des fonctions sacerdotales n'ex-
clut donc pus, en Babylonie, un groupement très primitif, des
attributions et des pouvoirs. Dansle rituel de IVu/iipu, à l'iu-
lérieur d'une môme cérémonie, s'entremêlent la lustration
par l'eau, la magie curative, le banuissemeul des démons, la
propitialion des dieux irrités. Même confusion dans les
représentations péché, ensorcellement. impureté, maladie
et mort, colère divine, – tous ces termes (ainsi que leurs con-
traires) reviennent au même. M. S. insiste avec raison sur
ces équivalences il y voit un produit de l'évolution qui
aurait rapproché et combiné des notions, d'abord distinctes
et hétérogènes. L'expérience des religions plus élémentaires"
exclut, croyons-nous, cette vue des choses, d'ailleurs arbi-
traire la confusion u est pas ici l'effet du syncrétisme, elle
est origiuald, primitive, essentielle.
R.H.
212 l'année soDioLomguK. iwa-luuu

IIOHSON(T. < Head-huntlng amongthe tribes of Assam.


PolkLoin,1800, p. 132si|.
FlUBfoKHlci<(;.). Soalplereuu.aehnUoheKriegsgebraeuoheln
Amerika. Hraunschweig, Yieweg u. Solm, 1900, in-8", 172 p. (k-
trophée et nuit k«culte des crânesserait l'essentiel de l'usage).

WKSTKH.W.UICK(B. PABTHIIMJK(C.>.– The Killingofthe Divine


King..«««. 190». » », ii" 29 ila discussion est bien insufli-
suUe.
HOSE II. A. Hindu Birth observances in the Punjab. Jimr-
naloftlic AiUhropaluiiiettllustituh: 1907, XXXVII,p. 220-230.
HOSK II. A – Muhammadan Blrth observances In the Pun-
jab. Juunuil of the Aiithrnpolmjie»!instUuh:, IWil, XXXVII.
|i. •r.n-iûQ.
HEWITT. Some Sea Dayak tabusJ/u/i, iyO8, ir ioû <lntei\lits
imposés aux femmps pendant uni- expédition1.
MAKTItOU'J,ocis;. – Les « Eki » des Fang. Antlwopos, l'JOO.
p. 745-701..Systi-UK-
d'interdits, dont quelques-uns totémiques;.
lillOKMWAX(A. M Het vasten bij Israël. Een verglljkend
onderzoek. Lcyde, l'JOO,XVI-331p.. in-fc".
UUKCKKNHOKK (K.). – Speisesatzungen mosaisoher Art, iu
mittelalteW. Kirclienrechtstellen des Moigen uud Abendlandes.
Mi'mstcri. \V., A>cliendoi-ll',in-b".
KHAL'S.SS.|. – La défense d'élever du menu bétail en Pales-
tine, lier, «tes El- Juim. 1907, l. LUI,p. Usq.
WKSTKHMAUCK ,K.. The principes of fasting. Folk-lore, l»û7.
XV11I, p. 3<j|-V2;i.
IKJDSO.NT. C\ – The « Genna » amongst the tribes of Assam
Journal of Ihe Anthvopologiealliutlitute, 1908, XXXV'I, |>. 92-10;*
(Inli'M-ossanUtétude sur les interdictions rituelles).
MI'ELLKH(.Knimis, Wahrsagerei bei den Kaffern. Anthropoa..
1906,p. 762-778,l«J07.p. 4:i-;i8.
TUL'UN ;C.; – Die etrusklsche Disziplin. 11. Die Haruspicin
iïïteborgii Hàyslvlus Aarskrift, I90B, lj. fiôteborg, Weltcrgri'ii.
1906, p. r.J, in-8".

U. – liituel oral,

V. CABKQL – Les origines liturgiques. Paris, Lutouzev.


1906, Vlil-372 p. iu-8".
IIITtJKt. H'i

Cet important ouvrage se compose de deux parties sensible-


ment égales une série de leçons, qui forment une étude à lit
fois historique et dogmatique puis, sous forme d'appendices.
un groupe de documents et de dissertations critiques. La pre-
mière partie ne traite pas seulement des origines liturgiques
mais des caractères généraux dela liturgie catholique. Lesori-
gines sont juives pour partie prières, psaumes, la composi-
tion môme de l'nvant-niesse viennent de lit tradition synago-
gale. M. C. fait de sou mieux pour réduire la part du giios-
ticisme dans l'élaboration du reste. Le principal, dit-il, en
est antérieur au gnosticisme. Mais il faut s'entendre sur le
tîuosticisme. En somme, la liturgie chrétienne a reçu de tous
les milieux que le christianisme a traversés. M. C. étudie
successivement la messe, dont il explique la division en
deux parties, avant-messe et messe des fidèles, laquelle com-
prend le sacrifice eucharistique, la liturgie du baptême,
comme type de liturgie sacrameutaire, enfin la composition
môme de l'année liturgique autour de Pâques comme pivot.
L'ouvrage débute par de fort intéressauts développements
sur l'esthétique de la liturgie. Nous avons été déçus de ne pas
voir l'auteur analyser le caractère dramatique de lit messe
sacrificielleet du déroulement annuel des (êtes. H.Il.

l'HKl'SS(K.T.).– DieReligioegenOesaengemidMytheneiuiger
Staemmeder MexikanisohenSierra Madré.Arehivf. HtUyiottu-
uifs.. IU08.XI,p. 309sq.
MATTHKWS (W.)«tt;»DI>AHD(l».K.).~ Navaho Myths. Prayers
and Songs. Uiiiv.ofCulif.Public.Am.Areh. a. Klhn».V. 3. 1007,
p. 21-03.
KLKIN. Die Oebete in der Didaohe. Zeitwhriftfiir ileu HcalvtOt-
mimtl. Wbtewicliaft. 1908.p. 132-1*6..
SCIIMIDT ;il.j. – VeteresphiloBOpbiquomodojudicaverint de
preoibus. R«>lig]onsg(!!>cliirlitlîcli«Vursuchfi»n<l Yorarlicituii
(licrfrg,Dii.'lricliu. Wiinsch.,IV., I). liinsscii,Tiipclmann.lUO".
p. 7i. ili-8".
– Schelten undFluchen..Uch. f. IMigiwituÏK
UAI)KUMA<:itKU.
1907,XI.p. 10sq. (Importantpour IVtude«lela prière en tîW-ce.)
III.A1;[\). – La récitation du Schéma et de la Hatara. lier, r/c*
Kl. Juin. !«(». I.V, p. *W s,|. Itôpoiiw fl'KllioRe». ibùl., I.VI,
|>. î'22sq.
IIKI-l.KIt(l(.) Lenom divin de vingt-deuxlettres, fia-,ticsEl.
Juieex.l'JOii, p. OOsij.;cf. Kamenutsky,ibidem.I.VI.p. 251sq.
-I* L'AS.VKK
*oU(UH)ai«(ÎB.ÎUOO-I'JOÏ

BMMWBN{J. – Studien sur ftesobiobte des


jildisohen 0»ttes
dienstes. B«rlin. Mnller. l»07. Vlll-192 p. iu-s-

Xi. iiBJKTSETUKL'Xl)K IXLTi;

MKYKR[H. M. – Fetisonismus. Arckiv f. lktiyhiiswU* l'jOS. XI.


p. HîOstj. (intéressant).
ItKIXACH(A. }.). Pila Horatta et Pilumnoe Poploe. Her
tl'llist. du lUliy. 1907. I,V. p. 317, sij.
IIOKPLBU(M.). Die Krapfen. Zeitsehrift îles Vereiiis fur Vullu-
A-«/t(/e.1907.|>. 65-75.
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churl. 1908. 40 pasex.
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KIMiXKKLU lî.M.– Der Weihnaobtsbaum. Bolanik und (Jeschi-
chte des WeihiuichlgrQiis. Seine
Beïielmn«en ?.. Volksglaubpii.
Mylluts, Kultur({(.'si.'lii(:|il«,
Sape. Sille u. Uiclituiif:. Oldeuburu
Seliullze. 1907,VII1-233|i.
VVIKUNf)(P.). – Mensaund Confession. Sludicn oberdon Allar
1er nltcliristlicticu l.ilurttio. I. Der Allar der vorUonslanlinisulion
Kirulie. Mâucben, Unifier. 1900,XVJ-J07p.. io-H".
(Apparition de
l'oulcl dansIViglisfi catholique.)
HHADf (J. Die llturgische Ctewandong ins Occident u.
Orient, nacb IJrsprunp u. Eiitwicklunjj. Vcrwandun^ u.SyraLolik.
Kreiburj!i. H., JJonJor.i'JO'i, in-8".

XII. KKI'KKSKSTATIOXS
RKUGIEUfsBS
l'ur MM.Mai»?.Dustom.•! IIoukut.

A, – lieprêtenlatiom tl'Hrrs el de filmomhwn naturels.


A. C. KRU1T. – Het Animisme in den Indischen Ar-
chipel. La Haye, Nijliotf, 1900, XiV-îiiJ p., iu-S-.
UKi'ltliWîXT A FIONS l(KI.|i.lKLSK> £{!>
'IF

Il lit II II lin lin lin Atjrit 4 t i Jt 1 t ,1,1 aik ,.11 19. i_


L'objet primitif (Jece livre était de mettre à jour l'uuvroitc
classique de Wilkeu sur le inftme tiruliîpul. (inkeasestobser-
vidions personnelIps 'M. K (ut missionnaire chez les To-
railja de Cèlôues), grâce aux informations que lui ont corn-
muuiquées ses collègues, très bleu au cuurunl, d'ailleurs, de
la bibliographie du sujet, M. K était préparé pour ce travail
du réunion.
Mais là ne s'est pas bornée sou œuvre sur un point essen-
tiel, il ditlèrede suit devancier. de l'école an-
thropologique anglaise, plus près même de M. Tylor i|iie de
Koberlson Siuith, Wilkeu faisait de la notion d'urne indivi-
duelle. personnelle, le principe de toute» les croyances reli-
gieuses, et, avec M. Tylor, il voyait dans cette notion l'expres-
sion du sentiment de la personnalité, renforcé et précisé par
les expériences du rêve. Or, M. K. constate que les faits,
mieux connus, débordent cette explication. Suivant lui. lit
notion du moi, de l'iudividu, est impossible à la plupart des
Indonésiens ip. ii la faiblesse de leur conscience est presque
un trait fondamental de leur mentalité. Le langage a les plus
grandes peines pour t'exprimer, et, la plupart du temps, con-
fond l'âme avecle corps ou un organe. Ce que l'individu sent
eu lui pendant sa vie, ce n'est pas uu principe iudividuel, une
âme au sens ordinairement donné à ce mot ce serait une
substance spirituelle impersonnelle,Xieltstof, plus ou moins
localisée ou généralisée, mais toujours sujette aux méta-
morphoses, aux transports, aux confusions. C'est, pour
employer l'expression dont nous nous servons couramment
ici, du manu, logé dans le corps, étroitement parent de celui
qui est diffus dans le monde. Il est ineinesi pou individualisé
que, quand il quitte le corps, il cherche à se loger ailleurs,
soit dans un autre organisme humain, soit dans un tinimal,
soit dans une plante (pp. 2, 385). C'est donc une conception
essentiellement panthéiste qui préparait admirablement les
Malaisà recevoir une partie des doctrines de l'Inde (p. 487j;
car l'âme humaine, ainsi conçue, n'est qu'une parcelle de cette
vague énergie qui est répandue dans toute la uulure et qui
est comme lame de l'univers. Aussi n'y a-t-il pas dissolution
de continuité entre les différents règnes hommes, animaux,
piaules, objets de toute sorte sont faits de la même substance
spirituelle (pp. tâO elsuiv., 1315etsuiv.
Bien que AI.K. ne soit pas un théoricien, qu'il s'interdise
même les questions d'origiue, il croit devoir signaler un ra.p-
îîllS L'AXXÉKSOCIOI-OGIOl'K.
190B-1U09

port, qu'il croit apercevoir entre la conception que nous


veuons d exposer et la structure primitive des sociétés indo-
nésiennes. Certaines tribus vivent encore eu plein commu-
nisme lu société humaine forme une masse compacte, indi-
vise, sans parties différenciées,où lit nature elle-même est
comprise; par suite, les individus, les espèces y sont coufou-
dues. C'est à cette organisation sociale que correspondrait
cette notion d'une substance impersonnelle, racine commune
de toutes choses. Aussi, Ii mesure que la société se différen-
cie, que le mouvemeutd'individuation s'y accentue, nonseu-
lemeut l'iiomme se sépare de l'univers, mais les hommes ten-
dent rase distinguer les uns des autres. C'est ainsi que l'auteur
explique les formes persounelles que prend lu substance ani-
mique. Delà viendrait la notion du double, qui peut sortir du
corps à titre temporaire. Mais. malgré sa plus grande indé-
pendance, le double reste relié au corps; il en est insépa-
rable. Ce n'est qu'un aspect plus personnel de l'ame imper-
sonnelle (p. 66etsuiv).
C'est seulement à la mort que la notion de l'âme propre-
ment individuelle prendrait naissance. Il est trop clair. eu
effet, que la plupart des pratiques funéraires et les rites du
deuil la supposent. Aussi, quand, dans la seconde partie de
son livre, M. K. aborde ces questions, il suit de nouveau
Wilken et Tylor. II ajoute cependant à leur théorie deux
intéressantes contributions. D'abord, il apporte des faits nou-
veaux qui confirment l'explication que M-Hertz a donnée ici-
même (Anm'eSociologique,t. X) des longues funérailles et
du double enterrement. Puis il insiste sur un côté impor-
tant du deuil c'est l'effort que font les parents pour ressent-
bleraumort, pour être mort commelui, pour vivre comme lui
au pays des morts 'p. 21'2,281, 289;. (I explique cette imita-
tion par le désir de ne pas irriter le mort, de ne pas môme se
faire remarquer de lui. Ce sont de ces mobiles étroitement
utilitaires auxquels recourt volontiers l'école anthropolo-
gique. Nous doutons que ce soient les vrais.
On voudrait savoir quel rapport il y a, suivant M. K., entre
cette conception de l'esprit individuel et la notion du Xielexto/.
Sont-elles tout à fait indépendantes t'une de l'autre, ou biou
doit on n'y voir que deux moyens d'une même évolution? ·
Nous savons que, sous l'influence de conditions sociales, le
Zielestof est susceptible de prendre comme une apparence
plus personnelle chez le vivaut l'âme du mort ne serait-elle
HKI'UÉSBSTATIONS
REI.HÎ1ECSES 217

que l'aboutissement logique de ce mouvemeut? D'après cer-


tains passages, ou pourrait être tenté de croire que la seconde
solution est celle vers laquelle peuche l'auteur. Il dit, en
effet (p.il, que les premières Ames qui aient été conçues
comme survivant au delà du tombeau et y gardant leur indi-
vidualité, sont celles des chefs, c'est-à-dire des membres de
la société qui se sont les premiers et le plus complètement
individualisés. Mais, en fait, M. K. refuse d'aborder de front
la question il se borne à constater qu'il rencontre les deux
notions et il s'interdit de rechercher si t unevient de t'autre.
Aussi ces deux catégories de faits suut-elle» étudiées dans
deux parties tout à fait distinctes de son livre la première,
intitulée Animisme, traite du Zieleslof lit seconde, qui a pour
titre Spiritisme, est consacrée à l'âme personnelle et aux rites
qui la concernent. Il n'est pas nécessaire d'insister sur les
inconvénients de cette terminologie.
Elle ne fait, d'ailleurs, que mettre eu relief l'erreur qui,
suivant nous, est à lit base do ce très intéressant ouvrage.
Assurément, M. K. ta eu le mérite de sentir que la notion de
l'almen'a pas la simplicité quelui attribue Tylor, qu'elle n'est
qu'une forme particulière d'une conception beaucoup plus
générale. En montrant que, chez les Indonésiens, elle se rat-
tache à l'idée de manu, il a apporté une preuve de plus à l'ap-
pui des idées dont nous nous inspirons ici: Mais ce qui nous
parait inconciliable avec les fails, c'est lia solution de conti-
nuité qu'il admetentre l'aine qui anime le vivant, et celle qui
constitue l'esprit du mort. Xous craignons qu'il n'ait trop
penché dans son sens et. outréune vérité importante au point
de lui nuire. Frappé de ce qu'il y avait d'impersonnel, dans
l'Amedu vivant, il l'a définie tout entière par cette imperson-
nalilô. Or, en fait, elle présente également le caractère cou-
traire. Assurément,ileslincoiiteslabloqu'ellese répand,qu'elle
se dilluse, qu'elle fuit par les ouvertures comme une force
quelconque niais, est même temps, elle u toujours lu marque
du sujet en qui elle réside, ou plutôt avec qui elle se confond.
(l'est d'ailleurs, ce que reconnaît M. K. lui-même, puisqu'il
est bien obligé d'admettre que lit notion du double existe dès
cette vie or entre le double du vivante! l'aimedu mort, il n'y
a que desdifléreuccs de degrés et des nuances M-K. semble
croire, il est vrai, que l'idée du double n'apparut qu'à uue
époque plus ou moins tardive. Mais l'hypothèse nous parait
gratuite nous ue croyons pas qu'il existe une société où cette
•218 l'ANNIiK SUUOI.(HilQl'K. !WMÎWI

idée lasse totalementdéfinit Eu tout cas, il partir du moment


où elle existe, ellune (litière ]hisBj«*('itii|iieu»Rat
de l'unie du
mort,»<t comme, «l'uu autre côté, elle dérive, do l'jiveu de
notre auteur, du Zielestof, c'est donc que ce dernier, n'est pas
réfractaire à toute iudivhluation. Ce qui achèvede rapprocher
ces deux concepts, c'est que les esprits des morts n'ont eux-
mêmesqu'une individualité relative et plus ou moins pré-
calro Celle-ci est, shijs doute, très accusée peudaut le deuil,
mals peu à peu elle s'eflace et l'âmedu mort devient unprin-
cipe plus ou moins abstrait, qui se confond avec l'âme du
groupe jusqu'au jour où elle s'en détacite à nouveau pour
veuir animer un autre corps. Cette impersonnalité prouve
qu'elle n'est elle-même pas suus rapport avec ce Zielestof
auquel ou l'oppose.
La troisième partie du livre est consacrée aux dénions et
aux dieux Ici. les documents rassemblés sont moins nom-
breux et plus courts. Nous craignons, d'ailleurs, que les ten-
dances apologétiques, franchement avouées, ch notre auteur
(p. IX) n'aient fortement aflecté su façon de voir et du grou-
per les faits. L'animisme, pour lui. n'est qu'une régression à
partir d'une révélation primitive. Nous ne discuterons pas
cette thèse la révélation du Xielexlofesl,en tout cas, peu d'ac-
cord avec celle de lit Bible.
On s'étonnera que M. K. n'ait consacré aucun paragraphe
au totémisme Sans doute, il ne faut pas attribuer au toté-
mismetoutes lescroyauces relatives aux rapports de I homme
avec les animaux. Mais, au moins chez certains lîutlak, il y a
du totémismeet même un totémisme très compliqué. Il eut
été important de ne pas le passer totalement sous silence.
M. M.
K. PECHUEL-LOESCHK.–Die LoangoExpedition. III, i.
Stuttgart, Strecker et Schroder, 1907.803 p., in-
L'expédition allemande de 1873,à la côte de Loaugo, dont
les membres étaient Adulf Baslian. les docteurs Paul Uiiss-
feldt, Julius Fiilkeiisteiu, Eduard Peehuël-Loesehe, a com-
piété, sinon achevé sonœuvre. En 1875,Adolflîastian publiait
deux volumes relatifs a l'expédition. Il y classait et localisait
les faits les plus importants qu'il avait pu recueillir dans la
littérature ethnographique congolaise. Il essayait de les relier
aux observations qu'il avait faites, donnant ainsi une pre-
mière esquisse des publications ultérieures. L'expédition avait
KKl'HKSB.VtAÏIuNS IlKMtiIKUïK» 2<U \.1

l'ii efltet, eutrepns uuu publication d'ensemble. En


187!),eu
paraissaient tes deux premier*Fascicules le premier, du
docteur(ïûKsfeldt.coiitfiiiHitlhistoire et ntinéniire du voyîiiço,
accompagné d'uue carte le second, du docteur Kulkeinsluhi.
décriviiit lu situation de la station de r*eltintxdtalsrlw fondée
par l'exnédiliou sur la côte, entre l'embouchure du l.netneet
celle du Tschibungu. Le docteur l'echuël-Loescho
publiait,
en 188:2,l'histoire naturelle du pays. remettant à
plus lard le
soin d'eu écrire l'histoire humaine C'est cette dernière
partie
qui a paru eu 1907. Dans l'iulerviille, le docteur l'oehuGI-
Loescheest retourné au Loaugo et a
complétéses observations
recueilIwiUn môme temps celles de MM.C. Niemaiiu, H. C.
Philips, L, l'onstijn. 11 ue uous donue malheureusement
qu'une partie des documents qu'il u en mains. Nousle regret-
tons et souhaitons une publication intégrale.
Cet ouvrage survient au moment où se
puse sur l'organisa-
tiou religieuse et sociale du vieux royaume
Loangoune ques-
tion de graude importance théorique. Un livre du M. R.
K. Denuett, paru eu 1901}(voir le compte rendu de M. Marcel
i
Mauss dans VAnnét Sociologique,t. X, p. nous a
3|i> sq.),
apporté sur « les idées de derrière la tête » de l'homme noir
de véritables révélations. Suivant M. Deiuiett, les Uavili du
Loaugo possèdent un système religieux, qui jusqu'ici n'a pas
été remarqué, à cause des préjugés des observateurs sur le
fétichisme des noirs de l'Afrique occidentale. Cesystème reti-
gieux est, en réalité, un vaste système de correspondances,
dont la relation avec l'organisation sociale et
politique est
explicite et trouve son expression suprême dans les attribu-
tions du roi-prôtre-dieu du Loango. Ma
Loaugo.Les idi-esen
counexiou avec ce système de correspondances, autant
qu'on
peut les exprimer par des idées européennes, formeraient six
groupes de notions, que M. Deunett appelle les « catégories »
du noir ip. 108;. Onse trouverait donc en
présence de faits
analogues à ceux que MM.K. Uurkheim et M. Maussont ana-
lysé dans l'l'sxui «;<-f/tM~xe.ss~slir"tc~r dec<tM.f<m<tOH
~<tM«7//i!
(Année Sociologique,t. VI;. Ces faits, tout aussi
complexes,
constituant une gnose aussi subtile que le système chinois du
l'uug Shui, présentent sur ce système cet avantage d'être
explicitement reliés à l'organisation socialo et politique. Le
processus mental par lequel cette relation s'est niaiuliHiiieou
reconstituée doit à priori être considéré par le sociologue
comme esseutiel à dolcrniitier.
230 1,'ASNKB I908-I90M
SOttlOlOGIQUB.

Mais. que faut-i) peuser d'abord des ailirmationsdeM. Deu-


uett ? Quelle toi mériteut-elles ? L'étude du problème théo-
rique doit être uécessairemeut précédée d'uu examen critique
des faits. Cet examen est délicat parce que l'ignorance des
anciens voyageurs sur les faits que révèle M. Dennett nous
prive de la possibilité de comparaisons. D'autre part, il est
difficile de faire le départ dans cet ouvrage entre ce qui est
reproduction d'une tradition orale, transcription plus ou moins
fidèle des conversations de l'autour avec le Ma Loango et
spéculations étymologiques. On pouvait espérer du livre de
N. PechueTLoeschele secours demandé vainementaux vieux
auteurs. La déception n'est pas complète.
I. M. Dennett afllrme l'existence chez les Uavili d'une reli-
giou véritable ip. 85), avec un culte organise. Il propose d'ap-
peler cette religion Mici-ixin. M- Pechuël-Loesché reconnaît
qu'il y a chez les Bafiote (dont les Bavili sont uue fractiou,
p. 2i un culte organisé, le culte de Mkim nssi, ou Hiïnssi
(p. 27Ggq.), ce qui distingue t'être à qui ce culte s'adresse,
des fétiches qui ne sont jamais l'objet, d'un culte. Ce culte,
relatif aux puissances mystérieuses de la terre, est le culte
officie)du vieux royaume de Loango. Mais, pas plus d'ail-
leurs que M. Dennett, M. Pechuël-Loesche ne peut se décider
à abandonner complètement cette notion de fétiche dont ou a
fait ici une critique définitive ivoir Année Sociologique,t. IX,
p. WI et t. X, p. 309). M. Denuett déclarait réserver cette
notion à la magie. Le point de vue de M. Pechuël-Loescheest
plus incertain encore. (Il est juste de remarquer cependant
que M-P.-L. se fait du « fétichisme a une conception qui en
soi n'est pas inexacte. Voir p. 330-357). Il y a fétichisme par-
tout où il y a désorganisation religieuse et politique, c'est
pourquoi il y a divers degrés de fétichisme le degré supérieur
(p. 338i se distingue mai de la religion. S'il n'y a pas culte à
proprement parler, dans ce cas, il y a un collège de praires à
qui sont réservés certains actes que les laïcs ne peuvent
accomplir. Ainsi la limite entre la religion proprement dite
et le fétichisme est indécise. Au vrai, la distinction ne peut
être qu'arbitraire, et il est fâcheux de constater uue fois de
plusque cette notionde fétiche, produit hybride, duspréjugés
européens à l'égard des croyances indigènes, dispense de
comprendre et d'expliquer toute uue catégorie de phéuumènes
magiques et religieux.
Il. Un examen attentif du livre de M. H. K.Dcuuell conduit
ItKPRKSKNT.VTlUNS
BKI.lllIKLSES gai

à estimer que, si l'ou écarte les inquiétâmes spéculations éty-


mologiques dont il enveloppe ses observations, il y a une
base solide qui résiste à la critique. Il y a un groupe do (ails
que l'on peut considérerala fois comme les plus certains et
les plus significatifs. C'est la classification en familles des
bois sacrés qui lui a été indiquée par les indigènes eux-
mêmes (voir p. 111et p. 111). Cesbois sacrés jouent dans la
vie religieuse et politique un rôle capital. C'est une des fonc-
tions du roi que de réglementer le culte dans les bois sacrés
tp. 2.'ijet il sembleque ce qui donne l'investiture féodale dans
le royaume, c'est lu possession et la charge d'un bois sacré
p. 13). Oril est remarquable que les différents bois sacrés du
royaume soient alliliés les uns aux autres de manière à cousti-
tuer des groupes ou familles. Les observations de M. Demielt
nous out paru suffisamment confirmées par leur correspon-
dance partielle avec certaines observations de M. A. Bastian
(voir dans -.UiedeulsckeExpedition,l, p. 70, et p. 209;. C'est
là un phénomène capital, signe objectif de l'organisation de
la pensée religieuse des Bavili.
Mais, M. Pechuël-Loeschene semble pas avoir compris ce
phénomène qu'il n'a pu manquer d'apercevoir partiellement.
Sans doute, il admetqu'il y a une religion et nu culte orga-
nisé, mais il est victime des mêmes préjugés qui lui ont fait
accorder un sens à la notion de fétiche. Le mot religion
éveille dans son esprit tout un ensemble d'images et de
croyances européennes. Sans se demander si le personnage
de Ntiïmbia uue signification religieuse comparable ait rôle
qu'il joue dans le folk-lore, il rattache finalement à X-wmlii,
le culte actuel des Bavili, culte, suivant lui, de liiûwi ou
Mlciiixinui. liânme&t ce que Nsiïmbia laissé dans la terre.
en abandonnant les hommes. Si lit personnalité de lliiimi est
indéterminée (il l'appelle unClivas, p. 276), elle est néan-
moins divine parce qu'elle se rattache à un Dieu, digne d'être
appelé ainsi par un Européen. Dèslors, les relations qui unis-
sent les différents bois sacrés entre eux sont comparables à
celles qui unissent les différents temples d'une même religion
("est le mômeculte qui est pratiqué dans tous les bois sacrés,
c'est au même être que l'on s'adresse, à ttûnssi.Il ne peut pas
y avoir plusieurs Bûnxxi, et si l'ou en rencontre plusieurs.
c'est là un fait de décomposition du vieux culte primitif.
L'idolâtrie fétichiste seule a pu créer cette multiplicité de
dieux.
Hi I.NNBK «OUlOLOStOUB.I9U(M9Û9

Nous retrouvons dans celle conception les mômes préjugés


que nous avons critiqués plus haut. Moisnousu vousd'autres
raisons que des raisons générales do lu tenir en méfiance.
Olle conception repose, à notre sens, sur une confusion des
deux notions de Mkmi imi et de lifmm. M. Pechufil-Loetclie
a ses raisons pour substituer au terme général de Mkmi b,«,
relatif au culte pratiqué du us le» bois sacrés, le nom de liiinuxi.
Mkim imi, remarque-t-il. désigne aussi bien la qualité ma-
gique (p 270 ce qui coufirme pleinement l'hypothèse de
M. M. Muuss,– .1..s1., t. X, p. 309– sur l'identité desnotions
foiiitiiinentalesàundongoism ou de 1»magieet du nA<< wM ou
religion) que la qualité religieuse. C'est donc une notion
mixte, et c'est pourquoi il l'élimine comme n'étant pas pure-
ment religieuse. Mais si l'on peut dire que Uïtrtxxiestt)tAt)!)!<
imi. c'est à-dire possède cette qualité mystérieuse qui, sui-
vaut l'expression de M. Dennett, inspire « la crainte ou le res-
pect » fp. lt)7,i,il ne s'ensuit pas que ces deux notions soient
interchangeables. hien ne s'oppose à ce que d'autres êtres que
Hûrmisoient considérés comme mkim nui, c'est-à-dire soient
des Hiilsimbu mut ip. 278). Il n'y a aucun scandale à l'ad-
mettre et à considérer ce phénomène comme constitutif de la
religion bavili ivoir, pour le rôle des Uakki baci suivant
M. Deunett, p. 13, 100. 120. etc.). Quant à Mnssi, ce n'est
pas le nom d'une qualité généralo, c'est celui d'un certain
pouvoir, complexe sans doute, mais spécialisé. Quand M. Pe-
chuël-Loesche rencontre dans la province de Muanda ce qui
parait bien être le véritable et originaire Minsù, qui est tout
ensemble le vent du sud-ouest, un pouvoir relatif au rythme
des pluies et des saisons, à la vie des sexes i voirM. Deunotl,
p. 115 A. Bastian, I, p. 2i*.2î!î) il le considère comme un
fétiche qui s'est installé à côté du véritable llùiwi et qui n'eu
est qu'une populaire idole (p. 2801 Ainsi M. Pechuël-Loeschc
n'a pas pu comprendre la relation assez complexe qui unit
les différents lieux du culte ou bois ancrés. Il a conçu celte
relation, qu'il a aperçue, sur le type simple de la relation qui
unit les dillèrentes églises d'un même culte. Sa
conception
est suspecte, parce qu'elle tient à ce que M. Pechuël-Loesclie
n'a pu se défaire du sens européen du mot religion, parce
qu'elle repose sur une confusion entre les deux termes Mkmi
nsu et hûnaù, parce qu'elle est contredite par des faits éta-
blis d'une façon certaine par M. Deniiell.
Toutefois, ou pourrait trouver dans le livre de XI. Pechutil-
IIEI'nÈSKXTATro.VS
RKLimKUSK* 223

Loesehe d'utiles confirmations particulières des ufurinulions


de M. Denuett. Les différents bois sacrés;dépendent à ce point
du hois sacré du roi, que les feux qui y brillent uu peuvent
être rallumés qu'au bois sacré du district royal (p. 174). Les
bois sucrés, au moins pour ce qui concerne celui du roi, sont
appelés du même nom pur M. Pecliuël-Loesehe que pur
M.Dennett: Tsvlubila, Identique au mot Xibila (pp. 161, Itii
et 192).M. Pechuël-Loesche donne d'ailleurs de ce mot In
uiéineexplieationélymologiquefp.383). Mais ya a plus, l'étude
de la classification en familles des différents bois sacrés du
Loaiigo nous a a menéà penser que celle classification est
avant tout une classification spatiale on les vents, seuls signes
constants et remarquables de direction dans ce pays où les
levers et couchers du soleil ne détermineutpas ries points car-
dinaux fixes, jouent un rôle prépondérant. Or. on pourrait
trouver (ticilemeut dans le livre de M. Pechuël-Loesche d'in-
téressantes confirmations de celtelhèse générale. La terre, c'est
l'espace qualifié religieusement les frontières du royaume
(p. I6os<[.i, les routes sont douées de qualités religieuses
ip. 20!»i.
111.Dans le système général des correspondances que nous
donne M.UeniieU,les représentations relativesau temps jouent
un rôle considérable. M. Ueunelt a établi un tableau des sai-
sons et des mois de l'année bavili (p. 107/où il a tenté de
déterminer entre elles et entre eux des relations génétiques,
conçues sur le type d'une certaine formule philosophique
générale, d'une certaine conception générale de lit causalité.
Sous cette construction aventureuse, il y a des faits. Aux trois
saisons qui constitueraient l'année bavili correspondent trois
prêtres, ayant des attributions définies 'p. lH-ltt>i.Les repré-
sentations relatives au rythme du tempssoûl donc inséparables
des représentations religieuses primordiales.Elles sontinsépa-
rubieségaiemeul de la vie politique, et le roi est le régulateur
des saisons (p. 28). Sur ce dernier point, M.Pecliuél-Loesche
p. VAX)apportcà M. Deunetlune couflrmatinii.Maisil y a entre
les deux auteurs un grave désaccord. Suivant M. PeehuiU-
Loesche l'année bavili se divise en 2 saisons et en H mois
lunaires; pour M. Deuuett, elle comprendssaisons et 13 mois.
Ce 13' mois, suivant M. Peehuftl-Luesehe,n'existerait que
tous les trois ans environ (p. 138, pour assurer l'opposition
du croissant de la nouvelle luneavec Sirius. Cetreizième mois
serait une période de terreur religieuse Or M. Denuelt nous
H'i LASNKK*OUHH.C«1IQUR.
IWHl.lWtt

parle sans doute de cette période de terreur religieuse, Mais


elle reviendrait tous les ans (p. <3(iià la fin du cycle auuue).
Seule une aualyse minutieuse pourra résoudre ce problème.
Par contre, les hypothèses hardies de M. Dennett, échafau-
dées sur de vertigiueuses considérations étymologiques, sur
les idéescosmologiquesdes Bavili et leurconception fondamen-
tales de lit causalité, envelopperaient une vérité imprévue.
M. Pechuul-Loesche. nous expliquant en quoi consiste l'effica-
cité d'un fétiche et de quels éléments cette notion se compose,
en arrive à définir trois notions comparables à celles que
M. Oeuuett appelle Xi. Ci, Fu (voir p. 353).
IV. M. Denuett nous signale la présence du totémisme chez
les Bavili, d'un totémisme, non plus de clans a proprement
parler, mais politique. Il apporte un catalogue d'interdictions
assez complet. A chaque degré dé la hiérarchie politique cor-
respond uu groupe d'iuterdictions et un animal sacré (p. 153.
L'organisation féodale se symbolise ainsi dans la hiérarchie
des animaux qui correspondent aux divers degrés de tenure
nobiliaire. H donne aussi (p. l.'Hj les règles d'héritages des
totems familiaux, qui nous révèlent l'évolution de la famille
bavili du type maternel, vers le type paternel.
Le système de correspondances entre les animaux sacrés el.
les fonctionsféodales ne constitue pas une classification toté-
mique proprement dite. On trouve cependant des traces, eu
pays bavili, de telles classifications, se rapportant sans nul
doute à un ancien totémisme de clan. La correspondance
établie entre le crabe, la mer et le soleil, et. par opposition,
entre le léopard, la mer et la lune (p. I58,i,est certainement
un exemple intéressant des restes de telles classifications.
Sur cette question du totémisme. M. Pechuël-Loescheest
très circonspect. Il signale sans doute une étyrnologie du mot
Bavili (p. 2, uute.isui vautlaquelle ce mol viendrait de Kuwila,
« être uni par un lien totémique » (?). Mais il n'ose pas inter-
préter les nombreuses interdictionsqu'il a rencontrées en pays
Loaugo et qu'il arppelle Tar/iinn (p. 4;>ttj,d'un mot identique
au .Vi'/wdeM. Denuetl. Suivant lui, les interdictions que t'ou
rencontre au Loango ue sont plus accompagnées de représen-
talions relatives à quelque chose de sacré (p. 4t>9j.Cesinter-
dictions s'interprètent de plus en plus comme des prescrip-
tions utilitaires. Il signale cependant les interdictions
matrimoniales dans la caste des Mftmu ns.tû (p. 177;, mais
sans en tirer de conclusions, En ce qui concerne les rapports
HKI'HKSKNVAI'IO\> ItKlIOlKlsES HT,n

1 M r
(lu totémisme et de l'organisation politique, il est très bref. Le
tout petit fuit suivant pourrait être retenu comme coulirmu-
tion des faits rapportés par M. Donnetl; Mukunduou lu prin-
cesse qui occupe un rang spécial dans la hiérarchie politique,
à coté de Ma Loanyti, distribue des queues de diltéreuts ani-
maux en signes divers de commandementip. HH). Il a aperçu
leuitractèrespi'cialetlei-ôle,daiislesi'cpréseutattoiisco||ectives,
du léopard. Mais peut-être faut-il attribuer sa prudence sur
cetteq uestiongénérale â l'insuffisante profondeur de sou ulrser.
vation, plus qu'à l'absence de faitsuotables. Il nous rapporte
'p. lOliiuu conte, que l'on retrouve dans le Folkloreofthe Fjart
de M- Deuuett, et qui est évidemment un conte totémique.
Maissoit parla fauteou lu résurvedu narrateur, soit pour toute
autre raison, ce conte a perdu chez lui toutes ses caractéris-
tiques totémiques, j'it parle de totémisme fUllliJill1 et s'il nous
donne des règles d'hérédité du totem, analogues à celles don-
uées par M. Dennetl ip. 4tîî>>,il apparaît qu'il n'a pas une
notion claire de la forme du groupement familial (sur lequel
il nous promet, p. 407, uu chapitre qu'il a sans doute retranché
de sou livre) et qu'il lie se rend pas compte que la famille est
eu train d'évoluer du type maternel au type paternel.
Y. Le système religieux des Havili, suivant M. Denuett.
est expressément rattaché à l'organisation politique et sociale.
Le roi est le centre du système, c'est eu lui que viennent se
réunir d'une manièrevivanteet personnelle lesdivèrs éléments
eu correspondance. Ses feudataires incarnent une partie du
système ils sontliakici baei(p. 13;, tout comme les pouvoirs
de la terre qui se inanitesteul dans les hois sacrés de leur res-
sort. M.Pechuêl-Loeschemalheureusement ne nous donne pas
le moyen de compléter les faits rapportés par M. Denuett,
dont la sécheresse cabalistique est parfois déconcertante. Il
a ignoré l'existence d'une cour royale et d'officiers nombreux
aux attributions définies, Il énumère au hasard quelques
titres(p. l<>'2;;il soupçonne qu'il y a une hiérarchie nobiliaire
et des titres précis de noblesse mais il en rend compte d'une
manière très insufllsanle et probablement inexacte (p. 170). Il
Il vu que les nobles étaient entourés d'interdictions, mais il
n'eu a pas conclu nettement à leur qualité religieuse 'p. 177).
Pour ce qui est du roi, il a brièvement signalé son influence
sur la vie religieuse, sans t'expliquer et l'analyser (Kehi Ma
l.oango, Kein Iteiliijes, Feuer, Keiit lltumi p. 179). Mais eu
revanche, ou peut dire qu'il a beaucoup mieux que M. Denuelt
K. DuiiKMKltl.– Aiini-i- «ociol., 1U0C-1UMI. t!>
;20 L'AX.VKfe t!IOM<«W
•WhlLOUlUttlf.

marqué le rapport de l'organisation sociale, au sens étroit du


mot. avec In pensée religieuse Sunlivre est un document de
premier ordre pour quiconque voudraitétudier les ôlùmeiils
religieux du régime féodal. La position de l'iudividu dans lu
socii'léest définie par son rapporta lu terre p. I!)m8i|.i,rap-
port mystiquequi est caractérisé aussi bien par unesérie d'in-
terdictions religieuses et magiques que par des règles posi.
tives de droit
Sur des questions aussi sailluutes que celles de ta division
en provinces du vieux royaume de Loaugo, nous ne trouvons
aucun renseignement daus le livre de M. Pechué'l-Loesclu1.
L'unité politique dont il nousparle est l'Erdxchuft( p. 194;.Le
morcellement politique et religieux, conséquencede la non
existence d'un véritable Ma Loango, l'a tellement inléresw
qu'il u'a pas songé à nous faire entrevoir l'itiicienue organisa-
tion du royaume.
On peut dire cependant, pour être juste, qu'il a traité im'IIc
question dans t'analyse critique remarquablequ'il nous donne
de la littérature ethnographique du Loaugoip. 1 42-183).Uni;
analyse menuo des faits qu'il rapportepermettrait de retrouver
dans ces faits les traces de l'ancienne organisation politique.
Il appelle Samano successivement un prince et une.princesse
des environs de Tschintschotscho, à l'endroit où suivant
Oenuett se trouverait l'antique province Sttmâau(p. 253'
VI. On trouverait euiiu quelques renseignements curieux
sur le symbolisme des Bafiole chezM.Peehuël-Loesche.L'écri-
lure symbolique desBavili que M.iJetincll afHrmait.ne serait
pus une chimèreivoir p. 80, p. lîtô, ellescurieusesexpérieuces
p. 233). Sur leur façon de penser il parait avoir senti dans
quel sens il tant chercher le principe d'explication des
connexions entre les représentations « sV Mt alkx nu
Flim, dit-il, au* HumpfettCefîèUiegmwH uufileigend wir
Sclutuwlilwimans hroiMndeu Wnuer ij>. iil.'jj. » Daus un
compte rendu sur te môme ouvrage de M Pe^liuël-Loesclu»
lllerui' dm('tudes iithnogntphiqwH el *ocwlngtqnet,février HMlS.
p. III sq.j. M. Arnold Van Geunep, suivant une méthode
différente de celle qui a été indiquée ici. u essayé d'établir
directement une correspondance entre les deux ouvrages, au
point de vue de ce que M. I Jeunett a appeléles « catégories »
de l'homme noir, et dont M. Mauss a donué la liste (.-tn/o'V
HwioUiQV\wi, t. X, p. MC> Sans doute M. Arnold van tien
nep n'a pus complètement, tort de chercher à retrouver si
HEPUKsKXT.vrioNr! HKMUIKUSHS 0JJ7

M. Pediuël-Loesche a constate des connexions d'idées ana-


logues i\ celles que M. Oennelt a aperçues et notées tant bien
que mal. 11 signale par exemple la connexion indiquée
par M. Pechuël-Loesche, entre les croyances relatives an
feu et celles relatives à lu vie sexuelle. Nous signalerions
également la connexion entre lus croyances relatives il I»
terre et celles relatives à la justice. Mais il ne faudrait pas
que ce mot « catégories » fasse illusion. Il convient de faire
une double réserve.
Sur la méthode, parce que ces dites catégories ne corres-
pondent pus à un tableau explicite, donné par les indigèues
eux-mêmes, des notions fondamentales'.Ce sont des hypo-
thèses psychologiques, uu moins partiellement. Il y a une
grande diflérence sur ce point entre les faits bautous et le»
faits ehiuois. 11faut donc attaquer l'étude du système de cor-
respondances qui définit la pensée bavili, par une autre voie.
dans sos umnilestatious extérieures, snisissables par leurs
conséquencesreligieuses et sociales.C'est pourquoi il (iiudruit
décomposer pour l'étude ce système complexe de correspon-
dances eu ses éléments, classification temporelle, classilica-
tion totémique, classification sociale et politique. Il faut, en
second lieu, preudre garde que la découverte de pareilles con-
nexions, telles que celle des croyances relatives au feuavec les
croyances relatives à lu vie sexuelle, n'est intéressante pour
le sociologue que dans la mesure où il peutretrouver le pro-
cessus mental qui tes engendrées. Or, ce processus meutal ue
peut être retrouvé que par une étude approfondie de l'orgaui-
satiou sociale et religieuse de la société. C'est précisément
l'erreur de l'école anthropologique anglaise que de ne retenir
comme intéressantes que des associations de représentations
sans saisir et définir leur lien avec1»vie et l'organisation d'un
groupe tout entier. ,v. B.

J. J. DE (SHOOT. The Religions System of China. IL 2.


Vol. V, The netuauology and Sorcery. Leiden. Brill. 1908.
XIV, «9-91.0 p., in*.
Ce cinquième volume du Systèmerdigkur de la Clnnr ue
présente jieul-ôlre pas pour le sociologue le même intérêt

1.Voiri:ft|ii-ii(lant
le Inlilvnud<->
<loul>k>s
motsMon».-
iiar M. Di-undl
p. lui.
OH i/annôk iocroLoiiiuuE.
fJim-190»
a
que les volumes précédents, Ceux-ciconsistaient eu exposés
exhaustifs de tout un ensemble de pratiques et d'idées le»
trois premiers, consacrés au rituel luuèrtiire et au culte immé-
diat de l'ancêtre, avaient remué une masse énorme de {ails;
le quatrième, le premier de la série consacrée à l'time et uu
culte des ancêtres, avait exposé les remarquables théories
chinoises sur l'ame et la nuiuière dont elles se rattachaient
aux couceptiuiis popuiaires, tout eu les déformant «cf. Année
T. Il, p. 221et suiv. T. VI, p. 220 et suiv.i.
Mais déjà la dernière partie de ce tome IV formait plutôt
un recueil de contes, d'anecdotes historiques (los deux se
confondent en Chine) où venaients'enregistrer des croyances
dont on ne disait pas si, par ailleurs. elles étafeut connexes
à quelque culte, à quelque genre d'activité. Le présent
volume, intitulé Démonologie, Sorcellerie, est composédecette
même manière. C'est un catalogue des contes les plus anciens
concernant les démons et la magie noire: c'est aussi un
répertoire de faits, plus ou moins authentiques, enregistrés
par lesannalistes, les encyclopédistes, les spécialistes chinois.
Ce n'est pas une analyse des rites ui même des croyances,
mais un recueil des monuments littéraires et historiques.
Il est divisé eu deux parties La première, la démonologie,
étudie les Il superstitions » concernant les revenants, les
âmes, les démons. Mais diverses sortes d'êtres ne sont pas
classées. Nul effort n'est fait pour délimiter leurs traits dis-
tiuctifs. La littérature et l'imagination populaire, en Chirie,
n'ayant jamais tenté de distinguer entre ceux qui n'ont jamais
été des hommes, et ceux qui ne sont que des revenants, M. de
G. les a confondus. Ce n'est guère que par rapport aux dieux
qu'il a tenté de séparer les démons des autres esprits icf.
p. 'Î2I, l'histoire des démons devenus dieuxi.
Cette 'confusion regrettable résulte, croyons-nous, d un
emploi exclusif de la méthode philologique. L'analyse des
mots, des idées d'un peuple peut être trompeuse quand la
critique ne s'étend pas à ces mots et à ces idées elles-mêmes,
mais s'applique seulement aux documents qui les expriment
ou lescontiennent. Car un peuple peut se représenter inexac-
tement ce qu'il pense; l'esprit collectif n'est pas plus iufail-
lible que l'esprit iudividuel. C'est une erreur de ce genre qui
s'est produite en Chine. Tradition vulgaire et tradition
savante, qui ne lit que raffiner lit première, se sont trompées
sur la nature des idées qu'on se faisait des démons. Un espri t
UKPH&KNTATIO.NS
HELMS1KUSKS >£$

de classification a priori dénatura les croyances et en faussa


l'expression. Les Chinois ont tout divisé dans le monde entre
le yin et le ynng, les principes céleste, mâle, lumineux, hou,
d'une part, terrestre, femelle, obscur, mauvais, de l'autre.
Conformémentà cette division fondamentale, t'âme elle-même
a été divisée en shen et en kuei, ame bonne et lumiueuse, et
âme mauvaise et obscure. La théologie et la littérature
popu-
laire ont été prises à ce piège. Quand on voulut
préciser lit
place des démons dans la série des êtres, il parut qu'ils ue
pouvaient être que des xhen ou des kwei ce fureut donc des
kwei.De plus, pour satisfaire la systématique, on décida
que
tous les kwei étaient des revenants, d'anciennes âmes
d'hommes. En fait, il est bien spécifié de temps en temps que
le démon est une âme mauvaise d'homme mort ou vivant.
Les savants chinois, le peuple chinois, se faisant l'écho de
leurs disputes millénaires, généralisèrent mais leur généra-
lisation est arbitraire. M. de G. n'a fait pourtant que les
suivre en traduisant régulièrement par « spectre » (cf. 800)
p.
uu caraclère qui lie désigne pas nécessairement l'âme d'uu
mort, et sûrement dans quelques cas ne le désigne pas du
tout.
Kn réalité, la pensée profonde des Chinois sur ce sujet a
toujours été très différente. Ce n'est certainement pas sur le
modèlede l'Ame humaine qu'ils ont conçu l'lime universelle,
les âmes des choses, les esprits. Bien que les différentes
formes d'âme aient été représentées comme interchangeables,
cependant tes âmes qui sont dans les choses n'ont pas néces-
sairement figure d'homme chacune d'elles a lu forme con-
crète de t'être qu'elle anime, Il n'y a pas seulement, en Chine,
•les loupsgiirouscommednns notre tradition indo-européenne,
il y a aussi des démons-tigres (p. S44 et suiv.) dont les Ames
se sont emparées des hommes, de leurs corps et de leurs
esprits, « Animaux, oiseaux, poissons, insectes transportent
leurs âmes dans les hommes, les rendant malades et tous: ils
émettent leurs âmes de leurs corps pour troubler maisons et
villages ip. 844;. « Les âmes des hommes, celles des hôtes et
des arbres sont sur le même plan. Il s'en faut donc que les
Chinois fournissent un argument à ceux qui prétendent déri-
ver toutes les notions religieuses, toutes les représentations
d'esprits de lit notion d'âme humaine. C'est pourtant ce que
parait admettre, à la suite des Chinois d'ailleurs. M. de G.
quand il traduit Icireiet ses synonymes par spectre, quand il
23u i/a.nsék sociologique, v.tfm-iyi.y

mit des démons des Aliteshumainesmalfiiisanlegi. l'otil-iMre


niéuic n'esl-il inipoiuibled'upurcevuir,travers le*documents
traduits pur M. de G. lu manière dont ce concept de démon a
évolué. Il y eut d'abordles dilîérentes catégories de dénions
les sié, les wumj, etc. Puis ou se demanda ce qu'étaient ces
déinousot, longtemps, ou resta indécis. On les classait parmi
les êtres composites.Dansune très ancienneconjuration d'un
empereur, ils sont appelés, non pas kwei, mais slwn kwei; ce
i|ui montre hien ne que cette expression avait alors do flottant
ut d'indéterminé. Les esprits des montagnes, les* m, qui ne
furent jamais des hommes,qu'aucun conte n'identifie avec des
revenants, étaient égalementdes xhen kwei. C'est seulement à
la suite d'un processus philosophiqueplus ou moins populaire
qu'ils devinrent des kwuitout court. Enfin, c'est surtout l'art
qui, eu les décorant d'une (orme humaine, en lit d'anciensS
hommes réduits à l'état de kwei.
Les esprits malfaisants sont eu nombre infini et partout
présents. Les uns sout des émanations,des tunes, (tesêtres qui
hantent et qui doublent la nature et ses produits. Ce sont les
démons de la montagne, du désert, de la (orét. 11est curieux
qu'ils ne soient pas les agents les plus fréquents da cauche-
mar (() G50,099 ce sont plutôt les esprits des plantes et des
choses inanimées qui tiennent ce rùle. Lu plupart ont des
aspects d'animaux, mais ce n'est ni uécessuireineut ni exclu-
sivement à ces représentations qu'ils sont astreints Lesesprits
des montagnes ont uneseule jambe et figure de chèvres ou de
chiens; ils peuvent aussi, sonible-l-il, revêtir par instants,
comme s'ils étaient les simples opposés du loup-garou, des
formes h uniai nés, plus ou moins terribles, colossales, mous-.
frileuses, fugaces, grotesques. Les esprits des eaux ont. natu-
rellumeiit. des formes serpentines; ceux dos arbres, alterna-
tivement, se distinguent de leurs habitats et se confondent
avec eux. Lesstatues sont naturellementanimées,fcf. Liv. 11,
I. uluip.XIII H, p. lS(i!)sq.) il euest de mémod'autres choses
qui n oui inftnie pas tes aspects extérieurs de la vie, comme le
halai, le bois à briller, qui sont des démons.
Mais les plus importants et les plus nombreux sont tes
démons animaux ilf. II. chap V.i tigres, loups, chiens,
renards, nie reptiles, oiseaux, poissons. Sans doute, la pré
sfiiiced'un ileinon-aniiniil.se relie quelquefoisà l'histoire d'un
mort; l'esprit du mort, grâce aux fortuits animales qu'a
l'Ame humaine, à la faculté qu'elle possède de prendre posses-
HKI>Hti«K!iT4ri»X« HRMfîlEI.'SK* 53 1

sioti d'un corps miiiiml, vient, par de subtile» mutations. se


trciusformer ip. 3"l)i (huis l'imago d'un démon uni mal (|iii
s'empare d'un corps, mort oit vivant Maislu plupart ilu temps,
i.'V'slle démon sous (les espèces animales qui apparaît aux
lioinines,ijtii les liante, les possède et les détruit en les
possédant^. 0") s<|.i.
Heslent les démons qui sont d'origine humaine et ont
pu-dû la forme d'hommes. Ce «ont tl'uhorii ceux des morts à
qui les services funéraires n'ont pas encore été rendus, ou
bien à qui on n'a pas encore (lui dfi les rendre (XII > ce sont
les spectres des suicidés, les squelettes, les crânes isolés
devenus des démons; ce sont enfin les vampires. I) h près'
M. de (i., ces derniers n'auraient tait leur apparition eu
Chine que réeeumient, peut-être à la suite des épidémies de
vampires en tëurope (p. 780». Le fait est possible et serait
intéressant. Mais nous lie voyons pas très bien pourquoi l'au-
teur distingue si nettement tes vampires des spectres uérro-
phages, ni poui'(|uoi Une les a pas joints aux autres reve-
nants, déjà étudiés ça et là à propos du rituel funéraire >d.
vol. 1. H. III et p. 8(10).ni pourquoi enfin il sépare ceux-ci
d'autres démons d'origine humaine comme par exemple, tes
esprits îles suicidés. – D'ailleurs, à notre avis, tes listes de
M. de (! si longues qu'elles soient, n'épuisent pas celles
qui pourraient être dressées. Les incubes et succubes <cf.
p. tWi, les esprits du vent et de l'air, les âmes errantes
échappées li dns vivants endormis, les esprits de la maladie
que M. de (î. n'étudie qu'à propos des calamités noires et
des paniques qu'alleu causeront, p. "KO.781 1 échappentà ses
classifications; maispeut être les rt'trouverous-uous dans un
livre suivant.
La seconde partie de ce volume est consacrée il la sorcelle-
rie. ou plus exactement à la magie noire, celle qui consiste
dans l'emploi de maléfices ou de procédés interdits, lui se
marque encore plus l'inconvénient de la méthode d'exposi-
tion de M. de (i.. qui consiste à faire l'historique plutôt
de la littérature du sujet "que des faits. Onsera surpris que
la Chiue. qui a sur toutes les matières une tradition écrite si
riche, n'ait pas transmis à M. de G. un seul maiiuol de
magie maléliciaire. Certes, comme tes éditset les codes itite.r-
disenl sévèi'i'iimnt d'imprimerou de faire circuler aucunécrit
de mafrie noire, on comprend qu'il ait été difllcile de s'en
procurer Mais il est pou probable qu'une institution aussi
21% IHtMMW
LAXXKEStlClOl.i-MilOUK.

importante que le maléfice n'ait laissé d autres traces que (les


anecdotes, des récits de procès, d'événements divers, des
contes. L'utilisation des démons malfaisants, celle des êtres
du
qui rendent riche indûment (voir la chenille d'or, p. 857;,
mille-pattes magique ip. 808 et suiv. l'envoûtement (cou-
tondu à tort, p. 876,avec les procédés de mise à mort magique
pour acquérir un fujtiis-esprit-serviteur), les fameux usages
du Ku qui déterminèrent sous les premières dynasties histo-
riques tant de procès et tant de paniques (p. 847 et suh'.i
avaient sûrement leur rituel Celui-ci se transmettait au
moins oralement, ou dans des manuscrits tenus secrets ou
dans des formulaires, obscurs pour la foule, mais clairs pour
les initiés. A travers les documents que nous révèle M. de G.,
nous n'apercevons que l'eflet que lit magie noire produisait
sur l'imagination populaire et, en partie, sur lit loi. Cet effet,
est une attitude de résistance très prononcée. Les autorité!}et
la morale sont résolument contraires à la magienoire qui est
considérée comme un moyeu uéfaste d'action, une violation
de la loi, de la règle des hommes et des choses, du Tao(voir
p. 867-868). Mais nous voudrions connaître les procédés
qu'elle meten œuvre. Quels sont les rites, les agents1 (souvent
des moines taoïstes), les formules, les objets? Voilà ce que
nous ne pouvons que deviner à travers les textes. Ainsi, il est
évident que la magie du A'« (p. «47 ne consistllit pas seule.
ment à utiliser un insecte dévorant, mais supposait aussi des
poupées d'envoûtement (p. 832>, et l'utilisation des nourri-
tures de l'ensorcelé ip. 850i. Mais peut-être AI.de (1. relrou-
vera-t-il toutes ces questions quand il traitera du taoïsme.
L'abondance de documents assemblés par l'auteur, un
vertu même de sa méthode, a. au moins, un avantage. Elle
fournira une riche matière d'observations à ceux qui étudie-
rout les curieux rapports des phénomènes psychiques, ceux
du rêve en particulier, avec certains phénomènes sociaux
comme la croyance aux esprits, etc. On verra bien nettement
ipp. SUS,«80, «99-70» i la façon dont. l'imagination collective
s'est emparée de faits individuels 'réveil d'un sommeil épi-
leptique, cauchemar, délire sciilophagique |>. 729 fausses
sensations, «te. pour les élever au rang de thèmes mytholo-
gique». On trouvera aussi de curieux faits de coulagiou men-

I. Ontrouv«ru dus amluhiulùtrssaiils»urli>sru|i|ior(.4


ip. HIT-MUi tiiliv
ii'.>
l'Ami- turorcK-ri'. s
savoix, u son
fui-mule, Huit.IV-loilc
illmik-, lefil.
llKl'llgSE~T.\T10:.a\
nRt.tfittMM~ ~3

taie, des paniques, celles des armées de démons ip. 4TOs(j.),


celles de la queue coupée (p. 483, 484), des vampires, du /vu,
des épidémies de suicide (p. 710et suiv.), avec une curieuse
interprétation mythologique de ces dernières (p. 714, vt
pp. 828, 68».).
On remarquera enfin (p. 8uO)un texte qui met eu relation
les « cinq sortes de A'«(inaléllce), les cinqnotes de la gamme,
et les nom* ikx clans ». Nous n'osions pus espérer jamais
trouver pareille corrélation entre l'ancienne organisation des
clans et le système de classification que nous avons étudié.
11est vrai que le texte est de l'époque des Mlng, par couse-
queut tardif, et que l'arithmétique mythologique y domine.
M. M.

\V. H. HOSCHEIl. – Enneadische Studien. Versuch einer


Gescliichle der Neunzahl bei deu (iiïechen, mit besonderer
BeruekBichliguug des iilt. Ëpos, der Philosophait und
Aerzle \Abhandlungen der pli. luit. kl. der bj. siichsischen
(lexdlsclutfUlir Wisxemchaftm, XXVI, 1 1. Leipzig,Teubuer,
l!)07, 170p.. iu-8°.
M. Roscher continue avec une inépuisable érudition ses
études sur ln mystique des nombres. Nousavons signalé en
leur temps ses trois études précédentes qui portaient, les
deux premières, sur les nombres 7 et 9, lit troisième sur le
nombre 7. Il nous promet des études sur les nombres 4, », (>,
10, M et 40. Cette fois-ci, il s'occupe particulièrement du
nombre 9. A peine avons-nous besoin d'insister sur la valeur
de la contribution que ces études spéciales apportent à
la sociologie ou. si l'on veut, à la psychologie collective.
L'emploi de nombres favoris, de nombres ronds, pour me-
surer des quantités indéterminées, ou de préférence à des
comptes spéciaux variant avec l'expérience, révèleune forme
de lit pensée. D'autre part, ces habitudes arithmétiques
sont imposées à ceux qui les suivent par une tradition reli-
gieuse, professiounelle, ou par tout autre élément de leur
milieu.
Selon M. R.. t'origine de tous les emplois mystiques du
nombre !>,comme du nombre 7, est chronologique. Il s'ap-
plique à montrer que, dans la religion, d'une part, chez les
poètes, de autre (p. 8 sq., p. 27 sq.), le nombre 9, qui se
rencontre surtout dans le compte des durées, n'est employé
23i IAVNKK M)i;iii|.oiagi'K. Ifliiii-lvuw

que par analogie pour uomi>rer d'autres quantités. KhoIiii»-


uolngi. l'origine du compte des parties du temps par groupes
de SJdoit ûtre cherchée dans l'observation de tu lunaison. Lu
révolution sidérale de lu lune s'accomplit en 27 jours, peu
daiit lesquels l'astre reste visible. (les il jours sont divisibles
un trois périodes égales de 0 jours. Que cette lunaison sidé-
rale ait été observée par les anciens et qu'ils eu uiiutt tenu
compte dans la chronologie, uous le savons. An surplus.
parmi les nombres novéniiires, dont M. R. relève l'emploi et
la fréquence relative, figure eu bonne place le nombre 27.
l'ytluigure a passé il jours dans la grotte de l'Ida Kpiinénide
y a dormi ixiia IH ans. Knh'u,un passage obscur de
Xénoerute cité pir Johannes Lydus n/c Meusilnix,p. 100
te que le nombre il a été considéré commeun nombre
lunaire et que lit lunaison a été divisée eu période de !>jours
p. U8 sq.). A vrai dire, ces périodes de '« jours ne eorres.
pondent pas k des termes naturels qu'il soit facile de llxer-
Auss!bien, les restes présumés rie ces semaines du !) jours,
pour s'exprimer comme M H ne sont pas concordants.
DansHésiode, c'est le neuvième jour de chaque décade qui
a une importance particulier!: (p. 17 su..); à Home, la
période de !>jours n'est comptée qu'entre les noues et les
ides. Ces divergences tout douler que ce soit observation
des divisions naturelles de la lunaison (lui ait donné l'idée de
compter les jours neuf par neuf.
Nous nous sommes déjà prononcés pour une autre hypo-
thèse, qui considère le nombre!), le nombre et d'autres
nombres typiques comme des constructions intellectuelles
dontles donnéesexpérimentales sont.non pas chrouolo^i-fues,
mais probablementsociales et spatiales (Mauss-Durklieim,
/« Cttmi/trntionx, Umêr fiormUnjiqiw,VI, p. 8-1.sq.; Uuhert-
Miiuss,.Wlttmjrx.p. il «i ·
Cette réserve (aile en ce qui concerne l'origine première de
1»prédilection ile<comptes par 0. nous nous gardons de nier
que. dans lesca.scités, le modèle ail étéfourni par des comptes
calendiiiiBSToutefois,cette habitude décompter par groupes
de 9 unités, formant une unité supérieure, pouvait être ëgale-
meut donnée par l'usage d'une abaque, ou planche A comp-
ter, présentant neuf fiches par limitepour les unités d'ordre
successif..M. H. se plull à le montrer (p. S'.l). Mais il va de
soi que l'usage d'une pareille planche à compter suppose une
numération décimale. Or. dans un bon nombre (tes exemples
llKl'llK.-KST.VtïOX» HKUUIKL'*K» Î35

cités»,le nombre 9 désigne seulement, lestieul premières uni-


lés d'il ni' dizaine. L'emploiqui en est fitil dépend dune par-
tiellement de celui du système décimal.
L'objet principalduuiùtiHiire n'est d'ailleurs pasd'expli(|iier
l'origine de l'usage mystique du nombre1), mais d'eu faire
l'histoire, en (jrèce. Les chapitres correspondent nu dévelop-
pement de cette histoire. Lu religion présente des tôles qui
durent 9 jours (lus Kamett) et des groupes de i) personnages
divins ii) Kourètes. !) Muses i lumythologie présente d'iiutre
part des périodicités uovénaires Héraclès et Apollon
subissent des servitudes de 9 ans. Les activâmes sont parti-
culièrement fréquentes dans le culte funéraire. L'ancienne
épopée montre pour le nombre une remarquable prédilec-
tion les voyages durent !» jours, les festins se répètent
!> jours de suite; lu guerre de Truio dure 9 ans; pour un
sacrifice il faut 9 bœufs. Un fragment liésiodique (p. ï!4j pré-
sente, dans des comptes de durées étagées, un système nové-
naire qui fait déjà penser aux Orphiques. Chex ceux-ci le
nombre0 est un nombrecosmologiqued'importance. H est en
faveur chez les Pythagoriciens. Des Pythagoriciens il passe a
Platon, puis à lu philosophie tardive, qui répète sans (lu les
spéculations anciennes. Deleur coté les médeeiusont emprunté
à la médecine magique la mystique de!l. Le nombre9 indique
chez eux la périodicité des dates critiques et il tient naturel-
lement une place considérable dans les spéculations embryo-
géniques..
M. Il. n soin de faire remarquer que, partout ou on le ren-
contre, chez les savants et les philosophes aussi bien que chez
les poètes, l'usage mystique du nombre 9 une origine hiéra-
tique. On y reconnaît l'empreinte religieuse de lu pensée.
N'ombretypique, choisi pour mesurer ou désigner arbitraire-
ment les quantités en raison de sa valeur mystique, est
entré en concurrence avec les autres nombres typiques,
comme 1. Dans la religion ils se balancent Demeter jeune
!l ou 7 jours les Thesinophoriesdurent fl ou jours il ya
il ou 1 Muses. Les médecins vont d'un nombre il l'autre. Le
tableau de leurs hésitations, débals, scrupules et (iéfmlusest
un bon document sur l'histoire de t'esprit tiraillé pur l'obser-
vation et bandage de ses formes sociales. – Chezles poètes
épiques le nombre 'l l'emporte décidément sur le nombre
Plus tard l'inverse se produit. M. Il constate le fait sans
l'expliquer. Nous avons indiqué dans un précédent entnple
230 (.'ANNÉE liOCluLOUIQUG. 1WU-11109

rendu (Annie Soeioloyiqw,t. X, p. 71il dans quel sens il faut


en chercher l'explication. II. H.

J. HEIIN. – Siebenzabl und Sabbat bel den Babylo-


niern und im Alten Testament eiue rellgiousgeschi-
chtlicheStudie (Leipziger Semitistische Studien, 11,Si.Leip-
zig, 1907,
Queles liérnérologiesassyro-bahyloiiietiiiesuttestentl'obser-
vanced'un sabbat comparable au sabbat hébreu, la place nous
est trop mesurée pour que nous ayons à apprécier ce que
ht. H. peut encore en dire. Que l'origine de la valeur reli-
gieuse attribuée au nombre 7 s'explique moins bien par le
culte des sept planètes que par le compte des jours et des
phases de la lunaison. nous nous gardon» de prendre parti,
pensant qu'elle ne s'explique très bien ni d'une façon, ni do
l'autre. Mais il y a dans le livre de .M. H. deux points sur
lesquels nous voulons attirer l'attention, deux contributions
notablesà l'étude du nombre et de sa représentation.
Il met fort bien en lumière ce que sont ces nombres mys-
tiques. Ce sont des cycles complets, des totaux arrêté» qui
comprennent toutes les unités d'un même ordre, qui peuvent
s'additionner pour former une unité de l'ordro immédiate-
ment supérieur. Ce que le nombre 10est pour nous, le nom-
bre 7 l'a été. Mais il a été quelque chose de plus dans une
arithmétique moins dépouillée de mysticisme que la nôtre et
pour des esprits moins exercés distinguer t'abstrait du con-
cret. Unpareil nombreévoque l'idée de totalité, de perfection,
d'achèvement, d'univers ut aussi de plénitude, de force, de
force cosmique. M. II. le montre par des citations fort bien
choisies. Il suppose même que l'obscure expression «. les
7 dieux », ilaiii sihitti, qu'on rencontre à l'infini dans les textes
liturgiques assyro-babyloniens, ne signifie pas autre chose
que la totalité des dieux, 9m ziw, -av.r.ii% Quant à ce nom-
bre qui est par excellence le nombre complet, à»td;t4;:%im;
son nomserait parent, selon M. H du verbe shelm,qui signi-
fieêtre plejn.
f.e sabbat mésopotamien n'était pas seulement un jour de
repos, mais un jour d'expiation et de purification. Le nom-
bre7 tient dans le rituel des conjurations et des purifications
un rôle de première importance. Il peut le devoir à cette
même idée de perfection qui lui est attachée. Être sept fois
REl'UK^EXTATION* KEMiilKl'SKï 237

pur est l'achêveineul de lit pureté. Ainsice deuxièmecaractère


mystique du nombre 1 semble dépendre du premier.
H. 11.
t
J. BACH. – DieZettund Festrechnung der Juden Frei-
burg iinBnsgau, Herder, 1908.W p.. iu-t".
C'est un travail de chronologie formelle. L'auteur étudie,
commentent vérifie lu (ormule inventée par le mulliématicien
(îauss pour dé terminer la récurrence de la Paque juive. Elle
tombe, comme l'on sait, le 14 Misait le mois de Nisau est la
lunuisou dans laquelle se produit l'équinoxe de priutemps.
La partie mathémutiquc du mémoireest précédèed'utie courte
histoire du calendrier juif, qui est puisée à de bonites sources
ou y trouve des renseignements, qui généralement ne sont
pus sortisdu cercle étroit de l'érudition hébraïque, estparticu-
lier sur la déte-mination du débutdu moisau temps où régnait
encore uu calendrier empirique. L'apparition de la lune était
annoncée par des observateurs qui transmettaient ta nouvelle
auSanliédriu, lequel se préoccupait de la répandre de proche
en procite. L'observation de la lunaison était difficile aux
commuuuutés éloignées, qui devaientrégler leur pratique sur
Jérusalem. On se tirait d'ailaire eu célébrant à tout hasard les
fêtes deux jours de suite. Un avait la chance que l'un desdeux
jours Israël tout entier se trouvât à l'uuisson. Valeur religieuse
des .débuts de période, nécessité de vérification expérimentale,
en conséquence par contre, nécessitéd'une décision légale
donnant autorité à l'expérience enregistrée et nécessité d'un
iicconi subordonnant tes observations particulières, voilà fies
faits dont M. J. B. nous donnede hons témoignages. Uncalen-
drier est uue loi. Il. H.

F. CUMONT. Le mysticisme astral dans l'antiquité.


HuUelindo l'Anuh'mh' rm/nhdi' fJ«//yif/«p
(classe des lettres*,
1909, p. 2.!i(i-'J86.
M. C. se demande comment t'astrotàtrie chaldéenne qui a
fourni au monde gréco-romain su dernière théologie il pu
devenir une religion. Lu représentation scientifique du monde
sur laquelle elle repose étsiit-elle capable, dans son aridité,
de provoquer les sentiments dont se nourrit une religion 1 0r,
on constate aisément que. depuis Posidoniusd'Apaméejusqu'à
>3H I.'AN.NKK SOCUlLUGWh!. IMi-lBU»

Jutien, les graudsespiilsdeSyriuou d'ailleurs, qui ont été les


tenants de cette religion ont ilouuû des preuves d'un véritable
mysticisme extatique, quise clou ne libre carrière dansl'expres-
sion du ravissement où les plonge lu contemplation du ciel
étoile. Lessentiments dont il s'agit ont une baseintellectuelle,
c'est lit uotiouquel'unie, pur sa nature ignée, participe a l'es-
sence des astres, M. C. lie s'occupeici que de philosophes et
de poètes. Mais la religion astrale (ul répaudue et vraiment
populaire. Le mysticisme des premiers est il l'un des pOles
de cette religion: à l'autre se trouve l'astrologie pratique. Ce
n'est évidemment pas lu très pauvre personnalité des dieux
planétaires qui a fait, sous l'empire romain, appel aux senti-
ments de la masse,c'est l'idée, répandu» partout, del'universel
échange d'influences et de natures entre le ciel étoile et le
reste du monde, qui trouve sa formule abrégée dans lu repré-
seutation do leur hebdomade. Puissance cosmique, à laquelle
la science prêtait une réalité et une efficacité incontestées,
point n'était besoin d'autre chose. H. H.

W. MDGEVVAV. The origin of the Tnrkish Crescent.


Journal of the anthiwpologiealInslUnle, 1908,p. 241sq.
Le croissant des Turcs et l'étoile qui l'accompagnefigureut
déjà sur des monnaies de Hyzance. Lu mythe explique le fait
et AI. H. le rapporte. J)e l'écussou municipal, il passa dans
les armes impériales et les Turcs en héritèrent, commede bien
d'autres choses. Maiscet héritagesuffit-il à expliquerqu'ils eu
aient fait l 'emblèmede leurs drapeaux et que le croissant soit
un des éléments les plus communs des amulettes eu usage
dans le monde musulman et bien au delà de ses frontières V
Le croissant de Byiunce, c'est le croissant lunaire, de même
due son étoile est l'étoile du matin. Mais il lie va pas de soi.
pour autant, que le croissant des Turcs et le croissant des
amulettes soit un symbole astrologique. Unecollectiond'itimi»
lettes dont les photographies sont jointes à l'article de
M. lui fait supposer que le croissant est le résultat de
l'accouplement de deux défenses du sanglier. Si c'est bien
là sou origine, les fabricants d'amulettes lui sont restés fort
lidèles. Cette origine date de loin, témoin les innombrables
dents de sanglier plus ou moins travaillées qui se trouvent
dans nos stations préhistoriques. Quant à l'usage de ces amu-
lettes et aux images qu'elles évoquent, celle de lu lune n'y a
HKIMIKSKNTATIONS
llKM>i|KU.'iK< 2S\>

rien à faire. Ce n.i


sont .i.=r..
des préservatifs 1.
contre lan.Q,a
ninuvais d'il,
dont les défenses du sanglier doiveut repousser symbolique
meutriiiflucnceiuuligiie. Ces uuiuletteMiiuiit surtout employées
pour les chevaux elles l'ont étô iiViiul l'islaiiusuje. Los c;i va-
lions turcs probablement eu étaient puurvusuvaut (lecoiiuailrt*
l'écussoii (leliyzuuce.
.M. U. n'analyse pas 1» psychologie de ces amukHtes. Nous
n'y entrerons pus davantage. Qu'il nous suflisedesigunler cet
intéressant exempte à ceux (lui se préoccupent des symboles,
de leur origine, des imiiges changeantes qu'ils comportent et
de la vertu dont ils restent chargés. II. II.

svdnkv llAItTUND (IC). Addreus to tbe Aathropologioal


Seotion, BrUish Atsoc.for (ht Adv.ofSe., York, IQOO.exlrnil.p. 1-
fi. iCItiin' llii'oiïe des notions uéiiérakwdw lu iimgiu et do sis rap-
litirts aveclu wliçion.)
lilU'MJ (A.). – Sui Fenomeni Magioo Religiosi délie Oomrau-
nita primitive, Hicista Itatium dl Socioloyiu, lOOtj.juillet. ji. 1i.
iii-l1'. Inliiriisiuiitc misenu puiutde lliéories soutenues ici nu'iiu-.

MKVKIf(11..M. Mythologisohe Fragen. Archw fur Helujionï-


irisseitscltafl, 1900. IX, p. 417sq.. 1907. p. m <ii|. (inti'-rcssanl.
OADIÈItMil-.)- – Philosophie populaire annamite Autlmipus.
JU07,II, p. 110sq.. 055 sq.. 1M8. p. 2*8sq. (Analyses de mots cl
île provt'ïbi'S. relation ilu lan^'agi;et des uruyaiK'usreligieuses.

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Goiste der Mystik. lena. Dicdericlis. lyou. XI-lu» p., iuK".

S<:HL'I,TZ(W. - Aiyonisohe Mystik. I. Wion. Akudem. Yi-rlim.


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I.KO (J.). – Die Entwicklung desaeltesten JapanisohenSeelen-


lebens, nuuli seincMi litterur. Ausilrucksfoinicn psycholoyiscli-
liislor L'ntL'i's.ucliun(idcrQucllcn. Ikitr.z. liull u. l'niiKiwltjcticIt.
lirgl, v. K. Lamprecht. Leipzit', Voi(jllllndcr. Vll-luo p.. iii-S".

(X.). -The place of the Christian Trinityand of


S()Kl)KHIil,t>M
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Oxford. 190». p. 391.

UHA'lï.KY << II. The power of gems and charms. l.undn>.


Cay et Uinl, I»o7. XI-ISISp.. în-8-.

WIOEî.S Ohthonlsche und htmmlisohe Goetter..lic/>. lieli-


yiuuswÎM.,X. l'JU". p. 2j7, »q.
240 l'a.V.XKK SUCIOLOUIQUR. 490049119

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l.l'.HMANN (W. – Der sogenannte Kalendor Ixtlilxochitls. Kin


Ileilr. Kcniilii. d. nclitzt-luiJalin-sfustc der Mcxikaiici1.Aittltru-
lion. 1908,III. p. 088 s.|
I,Kl>. NO.NNIKIl;m.). Notes sur la Chronologie etl Astrolo
gie au Siam et au Laos. Antlo-o/Mf,mus. III. p. isu s<{.(Kludf
ila cycle duodi'-iKiireet des prédictions quii'ii sont Vivém.

KAl'ÏZSCII (K Der alttestamentliche Ausdruck » népbescb


met», l'hiloltûa f. I1. Klcinert; Ilerlin. 1907.

B. – liepn'sentalion d'i'lres xpiriluHx.

L. K. FAKNELL. –The cuits ofthe Greek States. Oxford.


Chircndon Press, 2 vol., 1907, Xll-393 p., VIII484 p.. XXXV
Ll planches, in-8°.

AI. F- a publié, en 1896, les deux premiers volumes de cet


ouvrage. S'il nous eu a fuit attendre dix aus la suite, nous ne
devons peut-être pas nous en plitindre; il ne publie qu'à lion
HEl'ilÉSKXTATIUS.S
lUttlUlKl^KS M

escient. Il annonce encore uu ciuquicme volume qui, disait-il


dans sa dernière préface, ne devait pas tarder à par;ittri'. Ce
cinquième volume n'épuisera pas son sujet et il se propose
d'en écrire un sixième qui traitera spéeiiilement des héros.
M. F. voisine avec l'école anthropologique anglaise. II eu
est l'helléniste. Mais il ne lui est pas inféodé,il discute avec
elle; s'il n'adopte pas toutes ses conclusions, entre lesquelles.
d'ailleurs, il a de quoi choisir, il ne goitle pas non plus tous
ses procédés il estimeque, pour bien comprendre les mystères
d'Eleusis, mieux vaut suivre une messe catholique que lire
des descriptions de cérémonies australiennes. M. F. ne se
mélle pas moins des recettes philologiques allemandes. Les
généalogies divines et héroïques, dont M. i.'seuer a fait grand
état, sont d'un fil trop ténu, selon lui. pour fixer les attaches
des cultes. JI est le lionsens mêmeet il joint û son housens un
sens du réel qui donnebeaucoupde sHveur à la lecture de sou
livre.
Le titre eit déduit fort bien le sujet. Ce n'est pas l'ensemble
de la religion grecque, moins encore l'ensemble de la vie
religieuse des Grecs.Ce sont les parties de la religion qui
correspondent aux cases supérieures de l'organisation sociale.
C'est la religiou de l'État, de la cité, mais aussi des groupes
déciles et de ces unions morales qui, en Grèce, correspon-
dent à' lit nation. Ce sujet se définit plus précisément par ce
qu'il exclut. Cesont les cultes privés, les cultes de confréries,
les mystères orphiques. Les mystères dont il est question
sont des mystères officiels, comme ceux rt'Kleusis. Exclut-il
tout à fait le culte des héros"?C'est une question à laquelle
répondra lit suite du livre.
Il y a plusieurs façons d'ordonner uu pareil sujet. Nous
eussions pris pour point de vue tes cités, dont ou connaît lit
religion politique, et les groupes de cités, (loulou connaît la
religion d'état. M. K a cherché le sien sur l'Olympe. Il va de
dieu en dieu et. pour chacun d'eux, il fait un tour d'horizon
où il aperçoit d'abord ses différents aspects et ses différentes
épithètes, suivant sanctuaires et fonctions, la géographie de
son culte, les pratiques habituelles et les fêles qu'il comporte.
Dansles deux premiers volumes. il s'est occupéde Kronos. de
Zeus, de liera, d'Alhene, <l'Artemis,d'AphrodUe.C'est aujour-
d'hui le tour de Dcmeler, d'Hadès, de Khea, de Poséidon et
d'Apollon. Son procédé est uu peu discursif et ce n'est qu'à
la longue qu'on réussit à apercevoir, en te suivant, l'idée qu'il
K. Ilt-UKHKCU. .V«m>«soriol., lStltt-1'.M'.i. H.
242 i.'annkk sociouuïique. luao-VJW

faut se faire des religions d'état. M F. l'a choisi, sans


aucun doute, eu raison de la iiaute idée qu'il se (ait de la per-
sonnalité des dieux- Hévite ainsi de dissocier les images qu'il
eu présente. Mais, il vrai dire, son livre est plutôt un ouvrage
sur los grands dieux de ta Grèce qu'une étude méthodique
de ses religions d'état.
Si M. F. semble se défendre de théoriser, ses idées géné-
raies sont uéiiuiiioiiis fort claires, fêlles sont, au surplus,
exprimées dans une langue si précise et si élégante que nous
.'limerions les transcrire telles quelles.- Klles s'expriment
d'autant plus clairement qu'elles sont eu contradiction avec
des idées ou des manièresde penser,qui sout dopuis quelques
années communes parmi les savants. M. K. conduit contre
elles une heureuse réaction.
Il semble admis que l'étude d'un (ait religiuux ue doive
avoir d'autre objet que lu recherche disses origines. L'école
anthropologique sa part du responsabilité daus les méfaits
qui en résultent. M. F. revendique le droit de s'intéresser
à l'Age unir des dieux. Nous ne pouvons qu'y applaudir,
ayant assez nettement dit nous-mêmes que les recherches
sur les origines doivent se subordonner aux recherches sur
les (onctions. C'est précisément ce que.fait M.Faruell.
La maturité de la religion grecqueprésente un pelil nombre
(le personnalités divines dont les traits sout assez (ortemeul
accusés. Mais n'est-ce pas une illusion qui voile la réalité?
Dèsque l'on arrive à retracer leurs caractères, une dilllculté
s'élève qui résulte du grand nombre de noms, surnoms et
lipilhèli's qui s'attachent à un même nom divin, sans lui être
toujours exclusivement attribués. M. F. n'élude pas cette
difficulté, bien qu'il en réserve l'examen dûu'uitif pour la fin.
La solution provisoire qu'il en donne est, pensons-nous, la
principale thèse de sou livre. si toutefois on peut résumer en
thèses un ouvrage de cette espèce.
Ou peut considérer ces uoms, surnoms et épilhâles comme
les désignations de dieux distincts, doSomier-CôUer,dieux de
fonctionsspéciales, dieu»locaux, génies de faible personnalité
dont la syncrèse aurait produit les personnes olympiennes.
C'est ce qu'a fait tout particulièrement M. Usener. Les Gutter-
niinwn exposent magistralement sa thèse. Inversement, ou
peut supposer J'existence première de personnes divines,
capables de diverses (onctions et spécialisations, désignées
par des épilhètes et des noms de fonctions, lesquels sont de
HKI'HI«KSI\vni>SS
IIBU'.IEUSE* ïl'.t
nature a s'attacher il d'autres personnalités ou à deviniir In
germede personnalités nouvelles. M. F. préfère cette manière
rie voir at le déclare avec toute In netteté qu'il faut. Toutefois
il se garde de parti pris et résiste, par exemple, ta Imitation
(t'ideiilider HyakinthosàApollu».
M. K.admet donc que. dès le moment où il a existé quel-
que chose que l'ou puisse appeler nue religion grecque, le
culte a eupour objet un petit numhredepersonnalités divines,
reconnaissantesderrière le* désignationset les forumsdont on
on les affublait et coinmunesà tout ce ijiii était <rrec, Maisil
reconnaît aussitôt .que ces personnalités n'avaient pas toutes
la même netteté. Dus traces d'au ilgeoit les personnes divines
11'étaieut pas anthropomorphes, d'un a<reméineanienuique, où
elles ne recevaient guère d'imagedistincte des choses derrière
lesquelles elles se cachaient,sont apparentes. Ainsi, le pende
personnalité du ititinni de lu terre verdoyantea pu disparaître
flans la eerdiuf. l'hloi'. Cette anciennedéessede lu terre avait
une personnalitési dilluse que, lorsque des besoins d'esprit
nouveau imposèrent aux dieux des (i^tires plus nulles, son
unité s'éparpilla, l'andoni. Aglmirus, Deineter, Kore sont
issues par différenciation de (îè. M. V.ne nie d'ailleurs pas
que des »yncrèses se soient également produites. Quand des
associations de divinités ont eu lieu dans le culte d'une môme
cité, il eu est, sans nul doute, résulté des échanges de fonc-
tions, qui ont coloré diversement la figure des dieux.
De quoi sont donc faites ces personnalités divines? Deleur
personnalité même, répondrait volontiers M. F. H se refuse
a chercher une <<idée-souche >>,un caraclùre primordial, d'où
dérivent, lescuractéres p;irliculiers et lus fouettons de chaque
dieu. Toute divinité prééminente, dit il, était naturellement
bonne à tout faire, Il ne se range donc a aucune des théories
qui expliquent les dieux. Ceuxci sans doute sont en relation
avec les aspects de la nature animée et inanimée,mais ils ne
sont pas compartimentesentre eux. Poséidonn'est pas plus un
dieu delà mer qu'un dieu des champs. – Y a-t-il parmi les
dieux d'anciens totems ? – M. K.se refuse à jouer colin mail-
lard avec le totémisme. Deineter Kriny.sne prend la forme du
cheval que par suite de son association avec Poséidon. lequel
ne doit ses chevaux qu'à des comparaisons d'ordre poétique.
Le culte totémique des mouches, dont Apollou aurait hérité
à Loucade se réduit a une simple propilialiim des mouches
avant le sacrifice. Quant au culte de l'Apollon Smiiithens,
i!4 I/ANSKËSOCIOLOUIQIJK.
19(MM9Q'I

l'Apollon des souris, pour ne pas se prononcer, M. F déclare


qu'il n'est pus grec. A l'apport des cultes Agraires, il
n'oppose pas la même (in de non recevoir. Les personnes
divines ont certainement joué le rôle de génies agraires dans
ries fêtes «praires.Encorefuul-il s'en tondre.L'épi des mystères
d'Eleusis, par exemple. « peut aussi bieu avoir été un gage de
la naissance et de la renaissance de l'homme, non pas par
symbolisme; mais en vertu de la croyance naïve et primitive
a lïmiïMonie de la vif humaine et de la vie végétale» illl,
p. 184). Cette richesse originelle des représentations, inter-
prétateurs'et théoriciens l'appauvrissent, à plaisir. M. F.,
d'ailleurs, ne se prive pas d'interpréter et d'expliquer. H
explique même toute une partie du caractère moral d'Apollon
par le caractère musical de sa liturgie.
L'existence de pareilles personnalités est eu accord «vei:
l'état où nous pouvons nous représenter, si loin que uous
remontions dans leur histoire et leur préhistoire, les sociétés
grecques. Al'époque où elles se décomposaient seulement en
clans totémiques et, même à celle où elles étaient formées d<;
groupes de cultivateurs penchés sur la glèbe, nous ne les
connaissons pas. Leur substratum préhelléuique en Grèce est
formé par la brillante civilisation creto-myvéuienne. Les
Hellènes nouveau-venus avaient eux mêmes dépassé les pre-
mièresétapes de la civilisation. Ils étaient constitués en Tories
tribus. M. F. nous parle même d'institutions
panhelléniques
très primitives. A cet étage il n'y :i pas à s'étonner de trouver
des dieux ou des héros, dont la personnalité vit dans lu
mesure où vivent les groupes d'hommes qui prennent en eux
conscience de leur unité. Le livre de M. K. est semé de
remarques instruclives sur les rapports de l'état social et
de l'organisation politique avec les formes du culte et de la
croyance. u. (j

H. USEXKR.– Der Heilige Tychon. Souderbare Heilige:


Texte und Untersucliungen, I. Leipzig, Teiibner, l!)07,
Vlll-HSàp.,in-N".
Ce premier fascicule d'un ouvrage posthume sort d'une
veine que M. U. a souvent exploitée. Xon seulement dans
ses « Légendes de Sainte-Pélagie » dont ou nous annonce
pour la suite une réédition, mais à maintes roprisea au cours
de ses divers travaux mythologiques, il s'est plu ù montrer
HKI'H^KM.vnoN>
HKI.HlIKCsiK 2'»'

que les saints dit christianisme avaient été souventles succes-


seurs des dieux et qu'Us |iuuvni<mtmontrer pour celle succes-
sion des titres valables.
Suint ïyclion. évoqued'Ainnlhoiile, a pour prédécesseur
l'riape. C'est, en ellel.tin saint bien singulier. Commeévoque
• rAinalliaule.iiuuun léiuoigiiugGhistorique n'atteste son exis-
tence. Il n'en est pas moins devenu, et reste, le saint principal
delavillequela légende donnecl ailleurs comme sa ville natale.
Cette légende tourne autour dedeuxmiraclescaractéri.sliques.
– Le premier est de la jeunesse du saint. Son père était un
boulanger. L'enfant donne aux pauvres les pains qu'il devait
porter. Pour le justifier, le grenier se remplit miraculeuse-
meut d'un Ilot intarissable de grains. C'est un récit dont In
raciue peul être évaugôlique (Mare, IO,2i>i.– Le deuxième
miracle date de l'épiscopat. Ues vignerons coupaient dans une
vigne des sarments desséchés. L'évoque en prend un, le
plante en terre, dit une prière. Le sarment se met à pousser
et produit des raisins précoces. A la (été du saiut, le 10juin,
la vigne de saint Tychondonne des raisins qu'on distribue à
la communion. Ce deuxième miracle et surtout la pratique
qui le commémore n'ont rien de chrétien. Ce sont eux qui
ont donnélieu au présent travail.
La vigne (te saint Tychon, c'est la vigue miraculeuse de
Racclius, qu'il lit pousser eu diverses circonstances connues de
sou histoire mythique.
La « proposition »des raisins précoces àla (étén'est pas une
pratique spéciale au culte de saint Tychou. Enplusieurs loca-
lités de la vallée du Rhin, t'usage s'est maintenuà diverses
fêtes qui s'échelonnent des derniers jours de juillet aux der-
niers jours d'août- Elle a même été admise par la liturgie
catholique, entre le sacramentiiire grégorien et le f missule
romauum mde 1370.Cette bntetlictio uemavait lieu le (5 août-
(Test aux rinalin romains du 19 août que M. U. eu (ait
remonter l'usage. C'est sans doute uue frite analogue que cou-
tinue la fête de saint Tychon le 10 juiu.
Quanta la personne même du saint, son identité nous est
révélée par son nom. Le nom de Tychon est joint à ceux
d'Hennés, de l'Aphroditos chypriote, de l'riape. Kmployé seul,
il doit désigner quelque dieu des champs, ithyphallique etde
la mêmefamille.
A cette démonstration qui ne laisse guère de doute dans
l'esprit- du lecteur, M. (. a joint la publication d'une inlé-
-M i. vx.NKjf si»;|1ji.o.;i(.iiiK isiuti-t'JM»

ressaiile vie du saint par Johanues


Kleeinôn. patriarche d'A-
lexuudrie. jj jj

STEWAHT CAH.T.. The Origin of the Werewolf supersti-


tion {Vniwmln uf MumuriStuilitA, Sueidl Miienci!swies, vol. V.
ir :i). Coluuibia, Mo., IU0».IV-37 iu-8».
p..
UWHKXCK K.. cl IIKWITT J:. Some aspect» of spirit
worship amongst the Milano of Sarawak. Journal of Ihe
Àuthroiiutauival liuMute, IVm, XXXVIII.| 3is8-iU«.(Ksprils ,iui
••ausi'iit k* niiiladies.)

IIKXHY.1. Mi. Le Culte des Esprits chez les Bambara. AiUhro-


/J<w.l'JOK,III. (.. 7Oi «ij.

WKSTl'HAI- i; Jahves Wohnstaetten nach deu Anschau


ungen der alten Hebraer. Kinc-iiHlrsUimmiil'. L'iilcrsucliuns
XrtMirifl fur «Utestantentl. Wisitimliafl. Ht'ili.-flKV Oii-ss.-n,A
Tôfii'liiiiinn. 10i)S(,XVI-280p., in-8".

KI.'HIi;. - Joua,l'ritlosliintische MoimttliKfin.


11107,ji. i40-Mii.
DIIOUMK l'.i. Hammurabi Amraphel lu-rue hitilinm, iWH
I».iuti-ito.

HEINACII S, Phaéton. lier. ,1,'lUUl * IMiijùm-,l'JUB,I.VIII..


|>. 1-8. :|.i- myilic auraii |iuiifiiriu.iiii' t.- ..ac-rillvud'uu «Imvul Wnn«
au sol«il.;

RKINACII-S.i. Hippolyte. Anlw f,i, HcliijioMiriMtwicluin,I9U7


p. n-tiu.

HKNHV. Tho village Deities of Southern India. Xa.lm*


'»«'•. Muséum
Hullelw V n":i, l'jin. |i. |!i7-|'J0.

SAMTKU K.). Der Ursprung des Larenkultus. ,»«/.<.


f,;r
|<IO7,p. 3tlM-:i»;i.
lli-HuioiiMiisnewichiifl,

MC.NKAi :si ;u.; Dio Woltgottheiten der woguUschen Mytho-


logie. Keleli Sr.n\nht. Il, orkiil. jmar l,:x rtmk* »unilo<illm,tit,-s.
IImI. par I. Kurins .-I II..Muiikm-si,VII, ;j
p. »>|.
KEltX o.. Der Robbengott Phokos. A,r.l,.f. Heli;w,,s,,i<.<.t
l'JU7, X. p. H2sq.

MAASSV.M\lUefErde.J,il,r<:<foft<:tl,xlist,lm,l,
Arch/ht l,,<t
l'IUS.XI, |.

NKSTI.K K.. – Die jungfraueliche Erde .1r<M>-


fur IMwiuiwrU-
semclwft, IS»8, X).
HKPIMÎSKXTATIO.W
Kei.KURLNKS 247

MKII.I.KTA.. Le dieu indo-iranien Mitlira. JournalAriatitjue,


iw:. |>. li;i suiv.(Mouirt'iliuis la notionili- wdl«uducontraiun
lillrlIUlllUIIC
slM'illldiviniSi'
COOK,A. II.1. The Europeàa 8ky-aod. VIIci Via. TlieCclu.
l'ullihu-e.l'JUO.p. H;s<|. 1U07, p. 2i si|.
DICKSON 4. A. – The Burry-Man. b'ulk-Utm.I«U8,p. m s<|.
iCiùuied<-IVle cl personnage diiguisû.;
l'HAZICIl J.O.. Saint-Georges and the Parilia. lier, deslit.
PMuoijr.HmcIoL.1«U«,l. p. 1119.
SMITH[W. U.j. – Der vorohristlich©Jesu, ii«lisiweitoranVor-
sttidiun <l. l'ii;hiisli'lituiJH.(Jiosscn.
liiUsteliiuij!Sgi.'sc!iiclilc
ITiptlmann,l«O0, XM-iM \>.
I.OEWK jB.) – RUbezahliinieutigen Volksglaubea.'tllukrifl</•
I9U8.|». 1-2*.151-100.
Vereiiis/•((!•V'o/fo/c«i«/«,
KICKMANN AV.1. Die Angolologie und Daemonologie des
Korans. im Vergleioh zuderAngel- und Geisterlehre der
Hl. Sohrift.l.cipziK,I1. Kiwr.laoti, IV-oâp.. in-8».

C. – l.ex Mythes.

K. STUCKKN.– Astralnaythen der Hebraeer, Babylo


nier und Aegypter V, Alose. Leipzig, K. Pfeiiïer, 1907,
1)57p., in-8".
Nous avons rendu compte des précédeutsfascicules de cet
ouvrée. M. S. peut.être coulent de i'inllueucc qu'il a eue
il a fait école. L'expliciilion ustrouoniique des mythes est
maintenant classique en Allemagne. Nous n'y inclinons pas
pour autant. D'autre part, M. S. est un de ceux qui tint le
plus fortement appelé l'allenliou sur les parentés mytholo-
giques qui passent par-dessus les frontières des peuples et
des races. li a ouvert de larges horizons aux chercheurs d'ori-
giiies et suivi la migration des thèmes travers les quatre
parties du monde. L'histoire de Moïse fournissait uue belle
matière à comparaisons, dont plusieurs pliiuisphèruseiiregis-
treul les résultats. M. S. a jeté sur le marchéun très grand
nombre de fiches mythologiquesque l'on voit déjà reparaître,
et non pas une à une, dans les travaux qu'il contribue à ins-
pirer. Les éludes mythologiques lui devront certainement
beaucoup. H. IL
248 I.'ANNKK 1«Uli-t!l«»
SOCIOMMityl'K.

K, S1KCKK. – Drachenkaempfe Untersuchungen sur


indogermnuischeu Sageukunde. (Mylhologische Biblio-
tliek, heruusgegeben voa der (îeselIschaU fiir verglei-
chende Mytlieuforsehuug, l, lj. Leipzig. J. C. Htartohs,
1907.-1*3p.. in-tt".

Quelques mythologues ullemniicis. inquiets des tendances


négatricesque nifiiiifesteut de récentes études mythologiques,
ont entrepris de réagir contre elles et de montrer qu'il nefaut
pas renonceratirer de l'étude comparative des mythes des
conclusionssur leur formation et leur signification.Acetellet,
ils oui fondé une Oaciétiftle mythologie tomfnvée,qui va publier
une Mblinthrquemiilhologiquf.où les écrits de ses membres
viendront tour à tour confierau public les résultats de leurs re-
cherches communes. Voicil'idée directrice*de ces recherches.
La mythologie ue doit pas se contenter de colliger des faits.
Elle ne doit pas se perdre dans lu science des religions, ni
dévier du côte des rites et des cultes. Rlle ne doit pas non
plus dégénéreren étude de pure littérature. Les mythes « sont
l'expression de représentations définies», représentations qui
se sont produites dans toutes les inythologies et que ta com-
paraison d'exemplaires, choisis en dehors de toute préoccupa-
tion de temps et de lieu, peut seule aider à déchiffrer, de
même que les diverses colonnes d'une inscription polylingue
se déchiffrent luueâ l'aide de l'autre. Tels sont, ouà peuprès,
les termes de la déclaration de la nouvelle société.
M. S. a ouvert le feu par cette étude qui traite des com-
bats contre des dragonsdans la mythologie indo-germanique.
Les objets de ces « représentations délinies » pour M. S., et.
semblet-il, pour ses collègues, ce sont des phénomènes natu-
rets; les mythes ont une signification naturaliste Mais, entre
les phénomènes naturels, les astres et les péripéties de leur
cours retiennent l'attention des sociétaires. Même,si les deux
premiers fascicules parus peuvent indiquer les tendsincusde
la nouvelleécole, leurs préférencesvoulula lune. Qtiel'oune
voie plus dans les dragons mythiques de» personnifications
de l'abîme, du nuage ou de l'orage Le mythe est question est
un mythe lunaire: c'est la représentation et l'explication de
la disparition périodique de la lune. Le fauteur de sa dispari-
tion, c'est le ««/«/» de la lune ou bien le dieu solaire. Le dra-
gon est la lune ou avale IIIlune; le dieu-luno est tantôt le
vainqueur, tautût le vaincu. Zeus est un dieu-lune, Persée est
KEPttéîîKVTATIOXS nKUKIKl'sE* 2«>

ut) dieu-lune el ainsi de suite. De lu mythologie indo-germa-


nique, M. S., eu termiimut, jette un regard sur le mythe
sémitique qui lui parait susceptible du lu mémo interpréta-
tion.
Ingéniosité, érudition, M. S. a tout ce qu'il faut pour
itiiidre sa thèse spécieuse. Mais nous nous détendons. Mythes
astraux, mythes solaires, mythes lunnires, nous aimerions
mieux qu'on nous parlât de mythes tout court. Aussi bien,
nous ue sommes pus sur que les mythes soient l'expression
de représentations définies et constantes et que les homo-
nymes de la mythologieaient le même sens. H. II.

K. BOKKLEN Adamund Cain im Lichte der vergleiclien-


den MytheuforsclrnuK{Mylhologisehe Bibliotek, I. S/8).
Leipzig, J. C. Ilinrichs. IftÛ".147p., iu-K".
A la lumière de la mythologiecomparée, Adam et Cnïnsont
apparus à M. K. B. eomme des dieux-luue ou des liêros-
luue: il emploie iudilléremmeut l'une et l'autre expression.
Adam, le rouge, est lu lune tëveest la lune le talun d'Adam,
la côte d'Adam, le bâton d'Adam, le serpent, l'arbre de vie;
les fruits défendus,le jardin d'Edenet seslleiives Caïn, Abel,
Cala meurtrier d'Abe! ou veugeur dcsuinèreeleuuemi du ser-
pent; une lutte nouvelle se lève à chaque paragraphe, sans
compter quelques autres qui paraissent à l'horizon. La Gmll-
srhafl fuv oergleklinule MulheufoncliHiuj, qui publie la biblio-
thèque pleine de promesses, à laquelle appartient ce fasci-
cule, a de la partialité pour la lune. La méthode de démons-
tration est simple et ellicace. Pour chaque trait de la ligure
en question ou des aventures auxquelleselleesl mêlée, l'abon-
dante moisson de la mythologie comparée fournil à point
nommé quelque Heurde lune.Il sttflitque, dans un seul exem-
plaire d'un type de représentation mythique, le symbolisme
lunaire soit tant soit peu marqué, pour décider de la série
complète. M. B. trouve d'autres ressources dans une con-
naissance, qui parait étendue, de l'exégèseet du folklore rab-
biniques. Si Adam elCaïu n'ont pus été à l'origine des per-
sounificatious de la lune, ils le sont deveuuset Gainlest resté
il est « l'homme dans la lune » de notre folk-lore. MaisM. B.
veut trop prouver. Que le soleil, la lune et les étoilesaient été
conviés aux noees d'Adam,ne signifie pas qu'Adam soit 1» luue
ip. 32;. C'est un argument de plus mince valeur encore que
88« i/am.vék iwjcior.uiiiut/K. fwiiMmti

M. 11.emprunte a Plutarque, quuud il cite le


passage du de
furie tu orbelaitue, 28, où l'écrivain dit que la terre a fourni
le corps, la lune l'ûme, et le soleil
l'esprit de l'homme. La
mythologie comparéea le devoir de luire le tri et la critique
des éléments qu'elle emploie mais, à défaut de
critique, on
devrait tiu moins prendre les documents a la lettre.
La méthode,ainsi caractérisée, n'exclut
pas d'ailleurs Par
bitraire. Le soleil n'est il pas rouge ?
Pourquoi Adam, le
rougeoie serait pas le soleil ? Ksail. le rouge 'Rdom; et le
chevelues! lunaire selon M. B. Pour MM.Haus Schinidt et
Hermauu Stahndont les livressoulsitfuah'sei-uprèsjesdieux
et les héros chevelus sout incontestablement des soleils.
Que
nos ast rologuess'en leudent
Ce n'est pas queles résultats de ce travail soient
pour nous
«on avenus. Nous ue répugnons nullement a admettre
que les
aclesdes mythesprimitifsaient incarné des astres et que leurs
péripéties aient symbolisé le cours du temps, pourvuque l'on
nous concède que ce n'est pas là tout. Des hypothèses comme
celles de M. B. nous intéressent même tellement
que nous
sommes portés à le trouver parfois trop avare d'explications,
quand il rappelle, par exemple, l'association fréquemment
établie entre la luneet la sagesse, entre la lune et les ancêtres
de peuples ou de races, entre la lune et les morts. MaisU:
soleil a aussi fort à faire avec les morts.
Le plus grave reproche que nous
puissions faire à l'astro-
logie mythologique, ce n'est pas l'incertitude de ses conclu-
sions, c'est dôlfu opprimée par elles. Le sens hypothétique
du mythe lui fait oublier le mythe, et nous
regrettons, à lire
M. B que, muai comme il est. il ne nous ait
pas donné soit
une élude méthodique de la déformation des
mythes relatifs
à la première famille humaine a travers la
littérature juive et
ses annexes, soit uue étude comparative des mythes du pre
«lier hommeet du premier couple. II. U.

H. SOHMIbT.– Jona. Kine Untersuchiin^zur


vergleicheu-
deu IleligionsKeschicuto (Korschiingen zur Helifçinu und
Lileraliir des Allen und Neue» Testaments. !>).Gmtiugcn,
Vantien Hoer.knmlHuprechl,l»i>7. VIII- V.)'t p.. in-K\
M. II. Schinidt est élèvede M. Guntol. Cela veut dire
qu'il
se pbilt à retrouver dans les documents bibliques et chrétiens
des mythes antérieurs, «traugers ou universels. L'histoire du
riKi'HKsi:xr.vfiuxs hkuuikusb* S5l1

prophète Jouas contient un lie ces mythes. Le livre de Job,


quelques passages des prophètes, laissent deviuerdes variantes
d'un mytiie analogue, dont le livre de Tobio fournit encore
une version. Mais il a eu d'autres maître», qui l'ont incité à
se préoccuper outre mesure des phénomènesnuturels, et spé-
cialement astronomiques, que les mythes sont «Missesrepré-
senter. M. H. S. apporte une contribution il l'astronomie
mythologique. Son Jouas est le soleil avalépar un poisson, au
couchait, L renduau jour, au levant Celle préoccupation n'a
pas empêché M. Il. S. de nous donner un fort bon livre.
Les versions et les variantes du mythe central ne sont pas
seulement nombreuses, mais elles sont fort bien triées, com-
parées, analysées et classées. M. 11. S. en distingue trois
séries. Dansja première, le héros ou le dieu est avalé par le
monstre. Gel épisode fait généralement parti d'un combat.
Dans la deuxième, le poisson est à tafuis le sauveur et la mou-
ture du héros. Dans lie troisième série, qui est moins bien
constituée, le poisson monstrueux est te monde des morts.
L'ulion exemplaire de la première série est le mythe du
combat livré par Hercule au monstre, auquel fut exposée
Hésioae: une version du mythe de l'ersée, une version du
mythede Jfisou reproduisent le même épisode. ("est un thème
de coutes héroïques dans le folklore européen et de contes de
navigateurs. Dans l'Inde, In niylliologiefVisliuuiet les contes,
en Polynésie et die?, les peuples du uord-ouesUle l'Amérique,
des mythes et des contes fournissent une quantité notable de
parallélisme». M. H. S. met fort bien en lumière les élé-
ments caractéristiques du thèmedonf. la récurrence est le plus
notable. Le héros gurt.cliiuivi!du corps du poisson. Les che-
veux ont été brûlés par un feu intérieur; mais ce feu, souvent
il l'allume lui-même et pour «a délivrance. Il est souvent
pourvud'uiieurinurc miraculeuse<lout lesélénients rayonnent
au tour de son corps eLblessent son adversaire.
M. Il. S. ne pense pas que des versions de mythes où se
retrouvent aussi instamment dus traits aussi particuliers
soient indépendantes. Klles doivent avoir uue origine com-
mune «t nous nous plaisons il rramuailrfi qu y a Moude
rechercher cette origine. M. S. pensela trouver là oùle soleil
se lève chauve, sans rayons. Les particularités du lever du
soleil sur lesmers tropicales, consignéesdans Uiodon;lie Sicile
dll.c: 18),auraient donné naissance au mythe. Il viendrait des
parages de la mer Erythrée. 11est représentéen Babyloniepar
2ii2 I.ANXKE SOClOLOOlyLK.VM-VHM

le mythe du poisson civilisateur, Oui)nés, qui se replonge


le soir duusles flots, et aussi, pur le combat créateur entre le
dieu Marduk et le monstre Tiamat, si une ingénieuse explica-
tion, que M. S. propose d'uu passage obscur dans le poème
babylonien de lu création, se trouve justifiée (p. 7l>j.En Méso-
potamie est la souche du mythe.
C'est de là sans doute que procède aussi la deuxième série
de versions. Le mythe d'Arion porté par son dauphin en est le
type par excellence. Mais Arion a plus d'uu doublet parmi les
héros du cycle dionysiaque ou du cycle apollinie». Ledauphin
ou le cheval marin ne rapporte parfois qu'un cadavre. C'estle
cas du mythe de Melikerles. Il faut pousser bien loin la doute
philologique pour ne pas admettre que le Melikertes de
l'isthme de Corinthe soit uu Melqart phônicieji. Toute cette
famille de mytltes se trouve plus ou moins étroitement rat-
tachée ù une souche sémitique.
II en est de même de la troisième série qui n'est vraimentt
bien représentée que par des figurations traditionnelles de
la descente du Christ aux Unfers. Mais, dans l'étude un peu
décousue que M. II. S. consacre ù cette série, il trouve le
moyen d'insérer d'intéressantes remarques sur le Conte du
Mort Méconnaissant(p. 172),qu'il est utile de signaler.
Il n'est si bonne collection de faits qui n'ait ses lacunes.
Cellede M. flans Suhmidt en présente de graves. Une partie
de ses héros delphiuieus sont des parents d'Apollon Delphi-
uios, dont il ne dit mot. Apollou belphinios était un dieu
créto égéen, un dauphin guide des bateaux, qui, sous cette
forme, a conduit de Crète vers Delphes les fondateurs de son
culte. C'est un dieu. peut être solaire, qui est est même temps
un être marin.
Quant à l'histoire même de Jouas, elle a dans lo folklore
historique de ta Syrie des parallèles que M. H. S. a négli-
gés. Leur étude le dispenserait de supposer que le livre de
Jouas se compose de deux parties mal cousues, mais compli-
querait peut-être un peu son schème naturaliste.
A notre avis, d'ailleurs, c'est peine perdue, en général,
que de raffiner sur l'exactitude du naturalisme mythique.
M. H. S. nous eu donne, sans penser à mal, un amusant
exemple dans un conte hongrois (p. 57). Un roi avait trois
filles qui s'appelaient nommément, Soleil, Lune, et Étoile.
Trois dragons les eulèvent; trois priuces les délivrent. Elles
reviennent ensemble par le même chemin. Commont le soleil,
ItBLiaiBtMRS
HKPHKSENIATIONS 253

In lu neet l'étoile peiiventilssubiren même temps les mêmes


vicissitudes et suivre la môme route. Le conte, sans doute.
est mai conservé. C'est possible. Maisil est possible aussi qu»
le utiturniisine du conte soit de seconde formation et qu'il
estsoit do môme pour un bon nombre, même pour la plupart
des mythes naturalistes et en particulier des mythes astrouo-
miques. Au surplus, il y a toujours uutre chose clan» un
mythe que son rapport avec une chose représentée, et
ce u'est pas l'expliquer que de In traduire comme une
énigme. H. H

H. STAHN. Die Simson-Sage. Elue religionsgeschichl-


liclie Untersuchuug Ober Riuutkk, -18-lfl.liotlingen, Vîiii-
deuhoeck et Hupreclit, t«08, SI |>.
Cette étude biblique d'histoire religieuse est une étude de
mythologie comparative. Mais l'auteur a, sagement d'ailleurs,
limité sa récolte à un champ restreint ou toutes les simili-
tudes ramasséesaient chanced'être issues d'une même plante
mère. En raison des relations historiques que les habitants
de lit Palestine ont eues, d'une part avec les Assyro-Habylo-
niens et les Egyptiens, de l'autre avec les Grecs mômes par
l'intermédiaire de la Crète et des lies, il n'est pas interdit de
supposer que plus d'un épisode des légendes de Samson, de
Gilgamesh, d'Aristée et d'Hercule ont poussé sur la môme
souche, et même qu'ils sont comme des versions d'une
même légende. Ou peut au tout cas les comparer sans crainte;
ce sont choses comparables.
Pour M. Stahn comme pour la plupart des mythologues
allemands d'aujourd'hui, la mythologie comparative se pro-
pose la lecture des mythes. Il interprète donc la légende
mythique de Samson. Hy trouve un mythe solaire IIn'est pas
le premier à (aire cette découverte la liste de ses prédéces-
seurs est longue {p. 3 sq. M. S. ne se (latte que d'asseoir
cette hypothèse sur une bonne série de parallèles.
Le combat avec le lion est comparé il celui de fîilgamesh et
d'Hercule. Le sacrifice d'Aristée (ail pendant à l'épisode dl!
l'essaim qui sort du cadavre du lion. C'est, selon M. S-, un
mylhecoustruitsuruue énigme doul voici le mot les abeilles
tout le miel quand le soleil est dans \f. signe du Lion (p. 40).
Le grave défaut de ces thèses astrologiques est qu'il y faut
tout expliquer. Passe encore pour l'aveuglement de Samson,
254 I/XSSÈR SOGIOMlQIQl'K. IWti-llH»»

pour les deux colonnes entre lesquelles il se dresse coucher


du soleil d'une part, double«oluuiie de»autels des dieuxsolai-
res eu Syro-I'liénicie d'autre part Mais l;i source que fait
jaillir Samsou devient une preuve de sa nature solaire, parce
que Hercule a fait jaillir des sources; lu mâchoire (l'âne,
parce que l'âne accompagneDionysos. Il est vrai que M S.
a dû démontrer chemin faisant que Hercule et Dionysos
étaient des dieux solaires. Kstil bien sur d'y avoir réussi?
Le meilleur argument, c'est encore le non) inéinc de Samson
qui, eu eflet. signifie le solaire ou le petit soleil.
Au surplus, peu nous importe. Nous pouvons retenir des
investigations de M. S. que Samsou n'est probablement pas
un personnage historique. Ce ne fut pas un juge d'Israël.
Ce ne fut même pas un ennemi bien déclaré des Philistins!.
Son niiziréat est desplus suspects et fut probablementinventé
pour expliquer son abondante chevelure. Uneobservation de
AI. S. nous intéresse beaucoup. Samsou, qui est une sorte
de héros, n'est attaché nulle part. M. S. conclut de là que
c'est un dieu détrôné qui, dépossédé par Jahwe. lors de l'éta-
blissementdes Israélites, a subsisté daus le folk-loredu pays
a titre de persounrdilé demi légendaire. Son histoire serait
laite de mythes dénaturés.
Eu ce qui concerne la personnalité même de Samson, nous
iucltiious versune autre hypothèse. Nous pensons qu'elle est
surtout faite des contes qui se sont groupésautourd'elle. Sam-
son serait un héros, mais un héros de roman épique, comme
Gargantua. En raison même de son existence, cette personnalité
viable a pris nue valeur religieuse. Lemythede Samson a peut-
être absorbé quelque mythe de dieu détrôné. Maisle Samson
que nous connaissons par le livre des Jwjes n'est pas un dieu
détrôné; c'est au contraire un héros, c'est-à-dire un dieu eu
voie de formation, mais dont I» formation est encore plus
esllitHiqueque religieuse.
Un peu de scrupule dans l'emploi des documents ne peut
que contribuer à ta bonne renommée des études religieuses.
M 8. prétend que le Krouas grec, dieu solaire avait pour
symbole un tion (p. 'A'h. se référant au diction nain: mytbolo-
logique de Roscber, II, 14ÏK; or, leKronos en question est un
Kruiios phénicien adoré à G'irlos. Kt quelle valeur présentent
les textes do niythographcs hellénistiques qu'il cite plus loin
pour idenlilier avec le soleil lusdieux qu'ilcompare à Samson?
H.Il.
UKlMtKSKMMIliX.- HKI.IU1KUSKS ii't

P. FRIKOIAËMlKH. Herakles. SageugoscbicliUichet'u-


tersuehuugeiMl'hilologiseheUnterisuehuu^eii,XIXi. Herliu,
Weidmau»,X-IH8p., Ï»-H".
C'est bien l'histoire d'uu mythe, tout <>umoinsl'histoire de
son adolescence, que l'uuteur a vouluretracer. Il n dédié cet
essai à U.Useiieret il se réclamede l'enseignement de Wilamo-
wilss-Moelleudorf. Fidèle l'esprit de ces excellents maîtres, il
considèreles mythes connue des nullités en soi, dignes d'iuté-
rôt, mouvantes,complexes, faites de rapprochements iiiatleu-
dus qui se révèlent à l'œil aviséd'un philologue minutieux.
Oit verni que leur observation,a de quoi satisfaire d'autres
curiosités que des curiosités de grammairiens. La méthode
rnise eu («uvre tieut compte, d'une part, de la géographiereli-
gieuse,c'esl-H-direde la localisationdes épisodes mythiques et
des cultes, de l'autre, des généalogieshéroïques et divines, eu
portant sou attention sur les homonymies et les synonymies.
L'emploi de celle méthode dout les procèdes et les détours
sont allongés coniplaisamment, conduit M. Friedlaeuder à
présenter le mythe d'Hercule comme uue œuvre savante à
laquelle des poètes et des théologiens ont collaboré, (ondaut
avec quelques mythes originaux des traditions de familles et
des mythes empruntés.
Le cadre des douze travaux est l'uHivred'uu poète épique
rhodieu du vr ou du vir siècle, Peisandros de Camiros. qui,
d'ailleurs, a laissé dans la littérature ancienneune réputation
de plagiaire, ayantutilisé, dit-on, le poèmed'un autre Rlmdieu.
celui do Peisiuos de Liudits. L'Ile de Sa ni os » également
apporte sa contribution à l'édillcationépique du mythe d'Her-
cule le poète est également nomme parla tradition c'est
Greophylosde Sijmos.
M. F. nous (ait suivre son héros sur quelques-uns des
théâtres de son activité la Thrace. la Bëolie, 1Élolie, la
Thcssalie, et, chemin faisant, il nous fait passera Argosel
chez les Dorieus.Dans la Grèce historique. Hercule est une
sorte de héros national des Dorieus. héros familial de leurs
familles régnantes. D'autre part, on a voulueu faire un dieu
préhistorique de la Béulie n'est-il pas ne à Thèues? Maisà
Thebes, dans le culte. Herculeest Irai lé enmétèque. \)t: plus,
son nomn'est pas conformeaux lois phonétiques des dialec
les béotiens. Môme,à bien étudier sou arbre généalogique,
sa vruie mère n'est pas l'Alcniôue thébaine, mais uue Alec-
25tt i.snkk .suciuLOiiiyiF.. îmio-twi

tryone argieuue, celle-ci filleet nonpuspetitefllledePersée. A


Sparte, lecullft d'Herculeest toulùf:iit secondaire.EnArgolide
eufi», ce u'est pas Argos, la ville dorienue, c'est à Tyrintiit*.
ville prédorienne, que son nomreste attaché. Le mythe d'Her-
cule ne doit donc probablement pas gnuid'e.hoseaux Béotiens
et auxDorieus.
Les aventures étoliennes d'Herculetonnent I» part du poème
saniieu de Crêophylos. Celui-ciétait intitulé In prise d'OËcha-
lie. Œehalie était lu capitale d'Kurytos, le père de Joie. Vain
queur d'un concours d'arc, dont Joie était le prix, Hercule,
repoussé ppr Eurytos, se trouve engagé contre lui daus une
longue guerre de vendetta Entre temps, se placentses amour**
avecDéjanireet la mort du centaure Nessus. Le poèmesiimieii
doit avoir utilisé des traditions éoliennes dans lesquelles
Hercule, en plus d'un cas, s'est substitué à Apollon(p. "Hi.
C'est à la suite des navigateurs rhodiens qti'llercule a visiir
la Thrace et. de même, les terres occidentales baignées par lu
Méditerranée. Daus le cycle des douze travaux, l'épisode de
Diotnède appartient a l'apport rhodien. Celui deOéryon et dit
Jardiu desHespéridessontde la mêmeformat ion. Lemylhedes
douze travaux s'est développé, suivant notre auteur, autour
d'un noyau de légendes localiséessur les confinsde l'Argolide.
Le lion de Némèe, le sanglier d'Krimanthe, l'hydre de Lente,
les oiseaux du Stymphale, et peut-être te taureaude Crète, sont
de la première formation, qui est argionue. Les navigateur*
des colonies grecques avaient uu horizon plus vaste et, Il
mesure qu'ils étendaient leurs reconnaissances,ils ont allonge
sur les mêmes routes les voyagesdu héros, Parmi les nouvelles
péripéties du mythe, il en est une qui porte sans conteste la
marque des lieux où elle a été imaginée. C'est la mort du dieu
sur le bûcher. Le bûcher sur lequel périt Hercule, c'est celui
de Crésus, c'est celui du dieu de Tarse, Sandou. Cet épisode
de mythologie asiatique ne peut avoir été introduit dans le
mythe d'Hercule que par les Grecsd'Asie. Tout laisseà penser
que les habitants de la Doride et de Kliortessont les auteurs
de la combinaison définitive dont la vulgate hëracléeune est
résultée.
Restent les mythes thessaliens. Il y en a que M. I<\rat-
tache a la tradition de certaines familles rhodiennes (p.ïtëi
Dans les autres, Hercule est ou le substitut ou l'auxiliaire
d'Apollon. C'est le cas du combat contre Kyknos. Alais In
défaite de Kyknos est attribuée également au Thrace Lykos.
nKI'RIÎSKNTATlONS
HF.I.IOIKUSES 357
M. Farnell, dans le livre signalé plus haut, démontre avec
vraisemblance que Lykos est identique à Apollon. Le roi de
Dryopeg,Laogoras, qui est mis ù la raison par Hercule, est
également un ennemi d'Apollon. Notre auteur suppose que
Hercule a été adopté par les prêtres de Delphes. Le mythe de
la dispute du trépied relate, sous formedramatique, la concur-
rence et l'accord du héros et du dieu. L'oracle de Delphes a
beaucoup fait pour la diilusiou du culte d'Hercule. C'est a lui
qu'est duo la fondation de bon nombre de sanctuaires liera-
cléens,et c'est probablement à Delphes((ne s'est scellé le pacte
d'alliance d'Hercule et des Dorieus.
Ainsi, des poèmes épiques, après avoir mis en rouvre des
mythes et des traditions religieuses, produisent un nouveau
croit de représentations religieuses qui prennent racine dans
de nouveaux cultes. Dans cette deuxième phase de soit his-
toire religieuse, Hercule prend les caractères d'une sort* de
héros national. M. F. n'avait pas A le mettre en lumière,
mais il est bonde s'en apercevoir.
Nous ne nous dissimulons pas que quelques-uns des argu-
meuls invoqués oscilleut sur des pointes d'aiguille. Mais il
en reste assez de solidement plantés pour que l'ensemble de
la thèse soit en équilibre. Par une coquetterie d'helléniste,
M. F. s'ellorce d'helléniser tous les Phéniciens de la famille
d'Iuachos, à laquelle appartient Hercule. 11lestait tous partir
de la côte grecque d'Asie. Mais, s'il faut être scrupuleux en
matière d'étymologie phénicienne, il n'importe pas moins de
l'être en fait d'étymologie'grecque. Que les personnages en
question aient fait escale en Asie Mineure, considérons-le
comme démontré. Maisest-il vraiment impossible qu'il y ait
un apport phénicien dans la mythologie divine et héroïque
des Grecs?'f il. Il.

I.ICSS.MAN.N[H. – Aufgaben und Ziele der vergleicbenden My-


tbenforsohung [Mullwl.MM., l, 4|. Leipzig,Hinriclis,I'JOb,
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p. 2«8-3<ï;.[Collectionde mytheset
ili-voulusUtné. Les«ules cuitlipunenldes renseignement!) inté-
ressants,eu particuliersurrorii-nialiiin p. 3U.">
sq., p. 3ii si].;

JIKIKIl(J.\ Mythen und Sagen der Admiralitaetsinsulaner.


I90T.p. l'.4«,033; t!W, p. 193.051.(Voir.p. 200.une
,Ulhro)>os,
K. DniMiKiM. – AnniV suciûl.. 19ni|So!>. {',i
238 L'SSXÉBSOCtnLOUIVL'K.
f'JOfl-IUO»

à celle que rapporte Parkinsoti. cl qui mniblc


It'içiuitloi«]eutii]U(<
une lûueuded'inticliiuuiu.!
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vol. 1,1.

COSQUIN;k. – Lelait de la mère et le coffre Bottant. Uevue</w


IIBPKÉSKSTATIOXS
KF.I.rEU?ES 259

historiques,1008,u" 100.(ConIps
question* f>l mythes conipun'-ià
proposcl'uiiflogi'inli'liisloriijucmusulmanede Java).

f). – Légende»,imites, l'/mprex.

0. DAKHNHAKDT.– Natursagen. tiiue Saintnluug uatur-


deutender Sagen, Uiirchen, Kubelnund Legenden. Leipzig,
Teubuer, 2 vol., l«07-li)09, XIV-370,XVI-31Up., in-8».
M. Diihnhardt, nous donne, avec la collaboration d'un cer-
tain nombre de savants, dont la corn péteucenous assure que
les matériaux de son œuvre sont de bonne qualité, un recueil
de mythes, contes, fables et légendes classés suivant leur
matière et leurs allluités formelles. 11 nous promet deux
autres volumes qui doivent être suivis d'une étude critique
et théorique où les Natursagen seront définies, leurs méta-
morphoses et leurs voyages expliqués. Comme M. D. a
promené sa curiosité de collectionneur au moins à travers
l'Europe, l'Asie et l'Amérique, qu'il a mis à profit les littéra-
tures les plus anciennes aussi bien que le fotk-lore moderne,
ou peut être certain qu'il a fait un choix parmi la masse des
récits qui se sont offerts à lui. Quels sont les principes de ce
choix?
M. D. s'est proposé de récolter des « histoires naturelles »,
des récits concernant les animaux, les plantes, les miné-
raux, mais aussi l'homme, la création, l'ensemble du monde.
C'était un critérium, maisil n'était pas très rigoureux, car il
est peu de contes ou de mythes qui n'eussent pas un titre
quelconque à faire valoir pour être admis dans la collection.
Aussibien M Sébiltut a-t-il pu absorber tout le folk-lore de
Francedans une histoire naturelle mythologique. II faut cons-
tater toutefois que diverses séries de contes étiologiques,
relatifs aux animaux et aux plantes, ont été recueillies avec
faveur.
Le sous-titre des deux premiers volumes. Vu/en ;um ulten
Testament,Sf/gensumneuen Texlament,nous donnent à penser
que les récits colligésont trait aux deux Testaments, l'ancien
et le nouveau. Mais les nœuds qui les y rattachent sont fort
lâches. Ils ne sont d'ailleurs pas toujours noués rie la même
façon. Dans le premier volume, on trouve d'abord des groupes
de récits qui traitent les sujets mûmes de la Ceuése création
du monde,création de l'homme et de la femme, luttes entre les
Î60 L'ANNÉE SW.IOL0UIQUR, 1900-1900

principes du bien et du mal. D'autres groupes donnent des


développemeiitsoriginuuxtt a dessujets spécialement bibliques:
lit chute, Iti punition du serpent, la transformation de l'homme
après la chute, les péripéties bibliques du mythe du déluge,
hi chute des anges. D'autres groupes font
simplement inter-
venir des personnages bibliques tels que Abraham, ismaPl,
Joseph, Moïse, Josué, David et surtout Salomou dans des
contes qui n'ont pas d'autres rapports avec les récits
bibliques.
M. 1). prend la peine d'indiquer dans l'introduction du
deuxième volume .p. iv) le très petit nombre de textes évau-
géliquesqui se trouvent en relation avec les récits qui le cont-
posent. Mais ils ont pour acteurs le Christ, Marie, les apôtres.
Beaucoup se rattachent étroitement aux évangiles apocryphes
et spécialement aux évangiles de l'enfance, qui, d'ailleurs,
se composent en partie du folk-lore que le nom du Christ a
ramassé. Parmi les récits qui se trouvent dans ce volume, il
n'y a doue pas grande différence entre ceux qui viennent des
évaugiles apocrypheset les autres. Eu somme, les deux Testa-
ments ont été pour M. D. comme un grand filet dont les
mailles ont laisse passer toutes sortes de choses.
Quant au groupement des récits, qui, dans chaque chapitre
et section de chapitre, sont rapprochés suivant les affinités
de leurs thèmes, l'auteur de la collection s'est
beaucoup préoc-
cupé de leurs origines. « La question capitale, à savoir daus
quelle mesure la ressemblance des récits chez des peuples
différents doit s'expliquer par migration ou par similitude de
fonction mentale. peut, dit-il, recevoir plus facilement une
réponse quand il s'agit d' « histoires naturelles » que quand
il s'agit de contes proprement dits ». M. D. nous dira
sans doute quelque jour pourquoi nous connaissons en tout
cas sa réponse c'est que les contes étiologiques ont
voyagé.
Tandis que l'école anthropologique anglaise, se plaisant à
constater l'universalité des thèmes de récits, montrait volon-
tiers l'impossibilité de les rattacher à travers
l'espace aux
mêmes origine, s'il y a une école allemande, elle parait
verser de l'autre coté. Il se peut que l'étude comparée des
mythes et du folk-loreaient, à ce point de vue, subi l'influence
des ethnographes et aussi des historiens. Elle tient sans doute
moins de compte des institutions, plus de l'histoire et de la
géographie.
Le premier chapitre du premier volume nous donne un
excellent exemple de récit voyageur. C'est uu récit de la créa-
BBl'IMSSISNTATJONS
HKLIUlËUsiKi 2011

tion dont les versions s'éparpillent d'Europe en Amérique.


On peut en distinguer deux types, l'un occidental, l'autre
oriental. Dans les deux types, la création est l'œuvre de deux
créateurs, Dieu et le diable, qui collaborent; le diable agit
d'après les instructions de Dieu, mais, par jalousie, il essaie de
les tourner; la terre atteint son étendue définitive par crois-
sance le diable convoite et revendique l'empire des morts,
qui lui est assure par une sorte de pacte. Dans le premier
type, représenté par uue version bulgare, Satan plonge dans
l'océan pour y prendre une motte de terre avec ses ongles il
essaie de noyer Dieu endormi sur la terre Dieu lui demande
conseil pour le développementde la création. Dansle deuxième
type, que représente a souhait uue version sibérienne. à l'ori-
gine Dieu et le diable volent, sous forme d'oiseaux, à la surface
de l'eau le diable tombe dans l'eau et est sauvé par Dieu du
fond de lu mer surgit une pierre sur laquelle le diable s'éta-
blit le diable plonge pour chercher de la terre; il en réserve
une partie; sur la terre s'élève un arbre du monde. Ces deux
types de récits cosmogouiques sont parents. Le dualisme ira-
nien, plus net dans le type occidental, moins apparent dans
le type orientai, y est reconnaissable. Tous deux dérivent d'une
cosmogonie, dont quelques traits se trouvent déjà dans ce que
nous connaissons de la cosmogonie assyrienne et de plus
nombreux dans les traditions cosmogoniques de l'Inde. Ils
doivent rmmédialemeut leur origine à un mélange de tradi-
tions syro-irauiennes analogue à celui dout le mandéisme et
le manichéisme ont résulté. Ducôté de l'Europe, les Bogomiles
et autres sectes voisines ont propagé la tradition cosmogo.
nique dont dépend le type occidental. Du côté de l'Est, le type
oriental a circulé chez les Turcs et les Mongols. M. D.
le suit chez les Houriates et les Yakoutes et jusqu'en Amé-
rique. Il aurait peut-être été plus logique de rattacher la plu-
part des récits américains qu'il rapporte au mythe du déluge
qu'à cette cosmogonie manichéenne. Cependant les thèmes
de la plougée créatrice, de ln jalousie des démiurges, de la
croissance de la terre, qui se trouvent dans quelques autres,
justifient l'état qu'en fait notre auteur.
L'analyse des versions, dans les autres chapitres, n'a pas eté
poussée si loin.
Les matériaux du deuxième volume ont été rassemblés
dans un cercle plus restreint, ou la recherche de la parenté
peut donner des résultats plus sûrs.
-OS I.'AX.VKKmiCIULOUIUL'K.
iaOU-190'J

Ce sont les voyages de Jésus sur la terre en


coinpuguio de
saint Pierre uu de tuut autre de ses «poires
qui amorcentlu
plupart des épisodes de ce folk-loro évungôlique. Dans ces
voyages.Jésus se présente comme uu autre Wotiiu. S'il y a
des mythes derrière ces coûtes, c'est de
mythes germaniques
qu'il n'agit. Par contre, lu question de l'intluence exercée par
les traditions judéo-chrétiennes sur la rédaction dernière des
mythes gurmuuiques se pose ù M. U. 11 admet que les
Tohnloth Jeschu ont fourni une purlie du mythe de Halder.
l'our nous, nous sommes portés à restreindre au minimum
la part de ces emprunts.
Daus l'ensemble, ce qui domine, ce sont les labiés. Undes
chapitres les plus intéressants du deuxième volume expose
l'introduction dans la légende de la Vierge de la fable éso-
pique dont La Fontaine a fait L'aigle el le hibou (V, p. 18)).
Derrière les légendes, les fables, les contes, a-l-ii des
y
mythes, comme nousle dit l'introductiondu premier volume?
Ces mythes dépendent-ils de cultes naturalistes? Mieux vaut
ne pas en discuter eucore et attendre M. D. à sa conclusion.
Il. H.
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UKCKICIt
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ludiensin il. Ilisturinde prusliis.Pronr. Kuenigsijeij;,
V»p.
MK)')tÉSK'iTATt')!<'<)t[:f.)':tKC)!t!'< 20:f

IIKI'SI.EH ;A. ~~<t.tnt.tti,.t.JM,.tt.<––t-J––––-


-GesohiohUiohesandMytbisobeBindergeraa-
nlschen Holdenaage. Silîuinjxliemliled, K. pr. Akadem.d. Uï.«..
inoy, p. 920-9-1:».
UKKTKL11 ). – Altindisohe Paralielen zu abendlaendischen
Erzaeblungsmotiven. Studien Mri:er<jl<iiclntndeit
Literaturyesulti-
chte île M. Kock VIII. I, Uvrliii.l'JOS.

IIKLI.KH;U. -La légende judéo-chrétienne du compagnon au


Paradis. Hfi'iti^lcn
lit Juives, UHW,1.V1I.p. ÎU'Jsi|.
XACIIARIAK(Tu. – Zur Gesohichte vomweisen Haikar .1, l)j<-
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KINDLAY ;«.«. – The parable of the peari merchant.tStuonilur,
1008,pp. 138-170
T01.DO ;i». – Leben und Wandel der Heiligen im Mittelalter.
StmtienzurieroMch.IMeraluryesclikhle, 1908,n*1.
SlMiEK;S. – Schweker Maerohen. Ojimn. x. der verollenl-
lichleuWtrchenlilenttur,I. Hem. Francki»,187p.,iiits".

K. – Ihmjihi's.

ANTOINEUUP1N.– Le Dogme de la Trinité dans les


trois premiers siècles, llibliolhifjui'de eritiqnf relinieuxe.
Paris, E. Nourry, 1907.
Comme les autres ouvrages de la même collection, celui-ci
a pour but de poser et de résoudre devant le grand public l'un
IIKI'IIKnKXTATIOXS
HKMlilKUSKS 2t)ii

(tes problèmes les plus compliqués de t'histoire du Christia-


nisme. Il s'agit de l'origine du dogme de la Trinité et de .son
évolution pendant les trois premiers siècles. Enfermer un
sujet uussi vaste dans les limites d'un petit livre qui ne compte
pas quatre-vingts puges, est une lâche malaisée, irréalisable
môme et sur l'opportunité de laquelle il y aurait lieu de dis-
cuter. Je lie sache pas qu'on gagne rien de précis, au point de
vue scientifique, à ces simplifications hâtives qui sont de mode
aujourd'hui.
Malgré ces réserves, il convieut de louer la clarté de l'ex-
posé de M. U. Il lait de la formule ternaire, adoptée dès la
flu du premier siècle dans la cérémonie du baptême, et au
commencement du second, dans la prière eucharistique, le
point de départ de la Triade chrétienne. L'association litur-
gique des trois termes, Père, Filset Saint-Esprit, dont l'usage
s'impose insensiblement aux églises, ouvre la voie aux spé-
culations Idéologiques(lui conduiront plus tard au dogme de
la Trinité. L'inilueuce du rituel sur la pensée est même telle
que celle-ci, travers des vicissitudes diverses qui devaient
ramener logiquement à l'abandon de l'un ou de l'autre des
termes de la Triade, ne parviendra plus à les écarter. La for-
mule assurera leur conservation définitive.
C'est avec let théologie pauliuienne que commence le mou-
vement d'idées qui donnera naissance au dogme de la Tri-
nité. L'influence de la philosophie grecqueet particulièrement
de ta doctrine du Logos lui imprime eu Orient une direction
caractéristique dont l'aboutissement fut la théorie des hypo-
stases. Acôté du Dieu Père, infini, parfait, le Logos, incarné
dans le Fils, garantissait l'existence d'un second dieu, infé-
rieur, limité et placé à la portée des hommes. On s'en
serait certainement tenu à ces deux personnalités diviues
sans lu formule ternaire. Mais celle ci oblige» les théo-
logiens à faire du troisième terme l'tësprit, une hypostase
nouvelle émanée du Logos et placée à son Égard dans un
rapport de subordination semblable à celui qui unit le Fils
au Père.
Pendant que l'Église grecque adaptait sa foi à la doctrine
du Logos, l'Église latine lui restait entièrement fermée. Elle
conservait parallèlement la Triade liturgique et le principe
d'un monothéisme strict et absolu. Les termes Père, Fils, Es-
prit, distingués dans la formule ternaire, étaient considérés
comme les trois manifestations d'une même substance,
2M L'ANNÉE SUCWI.OUHJUK. 1UU6-1»O!I

n.
comme ses il:jT"I_- _L
dlilérculs attributs ou mwlexd action. D'où le nom
(le inodulisnio donnéù la théologie romaine.
Ce (ut le pape benys qui cutisuinmu tu fusion entre cette
théorie et celle des hypostases. Avec lu première, il afllrme la
communauté d'essence dus trois tenues de lu Triade avec la
seconde, leur division en trois personnes. Cette solution con-
tradictoire, Incohérente, irrationnelle, inspirée par le souci
de mettre li» à des querelles en conciliant l'iucoueiliable, fut
proclamée vérité surnaturelle. C'est le mystère de la Trinité
qui a triomphédans l'Église. Pu. du F.
I.KVI;i.. – Le péchéoriginel dans les anciennessouroesJuives.
Happ, Ann. de l'Écolepratique des Ifautes-Êtudes;Secl. des Se.
ttelig.; pour l'Mi".Impriiiwio Nationale,1908,28p.. in-8°.
«iKSTKKLKV ,\V.0. E.. The Evolution of tbe Messianioidea.
A studyin compurativ.'religion.Lundoii,J. l'itniaim, i'J08,iu-8û,
p. 292.
HKVILLEJ. –Les origines de l'Eucharistie, limtedel Histoire
desReligions,1901,p. 1-30 IH-iOtJ WOlS,
p. 1-59.
i;EFFCKE.\(J.•.– ZweigriechisoheApologeten. Uipatij, IVubner,
I'JÛ7,Xl.lil-liXi
ji.. in-8". u
(Contient ue importanteétudedes pre-
miers déveioppenipnlsde r<ipolog(Hii|ue.)
ZOECKLEH vo.. Qescbiohte der Apologie des Cfaristentums.
iintersloh, Herlelsmann, in-8".
JAMES[\ – The doctrine of the Earth-soul and of Beings
intermediatebetweeuManandGod. HibbertJournal,I9U9,n"2.
CASI'AM;\V.). – Echtheit, Hauptbegrlff und Gedankengang
dermessianiBohen Weissagung, Jes. 9, 1-6. Btitrûuezur Pôr-
vunScliilltlerund W. Lulgert,
i(erungcl,ristticht!rThc»loQie,llr*u.
XII' aimée,i llcfl. (liitersloli. C'. Bertelsmann,
1908.«9p., in-8u.
(Contientuneinli«res-;niti?étudede la notionde « paix »}.

XIII I.KîsSilCIKTi:» I.EIMIDROIT


KKLlrilKL'.SKS, Kï LKl'HMORAI.K

ParMM.
R.Ikuravl II. IUukiit.

F. BKNNEVVITZ. – Die Sttnâe im alten Israël. Leipzig,


Deichert. 1907.XII-271p., in-8°.

L'auteur, pasteur luthérien, veut prouver ses collègues,


I.K* SOCIKTB4
UBUIVIKI'SKS 2(57

tes « théologien» pratiques que l'iuloi-prêttitioti historique


de l'ancien Testament, à la manient de se cun-
cilie très bien avec les exigencos de lu prédication. Sa mé-
thode est simple. Toutes les représentations bibliques du
péché ou de la colère divine, ijui ne cadrent pas avec la morale
d'un chrétien éclairé, sont rejetât connue des éléments
<<presque païens », étrangers au véritable jitlivisme celui-ci
est caractérisé, mémo avant Moïse,,par une tendance éthique
que les prophètes auront seulement à dégager et à épurer. On
voit que M. H., s'il accepte les méthodes et les résultats de
Téculecritique, n'eu reste pus moins, en eilet, un pur théolo-
gien dans sa façon de poser les problèmes et d'interpréter les
faits.
Celivre pourra rendre des servicescomme recueil de textes
et de références aux exégôtes mais l'apport personnel de
l'auteur est très mince. R. Il.

1'.THOMAS. Le droit de propriété des laïques sur les


Églises- et Iè patronage laïque au moyen-âge (Biblio-
thèque de l'École des Hautes-Etudes, Sciences religieuses,
XIX;. Paris, E. Leroux, 190(5,XV-I9-S
p., in-8°.
L'auteur étudie un cas particulier d'un problème très géné-
ral il .s'agit, en effet, de la religion et du droit commun, de
conflits provoqués par les relations contradictoires de la
société religieuse avec la société civile. La fondation de cha-
pelles sur des domaines privés fut une première source de
difficultés les fondations en faveur des églises en furent une
autre: l'incorporation des églises ait système féodal mil le
comble à la cou fusion. Ces difficultés étaient multiples, car
ce n'était pas seulement le droit de propriété réelle sur les
terres occupées ou affectées, qui était débattu entre les pro-
priétaires et la personne moralequ'était l'Église: c'était aussii
l'extension de ce droit de propriété en ce qui concernait le
gouvernement spirituel des églises. Le patronat est 'le pro-
duit des transactions qui tranchèrent ces couilils.
IL H.
IIIlHMANN.– Die Idée d. Sonne im alten Testament. I.iMpziu,
Iliuriclis,l'IOû.
i:uLA1! I) I-. –Die religioesen und sittlichen Ansohauungen d
alttestamentlichen Apokryphen u. Pseudoepigraphen. (iii-
lersluli. Hurtulsmumi,t'JOT.
208 l'asxke sufiuLociyt-K, l'M-iWJ

STANGti. – SOnde, SchuJd undSOhne. Allgem. cvang. luther. Kir-


chenzeit, de Lutliurdt, 1907, vol. XL, p. 30-33.
ZOEPF (Dr L.– DasHefligen Lebenim 10. Jabrbundert lieitmge
:ur Kulluvtjesuhiclitedes MUMalters unit der Htitaitisance. Ursfib,
von W. (ioetz, 1 lien. Leipzig, B. II. Teubncr, 1908, Vll-230 p.,
in-8«.

HAUMUAHTKN. Verfassung u. Organisation der Kirohen.


Kempteii, Kû.scl,1U06.
RALSCIIKN. – Eucharistie und Busssakrament in d. ersten
6 Jabrhunderten d. Kirohe. Kroiburi; i. H., Herder. l'JOS,
VIII-204p.
KHKHS(Jos. – Das Devolutionsreoht vorneliral. im Katliol. Kir-
chenrecht. Stuttgart, Ënke, XXIV-«8p.. in-8".
TROISIÈME
SECTION
SOCIOLOGIE MURALE ET JURIDIQUE

KTUDI-:
DES1IKULKS
MOlUtKS COXSIUKKÉKS
Kï-JUIUDIOUBS
PA.NB LKUH liKNKSK

I. OUUllOITKTI)KLAMOH.UB
KRGÉNÉRAL

J'ai-MM.Lai'Iï,IHviii,I1oi-i.é,K.ircoxm,Hem.

ALFRED FOUILLÉE.– Morale des idées-forces. Paris,


F. Alcan, 1908, I vol.. in-8", i.xiv-391pages.
Si nous devionsexposer intégralement et discuter point par
point l'œuvre, longuementinéditée, dans laquelle M. Fouillée
déduit une morale de son systèmephilosophique, notre tâche
serait très lourde. Mais elle sera légère si, pour nous con-
former au programmede V.lmu'r,nous bornons notre examen
aux éléments sociologiques de cette morale. Leur rôle est, en
eflet, dos plus restreints.
Suivant une tradition à laquelle ou l'aurait cru volontiers
moins fidèle (puisque l'idée, pour lui, étant force, l'intelli-
gence doit être en même temps volonté;, M. F. distingue
d'une part les éléments intellectuels, de l'autre les éléments
sensitifs et volitifs dela moralité. Maisni dans la première, ni
dans la deuxième partie de sou ouvrage, il n'accorde une
grande importance aux faits sociaux. Parmi les facteurs qui
Agissent sur la volonté pour la déterminer à réaliser l'idéal,
M. F. signale, il est vrai. des facteurs sociaux l'opi-
nion, les mœurs, les lois, l'éducation (p. 311 à 330). Mais il
n'insiste guère vingt pages lui sulliseut, et ce court chapitre
n'est sans doute pas celui auquel ce penseur original tient le
plus, Quant aux facteurs intellectuels, ils sont déterminés
par une méthode toute dialectique qui invite l'auteur à cou-
370 l'aNNÈK UOC-190U
SOCIULOUIQI'ë.
sidérer tour à tour le sujet moral, l'objet moral, te rapport du
sujet à l'objet, le rapport des sujets entre eux. Et c'est seule-
ment dans l'examen de ce dernier problème qu'il serait
permis, selon M. F., de faire intervenir des considérations
sociologiques.
Il n'abuse pas de ce droit. L'une de ses idées principales.
c'est que.cbaeuu de ces sujets ayant en lui-même non seule-
ment l'idée-forcedu moi, maisridée-forced'autrui, l'altruisme
est aussi naturel et aussi désirable, aussi puissant et aussi
« persuasif » que l'égotisme. L'idéal moral consisterait doue
dans une synthèse de cesdeux idées-forces.Mais lu première,
l'idée-forcedu moi, mise au premier pian dans les premiers
chapitres du livre, ne tarde pas à s'effacer devant la seconde.
Constatant que le désintéressement est universellemeut con-
sidéré comme moral et qu'inversement la moralité est uni-
versellement teuue pour désintéressée, M. F. finit par nous
présenter la bouté, le sacrifice, comme le « principe de la
morale des idées-forces » il ne parait plus songer à conci-
lier l'altruisme et l'égotisme. Sa pensée semble donc hésiter
eutre deux directions. Mais aucune des deux propositions
dans lesquelles se résumeraient ces deux tendances n'est
fondée, dans son livre, sur une enquête sociologique. 11est
vrai que la première « cogito, ergo sumus », « la con-
science implique le non-moicomme le moi », ne parait pas
relever de la méthode sociologique.Pourtant, ce qui importe,
au point de vue moral, ce n'est pas le rapport abstrait de ces
deux termes, l'implication logique de l'objet dans le sujet,
c'est leur rapport concret dans quelles circonstances l'idée
d'autrui prime-t-elle, aux yeux d'un sujet, l'idée de ce sujet
lui-môme? Dans quelles circonstances ces deux idées, égale-
ment présentes à une conscience, luttent-elles l'une contre
l'autre ou s'accordent-elles l'une avec l'autre? Nous serions
surpris si l'examen méthodique de ces circonstances ne révé-
lait pas l'action de facteurs sociaux. Quant à ta seconde pro-
position « nul ne sépare la vertu du désintéressement »,
MF. nous met au défi de lui trouver une exception.
Pourtant, il ne nous semble pas qu'un hédoniste puisse
l'accepter. Kt, en tout cas, il vaudrait la peine d'examiner les
exceptions, au moins apparentes, que peut présenter l'obser-
vation sociologique.
L'observation sociologique ne serait pas inutile pour
résoudre les autres problèmes soulevés par notre auteur.
DL" DUOIT BT DE LA «QIULB KN UÉNÉB.U 3741

Ktudiant le sujet moral. Il s'ellorce de montrer que toute


valeur naît « dans. par et pour » la conscience individuelle.
MaisI» fonction d'évaluation, dans cette conscience, est-elle
soustraite à toute variation? Estelle un absolu? Il est peu
probable que M. F. l'admette lit valeur même de la con-
science varie pour la conscience. Comment varie-t-elle? Les
facteurs sociaux sont-ils étrangers ri ces variations? Est-il
inclinèrent, pour expliquer le prix qu'un individu attaclie à
la pensée humaine, de savoir s'il est Australien ou Français?
Pour qui veut, comme notre nuleur, constituer une morale
< scientifique », peut-être serait-il plus
important d'analyser
res faitssociaux que d'afïîrmer le primat de lu conscieuce^De
même,l'étude de l'objet moral est incomplète tant qu'on n'a
pas cherché en fonction de quels facteurs réels"(parmi les-
quels figurent des facteurs sociaux) varient nos appréciations
sur les objets. Ce n'est pas sans surprise qu'on voit M. F.
recourir à la table des catégories kantieunes pour dresser la
liste des valeurs objectives. Il est peut-être nécessaire, pour
penser, de soumettre les objets aux catégories do quantité,
de qualité, de modalité et de relatiou; mais, si ingénieuses
que soient les considérations pur lesquelles l'auteur tire de
cesnotions des jugements de valeur, on ne peut
s'empêcher
de les trouver arbitraires. Enfin, la théorie des
rapports du
sujet moral à l'objet moral aurait dû, elle aussi, se soumettre
au contrôle de la sociologie. Pour savoir si l'idéal moral
agit
sur nous comme un « impératif », ainsi que le veut Kant, ou
comme un « persuasif », ainsi que le soutient M. F., un
appel à l'histoire est au moins aussi nécessaire qu'un appel à
la conscience. Môme lorsqu'on est tenté de faire ù la
psy-
chologie sa part dans la coustruction de la morale scienti-
fique,on doit trouver exiguë celle que notre auteur réserveà
la sociologie, j>r jji

F. CHAPMAN SIIAKP. A study of the influence of eus-


/tom on the moral Judgment [Bulletin <>ftl,v
Unkenittj
nf WitCaimn, W 'Mu Madison, Wisconsiu, IU08, lit n
iu-8".
Au moyend'un questionnaire, complété par des interviews.
l'auteur obtenu les réponses d'envi rou cent cinquante étu-
diants à divers problèmes de casuistique ces
réponses
formentla matière d'une minutieuse étude sur les motifs du
â"2 l'asnkk sociologique, iuoimbo»

jugement moral spontané daus les sociétés modernes (les


sujets n'avaient jamais fait d'études morales, p. 18).La théorie
qui explique les jugements moraux par la pression d'une
volonté étrangère au sujet, spécialement la volonté sociale
(ou divine, p. 20) serait en contradiction formelle avec les
faits. Aucunedes réponses n'affecte le caractère immédiat qui
serait requis par cette théorie; l'autorité, par exemple celle
de la Bible, ne sulHt pas, chez ceux qui la retournassent, à
déterminer le jugement moral. Celui-ci se constitue constam-
ment par l'usage plus ou moins explicite, et d'ailleurs très
variable, du critérium eudémouiste. L'enquête de M. S.
est fort méticuleuse mais son poiut de vue, étroitement intel-
lectualiste, est superliciel. H se peut que les motifs, même
spontanés, de nus jugements moraux soient des raisonne.
ments eudémonistes mais. s'il est vrai que la pression col-
lective s'exerce normalement sur la conscience sans être
reconnue comme telle, les motifs conscients de nos jugements
seront loin de conteuir l'explication véritable des croyances
que ces jugements expriment. M. D.

F. TOEN'NIES.-Die Sltte. (dans la collection DieUesellxclwft,


1
dirigée par Martin Hubert. Francfort, Riitten et Lœniug,
190!),It.'i pages.
M. Martin Buber édite, dans la collection La Société,des
« essais » destinés à mettre à la portée du grand public un
certain nombre de notions sociologiques le Prolrtnrittt, par
W. Sombart; la Iteligion, par (i. Simmel; la liomw, par
Fr. Glaser; VÉroIr,par L (jurlilt. etc.
C'est la ('mit mur qu'étudie sommairement, dans cette
même collection, l'auteur de Gtmeimchnft unit (ieselhchtifl
Quand on parle de l'habitude chez un individu, il im-
porte de distinguer I le fait, un acte qui se répèle 2» ta
norme, la règle qu'on s'impose; 3' la volonté, la « seconde
nature » constituée par la domination d'une tendance. De
même, quand il s'agit de la coutume dans la société, il faut
distinguer entre le fait, la norme et lievolonté. Trop souvent,
selon l'auteur, les théories de la coutume «celles do Iliering
et (le Wiindteu particulier), n'ont pris en considération que
le second de ces éléments. C'est sur le troisième que la socio-
logie -devrait insister. La coutume est l'expression dune
volonté sociale >p. 13 par laquelle un peuple, – unité plus
»!• DHOIT
RTm LAMOR.U.B
UNli&Vlifl.U 2*3
iacile sentir qu'à définir et qui, pur lu collaboration des
morts avec les vivants, ;i un caractère d'infini, – s'efforce
de persévérer dans son être. Le malheur est que cette volonté
sociale ne s'exprime pas, comme il arrive pour la voloulé
individuelle, par des décisions formelles. C'est par des méca-
nismes plus ou moins inconscients qu'elle établit sa prédomi-
nance. Cesont ces mécanismes qu'il importerait de démouler.
L'auteur met le plus volontiers en lumière ceux de ces nu1-'
eanismesqui sont fondés en nature; il recherche avec prédi-
lection ce qu'il appellela Xatitrbam de la coutume. Non qu'il
méconnaissece que celle-ci doit aux croyances religieuses.
Maisles créations de la religion commentent plus qu'elles
n'expliquent les institutions sociales (elles constituent uue
HeylntuitgpluiùlquuueHrrjriiiulunyt. Lesinstitutions sociales
s'appuient, en dernière analyse, à des impulsions naturelles;
ce sera, s'il s'agit du culte des ancêtres, le mélange de révé-
rence et île «roiule iEhrfuivht) que les parents ne peuvent
mauquer d'inspirer aux enfants. S'il s'agit des devoirs de
l'hospitalité, ce sera, avec la crainte des déprédations que
l'étranger pourrait commettre, le désir de montrer qu'on prit!
recevoir. C'est en prenant texte de pareilles remarques que
railleur rectifiera l'Iiypotlièse de Spencer sur l'origine des
institutions eéremontelles ip. 05) les gestes de la politesse
ne fout peut-être que traduire, dans bien des cas, un besoin
nature) d'elïusum. Il (nul noter, à ce point, de vue, le grand
rôle queM.T. accordeà la femme comme organede la coutume
p..31-81 1.Parcequ'elle enfante et parce qu'elle nourrit, la
femmeest pius proche de lu nature. Et c'est peut-être par sou
influenceque s'expliquent bien des adoucissements des cou-
tumes barbares engendrées par la superstition.
Maisc'est par des changements de la structure sociale elle*
mêmeque s'expliquent les évolutions décisives de la coutume
et sa transformation eu sou substitut, qui est uussi sou con-
traire, la mode (p. 77). Lu domination du régime de la mode
est la preuveque la Gexeltsclutfts'est définitivement substituée
à la Gemeituehaft.Une société nouvelle s'est constituée, qui
a besoin de plus de mobilité, et qui doit élaborer de nou-
vellesinstitutions pour faire respecter enfin les égales liber-
tés des individus. C'est dire que l'ère du rationalisme est
ouverte.Mais le rationalisme ne doit pas nous faire oublier,
selon M. T., ce qu'il y u de raison latente dans les pro-
duits de l'activité spontanée des peuples. C. B.
K. IJniKiiKDi.– Année sociol., lunti-luOT. IN
27V l'a.HN'È» SOeiOtOGIi>US.HJUO-IBft»

K. WESÏERMAHCK.– The orlgln and development of


the moral Ideas. Vol. Il. London, Aluctnillaii. 1908. w-
«32 p. iu-K".

L'Année SocioloijHfite(t. X, 1903-14)00,p. 383 sq.), dans un


loug compte-rendu du tonte premierde cet ouvrage, a recouuu
tous ses mérites et les services qu'il est appelé à rendre et
-aussidéveloppé les critiques que nous avons à faire sur la
méthode qu'il applique. Reveuir sur ces deux points est chose
inutile. Je me bornerai donc ici à relever ce qu'il y a de plus
intéressnut daus ce second volume.
Les premiers chapitres achèvent l'étude, commencée dans
le tome premier, des formesde conduite qui concernent direc-
tement les ititérètsdes autres hommes (p. 161-228).Les princi-
paux points traités sont les suivants propriété, histoire des
opinions sur la valeur des rnodes d'acquisition; tendance au
volet prohibition du vol dans les différentes sociétés: – res-
pect pour la vérité et la bonne foi, prohibition du mensonge
fremarqusiblecollection de faits sur un sujet qui a été jusqu'ici
trop peu étudié); – respect pour l'honneur d'autrui et poli-
tesse – reconnaissance, patriotisme et cosmopolitisme (ces
deux derniers sujets sout faiblement traités) – origine et
développementdu sentiment altruiste et, à ce propos, revue
des différents types sociaux et examen de la manière dontt
l'évolution de ces types affecte celle de l'altruisme.
Viennent ensuite les formes de conduite qui concernent la
personne in^initde l'agent (p. 229-363) le suicide, sa fré-
quence relative dans les différentes civilisations, causes du
suicide dansles sociétés inférieures, histoire des opinions sur
la valeur morale du suicide et explication de sa prohibition:
– les envers soi-mème, leur origine et leur caractère
subordonné et. à ce propos, origine et évolutiou des opinions
sur ta videur monde du travail et du repos;– la tempérance,
le jeune, les interdictions alimentaires et notamment celle de
l'alcool. |;i prohibition de l'ivresse; – la propreté, l'ascé-
tisme. Sur lu plupart de ces questions, les faits n'avaient
jamais été rassemblés en si grand nombre.
La morale sexuelle est l'objet de la troisième section
ip. 3li'»-8!ii Lh chilpitre sur le mariage, la prohibition de
l'inceste défensede la théorie propre à \Vn8tennarckcontreles
critiqua» qu'elle a soulevées, notamment contre la théorie de
Durklieiinj, l'undogiimie, la polygamie et la monogamie. \v
DU DII01TKT BK M MOBiU.RRN IlKNKIUI. 27ti

«group marriage » australien, u'est pas très riche des ques-


lions capitales, comme celle du divorce, sont à peine ellleu-
rées. D'une façon générale d'ailleurs, les collections de faits
les plus originules qu'aient rassemblées ici M. VV.concernent
surtout les mœurs qui ne sont pas eu même temps des règles
de droit ou à l'aspect juridique desquelles ou u'altucbe
pas attention c'est par là que ces collections so distinguent
le plus de celles que nous devons nux créateurs de VRlkno-
Imj'mheJuriiynidenz. A celle section appartiennent encore
trois chapitres, sur le célibat et les variations des jugements
moraux le concernant, sur la liberté sexuelle (important),
la prostitution etl'adultère (rapide), – enfin sur l'homosexua-
lité (collection de faits particulièrement importante).
Les autres matières traitées dans le livre sont le respect
pour les animaux ip. 490-514;,le respect pour les morts et, à
i.-e propos, les idées dont les morts sont l'objet et les rites
funéraires ip. 51u-5û2i,le cauuibalisme (p. &83-&80. discussion
importante sur son extension), enfin les rapports de la morale
et de la religion (p. oSâ-liH). A ce sujet, l'auteur expose toute
une philosophie de la religion. Il étudie la croyance à des
êtres surnaturels, l'esseuce de la religion et de la magie, l'évo-
lution religieuse; les devoirs envers les dieux et. à ce propos,
certains rites commela prière et le sacrifice, certaines iuter-
dictions religieuses comme celles quiportent sur les noms des
dieux les crimes d'hérésie et d'athéisme et même la tolé-
rance le rôle des dieux comme gardiens de la moralité, ce
qui l'amène à discuter longuement sur l'origine de la croyance
à un dieu suprême, souverain législateur et juge.
Quelques pages, où l'auteur résume sa théorie de la mora-
lité et de sou évolution (elles sont pauvre» et iilleslKiil que
l'importance des résultats théoriques obtenus est hors de pro-
portion avec l'ampleur de l'enquête accomplie/, mi copieux et
utile index des matières et une très précieuse table des innom-
brables livres où l'auteur a puisé son incomparable érudi-
tion. terminent l'ouvrage.
Peut-être est-il possible de faire, en quelques mots, senlir
>e qui nous sépare de M. \V. Pour lui, comme pour tous les
iiiiihropologistes. les manières de penser et dt; si'iitir, qui
sont à la raciue des institutions et qui par siiile les expli-
quenl, sont connues ou pourraient l'être avant l'élude com-
parative Ances institutions et, s'il eu est ainsi, c'est queces
manières de penser et de sentir sont constitutives de la
376 VaxKIM KOcJolûUIQUB.
1906-190»

nature humaine en général, entendez de la nature de l'homme


comme iudividu, et que, pur suite, ln connaissance introspec-
tive que nous avons de nous-mêmes nous permet de les
atteindre immédiatement. L'explication des faits quel'obser-
vation ethnologique et historique découvrira est eu quelque
sorte donnée d'avance la science a pour rôle de montrer que,
malgré les apparences, malgré les anomalies dues à des con-
ditions secondaires, les (ails se laissent nimeuerà celte expli-
cation. Il y a bien évolution, mais cette évolution n'a rien qui
puisse dérouter notre cuuceptiou psychologique de la nature
humaine: si les mœurs changent, c'est seulement parce l'im-
portance relative des tendances qu'elles expriment «Image
elle aussi, que ces tendances se combinent entre elles autre-
ment. Itendre intelligible l'évolution observée par une psycho-
logie préconçue telle est la tache que notre auteur semble
s'assiguer. – Tout autre est l'idée que uous uous faisonsde
la niHre. Les premiers résultats obtenus par l'histoire des
sociétés humaiues nous conduisent à admettre, comme un
postulat. que la nature de l'homme nous est largement
inconnue, notamment pour cette raison qu'elle est, pour uue
grande part, d'origine sociale et ue peut être comprise que
si on l'observe connue rluelque chose de social, que l'intro-
spection individuelle n'atteint pas. Au lieu d'expliquer dr
pltiitoles institutions pur ce que nous croyons savoir déjà de
l'homme, nous voulous essayer de découvrir, par l'analyse
des institutions qu'il il créées, ce qu'est véritablement
l'homme. Par l'étude des elïets observables, nous cherchons
à atteindre les forces, les causes encore mal connues qui les
ont produits. Toute la sociologie nous apparaît comme une
immenseinduction qui doit, au terme, renouveler l'idée que
l'homme se faisait de lui-même. Aussi ne pouvons nous, sauf
exception, voir dans uuefuuvre comme celle de M. W. qu'une
immense accumulation de matériaux, infiniment précieuse
d'ailleurs, qui doivent dans l'avenir, non plus rentrer dans
les cadres fournis par la psychologie traditionnelle, mais les
briser et nousobliger à eu construire de nouveaux.
P. F.
HOBHOUSE (L.-T.. Morale in évolution A Study in
comparative etlties. Londres, Chapman, 1900, xvn-87Sp. et
vn-294 p. >1vol. in-H".

Ce volumineux ouvrage parait bien mince quand on songe


Ut UltUlT KT UK M MÛHAI.KEX liBNKHAL

ii I immensitédu sujet qui y est iiltanli').C'est toute la monde


dont le développement nous est décrit. M. Hobhouse ne s'en
tient pas au contenu de la moralité, aux normes objectives
qui repleut la conduite et les rapport» des hommes;il retrace
iiiissi l'histoire des conceptionsrelatives a lu naturede l'agent
moral, à l'obligation et à la sanction. Si le premier volume
contient un traité complet de sociologiejuridique, le second
expose à grands traits toute l'évolution religieuse et philoso-
phique de l'humanité.
Une telle irnivre dépasserait sans doute actuellement les
forces d'un homme, si elle devait être faite dans un esprit
scientifique. Eu réalité, ce livre ressortit à la philosophie de
l'histoire, non à la sociologie. Ce n'est pas sans raison que
M. 11. se réclame à la fois de Comte et de Hegel (II,
p. 237 sq.). Pour lui, toute l'évolution morale consiste dans
une réalisation progressive de l'humanité dans l'homme
il, p. 3G8>,dans l'élaboration d'une synthèse de plus en plus
compréhensive où s'harmonisent les droits du l'individu et
ceux de la communauté indéfiniment élargie. Kn même
temps, la vie morale change de caractère au lieu d'être mue
par des forces sociales, spontanées et aveugles, «Ile devient
« vraiment éthique », c'est-à dire consciente et déterminée
par un idéal rationnel (11,p. 218sq.. p. 279 1. nous paraît
inutile de montrer nne lois rie plus combien celte façon d'en-
visager les choses morales est peu satisfaisante au point de
vue scieiililique.
Le livre ne manque pas d'ailleurs d'exposés clairs et bien
conduits (par exemple, sur la question il tt matriarcat,I,
p. 100 sq.: mais Lclourueiiu est Irop souvent cite comme
une autorité), ni d'analyses pénétrantes (variations et rôle de
l'idée de la « nature lui nuii ne». Il, p. i>2Hsq.; façon diflé-
rente dont le problème moral se pose pour les philosophes
anciens et les modernes, II. p. 207 sq. i. Kulin, et c'est peut-
être son principal intérêt, «et ouvrage reflète, eu une langue
agréable, parfois éloquente, les aspirations généreuses, peut-
être un peu naïves, du néo-libéralisme anglais d'aujourd'hui.
R. H.

I.KVY(K.1.–Le droit repose sur des oroyances. Quextiompra-


lU{»ude législationoitrrirreetd'ëcimomi>;
sociale,juin-aoûtl'JO'J.
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Aikcrtaui. «906,10p.
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J909,XV-380p..in-8».

11. ORIOINK DKtiIUKKS


UKMGIKL'SK MORALKS
KT JUHIDIQI^.S

Par MM.M.mset Oaviu.

.]. G. FHAZKR.– Psyohe's Task. A discourse concerninn


the influence of Superstition on thé Growth of Institions.
Loudres. Macmilla», 1909,X-84 p., in-K».
Ce charmant petit livre ne prétend pas être un ouvrage
d'ensemble. C'estune série d'essais, conçus sous la forme d'uue
leçon, qui dut être longue elle est publiée ici avec notes et
développements à l'appui. Il y est traité des origines de la
morale. L'autour se demande comment les superstitions pri-
mitives, l'animisme, ont servi à fonder certaines institutions
fondamentales de la civilisation, comment Psyché a rempli
sa tâche, comment « la folie dévie mystérieusement vers la
sagesse ». Heureusement, M. Krazer ne s'en tient pas à de
pareilles formules, et nous voyous. môme dans un livre qui
2S(> l'anxkk «oii-imw
socioi.oaiQi.-E.

porte ce programme, un sérieux propres dans su méthode et


dans sa vue sociologiques des faits religieux. D'abord, son
enquête cesse d'être encyclopédique, et il u'éprouveplus le
besoin d« ces vastes revues de faits cuiitnulieloires. Ensuite
il s'ellorce, comme nous. de voir dans les institutions
primi-
tives autre chose que le simple eflet des illusiqus
mytholo-
giques. « Cuitune toutes ces instituions, dit-il, se Bout mon-
trées stables et permanentes, il y a forte
présomption qu'elles
reposeut, pour uue grande partie, sur quelque ehose de plus
que sur la superstition. Une institution fondée entièrement
sur la superstition, c'est-a dire sur l'erreur, ne
pourrait durer.
Si elle ne répond pas à quelque besoin réel, humain, si les
(ondulions n'en out pas été largement posées, profondément
établies dans la nature des choses, elle doit périr». Et la con-
clusion est encore plus uette « La superstition n'a été
que
l'opinion erronée, mais elle a mené à la bouue conduite. On
a mal motivé sesactious, mais ou a bien agi. Klletut le roseau
sur lequel s'appuya la civilisation naissante, la lumière cli-
gnotante à la lueur de laquelle on s'est dirigé vers la raison,
vers la morale. »
Le nouveau travail de M. F. a, pour cette raison, uue
por-
tée sociologique que u'avaieul pas ses
précédents travaux.
Nous nous étonnons même qu'i) n'ait pas compris combien
cette notion populaire de « la superstition >, qu'il continue à
accepter, devrait être mise en question. Les croyances primi-
tives des bonunes sont encore pour lui des « opinions erro-
nées», des préjugés affectifs et seutiiuiiiilaux.dêiiuésde valeur
objective. Maisalors, par quel miracle, si ce sont des opinions
fausses, auraient-clins pu diriger si heureusement la con-
duite? Comment des actions mal motivées se trouvent-elles
avoir été, dans un si grand nombre de cas, si convenablement
adaptées il leurs uns Sansdoute, ces considérations ne sont
pas le produit d'une élaboration rationnelle. Mais nos notions
du droit de propriété, de l'I-Ilal, de la vie humaine, du ma-
riage n'ont pas. eu fait. un autre caractère. Quand le peuple,
en appliquant les jugements moraux, réagit contre l'échelle
des peines, telle qu'elle est fixée législalivement, n'est
pas
détermine par des idées qui n'ont rien de scientifique? N'est-
il pas daus le domaine de la pure superstition ? Les
juristes
eux mêmesraisonnent « priori sur le droit, la loi, etc. 11ne
faut pas que le caractère soi-disant
mystique des croyances
primitives nous iuduise en erreur. Nos croyances murales
IIMU1NK HKMUIKL'SK DES IDÉES M0H.UES ET JUBlUigOES 28t

actuelles, bien qu'elles se soient dégagées de l'appareil reli-


gieux qui les enveloppait, conservent une religiosité qui leur
est propre. La persotiue humaine, le mariage. la propriété, la
patrie, sont des choses sacrées, aujourd'hui comme hier elles
le sont seulement d'une autre laçou. C'est pourtant à l'ana-
lyse de ces croyances, à la recherche de leurs origines que
(toit s'employer lu sociologietelle que nous l'entendons ici.
Comme le livre de M. K. est conçu sous forme de cours,
les idées qui y sont exposées sont présentées sous forme de
thèses que nous allons énoncer successivement
I. La croyance au manu et au tabou des chefs, à leur pou-
voir sur la nature, telle qu'on l'a conçue, en Mélanôsie, en
Polynésie, chez les Bantus, clans l'ancien Pérou, dans l'Egypte
pharaonique, a servi ù foncier l'autorité législative, morale,
le gouvernement. Ici M. F. fait une addition notable à sa
théorie des origines de la royauté, il fait attention au carac-
tère moral de celle-ci(cf. AnnéeSociolayiiiur,X. p. il I). Mais
il laisse toujours eu suspens la questionfondamentale, qui est
de savoirsi le roi fut tel it cause de ses « pouvoirs
magiques »,
on s'il eut ces pouvoirs parce qu'il était roi, centre de la so-
ciété. II. Les tabous de propriété, tels qu'on les
impose eu
Mélanésie, en Polynésie, en Afrique, servent à empêcher le
vol et it renforcer ta sécurité sociale. Le fait est certain mais
ici encore M. F. laisse de eôté le fond môme du problème
pourquoi, comment, en vertu de quelle autorité impose-
Um un tabou ? Carenfin, et ceciest formellement dit par les
Maori par exemple, il faut avoir le droit d'imposer un
lupu,
ce
pour que tapu sokellicace. La question essentielle est de
savoir ce qui fonde ce droit. III Kn Malaisie, en Afrique,
chez les Hébreux voir p. 40, une très fine analyse de faits).
eu Grèce, et. d'ailleurs, chez bien d'autres peuples que M. F.
ne nomme pas. bien qu'il les connaisse mieux que nous, la
régularité de la vie matrimoniale, l'observance des ititerdits,
l'horreur des adultères sont reliées à la notion du cours
régulier des choses, delà fertilité des moissons en particulier.
Ici M. F., qui rejoint les résultats de ses propres recherches
sur les rapports entre les rites sexuels et les cultes de la végé-
tation, se trouve sur un terrain plus ferme, mais qu'il eut pu
explorer plus à fond. IV. En Malaisie, dans le nord de
l'Afrique, en certains pays banlu, dans la (îrèce ancienne,
dans-uncertain nombredetribus nord-américaines, la crainte
de l'esprit de la victime renforce, commande le respect de la
288 f/an.vék socioi.oaigL'K. iWfl-luo»

vie humaine. Maisle (ait qu'où craint le mort ne suffit


pas
à déterminer la prohibition dp l'homicide car dans certaine*
de ces sociétés où cette crainte existe, le meurtre n'est pas
prohibé.
Quoique vaillent ces thèses, il faudra eu tenir compte, car
elles touchent aux rapports, capitaux tant pour l'étude de lu
moralité que pour celle de la religiosité, des institutions mo.
rale» et des institutions religieuses. M. M.

R. H1RZEL. – Themis, Dike und Verwandtes. Eln Bel-


trag sur Gesohichte der Rechtsidee bel den Grle-
ohen. Leipzig, S. Hirzel, lao", VI-M5 p., iu-8».

L'important ouvrage de AI. H. est, comme l'indique le


sous-titre, uue contribution à l'histoire des idées juridiques
et morales de l'ancienne Grèce la méthode employée con.
siste à étudier le développement sémantique des mots par où
ces idées s'expriment. On trouvera analysées ici les priuci-
pales sources de la conception grecque du droit, les notions
de Themis et de Dikè, l'idée d'égalité et celle de loi et fou
voit de suite quel intérêt sociologique une telle entreprise
comporte.
.De la première de ces notions, le vrai sens se manifeste
dans les attributions de la déesse Themis. Celle-ciest, avant
tout, une conseillère de Zeus, une divinité parrdre, qui en
vient à se confondre avec la volouté même de Zeus. En tant
que déesse d'oracles, elle ne fait qu'étendre aux hommes sa
sollicitude (p. 9). Par ce caractère essentiel s'explique sou
rôle dans les assemblées, qu'elle convoque et dont elle est
l'âme làY'M et Oijn»sont termes étroitement liési, dans les
repas, dont elle animeles entretiens. Divinité bienfaisante, et
notamment divinité de la Terre (V1( Bt^, p. \H>,elle n'est, en
son principe, que la divinité du bon conseil et tel est juste
ment. d'après AI.H., le sens primitif du moi OIjjhç.Interpré-
tation tonte nouvelle, car. tandis qu'anciens et moderne*
avaient jusqu'ici rattache Ofjii;à la racine Ot,parce qu'ils en
faisaient un synonyme de Omiu!;(la loi;, notre auteur admet
nécessairement une origine différente (p. 83-SSj,une raeinr
Ota, qui paraîtra peut-être assez hypothétique. Il ne parvient
d'ailleurs cette étymologie qu'après avoir déduit du « bon
conseil », avec une ingéniosité 'lui ne va pas sans «irtifice.
tous les sens de Os;i; C'est de cette acception première qui;
ORIU1NK
RKUiiMMKK
UKSlUÉKij
«UIUI.K*
KTUMDlyUE* 2J>3
dériveraient les 0*;M«t;comme oracles de»dieux, comme déci-
sions inspirées des rois homériques, comme sentences deb
juges, comme revendications de l'étranger nu nom de Zeus.
enfin, et seulement en vertu d'une abstraction postérieure,
comme « lois non écrites », d'institution divine. Devenu ar-
chaïque, le mot prend, comme <)wx6;,une teinte religieuse
sou usage, illimité dans lu poésie récente, se réduit en prose
classique aux expressions Ot>ju;in-.[, <A<%• où il est plus
proche du conseil que de la loi, étant « ce qui est permis ».
La conclusion de cette partie, c'est que « dès la racine » la
Ofynétait « activité et vie » ip. îi!»j sans quoi elle n'eût
jamais pu être réellement personnifiée.
L'auteur suit une voie analogue dans l'étude de lu Dikè
('pp.86 227) ici encore, et d'une mauiére plus subtile que
décisive, il déduit tous les sens du mot d'une acception parti-
culière, étroite, qu'il croit primitive. La Dikè (qui ne s'appa-
renterait pas à otfcvjjM,montrer, mais à <5'.y.t!v, frapper) ne
serait d'abord que le geste par letiuel le roi-juge homérique,».
de sou bàtou (sceptre, insigue de la puissaucej, sépare les
combattants et tranche le litige par suite, la sentence (d'où
une jolie explication, pp. 95-100, des formules telles que
U)*(«,oz'jÀiàotor)).Delà, la ôixr,en serait venue à désigner le
châtiment, qui résulte immédiatement de la sentence, et par
suite, la vengeance les droits et les devoirs de chacun, que
lu sentence a pour effetde fixer le droit en général; la jus-
tice la coutume, en tant que foudéeen droit (sens dérivé,
malgré l'opinion répandue) et aussi les prétentions des par-
ties elle procès tout entier. Intimement liée avec la vérité
(i).0uii, la &xi)ne se borne pourtant pas à la connaissance
théorique du vrai elle impliqne, comme le ju* romain,
une puissance effective, uue tendance à se réaliser ainsi on
passe naturellement de la sentence à la peine, et cet aspect
redoutable de la iw, tend à prédominer. Nous retrouvons la
môme évolution dans les fonctions (le la déesse Dik6 d'abord
divinité pacifiquede l'arbitrage, elle s'assoinbril jusqu'à deve-
nir infernale. L'expression M-i- vul &W.rt est cousacrée mais
il n'y a pas entre ces deux termes le contraste absolu d'un
droit divin ([as. et d'un droit humain ijux), puisque tuut droit
est d'abord d'origine divine, mais seulement la différence
entre deux sources du droit le conseil ou l'ordre du père.
du roi, du dieu iO^ïç),1»sentence du juge («for, – L'ancienne
supériorité de la OS^ (Themis, mere'de Diko.i s'efface en
284 LASSÉE SOCIULWHijl-E.IDUff-lUUt»

même temps que le « régime patriarcal » (p. IC7i la vertu


de l'époque nouvelle, celle qui. suivant un proverbe, ren-
ferme toutes les autres, s'appelle âtMtwivr,. La ôi^ s'étend à
la vie publique, elle régit l'existence tout entière (p. 178)
sou extension se reflète dans lu variété des définitions
qu'on
en donne, et dont le contenu, d'abord emprunté au droit
privé ou pénal, consiste finalement duus l 'accomplissement
des devoirs civiques. Dèslors, lu «!«•“complètement laïcisée
(p. 203),rapprochée de l'utilité bienentendue (tout droit étant
ceusé reposer sur un contrat i, atteintson apogée de l'hu-
maiiité, son empire s'étend jusque dans le monde des dieux,
dans le règne animal et dans la nature elle-même, où, d'un
rôle simplement répressif, elle s'élève au rang de
principe
constitutif du lusiiim.– Mais la construction de M. H., est
parfois aventureuse ou se demandera notamment, avec
M. Huvelin iC. It. in lier, des Et. Elhnoijr. cl Social., tîlOH
p. 279-284;,si la notion d'un droit propre aux animaux n'est
qu'une extension récente de la iixr,.
Ace transfert des notions juridiques, le concept intermé-
diaire d'égttlitè aurait spécialement contribué (p. 228-320i.
Plus étroitement encore que les Romains, qui1par
tequila*
désignaient non pas la justice, mais l'équité '<> iwtiy.i; les
(îrecsont associé l'idée d'égalité itô iw, il celle de justice
les Pythagoriciens symbolisaientcelle-ci par le nombre carré,
produit de facteurs égaux. Le mot t'xonouitViquine vient pas
de vtjtt;, mais de vijikv, p. H2>était « le plus beau des mots «
(Hérodote,3. 80) égalité de possession, tel est son sens pri-
mitif égal partage de la puissance, il exprimera l'idéal démo-
cratique. Atbèues est le foyer principal d'un grand mouve-
ment l'galilaire à la suite des guerres médiques, l'idée de
liberté (p. îïiïm-1, prend un sens plus riche 'indépendance
nationale, liberté politique, liberté morale et l'idée d'éga-
lité suit un développement parallèle. Réalisée
par la démo-
cratie, l'égalité envahit ta vie privée: il n'est pas jusqu'aux
adversaires de la démocratie qui ne définissent la justice par
une formeraffinée de l'égalité l'égalité géométrique nu
pro-
portionnelle. Le cosmos,qui désigne l'État avant de désigner
l'univers, repose finalement sur cette égalité plus subtile, qui
fait de chaque citoyen comme la parcelle d'une couvred'art
ou l'élément d'un organisme; la théorie contractuelle de
l'Ktat repose au contraire sur l'égalitéarithmétique mais, en
fait, ces représentations sont souvent mêlées. Elles s'oppo-
OIHGIXn
IIEUUIKL'SB
DESIDÉKSMORALES
ET ll'MDigUIK 288
seulv pareillement
"o~n.v en ce qui concerne la monde des ..11-
dieux. La
jalousie des dieux ne serait, suivant M. H., qu'uu
(70«vo,-)
reflet de l'envie démocratique, qui s'est forgé dans l'ostra-
cisme une institution elle tend il être remplacée pur la nimê-
m divine. qui ne châtie plu» le bonheur des hommes, mais
leurs méfaits, et qui correspondrait, par suite, nu
triomphe
de l'égalité proportionnellesur l'égalité grossière. Ëufiii
l'éga-
lité devient « une pauaeée » ip, 312} son concept s'étend à la
nature cite est l'équilibre du coamn*. – Analyse adroite,
mais souvent forcée.
Reste une autre « source du droit », la toi. M. H., passe
successivementen revue la notionde Ow; celle de vtfjio;,et
l'idée de loi naturelle, qui u est qu'une extension particulière
de la précédente. – Le premier de ces termes désigne tout
ordre durable ip. 820-888J en première ligne, le mariage.
Il soutient un rapport étroit avecDémêler Thesmophoros,
qui
au
préside mariage comme aux travaux réglés de l'agriculture
et à la foudaliou des villas et des États. Le 'aiji-5; n'est donc
pas la loi en tant qu'impératif c'est l'institution, et aussi
l'instruction qui la fait connaître. L'Attique est le lieu privi-
légié des i 0««!*olc'est à l'image des vieilles lois religieuses du
culte d'Eleusis, que les lois civiles, fixées par tes Ihesino-
thèles, porlent.ee nom vénérable. Ce sont d'abord des règles
à l'usage des juges Dracon et Solon en font des lois à l'usage
de la cite. Il ne faut pas confondre ce principe avec la cou-
tume, liien qu'il 'y ressemble par la durée c'est seulement
quand il s'est incorporé aux habitudes d'un peuple, que le
Ofïn' devient •*«»;.– Tel est, en eftel. le sens primitif de ce
uouveau terme (p. 859-380) il ne désigne d'abord que la
manière de vie propre à uu groupe d'êtres, et c'est le senti-
ment traditiontialiste, le culte, d'abord domestique, puis na-
tioual, des Rsfcyw, qui, de coutume, le change en loi (p. fi76j.
L'Idée de contrainte s'accentue alors de plus en plus le
v<î*«devient tyran. Sa sphère s'élargit il y a des •/ipmies
scienceset des arts, et les sophistes, qui s'en disent les adver-
saires, no laissent pas dy vouloir soumettre l'activité hu-
maine, notamment le langage. Enfin sa puissance est (elle
qu'on le prend pour mesure de la justice (•<«;«: est syno-
nyme de ÔMt«o, si la loi positive contredit la justice, ou
invoque la loi non-écrile (*•?*?'*v«î;iq;l– Enthousiasmés par
l'idée de loi, les Grecs la transportèrent à la nature extérieure
(pp. 386-411 1. Heraclite,le premier, applique eu ce sens le mot
t.'AXSK8 SUClOLOmOUK.19WMUI»

'«,«;; les conceptions philosophiques et


tliéologiques de
l'avis et de la Moiia tondent à arracher le monde nu hasard
et au caprice le stoïcisme
popularise la représentatiou d'un
•wroosrégi par des lois. On en vient à chercher dans ces lois
le modèle et l'origine des lois humaines
mais, en réalité, la
notion même de loi naturelle ne s'explique
que par le pro-
grès du développement juridique.
Le livre de M. H. est. on le voit, d'un contenu fort riche
une pensée très habile y met eu œuvre une abondante érudi-
tion. Et pourtant, l'artificedes théories, l'arbitraire des déduc-
tions de sens appellent sans cesse des réserves la
méthode
philologique nous révèle ici ses ressources, mais aussi ses
limites. Comme l'a remarqué M. lluvolin
(toc.rit.), l'auteur
s'y confine étroitement il ne lait aucuu appel au droit com-
paré, qui, pour ue citer qu'un exemple, lui eut sans doute
fait apercevoir eutre la 0i;«; et la ôwt, des dittérences autre-
ment profondes. On pourrait
entreprendre dans uu esprit
franchement sociologique des travaux du même
genre lana-
ne
lyse philologique serait alors conçue que commeun moyen
(entre autres^d'atteindre, derrière les mots, les
croyances col-
lectives. M D

PONS(A..A.). – Studio della morale nel suo


8volgim«nto reli-
gioso e soioatiûco. Toriuo, (' Il, Paravia t G., 1908 in-16
213p.
KURMANN (I'h.; Dejurte saori interpretibus attiois. Religion*-
uettthtekUiolie
Versuche
uurfVorqrhciten,
IV.3.(iiestteu.Tonelmann
1008,0+p.. iu-S».

III. SYSTKMKS ET MORAUX


JUKIIUQUKS
I
Jusqu'à présent, nous réunissions pêle-mêle dans ce cha-
pitre tous les systèmes juridiques que les livres parus dans
l'nnnéo nous perinettnieut d'étudier dans leur ensemble, Le
moment «si venu d'introduire dans cette masse confuse de
faits un peu d'ordre et de distinction.
Un système juridique se définit par l'organisfition sociale
qu'il exprime c>sl elle qui marque le mieux U: seus dans
lequel il ust oriunlé. Or. sous ce rapport, les distinctions sui-
vautes soûl, dès à présent, possible».
SÏSTBUIMit;itlUlyUKi KTMÛBÀL'X «87

Il y a d'abord l'organisation des sociétés que l'on appelle


communément intérieures. Mais nous avons moutré, à propos
..les systèmes religieux, que cette rubrique était beaucoup
trop indéterminée ivoir plus haut, p. 73). Ou peut, ou effet,
y discerner trois types différents.
Le système juridique le plus grossier est celui qui corres-
pond aux sociétés du type australien elles sont formées de
dans totémiques, parfaitement égaux entre eux, juxtaposés
les uns aux autres sans aucune hiérarchie c'est un agrégat
(le groupements homogènes entre lesquels il n'y a aucune
iliUérenciation fonctionnelle.
Au-dessus, viennent les sociétés comme celles des Indiens
de l'Amérique du Nord. Le clan totémique y subsiste, mais il
tend à s'effacer; sur cette base première, s'est développé un
système plus ou moins complexe de classes, d'ordres mili-
taires, de confréries religieuses, do collèges de prêtres, d'or-
ganes sociaux divers. Nous les appelous sociétés différenciées
à basede clans totémiques.
Enfin, toute trace d'organisation totémique disparaît la
tribu, tout en pouvant comprendre des clans, surtout des
clans à filiation masculine, prend davantage conscience de
•mhet de son unité. Il arrive assez souvent qu'elle a mêmeun
gouvernement central permanent. C'est ce que nous appelons
les sociétés tribales.
Au delà des sociétés tribales, il y a les nations. Nous ne
nous dissimulons pas ce que cette expression a de (loi tantet
île vague. Elle s'applique à des sociétés très différentes et qu'il
y aura ultérieurement lieu de distinguer, comme tes grandes
monarchies de l'Asie et les cités de la Grèce et de l'Italie, par
exemple. Nous prious donc le lecteur de considérer cette ter-
minologie comme purement provisoire. Les classifications
auxquelles nous procédons dans i'Anm'e ne uous sont pas
dictées par des considérations a priori; elles se font d'elles-
mêmes au contact des choses qui se révèlent à nous Elles ue
peuvent donc se faire que progressivement, et il est naturel
(fiie,surplus d'un point, les premiers groupements auxquels
ou aboutit soient encore très grossiers et ne puissent si; préci-
ser que peu à peu. En pareille matière, il faut redouter par
dessus tout une perfection prématurée qui ne peut cire obte-
nue qu'artificiellement.
Ou remarquera saus peine que cette classification répond
assez bien à celle que nous avons proposée plus haut des
288 (.'a.nxék sociuLociyUK. l'JUO-iaou

systèmes religieux et il n'y a rien là qui doive surprendre


si, comme uous le croyons, la religion, comme le droit, est
chose sociale, solidaire de l'organisation générale de la
société. Toutefois, il nefaut pas s'attendre à ce que cette cor-
respondance aille jusqu'à un parfait parallélisme. Il y a, eu
effet, outre systèmes juridiques et systèmes religieux une
importante dillérence qui empêche qu'ils puissent toujours et
dans tous lescas être classés exactement de la même manière.
Les premiers soutélroitemeut nationaux ils tiennent intime-
ment il la structure de la société; ils sont un élément essen-
tiel de l'individualité sociale et n'eu peuvent être détachés.
Notre code peut ressembler à celui des autres tëtats d'Europe,
mais chaque État européen u le sien. Les religions, au con-
traire, sont beaucoup plus susceptibles de passer les fron-
tières; tous les peuples d'Kurope ont une même religion. On
peut môme dire, en un sens qu'il n'y a peut-être pis de
religion qui ne soit iuteruatiuuale à quelque degré. Par suite,
il peut se faire qu'une société pratique une religion qui lie
soit pas exactement en rapport avec lu structure de cette
société, ni, par conséquent, avec son système juridique.
Ainsi l'islamisme figure parmi les religions nationales
(voir plus haut, p. IfJOy,mais le système juridique des Arabes
parmi les systèmes tribaux. C'est qu'il y a une religion cotu-
mune à tous les Arabes, mais pas de nation oriibe politique-
mentconstituée.

A. – Desxjisli'mex
juri/lii/iifs m ijiiih!mL
ParM.F.\ri:osMîT.

J. MAZZARKLLA– Les types sociaux et le droit. Paris,


Doiu (Encyclopédiescientifique publiée sous la direction du
DfToulouse, 1908,X11-487p., in 8°.
L'AnnéeSociologiquea signalé lappariliou du livre de Maz-
zarella sur le mariagenmbilien (t. VU, p. 48H,et VIII, p. 49!);cf.
t. III, p. 383j. Il résume ce livre dans son rsouvel ouvrage. Le
mariage amhil analt, pratique chez les Malais, est caractérisé
essentiellement par lu position subordonnée, presque servile,
que le mari occupe dans la famille de sa femme. MM.
appelle institution ambiliennc toute forme matrimoniale qui
présente ce caractère fondamental. Il se propose d'abord de
déterminer les liens qui existent entre cette institution et la
fïSTKMgSJUB1DIQCES
ET MOHAUX 289
structure gentilicematriaraile (le type gentilice
s'oppose au
type féodal le premier est défini par l'absence, le second par
la présence de la stratification hiérarchique des
classes;. A
cet effet, il étudie l'amhillanisme chez un certain nombre de
peuples de Sumatra, Bornéo, des Moluques, de Polynésie, de
Ceylan, d'Indo-Cuine, etc. Tous les peuples ambilieus, dit-il,
gardent dans leur structure sociale une série plus ou moins
riche de survivances geutilices, tandis
qu'on ne constate
aucun cas d'ambiliauisnie pur chez les peuples dont la struc-
ture sociale présente des traces faibles de
gentilisme la
constance de ce rapport démontre l'existence d'un lien de
causalité eutre le type gentilice et les phénomènes ambiliens.
Mais il n'y a pas constante corrélaliou entre les variations du
gentilisme et celles de l'ambilianistne. Une autre cause inter-
vient donc, qui appartient au groupe des causes
qui ont
exercé leur action daus la phase gentilice de l'évolution
sociale; c'est le matriarcat, défini par la parenté exclusive-
ment utériue. Kn second lieu, M. cherche à établir
qu'un certain nombre d'institutions, notamment le mariage
qu'il appelle semundien (la vie matrimoniale consiste en
visites que le mari fait à sa femme daus la maison de la
famille de celle-ci, les fils issus du mariage
appartiennent à
la famille de leur mère) sont des survivances d'ambilianisme.
Il détermine alors l'aire de diffusion des institutions ambi-
Ilenues et leur distribution entre les différentes familles
ethniques. L'application d'une méthode statistique permet
d'afflnner que toutes les familles ethnlqties figurent dans la
série des peuples ambiliens, mais d'autant moins
qu'elles
sont plus avancées en civilisation. D'où il suit que l'ambilin-
nisme est un phénomène uuiversel, c'est-à-dire se lie à une
phase générale de développement de l'humanité, et d'autre
part que son origine est reculée, puisque son étendue décroît
à mesure que la civilisation se développe. Pour détermi.
ner les causes génératrices des institutions
ambilieunes, M.
étudie celles-ci dans leurs relations
respectives avec les
dix groupes d'institutions dont se
compose, suivant lui, tout
système juridique (formes d'agrégation sociale, mariage,
parenté, juridiction domestique, propriété, obligations, suc-
cessions, institutions politiques, institutions pénales, procé-
dure). Cette étude porte sur une série, dite tfrie de réjà-eiu-c
et méthodiquement constituée, de sociétés malaises de .Suma-
tra. Elle aboutit à cette conclusion que les causesD"I
"1 génératrices
K. DcBKUEltt.– Année sociol 190<i-|9Q9. (y
290 i/ansèk soeioicraïQi'R.tWWMUO»

de l'umuilianisme sont 1° l'insuffisance des forces néces-


saires à l'utilisation el à la conservation des ressources éco-
uomiques des groupes sociaux autonomes. iiisiillisancedépen-
dant île la faiblesse uumérique de l'élément mâle; 2°l'existence
de ressources économiques réellement ou potentiellement
illimitées; 3" la nécessité d'une quantité considérablede tra-
vail pour l'utilisation et In défense des ressources susdites;
•4°l'organisation geuliUce 5° l'autonomie des communautés
de fiunille: li° le matriarcat c'est la première de ces causes
qui est prépondérante. – Enfin ces conclusions peuvent être
généralisées. D'une étude des sociétés ambilieiiues ne faisant
pas partie de la série de référence et appartenanl Atoutes les
familles etliuiques, il résulte que l'organisation gentilice-
inotriarcalf. dont les instituttous n mbiliennessont un produit
est elle-mêmeun phénomène universel. Une théorie du Mttrnl
nmliilienet de l'exogamie (cf. Année,III, p.,SK;-t,et V, pp. 390
et 39I) est annexée a cetle étude générale de l'iimbiliiiiiisme.
Des observations critiques ont été faites à propos de cette
théorie du mariage nmbilien dans un précédent compte rendu
(Année,III, p. 383 1.
Toute» les autres publications de M. ont été déjà analysées
dans l'Année <). HO; VI,p. 309; VII, p. 468; X,p.9,
448). Le livre dont nous rendons compte eu ollre un résumé.
Il comprend truis parties. La première exposa la méthode la
seconde et la troisième présentent deux exemples de son
application, l'une à la théorie du mariage umhilien, l'autre à
la théorie du prêt dans l'Inde antique icf. sur ce dernier
point, Année,VII, p. 408 etX, p. 448>.
Nous avons déjà noté par ou la méthode de M. res-
semble a celle que uous essayons de faire prévaloir et par où
elle en diffère. Le procédé essentiel par l'invention duquel
M. croit mumrcln- la science de l'ethnologie juridique, est
ce qu'il appelle l'analyse struligraphique. Une institution est
un ensemble de pratiques juridiques simples qui peuvent
ne pas appartenir toutes au même type d'organisation juri-
dique. L'analyse stratigraphique consiste à déterminer les
types fondamentaux auxquels se rapportent les normes qui
la composent, et le type prédominant, « type auquel,du us le
système considéré, lu plus grand nombre des plus i nipor-
tantes normes se rapporte ». Constituer des types d'institu-
tions, des types d'organisation et de structure, et établir leurs
relations généalogiques, lelln uous paruil bien être en uflct la
SÏSTÊMKSJI.'HJlJlgl'K» HT MlillAUX 291

tâche essentielle du sociologue. Mais M. prend pour accordé


qu'il y Il deux grands types de systèmes juridiques, qu'il
appelle respectivement genliliee et féodal: c'est ce qu'il fau-
droit d'abord établir. Un expose et une critique sommaire des
idées de l'ostne sauraient suffire pour cela et il nous parait
que, sous ces deux mots, se caclieuldes notions obscures dans
lesquelles sont confondus des types sociaux très différents.
– D'autre part les eftorls que fait M. pour créer uue termi-
nologie et des procédés rigoureux d'analyse, de classification
-etd'explication des faits, sout, croyons-uous, moins féconds
qu'il ne le dit. La rigueur en est plus apparente que réelle et
nous lie voyonspus qu'ils aient venourelételscience. – tëiiHn,
la conception d'une ethnologie juridique conçue comme
science indépendante de toute autre science sociologiqueet no-
tamment do la sociologie religieuse nous parait définitivement
condamnée. – D'une façon générale, M. reste un disciple
trop fidèle de Post et ne cherche qu'à perfectionner la mé-
thode du grand anluropologisle; il nous sembleau contraire
que cette méthode pèche par son principe même, parce que
Post ne s'est pas systématiquement allranclii des prénotious
et n'a jamais cherché à reconstruire inducli veinentl'idée qu'il
se faisait des institutions.
Sous ces réserves, ou ne peut qu'approuver les efforts que
fait M. pour introduire dans nos recherches toute la préci-
sion qu'elles comportent.

M. – fiyxlhnv.s juridique*de* xacWlhindifférenciées


à bas? de clans lolàiiiqtiex.

l'ar M. DciiKiiKut.

AV.WUXDT.– Die AnfaengederGesellschaft. Eine voel-


kerpsychologische Studie ( l'xijchologinrhi'Slwliai, 1907,
p. 1-4'.}».
On peut trouver qu'une étude de quarante-neuf pages sur
les origines de la société est peu en rapport avec l'importance
et les difficultés du problème; mais comme elle émane de
M. W'uudt, nous no pouvons lu passer sous silence.
La conception que M. W. se fait de la société primitive n'a,
d'ailleurs, rien d'original il y longtemps qu'élit a été expo-
sée. M. \V. suppose, à l'origine, une société une, indivise,
3V2 LANNKBSOCIOUMMQl'K.
H'ÛG-tUiB

homogène,qu'il appelle la horde, et qui se serait ensuite seg-


mentée eu deux sectious que représentent les phratries aus-
traliennes. Puis chaque phratrie, à sou tour, se serait subdi-
visée en quatre, puis en huit classes matrimoniales. Ces der-
niers groupements sont ainsi présentés comme dus à un
processus tout à fait analogue à celui qui a donné naissance
aux phratries; ce qui, croyons nous, est tout à fait inexact.
Puisque les classes alternent avec les générations, elles ont
doue un tout autre caractère que les subdivisions primitives
de la horde, et résultent de tout autres causes. Ce sont les
clans qui sont ia suite du mouvement de segmentation d'où
sont résultées les phratries. Dans l'exposé de M.\V.les groupes
totémiquesapparaissent à un moment donné, sans qu'où suche
bien comment ni pourquoi (p. lo-10;.
Clanset phratries sout exogames M. W. proposede l'exo-
gamie l'explicatiou suivante. Dans les sociétés intérieures,
les brigues amoureuses sout nécessairement violentes. Les
rivaux se disputeut, les armes à la main, la femme convoi-
tée. Chaque adversaire est appuyé par ses parents et amis;
ces conflits ont donc lieu, non pas entre individus, mais
entre groupes, par conséquent entre phratries et entre
daus Jà ot'i la société est divisée eu clans et en phratries.
Quecette lutte se consolide en usage, et J'exogamieest insti-
tuée. – H u'est pas utile de discuter cette explication qui
tient si peu compte du caractère religieux de l'institution exo-
gumique, qui, d'ailleurs, attribue au rite du rapt de la
femmeuue universalité qu'il u loin d'avoir à l'origine. M.W.
parait ignorer que la question de l'exogamie a, dans ces der-
nières années, fait quelques progrès.
Quant au système de filiation, l'autour estime que le prin-
cipe utérin u du être le plus général à l'origine; mais il ne
croit pas qu'il ait été le sent, ni surtout qu'il soit resté long-
temps le seul. Descroyances magicoreligieuses auraient très
vite conduit les hommes à admettre le principe opposé. l'arec
que t'entant tient sou sang de sa mère, on fut d'abord porté à
croire qu'il recevait d'elle son Ame. Mais, d'uu autre côté,
l'âme réside aussi dans le souille; par suite, on considéra
comme possible que le père insufflât sou ame à sou enfant
dans le baiser. Ce qui amenait à reconnaître le principe de
la filiation en ligue paternelle. – L'idée est ingénieuse; mais
nous ignorons totalement les faits sur lesquels s'appuie
M. W. pour supposer que les croyances relatives au soullle
SÏSTÈURSJUIIIDIQUK*
RT MORAUX 293
ont affecté le système de filiation dans les sociétés inférieures,
E. U.
W. K. ROTH. – Notes on Gtoveroment, Morals and
Crime. Bulletin n° 8. North Queeusland Etlinography
(1905).Brisbane, Governrocnt Prlnter, 1900, 12 p. in-t».
Les notes que M. Roth publie ici sur le système
juridique
des Australiens du Queensland portent sur les sujets les plus
variés et sur les tribus les plus éloignées les unes des autres.
Les unes ont trait à l'organisation familiale situation des
enfants rarement battus et dont les punitions infligées par le
père sont contrôlées par les frères de la mère ^p. Oi devoirs
du mari, et droits du père; interdiction du rapt: sanction de
l'adultère, privée dans son principe, mais qui ne peut être
exécutée qu'en public et avec la participation des parents de
la femme; morale sexuelle, où l'on remarquera un curieux
usage, dérivé de la parenté par groupes, qui met les frères
cadets de la femme à la disposition du mari pendant l'absence
de celle-ci (p. 7, n" 4i; propriété foncière, par famille, d'un
terrain de chasse et de cueillettes (le document est obscur et
semble signifier qu'il y a une propriété par claus, ou par
grande famille indivise, qui se transmet de groupes de frères
en groupes de frères. ,,0^ p. 9). – D'autres notes traitent du
droit criminel (n° 13, n°ll, n" I et 2). On y remarquera de
nombreux cas d'exécutions en effigie, exécutions magiques
l'importance de la justice publique, la façon dont la tribu
intervient pour régler l'administration de lu justice privée
ou les épreuves expiatoires. Des enquêtes sont faites, des
sanctions importantes, en particulier des peines du talion,
sont publiquement infligées quiconque a dépassé lit limite
connue de ses droits. Les documents les moins nombreux
concernent l'organisation du conseil de la tribu et des
anciens (p. Si. M. NI.

UNG (A.)«ENNBP (A.van).Questions australiennes, U«n,1906,


nu05 1907,i)°>16 et ÏS 1008,n« 18.
MATIIEWS [H.n.). Note on the social Organisation of the
Turrubul and adjacent Tribes. Mun,l'J07,n° 07.
MATHKWS (11.H.). Social Organisation of the Ngeumba
Tribe. Man,1908,n° 10.
MATHRWS
(II. H}.Bemerkungenliber die EingeboreaenAustra-
29'» l'ANXKK SOCIOMMUOl'S. IWG-l'JOiJ

liens. Milkilungender Anthropologische


Gewllschaftin M'icn*
XXXVI, fuse.V.
SCHM1UT (P. W). Die Soalologisohe und religiœs-ethisohe
Gruppierung der australischen Stœmmo. ZnUthr. f. Kilmol.,
1U09,p. 328-377.
î.
(iHAKli.NRIt
(F. Wanderung und Entwioklung sozialer Sys-
tème in Australien. litohtts,unie, XC,pp. ISO.îoi, iH), i>37.
lîKASSOi;.j. Le tribu australiane ed i Papua-melanesiaai.
;i'll!i culleiiioiic 1 popoliik'l moudo.ir»ie costuini;.Milauu,Val-
larJi, 19u8.

C. – Syxtènmjuridiquesdiffànieir-i à kmil? citais totémiqurs


l'ai-M.Mavss.

J.-R. SWANTOX. Contributions to the Ethnology of


the Balda. Leiden, Brill, 1000; 29!) p., gr. ia-i".
J.-n. SWANTON-– Social condition, Beliefs. of the
Tlingit Indians. Hep.ofthe Itur. «f Etlmol, 1905 ipubité
en 1908)p. S914ÎI2.
En trailuul plus haut de l'organisation religieuse de ces
peuples, nous avons dû déjà parler de leur organisation
sociale qui se confond, en partie, avec lit première; nous ne
revieudrons pas sur les faits qui ont été précédemment
exposés. Kappelons seulement que chacune de ces sociétés
est divisée eu deux pliratries (Aigle et Corbeau, Corbeau et
Loup i, strictementexogames. Pour les raisons qui) nous avous
développées, nous croyons que, primitivement, chacune de
ces phratries était divisée en clans, exogames également.
Quelques-uns de cesclans survivent, d'ailleurs, encore aujour-
d'hui. Ainsi, chez les Tliukit. les lilksàdi constituent un
groupequi. il est vnii, porte actuellement un nomlocal, mais
qui a tous les caractères d'un clan régulier tons les Ktksàdi
sont de la phratrie du Corbeau; ils ont pour loleni la gre-
nouille et leurs prénoms sont, en grande partie, des noms
de grenouille.
Mais aujourd'hui, dans la gém';ralitédes cas, ce qui corres-
pond au clan toléinique, c'est ce que M. Swanton appelle
assez improprement la famille. C'est un vaste groupement de
parents qui a toutes les dimensions du clan car il comproud
d
SÏSTKJIKS KTMORAUX
JL'IUMQUKS 295
plusieurs familles, plus restreintes, occupant des maisons
distinctes. On nous dit ij ne, qmuul 11se réunit, les assem-
bit-es auxquelles Il donne lieu sont parfois considérables. Il
est même probable que ce n'est autre chose qu*un ancien clan
local, car, primitivement, il semble bien qu'il y avait une
famille étendue de ce genre Ulaida, p. 00} par localité. Mais
aujourd'hui, beaucoup de ces groupements ont essaimé et
comptent des filialesdans des villes différentes. Mais si, par
ces caractères, ils rappellent les clans lolémiques, ils eu ili liè-
rent parce que, au lieu d'être homogènes et indifférenciés, ils
ont une forte organisation. Chacun d'eux a il sa le le une
famille principale Ilui exerce sur toutes les autres familles
particulières uue hégémonie; et cette famille principale a
elle-même à sa tête uu chef dont les pouvoirs sont étendus.
Mêmeles destinées de chaque clan tendent de plus eu plus à
s'identifier avec celles de la famille dominante et de son chef
(liaiita, p. 09).
Nousavons eu déjà l'occasionde dire que le clan se recrute
d'après le principe de la descendance utérine. Un homme
voit ses descendants non dans ses propres enfants, mais dans
ceux de ses sueurs. Le mari, il est vrai, emmène sa femme
chez lui. Mais ce qui permet au groupement utérin de subsis-
ter, c'est que les fils, une fois adultes, quittent la maison de
leur père et viennent s'établir auprès de leur oncle utérin
auxquels ils succèdent (Hattlti, p. îiO et (SB;.L'usage, dont
nous avons précédemment parlé, eu vertu duquel les pré-
noiussauleul une génération, achève d'assurer la continuité de
la famille utérine. Aussi, comme il arrive généralement sous
ce régime familial, les relations entre les époux sout très
biches. Cette situation est encore aggravée par ce fait qu'ils
appartiennent obligatoirement à deux phratries distinctes, et
qu'il existe entre phratries une rivalité qui va jusqu'à l'anta-
souisme. C'est ainsi qu'un époux n'hésité pas à trahir les
intérêts, môme vitaux, de soit conjoint, s'ils sont opposés à
ceux de sou clan natal illniihi, p. l\û et n.i.i.
Kndehors des phratries, des clans et des maisons, il existe
enfin des groupements locaux. Comme nous t'avons dit, il est
probable que, primitivement, chaquelocalité était occupéepar
uu clan. Aujourd'hui, au contraire, le cas ue se rencontre
que rarement. Le plus souvent, les deux phratries sont
représentées dans chaque ville ou village, C'est même la règle
chez les Tliukit. Aussi peul-on se marier sans sortir du vit-
»
290 i.Yvnkk sociot.ooiQi!B.iuocieou

luge, ce qui contribue il faciliter les nrrangemeuls nomes-


tiques dout nous venons de parler. Lu localité a, d'ailleurs,
sou organisation propre. Elle a son chef qui est le chef du
clan, là où il n'y eu a qu'un par cudroit, et l'un des chefs là
où plusieurs cluus coexistent.
Mais il y ta une institution qui domine toutes les autres
c'est celle du polluteh dont le rôle est si considérable dans
toutes les sociétés du nord-ouest.
Ontraduit généralement potlatch pur « distribution de pro-
priété », et ce moltraduit bien en effet le trait caractéristique
de cet usage qui consiste essentiellement en échanges et en
répartitions. Mais ce serait le dénaturer que d'en faire uu
phénomène exclusivement économique il domine la vie
religieuse, juridique, artistique du nord-ouest. Naissance,
mariage, initiation, mort, tatouage, érection du tombeau, etc.,
tout est prétexte à potlatcli. Le chef donne uu potlatch quand
il construit une maison, érige un emblème, rassemble une
confrérie, etc. La fête, c'est le potlatch (Tlingit, p. 433; Hairta,
p. loSi. C'est daus le potlalch que maisons et clans émettent
leurs chants sacrés, montrent chapeaux et masques, excitent
leurs sharnancs héréditaires à se faire posséder par les esprits
du clan, le tout sous la surveillance des autres maisons et des
autres clans. Mais il reste que toutes ces tètes ne sont là, pour
ainsi dire, que pour accompagner une répartition de biens et
une sorte d'échange d'uugeure très particulier. Voicicomment
les chosesse passent. Parexemple, le fils d'unchefest-il initié
dans une société secrète? Acette occasion, le père donne une
fête. un potlalch, à la maisou de son fils (la descendance étant
utérine, le père et le filssont de deux phratries et de deux mai-
sous différentes!. Dans cette fêle, il dépense toute la fortune de
son cliin. Seulement, pour avoir accepté ce potlatch, le clan du
fils devient ipxof/àclodébiteur du clan du père il doit, à son
tour, offrir ce dernier uu potlatch, mais plus considérable
que celui qui a été reçu. La dette ainsi contractée doit être
acquittée à un taux usuraire sans quoi, le chet du clan
débiteur perd son nom, ses armes, ses totems, son honneur,
ses droits civils, politiques et religieux. Un père de famille
dote sa fille, c'est-à-dire que, à l'occasion du mariage. il fait
un potlatcli en faveur des gens de l'autre phratrie, à laquelle
appartient son gendre. Maisalors le clan où sa fille s'est ma-
riée lui doit le double. D'une manière géuérale, le clan qui
reçoit doit « tuer » plus de propriété qu'il n'en a reçu. Il y a
SÏSTKUK*lUIUDlQUKSKT UOHAUS 207

uue sorte de rivalité entre tes contractants qui sont obligés


de se dépasser l'un l'autre. Ainsi, échauge entre collectivités,
obligatoirement usuraire, lié il lu gloire (les totems et. des
blasons, accompagnant tous les contrats, tous les actes de la
vie religieuse et économique, occasion pour les maisons nobles
d'étaler leurs trésors, de produire leurs masques, leurs cha-
peaux-talismans, leurs couvertures, leurs provisions, de
dépenser leurs biens, voilà tout ce qu'on trouve dans un pot-
latcb. Un pareil syncrétisme de faits sociaux est, à notre avis,
unique dans l'histoire des sociétés humaines.
Deux faits que nous devons à M. S. nous aident à le com-
prendre. On sait qu'on Australie il y a échange rituel de
bons ofïices, de prestations religieuses et matérielles entre les
deux phratries d'une môme tribu sur le terrain d'initiation.
Or, il est remarquable que, chez les Tlinkit, tes pollalcli se
font toujours de phratrie à phratrie. Tous les actes de la vie
religieuse, économique, juridique sont une occasion de
« montrer du respect » aux clans alliés do la phratrie oppo-
sée, il en est de même chez les llaidadans les pollalcli qui
ont lieu à l'occasion des mariages et des enterrements. On eu
vient ainsi il se demander s'il n'y aurait pas un lieu entre
cette institution et la rivalité traditionnelle des phratries.
D'autre part, M- S. nous appreud que, chez les Tlinkit. à
chaque cadeau fait à un membre de l'autre phratrie, on men-
tionne les noms des morts. Les cadeaux faits par les vivants
et reçus par des vivants s'adressent, en réalité, aux morts qui
sont censés les recevoir dans leur séjour. Ils sont I équivalent
de ce que, dans d'autres rites funéraires, on détruit par le
feu. Le potlatch serait donc une fête des morts eu même temps
que des vivants (Tlittgit, p. 43ty. Nous tendrions à croire que
les morts qui sont ainsi appelés à en bénéficier sont ceux-là
mêmes que les vivants réincarnent. Le caractère shamanis-
tique des danses et du culte, l'identité complète de chaque
individu avec le génie ancestral qu'il réincarne, sont autant
de faits favorables à cette interprétation. 11est vrai que, sui-
vant l'auteur, le côté social du potlatch haida serait plus im-
portant que le côté religieux. Mais M. S. nous rapporte lui-
même des mythes où l'on voit les esprits des ancêtres réclamer
le pollatch à un chef. AI.M.

Reports of the Cambridge anthropological Expedition


toTorres Straits. VI. Sociotogy,Magicand Heliyionof the
2'JS L'ANNBliweiOUttUQVK. IMMMWM!

Eaxtevn ltlanden. Cambridge University Press, HJ08, xiv-


810 p., XXX pi.

Ou a vu plus tmul.ip. 80) eu quoi consistait le système re-


ligieux des sociétés établies dans les Iles orientales du détroit
de Tarées nous iillonsinaintemint exposer leur système juri-
dique. A('exception du chapitre sur la propriété et l'héritage,
qui est de Wilkiu, toute cette partie du rapport est de
W. If. R. Rlvers.
Diius l'analyse «fuiva suivre, nous ne noua astreindrons pas
il observer t'ordre suivant lequel les matières sont disposées
dans le livre. Car cet ordre n'a rien de logique; il est même
impossible d'apercevoir de quels principes il procède. Ainsi,
c'est seulement à la page 10!)qu'il est traité de l'organisa-
tion sociale. Cependant, c'estd'elle que dépend l'organisation
matrimoniale, domestique, religieuse. Aussi est-ce par elle
que nous commençonsnotre exposé.
L'unité sociale élémentaire est le village. Mais le groupe-
ment que l'on appelle ainsi n'est pas purement territorial il
a un caractère domestique. La preuve on est que le mariage
est interdit entre habitants d'un mémo village c'est donc
qu'il y a entre eux des liens de parenté. D'ailleurs, pour être
cousidéré comme membre d'un village déterminé, il n'est pas
nécessaire d'y résider effectivement. C'est la naissance qui
décide de la question quel que soit l'endroit ou un individu
nubile, il est du village dont est ou dont était son père. C'est
dire que le villagen'est pas nue simple communauté d'habi-
tat.
Un certain nombre de villages voisins forment, par leur
réunion, une unité sociale d'un ordre supérieur que Hivers
appelle le district. L'expression est assez impropre en ce
qu'elle semble désigner une circonscription purement géo-
graphique et artificielle. Or il parait, au contraire, probable,
que le district est. tout au moins par ses origines, un groupe-
ment naturel. Bien que le mariage entre membres d'un
mêmedistrict ne soit pas interdit, cependant il n'est pas fré-
quent. 11semble,bien qu'ont'évite !p. M'A De plus, certaines
cérémonies funéraires et religieuses sont spéciales à des dis-
tricts déterminés qui peuvent seuls les célébrer. Chacun d'eux
constitue donc, sous certains rapports, une société religieuse
qui semble avoir eu son unité et son autonomie.
Enfin, par dessus les districts, il y a une autre division en
svstèjiks JDMûHH'iw kt moraux W

vertu de laquelle la population de chaque Ile est répartie


entre deux groupes, Ainsi, à Mer, tous les habitants suai ou
des Hagnrrbleou des lieizam boni. Les fonctions des uns et des
autres sout essentiellement religieuses chaque groupe a un
rôle il jouer dans les cérémonies du culte. Eu principe, un
district appartient tout entier à l'une ou a l'autre section i
seuls deux villages fout exception à la règle. On peut doue
croire qu'il fut un temps où ces groupements fondamentaux
étuieut formés par la réunion d'un certain nombre de dis-
tricts, de même que ceux-ci sout formés par une réunion de
villages.
En dehors des trois sortes de divisions et de subdivisions
qui viennent d'être passées en revue, M. Hivers signale
d'autres sociétés qui sont de véritables confréries religieuses.
Elles sont chargées d'exécuter des danses déterminées à l'oc-
casion des cérémonies du culte. Aussi n'y at-il pas lieu d'eu
parler ici.
Si donc on fait abstraction de ces sociétés religieuses, il
n'est pas dillicile d'apercevoir à travers l'organisation que
nous venons de décrire les cadres classiques des sociétés
d'Australie.' maisefïacés et transformés. l.es deux sections
entre lesquelles est répartie ta population de chaque Ile rap-
pellent les deux phratries australiennes. Tout comme en
Australie, il y a entre elles une sorte de rivalité constitution-
nelle (p. I7îii. Lesdistricts sout vraisemblablement d'anciens
clans qui, avec le temps, se suul segmentés en sous-clans,
devenus les villages. Ce processus de segmentation se pour-
suit, d'ailleurs, encore aujourd'hui: certains vil lagesessaimwut
autour d'eux des colonies qui, tout eu restant rattachées il leur
métropole, tendent pourtant à s'eu émanciper et à devenir
autonomes (p. l(îfl-l"l Il est même assez dillicile de savoir si
le village dont se réclame un indigène est le village principal
ou nue de ses colonies.
Cequi tend à confirmer cette manière de concevoir et d'ex-
pliquer lu structure que présentent ces sociétés, c'est que l'ou
y retrouve des traces de totémisme Assurément, ainsi qu'on
l'a montré plus haut. elles sont beaucoup moins apparentes
que diiiis les Iles occidentales où le totémisme est encore an
élément du culte. Il faut donc se représenter tes lies de l'est
comme sensiblement plus avancées que celles de l'ouest elles
sont plus éloignées du type social que nous devons considé-
rer commele plus primitif qui soit connu de nous. On a pu
300 I.AX.VéK SOCtOLOOlyl'E. 1900-1909

f. 1f-.l-_1 _Mi < • »


voir que 1 analyse du système religieux conduit nu même
résultat.
L'organisation de la parenté présente le même caractère.
Les nomenclatures employées sont très nettement du système
que Morganù appelé cîassiilcaleur chaque terme désigne un
vaste groupe d'individus confondussous une même rubrique.
Mais. eu même temps, elles s'éloignent du type normal et
classique par certains traits particuliers, et ces divergences
instructives viennent précisément de ce que ces peuples ont
déjà derrière eux une fougue évolution
L'uede ces particularités, c'est que les sœurs de père elles
soeurs de mère sont désignées par uu seul et même vocable.
C'est là uu des caractères distinctifs du système de nomen-
clature et de parenté que Morganappelait hawaïen et qui ré-
pondait, selon lui, il un stade de promiscuité, c'est-à-dire aux
débuts mêmes de l'évolution familiale. Si, disait-il, le langage
ne distingue pas entre la sœur de mon père et la smur de ma
mère, c'est que les deux ne sont qu'une seule et même per-
sonne ce qui implique que mou père lui-même est le frère
de ma mère. Mais le fait même que les sociétés dont il s'agit
ici ont, depuis longtemps, dépassé la phase du pur totémisme
et sont, par conséquent, très éloignées des origines, ne per-
met pas de s'arrêter celte hypothèse. La véritable explica-
tion doit être cherchée ailleurs, et nous avons eu déjà l'occa-
sion de l'indiquer dans l'Année(voir t. V, p. 3(58) Dans toutes
ces Mes,comme d'ailleurs dans celles de l'ouest, la filiation
en ligne paternelle s'est substituée à la filiation utérine. L'ef-
fet de cette substitution a été de placer t'entant, par rapport
aux sœurs de son père, dans une situation juridique et morale
tout à fait identique à celle où il était, sousle régime anté-
rieur, par rapport aux swursde sa mère; elles sont devenues
dès lors ce que cesdernières avaient été jusque-là le*femmes
de la génération qui précède ln sienne dans le clan dont
il fait partie en vertu de sa naissance. Il n'y a donc rien de
surprenant à ce que cette identité de situation ait amené une
confusion dans les vocables employés et que les deux rap.
ports de parenté aient été désignés par le mémo terme. Un
fait, entre beaucoup d'autres, peut servir à confirmer cette
explication. Il y a plusieurs expressions qui désignent égale-
ment la sœur de mère et la sœur de père il y a les mots apu
et amaua qui ont tous deux cette double signification. C'est
d'abord.la preuve que l'indigence du vocahulaire n'est pour
SÏSTKUK-; JfllIDJVUES KT MOIUIX 30|

rien dans lit particularité dont nous cherchons à rendre


compte. Uo plus, Al. Hivers considère comme très probable
que a muun désignait primitivement lu sœur de père. «pu lu
mèreet la sueurde mère. Les deux termes ne seraient devenus
équivalents que plus tard ip. 93) c'est donc qu'il y a eu un
moment oitces deux relations étaient distinguées, suivi d'un
autre où elles ont été identifiées. – Nous avions, d'ailleurs,
constaté des faits du même genre à propos des Iles de l'ouest.
(voir AnnéeSnciol., t. VIII, p. 387;.
Ces nomenclatures se font remarquer par l'extrême impré-
cision des termes employés, Les différents cercles de parents
ont des contours floltauts et indéterminés. Cette indétermina-
tion tient à plusieurs causes. Il y a, d'abord, la substitution
de la filiation paternelle ù ta filiation utérine et les confusions
qui en sont résultées. D'un autre côté, tous les habitants d'un
même village et d'une même génération se considèrent
comme parents au même degré des relations de parenté,
quand elles sont aussi vagues, sont susceptibles de s'étendre
presque indéfiniment avec le temps. Enfin, l'adoption est très
largement pratiquée dans toutes ces lies, sans qu'on nous eu
disela raison. Le père adoptife8tassimiiéaupèrerécl;i'eufant
est parent du village de l'uu et du village de l'autre et, par là
encore, les limiles de la parenté reculent tellement qu'il est
souventdillicile de dire où elles se trouvent.
Onconnaît les tabous multiples qui, dans tant de sociétés,
s'opposent à toute espèce de relations entre un homme et ses
beaux-parents. Chezles peuples que nous étudions, ces inter-
dictions sont curieusement limitées auxnoms que portent les
alliés mais, sur ce point, elles sont très strictes. Nul ne doit
appeler les parents de sa femme par leur nom. Il y a plus si
ce nom est un nom de chose ou d'animal, il est interdit de le
prononcer même pour désigner cet animal ou cette chose il
faut employer d'autres mots que l'on empruute généralement
au dialecte de quelque lie voisine. Toute violation de ce tabou
est considérée comme une grave offense dirigée contre la
famille entière des beaux-parents un présent doit leur être
fait à titre d'expiation et de réparation. Taudis que, dans les
sociétésoù la parenté est utérine, cet interdit ne pèse que sur
le mari, ici, il s'applique également à la femme; seulement il
est sanctionné moins sévèrement quand c'est une femme qui
le viole. Il n'y a pas, dans ce cas, de présent expiatoire
..p. 90-lOO.u
302 l\xttiK SOCIOUIOIQt'K. 1906-lfltHI

Nous
\ftllS! avonseu
îlVfltltt AH Gfllltraiif IVtnnnoi/wt ,|n •«.»-.».
souvent l'occasion de montreri- i
ici que, dans
les sociétésinférieures, la substitution de la filiation en liguo
masculine à la filiatiou en ligue maternelle avait
pour effet'de
compliquer à l'extrême les arrangement» matrimoniaux. Kn
ellet. comme la parenté utérine se maintient à côté de la
pa-
rente paternelle une fois que celle-ci est reconuueet
comme,
par suite, elle continue à produire ses effets prohibitifs quant
au mariage, il en résulte que le cercle des interdictions ma-
trimoniales s'étend au poiut de rendre les
mariages difficiles.
Pour empêcher ces difficultés d'être
insurmontables, il a fallu
recourir parfois il de savantes combinaisons dout nous avons
eu souvent l'occasion de parler ici (voir
AnnéeSveioL, t. VIII,
p. 118 cf. infm p. Mil). Les Iles occidentales du détroit de
Torrès nous offrent une nouvelle occasion de vérifier ce fait
important. Parce que la filiation se fait par le père, l'enfant
ue peut se marier dans le village où son
père est lié mais
parce que la filiation s'est faite primitivement par lit mère, la
même interdiction s'applique au village de lit
mère, età celui
de la mère du père, aux villages des parents
adoplifs soit de
l'enfant, soit du père, quand il y a eu adoption de l'un ou de
l'autre. Le mariage se trouve dune prohibé avec un nombre
considérable d'individus ip. 120 et suiv.j, et Hivers a
pu éta-
blir, par les tableaux généalogiques qu'il Il dressés suivant sa
méthode ordinaire, que ces règles prohibitives sont
générale-
ment observées.C'est mômepar elles qu'il
explique certaines
particularités de celte organisation sociale (\i. 17(5,.
La conception du mariage que trahissent les rites ou
usages
nuptiaux rappelle, par plus d'un côté, celle que l'on observe
dans uombre de tribus australiennes. Le
mariage est consi-
déré comme uue sorte de péché, daltentalaux mœurs ou à la
religion, auquel on ne se résigne que contraint et forcé; il ne
va pas sansviolence et il se conclut comme un traité de
paix
entre adversaires. Les deux jeunes gens, après s être entendus
claiidestiuement.se sauvent dans la forêt. Les parents de la
jeune fille, une fois constatée la disparition de celle-ci, mar-
chent avec tous leurs amis contre le village (lit ravisseur.
Une
bataille s'ensuit où des coups sonlécbangés.mais
qui lie sont
pas mortels. Puis une entente s'établit, on convient du
prix
à verser aux parents de Ja jeune fille et,
après des cérémonies
le
diverses, mariage devient définitif, sans que toutefois il soit
consommé sur le champ. Il y une période
pendant laquelle
mari et femme sont tenus de vivre
séparés (p. 113, 114,. Ce
SYSTÈMES JUttlUiqUK* Et UUHACX 303

tabou réciproque des époux, dont oufiait In généralité, tieut ù


l'ensemble des raisons qui fout apparaître le commerce con-
jugal comme une sorte de sacrilège.
Nous venons de voir que I» mariage ne devenait régulier
qu'après que des présents avaient été offerts pur la famille du
jeune homme aux parents de su future femme. Mais ces pré-
sents ne sont pus tes seuls que reçoivent les beaux-parents.
Le mari leur doit une ojlraude de nourriture après le ma-
riage. Ou Haitque ce intime usage est très fréquent en Austra-
lie. Mais ce qu'il a de particulier dims les Iles du détroit de
Tonès, c'est que les présents reçu» doivent être rendus sous
une autre forme. On ue donne rien pour rien. Il y a ainsi entre
les deuxfamilles des échanges de cadeaux qui semblent bien
être un commencement de poliakli i'p. 1 18- 119;.
Quant au droit de propriété, la conception que s'en fout ces
peuples parait biun ôl're d'une tr'-s grande indétermination.
Unpeut se deuiunders'ils outquelque idée de eequ'estlapro-
priêté du fond; car c'est la propriété des plantes et des arbres
qui entraîne celle du sol. Qu'une plantation d'ignames
s'étende sur uu terrain voisin, planté de bananes le droit du
premier propriétaire s'étendra sur le domaine du second
']). 107). L'aliénation d'une portion quelconque du sol est
chose inconnue. Entre une location à bail et un pnH, il n'y a
pas de différences nettement tranchées. Les gens ont mùjne
l'habitude de se prêter mutuellement leurs jardins; ou estime
que l'emprunteur cultive mieux que le véritable propriétaire
avec qui, d'ailleurs, il partage les fruits (p. 100).
Ces usages et les idées qui eu sont la base paraissent déno-
ter une civilisation assez archaïque. Mais, d'un autre calé,
la propriété, dans ces mêmes Iles, est strictement indivi-
duelle on ne relève aucune trace decomniuuisine p. 107 Le
père peut môme disposer de ses biens outre ses enfants
avant de mourir, il désigne à chacun d'eux la portion qui doit
lui revenir. C'est une sorte de testament oral dont on nous
uflirme l'existence, sans nous dire. il est vrai, avec une préci-
sion suffisante ce qui garantit l'efTicaciléde ces dispositions
pour cause de mort. Cette liberté testamentaire, de quelque
manière qu'elle fonctionne. t'st généraileuieut considérée
comme l'indice d'une civilisation avancéo et l'un est quelque
peu surpris de la rencontrer dans les sociétés dont nous par-
tons.
En défi-uilivu. nous trouvons dans ces Iles nue organisa*
304 I.'ASXÈB 19UG1909
SUC1OLOUKJL-K.
tiuu sociale très primitive, mais fortement ébranlée. L'ébrtiu-
lemeut est même beaucoup plus accentué que dtitisles Iles de
l'ouest. Aumilieu de cette décomposition, ou voit parfois appa.
raitre certains traits qui ressortisseut à un type social sensi-
blement plus élevé. Outils été importés du dehors?Sout-ils
le produit (l'une évolution spontanée ? C'est à quoi il est diffi-
cile derépondre. Il est possible que, quand une structure so-
ciale perd, par l'usure du temps, sa force de résistauce, elle
devienne plus malléable et plus accessible à des transforma'
tions rapides. E. f),

C. v. OVERBERUHET E. DE JONGHE. – Les Bangala.


Collection de monographies ethnographiques, I. Bruxelles,
De W'itt et Institut luteru. de Bibl., 1907, XV-4î58p.,iu-8».
Les Mayombe.Ibid., II, XV1-470p., in-8».
Les Basongos. Ibid III, IU-alOp., in-8°.
Ces monographies concernent les populations, toutes ban-
tues, du CongoBelge. Ce sont des compilations, surtout biblio-
graphiques, où M. de Joughe a mis la plus grande conscience
et une sérieuse critique. Mais nous craignons que la collabo-
ration de M. v. Overberghn'ait pas été très heureuse. Les
renseignements oraux, demandés aux explorateurs et qui
constituent la nouveauté de ces livres, sont quelquefois pu-
bliés sous une forme singulière.
Le plan de <:esmonographies est celui du questionnaire
établi par la Société belge de Sociologie. Il soulève bien des
objections. La division en vie matérielle familiale – reli-
gieuse – intellectuelle – sociale – nous paralt difficilement
défendable. On est étonné de voir les arts d'agrément classés
parmi les phénomènes de la vie intellectuelle, et la circonci-
sion, la taille rituelle de la dent rejetées aux caractères anthro-
pologiques. D'autre part, dans l'organisation de la tribu, nous
ne trouvons pas même une mention du clan ou de ses équiva-
lents, ui rien qui éclaire la filiation utérine. Le questionnaire
n'eu parlait d'ailleurs pas. Sur la procédure criminelle, les
renseignements sont meilleurs. M. M.

BHKYSII,(K.j. Die Voelker ewiger Urzeit. I. Bd. Die Ame-


rikaner des Nordwestens u. des Nordens. Ilerlin,liondi,1007,
xxvn-àCH p. d'eu sdenliflque)
BY*TKMKS ETUUHAUX
iUHtOIQUBS 30&
SAP1R(K-). Notes on Takelma Indiens of Southwestern Ore-
gon. Amcrkan AnlhropohQisf, 1007,IX, p. 251 sq. (Tribu Atliapas-
kane, nomenclature de propriélv, organisât, sociale, p. 207 sq.).

MORICIÎ{Le 1».A. – The Great Déné Raoe. AiKhropos, 1900, J.


p. 829-278, p. 483-509, p. 095-730; 11, 1907, p. 1-34, p. 181-190.
(liénéralitôs, porte sur tous les Atlmpasknnsà la fois).

MM. TOIT (C). – Report on the ethnology of the south-eas-


tera tribes of Vancouver Island, Britlsh Oolumbia. Journal
ofthe Anlliropolocjkallaslitutij, 1907,XXXVII,p. 300-374 il'utlalch;
cérémonies nuptiales intéressantes).

MKItltlAM;t:ll.). – Totemismin California. AmerkanA nlhropo-


lagiiit. 1908, X, p. S!» sq.
l'V.V.N(A.-J. – The Amerioan Indian, ae aproduot of envi-
ronment, with spécial référence to the Pueblos. lloston.
Litlle, Hi-owaa. Co., 1907, in-8»,275 p.

Handbook of Amerioan Iadians North of Mexico. Pt. I. A.-M.


Kditedby K. \V. Hotiçe. Bulletin H, Bar. Amer.Elltuo., 1U07,in-8",
ix-972 p. ;iïxlr<*Miieiiu.'iit
utile; certains articles sur le clan, les
Iroquois, les dieux, etc., sont de très remurquiiMes munogra-
phies}.
J.K WIS(A.-B.j. – Tribes of the Oolumbia Valley and the Coast
of Washington and Oregon. Mëm.Am. Anthrop. Ans., l. p. n~-
209.

tJRAEBNEH(F.). – Die sozlalen Système in der Sttdsee. ^citoAc.


{. Soiklwùi., 1908, p. 003-681, p. 748-755.

SCIIULER.–Privatreohtliohe Begriffeder Indianer des Chaco.


Xeiltehr. f. vergkie/i. Rtchhuritt., XX! 1909,p. 285-298.
HI.YDE.N(E.-W.J. – AfrioanUfe and eustoms. London, Phillips,
1908, in-8».
IKIWD[!.}. – TheNegro races a sociological
study. Vol. I.
Tlio Negrilos, llie Xegritians, the Fellalahs. New-York, Tl(p Mac-
millanCo, (907.
TOUDAY(E.) et JOYCE (T.-A.). -On the Ethnology ofthe South-
Western Congo Free State. Journal of Ihc Anlhropologicalhx-
tilute, 1907, XXXVII,p. m-IS6.

TOUDAY(Ë.) et JuYCÈ tT.-A.). Notes on the ethnography of


the Ba-Yaka. Journal or the Anthnpologieal lnstituk, l'.iOii,
XXXW,p. 39-50 (Organisation sociale, procédure criminelle, inj.
tialion).
h. DrnKitciM.– AnnOeoociol.,I900-1UO!>. S0
30(5 l'assise socior.o«i(jrE. i9O«.i»09

MtiMA.N'X;E.' – Die Wahehe ilni<G.>si:liirtit<>. Kull-, liecbls-


Krief[s>uiu|J»gauebrUucli<>.Jlorlin. Minier,IVOH, t3t p in-S"
(Hocuiru'iits le
iinportuuls«iir luti'iuUmi',le droit; ubsi'uced'ani-
nmint'
AlTUNKIETil. Reoht der Kissibaleute. Zahchr.f, argUteckt*-
ni* XXI,1908,p.3:.i-3yi,Tabli-uujuriJi(|ULM:uui|)U!iûtlesrc|iouso$
ifuu iudigf'iieAun qtMsUunuiiire
fourni par Kohlvr).
IMXNKHT. – Zum Reohte der Herero.
Berlin,1U00.
K0III.EII;J'. – Weiteresûber das Reoht der Herero.Zcitscht.
terul. Hechtuv.,t'J06, XIX,p. -Hâ-Uo.

D. – Stjxthnexjuridiques tribaux.

PueMM.
Bi.u-i:osi,Hkrti.Mtrws
i.a Davy.

E. PECHUEL-LOKSCHE.– Die Loango Expédition. III, i,


Stuttgart. Strecker et Schrûder, l'JOT,iiO3p., in-t°.
L'intérêt de cet ouvrage, au point de vue
juridique, est
moins d'apporter des faits nouveaux nue de signaler avec
pré-
cision le rapport qui unit les croyances religieuses des Bafiôtu
du Loango avec leur organisation juridique.
En effet, M. Pecliuf-l-Loesclie enrichit peu notre couunis-
sance. Onregrette qu'il ait précisément supprimé de sa
publi-
cation nn chapitre sur l'organisation familiale qu'il nous
pro-
met (p. 467). En ce qui concerne le droii criminel,sou énumé-
ration des différentes catégories de crimes p. 228) n'atteint
pas la netteté de celle de M. II. E. Deunelt. Sa description des
diverses sortes d'ordalies n'apporte aucun complément inté-
ressant, ni aucune précision nouvelle à ce que nous savons de
ce système si développé au Loango. Il décrit assez
longue-
guementune cérémonie judiciaire, appartenant à cette caté-
gorie de jugements, qu'il appelle Ertlyerkhl (p. 227;, ce qui
semble être pour lui un terme général pour tons les
juge-
ments criminels, pour tous ceux eu tout cas qui
supposent
l'intervention de l'autorité publique. Il serait dilllcile, par
conséquent, de classer YKnhjerirluparmi les cinq sortes de
palabres dont M. R. E. Oennelt nousadonuélo tableau (p. 84i.
Cette description met eu valeur peu do détails
importants.
Les faits ont été vus du dehors. Ou peut remarquer 1°
que
l'orientation du juge et des parties est strictement
détermi-
née "2°que le couteau sacré ou Tschimpupa'Deunelt Xim-
SYSTÉMKS WRIDIQUiS* RT MOH.AIX 307

.AI. ~or.;t..l .l.o tn .A.


papa) joue un rôle symbolique capital dans la cérémonie
JJ°qu'il ya un langagejudiciaire très développéet trèsuuaucé
(p. 2i8 note i.
En revanche, M. Pechuël-Loesch»il bien vu le caractère
religieux du crime et ses expressions sont intéressantes. Le
crime affecteles pouvoirs religieux de la terre. Luterre est
enttceilit (p. 233). Klleest (nippée d'interdit, et cet interdit est
signifié par l'érection de portes grossières, constituées par un
bâton posé sur deux fourches fichées au sol, analogues à ce
que M. R. E. Oenueitappello Mtibili, Dansle cas où le criini-
niinel n'est pas découvert, il est nécessaire qu'une cérémo-
nie do purification soit accomplie (p. 22ii. Ce qu'il y a de
curieux à noterapropos de cette cérémonie,c'est qu'elle n'est
plus simplement religieuse et u'u pas pour unique objet de
lever l'interdit en général. Chacun vientsuccessiveineut décla-
rer, suivant une formule sans doute rituelle, qu'il n'est pas
coupable. L'analyse d'une telle cérémonie, si la description
en était complète, permettrait de saisir lit responsabilité col-
lective en voie d'évolution vers la responsabilité indivi-
duelle.
En ce qui concerne le droit de propriété, M.Pechut'M-Loesche
a signalé le rapport religieux qui unit à la terre ht commu-
nauté territoriale. « IleiUg ht die Eide, dit-il, uiul lieinulie
lieilig die Enlxchaftfp. 20ii).« (| ne distingue pas avec clarté
ce qui est propriété collective et propriété individuelle,
(p. 207).Mais, en tout cas, il affirme que la terre ne peut être
la propriété de personne (p. 207; on n'en possède jamais que
l'usufruit. L'étranger ne peut acheter la terre 'p. 209i. Il ac-
quiert simplement le droit de s'y iustaller. On regrette que
M. Peehuël-Loesehe n'ait pas mieux défini la souveraineté
territoriale du seigneur féodal. On rappellera que, suivant
M. It. E. DennPtt, le chef féodal, t'uinu ni, possède la terre
(p. 43,1,ce qui semble être eu contradiction avec l'umnimlion
de M. Pechui-l-Loesche.Kntout cas, une conséquence inté-
ressante d.n respect religieux du à la terre, c'est qu'on lu cul-
tive avec économie et qu'on la ménage (p. iOi A. 13.

J. KOSCOE.– The Bahima a cow tribe of Enkole in


the Uganda Proteetorate. Journal afthe Aitlluopotoyiml
Institue, 1901,XXXVII,p. i»3-l18.

Importante monographie niais les observations recueillies


30» L'ANNÉE 1909-1909
SOCIOLOGIQUg.
VifbM
\M Lfflui
M. n. auAnttilftit'IlklAL^fciAflajt
cours d une brève wml**lh*\ ituAÏiAiti*«*
par visite excitent notre curio-
sité plus qu'elles ne la satisfont.
Les llahima sont essentiellement uu peuple de pasteurs.
Tout le bétail du pays appartient au roi les particuliers n'eu
ont que l'usufruit (p. 98 sq., IO3j. A la divisionest clans, se
superpose une organisation politique centralisée, à base ter-
ritoriate, qui répond à des fins pastorales oumilitaires. Chaque
clan « sou objet sacré que M. U. appelle un totem mois
aucun des faits qu'il relate ne nous autorise à considérer le
totémisme comme fonctionnant actuellementdans cette tribu.
D'ailleurs, le totémisme est difllcilemeut compatible avec le
rôle prépondérant et absorbant joué par le bétail dans la vie
d'un peuple de pasteurs. Sur quatorze « totems » meutiounés
par M. R., onze sont des vaches présentant certaines parti-
cularités, ou certaines parties du corps de la vache i p.99). On
ne peut pas non plus parler de totémismeà propos du culte,
d'ailleurs remarquable, rendu aux auiraaux sacrés (lions,
léopards, serpents) de la forêt dp Nsanzi, eu qui les âmes des
personnages royaux se réincarnent; la décomposition du
cadavre est assimilée à une grossesse et à uu enfantement de
l'animal (p. 101sq., 108sq.).
Acôté des Bahima, adonnés à l'élève du gros bétail, vit une
population de serfs, les Bahera, agriculteurs et pâtres de
chèvres et de moutons. Il y a une séparationcomplète entre
les deux classes au point de vue du genre de vie, du vête-
ment, de l'alimeutalion tandis que les Balierasont presque
complètement végétariens, les Bahima, sauf quand ils sont
en état d'impureté, se nourrisseut de lait et deviandede bœuf
il est interdit de consommer à la fois du lait et des légumes
(tabou de mélange). Peut-être faut-il attacher le même sens
au fait que l'usage de l'eau est défendu ou du moins décon-
seillé aux Bahima, qui se servent de préférencede beurre ou
d'urine de vache (p. 9i, 9(3,08, lOOsq.,106, III, 114 sq.
Cette stricte répartition de toutes choses en pastorales et
nobles et en agricoles et serviles est instructive à bien des
égards.
On trouvera, à propos du mariage, uu beau cas de lutte
cérûmouiclle entre les deux familles pour la possession de la
nouvelle mariée. L'exogamie ne vaut pas pour les familles
princicres. La polyandrieest pratiquée, mais seulement d'une
façon exceptionnelle et provisoire (pour cause de pauvreté;.
Il y a un contraste frappant entre la chastetéstricte des jeunes
SYSTÈMES JCBIDIQUES ET HOIMl'X 300

filles avant le mariage et le caractère relâché de l'union con-


jugale (prêt et échangedes femmes p. 104 sq., 117).
li. H.
W. II. RIVEHS. The Todas. Loudon, Macmillau, 1007,
xv-758p., in-8° (71 planches et uue carte).

Nous avons exposéplus haut la situation des Toda au mi-


lieu des populations ambiantes et nous avons décrit leur
organisation religieuse. Nous en venons maintenant à leur
organisation sociale. Nous avons vu, d'ailleurs, que la pre-
mière supposait en partie la seconde le culte implique les
phratries, les clans et les particularités distinctives de la vie
économique. Il semble que, dans ce cas particulier, les phé-
nomènes juridiques aient plus réagi sur les phénomènes reli-
gieux, que ceux ci sur ceux-là. D'ailleurs, tandis que le culte
du buffle est chose spécifiquement toda, les institutions so-
ciales dont il va être question sont assez générales dans les
populations dravidiennes et, surtout, malabari.
Danscette partielle son étude, M. R. est arrivé à des résul-
tats d'une remarquable précision, Il les doit à sa méthode des
généalogies l'en, xx.) qu'il a encore perfectionnée. Il dresse
l'arbre géuéalogique de chaque individu eu remontant aussi
loin que le lui permet la mémoire des gens qu'il interroge;
puis il rapproche ces généalogies,les confronte les unes avec
les autres, les rattache les uns aux autres et arrive ainsi à
reconstituer la vie, non seulement des générations présentes,
mais mêmedes générations passées. Cette méthode, il est vrai,
était plus facilement applicable à cette tribu qu'à beaucoup
d'autres. Les Toda, en effet, ne comprennent guère plus de
800 individus (p. 471et suiv.) et les quelques fluctuations qui
peuvent s'être produites depuis cent ans dans la population
sont 1lissezfaibles. Il est possible aussi que, à causede la net-
teté des divisions sociales et de leur importance, les Toda
aient gardé de leur généalogie une mémoire particulièrement
précise Toujours est-il que M. H. a pu faire remonter cer-
taines de ses il tables jusqu'à cinq ou six générations en
arrière. Il a pu refaire ainsi l'histoire de S50 mariages (p. 512)
et de 1800 individus appartenant à 17 clans. histoire qui
s'étend sur une période de près de l»0 ans. Non seulement
M. H. a pu, gnlce à cet ensemble de recherches, donner une
preuve incontestable des propositions qu'il énonce sur le
régime familial, matrimonial et successoral des Toda, mais il
310 L'ANNKK SOCIOLOUIOI'K. 19WMV09

il en de plus le mérite d'établir ainsi une méthode d'obser-


vation qui, par elle-même,constitue une véritable découverte
sociologique.
r.ex phratries et lei dmi*. Les Toda sont divisés en deux
phratries qui, autrefois. ont peut-être occupé des territoires
géograpliiquemeut différents Turtharol et Teivaliol. Nous
avons montré coinmenl elles étaient religieusement spéciali-
sées l'une possède et entretient les bergeries sacrées, les ti
l'autre fournit les bergers sucrés, les palol. 11ue faudrait pas
ca conclure que la seconde ait une supériorité quelconque sur
la première. Les pnlol ne tiennent leur autorité que de leurs
fonctions et ne l'exercent qu'à l'occasion de -leurs fonctions.
Ils sont même plutôt considérés commetes serviteurs des
Tartharoi qui sont propriétaires des bufflessacrés. Mêmele
fait que certains privilèges, comme celui de parler une langue
spéciale, privilège qui est très répandu eu pays dravidien
(voir Jules Bloi-lt,Ife lnnyfigedexenstn in Mail- de k SneiW
île linguistique de l'art' 1909', sont réservésaux seuls Tartha-
roi, semble indiquerque la phratrie des Teivaliol n'est qu'in-
complètement initiée aux secrets religieux ip. itoi, 687 cf.
p. 583).
Les phratries sont eudogames. Entre individus appartenant
à deux phratries différentes, it peut y avoir relations sexuelles,
mais pas de mariage régulier. Il existe pourtant uue institu-
tion qui permet à l'homme de prendre une sorte de coueu-
bine <p. 520, CSOj,dans l'autre phratrie. Mais, alors, il n'ha-
bite pas citez lui en général, il réside dans la famille de sa
femme les enfants ne lui appartiennent pas. Ils sont à un
père putatif, au membre de la phratrie de la femme qui eût
dû en être l'époux. Seul, celui-ci a flualité pour reconnaître
l'enfant, faire sur lui la cérémonie de la reconnaissance solen-
nelle qui établit la paternité i lu donation de l'un: et de la
llèche, p. 319). En somme, tout se passe, dans ce cas, comme
si les phratries étaient à 'descendance utérine. Il ne serait
d'ailleurs pas impossible que les Todaeussent autrefois passé
par une organisfttion de ce genre. Ku fait, dans la majorité
des cas, le rite de la défloration sexuelle delà fille sur le point
d'être nubile semble avoir été consommé par les gens de la
phratrie opposée. De plus, parmi les rites du mariage, il en
est un qui. nous semble rappeler un ancien droit de connu-
hitim par phratrie quand l'épouse est une Teivali, un Tar-
,thar doit la couvrir de son manteau avant que Je mariage
SÏSTKttlW JUHIIJlvIBi HT MvIUl/X 311

inu'i et
fit r|fftat
c'est l'invnrea a tiftii
nui îi lieu riiuiiwl la fi>mmn
soit consommé l'invorse qui quand lu femme
est une Tartliar 'p. î>08,p. ÎJOli,p. :;3u). – Nous ne croyons
pas qu'il y ait lieu de rapprocher de ces faits l'espèce de droit
qu'a le palol, le bercer divin, qui est un Teivali, sur toutes
tes femmes Tarlhar. particulièrement tors de son initiation
mn vieux document portugais, publié par M. H semble
démontrer qu'il était autrefois exerce d'une fai;ou plus gêné-
mie). Ce(ait peut correspondre simplement à un rituel pro-
prement religieux, et en tout cas est en relation avecle célibat
du palnl. – Mais il ressort, quant à nous, de tous ces faits
que les Todaont bien pu avoir autrefois deux phratries égales
et complémentaires,descendance utérine, elttxogames. Klles
seraient devenues endogames, après la victoire définitive –
qui n'est pas régulière en pays dravidten – de la descen-
dance masculine, et précisément pour concilier les deux des-
cendances.
Chacune de ces phratries est divUéeen clans descendance
masculine et rigoureusement exogames. Toutefois, cette exo-
gamie jie s'appli([ue qu'au mariage les rapports sexuels
entre gens du même clan ne sont même pas l'objet d'un
blâme. M. H. signale cependant un usage qui pourrait bien
être l'effetd'un ancien tabou sexuel du clan seule, une femme
qui n'a jamais eu de rapport avec quelqu'un de son clan peut
présenter la nourriture au palol qu'où initie. 11 n'y avait chez
tous les Toda qu'une seule femme qui put prétendre à celle
qualité. – Ces clans sont divisés à leur tour et du deuxfaçons,
('ne de ces divisions est purement religieuse. Chaque clan
comprend deux sections appelées kwlr. Quand un kmlr a
commis une faute rituelle contre les fouillessacrés ou le lait,
il rachète lu péchéeu faisant un cadeau solennel de bufflesau
troupeau de t'autre section (p. 130). Ou dirait que le clan est
aujourd'hui composé de deux restes do phratries, l'un expiant
à l'autre les fautes rituelles (voir, p. 312, l'interprétation do
l'auteur;. – L'autre divisiou du clan a un caractère plus
civil c'est le polm. Le polm est actuellement un agrégat de
familles. Il est probable que. primitivement, c'était une fa-
mille agnatique indivise, un groupe étendu d'agnats vivant
en communauté <p. al'» et suiv. ». Quelquefoisla division en
pointse superpose a celle eu kwlr, de telle sorte qu'un même
kuttr comprend plusieurs point (p. O.'iSi mais, dans la plu-
part des clans, ces divisions sont indépendantes. Le polm est
!a véritable unité administrative et juridique. C'est entre les
312 L'\SSèB iÙClOLUaiQVH.1900-190!*

polm que sunt partagés les soins et les' f misrelatifs à l'entre-


tien du clan, du village, de la bergerie sacrée. C'est dans Je
polmque se transmettent héréditairementlesrnresdignitésdes
Toda. Achacun d'eux est attribuée une part dans le troupeau
des builles sacrés, dans les revenus de ces buffles, dans les
pâtures communesdu du». Endehors de la propriété générale
du cktu et de ses villages sur les maisous et les terres, il n'y
a de lotissement qu'au profit du polm. C'est à cette même ius-
titutlon que M. Il. rattache, avec raison, l'absence, chez les
Toda, de toute règle d'adoption, absence que l'ou est sur-
pris de rencuutrer dans uue population de l'Inde. Tous ces
faits tendent à couflrmerque le polm était autrefois un groupe
uu et indivis.
Mais aujourd'hui ce n'est plus, comme nous venons de le
dire, qu'une confédérationde familles (kudupeb. L'organisa-
tion familiale tieut, à la fois, de la famille agnatique et de la
famille patriarcale. Le caractère patriarcal de la famille toda
est si accusé que la femme, comme presque partout dans
l'Inde, est introduite par son mariage danslit famille du mari,
tout au moins dans sou clan (p. 868; cf. p. 394, un exemple
intéressant de violation intentionnelle de la coutume par un
chef qui établit, au profit de sa lamille, un double système de
descendance et prétend pratiquer les rites funéraires de son
clan sur le corps de sa fille.i.L'influence de la famille agna-
tique se révèle par deux particularités importantes c'est,
d'une part, lu polyandrie dont nous parlerons tout à l'heure,
avec l'indivision qu'elle suppose, et qui est assez la règle en
pays toda c'est, en second lieu, le droit successoral. L'héri-
tage. en effet, se partage par tôtes (voir cependant un com-
mencement de partage par souche, p. 563;, avec « part supé-
rieure » pour l'ainé et le puîné. Ce curieux mélange (p. 861,
o&2)de droit d'aînesse et de minorat ne peut correspondre
qu'à un état où le chefdes agnats était alternativement l'aîné
lorsqu'ils restaient tous dans la maison, et le pulué lorsque
celui-ci restait dernier et seul d'un groupe de frères qui s'était
dispersé. M. Il. donne de cet usage une explication qu'il nous
parait inutile de rapporter, tant elle nous semble extraordi-
naire.
Nous n'avons pas besoin de rappeler que la parenté par
groupe, la parenté collective, est aussi accusée citez les Toda
que dans les autres sociétés dravidiennes. On sait, en effet,
que c'est de la nomenclature tamil que partit Morgan pour
SMTÈUKS JUttlDlUL'KSET MORAUX 313

fonder sa fameuse théorie de la « parenté classilieatoire ». La


nomenclature toda est la même dans la plupart des cas. Ce
système de parenté présente encore des traces de parenté uté-
rine. Ainsi, c'est le père de la femme qui donne le nom aux
enfauts (p. 619, 332). D'ailleurs, le père de la femme est en
même temps le beau-père du mari. Le mariage régulier a lieu
en ellet, entre fils et filles de frères et de smurs, matchuni
(p. 813, SOI, 418). Cette parenté joue uu rôle considérable.
Nous avons dit que, entre individus de phratries diflê-
rentes, il ne peut y avoir mariage proprement dit, mais seule-
ment concubinage. Dans ce cas, ce sont les tnatchuiu qui sont
les époux légaux1 de la femme et les pères réguliers des
enfants issus de ces relations.
Unedes raisons pour lesquelles h nomenclature classiflca-
toire a dû subsister en pays tamoul, et chez les Toda en par-
ticulier, c'est lit polyandrie. Comme chez les Naiïs, qui sont
parents des Toda, le fait qu'un même enfant a plusieurs
pères (bien qu'un seul soit légal) a contribué au maintien de
cette vieille terminologie et celn, d'autant pins que ces maris
associés sont généralement frères (p. 818 et suiv). Quant il
l'organisation matrimoniale, elle est la même qu'on trouve en
pays dravidien en général. Chaque homme a son jour. Mais,
chez les Toda, apparaît, mieux que dans les autres nations
dravidieunes, une relation directe entre la polyandrie et l'in-
fanticide des filles (p. 818, 678, etc.,). Si l'ou en croit les
Todu, cette pratique de l'infanticide féminin, dont la polyan-
drie serait la conséquence fatale, aurait eu une raison d'être
économique c'aurait été un moyen de restreindre la popula-
tion qui ne pouvait être dense. Comme ses prédécesseurs.
M. R. adopte cette explication traditionnelle. Peut-être est-ce
prêter à ces peuples de bien profonds calculs.
La polyandrie ne va pas sans une certaine liberté sexuelle:
pourtant, elle n'a, ici, rien d'excessif. Nous sommes loin de
la promiscuité que Marshall attribuait aux Toda. Le mariage
confèredes droits de possession sur la femme. L'adultère est
réglementé (p. 525. ï>-29). Les droits des frères tribaux, c'est-
à-dire des hommes du même clan et de la même génération,
sont purement éventuels et ne sont pas exercés (voir, p. 845.
une excellente discussion;. Il y a, il est vrai, des cas où,
'">M>,
réglementairement, les femmes sont échangées; i est aussi
défendu de garder trop exclusivement sa femme ponr soi
(p. 530, 867; mais ces dispositions sont peut-être de date
314 l'a.NNKR iOUOtOUlOUK. IWM-tW»

rucnute. Commecet échange de femmes est lucratif pour les


pareil ts de celles-ciet leurs maris antérieurs (car chaque nou-
veau mari duit nue prestation à ses beaux-parents et à son
prédécesseur), il en est résulté une plus-value de la femme
c'"st peut-otre du ta que vicul lu tuuduuce constatée de l'in-
funticiile féminin à décroître (p. 52fij..
Les autres phénomènes juridiques sont curieusement atro-
phias, à moins qu'il n'aienl échappé à l'observation, ce qui
parait peu probable. L'organisation politique vraiment toda
ne comportait qu'une espèce de conseil supérieur, le nuiiu
i'p. îîiîOet suiv.i. Le droit pénal n'existe pour ainsi dire pns.
On peut croire qui*cette absence u pour cause l'extrême dou-
ceur de nnuurs de ces populations. M. M.

MAXMOSZKOWSKI.– Sltten und Gebraeuehe in Ost


und West Sumatra. Xi-iturhr.f. terqleich.Itechtxtciss.XXI,
IU08, p. 321-354.
Ktude intéressante et claire d'un observateur sur les tribus
riveraines des fleuvesSink et Rokan et do leurs alllueuts. Ces
tribus, qui occupent la partie sud de la côteorientale do Suma-
tra et qui ne se sont pour ainsi dire pas ouvertes à l'influence
européenne, appartiennent à la race des Sakei qu'on ne con-
naissait jusqu'ici qu .Malakka.L'auteur décrit successive-
ment l'état social, juridique et politique des Sakei propre-
ment dits, des peuplades des cinq États du Rokauet de celles
du Siak.
I. – Les Sakei sout dolichocéphales. Ils habitent les forêts
que baigne la Mandau. Le nom qu'ils se donnent à eux-mêmes
n'est pas Sakei, mais Butin, qui dérive de l'expression dési-
gnant chez eux le chef; et ils appellent d'un nom malais
xuku les membres de leurs tribus, Ils sout divisés en
deux grandes sections les Untin-Sélapau au nord-est, les
liatin-Lima au sud-ouest. La première de ces sections ren-
terme 8 Sliïinnu; la seconde 5. Ce que fauteur appelle Slamm
est évidemment un clan. En ajoutant 3 Stumim-secondaires
ides sous-clans sans doute; on arrive finalement à un total de
1(>tribus.
La civilisation de ces peuplades est très primitive pas de
religion constituée, mais seulement une croyance répandue
aux spectres: exogamie droit matrimonial et successoral
dominé par le principe matriarcal suprématie du frère de la
SVSTÉ.MK* n'IUlMQPIM HT MORAl'X 3C>

femme utiquot le mari même est subordonné pendant sou


séjour près de sa femme; droit d'héritage accordé aux frères,
nu, u leur défaut, aux enfants des sœurs, mais jamais aux
«niants des frères; stricte réglementation du mariage quant
aux personnes et qiiiuit aux biens. et par conséquent nulles
traces d'une promiscuité primitive propriété ôminente du
soi attribuée aux chefs.
H. – Les cinq Klats du ltokan renferment un inélnnge de
Sakeis et de Malais. La encore exogamie <;t matriiircal le
frère de la femmeest le chef de lu famille. Le groupefamilial
large s'appelle le Suint, sou chef le l'iimjiilu ou l'ul-
rlwli. Les subdivisions du suku sont placées à leur tour
sous l'autorité de Yinduk ou iimmtuuk. Le jeune homme
se marie hors de .sonsuku et entre dans celui de sa femme.
Il y a d'ailleurs deux espèces de mariages le inuriuge-
seminda ou mariage ordinaire, et le mariage piiuntg. Voici
quelle est ta destination de cette dernière espèce de mariage
si une famille princière menace de s'éteindre sans descen-
dants, son dernier représentant doit contracter tiu mariage-
liiiimuj,c'est-à-dire épouser une princesse voisine, achetée, et
qui, contrairementà l'usage habituel, vieut s'installer chezlui
et lui donne des enfants habiles à lui succéder. Mais pour
cela comme pour le divorce, il faut le concours des A'rap/w-
lan, de l'ensemble des induits et des pulchuks. D'ailleurs
t'introduction de l'islamisme est venue compliquer siugu-
lièrement lu réglementation matrimoniale et a eu pour résul-
tat finalle développement de la prostitution. Le suku est col-
lectivement responsable des fautes et des dettes de ses
membres. Aussi l'activité de ceux-ci est-elle soumise au con-
trôle du chef, du mammak ils ne peuvent par exemple
s'obliger sans sou assentiment. De plus, ils sont tenus vis-a-
vis de lui à la prestation d'un certain nombre de services.
Et eu effet l'organisation, dans son ensemble, est nettement
féodale: il existe uue hiérarchie de krappatnn auxquels on
doit l'hommageet que domine l'autorité dn prince. Tels sont
les traits généraux. L'auteur caractérise ensuite plus spécia-
lementles cinq Ktals différents du Hokau.
III. – Dans le sultanat de Siak eutiu, l'influence de l'is-
lamisme est tout à tait prédominante.
Ainsi l'on constate chez ces peuples trois organisations so-
ciales différentes. L'auteur aperçoit à travers elles la continuité
d'un développement unique. Maisc'est d'une façon bien arbi-
316 f.'ASNKE SOCIOIOOIQI'E. 1900-1909

traire qu'il préteud définir l'état initial qui aurait servi de


pointdedépartà un tel développement.A-t-ilraisond'alïirmer
l'absencede tout totémisme? En tout cas, il a tort de fonder
l'antérioritéqu'il attribue à la gens par rapport à lu phra-
trie sur une comparaisonavecce qui se passechez les ani-
mauxsupérieurs.De telles comparaisonset lu construction
de groupementssociaux primitifs ù partir detel ou tel ius.
tinctne sont point du tout probantes.C'est sans beaucoup
plus defondementqu'il suppose que l'exogamiede la phra-
tries'est effacéedevantcelle de la yens. G. D.

J. KOIILER.– Ueber das Reoht der Urstœmme von


Malakka. Ztilxchr. cergleieh,liechlswm.,XXI,1008,
p. 342-202.
Voicilestraits essentielsdu droit des tribus primitivesde
la presqu'ilede Malakka organisationsocialeoù sont mêlés
groupementstolémiqueset groupementsterritoriaux ves-
tigesdefiliationutérineù côtédu régimeétablide la filiation
paternelle.L'auteurattribue le triomphe de cette dernièreà
l'usagedumariagepar rapt ou achat de la femme; traces
de couvade; monogamie; précocité du mariage; •
échangedes femmesà certaines époques. Naturellement,
M. K. voitdans cet échange une preuve de promiscuité
primitive et l'on sait que penser de cette interprétation.
Droitpour le mari, au cas d'adultère, de mettrele coupableà
mort ou de lui imposer uuo amende (et ue voilà-t-ilpoint,
par parenthèse,un droit bien défini et qui cadre bien mal
avec l'état anarchique impliqué par une soi-disantpromis-
cuité? faculté pour le mari et aussi pour la femme de
romprele lien conjugalau cas de fauted'un des deuxcon-
joints – développementtrès primitif de la propriété; –
absence presque totale de divisiontlu travail; échange
pratiqué sous forme de commercesilencieux,vendeuret
acheteurexaminantl'objet séparément,sans se voir et sans
porter aucune arme – droit de confiscationaccordéau
créancier contre le débiteur insolvable – suprématiedes
chefs appelés lialin ou Pengultu et dont le pouvoir a
une source magique;feur rôle dans les questionsd'adultère
et debannissement.Autotal, organisationjuridiquepeucohé-
rente, peu unifiéeet pas du tout primitive.
G. D.
KYSTÈMK* KTMORAUX
JUBID1QUIM 3J7
SPIETII (Jacob). Die Ewe-Stsemme. Materialxur Kunde
des Ewe-Volkes in Deutsch Togo. Berlin, Diotricli
Reimer,
1906, s.'J62p.,in-8».
LÉONARD (Autour Gux). – TJie lower Niger and ils
Tribes. London, Macraillau, 1900,
xxu-BiHp., iu-8".
UESPLAGNES (Louis). Le Plateau central Nigérien.
Paris, Kmile Larose, 1907, SOt p., in*.

UELAFOSSE(Maurice). Le Peuple Sléna ou Senoufo.


Reçuedes Études Ethnogr. et ftoeio., 1908-1909.
Les sociétés soudanaises et guinéennes
qui sont étudiées
dans ces différents ouvrages et dont on a vu plus haut
ip. t'iCi
l'organisation religieuse comptent parmi les sociétés tribales
les plus élevées que nous connaissions. Bien
qu'on puisse
trouver chez elles des traces de totémisme, ce ne
sont, en
général, que de rares survivances. qui u'aiîectent pas l'orga-
nisation sociale et juridique. Plusieurs même de ces
peuples
sont dans une situation intermédiaire entre la tribu et la
nation. Non seulement les Habé, comme leurs voisins Man-
dingues, Sarakholé, etc., ont formé des sortes d'empires, ont
eu une histoire que raconte, par
exemple, la légende de
Faraug reproduite par M. Desplagnes (p. 383) non seulement
à coté des Ewlié, décrits par M. Spieth, d'autres
Ewhé, au
Dahomey, ont formé une nation qui fait vraiment figure de-
royaume, non seulement ceux du Togo furent longtemps
vassaux du royaume Tsiii d'Ashanti iSpieth,
p. 72; non
seulement les sultanats de Yoruba et le royaume de Bénin
ont encadré les Ibo et les autres tribus du
Bas-Niger qu'a
observées M.Léonard mais, même danschacuuedes°sociétég
que nous alious étudier, on voit déjà se dégager une sorte de
sentiment national, des débuts de royauté, de droit interna-
tional, de suzeraineté, etc. Ce sont comme des nations ins-
tables qui ont un vague sentiment d'elles-mêmes, sans
par-
venir à se donner une organisation durable. Un
degré au-
dessus dans l'échelle des systèmes juridiques, on trouverait
le Maroc actuel, les petits royaumes de l'Asie ancienne ou les
anciennes tyrannies grecques.
La morphologie de ces peuples est en
rapport avec leur
organisation sociale. De ce point de vue, ils représentent assez
bien l'état dans lequel devaient se trouver les Celtes de la con-
quête romaine ou les Italioles avant la fondationdes grandes
318S r.'A.NN'KKSOCIOLUUlqUii.iUQft-JUO!»

n~,l.
cités. '1.
Des villes 1-forment le centre, quelquefois t.t
lu seule unité
sociale. Des villages de pluntalion ou des fermes isolées en
dépendent, que tus ttabitants des villes ont et exploitent
au prix de déplacements saisonniers. parfois assez considé-
rables i Spieth, p. 36S). Ces villes, il est vrai, coiume chez les
Creek en Amérique, portent encore lu marque de l'organisa-
tion à base de clans chaque quartier est habile par ce que
M. Spieth appelle un siamm. Il s'agit très probablement de
cUuik.Mais euliu ce sont des villes, et il semble môme que
l'organisation urbaine soit contemporaine de cette civilisation.
Les Ho, par exemple, se représentent le lieu d'où viennent les
hommes sous la forme d'une ville et d'une ville entourée de
murs. L'étal économique et la technique sont également
fort avancés (voir sur ce point le livre de M. Delafossej,et les
rapports juridiques, eu particulier commerciaux, qu'il sup-
pose ou produit, n'ontrieu non plus de primitif.
/.« notion île lui chez (en/>/«- – Ce qui montre le mieux
que nous sommes eu présence d'uue assez haute civilisation,
c'est que nous y trouvons des notions juridiques qui, pour
être encore mal dégagées des notions religieuses, ne laissent
pas d'être déjà conscientes d'elles-mêmes. Grâce aux docu-
ments réunis par 11. Spieth. nous pouvons suivre un»,partie
du travail collectif dont elles sont le produit. M. Spieth a eu,
en elîet, la bonne idée de puhlier des procès entiers de Ho,
procès de droit administratif, de droit civil, procèscriminels,
méthodes des preuves et ordalies[ p. 120et suiv.,u70etsuiv.).
A travers les abondants « palabres »qui nous sont rapportés,
on aperçoit la manièredout les fonctions judiciaires se répar-
tissent entre les anciens, les chefs, la commune, le roi, les
prêtres d'ordalie; le rôledes fables morales où sont enregistrés
les précédents, les proverbes, les coutumes, les principes de
droit y est très bien précisé. Nous ne pouvons «poser tous
ces faits dans leur détail nous nous bornerons A déterminer
la nature de la (dus importante de ces notions, celle de loi.
L«'iloi, ne, c'est la limite /cf. Westermauu, < certi., p. 800
Spieth. p. 108 et suiv.i; c'est l'endroit on l'on s'arrête, ce
qu'on ne transgresse point. C'est l'obligation civile et reli-
gieuse ce sont les interdits des jours de marché, du sabbat
Kwhe les règles de la morale, de la propriété, du mariage,
du contrat, sont autant de *•. Les villes où la loi ne règne
pas sont comme si elles étaient sans mur et sans porte elles
sont ouvertes.
SÏSTÈMKS ETMOIIAIX
Jl'IUUlyl'ES 3JU
Cette notion, les juristes Kwhe ne se sont pas hormis à la
déjuger, ils l'ont approfondie et sous son aspect juridique et
sous sou iisuoct religieux. D'abord, ils sont h r ri vusà une
curieuse distinction entre les lois promulguées et cultes qui
sont l'œuvre du législateur. Les premières sont faites pur
l'assemblée régulière de la tribu et elles sout d'ordinaire
éuoucécs sous tonne de surineuls. De là, nue sorte de philo
sophie du droit: luloi est uu serment, c'est le serment des Ho.
tëlle est ce que les Ho proférèrent quand, aux temps mythi-
ques, ils sortirent en corps de la ville de l'au-delà elle est
encore ce qu'ils proférèrent dans les grandes calamités
ip. 108, 121, 1!iS,etc.j. C'est à l'image de ce serment, par
lequel on jure d'ailleurs, que sont courues les autres luis et
leurs applications.
Mais ils allèrent plus loin dans leur spéculation. La loi
fut identifiée avec la nature elle-même, l'ordre moral avec
l'ordre des choses se fut rapporte au grand dieu Mawu, le
ciel, pore régulateur des jours et des nuits, des saisons et des
ans. La faute contre la loi fut une faute contre le grand dieu
et les choses; les irrégularités des choses furent attribuées
aux irrégularités des hommes. Mawu symbolise l'ordre, la
paix, la douceur (p. 422; le sabbat, qui est un ne des plus
sacrés. est sou jour. Dans quelques tribus, se a été identilié
à Mawului-même ip. 8(18,870), commetllmrmn, la justice et
la nature, est devenu, dans certaines traditions hindoues, le
plus grand des dieux. Nous avons donc ici une évolution qui
.a dépassé la simple personnification d'une abstraction collec-
tive, de l'ordre ou de la garde des contrats nous avons un
essai do hiérarchie morale des personnes divines, de mytho-
logie morale de la nature.
Vous n'avons, il est vrai. trouvé des documents aussi
significatifs que dans le livre de M.Spieth. Mais nous ne dou-
tons pas que des travaux, conduits d'après la même méthode,
feraient découvrir des faits similaires dans d'autres sociétés
uigritiennes. Des ligures, comme celle d'Ofo, dieu de la
justice et du roi, au lias-Niger (Léonard, p. 80, 420, VA"),
expriment, croyons-nous, des conceptions équivalentes:D'ail-
leurs, ces notions sont en rapport avec l'organisation poli-
tico-religieuse, celle du pouvoir royal en particulier, qui
présente, chez tous ces peuples, une grande homogénéité.
Organisation politique et juridique. – Toutes ces sociétés
sont ou des royaumes proprement dits ou des formes iuler-
320 b'ANKétiSOCIOIUUKJUB.
J90D-IW1S

médiaires entre l'organisation tribale d'un côté, et celle de


royaumes absolus d'autre part. Un certain nombre des tribus
Ewhé de M. Spieth, les Habé de M. Desplagnes sont du
premier type. Ou y trouve des rois de rang iuégal, des chefs
de villes et de villages plus ou moius subordonnés les uns
aux autres, dont les maisons ne se distinguent guère des
autres « cours » itiekôfle)que par leurs plus grandes dimen-
sions. Leurs pouvoirs sont déjà assez considérables, même
sous le rapport juridique. Citezles Ewhé, les procès d'état
civil se plaident devant le roi chez les Habé, devant le prêtre
divin, chef civil du canton, le Hogon (Desplagnes.p. 337). 11
est vrai que lit plupart des contrats, des <iflairescriminelles
relèvent de l'ordalie, de l'épreuve du serment religieux ou
magique dont les résultats sont jugés par un corps spécial
d'administrateurs dont la juridiction a une sorte de carac-
tère international et dont le nom dit lu fonction ce sont les
administrateurs « de l'eau de justice » (p. 150).Cependant les
tëwué ont déjà trouvé une procédure assez analogue à celle du
meramentnm romain ou invoque le nom du roi (cf. Globus,
XCII, p. •>),ou bien un des regalia, ou bien encore un des
dieux royaux le roi, comme prêtre-dieu, se trouve ainsi
faire concurrence aux administrateurs d' « eau de justice »
(p. 076). Chezles Soudanais de M. Desplagnes, le Hogonest
administrateur de la justice au nom des morts dont il détient
les reliques (p. âODi.Le pouvoir judiciaire et politique du roi
apparaît mais il est contre-balancé pur celui de l'assemblée
des anciens et des guerriers. Le roi Ho lui est subordonué
il en est justiciable (\>. 103) il peut même être déposé par
elle. M- Spieth nous raconte en détail une affairede ce genre
ip. 148.1.
Cette assemblée, surtout chezles Ewhé, a une organisation
religieuse. civile et militaire (voir les documents, p. 142 et
suiv., ot'i l'on voit le peuple déposer un premier ministre). Il
y a, d'une part. les dignitaires, porteurs des sabres du roi et
de la commune, hérauts des rois, des communes, des divers
ordres dont il va être ensuite question leur rôle est d'appa-
rat. Les groupes vraiment actifs sont formés par les chefs de
clans, tsilsiwo, les chefs militaires et civils, amegawo,qui,
tantôt, sont confondus avec les premiers et, tantôt, en sont
distingués, sans que nous puissions savoir si leurs fonctions
sont différentes ou si ce sont deux noms donnés à une même
fonction. C'est en eux que réside l'autorité morale. Mais il
SÏSTftWM ESKTMollAL'X
11!IIIllll.il.1 SU

leur faut faire ratifier leurs décisions par les deux autres
parties de l'assemblés ht connuune, ensemble desl'hommcs
libres, et leumohairn,ht troupe, lus militiiires'[p. 137, 115), ce
que l'siuteur appelle lu juiiyc Maniwltuft (p. lO.'ii.Ce sout les
jeunes gens qui forment l'armée, sorte 'le légionnaires qui
détiennentlii puissance nationale. Malheureusement, sur la
manière dont ils sont organisés H dont ils vivent, M. Spielh
est sobre de renseignements. C'est certainement autre chose
qu'un simple prytnnée. Ils habitent dans uiiejinaisonspéciale
(voir Westet'itifiun, ad tciir, p. 4iO). Nous soupçonnons
même qu'ils doivent avoir des mœurs particulières et c'est
peut-être ce qui explique In silence que les informateurs
de M- Spietli ont observé à leur endroit. Il s'agit donc, très
vraisemblablement, d'une maison d'hommes. Le fait est tout
à fait certain pour ce qui concerne les Habé. Desl'âge dusept
ans, le jeune garçon vient vivre dans cette maison spéciale.
y reçoit l'ùduciiljon militaire, civile et religieuse,est circoncis,
initié auxreprésentations des esprits et à fustige des musqués
(iJespIngnes,p. 208, 3I8|. 11y est visité aussi souvent qu'il se
peut par les filles dela tribu.
Autrefois, tous ces peuples ou bien ont formé des royaumes
importants (c'est le cas des Ilabé), ou ont fait partie de
royaumes très importants'c'est les cas des Ho qui out été
alternativement sujets des Eviiê et des Ashanlii. Le pouvoir
royal étail naturellementplus étendu qu'aujourd'hui. Il y eut
jadis un Har-Hogon,prêtre-roi du feu chez les Ilabé, dont la
puissance s'étendait au loin iDesplagnes,p. 314el suiv.î. Mais
maintenant encore, les fonctions religieuses du Hogon sout
très marquées les rites de sou sacre et de ses funérailles, le
secret qu'où garde sur sa mort, comme sur celle du wiutu
des llo iSpielb, p. IO7j,tout cela montre que le roi-prélru est
déjà. à quelque degré, un dieu. Chezles llo, il esten relations
directes avec lu ciel, Mnwu i'p. 162, Maislà où cette identifi-
cation est le plus complète et le plus systématique, c'est au
lias-Niger. Il n'est pas de petit chef de tribu ou de village qui
ne soit environné de multiples interdictions. 11est invisible,
ou. du moins, n'apparaît qu'à deux des grandes fêtes agraires
(Léonard, p. 371, 133) et il est remarquableque rime dt: ces
iètes est celle du dieu de justice dont il est l'incarnation. Nous
tendons a croire que, si le roi est invisible, c'est à l'imitation
du dieu du ciel et de la justice. Si cette hypothèse est exacte,
elle permet de concevoir les relations étroites qui unissent le
K. DniKiiKm. Anni'i- >o.:i.il., »Ofl-l!U)!i. il
323 l'année sucioi-oiîiyi-K. 1906-ltios

mythe du roi-prêtre-dieu et les premières notions de l'oblign-


tiou et de la loi.
La famille. Les renseignements qui nous sont doiiuéssur
la famille souffrent malheureusement de l'indétermination
dans laquelle M. Spieth lui-même laisse la terminologie. Le
mot de Slmnm est employé pour désigner une grande société
d'agnats, le clan. lu famille restreinte, sans qu'on sache tou-
jours duquel de ces groupes il est spécialement question. Le
type normal de la famille parait être une grande communauté
d'agnats, vivant ensemble daus un (iehôft, possédant et
exploitant d'une manière indivise les biens fonciers. Maisle
droit successoral porte encore fortement lit marque du droit
utérin, Les champs sont la propriété collective des agnats;
ils sont incessibles, s'il n'y a pas cousenteiiient unanime (te
tous les membres mâles du groupe (Spieth, p. llâj; les
agnats out, en ce cas, un droit de réméré. Mais les biens
meubles se transmettent en ligne utérine ce sont les oncles
maternels, soit du père. soit de la mère qui héritent (p. 1 18j.
La femme jouit d'une large indépendance elle est maltresse
de ses meubles ou, tout au moins, n'est comptable de la
manière dont elle eu dispose qu'à ses parents it elle. Peut-être
les droits étend us dontelle jouit sous ce rapport se rattacheut-
ils à la situation qu'elle occupe sur le marché. Quand il a
y
divorce, les enfants Suivent tantôt le père et tantôt la mère;
le plus souvent il y partage. Les traces de descendance
utérine sont particulièrement marquées dans les familles
royales des Ewhé, et surtout à Matse (p. 78t,i.
Quant il la famille restreinte, elle ne joue presque aucun
rôle chez les Ewhé. Cependant, quand il arrive qu'un homme
a acheté un champ avec ses biens propres, soit avec les
meubles qu'il détient de ses parents maternels, soit avec cer-
tains bénéfices personnels qu'il lui est permis do faire dans
des conditions déterminées ip. II2t, le bien ainsi acquis
passe au fils. Mais ce droit ne dure qu'une génération.
Quandle fils meurt, le bien revient au patrimoine indivis des
agnats. A Matse, même dans le cas ot'i il y a héritage du
fils. ce sont les neveux utérins qui reçoivent alors la plus
grosse part (\>,788;. Mais, dans le Bas-Niger,il y a de remar-
quables droits de primogéuitiire en faveur du fils aîné
(Léonard, p. 394-393).
Le droit criminel parait peu développé. On dirait que le
système des épreuves judiciaires est arrivé presque partout»
SVSTÊBKS1IMUDIQOT»ET BOIUUX 323

remplacer l'appareil des peines et des procédures. Ou notera


chez les Ho une remarquable procédure de mise à mort
sym-
bolique on « tire dnus le soleil » et la mort du coupable
s'ensuit (Spietli, p. Utij.
Nousavons encore trop peu de renseignements sur la situa-
tion que les forgerons occupent dans ces sociétés ils forment
une caste dont MM.Léonardet Desplagnes marquent bien les
rapports avec le dieu du (eu.
M. Spieth nous donne une excellente collection de fables
morales et de proverbes. AI. Léouard nous présente des
mêmes faits un tableau qui n'est pas sans intérêt, .bien
qu'embrouillé d'obscurs développements. M. M.

LE P. A. JAUSSEN. – Coutumes des Arabes au pays de


Moab. Paris, Uabalda, 1908, viu-448p., in-8°.
A. MUSIL. Arabla Petrœa. III, Ethnologischer Reisebe-
riclit. Vienue, Kaiserliche Akademie der \Viss8iiscliaften
(Holder), 1908, xvi.380p., in-8°.
En exposantle systèmereligieux des Bédouins, nous avons
eu déjà l'occasion de constater que le régime du clan subsis-
tait chez eux, dans ses cadrescomme dans son esprit.
A la base de l'organisation sociale se trouve la famille,
'(ilwl,qui comprend tous les agnats habitant ensemble sous
l'autorité d'un même chet (J.. p. 1 1sq.). Mais, de même que
la tente fait toujours partie d'un camp, In famille ne se suffit
pas à elle-même. La véritable unité sociale est la hamoulekou
àiineh ces deux mots, souvent équivalents, désignent dans
certaines tribus, l'un ie clan, l'autre une subdivision du clan
(J., p. Il 1 sq. M., p. 2S).Leclan comprend un ensemble de
gens unis « par le nom et par le sang J), suivant la formule
caractéristique de l'adoption (J., p. MB;M., p. 27); ce double
caractère se justifie par la descendance fictive d'un ancêtre
commun, généralement éponyme. La réunion de plusieurs
clans tonne la tribu, kubilch,qui peut elle-même entrer dans
une confédération, brtlidek(M.,p. 112, 386). Maisces
groupe.
ments politiques supérieurs au clan sont lâches et instables
il faut des circonstances exceptionnelles pour leur donner
quelque cohésion. D'ailleurs le clan sert de modèle il toute
communauté, quelle qu'elle soit la tribu prétend, elle aussi,
à l'identité du nom et du sang, à la dérivation d'un ancêtre
unique fJ., p. 107sq.; M., p. 20 sq.). Aussi est-il très difliciie
324 L'AXNKB iUUtMUO»
SUCIOLOUIgt'B.
de distinguer, autrement que par leur étendue, les divers
groupements qui, s'emboîtant les uns dans les autres, consti-
tuout la société bédouine d'où uue terminologie très flot-
tante nos deux auteurs emploient à peu près Indifléremment
les deux mots de tribu et de clan que nous sommes habitués
à distinguer.
Tous ces groupes, depuis la famille jusqu'à la tribu, se
recrutent exclusivement par les mules. Si la famille utérine
a existé chez lesanciens Sémites, comme le croyait Koberlsoii
Smith, elle n'a guère laissé de traces citez tes Bédouins de
l'Arabie Pétrée c'est tout au plus si nous avotts it signaler le
rôle important joué dans la cérémonie du mariage par l'oncle
maternel de lu liancée (M., p. 18!),20. Les femmes entrent
à peine dans la constitution de la famille contrairement it la
loi écrite, la veuve et les filles n'ont poiut de part légale à
l'héritage. Mais le droit exclusif du père sur les enfants n'im-
plique pas que son autorité soit absolue les enfants appar-
tiennent au clan, noniiu père; il lie peut ni les tuer. ni ies
vendre, ni les déshériter, de même qu'il ne peut pas disposer
à son gré du patrimoine (J., p. 2Usq., 27: M.,
». 213 sa
349 sq.
Le mariage a généralement pour condition le paiement du
mahai; prix de la fiancée(J., p. 4S sq. M., |j. ISi sq.; mais
il a. au plus haut point, le caractère d'un acte religieux sacri-
fices, onctions de sang, tabous remarquables des fiancés et
surtout des nouveaux mariés(J., p. 34 sq., 3'»i sq.; .M.,
p. 193 sq., 200). Le lien conjugal est unilatéral, non réci-
proque seul le mari peut le rompra en prononçant la formule
de la répudiation ij.. p. '17sq.; M., p. i\i). Mais le
mariage
ne fait pas sortir complètement ta femme de son clan et de sa
famille elle retourne chezses parents, si elle est nialtraitén ou
répudiée, et à la mort de sou mari, quoique le lévirat existe
dans quelques tribus 'J.. p. 26sq., 118; M., p. 173). Si une
femme commet un meurtre, c'est sa famille, non son mari,
rjui est responsable (M., p. 8CK,. – Les prohibitions matri-
monialessout extrêmement réduites; même, l'espèce d'etidn-
garnie que les anciens textes arabes nous font connaître est
encore admise et pratiquée par les Bédouins. Choque individu
peut revendiquer, à l'exclusion de tout au Ire prétendant, une
jeune fille de son clan, et notamment sa cottsiue, binV ummi;
ce droit est d'autant plus strict que la parenté est plus
proche
(J., p. -48sq, M., p. 174/.Fince cas, du moins dans certains
SÏSTfcMK-i KT XOGMUX
JrRIDIQCRS 8?5

clans, la coutume interdit aux parents de lu femme d'exiger


le mahar, ou, du moins, il est beaucoup plus réduit que s'il
s'agissait d'une « étrangère » (J., p. 49; M., p. 184 sq.i. Cette
institution puriill liée au faitquc chaque clan formeun groupe
à peu près autonome, extrêmement jaloux de son indépen-
duuce et de la puretOde .son sang.
Chaque clan impose à ses membresle devoir d'accrottre ou
de maintenir son prestige et sa puissance. Les poètes exaltent
sa gloire et rabaissent ses rivaux (M-, p. 233 sq.). Chaque
tribu, chaque clan a un cri de guerre spécial, qui sert de
mot d'ordre et de ralliement (M., p. 3H(isq.i. En cas de
meurtns tous les gens du dan sont obliges « de fuir et de
poursuivre », c'est-à-dire qu'ils sont exposés et astreints
solidairement ii la vengeance du sang versé M., p. 116; M.,
p. 2(5 sq,j. Toutefois,si le meurtrier et la victime appartien-
nent à la môme tribu ou à des tribus alliées, la vengeance ne
pèseque sur les parents en ligne directe et les collatéraux jus-
qu'à la cinquièmegénération M., p. liJHsq., 220; M., p. 301).
La responsabilité collective ne cesse que si, par un acte
exprès et public, l'individu se sépare lui-même de son clnn ou
en est expulséviolemment (3., p. 22(5sq. M,, p. 33a, 300).
La solidarité du clan se manifeste aussi dans l'ordre écono.
mique. Cher,les Bédouins, le bétail appartient aux individus;
mais le trdupeau entier est marqué du blason de la tribu ou
du clan, wnsui 'J., p. 236; M., p. 2Hsq.). Les pâturages et les
poiutsd'eau sont la possession indivise de la communauté (J..
p. 69, 117sq.,[239sq. i. Mêmecitez les Arabes demi-sédentaires
adonnés à l'agriculture, comme ceux de Kérak, la terre culti-
vable est encore souvent propriété commune de la tribu, qui
la répartit annuellement, par voie de tirage au sort, entre les
clans, puis entre les familles mais la propriété individuelle
est ici en progrès (J., p. 238; M., p. 87 sq., p. 293 sq.). Les
différences économiques au sein du clan. du moins chez les
purs Bédouins, sont pou importantes la richesse est précaire
par suite des razzias perpétuelles et elle oblige à des libérali-
tés souvent ruineuses le pauvre a droit à l'hospitalité et à
l'assistance de ses parents ou du chef du clan M., p. 273 M.,
p. 2">3sq.,p. 307). I.
L'égalitarisme est un trait caractéristique de celte structure
sociale. Les Arabes ont des esclaves et les fellahs, attachés à
la glèbe, sont souvent de véritables serfs mais, à l'intérieur
du clan, Il tous se valent, le cheikh comme le pâtre » et le
326 l.'AXXKBS0UI0LQ0IQIÎ8.MU6-19ÛD

prix du saug est le même pour tous les hommes libres du


clan (J., p. 123,«224sq., 243. Mij 3^ p. 36C Toutefois
sq
cette équivalence des personnesn'exclut pus toute hiérarchie;
dans la tribu certains clans, dans le clan certaines familles
jouissent d'un prestige et d'un ascendant particuliers. Le
cheikh, qui n'est souvent que prima ïnter pares, acquiert par-
fois par sa valeur, par le nombre de ses
parents et « sui-
vauts », une influencepersonnelle considérable,
qui s'exerce
sur toute une tribu et mêmeau delà il
plante sa lance sur la
« terre ensoleillée» de lit tribu et en fait son domaine
privé
que cultivent pour lui des fellahs il a ses partant», ses
alliés, ses protégés, ses tributaires, ses serfs; sa puissance se
transmet héréditairement, sinon dans sa lignée directe, du
moins dans sa famille II, p. 127 sq., et. 69 et ^37;
M.,
p. 334 sq.). Ce sont les rudiments encore incertains d'une
organisation féodale.
L'hospitalité confère temporairement à un étranger isolé,
quelquefois poursuivi, les garanties et les droits qui n'appar-
tiennent en principe qu'à l'homme encadré dans soit clan |J.,
p. 79 sq. M., p. 357 sq.). La « protection », dahalnh i– en-
tréei, est une hospitalité prolongée et spéciale, par
laquelle
un individu ou un groupe, lésés ou menacés, remettent leur
cause entre les mains d'un plus puissant <J., 208
p. sq., 216;
M., p. 344 sq.), Il est dillicile d'exagérer l'iullueuce de ces
institutions sur la vie sociale des Bédouins; elles
suppléent
dans une large mesure à l'absence d'un pouvoir central cons-
titué et, en élargissant les conflits, empêchent les abus de
force elles font contrepoids aux strictes exigences de la ven-
geance du sang et favorisent la composition elles introdui-
sent au sein du clan lui-même un principe de liberté indivi-
duelle car elles offrent à tous, même aux femmes et aux
esclaves, un recours contre la tyrannie du
groupe (J.,
p. 208 sq.,221 M., p. 2||, à25,i.Ces coutumes si importantes
se fondent sur des représentations
complexes, dont le carac-
tère magico-religieuxest hors de doute.
L'étranger est doué,
au moins" virtuellement, de pouvoirs
mystiques en ne le
satisfaisant pas, en lui manquantd'égards, on risque d'attirer
sur soi une malédiction terrible <J., p.
84sq., 386 M., p. 310).
Mais surtout, quiconque entre dans la tejte. ou eu touche
les cordes, et en invoque le possesseur selon certaines for.
mules et certainsgestes, est investi par là-rnème d'un carac-
tére sacré la sainteté qui appartient à la tente et
qui en fait
.ÏSTBUESJUMUlUimKTS1OHALX 33?

uu véritable asile se communique parle contact l'iiôle et au


suppliant sa requôte est une contrainte il laquelle oune peut
se dérober sans forfaiture (J.. p. IU9sq., 20!), 214sq.,
238 sq., 339 »i{. M., p. 344 sq.i. Le sacrifice, par loquet
l'hôte est « honoré et lié », et lu eommeûsalité achèvent de
donner à la relation d'hospitalité quelque chose de sacramen-
faire (J., p. «0, 849 sq.y. Tout dommage causé à l'hole ou au
protégé porte directement atteinte ù l'honneur du protecteur
et expose des poursuites de sa part.
Cette notion d'honneur domine toute lit vie morale des
Bédouins, qui contrastent avec les fellahs plus souples et di-
rigés surtout par l'intérêt (M., p. 2't sq.) c'est que la prépon-
dérance de cette notion est liée à des conditions sociales qui
ne se trouvent que chez les uomades. Chaque membre du clan
a en dépôt un patrimoine moral intangible qui s'attache, eu
particulier, au nom, au visage, à la tente; si, par sa faute ou
en su personne, ce dépôt sacré est «Itéré ou diminué, il
déchoit dans sa propre estime et dans celle des siens. L'action
honteuse, l'olTensenon vengée entament réellement l'inté-
grité mystique du coupable l'homme dont l'Iiouueur « été
« coupé » doit fixerasa tente un drapeau noir et il est quel-
quefois barbouillé de noir par les femmes le déshonneur
peut aller jusqu'à priver un individu de tous sesdroits et à le
mettre au hau de tout le monde (J., p. 89 sq., £05, 232 sq.
M., 887 sq., 373). L'honneur se rétablit tantôt par une action
d'éclat, tantôt par la vengeance ou la composition qui im-
plique l'humiliation del'ofleuseur; la réparation donne lieu à
la cérémonie du « blanchiment » qui lève l'interdit et réta-
blit la paix iJ., p. 92, 200 sq., 222 sq., cf. 28»; M.,
p.208sq.,3G3sq.).
Signalons encore des renseignements intéressants sur la
procédure judiciaire (serment, ordalie, témoignage, J.,
p. 188 sq., 439; M., p. 887 «j.) et sur le droit péual (J.,
p. 220 sq. M., p. 335, 8l7sq.i, sur les relations entre les
tribus IJ., p. 149sq.; M., p..WJsqw, sur les rapports des
Bédouins avec les fellahs (J., p. 240 sq.; M., p. 22 sq., 81i,
369sq.). R.H.

ifltOW.NJ.-M.. Maori aad Polynesiaa; their origin, history


and culture. l.omlon,llutuiiiiisou,1907,in-8",332p.
THOMSON (H.). The Fijlans a study of the decay of oustom.
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328 L'AXXRK SOt:tOLOU~~E, ~0.)tW)

1.1a ta 9 vri Ir
t~~<jt-
KOni.RR'}. bas Recht der Dajaks in Bornéo. Zeittehr.f.
vergleich.Utxhtmviss.,X.VII,lui», |>.290-31
!>.
1IOMKACY A. Étude sur les coutumes et la tanguedes La»
Tl. ltullctinde 11k. Fi: <flUln'iue-i triait. iyOO,VI, p. i7l scj.
iKxogamiv<toclan, L-virutdes frères «ululs, inulliplitilû des
Anii's,n''inu;iriHiUon
<|<>l'uni' d'enlrc ellesdans k>.<
i-nlauU,ntc).

D. Systèmesmoraux cl juridiques nationaïu.


l'«rMM.PlL'CONXKT
l't tiKIIXKT.

Il. UARESTK. Nouvelles études d'histoire du droit,


III0série. Paris, Larose, lOUti,ix-351p., in-K°.
Cette troisièmesérie d'études, la dernière, nous dit l'auteur,
est composée,connue les précédentes, d'articles parus dans le
Journal ikx Sttonnt*ou dans la Nouerlle Hcouc d'histoire du
droit et consacrés à l'analyse de monuments juridiques ou à
des comptes rendus d'ouvrages importants. J'ai déjà dit
(AnnéfSoc, VI, li)0l-l'J02, p. 310; quels services rendaient
ces travaux etattssi combien il était regrettable qu'un savant
si exceptionnellement renseigné s'abstint systématiquement
de toute recherche théorique. La seule idée doctrinale
que-
l'auteur laisse percer, c'est celle d'un fonds commun d'insti-
tutions juridiques, à f'origine de toutes les civilisations, au
inoins dans l'intérieur dune môme race, et d'une évolution
parallèle. quand il cherche les origines de cette évolu-
tion. il semble que ce qui t'intéresse le plus, c'est, non pas la
filiation des types telle que peut l'établir lit méthode compa-
rative, mais l'anciennetéabsolue d'une législation. Parlant de
la lui d'Hammurabi, il insiste sur son antériorité chronolo-
gique par rapport la législation mosaïque, à la lui de Gor-
tyne, au Codechinoisou il Muuôu, commesi lit date ici était
la chose principale. I.'neautre préoccupation dominante chez
M. Dareste est celle do l'inllueuce que les législations ont pu
exercer les unes sur les autres icf par exemple son étude sur
les origines du droit anglais, p. i¥) de ce vol u moi.Il pense
d'ailleurs que la ressemblance entre tleuxiuslilutioiis ne s'ex-
plique pas nécessairement par un emprunt d'une société à
l'autre, que « le droit a pu se former simultanément de la
même manière les deux pays, sous l'influence de cause»
identiques, et que la supposition d'un développement paral-
lèle est au moins aussi probable eu elle-même que celle
SVSTKMK-S
JURIDIQl'KJ ET MUIUUX 3Ï0

d'une filiation ». Cette proposition, semble-t-il, pourrait être


formulée moins timidement et considérés comme sicqulse.
Mais alors, pourquoini; pas donner uotumt! but ta science
lu détenui nation des types de causes et des types de dévelop-
pement?
Je ne vois pus qu'il soit utile de donner ici des analyses de
ces analyses, ni possible d'apporter, à l'occasion de ces
études, une contribution à la connaissance de quelques insti-
tutions déterminées; je tue bornerai donc à faire l'inventaire
du livre. Le Code d'Ifammurabi, les lois des Wisigollis, Bur-
goadeset Frisons sont aualysés. Le droit criminel en Grèce,
les origines du droit anglais, le pouvoir royal sous les pre-
miers Capétiens, Henurnaiioir, les établissements de saint
Louis sont étudiés d'après les livres de (ilôt/ l'ollock et Mai-
tliiud, Lucliaire, Saltnou, Viollet. D'autres travaux, plus ou
moins récents, sont résumés, sur l'histoire du Parlement de
Paris, les origines de la noblesse en France, la vie rurale et
provinciale de l'ancienne France.
Trois articles fournissent des documents originaux, à ajou-
ter à tous ceux que l'infatigable curiosité de M, l). a nis en
lumière. Le premier et le plus important est une traduction,
d'après l'allemand, de rapports écrits eu langue albanaise par
deux prêtres catholiques qui ont observédirectementles cou-
tumes des montagnards albanais vivant près de Scutari. Il est
précieux surtout pour l'étude du droit criminel, et notam-
ment de la vengeancedu sang, encore eu pleine vigueur dans
ces tribus. – Le second est une analyse étendue des lois des
Ilomérites ou Himyarii.es, société chrétienne de l'Arabie du
sud-ouest, qui correspond à l'ancien royaume de Saba; elles
datent du \T siècle et s'inspirent du droit romain des Codes
et des Novellesel du lu morale de l'église. ICIlescontiennent
surtout des dispositions de droit crimiuel et de police; les
délits sexuels, la police des mœurs, les dispositions protec-
Iricesdes esclaves', femmes, enfants, bétes de somme, les
rùglemeuls d'assistance publique y occupent une place
remarquable. – Letroisième enfin contient le texte et la tra-
duction de la/>.r Ilhoiliu,monument important du droit ma-
ritime du moyeu dge, déjà tenu en haute estime par les
ïlouiains de l'époqued'Auguste, et dont M.D.caractérise ainsi
l'esprit « Il a substitué au droit romainun système nouveau
et complet. Le principe romain de la gestion d'affaires et de
l'itetia rweitoiïa a fait place à uu régime d'association et
330 l'ANXKBS0U10LGIUW&,
1906.MO»

d'assurance mutuelle entre toutes les personnes intéressées


dausuu voyagede mer». il. V.

JONES <\V.Il. S.). Greek Morality in relation to Ins-


titutions. An Essay. Louduu, Bluckie, ti»0(>, jn-S",
183 pages.

Eu quatre chapitres, l'auteur examine la moralité et lit


religion, lit moralité dans lit société, dans lit famille, pu(in lit
moralité privée. Defait, le titre do l'ouvrage est assezinexact:
cela vient de ce qu'aucun des trois termes n'eu est défini.
Sans doulu, M. Joues oppose, daus lit préface, Elhicset Mora-
Uty, le premier désignant les systèmes de morale mais la
détermination du second est toute négative; ou pouvait
entendre par ce mot, soit l'étude des notions morales considé-
rées comme une réalité objective, soit l'étude de la moralité
au sens strict, c'est-à-dire du rapport, variable suivant les
divers états de société, entre l'idéal qu'expriment ces notions
et la pratique des individus. Ce n'est, à vrai dire, ni une
ni l'autre qu'entreprend Ai. J., mais plutôt celle des « idées
morales », comme on dit encore souvent chez nous, d'un
terme vague impliquant ce postulat ù peine dissimulé qu'il y
a des vérités éternelles dont il importe seulement de se
demander coin mentelles se spécilieutau cours de l'histoire.
Quellessont, d'autre part, les « Institutions»? La famille,
forme d'association, ne peut guère être m'se sur le môme plan
que la religion, système de dogmes et de pratiques. Le troi-
sième chapitre traite des rapports de l'individu et de « l'État»u
mais d'une façon tout idéologique, et dans le dernier il n'est
même plus parlé d' « institutions ». – Quaut au rapport de lit
morale avec les institutions, la rédaction même des sous-
titres atteste qui) n'en est question que dans le premier cha-
pitre. Maislà même, la méthode idéologique de l'auteur est
trop seusible. Décidé ne pas traiter la morale comme nue
réalité objective parce qu'il ne voit dans la société que des
individus, il ne peut trouver un principe d'unité et d'expli-
cation que daus des entités scolastiques celle de religion
par exemple. Le vrai problème serait de définir le rapport
entre faits moraux et faits religieux M. J. préfère se deman-
der quelle a été sur la morale l'influence de la religion. Ainsi
posée, la question se ramène à celle de savoir comment la
croyanceaux Dieux, à une sanction divine, à l'immortalité,
SYSTÈMES KTMORAUX
Jt'lllOJUUKS 331

a pu agir sur la moralité. Ainsi l'affaiblissement de la fol


aurait déterminé, vers lit fin du V siècle, une crise morale
que la philosophie, assumant la succession de lu religion,
aurait pris à tâche de résoudre ip. 14et suiv.).
Ou comprend qu'ainsi inspiré, et maigri' un réel ellort
pour voir la morale ailleurs que chez les philosophes, c'est
toujours à ceux-ci que revient M. J., et non poiut pour
situer leur pensée par rapport aux nullités sociales, mais
pour n'eu retenir que des expressions superficielles et, à
tout prendre, inexactes {!' « utilitarisme » de Sociale par
exemple, p. 15, i>4,0.1). Suus doute, t'auteur ne s'interdit pas
ci'niterpréter, tuais ses explications, strictement « histo-
riques », sont vraiment trop extérieures [p. 58 c'est parce
que l'éducation, avec le progrès des lumières, était devenue
iusullisiinte qu'Aristote lui accorde une pince si importante
p. 63 l'esprit utilitttire de la morale socratique serait dit aux
instincts égoïstes que manifesta lit guerre du Péloponèse).
11 serait injuste de ne pas tenir compte du caractère
d' « Kssay » et de lie pas reconnaître que, dans le détail,
M- J. a le sentiment parfois des problèmes qui se posent
liiinsi, p. 12îi, il cherche à analyser et il expliquer l'amour du
vrai chez le Gceci. Mais, nu total. ht science ne saurait retenir
beaucoup d'une étude qui veut rester eu dehors d'elle.
L. (i.
CROISET(A.). Les démocraties antiques. Paris, Klatn-"
rnarion, 1909,in-)8, Î-J39pages.

L'ouvrage traite, dans sa plus longue partie, de la démo-


cratie athénienne. C'est à dessein il Home, la démocratie a,
pour aiusi dire, avorté les démocraties grecques, eu dehors
d'Athènes, n'ont eu qu'une existence précaire et agitée
l'athénienne s'est développée avec une continuité et une régu-
larité dans la paix qui donnent à ce cis privilégié lu valeur
d'une « expérience sociale ». Dans un chapitre préliminaire,
l'auteur retrace l' « évolution politique d'Athènes »; vient
ensuite l'étude essentielle divisée comme suit 1°lit constitu-
tion athénienne c'est le « cadre »; 2" l'esprit et les mœurs
de la démocratie athénienne il s'agit des « qualités natu-
relles n de l'Athénien qui, développées par 1*« éducation »,
constituent la substance môme de la réalité étudiée; 3" les
actes et les résultats, qui apparaissent comme la conséquence
de cette psychologie.
333 i.'a.vniH; socioi.oniyiB. iwi-juos»

Inutile de dire que l'ouvrage se lit avec un agrément de


bon aloi. C'est la méthode qui doit nous intéresser ici. A
elle seule, la division que nous avons relatée attesterait l'es-
prit du livre. Qu'une constitution politique soit considérée
comme un cadre à l'intérieur duquel se joue l'activité plus
ou moins spontanée des individus, cela implique qu'elle est
relativement indépendante de tout l'ensemble de lit réalité
sociale elle pourra et devra s'expliquer idéologiquement,
tantôt par le génie de certains novateurs Surtout Solou
aussi bieu Solou a-t-il « tracé un modèle Méat » qui n'eutt
d'elllcurrequ'assez longtemps après lui, p. 88-5li, tantôt par
l'action des partis (p. Ouet suiv.l, tantôt par un idénl collec-
tif (\). 108et suiv.). Au fond. M. Croiset veut étudier une
forme politique pour elle-même. Est-ce légitime? De fait, le
tenue i(nnoera(ieaurait besoin d'ôtre analysé. Il désigne un
état politique mais il implique un état socinl. Si la démocra-
tie commence avec Solou, c'est qu'avec Solon s'achève le
mouvement séculaire par quoi la famille est intégrée dans In
cité intégration d'un mode très défini qui, en brisant les
cadres sociaux antérieurs, mnnifeste comme un retour ;'i l'in-
diflûrencialiou primitive, qui substitue a la famille un groupe
plus large, mais d'une unité également concrète (que la
démocratie grecque lit plus typique soit précisément celle qui
se vante toujours de son autoclilojiie, il y a là un point de
départ, peut-être, à la réflexion). A concevoir que le droit
public ne se suffit pas à lui-même, qu'il exprime – sous uue
forme abstraite, intellectualiste, mais aussi beaucoup moins
transparente qu'on ne le croit ce qu'il y a de plus général
dans une structure, on gagnerait d'éviter les interprétations
idéologiques dont nous ne pouvons plus nous contenter; les
problèmes tout au moins se situeraient 'rôle du tirage au sort,
p. 81 et suiv.; importance cardinale de la fonction judiciaire
exercée collectivement, p. 00 particularités de l'organisation
finaucière.commei:»&Sfti;,liturgies.antido8e, p. 102-103, etc.).
Mais a>ifond, M. C. entend distinguer dans la société les
choses qu'il dit seules « objectives » et qu'il uecroit péné-
trées de psychologie que par accident– et les individus qui,
considérés même abstraitement, manifesteraient un certain
/jrnii- collectif. De là le rapport entre la « constitution » et
1' « esprit «, entre l' « esprit » et les « actes «. Et ceci sup-
pose ce qu'on appelle une, « conception de l'histoire ».
Or M. C. a voulu d'abord s'expliquer sur cette « concep-
bVSTÈUKS ET MOHAUX
JUmUlIjUKS 31)3

lion » et il l'a fait, eomme il lui convenait, en une forme


attique, ù lu fois séduisante et lucide l'introduction est un
exposé de principes qui ne laisse pas d'être entraînât)t. M. C.
y définit sou attitude pur opposition à la sociologie. A cette
dernière il reproche 1° d'être encore hypothétique i" de
« laisser échapper une trop grande part de lit réalité », à
savoir l:i réulité psychologique; 5J"(l'échouer à l'expliculion
du particulier. Le rôle de l'llistoire sera d'interpréter le par-
ticulier elle ne pourra être, qu'uue « demi-science », parce
qu'elle comporte une part nécessaire« d'intuition, de divina-
tion subjective ». Danscette attitude, il semblerait parfois
qu'il y ait surtout de l'imputieuce, le besoin d'une sécurité
intellectuelle, même bou marché « eu attendant, faisons de
l'histoire ». Mais il y a autre chose pratiquement, .M.C.
paraît un peu ubsédé par une conception scolaslique de la
sociologie. 11est convaincu, en somme, de deux idées, d'ail-
leurs connexes d'abord, que lu lui sociologique est chose
transcendante, qui gouverne de haut (d'où lu représentation
d'une matière opposée à cette forme et rebelle a l'intelligence
purement scientiliquej ensuite, que la loi n'atteint que des
faits « extérieurs m,qu'elle n'a pas un contenu psychologique.
Ivst-ilbesoin de faire remarquer ici que lu loi est pour nous
tout autre chose et qu'elle peut être observée même dans des
cas singuliers? Car il se peut que les conditions de l'expé-
rience ne nous permettent de saisir le phénomène à l'état
pur– scieulifiqueuieut déliui – que dans un cas nous dirons
mômealors que la loi coïncide avec le phénomène mais nous
ne l'atteindrons jamais que par les munies procédés d'élabo-
ration conceptuelle et d'observation méthodique. Absolument
partant, une « liaison nécessaire » entre des « faits uniques »,
au seus où le dit M. C., est chose impensable.
On conçoit que M. C. eu arrive à voir dans la psychologie
de chaque peuple une donnée irréductible, qui explique et
ne s'explique pas il n'hésite pas à dire, discutant contre
M Dtirkheiin, que les Athéniens ont eu une véritable grâce
(p. 12i. N'est-ce pas là recourir u l'inintelligible? Cette gràce
u'u rien de surnaturel, assure M. C. s'il veut dire que
chaque peuple manifeste un caractère défini, l'école de
M. Durklieiin ne le niera certes pas puisqu'elle fait de l'étho-
logie collective uu objet d'étude s'il entend que ce qiwl prtt-
piium n'est pis entièrement déterminé par l'action des lois
générales et que ce n'est pas lit du surnaturel, où doue sera le
334 I.'ANNKK WCIOI,O(ilgL'K. IUOG-1909

surnaturel ? – M. C. est opposé a la conception de « races


biologlquement pures et distinctes » (p. 10); mais alors ou
sera le caractère d'un peuple? Une réalité ne se définit qu'on
se situant celle-là, si elle n'est pas biologique. ue peut être
que sociale elle est relative a une structure. M. G. pense
retrouver un Grec de tous les temps, très défini mais le
caractère qu'il lui attribue est chose très générale, et sans
efficacecar sans détermination. Cen'est pas une donuée posi-
tive que l'aptitude aux idées générales il faut spécifier et, à
moins de commettre le cercle vicieux qui consiste à expliquer
les institutions par lit psychologie après avoir induit la psy-
chologie des institutions, on doit essayer d'atteindre plus ou
moins directement les formes logiques de la pensée collec-
tive nous dirons des concepts de la morale, de la politique,
du droit qu'ils sont plus ou moins abstraits, plus ou moins
définis. Et nous ne le dirons qu'eu montrant de quel groupe
de notions ils procèdent, dans quelle forme sociale ils ont
leur principe, à quel champ ils s'appliquent, avec quelle
sûreté ou quelle incertitude nous les situerons dans une
réalité objective hors de laquelle ils seraient impensables.
Peut ôtre alors la «grâce » s'évanouirait-elle; peut-être trou-
veraitou 1' « intelligence » des Athéniens fort éloignée de lit
nôtre et que, si elle a conçu un certain « individualisme »
(p. 1 18,iiiiOs un « idéal do vie collective très noble, où la loi,
c'est-à-dire la raison commune, serait la règle suprême des
actions, et où l'individu cependant aurait un large champ
pour se mouvoir librement et développer toutes ses forces »
(p. 25Tj on n'en est peut-être pas très avancé pour l'avoir
dit cardes sociétés si diverses ont conçu cela! Ce qu'on ne
saurait faire, c'est unir en un concept commun 1' « individua-
lisme » des sociétés modernes et I' « individualisme » d'une
société antique, tout engagée encore dans une forme de soli-
darité si différente de la nôtre. L. G.

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KHAIS.S;f. – Slavisohe Forschungen. Abhandlungen ûber
Glauben. Oewohnheitsreoht, Sitten, Brœuche und die dm-
larenlieder der SCtdslaven.Leipzig, W. Heims, l«08, in-8».
V3lp.
KAItST{J.).~ Grundris8der Gesohiohtedes armenisoben Reoh-
tes. Xeilscln: f. verijl.Heehttw., 1900,XIX,p. 3t3-il<j.
IUKKAELK COItSO. Lasndliohe Oewohnheitsreohte einiger
GebieteKalabrieng. Mttehr.f. vtrgltkli.HeclUswis. J909, XXII,
p. -130-451).

IV. L'ORGANISATION
OOMKSTIQUKKT MATRIMONIALE
PurMM.DiBKiiKiii.
Du V,Hchoi.k.

A. – La Famille.
THOMAS.(Nohtiicotk \V.). Kinship organisation and
group marrlage in Australia. Cambridge, L'uiversity
Presa, xui-163 p., in-8°.
Du titre tnéinede cet ouvrage il résulte que deux questions,
330 l'a.n.nkk .snciuLMiiigi-u. ISHIMDU'J

différentes mais solidaires, y sont étudiées celle de In pa-


renté et celle du tuuriage dans les sociétés australiennes. Lu
première de ces questions se subdivise à son tour. L'urguni-
tiou de la parenté dépend, en ciïet, du système de filiation
adopté, déjà manière dont sont établis el entendus les rap-
ports de pareille. C'est le premier de ces deux problèmes que
l'aiilt'iir truite tout d'abord.
Pour les raisons que nous avons eu souvent l'occasion de
développer ici-même i AnnéeSariolaijiijue,1, p. i'â V. 104et
suiv. V1I1, 132 et suiv.i, M. T. reconnaît que la descen-
dunee en ligne féminineparultuvoir très généralement précède
l'autre. Il réserve, il est vrai, la question de savoir si cette
lui très générale est sans exceptions .et déclare qu'il n'y a
aucune impossibilité a ce que la descendance par les nulles
se soit constituée d'emblée Mais il ne cite pas un (ail qui
autorise cette hypothèse p. U> Ce u'est pas la seule ques-
tion sur laquelle il arrive à l'auteur d'observer une altitude
sytéinaliqueineut hésitante qu'on a quelque mal à s'expli-
quer.
L'antériorité de lu tilisition utérine uue {ois admise, nu
moins eu principe, M. T. se demande quelle peut avoir été
l'origine de la révolution qui a donné naissance au système
opposé. 11croit la trouverdans la manière dont est constitué
le groupelocal. Kn Australie, le mari emmène sa femme chez
lui el, par conséquent, c'est dans la localilé où il est neet oi'i
il a normalement droit de cité que ses enfants naissent à leur
tour. Quand donc l'entant suit sa mère, c'est-à-dire quand il
est du totem maternel, le groupe local est formé d'individus
qui appartiennent à des groupes tolémiqiies différents; car
les adultes inities ne prennent généralement pas tous leurs
femmes dans un même clan. 11en résulte un véritable conflit
de .sentiments el de devoirs. Kn raison du totem qu'il porte,
l'enfant a des devoirs, et particulièrement importants, envers
sescototémislesqui. pourtant, peuvent habiter au loin; c'est
avec eux qu'il coopèrereligieusement c'est à eux qu'il doit
la vendetta. Mais.d'un autre côté, par le (ait même de la colin-
bilalioueldc la vie commune qu'elle implique, des liens se
nouent entre les habitants d'une même localité ils exploi-
tent le même territoire dépêche ou de chasse: ils ont les
mêmesintérêts des sentiments de sympathie tes rapprochent
Peu à peu le besoin se fait sentir que les obligations qui ont
cette origine priment les autres. Le seul moyen d'arriver à ce
I.'UIUIANISATIO.N Kï MATHUIOXIALK
DOMgSTlQUB 337

résultat, c'est que l'enfant soit rattaché nu mémo groupe toté-


mique que son père; Car alors groupe lotémique et groupe
local se confondent.C'est ainsi que le principe de lu liliiition
en ligne masculine se serait établi.
L'explication n'est certainement pus sans fondement. Mais,
si elle est acceptée, elle entraîne une conséquence que l'au-
teur ne semble pas avoir prévue. Si le fait que l'enfant nuit
chez son père devait déterminer l'institution de la filiation
masculine, inversement, pour que la filiation utérine ait <Hé
possible, il faut qu'il y ait eu une période dans l'histoire où
l'enfant naissait chez la mère, où, par conséquent, le mari
venait, d'une manière chronique ou temporaire, vivre chez sa
femme, Il nemanque pas, d'ailleurs, de faits australiens qui
tendent à confirmer cette hypothèse, que l'auteur écarte pour-
tant aprèsune critique embarrassée <p. lt>).
Les cadres fondamentaux de l'organisation familiale sont
les phratries et les classes matrimoniale?. La plupart des tri-
bus australiennes sont divisées en deux sections exoga-
miques les membres de chacune de ces divisions se considè-
rent comme unis par des liens de parenté qui s'opposent à ce
qu'ils puissent se marierentre eux.Ce sont les phratries. Dans
un très grand nombre de cas, chaque phratrie est subdivisée
a son tour en deux ou quatre classes qui correspondent à des
rapports de parenté plus définis. Toute cette organisation a
été trop souventétudiée ici pour qu'il y ait lieu de nous arrê-
ter plus longtemps à la décrire1. l,
C'est peut-être à cette question que le travail de M. T.
apporte la plus utile contribution, Il a pris soin de relever les
nomsque portent les phratries dans les différentes tribus aus-
tralienneset d'eu dresser un tableau synoptique. Il arrive très
souvent que des tribus distinctes, qui ne parleut pas le même
langage, qui même, parfois, sont très distantes les unes des
n u1res,se servent pourtant des mêmes mots pour désigner les
phratries. Ainsi les Tatathi, les Wathi-Wiithi. les Keramiu,
les Harkinji, les Wilya, etc., appellent également une de leurs
phratries Muquara et l'autrc Kilpara. Les systèmes de phra-
tries que l'on observe en Australie se ramènent ainsi à un
nombre restreint de types. Le tableau de M. T., qu'une carte
illustre utilement, permet de se rendre compte de leur
importancerespective et de l'aire géographique occupée par

1.VoirAnnieSociol.,».p. 5 -t sulv.:Vit),p. 118<4suiv.


lv. DrnKiiEiu. AnmVmhmiiI.,1900-1UU9. ii
338 1.'aSS'IÎK SOCIOIOGIQCR.«00-1909

chacun d'eux. Le même travail a été effectué pour les classes-


matrimoniales. Ou peut ainsi voir d'un coup d'œil où sont les
tribusà huit classes etcelles qui n'eu ont que quatre. D'autre
part, les classes soûl, elles aussi, des institutions partielle-
ment internationales. Des tribus différentes emploient
pour
les désigner une môme terminologie. Cette organisation,
comme celle des phratries, ne comprend donc qu'un nombre
déterminé de types dont ta carte rend sensible la répartition
sur le continent australien. Enfin, par une complication
bizarre, il se trouve que des tribus qui ont les mêmes noms
pour les phratries, en ont de différents pour les classes. Il y a
toute sorte de combinaisons et de recoupements étranges; une-
comparaison des deux tableaux permet de s'eu apercevoir.
Ces recherches patientes ne pourront manquer de rendre
des services aux travailleurs futurs. Les chapitres consacrés
à la question de l'origine des phratries et des classes nous pa-
rait avoir une moindre valeur.
Sur les phratries, M. T. adopte la théorie d'Andrew Lang,
telle qu'elle a été exposée dans Theprimai inw et The secret of
the totem. A l'origine de l'histoire, il met des troupes, dis-
tinctes et rivales, de primates anthropoïdes. A la tète de cha-
cune de ces troupes, il y avait un ancien qui régnait tyranni-
quement sur les plus jeunes. Grâce à l'autorité que lui don-
naient son âge et sa force, il monopolisait, pour son usage
personnel, les femmes du groupe. Les autres mAlesétaient
donc obligés d'aller prendre, manu militari, les femmes dont
ils avaient besoin dans des groupes étrangers; ainsi aurait
pris naissance l'exogamie. Avecle temps, ces rapts se seraient
transformés en échanges pacifiques et réguliers. Chaque
troupe se serait entendue avec une autre qui lui aurait libre-
ment fourni les femmes nécessaires, ù charge de réciprocité.
Des liens se seraient ainsi noués entre ces deux groupes,
naguère hostiles; peu à peu, ils se seraient rapprochés jusqu'à
devenir les deux moitiés d'uue môme tribu, c'est-à-dire deux
phratries proprement dites.
L'auteur croit trouver une confirmation de cette théorie
dans la manière dont sont géographiquement distribués les
noms des phratries. Elle implique que les phratries sont très

i. Maisnouaru-savonspourquoifci<Ue carte comprendtes n'-ftinnsui-ri-


'tantalesot leurnUriliuctierssystèmesde classeiliHeriuinés,
alorsi|ti«uuii.»
ne favori:!piwqui:rien îlecuitepartit de l'Australie.Laiirimi-reniiin|Ui:
à la«;arlc'luirt'prùiontp
s'appliquii lu distribution<Ii-s <k<filiation.
>>y*K-iiiv.<>
1,'oHIÎANIÏATfOXDOMBSTIOt'KET HATIUMÛXMI-K 339

anciennes, antérieures à l'organisation tribale, puisque la tribu


serait due à laeoalescencededeux phratries, prénlableiueut
autonomes. Or il arrive souvent que. daus deux tribus, une
des deuxphratries porte uu seul et même nom, et l'a titre deux
noms différents. Lefait s'explique sans peine, dit M.T., si la
phratrie est le fait primitif. lleprésentons-iious, en effet, une
de ces phratries indépendantes que l'on suppose avoir existé
à l'origine. 11 n'y a rien d'impossible il ce que, à un moment
donné, elle ait essaim»;deux colonies distinctes qui s'en allè-
rent s'établir sur des points difléreuls, tout en gardant l'une
et l'autre leur nom primitif. Qu'ensuite chacune d'elles se soit
agrégée, pourleséchanges matrimoniaux, à une phratrie dif-
férente, et deux tribus se sont trouvées constituées, qui
avaient un nom de phratrie, et un seul en' commun >p.Wi-6"7).
D'un autre côté, uous savons que deux tribus, de dialectes
différents, emploient parfois les mêmes noms pour désigner
leurs phratries. C'est 'donc que ces dénominations remontent
à uue époque très ancienne, où les langues n'étaient pas
encore différenciées. Ce qui semble être une nouvelle preuve
que l'origiue des phratries remonte très loin dans le passé
ich. v.).
Il nous parait inutile de discuter longuement cette hypo-
thèse uous avons eu déjà l'occasion de l'examiner ici même
il propos des livres de M. Lang '.voir .\hhw Socinlogiqut, X,
p. 406et suiv.). On lie voit pas comment elle peut expliquer
le caractère strictement dichotomique de l'organisation aus-
tralienne. Les phratries ne sont jamais qu'au nombre de deux
cependant, chacun des groupes simples de l'origine n'avait
aucune raison de, limiter étroitement le cercle de ses choix
matrimoniaux. Quant à la répartition géographique des noms
de phratrie, elle.est, de l'aveu de l'auteur, bien difficilement
explicable; il y voit presque une question insoluble(p. ;ii); il
n'est donc pas fondé à en tirer un argument en faveur d'une
théorie, quelle qu'elle soit. L'explication qu'il en propose
semble, d'ailleurs, bien laborieuse, il en est une autre. beau-
coup plus simple, qu'il re jette sans qu'on voie au juste pour
quelle raison. Le mariage est, en Australie, une institution
intertribale; les mariages entre individus de tribus diffé-
rentes sout très fréquents. Pour les rendre possibles, il a
fallu établir des équivalences entre les différents systèmes de
phratrie par exemple, la phratrie Kupathiu des Kamilaroi
•st considérée comme l'équivalente de la phratrie Krokichdes
340 t'ANNKE 1U0M9O9
SOClOkOaiQUB.
Wotjobaluk et, par suite, un membre de la première ne peut
épouser un membre de lit seconde. Si donc un Kamilaroi
épouse une Wotjobaluk, il ne peut la choisir dans la phratrie
Krokiek. Howttt iSatire Tribesnf. S. E. Aux! p. 142) a établi
le tableau de ces équivalences. Il n'est pas étonnant que des
phratries qui sont ainsi considérées comme les substituts les
unes des autres aient Uni, dans certains cas, par porter les
mêmes noms; et ces échanges de noms ont pu se faire de
manières très différentes qui pourraient expliquer la diversité
des combinaisons sur lesquelles M. T. attire justement notre
attention.
Sur la question des classes matrimoniales, sou attitude est
encore plus emburassée et plus hésitante. Commeon le sait,
cette organisation se présente sous deux formes il y a des
tribus qui comptent quatre classes (deux par phratrie;;
d'autres eu ont huit (quatre, par conséquent, dans chacune
des deux phratries;. Pour ce qui est du premier de ces deux
systèmes, Al.T. rejette une explication que uous en avions don-
née ici même i AnnéeSociologique,1, p. 10 et suiv.). en lui
reprochant d'être eu contradiction avec une hypothèse qu'il
croit avoir précédemment établie, toujours en se fondant sur
la manière dont les noms de classes sont distribués sur le con-
tinent australien. Nous avons dit déjà combien une hypo-
thèse, qui n'avait pas d'autre base, devait être regardée
comme fragile'.r.
Sur le système de huit classes, c'est encore nous que M. T.
prend à partie, et, comme dans le cas précédent, il rejette lit
théorie que nous avons proposée i. innéeSociologique,VIU,
p. I18i, sans en proposer pourson propre compte. Nousavions

1. D'ailleurs,lu conlruilicUnn ellf-mômc«<lloin dVtredviuonlréV.


M.T.i-àliaioque l'institution i|i-s phratriesa dû iHretic beaucoupanté-
rieur'!à reliedosclasses.Or,suivantlui, notrethéorieimpliquerait néres-
•uiri'fuent'luelussecondes ant«tépresquecontemporaines dospremières.
Il n'unest rirn.Suivantnous, en elfel.)< classesvicndraieul de ce fluf-
l>;senfants.tuiitcnportantk tutem nialcriiifl,naissmit et viventclicï li-ur
|iê.re.Lr* deuxphratriesiirlifinrlluiuuraierit. Joncété Inrméu»de deu*
rouellestl'ltidiriilus
In'-siliiriin-nUln>unsqui naissaient et vivaientfur II;
territoireil«lu phratriedontils portaientle tntniu,1rsautresqui étuionl
L'uniinuexpatriéssurlit territoireîle l'autropliratri».Ci-«'mil m.'ttediflï-
furc entrelesKi;nér«tiuns <|if uurnU i:ï|irifin:l.>.*ystémi!
îlesquatrechuo.
Muisii, ruminenousIn ilisiuii-jilu.-liant,il y eut uni;longuepiirio.li-
pirnitantla>(uetiu lenifiri.au lieu d'i-tnineinM- sa IV-inine av«: lui, vnnuit
habiterchezcettedurub-ri-, eullt;iliin-rcncc n'exisliiilpas el, par consé-
i|ucnl,l«s classesn'avaientpusde raisondVire il estdonctri's poi»ilili-
qu'ellesn'aientapparuqu<-lunijtiimpi a|iri'.sles phratries.
KT MATItlMUMAU
L'OttQAmVriOX DOMESTIQUE 341

expliqué ce dédoublement des quatre classes primitives par


uu changement survenu dans le régime de filiation. Quand la
liliation utérine fut remplacée par la filiation masculine, la
parenté en ligne maternelle qui, pendant des siècles, avait été
considérée comme ossentielle, ne s'effaça pas du jour au len-
demain. Kllecontinua ù être respectée pur l'effet del'habitude
et. puisqu'elle était regardée comme uu obstacle au mariage,
elle conserva cette action prohibitive en même temps que la
parenté paternelle, nouvellement reconnue.Delà des compli-
cations que nous nous sommes elïorcé d'exposer et qui, sul.
vaut nous, auraient nécessité une nouvelle organisation des
classes matrimoniales. Acette explication, que nous ne rap-
pelons que sommairement, M. T. fait deux objections prin-
cipales. D'abord, suivant est cela lit tactique de son maître,
M. LanK, il s'attache a .mettre en contradiction le mémoire
précédemment cité avec un autre qui avait antérieurement
paru (Année S'ocioloyique,V, p. Hi et suiv.). Nous ue nous
arrêterons pas à nous disculper de ce reproche. Les argu-
ments ad homiwm n'ont qu'un intérêt personuel et ne
touchent pas au fond des choses. Admettons que nous ayons
successivement soutenu deux thèses qui se coucilient mal. Ce
désaccord, fut-il avéré, ne fait pas avancer le problème. Ce
qu'il importe de savoir, c'est laquelle des deux opinions
contraires est la vraie et doit être maintenue
Mais M. T. nous adresse une autre objection qui, elle, doit
être examinée. D'après notre hypothèse, le système de huit
classes aurait été rendu nécessaire par une nouvelle prohibi-
tion matrimoniale qui aurait mis obstacle au mariage entre
cousineet cousin tribaux, quand les parents de lu première
sont frères et sœurs (toujours au sens tribal) des parents du
second. D'un autre côte, cette prohibition aurait été détermi-
née par lit substitution de lit liliation masculine à lit filiation
utérine. Or, chez les Dieri, cette même interdiction existe;
tout se passe comme dans un système à huit classes et, pour-
tant, chez ce peuple, il n'existe pas de classe matrimoniale
du tout et la filiation se fait eu ligue utérine. 31~ilsc'est tout

1.L'auteurn'u pusvu, ilYill)-un>.


qui; nousavionsnous-iinMiie
fuitci'
choix.Nousavonsinconnu,dans lu sucomldi-smémoiresfilés,que lus
quvnousapportaitlunouvi.-i
ronsoiKiiiîiiKmls ouvrage<luSpencer
HGi Ile»
nous obligeaientù rectifierla façon dontnous avions précédemment
les anomaliesdu sv=t.-me
expliqué ArunlaiV.AnnéeSocial.VIII,p. 146.
147,.
.142 I.'a.VXI{E ttl««-l909
«OCItil.OlilQL'B.

si mplument l'indice que la filiation paternelle, sans avoir


encore pris le pas sur l'autre, commence il y être reconnue
et à y produire les effets que nous lui avons attribués. lie
môme que, dans les tribus du centre, lit parenté miiteruelle,
tout eu perdant du terrain, se maintient cependant à coté de
la parenté paternelle qui est devenue la plus importante,
chez les Dieri, la secondecommencea faire sentir sou action
à côté de lit première, qui, toutefois, reste au premier plan.
Dans un cas comme dans l'autre, les deux sortes de parenté
coexistent et accumulent leurs effets. Les résultats sont les
mêmes. Les Dieri, il est vrai, y sont arrivés sans recourir au
système des classes, mais pur une organisation nui yenert'ade
la parenté1. Seulement, comme les classes elles-mêmes ont,
en partie, pour fonction d'organiser lu parenté. le procédé
employé de part etd'aulrc est, au fond, identique-. lit ce qui
coulinne cette interprétation, c'est que. chez les Dieri, l'en-
faut hérite, sinon toujours, du moins souvent, du tolem de
son père en même temps que de celui do sa mère. C'est la
meilleure preuve – et ce n'est pas l;iseule – que la parenté en
ligue paternelle coexiste avec l'autre'.
Le reste du livre est colistier» à la question du mariage. On
connaît la thèse, encore défendue par Spencer et Gilleu, par
Howitt, d'après laquelle il y mirait eu nue époque où les so-
ciétés australiennes auraient ignoré le mariage individuel.
L'évolution matrimoniale aurait débuté par une phase de
promiscuité, à laquelle aurait succédé Ir;fjraup^mavvintjeou
mariage collectif. Ou entend par ce dernier mol un état de
droit en vertu duquel tous les hommes d'une phratrie auraient
été collectivement et par naissance les époux de toutes les
femmes de l'autre phratrie, du moins de toutes les femmes de
la même génération qu'eux. M. T. combat cette thèse avec
les arguments qui ont été Lien souvent exposés ici il nous
parait inutile de les répéter voir notamment, t. IX, p. 308 et
suiv.).
Mais si les critiques que M. T. adresse à lu théorie d'Ho-
witt sont très fortes. la théorie personnelle qu'il propose
prèle elle-mêmeà bien des objections. 11 ne voit dans le ma-

1.VoirIluwitl, T.ofS.E. Ami..\>.103<;tsuiv.


matrimoniale
farilftîle inontwrt\w l'organisation
i. Ilseraitmtfiiic Dieri
a pour«lïet ilVuiju'-clicr issus île pamits
!«•mariageenip-il«siinliviilu.s
i|Uiutil<ti.-s
lutrinsidentiques.
3. VoirHowilt,Op.cil.,|i. 1«7,281:cf. Année Stciot..IX,|>.3fci.n. I.
I.'kIKUNISATION DOItlKTIQUIi UT MATHIMOMALK 343

linge pirmuru qu'un cas de polyandrie iidelphique, du à la


rareté des femmes dans les sociétés australiennes. Connue le
mari pimutiu est surtout uu mari honoraire, qui n'exerce pas
le droit conjugal tant que le mari lippu-mulhi est présent, il
purntt peu vraisemblable que ces sortes de mariages aient été
institués dans le seul but de faciliter le commerce sexuel.
E. ».
SÏA.MSCH1TSCHiAlkxai. Ueber den TJrsprung der
Zadruga. Kine soziologisehe Uutersuchuug. lieru, Huch-
druckerei Scireitlin, Springu.Co., 11)07.72, p. in -8°
Peudaiit longtemps, on avait uiianimcrneiit considéré la
Zadruga des .Slavescomme uni; forme, relativement primi-
tive, d'organisHtiou familiale. Les dimensions mômes de ce
groupement, qui comprend généralement plusieurs souches
collatérales, le parfait communisme dans lequel vivent ses
membres semblaient autant de preuves de son caractère
archaïque. On y voyait le type, presque pur, de ce que Sum-
ner Mainea appelé la joiitl-famity. Maisen 18i>9,Peisker en-
treprit de démontrer que cette conception classique était
dénuée de tuut fondement historique1.Suivant lui, la
Zadrugst, bien loiu d'être le résultat d'une formation naturelle
et spontanée, loin de nous reporter aux origines de la civilisa-
tion slave, serait, au contraire, une construction gouverne-
mentale et fiscale, dedate récente. C'est seulement vers le mi-
lieu du xivcsiècle qu'elle aurait commencé à faire son appari-
tion. Au moyen âge, la population ne pouvait pas vivre en
familles restreiules. réduites à un seul ménage car une
exploitation agricole, pour être sullisamment productive, doit
être d'une certaine étendue. Mais, d'un autre cùté, l'État ne
pouvait pas laisser se former (le trop grandes familles, parca
que, l'impôt se payant par maisons, les intérêts du lise eussent
été lésés. Il s'opposa donc à ce qu'uue même communauté
familiale put comprendre plus de deux ménages. Quand ce
nombre était dépassé, les individus qui étaient eu excédent
étaient tenus de quitter la maison et de s'eu aller fonder un
foyer nouveau. Telle est l'organisation qui resta la plus géné-
rale jusque versta lin du xiv*siècle. C'est à ce moment que les
Turcs conquirent Byzauce. L'indolence politique et liuan-
1. DiesertischeXatlruga,m Zeitschriflfar Sozial-mut WiiIsthafltgts-
lfs:l9.L'ttfUch'
AteA/f. /1\'lli1ll11rll ditosf'a.<f)'eMA'r
11rI1"úrl/Jmll,ul .Mt'«<<o
imny SbornikCuko-aloeatisbj, IVu^au,lS'.i'J.
344 L'a.N.VKKSQCtOLOUIOUB.
4Wtt-1909

cière du régime nouveau fit qu'où ne tint plus rigoureuse-


ment la main à ce que la règle de la Doppelfamilhfut obser-
vée. Par suite, nflu d'échapper à l'impôt, ou s'arrangea de
manière à former des familles aussi étendues que possible
partout où l'état du sol le permettait. C'était aiusi que la
Zmtnigaaurait tardivement pris naissance.
Cette théorie venait rejoindre, étendre et renforcer celle de
Fustet de Coulanges sur la communauté do village. On suit,
en eltet, avec quelle vigueur dialectique Fustel s'attacha à
démontrer qu'il n'existait pas de I niées historiques d'une
époque où le sol aurait été possédé en commun parlesgroupes
locaux. Mais si la thèse de Peisker est fondée, ce n'est plus
seulement le communisme de village, c'est aussi le commu-
nisme domestique qui cesse d'apparaître comme une phase
naturelle, nécessaire et primitive de l'évolution sociale,
puisque, dans un des cas où l'on croyait l'avoir te mieux et
le plus sûrement observé, il serait exclusivement dû à une
combinaison de circonstances locales, fortuites et récentes.
–On eutrevoit sans peine toute l'importance de fa question
qui se pose ainsi. Suivant la solution qu'on en donue, le déve-
loppementhistorique sera conçu de manière tout à faitdiflé-
rente.
L'opuscule de Stnnischitsch est un examen critique delà
théorie de Peisker. Pour ce qui est des institutions où l'on a
cru trouver la survivanced'un ancien communisme de village
(Mir russe, Allmtude de la Suisse, etc.), il accorde qu'elles
sont de formation ultérieure. Maisil maintient, au contraire,
le caractère naturel et primitif de la Zudruga.
Il fait remarquer, tout d'abord, quelle invraisemblance il
y a à ce que le gouvernement, par des mesures purement fis-
cales, ait pu agir aussi profondément sur l'organisation de la
famille. substituer un régime familial à un autre et imposer
uue morale domestique nouvelle. II est certain qu'à la base
de l'hypothèse de Peisker il y a une conceptionartiflcialiste
de la société qu'on pouvait croire définitivement discrédi-
tée.
Les liens étroits qui unissent la Zadruga à certaines
croyances religieuses et surtout le caractère primitif de ces
croyances sufliseiUâ prouver que la Zadrugn ne saurait avoir
l'origine récente qu'on lui attribue. Chaque Zadruga, eu effet.
a son culte domestique, tille a, sous le nom deStawa son dieu
ou son génieprotecteur. La stawa, c'est la Zadruga persouni-
INORGANISATION KT1UTMM0NWUS
DOUKSTIQUtt 345
fiée. Aussi deux individus qui ont la mêmeSlawa se considè-
rent-ils comme parents, alors môme qu'ils habiteraient l'un
sur les rivages de l'Adriatique et l'autre sur les bords du Da-
nube. S'ils sont de sexe différent, le mariage est interdit entre
eux commeeutre proches. Le culte dela Slawa et le patrimoine
domestique sont si étroitement solidaires qu'on ne peut héri-
ter du second saus hériter du premier. Quand des familles
différentes habitent sous le même toit, elles doivent avoir une
seule et même Slawa. Bien que l'église ait essayé de donner
un coloris chrétien à ces usages, il est évident qu'ils remon-
tent à une époque très reculée. Eu tout cas, on ne peut
sup-
poser qu'une organisation religieuse aussi profondément
enracinée dans les mœurs ait été suscitée par des mesures
fiscales (p. 45).
La théorie de Peisker repose, d'ailleurs, sur une contradic-
tion. Filleadmet, en elïet, que la famillene pouvait se mainte-
nir qu'à couditiou d'avoir nue sulilsauto étendue. Et, en (ait,
les historiens du droit comparé connaissent bien cette néces-
sité qui s'impose aux hommesdans les sociétés peu avancées-
Mais c'est dire que, à partir du moment on l'agriculture était
un peu développée, une famille telle que la Zadruga était
appelée par la force même des choses. On ne voit donc pas
pourquoi ces besoins eussent du attendre jusqu'au xiv"siècle
pour se satisfaire. Le concours d'un gouvernement fort et
bien organisé n'était nullement nécessaire pour obtenir ce
résultat qui se produit de lui-même, par un
développement
naturel. Mêmec'est surtout là où l'État est encore rudimen-
taire que ces grands agrégats familiaux sont indispensables.
Car comme le pouvoir politique n'est pas alors en situation
de protéger les individus et leurs droits, il faut
que les grou-
pements particuliers, c'est-à-dire les familles, se chargent de
ce soin et elles ne peuvent y réussir qu'à condition d'avoir
un effectif qui impose le respect.
Mais M. S. ne se borne pas à montrer les invraisemblances
et les contradictions de la théorie; il établit que les données
historiques sur lesquelles elle s'appuie n'ont pas la significa-
tion que Peisker leur a prêtée.
Suivant ce dernier, la Zadruga aurait été impossible en
Serbie pendant le moyenâge, parce que, d'après un texte de
Procope, la population était alors nomadeet dispersée est vil-
las éparses. Maissi cette dispersion est peut-être un signe que
le village n'existait pas alors chez les Serbes, elle ue
prouve
3*G l'axkbb socroi.ot>iQUB.
W9MM»

rien contre la Zudruga ip. M). Quant au nomadisme, l'auteur


eu conteste l'existence. Sans doute, lu population était d'une
certaine mobilité. Les paysans changeaient assez facilement
de localité pour échapper aux charges dont certains sei-
gneurs les accablaient et pour répondre aux avances que
d'autres leur faisaient niais, eu principe, ils vivaient à l'état
sédentaire ip. 55).
Hesleut les textes invoqués par Peisker pour démontrer que
le groupementde la Doppel fa mille fut, à un moment douuô,
imposé par l'Ktat. Par une discussion que nous ne pouvons re-
produire ici, l'auteur s'attache à prouver qu'ils n'ont pas du
tout le sens qu'on leur a donné. Quand un homme vivait
isolé, te couventdont il dépendait était tenu de lui associer un
conipagnou pour certaines corvées. Mais c'était uue mesure
gracieuse. destinée à alléger les charges et à les répartir plus
équitablemeut c'était une protection pour le paysan, non
un privilège concédé ses maîtres. tin tout cas, il n'est nulle-
ment question de cohabitation obligatoire et, par conséquent,
il n'y a rien dans ces dispositions qui ail pu frayer les voies à
la Zadruga p. 02 et suiv.i. D'ailleurs,bien des faits établissent
que ta Zadruga existait dès ce moment. Ce qui est vrai, c'est
que, pendunt le moyen âge, elle a subi, au moins dans cer-
taines légions, une régression passagère. Comme l'État était
très fort et connueil est l'antagoniste de ces grands groupe-
ments qu'il tend, du reste, il rendre iuutiles, les vastes com-
rauuautés domestiques cédèrent la place des familles plus
restreintes ce résultat fut particulièrement marqué là où
l'action gouvernementale put se faire sentir plus directement,
c'est-à-dire autour des points qui servaient de centre à
l'Ktat. Mais, avec la conquête turque, le pouvoir central
s'affaiblit; par un contre-coup naturel, la Zadruga. regagna
aussitôt une partie du terrain qu'elle avait perdu. Mais il s'en
faut qu'elle soit née à ce moment.
Ce petit livre nous rend le service de mettre à notre portée
un certain nombre de faits qui ne sont pas aisément actes-
sibles au lecteur occidental. L'argumentation contre la thèse
de Peisker parait bien conduite. Peut-utre l'autour a-t-il trop
facilement admis l'origine récente du village. De ce que le
Mir russe, sous sa forme actuelle, n'est pas ancien, il uesuit
pas que, dès le début, il n'y ait pas eu, par delà la commu-
nauté domestique, une autre communauté plus étendue, de
nature familialeelleaussi. Ici comme ailleurs, nous tendonsà
i.'imnsmt\rifi\ wjmkstkjdk ht jjatjïimo.nui,b 347

peuser que 1«tout précède la partie ou, tout au moins, eu est


coutemporain. K. j).

LAUNSPACHiC-W.-L.». – State and Famlly in eariy


Rome. Loinlou.Oeoi'Kliell a. sons, 1908, xx-îHHp.
Cet ouvrage est une paraphrase nouvelle fie Iîi Ihforie clas-
sique sur les origines de 1"filât romain cl de la famille
romaine. Ou met à la base la ijm», grand agrégat familial, de
nature essentiellement religieuse, ayantsa lé te undief, un
patriarche, armé, des le principe, des pouvoirs étendus qui
constitueront la ptilria jiatostaxde l'époque classique. On
explique ces pouvoirs a la (ois par la supériorité physique
ip. ittii et par les idées qu'impliquait el qu'entretenait le
culte des iiuciXnfs. La confédérationdos unitris aurait donné
uaissauceà l'filal. Quant à la constitutionde la famille, telle
qu'on 1'observw à Homedès le couiiueuveuieut des temps
historiques, elle viendrait tout simplement d'un démembre-
ment de la t/i-itseu groupes plus petits, mais organisés d'après
les mômesprincipes.
L'auteur ne parait pas soupçoiiuer les difficultés que sou-
fèvecelte solution, si simple et) apparence.Ainsique l°:imon-
tré tëdttard Meyerdansle livre que nous analysons plus haut,
à Homecomme ailleurs, la société politique, si elle n'a pas
précédé la famille, en est contemporaine et n'est pas résultée,
comme trop d'historiens l'ont répété, d'uue coalition de grou-
pements familiaux. Expliquer un type familial quelconque
autrement qu'en le rapportant à la société politique détermi-
née dout il est fonction, c'est se poser le problème eu des
termes qui ne permettent pas de te résoudre.
D'un autre coté, c'est tout à fait arbitrairement qu'on prête
à la gens une organisation comparable a celle que présente,
plus tard, le petit groupeforme par le paler familiuset ses«mi.
Rien ue nous autorise à prêter au chef de la gens des pouvoirs
analogues à ceux dout jouit ensuite le père de famille propre-
ment dit. La yens est une sorte de clan et, d'une manière gé-
nérale, le clan est plutôt organisé démocratiquement: snn
chef est un primu* inter paies plutôt qu'un souverain. La
grosse et difficile question est précisément de savoir d'oi'i
vient que la patria potesta* s'est constituée à mesure que la
petite familia s'est détachée davantage de la yens, s'en est
affranchie pour se faire uue existence de plus en plus auto-
3*8 I.'AX.wSb i906-t90»
sUMirof.OOHH'B,
nomeet personnelle. Or, pour l'auteur, celte question n'existe
pas Klle existe d'uutaut moius <iu'il nesemble pus se rendre
compte exactement de la nature et des dimensions réelles du
groupement familial à l'intérieur duquel la pntrin pointus a
pris naissance. II l'appelle la famille nguotique. Il L'unité
civile de l'État, dit-il, .'tait la famille
agualique ou groupe
d'individus parents, soumis à l'autorité d'un ancêtre cominiiii
vivant (p. 203, ci. p. dOS.i.» Mais,en réalité, il
n'y a que cer-
tains iigunts qui soient soumisil la yalria
poteslax, ce sout les
*«/, et justement il faudrait expliquer pourquoi elle ne s'est
appliquée qu'à ce cercle restreint.
L'ouvrage dénote, d'ailleurs, une connaissance des ouvrages
classiques sur la matière; et l'auteur sait s'en servir avec dis-
cernement, mais sans y rien ajouter d'important.
E. 1).
W. KRDMANN.– Die Bntwlcklung der Testierfreiheit
im roemischeu Reoht. Zritxehr. rergieirh. llechlmm.
XXI, 1908, p. I à M.
Le droit primitif ne connaît pas le patrimoine individuel
ce qui se transmet par héritage, c'est le
pouvoir du chef de
famille, pouvoir qui ne porte pas moins sur les personnes que
sur les choses, mais non la propriété. Celle-ci est l'attribut
de l'ensemble de la famille. Quant à la transmission du
pou-
voir du chef, elle se fait, naturellement, à la mort de celui-ci.
L'autorité qui émane du groupe et le dépasse s'incarne sim-
plement en de nouvelles personnes suivant un ordre déter-
miné-. Le pnter n'a pas la liberté d'imposer ses dernières
volontés il n'y a point de testament. Une lelle institution ne
saurait coexister avec le communisme familial primitif.
L'ancienne Rome n'a point fait exception à la règle. Et
cependant, remarque notre auteur, le testament apparaît, des
le commencement de l'époque historique, sous lit double
forme de tnlammtumeomiliix ailalts et de iïstammtum in
pvo-
einctu. Comment cela s'explique-t-il V ta afallusans doute
que l'idée de communauté domestique s'effaçât devant celle
d'État, laquelle est moins tyrannique pour l'individu et lui
laisse plus d'initiative. Le présent article cherche à retrouver
les voies qui ont préparé et rendu possible cette initiative en
matière de testament. La question a déjà fait
l'objet de plus
d'une étude. L'auteur le sait et il en profite, JI faut le louer
de ne point ignorer la production frauçaise sur le
sujet et
l/otlUANISATlOX KT S1ATMUOXU1.IS 3*9
DOUKSTlgL'E

d'utiliser les travaux de Girard, de Curj, de Lambert, d'Apple-


ton, etc.
Quels sont doue les premiers moyens qui permettent à l'in-
dividu qui n'a point de fils de se donner un successeur de sou
choix Les Grecs pratiquèrent l'adoptiou testamentaire. Et
d'après Scliulia, le testament comitiis calMisaurait été chez
les Romainsune institution analogue. Mais ce u'est là qu'une
fausse analogie. Nous n'avons pas la moindre preuve attes-
tant que l'héritier institué dans le testament devint, comme
il eut du le faire, eu qualité d'adrogé, l'agnat des aguats du
testateur. – Hn'est pas plus exact de rapprocher, avec Lam-
bert, le testament comitiul romain du thinx lombard ou de
Vaffatomiefranque. L'adoption et' le testament, bien qu'ils
soutiennent d'étroits rapports, sont cepeudaut deux choses
distinctes.
Voici quel est le mécanisme, ici proposé, du testament
comitial. L'institution d'héritmr s'y fait par l'intermédiaire
des pontifes. Supposons que quelqu'un, sans être disposé à
se laisser adopter comme fils par celui qui désire tester, soit
néanmoins prêt à lui succéder eu qualité d'héritier, et ai cou-
tinuer ses sacra comme le ferait un héritier naturel. Alorsles
pontifes font décider par les comices que ce quelqu'un, sans
être adrogé, du vivant du testateur, sera, après la mort de ce
dernier, institué son héritier. Une telle opération est donc en
définitive une sorte d'adrogation fictive qui, comme l'adroga-
tion ordinaire, résulte de la décision des comices curiates.
Tel fut le moyen employé lorsque manquaient les hernies
sut. L'auteur ajoute que ce moyen permit secondairementdes
legs et des dispositions accessoires sous forme de 1er curiuln.
Et il voit là une preuve de l'intervention de la volonté in(li-
viduelle dans l'ordre naturel de succession leiiw inrklicbr,
yeusiUkiirleEibfolge),intervention partielle, il est vrai, et dont
nous verrons le sens tout à l'heure.
Dèslors le fameux nti legassit. Un /«* nto des DouzeTables
ne crée point, comme on le dit souvent, la liberté de lester;
il ne fait que sanctionner uue coutume déjà en vigueur.
Aussi bien, d'après notre auteur, ne faut-il pas donner un
sens fort à la prescription décemvirale. Leyaiv correspond.
pour lui, à tw/iiV/i'M.etconnote le simple fait de prendre des
dispositions, sans prétendre à bouleverser radicalement
l'ordre naturel de succession. C'est qu'il est hanté par l'idée
du communisme familial et qu'il ne peut admettre une inter-
350 l'A.NXÉK SOOIOUWtQl'R.190C1909

prétalion suivant laquelle uu iudividu pourrait, à son gré.


disposer d'une propriété qui n'est pas encore individuelle, ni
eu ce qui concerne les meubles, ni eu ce
qui concerne les
immeubles. Force lui est donc de soutenirque ces
dispositions
laissées à la merci du pater concernent non pas la
familia,
chose commune, mais seulement la peeunia. D'après une
telle conception, la peeunia ne désignerait
que le fruit d'un
travail individuel, par opposition aux biens hérités de
généra-
lion eu génération qui restent communs: et la libre
disposi-
tion de ce bien individuel
s'accompagnerait aussi du libre
choix d'un tuteur (legare mperpeeunia tulelare mue rei).
Tel serait le premier contenu du droit de tester. Les
juristes se chargèrent de l'amplifier, Ils firent application it
l'opération testamentaire de la vertu juridique de lit inamïpa-
tio per .-exet libram et purent ainsi, par un détour, annihiler
les droits successoraux de la communauté familiale en
oppo-
sant aux hereilexl'emploi- fmnilUe investi dans les formes. C'est
donc lu iiiuncipuliou fiduciaire de la familia qui permit de
tourner en fait, tout en le respectant-en droit, le principe de
succession untifrelle. Quant à ce qui concerne la peeunia, le
testateur, afin de la faire passer à qui il voudrait, en vint
aussi à la remettre au familite emptnrqui servit ainsi de léga-
taire II en résulta qu'elle tendit à se confondre avec in
fami-
lia, puisqu'elle se trouvait concentrée comme elle aux mains
de cet exécuteur testamentaire avant la lettre et l'on cessa
de distinguer entre la manripaUo familiie elle legare xnperpeeu-
nia tutelun: Les deux actes se confondirent dans le Testament
per wxet libram.
Mais ce n'est point là le testament classique
puisqu'il ne
contient pas encore, a proprement parier, d'institution légale
d'héritier. Le fnmiliie emploi-n'est pas un héritier. A côté de
lui les hereilex demeurent, soit qu'ils héritent de
quelque
chose ou qu'ils ne reçoivent rien. Il reste donc toujours il
expliquer comment il devient loisible à l'individu d'instituer
un héritier de par sa propre volonté. Il fallait qu'une chose
vint rapprocher, jusqu'à la presque identification, les lutimici
et ceux qui étaient légalement hernies, de telle sorte
que le
concept tCkernln devint un concept vide à côté de l'autre. Ce
rapprochement se fit, d'après notre auteur, par les charges de
la succession. Supposons que les hereilexlégaux se trouvent
déshérités ils sont par lit même libérés de l'obligation des
nacra. Celle-ci passe à celui qui recueille la plus graude part
i.'niuiANi.sA-nox domestiqur KT uataimo.niai.k 35!

de lu familùt et de la pétunia. Tel est du moins te système


dont l'auteur veut voir In germe dans les prescriptions ponti-
ficales de l'époque de Tib. Coruneaniiis. il tipptiie son inter-
prétation sur une critique et une restitution du texte soi-
disantii Itéré de Cicéron i f>el.cf/ihax,II, iQ) où sont énumérées
les trois manières dont les Anciens étaient tenus aux mera.
Ici comme plus Imut nous voyons revenir lu distinction de la
familia et de la jteeutùa et sous le prétexte qu'au temps de
Coruncauius la morlh canna c/ipin ne pouvait s'appliquer qu'à
la familia, on nous propose de lire: IlMajorentpartent fnmiliœ
au lieu de « Mnjorempartent perunite et, au lieu de « Si major
pars pecunùielegnla est», « Si major par* rei penuiiti euqnelegaUi
est. » Les pontifes attribuaient donc les xnrra celui qui
recevait, soit sous forme de familia soit sous forme ûvpeatnia,
la plus grosse part de l'héritage. Le Droit les imitu et imposa
de même au mieux partagé la charge des dettes et obligations
diverses de la succession.
Dès lors Yertrnneivtainsi investi de l'actif et du passif ne
différait plus guère de l'héritier légal ikerex). L'ertraneus
devenait lui aussi, sans être agnat, l'hère* du patrimoine
transmis. Et c'est avec la confusion de ces deux êtres juri-
diques qu'apparaît enfin la liberté de tester. Le testateur peut
désormais faire véritablement, et suivant ses préférences, ins-
titution d'héritier. Si la mani'ipatio familiœ demeura, ce ne
fut qu'à titre de survivance et comme une forme maintenant.
dénuée de signification.
Telle est, reconstruite par notre auteur, l'évolution à la
suite de laquelle la volonté individuelle aurait réussi à se
survivre à elle-mêmedans le testament. Mais n'y aurait-il pas
bien des réserves à faire sur la fameuse distinction de la
familia et de la pnunin? Ceux qui l'ont faite sont toujours
restés impuissants à préciser de façon satisfaisante lecontenu
de ces deux notions qu'ils voulaient distinguer. Kn second
lieu la correction et l'interprétation du texte de Cicéron qui
nous est proposée ne nous paraissent pas s'imposer. Cicéron
ne dit-il pas tout simplement que, d'après les pontifes, étaient
obligés aux «tfivtfà lu fois les héritiers nb intentât, les léga-
taires et les copartageants du legs'! – Mais admettons même e
que, sur ce poiut, l'auteur ait raison, il n'en reste pas moins,
– et cela est autrement essentiel que ln question de la
liberté de tester à Rome nous semble posée par lui à contre-
sens. Cette liberté ne s'affirme pas à Home comme une con-
35â I-'ANNKKSOCIOLOUIQUK.
1 DUO-1900

(luète de l'individualisme sur le communisme domestique.


M. burkheim a indiqué ici même (cf. ,1mm.Social., IV, p. ÎH8
à 352 V, 375)que'le droit de tester romain, par opposition à
notre droit de tester moderne, ne répondait pas à un désir
qu'uuniit ressenti l'individu de distribuer sa fortune d'après
ses propres sympathies. Le pttterfamilùtx, eu instituant un
héritier, réalise non pas sa propre volonté mais celle de la
famille qui est incarnée eu lui. En ce seus donc le testament
favorise lu perpétuité de lu communauté domestique, loi»
d'être uu signe de sa dissolution. G. 0.

OBRIST Auw.ni. – Essai sur les Origines du testa-


ment romain. Lausanne, imp. Viret-Geutou, 1906, 172p.,
in-H".
Ou sait qu'uu certain nombre d'historiens tendent à reculer
la date à laquelle le pouvoir de tester aurait fait sou appari-
tion dans l'histoire du droit romain. C'est aussi la thèse que
M. Obrist soutient dans l'opuscule que nous allons analyser.
L'institution testamentaire lui parait trop complexe pour
avoir pu naître avant une époque relativement récente. Outre
qu'elle suppose une culture juridique déjà très raflinûe, elle
venait se heurter au principe du communisme familial dont
elle était la négation.
C'est sous la forme de l'adoption que l'acte pour cause de
mort aurait pris naissance à Home. Pour empêcher lu perte
d'un foyer, uu père de famille adoptait comme fils et, par
suite, comme successeur, soit un parent éloigné, soit môme
un étranger. Un tel acte avait déjà un des caractères du testa-
ment puisqu'il modiiiait l'ordre légal de succession. Mais ce
n'était paseucore un testament proprement dit; car c'était un
contrat qui supposait l'acquiescement du bénéficiaire, taudis
que le testament est complet par la seule volonté du testateur.
De plus et pour la même raison, le contrat d'adoption, une
fois formé, devenait irrévocable tandis que les dispositions
testamentaires sont ambulatoires jusqu'au moment de la
mort
Au contrat d'adoption succéda le lextamenlumcaUtliscomi-
liis après avoir obtenu l'assentiment du collège des pou-
tifes, un homme en désignait publiquement un autre pour
son successeur, eu présence des comices assemblés qui, sui-
vant notre auleur, avaient le pouvoir ou d'accepter ou de
L'OKGAiHSATI».* POMKSTIQUR RT MATMMMilAfcB 35Ï

.u.f:
refuser cette dérogation »1-«î
au droit "J~n'lInl
successoral. t~n·4n innova-
Cette innn.rn_
tion constituait uu progrès important sur l'adoptio in Iwredita-
lem l'adopté n'acquérait l'aptitude à succéder qu'en sortant
de sa famille natale- pour entrer dans celle du l'adoptant dont
il prenait le nom, tandis que l'héritier désigui'1devant, tes
comicesconservait son nUituafnmilim.On se rapprochait ainsi
du testament; cependant, suivant notre auteur, ce mot ne
peut s'appliquer sans impropriété à cette institution très
archaïque. Lé Inlitmenlum cala! h romiUii était irrévocable et
M.0. estime qu'il ne constituait pas un acte unilatéral, mais
cet
impliquait le consentementde l'héritier. Déplus,l'objet de
acte aurait été moins de transmettre la propriété que de don-
uer au itteujux uu successeur qui continuât sa personne, le
culte domestique, et, quis'acquittât des rites enversle défunt.
Le principe de la copropriété familiale serait reste intact le
disposant aurait eu seulement le droit de désigner l'adminis-
trateur du patrimoine.
C'està l'acte comitial ainsi entendu que se serait appliquée
la fameuse formée de la loi des XII Tables: ili Wgaml.
itajusnlo. Celle-ci n'aurait donc pas eu pour but de procla-
mer, comme on l'a dit, une entière liberté testamentaire,
mais seulement de simplifier le testament comitial en le dé-
barrassant de formalités gênantes. Jusqu'aux XII Tables, le
père de famille ne pouvait se choisir un successeur qu'après
ratification du collège des pontifes et des comices; ce double
contrôle fut supprimé. Les comices ne jouèrent plus qu'un
rôle de témoin. Mais le palcrfnmiliax n'eut pas davantage le
droit de disposer librement du patrimoine son pouvoir se
réduisit toujours a déterminer la personne qui, à sa mort,
administrerait la tloniunfamiliaque et présiderait aux sacri-
ficesdomestiques. Il put seulement procéder à celte détermi-
nation avec plus d'indépendance qu'autrefois et encore
peut-ou croire que l'opinion l'empêchait d'user de cette
liberté sans motifs légitimes.
Ledroit illimiti' de tester ne daterait donc pas des XII Ta-
bles il ne serait apparu que beaucoup plus tardivement par
le développement, du teslameiilumper arx <7libram qui fut la
première disposition pour cause de mort ayant directementet
essentiellement pour objet la transmission delà propriété.
Nous avons du mal à comprendre comment l'acte coini liai
pouvait maiuteuir intact le vieux communismedomestique.
Puisque lu successeur aiusi désigné se substituait h la per.
K. DrmciiF.lM.– AmiiV»uriul., IflilC-l'JOO i%
354 t'ASNÉSSeCIOtOfHQUB.
1900-1909

sonne du défunt, il en avait tous les droits; par


conséquent,
quand lui-même mourait, s'il n'avait pas testé, c'étaient ses
mi à lui, ses propres enfunts, qui liéritaieut du
patrimoine
qu'il avait reçu par testament et, par conséquent, les agnats
du premier testateur se trouvaient dépossédés. Que devenait,
dans ces conditions, l'institution de la copropriété familiale
C'est donc très arbitrairement que notre auteur essaie de
limiter les droits que conférait le testament fait devant les
comices. Déjà et par lui-même il impliquait un régime domes-
tique nouveau.
Maisil est inutile de discuter longuement cette
hypothèse.
Si l'auteur a cru nécessaire d'y recourir, c'est
parce qu'il se
fait du testament romain une conception
qui, pour lui être
commune avec nombre de juristes, ne laisse pas d'être contes-
table.
Ou part de cette idée que la liberté de tester n'est
possible
que dans une société où la propriété est devenue individuelle;
d'un autre côté, ce serait uu miracle historique que Home eut
pu connaître la propriété individuelle à une époque aussi
primitive que celle des XII Tables; d'où l'on conclut que le
droit absolu de tester doit être nécessairement postérieur au
iv" siècle. Mais,en réalité, l'institution testamentaire, à
Rome,
n'a nullement la signification qu'elle a prise de nos
jours.
Elle n'implique pas que le vieux communisme familial était
dès lors ébranlé et reculait devantles droits reconnusde l'in-
dividu, mais simplement qu'il s'est transformé. Au lieu de
rester diflus, il s'est organisé. Sous l'influence de causes que
nous n'avons pas à recbercher ici, la famille a été amenée à
s'incarner dans la personne du pnler/amilian, abdiquer
entre ses mains tous les pouvoirs qu'elle détenait primitive-
ment. C'est ainsi que le père s'est trouve investi d'un pouvoir
de disposer presque illimité. Ce n'était pas en vertu du res-
pect qu'aurait dès lors inspiré la personnalité individuelle
c'est qu'il (Hait,à la lettre, la famille personnifiée. Il eu était
l'organe. Son autorité, c'est celle du groupe domestique qui
lui a été comme déléguée. Bien loin de reposersur le
principe
de la propriété individuelle, la pallia potcstas en est la néga-
tion. puisque tous les biens qu'acquièrent les membres de la
famille sont acquis au père, de même que, antérieurement,
ils étaient acquis à la famille. L'institution de la
copropriété
familiale transpire à travers toute l'organisation du pouvoir
paternel. Kn un mot, la liberté de tester et tous les autres
1.'ORQAS|SAT|O.V Bf MATWMOXIAI.K 35"i
DiIJiUVngL'K
i
droits dontelleest solidaire viennentuniquementde ceque
la familleromainea été déterminéeà sedonneruneconstitu-
tion monarchique'.Or, les causesqui l'ontnécessitéeà s'or-
ganiser de cette manièresont de cellesqui pouvaientagir
bien avant que l'idéedo la propriétéindividuellene fût née.
Par conséquent,le droit de tester qui en résultepeut,sans
aucunanachronisme,être maintenuù la date relativement
reculéeque*lui assignentles textes. E.1).

ROBERTS (Rou.j. – BasFamilien-Sklaven-undBrbrecht


im Qoran. Leipzig,Hinrichs,1908,36 p. in-8°.
L'objetde ce travailest de présenter,dansun tableaud'en-
semble, les principalesdispositionsdu Qoraurelativesau
droit domestique,de manièreh mettreen reliefet ce qu'elles
ontde communavecle droit des Hébreuxet ce qu'ellesont
de spécialet de caractéristique.Dupointde vuesociologique,
ce sont ces dernières particularitésqui présententle plus
d'intérêt car les autres, celles qui se trouventdéjà dans le
Pentateuquefont double emploi avec lui, d'autant plus
qu'elleslui sont, pour la plupart, directementempruntées
elles ne sauraient donc enrichir utilementnotre connais»
sance.Pour cetteraison, nous insisteronssurtoutdansnotre
analysesur ce que le droit musulmana d'original.Malheu-
reusement.cetteoriginalitéest assezréduite.
Ledroitmatrimonialse distingueparla grandefragilitédu
lien conjugal. Le mari peut répudiersa femmeà volonté,
sansavoira justifierlesraisons qui le déterminent et, bien
que l'abus de ce droit paraisse réprouvépar l'opinionpu-
blique,oncitedes paysoùun hommecontracte,dansl'espace
de dix ans, vingt outrente mariages(p.18;.Et cependant,en
mémotemps,il semblebienque cemêmelienconjugalait un
caractèrereligieuxqui le rende respectableet commesacré.
Quandune femmeest répudiée une premièreet mêmeune
secondefois, le maripeut revenirsur sa décision,et repren-
dre avecelle les relations.Maiss'il y a eu troisrépudiations
successives,le mari ne peut plus l'épouserà nouveau, à
moinsque,dans l'intervalle,elle n'ait contracléavecun tiers
un quatrième mariagequ'un quatrièmedivorceou la mort
est venu dissoudre.C'estdoncque cettetriplerépudiationa
un caractère définitif, comme la triple mancipationdes
Romains,et qu'elleest considérée comme constituantuuesorte
3uC 1000-190!)
I.'aNNKKBOCKJLOGIUl'K.

de sacrilège qui met entre les époux une barrière, un iuter-


dit, un tabou. Le mariage avec un nouveau mari lève ce
tabou, sans doute en ettaçant les souvenirs luissés par la pre-
mière union. Du moment où les marques laissées
par celle-
ci out disparu, le mari se retrouve vis-à-visde sa
première
femme dans les mêmes conditions qu'avant leur mariage
elle est redeveiiue pour lui comme une étrangère et, par con-
séquent, il n'y a plus de raison pourqu'eJie ue l'épouse pas de
nouveau ip. jO-â2i.
Cettecurieuse disposition a d'autant plus surpris les com-
mentuteurset les historiens qu'elle contraste avec une
dispo-
sition très différente du droit hébreu. D'après le Pentateuque,
si nue femme répudiée se remarie, il est, au contraire, inter-
dit à son premier mari de l'épouser a nouveau, même si elle
redevient libre iDeutemnome,U, 1-4 Mais ht contradiction
n'est qu'apparente. Dans un cas comme dans l'autre, on con-
sidère que la rupture définitive du lien conjugal donne nais-
sance à un tabou entre les deux époux. Seulement, chez les
Hébreux, c'est un nouveau mariage qui passe pour consom-
mer cette rupture; d'après le droit du Qorun, c'est un divorce
trois fois répété. Le principe est le même de part et d'autre.
.Nouscroyons probable que ce principe tient au caractère re-
ligieux qui est si souvent prêté ait commerce sexuel. Par lui-
même, il donne naissance à des liens nui generis qui ne peu-
veut être brisés sans impiété et l'impiété qui viole uu tabou
en entendre à son tour. Ce qui rend vraisemblable cette
hypo-
thèse, c'est que, chez les Musulmans, les deux sexes vivent
étroitement séparés. Or, partout où l'on constate cet état de
séparation, il contribue à marquer les rapports sexuels d'un
caractère mystérieux et. par conséquent, mystique.
Pour ce qui est de la morale familiale, ce qu'elle a peut.
être de plus caractéristique, c'est lu subordination des
devoirs proprement domestiques aux devoirs religieux. Le
manque de piété filiale est, eu principe, un péché très grave
mais le fils doit désobéir» ses parents s'ils lui demandent de
trahir la foi. Lesenfants sont considérés comme une richesse,
mais, en ménm ti'iiips, comme une séduction dangereuse,
comme la richesse ell<inôrnft, car ils peuvent faire oublier
iJieu ip. 3<iet 37:. Cette supériorité du lieu confessionnel sur
le lien de parenté se marquait même, à l'origine, dans cer-
taiues dispositions du droit successoral ip. 80). Sous ce
rap-
port; la loi de Mahomet contraste avec la loi romaine, qui
I
I.'oni.ANISATJON ETUATRIUOSIAI.B 35"
UOIiKSTIQUe
reconnaît aux intérêts de la famille une sorte de suprématie
sur tous los autres. Serait-ce ù cette influence des idées reli-
gieuses qu'il faut titlribuer la conception très élevée que le'
droit musulman a du ia tutelle? Tandis que, it Rome, elle
parait être instituée, en«taude partie, duiib riulérÊtdututeur,
d'après le Qoran, le tuteur a, avant tout, pour fonction de
veillersur le pupille, sur sa personne et sur ses intérêts (p. 35).
D'une manière générale, ce droit successoral présente de
curieuses singularités pur oit il se distingue du droit romain
(P « 1-52). k. ]).

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KOIILER(Joseph). Ueber Totemismus und Urehe.


Xeiltehrift fur tergltkhmdt Hechlsivinnenschaft,T. XIX,
p. 171488.
Eskimo und Gruppenehe. llwl., T. XIX, p. ii'd-Yiî.
Nochmals ueber Gruppenehe und Totemismus. Ibid,
T. XXI, p. 2JÎ2-2G7.
M. K., qui est reste un défenseur intrépide des théories
de Morgan, entreprend de les défendre contre nous. Pour
lui, le caractère collectif des termes de parenté employés
dans tant de sociétés diflérentes prouve le caractère collectif
du mariage primitif. Si tous les membres d'une même géné-
ra tiou appellent pères une collectivité d'hommes, et mères
S60 t'ANXÉE SOCIOMHUQL'K. IMWMWW

un collectivité de femmes, c'est se considèrent comme


issus tlece groupe d'hoiiimeset de ce groupe de femmes d'où
il suit que le premier de ces groupes est l'époux collectif du
second. Nous lui avions fait remarquer {Année, X, p. 379)
qu'une maternité collective n'a rien île communavec le lieu
,de sang que ce mot désigne et qui no peut s'établir qu'entre
personnes individuellement déterminées; d'où il nousparais-
sait résulter que ces expressions, n'ayant rien de commun
avec aucune idée de descendance, ne peuvent s'expliquer par
'tu nature du mariage, ni par conséquent servir a prouver que
le mariage a eu telle ou telle forme. M. K. nous répond que,
pour le primitif, le groupe de femmes qu'il appelle ses mères
forme un véritable individu, un être unique, doue d'une
pluralité d'organesgénitaux. 11 n'y aurait douerien de surpre-
nant à ce que l'enfant se regardât comme uni par un lieu de
sang à cet être singulier qui joue pour lui le rôle d'une per-
sonne déterminée mx. p. -WJ-WOj.Cette manièrede présenter
les ehoses nous paraît de pure fantasmagorie. Nous ne con-
naissons pas de mythe oit les femmes d'une même généra-
tion soient conçues comme uu monstre doue d'une pluralité
de matrices. Or, pour qu'une conception puisse être attribuée
aux primitifs, il lie sufïit pas qu'elle soit étrange il faut
encore avoir des raisous pour la leur attribuer. 1)'uilleurs, il
est bien établi aujourd'hui que l'Australien distingue nette-
ment le rapport qu'il soutient avec sa mère véritable de celui
qu'il soutient avec les contemporaines de sa mère; il sait de
quelle femme détermiuée il est issu et, par conséquent, il
est faux qu'il se croie descendu d'une mère collective.
Ou trouve aussi dans ces articles une tentative pour expli-
quer l 'organisationdes tribus australiennes à huit classes
matrimoniales les quatre classes primitives se seraient
dédoublées pour empêcher le mariage entre grands-parents et
petits-eufauts. Ces unions incestueuses sont, en effet, per-
mises avec le régime ù quatre classes, puisque, sous le
système de la filiation utérine, les petiles-lillcs d'un homme
sont de la classe a laquelle appartient leur grand-mère,c'est-
à-dire de la classe où il peutpreudre femme. Pour prévenir ce
résultat, on aurait décidé de ne plus permettre le mariage
entre cousins, mais seulement entre entants de cousins ce
qui impliquait le système de huit classes, Kt il est, en ellet,
certain, que ce système suppose l'interdiction de mariage
entre cousins. Mais ou ne voit pas pourquoi cette interdiction
1,'ORIIANISATIOX
bOMKSTIyUgIT U.VTIUMÛNIAI.K 304

était nécessaire pour éviter que des grands-parents pussent


épouser leurs petits-enfants. H sufllsait do créer pour ces
derniers une troisième clnsse distincte et de celle des parents
et de celle des grands-parents. On aurait eu un système de
six dusses, et non de huit. K. I).

CHAWLEY(A.-K). – Exogaray and the mâtting of


cousins. MélangesTylor, p. ol et suiv.
LANG(A.). Australien Problems. tlml., p. 208 et suiv.

Nous groupons ici ces deux mémoires parce qu'ils se rap-


portent tous deux à la question de l'orgauisiition nmtrimo-
uiule dans les sociéli'Saustraliennes et parce qu'ils pratiquent
une môme méthode.
M. Crawley entreprend d'expliquer l'interdiction de ma-
riage entre frères et sunirs tribaux uu de sang, et la règle en
vertu de laquelle, clansde nombreusestribus, les mariages se
contractent entre cousins. Les réponses sont d'une
extrême simplicité.
L'inceste est prohibé parce que le désir sexuel ne s'éveille
généralement pas entre frères et sœurs, et, si cette absence
de désir est sanctionu.eejuridiquement, c'est que, dans la vie
primitive, ta loi ne (ait souvent que confirmer les mouve-
ments spontanés de 1» nature. Knilu,si l?i prohibition s'est
étendue aux frères tribaux, c'est « à cause de la solidarité
tribale et de l'identité du nom Il porté par tous les membres
du groupe; il faut entendre, sans doute, du clan ou de la phra-
trie.
Sur le second problème, l'auteur adopte une solution voi-
sine des théories récemment soutenues par M. Lang. filant
donnée la tendance vers l'exogamie, ci-dessus expliquée,
chaque famille devait s'entendre avec une autre pour obtenir,
par voie d'échange et de réciprocité, les femmes dont elle
avait besoin. Une foisétabli ce régime matrimonial, les mem-
bres de chaque génération dans la famille A se trouvaient
cousins des membres de la génération correspondante dans la
famille fi, et ainsi les mariages entre cousins devinrent usuels.
D'autre part, ces familles, eu se développant, devinrent les
phratries et l'association des phratries forma la tribu.
Le travail de M. Lang a pour objet d'expliquer la règle, en
usage chez les Urabunna, en vertu de laquelle un clan d'une
302 L'ANNÉE SOCIOMHlIiJUK.
U'Oli-lUO!)

phratrie ne peut se marier que dans un clan déterminé de


l'autre phratrie. Une page suffit pour résoudre lit question
conformément aux principes exposés dans Thesteret of the
Totem.Il y eut d'abord, de petits groupes familiaux, distincts
et indépendants. Chacunportait un nom d'animal et un seul;
c'était uu totem. Le connubiums'établit entre deux groupes
de ce genre qui convinrent d'échanger leurs femmes et de se
les réserver mutuellement. Plus tard. quand les groupesde ce
genre se confédérèrent en phratries opposées–on ne nousdit
pas pourquoi- l'usage persista. Mais pour que les membres
de chacun de ces groupes aient tous un seul et mêmetotem,
il faut que la descendanceait lieu en ligne masculine. Ou
admet donc la priorité de cette filiation. La filiation eu ligne
utérine aurait été instituée plus tard, comme un moyen de
resserrer les liens qui unissaient les groupes ainsi appariés;
car, par elle, les deux totems se trouvaient représentés dans
chacun des deux groupes.
Nous exposons ces théories parce qu'elles nous purais-
sent symptomaliques de la méthode trop souvent pratiquée
par l'école anthropologique. On part du fait à expliquer et on
imagine des combinaisons qui peuvent eu rendre compte,
sans s'obliger à vérifier par l'observationchacune des étapes
dé la déduction. On se met même à l'aise avec les faits. Par
exemple, M. Crawley admet, on ne sait pourquoi, qu'en
Australie le mariage est interdit endehors de ta tribu (p. 8'n,
alors qu'au contraire les mariages internationaux sont fré-
quents et que toute une réglementation a pour objet de les
faciliter. De même, M. Lung a besoin de supposer que la
filiation a été d'abord masculine; il admetdonc l'hypothèse
alors que, pourtant, tant de faitsla rendent, pour le moins,
douteuse.
Aussi ne discuterons- nous pas ces thèses. Nous espérons
avoir suffisamment fait entrevoir l'extrême complexité des
représentations religieuses sur lesquelles repose le mariage
australien pour qu'il soit inutile d'insister sur le simplisme
excessif de cesthéories. K. I).

EHRENZWEfU. Die Scheinehe in europœischen


Hochzeltsbreeuohen. Zeilsclu;f. terijl. HechUwm.,XXI,
1908, j). 266-288.
Le présent article passe en revue les vestiges européens de
r.'oiiiuxij.vrioN'dosiestuji.t: ht u vhiisionuu; 303

l'institution primitive du mariage fictif. – D'après Kohler,


cette institution consiste il l'origine, en Inde pur exemple,
dans l'uniou spirituelle avec un animal, une plante ou uu
objet quelconque qui doit jouer le rôle de génieprotecteur du
mariage réel. Une telle pratique peut servir ou bien da sub-
stitut du mariage réel afin de procurer au célibataire les.avan-
toges religieux et juridiques de l'état matrimonial; ou bien
de mariage préalable. Dans ce dernier cas, le but est primiti-
vement de ménagerune protection surnaturelleaux nouveaux
conjoints, et ensuite,d'une façon dérivée et très vite beaucoup
plus répandue, de les protéger contre les maux qui les mena-
cent en les détournant sur la fiancée imaginaire. Le mariage
fictif apparaît donc le plus généralement comme une ruse
mugiquequi permetd'échapper a l'esprit du mal, de conjurer
ou de réparer ses effets pernicieux.
C'est un rite de ce genre que l'auteur retrouve dans lu fête
grecque appelée <\zî«».«où les anciens Béotiens célébraient
la réconciliation ou plus vraisemblablement le mariage de
Zeuiset de liera. Ils voyaient dans le chêne lu liaueéede Zeus,
comme les Hindous voient dans le basilic celle de Visluni.
Dans tel fêle en question, la fiancée fictive était donc une
poupée de cliéne.Un la brillait uu cours de divers rites. la
elle était censée emporter ainsi avec elle tout malheur et
tout mal. Silot qu'elle était détruite, Zeus et liera pouvaient
s'unir. Ou retrouve encore les mêmes rites de préservation
dans certains usages ossétes et slaves, par exemple dans
celui de lit « vieillefiancée ». (î. U.

WEBEK i'Makuxnki. – Ehefrau und Mutter in der


Rechtsentwlckelung. Kiue Eiiifûlirung. Tiibingen, Mohr,*
•1907,xvi-572p., gr. iû-8".
L objet de ce livre est à la fois théorique et pratique. L'au-
teur se propose d'abord de nous retracer le tableau de ce
qu'a été la condition de la femme aux principales époques
de l'histoire c'est Aquoi est employée la majeure partie de
l'ouvrage (p. 1-500).Mais, dans les derniers chapitres, il de-
mande aces recherches historiques la solution des problèmes
qui se posent aujourd'hui relativement à ce que doit être
présentement la condition juridique de la femme autant dans
la famille que dans la société.
Unexposéhistorique qui va des sociétés les plus grossières
3tiV r/ANXBK
socioi.<>(UQUK.
luoo-imw

que nous connaissions aux récentes réformes du droit civil


allemand touche naturellement à un trop grand nombre de
questions très complexes pour pouvoir être bien approfondi.
Mm"Weber est. le plus souvent, forcée de s'en tenir à des
ouvrages de seconde main. H n'est que juste cependant de
reconnaître que, sur chacun des nombreux peuples dont elle
est amenéeà nous parler, elle s'est aussi sérieusement infor-
mée que le permettait l'ampleur du sujet qu'elle s'efforce
d'embrasser. Leplus souvent. elle a su découvrir les ouvrages
les plus importants et elle les utilise en général avec un juge-
ment et un esprit critique auquel il convient de rendre
hommage.
Cequi manque plutôt a ce livre, c'est une pensée orguni-
satricB qui dispose les faits suivant un plan méthodique et
inarque la manière dont ils convergent vers la conclusion
où l'on tend. 1/ordre dans lequel sont abordées les questions
est assez extérieur Un premier chapitre est consacrée toutes
les formes primitim de commerce sexuel et de mariage dans
le suivant sont confondusles ftgyptiens. les Babyloniens, les
Hébreux, les Arabes avant et après l'Islam, les Grecs et les
Romains le troisième traite séparément du droit germanique,
sans qu'on voie pourquoi il vient il cette place, si ce n'est
parce qu'il précède mais pas plus que le droit romainj le
droit iniidit'Videt li> droit moderne qui sont ensuite abordés.
De plus, iliiiis cliiiciim: deces études particulières, l'auteur
n'a pus su faire porter son cllort sur un nombre restreint de
points uelleiiieut déterminés,choiris eu raison du luur impor-
tance pour l« problème général qui est traité mais il est
confusément question de tout ce qui se rapporte à la morale
.des sexes, ;iu niariagi'. à la famille, aux droits civils de la
f«mmp, etc. Cette dispersion achevé de rendre un peu trouble
l'impression laissée par l'ouvrage.
Ce n'est pas que tout le travail ne soit pas domina par une
idée directrice; elle est môme, comme on va voir, d'une assez
grande simplicité.
Tout d'abord, l'auteur se refuse à admettre qu'il existe un
rapport défini entre les régimes économiques qui se sont
succédé dans l'histoire et la condition sociale de la femme.
Sans doute, il ne mécouuait pas que la femme est plus ou
moins bien traitée, selon l'importance plus ou moins grande
de son rôle économique. Mais, suivant lui, l'iiction de ces
facteurs n'est que secondaire. Surtout, il nie que, comme te
I.WiANISATIII.N UOMESTKH'K HT «ATIilHOSIAl.E 365

soutiennent certains socialistes, le mariage monogamique et


l'asservissement de lu loin nie aient pour cause essentielle
l'institution de la propriété privée. On sent M"1"\V, perpé-
tuellement préoccupée de combattre la thèse, bien connue,
de Engels. Il est permis de trouver cette préoccupation exces-
sive et la place ainsi attribuée à celte théorie tout a (ait dis-
proportionnée avec sa valeur scientifique.
C'est principalement l'évolution domestique qui aurait
déterminé la manière dont se sont développés les droits de la
femme; c'est la place de la femme daus la famille qui aurait
déterminé sa place dans lit société. Le principe est incontes-
table, mais la conception que l'auteur se fait de l'histoire de
la famille est d'uu simplisme qui lui dissimule, en partie,
la complexité du problème examiné. M' \Y\, à la suite
de- Grosse,ne reconnaît que deux types familiaux, nettement
vaste agrégat
distincts l'uu de l'autre. C'est le clan (die SSi/ipei,
d'individus qui ne sont pas nécessairement consanguins les
uns des autres c'est ensuite lit famille patriarcale, qui peut
avoir une étendue très grande, comme chez les Slaves, ou
moindre, comme citez les Romains, ou plus restreinte encore.
là où elle ne comprend que les descendants d'uu seul couple,
tuais qui, sous des différentes formes, repose sur le même
principe et présente les mêmes caractères disliuctifs. Elleest
formée par uu groupe de parents soumis à l'autorité d'uu
chef mâle que désignent ou sou âge, ou l'élection, ou sa
situation sur l'arbre généalogique de lit famille. Non seule-
ment un grand nombre de types différents se trouvent ainsi
confondus sous une même rubrique, mais, de plus, ou remar-
quera qu'il n'est pas question de la famille utérine ou mater-
nelle. C'est qu'eu effet l'auteur y voit.,non un régime familial
mais un arrangement très contingent, du à cer-
taines combinaisons de circonstances, et qui peut se pro-
duire soustous les régimes possibles. Quaud la famille de lit
femme jouit d'une supériorité économique ou autre par rap-
port à la famille du mari, la première tend naturellement à
eut ruiner dans sou cercle d'action le nouveau ménage et les
enfants qui eu naissent. Aussi est-il rare que lu filiation uté-
rine uese rencontre pas concurremment avec la filiation con-
traire dans la même société. Ce serait seulement dans un
très petit nombre de cas que le premier système régnerait
d'une manière à peu près exclusive et serait considéré comme
la base normale des relations domestiques et conjugales. Et
300 I.'a.NNKK SuClOUMilytK.JTO-IUO'J

d'ailleurs, suivit notre auteur, le sens dans lequel se fait la


liliatiou n'aurait pas pour effet d'affecter la structure interne
de la famille et ne suffirait pas à donner naissance à un
type
familial déterminé.
11nous paraît inutile de discuter une thèse que contredisent
trop de faitsconnus. Nousne pouvons, d'ailleurs, nous empo-
cher de penser que M™\V. ue l'aurait pas
acceptée aussi faci-
lement, si la théorie de Engels, qu'elle a perpétuellement eu
vue, n'avait attribué à la famille matriarcale uue importance
primordiale. – Quoiqu'il en soit de ce poiut particulier, voici
comment l'histoire de la femme est rattachée par l'auteur ù
l'histoire de la famille.
Ce qui caractérise le clan, c'est le communisme. C'est un
groupement étendu où tout est communà tous, où l'individu,
par suite, u'a pas de sphère d'action qui lui soit propre; il ne
peut pas se faire depersouualité il est absorbé dans la collec-
tivité. La constitution de la famille patriarcale
correspond à
un premier mouvement dans le sens de l'individuation. Le
vaste agrégat que constituait le clan se segmente en un cer-
tain nombre de familles particulières, autonomes; chacune
administre comme elle l'entend les intérêts qui lui sont
propres. Ainsi, à la vie une et homogène de l'origine se trouve
substituée uue pluralité de foyers d'activité hétérogènes et
indépendants. De plus, à lu tête de chacun de ces groupes se
trouvait placé un individu, qui, grâce à l'étendue des pouvoirs
dunt il était armé,"avait conscience de lui-même comme
d'une persoune. A mesure que les groupements familiaux
sont allés en se segmentant et en se réduisant
davantage, ce
mouvement d'individuatioi) lui-même n'a fait que se dévelop-
per et s'accentuer, jusqu'au moment où la famille n'a plus été
normalement composée que. du couple conjugal et de ses
enfants mineurs. Alors chaque homme, une fois adulte, s'est
trouvé exercer les pleins droits qui reviennent à une person-
nalité morale.
Mais ce mouvement n'a profilé qu'à la partie masculine de
l'humanité. Les chefs des familles particulières ont toujours
été des hommes. Que cette hégémonie ait été nécessitée
par
les conditions mêmes de la vie, c'est ce que l'auteur ne con-
teste pas. Notamment l'importance des fonctions militaires
explique cette primauté sociale attribuée au sexe fort. Seule-
ment il eu est résulte une subaUernisation.de la femme
qui
dure toujours. Car la souveraineté de l'homme, une fois éta-
l.'ttltliAMJMAliM.N KT il.Vl H1UUNIAI.K 30~
DOMBSTIQl'K

blie, s'est maintenue pur la force des préjugés et c'est ainsi


qu'aujourd'hui, bien que le vieux pouvoir patriarcat n'ait
plus sa raison d'être, la femme est toujours traitée comme uu
être inférieur; et, en cette qualité, elle est empêchée de déve-
lopper librement su personnalité, tant à l'intérieur delà mai-
son que dans lu vie publique. Dans cette situation, M' W. ne
voit donc qu'une survivance qu'il faut travailler à faire dis-
paraître.
Comme c'est le mariage qui, en enchaînant la femme ù
l'bomme, met la première dans un état de dépendance, on a
proposé de supprimer le mariage, comme institution sociale,
et d'en faire un libre contrat abandonné tout entier à l'arbi-
traire des parties. tësprit sagement conservateur, l'auteur
repousse ce remède qui lui parait il la fois inefficaceet dange-
reux. Les formalités nuptiales lui paraissent indispensables
comme moyen de constater publiquement et d'une façon cer-
laine la volonté d'un homme et d'une femme de vivre
ensembledans l'état de mariage et d'accepter les conséquences
juridiques de cet état. Mais comme le mariage ne lui semble
guère utile qu'a ce titre, M1"*\V. s'accommoderait très bien
d'un régime où le lien conjugal serait singulièrement relâ-
ché, où le mariage ne serait plus qu'un moindre mariage. Au
nom de l'individualisme morul dont elle se réclame, elle
demande que le mariage puisse être rompu par la seule
volonté, confirmée et dûment constatée, des parties. Quandou
a cette conception du mariage, on prend aisément son parti
de tout ce qui peut compromettre l'unité organique de ta
société conjugale et de la famille. C'est pourquoi l'auteur
croit pouvoir revendiquer une complète assimilation juri-
dique de ta femme au mari qu'il s'agisse de l'éducation des
enfants ou des décisions à prendre touchant les affaires
domestiques, aucun des deux époux ne devrait avoir de droits
supérieurs à ceux de l'autre1.l,
Noussommes loin de contester que le statut juridique de la
femme, tel que le détermine le droit civil des peuples euro-
péens, n'appelle d'importantes réformes. Mais d'un autre
côté, l'argumentation simpliste de M"" W. et les conclusions
qu'elle en tire méconnaissent trop, croyons-nous, la com-
plexité du problème.
1. Kncas de dissentimentsur la manièred'éleverles enfuiils,l'autour
ileimmde lue les lillossoientironllées
la directionde)u méiv.lesfils6
l'dledu père.
368 !NNEK SfteiOlOOiODB, ISU619UU

Toute su théorie repose sur ce principe, que la famille


patriarcale a détermiué un complet asservissement de la
femme. Or, sous cette forme absolue, lu proposition est des
plus contestables. Assurément ce régime domestique a douuè
naissance à la minorité juridique de la femme dans lu vie
civile. Mais, d'un autre côté, commedans ce même type fami-
lial, la vie de famille est beaucoup plus intense et plus i nipor-
tante que daus les types antérieurs, le rôle de la femme, qui
est précisément de présider à cette vie intérieure, a pris, lui
aussi, plus d'importance et la situation morale de l'épouse et
de la mère s'est trouvée grandie du même coup. Eu môme
temps et pour la même raison, le mari et lit femme se sont
trouvés rapprochés, plus directement et plus constamment
en contact, parce que le centre de gravité de la vie masculine
a cessé d'être, autant que pur le passé, excentrique à la mai-
soit. Plus la famille tenait de place daus les préoccupations
de l'homme, plus il se sentait l'associé de sa femme, plus il
perdit l'habitude de voir eu elle une inférieure. Ce résultat
est d'autant plus marqué que la famille patriarcale est plus
forlemeut et plus solidement organisée. C'est ainsi qu'à Rome
où le pouvoir patriarcal atteint son maximum de développe-
meut, ta femme est entourée de respect, elle partie la con-
ditiou de sou mari. Sous ce rapport môme, Home était singu-
lièrement en progrès sur Athènes
Mais qui ne sent que tout ce qui peut contribuer à affaiblir
l'unité organique de la famille et du mariage doit nécessaire-
ment avoir pour effet de tarir cette source de la grandeur
féminine' Les sentiments de respect dont elle est l'objet et
qui sont allés eu s'accentuant ù mesure qu'on avance dans
l'histoire ont, en grande partie, leur origine daus le respect
religieux que le foyer inspire. Si la famille n'est plus consi-
dérée que comme un rapprochement précaire entre deux
êtres qui peuvent, à tout instant, se séparer s'ils le veulent,
qui, tant que dure l'association, ont chacun leur cercle d'iu-
téréts et de préoccupations, il est dillicile que cette religion
subsiste. Et lu femmeeu sera diminuée. Sans doute, on pense
que ce qu'elle perd d'un côté-,elle le retrouvera de t'autre, par
suite du rôle plus considérable qu'elle jouera dans la vie
civile. Toujours est-il que le gain qu'elle devra à la conquête
I. fVuuteurull riljui:<:t:tlituonsidûnition
iluntjouiraitluiiwlrnno
innmiiic
it l'institution
fiesjutlx nufilhusinemanu.MaisMit assi'rtionUisturûiuc
nouspai'uilbienilifllcilcil juslilier.
r/OBUANISATlOX KTHATRIMOXIM.K W)
DOMESTIQUE
des droits qu'on revendique pour elle sera compensé par des
pertes importantes; cela suffit à montrer que le problème est
moins simple qu'on ne pense et c'est tout ce que nous vou-
lions établir, E. D.

RICHARD(Gaston). La Femme dans l'histoire (Biblio-


thèquebiologique et sociologiquedé la femme).Paris, Octave
Doin, 1909, p. 466, in-12.
Le problème que se pose M. Richard est celui-là même que
traite Ua° Weber dans In livre dont 11vient d'être rendu
compte. Il s'agit d'interroger l'histoire et l'ethnographie sur la
condition passée et future de la femme. Pour résoudre cette
question, les deux auteurs emploient sensiblement la même
méthode. Comme MracWeber. M. R. passe en revue, d'une
manière nécessairement sommaire, les peuples divers. Toute-
fois, il a sur sa devancière cette supériorité, entre autres.
qu'il se rend compte de la difficulté et, presque, de l'impossi-
bilité de l'entreprise (p. I). Il s'excuse de la tenter en faisant
remarquer que, autrement, la bibliothèque de la femme eût
été incomplète. Il est trop averti pour ne pas sentir les graves
inconvénients scientifiques et même pratiques de ces cons-
tructious prématurées.
Un peu comme M™* \Y\, il distingue trois principales étapes
(nous laissons de côté les stades de transition) dans l'histoire
de la famille, du mariage et de la femme. Il y a d'abord la
phase du droit maternel qui a pour caractéristique l'absorp-
tion' des iudividus des deux sexes à l'intérieur d'un groupe
familial, recruté en ligue utérine. La femme y est à peu près
sur le même pied que l'homme mais le droit collectif y prime
le droit individuel. Puis vient le patriarcat, oit ledroit collec-
tif se concentre entre les. mains du père, sous l'influence de
causes principalement religieuses. Par suite, les hommes,
d'une manière générale, jouissent dans la famille d'une
situation privilégiée, taudis que la femme« est désormais une
inférieure destinée à devenir une étrangère » (p. 104). Enfin,
la troisième période est celle oi'i nous sommes; M. R. la déil-
nit par l'individualisme qui est à la base de sa morale. La
responsabilité collective y est remplacée par la responsabilité
individuelle; il en résulte une tendance à l'assimilation de
plus en plus complète des deux sexes au point de vue inoral,
juridique et politique.
E. OtiiKHEiu.– AnniW!
«iciol., 1006-lUOtt. »l
370 l'anmôk sooiobooiotm. îfloo-iuo»

A travers ce schéma, l'évolution de la famille apparaît


comme quelque chose d'assez simple. Malheureusement on
n'a pu arriver à cette simplicité qu'en confondant sous une
même rubrique des formes sociales très différentes. Ainsi le
droit materuel serait celui qu'on observe chez les Australiens,
les Mélanésienset les Indiens de l'Amérique du Nord. Or les
Australiens ne connaissent pas lu maison les Américains en
ont le plus généralement etcela seul su dit déjà il montrer que
l'organisation domestique ne saurait être lu même ici et là«'
Nous ne comprenons môme pas comment on peut parler de
droit maternel en Australie actuellement, c'est une règle
que le mari emmène sa femme chez lui; c'est dans la localité
e leur père que naissent les enfants la femme vit doue au
milieu de gens qui lui sont étrangers, tout comme sous le
régime qualifié de patriarcal. Sans doute, daus un nombre
important de ces sociétés, c'est par la mère que le totem se
transmet; mais la situation juridique de lu femme n'eu est
pas autrement aflectée. On peut supposer, il est vrai, qu'il
fut un temps où lu femme et ses enfants restaient sur leur
territoire natal. Mais ce n'est qu'une hypothèse il nous est
impossible de savoir quelle était l'organisation dpmestique à
ce moment et, eu tout cas, on peut être assuré qu'elle dit-
férait de celle qu'on trouve dans l'Amérique du Nord. – De
même, le régime patriarcal serait celui des Romains, des
Grecs, des Chinois, des Germains, des Juifs, des Japonais de
l'âge primitif (p. 1"lj. Cesont là, pourtant, des civilisations
bien diflérentes. C'est que, pour M. R., aguation et patriarcat
sont termes substituantes; l'un n'irait jamais sans l'autre et
réciproquement. Or, en fait, il y il des familles aguatiques
sans pouvoir paternel. Lu famille, chez les Slaves, est consti-
tuée par un vaste groupe d'agnats qui vivent dans l'indivision;
mais le droit collectif reste diffus dans la communauté et
n'est nullement concentré entre les mains d'uu seul, comme
il le fut à Rome. Il y a donc lu deux types familiaux qui
devaient être distingués et le droit de la femme n'est pas le
même dans l'un et dans l'autre.
L'ouvrage se termine par une note où l'auteur discute notre
théorie de l'inceste. C'est par les sentiments religieux qu'ins-
pire le sang, par le tabou du sang combiné avec le tabou
totémique que nous avions expliqué l'exogamie. L'objection
que nous fait hi. R. est double. c On ne peut, dit-il, affirmer
un rapport de cause il effetentre le totem et le tabou » parce
l/oAOANIÏATIOK gTMAT1UMOXUI.E 3*1
DOMESTIQUE

que « le tabou est une institution polynésienne le totem est


une institution Hmeriudieune » (p. 435).C'est avec la ptus vive
surprise que nous avons lu cette proposition. En réalité, le
totémisme est chose essentiellement australienne on n'en
trouve plus en Amérique que des formes très évoluées et alté-
rées (voir plus haut, p. 78, 108 et suiv.). Le tabou, ou système
des interdits, n'a rien de proprement polynésien il est uni-
versel.
En second lieu, nous dit-on, si los préjugés relatifs au
sang, notamment au sang menstruel, avaient rendu la femme
inviolable, c'est tout mariage qui serait impossible. L'objec-
tion confirme notre thèse. C'est un fait sur lequel nous avons
souvent Insisté ici que, dans les sociétés inférieures et même
dans d'autres, la consommation du mariage est considérée
comme un acte dangereux religieusement, qui met J'homme
en contact avec des forces redoutables. De là viennent le tabou
des fiancés, le tabou des époux et toute sorte de pratiques,
parmi lesquelles la défloration rituelle. R. D.

1». LAPIS. – La femme dans la famille (liilil, ùiol. et


sociol. de la femme),Paris, Uoin, 1908, 834 p., ù\i.
Le problème assigné à il. tapie par le plan de la liihlio-
ihiijue de lit femme était un problème moral « Quelle doit
être au xix«siècle, en Occident, la place de la femme dans la
famille? » M. L. a voulu résoudre ce problème- par une mé-
thode scientifique, persuadé que l'idéal sort du réel, que les
impératifs de la conscience ne sont que des traductions. –
complètes ou partielles, fidèles ou inexactes, logiques ou
incohérentes, – de certains faits. Mettons ces faits en évi-
dence nous aurons expliqué du coup les jugements moraux;
bien plus, nous pourrons justifier les uns, comme adéquats à
la réalité, et critiquer, comme erronés, les autres.
Si, pour appliquer cette méthode, on recherche d'abord
comment varie, en fait, la condition de la femme dans la
famille, on sera amené à constater – eu comparant entre elles
des sociétés par ailleurs très diverses, comme celles des Iro-
quois, celles des lïgyptiens, celles des Américains d'aujour-
d'hui, mais rapprochées par un trait commun le respect
t.lu'ellesaccordent à lit femme que la femme tient dans le
groupe domestique un rangd'autant plus haut qu'elle exerce,
eu dehors de ce groupe, des fonctions plus relevées. (M.L.
373 l/*XNÉBSOelQLOOtQUK.
19UIM909

semble aller ici directement û rencontre de la thèse de


P. Gide sur la Condition pricée de la femme dans le droit
ancien et moderne–suivant que la femme serait d'autant plus
respectée dans la famille qu'elle jouerait dans la société un
rôle plus effacé. – Faut-il donc dire que le caractère des fonc-
tions exercées par la femme en dehors du cercle domestique
explique la place qui lui est assignée ? Selon M. L., les deux
ordres de faits seraient plutôt corrélatifs. Ils dépendraient
l'un et l'autre d'un certain état de l'opinion publique. C'est
l'idée qu'on se fait 1° du genre de cohésion nécessaire au
groupe domestique; ï" du genre de bonheursouhaitable pour
la femme; 3° enfiuet surtout de la valeur qu'elle peutatteindre,
qui détermine la situation qu'on lui réserve, soit en dehors,
soit à l'intérieur de la famille. Suivant les jugements aux-
quels on s'arrête, sur ces différents points, on déclarera qu'il
est juste ou uou que la femme s'émancipe.
Sur ces trois points, M. L. discute méthodiquement – en
utilisant les renseignements de diverses sortes fournis par
l'anthropologie, par la statistique, par l'histoire – les affir-
mations des auti féministes,11établit que dans l'état actuel de
l'Europe, après que l'unité familiale a perdu la plupart de ses
attributions traditionnelles, le nombre des femmes va sans
cessecroissant qui font leurs preuves de puissance en môme
temps que d'indépendance. S'il reste vrai qu'en général les
Européennes restent inférieures a leurs maris, les exceptions
à cette régie, qui nous forcent conformément aux lois que
M. L. a établies dans sa Logiquede fa Volonté– à rectifier nos
jugements de valeur, sont de moins en moins rares.
C'est pour tenir compte de cette variété que M. L. souhaite-
rait au point de vue pratique plus de souplesse dans la ma-
nière dont sont délinis et garantis les droits des femmes. Il
voudrait que, selon les situations, les fonctions, les valeurs
respectives des époux, on put concevoir des contrats mul-
tiples qui détermineraient diversement les relations person-
nelles des époux, leurs relations économiques, la mesure de
leur autorité parentale, les sanctions des infractions au pacte
conjugal, etc. Alors on pourrait parler enfin, non pas sans
doute d'unions libres, (les partisans de l'union libre oublient
que la loi est encore, dans la plupart des cas, la meilleure
garantie de la liberté) mais d'unions justes; elles seraient
adaptées à la réalité variée des faits, interprétés selon les lois
à la fois logiques et morales qui, parce qu'elles gouvernent
l/unaANtSA.TIO!i ttOURSTlQUK
HT UATRIUOKIAI.B 373

l'esprit humain, gouvernent aussi – selon cette sociologie


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psychologie. Leipzig, Veit, 1908, xiv.1020 p. in-8°.
Cet ouvrage ne saurait assurément être recommandé
comme uu modèle sous le rapport de la méthodeet de la com-
position. Les questions les plus diverses y sont traitées sans
qu'ou voie toujours comment elles se rattachent au sujet: les
chapitres chevauchent souvent les uns sur les autres; les
faits sout pris de toutes mains sans beaucoup de choix ni
de critique; ils sont classés d'une manière très extérieure.
Mais, d'uu autre calé, ils sout tellement nombreux et variés
quo la masse qu'ils forment par leur rapprochement ne laisse
pas d'être instructive et suggestive. M. Stoll ne possède pas
seulemeut une énorme érudition livresque; il a voyagé dans
les parties du monde les plus diverses et ses observations
personnelles viennent encore enrichir celles qu'il emprunte à
la littérature écrite. Le spectacle même des choses qui sont
ainsi rassemblées sous les yeux du lecteurntnèoe celui-ci à se
poser des questions intéressantes, bien que, le plus souvent,
l'auteur ne paraisse pas les avoir entrevues. C'est à dégager
«es questions que nous allons surtout nous
appliquer; car
chercher à résumer cet énorme matériel de faits serait une
entreprise à peu près impossible, et, d'ailleurs, inutile.
L'objet de ce livre est do décrire et, daus une certaine
mesure, d'expliquer le rote, variable selon les sociétés, que
370 l'axhRR SOCtnioorQCR. 1908.1909

jouentles différentsseusdansl'activitésexuellede l'homme.


Il y a des sensationsqui excitentle penchantsexuel,qu'elles
soient causées par des qualitésnaturellesou par des orue.
mentsdont se pare chaquesexepour séduirel'autre. Or, lu
naturede cessensationset la manièredontelles sontprovo-
quéesvarient suivantles civilisations.
Il ya donclatin champ
d'études ouvert à l'ethnographieet à l'histoire comparée.
c'est-à-direà la sociologie.M.S. s'est proposéde le parcou-
rir. Ensomme,il s'agitde dcterminerla façondonta étécon-
çue l'esthétiquesexuelleaux différentesphasesde la civilisa-
tion. Aussi l'ouvragepourrait-il être classé à la rubrique
esthétique,si les questionsqui concernentle commercedes
sexesn'étaient empreintesd'un caractèremoral donton ne
saurait, sousquelqueaspectqu'onles considère,faireabstrac-
tion.
Ainsi que nous venonsde le dire, les sensationsexcita-
tricesde l'instinctsexuelsontprovoquées ou par l'état naturel
du corpsou par des artifices.Il semblaitdonc qu'il y eut lit
une divisiontout indiquéeet qui s'imposaità l'étudeentre-
prise on aurait recherchéd'abordquellessont les qualités
naturelles qui, suivant les peuples, ont été considérées
commeles plus propresà éveillerces sensations on serait
passéensuiteaux ornementsqui ont le mêmeeffet.Maistout
en reconnaissantce que ce plana de méthodique,l'auteur y
renonce;il le déclareimpraticablepourdes raisonsquenous
ne comprenonsqu'imparfaitement(p. 20-27 C'est, sans
doute, que les impressionsqui ont cette originene lui sem-
blentpas souleverde question.Cependant,la perfection,sous
le rapport sexuel, du corps fémininou masculinn'a pasété
toujoursconçue de la mêmefaçon; il eût été intéressantde
voirde quelle manièreelle a varié,quelcoefficient,trèsiné-
gal suivantles peuples,a étéattribuéaux différentesqualités
physiques. M. S. s'occupe très peu de cet aspect du
problème.Sonlivreest avanttout uneétuded'ornementique
sexuelle.
Ainsi restreinte, lVtudeest diviséede la façon suivante.
M.S. passesuccessivementenrevueles différentssens,vue,
ouïe,odorat, toucher, et se demandequelleest la contribu-
tion de chacun d'eux à l'activitésexuelle,c'est-à-direpar
quels moyens les différentspeuplesont cherchéà agir sur
l'instinctdu sexeen agissantsur chacundes organessenso-
riels.Onvoitque la divisionesttrès artificielleet ne tientpas
L'onnAxrsATrox
dombstiopb rrr matiuiionuuc 377

à lu nature des choses. C'est ce que rend manifeste ce fait


que, commeles propriétés visuelles sont celles qui out le plus
d'emcacité sous ce rapport, le sens de la vue tient presque
toute la place (vingt-et-unoleçous sur vingt-six que comprend
l'ouvrage).
Au premier abord, on pourrait croire que l'ornementation
sexuelle a du consister essentiellement à développer et à
accentuer les caractères sexuels secondaires; que, par exem-
ple, les hommes ont laissé pousser leur barbe, qu'ils ont cher-
ché à en stimuler artificiellement la croissance et que les
femmesont procédé de même pour leurs cheveux. Maisil s'en
faut que la loi ait la généralité qu'on pourrait être porté à lui
attribuer. Il arrive souvent, au contraire, que les sexes contre-
carrent la nature, que les hommes s'épilent (\>.2l5etsuiv.
que les femmesse fassent raser la tête ip. 100). Inversement,
il est assezfréquent que de longs cheveux soient comme uu
Insigne du sexe masculin (p. 149 et siiiv.i.
Eu réalité, toute cette ornementation, bien loin de n'être
qu'un simple prolongement des différences somatiques qui
distinguent les deux sexes, a des origines essentiellement so-
ciales et, spécialement, religieuses. Sous sa forme la plus
primitive, elle consiste eu images variées, qui sont. par des
procédésdivers, peintes ou gravées sur la surface du corps
de là les tatouages, les mutilations, déformations de toute
sorte qui sont en usage. Or, il n'est pas douteux que ces pra-
tiques ne soient denature originellement religieuse. D'abord,
et l'auteur lui-même le constate, c'est généralement au milieu
de cérémonies religieuses qu'elles ont lieu elles fout partie
des rites d'initiation. L'iuitiatiou, en effet, implique des
tatouages, des excisions, des mutilations, des déformations de
toute sorte, qui ne sont pas les mêmes pour les hommes et les
femmes. Tous ces usages ont primitivement un objet reli-
gieux mais que l'on perde de vue leur raison d'être pre-
mière et ils deviendront des ornements. Une autre cause
devait, d'ailleurs, incliner les hommes ù développer ce pre-
mier germe dodifférenciaiion. C'est une règle générale que les
groupes sociaux tendent à se distinguer les uns des autres par
des signes physiques apposés sur les corps des individus. Or,
à l'intérieur de chaque agglomération, hommes et femmes
formentdeux groupes distincts, qui campent séparément, qui
ne vivent pas de la même vie religieuse. Il était donc naturel
qu'ils cherchassent à se différencier les uns des autres par
378
8 i.wi!£ socruLUftfQirk.
tuociMu
des procédésanalogues à ceux qui sont employés pour diflé-
rencier les clans.
Aussi rornoinentHtion primitive, loin de se borner à n'ôtre
que le développement de dispositions et de qualités natu-
relies, est-elle souvent coutre-nature. Elle implique des
sévices exercés sur le sujet; elle l'astreint a des gènes que
uous pnnillruieut intolérables et à de véritables supplices. On
lui déforme le crâne, le pied, on lui perce les oreilles, les
lèvres, etc. C'est que, dans le principe, il s'agissait d'opéra-
tions graves, solenueiles, proprement liturgiques qui n'ont
pris qu'à la longue un caractère esthétique. Toutes ces pra-
tiques qui nous semblent absurdes, monstrueuses môme,
quand on les attribue à je ne sais quel besoin instinctif dese
parer, deviennent, au coutraire, parfaitement explicables
quand un les a rattachées si leurs origines. Ce qui, ici comme
ailleurs, a amenél'homme faire ainsi violenceà ses instincts
individuels, ce sont tes représentations collectives qui, pour
une si large part, détermineut sa conduite.
.Maisles faits qui précèdent posent d'eux-mêmes une impor-
tante question dont l'auteur ne semble pas se douter. L'ini-
tiation est surtout un rite des hommes dans un grand nombre
de sociétés, les femmes en sont exemptesou, en toutcas, elles
ne lu subissent que sous une forme plus restreinte et relati-
vemeut simplifiée. l'ar suite, les images, dessins, marques de
toute sorte dont nous venons de parler, sont très souvent
réservés plus ou moins exclusivement aux hommes. Ce sont
eux surtout qui se tatouent, se peignent, se mutilent, etc.
d'où il suit qu'ils se décorent alors beaucoup plus que les
femmes et il semble bien qu'ils gardent encore cette espèce
de privilège on matière de décorations, là môme où celles-ci
ont pris un caractère plus franchement esthétique. La lecture
des chapitres IV à XIII du livre (\>. 128en particulier;, est,
sur ce point, très démonstrative. Il est cependant certain
que, plus tard, une véritable inversions'est produite dans les
dispositions des sexes sous ce rapport. La toilette, pour em-
ployer une expression vulgaire, est devenue chose féminine.
I) serait intéressant de savoir comtneuts'est produit un chan-
gement aussi radical. Mais nous ne trouvons rien daus l'ou-
vrage de M.S. qui permette de résoudre le problème ou môme
d'en orienter la solution.
Des ornements précédents, qui consistent en modifications
introduites dans la contexture des tissus ou dans leur aspect
L'oHtHMSATtOS MIMBSTIQUR Kt MATRIBOmi.B 37»

extérieur, ou passe (oui naturellement à la parure propre-


ment dite, c'est-à-dire la décorât Uni au moyeu d'objets
extérieurs apposés sur des parties différentes de l'organisme.
Ici encore, les croyiiuees magico-religieuses paraissent bien
avoir joué un rôle prépondérant. C'est particulièrement évi-
dent pour les ornements en métal, or, argent, cuivre, fer. Les
métaux ont été pendant longtemps considérés comme doués
de propriétés mystérieuses. Ou les emploie comme amulettes;
ils sont chargés d'interdits; par suite, ils serventspécialement
dans les cérémonies religieuses; ils sont consacrés aux dieux
(p. 384, 392, 408, 421). H n'en est pas autrement des pierres
(p. 406 et sniv.), des coraux (p. 410, etc.). La (orme même
que l'on donne aux bijoux a souvent une signification mys-
tique (p. 4S4-43ÎJ.443. 448j. Toutes ces parures n'étaient donc
pasprimitiveineulomployéescoinine telles: elles n'étaient pas
destiuées essentiellement à embellir, à plaire, mais à exercer
une action ellieace ei utile, à rehausser lu vitalité des indi-
vidus qui les portaient, à les protéger contre des inlluences
dangereuses, etc. Pour cette raison, elles sont, à l'origine,
d'un emploi plus masculin que féminin; car les choses reli-
gieuses vont tout nalurellemtuU aux sujets qui tiennent lit
place la plus importante dans la vie rel.igieu.su.L'inversion
que nous consultions tout à l'heure s'est donc également pro-
duite pour cette forme de décoration et c'est ce que M. S. re-
connaît lui-tnônio (p. 48Hi. Mais il ne se demande pas ce qui
a pu donner lieu à ce singulier changement.
Des bijoux et des pierres considérées comme précieuses,
AI. S. passe aux couronnes, bandeaux, bonnets, masques,
ceintures, etc. (p. 451 et suiv.j. L'origine religieuse de ces
divers objets de toilette est bien comme; elle est, d'ailleurs,
apparente même à travers l'analyse qu'en tait l'auteur qui,
pourtant, n'est pas suspect d'idée préconçue sur ce point.
Mais, au cours de ses descriptions, M. S. perd complètement
de vue le sujet qu'il traite car il est, le plus souvent, difficile
d'apercevoir quel rapport il y a eutre ces différentes sortes de
parure et lecommerce des sexes, sauf pour ce qui concerne
les voiles qui servent à dissimuler les parties génitales. L'es-
pèce de respect religieux qu'inspirent les organes sexuels
sont certainement pour beaucoup dans les précautions prises
pour les isoler, pour les dérober aux regards. C'est pourquoi
ils sont plusgéuéralemeut et plus complètement voilés chezla
femme que chez t'homme (p. 493) c'est que, à cause des ma-
380 l'asnkb sqciologiqur. M0&-JU09

uifestalions menstruelles, les parties génitales de la femme


sont marquées d'un ctiructôre religieux beaucoup plus uccusé
que celles de l'homme. Il paraissait indiqué*de chercher à
cette occasion comment ces pratiques ont contribue à former
le sentiment de lu pudeur et de quelle manière ce sentiment et
les règles d'étiquette qui en dérivent ontagi sur t'attrait mutuel
des sexes. MaisM. S. dit à peine quelques mots de la question
dout il ne parait pas sentir toute la complexité (p. 486-487).
Cette question est étroitement solidaire de celle du vête-
ment en général. On s'attendrait à voir celle-ci occuper dans
le livre une situation tout à fait centrale, car le vêtement est
un des moyens les plus efficaces qu'ait inventés la civilisation
pour aiguillonner et contenir, exciter et railiner le sentiment
sexuel. L'influence qu'il a exercée sur la morale des sexes
peut difficilement ètreexagérée. Toute sorte de problèmes se
posaient à ce sujet qui sont à peine effleurés. Notamment, il
eut été intéressant de rechercher comment le costume de la
femmes'est différencié de celui de l'homme et quelles out été
les conséquences de cette différenciation. Pour l'expliquer,
M. S. se borne à invoquer les différences anatoniiques et phy-
siologiques qui séparent les deux sexes (p. 492). Il n'est pas
douteux que bien d'autres considérations sont intervenues et
même ont joué un rôle prépondérant. Ce n'est pas seulement
pour des raisons de commodité matérielle que le vêtement
masculin a été si souvent interdit aux femmes et réciproque-
ment, et cela sous la menace de sanctions religieuses. Cette
différencen'est qu'une forme particulière de ce vaste système
d'interdits qui, dans toutes les civilisations, séparent maté-
riellement et moralement les deux sexes.
Jusqu'à présent, l'auteur avait successivement examiné les
excitations produites sur le sens de la vue par le corps
humain au repos, il passe maintenant à celles qui ont pour
origine la vue du corps eu mouvement, c'est-à-dire la danse
(p. î>72j.Nousreproduisons cette classification, telle que nous
la trouvons dans ce livre; il est inutile de faire remarquer
combien elleest artificielle et superficielle. En réalité, ce n'est
pas par la vue ou ce n'est pas principalement par elle que la
danse agit. C'est qu'aussi bien cette façon de ranger les faits
d'après la nature des sens intéressés est d'un simplisme qui
ne permet guère d'apercevoir les vrais rapports des choses'.l,

1.Vnfaitdonnerauneiilûcticlu mantërodontsontranguuslesinaliÏTos
L'ulWANIiATION KTUATAIUONIALB
DOUBSTlgHË 381

Que la danseait une Influenceérotique.c'est ce qui est


connude tout le monde.Mais,d'un autre côté,il parait bien
établiqu'elle n commencépar être unecérémoniereligieuse;
c'est ce qui ressort des chapitres mêmesque M.S. lui con-
sacre. On s'explique d'ailleurs sans peine qu'elle soit née-
dans la religionet de la religion. En effet,unecérémonieri-
tuelle est toujours un système de mouvementscollectifs,
accomplispar un grouped'hommesassemblés;or, des mou-
vementsde ce genre ne sont possiblesque s'ilssont réglés,
c'est-à-diresoumis à un rythme, à une mesure.Maispour
quela danse ait pu être, à la fois, un rite et un puissantsti-
mulaut de l'instinct sexuel, il faut qu'il y ait uneintime pa-
renté entre l'état où se trouvent les hommesquand ils sont
sous le coup du désir, et celui où les met l'exaltationreli-
gieuse.Denombreuxfaitsdémontrenteffectivement cette pa-
renté. Onsait comment,en Australie,l'échangede femmeset
de véritables bacchanalessexuellesconstituentparfois un
rite auquel est attribuéeune efficacitéparticulière.Cettealli-
nilé du sentimentreligieux pour les manifestationserotiques
tient à plusieurscauses.D'abord,quand il esttrès intense,il
ne va pas sansune violentesurexcitationdu systèmenerveux
qui prédisposeà l'amour.De plus, l'acte religieuxpar excel-
lence,c'est l'uniondu fidèleavecsou dieu l'hommes'ouvre,
se donnela divinité. Or, l'amour impliqueun abandondu
même genre, un don de soi, une communionavec l'objet
aimé. Le mêmeprocessuspsychiqueestdoncà la basede l'un
et de l'autre état. Ons'expliqueainsiqu'ilspuissentse mêler,
se confondre,se transformerl'undansl'autre.Voilàcomment
il se fait que le mystiquese représenteses rapportsavec son
dieusous la formed'un commercesexuel.
Cette parenté, une fois admise, permet peut-être d'entrevoir
une des causes qui ont dû donner naissance aux cultes phal-

liques. On croit d'ordinaire que ces rites s'adressent aux puis-


sances génératrices de la vie, symbolisées sous la forme ma-
térielle de l'organe dans lequel elles résident éminemment.
Mais il est probable que, ici comme ailleurs. le symbolisme

Iraili-us dans le livra "•V'.stiipn's les <|uali|iivs paiii-s consui-Tvi-saux vi'-lu-


uieiili <|u'il l'iit piu'li- ilu la eircunelsliui ot de i|iii'li|itis auiivs pratiqur-s
riimiluii'os l|>. VM ni sniv.i. MunifcstiMiionl la elrroncirinn i-st un rite il<-
iiii°'in»nuluiv ijuu le lulouugi!, les imiUlations iliversoî dont il csl tiiiilvnu
ilûlml do l'ouvrage. Cesi|ii«'slion» nml iHniHwiiwl |Mirriiti'>cl, par non,c-
i|tiu>it, il y avait inlvrôl à m.- pus les ilisjoiudro aussi iinliruk'mi'iii.
382 L'ANNÉE SOCIOIOQIQUK.JHOMWW

n'est pu un fait primitif. Si, comme nous venons de l'indi-


quer, les pratiques religieuses, dans des conditions détermi-
nées, surexcitent les penchants sexuels, il s'est naturelle-
ment produit, au cours des cérémonies, des exhibitions
rituelles des organes génitaux; M. S. en
rapporte plus d'un
exemplo (p. 620 et suiv.). Ces organes ont ainsi pris. dans
certains rites, uue place importante ils ontété
l'objet de pra-
tiques déterminées et d'une véritable dévotion. L'interpréta-
tion symbolique de ces pratiques était, d'ailleurs, tellement
naturelle, tellement appelée par la nature des choses qu'olle
a pu se présenter assez vite aux esprits; c'est
pourquoi on la
rencontre très tôt dans l'histoire des religions.
Les faits réunis daus les dernières parties de
l'ouvrage
(ch. XXl-XXVJ)ne nous paraissent pas avoir le môme intérêt
que les précédents. Au sens de l'ouïe, l'auteur rattache les
effets produits par le chant et la musique, bien
que, on réa-
lité, ils soient très proches parents de ceux que produit la
danse et n'en puissent ôtre que difficilement
séparés. Vient
ensuite un chapitre sur les ditlérentes sortes de
grivoiseries,
aussi bien verbales que dessinées, sculptées ou
mimées, où
l'on trouvera des renseignements assez curieux, mais dont on
s'explique mal la place à cet endroit du livre. Quant au sens
de l'odorat, l'auteur recounalt lui-même qu'il ne
joue, dans les
faits étudiés, qu'un rôle très secondaire. Reste le toucher à
ce sujet, M. S. fait une histoire sommaire de ce
qu'on pour-
rait appeler les pratiques manuelles dans l'art
amoureux,
normal et anormal.
Ainsi que nous l'annoncions en commençant, nous nous
sommes efforcéde dégager les questions que
posent les faits
confusément assemblés par M. S. Mais par dessus tous les
problèmes particuliers que nous avons indiqués chemin fai-
sant, il en est deux qui dominent toute la matière et
que
l'auteur ne parait pas avoir soupçonnés.
Ce qui résulte, en effet, de tout ce qui précède, c'est
que la
vie sexuelle présente deux aspects essentiels.
Si, comme nous l'avons vu, l'ornemeutique sexuelle a des
origines religieuses, c'est que, jusqu'à uue époque relative-
ment avancéede l'histoire, le commerce des sexes si lui-même
un caractère religieux. Il est même peu de relations sociales
qui inspirent à un plus haut degré cette sorte d'inquiétude
respectueuse qui est caractéristique de l'émotion religieuse.
D'ailleurs, ne survit-il pas quelque chose de cette
impression
L'OBlUXrSATlONDOMISiSTIOUE
BT MATBIBONULE 383

dans notre sentiment de la pndenr? Une étude consacrée it


cette forme spéetolede l'activité humaiuenurnitdonc dn com-
mencer par chercher il établir lu nature do cette religiosité et
à eu déterminer les causes. C'est là que se trouve
l'origine
de beaucoup des particularités que nous avons eu l'occasion
de signaler.
Mais, et c'est ce que démontre également cet ouvrage, ce
même commerce a aussi des rapports étroits avec lu vie artis-
tique. Ces ornements, ces parures, ces raffinements de toute
sorte dont il vient d'être question n'ont pas seulement pour
résultat d'exciter le désir, mais aussi d'éveiller des impres-
sions esthétiques; et d'ailleurs ces impressions réagissent sur
le désir et le renforcent. L'amour appelle l'art et l'art stimule
l'amour. Il y a donc entre ces deux sortes de manifestations
une intime affinité. Il etlt été intéressant d'en chercher les
raisons. Ne serait ce pas que, si l'amour a objectivement des
lins utiles et sérieuses, il les ignore et s'en désintéresse? Pour
le sujet qui en goiUo les charmes, il n'est qu'une sorte de jeu.
Ou s'explique donc qu'il ollre une matière appropriée à
l'imagination de l'artiste. En prenant une forme esthétique,
il se développe conformément à sa nature. E. I).

Dl'I.AUHK.– Die Zeogung in Qlauben, Sitten u. Gebrœuchen


d. Voslker. Verdeutschlu. ergnuxiv. Kraussu. Uniskcl.Leipiig.
DeulscheVerlagsaklicngesell.sclmft,
I90!l,349p.
t'OHEL(A.). Sexuelle Ethik. Mtinclien,Behiliardl,1900,31
p.,
in-8".
THOMAS ;\V.). Bex and Society studies in the social psycho-
logy of sex. Chicnuo, L'nlversityuf Chicagol'i-ess, 1007,VI-
325 p.
l-S.). – Anthropophyteia; v. Il elIII. Leipzig,Dculschc
Vcrlaysukliengcîscilscliaft.
HAIi(il). – Geaohleohtsleben, Qeburt und Missgeburt in der
asiatisoben Mythologie. 'Mtsehr.f. EUmol., l'JOii,p. :,W\I.31
J.
KAltSCIl-llA.SCK.Forsohungen ûber Gleichgeschlechtsliebe.
I. Das gleiulifîescliUiclitsclKiliclie
I.ebenil. Ostasiaten Cliincsen.
Japaner, Koreer. Miinchuu.SeiU.ÎUOC, l\-in p., ia-8».
KHAl'SS.– Das Geschlechtslebenin Glauben,Sitte und Brauch
des Japans. t.uipxiff,licuisclieVcrlagsulcdengirscllsciian,ii« p.
KACNKCX 1)KVIM.KNKL'VK. – Le baiser en Grèce. Paris. Dara-
gon, i«joo,)n-H«,2l2|i.
D84 l'J0<M908
l'ANKÈBSOCIOtOGlQl'B.

STElt.N(ll.J. – Oesohlobto der œffentliohen Slttllobkeit in


Ruasland Kultur, Aberglaube, Sitten und Gebrœuohe
Berlin, Barsdorl",i»07, in-S»,V-J02p.
I.LK1CH(J.). – Historisohe QueUensohriftenznmStudium der
Antbropopbyteia. I. Volkstûmliohe Dlohtungen der Italie-
ner. Leipzig, Deutsche Verlagsaklieiifîesellscli.,
1900, in-8u,
X1X-152 p.
I.El'TE (Josrp).– Das sexuelle Problem und die katbollsobe
Kirohe. Fratikfurt,Neues frankfmler Verlug,1908,XXIV413p.,
in-8" (Uieiide scientifique;.

V. ORGANISATION SECONDAIRES
DESCROirt'ES
'CadM, ili»lricls, groujiomcul urLaiai.

Par MM.Rkvxieii
et Dviikiikiu.

C. BOOGLK.– Essais sur le régime des Castes ( Trawix


de l'Année Sociologique).Paris, Alcan, 1908, Xll-278 p.,
in-8".
Les Essais qui composent ce livre, bien que publiés it des
époques et dans des recueils divers, n'en forment pas moins
un tout qui n'est pas trop artificiel. Munisd'une définition du
régime des castes, nous en étudions, dans une aire privilégiée,
i'Inde I, lesracines II, la vitalité III, les effctssur le droit,
la vie économique et la littérature.
Le régime des castes se définit 1° par la spécialisation
héréditaire; 2" par t'organisation hiérarchique; 3° par la
répulsion réciproque. On a voulu faire du premier de ces
traits la racine des autres, et expliquer ta caste par la gliilde
iDalilmann, Nesfield) mais on se heurte à degrossesdifficul-
tés quand il s'agit d'expliquer ainsi l'hérédité même, et sur-
tout la hiérarchie et l'opposition des groupes.
C'est avec plus de raison qu'on cherche l'origine de la caste
dans les institutions familiales, en considérant comme domi-
nateur le caractère qui fait de la caste un groupe eudogame
exclusif. Reste à fixer quelles sont ces institutions familiales.
11n'y a pas de raison pour les considérer comme nécessaire-
meut aryennes, et il y a bien des difficultés à se les représen-
ter sur le modèle de la gens, comme le fait M.Sénart. H serait
plus exact de les rapprocher des groupes larges de parents,
OKQAMSATION
DKSUnOUI'KS
SECONDAIRE* 385
clans ou tribus, qu'un culle fermé isole les uns des autres.
Mais, si la spécialisation des occupations, luiu de fonder la
différenciation des castes, dérive plutôt elle-môraed'une diffé-
renciatiou préalable, reste à expliquer comment cette diffé-
renciaiion devient hiérarchie. Dire qu'il y a, dans la divisiou
du travail ou dans l'opposition des groupes, un
germe de hié-
rarchie ne suilit pas. Il faut savoir que cette hiérarchie a
pour
sommet le brahmane, dont la domination est incontestée et
dont la supériorité est supériorité de race, pureté de sang, et
surtout monopole du sacrifice. C'est à la distance
qui la
sépare du brahmane que se mesure la dignité d'une caste.
Par le principe de sa hiérarchie, comme pur son
endogamie,
le régime des castes apparaît comme une institution reli-
gieuse celle-ci vit et se conserve par l'observation des règles
qui définissent pour elle le pur et l'impur. Ail leurs carles
causes génératrices de la caste ne sont pas spéciales à l'Inde
l'opposition des groupes primitifs, bien que religieuse est
sou fond, a cédé et fait place à l'unité politique qui nivelle.
Dans l'Inde, la division, la spécialisation, la hiérarchisation,
loin de céder, sont allées croissant. Le bouddhisme, dont l'in-
tention n'était pas d'ailleurs de rien cliauger à la caste, l'a
laissée intacte. Et l'administration anglaise n'est
capable ni
d'empêcher le jeu de la caste et de ses divisions, ni de ruiner
le principe de sa hiérarchie. On peut, dans ces deux circon-
stances, apprécier la vitalité du régime.
Si nous passons à ses effets, on pourrait s'attendre à consta-
ter des correspondances précises entre les différences sociales
et les différences mentales. Il n'en est rien la spécialisation
héréditaire u'a pas créé des facultésmentales essentiellement
différentes. Ces différences sociales d'ailleurs, pour le dire
en passant, ne correspondent pas non plus à des différences
physiques et l'anthroposociologie doit renoncer à vérifier ici
ses thèses maîtresses.
A étudier maintenant, à côté de la caste, le droit hindou
qui est l'œuvre des brahmanes, nous le comprendrons mieux
et nous arrivons à cette conclusion, qu'après t'avoir
trop faci-
lement accepté comme une traduction du fait, il serait exa-
géré de n'y voir qu'un idéal imaginé de toutes pièces. Si nous
ne pouvons pas parler de codes, s'il faut dire seulement litté-
rature juridique, disons que cette littérature
juridique n'est
nullement dépourvue d'autorité. Cedroit mèneparce qu'il a
suivi et ce qu'il a suivi, c'est la vie juridique du régime des
E. I.ti'tiKiieiM.
– Anroîe soclol., 190C-1U09. g>
38* L'ANNÉESOCIOLUUlQtK.
l'JUO-1909

castes, dont il est comme l'expression moyenne. Commentt


cette moyenne a-t elle pu s'établir au dessus des systèmes
juridiques presque fermés que constituent les castes? C'est ce
qu'explique lu situation unique du brahmane juriste au seiu
de lu société hindoue. Pourquoi est-elle ce qu'elle est, c'est-à-
dire pourquoi ce droit uedistiugue-t-il pas le jusdu fax, pour-
quoi se fonde-t-il sur l'inégalité, pourquoi se préoccupe-t-il
plutôt de punir que de réparer, pourquoi les rites et les pro-
hibitions y tieiiueiit-ils tant de place ? C'est que ses racines
plongent daus lu vie même des castes, dont il traduit les sen-
timents collectifs, en même temps qu'il s'y substitue; c'est
que la seule unité qui ait pu dominer d'une façon stable cette
poussière de groupes, c'est l'accord sur le principe même de
la caste qu'il ne peut pas ne pas y avoir des castes.
Passons a lu vie économique. Une fois qu'il est bien en-
tendu que la société hindoue n'est pas un peuple de méta-
physiciens et qu'où a mis en lumière sa vitalité économique,
ainsi que la part qui y revient au régime qui nous occupe, il
reste cependant que ce système de prohibitions étroites a dûù
exercer une influence singulière sur les formes de la consom-
mation et de la production. D'une part, il manque à cette so-
ciété «la capillarité sociale » griîce à laquelle s'universalisent
les besoins et par suite s'intensifie la production. D'autre part,
si la caste est une ghilde, elle est la moins innovatrice, la plus
fermée, la plus exclusive des guildes, parce qu'elle est aussi
et surtout autre chose. Maissans collaboration, pas de villes,
pas d'économies municipales, pas d'économies nationales.
La littérature nous présente des effets analogues et corréla-
tifs. Là où l'émancipation individuelle est contrariée, sans
que puisse se constituer une unité nationale, on ignore l'his-
toire, l'éloquence des hommes publics, commele lyrisme per-
sonnel. La seule littérature qui se développe est celle qui est
l'œuvre et rentre dans les attributions spéciales des penseurs
professionnels, c'est-à-dire des prêtres. Et ce qui pourrait
naître ailleurs, ou bien les brahmanes l'utilisent (l'épopée;
et y mettent leur marque, ou bien nous y voyons avec une
netteté parfaite (dans le théâtre; l'empreinte du régime des.
castes.
Nous n'avons fait que donner une esquisse du livre de
M. B., en nous efforçant de ne pas le trahir. Si nous en
sommes restés aux généralités, c'est que l'auteur lui-même,
à tort, nous semble-t-il, a voulu ces généralités. JI les pré-
OltU.VNiSÀÎIOS
UESUIIOUPES
SEflONimitKS 28?
sente comme des cadres qui appellent un contenu, comme
une perspective destinée ri orienter l'enquête, comme des
inductions provisoires, avec une telle modestie qu'on ose à
peine risquer une critique. Regrettons qu'il n'ait pas préféré
approfondir lui-même les problèmes qu'il signale à l'atten-
tion des indianistes et des sociologues,et attaquer de front,
par exemple, la question des racines de l'endogamie et de la
hiérarchie des castes.

CRAMKR (Juml-s).– Die Verfassungsgeschichte der


Geraanen und Kelten. Ein Beitrag zur vergleicliendeu
Allertumskuude.Berlin, Karl Siegismund, 1900,vm-208p.,
iu-8\

SCHWKRIN(Cuumus vos;. Die Altgermanische Hun-


aertsoh&tt (Untmuchmgen sHnleulsehenSlaats-und Itechts-
yeschinlite,hgg. von Otto Gierke). Breslau, H. et NI. Mar-
cus, 1907,215 p., in-80.

Le premier de ces deux ouvrages est une étude de droit


comparé, tandis que le second ne porte que sur une question
très spéciale relative à l'organisation des sociétés germa-
niques. Néanmoins, il y a intérêt à les rapprocher dans l'ana-
lyse que nous allons en faire; car le travail de M. Schwerin
sans viser particulièrement celui de M. Cramer, appelle l'at-
tention sur certaines difficultés dont ce dernier n'a peut-être
pas tenu un compte suffisant.
1. Le livre de M. Cramer est un tableau d'ensemble de la
constitution sociale et politique des Germains, comparée à
celle des Celtes. Voici quels en seraient les caractères princi-
paux.
La constitution des peuples germaniques est un bel exemple
de l'organisation sociale que nous avons appelée segmentaire
voir Divisiondu tvatail social, 2' édit., p. 149 et suiv.). La
société est formée d'un certain nombre de groupements élé-
mentaires, semblables entre eux, qui tantôt sont simplement
juxtaposésles uns aux autres, tantôt organisés suivant uu sys-
tème plus complexe. Chez les Germains, ce groupement fon-
damental a un double caractère il est, à la fois, familial et
territorial. Nous savons, en effet, que l'armée (et, par consé-
quent, le peuple, cir l'armée n'est autre chose que le peuple
en armes) a pour unités constitutives de grandes sociétés do-
388 I.*AX.\KK 1900.1W
JiOCIOLOaiOUK.

mastiques ce sont les fainiliae et propinquitates dont parle


Tacite. Chacuned'elles gurde dans le combat son Individua-
lité. C'est dire qu'il s'agit ici, non (le familles, au sens étroit
du mot, mais de clans. – D'un autre côté, dès le temps de
César, les Germains étaient devenus sédentaires ils avaient
une organisation territoriale. Or, le district élémentaire,
que
nous trouvons à lit base de cette organisation, est également
occupé par un groupe de familles parentes les unes des autres
ou qui se considèrent comme telles; c'est un clan fixe. Cette
division géographique est donc en même temps une division
ethnique telles sont les caractéristiques de la Mark, du vil-
lage (cieusi, propriétaire collectif du sol que se partagent,
pour l'exploiter séparément, les différentes familles associées.
Ces segments sociaux, qui constituaient lu matière de la
société, étaient organisés de la manière suivante-
Un certain nombre de villuges formaient, par leur réunion,
une division sociale et politique d'un degré supérieur c'est
la centaine, die Ilundevhcliaft, qui a son chef spécial
appelé
Imnnoou centenariux. Un certain nombre de centaines, entre
lesquelles il existe des liens spéciaux de voisinage et peut-être
même de parenté, constitue le canton (der (km, pagta), qui a
à sa tête un chef d'un rang plus élevé que le Imnno, c'est le
princeps. Enfin, au-dessus du canton, il y a la tribu, la cititns
des textes latins, (fui est elle-même formée par la confédéra-
tion des cantons. Il y aurait ainsi, dans l'organisation com-
plète de la société, quatre degrés, s'étageant les uns au dessus
des autres.
L'expression de centaine par laquelle est désignée la divi-
sion sociale du second ordre a, de tout temps, intrigué les
historiens, et douné lieu à bien des théories dont nous dirons
un mot plus loin. Voici l'explication qu'en propose notre
autour.
S'appuyant sur un texte de César (Gatl. IV,1;, il admet
que, à l'origine, le pagu* était un groupe de population qui
fournissait mille guerriers vraisemblablement il portait
alors un nom qui rappelait ce trait caractéristique; c'était
un millier (Tttumutschafl). D'autre part. il comprenait dix
divisions de l'ordre immédiatement inférieur; de là serait
venu le nom de centaine qui servit à les désigner. C'est cette
organisation militaire, à base décimale, qui aurait été primi-
mitive elle serait d'origine indo-européenne. Comme elle
était purement artificielle, on s'explique que chaque subdivi-
ORGANISATION ORS UltOL'PRg SKUONDAIKKS 389

sion ait pu avoir un effectif constant et que, par suite, des


noms de nombre aieut été employés à les caractériser. Quant
à l'organisation en groupes familiuuxet territoriaux que nous
avons décrite en premier lieu et qui, elle, ne pouvait tenir
dans des cadres aussi fixes, elle serait d'origine postérieure.
Un moment serait venu où le millier, la Tausendtehafl, aurait
changé de caractère; c'est alors qu'elle serait devenue le
patjws mais, on ne sait pourquoi, les subdivisions dout elle
était formée auraient conservé leur nom initial du centaine
(p. 28-31), bien que, à partir de ce moment, il ne fût plus
qu'un souvenir du passé.
Quant à la raison pour laquelle l'auteur admet comme
primitive cette division décimale de la société, c'est qu'il
croit la rencontrer chez les peuples indo-européens les plus
différents à Home, où chaque tribu comprend dix curies
et chaque curie dix geittet, dans l'Iude, dans la Russie primi-
tive, etc. Il eu conclut que ce système était autérieur à la
séparation de ces peuples et, par conséquent, qu'il ne peut y
eu avoir eu de plus primitif.
Cette constitution sociale, quand elle est pure, implique
une organisation politique que caractérise un parfait ôgalita-
risme. Chaque segment social est, en effet, semblable et, par
conséquent, égal aux autres; à l'intérieur de chacun d'eux,
toutes les familles et tous les individus sont sensiblement sur
le même plan. Eutre les différents groupements qui consti-
tuent la société, il y a des rapports de coordination plus que
de subordination. Les divisions les plus compréhensives
n'ont, sur les unités élémentaires dont elles sout composées,
qu'une autorité limitée et précaire. Dans les sociétés germa-
niques, cet état initiul commence à s'altérer parce que l'orga-
nisation segmentaire elle-même n'a plus sa pureté primitive.
11y u des chefs, comme nous t'avons dit, et entre ces chefs
une certaine subordination il y a une noblesse, des clients,
des esclaves à côtédes libres. Cependant, cette différenciation
de rangs, de classes et la hiérarchie qui en résulte fie sont
pas encore très accusées. L'autorité des chefs leur est, en
grande partie, personnelle. C'est surtout vrai du chef de la
tribu, du prinetps cicitalù, lit où il y en a il agit plus par
persuasion que par coercition (p. 79). Tous les principes,
ceux du imgns comme ceux de la ekiUu, sont élus. Il est vrai
que l'élu devait appartenir à une famille noble mais il
est probable que cette noblesse elle-même était un produit de
390 l'annkk sociologique. iao<M9O9

l'élection. Primitivement. le peuple choisissait ses chefs dans


sou sein mais peu à peu te choix se porta sur certaines
familles déterminées qui jouissaient d'une considération
par-
ticulière. Mises uinsi hors de pair, elles constituèrent une
aristocratie. Mais sous cette organisation aristocratique, qui
est, d'ailleurs, assez rudimentaire, on sent encore, toute
proche, l'organisation démocratique dont la première s'est
dégagée.
II. – De la constitution des Germains, l'auteur
rapproche
celledes Celles, Son étude porte non soulement sur les Coites
de Gaule, mais aussi sur ceux de Galatie et de Bretagne.
Cette constitution rappelle par certains traits celle
qui vient
d'être décrite. C'est toujours une organisation
segmentaire
mais, contrairement à ce que M. Cramercroit observer en Ger-
manie,elle ne comporte que trois degrés. La tribu était divisée
en pttgi, appelés tétrarehin par Strabon, parce que cen divi-
sions y étaient au nombre de quatre. C'est le
pagtu qui était
lu base solide et fondamentale de la société. Au dessous de
lui, il y avait les villages,ou bien des exploitations no»
agglomérées. Mais on ne rencontre rien qui ressemble à la
centaine.
Mais par dessus cette organisation segmentaire, il en est
une autre, plus complexe, qui tend (le plus en plus à se déve-
lopper et à recouvrir lit première. Les distinctions de rangs et
de classes deviennent plus marquées la hiérarchie sociale se
consolide. L'écart entre la foule et les castes privilégiées des
nobles et des druides devient plus considérable. Entra le
peuple et l'esclave, une classe nouvelle apparaît c'est celle
des clients. Pour pouvoir se maintenir, un
grand nombre de
libres étaient obligés de se placer dans la clientèle et sous la
dépendance d'un noble.Ce sont des raisons économiques qui,
ici comme à Rome et en Grèce, paraissent avoir donni' nais-
sauce à cette subordination. Les nobles n'étaient donc
plus
simplement des hommes qui appartenaient des famillestrès
considérées leur autorité reposait sur une base matérielle,
stable, indépendante de l'opinion.
Le peuple avait cependant un moyen de tenir tiile à la
noblesse il s'organisait est faction. Il constituait un parti,
chargé de protégerses membres.A la tète se trouvait toujours
un noble, à qui cette situation donnait
parfois une autorité
considérable. En regard de la faction populaire, il y avait
naturellement une faction aristocratique. L'histoire des
DK* UROUl'P.*SECONDA
OUUAXISAÎION IIIKS 391

sociétésgauloises est, en grande partie, l'histoire de ces divi-


sionsintestines.
Une autre différence, sur laquelle l'auteur n'insiste pas,
mais qui parait bien ressortir des faits, c'est que la concou-
tra tiou de lu masse sociale était sensiblement plus avancée
chez les Celtes que chez les (iermains. Chezces derniers, il
n'y a généralement pas, à la tête de la tribu, d'autorité per-
manente. La tribu est une confédération de puyi qui n'a
encore qu'un sentiment assez ilottant de son unité. Quand
elle se lève pour la guerre, elle se donne un chef (diu, hersog),
mais d'un organe stable pendant la paix il est seulement
question dans Tacite et uniquement dans deux passages
(voir p. 6s!j.Aucontraire, les Celtes sont assez souvent orga-
nisés tnouarchiqueineut; et, en tout cas, à la tête de lit tribu,
il existe, sous des noms différents, un conseil permanent.
De ces similitudes et de ces différences, l'autour conclut
que l'organisation sociale des Celtes et celle des Germaius
reposent sur une base commune, qui leur vient des temps
lointains où ils n'étaient pas séparés. C'est un signe de leur
unité d'origine (p. 2j. Partis du même point, ces deux sortes
de peuples auraient, ensuite, évolué avec une vitesse iuégale.
Les Germains représenteraient une phase plus rapprochée
des origines; les Celtes seraient parvenus à une forme d'or-
ganisation plus haute.
Présentée en ces termes, la conclusion du livre appelle les
plus expresses réserves. Dece que l'on constate des ressem-
blances entre deux systèmes sociaux, il ne suit nullement
qu'y ait entre eux un rapport de parenté. A ce compte, il
faudrait dire que l'organisation des Indiens de l'Amérique
septentrionale et celle des Australiens sont nées l'une de
l'autre ou dérivent, d'une même source: car il y a entre elles
la même relation qu'entre celle des Celtes et celle des fier-
mains. Deux peuples peuvent avoir les mêmes institutions,
sans que l'un d'eux les nitcmpmnlées à l'autre, ou sans qu'ils
les doivent tous deux à un même troisième. Il suffit qu'ils
aient été placés dans des conditions d'existence similaires, et
que les mêmes causes aient produit les mêmes effets. L'orga-
nisationsegmentai™ est d'une extrême généralité. Ou la ren-
contre sur les points les lrlus différents du globe. Klle cor-
respond à une phase déterminée de l'évolution sociale. Il n'est
donc pas surprenant qu'elle se retrouve chez les Celtes et
citez les Germains, comme dans tant d'autres sociétés. Les
39£ I-'ANNKK SQGKH.OGIQUIJ. l'JWi-l'JO!»

concordances signalées peuvent très bien être le produit de


deux développements autonomes et parallèles.
D'un autre cdlé, il y a entre ces deux formes d'organisation
uue différencegrave que l'auteur met lusullisu minenteu relief,
bien qu'il la squale eu terminant. Chez les Celles, du moius
chez les Celtes de Gaule, il y avait un vif senlimeut de l'unité,
uon pas seulementtribale, mais uatioimle qui n'existait pas
en Germanie. Les Gaulois formaient une nation qui avait
conscience d'elle-même. Non seulement ils pratiquaient tous
une même religion, mais encore leur vie religieuse était
administrée par une même corporation sacerdotale, qui était
indépendante de tous les États particuliers et qui avait,
pour la Gaule toute entière, un chef unique. Il y avait égale-
ment, mais d'une mauière intermittente, des assemblées
laïques de la Gaule, concilia lotius Gallite,on chaque cititas
envoyait des représentants et où l'on délibérait des affaires
communes (p. lOi,. Enfin, il est arrive, plusieurs fois qu'un
peuple ou un groupe de peuples a essaye de réaliser l'unité
politique du pays. L'idée d'un empire gaulois hantait, au
temps de César, ta conscience gauloise (p. 183). Cette homo-
généité morale et cette tendance à l'unilé sont tout à fait
remarquables daus une massesociale aussi étendue, dispersée
sur un aussi vaste territoire et à un moment où la technique
des voies de communication était encore rudimentaire.
III. – Nous avons vu que, suivant Cramer, les sociétés ger-
maniques comptaient quatre divisions étagées et hiérarchi-
sées. L'une d'elles portait le nom de centaine. Cette expression
a, de tout temps, intrigué les historiens. Nousavons vu quelle
explication eu donnait notre auteur qui, sur ce point, suit
Maurer, Brunner et bien d'autres. La centaine aurait été pri-
mitivement une division de l'armée qui aurait été organisée
sur uue base décimale. Maiscette explication soulève les plus
sérieuses difficultés que le livre de vou Scliwerin a précisé-
ment pour objet d'exposer.
En effet, nous savons,d'autre part, que l'armée était divisée
par groupes familiaux, familial et propinquitalu. Or il est
malaisé d'apercevoir comment cette organisation gentillce
pouvait se confondre avec la précédente. Tous les clans ne
comptaient pas le même nombre de tètes suivant les temps
et les circonstances, l'effectif de chacun d'eux élait suscep-
tible de varier. Commentdes divisions aussi inégales et aussi
changeantes auraient-elles pu coïncider avec des divisions
OnOAN'IKATlDN"
DRS «KOl-PK»KKCONDAIRKS 393

uumérkjues qui, elles, sont nécessairement égales entre elles


et immuables?
Cramer répoudquu l'orgunisutiou numérique est primitive,
qu'elle est un legs de l'époque iudo-européeuueet que l'orga-
nisation à base familiale n'est survenue qu'ensuite. Elle
aurait alors utilisé, par respect pour la tradition, des déno-
minations qui n'étaient pas faites pourelle. Maisvoit Schwerin
objecte très justement que cette hypothèse est contraire à
toutes les vraisemblanceset à tous les enseignements du droit
comparé. L'organisation gentilice est la plus naturelle, la
plus primitive, celle qu'on retrouve au début de l'histoire et
qui disparaît ensuite. L'autre, toute conventionnelle et arti-
ficielle, suppose déjà une culture d'un certain raffinement. Il
est donc impossible qu'elle ait précédé la première. Le fait
qu'on la retrouve à Home, dans l'Inde, ne prouve aucunement
qu'elle remonte aux origines mêmesde la civilisation indo-
européenne car elle s'est établie citezces différents peuples
ù une époque relativement tardive. C'est une organisation
administrative, instituée de propos délibéré, lorsque la vieille
organisation familiale commença à s'effacer. On sait d'ailleurs
que ces concordances n'ont nullement la signification rétro-
spective qu'on a voulu parfois leur attribuer.
Suivant d'autres historiens, la centaine aurait été une
circonscription géographique, comprenant cent domaines ou
villas qui, au moment où les Germains devinrent sédentaires,
auraient été attribués à un groupe de cent pères de famille.
Seulement, comme il tallait expliquer pour quelle raisou ce
chiffre de cent fut choisi de préférence à tout autre, les
partisans de cette théorie, parmi lesquels se trouve Vaitz,ont
été obligés de supposer que la division en centaines était
déjà à la base de l'organisation militaire la tradition aurait
imposé ensuite le même cadre à l'organisation territoriale.
Cette nouvelle hypothèse implique donc celle qui vient d'être
discutée par suite, elle est exposée aux mêmes objections,
et.de plus, elle a ses difficultés propres. Car d'une génération
à l'autre, le nombre des pères de famille ainsi
groupés
ensemble devait nécessairement varier. De plus, on voitmal
par quel miracle le pays pouvait se prêter à ce partage mathé-
matique. Les villas, qui existaient déjà, n'étaient pourtant
pas groupées par centaines ip. 84). ').
De cet examen critique, M. von Schwerin conclut que la
question de la centaine est insoluble si l'on donne au mot une
394 l'ASSKB SOCIOlOlUQl'K. WtM-HHM)

signification étroitement numérique; car il parait impossible


qu'un groupementsoit familial soit territorial puisseêtre niusi
défini par un nombre fixé une fois pour toutes. Il entreprend
donc d'établir que le radical llnnd qui entre dans le mot,
relativement récent, de llnmlerluchaft, avait primitivement
une tout autre acception. llund aurait simplement signifié
se se-
beaucoup,une pluralité de choses ou d'individus. Ou
rait servi de cette expression pour désigner les groupe» élé-
meutaires, à effectif indéterminé qui constituaient les unités
de l'armée. Quand les Germaius cessèrent d'être nomades, le
sol fut partagé entre les groupes ainsi dénommés, qui étaient
en même temps formés de familles parentes. Les circon-
scriptions territoriales qui prirent uliwi naissance gardèrent
tout naturellement le même nom.
Nous n'avons pas la compétence nécessaire pour discuter
ici cette étymologiequi ne laisse pasde nous paraître quelque.
peu laborieuse. Aussi bien n'est-elle pas aussi indispensable
que le croit l'auteur; en dehors des hypothèses qu'il a juste-
ment critiquées, il en est une autre qui est tout au moins
possible. Assurément, un groupe social, tel que la centaine,
ne saurait comprendre un nombre fixe de familles et de pères
de famille, si la règle est que les enfants d'un même père se
séparenl, soit à sa mort, soit au moment du mariage, pour
devenir les chefs de familles distinctes et autonomes. Maisil
en va tout autrement si, à travers la suite des générations, la
famille reste, en principe, indivise etgarde son individualité.
Dans ces conditions, on conçoit très bien qu'à un moment
donné onait pu convenUonuellement ranger dans une môme
division sociale un nombre déterminé d'unités familiales de
ce genre et que ce nombre soit resté sensiblement le même
pendant très longtemps. Pour que cet arrangement fut pos-
sible, il suffisait, par exemple, que le groupement familial
servant de base à ce déuombrenieut fut constitué par l'en-
semble des individusqui portaient un môme nom car, alors,
le nombre des familles ainsi entendues était nécessairement
invariable, comme celui des noms par lesquels elles se défi-
nissaient. C'est, d'ailleurs, d'après ce principe que furent
organisées les vieilles curies romaines. La <j«métait précisé-
meut formée par la réunion de tous les citoyens qui avaient
le droit de porter le même nnmen. Aussi putoii répartir les
(jfi.HU'xentre les curies suivant une proportion établie une
fois pour toutes -.chaquecurie en comprenait dix. La centaine
DES UHODPKSSKCDNOAIKKS
OKOAMKATIUN 305

peut donc avoir pris naissance de lu même maniera. Le


caractère artificiel de cette formation se concilierait ainsi «uns
peine avec celait que, dans les années et les peuples gc!rtnii-
niques, les hommes étaientgroopés per fa militaet propini}ui-
tates.
Rn môme tempsque la manière dont on conçoit d'ordinaire
la centaine. M. v. Schwerin conteste la placequi lui est Kèné-
ralemeut attribuée dans l'organisation sociale des Germains.
Le plus fréquemment, on en fait une division du
pagvt ou
(Jau c'était, comme nous l'avons vit, la coucepliuiuleCrnmer.
Mais M. v. Schwerin fait remarquer que les textes latins ne
mentionnent aucune subdivision de ce genre la ci titan y
est présentée comme composée de pagi; ceux-ci, à leur tour,
se décomposent en tici; mais entre le canton et les villages.
aucun district intermédiaire ne vient s intercaler. On ne voit
pas, d'ailleurs, dit notre auteur, quelle aurait pu en être la
raison d'être. L'assemblée de la Mark sutlisait à l'administra-
tion de la vie économique; les affaires judiciaires se parta-
geaient, suivant leur importance, entre l'assembléedu canton
et celle de lit tribu. Il n'y avait donc pas de place pour l'acti-
vité d'un autre organe. De ces faits, M. v. Schwerin conclut
que la structure des sociétés germaniques n'était faite que de
trois compartiments emboîtés les uns dans les autres, au ulieu
des quatre qu'y distingue Cramer la chitm, le pagus, le tint».
Quant à la centaine, elle ne serait qu'un autre nom donné
au paytis. Ce serait le pagu», mais considéré comme un
grou-
pement purement personnel, abstraction faite de sa base
géographique. Inversement, le ptigut proprement dit serait la
centaine, en taut que district territorial. C'est seulement a lit
période franque que, par dessus le puguaou centaine, se serait1
constituée une circonscription administrative plus étendue,
comprenant uu certain nombre de centaines, et à la tète de
laquelle se trouvait placé le comte. Ce changement aurait
été uu contre-coup des modifications surveuues dans l'orga-
nisation politique de ces peuples.
Nous mentionnons la question sans nous y arrêter, car,
outre qu'on ne peut eu donner qu'une solution très hypothé-
tique, elle n'a pas un grand intérêt sociologique.11y a eu des
sociétés germaniques qui, de tout temps. n'ont compté
que
trois divisions, d'autres moins. Si ce nombrea varié ilce point,
c'est qu'il ne constitue pas un trait distinctif de cette organi-
sation sociale. K ]).
^C 1.'aXSÉE ÎUÛCI'JO'J
SOCIQLOCUQÇK.

H. PltEUSS. – Die Entwloklunff des deutsohen Stœdte-


wesens. 1 Baud. Leipzig, Teubner, -WW,xu-3"9 p., in-8".

Les monographiessur les différentes villes allemandes sont,


comme on sait, très nombreuses. De ces multiples études,
M. Preuss a voulu dégager les lignes générales de l'évolution
urbaine en Allemagne car il estime que, malgré la réalité
des différences locales. cette évolution s'est faite partout sui-
vant des principes communs qu'il est possible de retrouver.
C'est donc un ouvrage de synthèse qu'il nous présente; c'est
môme une sorte de philosophie de l'histoire d'Allemagne. Car
c'est dans la manière très particulière dont les villes se sont
constituées et développées qu'il voit la cause fondamentale
des particularités les plus distinctives de la civilisation alle-
mande.
II nous montre d'abord les villes naissant en certains
endroits privilégiés, sur le bord des fleuves ou des rivières
navigables, aux points de rencontre des grandes voies de com-
munication. Des causes diverses y déterminèrent une concen-
tration très particulière de la population. C'est là que rési-
daient les grandes puissances du temps, princes ou évêques.
Or, avec les leudes qui les entouraient, ils constituaient la
principale clientèle du commerce et de l'industrie du temps;
car ils avaient des besoins qu'ils ne pouvaient satisfaire par
leur propre activité.. Pour se rapprocher de leurs clients,
artisans et commerçants vinrent donc s'établir à proximité
des cathédrales et des résidences royales. Des murs solides,
des forteresses leur assuraient, d'ailleurs, en cas de danger,
un abri qu'ils ne trouvaient pas tacitement ailleurs. Tout
les invitait à renoncer à l'existence nomade qu'ils menaient
jusque-là. Les palais des évêques et des princes furent les
centres de cristallisation autour desquels se fixa cette popu-
lation mouvante. Des marchés permanents se constituèrent.
Lesvilles étaient fondées.
C'est un groupement humain, d'une forme nouvelle, qui
avait ainsi pris naissance. En effet, l'agglomération urbaine,
dès qu'elle apparalt dans l'histoire, se distingue par des
caractères tranchés de l'agglomération rurale. Les fonctions
de l'une et del'autre sont essentiellement différentes. Lacam-
pagne produit les matières promièrés et tout ce qui est néces-
saire à l'alimentation la ville, par la main de ses artisans,
élabore ces matières, en même temps que, par l'intermé-
OROANISATlUN
DES GHOUfESSEOttilMlftKi 301

diairo de ses commerçants, elle fait venir de régions plus ou


moins distantes tout ce que le voisinage immédiat ne peut
pas produire. Mois cette différenciation fonctionnelle eu
entraînait d'autres, et plus Importantes, d'ordre juridique,
moral, politique.
Le droit qui régissait les campagnes était essentiellement
féodal il avait pour buse les relations de l'homme et de la
terre. Il était donc inapplicable aux relations commerciales
et industrielles qui caractérisent la vie urbaine. Celle-ci était,
au contraire, relativement détachée du sol. Uneéconomie nou-
velle était née où l'argent prenait la place de la nature la
(Jeldtoiiisrfutftse substituait à la Nuturwirtuckaft. Cette éco-
nomie nouvelle ne pouvait s'accommoder de l'ancienne orga-
nisation, mais en réclamait une qui lui f lit propre. La liberté
devait y être plus grande, les liens sociaux moins rigides,
l'autorité moins compressivedes initiatives individuelles. Car
ce qui faisait la servitude du rural, c'est que le sol le possé-
dait il en était comme une dépendance. A la ville, au cou-
traire, grâce à l'argent, le sol devient objet de possession
l'homme eu est affranchi.D'ailleurs, un droit nouveau lie peut
être l'œuvre que des intéressés eux-mêmes; car les coutumes
ne peuvent sortir que de la vie qu'elles sont appelées à régler.
Les villes devaient donc tendre à se taire à elles-mêmes leur
droit. Pour cela, chacuue d'elles se constitua en un corps qui
prit en mains la direction des affaires. Désormais, à coté de
l'autorité personnelle des seigneurs ou de leurs fonction-
naires, qui régnait seule sur les campagnes, il y eut dans les
villes, un gouvernement d'une tout autre nature c'est le gou-
vernement corporatif. Un droit public d'une espèce nouvelle
se forma en regard du droit féodal qui était essentiellement
privé c'est le droit urbain.
Deux mondes et deux civilisations se trouvaient ainsi face
a face celle des villes et celle des campagnes. La première,
c'est la civilisation moderne, au moins en germe, avec sou
culte de la liberté, de la dignité personnelle, de l'initiative
individuelle. La seconde, c'est celle du passé. Le progrès
naturel eût donc été que la civilisation urbaine s'étendit peu
à peu aux campagnes et se généralisai. C'est ce qui estiirrivé
eu France. L'organisation communale, née dans les villes et
pour les villes, est devenue la chose du pays tout entier. Mais
il en fut tout autrement en Allemagne. Ici, les villes gardèrent
jalousement pour elles les libertés conquises. Par suite, IV
308 LAX-NÉK itMM-lWI»
saciOMHUQBK.

bitue qui les séparait des campagnes alla toujours en se creu.


sant davantage toujours plus de liberté d'un côté, plus de
servitude de l'autre. L'auteur semble attribuer cette différen-
ciation croissante à ce fait que l'Allemagne était, à un bien
plus haut degré que les pays latins, un pays essentiellement
agricole et rural. L'organisation féodaleet territoriale y avait
doue de fortes racines; par suite, elle se laissa moins facile-
ment entamer par l'organisation nouvelle.Cesdeuxformes de
culture coexistèrent sans se pénétrer, comme il etlt été dési-
rable. Cequi parait à M. P. confirmer cette explication, c'est
que, dans les provinces de l'ouest, où la civilisation latine
avait luissé plus de traces, l'opposition eulre les villes et les
campagnes fut toujours moins marquée; elle va, au con-
traire, en s'accentuant à mesure qu'on s'avance vers l'est.
Huis, quelle qu'ait été l'origine de cette irréductible dua-
lité, elle a eu sur l'histoire de l'Allemagne l'iiiflueuce la plus
considérable. Deux sociétés coexistaient côte à côte qui
ùtaieut fermées l'une à l'autre, qui n'avaient ni les mêmes
idées, ni les mêmes besoins, ni la même morale, ni le même
droit. Dans ces conditions, le pays ne pouvait se faire une
conscience commuue, un ijemein (Jeinloit il pût prendre le
sentiment de soi et de son unité. Les villes se rendaient
bien compte des liens, matériels et moraux, qui les unissaient
les unes aux autres c'est pourquoi elles s'associaient, se
liguaient entre elles pour défendre leurs communs intérêts.
Mais elles se sentaient étrangères aux populations rurales
qui restaient en dehors de çes ligues et de ces confédérations.
Ainsi partagée eu deux moitiés hétérogènes, l'Allemagne ne
pouvait se constituer comme nation. Sans doute, par dessus
les seigneurs locaux, il y avait l'empereur, qui, théorique-
ment, représentait l'unité de l'empire. Mais, pour qu'il put
réellement jouer ce rôle, encore fallait-il que cette unité lût
réelle et vivante. La force nécessaire pour contenir les ten-
dances dispersives de la féodalité, il ne pouvait la tirer que
d'un esprit public préexistant qu'il pouvait bien incarner et
renforcer par cela même, mais non créer de toutes pièces.
Manquant d'autorité, l'empereur fut bien obligé de se mettre
à la suite des princes et de confondre sa cause avec la leur,
puisqu'il n'eu avait pas qui lui fût propre. Voilà comment
l'Allemagne est restée décomposée en une poussièrede prin-
cipautés indépendantes. Si un pouvoircentral, fort et respecté,
n'a pas réussi à s'élever au-dessus des intérêts seigneuriaux et
OIHUMSATION-
I)KS (iltOl'I'KB SfiCONDAIRBS 399
1-
jjrindors, c'est qu'il 110s'y est pas formé d'esprit public où les
esprits do castes, de classes, de provinces, de clochers vinssent
se fondre et s'absorber et ce qui a empêché cette fusion,
c'est que les villesallermiucles,uu lieu de rayonner leur action
sur l'ensemble du pays, sont restées à l'élût d'îlots, morale-
mentisolés detout le milieu ambiant. Si, est France, il en a été
autrement, c'est que, comme la vie sociale tout entière s'est
urbanisée, unecivilisation homogèneet unitaire a pu secous-
tituerdont le roi a été l'organe. C'est de là qu'il a tire la force
nécessaire pour soumettre le système féodal à une loi plus
haute.
C'est donc par les conditions particulières dans lesquelles
se sont développées les villes allemandes que s'expliquerait
le particularisme invétéré de l'Allemagne. Mais, par un juste
retour, elles ont gravement pâti de cette absence de centralisa-
tiondont elles étaient, en partie, responsables. Car les princes
étaient leurs adversaires naturels et irréductibles. Entre la
culture urbaine et le système féodal, il y avait un irréconci-
liable antagouisme. Tout ce qui fortifiait l'un devait nécessai-
rementafïaiblir l'autre. Pendant un temps, il est vrai, ce sont
les villes qui l'emportèrent. L'accroissement de l'activité éco-
nomique, l'attrait exercé par le régime urbain sur les popu-
lations ruraleseurent pour effet deporter les villes à un degré
de prospérité qui leur permit de s'alïraucllir, dans une large
mesure, de la tutelle seigneuriale et de se développer con-
formément à leur nature. Mais quaud, vers le milieu du
xvi"siècle, sous l'empire de causes que l'auteur s'efforce d'ana-
lyser (p.idletsuiv. les É ta tscuropéenstendirent à se donner
une plus solide organisation et le pouvoir politique à devenir
plus fort, quand l'idée desouveraineté se constitua et fut mise
à la base du droit public, en Allemagne, ce sont les princes
qui bénéficièrentde ce courant. C'est leur pouvoir qui se con-
solida, puisqu'au dessus du leur il n'y avait rien qui comp-
tât. Cesont eux qui devinrent les souverains. Ils tirèrent ainsi
des circonstances un surcroît de force et d'autorité qui leur
permit d'engager la lutte contre les villes dans de meilleures
conditions que par le passé. Peu à peu, elles perdirent l'au-
tonomie qu'elles avaient conquise. Leurs administrateurs de-
vinrent des fonctionnaires dn prince, leurs finances furent
soumisesà sou contrôle, etc. L'esprit municipal, l'idée corpo-
rative tfienonuniukaftsiilee),en vertu de laquelle tous les ci-
toyens sont associés à l'adiniuislratiou des affaires communes
400 i/a.nxkk .<ucinLor.iQ.t-K. «00-190»

et y participent, perdirent du terraiu, et il en résulta une


décadence progressive des villes.
C'est à cette décadence de l'esprit corporatif que l'auteur
attribue l'écrasement d'Iéuti et ht passivité avec laquelle le
peuple, eu général, acceptala détaiteet l'hégémonie de l'étran-
ger. Tenus en dehors des affaires publiques, les individus
avaient fini par s'en désintéresser. Rien ne les attachait la
chose commune ils ue la voulaient pas, mais ne s' acquit-
taient de leurs devoirs civiques que sous l'action iinpérative
et coercitive de l'État. C'est par là que se caractérise le sys-
tème politique qui régnait au moment de l'invasion et que
M. P. appelle l'État policier (l'olhehtaal). La situation, en
France, était très différente. Sans doute, là aussi, le gouver-
nement avait été absolu pendant plusieurs siècles. Seule-
ment, c'est au profit du pouvoir royal que cet absolutisme
s'était établi; et comme le roi représentait l'esprit national,
comme il n'en était que la forme visible, la nation prit tout
naturellement sa place, une fois qu'il fut écarté. Quand on
eut renoncé au symbole, la réalité resta. Une grande force
collective était constituée; elle subsista tout entière, alors
même qu'elle n'était plus figurée matériellement par la per-
sonne royale, et elle eut facilement raison de cette poussière
d'individus qui constituait un État allemand.
Telle est l'idée qui domine tout l'ouvrage, et l'on ne peut
méconnaître l'intérêt de cette tentative en vue d'expliquer par
des causes définiesle particularisme constitutionnel de l'Alle-
magne. Cecaractère de la civilisation allemande, au lieu d'être
considéré comme une sorte de particularité idiosyncrasique
dont on ne peut rendre compte, devient ainsi uu simple cas
particulier d'une loi très générale. Mais la manière dont l'au-
teur suit l'application de cette idée, après léna, nous parait
moins heureuse.Il raconte comment, après la défaite, les réor-
ganisateurs de la Prusse entreprirent de ranimer la vie ur-
baine en restituant aux villes une partie de leurs anciennes
libertés, et cela daus le but de réveiller l'activité politique du
pays tout entier; comment ces efforts furent paralysés en
partie par des résistances de toute sorte comment la bour-
geoisie elle-mème, par peur du socialisme, s'est jointe aux
représentants du principe féodal pour combattre le principe
corporatif dont elle se réclamait autrefois, pour en empêcher
tout au moins l'extension aux masses ouvrières. La. dernière
partie du livre est, tout entière, consacrée à l'exposé des iuci-
BBS fiKOUHSSSKCONBAIWiS
OBUANISATION 401

dents variés qui ont marqué, pendant le xix»siècle, l'his.


toire de l'organisation communale. Mais c'est en vain que
l'auteur, fidèle à sa pensée, essaie d'expliquer, par là, l'his-
toire récente du pays. Le problème ne se pose plus dans
les mêmes termes qu'avant 1789. Les villes étaient à la base
de la société médiévale elles ne jouent plus le même rftle
aujourd'hui. Les questions sociales tendent à primer toutes
les autres et elles n'ont rien de spécifiquement urbain. Si
donc on veut comprendre l'histoire contemporaine, c'est d'un
autre point de vue qu'il faut la considérer. Pour répondre
aux besoins actuels, il ne saurait suffire de galvaniser la
vieille organisation commuuale c'est une organisation
neuve que nos sociétés actuelles doivent tirer de leur sein.
E. D.

– Kikuyu Kika. Uan, «908,n° 101(Divisionen classes


DL'NDAS.
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VI. ORGANISATION
POUTIQUK
ParM.Gebset.

FRANCOTTE(U.). – La Polis grecque. Recherches sur


la formation et l'organisation des cités, ligues et
confédérations dans la Grèce anoienne. Paderboru,
SchOniugb, 1907, 250p., in-8».
L'iutérèt du sujet est capital mais les dounées du problème
sont trcs éparses, très minces et très obscures. La méthode
d'exposé de M. Francotte n'est pas faite pour les éclairer
beaucoup confuse et diffuse, dénuée par moments de toute
articulation logique, elle rend la lecture de l'ouvrage vrai-
ment pénible.
Ce sont d'ailleurs quatre mémoires déjà publiés; mais les
deux premiers, les plus importants, sont remaniés (le second
a «Hél'objet d'une analyse au tome VI de VAnnce,p. 373;.
1. L'organisation lie la Citéathénienne et la réforme de Clin-
tlihti'-i.– Quelques pages retracent d'abord l'état antérieur à
Clislliènes. Primitivement, deux grandes classes d'une part.
les géàrgoi et ilémiourr/oi d'autre part, les cupatrides ou
nobles a ces derniers appartient en propre t'organisation
ORO.VtiISA.TtOS PI1UTH1CR 403

en (ii'nê, phratries et phylai, organisation gentilice ou les


hommes sont rattachés les uns aux autres par leur parenté,
réelle ou prétendue, Mais peu u peu, à côté des génê. se
créent des confréries analogues de non-nobles, les t hiatusou
orgéons; les non-nobles pénètrent dans les phratries qui,
d'ailleurs, dès une époque très reculée, manifestent l'interveu-
tion du législateur et des reconstructions relativement artifi-
cielles. La prépondérance des Eupatrides se maintient pour-
tant. A cette organisation fondée sur le principe genlilice,
Clisthènes substitue une organisation {ondéesur le principe
territorial, et par là il brise le pouvoir de l'aristocratie
d'une part il crée de nouveaux groupements (phylai au
nombre de dix, dèmexet Irittyr») où les hommes sont ratta-
chés les uns aux autres par leur domicile, il y fait entrer pas
mal de naturalisés et fait dépendre de l'afliliation au dème
l'exercice du droit de cité d'autre part, il conserve les quatre
anciennes phylai, les phratries, les génè et les thiases. mais
ne leur laisse qu'un caractère religieux. On continue néan-
moins d'être inscrit à la phratrie, mais la liste de lit phratrie
et celle du dème restent indépendantes l'une de l'autre
aussi bien, l'inscription n'a-t-elle, dans les idées des Grecs.
aucune force probante.
II. Formation des tilles, (les litats, ilex Conffyli'rutiimttet di'x
Lignes. 1° Synœcisme ou fondation d'État par la fusion
d'éléments jusque-là autonomes. 11a lieu avec ou sans fonda-
tion de ville; il a lieu entre tribus, entre peuplades sans
caractère geutilice, entre États déjà existants, i" Sytnpolitie
ou confédération. H° Ligue (mal distinguée de la confédéra-
tion celle-ci serait une « association tl'Hlats pour un objet
déterminé »; celle-là supposerait « des intérêts communs
plus nombreux et permanents ». « Plus nombreux » est
obscur, et il s'en faut que les tenues s'opposent nettement: de
plus, les faits décrits lie répondent pas uux définitions don'
nées enfin, l'auteur ue parait pas se tenir à ces dernières
par moments, il semble que lit Ligue soit caractérisée par
l'hégémonie d'une des cités.
III. I.'ortjanùatinn dn cités à Hhode*c/ eu Carie. – Lesynti;-
cisme rhodien de 408 donne naissance une organisation en
dômes, doue territoriale, mais où subsisterait 1» principe
genlilice (dans les eloiuui dont ta nature reste encore très
discutée). Ku Curie, après la conquête d'Alexandre, on
voit se fonder de nouvelles villes, puis des Ktats qui associent
404 1900-1909
I/aNSÈK SOCIOLOGIQUE.

plusieurscités, puis, au-dessusde ces États, des confédéra-


tions, groupementsinstableset qui restent pour nous mal
définis, qui attestent en tout cas le besoin d'unité dont les
cités sonttravaillées.
IV. Le Conseilet l'Assembléegénéralechez les Aehéens.
L'intérêt de ce mémoireest de montrer comment, au sein
d'une organisationencoretrèsprimitive(où la règle prévaut,
commechezles Macédonienset les Étoliens,qu'en certains
cas l'arméese formeen assemblée),un rudiment d'État se
constitue assembléeappeléexynodosqui fait les élections,
accordela proxénieet sans doute le droit de cité, maisqui
est normalementsupplééepar un Conseilou Houleexpédiant
les affairescourantes;d'autre part, assembléeappeléesynclè-
los qui, elle, comprendla massedes citoyenset à laquelle
sont réservéeslesgrandesquestionsde politiqueétrangère.
Nous avons résumécet ouvrageH cause de l'importance
des problèmesqu'il traite et parceque l'éruditionde l'auteur,
qui est de bon aloi, permettrade le prendre pour point de
départ onne sauraitdire toutefoisqu'il apporteuue contribu-
tionbiennette,surtoutdans les deuxplus importantes parties.
M. Durkheima montréici mêmeque la notiondu syncecisine
n'avait pas été assezanalyséepar M. F. En outre, à la ques-
tion de savoir pourquoile principe territorial s'est substitué
au principegentilice, l'auteur n'apporte pas une solution
scientifique ce n'en est pas une que les « motifs » de dis
thènes (p.38),ou le génie de Clisthènes et c'est répondreil
la questionpar la questionque d'invoquer 1*« esprit égali-
taire » desGrecs(p. 121;.Ceque M. F. a du moiusbienmis
en lumière,c'estla complexitédu problème car, d'une part,
le groupementgentiliceest déjà un groupementterritorial,
plus ou moins(ainsilesginêsont répartis sur la surface de
l'Attique et, de chaque centre, exercent une action rayon-
nante, p. 44) d'autre part, l'appartenanceau dème, qu'a
déterminéele domicilelorsde la réforme,se transmetensuite
héréditairement. L. G.

MARTIN(A. Notes sur l'ostracisme dans Athènes


(extrait des Mémoiresprésentésà l'Académiedes Inscrip-
tions, t. XII, t partie). Paris, Klincksieck,1907,in-4°,
p. 382-44».
CARCOPINO il). Histoire de l'ostracisme athénien
URBANISATION
POLITIQUE W5

dela Facultédeslettres, XXV).


(Bibliothèque Paris,F. Alcan,
1909,lu-8-,p. 88-206.

Nous signalons ces deux mémoirespour les problèmes


d'ordresociologiqueque soulèvel'institutionde t'ostracisme.
Ou sait que l'ostracisme est un exil temporaire (de dix
années)que le peupleathénieniufligeaitdansdes conditions
très particulières.La procédurecomprend 1°une assemblée
préparatoirequi décideunefois l'an et à date llxes'il y aura
ou non ostracisme la tenuedecette assembléene dépendpas
du Conseildes Ciuq-Cenls,ni, par une notable exception,
son ordre du jour; le votea lieu sans débats sur ces deux
pointsessentiels,l'argumentationde Ai.Carcopino(p. 127et
suiv.) parait définitive; 2° si le vote a été affirmatif,une
deuxièmeassemblée,où est désigné un nom,et un seul; ce
n'est pas une assembléeordinaire elle rassembleles gens
de la campagneet de la ville; elle a lieu non sur la Pnyx
commeles autres, mais à l'agora(désignationtraditiounelle
desvieillesassembléesdeschefsdes yt'vr,, nomconsacréégale-
ment pour les réunions solennellesdes groupementsreli-
gieux C., p. 141); le nomde l'ostracisééventuelest écrit
sur un Waiwi (ou tesson); enfin six mille suffragessont
nécessaires mais ce chiffré représente-til un quorumou
une majorité? Ona beaucoupdiscutélà-dessus M.M.tient
encore pour la premièrehypothèse<p.419-440);en fait, les
témoignagessont plus favorablesà la seconde M.C. l'éta-
blit (p. 149et suiv.). La question est. liée à celledes itpn
h' ivop!(concessionde l'adeica, c'est-à-diredu droit de parler
au peuple en faveurde certainscondamnéset collationdu
droit decité),pourlesquelssix mille suffragessont également
exigés nous considéronscommedémontréque, dans tous
ces cas, le chiffrede 6000 représentela majoriténécessaire.
Le fait est capital, car cette majorité doit être considérée
commeun substitut de l'unanimité; or l'unanimitéest la
loi des décisionsdu génosprimitif en sorteque noussaisis-
sons dans le régime de la cité la persistanced'un principe
antérieur à elle et remplacé dans les cas normauxpar le
principe majoritaire. Retrouverl'origine et définirla fonc-
tionde ce dernier.reste encoreun problèmetroublant.
Maintenant,qu'est-ce, au vrai, que l'ostracisme?On ne
saurait préciser sa fonctionpar une téléologiede senscom-
mun. Moyeu préventif contre l'oligarchie et la tyrannie,
Wli I.V.\K8K
SOUIOMMIUUB.
taûMSO'J
assure M. C. (p. 107 et suiv.i. C'est au moins iusullisttut;
c'est au fond admettre qu'une institution peut s'expliquer pur
ta volonté consciented'un groupe ou même d'un législateur
en l'espèce CHstliénes)et en fonction de réalités aussi iudefi-
uies qu' « aristocratie » ou « démocratie », objets tout au
plus d'uue expérience vague. De ftiit, la disproportion reste
trop sensible entre une interprétation de «eus commun et les
particularités si étranges de l'ostracisme. El c'est perdre le
béuéfiee des conditions de l'expérience que de ue pas cher-
cher le rapport qu'il peut y avoir entre cette institution rela-
tivetneut ancienne d'une société encore si éloignée de la
notre et lu structure sociale ou les représentations religieuses.
II est bien frappant que la queatiou de j'ostracisme soit posée
au peuple obligatoirement uue fois par au, à lu même date,
et qu'on ne puisse ostraciser qu'uu seul individu. Il est bien
frappuut. d'autre part, que cette « pénalité » soit appliquée
avec une douceur relative et ne paraisse pas avoir un carac-
tère passionnel bien marqué. Cette espèce de quarantaine
infligée daus un intérêt de salubrité sociale a dû mettre eu
jeu. dans le principe, des représentations et des sentiments
qui, deux siècles plus tard, étaient devenus incompréhen-
sibles ù uu Aristote. L. il.

EDLER vonHOFFMANN.– Die Entscheidung liber Krieg


und Frieden nach germanischem Recht. Tubiugen,
Mohr, 1907,vn-70 p., in-8°.
Actuellement, dans les États germaniques, c'est au chef de
l'État seul qu'appartient le droit de déclarer la guerre. Or à
l'origiue, daus les tribus germaniques, ce droit appartenait à
l'assemblée du peuple. Comment l'assemblée du peuple a-
t-elle perdu ce droit? Commeut se sont constituées les préro-
gatives de la royauté' Pour répondre à cette question,
M. v. II. passe eu revue les transformations du droit de
guerre ou de paix chezles Vandales, les Ostrogoths, les Wisi-
goths, les Lombards, les Hurgotules, les Alamans, les Bava-
rois, les Tuuringieus, les Saxons, les Frisons, les Francs.
Il remarque justement que, lorsqu'on parle du droit de
déclarer Ja guerre exercé par rassemblée du peuple, il faut
distinguer les èas ois il s'agissait d'une guerre intéressant
toute la tribu de ceux où un guerrier entreprenant cherchait
des compagnons pour quelque razzia- il faut se rappeler
OUiiAKISAtlUN' PUMTIU.UK Wi

encore uou seulement que (es chefs puuvaicnl préparer û leurs-


gré les décisions de l'assemblée, mais que les prêtres gar-
daient divers moyens de lui faire respecter leurs volontés.
Mais, tel quel, le droit des assemblée» populaires devait
iHrede plus en plus réduit par les circonstances mêmes. On
ne le voit guère subsister que chez les Frisons et les Saxons.
Dans la plupart des autres races, le conducteur de 1 armée
accapare peu à peu la faculté de décider ia guerre ou la paix.
Lndurée des entreprises d'émigration, l'extension destëtats,
les nécessités de la conquête expliquent cet irrésistible
accroissement du pouvoir royal. <>.U.

CKAHAM WALLAS. – Human Nature in Politics.


Londres, Coastable, 1908,xvi-302p., iu-8°.
La démocratie représentative suscite, partout oit elle s'éta-
blit, des difficultés significatives et pourtant la sciencepoli-
tique ne progresse pas. On s'en tient le plus souvent, dans les
spéculations sur la vie politique, à de vagues aphorismes tra-
ditionnels, ou à des observations toutes personnelles et frag-
mentaires. Oune voit pas ici, comme en pédagogiepar exem-
ple, des spécialistes réunir et classer, en dehors de toute
théorie préconçue, des documents sur la nature humaine.
M. Graham se propose de commencer à comblercette lacune.
Conseiller municipal de Londres, habitué des campagnes
électorales, M. Ci. est mieux placé que personne pour con-
fronter avec ceux déjà vie les enseignements des livres.
Sa tendance, commecelle de M.MacDougall.est nettement
anti-intellectualiste. Après la psychologie de William James
et après la biologie de Darwin, on ne peut plus en rester.
pense-t-il, aux postulats communs au radicalisme philoso-
phique et à la plupart de ses adversaires. Macaulay.s'il ne
croit pas comme Hentham que l'homme est dominé par la
recherche de la plus grande somme déplaisirs., semble encore
admettre cependant que toute action humaine s'explique
par une fin préconçue. En réalité, l'homme est un animal
moins raisonneur. C'est surtout avec des instincts et des im-
pulsions que les candidats doivent compter. Les « entités
politiques » servent surtoutà grouper des émotions (chap. II).
fît les « inférences non rationnelles » ichnp.111) sont singu-
lièrement plus fréquentes que les autres.
En foi de quoi l'auteur indique quelques préceptes confier»
408 L'ANNKK SOCIOLOMOUK. 19UIÎ-IV09

ver un domicile dans sa circonscription, mais n'y


pas habiter
continûment, c'est le plus sûr moyen de sauvegarder son
prestige; en réunion publique, ne se défendre qu'en atta-
quant, etc. Chemin faisant, l'auteur rappelle les effets spé-
ciaux que l'on peut attendre de la réunion des électeurs en
foules impressionnables; mais il ajoute
que, d'âpres ses expé-
riences anglaises, ces effets seraient de peu
d'importance
(p. 54).
Peut-on espérer, daus ce domaine aussi, une mainmise de
l'esprit scientifique qui permettrait, non seulement d'exploi.
ter plus méthodiquement l'irrationnel, mais
peut être de
rendre plus rationnelle la conduite politique ? 11faudrait alors
opérer, dans la science politique, un changement analogueà
celui qui a été opéré récemment dans la science
économique.
Il faudrait ne plus penserà cet homme abstrait ou a
cecitoyen
idéal dont l'image transparait, selon l'auteur fp. 123), à tra-
vers les enquêtes mômes de M. Ostrogorski sur les
partis. Il
faudrait, à la manière des médecins, rassembler un certain
nombre d' « observations typiques et se placer au point de
vue « quantitatif ». L'exemple.le plus clair que fournit l'au-
teur de ce changement de méthodeest celui qu'il emprunte aux
travaux de la Commission parlementaire chargée d'enquêter
surla PoorLaïc en 1908(p.188,. Celle-ci ne s'est pas contentée
comme celle de 1834 de raisonner « priori sur le rapport du
travail au besoin, et de l'effort au plaisir. Ellea vu à l'œuvre
dans les faits, à travers mille observations accumulées, les
divers facteurs qui influent, dans les diverses situations
sociales, sur la volonté du candidat à la pauvreté.
Livre suggestif, mais qui, le lecteur s'en rend compte
par cesquelques exemples – pose plutôt les problèmes qu'il
ne contribue à les résoudre. C. B.

A. F. BENTLEY.– The Prooess of Government. A Study


of social pressures. Chicago, The Universily press, 1908,
xv-501 p., in-8".
CommeM. Graham Wallas, M. Bentley voudrait fournira
la science politique des bases objectives. Mais s'il n'est
pas
plus intellectualiste, il est moins psychologue. H juge trop
étroites, ou trop vagues, les explications qui nous renvoient
aux sentiments aussi bien que celles qui nous renvoient aux
idées; les instincts des races lui paraissent aussi insuffisants
OIUU.\(S\TIÛN PUUTIQUK 409

à rendre compte des mouvements politiques que les calculs


individuels. « Pour préparer les voies», commence donc son
livre par la condamnation d'un certain nombre de théories
soi-dignut explicatives celle de Giddings comme celle de
Smail, et, après celle do Spencer, celle de Itiering lui-même
(p. 1-154). La vie politique ne s'explique qu'à celui qui voit
les groupes en action, luttant les uns contre les autres pour'r
s'assurer les moyens de pression nécessaires à la satisfaction
de leurs iulérêts. « Les idées peuvent toujours être exprimées
en termes de groupes, non les groupes en termes d'idées »
(p. 206). C'est dire que M. B. entend se placer à un point de
vue strictement, rigoureusement sociologique.
Mais il fait remarquer que la sociologie ne gagnerait pas
grand' chose sur la psychologie si elle s'en tenait à des cou-
cepts aussi vagues que le Volktgehl, l'intérêt collectif, la
Volonté générale, l'Opinion publique. Derrière ces mots, cher-
chons les vraies réalités sociales à savoir les groupements
actifs. L'opinion publique vaut ce que valent les groupes qui
t'expriment (p. 238). Cesont leurs forces respectives, et leurs
techniques particulières, aboutissant à des pressions plus ou
moiusdirectes, qu'il faut se représenter pour comprendre ce
qui meut la machine politique. Dece point de vue on aperce-
vra clairement l'équivoque de la classification traditionnelle
des gouvernements (le despotisme reste, en un sens, un gou-
vernement représentatif et un gouvernement représentatif
laisse une très large place au despotisme;, la vanité de la
théorie des trois pouvoirs 'le judiciaire et le législatif, comme
l'exécutif, obéissantaux pressions des groupes;, la vraie nature
delà loi (une habitude du groupe qui tend à s'universaliser;.
Dans tous ces chapitres (XaXVI), M. 13.illustre et commente
de toutes manières, en la généralisant, la remarque de LassaIle
sur les diverses forces sociales qui font toute la réalité des
constitutions.
Les organes par lesquels toutes ces pressions s'exercent ne
sont pas seulement, à vrai dire, les partis politiques, dont
l'auteur distingue différentes espèces ichap. XVII). 11 faut
tenir grand compte aussi des groupements semi-politiques –
ligues, associations partielles qui peuvent à un moment
donné peser d'un grand poids. Il faudrait, en somme, répartir
tous.ces groupes, en groupes de discussionet groupes d'orga-
nisation. Ceux-cisont plus près de l'action, ceux-là plus atta-
chés aux théories, mais les uns et les autres traduisent les
410 l/AX.MiK .SUCigLOUIQL'K. 1UM-I9II9

intérêts des groupements de diverse nature que fait ualtre lu


variété des circonstances (chap. XXI The UnderlijingConili-
tiansl Et c'est de ces groupements premiers que les organisa-
tions politiques tiennent teur force M. H. réagissant contre
les teuduuces d'Ostrogorski. s'eflorce ici de montrer que la
machinerie ne crée rien elle canalise, pour eu mieux diriger
l'impulsion, des énergies données.
Les groupements vitaux ne coïncident pas exactementavec
les classes. L'auteur ne veut pas que l'on identifiesa théorie
avec celle de Marx qui suivant lui réalise encore des abstrac-
tions (p. 4(58)et il proteste contre l'exclusivisme des explica-
tions purement économiques (p. 209). Mais il ne fait qu'indi-
quer les différents facteurs – les données géographiques, lit
concentration ou la raréfaction de la population – qui, à cAté
delà distribution des richesses, peuvent contribuer la for-
mation de groupes politiquement puissants. Pourquoi, parmi
ces centres de groupements, M. U. ne siguale-t-il
pas les
croyances religieuses, et ta longue persistance de leur action?
N'est-ce pas peut-être que le fait serait difficile à accorder
avec la tendance dominante des explications de M. B., qui
correspond en gros, au moins par ce qu'elle nie, a celle du
matérialisme historique? Mais plus que l'influence d'une
doctrine quelconque, l'influence de la vie politique améri-
caine et des spectacles que les luttes de groupes ont donnés
aux États-Unis dans ces dernières années est sensible dans le
livre; etc'estune des choses qui en fout ta saveur. On regrette
seulement que l'auteur n'ait pu, en développant ses Appen-
dices, confirmer par le récit des faits dont il a pu être témoin
ses thèses générales elles restent trop souvent, faute d'exem-
ples, affirmées plutôt que prouvées. C. B.

TL'I'PEUC. L) – Sociology and comparative Politios. Sociol.


Hec, I, p. 20y.ise.

USUH (A. – Die Politlk. Untersuckung ûber die vcelker-


psyohologischen Bedingungen d. gesellgohaftl. Organisation.
lïankfurt a. M.,liuellen u. Loening,1900,iti-80,100p.

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meiuer»Hechts-undStaats-Lehrft.Berlinet Leipzig,1908,95 p.
I.KUIUMÏ
UkHttlMUKTK 411
UliPKCKBX (II.). Das Gesamtinteresse ala Grundlage des
Staats und Vœlkerroohts. Leipzig,190S,ni p., in-8«(Knsuiede
déduire le droit publicet le droit iiileuiulioimld'une notion foii-
tluniputulcqui serait le priticipi:de toute vie niurak' et
.juridique la notiond« but ou d'iiiWh'iH
fç<:n<r!il)
MLMFOUI) [E: The Origins of Leadership. Chicago. l'niver-
sity l'iess, 190'J,in-8<\81 p.
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ton Kœnigsthums der GermanischenStsemme (l)i«Thiiringe).
U-ipïig,HreilkopfundHaeiU:l,1907,xxiv-180p.

VU. UvDROITDKPROPRIÉTÉ

ParJIM.D.»vv
et I.êvv.

Ka. BEROLZHKIMElt.– System der Reohts und Wirts-


chaftsphllosophle. IVBand Philosophie des Verraôgens
einschliesBllch des Hanclelsverkers.Mtïnclien, Beck, 1907,
x-883 p., in-8°.
Sous le titre de « Philosophie du patrimoine » le quatrième
volume consacré par M. Berolzheimer à la philosophie du
droit nous offre la suite d'une sorte d'encyclopédie où il a
réuni les problèmes, qui, dans les diversesbranches du droit.
sollicitent l'attention du théoricien. Mais c'est ù une analyse
historique et comparative, et non u la méthode idéologique
du Nalurreeht que l'auteur s'adresse pour arriver aux solu-
tions qu'il nous propose. Il déclare lui-même(p. i et 170), en
termes auxquels le sociologue ne peut que souscrire, que les
raisous métaphysiques et utilitaires sont insuffisantes à
rendre compte d'institutions comme la famille, le mariage ou
la propriété seule l'histoire de leurs (ormes primitives four-
ait l'explication (le leur développement et de leurs modalités
actuelles. Tel est /l'esprit dans lequel l'auteur entreprend de
uous mettre sous les yeux le t;ible;iu réel des phénomènes
économiques et juridiques, tels qu'ils sont.
»2 l'ANMSG SOCIOLOOIQUK.
J900-1909

C'estd'abord et essentiellementla scienceéconomique–


donten sommetout dérive qui a été fausséepar la façon
abstraitedont on a conçule fait économique, et par la ten-
danceà ramener tout son développement à des facteurssim-
ples commele besoin.Ici l'onattendraitune bonnedéfinition
du fait économique.L'auteur nous montreseulementque
l'économies'organiseen fonctiond'uneréalitétrès complexe,
à la foisjuridique et économique le patrimoine.Maisles
cinqphases que l'auteur reconnaît danscette organisation
(p. 32et 37)ne sont-ellespas à leur tourle produitd'unedi-
visionassezartificielle?Et l'idée elle-même de fairedece fac-
teur économiquele facteuressentielde l'évolutiondesinstitu-
tionsjuridiqueset socialesn'est-ellepasaussibienartificielle?
Unefois ces préliminairesposés,noustrouvonsanalysés
tourà tourlesdiversélémentsqui formentle contenupositif
de cettenotionfondamentaledu patrimoine(propriété,droits
réels,obligations,droitde vengeance,droitdomestique,droit
d'héritage).Mais,commenousl'avonsdit,c'estd'une analyse
historiquequ'il s'agit. Or, cette recherchedes formesprimi-
tivesest dominéepar le principesuivantaffirméà proposde
la propriété(p. 41) dans les civilisationsprimitives,le sujet
juridiqueest toujoursun groupe(groupefondésurdesrepré-
sentationsreligieusesousur la consanguinité);l'individuau
contrairen'apparaît commesujet des diversdroits qu'à une
périodeplus avancéede la civilisation.Propriété,servitudes,
vengeance,composition,mariage sontdoncdes relationsju-
ridiquesétablies originairemententre groupes,sans qu'il y
ait lieu de parler d'un communismeuniversel,maisseule-
ment d'un droit collectifde groupesrestreintset nettement
définis.Decesdivers droitscollectifsdesgroupessortent,par
la suite, les divers droits individuelscorrespondants.Il y a
certainementdu vrai dans une telle conception. Par exemple,
il est sur que le soinet le droit de la vengeanceappartenait
primitivementau clan. Mais faut-il affirmerpour autant,
d'une façongénérale,le caractèrecollectifde touteslesinsti-
tutions primitives?A toutle moinsfaudrait-ilne pas laisser
ignoreroune pas ignorerque bien des réservesontété faites.
Le mariagecollectifenparticulier(6>«p/)«hc/((?)estchosevrai-
ment tropcontestéepourqu'onpuissese contenterd'enaflir-
mer l'existence,sans preuvesni discussion.Lesthéoriesde
Morgan,reprises par Kohler,ont été, ici mime,biensouvent
réfutées,et il a été montrédans quel sensil faut interpréter
le duoit dk paopniéîâ 413

le mariagefirrauru. Quelque ppiuionqu'oùait, on ne peutpas


ne pas tenir comptedecesdiscussions.Aussibien les biblio-
graphies, d'ailleurs nombreuses,de l'auteur, laissent-elles
apparaîtred'étrangeslacunesdansson information.Longue-
ment et à peu près exclusivementallemandes,donnent-elles
l'étatallemandde la question? Il faut le croire. Eu toutcas
elles no donnent nullementl'état de la question. Celleseu
particulierqui concernentl'exogamie, le totémismeet le
mariagesontvéritablementinsuffisantes.
La partie de l'ouvragequi concernele contrat et l'obliga-
tion nousparait plusintéressante.L'auteurs'élèveavecforce
et avecraisoncontrela théorie qui voit dans la volontépsy-
chique l'élémentconstitutifdu contrat. Primitivement,il
n'était pas questiondevolontéà proposde contrat, maisseu-
lement do prestationréellementou symboliquementeffec-
tuée. Mais.mêmeavecle régime postérieurdes contratscon-
sensuels,la volontén'estpas le critèrefondamentaldel'obli-
gation. Notre capacitéde contracter n'est-elle pas, en fait,
fort limitée par la loi? Toute cette critique est juste. Mais
l'auteursupprimela questionvéritablelorsqu'il s'interdit de
rechercherl'originede la force liante du contrat. Au lieu
d'interrogerl'histoire,Il improviseunesolution pourlui, le
contratobligeparcequ'ilest consacrépar la Loi, et il est cou-
sacré par la Loi dansla mesureoù il répond aux besoins
pratiquesdu commerce et à notre besointhéoriqued'équiva-
lence.
Maisce livre n'estau fond qu'un manuel. Tout ce qu'on
peut lui demanderc'estd'être renseigné,non d'être original.
Ontrouveradansla dernièrepartiequelqueschapitressur le
commerce,sur la circulationet laconcentrationdu capital,et
à la fin un index. G. D.

F. GOLDMANN. – Elgentumserwerb durch Speziflka


tlon lm Jûdischen Recht. Zeitschr.f. vergleich.lieekts-
wiss,1909,XXII,p. 232-285.
Onsait qu'il peutexisterdivers modesoriginairesd'acqué-
rir la propriété occupation,prescription,acquisitiondes
fruits, adjonctionou rapprochementde deux choses, épave,
Orce derniermoded'acquérir est spécialement
spécification.
intéressantpar la questiongénéralequ'il soulèveet qui n'est
autre que la propriéténaissantdu travail. Le conflitentre le
414 l/ASNKK
SOCIOMMIQUK.
19l)«-l!)OT

possesseur d'une matière et celui qui a transformé cette ma-


tière, ou encore, par analogie, entre celui qui possède un ter-
rain et celui qui élève une construction sur ce terrain, amène
en ellet à se demander si le travail donne un droit sur lu
valeur qu'il crée. Et c'est un tel conflit que nous voyons sur-
gir dans la théorie de la spécification. Une personne trans-
forme par son travail une chose qui ne lui appartient pas et
lui donne une forme nouvelle; va-t-clle, de ce fait, acquérir
un droit propre sur la nota speciexainsi créée pur elle, ou au
contraire ce nouvel objet reste-t-il juridiquement assimilable
à l'objet ancien et continue-t-il par conséquent à être in pro-
priété exclusive du premier propriétaire 1 Telleest la question
particulière de la spécification. Gaius (II, 79) nous rapporte
qu'à son sujet les juristes romains étaient divisés « Que-
ritur utrum tuum sit id quod ex meo eileceris an nieum. Qui-
dam materiam et substantiam spectandam esse putaut, idesl
ut cujus materia sit, illius et res qua? facta sit, videatur esse.
idqne maxime placuit Sabino et Cassio; alii vero ejus rem
esse putant qui fecerit sed eum quoque cujus materia et
substantia tuerit, furti adversus oum qui subripuerit, babere
actionem; uec minus adversus eundem condictionem ei com-
petere, quia exUncuc res licet vindicari non possiut, condici
tamen furibus etquibusdam aliis possessoribus possuat. »–
Ainsiles Proculieus veulent que l'objet nouveau appartienne
à l'ouvrier, les Sabiniens au contraire qu'il reste aux mains
du milme propriétaire. A l'époque classique on est arrivé, dit
Girurd(Manuel,p.'li6i,âuuedoctrineinlermédiaire«quiestun ii
triomphe partiel de la doctrine proculieune et qui attribue la
chose nouvelle à l'ouvrier qui l'a faite, mais seulement à la
condition qu'elle ne puisse revenir à son ancienne forme, et
peut-être aussi à cette autre condition que le spécificateur
soit de bonne foi. » D'ailleurs le spèciflcaleur doit indemniser
l'ancien propriétaire de la valeur de la matière qu'il perd,
comme aussi dans le cas inverse, l'ancien propriétaire gardant
son droit sur ta chose nouvelle devrait rembourser l'ouvrier
de sou travail.
C'est cettt! question des rapports de la spécification et du
droit de propriété que l'auteur de l'article que nous avons
en vue étudie pour le droit juif.
i. Période Tannaïtique (jusqu'à la fin de la Mischnah, iiOU
ap. J.-C.y. La spécification conçue comme une transformation
artificielle génératrice d'un droit de propriété est conçue des
Mt DUOITDEPROPRIÉTÉ -My

l'origine et mômeétendue au cas de lu croissance d'un animal


ou de raeeroissemeul naturel de valeur qui résulte pour
uu objet d'un changement de place par exemple. Ainsi dès la
période tannaïtique la spécification fait acquérir. Cependant
ici comme à Rome, lu doctrine se divise Hillel tient pour la
spécificationacquisitive et le droit du travail. Scharnmaï
pour la spécificationnon ucquisitive et le droit de la matière
qui s'approprierait le travail par une sorte d'accession. Mais
des motifs économiques tendirent à imposer peu à peu le
point de vue des Hillélistes on vit en effet que souvent le
travail accrolt la valeur de la matière dans des proportions
très considérables. Cela n'empêcha point que des arrêts isoli-s
continuassent à s'inspirer de la théorie adverse (cf. Rabbi
Simon ben Jehuda aux environs de 170; Habbi Ëliezerben
Jakob, etc.
Maisil uesullisait pas de décréter que la spécificatiou fai-
sait ounon acquérir. La jurisprudence tannaïtique commença
d'en délimiter le concept. Tout travail, d'après elle, n'im-
plique pas spécification et par conséquent acquisition de
propriété. Il faut, entre autres conditions, que le spécificateur
accomplisseson travail spontanément,car s'il a reçu mandat
du propriétaire, il travaille simplement pour le compte de ce
dernier. Le cas-type de spécification est donc, pour les Tau-
naïtes, celui où le spécificateur a pris la chose du propriétaire
et la transforme, à son insu, en un objet nouveau. 11n'im-
plique pas le volde la matière. Mais un tel vol a lieu parfois:
à côté du spécificateur de bonne foi, il y a le spécificateur de
mauvaise foi. Et il faut dire qu'à l'égard de ce dernier, In
.Mischnali,avec son louable souci de reconnaître lit valeurdu
travail, parait indulgente puisqu'elle l'oblige seulement à
restituer la valeur de l'objet au moment du vol. Ainsi la pro-
tection du travail honnête entraîne celle du travail malhon-
nête. Dans quelles conditions exactes se réalise celte double
protection, c'est ce que montre l'étude détaillée que l'auteur
fait.des conditions particulières de ta spécification soit artifi-
cielle, soit naturelle (p. '246à 239).
II. Période Talmudique (jusqu'à la fin dit Talmud de Baby-
lone, 500 ap. J.-C.). L'auteur attribue au caractère formel et
littoral du droit de cette époque et à la casuistique juive la
lenteur des progrès réalisés. Le principal objectif des Juristes
d'alors tut de ramener définitivement à l'unité la théorie de
la spécification et de rattacher au droit du travail les der-
410 l.'ANKÉg SOCIOLOGIQUE.
1900-1909

nieresdécisionsqui restaientempreintesde I autretendance.


Ils firentégalementdes distinctions.C'est ainsi que la vertu
juridique de la spécificationse trouva réduite par les dif!é-
renéesque l'on reconnutentre losdiverses façonsde trans-
formerun objet.Taudisque la doctrine tannaïtiquedéclarait
valabletoute espècede transformation,le Talmudposa en
principequ'il n'y aurait pas spécificationdansle cas où l'ob-
jet nouveauserait susceptiblede revenir à sonétat primitif.
Encelad'ailleursil ne lit que s'inspirer du droit romain, de
la nmilentiamédiade Justinien.Maisl'applicationde ce nou-
veau principeconduisità des subtilités qui firent perdre de
vue le principe de protectiondu travail honnête.Le spécifi-
cateur sans douteétait souventmalhonnête aussi le droit
8'inquiétait-ilpeu des cas où il eut pu être vraimentlésé.
C'estce qui explique,suivantnotreauteur, que le Talmudne
contiennepoint, par exemple,de protectionefficacepour un
spécificateurqui, avec la matièred'autrui, eût réalisé une
œuvred'art.
III. PériodePost-talmudique.Isaacben Jakob ne fait que
reproduireeu les accentuantles positionsdu Talmud.Quant
à Maïmonide,sa contributionest plus importante. Plus
encoreque le Talmud,il rétrécitla conceptiontrop largede la
transformationvalable, définiejadis par la Mischuah-11en
excluttout ce qui est transformationinvolontaireet fortifie
lapositionjuridiquedu propriétaireprimitif vis-à-visdu spé-
ciflcateurde mauvaisefoi.Il développepour cela la notionà
peine définieavant lui de renonciation.Les Tosaflstesenfin
continuentl'couvrede Maïmonideet introduisentune protec-
tion vraimentefficacedu travaild'art. G. D.

KARLHAFF.– Die daenlsehen Gemelnde Reohte. Leip-


zig, GeorgBfiume,1909,1" partie L'almendet la Marche,
(213p. et trois cartes,in-8").
D'abordla définitiondes termes:
La partie de forêt occupée,défrichéepar le conquérant
Germainse nomme tcang(tanyr) dans le droit danois du
moyenâge, wang signifiechamp la forêt autour du village
s'appelle tior; on donne à tout bois le nom de xhoghou
ûoijr; la mark dans les sourcesdanoisesest le sol dans les
limites d'un village; on» est le sol qui constituela mark en
dehorsd'un village,qui est commun a plusieursvillages; on
MiDROIT
DRHWPMliTli if]
nomme atminning ou almienntng ce qui est soumis à la do-
minationd'une certaine communauté.
Dansles grands almends, le titulaire du droit est toute la
communauté des habitants, Par I» suite (comme on le voit
par exemple dans lo SôdeimannaUiagenin (chlyters Corpus),
les habitaiits seles partagent – dans la loi du Jûllaiid les pay-
sans ayant eu la jouissance commune: le lot de chacun était
sansdoute égal sur le» grands almends commeil l'était surles
almends de villages.
Lesdroits sur les forêts ue sont pas précisés dans les vieilles
lois danoises; les lois suédoises les limitent à ceux qui habi-
tent le village.
Les pâturages d'été sont utilisés d'une manière semblable
à celle qu'on trouve en Islande, en Suède, en Norvège, etc.
Cequi n'était pas propriété individuelle n'appartenait pas
eu tout cas au roi, mais il lit communauté d'habitants et, s'il
résulte de la loi de Jutland que le fond et le sol de l'almend
était au roi, la foret aux paysans, cela n'était pas dans les
vieillescoutumes danoises. Plus tard. les paysans n'ont pas
sur les forêts de la communauté un droit réel mais un droit,
qui presque toujours leur est accordé par privilèges spé-
ciaux.
Il'' partie La communauté des terres (It2 p. in-8" et deux
cartes).
La communauté des champs est une terre sur laquelle il
n'y a pas de propriété privée, mais des parcelles attribuées
périodiquement au sort ou d'après certaines règles.
Lesrecherches de l'auteur ne confirment pas les théories de
Hanssen, Hoscher,-Laveleye d'après lesquelles les récits de
Césaret de Tacite décriraient une organisation agraire origi-
naire. Déjà d'ailleurs Tacite montre que des différences de
situation sociale jouaient un rôle dans le partage « Agri pro
numéro cullorum ah uuiversis in vices occupaulur quos mox
inter se secundum digiialiouem purtiuulur. »
Kn Danemark, la terre en possession de nobles s'appelle
ornum. Sous réserve de ces droits de préférence, il était
naturel que les terres fussent périodiquement partagées
entre les voisins. Ou voit à partir d'une certaine époque les
parts être attribuées, comme dans l'Allemagne du sud, pour
deux à trois ans, puis retourner à l'Almend.
En Suède, le sol de l'almeiid n'était pas travaillé avec la
n! '0.DuiihiiKiu. vh"L.I•iociol-,lîmnrtuu,n
– Aiiin*i' 06-ltiOO. nH
87
418 L'ANXKK MICIOLOlilQl'K. I«W»|!MI

charrue niiiis.ivee la houe à cause (te lu ntittire pierreuse du


terrain, et ceciencore à uue époque ri'ceiile.JJwplus, le sol au
bout de trois mis était épuisé: et alors un roulerneut était
indispensable.
Dans certaines régions était pratiqué le système des trois
champs été, hiver, puis jachère; ailleurs c'était tantôt trois,
tantôt cinq périodes, ailleurs quatre.
Le partage de terres d'une Marche de village se faisait au
vu"siècle et après, par le sarment ou la corde. Les procédures
de partages fixaient les parcelles selon uu certain ordre, une
certaine orientation, et une relation précise existait entre les
droits dans le village et les droits sur les champs, les prés.
Ces procéduress'étaient précisées, sansdotito, notamment,pur
l'ellet de l'augmentation de la population.
Des règles correspondantes fixaient les droits sur les mar-
ches de plusieurs villages, lorsque l'altnend dépendait de plu-
sieurs villages.
Kgulemeul uue réglementation précise concernait les se-
mailles, les moissons, les pâturages. Quand les semailles se
faisaient, une assemblée du village fixait le temps pendant
lequel les champs étaient protégés contre la pâture. Les
moissons devaient autant (tue possible être faites en même
temps: au cas de retard, il y avait citation devant la justice
qui lixait un terme au delà duquel le contrevenant devait
protéger lui-même, et à ses risques, sa récolte contre les
pâture.
Dune manière générale, des amendes sanctionnaient les
violations de toutes les règles prescrites.
Celte analyse résume les directions de l'ouvrage. Mais c'est
une œuvre d'érudition historique et philologique. 11s'eflorce
de montrer l'organisation des terres danoises, en prenant
pour centre le moyenAge. indépendamment de tout appel
aux théories divergentes sur l'origine et les transformations
du droit de propriété. Il est à consulter dans le détail, jus-
qu'aux indications les plus minutieuses sur ce que les textes
nous disent sur les mesures de partage et les incidents de
procédure. Mais il est en même temps un hou instrument pé-
dagogique par ses grandes divisions, par nu exposé dont la
texture savante ne supprime pas le mouvement, par d'ingé-
nieuses cartes schématiques qui veulent rendre visibles le vil-
lage, ses forêts, ses champs, ses enclos. les droits sur le tout
fie la communauté et des habitants. H. L.
LK DIIUIT DE PHÛl'HtKTli 4-tU

CAHltlfiL'ET.– Le régime de la propriété. Tniilû île sociologie


d'aprfts les j>firicij>(.'Hde lu llu'Mtlo^ior.iillinliqii'1. Paris, Hlovtilel
0'.

v(i. – Intorno alla evoluzione délia proprieta. Riv.


JMLLAIil
Util, d. aociuL, XIII. p. 13-33 (Surit* passage d« la propriété collec-
tive du lu tevre ù la prupriùU";privée dans Hiisluiro des Ktals
modenws).

CI,'U (lu).)- – La propriété foncière en Chaldée d'après les


pierres-limites (Koudourrous! du musée du Louvre. A'ow.
liée. Ilistur. de U/ l'JUO.p. 7l)t-73Vt 1!IO8.|i. Hî:i-*78 deux nou-
veuux Kouilourrous.

FI.ACII(J.J. Le code de Hammourabi et la constitution origi-


naire de la propriété dans l'anoienne Cbaldée. liée. Historique.
1907, p. 272-280.

LACOMUI1: (l'An; – L'appropriation privée du sol dans l'anti-


quité. Bec de synthèse Idit.. XII, p. 278-308; XIII, p. iiii; XIV,
p. 31-31,et Iit)-lîi7.

I.ACO.MBK. L'appropriation privée du sol. Nouvelles études.


««. detutUhise hiti., XVIII.p. 180-189et p. 281-310.

IMHKSTK <K. – Notes sur l'hypothèque en droit grec. JVuu-


vetle Ikv. Ilisl. de Dr. fr., 1908, p. C3IMi»0.

BGHNII«:KT I"h). – Die Verbuohung der dinglichen Reohte


an OrundstOoken im griechisonen Rechte. Xvitschr.f. vergl.
Hechtsirm., 1908; XXI, p. I421U7.

MAHKOW1TSCII;l..u.\»'. – Die Orundbesitsverhœltnisse in


Serbiennaoh Duscbans Oesetz. Zeitwltr. f. cergleick.liechUuiss.,
190», XXII,p. 1UI-I88.

HHIFFAUT,O.). -Étude sur les biens cultuels familiaux en pays


d'Annam. Paris, hui-ose i-tTciiiu, 1<JO7,xii-Kil p., in-V1.

KDMO.N'T(K.). – La transmission de la propriété dans les an-


ciennes coutumes. Un-, fie*tradit. populaires, avrill'Jlfô.

POUSSANT(M.). Origines et transformations de l'hypothèque


dans l'ancien droit français. Vw\>. Uirust: i;t l'cuin, l'.tuh.
Hli p.

KOS/lIIi. – La propriété foncière en Angleterre. lieu,de ujHtltHe


hist., XVII,p. 30-42: XVIII.p. 32-43.
420 L'ANNÉE 1900-t'J(W
SOCIOLOOIÛOE.

VIII. DROITCONT1UCTUKL,
DROIT
COMMERCIAL
Pur MM.Mil'»»,lUvr, lluveux.

J. RAUM. – Blut- und Spelchelbunde bel den Wad-


schagga. Airhi. f. Hcligionswm.,1907, X, p. 209-294.
Les Wadschagga sont une peuplade montagnarde, de la
chaîneet des environs du Kilimaudscharo, de race et de civi-
lisation bantou. mais fortement influencée par les races et la
civilisation des Nègres du Nil. Merker. connu aussi pour son
travail sur les Musai, nous avait donué déjà une idée de teur
droit. M. R., qui s'était signalé en nous donnant do précieux
renseignementssur leur religion, étudie ici uu rituel d'alliance
tort important. C'est l'itlliauce par le sang et le crachat. Le
mot de mmtt,dit M. R., désigne non seulement le rite, sa
forme, nmiseucore, eu fuit, la partie de substance organique
qui est passée, par ingestion, du corps de l'uti daus le corps
de l'autre, partie à laquelle s'attache le lien de saug, comme
un nœud, un « ban » magique et enfin le mma désigne encore
ce ban magique lui-môme » (p. 271,p. 291 Eu principe, c'est
un rituel d'ordre politique, il est réservé aux chefs, à leurs
alliances, à leurs traités de paix, qui impliquent toujours la
reconnaissance d'une sorte de vassalité (cf. p. 2Tô)du vaincu
vis-à-vis du vainqueur. 11lie d'ordiuaire, non seulementles
deux chefs comme uu fils h un père (p. i»ii, mais les prin-
cipaux personnages des deux principautés.
Le rituel proprement dit est précédé d'une sorte lie doublet,
de diminutif, une sorte d'échange d'anneaux, et de crachats.
La céiémonie se fait, dans la cour du vainqueur, sous la
direction des vieillards du lieu, et en présence seulement de
quelques témoins qui participent aux rites de consécration
et d'imprécation. Il consiste en une série de malédictions évo-
quées sur le contractant au cas où il violerait, d'une façon ou
d'une autre, sou contrat d'alliance, et do bénédictions éven-
tuelles pour le cas où, suivant les multiples hypothèses énu-
mérées, il l'observerait. Les formules sont alternativement
répétées, approuvées par les vieillards, les contractants.
Elles enchantent et le contrat, et la peau de la chèvre sacrifiée
sur laquelle les contractants se tiennent, et le sang, qu'au
momentle plus solennel les deux chefs, puis les représen-
DKOIT CO.NTIUeTURt, DROIT GOMltRRCf.U 431

tants des deux parties, s exiraiem au nras. u» sucem le sang


l'uu de l'autre, ou lève la peau de chèvre, et c'est dans la
maison du chef que les contractants se crachent dans la
bouche.
Mais ce contrat d'alliance a pu évoluer dans deux sens.
D'une part, dans le cas d'alliance purement politique, la
cérémonie entre les deux chefs ne suffit pas, et l'on fait une
cérémonie qui donne une force sacramentaire aux formules
des troupes rassemblées, entourées d'une corde, et dont les
victimes sacrifiées ont fait le tour. Autrefois c'étaient des
initiations sanglantes ou des sacrifices humains qui accompa-
gnaient ces rites. 1)'autre part, ce procédé juridique a pu,
soit avec l'autorisation du chef, soit en secret, servir à des
contrats individuels; on s'assure ainsi la bonne foidu tuteur,
du dépositaire, du complice. Dans ce cas, le rite se réduit à la
forme simple de l'échange des crachats, soit dans une bois-
son, soit môme directement.
On voit ici, dans un fait extrêmement typique, rassemblés
bien des éléments qui ont fondé ailleurs le droit contractuel.
M. M.
R. LASCH. – Das Marktwesenauf den primitiven Kul-
turstufen. Zeitschrf. Sozialiois.\ 1900,p. 019-027.700-715,
764-782).

Rathgeu et Huvelin ont étudié le droit des marchés en Alle-


mague et en France l'auteur entreprend ici la même étude
pourles peuples primitifs. L'activité commerciale qui s'exerce
dans le marché primitif est suivant lui un cas particulier de
la division du travail entre les sexes. Le commerce loiutaiu
et plus ou moins belliqueux est réservé aux hommes, lecom-
merce voisin et pacifique est la part des femmes. Ce carac-
tère pacifique des transactions du marché les rapproche
de celles de la pratique bien connue, du « commerce silen-
cieux » (cf.Iiin. Soc., VIII). Mais l'auteur, tout en recon-
naissant ces ressemblances, se refuse à voir dans le « Silent
traite » étudié par Grierson le prototype du marché en géné-
rai les conditions mômes du marché, le fait qu'on y échan-
ge avant tout des denrées alimentaires, le distinguent du
commerce silencieux. De telles marchandises étant suscep-
tibles de se gâter très vite, vendeurs et acheteurs doivent
s'entendre immédiatement. Enfin le commerce des marchés
se distingue des autres formes de commercepar des conditions
fc!2 l/AMiliKiociuuMiyUK. tliiitl-19û9

déterminées de lieu et de temps, et par des coutumes et uVs


prescriptions spéciales. Au point du vue géographique ou
constata que les marchés sont très peu
développés dans les
Iles. KUeei les opposeencore au graud commerce
(lui au con-
traire y est spécialement
llorissaut. Maisleseouditionstopogra-
phiques, et do môme les conditions ethnologiques 'caractère
différent des diffèreuls peuples) restent secondaires: elles ue
sout pus coitstautes. Seulle double trait que le marché est
réservé aux femmes et consacré à lu veute de
produits ali-
mentaires est essentiel et peut délluir l'état
primitif de cette
institution économique. L'auteur appuie cette définition sur
de nombreux exemples empruntés à
l'etliuo^rupliie et nous
montre cummeutles hommes ne
participent au commercedu
marché qu'à partir du moment où cesse de se restreindre
aux vivres pour s'étendre à des objets de toutes sortes.
L'eu-
trée des hommes au marché est même considérée comme si
peu régulière que. dans certaines peuplades, ils sont exempts
des droits de place auxquels sont au eoulraire
assujetties les
femmes n'est-ce pas une preuve qu'où leur refuse la
qualité
d'agents normaux du trafic i
L'auteur nous apporte ensuite des
renseignements sur
la
remplacement, périodicité, l'heure, la durée des marchés
primitifs. Toute cette réglementation vise, comme celle du
commerce silencieux, à. assurer la paix et la sécurité néces-
saires à l'échange on ne porte point d'armes, mais souvent au
contraire une branche verte, symbole de paix; il a des
y per-
sonnes spécialement charges de surveiller le bon ordre des
transactions et de régler les différents, etc. Mais M. Lasch
dépasse, avec raison, l'explication simpliste de Grierson il
n'admet pas (lue la seule idée des nécessitésdu commentait
suin à guider le primitif et à lui faire
accepter et imposer
celte trêve momentanée et
périodique ait milieu d'un état de
guerre permanent. Si des représentations relieuses n'étaient
intervenues, cette neutralité de la foire et du marché u'eiH
ja-
mais été obtenue.Il a failli qu'elle tilt regardée comme sacrée
et qu'on vit dansle lait dela violer un sacrilège infaiiliblemeul
et immédiatement chAliéd'une sanction divine. 0. 0.

HEjfiL <l>'Jouas:»! Dasalttestamentlsche Zinsverbot.


HiblixrheSlwlien,XII. 4, Fribourgen-Hrisgati, Herdersche
Verlagshuclilmndlung. 1907. Mp.. in-8".
La prohibition du prêt
à intérêt par l'Ancien Testament a
muiiT riii'TiiAi'TrbL mmrr ciiUMicitr.lAl, 4&i

été un tiiit historique d'uue graude importance car eettf


prohibition a passé dans le droit cttnotitqtm,et toute ta légis-
lation économiquedu moyeuâge s'en est trouvé»transformée.
D'où l'intérêt qu'il y a ù rechercher les origines et les causes
de celle prohibition. Cette recherche, M.11.l'entreprend à la
lumière de la « jurisprudence ethnologique » ip|>. 8 I7i:
iuspirution heureuse, mais qui serait plus heureuse encore
s'il ne suivait pus trop aveuglément les hypothèses de Post
et s'il ne s'ex posait, par lu, aux mêmes critiques que son
modèle*.Quoi qu'il eu soit, voici les traits généraux de l'évo-
lution du prêt à intérêt, tels qu'ils ressorteut de sou étude de
droit comparé.
Il y a des sociétés qui ignorent le prêt à intérêt. Ce sont
celles qui se fondent sur la communauté de race '(jesclilrch-
temclitlklw Organisation de l'osl;. Chex elles toute la pro-
priété est collective, il n'y a pas d'échanges, pas de transac-
tions intéressées. Les hommes doivent s'eutr'aider gratuite-
meut. Le prêt à intérêt n'apparaît, avec les autres formes
d'échanges, que dans les relations internationales. L'étranger
qui emprunte a un homme que n'oblige envers lui aucuu
devoir d'assistance, reconnaît ordinairement par un cadeau
le service qu'il reçoit. Ce cadeau, de volontaire et spontané
qu'il était à l'origine, devientobligatoire; il prend le caractère
d'uue rémunération régulière. A lu longue, l'usage d'une
rémunération analogue s'introduit dans les prêts entre cou-
citoyens, lorsque décline l'ancieiiue solidarité lainiliale. Or la
pratique généralisée [de l'intérêt engendre des abus. Les pré-
teurs exigent des iulérèlsénoriiies, et cela amènel;i puissance
publique à intervenir, et a renouveler par voie législative ce
qui n'était autrefois qu'un précepte coutumier. Ou aboutit
ainsi à une prohibition absolue du prêt H intérêt. Cette
rigueur doit fléchir avec le temps, car elle gêne les besoins
d'échanges, sans cesse grandissants. Ou transige d'abord, et,
entre la prohibition absolue et la liberté absolue, ou admet
un régime de liberté limitée; on fixeun taux maximum que
l'intérêt ne doit pas dépasser. Ce n'est que dans des civilisa-
lions parvenues à uu haut développementcomnierciaj qu'on
supprime toute limitation légale et qu'on établit un régime
de complète liberté.
Les peuples voisins de la Judée n'étaient point parvenus, en
mémo temps, ù la pratique du prêt il iulérét. Les plus en retard
étaient les Égyptiens, qui avaient conservé intactes jusqu'au
42V f/.ANNKB SOeiOI.HOIfJl'R.IWM-tWV

règue de Bokchoris (vin* siècle av. J.-C.) leurs préveutious


contre Iklée d'uu prêt rémunéré. Us s'en départirent depuis
cette époque, iuflueucés par les civilisations
asiatiques, mais
ils limitèrent à 30 ou 33 1/3 p. 100le taux licite do l'intérêt.
Les Babyloniens et les Assyriens le» avaieut devancés,et de
beaucoup, puisque le commerce et lu pratique du prêt il iutô-
rôt fleurissaient chez eux trois mille nus avant notre ère. Les
Babyloniens admettaient un taux légal maximum de 20 p. 100.
Les Assyriens s'étaieut même allraucltis de toute réglementa-
tion restrictive chez eux l'intérêt de t'argent se fixait libre-
ment entre les parties, par le seul jeu de la loi de l'offreet de
la demande (p. 18u6i.
Le peuple israélite était très jeuue par rapport aux peuples
égyptien, babylouieu et assyrien il menait encore la vie
nomade quaud il s'établit eu Palestine, et il u'avalt pas
dépassé la phase de la GeschlechlerrechtlklwOrganisation. 11
ne pratiquait point originairement le commerce, et il ne
devait faire sou éducation commerciale qu'à partir du règne
de Suionion. Rien d'étonnant, dans ces conditions, a ce qu'il
regardât le prêt comme essentiellement gratuit. La prohibi-
tion du prêt à intérêt n'a rien que de normal, de naturel
c'est une application d'une loi ethnologique universelle.
Le premier précepte de droit positif sur la matière est
attribué à Moïse. Celui-ci s'est vraisemblablement borné à
renouveler età préciser une règle cou lumière qui se perdait.
Peu à peu on commençait à prêter il iulérêt mais la con-
science populaire n'acceptait qu'avec répugnance cette nou-
veauté. En la proscrivant, Moïsea donné satisfaction aux ten-
dances conservatrices de son peuple (p. a~i4't).
Nous ne possédons pas les préceptes mosaïques daus leur
forme originaire. Le texte de VExode(22,24i porte la
marque
de rajeunissements importants. Il ne se borne
pas à interdire
aux Hébreux de prêter à intérêt i a une portée plus large
il leur prescrit de traiter leurs débiteurs avec moins de
rigueur que ne le font les « usuriers », et par ce dernier terme
il entend désigner les prêteurs professionnels, –
banquiers,
changeurs, d'origine assyrienne – avec lesquels lés Hébreux
commençaient à se trouver en contact par l'intermédiaire des
Chauanéens(p. 64-73;.
A ce premier texte il en faut joindre plusieurs autres
qui
lui sont postérieurs. L'un d'eux est le célèbre
passage du
UeutéroHome(23, 20-21) qui permet aux Israélites de
prêter
DROIT GOHTMeTUN., DAU1TCOM4IKBCIAL 423

aux étrangers. Il a fourni parfois uu alimeut facile aux polé-


miques antisémites. Su véritable portée s'explique suffisam-
ment par les considérations ethnologiques que nous avons
rappelées (p. 83-77). Vient ensuite un passive du Mvitiqut
(25, 36-37),qui semble à première vue u'ètre qu'une répétition
du précepte de l'EMile, mais qui en constitue en réalité une
interprétation exleusive. Pour tourner la prohibition du prêt
à intérêt. Il parait qu'où se servait parfois d'un expédient,
emprunté à la pratique assyrienne,qui consistait à dissimuler
une convention d'intérêts sous uue clause pénale le prêteur
stipulait une peine conventionnelle, c'est-à-dire uue iudem-
uilé, pour tout retard que l'emprunteur mettrait àlerembour-
ser après une échéance qu'il avait soin de fixer très rappro-
chée ou bien, lorsqu'il s'agissait, commecela arrivait souvent,
d'un prêt de denrées, il stipulait une indemnité pour le risque
que lui faisait courir la baisse éventuelle de ces denrées au
temps de leur restitution (p. 77-89). D'autres textes moins
importants (/> 18,» 37,26; 33,15 Ez., 18, 8 13, 17 ¡
Hpr., 28, 8, etc.; nous attestent que les Hébreux lie laissèrent
jamais tomber en désuétude la prohibition ancienne, mais
qu'ilsdureut l'enfreindre assezsouveut dans la pratique, pour
qu'on la rappelât tant do fois (p. 4)0-911.
De cette étude consciencieuseet intéressante. M.H. tire cette
conclusion, que la prohibition du prêt a intérêt chez les Hé-
breux ne procède point d'influences étrangères. Elle ne vient
ui des Assyriens, ni des Babyloniens, ni des Égyptiens. Elle
est liée spontanémentde certaines conditionséconomiques et
sociales. P. il.

JOSRF PARTSCII. – Grieehlschea BUrgsehaftsrecht. I.


Das Recht des altgrlechischen Gemeindestaats.
Leipzig et Berlin, Teubner, 1909, 434 p., in-8°.
Il existait déjà plusieurs monographies traitantdu caution-
nement dans l'ancien droit grec. On a rendu compte ici même
(Ann. Soc, VIII, p. 4484S0j de celle de T. W. Beasley, qui
était la dernière en date, et on exprimait, à ce propos, le vwu
de voir consacrer à cette importante matière une étude vrai-
ment scientifique. Ce vœuest réalisé aujourd'hui. Le livre de
M. Partsch domine de très haut ceux de ses devanciers il
leur est supérieur par l'abondance et la sûreté des informa-
tions, et plus encore parla méthode et le sens historique.
420 I.'mkBB >0i:lUl.()(iH,H!K.
HIOIM'JU!)

Cettesupériorité su révèle immédiatementdans les dévelop-


pements réservés au très ancien droit ip. 9-80). Le témoi-
«»*Hjçe principalsur le cuuUouiieineutpréhistoriqueest fourni,
comme on suit, par Homère <(%w. VUI,JK4-300i;il s'agit du
célèbre épisode où Ares, surpris eu flagrant délit d'adultère
avec Aphroditeet enchaîné par Héphaïslos,n'obtient la liberté
nécessaire pour se procurer sa rauçoii que par l'intervention
de Poséidon, qui se porte garant en son nom. M. 1\ élu-lie
longuement cette anecdote, et en déduit ingénieusement les
traits caractéristiques du très ancien cautionnement. La
caution homérique n'est pas autre chose qu'un otage, qui
donne sou corps en gage pour garantir la réalisation d'une
éveutualilé définie, et qui s'expose par suite Ii la veugeauce
privée, si cette éventualité ne se réalise pas. L'engagement de
cet otage n'a aucuu caractère accessoire; il lie suppose pus
l'existence d'une obligation principale à laquelle il serait
subordouné tp. 23-33). L'engagement se réalise par le rite
formaliste de la paumfr lu caution tend la main droite au
créancier, (lui lit reçoit dans sa main droite; par ce geste, elle
se met symboliquement « dans sa main », c'est-à-dire dans sa
puissance. Les mots techniques, qui servent à désigner la cau-
tion et le cautionnement, rappellent cette ancienne pratique.
'Ky.'âr, signifie étyinologiquement « dans lu main »; syyjâv
signifie n metlivilnux la main » <p. 33-541.
Ainsi conçue, l'îyyv/, homérique se rapproche beaucoup de
la caution germanique (à laquelle, pour plus de clarté, je
restitue ici sou nom ancien de plnjcrie ou pùriiw). Ou suit que.
daus le vieux droit germanique, toute obligation est conçue
comme une plégerie. Ou dit d'un bien grevé d'uuecharge réelle
qu'il est pluige, d'uu débiteur priucipal qu'il est son propre
pleige, d'uue personne qui assume certains risques, qu'elle
est pleige polir ce risque, etc. Il n'en va pas autrement pour
l'r-'À hellénique. L'élude des mots apparentés avec t'/vÂ,
et dii mot à/ïosyîTO* (assumer une obligation de garantie)
nous montre rlue les concepts helléniques de cautionnement
et d'obligation reposent aussi sur la mêmeidée de risque
eu (irèce comme en Uennanie, on dit d'uu bien altccté à une
sûreté qu'il « cautionne ». Nous manquons toutefois d'indices
pour affirmer que le débiteur principal soit regardé comme
se cautionnant lui-même (p. «0-70) Le parallélisme entre le
droit hellénique et le droit germanique se trouve également
rompu sur un autre point tandis que, en droit germanique,
DROIT
DilOlïCU.VriUWUBI., CUMMEUCIAI* -427
lu plégerie suppose nécessairement une dette, eu droit hellé-
nique, l'syY'Jv, peutexister en dehorsdo toute dette tel est lu
cas lorsqu'elle suppliqueil certains devoirs extra-juridiques.
par exemplecelui qui résulte de la promesse faite par un
prisonnier de guerre de payer une rançon (p. 84-OU;.Souvent
le cautionnement grec s'analyse, non point eu une sûreté
attachée ù une dette, mais en une promesse de garantie tour-
nie pour le cas où une éventualité déterminée se produirait.
Si l'éventualité se réalise, on peut saisir la personne de
l'ïyyw;, mais non le contraindre à exécuter personnellement1
ce qu'il a garanti (p. 70;. Les cas d'application originaires de
l'îyyiï, sont mal connus. Ou y peut ranger sûrement les pro-
messes de garantie relatives au paiement des compositions
pécuniaires pour délits; – et, très probablement, certains
engagements pris eu matière de procédure, et certains con-
trats (louage, fermage, entreprise de travaux, vente, etc.
(p. 77et sq.j.
Après ces recherches sur l'syyûï, homérique, M. J. P.
s'attache à l'îypr, étudiée dans les sources classiques. Suivantt
une méthodeexcellenle, il commence par scruter le sens des
divers mots techniques qu'emploient ces sources à propos du
cautionnement, Ces mots sont moins nombreux et moins
divers que ceux qu'emploie la terminologie romaine corres-
pondante. Danslessoiircesatliques, il n'y a guère qu'îyyvMWJvt,
tyyvâv, syyjv,, sYYVTW»et leurs dérivés. Ava&sywfk'.n'y
ligure jamais avec une acception technique. Il est est autre-
ment dans les sources d'autres dialectes, où l'on rencontre
encore, il côté d'îyyj* et des formes apparentées, le mot
îiporcbï,; pris dans le sens de la caution iji. 87-125). A cette
étude de terminologie, M. P. joint une critique trop jus-
tifiée – de la littérature consacrée à rJyyJr, classique. Il
constate que tous les auteurs qui ont abordé ce sujet iller-
mann. Meier-Schfimann-FJpsius,lJlalner, Tliulliehn, Urina,
(laillcmer. Lécrivaiu, Beauchet. Ueasley) ont eu le tort de
suivre la doctrine roinauislique récente, et de définir le
cautionnement comme une obligation accessoire accom-
pagnant une dette principale. J'avais fait jadis i.Wi».
snc, V1 1 1 p.4Wila même observation. M. I'. ne démontre
le bien fondéde lit façon la plus pressante et la plus décisive
(p. 127-132).
Les développementsque M. P. consacre à l'jyyir, classique
présentent moins d'intérêt pour le sociologue que les préeé-
dents. Nous pouvons doue les résumer plus brièvement.
Signalonsd'abordceuxquisontrelatifs àlaconclusiondu cau-
tiouuemeiit,à la capacitédes parties(p. 133-145;,aux condi-
tionsde tormatiouetde preuvedel'actejuridiquepur lequelil
se réalise.Toutetracedu formalismeanciena désormaisdis-
paru. L'accorddes volontés,manifestéeu une forme quel-
conque,suffità rendrele contrat partait, sans l'intervention
de témoins, et sans la rédactiond'un écrit (p. US-ISSj.
L' «Y*w(w;ç oe prometpasd'effectuerpersonnellementla pres-
tationpourlaquelleil répond;ilueditpas:r>;moywffvvïxr.«w;
– il prometseulementd'eu garantirl'exécutionpar autrui;
il dit rfTJW}t*i «ûrivKwrlmv», cequi ne l'obligequ'à payer
éventuellementuneindemnité.Telleestdu moinsla pratique
juridiqueque nousfoutconuattreles sourcesattiques. Dans
les sourcesnonattiques,ou voitfréquemmentYî'ftvrrftipro-
mettre d'effectuerlui-même,à défautdu débiteur, la presta-
tion qu'il cautionne; il dit sypwjx«taùrivàno&tarttv v,«ùtôt
àrcoSww(p, 1C8-171).
Pas plus que Yr~vt,homérique,l'î'/yw, classiquen'a le
caractèred'une obligationaccessoire.L'w.r/j peut être
obligé plusque le débiteurprincipal.Toutefoisle caution-
nement tombe lorsque la dette cautionnéen'existe pas ou
n'existe plus (p. I72-I7C).La conditionde rîyyyr.r/îï est
assezdouce.Le créancierne peutle poursuivreque lorsque
le débiteura manquéà ses engagements(p. 178-193). Encore
doit-ilintenter contrelui, à ceteffet,uueactionen justice; il
n'est plusautorisé,commedausledroit homérique,à s'empa-
rer de lui sans jugementL'exécutionne porteplus sur la per-
sonne,mais sur le patrimoine.Ceprogrèsrésulted'une lente
évolution.Sans doute,ou avait pris l'habituded'insérerdans
les conventionsd'ïyyJv,desclausespar lesquellesles cautions
se réservaientd'avancele droitdese racheterà prix d'argent
des rigueurs de l'exécutionsur la personne.Cesclausesse
sont généralisées,sont devenuesde style, et ont finipar être
sous-entenduesdans tous les cautionnementsip. 103-200/.
Le droit attique a atteintici uueétapeplus avancéedu déve-
loppementque les autresdroits helléniques.Dansla plupart
des cités helléniques,toutcautionnementqui n'est pas con-
senti expressément« à fin de paiement» (v.i hnvrv/<expose
encore la caution à l'exécutionsur la personne; seuls les
cautionnementsri; ïxïitw donnentouvertureà une action
aveccondamnationpécuniaire(p. 200-209/. Ledroit athénien
DROITCONTIUWUKL,
DROITCOUUKHCUI. 429

ne fait plus cotte distinction pour lui tousles cautionnements


valent comme des cautionnements «wmnvnv, et ne donnent
jamais ouverture qu'à une action, la ow.rwv?,? –que M. P.
étudie autant que le permettent les sources tronquées dont
nousdisposons(p. 209-2l8i–-eidont la condamnation n'atteint
l'svyv/.T*;?que dans sou patrimoine. Pour écarter la 3Uy,
îvyiï,ç et rendre le cautionnement exécutoire sans jugement,
il faut une convention expresse, qui est d'ailleurs légalement
possible fp. 219-228).
A l'époque classique, le cautionnement ne s'éteint pas par
la mort de \'l-rtr-l,ï- L'obligation passe à ses héritiers. Mais
l'on ne saurait parler ici d'une véritable succession. H n'y a
pas, en droit grec, de succession aux dettes. M. 1'. croit, con
trairement à l'opinion courante, que les dettes ne se trans-
mettent que comme une charge de l'hérédité, et dans la
mesure où les héritiers recueillent t'actif héréditaire (p. 228-
246). La mort du débiteur n'éteint le cautiouuemeut que
lorsqu'elle met fin à un rapport purement personnel (par
exemple au cas de louage); elle ne l'éteint pas lorsqu'elle
laisse survivre une dette pécuniaire que ce cautionnement
garantit (p. '240-249).Eu dehors des cas dont it vient d'être
question, le cautionnement peut encore s'éteindre par une
convention, par le paiement de la dette garantie, ou par
la dation d'une satisfaction équivalente, par la prescrip-
tion, etc. (p. 2W-S84).
Il peut y avoir pluralité de sûretés. Parfois, pour une
même dette, la caution coexiste avec un gage, parfois aussi ou
constitue plusieurs cautions. Dans ce cas, la convention
autorise d'ordinaire le créancier à agir contre une seule des
cautions à son choix, ou contre toutes (p. 254-271). L'idée du
bénéficede cessiond'actions n'est pas étrangère au droit Itellé-
uique, et la caution qui a payé le créancier peut exercer, pour
son recours, les droits de ce dernier (pp. 271-272).Il convient
en effet d'assurer le recours de la caution, psirtieulièrement
contre le débiteur principal. Ce dernier est moralement tenu
de ne pas laisser son ï*wrt,i dans l'embarras; il l'est aussi
juridiquement, du moins en droitclassiquo. La voie de recours
donnée pour cela est une action, qui ne se fonde point sur
uu rapport général de droit pouvant exister entre la caution
et le débiteur (par exemple sur un mandat), mais qui est spé-
ciale à lu matière de l'l-jr,. Elle permet, soit de faire indem-
niser la caution, si elle a déjà payé, soit de la faire libérer, si
i.'lO I.VKXKK IfltUM'.MM)
SOeiOI.OOKil'E.

«lie n'u pas encore pttyé,et que son engagement n'ait plus
d'utilité (pp. 272.2881.
Une question fort importante est celle de savoir quelles sont
les applications de \'i~rt,. On en trouve beaucoup dans le
domaine du droit privé et de la procédure. Parfois i'èyy'jy.Tv-;
intervient spontanément, sans être constitué par un débiteur,
et sans môme qu'il y ait un débiteur c'est par exemple le
cas où un tiers s'interposecomme axseitor libeiiulix estfaveur
d'une personne qu'une autre réclame pour sou esclave; le cas
où un citoyen s'engage à ce qu'un étranger qui plaide devant
une juridiction hellénique lie fasse pas défaut, etc. Parfois
aussi l'r™jrï,7t\iintervient pour le compte d'un débiteur dont
l'obligation manque de sanction c'est le cas où un déposi-
taire consent une S77W,à son déposant, pour garantir la res-
titution du dépôt qu'il eu a reçu cette application du caution-
nement uous reporte à l'époqueoù le pacte do dépût, dépourvu
de formes, n'était pas encore sanctionné juridiquement. Par-
fois enfin VvfCJr,vt,tintervient pour le compte d'un débi-
teur dont l'obligation est déjà sanctionnée, pour y a jouter une
sûreté de plus nous avons des exemplesde semblables inter-
ventions dans les contrats de prêt de consommation, de prêt à
usage, de vente, de louage, d'entreprise de travaux, de
séquestre, etc. (p. 388-8.(0 1. Remarquons.il'ailleurs,qu'il ne
faut pas confondre, –comme le fait la doctrine moderne–
le|ït'J*K'nvi,5,garant d'éviction dans la ventn, avec ï's'^y^r/
Le 'itSauuT^ ne se borne pas, comme Vv^jr,?/ à promettre
le fait d'autrui (ici le paiementpar le vendeur d'une indem-
nité à l'aclicteur évincé); il promet son fait personnel; c'est
lui qui fournit en son nom propre la garantie, ce qui s'explique
parce qu'il est partie à l'acte de vente, et juridiquement assi-
mité au vendeur (p. !iM)-8u8>. Certains cas d'application de
l'ïyvvr, restent douteux. Lugarantie qu'on désigne d nom de
r.r:\i est-elle une tyv.jy,? Le iwowmrr/ des inscriptions de
Délos est-il u» î'/Y'-ir/r/i;?A tous ces problèmes. M. P. donne
des solutions inléressantes et neuves 'p. 338-3711.
L's*j»i s'emploie aussi daus le domaine de la procédure
criminelle. Nouants comprendrionspas, de nosjours, qu'on put
adjoindre à un prévenu ou à un condamné une caution app
lée à subir les peines mêmesencourues par celui qu'elle cau-
tionne. Mais la caution hellénique est un otage, et c'est pour-
quoiellepeuts'exposerà une responsabilité pénale, parfois très
étendue, en répondantsoit pour la comparution en justice da
1)1(0! T i.'QMUKWIAI.
DROITCONTIIACTL'Ef., 431

l'accusé, soit pour le paiement de l'amende par le condamné.


D'ailleurs eelteresnousabllltë s'adoucit avec le temps;elle tend
à devenir purement pécuniaire. L usage se répand de limiter
d'avanceaux presta lions pécuniaires l'obligation do l'h^ïri;
en matière pénal». A Athènes, sinon duus d'autres cités, uue
pareille convention soustrait la caution aux peines propre-
ment dites (-licou ruespar le délinquant <p.37l-J8.*ij.
La fin du livre de M. P. traite du cautionnement en droit
public. Elle expose d'abord les règles particulières de droit
publicqui s'imposent aux cautions engagée!!vis-à-vis de l'État
(p. 390418), – puis les usages suivis pour la constitution de
cautions dans les relations internationales car ou emploie
rJy/vY,pour donner à ces relations la sanction dont elles sont
par elles-mêmes dépourvues. Souvent un ftlut, eu s'eiigageant
envers un autre État, lui assigne un de ses ressortissants
commer/y/r/rvl;. S'il manque à ses engagements,sait
subit les rigueurs de t'execution. Xous ignorons, d'ailleurs.
quel recours la caution peut exercer contre l'État qui l'a colis-
tituée <\>.418-423).
M. P. lieconclut pas. Sans doute réserve-t-il ses conclusions
générales pour le volume qui doit compléter celui-ci. et trai-
ter du cautionnement d'après les papyri gréco-égyptiens.
Commeon le voit, la matière traitée par M. P. était ample
et variée. L'auteur n'a pas été inférieur à sa tâche. Envisagée
au point de vue de I" seule méthode philologique, son œuvre
peut être qualifiée d'excellente. C'est au point de vue de la
méthode sociologique qu'on pourrait formuler des réserves.
M. P. dit L'îf,"Â est ceci ou cela, elle produit tels eflets, elle
comporte telles conditions, et il emploie pour cela la ter-
minologie abstraite et les cadres imagiués par la doctrine
juridique moderne. Avec les théoriciens allemands, il lie
manque point do distinguer Vllaftung, YiMùjiHinn,la .SWikW,
sans s'apercevoir que, même au point de vue des droits mo-
dernes, il n'y a guère là que des mots. Mais il lie dit pas
r^"i"T»iî agit da telle façon, et coici raniment sen eontnn-
linrainsentinugmt xon acte. Il ue replace pas les institutions
dans leur milieu. Il lie dit pas un mot des conditions écono-
miques qui ont pu influer sur le développement de l'r""Jv
II passe sous silence des questions comme celle de savoir s'ilit
n'y a pas un lien entre l'ancienne communauté familiale et
le devoir de se laisser porter caution pour un proche, ou de lie
pas laisser dans l'embarras une caution qui a payé pour
432 L'ANNÛKSOCIOLOUIQUR.4900-1900

autrui- 11se sert, il est vrai, du droit comparé, du moins pour


la partie de sou livre qui traite de la préhistoire. Mais il en use
avec quelque timidité. puisqu'il ne prend de termes de compa-
raison que dans le droit germanique et le droit hindou, alors
qu'il pouvait aisément faire ttppet à beaucoup d'autres droits
sutUsammetitconnus dès maintenant (droit hébraïque, droit
musulmau, droit celtique, droit coutumier médiéval, etc.).l,
Encore se croit-il obligé de s'excuser (p. 7-H).
Quoi qu'il en soit, le livre solide, probe, clair, bien rensei-
gné, de M. P. peut être regardé commel'une des plus impor-
tantes contributions qui, aient paru dans ces dernières années
sur l'histoire des obligations. P. H.

BERTOLINI(Cksahk;. Appunti didattici di diritto ro-


mano. Toriuo, 1905-1909.9 fasc. 1177 p. iu-8°, TipogrnOa
Pietro Gerboue.
Sous un titre modeste, ce gros volume du savant romaniste
italien nous présente une histoire complète des obligations
contractuelles et quasi contractuelles romaines. Il passe suc-
cessivement en revue les contrats formels (nexum, contrat
verbal, contrat littéral), les contrats réels tmutitum, fiducie,
commodat, dépôt, gage), les contrats innommés (échange,
xstimtitiim, précaire/, les contrats consensuels (vente, louage,
société, mandat), les pactes (pactes adjoints tincontrat, pactes
prétoriens, pactes légitimes; pactes nus), enfin les quasi-
contrats (gestion rt'aJîaires, enrichissement injuste, copro-
priété et indivision•• Lapartie générale de la théorie des obli-
gations n'est pas encore publiée. Nous ne pouvons pas suivre
l'auteur, matière par matière, pour faire connaître la position
qu'il prend sur les questions qui intéressent le plus les socio-
logues. M. B. ne so pique pas, d'ailleurs, d'apporter beaucoup
d'idées neuves et personnelles daus le sujet qu'il traite. Il
tient surtout à faire (i-uvre didactique. H faut le louer d'avoir
écrit un livre clair, bien renseigné, bien composé, qui rendra
des services et mettra nombre de questions au point. Des
bibliographies abondantes, et la transcription in erlemo des
principales sources classées méthodiquement, donnent à ce
livre tout son prix. P. H.

PFLUGKR(H. U.j. – Nexum und Manclplum. Leipzig,


Dunckeret Humblot, 1908, 104 p., in-8°.
DROIT CONTR.VCTUKI., liROIT UOMURRCttt. 433

KRETSCHMAK(P.) – Da8 Nexum und sein Verhaeltnis


zum Manolpium. Xeilachv.der fiatigny Sliflung fur Ueehh-
geschichtc,nom. Abth.,XXlX, !«08, p. 227-280.
Les sources de nos connaissances sur le nexum sont si
incomplètes, si mutilées, si éuigmaticiues,qu'où peut eu tirer
toutes les interprétations que l'on veut, ou presque, et que le
nombre des systèmes qu'on peut fonder, plus ou moins soli-
dement, sur elles, est illimité. Depuis que Alitteisu remis lit
question sur le tapis, les romanistes allemands proposent
chacun h leur tour une théorie nouvelle. MM. Pfliiger et
Kretsclininr sont les derniers en date parmi les auteurs qui
s'adonnent hce sport. Leurs recherchesrévèleut un haut degré
d'iugèuiosité; mais serrent-elles la vérité historique de plus
près que celles de leurs devanciers? On peut en douter.
Au point de vue de la méthode, M. K. parait supérieur
à M. l' Moins préoccupé de sauver le vieux système de
Huschke, mieux pourvu do sens historique, il aboutità uue
théorie cohérente, et bien ordonnée. Trop cohérente, et trop
bien ordonnée peut-être, conuno le montrera le résumé de
ses idées.
La question fondamentale, dit M. K., est celle des rapports
entre le uexmnet l'acte per tes et lilmun, d'une part, le nexum
et l'acte de crédit, d'autre part. La terminologie présente des
obscurités, parce que les concepts juridiques auxquels s'ap-
pliquent les mots ne sont pas différenciés. Il semble pourtant
que, dans le précepte des Douze Tables « Cum nexuiu faciet
mancipiumque, ita jus esto », l'expression complexe neœum
mancifiiunnfuedésigne un acte unique, l'acte per m et libram.
Cela s'explique. Ou sait que l'acte per tes et lilmima servi
d'abord à réaliser une vente. Dans cette fonction ses traits
caractéristiques sont quant à la forme, une appréhension
manuelle (huihu atpere); quant aux effets, le pouvoir
reconnu a l'acquéreur do lier (uectere) l'objet acquis
(esclave, enfant, animal; pour s'en i-endre mattre. Le mot
mancipium ne suffirait pas à lui seul à identifier un pareil
acte, et, notamment, à le distinguer de Vinjuivemia, qui com-
porte aussi une appréhension. Aussi emploie-t-ou de préfé-
rence la désignation double nerum maiieipiumque.Mais cette
expression lie peut s'appliquer, telle quelle, à toutes lestrau-
sactious effectuéesper maet libram. Le mot wniicyu'uiHest de
>
trop lorsque la transaction a pour objet la personne d'un des
K. iJt-KKUKtu. Aiuh'i- sociu! 1900-1909. ;S
tôt l.VSNltKSOl!!OI.OGIQt>K.
ÎUOIMWU

contractants on ne peut pas appréhender (munit ni;wj mi


homme libre autrement dit, cmnu peut pas le traiter comme
une m nutneipi. Les sources attestent en effet qu'onnese nmu-
cipe pas soi-ineine. Les seuls témoignages douteux, ceux qui
se rapportent au mariage par cwmf/oic'est à-dire par maùei-
patioui, dateut d'une époque récente, où l'institution s'est dé-
formée sous l'influence desnécessités pratiques. Lu motni'.rnm,
sans l'additiou iiiiiiuli)>iiim(jiw.
désigne ainsi l'acte per m ri
libntm dans lequel n'intervient pas d'appréhension manuelle,
spécialement celui par lequel un débiteur se soumet à lu ser-
vitude pour dettesiXvliulitlcneelitxrhufl).
r.
Les témoignages des annalistes romains établissent que les
emprunteurs ne se résignent à devenir serfs de la dette que
lorsqu'ils sout déjà lourdement obérés, à bout de res-
sources et de crédit. Cela prouve qu'où peut s'endetter sans
devenir pour cela serf de ta dette. Comment?On nu peut peu-
ser qu'à uue veute pev wh et tibnun, adaptée aux besoins du
crédit. Celuiqui veut emprunter vend, à un capitaliste, un ou
plusieurs biens (au besoin un enfant en puissance) moyen-
nant un certain prix. Une double promesse verbale outm-u-
ptdio) accompagnela vente l'aliénateur (–emprunteur! pro-
met de restituer, à une échéance fixée, le prix reçu (mxum wx,
prcuniu nttnrupnUi)avec ses intérêts; l'acquéreur (==prêteun
promet de restituer, à lu même échéance, le bien vendu. Au
point de vue de lu forme, cet acte s'analyse donc ou une vente.
avec un prix et uu objet vendu; au point de vue du fond, il
s'analyse en un prêt. avec une somme prêtée et un gage. Com-
ment la /mm'upu/ioest-elle sanctionnée; c'est-à-dire comment
peul-ou contraindre l'acquéreur remboursérestituer le bien
vendu ?C'est ce que .M.K. néglige de dire, et ce qui stilllt
peut-être à infirmer sou système. Car l'action jiduci.nn'existe
pas encore, et VwmivceptiafubuUen'est qu'une sanction indi-
recte et insuffisante.
Quoiqu'il eu soit, M. K. croit donc qu'il existe, pour les
affairesde crédit, deux sortes d'actes pcr res ri libram 1° la
maiicipation fiduciaire, portant sur les biens de l'emprun-
teur ::>0le nexitm, portant sur sa personne, et établissant la
servitude de la dette, 11 appuie ce système sur une interpré-
tation nouvelle du fameux texte de Varrou (L. VIL
10;j) relatif au wusiuh. Pour lui, ce texte rapporterait un
débat engagé entre les jurisconsultes Mauilius et Q. Mucius
Scmvolnà propos de l'application de la loi l'œtolia l'apiria.
OMOIT CUNTItAOTl'KI.. DROIT COtfMKBCIAf, 435

Puisque lu loi avait réforméles «w« rtrium. il {«liait avant


tout préciser ce que comprenaienteus ne.ra. Fallait-il y com-
prendreles uuiHcifnn,c'est-à-dire les lils de famille que leurs
imlrexfamilin*avaient niaiicipés à des étrangers ? Manilius se
prononçait pour l'iilliriiiativo. Pour lui, la notion du nexum
embrassait tous lus actes per amn librum, tout niuncipiumétait
un w'.mm. Q. Mucius résout! la questionpur une distinction
Pour lui le nexunine comprendque les actes par mxut tibrain
qui tendent ù créer une obligation i « qun1per jds et libniiu
liant, ut oliligeutur » exception faite pour ceux où il y a
une dation ou mancipium< « pra-lerquamniaticipio detur » i
autrement dit, il n'assimile au im-nin, pour l'application de
la loi Pu'iclia Papirici, que les mancipations ait s'eiïectue un
transfert de propriété, celles pur lesquelles le inancipé perd
la qualité de suits « quod ohligntur per lilirani, ueque xuum
fit, inclenexum dietu m>•) il exclut par conséquent les iiiau-
cipatiouBqui ligureul daus l'adoptiou, la caenttia, l'étnaiicipa-
tiou, car l'adopté, la femmein nuinusont lieinles nuide l'udop-
taul ou du mari, cl l'émancipé est nuijitiïs. Ou peut donc
afliriner queQ. Mucius distingue la maucipntioii du ne.ruvi
proprement dit, c'est-à-dire de l'acte per muni lilimm qui tond
à faire naître une obligation. Cetteargumentation repose, on
le voit.sur uue hypothèsea démontrer à savoir que les défi-
nitions de Manilius et de Q. Mitciusont été formulées à pro-
pos de l'application de la loi l'œtelin Papiria. Il y a, pour l'tid-
mettre, deux dillicultés. D'abord uue pareille controverse
entre Manilius et Q..Yluoitis ne se concevrait qu'à propos
d'une loi récente. Mlleserait inadmissibleà une époque où la
pratique aurait dès longtemps tranché la question. Or. ou
place d'ordinaire la loi PuHelm Papiria au cinquième siècle
de Rome, alors que Manilius et Q. Muciusout vécu au sep-
tième siècle. J'ai indiqué, il est vrai, quelques raisons qui
porteraient à rajeunir la loi Pœlelin Papiria iV" t\e.rumdans
le Dictionnaire de DaremberKelSajîlio) mais M. K.ii'ii pas
pris parti surcette attribution de date. Supposons, cependant.
qu'il ait raison, et que les deux juriscoiiHultesaient effective-
ment songé à l'application de la loi Pustelia Papiria il fau-
drait alors que leur controverse les eut amenés à des résolu-
tions pratiques différentes. Mais nnus savons qu'il n'en est
rien. Q. Mucius conclut exactement comme Manilius, quant
à la situation des lils de famille in mauripia. Contredit- il
donc Manilius dans la seule intention de rectifier les bases
436 U' Misés SOCIOLOGIQUE.
JUOtMWJ

théoriques de sou iirgumeululiou ? Les discussions acadé-


miques no rentrent guère dans les habitudes des prudents du
vu" siècle.
Reprenons l'exposé du système de M- K.. Il aborda ensuite
la question de savoir comment se conclut le netum. Ce n'est
pas par une mancipation de soi-même, c'est pur un acte per
w»et libmut de (unne particulière, dans lequel le préteur pro-
nonce une formule déclarant l'emprunteur nexiu abmin-
iHxque.Le «mm*est traité comme un esclave, au point de vue
de son travail. 11 se trouve a cet égard placé sur la môme
pied que le fils de famille in rrrascipio. Mais, à lu dili~-rence
de ce dernier, il reste juridiquement libre, il lie subit pas de
rupitis (temiiiutio.
Quelles sont les applications du nesuin ?Il sert, soit à liqui-
der uue situation déjà obérée, suit à contracter un emprunt
nouveau. 1" 11sert à liquider nue situation obérée, et à adou-
cir pour le débiteur les rigueurs de l'exécution. Les textes
nous donnent de nombreux exemples de celte fonction du
neeum.Le débiteur se fait serf de la dette, pour échapper à lu
mise à mort ou à la vente traits Tiberini le créancier y con-
sent, pour éviter la nota eensoiïa qu'il encourt s'il prétend
user sans ménagement de sou summum jus. Souvent le débi-
teur est déjà judittitu*. Alors il contracte uu ntxum avec son
créancier ou avec un tiers, il fait argent de ses services, et
règle avec le prix reçu le montant de ses dettes wexi libem-
tio). i" Le nés mu peut aussi servir à contracter un emprunt
nouveau, Il sullit pour cela d'apporter quelques modifica-
tions à la mmcupatio, et d'y exprimer l'obligation de restituer.
qu'assume l'emprunteur et dans ce cas l'emprunteur ne colis-
mence à servir le prêteur qu'après l'échéance, s'il ue peut
s'acquitter de sa dette.
Combien de temps dure la servitude de la dette ? Les textes
se contredisent. D'après Varron, le serf de la dette porte le
nom de nesut jusqu'à ce qu'il s'acquitte par sou travail.
( « dum sotveret » ) d'après les historiens, au contraire, il
reste nexus indéfiniment, sa situation se perpétue même
lorsque ses services ont compensé son passif. Cettecontradic-
tion doit s'expliquer historiquement. Sans doute la servitude
de la dette s'établit primitivement pour une durée indéfinie.
Mais la loi Pœtelia l'apiria a adouci ce principe trop rigou-
reux. Elle n'a pas supprimé la servitude de lit dette, mais elle
a ordonné que le travail fourni vint dorénavant en déduction
DftUlTCONTRA
flTL'ia, IX10ITCOSlUKIinUI, Vil

de la dette pour su valeur pécuniaire. Les nexi qui jurent de


fournir une sommesuffisante de travail <« qui bonnin copinm
jurnrunt ») peuvont ainsi conserver la liberté de leurs mou-
vemeuts. Les(Ils defamille in mamipio bénéficient ùgalemeiit
de lu réforme. Désormais, its peuvent se racheter du manci-
pium par leur travail, sauf lorsqu'ils ont été abandonnés à lu
victime d'un délit par eux commis (abandon noxak Ainsi
s'explique la restriction apportée par ta toi Pwteliu i'apiria à
la portée do sa réforme nisi qui noxain nieruisset ». dit
Tite-Live, VIII,2H. Mais remarquons que Tite-Live ne pro-
nonce pa» un mot qui puisse faire soupçonner qu'il pense aux
seuls fils de famille in mancipio. Ici encore la construction de
M. K. reste purement hypothétique).
Comments'oxécute le hwwii ? Distinguons le nerum-pvèl du
we.»M>«-contrat de travail. Lors(|ue le netu» sert à réaliser un
contrat, de travail, le créancierpeut emmenerimmédiatement
lenexux, cela ne soulire pan de difficulté. Mais lorsque le
nejiim sert à réaliser uu prêt, ou peut se demander s'il est
immédiatement exécutoire. M. K. conclut négativement le
«cnim-prêt n'est pas un titre d'exécution il ne donne pas
directement,ouverture à la hkmhx injerlin il ne peut s'exé-
cuter qu'en suite d'une action judiciaire qui s'intente de droit
commun en la forme d'une legixnrlio persiterawnilitm in per-
Honum.Mais, en fait, il produit ses effets aussi promptement
que s'il était directement exécutoire. Car le débiteur pour-
suivi est presque toujours hors d'état de se défendre réguliè-
rement, soit parce qu'il ne trouve pas de vindex dans Vin jus
r-acaliointroductive de l'instance, soit parce qu'il n'a pas de
quoi déposer letsaeramrnlum.Le créancier peut emmener chez
lui YinHffemmii comme serf de la dette: M. K. tire cette con-
clusion du texte de la loi Muhria(c. 21et ii\. qui date, à vrai
dire. du vin"siècle.
L'élude de M. I'. contraste singulièrement avec celle que je
viens de résumer. Plus claire. plus divertissante par sa viva-
cité d'exposition,elle vise moins reconstruire systématique-
mentle ncrmitancien qu'à démolir les reconstructions récem-
ment tentées par d'autres. Mais, comme elle ne s'appuie guère
sur l'histoire, et jamais sur le droit comparé, comme son
auteur se range parmi cesromanistes qui invoquent lebon sens
ou les nécessités pratiques de tous les temps pour transposer
inconsciemmentdans l'évocationdu passé des préoccupations
actuelles, elle fait fausse roule. La critique conservatrice de
43$ i/annkk socuii.oiiiyUK. I'jùu-iuu»

M. 1>.aboutit à présenter des vieilles institutions romaines,


une imago ù coup sur moins (Idole que les reconstitutions les
plus hasardeuses des ailleurs qu'il combat.
M. 1'. s'en prend surtout ù M. Milteis, qu'il parait considé-
rer comme le principal représentant des théories nouvelles.
Il lui reproche d'abord d'être obscur. Mêmesi l'on udmet avec
lui que le itexuuiso rameue dans sa forme à une niancipatiou
par laquelle le débiteur cloum1sa propre personne eu gage de
sa dette ù sou créancier, l'institution peut s'entendre de doux
(iiçoiis 'ftiubien ta inancipiition se lie a un prêt. qui eu con-
stitue la contre-partie nécessaire le débiteur ue se inancipe
au créancier qu'à condition de recevoir une sommed'argent
à titre de prêt. C'est lu conception de Niebuhr. i" Ou bien la
inaucipation existe indépendamment de tout prêt. Si elle sert
à l'occasion à garantir un prêt. ce prêt a sa source propre. Le
débiteur se mancipe au créancier pour un prix fictif. C'est lu
conception de Scheurl et de Momniseii. M. Milteis ne se pro-
nonce ni pour l'un de ces systèmes, ni pour l'autre il semble
adopter tantôt l'un, tantôt l'autre. tantôt les deux à la fois
i lorsqu'il admet l'existence simultanée de deux formes de
arxnm, te H&cut/t-prôtet lejie/M»t-dalioueu gagede soi-même;
Il postule l'existence du MexMw-prôt,parce qu'il no peut cou-
cevoir que les Romains de l'époque ancienne aient connu des
procédés non formalistes decontracter uu prêt. M. I'. est per-
suadé, au contraire, qu'ils pratiquaient de longue date le
mut nu m.Les argumentsqu'il produit pour établir cette asser-
tion fournissent un bon exemple de sa méthode. Après avoir
allégué des autorités (Huschke. lliering! en sa faveur, il
chercha à montrer (p. Il) combien les sanctions du inutuiun
sont naturelles et nécessaires; il est aussi naturel de donner
une action au prêteur contre l'emprunteur qui ne restitue pas
que de donner une action au vote contre le voleur. A quoi
l'on peut répondre qu'il ne s'agit pas de savoir si la chose
parait naturelle ;'i nos consciences actuelles, mais si elle est
vraie, <?lque, d'ailleurs, la Mudilio furlir-n n'existant point
avant le vu'' siècle, la rondii'Hops ntttttw n'a, méinu a ce point
de vue logique, aucune raison d'exister pins tôt. •– M. I'. (ait
observer ensuite ip. \ii que la loi Satique. aussi formaliste
que l'ancienne coutume romaine, connaît un contrat réel
comparable au muttiunt, le contrat qui se (orme par la remise
d'uni; chose ur.s frieatiln. – Mais à quoi M. 1'. rnconnalt-il
que la loi Salique est aussi formaliste que le vieux droit ro-
nnoir ciixTiMCTi'ia, otioir commuhciai. 43'J

main ? Nous ne trouvons pas dans lu loi italique l'équivalent


du nexum.("est ce fait qu'il faudrait d'abord expliquer pour
fixer les rangs respectifs des deux droits eu ce qui concerne
la pratique du formalisme dans les actes de crédit. –M. P.
poursuit, <p. \t\: Les formalités du nt-ruiu sont favorables
aux emprunteurs, défavorables aux prêteurs. Or les prêteurs
étaient très généralement des patriciens. Ces patriciens n'au-
raieut pas joui, dans la cité romaine, de l'influence que les
historiens leur attribuent s'ils n'avaient pas disposé de moyens
de prêter plus « capitalisliques » il faut donc qu'ils aient pu

employer le ntitlaum. Mais le mutuuni est-il un procède de
crédit « cnpitalistique » ?M. F. remarque lui-même, un peu
plus loiu (p. 13-14), qu'il a le caractère d'un prêt d'ami, et
– Puis vient un argument
qu'il est gratuit de sa nature
d'utilité, déjà produit par Huscbke (p. 13) le nexum avecses
formes compliquées ne peut s'appliquer aux petits prêts de
circonstance il ne peut pas s'appliquer davantage aux prêts
de denrées, qui cependant devaient être fréquents. – Faut-il
insister sur le défaut de la méthode qui nous amène à décider
qu'une institution existait ou n'existait pas à une époque
donnée parce que nous la concevons commeutile ou inutile ?
Ou voit assez à quels résultats cette méthode aboutit. Dece
qu'un Hoiiiiiinqui achetait à crédit deux as de légumes chez
un maraîcher ue mettait pas nécessairement eu branle à ce
propos leformidable appareil du formalisme, conclurons-nous
que la vente consensuelle a du exister, avec ses sanctions, dès
l'époque la plus reculée –tënfin M. P. donne des arguments
philologiques. Il remarque, avec Bekker, que les Romains
énuméraient leurs modes de contracter eu plaçant les contrats
réels avant les contrats formels donc les contrats réels, et
spécialement le muluuiu, étaient les plus anciens (p. 11.. – Il
faudrait d'abord prouver que les éuumérations et les classifi-
cations des jurisconsultes classiques suivent l'ordre chronolo-
gique. Giiius place aussi In contrat avant le délit parmi les
sources d'obligations. Ksi-ceà dire que le contrat ait précédé
chronologiquement le délit ?– Le dernier argument « et non
le plus mauvais », dit M. I'. <|>-!•'>).est fourni psir une obser-
vation de Iheriug. Lu mol n-alilnr désigne étymologiqufimenl
celui qui a donne iix </«('rm-dedili.le mol tlehilw celui qui a
reçu il'*f/«i"th'-htilit't..Ces mots techniques de l'acte de prêt ne
fout donc allusion à aucun élément formaliste ils visent seu-
lementla datia constitutive du mutunm. – Ce n'est pas ici If
M" L'A.NNAKSOUIOLQUIQUR.
ISOG-lUOU
N

lieu d'engager une controverse desémasiologie. Maisles mots


debilor et créditai- lie sont-ils pas d'un usage relativement
réceutdaiu lu laugue romaine du crédit? Et d'ailleurs le nnux
du ncntM-prét n'a-MI pus reçu une somme d'urgent
que le
créancier lui a ~OMf«'<' ?
On voit par cette discussion sommaire avec quelle
pru-
dence il faut accepter les raisonnements de M. P.. Quoi
qu'il
dise, rien u'est moins prouvé que l'existeuce du mttluum dans
le très ancien droit romain. Il ne nous donne aucune raison
valable de rejeter l'idée d'un prêt perte*et tibram admise par
Mitteis.
Mais Mitteis expliquait les formes du prêt per tes et Uhnim
par des considérations d'utilité ou employait la balance dans
les actes de crédit à une époque où lu monnaiese
pesait et où
il n'existait pas de peeunin nummtta les témoins interve-
naient pour assurer la preuve de l'acte, etc. – M. P. est donc
amené, pour combattre Mitteis, à répudier la méthode de sou
adversaire, sans trop s'apercevoir qu'elle était la sienne deux
pages plus haut. Quoi qu'il en soit, il professe désormais que
les raisons d'utilité ne peuvent rendre compte des formes de
l'acte perte* et tibram. Les nécessités du but à atteindre suf-
fisent-elles à expliquer qu'on exige cinq témoins (plutôt
que
trois ou dix) ? qu'on oblige le créancier à prononcer telle for-
mule stéréotypée plutôt que telle autre ? qu'on
procède à une
pesée, alors que l'acte peut s'appliquer à un prêt de céréales,
qui ne se vendent pas au poids ? M. P. a raison de voir dau's
tout cela, non un mécanisme pratique, mais uu rituel forma-
liste.
Mais, s'il n'existe pas de nw«w-prêt au sens où le prend
Mitteis, comment entendre le texte des Douze Tables « Cum
nexum faciet mancipiumque, ita jus esto » ? M. P. se rallie
ici à l'interprétation de Leuel, en la modifiant. Pour lui, les
mots nexum et numcipwuidésignent deux moments différents
de l'acte connu sous le nom de mancipation. Les solennités
per œx« libram ont dû être précédées de certaines tractations
préparatoires. Ainsi, dans la cérémonie religieuse du mariage,
ce n'est pas au moment où le prêtre va bûnir les anneaux
qu'on se préoccupe de se les procurer et de les essayer
aux époux on les prépare et on les essaie d'avance. De
même, dans la mancipation, si l'on doit peser les lingots qui
servent de prix, on s'assure d'avance que tout marchera
bien, qu'il y aura le poids voulu, que rien ne manquera, etc.
MWIT CONTRACTUEL.DROITCOMMERCIAL 441

Lu moncipation s'effectue en réalité eu deux actes un acte


préparatoire, non formaliste; puis un acte formaliste qui
seul produit leseffets juridiques c'est à ce dernier que s'ap-
plique la désignation de neaum, parce qu'il lit les parties.
Doncdans toute mancipation il y a un nomm. Le mot manci-
jkuwia un sensplus étroit il nodésigue que les actes pM'w.!et
libram ûnnslesquels il y a uneappréheusion manuelle^– manu
rapem.1.
Le sens du mot nexiuu s'est élargi par la suite, eu môme
temps que s'accroissait le nombre des actes per us et libram.
Nexum a désigne successivement, par une extension natu-
relle, le testament pertes et libram el\a.<iolulw permetlihmm.
Le mot mancipium,qui ne s'applique plus qu'à la seule man-
cipation, se sépare donc définitivement du mot nexum. A ce
système on objecte, il est vrai, l'ancienneté relative de la
mlulioper tes et libram. Aussi M. 1J.s'efîorce-t-il de prouver
que cette institution ne date que d'une époque récente. La
jurisprudence l'aurait créée tardivement pour éteindre les
obligations nées d'un testament (legs per ilamnntionem) ou
d'une mancipation (obligations auctoiïtatix ou de motlnagvi>,
et l'aurait étendue ensuite, pour des raisons d'utilité, à l'obli-
gation née d'un jugement. M. P. sacrifie du même coup aux
besoins de sa démonstration le principe de correspondance
des formes de création et d'extinction des obligations con-
tractuelles.
M. P. s'attelle ensuite au texte de Vairon (/ L., VII, 105).
Là encore il suit do préférence les traces de Lenel. Il résulte
de son interprétation, fort embarrassée, que Q. Mucius Sca>-
vola, cité par Varron, admettait une troisième acception du
mot ncrwni. Il désignait sous ce vocable, non un acte juri-
dique, mais certains effets d'actes juridiques (les obligations
nées per œ»et lihmmi, à l'exception des effets qui naissent du
maneipium (c'est-à-dire à l'exception du transfert de pro-
priété).
Comment s'exécute le ««m/h? Les textes de Denys d'Hali-
caruasse et deTite-Live ne concordentpas sur ce point- Denys,
quoi qu'ait dit Mitteis, présente le «wuiii comme nu prêt
exécutoire sans jugement. Tite-Live.au contraire, le présente
comme une convention assujetissant un débiteur il la servi-
tude pour dettes. Cette contradiction s'explique par les ori-
gines des deux historiens. Tite-Live rapporte la véritable tra-
dition romaine, tandis que Denys, Grec de naissance,
442 l/A.NNtiK IWHM1MM
SgOIOLOUJ«L'K.
accommode ses sources ù la mode
hellénique. La pratique
grecque de sou temps insère.eu effet, très fréquemment, dut»
les contrats de prêt, la clause xaO«nî?ix obir,?
qui permet de
les exécuter sans jugement.
Quelle était la forme de l'iicte par lequel un débiteur deve-
nuit serf de la dette? C'était celle d'une
mancipation. Ou ne
peut pas se mauciper soi-môme, mais Varron nous apprend
que le débiteur mancipait non sa personne, mais ses services
(operw). Les operm,il est vrai, ne reutront pas dans la liste
classique des m mnelpi. M. 1».pense que celte liste se serait
écourtée quand le nexurn est tombé eu désuétude. Encore
faudrait-il qu'il expliquât comment ces prétendues res inctn-
âpi seraient les seules qui eusseut un caractère abstrait, les
seules qui consistassent en des choses à venir.
Puisque l'acte
caractéristique de la innncipotion consiste en une appréhen-
sion manuelle de la chose maneipée, comment
apprùltende-
t-on des opérai? M. Il. ne le dit pas, et pour cause.
Lu servitude pour dettes ainsi établie durait
jusqu'à ce que
le nems se fût acquitté. Lorsque le nexwss'était
acquitté, il
reprenait la liberté de ses mouvements; il n'avait pas besoin
pour cela d'un acte solennel de libération; la solutio jkt reset
libram ne s'appliquait pas au nerum. Rien ne
prouve que lo
travail fourni par le ne,tm vint en déduction du montant de
sa dette. Les enfants du uexiu ne tombaient
pas en servitude
avec lui.
On voit combien M. P. est loin de SI. K., et l'on
conçoit dit-
ficilement que des recherches historiques fondées sur des
sources identiques se contredisent aussi
complètement. Cette
divergence souligne un «rave défaut de méthode de nos
romanistes, défaut moins apparent peut-être lorsqu'ils dis-
posent de sources d'information abondantes et sures, mais
tout à fait frappant lorsqu'ils ne peuvent faire état, comme
c'est ici le cas, que de sources incomplètes et douteuses nosv
romanistes n'utilisent point les études de droit
comparé. Ils
se risquent bien quelquefois à fournir
quelques références
non contrôlées, non critiquées, généralement tendancieuses.
sur tel ou tel point d'une législation arbitrairement choisie;
ils pensent afficherainsi, à peu de frais, une certaine
largeur
d'esprit et une certaine curiosité. Mais ils no vont pas plus
loin. Aucun d'eux ne donne au droit comparé la
place qui lui
revient, c'est-à-dire la première aucun d'eux ne demande à
des investigations de droit comparé des notions
générales sur
UltUITCONTIUCTDBI.,
UitolTMtMUKltClAI. ii'i

ta coulexture et la portée de l'institution qu'il étudie duns un


milieu particulier aucun d'eux ne prend le droit comparé
comme guide dans le choix des questions qu'il doit se poser.
Ils donnent libre carrière à leur imagination les monogra-
phies s'accumulent mais la solution du problème n'uvauce
pas; on peut aflirmor qu'elle n'avancera pas, tant qu'on ue
basera pas l'étude du uexum romain sur des recherches ser-
rées, complètes, scientifiques, do droit compare. P. H.

FLINIAUX (Anuhé). – Le, vadimonium (Thèse). Paris,


A. Rousseau, 1908, iu-8»,105 p.
On appelle rmlimnnium,en droit romain, une institution
destinée à assurer la comparution d'un défendeur devant le
magistrat, lorsque les débats in jure dans lesquels il défend
ne peuvent se terminer en. un seul jour. Le défendeur fournit
pour cela à son adversaire des cautions appelées aule*. Ou
rencontre souvent, en droit compare, des cautions procédu-
raies remplissant nue fonction analogue, et le eadiinanium
ne. présenterait pas d'intérêt spécial pour le sociologue, s'il
ne se rattachait, par ses origines, aux plus anciennes formes
de contracter, et s'il n'était marqué, dans si technique, des
traits les plus archaïques. Malheureusement, le livre de M.F.
est à cet égard moins suggestif qu'on ne voudrait, et la partie
préhistorique, qui traite du radimoniumau temps des legis
actione. semble moins réussie que la partie historique, qui
traite du wdimonium au temps de la procédure formulaire.
Sans doute.l'auteur, iie disposant que d'une méthode étroite.
s'est 'trouvé dans l'embarras toutes les fois qu'il lie pouvait
suivre pas à pas des sources Kiiflisammentabondantes et pré-
cises.
Cet embarras se révèle des qu'il cherche il décrire la phy-
sionomie du radimnnium primitif. Les rudes s'engagent,
paraît il, aux lieu et place du défendeur*,celui-ci n'est titille-
ment obligé. Pourquoi cela? M. F. mot en avant des raisons
abstraites chez les peuples primitifs, la notion du responsa-
bilité ne so confond pas. dit-il, avec celle d'obligation, vrai-
semblablement pour cette raison que l'individu n'y a de
valeur juridique qu'eu taut que membre d'une collectivité
qui supporte à sa place la responsabilité de ses actes ')>. '•);.
Comment explique-Ml alors que l'individu, s'il n'est pas res-
ponsable personnellement, ne le soit pas du moins comme
4*4 1/AN-mIk 80CI0LOUIQUB.19OC-1'JOU

membre de la collectivité,nu môme titre que les autres


membresde cette collectivité?M.F. était sur la trace d'une
explicationplus solide et plus coucrète.Il avait accepté
l'opinionqui voitdans le ras primitif un otage(p. 4); il pou.
vaitén tirerparti.Originairementle défendeurne fournissait
un otageque pourgarder lu liberté de ses mouvementsjus-
qu'au momentdereveuirdevantle magistrat; s'il ne tournis.
sait pasd'otage,Il devaitrester personnellementà la disposi-
tion du demaudeur,qui sans doute le retenait prisonnier.Il
était naturel,lorsquele lien juridiquesuccédaau lien maté-
riel, que le ras restât obligé, tandis que le défendeurconti-
nuait à ne pas l'étre.
Le contratde cudimonium comporte,selon toute vraisem-
blance,desformessacramentelles,et spécialementla pronon-
ciationde parolessolennellesdont nous ignoronsla teneur.
Le ras promettaitde faire comparaîtrele défendeur,ou de
payer une sommed'argent si le défendeurfaisaitdéfaut.S'il
y avait plusieursvades.chacun d'eux répondait pour une
sommedéterminée.L'obligationdu ras avait pour sanction
une manu*injntio. Leshéritiersdu tas ne succédaientpas à
son obligatiou.Le ta* qui avait payén'avait aucunrecours
contrele défendeurpour qui il s'était portégarant.
Leradimaniumne fonctionnaitqu'en matièrede procédure.
On a penséparfoisqu'il avait un champ d'applicationbeau-
coupplus vaste,et qu'il pouvait servirà garantir toutes les
obligationsciviles.Un texte de Varron(De VI, 7, 74)
sembleimpliquerque,dansla mancipation,le veudeurgaran-
tissait l'acquéreurcontre l'éviction en lui constituant'des
codes.Maisce n'estlà qu'uneapparence;le texte viseen réa.
lité une hypothèseprocédurale; il s'agit d'un acheteur,
menacéd'évictionpar l'actiond'un tiers, qui, ayantappeléen
garantie son vendeur, s'assure, en exigeantde celui-cides
cades,qu'il reviendral'assister.Cettepratiquelui donne,selon
M. F. <p.23),« un surcroît de garantiecontre les risques
d'insolvabilitédu veudeur.On peut se demanderen quoi ce
surcroît consiste,puisque, de l'aveu de M. F., les r-arfw
répondentde la comparutiondu vendeur,et non de sa solva-
bilité.
Mêmeenmatièrede procédure,le vadimonium a unesphère
d'action étroitementlimitée.Il ne sert pas à assurer la pre-
mièie comparutiondu défendeurdevantle magistrat il n'y
a pas de tadimonium extrajudiciaire.Il ne sert pas non plus
UHOITUOUUKIICtAi.
MIOIT CONTHACÏUEL, 445

à assurer sa comparution devant le juré (M. F. se débarrasse


uo peu trop sommairement d'uu texte de Macrobe,Sa t., I, "0,
qui gène ce point de sa démonstration). Le vadimoniuma une
fonction unlque garantir la reoumparution du demandeur
devant le' magistrat. De la procédure civile, l'institution a
passé dans la procédure criminelle jusqu'au vu"siècle, on
voit des accusés éviter la détention préventive en fournissant
des codes pour garantir leur comparution au procès.
Nous connaissons mieux le, eadimouium de la procédure
formulaire que celui des actions de ta loi. La seconde partie
du livre de M. F., qui lui est consacrée, est plus substantielle,
et d'une meilleure méthode. Mais l'institution qu'elle décrit
est devenue plus banale. Je nie borne à un résumé très
rapide.
Les miles disparaissent il la suite de la loLKbutia. M. K.ne
recherche pas pourquoi, ni s'ils survivent dans les cas où
l'on se servait encore de la kgis actio per mcramentum. Le
système du cudinwniwn se transforme; le défendeurdevient
le principal obligé; les miles deviennent des cautions, au
sens moderne du mot. Le défeudeur promet, par une stipula-
tion, de recomparaître au jour dit. Le préteur l'y contraint
s'il ne le fait pas de bonne volonté la stipulation en question
est donc une stipulation prétorienne, réglementée par le pré-
teur dans sou édit. La promesse émane ordinairement du
défeudeur; elle peut émaner d'une autre personne. Elle a
pour objet principal la comparution du défendeur, pour objet
accessoire une pana pécuniaire à payer est cas de nonconipa»
rutiou. Cette pana s'élève, dans les actions judkuli et depewti,
à la valeur entière du litige; dans les autres actions, à nue
somme fixée sous la foi du serment par le demandeur.. Si le
défeudeur fait défaut, ou dit qu'il y a tnitimaniumdexerlum,
et le demandeur peut exiger lo paiement de la mmma cadimo-
nii par l'action owlimoniidexerti,qui n'est d'ailleurs, sous un
nom spécial, que l'action générale qui sanctionne tout contrat
verbal. C'est la seule sanction du cadimomumdemtum. La
mùtio in posmsionemquesigualeut les textes n'a rien île spé-
cial à notre institution; elle fonctionne contre tous les plai-
deurs imlefensi. Le défendeur qui ne comparait pas n'est pas
condamné par défaut sur l'action principale, quoi que semble
dire un texte d'Horace (Sat., I, 9, 38) qui se rapporte en réa-
lité à une autre question.
La sphère d'application du vadimumun»s'est élargie dans la
*4Û l'aNSKB SÛGIOLUlUyUR.
l'J0tM9Û0

procédure formulaire. A côté du tndhnonium injure, tu pra-


tique » introduit l'usage du emlimoniumextrajudiciuire qui
peut remplacer, du consentement des parties, lï» jus oomtio
comme procédé de citation ou justice. Mais,
pas plus que par
le passé, le tmlimonium ne sert «assurer In
comparution du
détendeur in juitieto. Kmmatière criminelle. le mdimonium
disparatt lorsqu'il supprimée, avec l'institution des
Houesperpétua, lu détention préventive de awmt-
l'accusé, et il ne
rentre point en vigueur quand la détention
préventive est
rétablie sous le principat on le remplace alors
par un sys-
tènte de mise eu liberté sous caution
qui n'est pas sans ana-
logie avec lui.
Le vudimoHiuiiiue fonctionne pas seulement à Rome.
Il
fouctioune aussi eu Italie. Après l'extension du droit de cite
à toute l'Italie, et lit formation corrélative du
régime munici-
pal romain, l'attribution aux magistrats muuiciptuix d'une
compétence judiciaire limitée fournil au mdiiuonium un nou-
veau champ d'application lorsqu'un litige
dépassait! le taux
de cette compétence doit être renvoyé devant le
préteur de
Homo,c'est aumoyend'un tadimouiuni exigé
par le magistral
municipalqu'est assurée la comparutionà Homedu défendeur;
c'est aussi au moyen d'un vadimoniutn
qu'est assurée la com-
parution, devant le tribunal de sa ville d'origine, d'un défen-
deur étranger qui invoque le jm domum
recoeandi. Le
eadinwninmfonctionne de même dans
les provinces. Nousen
avons la preuve pour la Sicile et pour
l'Egypte. Mais l'exis-
tence dans ces provinces d'un mode
spécial de cimiiou.étrau-
ger au droit de la métropole (dkarum miptitt sicilienne
xxw/wpuriM,-égyptien), y restreint le rôle du cadimonium. En
Sicile, le tttdimoninm n'intervieut, dans sa forme
extrajudi-
ciaire, que lorsqu'on ue peut recourir à la diatrum
seiiplio
par exemple parce que le registre .des demaudes est
déjà clos
pour la session où les parties veulent plaider, ou parce que
les parties veulent saisir de leur litige un amreMm autre
que
celui de leur ressort. En Egypte, le cwlimntiiumsert il sous-
traire certaines affaires à la juridiction de droit
commun,
les
pour porter au tribunal de r*,v/»w*Tr/,i ou du o«taw3Wlî]
Au Bas Empire, sous lu procédure extraordinaire, il
n'est
plus question du radimonium ou trouve à la place une insti-
tution sensiblement équivalente, Ih cauth
jwiicio mti Les
compilateurs de Justinieu ont interpolé les textes classiques
poursubstituerlaineiitioiidecettec(iu/(uàcelleduv(trfiiii(mium.
CUMUKIlUfAL
UltOlT CONTItunUKI,,DHO1T 4*7

Le résumé qui précède exagère peut-être, par son raccourci


ut sou allure schématique. In sécheresse du livre. d'iiil leurs
consciencieux et bien remelguè, de M. K. Alais cette séche-
resse n'est pusniable. Onne pouvaitguén?l 'éviter, du moment
qu'un su gardait à lu fois de tout ellort de synthèse pour relier
l'institution étudiée à des idées générales, et de tout ellort
(t'iniuKiuutionpour la faire revivre dans le milieu concret oit
elle a vécu. H y avait pourtant des recherches qui s'impo-
saient. Ainsi l'on peut constater que la terminologie du eadi-
iiwniuiii ue nous présente que des idées do choses concrètes.
Le ctulimoniumesïune chose que l'on fait (oatlimonium fiuere),
que l'on jette ipiulirnonium pi'omUten1;,que l'on place icadi-
inoiiiuiii mlere), près de laquelle on vient (taHimanitii)iobirt;
ad mdimùnium tenin; aurere), qu'on abandonne trniliwo-
nium deterertj, etc. ou devait se demander ce qu'était cette
chose matérielle. Mais M. K. n'ii voulu voir dans toutes les
exprpssious que j'ai signalées que leurs acceptions abstraites
récentes ip. ii-'t'A). de sorte que In question reste ouverte.
Nous ignorons encore ce qu'était le très aneieu milimonium.
V. H.
HASSlîT(II.). – La fraternisation par le sang chez les Malaï.
HeK.dcs tradil.popul.. novembre100".
i;oi.0!lA,Y – Die Théorie des Faustpfandvertrages naoh
jttdisohem Reohte. ZeiUehr,f.vergl.Heckkwiu.,[WH,XXI,p. 19"
240 ;Kluilodes droits et des devoirsil'un nvénnciermuni d'un
(!«««)•
KL1ITMANN. – Analyse des national-gruslnlsohen Obligatio
nenreohts. Zcilscltr.f. venjleicli.UecMurm.,iWH,XXI,\>.425-470
{Kludedes obligationsen droit géorgk'Ud'uprès le cod<:iln Wacli-
tang VI, du1">Wvrier1723).
COLLINCT. – Le rôle primitif de la stipulation. àManues
Giirardia.('mis, l.nrosi!cl Tcnin. 1907.
SCIII.OSSMANN. – Uber die angebliche teohnisohe Bedeutung
von tiarein der roemisohen Reohtsspraohe. Zeitsclir.tin-Sari-
gny Slitl., XXIX.1008.Itoiunii. Abu,p. 288-309.
S'1'INT/.lMi. – Nexum manoipiumque und manoipatio. Leipzig,
l.icbisoli,r>ip.
I.KVY(Iïrnst). – Nachtraegliohes zu den Anfaangen der
roerai8ohen BUrgsohaft. Zeltsokr.il. SaviyuySliflvHg,XXVIII,
1907,Hom.Abt., p. 308**05.
448 mo-lotH)
u'annkksociologique.
NOHTHCOTE (TH.W).-The market in afrioan law aad oustora.
TheJournalof tlte Suc.of Comparative
hegisl.,1908,n. XIX.
BOULANGEH. – Le droit de marché. Reoherches sur son ori-
gine. Paris, Pcdone,in-8»,217p.
l'UNIOL(M.}. Étude sur la responsabilité civile. Rer. critique
de Ugislut.et de Jurispr.,mars l'JOD.

IX. IJHOIT
l'ÉNAI.OTHK8P0N.sXBIl.ITl!

Par M.FAimixn.

F. BEROLZHËLMER.– System der Rechts- und Wirt-


schaftsphilosophie. Fïmfter (Schluss-) Baud titmfrecht*-
philosophie und Strafmhtsreform. Miinchon, Beck,-11)07,
279 p., in-8».

Si on néglige les pages consacrées à des questions de détail


d'ailleurs assez arbitrairement choisies, on trouve dans ce
livre trois doctrines principales. – 1"Unethéorie de la respon-
sabilité ou de la faute pénale (Strafscliuld). Selon l'auteur, la
théorie classique qui voit dans le crime une manifestation de
la volonté libre et la théorie italienne de la témibilité, quoi-
qu'opposées entre elles, sont égalementfausses, parce qu'elles
participent l'une et l'autre à l'esprit du Droit naturel, dont la
critique constante est une des principales préoccupations de
l'auteur. La faute pénale est une manifestation de la « per-
sonnalité », dans le sens juridique du terme (die Strafschuld
alsBetiitigung der Persûnlichkeiti elle est uue espèce parti-
culière de la faute tragique (species der trogisclieii Schuld).
produit du concours de l'activité libre et du destin. Pourl'
l'apprécier, dans la phase actuelle du droit pénal, il faut tenir
compte à la fois des éléments subjectifs et de la matérialité
du crime. 2° Une théorie de la peine celle-cia pour nature
d'être, non pas un mal (maluni passionis), mais un anéantis-
sement ou une diminution de la personnalité juridique du
criminel; elle est bien, comme l'enseigne la doctrine qui voit
dans la peine une expiation infligée « quia peccatura » (Vergel-
tungstheorie;, un éqnhalml du crime, mais ce qui équivaut
au crime, violation du droit, c'est une atteinte portée aux
droits du criminel, une négation de sa personnalité juridique;
la souflrance n'est pas là l'essentiel. L'auteur avait déjà exposé
ohoit p&ml bt wnts*Amuri 449

«ette théorie, qu'il appelle Vntijeltimgxthevm(Die Entgoitung


lm Strafreclite, Miiuchen, 1903); elle reste obscure et insuffi-
samment établie, mais son principe est intéressant. 3° Une
théorie de l'évolution du droit pénal, lequel aurait passé par
trois phases, religieuse, nnéthiqueitalion;, et éthico-juridique
(sittlichreehtllch). – Aucune de ces doctrines n'est sans
intérêt et il me paratt qu'elles contiennent beaucoup d'idées
qui, présentées autrement, seraient la vérité même.
Mais comment ne pas opposer, préjudieiellement, une fin
de non-recevoir à une œuvre dont la méthode n'échappe à ta
critique que parce qu'elle est Indéfinissable. L'Année(X, 1903-
1900,p. 371) a rendu compte du tome III de ce « Système »
qui contenait une Philosophie de l'État. Le tome I" était une
théorie de la connaissance; le second, une philosophie de l'his-
toire du droit et de l'histoire économique le tome IV enfin
expose la philosophie du droit privé et de l'économie poli-
tique. Rien qu'à l'énoncé de ce programme, on peut prévoir
combien peu de chances l'œuvre avait d'être féconde. Dès le
moment qu'une Philosophie du Droit est autre chose qu'un
système de concepts déduclivemeiit enchaînés et veut être
(ondée sur l'analyse des faits, il est manifestement impos-
sible, dans l'état actuel des sciences sociologiques, de l'em-
brasser tout entière dans un ouvrage d'ensemble, eût-il
quatre volumes (car le premier a un tout autre objet). Si
étendues que soient les lectures de l'auteur, quelque nom-
breuses que soient lesdoctriueset les civilisations qu'il étudie,
si abondantes que soient les références qu'il donne, il ne peut
pas, précisément parce que son analyse ne s'attache jamais
longuement il un objet limité, aboutir à des résultats impor-
tants. Si encore une grande idée directrice commandait toute
la doctrine et en organisait vigoureusement les diverses par-
ties, l'ouvrage, pour ressortir à une forme de spéculation qui
semble condamnée, pourrait cependant fournir des hypo-
thèses fécondes.Mais, sans contester la science de l'auteur ni
l'intérêt qu'olîient, dans le détail, certaines de ses idées, on
est bien obligé de reconnaître que l'unité systématique de son
ujuvre n'apparaît guère. Ce n'est pas un « Système » valant
par sa puissance d'organisation et ce n'est pas non plus une
contribution à la sociologiejuridique objective.

E. DrotcttiM. Année sociol., l'JUii-MO'J. «J


450 (,'ANNàB SftClOLQWQUR.lUOOl'JOtt

0. TESAR. – Die syjnptomatisohe Bedeutung des ver-


brecherlsohen Verhaltens. Ein Beltrag zur Wer- }
tungslehre lm Straft-echt. Berlin, Guttetitag, 1907, xiv-
"270p., in-SJ"(Abhundl.des kriminnl. Seminnr* nn iler l'iti- •
rmihït Berlin. N. R, V. Bd., 111.II.).

Tout jugement pénal comporte l'évaluation d'un crime, (le


la culpabilité d'uu crlmiuel c'est de celte évaluation, de cette
mesure, que dépend la mesure do la peine. Suivant quels prin-
cipes doit se faire cette évaluation? telle est ia question
que pose Tesiir, en remarquant que c'est une question trop
négligée. Les deux conceptions traditionnelles de lu peine, lu
conception utilitaire de la peine préventive et la conception
dite classique de la peine rémunératrice (Vergeltungsstrafei,l,
sont toujours aux prises or c'est précisément le problème
de la juste mesure de lit peine qui est au centre du débat.
Seulement, lundis que les utilitaires ont clairement défini
leur système de mesure, t'autre doctrine se contente trop
volontiers d'affirmer qu'il doit y avoir proportionnalité entre
le crime et la peine, proposition purement formelle et sans
signification précise, tant que l'une des deux grandeurs, le
crime, n'a pas été détermiuée. Tesar admet que le principe
de In proportionnalité est si profondément enraciné dans ta
conscience collective qu'un droit péual qui le rejetterait ces-
serait d apparaître comme juste, comme un droit. Maissi les
classirlues ont raison sur ce point, ont-ils raison encore quand
ils prétendent établir, entre ce principe formel et tel système
d'évaluation de l'une des deux grandeurs Aproportionner, un
lien nécessaire? Dans leur critique de ta doctrine utilitaire, ils
raisonnent toujours comme si la proportionnalité impliquait
une certaine méthode, qui est la leur, pour la mesure, l'éva-
luation du crime; mais c'est la un postulat illégitime, tant
que la preuve n'est pas faite qu'une autre méthode de mesure,
celle des utilitaires, est inconciliable avec le principe de lu
proportionnalité. Href, il est illégitime de faire profiler un sys-
tème d'évaluation de l'autorité indéniable du principe de pro-
portionnalité, tant que les liens qui les unissent n'ont pas été
critiqueiueut éprouvés; et, de môme, les utilitaires, avaut
enquête, ne sont pas fondés à rejeter le principe parce qu'il
passe pour solidaire d'une méthode de mesure qu'ils rejettent.
Or,quandil s'agit del'évaluation d'un crime, deux méthodes
antagonistes sont en présence. L'une apprécie ia conduite
DROIT KTRESPONSABILITÉ
l'KN.U, 491

d'après l'importance et lu nature du dommage causé; isolant


en quelque sorte le crime du criminel, elle le compare à des
types abstraits préalablement constitués et hiérarchisés; la
gravite de l'acte, la culpabilité et par suite la peine sont mesu-
rées par la place, dans la hiérarchie, du type auquel appar-
tient le cas particulier; on peut appeler réalwle cette méthode.
L'autre consiste à interpréter le crime comme uu symptôme
de lu criminalité subjective de l'auteur; c'est cette crimiua-
lité qu'où veut évaluer, mesurer; ou appellera cette méthode
symplomuliiiue. Lu méthode réaliste prétend uu Utre de clas-
sique et se donne comme nécessairement solidaire du prin-
cipe de la proportionnalité pénale et de la conception de la
peine comme rémunération du mal accompli; la méthode
symplomalique au contraire est celle des utilitaires et passe
pour inconciliable avec la théorie classique de la peine. C'est
ù la critique de cette opinion que Tesar a consacré son livre.
11est résolument xijmptnninthte. Seulement il estime que l'in-
terprétation du crime comme symptôme est, non seulement
conciliable, mais seule conciliable avec les exigences de l'es-
prit de justice comme avec celles de la défense sociale. Le
problème de la mesure du crime est selon lui le problème
capital, et la solution réaliste, la véritable pierre d'achoppe-
ment de lit théorie du droit pénal. Cette fausse solution
écartée, les conceptions opposées de la peine se réconcilient
sans dilliculté. JVnntagonisniede la et delà
Selmtstlntfe, celui du déterminisme et de la liberté sont secon-
daires ou artificiels; le véritable conflit n'est pas là, mais
entre nfalUmect nymptomutiniiu1.
Cet effort pour découvrir, sous les oppositions apparentes
et souvent factices des théories abstraites, les oppositions
profondes et vraies dos tendances, est d'un haut intérêt car
ce sout ces tendances collectives, et non les systèmes abstraits
qui les faussent est les exprimant, dont la connaissance a une
importance sociologique. Nous devons déjà à Liszt de pré-
cieuses indications sur lit signification réelle du conflit entre
les théories pénales le livre de Tesar doit sans doute beaucoup
à son influence. Je laisserai de côté le système d'ovalua-
tion que propose l'auteur <p. 197-276).Le principal intérêt de
l'ouvrage n'est pas là il est dans le problème posé et dans
l'histoire, que retrace Tesar de la doctrine de l'évaluation du
crime. Toutes les doctrines dont il traite sont connues et il
n'apporte rien de bien nouveau sur chacune d'elles; ce qui
4S2 L'.mriB 90CI0LOIHQD8.1006-1909
«al 4fe • t« »
est nouveau, c'est la manièredont elles sont clussées, l'angle
bous lequel elles apparaissent.
H va de soi que lu plupart des théoriciens ne sont ni des
réalistes purs, ni des symptomatistes purs. Chaque doctrine
est obligée de faire aux deux tendances sa part et les concilie
taut bien que mal. Ou peut cependant suivre les deux cou-
rants d'opinions et constituer, pour simplifier, deux séries
de doctrines.
L'histoire de la théorie subjectivisle commence avec Aris-
tote, quoique la théorie opposée ait également trouve chez lui
un point d'attache c'est sousl'influence de sa philosophie et
de celle du Portique que les jurisconsultes romains ont élu-
boré la doctrine, opposée aux idées qui prévalaient dans l'an-
cien droit de Home in mak/kik coluntax xpeelntur, non
e-ritm. Au moyeu âge, le droit positif est au contraire eu
avance sur la théorie. Si grossièrement réaliste que soit û
bien des égards le droit pénal allemand du moyen âge, il
manifeste une tendance à adapter la répression pénale plutôt
au caractère du criminel qu'à son délit considéré objective-
ment. Cette tendance est plus marquée encore dans la Caro-
line et dans les législations qui s'y rattachent. Au contraire
la doctrine, représentée par les glossaleurs, est plutôtréaliste
de la science romaine, les glossateurs ont surtout retenu ce
qui pouvait les pousser dans le sens du réalisme. C'est avec
la Renaissance que réapparaît, non sans mélange irrationnel
de réalisme d'ailleurs, la couception subjectiviste d'Aristote,
notamment cheilBodiu parmi les fondateurs du Droit naturel,
elle a des représentants, quoique le droit naturel ait été par
ailleurs le pluspuissant soutien du réalisme. Mais. sauf excep-
tions (Kleiuschrod, Grolmann,, le temps des symptomatistes
n'est pas encore venu c'est seulement la philosophie de Kant
et surtout celle de Hegel qui fournit à la théorie du crime
comme symptôme un terrain sur lequel elle puisse se déve-
lopper. Cette histoire de la théorie symptomatisle est
incomplète; on se demande pourquoi la criminologie ita-
lieune et ses précurseurs, dont l'étude s'imposait ici, ne sont
même pus meutionués. De plus l'auteur semble rattacher les
progrès du subjectivisme exclusivement à des progrès de la
pensée philosophique, non il une évolution sociale profonde
qui en serait la véritable cause. Les raisons du développe-
ment de la doctrine qu'on nous donne coinnie destinée à
triompher restent ainsi mystérieuses.
DH01T PBNAt, ET IIESPONSAUIUTK 453

Au contraire quand il expose l'histoire du réalisme, Tesar


donne, de sa longévité et de ses multiples renaissances, des
raisons qui (sans être, je crois, les seules ni mémo les plus
protondes) ne sont pas suris valeur. – La première est la
confusion persistante du délit civil et du crime, de la sanc-
tion civile qui par une indemnité compense le dommage
causé, et de lu sanction pénale. Elle vaut surtout pour les
glossateurs et postglossateurs qui, se référant au droit civil
romain et aussi à la conception réaliste de la sanction comme
composition pécuniaire (conception qui survit (laits la législa-
tion allemande ou italienne lu moyen âge), s'efforcent de pro-
portionner la peine au mal causé par le crime. Cette confusion
est d'allleuts favorisée par le caractère formaliste de leur doc-
trine, beaucoup plus soucieuse de logique que de psycho-
logie. La seconde raison est le triomphe durable d'une
fausse notion de la volonté et d'une théorie inexacte de l'im-
putation qui en est la conséquence. Elle vaut surtout pour
les théoriciens du Droit naturel et, parmi les Allemands, pour
quelques jurisconsultes qui s'inspirent de certaines idées de
Kant (Zachariae; la peine conçue comme un talion au sens
matériel du mot), et surtout pour ceux qui s'appuient sur la
philosophie de Schopeuhauer (Welcker, Merkeli. Chez ces
théoriciens, dont la pensée domine encore la doctrine cou-
rante, sinon la législation et la jurisprudence pénales, la
volonté est conçue comme une entité, une faculté distincte;
c'est à cette force indépendante, et non à la constitution psy-
chologique de l'auteur considérée dans tous ses éléments,
qu'est rapporté l'acte. Imputer un crime, c'est le rattacheraa
la volonté qui l'a produit comme à sa cause. L'analyse psy-
chologique intervient une fois pour toutes, afin de déterminer
s'il y a lieu à imputation, si l'auteur est responsable, si sa
volonté est bien lu cause du crime. L'imputation une (ois
admise, le rôle de ta psychologie est fini, et la faute se mesure
exclusivement d'après la nature et la quantité du mal produit,
la valeur des droits lésés. Car la volonté est une, l'acte est
ou n'est pas volontaire, et sa perversité ne varie que suivant
la grandeur du mal qu'elle a créé. – La troisième raison
enfin est l'apparition d'une préoccupation, étrangère en soi à
la justice pénale, colle de la libertécivile pour protéger cette
liberté contre le pouvoir exorbitant accordé ait juge par l'an-
cien régime, en Franco surtout, pour nllnmchir le citoyen,
mémo criminel, de tout arbitraire individuel et ne le sou-
454 l'an.nék sociologique. IQWMMo

mettre qu'a la Loi, les philosophes français du xviii"siècle et


leurs disciples, Montesquieu et les Encyclopédistes, Voltaire,
Munit, Beeearia. ont réclamé l'iustitutiou d'une législation
pénale où l'échelle des fautes et celle des peines, rapportées
l'une à l'autre. seraient si exactement établies par le législa-
teur que le rôle du juge pût se réduire à lu constatation du
fait et à l'application mécanique d'une disposition de la loi à
ce fait. Or une pareille rigidité de la loi pénale n'est possible
que si le crime est mesuré d'une mauière toute objective, la
loi construisant d'avance les figures, les schèmes auxquels
les faits concrets devront être rapportés c'est le triomphe du
réalisme formaliste. Le Codepénal de 1810s'est inspiré de ces
principes. Et, sans doute, dans la doctrine, ce réalisme n'a
jamais pu être maintenu dans son intransigeance pour éviter
les absurdités et répondre aux besoins de la pratique, ii a bien
fallu qu'un lit une place à l'évaluation symptoimitique de là
des inconséquences que Tesar relève chez Beccaria,et ce rf««-
liime qu'il signale chez Filungieri et Feuerbacli, et surtout
dans les doctrines éclectiques du xix°siècle, en Italie et en
France.
La conclusion de cette enquête, dans la pensée do l'auteur,
c'est que le réalisme n'a pas de titre à se donner comme clas-
sique ni à affirmer qu'il est lié, d'une manière logiquement
nécessaire, à la destinée du principe de la proportionnalité
pénale. Cette liaison est contingente, et la théorie symptoma-
tiste peut revendiquer pour elle une lougue tradition.

M. PARMELKE. – The principles of anthropology and


sociology in their relations to crlminal procedure.
New-York,Macmillim, 1000, vm-4101)., petit iu-8u.
Les Étals-Unis ont fait les expériences les plus originales
de réforme des institutions pénales, mais d'une manière toute
empirique les théories cri mlnologiqucsélaborées en Europe
depuis une trentaine d'années n'y ont eu encore que peu
d'écho. Cepetit livre a d'abord pour but de les vulgariser, et
il est bien fait ilcet égard.
Plus spécialement l'auteur s'est attaché à montrer com-
ment la procédure criminelle devailèlre modifiéepour s'adap-
ter ait droit pénal nouveau qui s'élabore. Kéductioude la loi
criminelle et des formules qui déterminent les infractions,
notion de la complicité et des circonstances aggravantes ou
DROIT
l'KNAI.
KTlUKKUHABlMTtf 4b5
>art relative it
atténuantes, part il faire à la nrocédure
procédure inauisitoire
inquisitoire
et à lu procédure uccusatoire, fonctions de la police, règles
de lu procédure, système des preuves, rôle dujury, spécialisa-
tion des juges, – sur tous ces points l'attitude du législateur
devra être différente suivaul que prévaudront, sur ta nature
et la fonction de la peine, les idées classiques de, lu Hu du
xviii°siècle ou les idées contemporaines.
Nous n'avons pas à étudier ici un programme de réformes.
Ceque je voudrais noter, ù propos de ce livre commeà propos
de celui de Grasset (cf. ci-dessous;, c'est l'étroite solidaritédes
institutions do la procédure avec les institutions pénalespro-
prement dites et avec le droit criminel. Cette solidarité, per-
sonne ne la conteste et il semble que jamais on n'ait pu l'ou-
blier. Et cependant le plus grand nombre des polémiques,
soulevéesdepuis vingt ans par les idées émises sur le crime,
In peine et lu responsabilité, perdent tout leur sens, dès qu'où
ne commet pas cet oubli. Si vous supposez que la procédure
et les institutions pénales restent ce qu'elles sont, il est bien
évident que telle modification, parfaitement fondéeen raison,
proposée' la conception de la responsabilité, apparaît comme
absurde, de même que serait absurde la construction d'une
maison de réforme comme celle d'tëlinira, si lu loi ne permet-
tait pas aux tribunaux d'y envoyer des condamnés. Les doc-
trines les plus révolutionnaires en appureuce le sont beau-
coup moius qu'on ne pense, si l'on ne sépare pas un de leurs
principes, pour considérer les conséquences qu'il entraîne-
rait, à supposer qu'il fût seul introduit dans le système
actuel des institutions pénales et procédurales. Bien des
autagonismes doctrinaux disparaissent ou s'atténuent, dès
qu'on examine, oon plus des concepts abstraits qui semblent
s'exclure, liberté et déterminisme, expiation et défense so-
ciale, mais lit manière dont les diverses institutions concou-
rent à produire un résultat donné la combinaison d'une
règle de procédure et d'une installation matérielle daus une
maison de détention peut parfaitement concilier deux préten-
tions qui semblaient irréductiblement opposées sur le terrain
de l'abstraction. Parmelee montre très judicieusement com-
ment lit réforme de la procédure rendrait possibles et fécondes
des réformes proprement pénales qui, avec la procédure en
vigueur,pourraieut au contraire être irréalisables ou dange-
reuses.
456 1,'ASSBK t)10li-i»UB
SOCIOUKjIQVK.

J. GRASSET. Demifous et demiresponsables. Paris,


Alcau, 1907, 297 p., in-8". – La responsabilité des ori-
minels, Paris, Bernard Grasset, 1908, 270 p., iu-12.
Le premier de ces Uvres a pour objet d'établir la milité et
la fréquence de la demifolie et par suite la nécessité d'insti-
tuer des mesures à la fois pénales et curntives. appropriées à
.l'état des deniirespousobles, des demifous délinquants. Le
second est un livre de polémique le I)1"Grasset y détend sa
conception do la responsabilité et de l'expertise médico-
légale en matière de responsabilité (et par suite aussi sa'thuo-
rie do la demiresponsabilité) contre ses adversaires. Dans
leur Cougrès de Genève, en 1907, les aliénistes et neurolo-
gistes de langue française ont en majorité, sur un rapport de
Ballet, émis le vœu que les magistrats s'en tiennent à la
lettre de l'article 04 du Code péual, c'est-à-dire demandent
exclusivement au médecin expert de luire le diagnostic de la
maladie dont le prévenu peut être atteint, sans le consulter sur
les questions de responsabilité qui,»e sont pas d'ordre médical
et excèdent sa compétence. Par opposition, Grasset deman-
dait I" que, dans la loi, soient expressément introduites les
notions de responsabilité, d'irresponsabilité et de responsabi-
lité atténuée (au seus médical du motresponsabilité); ce qui
implique l'obligation pour le juge de poser à l'expert la ques-
tion de la responsabilité du prévenu; i- que, pour les demi-
fous, le juge ordonne, comme complément ou substitut de la
peine, le traitement obligatoire dans des établissements spé-
ciaux.
Du point de vue théorique, Grasset fait un intéressant effort
pour élaborer la notion de responsabilité médicale. Par oppo-
sition à la responsabilité morale à laquelle on ne pourrait,
suivant lui, croire que si l'on admet le libre arbitre, et à la
responsabilité sociale, ensemble des conditions par rapport
auxquelles le magistrat détermine comment doit être traité le
délinquant, la responsabilité phyaioloijiqw;ou nu sens médical
« apparaît comme une fonction de nos neurones psychiques.
la responsabilité correspondant à la normalité, l'irresponsa-
bilité à la maladie de ces neurones. » Cette responsabilité
médicale diffèrede la responsabilité morale; le déterministe
est obligé de l'admettre, dès qu'il admet que « citez l'homme,
il y a des neurones psychiques dont l'itclivilé propre inter-
vient pour apprécier, classer et juger les mobiles et les motifs
DBO1TPKNALET RESl'ONSAIHUTK 457
..1. 1
avant tout acte », et que, jjr.r suite, le déterminisme humain
diffère dudéterminisme végétal; elle diffère aussi de la res-
ponsabilité sociale, dont elle est un élément nécessaire (on ne
peut pas punir celui qui est physiologiquement irrespon-
sable), mais non suffisant (le magistrat doit tenir compte,
pour déterminer la responsabilité sociale d'un accusé, do bien
d'autres éléments que de sa santé psychique). Ou voit com-
ment cette doctrine sert de fondement au programme pra-
tique de Grasset: telle étant la responsabilité médicale, dil-il,
abandonnons la responsabilité morale aux philosophes, la
responsabilité sociale au magistrat, mais réclamons pour le
médecin, ici seul compétent et cantonné sur un terrain pure-
ment médical et par suite indépendant de toute doctrine phi-
losophique, l'appréciation de la responsabilité médicale.
fin lui certain sens, il me parait que Grasset a absolumentrai-
son, tellement raison qu'on ne s'expliquerait pas comment il
a besoin de détendre sa thèse contre des adversaires, si l'on ne
savait que des nuiI entendus et des divergences de détail peu-
vent faire perdre de vue les points essentiels sur lesquels l'ac-
cord, au moins en gros, existe nécessairement. Il est de toute
évidence que, en fait, nous ne concevons pas qu'on puisse
apprécier la culpabilité d'un homme et le punir sans tenir
compte de sa « santé psychique ». Tout débat sur le libre
arbitre ou sur lit nature de la criminalité mis à part, en fait,
quand nous jugeons avec réflexion laconduite morale d'uu de
nos voisins, « fortiori quand nous sommes comme juré en
face d'uu accusé, nous nous posons exactement lit question
que Grasset appelle question de la responsabilité médicale Les
progrès de la psychiatrie et de l'anthropologie criminelle ont
eu cette conséquence que les gens cultivés savent aujourd'hui
que beaucoup de sujets, en apparence normaux, sont, en réa-
lité, des anormaux, que le domaine des psychoses et des
névroses est beaucoup plus étendu qu'on ne l'imagine vulgai-
rement, et qu'il faut une expérience consommée pour dia-
gnostiquer et même pour soupçonner beaucoupd'états parfai-
tement pathologiques.
Seulement, la notion de responsabilité médicale ne me pa-
rait pas pour autant une idée heureuse. L'idée de responsabi-
lité ne peut être dissociée de celle de sanction dire d'un
homme qu'il est responsable, quelque épithete qu'on ajoute
au mot, ce sera toujours dire qu'il est le sujet sur lequel doit
justement tomber la sanction de telle action. Il est d'une mau-
458
8 i.'anxkk sotmoaiQUR. iooo-ioo»

vaise langue de parier de la [onctionre*fmnmhililé la respon-


sabiliU;u'est pas une fonction psychologique, elle est un iittri-
but inoi'ul ou légal que lu société décerne nu sujet qui lui
parait devoirsupporter une sniiction. Dans l'ûtut actuel (lenos
croyances, l'intégrité, lu normalité des fondions mentales, de
la foucliou volonté en particulier, apparaît comme une con-
dition m'/jcqua non de la responsabilité pénale. C'est sur cette
normalité que le médecin est consulté et le râle qu'on lui
assigne ici est bien le sien décider de ta santé ou de lit mala-
die, diagnostiquer le mal, indiquer le traitement convenable
s'il y a lieu. Le médecin doit éclairer le magistrat, ou mieux
lu médecine doit éclairer la justice. Mais, dans l'état uctuel
de l'organisation des tribunaux criminels et de la procédure,
le jury ou même les magistrats sont souvent incapables de
comprendre lu portée des observations du médecin. (irasset
sent très vivement ce dangor et, pour y paver, il est «menuà
fabriquer ce concept bâtard de responsabilité médicale. Ima-
ginez le tribunal composé de magistrats préparés à inter-
préter le diagnostic du médecin et toute la difiicullé s'éva-
uouit.
D'ailleurs, ce qui ressort le plus cl ai renientde toutes ces
polémiques, c'est riulerdépendauce de tous les éléments de
l'organisation pénale et procédurale cl l'impossibilité d'isoler,
quand il s'agit de réformer les institutions, des problèmes
qui sout sol iduiresles uns des autres. Commele montreGrasset
t'opposition, faite par beaucoup de bons esprits il l'introduc-
tion dans le code de la miiontabilttè atténuée, provieut, non
pas de difficultés inhérentes à cette notion même, mais de ce
que, dans l'état actuel des choses, la reconnaissance de ta
responsabilité atténuée entraîne soit un acquittement scanda-
leux, soit uu de ces courts emprisonnements dont tout le
monde sait les inconvénients. Qu'on suppose organisé uu
régime spécial pour les anormaux délinquants, et la question
change d'aspect et se pose alors dans les termes qui convien-
nent. De même, selon que le jugement sera remis à uu jury
incompétent ou à uu tribunal de juges prépares par les études
crimiuologiqucs, la fonction du médecin expert sera dill'é-
reute et la question de la responsabilité se posera autrement.
C'est un des mérites de l'École italienne d'avoir montré qu'on
ne pouvait, sans absurdité, introduire dans un système pénal
des correctifs fondes sur des principes radicalement opposés
il ceux de ce système et que, par exemple, la diffusion des
DROIT P&SM, BT aK.-îl'ONfi.Ultf.f
TR «9

connaissances criminologiques et psychiatriques devait entraî-


ner tout tm remaniement du droit pénal, sous peine d'abou-
tir ù des conséquences funestes et ridicules. Les médecins que
combat Grasset pensent a boa droit que l'expertise en matière
de responsabilité n'est pas ce qu'elle devraitêtre.
Mais Grasset est dans lit vérité qiiiiud il leur répond qu'il ne
saurait être question de diminuer l'importunée de ce rôle,
mais qu'il s'agit de le réglementer, et de mettre l'ensemble
des institutions pénales en harmonie avec cette réglementa-
tion.

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Eu 1902, Ilirzel a publié un ouvrage DerEût, Fin Rritmgzu
sieiner Geschichte,sur le serment dans l'antiquité classique
(voir ,»««A«Social., VII, p. «08). M. Lasclin entrepris d'étudier
cette même institution dans les sociétés inférieures.
Son livre eat une preuve nouvelle de l'inconvénient qu'il y
a, pour l'ethnographe ou l'historien tout commepourle socio-
logue, à s'engager dans une recherche sans en avoir au préa-
lable défini l'objet. Il a paru, sans doute, à M. L. 'lue la
notion du serment était trop simple pour réclamer une défi-
nition expresse; la précaution, cependant, n'eut pnsété inutile.
Pour ne l'avoir pas prise, l'auteur se trouve avoir confondu
dans son étude, avec le serment proprement dit, des pratiques
d'un tout autre canictèro. En effet, sans vouloir tenter pour
notre compte la définition dont nous regrettons l'iibsence, on
peut dire que le serment se reconnaît à deux caractères dis-
tinclifs. D'abord, c'est une pratique orale, ou plutôt – car il
a toujours quelque caractère religieux – c'est un rite oral;
il implique essentiellement des formules, des combinaisons
de mots dont l'émission est indispensable pour qu'il produise
ses effets. En second lieu, il est l'annexe, le complément d'un
LA PROCÉDURE 401

autre acte, essentiellement juridique, auquel il a pour but


d'assurer des sanctions qui ne sont pas normalement impli-
quées dans la nature de cet acte. Par exemple, un faux témoi-
gunge, s'Il est prêté sous la foi du serment, est plus sévère-
ment puui que s'il n'a pas été accompagné de cette formalité.
Cela étant, le serment apparaît comme parfaitement distinct
des opérations juridiques auxquelles il peut servir de complé-
ment. Or M. L., faute d'avoircirconscril l'objet de son travail,
a plusieurs fois confondu ces deux sortes de choses, pourtant
très différentes. 11appelle serments des traités de paix, des
alliances entre sociétés ou enIre individus, par cela seul qu'ils
sont conclus suivant des formes magico-religieuses, par
échange de présents, communion sanglante, comtnensalité.
Pourtant un engagement n'est pas uu serment parce qu'il est
contracté au moyen de procédés plus ou moins mystiques.
Mais, malgré le flottement qui résulte de cette imprécision,
le livre n'en constitue pas moins un recueil intéressant de faits
instructifs.
Ala suite de Hirzel, AI.L.distiuguedeux sortes deserments:
il appelle les mis promittoire*iproinisxoiischer KUl),les autres
asserlorUfuesaiiiiIJiimaloives[imertoiwher Eid) Lespremiers
concernent un événement à venir que le jureur s'engage à
accouiplir. Usservent surtout à nouerou plutôt à renforcer des
liens d'origine contractuelle (traités de paix ou d'alliance,
promesses de fidélité à un souverain, à un chef, à uue consti-
tution, etc.). Les paroles employées ont. pour objet d'attirer sur
celui qui les prononce des sanctions déterminées pour le cas
ou les engagements contractés lie seraient pas tenus. Les ser-
ments assertoriques, au contraire, se rapportent à des faits
accomplis, et ils ont pourobjetde garantir que ces faits sesont
passés de telle ou telle manière. Ce sont ceux par lesquels
plaignant, accusé ou témoin appuient leurs dires devant les
tribunaux. Ce sont donc des sortes d'ordalies. Celui qui
prête un serment de ce genre assume, par cela même, telle ou
telle pénalité, d'ordre mystique ou civil, pour le cas où ses
ailirmatiuiis seraient reconnues contraires à la Toute la
différence avec les ordalies proprementdites, c'est que, dans
ces dernières, la sanction à laquelle s'expose le patient est
censée s'appliquer immédiatement, au moment môme où la
1 llirzcluilmclliiit
eu plus un suniivnlditsincéillvlEcItlheilneUli
dont
t'objetml d'affirmer
la sincérik-
d 'au actu M.
pr&vnt. L. laissetomber
boUudistinction.
462 L'aNNIU SOCiOLOUIVUK. MU(M!MW

procédure a lieu; dans le serment assertorique, l'application


«iHAftAiltutn
« tîaii* ilnna In cannant ucantitnt»!ri lia l'annltrtnt 1j

en est seulement éventuelle; la date en est indéterminée. Et


encorearrive-t-ii bien souvent que cette différencese réduit à
rien.
Mais, si réelle que soit la différencequi sépare ces deux
types, le mécanisme de l'institution est le môme daus les
deux cas. Aussi l'auteur les réunit-il dausl'analyse qu'il tente
du serment eu général.
Delu définition que nous donnionsen commençant, il résulte
que le serment est un rite essentiellement oral. Il Implique
nécessairement des paroles prononcées, Toutefois los paroles
s'accompngnent très généralement de gestes qui, tout comme
les parolesqu'ils complètent, sont astreints à un formalisme
rigoureux. Une analyse historique du serment devrait donc
chercher a dissocier ces deux éléments constitutifs, li déter-
miner leurs rapports et leur rôle respectif. L'auteurs'est bieu
rendu compte -de la nécessité de cette distinction (cli. viti).
Même les chapitres x a xiv paraissent plus spécialement cou-
sucrés à l'élément oral; le chapitre xv (p. 07-89/à l'élément
manuel. Mais, en réalité, les deux parties chevauchent l'une
sur l'autre dans lit première, il est très souvent question de
pratiques purement manuelles. Cette confusion a peut-être
contribué à empêcher M. L. d'apercevoir distinctement les
problèmes différents que posent les faits qu'il rapporte. Les
formules consistent généralement (mais lion toujours; en
malédictions que le jureur, en général, prononce lui-même.
L'auteur explique le rôle de ces formules par l'efficacitéattri-
buée nu mot d'une manière générale. Le nom d'une chose
agit sur cette chose; un souhait, bon ou mauvais, fraye les
voies à l'événement souhaite 'p. 28). Mais l'explication est un
peu générale, puisqu'elle s'applique à tout rite oral, que) qu'il
soit Or, dans le serment, lu parole n'est pas employée comme
dans la prière ou dans le vœu. 11eût étéintéressant de recher-
cher les caractères spéciaux qu'elle y présente et de tAcher
d'en rendre compte. Tout d'abord, pourquoi la parole est elle
nécessaire'? On conçoit encore qu'il soit dillicilode s'en passer
dans les serments promissoiresjuir, comme ils concernent
t'avenir, la parole est presque indispensablepour exprimer le
caractère conditionnel des sanctions assumées et encore y a-
t-il des liens qui se contractent au moyen d'opérations pure-
inent matérielles, comme le blooU-toteuantpav exemple M;iis,
quand il s'agit de serments assertoriques, d'où vient que le
LAFHOuéUUAE 403
tn
serments'est, au moins dans certains eus, substituée à l'ordalie
pure et simple? D'oùvient que la formule de malédictionest
prononcée par celui qui prête le serment, et non par celui qui
le reçoit? L'auteur ne se pose aucune de ces questions.
Lu formule de malédiction peut être efficacepar elle-même;
on croit qu'elle engendre automatiquement les sanctionsdont
elle menace le parjure, par la seule vertu des motsprononcés.
Cependant, en général, sou effet immédiat est de faire inter-
venir une autre puissance religieuse qui, elle, a pour fonction
de sanctionner le serment. L'opération comprend alors deux
moments on fait appel, par la parole, ù un être sacré, qui
réalise, s'il y lieu, les niiilédietioiisformulées. Cet être sacré
n'est pas nécessairement un être personnel, esprit ou dieu;
c'est très souvent une forme impersonnelle et anonyme,
immanente il tel ou tel objet mitté ciel le ciel, les astres 'de
là, sans doute, l'usage très répandu de prononcer le serment
il ciel découvert), la terre, l'eau, le sel, les pierres et les mou-
tagnes, certaines plantes, certains animaux icliap. x-xu).
A lit suite de Preuss, M. L. donne ces forces le nom de
magiques. L'expression est équivoque et elle entretient dans
les esprits une confusion il laquelle il importerait do mettre
un terme. Elle tend ù faire croire, en effet, qu'il s'agit de
forces qui sont étrangères il la religion et qui ressortissent,
non au prêtre, mais au magicien et nu sorcier. En réalité,
elles sont tout aussi religieuses que les âmes d'ancêtres et les
divinités qui remplissent exactement le même office dans
d'autres serments. Elles ne se distinguent de ces dernières
que par leur impersonnnlité.
Quant aux opérations manuelles qui complètentl'action de
la formule, elles peuvent se ranger en deux catégories prin-
cipales.
Les forces impersonnelles et personnelles que la formule
met en mouvement résident dans certains objets on certains
endroits les dieux sout dans leurs temples; quelque chose
de l'âme des ancêtres reste dans leurs ossements, etc. Des
mouvements, des gestes déterminés sont donc nécessaires
pour que le jureur se mette en rapport avec ces lieux et ces
objets, et cela afin de se placer sous l'action des forces reli-
gieuses qui y ont leur siège. Par exemple, on touche de la
terre, on bien on en avale. on boit l'eau qui est censée recéler
une vertu mystérieuse, ou même on agite des armes d'où se
dégagent des effluvesredoutées, on avaledu sel, on pose lumain
404 L'ANNÉE l'JOMTO
SOCIOLOGIQUE.
sur une pierre sacrée, etc. Farces muuwuvres, l'individu fait
passer en lui la puissance mythique qui, s'il l'offense en mau-
quaut à sou serment, réagira contre lui sous forme de mani-
festations vjolpiites (ch. x, xi, et xv)1. Ces sortes de
pratiques
sont parfois employées pour renforcer l'efficacité directe et
automatique de la formule. Ou l'écrit, ou brille l'objet sur
lequel elle a été écrite, ou délaye les cendres dans de l'eau que
l'ou boit. Lu force inhérente aux mots passe ainsi
dans l'orga-
nisme. Dans ce cas l'élément manuel du rite se confond avec
l'élément oral dont il n'est qu'un autre aspect.
Les autres actes qui accompagnent les paroles du serment
ont pour objet de figurer matériellement le sort
auquel se
voue le parjure. Par exemple, ou brise un œuf, ou tue un uni-
mal en disant Que je sois mis à mort ou eu pièces de la môme
manière, si je mauque à mou serment, ou si mou afllrmatiou
est reconnue fausse. Ces gestes ne sont pas
simplement des-
tinés à représenter d'uue manièresensible lu sanction à
laquelle
ou s'expose; Ils en préparent lu réalisation éventuelle, contor-
mément aux lois de ce qu'on appelle assez improprement la
magie sympathique. Comme le semblable produit le sem-
blable, cette image de la sanction détermine lu sanction à
s appliquer s'il y a lieu (p. 7'Jetsuiv.j. 11n'est pas impossible,
d'ailleurs, que, par l'effet du temps, les manœuvres rituelles
de la première catégorie aient, dans certains cas,
changé de
caractère et soient devenues symboliques. Aiusi, on commen-
çait par tuer des animaux pour actualiser la force-magique
qui leur est immanente; puis, le seus primitif de la pratique
s'e tantperdu, ou a continué les mêmessacrifices dans la
pensée
qu'ils symbolisaient le sort dont était menacé le parjure
(p. 84}.
Dans un des derniers chapitres (ch. xiv.t, ttiuteur se demande
d'où peuvent venir les serments où c'est une puissance morale
tout à fait abstraite qui est invoquée, comme lu vérité, la bouuu
foi, les péchés, etc. Il semble tendre à les expliquer pur uue
sorte de culle iuué de l'homme pour la vérité, culle
qui, sui-
vant lui, serait assez fréquent chez les primitifs. Bien
qu'à
l'appui de cette hypothèse il cite quelques observatiouseliino-
graphiques, elle nous parait difficilement, admissible. Pour

1. «anslu livre, lieuueou{i


des faits auxquelsnous fuyonsiciallusion
sontcite dunsli-sriM|>iln:»i|ui
su ia|.|iorlonluuefui-rmilcs.
Il nous
nécessaired'introduiredansnolro analyseun peu iilusd'ordre u puni
en a dans l'ouvrageaoaJym- uu'il n'y
LA rnocâDtiHB 465
uvotr le culte de la vente, il faudrait d aborden avoir le sen-
timent, et le sens du vrai n'a rien de primitif; c'est uu produit
de la culture scientifique. g. j>.

A. GAL. – Der Zweikampf im frànkiaohen Prozess. Zeit-


svhiift (1er Saciynyttiftung, M. XXVIJI, 1907, p. 230-289.
A. COULIN. – Der geriehtliche Zweikampf im altfran-
zôslschen Prozeas und sein Uebergang zum moder-
nen Prlvatzweikampf. Erster Teil Der gerichtliehe
Zweikampf im altfranzosischen Prozess. Berlin, Gut-
teutag, 1900,xvw-169p. in*.
J. DKGLAREUIL.– A propos de quelques travaux ré-
cents sur le duel judiciaire. Nour. liecue ItiMor. de
droit fraur. et étranger, janvier-février 1909,p. 73-95.

Quelles sont les origines du duel judiciaire tel que l'n connu
notre moyen âge? Al-il été dès l'origine conçu comme un
mode de preuve ayant sa place dans une procédure judi-
ciaire, est-il une ordalie ou enfin a-t-il commefondement la
croyance à un rapport nécessaire entre la force physique et la
bouté de la cause? Ni les textes gréco-romains, ni les Leges
SaUca et Hibuaria, ni les sources Scandinaves ou anglo-
saxonnes ue permettent de penser que les anciens Ger-
mains aient connu le dueljudiciaire. Gai y voit en somme un
phénomène comparable aux ordalies que connaissent tant de
civilisations archaïques (par opposition à Declareuil qui
accentue l'opposition entre le caractère magique de l'ordalie
et le caractère religieux du duel cf. sur ce point Année Soc,
V, 1900-11)01, p. 428). Seulement, et c'est là ce qu'il apporte
d'original, (jal pense que l'apparition, dans le droit franc, du
duel comme moyen de preuve, a dépendu d'un concours de
causes toutes particulières. C'est daus l'intérieur de la truste
royale, il propos de la violation du devoir de fidélité envers le
roi et devant la juridiction royale, que le duel extra-judiciaire
aurait acquis le caractère de mode de preuve judiciaire. Kl
c'est seulement avec l'extension du pouvoir royal et de sou
rôle que cet emploi nouveau du duel se serait généralisé, par
suite de l'habitude de donner à tout délit lit forme d'un
attentat contre le roi et d'une violation desa paix.
Sous l'inspiration de Kohler, Coulin a entrepris de recher-
cher comment s'est tait le passage, en France, du duel judi-
th lkRKHEiu. Anm'o sociul., 1U06-IÎI09. 30
466 l'asnkb sociologique. iUoa-tDOu

ciaire au duel privé et d'éelairclr ainsi la théorie de cette


étrange institution qui est encore si obscure. Maisne trouvant
pas suffisamment connu le duel judiciaire lui-môme, M.Coulin
a d'abord voulu le décrire d'après les sources, qui n'avaient
jamais été dépouillées en cette matière avec uu soin et une
érudition comparables; et l'introduction de son ouvrage est
ainsi devenue uue monographie indépendante, et excellente.
11ne traite pas des origines de l'institution et considère seu-
lement la « bataille » pendant les siècles où elle a été propre-
meut un mode de preuve judiciaire, du x" ou xie au xiv" ou
xv'siècle le déclin du duel probatuireet l'apparition du duel
privé serontétudiés ultérieurement (cf. cependant déjà Coulin
Vevfallder geriehtlwltenIMstehutuj des pricaten Xmikampfn
in l'ranla-eieh, Berliner Diss., 1908, 36 p.).
La procédure du duel judiciaire s'est maintenue en France,
malgré l'ordonnance de saint Louis (1358 ou I2G0), jusqu'au
xiv1'et môme au xv4siècle, et les coutumes contemporaines lu
décrivent dans le détail comme une institution vivante.
M. Coulin présente d'après elles un exposé
systématique de
cette procédure. L'inconvénientindéniable qu'il y a à grouper
ainsi, dans un tableau d'ensemble, des traits empruutés il des
provinces et à des époques différentes estattéuué parla clarté
de l'exposition, qui permet de rattacher aisément
chaque
indication à la source d'où elle est tirée. Ce qu'on peut regret.
ter davantage, c'est que l'auteur n'ait pas marqué les
rapports
que soutient l'institution avec l'ensemble de la civilisation
féodale, ni comment elle évolue avec elle.
Le duel judiciaire n'est nullement une forme inorganisé»
de procédure, une manifestation indisciplinée de
violence,
une manière grossière d'abandonner les procès à la force au
lieu de les soumettre à la justice. C'est un mode de
preuve,
au sens le plus rigoureux du terme, une procédure fort com-
pliquée où rien n'est laissé au hasard. Cela prouve que la.
société qui en faisait usage avait dans sa valeur
pleine con-
fiance, puisqu'elle pouvait y-attacher sa réflexion pour la ré-
glementer minutieusement, sans apercevoir ce qui fait pour
nous l'absurdité de son principe.
Après avoir défini le duelprobatoire. M.Coulin délimite son
champ d'application. En matière civile, il est encore d'uu
emploi général au xm"siècle en matière pénale, il est admis
alors quel que soit le délit, tandis qu'au xiv",les affaires
capi-
tales seules comportent ce mode de prouve. Dans l'uu et daus-
u phocéduhk 467

l'autre domaine, les matières auxquelles il peut être appliqué


sont extraordiuairement nombreuses, de beaucoup les plus
nombreuses. Néanmoins il y.n des cas où il n'est pas admis ou
n'est admis qu'à défaut d'autres preuves, pnr exemple si l'ob-
jet du procès est uue question de parenté, d'héritage, de
doiuiire, etc., ou lorsqu'il y a aveu écrit. C'est sans doute
par la multiplication de ces exceptions que lo duel a peu à
peu perdu de sou importance. – Demême que les cas où il y
a lieu à un duel, les conditions que doivent remplir person-
nellement les combattants sont établies avec précision. Ils
doivent être libres, cli retiens, non excommuniésni proscrits,
n'étrn pas proches parents ou dans certains rapports de su-
bordination féodale, n'être pas de condition sociale trop diffé-
rente, avoir bonne réputation. L'âge, l'élut de santé, le sexe
sont pris en considération les enfants et vieillards, les in-
firmes et malades, les femmes ne peuvent combattre que par
représentant et la représentation est soumise à des règles.
Après avoir déterminéquelles sont les juridictions qui peuvent
ordonner le combat, Coulin décrit les nombreuses phases,
minutieusement réglées et où abondent les manifestations de
l'esprit formaliste, de la procédure antérieure au combat et du
combat lui-même. II expose enfin le système des peines
qui sont appliquées à In partie qui succombe. Elles sont ter-
riblement sévères; elles ont la forme du talion, le vaincu
subissant une peine symétrique au délit ou payant le montant
du litige. Comment faut-il interpréter ici ce principe du
talion ? Selon l'auteur, il ne serait pas, comme le talioudes
Leges.du à une certaine conception delà proportion qu'exige
la justice pénale, il serait une conséquence du principe pro-
cédural, qui commande tous les détails du due), de l'égalité
entre les parties. – D'autres questions sont abordées par lui,
qui inléresseut l'histoire du droit pénal comparaison de la
nature des peines dans la procédure accusatoire et dans la
procédure inquisitoire, comparaison entre lesamendes impo-
sées à la partie qui succombe dans le duel avec les amendes
et compositions du droit plus ancien.
M. Declareuil présente des observations originales sur les
deux travaux précèdent mentannlysés.Il n'accepte qu'eu partie
les idées de M. Oal. Il ne croit pas que l'évolution du duel ait
été différente dans le droit franc et dans les autres législations
barbares. Renvoyant à ses travaux antérieurs (cf. AnmleSoc,
Y,1900-1901,p. 423), il montre dans le duel un dérivé de la
468 l'a.n.v£k sociouiuique. lOOc-tooo

guerre privée extra-judiciaire, peu à peu réglementée par lu


coutume et deveuaut, sous l'influence d'idées communes a
tous les hommes de ce temps et peut-être notamment sous
l'influence du christianisme, une ordalie, dont le rôle est de
permettre à l'une des parties de repousser les effets du
témoignage et l'offre du serment, et pur suite de neutraliser
les inconvénients du parjure.
A propos du livre de Coulin, Dechireuil marqueles points
suivants lg le duel s'est graduellement étendu à toute
espèce
de procèset son rôle s'est trausforméjdti raug de preuve subsi-
diaire, il a passé à celui de preuve principale – 2»les règles
minutieuses qui déterminent les conditions que doivent
remplir les combattants, qui exigent entre eux une parité de
situation moraleet sociale et par suite uue certaine égalité de
forces, sont inspirées par l'esprit féodal – 3Udes précautions
sont prises pour assurer, eu un autre sens, l'égalité des forces,
à savoir, pour empocher les adversaires de s'aider de
moyens
nwgiques. Cette préoccupation de rendre le combat aussi
juste que possible, humainement parlant, semble incompa-
tible avec lit croyance à l'intervention de Dieu dans la procé-
dure. C'est qu'elle serait antérieure à cette croyance et même
qu'elle l'aurait engendrée. La coutume aurait réglementé la
guerre privée primitive pour diminuer l'injustice de la lutte;
et c'est précisément parce que l'issue ne semblait pluspouvoir
dépendre de la supériorité humaine de l'un des combattants
que l'idée d'uue intervention divine se serait imposée et aurait
fait de lit victoire la preuve du bon droit. D'ailleurs la con-
fiance dans l'intervention divine n'empêchait pas un certain
scepticisme, si bien qu'il continua il sembler convenable
« d'agir humainement comme au tempsoù l'on
ne croyait pas
encore que l)ieu dût intervenir »; – 4° devenu judicium Dei,
le duel dévia de son but primitif. Il était apparu d'abord
comme un obstacle au psirjure. A partir dux" ou xr siècle au
contraire, il fut nécessairement précédé d'un serment; «u Heu
de rester un moyen d'éluder lu preuve par témoins ou le ser-
ment purgatoire, il devint une procédure directe; C»les
parties pouvaient toujours conclure un traité de paix et les
complications de la procédure antérieure au combat, ainsi que
beaucoup des dispositions ordonnées pour le combat lui-
môme, auraient eu pour rôle de pousser les parties à transi-
ger – 6° enfin lit vitalité du duel probatoire, en dépit de ses
défauts, viendrait de l'impossibilité où l'on fut longtemps de
UOHAI.fi IXTK1ISATIOSAU 40»

le remplacer par autre chose, de procéder par enquête et


témoignages, et de la simplification que ce système de preuve
apportait dans le travail du juge. P. F.

WITTE(A.). Der a Kônigseid » in Kpandu und bel einigen


benaohbarten Bwe Stammen. Anthropot,1908,p. 428.(Complète
iissozmutlo.sdoiHinielilsile
Spieilisut-cellequestion).
(JLOTZ;(i.). – Les ordalies en Grèce. Reiuehistorique,XC, i,
p. 1-17.
I.EISl(E.). -Der Zeuge im attisohen Reoht. Krauenfeld,Hubur,
1908,in-8°,100 p. (Utile',mais purementdescriptif].
fJKTKHK (Fa.). – Das Verfahren vor den Sohwor- und den
Sobôffengeriohten. (Hwulb,d. Strafpna. (/)- Leipzig,Uuncker
et liumblot,xiv-'fiS p.
DRBHAY (Louis).– Contribution à l'étude du sermentnéoessaire
Noue,ttei: Hi4.de Dr. /)- 1908,p. 123-100,3U-30K.437-WI.

Xt. MOHAI.K
IXTIiHNATIONALli

l'nr MMllcmciiEia
et llnini.f;.

FRIEDKHICifGnonu).– Der Traenengruss der Indianer.


Leipzig, Simmel u. Co., 1907,ii p., iu-K°.
Cet opuscule fuit suite à nu article paru dans le tllobus
(t. LXXXIX, p. 30 et suiv.) et qui traitait déjà de la môme
question. Il s'agit de la curieuse coutume qu'un observateur
décrit dans les lermessuivants « Quand un étranger franchit
le seuil de leur hutte (des Indiens), les honneurs qu'on lui
rend et la réception qu'on lui fait consistent à le pleurer. On
lui fait prendre place sur le hamac on ne lui adressepas une
parole. Unefois qu'il est installé, arrivent la maîtresse de la
maisou, ses filles, ses amies elles s'assoient autour de lui,
les cheveux dénoués. Elles le touchent de la main, et com-
mencent pleurer bruyamment et à verser des flotsde larmes.
Elles racontent dans un espèce de discours suivi tout ce qui
s'est passé chez elles depuis qu'elles n'ont pas vu leur hôte.
elles parient des fatigues qu'il a eu à supporter pendant sou
voyage; elles choisissent de préférence des sujets qui soient
de nature exciter la compassion et à faire couler les larmes.
470 l/ASNÉBSOCIOLOGIQUE.
1900.190»

Pendant ce temps, l'hôte no dit pas un mol. Mais,après


qu'elles se sont bien lamentées, elles essuyent leurs larmes et
deviennent aussi tranquilles, aussi gaies et aussi en train
que si elles n'avaient jamais pleuré « (KerufioCardin, l'niwi-
pio Oriffem dos Initia»tla Hratit, p. 10-11).Le mêmeautour
ajoute – et sou témoignage est confirmé pur d'autres que
le ton et la cadence de ces lamentations différent do celles
eu usage lors des cérémonies funéraires. Un autre
voyageur
nous dit, il est vrai, à propos des Indiens de lu Californie,
que, au cours de ces étranges salutations, les femmes et les
vieillards qui le recevaient s'infligeaient de cruelles bles-
sures, comme il est d'usage en temps de deuil; mais, à cer-
tains signes, on s'apercevait qu'il ne s'agissait pas d'un deuil
véritable.
Dans ce travail, l'auteur s'attache surtout à établir que
cette pratique a été très générale sur toute l'étendue du con-
tinent américain. E. D.

A. CONSTANTIN. – Le rôle sociologique de la guerre


et le sentiment national. Suivi de LaGuerre commemoyen
th- sélectioneaUettiot, par II. Sleinmeto. (Blbl. Se. internat.)
Paris. AIchii, 1!H)7,29! pages.
• Pour réagir coutre un humanitarisme pacifiste dont le pro-
grès lui parait dangereux pour la France, le capitaine Cons-
tantin a eu l'idée d'offrir au public français une traduction de
la brochure JVr Krmj «/sxosiologiselm Prohkmque leD' Stein-
metz avait écrite lors du premier Congrès de La Haye.Il faut
se féliciter de cette idée: puisque la brochure de M. Stein-
metz reste encore, dans l'énorme littérature qu'a suscitée la
question de la guerre, l'essai le plus méthodique. Eu recher-
chant les rapportsde la guerreavec l'État, en rappelant qu'elle
est l'unique arme qui soit collective et l'unique mode aussi
de sélection collective, M. Steinmetz faisait du moins un
effort pour se placer à un point de vue proprement sociolo-
gique.
Les indications contenues dans cette brochure ont d'ailleurs
été reprises et développées par M. Steinmetx dans un livre
sur la philosophie de la guerre Die Philosophiedes Krieges,
(332 p. dans la Xiitar- mut KullurphiloxophixclteDibliolhek,
Barth, Leipzig, 1907.
C'est à tous les points de vue à la fois que M. C. se place
UORAI.K
!NTK!l.Vno.NAt.K 471

dans la longue introduction qu'il a écrite pour lu brochure de


M. Steiniuetz. Pour aboutir à une « esquisse de l'esprit fruit-
çais » (ehap. iv; et pour déliair les « éléments du sentiment
iiatiouul » (chap. v), il invoque l'autorité des authroposocio-
logues, duslinguistes, des littérateurs: il pusse eu revue,dans
un rapide résumé de l'histoire de France, les divers facteurs
de l'éducation d'un peuple. Les chapitras les lrlus instructifs
sont ceux où -M.C., avaut de dénoncer l'inutilité, voire les
dangers de l'arbitrage international, rassemble utr certain
nombre d'exemptes qui prouvent la vitalité que conservent
encore aujourd'hui, malgré les solidarités nouvelles créées
par le progrès économique, les sentiments ethniques.
c. u.
QL'ATItltiME
SECTION
SOGIOLOGIK CRIMINELLE ET STATISTIQUE MORALE

ftïUDK DUS HÈQLKSJl'RIDIQUKK ET S1OIIAI.KS


CO.VsIBÉftfe
DANS USL'n FONCTIOX.1KMKNT

NUPTIALITÉ
KTDIVORCKS
PurMM.IUlbwaciis
et llu.

MAYR(Ukohovos). – Statistlk und Gesellschaftslehre.


8" Band Sozialstatistik (Moralstalistik,
Bilduugsstatistik,
WirtschafsstaUslik, Politisclie Stalistik), 1° Lleferung.
Tûbiugen, J. C. B. Mohr, 1909, ui-âCOp., iu-8*.
Nous rendons compte ici de la troisième section seulement
de cet ouvrage, de celle où l'auteur étudie les
statistiques du
divorce, parce qu'il s'agit là d'un phénomène purement juri-
dique et moral, et non, comme ceux qu'il étudie dans les
deux premières, d'un mélange de faits de
population et de
faits juridiques et moraux.
On se demande, d'abord, quelle est l'importance exacte,
comme signes d'un élatou de tendances morales, desdivorces
et séparations, et l'on émet des doutes sur l'existence d'un
rapport invariable outre leur nombre et celui des « mauvais
ménages ». Toutefois, le dépôt d'une demande en divorce
révèle bien un dissentiment exceptionnel en
Allemagne,
pour 100demandes introduites, on n'a relevé que 19 concilia-
tions: sur 100 jugements rendus, 70 décidaient le divorce.
– Maiscommeat calculer la
fréquence des divorces?L'auteur
ne distingue pas moins de cinq méthodes, dont chacune a sa
valeur. On pourra rapporter les divorces: l°a la
population
ce n'est guère que là où ils sout très nombreux
que les varia-
tions de ce rapport nous instruiront sur l'évolution du
divorce lui-môme; i° aux mariages de la même ou d'une
I
NUPTIALITÉET D1VOHCKS 4733

précédente période mais si on choisit des périodes trop


courtes, on n'atteindra guère tous les divorces que les ma-
riages en question contiennent en puissance; si on choisit
des périodes trop longues, on ne distinguera pas l'action des
influences les plus récentes; 3° aux dissolutions do mariage
en général, ce qui ollre l'avantage de rapprocher des faits
homogènes; toutefois ce rapport dépend trop immédiate*
ment de la mortalité des gens muriés 4° aux ménages
(fondés sur le mariage) existant il une époque donnée cela
permettrait de déterminer la tendance actuelle au divorce
dans leur groupe, mais il est très dfllcHede déterminer cette
donnée pour chaque nnuôe; 5° aux ménages dusses d'après
In durée du mariage: ce serait la donnée essentielle: mais on
ne peut l'obtenir que rarement.
L'auteur note que les divorces sont très Inégalement répar-
tis, suivant les pays et les provinces entre les maxima et les
minima, de grands intervalles s'étendent. C'est en France et
en Allemagne qu'on trouve (le Japon excepté) les plus hauts
chiffres absolus dans ces pays, le nombre relatif desdivorces
diminue avec l'importance des villes (il faut remarquer d'ail-
leurs, que les villes contiennent une proportion forte de
jeunes ménages).
Dans l'ensemble, on relève des fluctuations dedeux sortes.
– Les unes sont dues a In législation eu France, l'introduc-
tion du divorce en 1884n été suivie d'uue brusque poussée, •
avec ensuite un recul (très passager); en Allemagne, avant
la promulgation du nouveau code civil de 1900, qui rendait
le divorce plus d illicite, on relève un accroissement net et
momentané (une préliquidatiou). Mais c'est nu Japon surtout
que l'influence de la loi de 181)8s'est exercée auparavant,
c'était le régime de la liberté absolue des époux mariages
et divorces étaient affaires de droit privé depuis, lorsque le
divorce est demandé par un seul conjoint, il faut invoquer
des motifs, faire rendre un jugement. Dece fait, les divorces
sont tombés de 2,50 à 1,2Î5-1,5Opour 1000 habitants
influence directe, mais indirecte aussi de lois qui obligeaient
lise représenter le lieu malrimoniul comme plus sérieux qu'on
ne s'y était habitué. D'autres variations sont plus con-
stantes, et s'expliquent par l'évolution des mœurs. C'est sur-
tout l'accroissement continu des divorces, en dépit des lois,
et dans les cadres mêmes que celles-ci déterminent. Kn Alle-
magne, après la baisse de HKlO, le mouvement ascensionnel a
474 1,Y\IÎK BOCIOLOaiQUK. 1900-1îlO't

repris: on » utilisé les nouveaux motifs ù l'aide de toute une


casuistique nouvelle et appropriée. KuFrance, après la baisse
d'une unuée qui a suivi la hausse du 188:1(post-liquidation),
la hausse a recommencé très continue malgré de légers arrêts
(de 1080 à 11.000en 1905).
On peut classer les divorces d'après l'âge des conjoints au
moment du divorce >auJapon, il y a des divorces très jeunes,
à Paris, un certain nombre de divorces de vieillards; –
d'après leur diltéreuce d'Age(l'un ou l'autre est trop vieux, ou
la femme est trop jeune; – d'après leur âge au moment de,
leur mariage (les femmes qui se marient entre vingt-cinq et
trente aus divorcent fort peu, celles qui se marient très jeunes
divorcentbeaucoup) d'après la durée du mariage(c'est pour
les plus faibles durées qu'on relève les plus fortes différences
de pays à pays: moins de 1 p. 100des divorces se produisent
après une année de mariage, en Saxe, Angleterre et Suède,
près de 10 p. 100 en Autriche et eu Italie, piusde lu p. 100au
Japon;; d'après ta race des conjoints (c'est unfacteur entre
d'autres, qui sigit nettement en Autriche, par exemple, où les
Allemands divorcent plus que les Slaves toutefois les ma-
riages entre gens de nationalités di lié rentesne produisent pas
plus de divorces que les aulresi d'après l'état civil avant
le mariage test général1, les. veufssont très satisfaits d'être
remariés toutefois, en Autriche, ce sont les veuves rema-
riées qui ont le plus envie de divorcer les divorcés remariés,
plus que tous les autre, divorcent;; d'après la profession
(en France, les employés des administrations publiques, les
gens de profession libérale, les ouvriers de l'industrie don-
nent une même proportion elle est un peu plus faible pour
les propriétaires fermiers et capitalistes, un peu plus forte
pour les employés de commerce et de l'industrie, nettement
basse pour les travailleurs de la terre >; – d'aprèsla religion
1"il y a de grandes différences de confession a confession (les
catholiques divorcent le moins, toujours; 2" cette influence
s'exerce avec une forme illégale, dansles divers milieux 'fai-
blement dans les villes et dans l'industrie;; 3° les mariages
mixtes sont plus exposés au divorce que les mitres c'est d'ail-
leurs la religion de l'homme qui importe surtout (eu Alle-
magne, les divorces sont plus fréquents quand l'homme est
protestant et la femme catholique qu'au cils inverse;.
L'auteur défend enfin tes statistiques des motifs contre ceux
qui lour refusent toute espèce de valeur il reconnaît d'ail-
NUFTIAUTâ UT BIVORCBS 415

leurs qu'il vtiut mieuxavoir à compter des motifs spéciaux


(adultère, sévices, ivrognerie), ou généraux, mais absolus
(consentement mutuel, autipalhie prononcée), que des motifs
généraux et relatifs, c'est-à-dire values (attitude contraire à
l'iiounetir, il lu moralité;. L'étude des motifs le conduit aux
deux propositions suivantes 1° ils se répartissent ù peu
près (?) de lu même façon dans les divers pays; '2"quand la
législation écarte un motif, la part des autres augmente.
Cet exposédes points de vue divers sous lesquels le divorce
est il étudier est conduit très méthodiquement si lu plupart
de ces cadres ne sont pas encore remplis, ils pourront l'ôlre
et on aperçoit l'importance des questions qu'on serait alors
à même d'aborder. Maisn'est-ce pus aller bien loin que
d'attribuer une réelle valeur à ces dernières statistiques [dm
motifs du divorce)alors surtout que l'auteur a reconnu toute
la part qu'il faut faire ici aux simulations? Il semble que,
d'après lui, les motifs spéciaux, tels que l'adultère, mérite-
raient foi davantage. Mais la simulation, en ce cas, pour plus
grosse qu'elle soit, ne devient-elle pis plus avantageuse, puis-
qu'elle permet d'échapper à l'appréciation du juge, et, dans
les pays au moins où les autres motifs sont plus difficilement
admis, n'aura-t-elle pas les préférences ? C'est pour cela sans
doute, qu'où conserve des motifs généraux et vagues à côté
des autres. Le législateur seuti qu'il ue pouvait s'opposer a
à un courant irrésistible et n'a pas voulu donner une prime
aux fraudeurs. Mais c'est la raison de ne pas retenir, pour
l'étude scientifique, des allégationsqu'on ne peut pas vérifier.
Il est plus instructif de connaître quels groupes fournis-
sent les plus forts contingents de divorcés. En particulier,
puisque le nombre des divorcés augmente, quels sont ceux
qui contribuent le plus son accroisemeut? '? L'auteurremar-
que ceci dans les pays où les divorces sont déjù fréquents,
ce sont les basses classes qui s'engagent de plus eu plus dans
cette voie; là au contraire où, jusqu'ici, les divorces sont
rares, ce sont les hautes classes qui donnent l'exemple. Com-
ment interpréter ce fait ? Un pourrait admettre que, dans les
premiers pays, le contingent normal des divorces que com-
portent les hautes classes est atteint, qu'il ne l'est pas dans
les derniers, et qu'il aie l'est pas non plus pour les basses
classes des premiers, Dans cette hypothèse, les divorces ne
risqueraient pas de se multiplier indéfiniment, mais, une
fois atteint un certain niveau, ils s'y maintiendraient. – Tou-
4?0 1900-100»
L'ANNKKMKUOfcQMOCR.

tefois, voilà un autre fait. qui parait plus grave si un classe


les divorces d'après lu durée du mariage, et si on cherche
des
quels groupes contribuent le plus à l'accroissement
divorces, on constate que ce sont, en Italie et en Autriche,
les divorces après une longue, et, eu France, après une courte
durée de mariage. Et on comprend très bien que, dans les
deux premiers pays, les gens mariés depuis longtemps, et
plus âgés, aient eu plus de peine il accepter cette solution
nouvelle; mais eu France, il faut sans doute admettre que ce
processus s'est déjà développé,et qu'un nouveau courant se
dessine, à partir des jeuues. Est-ce que de nouveaux cou-
rants ne pourraient pas se dessiner aussi dans les hautes
classes. là ad on croyait que les divorces avaient trouvé
leurs limites? – Cela ne veut pas dire que le divorce, à un
moment donne, cesserait d'être un phénomène collectif « nor-
mal » du moius, son développement serait, dans uue cer-
taine mesure, indépendant il ne faudrait pas le traiter
comme une simple pièce accessoire, ou môme essentielle
mais subordonnée, un « régulateur », une « soupape » il
exprimerait il sa manière toute une évolution importante de
la société, et contribuerait à en déterminer le sens.
M. Durklieim disait ici même1 « La vérité, c'est que le
divorce ne peut pas progresser sans menacer l'institution
matrimoniale et il voyait, dans l'accroissement du nombre
des divorces, le symptôme « de la maladie d'une institution
sociale et fondamentale » qui déterminait, en dehors même
des divorcés, bien des « souffrancesindividuelles ». Les ren-
seiguemeuts statistiques sur les divorces au Jupon, que
M. von Mayr à obtenus de M. Hauabura, le directeur de la
statistique ofrcielie dans ce pays. eu apportent une nouvelle e
preuve bien curieuse. Avant1898,les mariagesy sout de véri-
tables unions libres, en tout cas des mariages à l'essai on
n'en fait même point part avant la naissance du premier
enfant le consentement d'un seul su(lit à les rompre, et le
conjoint délaissé accepte la situation, comme une éventualité
naturelle et prévue. Dès que le législateur se préoccupe de
donner au mariage une forme juridique sérieuse, il abolit le
divorce parconsentementunilatéral, comme si les deux ins-
titutions étaient incompatibles, et le nombre des divorces
diminue aussitôt considérablement. En France, il semble que

9*uniwie,
1. Innée Sociologique, p. J13.
.Nl'MNUITfi ET DIVOBCRS *"7

nous assistions au développement inverse et ou en peut


loi de 1908, qui établit
prévoir de loin les conséquences. La
le divorce est de droit, ne
qu'après trois ans de séparation cou-
fait sans doute que consacrer un état de fait mais une
sécratiou officiellede ce goure agit profondément sur les
mutuel est dans les
groupes. Le divorce par consentement
mœurs. En établissant le divorce par consentement unila-
au moins
téral, on n'augmenterait peut être pas beaucoup,
immédiatement, le nombre des divorces, mais on ébran-
lerait le mariage de façon définitive car, dans ces cou-
ditions, la sécurité, la confiance en l'avenir, que le seul but
de cette institution est de prouver, ne subsisteraient plus.
Pour que l'époux non consentant accepte, sans souffrances
excessives, la séparation imposée par l'autre, il faut qu'il aie
la soli-
pu prévoir, au moment même oi'iils s'unissaient, que
dité de leur union serait il la merci d'une soudaiue décision
individuelle. – Commela limite, d'ailleurs, qui sépare lecou-
sentement mutuel du consentement unilatéral est, psycbo-
d'un des deux
logiquement, peu perceptible (le consentement
le
conjoints étant toujours, plus ou [moins forcé), problème
se pose donc, eu France et en Allemagne au moins, en ces
termes. Le sociologuen'a pas le droit de dénoncer (comme le
fait l'auteur) le divorce comme un fait anormal le divorce
naturel du
compris dans certaines limites est un complément
mariage. Maisledivorce de caprice, de fantaisie individuelle,
est incompatible avec le mariage, ou le mariage est iucom-
M- "•
patible avec lui.

AUGUSTOBOSCO.– Divorzi e separaaioni personali di


atti délia
oonjugi (Aniialiili stalkliea Appendice agli
commissione per lit statistica giudizimia'e uotarile ses-
sione del luglio 1898, série IV, nMI4W* Home, typ. uat.
xiv-53i p., in-8".
Dertero, -11)08,
En juillet 1808,Bosco présenta à la Commission de statis-
ou le chargea
tique judiciaire un court rapport sur tedivorce
d'un travail plus étendu, dont la Commissiondécida la publi-
la
cation, en juillet 1907,après la mort prématurée de B.
Direction générale de la statistique se chargea de l'édition
elle nous donne sans modifications le travail de B., mais
dans les tableaux statistiques donnés en appendice, elle a
aux années récentes.
ajouté les chiffres qui se rapportent
478 i/ajinéb soeroLoeioBB.l'JOe-ioo»

L'ouvrage qui nous est ainsi présenté 4st d'un grand iulérêt
l'auteur a rassemblé un nombre considérable de documents,
et dans l'interprétation nous retrouvons les qualités de pru-
dence et de probité scientifiques, dontB. fit toujours preuve.
Dans une première partie, l'auteur étudie d'abord l'nug-
meutuliou générale des divorces et séparations de corps dans
les divers États européens (depuis le début du siècle, et parti-
culièrement depuis 1871),aux États-Unis (de 1871à 1900;, eu
Australie (1871-1898,1.Et à propos de cette première enquête,
l'auteur indique quel sera à lu fois l'objet et le résultat le plus
général de ses recherches le divorce ne dépend ni de condi-
tions individuelles, ni d'influences purement législatives; ta
constance des séries statistiques, même lors des changements
de législation, témoigne de l'action d'autres causes la struc-
ture démographique et économique de la société, révolution
des conceptions morules caractéristiques de chaque groupe.
Toute recherche statistique sérieuse vient confirmer cette opi-
nion. Après avoir, selon son habitude constante, indiqué
longuement quelles difficultés rencontre la comparaison sta-
tistique, B. examine la diffusion du divorce dans les divers
États, et cherche à rendre compte des différences qu'il cons-
tate. Pour chaque pays, il fait un bref exposé de la législa-
tion, et énumère les influences dont on peut démontrer, ou
tout au moins supposer l'action.
Au premier plan apparaît naturellement l'action. des
diverses confessions religieuses ou divorce plus dans les
pays protestants que dans les pays catholiques. Parmi les
pays protestants, l'Angleterre a sans doute un chiffre très
faible de divorces; mais ou sait qu'à bien des égards le pro-
testantisme anglais se rapprocheducatholicisme (par exemple
pour le suicide).. La structure démographique est fort
importante; là où la population est concentréedans de grands
centres urbains, ce qui a lieu généralement dans les pays
industriels, le divorce est plus répandu c'est ce qui ressort
par exenfple de la comparaison du Danemark avec les autres
États scandinaves. L'auteur signale aussi l'influence, dans
certains groupements,de conceptions traditionnelles relatives
au mariage et à sou indissolubilité iiiusi en Serbie, eu Bul-
garie, en lioumanie, la diflusiou du divorce a été facilitée par
l'existence de vieux usages admettant la rupture du mariage
comme chose normale. En r'rauce, la Révolution a substi-
tué à l'ancienne conception religieuse une conception civile
NUPTIALITÉ
KTWVOHCKS 47»
q

et presque purement contractuelle du mariage dès lors, on a


cesséde le concevoir comme indissoluble.
Maisce qu'il y n assurément de plus intéressant et de plus
dénisifdans cette revue que fait l'auteur dos différents fitats,
c'est la comparaison qu'il institue entre l'Europe et les Ktots-
Unis d'Amérique. Ou sait que ces derniers présentent un
chiiïre très élevé de divorces. L'auteur l'explique ainsi nous
nous trouvons en présence d'un peuple jeune; pas do tradi-
tions; la stabilité sociale est presque nulle :la vie est intense
et fiévreuse; le désir du luxe et la lutte économique déve-
loppent à l'extrême l'individualisme; à l'instabilité des cou-
ditions économiques s'ajoute l'instabilité démographique; il
est tout naturel que le lien matrimonial, lui aussi, soit moins
solide. Un régime profondément démocratique, la coudition
juridique et sociale de la femme ne sont que des manifesta»
lions de cet individualisme profond de la société américaine.
Lorsque l'auteur passe à l'étude des diverses régions des Ktats-
Unis, Il trouve une éclatante confirmation de sa théorie les
États les plus anciennement colonisés, ceux qui bordent
l'Atlantique présentent un nombre relativement faible de
divorces 18, 7 à 13 pour 10.000couples); ceux du Centre, plus
récemment civilisés donnent une moyenne beaucoup plus
forte (28à 38) et l'on obtient te maximum dans les nouveaux
États de l'Ouest, le long du Pacifique (44).
Avec une méthode très sure, l'auteur cherche la confirma-
tion des hypothèses générales qu'il a formulées en comparant
lesdiverses nations, dans la comparaison qu'il faitt desdiverses
régions des différents pays. Il insiste sur l'utilité qu'il y a à
considérer des unités statistiques de plus en plus petites, de
façon à voir peu à peu se juxtaposer aux grandes influences
générales les influences locales particulières j actuellement
d'ailleurs il est difficile de pousser assez loin cette recherche.
– Des régions, l'auteur passe aux villes il fait cette remarque
intéressante que le divorce se répand d'une façontrès rapide
dans les villes qui ont eu un brusque développement ainsi
à Hambourg et h Berlin la population y est neuve, déracinée,
sans traditions. Aux tètats-Unis, où toute la population se
trouve à peu près daus cette condition, la différenceentre les
villes et la cauipague est beaucoup moins accentuée on n'y
trouve pas, comme en Europe, une population urbaine libérée
en face d'une population rurale gardienne des traditions.
Dans la seconde partie de son travail, B. étudie au point
480 l'akxkk socjuumtoce. t«oe-l90'j

de vue statistique, lu procédure du divorce il constate que


les demandes présentées pur la lemme sont purtout sensible.
ment plus nombreuses que celles qui sont présentées pur
l'homme. (L'Angleterre ne constitue qu'une apparente excep-
tion ou sait qu'elle n'admet que le divorce pour adultère, et
l'on exige contre l'homme certaines circonstances aggra-
vantes. Pour les séparations, presque toutes les demandes
viennent des femmes; et il existe une séparation demandée
aux tribunaux de répressiou, au profit seulement de lu
femme;. Dans lu plupart des pays, on s'est préoccupé de
faire abaudouuer les demandes de divorce très souvent le
juge doit tenter la conciliation. Eu Autriche, il désigne un
« défeuseur du mariage »; en Hongrie, il doit ordonner une
séparation provisoire avant de prononcer le divorce ou la
séparation définitive: eu Allemagne, les demandes, avant
d'être soumises aux « Laudgerichte », doivent être dans
presque tous les cas présentées aux « Amtsgericlite », qui
doivent tenter la conciliation. Tout ceci montre bien que dans
la plupart des pays ou considéra comme normale l'indissolu-
bilité du mariage le divorce n'est qu'un pis-aller. 11est assez
rare d'ailleurs que l'on réussisse à faire iibandonner l'ins-
tance eu Hongrie cependant, environ 30 p. 100des instances
sont abandonnées; en Allemagne, on trouve une proportion
à peu près analogue. En France au contraire, et c'est le cas le
plus ordinaire, il n'y a pas même 7 p. 100 d abandons d'ius-
tauce pour les divorces (un peu plus pour les séparations).
Lorsque le procès suit son cours, la demande est générale-
ment accueillie par le juge; aux États-Unis cependant, ou
rejette environ uu tiers des demandes, ce qui témoigne d'une
sévérité plus grande qu'en Europe; l'auteur pense que c'est
parce qu'aux États-Unis ou demande très facilement le
divorce, parfois pour des motifs futiles. L'auteur s'est
demandé si la facilité avec laquelle on accueille les demandes
en divorce ne traduit pas un étut de l'opinion, qui devrait su
manifester aussi par le nombre plus grand des demandes
l'exemple des États-Unis, que nous venons de citer irait
contre la thèse et ce n'est pas le seul la question est diffi-
cile à résoudre, car l'altitude du juge dépend d'une multitude
d'éléments; il est bien certain que l'état de l'opinion est un
de ces éléments l'auteur signale la facilité avec laquelle on
accueille les demandes à Paris, et la difficulté qu'elles ont à
triompher devantles tribunaux bavarois.
NUPTIALITÉKT DIVOHOKS 481

Circonstanceset motifs desdhorces. Le divorce se produitt


généralement plus tôt «près le mariage que la séparation de
corps (Autriche, France, Ecosse); de même, le divorce se pro-
duit plus tôt dans les pays où l'on divorce plus (par exemple
duus les États-Unis comparés à l'Europe ù Berlin coin pure a
Paris; dans les villes que dans les campagnes, en France par
exemple). Ainsi la faiblesse du lien matrimonial se révèle à
la fois par le nombre des divorces, et par la promptitude
avec laquelle on a recours à cette iustitutiou.
B. étudie ensuite l'influence, souvent constatée, des enfants
en faveur de la stabilité du mariage. Cette influence n'est pas
niable; mais il est très difficile de là mesurer de façon pré-
cise en particulier, il est presque impossible de dissocier
cette Influence de celle de la durée du mariage, dans l'état de
la plupart des statistiques. D'après les statistiques de Paris
et de Berlin, l'influence protectrice est d'autant plus forte
que le nombre des entants est plus élevé l'auteur se demande
avec raison si cela ne vient pas de ce que les classes pauvres,
celles qui ont le plus d'enfants, sont aussi celles qui divorcent
le moins. L'auteur indique lui-même que la statistique
des motifs est assez peu intéressante il est sur que le motif
invoqué ne représente que très rarement la véritable, cause
du divorce. Ce qui le prouve bien, c'est que, lorsqu'une
législation admet un -motif nouveau, le uombre total des
divorces n'augmente pas beaucoup, les motifs anciens sont
invoqués moins souvent. Cela explique que les motifs les
plus vagues soient aussi les plus fréquemment invoqués par
exemple le consentement mutuel (Autriche; Italie sépa-
rations), les injures graves eu France (74 p. 100;, eu Rouma-
nie (94 p. 100). La fréquence de certains motifs, comme
l'abandon, vient d'une situation démographique particulière
(Russie, États-Unis;.
Condition peynonrtelkde»époux.– L'âge peut être considéré
au moment du divorce le maximum se trouve dans les pre-
mières années de la maturité on peut le considérer au
moment du mariage les mariages précoces résistent mal.
Enfin, lorsque les époux ont une grande différence d'âge,
surtout lorsque la femme est beaucoup plus âgée que le mari,
le mariage est fragile (documents relatifs à la Suisse et à
Berlin). – Ceux qui se sont mariés étant célibataires divor-
cent plus que ceux qui se marient étaut veufs mais cette
influence de létal-civil se ramène peut-être à l'iufluence de
cB. I\u.t.t..1
DniKHEtii. AumV jjociol,, .nn& .lnnR
I90C-19U9. o~
31
482 I/aNXKK SQCIOI.OISIQUB;
UHHMttO»

l'âge. – 11est ditlleile d'isoler l'influence religieuse: elle se


confond parloisnvee l'influence démographique ainsi l'auteur
et
remarque qu'en Suisse les villes sout surtout protestantes,
les campagnes catholiques. Cependant l'étude minutieuse de
Bosco donne des résultats intéressants dans les mariages
mixtes eu Suisse, l'influence du mari est prépondérante (pro-
catho-
portion pour 10.00Ocouples[l877-l890î mari et femme
mari catholique
tiques -.tU mari et femme protestants •.2(5,3
et femmeprotestante 33.U: mari protestant et femme catho-
tique 48,1).Cesont d'il illeurslesmariages mixtesqui donueut
le plus de divorces. Toujours d'après lit statistique suisse,
l'influence confessionnelle est plus forte dans le» cam-
pagnes que dans les villes (aiusi à la ville, 21 divorces pour
10,000couples, pour les catholiques, 40 pour les protestants;
à la campague, S.pour les catholiques, 24pour les protestants).
L'auteur fait aussi cette remarque précieuse que les divorces
sout plus fréquents duus les cultes dissideuts que dans le
culte normalet traditionnel d'un pays ainsi en Hongriepour
les unilorieus, à Berlin pour les « dissidents ».
B. examine enfiu les renseignements donnés par beau-
il cherche
coupde statistiques sur la professiondes. divorcés
moins à dégager l'action du métier lui-même, chose trop
délicate, que celle de la condition sociale que la profession
révèle. Cèla lui permet de constater que, suivant les pays, la
diilusioudu divorce ne s'est pas faite dans les mêmescouches
sociales. Généralement, dans les pays où l'on divorce peu,
c'est que les classes populaires n'ont pas été atteintes (sépa-
rations en Italie divorces en Angleterre, Autrichei. Dans les
le
pays au contraire oit l'on divorce beaucoup, c'est que
divorce s'est répandu chez les paysans et surtout chez. les
ouvriers (France, Suisse, Roumanie sans doute, Allemagne').
Ainsi, lorsque le divorce a atteint un certain taux dans un
du taux pour
groupe, il semble s'y maintenir l'augmentation
uu groupe plus étendu malien par exemple) ne ferait que
traduire l'extension à des classes nouvelles. L'importance de
ki remarque est considérable s'il en est ainsi, le divorce
reste, malgré sa diffusion, une institution d'exception. Mais
on ne peut, pour l'instant, considérer la thèse comme établie;
l'auteur lui-même ne tire pas de conséquences générales de
ses remarques.
Dans la cinquième et la sixième partie de son ouvrage,
B. étudie l«s rapports du divorce avec d'autres phéno-
NtiPTULrré ïî'r mvorg'k* ifc3
1.].
mènes mariage, mortalité, suicide, criminalité. Deux pro-
cédés d'enquête sont successivement mis en œuvre i'X
t'auteur, soucieux de suivre minutieusement les données
statistiques plutôt que d'exposer systématiquement su pensée,
doune séparément les résultats de ces deux sortes de recher-
ches. Dans lu cinquième partie, il compare la situation des
divorcé» à celle des autres catégories d'étui civil clans la
sixième, il compare, dans les dilTérents pays et à différentes
époques la diffusion du divorce et celle des divers phéno-
mènes démographiques et sociaux précédemment indiqués.
C'est plutôt parce qu'il a le souci de faire connaître tons les
documents, même lorsqu'on n'en peut tirer que fort peu de
choses, que l'auteur donne les résultats de sa première
enquête il Insiste surtout sur l'impossibilité qu'il y a à
conuattre la proportion des divorcés dans l'ensemble de la
population aussi préseute-t-il des opinions vraisemblables
plutôt que des inductions scientifiques. Nous signalerons
cependant quelques remarques intéressantes les divorces se
marient beaucoup plus avec des divorcés et veufs qu'avec des
célibataires; et cela.est vrai des femmes beaucoup plus que
des hommes il semble que ce fait traduise un état de l'opi-
nion- Pour la criminalité, l'auteur signale surtout (d'après la
statistique suisse et celle de Berlin; le grand nombre des
récidives chez les divorcés; il signale également que le
divorce, comme le veuvage, semble plus nocif pour lit femme
(tue pour l'homme.
La sixième partie est d'un intérêt plus général. L'auteur
constate que certaines causes paraissent agira la fois sur la
nuptialité et sur le divorce ainsi le développement de l'indi-
vidualisme. Quant à l'action directe d'uu phénomène sur
l'autre, elle n'apparaît que dans quelques cas déterminés:
l'auteur signale surtout l'instabilité des mariages mixtes; et
il entend cette expression en un sens très large les mariages
entre personnes de religions différentes, de pays ou seulement
de régions diverses, ou même, quoiqu'à uu moindre degré,
de classes sociales distinctes, se sont multipliés dans les
sociétés modernes: il y a là un fait intéressant, dont les
conséquences peuvent être graves; l'auteur indique la ques-
tion sans la traiter.
llicorcc~s~et nalcilit~r. Constatant certaines coïncidences
(dans lesdépartementsfrançaise! enSuisse tenlrela diminution
de la natalité et la diffusion du divorce, l'auteur constate que
iU 1WM009
l'ASXêR SOCKM.O0IQVB.

les deux phénomènes doivent subir l'action de causes com-


muues; mais les faits ne permettent pas de généraliser. Il est
impossible d'établir, comme ou a voulu le faire, une relation
entre le nombre des naissances illégitimes et le nombre des
divorces.
Le suicide et le divorce semblent se rattacher à certaines
conditions morales identiques; il y a des coïncidences frap-
pautes B. relève certaines divergences, car il tient à éta-
blir que, si le divorce et la suicide dépendent de causes com-
munes, le premier ne peut être considéré comme cause du
second. U discute à cet égard la thèse de M. Durklieim. Tout
en en reconnaissant l'intérêt, il proposeplusieurs objections.
11 signale d'abord ie tait, qui n'a jamais été nié, que des
causes autres que l'existence de l'institution du divorce
peuvent pousser les gens mariés à se suicider davantage dans
un pays que dans un autre. Il remarque aussi que, dans cer-
tains pays où le divorce est en vigueur, la fréquence du sui-
cide atteint les célibataires. Il note enfin. suivant les indica-
tions même de M. Durklieim, que dans les pays où le divorce
existe, les femmes mariées se suicident moins que les céliba-
taires, tandis qu'en Italie par exemple où il n'existe pas, elles
se suicident presque autant. Il semble que B. n'a pas très
exactement interprété la thèse en question, qui se trouve en
parfait accord avec les faits qu'il signale. Le fait essentiel,
qui parait favoriser le suicide, est le relâchement du lien
familial le divorce en est un symptôme, c'en est aussi uu
facteur. le divorce qui manifestera le relâchement du lien
familial, pourra t'accentuer. Mais le divorce légnl consacre
un divorce réel; là où cette consécration légale d'un fait ne
sera pas possible, on sera tenté de se réfugier dans le suicide
et c'est ce qui se passe en Italie. Au reste, beaucoup de cons-
tatations faites par B. pour le divorce vont dans le même
sens que celles qu'a faitesM. Durklieim pour le suicide l'in-
dividu est d'autant plus exposé qu'il est moins fortement
intégré dans les groupes sociaux.
Dans la comparaison qu'il fait du divorce et de la crimina-
lité, B. se borne à recueillir uu certain nombre de documents
(sur l'adultère, les délits contre les mœurs, les homicides
domestiques) il lui semble. autant qu'on puisse juger, que
le divorce n'a pas d'influence funeste, qu'il ferait plutôt dimi-
nuer certaines catégories de crimes; peut être n'at-il pas pris
lit question d'assez haut, et n'at-il pas soupçonné l'influence
NUt'mUTK
ETD1VOHOKS 481
profonde et indirecte que pouvait avoir le divorce, ou tout
au moins la situation morale qu'il révèle, sur la criminalité.
Danslu septièmeet dernièrepartie de son travail, B. résume
ce que l'on peut dire sur Pétiologle du divorce. II examine
d'abord l'état des lois, et Indique que l'on a souvent exagéré
leur importance; la procédure exerce une influence plus cer-
taine. L'auteur dégage ensuite les tendances qui semblent
prédominer actuellemenl ou admet de plus eu plus la
nécessité du divorce, maison s'efforce aussi d'en restreindre
l'usage l'indissolubilité du mariage reste la règle, et le
divorce n'est conçu que comme un recours suprême (mesures
diverses destinées à faciliter la conciliation par exemple
en Hongrie, en Allemagne; évolution des législations aux
États-Unis). L'auteur signale les projets d'introduction du
divorce en Italie; il s'abstient d'entrer dans les polémiques i
toutefois on peut peutêtre, sans suspecter aucunement son
impartialité, expliquer en partie par des préoccupations
opportunistes, la très grande réserve avec laquelle il a traité
des rapports du divorce avec le suicide par exemple et la cri-
minalité. L'auteur reprend ensuite l'énumération des
diverses influences sociales signalées au cours du livre; con-
ditious démographiques et économiques, confession reli-
gieuse, conceptions relatives à la famille et au mariage, con-
dition juridique et sociale de la femme enflu et surtout, la
plus ou moins grande cohésion sociale sous forme politique
(développement du divorcedans les démocraties États Unis,
Suisse, France), sous forme religieuse (l'influence du calho-
licisme et du protestantisme ne vient pas seulement du
dogme, mais d'une action psychologique différente), enfin
sous forme morale et intellectuelle (développement de l'indi-
vidualisme, disparition des traditions). J. R.

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III. I.A CKIMIXAMTK


SflVA.NTI.KS PAYS

l'ai- JIM.Haïet Ktr«Mi.\tr.

HkniiiJOLY. –La Belgique criminelle. Paris, (inlxildti,


l»07, vn-3C2p.,in-|â.
» Ce livre «si le fruit
d'enquêtes faites au nom de l'Acadé-
mie des sciences morales et politiques ». L'uuleur s'est
informé auprès des autorités politiques, judiciaires, reli-
U GlllUINAMtâ SUIVANTI.KS HAÏS tf)7

gieuses, et, njoute-t-il en reprenant le mot de Le Play, auprès


des autorites sociales, Ue là vient, à notre sens le défaut
grave du livre les opinions sont au premier plan, les faits au
second. Celaest particulièrement grave chez un auteur qui se
soucie aussi peu que possible d'oublier, comme savant, ses
préférencespolitiques el religieuses. – M.Joly étudie d'abord
dans son évolution et ses caractères généraux lu criminalité
beige. Il remarque d'abord qu'elle est très forte; cela vient
sans doute en partie desexcès d'un esprit de réglementation
des lois récentes oui créé des quantités de nouveaux délits.
Cela vient peut-êtreaussi de ce que la répression est devenue,
à la fin duxix"siècle, très énergique. Mais cela vient aussi de
la densité tout à fait exceptionnelle de la population belge.
L'auteur note la forte participation des femmes à la crimina-
lité 23 à M p. 100pour les crimes, 12 p. 100 pour les délits,
36 p. 100 pour les contraventions f'p. 58). Il remarque égale-
ment que J'influence saisonnière se ramène très vraisembla-
blement à des différences de vie sociale ainsi si l'on com-
pare les communes de -100.000habitants à celles qui ont
moius de 10.000 habitants, on constate que dans les pre-
mières le maximum des vols est en janvier, celui des atten-
tats à la pudeur en décembre; dans les deuxièmes au con-
traire le maximum des uns et des autres se produit en juin et
juillet.
Si nous mettons il part le premier chapitre, tout à fait
général, le livre comprend eu somme deux parties dans la
première (eliap, 1I-V),l'auteur décrit les conditions de la vie
rnorule dans l'ensemble du pays la vie industrielle, ta vie
rurale, les conditions ethniques. Ce dernier terme ne doit
pas nous abuser Fauteur considère surtout les races, fla-
maude et wallonne,coin medeux milieux sociaux distincts.et
il se préoccupe de les caractériser actuellement au point de
vue démographique le Flamand se déplace peu, se marie
davantage, a plus d'enfants plus encore que le Wallon, il
aime les fêtes et les grandes beuveries. L'auteur signale à
maintes reprises l'influence de l'alcoolisme sur l:i criminalité
belge; mais il interprète de façon intéressante cette influence
(p. 270); ce n'est pas la consommationde l'alcool qui est
funeste, « c'est le cabaret », centre de surexcitation, milieu
où naissent facilement les occasions délictueuses. Notons
qu'à maintes reprises l'auteur signale le goût des Belges
pour les grandes fêles prolongées, et nous aurons sans doute
408 i/ANNKBSOCIOLOGIQUE.
4906-1809

une ~I. a,. t'_u..II.&f_-


des causes de la criminalitébelge l'exultation tempo-
raire de la viesociale.
L'auteur insiste surtout sur un autre facteur, le relâche-
meutdes liens sociaux permanents(religion, famille, tradi*
lions); il le fait eu particulierdans ta secondepartie de son
ouvrage (cliap. vi-xi Étude morale des arrondissements
judiciaires.; Dans ces chapitres,l'auteur trouve avantage à
pousserl'analyse dans le détail,à prendre des unitésstatis-
tiques petites le canton, lorsqu'il le peut. L'inconvénient
est qu'il devient presque impossiblede considérer séparé-
mentles diverses formesde criminalité aussi l'auteur lui*
même remarque-t-ilparfoisqu'une criminalité qui semble
forte esten réalité assezpeugrave(parexemple la criminalité
féminine d'Huy, p. 238).Cequi frappe le plus dans cette
revuedes diversesrégionsde la Belgique,c'est l'influencede
la mobilité de la population.On sait que dans certains
endroitselleest extrême: dans bien des cantons de la (rou-
tière les usines françaisesappellentdes travailleurs belges
(Longwy),et dans d'autresc'estle contraire; dans l'intérieur
du pays,l'organisationdestrainsouvriers permetà toute une
populationd'aller travaillerloin, parfois très loinde sa rési-
dence enfin l'auteur rapproche,d'une façonassez piquante,
la fortecriminalitéd'Ostende,de Spa, les villesde cosmopo-
litisme mondain, de cellede Menin,Mouscron, Charleroi
qu'affectentles migrationsouvrières.Il semble bien certain
que l'instabilitéde la populationest une condition favorable
au développementde la criminalité l'auteur a raison d'in-
sister sur « le péril socialdeces déplacementsau cours des-
quels il y a toujoursquelquefrein qui tombeou qui s'use »
'p. 383).H a raisonde juxtaposerà cette mobilité,toutematé-
rielle, la mobilitédes biens,desconditions,des habitudeset
des idées la criminalitétrouveraitun terrain d'électiondans
un milieusi profondément,si rapidementmodifiéparle dé-
veloppementde l'industrie, et où commencentà peine à se
constituer des groupementséconomiques,des formes nou-
vellesde solidaritésociale. J. R.

C.DENEGRI. – La delinquenza in Italia dal 1890 al


1906. Publié dans les Annali di statisttea, Alti délia
Commmione perla Statisticagimliziqriae nolarile, Sessione
del Luglio1907(série IV,vol.HO), Roma, 1908,p. 487 à
36».
u criuinàmti!: suivant -mb PAYS 48»

Nousne pouvonsici querelever quelques-unsdes faits que


fournitce très importanttravail. Lu périodeétudiéeest bien
choisie,lesdonnéesétant comparablestant sousle rapportdo
la méthodestatistiqueque sous celui de la législationcrimi-
nelle (codede 1889).
Dansl'ensemble,l'augmentationdes iutracliousdênoncérs
est très marquée le taux en a passéde2.023par 100.000ha-
bitantsà 2.42'»,de 1890à I9o:>,avec un maximumde 2.68»
eu 1898,au néede troubles publicsparticulièrementgraves.
Lesdeliui (crimeset délits) ont augmentécommede 100à
128,les contraventionscommede100à 136,soit une augmen-
tation de 3 délits pour une de 4 coutruveutious.Parmi les
crimesles plusgraves,il y a augmeutatioufaiblepour letaux
du vol,plus fortepourcelui des blessures,très marquéepour
celuides délits contreles mœurs (16,50à 23,39pourlOO.OOOh.)
et des résistanceset outragesà l'autorité(38 à47]par contre
diminutionsensibledu taux de l'homicide,de 12.84à 8,81
ce taux reste cependantextrêmementélevédans l'Italie mé-
ridionale(Sicile:21, Sardaigue lUenchiffresronds, taudis
qu'il est eu Vénétiede 2,3">).L'étude des infractionsjugées
donnedes résultats un peu différents la proportion des
infractionsdénoncéesqui ne viennentpas en jugementest
considérable,elle dépasse30p. 100(dans20 p. 100des casles
auteurs restent ignorés).
Dans la secondepartie de son rapport, l'auteur étudiela
conditiondes condamnés,sexe, âge,état-civil,profession,et
la récidive.Il faut noter ici l'accroissementde la criminalité
juvénile.Sur 100condamnés,le nombredes mineursa passé
de 22,96en 1890à 34,16en 1900.Pour 100.000habitants mi-
neurs, le nombre des mineurs condamnésa passéde 548,39
(1891-1893; à 551,83(1896-1900). Onnoussignaleà ce propos
la nécessitéd'étudierla criminalitéjuvéniledans ses rapports
avecl'émigration.
La troisièmepartie est un essai très prudent de statistique
internationalecomparée.On remarqueraà quelpoint diffère,
d'un pays à l'autre, le nombre qui exprime le rapport des
accusésmisen jugementaux condamnés Autriche,?>3p.100;
Italie, 61: Allemagne,18; Angleterre,81; Belgique,84;i
France,95p. 100en chiffresronds. Pour l'homicide,le taux
le plusélevéest fourni par l'Italie, avec 6 condamnéspour
100.000habitants,le plus bas par l'Angleterroavec0,40envi-
4'JO l/ANSKB itucwmiiiyUK. i(HMï.|V09

ron lAqtriche et Belgique, et I,U; traitée. 1,2-, Alle-


magne, 0,80).. |>.i\

A. WADLER – Die Verbreehensbewegung tm oestli-


chen Europa, 1. Baud Dite Krlmlnalltaet der Balkan-
laender, Mfiuclieu,Sebmidt-HertKch,1 908, -16Hp. iu-K"et
12 diagrammes.
C'est un nouveau domaine i|tie cet ouvrage ouvre aux
études de statistique criminelle, en général cantonnées dans
les sociélésde l'Europe occidentale, et un doinaiue particuliè-
rement intéressant, puisque nulle part ailleurs les facteurs
ethniques, politiques, religieux, etc., dont peut dépendre lit
criminalité ne se présentent eu combiuuisous aussi variées,
condition favorableà la détermination des causes. Malheureu-
sement les statistiques ne sont suffisantes, pour avoir permis
la construction de tableaux et de diagrammes, qu'eu Serbie1
et en Roumanie; elles sont défectueuses eu Grèce; ta Turquie
d'Europe n'en publie pas. L'autour a cependant pu se procu-
rer aussi des renseignements pour la Bulgarie. Il a enfin fait
entrer dans son étude la Bosnie-Herzégovine, la Croalie-Sia-
vonie et lu Dalmatie. Sa méthode est extrêmement prudente
et il se défie des théories prématurées. Les résultats
qu'ou
peut avec lui considérer comme obtenus par sou travail sont
les suivants.
La proportion des acquittements, surtout desacquittements
faute de preuves, est plus élevée que dans l'Europe occiden-
tale, fait d'autant plus remarquable que la compétence des
jurys est plus limitée par rapport à celte des tribunaux com-
posés de magistrats professionnels. La cause en est dans le
rôle important du banditisme les associations secrètes,
qui
commettentle plus grand nombre des délits caractéristiques
de la criminalité balkanique, meurtres et incendies, et
l'appui
qu'elles rencontrent dans ta population rendent difficile l'ac-
tion de la policeet la découverte des preuves de culpabilité.
La criminalité balkanique est une criminalité de violence
et non de ruseet d'artifice les crimes de sang et. parmi les
délits contre la propriété, le brigandage en sont les formes

I. Kncorom*st;ilislii|iics
s>>nMli>s suspecta.Cf. il cesujet1nsobserva-
tionsfaitesà pnipogdu livroi|i>WndlvrdansZeittchr. f. ri.i/emmlrSlrnf-
recAUu:,X.XVIK Brl.,19BX. p. 7«.l.
, j(h Imviiii
r ie WuiMiriiianii
HWuif.
ler. inili(|Ui;
ci-dessous(iih'iiiu
ii-vui-,iiiruiulome,p. Mi!s<|.|.
LA CltlSUNAUTKSUIVANTUJS l'AÏS 4U|

prépondérantes; ce caractère s'atténue dans les pays clunt lo


développement politique et économique est plus avaucé eu
raison de leur incorporation à lit monarchie austro-hongroise.
Ge fait dépose en faveur de lu théorie qui voit dans la crimi-
milité violente la criminalité primaire correspondant aux
formes inférieures de civilisa tiou.
L'actiondes causes économiques sur le taux de Ih crimina-
lité est manifeste. Dans ces sociétés essentiellement agricoles
et relativement isolées est matière économique, les variations
de ce taux et les variations locales des prix des céréales, no-
tammeut du maïs, sont corrélatives (cf. le diagramme n" t
pour la Serbie). -Aux crises économiques correspondent une
augmentation numérique des délits et une aggravation quali.
tative des attentats contre la propriété.
Le taux de la criminalité féminine est plus faible que dans
tout le reste de l'Europe là où elle est observable (Serbie i,
elle est caraclérisée par les attentats contre les personnes et
les délits sexuels beaucoup plus que par les crimes contre la
propriété. – Leselasses d'âge qui fournissent le plus de cri-
minels sont celles qui sont comprises entre vingt et trente
mis la délinquance juvénile n'est pas excessive. – Les sens
mariés participent aux crimes contre la chose publique plus
que la moyenne de la population, aux crimes contre les per-
sonnes autant qu'elle, aux crimes contre la propriété sensi-
blement moins. L'usage des mariages précoces est la cause
principale de l'abaissement remarquable du taux delà crimi-
nalité sexuelle. Le veuvage et le divorce if affectentpas de la
même manière les deux saxes les feninies veuves ou divor-
cées participent au crime trois ou quatre fois plus que les
hommesde même état civil.
L'agriculture est la profession dominante aussi les vols do
bétail et les délits forestiers sout-ils tout particulièrement
nombreux; ces derniers représentent à eux seuls près du
quart du nombre total des crimes commis (phénomène qui
s'explique par les changements introduits dans le régime de
la propriété). Mais. abstraction faite de ces délits spéciaux, la
criminalité de I» profession agricole est normale et plutôt
faible. La criminalité rurale est plutôt violenlo 'criminalité
atavique), la criminalité urbain» présente au contraire à
uu plus haut degré les caractères de la criminalité évolutive
les crimes sont plus nombreux à la ville, mais plus graves à
la campagne. Les indigents participent aux crimes contre
498 l'an.nèb socioloqiquB.taao-1909
la propriété et aux attentats graves contre les personnes dans
uue forte proportion les riches nux délits forestiers dans uue
très forte proportion.
Sur l'influence de l'instruction, l'auteur ne croit pas qu'on
puisse apporter de conclusions fondées, par suite de l'impos-
sibilité d'isoler ce facteur. Il n'a pas pu non plus établir de
rapport entre l'alcoolisme ét la criminalité il signale l'inté-
rêt qu'aurait à cet égard l'étude de la participation des Musul-
mans, abstinents pourdes raisons religieuses, aux différentes
espèces de crimes.. P. F.

YVEHNltS (M.)-– La oriminalité en Europe. Législation et sta-


tistique. Journ. de la Soc.deStatut, de Paris, 10décembre1907.
(ULLE. Untersuoh. ûber d. KriminaUtaet in d. Provins
Sohlesien. Halle(Dissert. 40 p.
DrFIUL'EXSTAEDT – Die preuseisohsn Ostprovlnzen in krimi-
aal-geographischer Beleuchtung. Zeitsehr.f. Sociativissemsclt.,
1906.p. 570-583
CAMBOM (1,.).– La deUnquenzadélia Sardegna (cou prerazione
di N. Colnjanni).Sassari, G. fiallitti e C., 1907, in-8°, XII-
206p.
QVIHOS Bkhnai.uuUK).– La picota. Critnenesy «istigos en le
paiscnstellanoenlos tiemposmédius.Madrid,1907,108p., in-8".
FEHLINfiEH. Die Kriminalitaet der Neger in den Vereinig-
ten Staaten. Archiv f. Kriminal-Anlhrop. u. Kriminalistik.,
vol.XXIV,faso.1u. 2.
CONZALEZ (Anastasio). Arqueologia Orimlnal Amerioana.
San Jose,imp. Alsinu.1006,227p., in-8".
MIRANDA (H.). El olima y el deUto (Bnsayo). Montevideo,
y I.itograliafi Oriental», 1907.
Tipograpliiu
NACKE (P.). Basse und Verbreohen. Arehiv.fur Kriminal-
Anthropolook und Kriminatislik,1900,n. 1-2.

IV. SUIVANT
LACRIMINALITE L'AGEETLHSKXK
Par MM.Durkiibim
et Rav.

BUSCHAN(Geohg). Gesohieoht und Verbreohen. Ber-


lin et Leipzig, Hermann Seeinanii, 96 p., in-8°.

On ne trouvera pas dans ce livre de recherches originales


LA f~ltfHJ"'ALJT' SUIVANT).'ACB BT LR BRU 493

mais fauteur u consulté los meilleurs travaux eu la matière>,


il eu a rapproché les principaux résultats d'une manière judi-
cieuse et il nous présente ainsi un tableau d'ensemble de l'ac-
tion exercée par lesexe sur la criminalité.
Le fait dominantest, naturellement, lu moindre criminalité
de lu femivie.Très justement, l'auteur l'attribue à la moindre
part que la femme prend à la vie sociale. Comme elle est
davantage on dehors de l'ordre social, elle a moins d'occasions
de s'insurger contre lui (p. 87j. Mais il s'en faut qu'elle
soit protégée contre le délit ptiruue meilleure constitution
morale comme on l'u parfois soutenu. M. B. nous fait de la
femme un portrait sans partialité. Certains des traits du carac-
tère féminin la prédisposent à des formes déterminées d'actes
immoraux. Elle est plus impulsive, moins capable de se con-
traindre et de se contenir; ses réactions sout facilement vio-
lentes elle a même une sorte de penchant à lu cruauté que la
civilisation atténue progressivement sans le faire totalement
disparattre (p. 90 et suiv.). Aussi y a-l-ij des formes de lu
criminalité ot'ielle atteint et dépasse même l'homme c'est le
petit vol, le recel, la fraude, la calomnie, l'injure, le faux-
serment (elle a une moindre véracité), le tapage it l'intérieur
des maisons (llatufriedeiuhruelt), le délit d'entremetteuse.
Il y aurait même une particularité constitutionuelie de la
femme qui la rendrait, à de certains moments de sa vie,
plus
accessibles aux actes coupables c'est la menstruation et, plus
spécialement, l'apparition ou la disparition des règles. Après
d'autres auteurs, M. B. croit même pouvoir établir
que
la ménopause a une influence aggravante sur le taux de la
criminalité féminine: celui-ciatteindrait soit maximum entre
quarante et cinquante ans, Mais les faits allégués il t'appui de
cette thèse nous paraissent peu démonstratifs. Si, en ettet,
l'âge indiqué est bien celui où l'écart entre la criminalité de
l'homme et celle de la femme est minimum, il ne faut
pas
perdre de vue que la distance qui sépare, sous ce rapport, les
deux sexes, va régulièrement eu diminuant, de période eu
période, à partir de vingt-cinq ans. Cette régression progrès.
sive ne peut pourtant pas s'expliquer par l'approche de la
1. Notamment Hère,DieKriminaliMdes Weibea in Arch.f Krituiml-
anthrop., 1903,Bd.X, p. 1-69 llngol,Die SlraffMigkeildes Wcibes
Ibid., 1900.Bd.Y, p. 231-28!)HAgel,Der Einflmsdes famUientlamte*
aur die Slntr/alUghit, Ibid.,«On. B.I. XXIV.p. 15-2:);Vniuinx I) le
KvUOhung der KriminalildldesWeibexdurci, die gl,e. in Zeitachr f
Socialms.,1000,p «3; cf. 1899,|>.37.
494 l'axkiLk saciaLotiiouK. iïwu.iUûu

ménopause. De plus, à partir de cinquante ans, si l'écart s'ac-


croît, c'est de quantités très petites.
Ontrouvera dans ce livre uu grand nombre do tableaux sta-
tistiques qui permettent d'étudier séparément les différentes
formesde ta crimiualïté fémiuine, la manière dont elles varient
avec l'âge et avec l'étui civil. E. 1).

Df PAULINE TARN0WSK1. Les femmes homicides.


Paris, F. Alctin, 1908, vin-}î92p., iu-8- iavec 40 planches
hors texte;.

L'uuteur nous apporte, après quelques chapitres généraux


Signes de dégénérescence; –L'hérédité; – La biologieappli- i.
fluée à l'étude du criminel/, le résultat d'une enquête faite
sur ICOfemmes homicides. Tenant à ce que ses sujets soient
comparables au point de vue ethnique et social, l'auteur a
étudié uniquement des villageoises de la Grande-Russie. Elle
nous donne leur description anthropométrique, leurs tares
héréditaires, leurs anomalies physiques et le récit de leur
crime. Comme repères, elle a examiné un certain nombre de
prostituées, de voleuses, de femmes normales. – Les obser-
vutious sout classées sous les titres suivants femmes homi-
cides pour cause passionnelle (a. par cupidité. h. par amour
maternel r. pur amour sexuel d. par jalousie, etc.)
fenimeshomicides par obtusiou du sens moral femmes homi-
cides sous l'influence du sens génésique femmes homicides
par occasion femmes homicides affectéesde troubles nerveux
et psychiques. Cette classification a pour l'auteur une réelle
importance elle n'est pas seulement adoptée pour la clarté de
t'exposition (p. îtti. Or; il est aisé de voir qu'elle lient grand
compte d'éléments assurément accessoires: -.commentad mettre
par exemple, que les homicides commis sous l'influence du
sens génésique soient classés si loin des homicides commis
par amour sexuel. En réalité, un très grand nombre de cas
le plus grand uombre auraient dû être rapprochés sous une
même rubrique nous voulons parler du meurtre du mari par
la femme; les analogies sont frappantes entre les cas de ce
genre éparpillés dans les divers chapitres; certains détails
montrent le vice de la conception d'ensemble ta conclusion
du chapitre sur les homicides attribués au sens géuésique
porte en grande partie sur la nécessité d'organiser autrement
le mariage et les droits du mari (p. 43Sj.
LA GlUMINAMTi:.SUIVANTL'aGK KT I.K SKXK 495

Il n'y a pas là, croyons-nous, un défaut de plan l'auteur Il


voulu faire uiuvre d'aiillujopologiste mais, la matière lui tai-
saut défaut, elle n fait appel aux notions tes plus courantes,
les moins scientifiques aussi, – sur la nature du crime et
les diverses sortes du crimes. ))eux faits mettront en pleine
lumièrele vice radical de la conception 1° Apropos des homi-
cides parobtusiondu sens moral (p. 300-301),l'auteur insiste
sur le rôle du I» conscience morale comme force d'inhibition
et, oubliant ses tendances lombrosieniies, elle reconnaît que,
chez le dégénéré, l'éducation peut développer les forces inhi-
bilriees; n'est-ce pas avouer que le crime ne vient pas de
défectuosités physiques, mais de l'absencede forces psychiques
qui se développent chez l'individu sous l'influence sans doute
du milieu social (Sur l'influence considérable de ce milieu
dans le genèse de la conscience morale, voir spécialement lu
page 303). 2° Dans le chapitre sur les homicides commis sous
l'influence du troublesnerveux et psychiques, l'auteuritulique
que 8 femmes sur 100 ont présenté des troubles de ce genre
ip. 438) si l'on restreint à ce point la thèse de Lombrososur
le rôle de lu dégénérescence dans la genèse du crime, tout le
monde sera d'accord. – 11est juste de reeonnattre d'ailleurs
que l'auteur s'est proposé de recueillir des matériaux plutôt
que de faire des inductions elle nous donne eu ellet un assez 'z
grand nombre de renseignements, qui eutreront peut-être
dans une synthèse ultérieure. J. H.

RENZOPURLANI. – Dellnquenza e oorrezione dei mino


renni. Rome, Soc. ed. Dante Alighieri, 1906, ix-47ti p.,
in-8".
Le but de l'auteur est essentiellement pratique il s'agit de
savoir quels sont les moyens les plus efficacespour combattre
la criminalité juvéuile. L'ouvrage débute pourtant par un
certain nombre de chapitres théoriques, dans lesquels nous
regrettons que l'auteur, selon une tradition trop répandue en
Italie, ait tenuà mêler à des indications précises sur son sujet
des considérations générales une cinquantaine de pages par
exemple sur le libre arbitre. – L'auteur accepte les idées
essentielles de l'école de Ferri le crime est le produit de.fac-
teurs individuels (sexe, âge, culture, profession), de facteurs
physiques (climat, saisons;, de facteurs sociaux (situation
de famille; guerres, révolutions, crises économiques;
40G t/ANNÉK SOClOLOUIGlIg.
19U6-1'JVU

causes sociales chroniques;. Il estime que l'on doit s'occuper


du criminel plutôt que du crime. Mais il hésite pourtant
(p. 474 par exemple) à abandonner complètement l'ancienne
notion de la responsabilité. Pour les mineurs, du moins, la
société n'a qu'à éliminer les incorrigibles, ù tâcher de guérir
et de réadapter les autres. Enfin, beaucoup de chapitres ne
sout qu'une application de la fameuse théorie des « substituts
de la peine ». Ainsi l'auteur attache une grande importance à
la réorganisation de lu tutelle tutelle rétribuée, et, s'il le
faut, tutelle administrative sérieuse. De môme il insiste sur
la nécessité d'interdire aux enfants l'accès de tous les métiers
qui risquent de les mettre eu contact avec des gens peu
recommandables.
Dans la partie théorique du livre, deux chapitres surtout
sont à signaler le chapitre VU sur lu criminalité féminine,
le chapitre V11I sur l'influence de l'instruction. L'auteur
constate, après beaucoup d'autres, que lacrimluulite féminine
est bien inférieure à la criminalité masculine. 11montre, spé-
cialement pour les mineures, qu'il est bien d'illicite de com-
bler l'intervalle considérable que l'on constate, en tenant
compte de la prostitution. D'ailleurs, il serait, ajoutet-il,
Injuste de considérer celle-ci comme un délit féminin elle
est, pour une large part, imputable à l'homme et elle consti-
tue une nécessité pour des sociétés qui contraignent beaucoup
d'hommes au célibat. L'auteur signale l'opinion qui attri-
bue l'immunité relative de la femme à ce qu'elle participe
d'une façon beaucoup moins active à la vie sociale. Mais, pour
réfuter cette thèse, il la transforme singulièrement, et se borne
à remarquer que la femme a autant, et plus que l'homme, à
souflrir dans la vie. 11ne signale même pas les arguments en
faveur de la thèse qu'il écarte prépondérance de la femme
dans la criminalité domestique, développement de la crimi-
nalité des femmes à mesure que celles-ci se trouvent plus
directement mêlées à la vie sociale. M. F. conclut que la
femme est moralement supérieure à l'homme; et il estime
qu'on devrait utiliser cette supériorité dans l'œuvre de réadap-
tation des jeunes criminels.
Dans sou chapitre VIII, l'auteur examine la thèse bien cou-
nue, selon laquelle le développement de l'instruction aurait
amené un développement de la criminalité. Après avoir cité
de nombreuses autorités pour et contre, il remarque que l'on
fait très souvent une méprise on parle de l'influence de
U CRfMIKAMTl!SUIVANTf/ACK KT LE SBXB 497

l'instruction mais on appelle « gens Instruits » ceux qui


savent lire.et écrire et, si l'on consulte des statistiques qui
distinguent ceux qui savent à peu près tire et écrire de ceux
qui écrivent et lisent couramment. ou constate déjà que la
proportion des gens instruits, en ce dernier sens, est extrê-
mement faible parmi les criminels. L'iuiteur analyse eu par-
ticulier los données très précises de la statistique anglaise,
pour la période 1870-1900(Htpart oflhe Comniixxionerta\ Pri-
.10111,\(Mûj. En 1900par exemple, lit, p. 100 des condamnés
ne savent ni lire, ni écrire 73,9 p. 100 Usent et écrivent im-
parfaitement alors que dans l'ensemble de lit population, il
n'y a guère que Bà 6 p. 1 00de personnes lie sachant ni tire ni
écrire, et environ 60 p. 100 de personnes qui lisent et écri-
vent imparfaitement. (Ces dernières évaluations lie peuvent
être qu'approximatives.) – On pourrait ajouter qu'on s'ex-
plique fort bien pourquoi on a pu croire que les statistiques
prouvaient l'influence démoralisante de l'instruction le dé-
veloppement de l'instruction a pu être parallèle au dévelop-
pement de certaines conditions d'existence qui ont eu une
influence certaine sur la criminalité, soit pour eu modifier
l'intensité, soit pour en changer la forme nous signalerons
par exemple le développement de la vie urbaine, Il pourrait
donc y avoir souventsimultanéité d'évolution, sans qu'il y ait
rapport de cause à effet.
La première question pratique que l'auteur examine est
celle de la fixation d'une minorité pénale. II expose avec dé-
tails les dispositions de la loi dans les divers pays. Puis il cri-
tique h la fois le fait de la part de la société de se désintéres-
ser (les actes d'un enfant qui n'a pas atteint un certain âge,
et la distinction, selon lui purement abstraite, entre ceux qui
ont agi avec discernement et ceux qui ont agi sans discerne-
ment. Des qu'un enfant a commis une faute, la société a le
devoir d'intervenir, dans l'intérêt de l'eufant aussi bien que
dans te sien propre plus tôt elle interviendra, mieux cela
vaudra. Et, au lieu de se demander dans quelle mesure on
pourra appliquer à l'eufant les peines instituées pourl'adulte,
il faudra qu'elle l'envoie dans des établissements spéciaux
d'éducation. On évitera, avant tout, de mettre l'entant en
contact avec des adultes qui ne pourraient qu'achever de le
pervertir. La peine qu'on lui infligera ne sera pas en réalité
une « peine » elle sera toujours indéteriniuée, et par suite
largement indépendante de la faute commise. Ou jugera sim-
K. bnullKW. – Alllli'i' mii-lol., I9IJIM009.#
498 1.aknkb sociulookjL'k. i'JOti1900

pleiitenl que l'eu/ant doit être corrigé; et c'est l'administra-


tion pénitentiaire qui déterminera et les coiuiitiouset la durée
de la déteutiou.
Celù explique qu'un grand nombre de chapitres soient con-
sacrés par l'auteur à la description des établissements de cor-
reetion,tels qu'ils fonctionnent daus les divers États. Il y a là
un recueil abondant de renseignements. Commeou pouvait
s'y attendre, le rélormatoire d'Elraira est longuement décrit.
Cette étude conduit l'auteur aux conclusions suivantes la
classification des enfantscrimiuels ou simplement vicieux est
extrêmement importante il serait bon de spécialiser le trai-
tement infligé à chacun; au lieu de calquer sur uu même
modèle les divers établissements, Il faudrait que chacun
d'eux n'ai ta s'occuper que d'uue catégorie de criminels, Vue
première période d'épreuve permettrait d'opérer le classe-
ment. Il faudra autant que possible faire mener aux
enfants une vie régulière, calme, sans excitants, sans loisirs;
on les groupera en des sortes de familles, sous la surveil-
lance d'un ménage plutôt que d'un seul gardien on leur
apprendra un métier. On tâchera de substituer aux eliâti-
ments, qui ne donnent guère de résultats, une série de ré-
compenses ou de primes. Mais alors les jeunes criminels
seront des privilégiés. L'auteur a vu l'objection et a répondu
simplement qu'il y aurait à tenir une juste mesure; d'ailleurs
les mineurs criminels subiront toujours une certaine priva-
tion de la liberté, qui répond au type moderne de la peine. 11
n'empêche que l'on risquera d'oublier la fonction tradition-
nellu de la peine, d'être la sanction d'un acte désapprouvé
par ta société. Cela deviendra grave, si l'on confie aux réfor-
matoires des criminels qui peuvent avoir jusqu'à trente ans,
ainsi qu'il se pratique à Elmira. Au fond l'auteur n'a pas ré-
solu, et il n'a même pas assez nettement formulé la difficulté
essentielle dans quelle mesure peut-on combiner la concep-
tion de lit peine comme une sanction, et la conception de la
peine comme un moyen de réadaptation de l'individu à la
société. j. j{.

Ml.NOVIQ.– Remarques sur la criminalité féminine en Rou-


manie. Areh.d'Anlhrop.crimin.,13ucnU-15
septembre1807.
M.7JUTTO;F.). La delinquenza giovanile e le sue cause.
liivistadelta[ieneficenza
l'ubhlica,novembre-décembre
1908.
DEIA «WJJtSALITÉ
DiVIHW
FAGVHVM 49!)

liUAnMRRl-VKXTIMUiMA (A.). – Ladelinquen*ae laoorrezlone


dei minorenni. Homa-Torino,Houx e Viarengo, 1000, in-X*,
4SI)p.
OHD1NK (!) La madré et la deUnquenza dei minormi..
Napoll.Delkeue Hoclioll,1907.
(JKOSMOUHD (J.) – La lutte contre la criminalité juvénile au
XIX1 siècle. Archivesd'Anthropologie criminelle,)B février1907.

KUNet I.ADAY. – La lutte contre la criminalité des mineurs


en Hongrie. Budapest,S. Polit»«t Solm,l'JOii,ia-8°, vu-400p.
blPHAT («;.L). – La criminalité dans l'adolescence. Causeset
remèdesd'un mal socialactuel.l'aris, Alcau. 1909,200p., in-H".

V. FAUTEURS H1VEKS DKLACRIMINAUTIv


(Confession, facteuri?conoini(ia«',
profession, alcoolisme)

Par MM.Fh-connbtvlR\i.

H. WASSERMANN.– Beruf, Korifesslon und Verbre-


otaen. Bine studie Ober die Kriminalitàt der Juden
In Vergangenhelt und Gegenwart. (Slatist. uud N'atio-
nalokoaom. Abliaudl. hrsgg. von G. von Mayr, Heft II.)
Mfmchen, Reinhardt, 1907, 106 p., iu-8°.
Ce travail a un double but appliquer à un problème de
statistique criminelle une nouvelle méthode mathématique,
et expliquer grâce à l'emploi de cette méthode les particula-
rités bien connues de la criminalité juive.
SatiBentrer dans l'exposé détaillé de la méthode, on peut
en indiquer te principe. Il faut reconnaître qu'à défaut d'autres
avantages, le travail de Wassermann aurait au moins celui de
mettre eu lumière quelques-uns des daidemla.de la statis-
tique criminelle et quelques-unes des iusuftisunces des don-
nées fourni*» par les statistiques oincielles. Tout le monde
sait qu'il y a une criminalité professionnelle, c'est-à-dire que
chaque profession participe dans une proportion qui lui pst
propre illa criminalité générale et il chaque espèce de délit en
particulier. Pour pouvoir déterminer la criminalité spécifique
d'une confession religieuse, il faudrait donc tenir compte il»
ce fait que la répartition des diverses confessions entre les
différentes professions est très inégale, par exemple que les
BOO l'AN!(£ë SOCIOLOGIQUE. 1900-190'J

proportionnellement aussi nombreux parmi


luifa nenn caiiI
Juifs sont nno
pas tiitnr.ni'ltnnnollamant imaoE nnmlit<

les agriculteurs que parmi les commerçants sinou, ou


s'expose à attribuer à la confessionce qui devrait l'être à la
profession. La statistique devrait donc tenir compte à la (ois
de la confession et de la profession (et aussi du uombre des
personnes capables par leur âge de commettredes délits, point
important quand il s'agit des Juifs, mais que je néglige pour
simplifier cet exposé;. Or, les statistiques otllcielles ne rem-
plissent pas cette condition. M. VV.a entrepris de remédier à
ce défaut et d'obtenir iudireclemeut, par le calent, on partant
des données fournies isolément par lu statistique criminelle
d'une part et par la statistique professionnelle de l'autre, des
nombres qui exprimassent la criminalité confessionnelle des
Juifs eu fonction de leur criminalité professionnelle. La crimi-
nalité spécifique d'une profession est mesurée par un nombre
qui exprime combien de fois les membres de celte profession
commettent plus (ou moins) tel délit (ou des délits en géné-
ra^ que l'ensemble de la population. Etant donné, d'une part,
les taux de celle criminalité spécifique des différentes protes-
sions et, d'autre part, le taux de la répartition des Juifs entre
ces mêmes professions, on peut calculer ce que devrait être
la criminalité juive, si elle était uniquement déterminée par
les influences professionnellesauxquelles les Juifs sont sou-
mis (c'est ce que l'auteur appelle die Soll-Kriminalitât der
Judenj. Comparons maintenant cette crimiualilé toute hypo-
thétique avec la criminalité réelledes Juifs rapportée à celle
des Chrétiens (die bl-KviminaUtâl der Juden), et nous ob-
tieudrous un nombre qui exprimera combien de fois plus (ou
moins) les Juifs participent à la criminalité, que leur partici-
pation à telle ou telle profession ne l'exigerait, si la profession
seule et non la confessiondéterminait leur criminalité propre.
C'estce dernier nombre seul qui peut mesurer ce qu'on appelle
la criminalité spécifique des Juifs, et permettre de distinguer
dans quelle mesure la confession, toutes circonstances étant
égales d'ailleurs, exerce une influencesur la criminalité.
L'application decetteméthodeauxdonnéesfournies pourl'Al-
lemagne, l'Autriche et subsidiairement pour quelques autres
pays, donne des résultats intéressants. Ils sont malheureuse-
ment assez fragiles, par suite des variations considérables que
présente la criminalité juive d'une période, d'une année à
l'autre. En Allemagne, par exemple, les Juifs ont commis le
délit d'usure 2,8 fois plus que l'ensemble de In population
MVBMAs LA CMIHMAUT8
WMStBDBS- BOt

dansla période1882-1889, 3,71foisplus 1895,1,85lois plus


seulementdans la période-1899-1902 (cf.XeUseh. f. d. ijuamU
Strafrw.,XXVHU908,p. 765).M. W. semblefaire trop bon
marchéde ces fortes variations, commeaussi del'inconvé-
nient qu'ily a à délimiter arbitrairement les périodespour
lesquelleson établitdes moyennes.
Onavaitdéjh réagicontre la tendanceà rapporterles traits
caractéristiquesde la criminalitédesJuifs à leur race,à leur
religion,à leur passé,bref à tout ce qui les distingueen tant
que Juifs,et montréà quel pointcestraits semblaienttenirà
leur conditionéconomiqueet professionnelle.Le travail de
M.W.esttout fait favorableà cettedernièremanièrede voir.
Comparantla situation économiquedes Juifs en Hollande,
Allemagneet Amériqued'une part, en Autricheet en Russie
de l'autre, avec leur criminalitéspécifiquedansces mêmes
pays,il conclut,en imitant uneformulefameuse,quechaque
pays a la criminalité juive qu'il mérite, c'est-à-dire celle
qui correspondauxconditionspolitiqueset économiquesdans
lesquellesviventles Juifs dece pays.
La criminalitéspécifiquedes Juifsallemands(ausensdéfini
plus haut de ce terme), est dans l'ensemble, inférieureà la
moyenne.Étantdonnée leur répartition professionnelle,les
Juifs devraient,si l'iufluencede la professionse manifestait
seule,cellede la confessionétant nulle, avoirune criminalité
égalea 1.Elleest, en réalité, pour la période1899-1902, égale
à 0,86, s'il s'agit de la criminalité en général, inférieureà
l'unité et quelquefoisd'une manière très sensible, pour la-
plupartdesdélits,supérieureseulementpour le parjure(1,09),
(tes autres périodesdonnent
la fraude(1,343),et l'usure (-1,836) t
des résultatsqui neconcordentpastout à fait, il y a desexcep-
tions importantes,mais les traits les plus caractéristiques
restent à peu près les mêmes).Ainsi,dit M.W., la criminalité
des Juifs ne s'écarte pas sensiblementde ce qu'on pourrait
prévoirsi l'on tenait uniquementcompte de leur répartition
professionnelle; l'écart est en faveur des Juifs pour tous
les délits,sauf trois,et pour l'ensemblede la crimiualilé;–
là où l'écart est défavorableaux Juifs, c'est-à-direpour ces
trois délits,il resteassezfaible,sauf pour l'usure.
Il sembledoncque les traits propres de la criminalitédes
Juifs s'expliquentprincipalementpar lanalure desprofessions
auxquelless'adonnentles Juifs,et non par leurs caractères
ethniques ou les particularitésde leur religion et de leur
502 I.'aNXKK SOCIOLOGIQUE!.
iOOC-1'JO'J
1.~
1I..MU1.C. uesi sBuiemeiuuans jîi mesure ou celte criminalité
s'écurle de ce qu'elle (tenait être (du seul point de vue de la
répartition professionnelle des Juifs) que l'influence secon-
daire de ces facteurs peut être admise. Parjure, fraude,
usure,
sont des délits «commerciaux », qui ont leurs causes dans les
particularités psychologiques du caractère des commerçants
et dans les conditions de leur existence c'est à ces causes
qu'il fuut rapporter ces mêmes délits quaud les délinquants
sont juifs ta confession n'a rien à voir ici; et la forte
partici-
pation dos Juifs à ces délits vient de leur forte participation
aux professions auxquelles ces délits sont familiers. On fera
au contraire intervenir les particularités propres aux Juifs
en tant que Juifs, quand il s'agira
d'expliquer pourquoi, dans
des conditions professionnelles identiques, le Juif a
plus ou
moins de propension à tel délit que le non-Juif. Une
par.
tie de l'étude de M. W. est consacrée à des
explications de ce
genre ce n'est pas la meilleure et je n'y insisterai pas.
A l'importante conclusion que je viens de signaler s'en rat-
tache une autre. Considéréedans le temps, la criminalité
juive
se développe comme la criminalité de la civilisation indus-
trielle, des sociétés où le système économique industriel pré-
vaut de plus en plus. L'unecomme l'autre, elles sont de moins
en moins « ataviques », violentes, de plus en
plus « évolu-
tives », artificieuses et rallinées. Plus la prépondérance de
l'activité économique et du régime « capitaliste » s'affirmera,
nousdit M.W., plus la criminalité générale prendra les carac-
tères propres de la criminalité spécifiquement
juive.
Ces indications demandent sans doute un plus
ample exa-
men mais elles sont incontestablement intéressantes.
1». F.
Il. HEHZ.– Verbreohen und Verbrechertum in Oester-
reich. Kritische Untersuehungen ûber Zusaramen-
hânge von Wirtsehaft und Verbreohen. Tiibiugen,
Lnupp, 1908, xi-320 p., in-H".
C'est avecdes travaux du genre de celui-ci que pourra s'éla-
borer peu à peu une théorie de la criminalité dans les socié-
tés contemporaines, fondement indispensable pour une
poli-
tique criminelle rationnelle. Toutes les doctrines qu'on a
émises, sur lu nature et les causes du crime et des diverses
espèces de crimes en particulier, sont examinées au contact
des faits et sortent de cette épreuve, non seulement corro-
i \um-it* ihvku» du i.\ uuuukauté 50»

«orées pour autant qu'elles soient exactes, mais modifiées,


mieux détenui nées et mieux nuancées. Mais précisément,
parce que de pareilles inouogntphies ont le souci d'apporter
des preuves et d'exprimer les*faits dans toute teur complexité,
elles sont nécessairement plus pauvres est théories générales
et simples que les travaux de synthèse. Elles valent surtout
par le détail, par les faits secondaires qu'elles mettent au jour,
par les interprétations limitées dans leur portée, niais sures,
qu'elles en proposent. Ou les trahit nécessairement eu ue
retenant, dans un compte rendu sommaire, que leurs conclu-
sions los plus générales.
L'auteur a voulu examiner la criminalité autrichienne dans
ses rapports avec les conditions économiques. C'est sur la
manière dont l'évolution économique, dans le sens industriel
et capitaliste, de l'Autriche contemporaine, affecte l'évolution
de lu criminalité qu'il nous apporte des enseignements.
La distribution géographique de la criminalité, comparée
à celle de la fortune, n'autorise pas à admettre que les régions
les plus pauvres aient la criminalité la plus élevée et inverse-
ment. Mais il n'en résulte pas que le taux de ta criminalité
d'une région soit sans rapport avec sa richesse seulement la
situation économique, le bien-être moyen ne dépendent pas
exclusivement du revenu d'autres facteurs doivent être pris
eu considération. – Des variations du prix des vivres dépen-
dent étroitement les variations du taux des crimes coulre la
propriété, mais seulement des formes brutales de ces crimes
(vol proprement dit). Au contraire, les formes artificieuses,
fraudes de tout genre, sout largement indépendantes de ces
variations. Mieux adaptées au milieu économique moderne,
les fraudes se produisent partout où la complication de la vie
économique ollre des conditions appropriées. Ces délits sont
eu augmentation. Le vol resta au contraire le délit des couettes
inférieures de lu population, des classes arriérées sous le rap-
port de la culture. Quant aux attentats contre les personnes
et contre l'État, les causes économiques n'agissent pas direc-
tement sur eux, mais d'uue manière indirecte seulement, par
exemple eu tant qu'elles favorisent la concentration urbaine
et surtout l'alcoolisme, dont dépendent immédiatement la
moitié des attentats violents. A la situation économique
spéciale des Tziganes et des Juifs, non incorporés à l'orga-
nisme politique mais vivant en symbiose avec lui, correspond
une criminalité spéciale, dont le trait dominant est le taux
Bot tYvsés sontotooiQUE.1«oo-»9i)»

élevédes crimescontrela propriété.Les Tzigauesontunecri.


minalitéarriérée,caractériséepar le vol sous ses formesvio-
leutes; les Juifs,uu contraire, participentactivementà l'acti-
vitécapitalisteet industrielleet s'adonnent surtout (môme
dans les classesinférieures)aux formessavanteset produc-
tivesdu vol,aux fraudes.
L'iutroductioudu machinismeet de la production indus-
trielleappelleà une vie professionnelledes éléments nou-
veaux,des femmeset des enfants. D'une façon géuérale,les
élémentsdela populationparticipentà la criminalitédans la
mêmemesurequ'a la lutte économique,à la lutte pour le
gain. L'industrialismegrossitdoncles rangsde lu population
susceptiblede commettredes crimes. La criminalité de la
femmeadounéeà une professionest plus forteque cellede la
femmesans profession.Néanmoinsla criminalité féminiue
est plutôten décroissance,par suite de l'améliorationde lit
situationéconomique de la femme.Maisla dissolutionde la
famillepurl'industrialisme,danslesclassesouvrières,a pour
conséquencel'aggravationde la criminalité infantile. L'In-
dustrialisatioude la productionaffectela criminalitéd'une
autre manièreencore. Eu attirant les ruraux à la ville, en
ruinant les petits commerçants,elle détermine la forma-
tion d'uneclassed'instables,distinctede l'autre subdivision
de laclassenon possédante,celle qui est parvenueà uue sta-
bilitééconomique relative.Cesdeuxsubdivisionsont chacune
leur criminalitépropre. La première a une criminalitéde
formeatavique,violente,dont le taux varieavec le prix des
vivres; il n'enest pas de mêmede ta seconde.
Considéréecommeune formeparticulière d'activitéécono-
mique, l'activitécrimiuelle ne participepas aux caractères
de l'économiecapitaliste.Le travail criminelest très faible-
mentproductif,sa rémunérationest hors de proportionavec
la peineet les dangersqu'il implique. Sa technique est pri-
mitive,peuintelligente;il y a faible originalité, en géuéral
uniformité, dans l'exécution. L'association,l'organisation
professionnelle des malfaiteurstendà perdre de son impor-
tance.Letauxde la récidive,en Autriche,s'abaisse, réserve
faite pour les instables,les déracinés, tant qu'ils n'ont pas
atteint un minimumde stabilitééconomique.La criminalité
a une tendancegénérale à augmenter en extension, maisà
perdre en intensité.
Lesconséquences économiquesducrimesontgraves.M.Herz
f

FACTRUKSDIVERSDE LA I:IiIHI~A1.li!£ 5U3


1
calcule que les dommages matérielsdus au crime repré-
sentent0,84 p. 100du revenu national total. II est remar-
quable que cesdommagesatteignent,dans plus de 00 p. 100
descas, les classespauvres elles-mêmes.La lutte n'est pas
entrele prolétariatet le capital elle se livre dans la zoueoù
l'indigencecomplèteest en contactavecle revenudépassantà
peinele nécessaire. p. F.

AMEDEO PISTOLBSE. Alcoollsmo e delinquenza..SY«-


dio xociologicO'giuridko,
eonprefazbneclell'rof. Xapoleone
Colaianni.Turin,1907.xvi-835p., in-8".
Lathèse de l'auteur a le mériteau moinsd'être très nette
on a soutenu très souventque le développement de l'alcoo-
lismeavait eutraluéle développement dela criminalité;l'au-
teùrs'attacheà inoutrerque lesfaitsdémententcelteopinion
ce qui explique certaines apparencestrompeuses,c'est que
l'alcoolismeet la criminalité sont les effets,parfois isolés,
maissouventjuxtaposés,d'uuemêmecause le régimecapi-
taliste.
La première partie du livre d'alcoolismeet lu criminalité
danslestlieen Étatsd'Europe)est presquepurementcritique;
M.P. rappelled'abord certainsfaits biencountis dans les
hautes classes de la société anglaise,l'alcoolismeest assez
répandu, la criminaliténe l'est point; on a mis en rapport
(Ferri, Lacassagne)l'alcoolismeet les crimesviolents mais
on boit plus en Angleterrequ'en Italie,et l'on y tue moins.
D'ailleurs, tandis que l'alcoolismese développaitpendant
tout le cours du xix°siècle, la criminalitévioleutea plutôt
été en régression.Lesauteurs s'accordentmallorsqu'ils'agit
d'indiquer sur quelle sorte de crimes, l'alcoolismeagit le
plus sur l'homicide,disent certains; sur les attentatsà la
propriété, disentles autres maison sait bien que l'alcoo-
lisme chronique paralyse les facultés plutôt qu'il ne les
excite.
Lorsquel'auteurexamineles méthodesde ses adversaires,
il est souvent perspicace; combienil est imprudent par
exemplede comparerla criminalitéd'uueannéeà la produc-
tion(de vin oud'alcool)de cette mêmeannée c'estla produc-
tion de l'année précédentequi importe. Kt quels résultats
extravagantsl'on obtient, lorsque, pour savoirce qui s'est
consommésur place,ou soustraitdu chiffrede productionde
506 1,'aXXISk 4900-11109
SGCtULOtilQUB.
îuunee, te cuiure a exporta non de cette môme anime il est
trop évideut que c'est le vin de l'année précédente qui est
exporté. Les antialcooliques ont siguulé l'aboudance des
crimes le samedi et le diiuimche, jours où l'ou boit: l'autour
remarque que ce sont aussi les jours oit la vie socialeest plus
intense. les occasions plus nombreuses, les passions plus
vives. 11discute aussi la répartition mensuelle des crimes, Ptt
signale Ii ce propos une remarque intéressante d'UKrlelsur
le district de Dresde le maximum tombe en mai, époque de
grandes fêtes populaires. Lorsqu'ou ne fonde pas ses
inductions sur la production annuelle, on calcule la consom-
mation tuoyeuue méthode fâcheuse car lu consommation
peut augmenter et l'abus diminuer cela dépend de I» répar-
tition réelle. De façon générale, l'auteur regrette d'être oblige
de recourir à des statistiques qui ne donnent que des
moyennes; il préférerait, comme Colaiauni et Morselli, avoir
des séries.
L'auteur, qui est parfois servi par sa partialité, est parfois
aussi amené à des affirma lions étranges ainsi il s'étonne
(p. 84) qu'on considère un phénomène comme une cause,
mais non comme lu cause unique d'un autre fait. 11en est de
môme dans la partie coustruclive du livre {Causn et remhlex
tlel'alcoolisme i.AI.P. reprend la thèse ancienne de Colaianui
c'est lit misère qui produit l'alcoolisme. Vandervelde avait
objecté que l'alcoolisme existe dans les hautes classes.C'est
le régime capitaliste qui est responsable daus tous les cas
c'est tantôt par lu misère et la faim, tantôt par l'oisivetéqu'il
mène à l'alcoolisme. Tarde avait objecté que l'alcoolisme
s'était accru en même temps (lue les salaires. Maisles prix et
les besoins se sont accrus aussi et de plus aux Étals-Unis,
eu Suède, les salaires augmentent, l'alcoolisme décroît; à
Naples, l'alcoolisme se développe à mesure que l'on voit dimi-
nuer la consommation des objets de première nécessité.C'est
dans les professions où la lutte pour la vie est la plus dure,
dans les professions qui dépriment l'individu, au physique
et au moral, que l'alcoolisme se développe. La causeest plai-
dée avec chaleur; fauteur cite des faits; mais ces faits sont
épars: nous ne trouvons nulle part l'investigation métho-
dique qui peut seule donner à une affirmation la valeur d'une
vérité scientifique.
L'auteur éuumère les diverses catégories de remèdes mis
en œuvre contre l'alcoolisme remèdes répressifs, fiscaux,
TU-1CSDIVKltSUK UKUTS RT PB DÉLINQUANT:» S 07

administratifs, thérapeutiques. Il accorde plus de confiance à


lu propagande mais elle ne peut agir que si elle s'accompagne
d'améliorations économiques. Lu dernière partie du livre
(Akaolùmeet reupunmbUih'pénale) est d'un intérêt bien par-
ticulier c'est le commentaire et tu critique de la législation
italienne sur l'ivresse. L'auteur attaque en particulier de
façon très vive la notion de demi-responsabilité et il propose
d'étendre dans de très larges limites le sens que l'on donne
à l'excuse de « l'état (le nécessité» on entend par là d'habi-
tude le désir d'échapper à nu péril grave et imminent; l'au-
teur voudrait qu'on cessât d'assimiler « nécessité » à « acci-
dent » toutes les fois qu'on pourrait établir la genèse du
crime, son « déterminisme », il y aurait lieu d'absoudre. On
voit combien ces thèses hardies et sommairement exposées
débordent le sujet précis examiné par l'auteur. J. II.

HEUZ(II.).– La orlminalltô et les classes populaires des tra-


vailleirs. Archwiodi toichiotria,1907,vol. XXVIII,fase. III.
HEI.I.WIC (A.). – Verbrechen und Aberglaube (AuxNawr- u.
(ieisteswelt).Leipzig.H.G.Teubner, 1908,in-8<\139p.
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A. auxder Fcstschriflf. diejurislixclicFacullâtinGhstentum Uni-
(iiessnn.Tfipelmann,1U07.
vertilnetsjubilaeum.
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ZeiUchriflfiir Démographie undSlatislikder Juden,1907,III. p. 38-
«.
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Soc.de Statistique(leParis, 10novembreI90S,
I1OI>I>K.Alkohol und KriminaUtaetin allen ihren Beziehun- •
gen. WiftshadiMi.
Boi-gmanii. 208p.
S&ggi di psioo-sooiologia e di soienza oriminale nei militari,
HkhtiiililitnrcHaliaim,snpl. l'JOT.

VI.– TVPKSDIVKRS
I)KDIÎMTS
HTIJEDI-XINQUANTS
Par M.lin.

DOTT.JOSE INGEGNIEliOS. – Nuova classifleazione dei


dellnquenti. (Uiblioteca di scienze socittli e polilichci.
Milan, Reino Sandron, 1907, 80 p., in-Ki.
·
508 l'aSSKB SOUIOLOQIQUK.
tUQO-itlQD

Sousce titre, l'autour nous donneun petit manuelde cri.


minologie et il se borne, ou à peuprès, à résumerles idées
de Ferri. L'étiologiedu crime doit comprendrel'étude des
facteurs Individuels,et l'étudedu milieu, soit physique,soit
social. Chezles criminels-nésnous ne trouveronsque des
causesindividuelles chezles criminelsd'occasion,le milieu
seul importera; les criminels d'habitude occuperontune
place intermédiaire. Une fois poséesces conceptionstrès
claires, on comprendmal pourquoil'auteur prendpourbase
unique de sa classificationles donnéesde la psycho-patholo-
gie. Ou plutôt on le comprendtrop bien ceuxqui se rat-
tachentà l'écoleitaliennerestent,souventmalgréeux, hantés
par la thèseessentiellede Lombroso il faut étudieret clas-
ser les criminels, et non les crimes.C'est, croyons-nous, ce
qui empêcheplus d'un criminologisteitaliende mettreà sa
véritableplace le facteursocialdans la genèsedu crime; on
le signale, ou l'étudie parfois longuement,et cependanton
l'oubliedansl'élaborationde la conceptiond'ensemble.
I)ans le détail desa classification,l'auteur tieut à signaler
certains pointssur lesquelsil se séparedeFerri par exemple
il a tenu à séparerles criminelscaractériséspardes troubles
des sentiments moraux,de ceux qui présententdes troubles
de la volonté. Maisil ne proposeni faits, ni argumentsà
l'appui de ses innovations;et nousne pouvonspar suite y
voir que desopinionspersonnelles. J. R.

Dr MARIEkt RAYMOND MEUNIER. Les vagabonds.


(Encyclopédie internationaled'assistance,de prévoyanceet
d'hygiènesociale.Assistance[)" série], 1;. Paris, Giardet
Briére,~1908, 334p., iu-i8.
La thèse est la suivante « Lesvagabondssont tous des
individusqui n'ont pu s'adapterau milieusocial. L'inadap-
tationsocialedes vagabondsest endernièreanalysed'origine
psychologiqueet souventpsycho-pathologique. » (Conclusion,
p. 306.) La plus grande partie dulivre (p. H9-246)est en
efletconsacréeà la descriptiond'anomaliespsychiquesqui
provoquentle vagabondage.Cependant,si le vagabondage
est conçucommeétantessentiellement un état d'inadaptation
sociale,il est un fait social et il estbien vraisemblablequ'il
doitêtre sousla dépendancede causessociales.Il estd'autant
plus étonnant que les auteurs aientdédaigneusementécarté
TÏPKi DIVKKSOK UKUTS KT OK DKLLNgUANTS !)09

cette conception(p. 0, p. 75))que le caractère collectifdu


vagabondageressort jusqu'à l'évidencede leur chapitre II
(Aperçuhistoriquesur le vagabondage), et mêmede leur cha-
pitre III (Géographiedu vagabondage). Nous nous étonnons
aussi que,dans ce dernierchapitre,les auteurs se soientbor-
nés à signaler, d'après les chiflres d'hospitalisationet les
condamnationscorrectionnelles,les grandes voies du vaga-
bondage du Nord et de l'Est vers Paris, de Paris vers
Bordeaux,et vers la Côted'Azur.Il n'est pas indifférent,sans
doute, de savoir quels chemins suiveut de préférenceles
vagabonds. Mais d'autres problèmesnous paraissent plus
essentiels, que les auteurs n'indiquent même pas quels
sont les milieux sociaux, villesou campagnes,professions,
départementsqui alimententle vagabondage,qui donnentle
plus de vagabonds?Si ces questionsavaientété examinées,
peut-êtreu'aurail-onpas conclu,d'aprèsquelques anecdotes,
que le vagabondages'expliquepar des auonialies physiolo-
giques. J. R.
– DieEinteilungder VerbrecherIn Klassen.Leipzig,
HOECKL.
(908,ix-201p.
Ëngelmunn,
SITIIEKLANJ)(J.-F.). Recidivism;habituai oriminalityand
habituai petty delinqueuoy.l.oudun,(ireen, i'JUS.in-8:i,
1-2C
p.
SKKGKEVSKI (N.i. Criminie delitti contro la religione.Oior-
naledelMinistero
délia(Hmtizia,
Saint-Pétersbourg,avril1900.
CASCELLA (F. II brigantaggio. Ricerchesociologiche
crl
Avers»,
anlropologiche. Noviello,
190*.
FI.VZI
(M.). I reati di falso.Vol.I.Bibliografla.Dirittoantico.
Dirittoromano.Torino,Bocca,{908,in-8»,xix-380p.
l'AKPAGLIOLO (A. I mendloanti;eziologia, statistioa e
penalita.Scttolal'osilua,novembre-décembre
)UO7..
GIIAXCB (W.-B.– Vagranoy.London,I».S. Kinga. Son,1900,
in-8",48p.
CULI.IN (P.). – Aperçus sur le vagabondage.Effets, causes,
remèdes.Paris,Iiivière,1907,inlâ.
l'ACNIEK (A.).– Du vagabondageet des vagabonds. Etude
psychologique, et médico-légale.
sociologique Lyon,Slorcket C,
1900,in-ft°,231p.
!HO L'ANNKB IUG<M909
SOOIOLOUKJUU.
PAIXTHR. De la répression de la mendicité et du vagabon-
dage en France sous l'ancien régime. Paris, Urose et Tanin,
030p.
POUHQUET %). – Les vagabonds. Les vagabonds oriminels.
%»ptoWètab du vagabondage. l'ui-is,Murchulet Billard,1908,
in-lt), 19Bp.
HKMHYK Al'OLMNAHY KO.NN.– Les instincts sociaux des
vagabonds professionnels. Criminel de la civilisation. Revu»
Mititenttoin,janvier 1907.
SGUXKIUKR ;c.-K. Die PrOBtituiorteund die Gesellschaft.
Eine soziologischethische Studie. Leipzig,J.-A. Hnrlli.l'JOf).
m p.

VII. LK8CICIDK

Par MM.D.uvet DrnsHEiu.

S. R. STEINMETZ. Der Selbstmord bel den afrlkanis-


ohen Naturvôlkera (Xeitsehr. Sotialtei».,1907, p. 298à
304, p. 359 à 375i.
L'auteur s'élève contre les théories qui voient dans le sui-
cide un trait spécial aux peuples civilisés et il rapporte uu
grand nombre d'exemples qui attestent l'existence de morts
volontaires chez les peuples sauvages de l'Afrique (fiuntous,
Nègres du Soudan, Sud-Africains, Haraitesj. Voici quelques-
uns des exemples les plus caractéristiques chez les Amu-
Xosasuicide d'esclaves et de parents à lumort d'un chef –chez
les Basutos suicide d'époux malheureux en ménage, de
jeunes filles obligées à se marier contre leur gré chez les
Bailundos suicide du prince Ralaiidulji déposé par le conseil
des nobles chez les Angola suicides de femmes à qui l'ou
reproche leur stérilité; chez les Achauti suicide d'un
chef vaincu à la guerre, etc. Le suicide est donc une pratique
communément répandue dans les peuplades africaines, et
l'auteur nous montre qu'elle répond à des causes souvent
analogues il celles qui poussent le civilisé à se donner la
mort. Comment enfin l'opinion juge-telle une semblable pra-
tique ? Là il faut distinguer. Chez les peuples où les sujets
sout la propriété du prince, le suicide est considéré comme
un crime coutre le prince et puni d'une amende et d'une
LE SUICIDK SI i
mutilation du cadavre. Ailleurs le suicide est considéré
comme un bien pour J'âme, ou tout simplement comme une
chose indifférente. En tout cas à ces intelligences
peu compli-
quées la mort apparatt souvent comme la solution lu plus
simple aux difficultésou aux scrupules qui peuvent les assail-
H'1- G. I).

KHOSKiH. A.|. Die Ursaohen der Selbstmordhauflg-


keit. Freiburg i. B., Herder, 190O,vu- 169p.
Celivre est la première étude d'ensemble qui ait paru sur le
suicide depuis l'ouvrage que nous avons publié en 1897.
Comme il arrive assez souvent à ces sortes de traités
qui
visent à être à peu près complets, il répète, sur plus d'un
point, les travaux antérieurs. Dans notre analyse, nous nous
bornerons à relever ce qu'il apporte de neuf soit comme
faits, soit comme idées.
Le plan suivi est classique. L'auteur recherche d'abord
quelle peut être l'influence des facteurs cosmiques ou orga-
niques sur la mortalité-suicide. La dernière partie du livre
est consacrée aux facteurs sociaux. Entre les deux s'inter-
calent deux chapitres, l'un sur les motifs individuels du sui-
cide, l'autre sur les modes du suicide, dont la place, quoi qu'en
dise M. Krose, ne laisse pas de surprendre. Ils
interrompent
la suite de la recherche.
Sur les facteurs cosmiques et organiques, la conclusion de
l'auteur est à peu près négative it ue leur reconnaît
qu'une
action très restreinte. Pour ce qui est du el1mat et de la tem-
pérature, il accepte les conclusions auxquelles nous étions
arrivé si le suicide augmente de janvier a juin. c'est
que la
durée de la journée sociale va en augmentant
pendant cette
même période. Il on est de même des états
psychopathiques
des documents nouveaux produits par M. K. tendent à coufir-
mer qu'il n'y a pas de rapport direct entre le taux social du
suicide et l'aliénation mentale (p. 40 et suiv.i. L'influence du
sexe et celle de l'âge sont incontestables, mais sont des
formes particulières d'influences sociales. Un tableau dressé
par notre auteur (p. 22) établit très nettement que la part de
la femme dans l'ensemble des suicides va
régulièrement eu
diminuant depuis le commencement du six' siècle: c'est donc
que la faiblesse du penchant au suicide, que l'on a universel-
lement constatée chez la femme, tient à des causes, non
pas
512 L'ANNKE80W0I.0GIQUK.1U0M909

organiques, mais historiques. La civilisation, en devenant


plus urbaine, sembleavoir eu poureflet de difléreucier davan-
tage les deux sexes. La femme, à la ville, est tenue plus en
dehors de la vie sociale sérieuse et, par suite, en subit moins
les effets. A propos de l'âge, l'auteur traite In question des
suicides d'enfants.- des faits réunis par lui, il résulte avec
évidence que le nombre de ces suicides croit dans tous les
États européens, s;m( peut-être eu Angleterre où il est relati.
vetneut constant. C'est donc que le mai n'est pas spécial à la
France el ne tient pas, comme ou l'a dit. à telle ou telle par-
ticularité de notre organisation sociale (p. 33-38).
Les facteurs sociaux dont M. K. essaie de déterminer
l'action sont au nombre de six ta nature de l'habitat et ta
densité relative de la civilisation, l'état civil, la fonction et
la condition sociales, la culture intellectuelle, la moralité col-
lective (YolkssUtlichlieil),la confession religieuse. – Sur ces
différents points, M. li. apporte un certain nombre de docu.
ments qui confirment des résultats antérieurement acquis.
Dans notre Suicide, nous avions pu mesurer l'influence
exercée par la vie de ta famille au moyen d'un tableau où
l'action de l'état civil était établie pour chaque groupe d'âge,
pris séparément. L'auteur, qui reproduit ce tableau, l'a con-
fronté avec deux autres dout il a emprunte les éléments à la
statistique suisse et à la statistique suédoise. Le premier con-
corde avec le nôtre dans l'ensemble. Du second il ressort éga-
lement que les gens mariés jouisseut d'une immunité; mais,
surtout pour ce qui concerneles femmes, elle serait tellement
extraordinaire qu'elle nous laisse un peu sceptique. Les céli-
bataires de 20 à 25 ans se tueraient 16 fois plus que les
femmes du même âge, 8, S fois plus que ces dernières à l'âge
suivant. Puis, brusquement, les nombres décroissent à
40 ans, le coefficient de préservation ne serait plus que de
1,5 et, au delà de 70 ans, il se changerait même en un coeffi-
cient d'aggravation (0,78). D'autre part les veuves se tueraient
64 fois plus que les épouses de 20 à 25 ans, et H fois de 25 à
30 ans. Puis une décroissance plus brusque encore se produi.
rait et, dès 60 ans, une inversion se manifesterait; ce sont les
veuves qui seraient avantagées (73 suicides de veuves pour
100 de célibataires;. La situation que parait révéler cette sta-
tistique s'accorde si mal avec ce que nous savons par ailleurs
que nous nous demandons si quelque erreur n'a pas été com-
mise. Ce qui renforce nos soupçons, c'est que, dès 1878, Ber-
i.8 SUICIDE Si3
tillon avait publié les résultats d'une statistique suédoise
dontnous avonspu, dès 189",établir l'inexactitude(St»fc»*\
p. 179, n. 2). Il est, d'ailleurs, très remarquableque ces
deux statistiques ne s'accordentpas entre elles. D'aprèsles
chiffre»que nous donuait Bertillon.l'immunité des époux
irait en croissant jusqu'aux dernières limitesde la vie, et
celledes épousesjusqu'à l'âge de 7Sans. De plus, celledes
femmesserait sensiblementinférieurea celle des hommes.
D'après le tableau de K., ce sont les femmes,au contraire,
qui seraientle plus favoriséespar le mariage;en outre, pour
les deux sexes, le coefficientde préservationbaisseraitdès
28 ou 30 ans et deviendrait très faibleentre 40 et 50 ans,
pourdiminuerencoreaux âges suivants.Il nous panilt doue
prudentd'accueilliravecbeaucoupde circonspectionles ren-
seignementsqui ont cetteorigine.
C'est'à proposde la moralité collectivequ'il est truité de
l'alcoolisme.L'auteur n'a aucun mal à montrerque si la con-
sommationexagéréede l'alcool peut avoir quelquepart au
progrèsde la mortalité-suicide,son influence,cependant,est
loin d'être aussi décisiveque l'a dit Primùng,par
exemple.
Il n'existepas entre ces doux phénomènesde relations défi-
nieset régulières(p. 128et suiv.). C'estun fait qu'il n'est
pas
sans intérêtde noter à une époqueoù l'ou impute volontiers
à l'alcoolismetousles mauxdont noussouffrons.
Le chapitresur les rapportsdu suicideavecle conformisme
religieuxest le plus étendu et le plus nourri (p. 137-165).
L'immunitérelativeque confèrele catholicisme est à nouveau
démontrée,avec une grande abondancede preuves. D'un
autre côté,do faits qu'il emprunte particulièrementà un tra-
vail de llost', il semble bien résulter que le coefficientde
préservationdont jouissaientlesJuifs tendde plus eu plus à
dimiuuer.Alorsque.de1844à 1856,un milliondeJuifs bava-
rois ne produisait annuellement que 10» suicides, on en
comptait115,8de 1870à 1879, 185 de 1880à 1889,et de
1890à 1899,212,4,c'est-à-direun peu plusqueles
protestants
(210,2). A mesure que la populationjuiveestassimiléedavan-
tageà la populationambiante,elle perdses vertus tradition-
nelles,sans peut-êtreles remplacerpard'autres.C'estun cas
particulierd'une loi très générale un groupementsocialqui

i. DerSelbslmoytt
inseinerBe-Jehung ulldSliullbevoelke-
sut Konfemon
m
i-ung Baient, in Hhtorisch-poJUhche
BUlIter.
CXX.V,
MOnchen,1902.
I.tfi.
E.DenKHRi*.– Anmiosoeiol., 190B-J909. 33
514 l'asNBK SOUIOMHiSQUK. ttHKMWW

a une culture moralexvÀgeuenitpeut dilIicileitieuLeu changer


sans risquer de se démoraliser. Toutefois, pour pouvoir
donner aux chiffres qui précèdeutleur signification véritable,
il faut ne. pas perdre de vue que les Juifs habitent surtout
dans les villes et que, par elle-même, la vie urbaine pousse
ati suicide. Dece que les Juifs d'aujourd'hui se tuent autant
ou plus que les protestants il ne suit doue pas que le judaïsme
a une action préservatrice inférieure ou simplement égale à
celle du protestantisme. Pour mesurer exactement l'influence
du facteur confessionnel, il faudrait éliminer le facteur urbain
eu ne comparant que des populations de môme habitat.
Sur une question de détail, M. K. fuit une remarque qui,
si elJflse confirme, ne manquerait pas d'intérêt. On est assez
souvent porte à croire que, quand une Église est à l'état de
minorité dans un pays, elle a une meilleure constitution
morale et. par suite, un moindre penchant au suicide. On
conçoit, en effet, que, pour pouvoir lutter contre l'hostilité
des populations' ambiantes, elle soit amenée à s'astreindre à
une discipline sévère. Or, s'il y a effectivement quelques
faits qui tendent à établir la réalité de ce rapport en ce qui
concerne le protestantisme, il semble, au contraire, que le
catholicisme perde de sa vertu prophylactique quand il n'est
pas la. religionde la majorité. Plus les catholiques sont mêlé»
à des croyants de confeRsions différentes, plus aussi leur
force de résistance au suicide diminue. On dirait que la foi
catholique ne peut garder son autorité sur les consciences
qu'à condition de n'avoir pas à supporter In contradiction.
La conclusion que l'auteur tire de cette étude comparative,
c'est que lo facteur religieux est le seul dont l'action soit
assezprofonde pour transparaître avec évidence dans tous les
cas et toutes les combinaisons de circonstances. L'influence
des autres aurait quelque chose de plus incertain. et de plus
contiugent (p. 138). A vrai dire, à coté de In religiosité et de
lirréligiosito des peuples, il est un autre fait dont il est obligé
de reconnaître l'importance sous ce rapport c'est la tendance
au divorce. Mais il croit qu'elle dépend étroitement de la foi.
Ce privilège de la religion, M.K. ne le réclame pas pour le
seul catholicisme, Il estime que toute confession peut avoir le
même effet, pourvu qu'elle proscrive le suicide et croie à une
vie future. Tout dépend de la force avec laquelle cette foi
est imprimée dans les esprits.
Cette interprétation des faits nous apparaît comme tout à
lk .tniuiug 5)s
1..1.. l'L.I~I .J_I.
fiiit inadmissible. si c'était 1lu croyauce à1 l'au-delà
qui explique l'action de la religion, on ne comprend pas pour.
quoi le protestant serait à ce point inférieur au cutliolique
pourquoi uu pays, comme la France, oit la foi est si profondé-
ment ébranlée, n'est pas plus enclin à la mort volontaire que
l;i religieuse A Hemague comment surtout le judaïsme aurait
pu, pendant longtemps, soutenir lu comparaison avec Io catho-
licisme, bleu que les idées relatives à la vie future y soient
d'origine relativement récente et n'y soient pas considérées
comme un dogme fondamental c'est sur cette terre que le
Juif espère ou redoute les.suuctiousdivines. Pour comprendre
à quoi la religion doit son bienfaisant pouvoir, il faut, au lieu
de lu considérer en elle-même et comme une sorte de fait
unique et incomparable, la rapprocher d'autres faits simi-
laires et qui ont sur le suicide une action de même nature.
Bu dehors de lu toi religieuse, il y a la foi politique, le patrio-
tisme qui agissent de la même manière et dont M. K. a le tort
de ne pas parler. A côté du groupement confessionnel, il y a
le groupement familial dont il recouualt, chemin faisant,
l'heureuse .el très puissante inllueuce, mais dout il ne tient
aucun compte dans sa conclusion. Quand on rapproche ces
divers facteurs les uns des autres et du facteur religieux,
celui-ci apparaît sous un tout autre aspect.. C'est ce que nous
avons essayé de montrer ailleurs.
Le radicalisme simpliste de cette conclusion tient, ou par-
tie, à la méthode suivie par l'auteur. II raisonne comme s'il ii
n'y avait qu'une sort» de suicide et de courant suicidogène
or, en réalité, il y en a plusieurs, comme nous noas sommes
efforcé de l'établir. Si la religion préserve du suicide, elle
peut aussi y pousser et les suicides vers lesquels elle nous
incline sont très différents de ceux dont elle nous détourne.
Les intellectuels se tuent beaucoup ainsi que les sous-offl-
ciers mais ce sont deux espèces de suicides qu'il importe de
distinguer. On conçoit dès lors tout ce qu'il y a d'abusif à
vouloir faire dépendre fS mortalité-suicide d'un seul et unique
facteur. E. I).

JACQCAHT (CUuiixk).– Easais de statistique morale. I. Le buI-


cide. Bruxelles,A. Oewil,(908, p. 100,in-»"Y ajouterien aux
faitsconnus. Raltacla*les progrèsdu suicideaux. progrès({e l'in-
,lIulI,'illlismf1
et t\ la surexcitationd'appétitsqui eu résulte.)
CINQUIÈMESECTION

SOCIOLOGfK tiGONOMlyi'E

I. KTL'DKS
UtiNÉRALKS.
TRAITKK.

l'ur M.P. Swianu.

JEVONS(W.STANLEY). – La théorie de l'éoonomie poli-


tique, traduit par MM.U.K. Bamultet MauriceÀlfassa.
AvecPréfacede PaulPainlkvé iBibliothèqueinternationale
d'économiepolitique, publiée sous la direction d'Alfred
Bonnet).Paris, Giardet Brière,I «09,xxiv-406p., in-8».
PARETO(ViLFREDoi. – Manuel d'économie politique. Tra-
duit sur l'éditionitalienne par AlfredBonnet(Bibliothèque
internationaled'économiepolitique).Paris,Giardet Brière,
1907,697p., in-8".
MARSHALL (Alkkei>). Principes d'économie politique.
TomeI, traduit par F. Sauvaire-Jourdan.TomeH, traduit
par F. Sauvaire-Jourdauet et K. Savinien-Bouyssy (Biblio-
thèque internationaled'économiepolitique). Paris, Giard
et Brière,1906-1909, 2 vol., xvi-544èï«6l p., iu-8°.
sur l'économie
Remarques engénéral.
mathématique
Il était important d'avoir sur l'économie dite mathéma-
tique l'opiniond'un vrai mathématicien.C'estce que les tra-
ducteursen françaisde la classique Théoriedel'économiepoli-
tique de Jevons ont voulu nous donner en demandant à
1ÎTUDKS
UIÎNKBAI-RS.
TAAIT& 8*7
M.Painlevéunepréfaceà cettetraduction.Le jugement,con-
densé en un petit nombre de pages,que cettepréface nous
apporte, mérited'être étudiéde près, tant pourl'autorité qui
s'attache à la sciencemathématique,à la compréhensionet
pénétrationd'espritde l'auteur,que pour les perspectivescon-
cernant l'essence môme de la scienceéconomiqueque, par-
tant de lui, nousallons voir s'ouvrir. Bt ce nous paratt être
une bonneoccasionde considérerd'ensemblecette direction
méthodologique,suivieet défendue par un certain nombre
d'économistes,surtout italienset anglo-américains, alors que
des ouvrages nouveauxqui en procèdent(nous étudierons
plus loin spécialementl'und'eux 1),des traductionsd'œuvres
importantesqualifiéespour la représenter, et aussi diverses
études critiques qui en reconnaissentl'importance,attirent
à nouveaul'attentionsur elle.Avecla préfacede M. Painlevé
et, bien entendule traité de Jevonsqui en est l'occasion,nous
retiendronssurtout, pour cet examen,le Manuelde M.Pareto
et les Principesde M.Marshallrécemmentprésentésau pu-
blic français.
Le premier de ces livres est, malgré l'apparencebeaucoup
plus volumineusede l'ouvrage, la traduction,accrueseule-
ment de quelques notes et peu modifiée,du Manualede petit
format,maisd'impressiontrèsdense,dontunerecensionanté-
rieure3,à laquellenousrenvoyonsàcet égard,a indiquésom-
mairementle contenu,l'ordonnanceet le caractère.LesPrin-
cipesde M. Marshallsont traduits sur la quatrième(com-
plétée, nous dit-on;et, vers la fin, sur la cinquièmeédition
anglaise de cet ouvrage; à la vérité, nous ne partageonspas,
pour notre part, et mômene nousexpliquonspasbienl'admi-
ration dont il est entourécommed'un culte; et, à le prendre
dans son développement,nousaurionsbeaucoupà y objecter
il nous parait, en somme, être remarquablesurtout par un
éclectisme,ouplutôtmêmepar une indéterminationde pensée
déconcertante,qui, présentanttoute théorie sousle bénéfice
de multiplesréservesdontla portéerestenondélimitée,corri-
geant presque toutepropositionnefte par tellerestrictionmal

1.Viiircl-'lessouï
secl.IX,1.Fishur,Therateor inlete»t.
2.VoiriiMlammiMil lecliiqiilrc substantiel
oonsacn1 i. Vivait,
mathéma-
tiquepar MM. Gidee t liistdans leurrécente H istoire
der doctrine*
écono-
miquesrecousue ci-dessous. Cf.|)rilcùilniiiiiii'nt
Bouvier, laméthode mathé-
maliijtnenéconomie politique.
3.Imite Social. |>. 5Î7.529.
518 • l'AKttÉE SOCWtOBlOWE. UWfrlW»

définie qui est laisse tout le senseffectif en suspens, n'aboutR


guère à des résultats indiscutables, qu'en ce sens qu'ils sont
trop vagues oa incertains pour être efficacement discutés et
le ton général de l'exposé nous semble être plus souveut celui
d'un essayiste ou d'un causeur, à informations du reste assez
variées, présentant sort» vie de tons les jours des remarques
de sens commun, que celui d'un savant, recherchant et éta-
blissaut, sur un objet scientifiquement étudié, des proposi-
tions et des théories de caraetère et de rigueur scientifiques.
Mais oomine. à raison même de soi) suoeès, cet ouvrage est
assez connu et en tout cas assez accessible, et que précédem-
ment les Riment* du même auteur'nous ont donné une occa-
sion > d'étudier sa façon de définir, d'ordonner, de traiter les
matières de l'économie politique, nous ne ferons pas ici une
analyse et unexnmen direct des Principes, mais nous y pren-
drons seulement, ainsi que dans le Manuelde M.Pareto, et, à
l'occasion, dans tels autres ouvrages de l'école mathématique,
des éléments pour l'examen d'ensemble dont la critique de
M. Painlevé nous ouvre le champ.
1. Le progrès des sciences, commence d'abord par rappeler
M. Faiulevé, consiste à « évoluer de l'état qualitatif et des-
criptif à l'état quantitatif et causal ». Le type parfait de ce
dernier état nous est actuellement fourni par l'astronomie de
position. Imparfaitement quantitatives sont encore la phy-
sique et encore plus la chimie. Ici, se rencontrent des catégo-
ries de phénomènes très complexes, des « multiplicités colos-
sales de petits phénomènesenclievôtrés », qui. – malgré qu'ils
échappent individuellement à notre atteinte.et à notre mesure,
et même s'ils sout individuellement capricieux, mais précisé-
ment parce que ces caprices s'annulent pour ainsi dire les
uns les autres, – donnent prise, considérés en masse, à une
quantification globale et peuvent être la matière de ce qu'on
pourrait appeler une science quantitative statistique (par
exempte théorie cinétique des gaz). A un degré moins procire
euoorede la perfection se plane la « science imparfaite » que
nous pouvons avoir de phénomènes échappant à une théorie
quantitative intégrale, science dont les lois, numériques
encore, sans sullire à déterminer ces phénomènes, les astrei-
gnent pourtant 'exemple: principe de conservationde l'éner-
gie, principe de Carnot-Clausius).

Année
Sûciul.,IV,p. iSI-Sfl.
..9tut)ge IlIb..lk.\LK~1'ItM'It!~ ~t»

Auquel de ces trois types l'économie politique peut-elle


être amenée par uue utilisation des mathématiques ? Au pre-
mier? Cela est concevable, mais chimérique « II est évident
(lue l'économie politique sera toujours impuissante devant
les phénomènes où il lui faudrait tenir compte des caprices
de chaque unité humaine (p. vit!)». Le type statistique est la
seule furme mathématique qui puisse lui convenir. Mais
encore faut-il, à une science malhémiilique statistique, « des
grandeurs mesurables bien définies ». Or, admettons que
l'unité de valeur soit lu valeur d'un gramme d'or « Pouvons-
nous sur le seul examen d'un objet, un lot de poissons par
exemple, dire quelle eslsa valeur a l'instant considéré?j>Uue
définition de la valeur telle que « la valeur d'au objet, à un
instant donné, soit immédiatement mesurable (comme le
sont ses dimensions, son poids, etc.], du moment qu'on cou-
uatt l'objet, l'uuité de valeur et rien d'autre », n'existe pas et
ne peut pas exister. Supposons les habitants d'une lie ne se
nourrissant que de poisson, deux pécheurs faisant toute la
pêche et le poisson ne se conservant pas plus d'uu jour si la
pêche d'aujourd'hui est double de celle d'hier, ou ne peut
dire que la valear du poissonsera la même, ni qu'elle sera la
moitié de celle d'hier car, suivant que les deux pécheurs
s'entendront ou se feront concurrence, le prix pourra être
maintenu, ou au contraire pourra baisser à presque
rien.
Mais, s'il n'y a pas de définitiou de la valeur comparable à
celle de la longueur, le prix d'une marchandise sur un mar-
ché donné, à un instant douné, n'est-il pas déterminé et n'est-
il pas une grandeur susceptible d'une étude quantitative?
Prenons la double équation par laquelle Jevons exprime les
conditions d'un échange achevé (entre deux corps marchands
A et B, l'un possédant du blé par exemple eo quantité a,
l'autre de la viande en quantité b; et //étant respective-
ment les quantités échangées de ces deux marchandises,
?, (u–r) et <?ir le degré final d'utilité du blé respectivement
pour A et pour B, l'échange une fois arrêté,y, j et -»3 '»–)/) le
degré final d'utilité de la viande pour Aet pour B>

?' *) ?' f
'h II •' h !> – !!>r

« Comment, demande M. Paiuleré, définira-ton quautitati-


&20 LASNÉB 1908-11)09
SUUIOLUGIttUB.
vement l'utilité de telle marchandisepour A et pourfi ?»
Mêmesi l'on suppose(ce qui est loin d'être toujoursle cas)
que cette utilitédépendeseulementde la quantitéde la mar-
cliaudisepossédéeparA,on conçoitbienquecetteutilitépour
A décroissequandla quantitéaugmente,maisuneinfinitéde
ionctiouspeuventrépondreà cettecondition;et si l'onchoisit
cellequi résulteraitde statistiques,c'est un constatet non de
plus de la' théorie.
IIen est de mêmepour la plupart des autresconceptséco-
nomiques (travail, etc.), traités quantitativementdans les
équationsde Jevous.Et « l'assimilationdes loisde l'équilibre
économiqueauxprincipesde la mécaniquestatique n'a point
jusqu'iciplusde portéequ'unefigurede langage» (p.xii).
Ce premierexamenaboutitdoncà ne trouverdans l'écono-
mie mathématiqueque « des raisonnementsquantitatifspor-
tant sur des chosesqui ne sont pas des quantitéspuisqu'elles
nesout pas mesurables». Maisce jugementest peut-êtretrop
sévère.
D'abord, poursuit donc M. Painlevé, certainesclassesde
faits économiques(assurances,mouvementsd'ensembledu
crédit, etc.) peuventêtre légitimementsoumisesau raisonne-
ment mathématique,parceque l'élémentpsychologiquen'y
intervientque sous la formestatistique.L'usagedesmathé-
matiques permettra encorede résoudreaisémentdes ques-
tions devant lesquellesle raisonnementordinaire pourrait
être embarrassé ou impuissant(par exemplerecherchedu
bénélicemaximum dans certaines hypothèsescomplexes).
Maiscette utilité des mathématiquespour la scienceécono-
miqueest « aussi humble qu'incontestable». N'y a-t-il pas
plus, pour avoir occupé« des esprits aussi vigoureuxque
Cournotet Walras»?
La double équationplus haut rappeléene définitsous une
formequantitativel'état d'équilibredu marchéconsidéréque
moyennantl'hypothèseque le degréde satisfactionou la va-
leur se quantifieen fonctionde la quantité.Soit.Mais.cette
hypothèseadmise,la double équation nous montreaussitôt
nettement,dansce cas pourtant très simple,les dépendances
réciproqueset continuesque supposecet équilibre,les direc-
tionsdes variationsavantl'équilibre,etc. Neretenonsque les
tendancesqualitalim ainsi montréeset qui subsistentquelle
que soit la fonction(pourvu que celle-civarie en raison
inversede la quantité;. Onvoit qu'ici « le raisonnementma-
KTUWBS(JÉNKIWtK*.TRAITÉ* 521

thématiquenous sert d'instrument auxiliaire et provisoire


pour déduire,plus commodémentet avec plus de sûreté, des
conséquencesqualitativesde prémissesqualitatives». L'em-
ploi dos mathématiques,en uu pareil cas, se justifie en ce
que « notrecapacitéde déduireeu langageordinaireest incom-
parablementplus faiblequ'enlangagemathématique». C'est
même,pour M.Painlevé,le principalservicerendu jusqu'ici
par l'économiemathématiqueque d'avoirpu, par cette quan-
tificationartificielle, mettre en évidence,sur un schéma
pourtant grossièrementsimplifié,l'extrême complexitédes
interdépendancesimpliquéesdans les phénomènesécono-
miques « Or, si c'est là le schéma,qu'est-cedonc que la
réalité?»»
Serviceplutôtnégatif,sansdoute,maisnonmédiocreen ce
qu'il introduit la critique et l'esprit scientifiquedans ce do-
maineet de làdans toute la sociologie.
Enfinles phénomèneséconomiques,s'ils ne sont pas la
matièred'unescienceexacte,peuventprésenterdeces lois,de
la troisièmesorteplus haut indiquée,qui astreignentles phé-
nomènessansles déterminer.
Voilàl'œuvreprésentede l'économiemathématique peut-
on en attendre davantage? « Un temps viendra-t-il où une
économievraimentscientifiques'imposeraà tousles esprits,
commec'est le cas aujourd'huipourla géométrie,et fixerala
valeurde tout objet d'échangede façon tellement indiscu-
table que non seulementaucune intelligencu,mais même
aucune volonté n'essaierade se soustraireaux décisionsde
sa logique? » Unedéfinitionde la valeurintrinsèqueet abso-
lue est impossible,et môme s'il en était trouvéune que la
sciencedéctarât./M~e, « il n'est pointde raisonnementsmathé-
matiquesqui puissentimposer la notionde justice socialeà
ceux qui ne la possèdentpasoitqui refusentde s'y plier ».
Maisles esprits rebellesaux argumentsthéoriquess'émeu-
vent souvent devant les conséquencesréellesconstatées or,
pour apprécierces conséquences(par exemple,pourdécider,
par uneanalysedu mouvementgénéraldes fortunesdans un
pays,pendantun certain temps, si le capitals'accroîtindéfi-
nimentpar l'intérêt,ou sil'influencede l'intérêt est contreba- •
lancéepar descausescontraires),remploideméthodesmathe-
mathiquesseul peutapporterquelquecertitude.
– L'étudede M.Paiulevëtouche,on le voit,à des
questions
essentielles pour l'économie mathématiqueet même pour
82î l'aNNÉHsOCluLOlilyUK.
llnHMUOa
tt\n
toutetu Biiîa«iAB
science AnnikAnnî/rna Vn it/vn»fAl
!»!•*>
•>I r\t\
économique. En nous félicitant de la posséder
telle qu'elle nous est donnée, nous ne pouvous pas cependant
ne pas regretter un peu qu'elle ait été faite à propos d'une
oeuvre qui a une importance historique suas doute, mais qui
n'est pas le plus résistaut des travaux classiques de l'économie
mathématique, et qui, en tout cas. datant bientôt de quarante
années, ne présente pas exactement les positions prises par
les représentants actuels sérieux de cette méthode. Bien que
M. l'aiulevé se réfère en plusieurs endroits à certains de ces
autres travaux, il est pourtant manifeste(et cela était forcé en
«fïetjque J'occasiou de son étude eu a conditionné fortement
l'élaboration et ce sont ces défauts du cadre qui nous paraî-
tront respousubles si la discussion qui s'y trouve instituée
n'apparutt pas aussi probante et serrée que nous l'aurions
obtenue d'au tel auteur sur des questions mieux posées.
Il. Ainsi les objections préjudicielles de M. Pain levé à
la possibilité d'une mesure objective de la valeur économique
nous paraissent porter contre uue conception de la valeur
qui, si elle n'est pas entièrement éliminée par Jevons, nous
parait devoir l'être tout à fait de la théorie économique
actuelle. Étant donné un lot de poissons et un gramme d'or,
unité de valeur, personne, nous dit M. Painlevé, pourra-t-il,
sur le seul examen de l'objet, connaissant cet objet, l'unité
de valeur et rien d'autre, nous dire quelle est la valeur de ce
lot de poissons à l'instant considéré ? Mais, prenons une
comparaison appelons valeur nutritive d'un aliment, par
exempte, le rapport de la quantité assimilée de cet aliment
par un organisme à la quantité ingurgitée soit la valeur
nutritive d'un gramme de Imbu!l'unité de valeur nutritive
et soit à mesurer la valeur nutritive d'une certaine quantité
d'un aliment quelconque, par exemple, d'un lot de poissons
niera-ton que cette valeur nutritive soit une grandeur objec-
tivement mesurable par cette seule raison que personne, sur
le seul examen de l'objet, connaissant cet objet, l'unité de
valeur nutritive intrinsèque et absolue et rien d'ttutiv, ne
pourra dire quelle est la valeur nutritive de ce lot de jiois-
sous ? (Car il est bien évident (lue notre valeur nutritive
dépendant, par définition, du fonctionnement d'un organisme
ne peut être déterminée endehors de tout organisme, et valoirr
identique pour tout organisme, présent, passé ou possible; et
l'on peut dire même qu'ainsi posée la question de la mesure
de cette valeur nutritive n'a pas de sens.)
KTtjmsSQKNKHA1.KS.
TB&ITK* XO3

Il eu va de même pour la valeur économique. Sans doute


les premiers économistes,dans Içur désir d'atteindre ù de
l'objectif, et faute de voir comment cette notion pouvait avoir •
eu elle-mêmeson objectivité véritable, ont pu être tentés de
rattacher lit valeur économique des choses à quelque pro-
priété de ces choses, existante et reconnaissable daus ces
choses elles-mêmes; et il persiste encore, croyons- nous, des
restes de cette tendance dans la théorie la plus courante
aujourd'hui de la valeur (c'eli est justement, à nos yeux, un
des vices rédhibitoires). Mais, soit qu'avec certains des
plus récentséconomistes mathématiciens, on réduise la notion
de valeur à un pur rapport d'échange ou d'échangeabilité
entre les choses, soit qoe, comme il nous semble, il faille
bien reconnaltre une réalité distincte à l'espèce même de
grandeur seloti laquelle se constituent ces rapports, c'est-à-
dire à la notion de valeur économique, et rencontrer là sans
doute un phénomène suigeneris irréductible, quoi qu'il en
soit (car cela n'importe pas à notre objet présent 1),il faut, si
nous voulons rendre explicite ce qui est toujours impliqué
dans celle notionmême de valeur économique, apercevoir et
dire nettement que cette valeur économique des choses iou
d'une chose par rapport à une autre, ou aux autres) n'est
absolument pas dans les choses auxquelles on l'applique, et
que, dans son essence, dans sa réalité même, ellene s'établit et
n'existe pas autrement que flans un esprit, dans l'esprit d'un
homme, de plusieurs hommes, d'un groupe d'hommes, etc.
Chercher uue valeur économique intrinsèque et absolue, en
enteudaut par là que cette valeur soit déterminée et déler-
minable indépendamment de tout esprit, est donc une entre-
prise contradictoire dans les termes. 11 peut, sans doute,
exister dans les choses telle ou telle propriété qui soit
uu élément dont dépende, dans l'esprit où nous lu trouvons,
cette valeur; mais ces propriétés ne soutpas la valeur. Une
mesure de la valeur économique indépendamment de tout
ésprit est chimérique, je le veux bien; mais ce n'est point
parce que la valeur ce serait pas objectivement mesurable
c'est parce que ce serait chercher à mesurer la valeur ècouo-

1. Pourlamêmeraison,nouslaissons(•jiali-uii'iil île11M1S –piiuroit.-


l'ois la <|tii*lion.|iuurlunlsi iiuporluiilo.
il>>savoir s'ilest uu non
nécessairequeretlevaleurs'incorporeilans i)tielqui'<Halon, <-Vst..ti-ilin»
ilunsune(•«rluim- mnrvIiuiKlisc c e le
dont suit rôleou un riesrôlew<l<- servir
ainsi il'iUulon
i la valeur(Cf.à cot«*gard,
Marslmll,I, p. 109;.
i
524. L'ANNKBSOCIOLGttHjl'R.18OIM90!»

mique eu dehors d'une conditionsans laquelleelle n'existe


pu»;au fond, si la valeuréconomiqueest bien ce que nous
venonsdedire, lu questionainsiposéen'a pas desens Il n'est
pas étonnant que la solutionen apparaisseimpossible.
Chimérique,dit encoreM. Painlevé, l'espoir que jamais
puisseêtre fixée pour une chose une valeur qui s'imposeà
tous les esprits. Est-ce tellementchimérique? Je n'en sais
rien. Est-ce tellement,du reste, un idéal souhaitable? Ce
n'est pas le lieude lediscuter.Car, quoiqu'il en soit, cela n'a
pas de rapport nécessaireavecla questionprésente il n'est
pas plus nécessaire,pourque la valeuréconomiquesoit une
quantité objectivement déterminée,objectivementmesurable,
qu'elle soit la.mômepour tousles esprits,qu'il n'est néces-
saire, pour que la valeurnutritiveplus haut définiesoit une
quantitéobjectivemesurable,qu'ellesoit la même pour tous
les organismes,ou qu'il u'estnécessaire,pour que là densité
soit une grandeur objectivemesurable,qu'elle soit la môme
pour tous les états d'un mêmecorpsou pour un même corps
à toutes les températures.Cen'est pas un empêchementà ce
que la valeurd'une chosesoit l'objetpossibled'une connais-
sance quantitative,que pour une mêmechose la grandeur
de celte valeurse montredifférentedansdes conditionsdiffé-
rentes, et donc notamment,si l'esprit où se détermine cette
graudeurest uuede cesconditions,qu'ellesoit différentepour
les esprits différents.Tout au contraire,ce qui serait dans
notre notion un vice préjudicieléliminant d'emblée toute
étude de science,ce seraitquedans desconditionsdifférentes
la valeur d'une mêmechosefût la môme,ou que dans des
conditionsidentiqueselle fûtdifférente.Maisquelqu'un pré-
sentet-il l'idéeet nous apporte-t-onquelqueexemple d'une
pareilleindétermination? Queprouvelecasdes deuxpécheurs
monopoleursalléguépar AI.Painlevéet le fuit que, suivant
qu'ils seront trustés ou non,le prix du poisson sera grande-
mentdifférent,sinon que l'ententeou laconcurrenceentre les
producteursest une desconditionsdont dépend le prix, et en
quoi l'influencepossiblede cette conditionfait-elleque dans
chacun de ces casla valeurdu poissonne soit pas une gran-
deur objective,susceptibled'étude scientifique? La densité
d'un gazcesse-t-elled'être unegrandeur,objet de sciencepos-
sible, parceque pour le mêmegaz ellene reste pas la même
suivant que la températureoula pressionseront différentes?
Cesserait-ellede l'être parceque, pour un même gaz, à la
ÉTUOESOÉNKRALBS.TftAftÉ» 1>25
même températureet pression, elle varierait d'un
jour à
l'autresuivanttelles autresconditionsdéterminéesou déter-
minables11?
Entre ces cas nous n'apercevonsqu'une différence si la
notionde valeurécouomiqueest bien ce qui vient d'être dit,
la nature et du phénomènelui-mêmeet de certainesde ses
conditionsapparemment essentielles est évidemmentpsycho-
logique serait-ce doncdanscelte nature psychologiqueque
nous trouverions la raison profonde,plus ou moins con-
scientedu reste,des objectionsqui sont faitesà la possibilité
d'uue sciencequantitative de ce pliéuomène?Est.ce donc
cette doubleidéeque « psychologique» et « objectif», d'une
part, et que « psychologique et « quantitatif», d'autre part,
s'excluent,que nous rencontrerionsen définitiveau fondde
ces résistanceset de cesréserves Maisc'est
peut-être jus-
tementici que cettedoubleexclusionest le moinssouteuttble.
Pour le pliéuomènelui-même,en effet,que cela
paraisse
explicable ou non, ou
primitif dérivé, c'est un lilit qu'une
représentationde valeur économiquedans notre esprit est
quantitative(c'en est même,à notre avis, la caractéristique
essentielle,et uousdirionsmêmepeut-êtrela définition.– à
la différence,par exemple,d'une représentation de valeur
éthique,essentiellementqualitative au contraire). Et cette
évaluationquantitativeest-ellesusceptibled'une constatation
objective(c'est-à-direindépendantede l'arbitraire de celui
quilit fait)? Oupourruitencorediscuterla question,tant que
cette évaluationreste à l'intérieur d'itn esprit et nous ne
disons pas que nous la résoudrionspar la négative; mais
cette discussionne nous est pas ici indipensable,
puisqu'il
n'est pas contesté (et par les économistesmathématiciens
encoremoinsquepar les autres)qu'il s'agit surtout desaisiret
d'étudiercette valeurdam l'échange.Or, l'échange
implique
1.Kst-cula variabilito
de ('«talon
scrvuuliciù la mesure(varlalillid:
la valeur<1« la choseservant«lemonnaie<|uiferaitludifliculli!? il,,
I*cest,au ileitriprès,lecasdetoutétalon,mOmc Mais
matériel c l in, miumi
ailleurs,unpeuttacherdomesurer litrurrecllun
à nppiirlcrdei-ufaitaux
mesures Tuilessuivantcet«talon(c'est l'undis des
objets index iiumlww •
2*destentatives (intéressante au point•!»•vuemalliii-
purticuliéiviiieul
malque)uni éli!faitespourdélinirune nu*tuv«linvralc de la valeur
onfonction
• ik-liaiiKc dol'UMemblu .lusnmri-lmndise.-
;et nonseulfim-nl
•lela marchan<lis«.i!laU>n).
Cf.Walsh,Ï7<e
etsurtoutecettequestion measm-emenl of theaeneml ex-
cluwge-value deim-sure la
par monnaieBour-
KUln,/.omesure dela valeurel la monnaie i;tnotrecoiiipti-
renduAnnie
Sacwl., I, p.47&-480.
536 l'aNNKH SOUfOLOfllQUfc. 1906-1909

des faits matériels, où il se traduit, qui sont très évidemment


susceptibles de constatation objective s'il a été constaté par
des observateurs dignes de foi, avec toutes les précautions
requises pour une bonne observation, que, par exemple, tel
jour, en tel lieu, Pierre a échangé avec Paul cinq livres de
pain contre un franc, le fait qu'en ce jour et ce lieu, pour les
esprits de Pierre et de Paul, en tant qu'il* jtraeéttuwnt à cet
l'ehamjê, l'unité de pain a valu '1/5de l'unité de monnaie, ou
que la valeur du pain eu monnaie se mesure pur le rapport 1/5,
est un fait à lu fois aussi purement quantitatif et aussi objec-
tif que peut l'être lu constatation faite ptir un chimiste, bon
observateur, procédant avec toutes les précautions requises,
que tel volumede tel gaz a pesé tant de grammes, et que par
suite sa densité a été de tant. M. Pain levéa raison de penser
que, pour conférer à la définition de la valeur et à la mesure
de cette valeur l'objectivité,cette définition et cette mesure
doivent pouvoir s'imposer à tous les esprits mais ce n'est
pas au sens où il le dit, c'est-à-dire en ce sens que tous les
esprits aient à accepter pour etu-mêmeacette mesure et ne
puissent avoir de la mêmechose une estimation propre diffé-
rente (que, dans notre exemple, le pain doivevaloir à jamais et
pour tout le monde0 fr. 20 la livre) c'est en ce sens que tous
les esprits aieut à recoanattre que poux tel esprit, dans le cas
donné, la valeur de cette chose était telle (dansnotre exemple,
que ce fait que, pour Pierre et pour Paul, en ce lieu, en ce
jour, etc., si ces circonstances jouent en effet le rôle de condi-
tions influentes sur ce prix. le pain ait valu 0 fr. 20 la livre,
soit pour tous les esprits un fait constant,non suspect d'avoir
été arbitrairement déformé par l'observation). ').
III. Ainsi la valeur économique des choses, pour n'être
point une propriété intrinsèque des choses, pour être essen-
tiellement une relationexistant pour un esprit ou des esprits,
ne laisse pas de nous apparaître comme une notion objective,
quantitative, mesurable. Mais, pour qu'uu phénomène donne
matière à une connaissancede science,ce n'est pas assezqu'il
soit objectivement,quantitativement observableeu lui-même:
il faut encore qu'il puisse être objectivement, et si. possible
quantitativement, étudié dans ses relations avec d'autres
phénomènes, avec des phénomènes qui le déterminent, ou
avec des phénomènesqu'il détermine. Or, sur ce second point
nous trouvons la critique de M.Paiulevé en pleine valeur elle
vaut non seulement contre Jevous, mais contre toute l'écono-
KTUOKS (iKNKH-VI.I-:s.
TBAlTlis W
~AAa-
.&
mie mathématique antérieure -II.u_-
ou ultérieure, et même, comme
nous le verrons plus loin, elle peut paraître lui accorder
encore trop. Mais, est recherchant ta raison de cette imperfec-
tion si nettement dàuoneée par M.Puiuievé,nous ajlous tâcher
de recountillre si cette critique vaut coutre toute science
économique possible faisant usage des malhématiques.
Cen'est pas faire une objection radicale a l'économie dite
mathématique que de lui deniiimler quelle e*t la proposition
établie parelle qui n'ait pas été ou ue puisse être établie et
formulée par l'économie eu langage ordinaire Car, la puis-
sance de déduire étant assurément beaucoup plus grande et
lit déduction plus, précise, plus commode peut-être et plus
sureeit langage mathématique(du moins pour les esprits aux-
quels il est familier) qu'en langage ordinaire, même si l'éco-
nomie mathématique ne nous avait pas encore apporté de
résultats propres, on ne pourrait, par eet argument de fait,
former t'avenir à cette méthode, si elle ne rencontre pus 11.11e
impossibilitéde droit.
Cen'est pas non plus à la Légitimitéen elle-mêmede la mé-
thode jusqu'ici suivie ou tentée par l'économie mathématique
qu'il nous parait y avoir lieu de s'attaquer: c'est à son succès.
Pour arriver à comprendre des phénomènes complexes et
échappant à l'expérimentation artificielle il est certaine-
ment légitime de chercher à partir de propositions abstraites
simples, soit tirées de quelques faits plus ou moins rigoureu-
sementobservés, et généralisés provisoirement par hypothèse,
soit tirées d'hypothèses faite» d'intuition, à l'essai, ou même
arbitrairement, et d'en déduire par dérivation successive, et
complication systématique croissante, les phénomènes qui
paraissent devoir en découler. Mais, quelques services que
doive rendre ce travail analytique, la valeur de science qu'il
peut prendre ne dépend ni uniquement ni surtout de l'exac-
titude et de la puissance de la déduction qu'il opère; elle
dépend essentiellenfeul de la valeur des prémisses,.d'un côté,
et de la valeur des conséquences, de l'autre. D'où part donc
et où aboutit la- déductionmathématique opérée jusqu'ici en

1.Ci'|Hiinlunt,
si lesiiiallniiimtiiniivî
sontûc»pointutileset mfriicm'rcres-
suiros.ilesttoutde môiiif l'irmi^oi|iicdos l'ConomisU's iiiatln'niutick-ns
en\-iih'im>spuissent,c omme fuitM.Marshall dansses Principes,fmnnxi
.M.l'ureloilansson Manuel,fuiivnon pas.tili'iiii'iitunrfcunutde vulga-
rUutionmais un l'xpomSsavantet intiij.'ral<lclourscience.sunsOiin-
usuk<!desiiwUiiiinuliqucg,eu rclûnuant utformules
ilviuonslruMuni; nialliû-
îles
lions appondia-s.
niulii|uu«
528 u'ANNÈS UIOMDQ»
SOCIOkOUlgUB.
économie?Ellepart de propositionshypothétiques,dénature
qualitative,et elle aboutit à des propositionsinvérifiées,et
de nature qualitativeencore ce « vêtement quantitatif >
(selonla pittoresqueet juste expressionde M. Painlevë)jeté
sur les opérationsintermédiairesnochangela nature ni de
celles-ciui de celles-là.Et c'est seulementpar ce vêtement
des opérationsintermédiairesque l'économiemathématique
(jusqu'ici)diffèredel'économiedéductivetraditionnelle.
Lefondementdes théories reste donc le même. Une auu-
lysehypothétique de facteurspsychologiquesindividuelsque
l'on supposeagir sur les phénomèneséconomiquesest tra-
duite et expriméepar des symbolesmathématiques mais
elle-mêmene devient pas pour cela mathématique,et la
natureet la valeurdes preuvesde tait qui peuventt'appuyer
n'ensontpaschangées.Par exemple,où l'économieen langage
ordinaire énonceque l'utilité d'uu bien pour un individu
décroît à mesure que la quantité dont il peut disposer
augmente,l'économiemathématiqueécrit que, si x est la
quantité,l'utilitésera ? (.r) mais elle est bieu iucapablede
déterminerle moinsdu mondecettefonction(une infinitéde
fonctions,commel'a remarquéM.Painlevé,peuventrépondre
à la seule condition posée). Non seulement l'expression
mathématiquen'ajoute aucune preuveà l'établissementde
cetterelation,maisencoreil n'est donnéaucune preuveque
cetterelationsoitsusceptibled'uneexpressionmathématique,
c'est-à-direqu'elle soit relation établieentre des éléments
l'un et l'autre quantitatifs. C'est par un postulat (et, si l'ou
voulait y prendre un argument en faveurdes résultats,ce
serait par une pétition de principe)que cette expression
mathématiqueest établie.(Cf. la phrasecaractéristiquede
M. Aupetit, Théoriede Ut monnaiep. 42, déjà citée par
MM.Gideet Rist,op.rit. p. 017,n. 2 « Nousne connaissons
pas lurelationprécisequilie la fonctionà la variable. mais
à toutevaleurde la secondenowsadmettonsque correspond
une valeurdéterminéedela première ».)
Aussitoutecettemathématiqueéconomiqueest toutà fait
incapabled'aboutirà uneapplicationde fait et à des résultats
numériques(ce qui cependant, mêmesi cette théorie n'a
pas besoindevérification,– et nouscontesteronsplus loince
1.Cf.aussila phraseessentielle
de Watt-as,justementsouIIkim'C \nir
M.Hourguin (Mesuredela valeur,
p. C.R..
30-33, Année 1.
Sociol., li.t7T.
«Je supposequ'ilexisteuniHalon
demesurrdel'ink-nsilé
desbéguin*u
ÉTUDES
(HÛiitHMJS*.
KIMT! D29

point, ferait du moins qu'elle servit à quelque chose).


M. Pareto le reconnaît en un passage uotable après avoir
établi ce qu'il considère comme une théorie générale de
l'équilibre, 11ajoute qu' « elle n'a nullement pour but d'arri-
ver à uu calcul numérique des prix » supposé môme que
soient surmontées les difficultés de fait à l'observation des
données qu'elle suppose (et c'est déjà là, selon M. Pareto,
une hypothèse absurde), comme, dans lecas relativement très
simple d'un marché de 100 individus et de 700 marchandises.
il y aurait, d'après sa théorie. 70.699 conditions à considérer
et par conséquent un systètnode 70.09!)équations à résoudre,
« cela dépasse pratiquement la puissance de l'analyse algé-
brique, et cela la dépasserait encore davantage si l'on prenait
en considération le nombre fabuleux d'équations que donne.
rait une population de quarante millionsd'individus, et quel.
ques milliers de marchandises. Si on pouvait vraiment
connaître toutes ces équations, le seul moyen accessible aux
forces humaines pour les résoudre, ce serait d'observer la
solution pratique que donne le marché» {Manuel,Ch. III, §217,
p. 233-234). Mais M. Pareto, dans cet aveu, surfait encore
l'économie mathématique en n'attribuant cette impuissance
qu'à des raisons pratiques même connaissant des valeurs de
fait pour toutes les données inscrites dans ses équations et
même pouvant résoudre ces systèmes, elle n'aboutirait pas à
y donner des solutions numériques, parce que ses équations
essentielles comprennent des fonctions, nous venons de le
voir, tout à fait indéterminées, et, nous le verrons, indétermi-
nables.
Tout cet appareil mathématique et ces systèmes d'équations
tt fabuleux ne doivent donc pas, par eux-mêmes, nous en
imposer ils n'apportent pas de vérité par eux-mêmes ils
ne valent que ce que valent les bases sur lesquelles ils sont
construits. C'est Jevons mômequi le reconnait ingénument
après avoir énonce laproposition maitresse « clef de voûte de
la Théoriede l'échange », il ajoute: « Le lecteur.. verra. je le
crois, qu'elle icette proposition] est nécessairement vraie.
ni les principesde la nature humainront été eorretinwnterpnséx
ému bit pagesprécédente»» (p. Ifi4,c'est nous qui soulignons'.
Mais ces principes sont essentiellement les mêmes que ceux
auxquels se suspend aussi l'économie npriorique actuelle
écrite en langage ordinaire: plusieurs des économistes ma-
thématiciens ont sans doute fait des efforts estimables pour
K. UUBKHP.IU. Allli'.V sooiol.. 1!IOO-l<IÛ!t. 34
B30 l'asxée sactotouiot/K.im-ms
lesréduirele plus possible,pour leur donner uneformeplus
pure,plus rigoureuse,plus simple,pour en préciser levéri-
tablesenset lesdéfendrecontredes objectionstrop rapidesi
tels autres y ont apportédes modifications de mot plusque de
fond; et tels enfinconçoiventque ces principespuissentêtre
retournés (par exemple, le principe altruiste substituéau
principeégoïste,l'éciiaùgedes sacrificessubstituéà l'échange
des utilités)et soientdéfinis à voloutôtout autres. Toutcela
n'en changepas le caractèreet ne les met pas à couvertdes
objectionsqui nous ont, à plusieurs occasionsdéjà, paru
pouvoiry être faites et que nousne reprendronsdoncpasici.
Oubiencesprincipesprétendent,au vu de quelquesexemples
hardimentérigés en règle, exprimer uue loi psychologique
géuéralemeutvraie et sur ce terrain, également à simple
iuspectiou', nous y trouvons aussitôt tant ou de si grosses
exceptiousque les résultats déduits de ces prémisses ne
peuvent à aucuu degré valoir comme une représentation
delà réalité, s'il ne nous est pas prouvé ù posteriori que la
réalité,dûment observée,en efîet les confirme.Ou biences
principesnoussout présentéscommedes hypothèseslibres,
arbitraires, si l'ou veut, mais servant ultérieurementà nous
fairecomprendreune réalité trop complexepour être abordée
directement;et dans cette positionaussiles résultatsqui en
sont dégagésne vulent évidemmentpour cette intelligence
de la réalitéque s'ils nous sont prouvésy être conformes
Detoutes façonsdonc, on le voit, nous devons passer du
pointde départ de ces théoriesà leur pointd'arrivée,et, à ce
point d'arrivée, leur demander leurs preuves qu'elles
répondentà la réalité. Pourtant, si étrange que cela puisse
paraltreà qui a pratiqué une quelconque de nos sciences
positives,cette nécessitéde contrôler par les faits les résul-
tats d'une déduction à prémisseshypothétiquesn'est pas,
mêmeen principe,reconnuepar tous les économistesmathé-
maticiens et elle n'est reconnue en fait par aucund'eux.

1.Voirnotamment lafuililessu
desréponsesfuitespurM.Marshall aux
objection» «
<(ti'ilprévoit luloi do décroissance rie l'utillliMIuiila
(«ans
parlerilncellesi|u'ilni'pn'-voit 1.p.223et suiv.Cf.tnulivs
pas)Principe*
lesréserves etexception* qu'ill'annule
sursut.hypothès-s ««henllclles
(par
l ibre
usttmplc coniMirn-ncii, Il,p.30sip.j.,218s<|<|.|.
distribution.
H.Enfichons «lesprincipes il y u aussi,romnip
psychologiques, hypo-
tliMes,îlespropositions tellesquolaloidosrendements décroissants
durit
nousnereprendrons n o» la elle*
pa.< plus discussion; nesontpasnpûciah'i;.
a lï-conufiiic
d'ailleurs, mathématique.
ÉTUD8S (1KNKIULKS,
TRAIT& &31
« Les théories ne sont que des
moyens de connattre et
d'étudier les phénomènes. De toutes façons elles doivent
être d'accord avec les faits », écrit bien M. Pareto dans ses
principes généraux de son Manuel(p. il), et plus loin « Il
est faux de croire que l'ou puisse découvrir exactement les
propriétés des faits concrets en raisonnant sur les Idées que
nous nous faisons « priori de ces faits, sans modifier ces con-
cepts en comparant « posteriori ces conséquences avec les
faits » (p. 1ty. Mais, comme il ajoute peu après
que « l'écono-
mie politique est arrivée, elle aussi, en grande partie du
moins ». « au point où les faits sont étudiés directement Il
(p. 14), il nous parait clair que nous ne nous enteudons pas;
car, dans tout son Manur! nous ne trouvons pas la moindre
confrontation de ses théories avec une constatation méthodi-
que des faits et ce n'est surtout pas dans ces aperçus fantai-
sistes et digressions d'objet et de ton extra-scientifiques qui
remplissent le chapitre intitulé « Le phénomèue économique
concret a, et dont le mieux qu'on puisse dire est qu'ils n'ont
aucun rapport avec une science économique digue de ce
nom. – De même, en principe, M. Marshall déclare
qu'en
économie politique les longues déductions poursuivies sans
« recourirà l'observation et à l'étudedirecte dela vie réelle ».
« ne pourraient pas être assez conformes à la réalité
pour
servir de guide à l'action » (I, p. 122; « elles ont besoin
qu'on les complète par l'expérience spécifique, et qu'on les
emploie eu le* conformant, H xo«trni en les subordonnant, à
une étude continuelle des faits et à une recherche continuelle
de uouvelles inductions » (I, p. 123). Mais d'abord, ce n'est
pas seulement pour les applications pratiques que cet appel
à l'expérience est ici nécessaire; c'est pour l'établissement
même de la science pure entendue au vrai sens du mot (cf.
AnnéeSociol,,X, p. S09, ?ill).Et ensuite ce
précepte même,
M. Marshall ne nous paratt en fait, dans son traité, nullement
l'appliquer. Ou bien, à la vérité, il indique que les théories
présentées sont faites dans l'hypothèse d'un certain nombre
de conditions qui ne se trouvent pas
toujours réalisées dans
la vie réelle, ce qui, pour faciliter les débuts de
l'analyse, est
jusqu'ici légitime; mais il ne rétablit nulle part toutes les
conditions différentes, présentéespar la réalité,
pour y «con-
former » et encore moins y « subordonner ses théories (cf.,
parexemple toute la théorie dusalaire,II, p. 239-368/. Ou bien
ce qui peut passer comme un contrôle par les faits, nous
l'ap-
53$ I.A.NSKK KIOMVOtt
siMMULuaiUllfi.

pellerous proprement allirmatious sans preuve, et d'ailleurs


trop vagues pour en être susceptibles (pur exemple, sans
autres preuves, II, p. 101 « Cette théorie fde l'équilibre stable
de l'offre et de lu demande normales' dans sa partie élémen-
taire, m' x'éearlepaît beaucoup des faits réels de lu vie; cet
l'mrt n'est pas assez grand pour l'empêcher de donner un
tableau très véridique. »; il ajoute du reste que lorsque
cette théorie est poussée plus loin, « jusqu'à ses conséquences
logiques les plus lointaines et les plus compliquées, elle
sort des conditions de la vie réelle »). Jevons, sans doute
parce qu'il croit <p. 73, 77, etc.) ses principes psychologiques
et l'analyse qu'il eu fait beaucoup plus proches de la réalité
du sens commun qu'ils ne le sont vraiment, ue parait pas se
gosier nettement lu question, 11conçoit (p. 78 et ailleurs) que
<<la science déductive de l'économique doive être vérifiée et
rendue utilisable par la statistique purement empirique»;
mais elle n'a pas besoin de cette vérification pour être vraie.
Ailleurs, il allègue surtout que des lois générales ne cessent
pas d'être vraies, parce que des faits complexes où leur
action est voilée, ou neutralisée, ou dominée par d'autres
influences, ne les vérifient pas (p. S9,74,etc.) et cela est bien
évident en effet mais l'impossibilité de vérifier ces préten-
dues lois générales dans la plupart des cas oiïerts par la réa-
lité n'est tout de même pas non plus une preuve qu'elles
soient, vraies; et il faudrait donc que cette vérité fût d'autant
plus solidement établie par ailleurs. Or ce n'est pas quelques
exemples de fait. présentés ici et là, à titre d'illustration,, du
reste, plus que de preuve (par exemple, variations du prix du
blé, p. '2H*2 – sans une revue préalabld de tous les faits
*2Wï),
à considérer, et sans un choix raisonné montrant dans les
faits- retenus les faits les plus représentatifs de la réalité
générale, qui peuvent sufîire à établir ainsi cette vérité. Il
serait vraiment trop commode de donner valeur de preuve
générale aux cas de fait qui se trouvent coïncider avec la
théorie hypothétique, et de nier toute valeur de coulre-argu-
ment à tous les cas qui ne s'y montrent pas conformes. –
M. Irving Fisher, dans l'ouvrage étudié plus loin. présente
une vérification de sa théorie (le l'intérêt par les faits. Mais il
estime qu'en pareil cas ou doit se déclarer satisfait si les faits
se montrent a quelque degré comptitihlt»avec lu théorie car,
la théorie se suffisant par elie-môme, il n'est pas uécessaire
d'atteiudre à une exacte conformité pour que la théorie soit
lÎTi'mcsiiiîvi!|t*u>. Tit.wïi!< $33
vraie; mais, si lu théorie était vraiment erronée, une vue
même superficielle des faits suillrait sans douteù le dénoncer.
Mais ou binu la tlmorie se siillit, et les faits lie prouvent rien,
ni pour ni contre elle; ou bien elle lie se sufïil pas. et elle a
besoiu, avant d'être tenue pour vraie, d'être moutrée cou-
forme aux faits et 11011 pas seulement compatible avec eux.
Au reste, ces confirmations ne confirment justement
pas,
nous le verrons, l'esseutiel et je propre de la théorie qu'a
pré-
setilée AI. Fisher. Et de fait, il y a peut-être en ellet des rai-
sons radicales pour qu'elle et toutes les théories de ce type
ue soient pas vôriflabless,mais nous toucherons ce
point plus
loin.
Ce que nous notons en ce moment, c'est que les économistes
mathématiciens u'hésitenl pas à donner valeur de science à
leurs constructions hypothétiques avant qu'elles soient con-
trôlées par les faits, sun» qu'elles le soient, et même alors
qu'elles sont contredites par au moins une partie des faits. Et
ce n'est pas trop dire que de dénoncerlà un scaudale métho-
dologique, dans une science qui se propose d'expliquer une
réalité. Les sciences modèies dont ils pourraient le mieux se
réclamer condamnent formellement cette attitude. Un des
meilleurs exemples qu'on puisse invoquer en faveur du droit
de partir d'hypothèses construites par l'esprit pour arriver à
une théorie explicatrice de phénomènes complexes, ingrats à
aborder directement, est certainement celui de la théorie
atomique. Mais 1° les savants qui l'ont défendue se sont
préoccupés de prouver, en fait, que les conséquences s'en
vérifiaient; et, si elle a pris le rôle que l'on sait, c'est que
toulexles conséquences qu'on pouvait en tirer par le raison-
nement se trouvaient en fait vérifiées; 2"néanmoins, malgré
que toutes les conséquences aient été vérifiées et qu'aucun
fait ne l'ait contredit, cette théorie a continué, tant que la
preuve de fait n'a pas remonté plus haut que les conséquences,
d'être tenue, même par ses partisans, coin meune hypothèse,
et a été écartée pur certains esprits; et 3" enfin, si certains
faits nouvellement étudiés paraissent eu offrir une vérifica-
tion plus directe, personne même parmi ceux
qui l'accep-
taient déjà sur ses preuves plus éloignées, n'a peusé qu'il lie
ftlt d'une grande importance pour sa valeur de science
que
cette vérification plus directe fut tentée et qu'elie réussit'. –
t Cf.Perrii»,Hteatilnmois,ilv-c.lfWiriButlttin<lela Snàéltrranrnke
1U10.
•teijUilosopliic,
tM* l'mk&& soëiai.oQiQi'K.
IWHM'JOtt
Mais (lue dire d'une théoriequi se dit vraie, alors
qu'elle
u'eu est mêmepas au premier de ces studes? Les raisons
qu'où allègue parfoispour que le cas de l'économiquesoit
différent ue tiennent pas contre cette règle essentielle de
toute sciencepositive.L'expérimentatiouartificielleest ici
impossible?iugéuiez-vous à trouver,dans la réalité, des cas
d'expériencetopique.Lesfaits sont trop complexes?nnaly-
sez-les.Ils sortentde l'hypothèse?changezvotre hypothèse;
ce sont voshypothèsesqui doivents'adapteraux fuits et lion
les faits qui ont tortde ne passe trouvertout conformesa vos
hypothèses.C'estse priverd'uudesplus puissantsfacteursde
progrès dansla théoriepureque de sedispenserde cet ellort.
Maisenfinadmettonsmêmeque tout ceteffortpour rappro-
cher de plus en plus des faitsles hypothèseset les théories,
pour les régler sur eux, ne réussisse pas ou ne réussisse
qu'imparfaitement(notonshieu, toutefois,que, comme les
économistestraditionnels,mathématiciensou non, n'ont
jamaisencoresérieusementtentécet effort,d'une façongéné-
rale et méthodique,ils uesont pas eu droit présentementde
déclarerd'avancecette réussiteimpossible).Il resteévidem-
ment,commetinpis-aller,que l'esprit rationnelessaie,par des
hypothèsesplus ou moinsarbitraires, plus ou moins artifi-
cielles,d'imaginer,concernantla quantificationéconomique
et l'échangedes choses,un jeu de phénomènesabstraitement
définis, relativementsimples, qui nous représenteruiteu
quelquesorteune vieéconomiqueintelligible,Mais,ou bien
cette constructionrationnelleest considéréecommeun idéal
arbitraire, assujetti,par conséquentà la seuleconditionque
ses démonstrationssoient logiquement(ou
mathématique-
ment) exacteset se suffisentà elles-mêmes,et à cette loide
progrès qu'elles deviennentde plus en plus complètes et
avancenttoujoursplus dans le champ des déductions pos-
sibles. Ou bien elleest considéréecommeun idéal, non réa-
lisé sans doute et mômenon pleinement réalisable, mais
sous-jacentà la réalitéconcrète,exprimant un système vir-
tuel sur lequel l'actuelse modèlede plus en plus, ou un
système partait vers lequelcette réalité tend sans peut-être
jamaisl'atteindre,et elleest, dans ce cas, assujettiea la con-
dition de s'accorder,daus son principe, avec ce qui parait
être l'essencemêmedela réalitéconsidéréeet a commeloide
progrèsque cet accordtendeà devenirde plus en plus étroit
et complet.
é7VDSiOÉNÉIUI.BS.
TIIAITÈS S3U
IV. Mômeà interpréter ainsi l'économiemathématique
actuelle, il ne nous semble pas qu'elle satisfasseni à la
secondeni mêmeà la premièrede ces conceptionspossibles
d'une économiepure hypothétique.– Rappelons,d'abord, à
quel ordre de phénomènesl'économie mathématiques'est
jusqu'iciappliquée,ordre qu'elle avoue n'avoirpas ou guère
dépassé.Concentréesur les phénomènesd'échange, et il y
aurait déjà,du secondpoint de vue, à discutersi ce sont bien
cesphénomènes, etnon plutôtdes phénomènesliésà eux,mani-
festéspar eux, mais distincts,et les expliquantplus qu'expli-
qués par eux,a savoirles phénomènesde valeur et de prix,
qui sontles phénomèneséconomiquesessentielset premiers,
l'économiemathématiquen'en a guèrejusqu'ici traité que
statiquement.M. Pareto, qui voit à l'économiepure « trois
parties, une partie statique, une partie dynamiquequi étu-
diedes équilibressuccessifs,une partie dynamiquequi étudie
le mouvementdu phénomèneéconomique» (?), ajouteaussi-
tôt « La théoriede la statique est la plus avancée ou n'a
que très peu de notionssur la théorie des équilibressucces-
sifs; sauf en ce qui concerneune théorie spéciale, celle des
crises économiques, on ne sait rien de la théoriedynamique»,
(III,§ 7et 8, p. 147-148;,Mômecommeconstructionpurement
idéologique,l'économie mathématique serait donc encore
bien iucomplète.Mais c'est une imperfectionencore plus
grave, si elle prétend à nous faire comprendre la réalité.
Toutesa constructiontourneautour d'unethéoriede l'équi-
libre mais,commenousl'avons déjà remarqué1,à quoi nous
sert cettethéorie,même supposéeparfaite,si c'est un perpé-
tuel déséquilibre,ou une succession de déséquilibres,qui
nous apparaîtêtre l'essencede la vie économiqueréelle, et
s'il apparaît rationnelet normal qu'il en soit ainsi ? C'est
Jevonslui-mêmequi va nousdire l'importanceessentiellede
la dynamique « La conditionréellede l'industrieest le mou-
vementet le changementperpétuels. Si nousvoulionsavoir
une solutioncomplètedela question danstoutesa complexité
naturelle, nous aurions à la traiter commeun prohlèmede
mouvement un problèmede dynamique» ip. 161).Pour-
quoine le fait-ildonc pas? La raison qu'il eu donne aussitôt
est unedéfaiteouun aveuassezgravepour l'économiemathé-
matique «Il serait assurémentabsurdedetraiter la question

1.Cf. MilhmU enscience


potU'tve art!iniUijmî
econom., plusbas,p. 8M.
53ii I.'ANSÊK l»l)8-|90»
SUCIOLOGtQtnC.

lu plus dillicile lorsque nous ne possédons encore qu'iutpurftii-


lement lu solution lu plus facile. » M. Murslmll (Il, p. 38i,
reimirquaiil, à propos d'une théorie non médiocre (ta théorie
de Information d'une valeur normaleou naturelle), qu'elle ne
se réaliserait dans les faits que « si les conditions générales
de la vie demeuraient stationnaires pendant un temps assez
long », recomiHit que « Le fuit que les conditions généralesde
la vie tie non! pas tstationnaii'esest la source de la plupart des
difficultés auxquels l'on se heurte quand il s'agit d'uppliquer
les doctrines économiques aux problèmes d'ordre pratique »
(p'est à-dire, dirous nous, d'appliquer la théorie aux faits
dont elle devrait nous rendre compte). Et ailleurs encore, à
propos de la théorie (non médiocre non plus) de l'équilibre
stable de l'offre et de la demande si cette théorie, lorsqu'elle
est poussée, lui parait, comme nous l'avons déjà cité plus
haut, sortir des conditions de la vie réelle, c'est que « les pro-
blèmes économiques sant imparfaitement préxeuté*lorsqu'ils
sont présentés comme des problèmes d'équilibre statique et
non comme des problèmes de développement organique »
(II, p. ICI-.
Assurément personne ne peut exiger d'une discipline nou-
velle que, pour prouver ses capacités, elle ait, du premier
coup, à atteindre la perfection et à traiter tous les problèmes
du champ qu'elle s'est assigné. Tout de même, si M. Pareto
reconnaît en 1909 que l'économie mathématique n'est guère
plus avancée eu ces problèmes dynamiques que Jevons le
constatait en 18-71, on est en droit de se demander si cet
arrêt prolongé devant eux ne cache pas une impuissance de
lesaborder vraiment du moins par les moyens dont elle afait
emploi jusqu'ici et si ces problèmes à peine entumés sont,
de l'aven même de ces économistes, les problèmes essentiels
pour l'intelligence de la vie économique réelle, on peut trou-
ver que l'économie mathématique ne nous rond pas, même à
titre hypothétique et comme construction artificielle, le ser-
vice que nous pourrions attendre d'elle, et que c'est là une
raison de plus pour nous tourner vers d'autres méthodes(nous
croyons eu effet, pour notre part, que, pour avancer vraiment
dans lit connaissance économique, il faut s'attaquer, directe-
ment et d'abord, à des variations, c'est-à-dire à lu forme dy-
namique des phénomènes, et par la voie expérimentale;.
Mais plaçons-nous sur ce terrain limité même, – extérieur
à l'essentiel de lu vie économique, – où s'est jusqu'ici canton-
Éïl'0KM;0évÈHAI.B«. THAITBS R37

uée à pou près exclusivement l'économie mathématique (lue


préteud-elle y «voir édilié eu propre? Elle établit, uousdit-
ou, les conditions d'équilibre d'uu marché libre; elle ne
résout pas le problème, mais elle le met eu équation, et, en
montrant que, les propositions établies pur son analyse étant
exprimées dans ces équations, le nombre des équations est
égal celui des Inconnues, elle démontre donc par là-môme –
et ce résultat lui suffit que, supposé connues les données
inscrites dans ces équations, la solution est déterminée; ou
encore, elle formule les dépendances mutuelles d'où ressort
cette détermination. Et M. Painlevé lui accorde ce mérite
d'avoir montré ainsi l'extrême complexité des interdépen-
dances impliquées dans le phénomène économique môme
hypftVhôUquement let arbitrairement) simplifié.
Est-il vraiment sûr qu'elle nous rende ce service, – tout
négatif qu'il soit et eu tout cas peu fécond en utilisations, –
de nous montrer que nous aurions la solution des problèmes
posés, si nous connaissions les données indiquées, que nous
ignorons? Quelle preuve avons-nous que les conditions expri-
mées dans les équations posées sont bien toutes les conditions
dont dépend le phénomène, suffisentà le déterminer? A défaut
mômed'une contre-épreuve expérimentale (qui nous est refu-
séeet qui déciderait sansappel, dans un sens ou dans l'autre),
l'analyse seulo suffit à nous mettre au moins en doute à cet
égard. Reprenons en effet, par exemple, les raisonnements
par lesquels Jevous arrive à la double équation plus haut
citée. « Supposons pour un moment, dit-il, que le rapport
d'échange soit approximativement celui de 10 livres de blé à
I livre de bœuf alors xi, pour te corps commerçant possé-
dant le blé, 10livres de blé sont moins utiles qu'une livre de
bœuf, il désirera continuer l'échange plus loin. S'il arrice
que l'autre corps possédant le bœuf trouve qu'une livre est
moins utile que 10livres de blé, ce corps sera aussi désireux
de poursuivre l'échange, ». Mais, s'il n'unir? prtxque le
corps
possesseur du bœuf en fasse cette appréciation, (lue se pas-
sera-t-il ? « L'échange, poursuit Jevous, se continuera jusqu'à
ce que chacune des deux parties ait obtenu tout le profit pos-
sible, et si ou échangeait davantage il en résulterait une perle
d'utilité » (p. 104). Cela n'impliquet-il pas que le taux jus-
qu'où chacuuedes deux parties désirerait continuer rechange,
c'est-à-dire au delà duquel elle y trouverait une diminution
d'utilité, soit le môme pour les deux parties? Auparavant
538 L'ANNÉK 1900-190»
SOCtOLUUlQUti.

même,811est vraique,pour se poursuivreou pour s'arrêter,


il faut bien que l'échangeait déjà commeueé,cela n'im-
plique-til pas que les estimations initiales respectivesse
soient trouvées telles que cet échangeait pu commencer?
Mais,sur cesdeuxpoints,est-il doue nécessairequ'il eu soit
ainsi? Rien dans les prémissesde la théorie ne nous oblige
à l'admettre, même par hypothèse(car, si nousne l'admettions
que par hypothèse,la théorie serait-elleautre chosequ'une
tautologie?).Lorsqu'ilenest aiusi.à quelleconditionse fait-il
donc qu'il eu soit ainsi? – De même, chez M.Pareto étu-
diant les « conditionsd'équilibre par rapport aux goûts ».
« Si les obstaclesdu premiergenre donnentsur ce chemin
un point au delàduquel on lie peut aller, et si les positions
qui précèdent. sont moins avantageusespour l'individu,il
ira évidemmentjusqu'àce point, et là il s'arrêtera »
(p.183).
Maissi les obstaclesne donnentpas un tel point, cela n'arri-
vera pas; à quellesconditions se produit-il donc qu'ils le
donnent? Et dansla théoriede « l'équilibre des goûts et des
obstables» « Si deux individus coutracteut ensemble,les
points où se coupentles lignes des échangesde ces individus
constituentdes pointsd'équilibre » (p. 189).Maisest-il donc
forcéque ces lignesse coupent? Certainementnon. Alorsde
quelles conditionsdépend-il qu'elles se coupent? De
même encore, M. Marshall,dans sa représentationgéomé-
trique de l'équilibre de l'oflre et de la demande (II, p. 36),
impliqueque lesdeux courbesde l'offreet de la demandese
coupent, mais ne nous prouve ni qu'il est nécessaireni de
quelles conditionsil dépend qu'elles se coupent en effet.
--Dira-t-ouque,s'il enest autrement, il n'y aura pas échange,
ou tout au moinspaséchangeen équilibre, et .que, par suite,
cela est en dehorsde lathéorieen question?Mais,si elle peut
bien, en effet,ne pas avoirà étudier ce par quoi se produit le
déséquilibre,une théoriede l'équilibre peut-elle doncse dis-
penser d'étudier ce sans quoi ne se produit pas l'équilibre?
On le voit, ce que l'économie mathématique
jusqu'ici
appelle déterminerles conditionsde l'équilibrede l'échange,
ce n'est pas, commeon pourrait le croire, déterminer les
phénomènesdont il dépend que cet équilibre soit jiossibk,
encoremoinsdéterminerles phénomènesdont il dépendque
cet équilibre se produise c'est simplementéuoucer des
phé-
nomènesdonton puissedire qu'ils se trouvent réalisés là où
cet équilibrese trouveréaliséet que là où ils se trouventréa-
KTCDKS (iK.Kll/U.KS, TltAlTlU MU

liséa cet équilibre


imlillt*a (ia ttiS\tlim t*Atfhlir>A • iiitlunmn»!
se trouve réalisé autrement #ltt itr% *« .Eli
dit, ce ne sont
ni les conditiows proprement dites ni encore moins les causa
de l'équilibre, au sens véritable que la méthodologie des
sciences positives donne à ces mots ce sont, si l'on veut, des
caractères constants, ou, au mieux, des dUmentsdela définition
de cet état d'équilibre. C'est à peu près comme si l'hydrosta-
tique appelait condition de l'équilibre d'uu liquide (au sens
soit de condition proprement dite, soit de cause) le fait que
la surface supérieure en soit horizontale
Et c'est peut-être encore trop dire il y aurait à voir, eu
effet, si ces prétendues conditions, plus encore que des carac-
tares constants, ne sont pas proprement des couxi'quenmde
l'état d'équilibre. L'état d'équilibre existe, l'équilibre est dé-
terminé, nous dit-on, lorsque le rapport des utilités finales
des biens échanges est le même chez les divers échangistes.
Maisà quoi recbnualtra-t-ou que ce rapport est le mêmechez
les divers échangistes' A ce que l'équilibre existe. Autrement
dit, supposons que l'ou veuille établir eu fait les données
inscrites dans les équations de l'équilibre y aurait* un
autre moyen d'établir la fonction qui lie inversement les
quantités échangées et les prix que de constater en fait quels
prix correspondent à telles quantités échangées (et c'est bien
ainsi eu sQet que nos auteurs eux-mêmes conçoivent le pas-
sage à des applications numériques, par exemple Jevons,
p. 222sqq.)? Mais qu'est-ce à dire sinon que c'est uu système
d'équations dont nous ne pouvons établir les données que si
nous eu connaissons les inconnues? Ne serait-ce donc pas
plutôt ces prétendues données qu'il conviendrait de prendre
pourinconnues et les quantités traitées en inconnues qui de-
vraient être les véritables données ? Mais alors nous aurions
plusd'iaconnues que d'équations, c'est-à-dire la solution du
problème, même tel qu'it est posé, ne serait pas déterminée.
De même, lorsque M. Pareto dans sa théorie de l'équilibre
au cas général i p. 224-33;exprime cet état par plusieurs con-
ditions, répétées respectivement par te nombre des individus
ou par le nombre des marchandises (dans un marché de

1. C'estM. Mui-ihutllui-inèini!qui nousdit du faotourpar lequelil


romtruill'essentield'unede sesthéoriesexplicativesMiéurieilu salairpj
i|Uecefacteur« ne fuitpanautrechosequemesurerlarésultaitic*causes
Iluigouvernentlessalairesdes pâtres,toutcommelesmouvements d'une
soupapede sûreté peuventmesurerlescausesinulliples(luigouvernent la
pressiondans unechaudière» (II, p. 26I|. Niaisou est ilnncla lhe"orio
propredola pressiondela vapeur,qui estcequi nousImporte avanttout? Y
540 i'axn'ér l'jou-tixra
sacrouHiujuK.

100 individus et de 700 marchandises, on aurait au total


70.M9 couditious,, et trouve un nombre d'inconnues exacte-
ment égal ù celui de ces conditions traduites en équations, ce
résultat, qui entraîne la détermination du problème, ne
serait-il pas obtenu seulement au prix d'uue omission ? Ne
manquerait-il pas encore toute une catégorie de conditions et
par conséquent d'équatioug, pourtant certainement impli-
quéesdont le raisonnement (à savoir des étj unlionsdedéfini-
tiou du prix des marchandises;, et justement cette
catégorie
d'équations ne comporterait-elle pas un nombre d'inconnues
supérieur d'une unité à celui des équalious? (Il ne suffirait
pas de répoudre que la notion de prix n'est pas essentielle la
tliéorie car c'est vainement, croyons-nous, que M.Pareto croit
n'introduire cette notion qu'une fois la théorie de l'équilibre
d'abord formulée sans elle ip. 307; non seulement il eu a fait
l'usage implicite qu'il reconnaît, et y a trouvé une inconnue
auxiliaire tort utile; mais encore il n'u en réalité ellmiué la
notion de prix de l'essence de sa théorie que parce qu'il a
transporté aux notions vagues, les « goûts » et les « obstacles»,
dont il a constitué cette essence, justement les
propriétés
caractéristiques indispensables de la notion de prix) – Et
de même encore, dans la théorie de la détermination de l'in-
térêt, Al. lrving Fisher n'aurait-il pas en réalité, comme nous
le demanderons plus loin, une inconnue de plus
que d'équa-
tions ?
Que ce doute puisse être levé ou non, qu'il le soit par de
simples artifices mathématiques, ou par des raisonnements
bien fondés sur les prémisses posées, il a, pour notre
objet
actuel, au tant de sens il siguifie que, par elle-même, la théo-
rie qui nous est donnée est bien incapable, eutre le
phéno-
mène qu'elle considère iéquilibre de l'échange, prix
d'équi-
libre, etc.) et les concomitants constants avec lesquels elle lie
dans ses équations ce phénomène, de nous démontrer si le
phénomène résulte de ces concomitants, ou bien si ce son ces
concomitants qui résultent du phénomène: elle est bien
incapable même de nous démontrer qu'il y a entre eux inter-
dépendance «en dehors, bien entendu, d'un recours à une
vérification expérimentale, dont elle se défend). Pour prendre
encore uue comparaison, cette économie mathématique nous
I. M. Piiiiil.'V.
in.li.fm-((..xv,n. i> i|un l.-s«(Tort*
|ir«|in.sà M.l'ureti»
|ir*l«nl'enmt-nn> t<!i)»|>s «Ina
i|u'ù objections>-nr|Ur piirMi; il
i-Tulicativol
fiesoltjectiommulhtinati'jiies.
ÈTUMS
HBNKHAU».
TRAITÉS 541
parait ressembler a une statique (les «orps solides, telle
qu'elle aurait pu être établie d'ans un monde où aucun des
corps à notre portée ne pourrait étre dépincé qui empêche-
rait que l'esprit humain eût, dans un tel monde, attribué la
stabilité de ces corps, par exemple, à telles propriétés chimi-
(lues, ou à une composition moléculaire hypothétique, ou à
tel ou toi autre phénomène constaté ou conçu? Nul doute
que l'ingéniosité mathématique aurait pu établir, entre ces
phénomènes et celui de Instabilité, des relat ionsquantitatives
hypothétiques où le nombre des inconnueségalerait celui des
équations et dont on nous dirait donc que, dans l'hypothèse
faite, la solution est déterminée. Qu'est-ce que prouverait
toute cette construction en l'air? Et en quoi, même si elle
était, eu elle-même, logiquement et mathématiquement incri-
liquable, nous aiderait-elle (car il faut bien enfin revenir ce
« test » essentiel d'une connaissance à
objet positif) à l'intel-
ligencede la réalité à laquelle ses hypothèses s'appliquent?
V. Ce n'est donc point, en définitive, et nous
rejoignons
ainsi, on le voit, notre point de départ, – d'arguments ma-
thématiques que dépend ou- peut dépendre la valeur de l'éco-
nomie mathématique c'est de preuves de fait ou de droit
que les relations auxquelles elle donne uneforme et applique
un traitement mathématique sont bien, en
principe et au
fond, dans le sens de la réalité qu'elles veulent uous permettre
de comprendre, ou, tout au moins, de nous figurer sous une
forme intelligible. Or, arrivés à ce point, nous retrouvons lit
critique fondamentale que nous avons déjà opposée à l'éco-
nomie traditionnelle en langage ordinaire. et qui s'adresse
pa-
reillement à l'économie mathématique jusqu'ici, puisque celle-
ci implique le môme postulat. C'est qu'eu voulant
expliquer
les phénomènes économiques essentiels (de prix.de
marché,
d'échange, etc.) par des phénomènes élémentaires de psycho-
logie Individuelle, traités plus qualitativement par l'une,
plus quauti ta tivementparl'autre, l'une et l'autrevont àcontre-
wiwde la réalité., parce que ces phénomènes de
psychologie
individuelle sont, au vrai, dépendants et dérivés de ces
phé-
nomèneséconomiques essentiels que Ton veut
expliquer ou
déterminer par eux. Sans doute M. Marshall il, p. lir» re-
connaît que « de même qu'une cathédrale est quelque chose
de plus que les pierres dont elle est faite. de même la vie de
la société est quelque chose de
plus que la somme des vies
des individus ». Mais, avec cette indétermination de
pensée
542 L'ANNÉE 1WHM9O0
SOCIOMMIIQCR.

que nousavonsnotéecommela caractéristiquede cet auteur,


il ajoute aussitôt « IIest vrai que l'actiondu tout est for-
méede l'action de ses parties constituanteset que, dans la
plupart des problèmeséconomiques, le meilleur point de
départ se trouve dans les mobilesqui affectentl'individu,
considéré110npas certes commeatome isolé, mais comme
membrede quelquemétier particulier ou de quelquegroupe
industriel» et il poursuit en reconnaissantà l'écouomistele
devoird'étudieraussi> les mobilesserattachantà l'appropria-
UoiicoHective des bienset à la poursuitecollectivede certains
butsimportants», ce qui est uuetoutautrequestion.S'il déclare
(1.p. 110)que l'écouomiste« étudieles actionsdes individus,
mais au point de vue de la viesociale plutôt qu'à celuide la
vie individuelle*cela veut dire simplementqu' il ne se
préoccupeque peu des particularitéspersonnellesde tempé-
rament et de caractère», qu'il considèreun hommemoyen
(d'uneclasse,d'une nation,d'unpays,d'uncertain métier),un
hommeordinaire; et cela neva pas plus loin la concession à
une position sociologiquedes questionsest touteapparente,
et la penséen'a pas pénétrédans la véritabledistinctionde
l'individuelet du social,et encoremoinsdu collectif(ausens
seulementd'une sommationd'individuel)et du socialpropre-
ment dit. Et la preuve en est que toute la théorieultérieure
netire aucun profitde ces observationsliminaireset qu'elle
nous montrera, par exemple, dans un passagecaractéris-
tique, l'auteurne voyantdans< l'histoirede l'humanité» que
« l'ensemblede l'histoiredes individus» et dans« la
produc-
tion totale pour un marchégénéral » que « le résultat des
motifsqui poussent lesproducteursindividuelsà étendreou
à restreindreleur production» (II, p. 159).Et quant à M.Pa-
reto, s'il sedétourneaussides particularitésindividuelles,ce
n'est que pour étudierune sorte d'individucourant, moyen
maisle problèmemêmeil ne l'aperçoitpas: « C'estune chose
vaine que de recherchersi les sentiments morauxont une
origine imlitUlutlfeou sociale. L'hommequi ne vit pas en
sociétéestun hommeextraordinairequi nousest à peu près,
ou plutôt qui nous estentièrementinconnu,et la sociétédis-
tincte des individusest une abstractionqui ne répondà rien
de réel » (Manuel,II, 1 83,p. 101).
Ceque nousconcevonsest tout différent,et notre critique
s'opposedonc à ces auteurs autant qu'aux autresreprésen-
tants de la tradition individualiste.Nousavonssoutenu,plus
ÊÎCDKS
civénALKS.
TltAlTÉS 843
haut, contre M.Paiulevé,que la notionde valeur économique
était bien, encoreque psychologique,une notion essentielle-
ment quantitative mais, ce phénomènepsychologiquesur-
prenant, peut-êtreuniquedesonespèce,–une opinion qui est
unequantité,– ne nous parait,en tout cas, existercommetel
que sous la forme sociale(et peut-êtrepar l'effetde son ori-
ginesociale).Dansla psychologiedes individus.-et ici nous
retrouvonsM.Painlevédanssa juste critique des quantifica-
tionsopéréespar l'économiemathématique,– le phénomène
correspondant,dansla mesureoù il peut être conçu indépen-
dant de toute actionsociale,serait phéuomèuede qualité la
quantificationqu'il nous paraitrevêtir, et qu'il revêt, en ellet,
aujourd'hui, dans nos espritsd'hommesd'une sociétéoù la
quantificationsocialedes valeursa étendu sou domaine à
presquetouteschoses,n'est pasoriginelleet constitutive,mais
dérivée,et appliquéedans la conscienceindividuellepar un
transport postérieur,et peut-êtreillusoire,des propriétésdu
phénomènecollectifau phénomèneindividuel. Imaginons,
fictivementséparées,une consciencesocialeet desconsciences
individuelles nousaurions, d'uu côté, dans la psychologie
d'un groupe, d'uue collectivité,d'une société,des
apprécia-
tionsobjectives,phénomènesquantitatifs, mesurables(elles-
mêmesen relation,plus ou moinsdirecte,avecdes quantités
matériellesde chosesphysiques; de l'autre, dans la psycho-
logiedes individus,des sentiments,des préférences,phéno-
mènesqualitatifs on transfèreinconsciemmentde ceux-làà
ceux-cila propriété d'être quantitatif,et l'ou penseensuite
expliquerles premiersparles seconds,ou môme,sautant par-
dessuscette quantificationsocialeintermédiaire,on veutéta-
blir directement des relations fonctionnellesentre ceux-ci
et les choses physiquesen relation avecles premiers, accu-
mulantainsi pétitionde principesur cerclevicieux.
Il ne fautdoncpas nousétonnerque les théoriesde l'écono-
miemathématique,tellequ'ellea été cultivéejusqu'ici,soient
demeuréesiuvérifiées c'est qu'elles n'étaient pas vraies, et
par conséquentpas vérifiables.Il est iuvérifiéet invérifiable
quele prix de marchérésultedes appréciationsquantitatives
desindividus,partiesà cemarché,parceque la véritéest
que
cesappréciationsindividuellesà formequantitative, mêmesi
ellesinfluentsur la formationdu prix considéré,dériventen
réalitéelles. mêmes d'un prix antérieur, qu'elles impliquent
donc et qu'elles n'expliquentpas, et qui ne peut lui-même
5U L'ASSKB SOCIOLuciQtUi.l'JOS-tOO!)
,&a" 1-
n'expliquer que par (les phénomènes de même espèce que
lui Jevons t'avoue iucouacieiuiueut dans
l'uualyse plus haut
citée « Supposons que le rapport d'écliaugo soit
approxi-
mativement celui de dix livres de blé à une livre de bœuf ».
Mais ce rapport approximatif d'où part son
raisonnement,
qu'est-il donc qu'un prix antérieur d'où partent et auquel
se réfèrent les dispositions individuelles desdeux
échangistes
ou corps échangistes par lesquelles il veut nous
expliquer
rétablissement d'un prix d'équilibre Et l'ou pourrait mon-
trer des implications de même sorte au départ de toutes les
théories que nous critiquons. Si cela est vrai, il n'est
pas éton-
uant, uou plus, que l'économie mathématique soit restée infé-
conde enfermée dans un cercle de corrélations
statiques in-
complètes, dont, de plus, elle intervertit le sens, elle ne peut,
une fois ainsi engagée à faux, arriver aux relations
dyua-
miques, dont les antécédences vraies, même telles que peut
les apercevoir une analyse assez éloignéedes faits, ue
peuvent
cadrer avec cette statique à l'envers.
Mais, si c'est bien là qu'il iaut voir la raison du caractère
à peu près purement négatif, comme le constate M. Pain-
levé, des résultats obtenus jusqu'ici par l'économie mathéma-
tique, cette impuissance ne nous apparaît désormais que rela-
tive et liée à une conception initiale inexacte des
phénomènes
a considérer par la science économique, et non
plus constitu-
tive et résultant de la nature même de ces phénomènes. Les
mathématiques, dans cette science économique ainsi conçue,
ont un grand rôle. Non seulement elles sont
indispensables,
comme tout le monde l'accorde, à l'étude de certains
phéno-
mènes spéciaux (assurances, etc.). Mais, au cœur même des
théories essentielles, si la valeur est bien une grandeur mesu-
rable et mesurée par le prix, les données à considérer seront
des données numériques de masse: ce n'est
pas seulement
parce que les cils particuliers seraient trop complexes ou
même susceptibles de refléter de l'arbitraire ou du
caprice
individuel, et que. comme l'indique M.Painlevé, la science ne
peut s'attaquer qu'à des phénomènes d'ensemble oi'ide telles
influences sont inexistantes ou s'annulent; c'est encore et
plutôt, nous apparalt-il maintenant, parce que c'est le seul
moyen d'atteindre d'abord les phénomènes collectifs qui sont
la condition des phénomènes individuels. El c'est eu cela
que
1. Cf.ci-desioiM
If C.n.«l<-
Turil. te junte/“,•.<
KTUDBS
()éXKIIAr.B8.
TflAlTÉS G4S
la rechercheainsiconçuedifféreraitprofondémentdes véri-
ficationsou étudesde faitsconçuespar nos économistesma-
thématiciens celles-ci prenaient lu forme statistique par
nécessitéde fait, puréeque, pour ne pas s'égarer dans la par-
ticularité arbitraire, il faut bien s'attacher d'abord aux cas
qui se répètent la recherchedansle sens que nousindiquons,
au contraire,prendla formestatistiquepar nécessitéde droit,
parce que è'est le moyend'atteindre aux phénomènespre-
miers,explicateursdesautres. Puis,ce ne sont pas seulement
les phénomènesdevaleuréconomiqueen eux-mêmesqui sont
objetsd'étudemathématique,encoreque les interrekitionsdes
diversescatégories,desdiversesespècesqui s'y distinguent,
offrent déjà à cette étude un vaste champ souvent aussi,
lesphénomènesd'autresorteaveclesquelsils soutiennentdes
relations(de conditionou de cause),sont eux-mêmesquanti-
tatifs denature, et sont égalementà prendre en donnéesde
masse.Or,l'élaborationet le traitementde ces donnéesnumé-
riquesdemassepeuventbiennecomporterquedes opérations
assezsimplesaudébutde la recherche,pour le simpledégros-
sissementdes questions, – stade que nous n'avons guère
dépassé,– et tant que les renseignementsélémentairessont,
de nature et de quantité, fort imparfaits encore mais, à
mesure que la théorieira progressantet disposerade maté-
riaux plus abondantset meilleurs, cette élaboration et ce
traitement réclamerontdes procédés mathématiquesplus
avancés, dont la mise au point n'est peut-être pas encore
accomplie.Il y a donclà tout unvastedomaineouvertà l'ap-
plicationdes mathématiquesen scienceéconomique,qu'à cette
heureonpeut diren'être pas mêmeentièrement défriché,ou
les mathématiquessontl'instrumentindispensabledu travail
théoriqueconcevable.AI.Painlevé,en ne laissantà l'économie
mathématique,tellequ'ellea été pratiquéejusqu'ici,que des
perspectivesbien pauvreset ingrates,aura sansdoutecontri-
buéà tournerdésormaisles économistesverscette utilisation
des mathématiquesen économiequi sera à la fois plus posi-
tive et plus féconde.

POLIER(Lftos).– Cours d'économie politique. Première


annéede licenceen droit. Deuxièmeannée de licence en
droit. Toulouse,Imp. Sirven, 1909et 1910,i vol., auto-
graphies, 400et 398p,, gr. in-8«.
Voiciun très notableeffortpour établir un cours d'écono-
E. IXiikiiem. Année suclol., 1906-1909. 35
840 l'année sociologique, juoo-19U9

mie politiquesur un plan nouveau,difléreutdes cadres tra-


ditionnels. A vrai dire, soussa forme actuelle(de rédaction
autographe à l'usagesurtout des élèvesde l'auteur), ce tra-
vail ne parait pas se présenter commearrêté et M. Polier
se réservesans doutede le reprendreet de le modifier,avant
d'en opérerunepublicationproprementdite. Telquel, il nous
apparatt déjà intéressant,et, en particulier,il nous intéresse
d'autant plus ici que l'auteur y a, pour une part,
adopté,
élaboré,porté-jusqu'à l'état d'un exposédidactique, la classi-
ficationque nousavonsproposéeà cetteplacedans les volumes
antérieursde l'AnnéeSociologique, à l'occasiondes livresétu-
diés, d'uue façonforcémentsommaireet partielle.
Aprèsune introductionméthodologique et historiqueet un
livre premier consacréaux notions générales,
principes et
M .
systèmeséconomiques, P., faisantrentrer la circulation
dans la productionlato sensu et éliminantde
la consommation,ne distinguecommenous quedeux l'économique
grandes

parties Production,Répartition. LaProductionest de beau-
coupla plus longuementtraitée et aussila plus élaborée.Elle
se divise elle-mêmeen trois parties Théorjegénérale de la
production.Espècesde la production.Échange.La première
se subdiviseen deuxsections Organisationde la
production
(où,après les facteursclassiques,nature, travail, capital, on
étudie les Formesde la productionet les Régimesde la
pro-
ductionen général,ceux-cidistinguésen régimes des biens,
régimesdes personnes,régimesdesexploitations),et Fonction-
nement de la production(moteursde la prodctiou, équilibre
de la productionet de la consommation;.Sousle titre donné
à la deuxièmepartie, l'auteur étudiesuccessivementdans les
trois grandesbranches,industrie, agriculture,commerce,les
formeset les régimesde la productionqui leur sont
propres.
Avecla troisièmepartie, on retrouveles questions
classiques
ordinairementrangés sous cette rubrique(monnaie,crédit,
prix, échangeinternational,politique commerciale). Le
livre troisième,qui parait écourté,comprendtrois titres Élé-
mentsde la répartition,Institutionsde la répartition, Résul-
tats de la répartition.
'L'ensemblede ce cours est une œuvreréfléchie,informée,
dont l'effortsera certainementremarqué. Nousne noterons
pas ici tous les pointsde fait ou de détail, sur lesquels nous
aurionsdes observationsà présenter.Nousne discuterons
pas
non plus l'esprit général de l'œuvre qui, à notre avis, n'est
ÈTUDKS
GKNlSlUI.es.
TIUIT|5S $47
pas assezpoalli/'etn'est pas non plus proprementsociologique
(maintiende théoriescentralesdans le type traditionnel,par
exemple,théorie de l'équilibre, explicationencore par des
phénomènespsychologiquesindividuels).Cet esprit général
nousparaîtcependantimporter à la constitutiond'uneécono-
mie sociologiqueautant et plus mômequ'une classification
nouvelledesmatières mais,cette critiquepouvants'adresser,
nous le savons,à biend'autres auteurs, nous passeronsà ce
qui caractérisedavantagele coursdeM!P. – Sur la classifica-
tion, nousn'avonspasbesoindedire quenous n'avonsjamais
eu la pédanterie de considérercomme intangibles les élé-
mentsque nous en avons donnés ici, et nousla modifierons
ou complèteronssans doute encore nous-mêmes.Maisjuste-
ment, pour contribuer un peu à ce travaild'élaborationpro-
gressive,nous feronsbrièvementquelquesremarquessur la
systématisationde M.P. – 1°L'étudescientifiqued'uneins-
titution ou d'un phénomènecomprendtoujours pournous,
après la défluitiouet description, non seulementune étude
génétique,mais encoreune étude fonctionnelle dansle pré-
sentcours,celle-cimanquepresquetoujoursencoreet l'étude
génétiqueassezsouvent.•–'2°Si nousne distinguonsque deux
grandesparties, Production,Répartition,c'est à la condition
de dissocieret d'intégrer différemmentles phénomènesfort
diversétudiéstraditionnellementsousla rubrique Échange;
sinon, le changementest de mot plus que de fond. Et aussi.
entre Productionet Répartition, nous distribuerionsautre-
me,ntcertainesmatières,et en tout casdévelopperionsl'impor-
tancede celle-ci. 8*La partie du présent cours intitulée
Espècesde la productionne contientà peuprès rien de l'objet
propreque nous donnonsici à cette section(voir ci-dessous,
sect. III) v–4°La distinctionentre Formeset Régimesde la
productionprend dansce cours une placeun peu dispropor-
tionnéeavecl'importanceque nous lui attribuons pournotre
part. Nouscroyonsqu'il y aurait avantageà ne pas en disso-
cier l'étude entre les branches industrie, agriculture, com-
merce.Formesou régimesne sont pas toujours définisavec
lesélémentsque pournotre part nous y mettons.Et quant à
la distinctioningénieuseen régimes des biens, régimesdes
personnes,régimes des exploitations, nous ne voyous pas
bienladifférenceentreceux-ciet les premiers(une foisretirée
la propriétéqui, pour nous, n'est pas un régime de la pro-
duction et ce que M. P. met sous les secondsnous parait
648 l'asske sqciomiqiqqb.imio-isoi)
ressortir à la Répartition. Mais on voit, par ces seules
observations, combien de questions intéressantes pose ou
suggère ce travail.

LANDRY(AuotwiK). – Manuel d'éoonomlque, A l'usage


des Facultés de droit. Paris, Giard et Brière, 1908,889 p.,
in-8».

une introduction où il est traité de la définition, des


Après
caractères, de l'histoire, des méthodes de l'économique, ce
manuel se divise en quatre livres Les bases psychologiques
de l'économie, Lu production, L'échange, La distribution.
Dans le premier se succèdent des chapitres intitulés Les
Besoins, Les Biens, Le Labeur, L'intérêt de l'iudividu, L'ho-
mococououiicuset l'homme réel. Le second se diviseen trois
chapitres fort étendus et dont chacunse divise en nombreuses
sections, le premier consacré ù la productionen général (fac-
teurs de la production, travail, nature, capital, loi des reude-
ments décroissants;, le secondaux «caractères de la production
dans l'époque contemporaine » icaractère mercantile,
capi-
talistique, l'entreprise, la spécialisation, la concentration,
concurrence et monopole), le troisième à une élude surtout
descriptive des « diverses branches de la production » (chasse
et pêche, agriculture, mines, industries, transports, corn-
merce, banque, assurance, services personnels et fonctions
publiques). Le livre de l'échauge se divise en deux grands
chapitres, l'un traitaut du mécanisme de J'échange (monnaie,
monnaies métalliques, fiduciaires, change;, l'autre de la valeur
(concepts de valeur, valeur d'échange, détermination de
cette valeur, monopole, concurrence, équilibre de' l'offre et
de la demande, valeur de la monnaie). Le livre IV définit le
problème de la distribution, puis traite successivement de la
rente, de l'intérêt, du profit, du salaire, de la réparlitiou des
richesses et de la population. Deuxappendices sont consacrés
l'un à la question de la propriété, l'autre à celle du commerce
international. Les indications que nous avons déjà données
dans les volumes précédents et ci-dessus même, sur le choix
et le classement de matières d'un cours d'économie
politique
nous dispenseront d'exposer ici les observations que nous
aurions à présenter sur le cadre du présent manuel. Nous
nous bornerons à examiner brièvement, au point de vue mé-
thodique, ce que l'auteur a mis dans ce cadre.
ïSTODBS
CÉNÉlUtES.
TRAITÉS 5i9
Contrairement à ce qu'on aurait pu attendre, ce manuel ne
procède pas uniquement de la méthode suivie dans les tra-
vaux antérieurs de l'auteur et que nous avons critiquée Ici
même à propos de l'un d'eux II s'y montre un effort très
notable pour éviter tout exclusivisme, pour faire à chacune
des méthodes diverses ou opposées sa part légitime, et tirer
d'elles le concours qu'elles peuvent ou doivent se donner. Il
s'y manifeste tout spécialement un souci d'information objec-
tive, une préoccupation d'introduire des données de fait
(statistiques, historiques, etc.), qui nous parait uu symptôme
intéressant à signaler de l'importance malgré tout croissante
prise aujourd'hui, en ces matières, par l'étude positive des
réalités.
Maison peut se demander si cet éclectisme satisfera per-
sonne. Cet apport de faits est considérable, mais il est juxta-
posé, sans être vraiment lié au travail d'établissement de ce
que l'auteur n tenu jusqu'ici et continue de tenir comme la
théorie proprement dite de science économique. Ces faits ne
servent nullement à fonder cette théorie tout au plus, par-
fois, en est-il tiré une confirmation, ou une application de la
théorie, laquelle, pour l'auteur, se suffit par ailleurs à elle-
même. Mais, le plus souvent, ce n'est même pas le cas, et de
ces faits ainsi simplement jetés entre des « théories », il n'ap-
paraît pas plus une péuétration de celles-ci dans ceux-là que
de ceux-là dans celles-ci. Aussi n'est-il pas étounant qu'ainsi
fournies sans utilisation véritable et comme par acquit de
conscience, ces informations ne soient pas toujours aussi
complètes, mises au point et critiquées qu'une économie posi-
tive le demanderait. Cen'est donc pas danscetto part que nous
parait résider le principal intérêt de ce manuel, mais c'est
dans la part, d'ailleurs prédominante, où il expose les cons-
tructions, dites de théorie économique, qui constituent l'ensei-
gnemeut traditionnel. Ici on sent l'auteur sur un terrain qui
lui est familier; et on y appréciera la connaissance étendue de
lalittératureéconomiqtieet lesqualités d'analyse conceptuelle,
de dialectique et de subtilité qui ont marqué ses précédents
travaux. Pour la discussion de ces prétendues théories, l'ex-
posé de M. L. nous parait être précieux eu ce qu'il en expli-
cite plus complètement qu'il n'était fait ailleurs et qu'il en
discute déjà lui-même les postulats, les raisonnements et le

1. Cf.AnnéeSociol.,l. VIII,p. 578-87.


Î>SO L'ANNliegQCIOLOaiQUK.
1900-1809

sens: par là, il nous permet d'examiner plus sûrement et plus


vite, d'abord, si les réponses faites par un partisan de ces
théoiiesaux objections aperçues sont satisfaisantes, et ensuite
si les objections aperçues sont toutes.ou les plus fortes
objec-
tions à considérer.

PINKUS (N. – Das Problem des Normalen la der


Nationaloekonomle. Beitrag zur Erforscliung der StOrun-
gen im Wirtscbaftsleben. Leipzig, Duncker u. Hurablot,
1906, X-29ÎÎp., iu-8».
En même temps qu'il était frappé par le rôle que les notions
de sain et de pathologique, d'harmonie et d'inharmonie,
d'équilibre et de rupture d'équilibre, de hou et de mauvais.
en uu mot' de normal et d'anormal jouaient, que les auteurs le
veuillent ou non, le sachent ou non, dans toutes les théories
économiques jusqu'à ce jour, M. P. l'était aussi fortement par
l'obscurité et l'indétermination réelle de cos notions, claires
et distinctes seulement d'apparence. C'est spécialement dans
la théorie des crises qu'où voit, alliés au plus haut degré, ce
rôle et cette obscurité sléri'liser l'étude de ce phénomène.
M. P. s'est proposé de dénoncer ce double défaut à travers
toutes les théories, même à prétention
d'objectivité et de
rigueur purement scientifique, qui en ont été présentées, et
de montrer ensuite comment une étude de crises
pourrait être
entreprise indépendamment de tout semblable jugement d6
valeur.
Unpremier chapitre, qui est presque tout le livre (246
pages
sur 291>,est donc une revue critique de toutes les doctrines
des crises, dans leur rapport avec la conception de la science
et avec les directions essentielles de chaque grande école et
de chaque auteur; elles y sont classées en six
groupes. Dans
un second chapitre, l'auteur rappelle la conception du normal
selon M. Durkheim etselon M. Tarde, distingue entre la notion
de loi naturelle et la notion de norme dans tes phéiiomèues
humains, et spécialement dans les phénomènes économiques.
Dans un dernier chapitre, il indique les moyens
qui lui parais-
sent permettre d'instituer de façon toute objective une étude
des perturbations économiques.
Ce travail, qui témoigne d'une connaissance assez étendue
(peut-être, il est vrai, assez souvent indirecte) de la littérature
économique, en même temps que d'un souci méthologique
OÉNlJHALE!)'.
ifrUORS TKAIT& 851
estimable, reste pourtant, au total, assez déroutant. Si
M.P. pense qu'une théorie vraimentscientifiqueet objective
des crises peut et doit s'établir en dehors de toutjugement
sur le caractère uormal ou anormalde ce phénomène,qu'il
l'établissedonc ainsi, sans tellementet si longuements'in-
quiéter de tousceuxqui avant lui, ne l'ont pas fait. D'autant
que c'est seulementsur la théorie ainsi réaliséequ'on pour-
rait juger si M.P. a écarté,autant qu'ille penseet au sensoù
il le crott, la considérationdu normal et de l'anormaldansce
problème.Quecesoit une pétition de principe,une fautede
méthode,une confusionde la pratique et de la science,que
de considérerdès l'abord le phénomènedescrisescommeun
mal,commepathologique,nousl'avonsdéjà notéIci mêmeil
y a plusieursannées.Que les doctrineséconomiquesencore
en vigueur, et spécialementles doctrinesde l'économiedite
pure, impliquent, consciemmentou non, dans leur essence
même,une positionfinalistearbitrairedes problèmesproposés
ù la théorie économique, nous l'avons indiquéà plusieurs
reprises. Mais la discussionet la conclusionde M. P. nous
paraissent être dominées et gâtées par une indistinctiou
fâcheuseentre les notionssubjectiveset arbitrairementfina-
listesdebonet demauvais,d'équilibreet dedéséquilibre,etc.,
qui sont,en effet,à bannir rigoureusementde touterecherche
de science pure proprementdite, et les notionsobjectivesde
normalet de pathologique,qu'il est pleinementlégitimede
chercherà établiret à reconnaîtredans l'étudela plusstricte-
ment positived'unematière qui lacomporte.Rumêmetemps,
et fauted'avoir bien aperçu les conditionsvéritableset suffi»
sautes d'une sciencepositive, M.P. parait en rester à une
oppositionsuperficielle,affirméeet non démontrée,entre les
phénomènesde la natureet lesphénomèneshumains,sociaux,
économiques,entrele domainede la loi naturelleet celuide
la normed'unvouloir.Etd'autrepart, toutsoneffortpourune
positionobjectivede l'étudedu phénomèneéconomiquecon-
sidérése limite aupoint de départ(ce n'est,en somme.qu'une
symptomatologiedes crises qu'il nous esquisse)et semble
trouvertout naturelun passageultérieuren un domainesub-
jectif, seul capable-de fournir les explicationsvéritables
fnulleesquissed'uneétude objectivede la causationdescrises
et de leur fonction).Si c'est là le terme de son travail,onvoit
que M.P. ne paraitpas avoir aperçu exactementni pourquo-
les théoriesantérieuressout justementcritiquables,ni pouri
B*2 L*A.Vx6k SOCIOMKUQUE. 1906-1909

reuni
quoi niet n..v.v
comment à Il.leur _.1_ f. '.4
place une théorie positive, entière-
meut objective, est possible, est à faire et suffirait.

SCHUMPETËR (Joskpu,. Das Wesen und Hauptinhalt


der theoretisehen Nationaloekonomie,
Leipzig, Duo-
eker a. liumblot, 1908, 626 p., iu-8u.

Voiciune œuvre théorique considérable qui


témoigne d'un
eflort personnel de réflexion et de renouvellement. C'est une
tentative pourcoustituer une économie pure dégagée de tous
les éléments non économiques,
politiques, philosophiques,
éthiques, comme aussi de tous les éléments historiques de
temps et de lieu. Et c'est là une tentative qui témoigne, dans
l'économie de langue allemande, d'un réveil de la
peusée
théorique, qui va plus toit) que l'activité même de l'école
autrichienne au temps de sa lloraisou n'a jamais fait. Le tra-
vail daM. Schumpetor s'apparente plutôt à ceux de l'écono-
mie dite exacteou â ceux des économistes mathématiciens les
plus solides. Maiscela nous autorise à ne pas reprendre ici,
à propos de ce travail, la critique générale
que nous avons
ci-dessus présentée contre les ambitions et les
possibilités
mêmes de cette direction
méthodologique car les particula-
rités de la constructionopérée par M. S., intéressantes du reste
en elles-mêmes (par exemple, l'élimination de
l'analyse psy-
chologique des motifs dans la notion de valeur, etc., et bien
d'autres vues ou remarques ingénieuses; laissent subsister
les traits essentiels auxquels des objections de fonds nous ont
paru pouvoir être opposées. Nous renvoyons donc à la dis-
cussion collective instituée plus haut (p. 516-845).

GH)E(Charles;et RIST (Chabub;. –Histoire des doctrine»


économiques depuis les Physiocrates jusqu'à nos jours.
Paris, Larose et Tenin, 1909, xx-760 p., iu-8".
11n'entre pas dans notre cadre de rendre
compte des ou-
vrages sur l'histoire des doctrines considérées eu elles-mêrnes
et à part des faits. Nous signalerons cependant par une brève
notice cette nouvelle histoire des doctrines
économiques, non
simplement à raison de ses mérite», maisencore parce qu'elle
nous parait, plus qu'une autre, soulever uue
question géné-
rale du point de vue même oîi nous nous
plaçons ici. Les
auteurs reconnaissent spontanément dans leur
préface, que
ÉTUDES
UÈNKRAI.Bs'.
TI1A1TKS 553
la place faite à l'histoire des doctrines dans l'enseignement
éooaomique français est excessive, alors surtout que l'histoire
des institutions et des faits n'y est à peu près pas représentée.
Pourtant ils maintiennent pour elle le droit de se constituée
en discipline distincte; si notable que leur paraisse être liu-
fluence des faits sur les doctrines, il ne leur semble pas en
effet que les faits suffiraient à en expliquer la naissance.
« Comment expliquer ainsi que le même milieu et ta même
époque aient pu engendrer à la fois des doctrines aussi hété-
rogènes et même aussi antagonistes que celles d'un J.-B. Say
et d'un Sismoudi? d'un Bastiat et d'un Proudhou? d'un
Schulze-Delitscn et d'un Marx? d'un Francis AValkeret d'un
Henry George ? » (p. vi-viij. – Cette argumentation ne nous
apparaît pas décisive. D'abord, à tous moments, parmi les
théoriciens, il côté d'esprits chez qui le travail théorique *est
une réaction directe à l'impression originale et immédiate
faite sur eux par la réalité économique de leur temps, il peut
exister des esprits qui continuent simplement la tradition
d'une doctrine antérieure, sans s'apercevoir qu'elle ne s'ap-
plique plus à la réalité deleur temps, ou des esprits qui, imbus
d'une doctrine transmise ou préjugée, méconnaissent ou ne
voient pas telle qu'elle est la réalité du temps, ou môme des
esprits incapables ou insoucieux de considérer objectivement
aucune réalité intégrale, présente ou passée, ou construisant
leurs théories sur un monde économique hypothétique qui
leur en tient lieu (au fond, n'est-ce même pas jusqu'ici le cas
ordinaire et n'est-ce pas la raison pourquoi l'histoire des doc-
trines économiques est d'un si médiocre profit pour une
science économique positive à instituer aujourd'hui ?) D'autre
part, à tous moments, une mémo réalité économique, com-
plexe comme elle l'est, d'autant plus difficileà embrasser que
les moyens d'informations étaient plus insuffisants, peut être
et surtout avoir été aperçue ou sentie par des esprits diffé-
rents de façons différentes, dont chacune est inexacte moins
parce qu'elle contient que parce qu'elle ne contient pas, et
qui, par suite, ne se contredisent ou ne s'excluent pas forcé-
ment ou encore môme, les esprits différents voient dans la
réalité les mêmes traits, les mêmes phénomènes, mais met-
tent t'accent sureux différemment et cela suffit à différencier
les doctrines. – Nous regretterons donc que les auteurs du
présent ouvrage, avec la remarquable connaissance qu'ils ont
des doctrines, l'intelligence à la fois impartiale et critique
5S4 LANNKB$(H!IOfiOQIQL'E.
ITO-1'JOU

qu'ils apportentà les comprendre et le talent d'exposition


lucideet intéressantequ'ils possèdent,n'aient pas,en même
temps,davautagerecuerchéetmarquéles relationsdechacune
des doctrinessuccessivesavecla réalitédu
tempsou d'autres
temps, avecles donnéesdont chaque doctrine disposaitou
pouvaitdisposer,avec la matièrede sciencequ'ellesont ou
n'ont pas,ont bien ou ont malélaborée. 11noussemble
qu'il
seraitplusexact ensoi,autant que plus propreà formerl'es-
prit desétudiants,d'étudieret de critiquer ainsiles doctrines
que delesconsidéreren elles-mêmes,isoléesdesfaitsqu'elles
prétendentexprimer,commesi elles étaient des phénomènes
indépendantss'expliquantpar soi-même,et quede les discu-
ter dialectiquement,soit les unes par les autres, soit par des
contre argumentsde mêmeordre présentés par le critique,
c'est-à-direencore par une oppositionentre des doctrines,
entreles doctrinesexposéesot la doctrine, avouéeou latente,
du critique lui-môme.Ce serait, de plus, le
moyende faire
entrer dans l'enseignement,sous le couvertde l'histoiredes
doctrinesqui y est si largement admise, cette histoire des
faitséconomiquesqu'ou regrettede n'y point voir.– Ladis-
cussiondes doctrines,faite par nos auteurs, ue noussatisfait
donc pas pleinement;sur plus d'uu point elle nous parait
êtretropindulgente,précisément,croyons-nous,parce
qu'elle
ne se réfèrepas assezà la réalitéqu'il s'agit d'expliquer et à
plusieurségardsnousla concevrionsautrement notamment,
onne s'en étonnera pas ici, elle ne nousparaitpas faire
la part qui convientà la positionsociologiquedes problèmes
et aux vuesqui nous semblents'ouvrirde cette positionune
foisprise.Tellequ'elleest cependant, nous préféronsencore
l'y trouverque de rencontrerun exposéoù les doctrinesse
succéderaientsimplementanalysées,sans être soumisesà un
examenlui-mêmedoctrinal. dans une indifférencede
pur
historienou de sceptique. NousloueronsaussiMM.Gideet
Rist de ne point s'être asservis à un cadre
chronologique
étroit et inintelligent,ni astreints à être superficiellement
complets,mais plutôt de s'être, de propos délibéré,limités
aux auteurs considéréscomme les plus représentatifs,et,
ceux-là,de les avoirbien étudiés,d'avoircherchéà constituer
desfamillesdedoctrines,d'avoir pris, pour situercesfamilles
danale temps,la date de leur maturité de préférenceà celle,
souventbien vaine, de leur originepremière. Et enfinnous
noteronsencore à leur éloge qu'ils ont introduitdans cette
ÉTUOKi UBNÉRALK8. TKAIîkf "wU

w.I!J.J- e_ e__v t. .,a .1~l.w.


histoireet étudié de façonfort heureuse,et avecl'importance
qu'elles méritentd'y prendre, tant certainesdoctrines trop
souventnégligéesou mal exposées(commecelle de l'écono-
mie dite mathématique,par exemple)que telles doctrines
récenteset toutes contemporaines, d'autantplusintéressantes,
les unes et les autres, à trouver Ici présentéesde la sorte,
qu'elles sont, dans les travaux originaux,plus difficilesà
atteindreou mêmeà comprendrepour le communlecteur.

BENIN!(Rodolfo). Prlnelpii di Statistioa metodolo-


gica. Torino, Unionetip.-ed. toriuese,1900,vm-35Sp.,
in-8<\
Ces principes de statistique ne s'adressentpas unique-
ment ni mêmesurtout à l'économiste ils conviendraient
plutôt, en réalité,à une propédeutiquegénéralepréparantà
toutes les recherchesqui, dans les diversesbranchesde la
sociologie,ont ou peuventavoiraffaireà desfaits de masse
numériquementobservables(notammenten sociologiemo-
rale, en morphologiesociale,etc.);et mêmeIls s'étendent,en
dehors des sciencessociales,à toutesles connaissances qui
peuventavoir à étudierdes phénomènesde cette sorte (par
exemple,biologie,météorologie,etc.). M. Beninien eflet,
avec raison,voitdans la statistiqueun procédéde recherche
et non uue disciplineparticularisée.Il en donneune défini-
tion touteformellequi lui permetdoncd'être applicableaux
matièresles plus différentes,et en fait M. B. prendra ses
exempleset indiquedesapplicationsdans desdomainestrès
variés.Par statistique,il entend« une formed'observationet
d'inductionappropriée l'étude quantitativedes phénomènes
qui se présenteutcommepluralitéou massede cas, suscep-
tible de variersaus règleassignableen touterigueur ». Dans
uneétudegénéralepréliminaire,il détermineassezheureu-
sementdes notionsessentielles(par exemplenotionde type
dans unevariétédecas, deconstantedansune variabilité,de
probabledans de l'accidentel,de cause,d'uniformitéempi-
rique, de loi, d'interdépendance,de fonction,etc.), puis en
montrele caractèrecommebranchede la logique, comme
forme d'observation,commeformede raisonnement,en un
mot commemode particulierde la méthodeinductive,et il
distinguedonc de la démographie, oudesdescriptionsstatis-
tiques des phénomènessociaux,la « statistique méthodolo-
550 l'aks&k isocnaamouK.ibumso»

gique » qui est l'objet de ce livre. Dans l'étude spéciale ainsi


déterminée sont faites deux sections; l'une, trttitant, en sept
chapitres étendus, de la statistique comme forme d'observa-
tion (p. 37-280), l'autre, en trois chapitres, de la statistique
comme forme d'induction (p. 295-317). Nous ne pouvons ici
que signaler brièvement les matières de ces chapitres
(livre 1) relevé des données, tabulation et critique, moyens de
simplification et de représentation (moyennes, rapports, dia-
grammes, interpolations, corrélations..), éléments do calcul
des combinaisons et de calcul des probabilités, nombres-
indices, tables dérivées, comparaisons; (livre II) indices et
traitement des causes et application des méthodes distinguées
par Mill, emploi des hypothèses. – L'exposition est assez
technique, en particulier suppose chez le lecteur une bonne
culture mathématique élémentaire; mais est claire et ordon-
née et certainement ce traité sera étudié avec fruit par ceux
qui voudront s'avancer dans lu connaissance et le maniement
de ces procédés spéciaux.

ASHLKY(W.-J.). The présent position of politioal eoonomy.


Econ.J., déc. 1907,p. 407-90(Important exposéde la position
méthodologiqueactuellede l'auteur).
HIST(Charlrx). – économie optimiste et économie soienti-
fique, R. de métaph.et (lemor.,nov. 1907(très intéressant).
SIMJAND (Khançois).– La méthode positive en science écono-
mique. Rev.de métaplt.et de morale,nov. 1908,p. 889-90*(Pré-
sentesousune formecondenséeles directionsd'unetelle méthode,
par oppositionà cellesde l'Économie traditionnelle).
PARETO(V.). – L'économie et la sociologie au point de vue
scientifique. Hirista di scienza,n« 1.
SI'AN.N(Otiimar). – Der logiaohe Aufbauder Nationaloekono-
mie und ihr Verhiiltniszur Psychologieund se»den Nutunvis-
senschaflen..Z. f. il.ges. StaaUwias.,1908,1, p. 1-57(Dissertation
à forme scolaslique, maisnon sans intérêt).
STEPIII.WEK. Zur Methode der Volkawlrtsohaftslehre
{Volksu-.Abirandl.d. bud. Hocliscliulen; Kurlsrulie,Hiuun, 1907,
iv-128p., in-8u.
UKSCIIITZ(V). Untersuohungen ûber die Methodologieder
Wirtsohaftswissensahalt. Leipzig,Hirscbfcld1909, 94p. in-»*
(Fragment.Méthode« exacte»,historique,empirique,etc.Critique).
KTUOBS
DÉNliBALRS.
ÏRAITÉS 5S7
STOUMA.VN (Hruow). Der Zweek la der Volkswirtsohaft.
Die VolkswlrtBohaftals Boztal-ethisobesZweokgebilde- Ver.
such einer so/Jal-organischenBegrûndungder Volkswirlsciwfts-
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Die Erttwiokelung der deutaohen Volkswlrtsohaftslahre im
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MOOKK (IlKNiirt.). – The statistical complément of pure eco-
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11. SY8TBMK8
ÎÏCONOMIQCKS
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Grieohenland. Zur Theorie und Geschichte der anti-
ken Statitwirtsohaft. Berlin, Puttktimmer, 1907,iu.8°,
98pages.
L'étudecomprenddeux parties. La premièreest de bonne
philologie,méritoireet profitable c'est l'élucidationconti-
nue et aussi complèteque possible d'un texte mal établi,
toujoursconcis,souventtrès obscur, le secondlivredes Éco-
nomiquesdu pseudo-Aristote.où sont rassemblésun assez
grand nombrede faits illustrant la théoriede la cité mercan-
tile. La secondepartie se subdivise d'abord l'auteur essaye
de définirobjectivementles faits en question ensuite il les
rattacheà leurs conditionséconomico-sociales.
D'aprèsle pseudo-Aristote,on voit que la cité s'enrichiten
vendantdesdomaines,en se livrant à des entreprises indus-
trielles et commerciales(pour des raisonssocialesassezpro-
fondes, ces entreprises sont généralement passagères, se
rapportentà la vente, non à la production, et affectentla
forme du monopole);la cité intervient encore dans la vie
économiqueen assumant la charge des approvisionnements
fruinentaires quant aux emprunts, leur rôle est très secon-
daire, ou plutôt ils se présentent essentiellementsous la
forme de l'empruntforcé la notion du crédit de l'Ktat est
absente. Viennentensuite des faits relatifsà la toute-pats-
îtôo l ses socioioaigiîK. iooo-iwj

sance de la cité en matière de monnaie à à t'influencedes


conditions du crédit sur la vie économique (pas de commerce
d'argent au sens moderne du mot); aux impôts; au rôle
essentiel du pillage comme moyen d'enrichissement.
Le sous-titre indique assez justement ce que veut être cette
étude. Immédiatement, elle ne vise qu'à interpréter un
groupe de faits particuliers; mais ces faits illustrent une
théorie fondamentale dans la psychologie
économique des
anciens Grecs méthodiquement analysés à travers des con-
cepts définis, ils peuvent fournir à la sociologie des données
plus positives et plus utilisables que tels tableaux d'histoire
économique qui n'ont de général que l'étiquette. L'auteur,
qui d'ailleurs procède pour une part de Sombart, a bien le
sentiment que la science n'est pas lu pure reproduction d'un
donné entendu à la façon des historiens, c'est-à-dire au foud
.comme subjectif ce sout des réalités qu'il veut étudier, un
ordre de phénomènes impliquant des lois générales et non
singulières (d'où certains rapprochements avec les faits éco-
nomiques d'autres milieux, p. 81, SC, 89, 04, 8R). Et comme
la notion positive d'une réalité suppose vraiment une élabo-
ration conceptuelle, il croit légitime de définir des
types. De
là sa position dans le différend Biicher-E. Meyer(voir notam-
ment l'Exeum. Chosecurieuse, en effet, à voir partout du sin-
gulier, les purs historieusflnissent par mettre tout sur le méme
plau Beloch et, après lui, E. Meyer ont prétendu qu'il
n'y avait aucune différence fondamentale entre l'économie
des anciens et la moderne; mais peut-être Bûcher leur avait-
il donné trop beau jeu en définissant la première, à la suite
de Rodbertus, une ttaustnrtxchaft. Il convient de
distinguer
il n'y a pas, dans l'antiquité, de production en
grand (la loi du
rendement croissant ne joue pas) il n'y a en somme qu'une
Hausindmtiï* mais on produit pour le dehors (p. 97-98) le
commerce est à la fois considérable et spécialisé
(p. 77). On
regrettera que l'auteur se soit arrêté à mi-chemin d'analyse
il est naturellement opposé à l'idée qu'il ait eu en
y Grèce,
faute des conditions générales du crédit, nue
VotkstrirUchaft
(p. 87, n. 2) mais ce n'est pas non plus une économie urbaine
qu'il décrit. Peut-être serait-ce le lieu de se souvenir que la
distinction, familière aux lecteurs de l'Année, entre la forme
et le régime de la production s'applique au commerce autant
qu'à l'industrie (AnnéeSociologique,t. IV, p. 514). De vrai le
concept de WirUchaft n'est pas assez défini et pas davantage
SVSTKUKB
ÉCONOMIQUES BÔi
celui de kapUalistiscliesDenkenque l'auteur appliqueaux
Grecs, car la mentalité capitaliste se spécifiesuivant les
typeséconomiques.
L'étudede M. R. n'eu restepas moins,dans touteune par-
tie, une bonneet solide analyse nous regretteronsqu'elle
perdeensuitele contactdes réalités et deviennefranchement
idéologique.Peut-être qu'en est responsablel'Kntwiekhtng
il semble que le mot induiseen scolastique;toujoursest-il
que M.H. explique le « développementhistoriquedel'écono-
mieurbaineantique >>parfaction combinéede deuxfacteurs
qui ressemblentfort à des entités.Thèse la cité commeuni-
té économiquefermée (l'idéal de Antithèse le
commerceinterurbain (psychologiecapitaliste).Et il u'y a <
pas eu de synthèse, en d'autrestermesil n'y a eu qu'anarchie
et perversion. Sans nous demanderce qu'il entred'a priori
dans ce pessimisme, nous pourrions faire observerque le
vrai problèmen'est guère examiné.Levrai problèmeétait de
rechercherquelle réalité socialetraduisent l'idéeet le fait de
la cité mercantile pourquoila cité s'est appropriéen quel-
que sortela psychologiecommerçantedu Grecancien(désir
du gain par à.coups, par bonnefortune).De ce phénomène,
il aurait falludéfinir la condition,puis déterminerla cause.
Quantà la condition, nous sommesassez frappésde voir que
les faits (dramatiques) récoltés par le pseudo-Aristoteont
souventlieu dans des colonies,notamment d'AsieMineure.
ou à la faveur de certains ébranlementssociaux il semble
que ce machiavélismeou ce cynismedont la citéfait preuve
par momentssuppose,dansla psychologiecollective,unecer-
taine libertéde conception,un certain libertinageintellectuel
commepouvaientles connaîtredes communautésdétachées
pour une part de la tradition. Quant à la cause, elle doitêtre
cherchéedansla structure de la cité, groupementqui necom-
porteguère un organe défini de lit consciencecommune,où
il y a encorepeu d'Étal (par suite, pas de crédit d'État, une
actionde l'État discontinue),dont l'unité, commecellede la
famille ("cf.le mot ontovojxU) .est perçue commeconcrète
(d'où l'idéal de rayïipxsw, d'où l'idée de satisfaire aux
besoinscollectifsdu momentpar une action collectiveimmé-
diate) on peut dire qu'il n'y a pas une pensée propre de
l'État, pas plus dans l'économieque dans le droit pour
autant qu'est pensée une autorité publique, la psychologie
qu'elle manifestedoit reproduire un modèle extérieur. –
K. I)viikiie!M.– A nnw socioi., 1900-1909. 36
603 l'année soutouKuaug.««(Matin
En tout cas, ce n'est pas sur l'idée traditionnelle de l'opposi-
tion entre « l'Élut et l'individu », mais sur l'analyse d'une
notion encore incertaine, que devra se fonder toute contribu-
tion à la théorie de l'action de l'État sur la vie économique.
L. G.
80ML0 (Félix). 'Der Gûterverkehr in der TJrgesell-
sohaft (Instituts Solvay. Travaux de l'Institut de sociolo-
gie. Noteset mémoires, fasc. ~8~.Bruxelles, Mischet Throu,
1909,viit-i8(5p., gr. iu-8«.
L'auteur a préconisé, dans un ouvrage de méthodologie
antérieure1, la constitution d'une sociologie descriptive, des-
tinée à préparer la matière d'une science d'élaboration. Dans
le présent ouvrage, il a pris à tache de mettre ce principe en
pratique et à vrai dire il a choisi au très bon exemple en
réuuissaut, sur le phénomène que l'économie traditionnelle
prend comme centre de ses théories, présume simple et
naturel et croit connaître, une masse de faits, observés dans
les sociétés inférieures, qui suffisent à en moulrer tout l'in-
connu et toute la complexité d'origine. A vrai dire, le
phéno-
mène étudié par M. S. est plus large que l'échange entendu
au sous économique,qui n'eu est qu'une des formes; et, pour
ne pas attribuer une prédominance ni à cette forme ni à une
autre du passage des biens d'un individu à un autre individu,
d'un groupe à un autre groupe, et surtout pour ne pas attri-
buer ces formes une prédominance sur le fait même de la
circulation des biens, M. S. a entendu étudier tous les faits,
qu'ils soient de caractère économique, ou qu'ils soient reli-
gieux, traditionnels, etc., où un bien se trouve passer d'une
personne ou collectivité à une autre. Les Australiens lui four-
uisseut l'élude la plus étendue (p. 13-67), grâce au nombreet
à la qualité des informations eluographiques que nous possé-
dons sur eux. Puis il pisse en revue les Tasmanieus, Uoto-
kudes, Fuégiens, Andamaus, Negritos, Boschimans, Indiens
Séris, Weddahs, et aussi jette un coup d'ujil sur les sociétés
préhistoriques européenneset quelques-unes un peu plus éle-
vées (p. 09-18-1).Mais M. S. ne s'en tient pas à ce travail de
description, d'inventaire et de classification de faits. 11est bien
amené à dégager des résultats, et à aborder le terrain de la

i. 7.ur (Irttndungeiner beaclll'eibe1llien


Soiioloaie.Borliii-U'iiizin
Rutirliild,1900.
«ÏSTÔBKS
JJCOHOIHQUES BG»

théorie (positive bien entendu), au moins à titre négatif


assez vivement môme, il oppose à certaines thèses bien con-
nues de Uiichor (sur la forme originairement individuelle de
l'économie, de la recherche de nourriture, sur l'absence pri-
mitive.d'échange économique proprement dit, au moins dans
l'intérieur de In tribu, etc.) des arguments qui ne sont peut-
être pas décisifs contre elles (Cf. notamment la réponse d'un
disciplede B1Ui\iW,Zeilxeh.f.d.gex.StaiHtwit., 19-10, 1, p. 178-
182 1. Mais,sansentrer dans le détail de cette discussion, nous
en retiendrons seulement la preuve fournie par l'exemple de
M. S. lui-même, qu'une pure description ne se suffît pas à
elle-même et que même une recherche de faits, si elle veut
être méthodique, suppose une certaine position de question,
et la position de question préjuge, dans une certaine mesure,
des solutious qu'on peut trouver ensuite. F. S.

GERNET(L. L'approvisionnement d'Athènes en blé


au Vet au VI" siècles. (Universitéde Paris. Bibliothèque
de la Facultédes lettres. XXV,Mélangesd'histoire ancienne;.
Paris, Alcao, 1909. pp. 271-391
Par son intérêt de méthode et la qualité de ses résultats, ce
travail dépasse la limitation de son titre. Ce n'est pas seule-
ment que les données, notamment les évaluations de popula-
tion et de consommation, y sont élaborées par une discussion
érudite et critique, qui reprend à leurs hases les opinions
couramment admises et souvent aboutit à les réformer. C'est
surtout, à notre point de vue, que l'étude ne se contente pas,
comme beaucoup de travaux dits d'érudition, d'être une
simple description des faits, accompagnée tout au plus d'in-
terprétations classiques superficielles, mais soupçonne et
s'efforce de dégager comme causes explicatives du service
économiqueétudié, tel qu'il s'est préseutéen fait, une certaine
sorte d'états psychologiques collectifs, un certain ensemble
û'« idées complexes et spéciales que les Athéuiens se sont
faites du rôle de leur cité dans l'approvisionnement ».
F. S.
OLIVER(E. H.). – Roman économie conditions to the
oloseof the Repittblie. The Uuiversityof Toronto
Library
1907, in-80, 200 pages.
C'est un tableau de l'économie romaine jusqu'à la fin de la
&04 L'ANNÉE SOCIOLOUIQUB.
1900-190»
AA.itl~ '~W .f_
République.L'étude est diviséeeu trois parties1" Époque
royale.L'auteurnote1*« écouomie indépendantedu fundus»,
correspondantà la phase de l'économiefamiliale;dès cette
époque,il y a ausside l'industrie(particulièrementtravail du
bronze et poterie). t" Périodede lutte (jusqu'aux.guerres
puniques),de deux siècleset demi. 3»Desdébutsde l'expan-
sion méditerranéennejusqu'à la fin de la Hépublique.C'est
de beaucoupla partie la plus développée a) conditionséco-
nomiquesgénérales(progrèsde la grande propriété,substi-
tution de la pAtureà la culture, etc.) I»)agriculture (au
point devue technique);c) industrieet commerce;d) admi-
nistration et finances.La conclusionexposeque la richesse
n'est venueà Romed'aucunesourceproprement
économique,
maisdel'exploitationdes provinces.
Riende biennouveaudans cet ouvrage.Maison regrettera
surtout que la matière proprementhistoriquey soit si
peu
élaborée aucun effort d'analyse,commeen témoignentles
seulesdivisionsde la troisième partie la
techniqueagri-
cole sousle nomd' « agriculture» est misesur le mêmeplan
le
que régimeet la formede la production(obscurémentcon-
çus) dans « l'industrieet le commerce». M.0. parait vouloir
rester étrangerà toute préoccupatiouscientifique ni il ne
chercheà définiret à classer (son analyse des « conditions
économiquesgénérales» est insulHsanle,la notionde « grande
propriété » n'étant pas serrée d'assez près, et l'idée tra-
ditionnelle de la disparition de la petite culture étant
trop
facilementacceptée) ui il ne chercheà situer et à fonder la
psychologieéconomiquequ'il constate (sinon, très briève-
ment, dans son exposé, d'ailleurscontestable,de l'économie
du funilm).Au vrai, cet ouvrageest encore
plus purement
descriptif que ne le sont généralementceux de son espèce
l'auteur en resteà la notiontrès vagued'une histoireécono-
mico-socialedont les phases se trouvent coïncideravec les
époquesde l'histoiregénérale c'est ainsi qu'il se donnebien
du mal (p. 27) pour arrêter à la chute de la
royauté une
D es
premièrepériode. pagesentièressont consacréesà la revue
rapidedes grands faits historiquesauxquelsl'auteur attribue
une relationimmédiateavecla réalité
économique(confection
des DouzeTables,lutte des patricienset des 11y
plébéiens),
a là commeun matérialisme historique
qui, inconscient,
échappe mêmeà la discussion. L. g.
SVSTliURS
ÉCONOMIQUES 06B
VINOGHADOFF (Fani.). Engliah soeiety in the eleventh
oentury. Essaysin english mediaevalhlstory.Oxford,Cla-
rendonPress,1908,in-8v,599pages.
Les Ksmysde M. VinogradofT portent, l'un sur le gouver-
nementet la société,l'autre sur le paysetle peupleeu Angle-
terre auxi"siècle; ils sont nourris d'une érudition sobre et
sûre, qui apparutt dans les notes et les appendices,et ne
manquent pas d'une certaine beautéharmonieuseet balan-
cée.La méthodesuiviepar M.V.est trèsclaire: il analyseles
phénomènes les plus appareats de la société considérée,–
organisationmilitaire, organisationjudiciaire, organisation
financière, et montre que ces phénomènesne fout que
recouvrirla basepermanentedu système,l'économieagricole.
Maiscelle-ciest une combinaisondes habitudesde la société
anglaised'avantla conquêtenormandeet des nouveautésféo-
dales importéespar les conquérants le manoir,eu particu-
lier, est presqueexclusivementle produitde la conquête, et
c'est autour de lui que s'organise toute la populationrurale
des tenancierslibreset des vilains, les premierstondant tou-
tefoisà disparattre,de mêmeque les esclaves,remplacés, les
uns et les autres, par une classe plus homogènede travail-
leurs ruraux.Cetteéconomieagricolea déterminél'organisa.
tion militaire les laboureurs producteursont dû être proie?
gés par les soldats professionnels,à l'armement coûteux,
rémunères par les revenusdu sol. Ceschefs locaux ont été
mis en possessiondesdroitsde justicequ'exerçaientjadis les
groupementsde tenanciers, et ils ont été chargésgraduelle-
mentdo la perceptiondes taxes locales.La souplepenséede
M.Y.suit ainsitoutes les manifestationsde la vie socialeen
fonctionde l'économieagricole, à l'exceptiontoutefoisdu
droit familial; cette dernière lacune s'explique peut-être
parceque M.V.a l'espritle moinsjuridiquepossible sousle
manteaudes termes d'originevariée,– celtes, scandinaves,
saxons,normands,– il recherchela réalité, et ne l'asservit
pas à des règlesa priori un livrecommele sienest la meil-
leure critiquedes théoriessimplistesà la façonde M. Seeligcr
(Diesosiak uni!yoUlmheBeileutungder Grunrthemsehaft ini
frûherenUittelaltei\Leipzig,1903),s'en tenant nux origines
exclusivementpubliquesdu droit domanial,oude Hildebrand
(Heehtunil Sitteau]' den primititerenicirlschufllichen Ktiltxir-
stufen,2'édit., lena, 1907),niant délibérémentle communisme
566 i.'annk» somotooKH'R. Iflucmo»

.Iu.1.. -1 _1 1
agraire du prû-moyeu Ûge à rapprocher des ouvrages de Sèo
pour ta France (Le»dîmes rurale*et k régime domanhlmt'ranre
«m moyenûge, Paris, 1901; et de Lizier pour l'Italie il/eeauo-
mk rurale delî et à prvnormunnu mil' Ualia meriilionnle,
Païenne, liMïï), il fournit de» faits clairement classés et intel-
ligenimeut interprété», qui pourront ôlre utilisés pour une
synthèse do l'économie européenne à l'époque féodale.
G.H.
CAROi'Gkokg).– Sozlal-uud Wirtsohaftsgesohiehte der
Juden im Mlttelalter und der Neuzelt Grundriss der
Gesiimintwissenscliafl des Judentums (Schriften ligg von
der Gesellscliaftzur FOrderungderYVisseuscliaftdes Juden-
tuins.i, t. i. Leipzig, Fock, 10fl8,iu-S", vit-514 pages.
M.Caros'est bien reudu compte, dans son introductiou, des
difficultés de lu tâche qu'il assumait je passe sur les difficul-
tés de la documentation, qui, à y regarder de près dans les
Anmerkungeit du la fin du volume, parait aussi précise ot
aussi étendue que possible; mais décrire une économiedont
les manifestations .se trouvent disperséesdans l'espace et dans
le temps, c'est («uvre ardue et délicate. Dira-t-ou qu'il l'a
accomplie? AUeudouspour cela la suite de son ouvrage, car
le premier volume ne fait queposer et amorcer le problème.
M. C. montre en effet que les Juifs de l'antiquité ont dû ôtre
culth'iiteurs eu Palestine, niarchaiids eu Habylonie,artisans
dans les villes grecques, s'adaplaut parfaitement aux condi-
tions économiques des pays où ils se trouvaient, capables
d'entrer par suite dans les cadres de la société romaine;i
mêmela christiauisatiou de l'empire ne changea pas les ha-
bitudes de vie des Juifs, en dépit des- persécutions de l'église
triomphante, non plus que l'invasion des barbares c'est que
ces invasions n'ont pas bouleverséles procédés commerciaux
do l'antiquité, et les JuifscomiuerçaiiUpuroulcotilInuer dans
les ports de la Méditerranée les trafics anciens, tandis que
dans les villes continentales, subissant l'évolution du droit,
etse soumettant aux obligations féodales, ils restaient arti-
sans ou propriétaires, ou devenaient, auprès des empereurs,
tes courtiers nécessaires de l'Europe et de l'Asie, maîtres de
capitaux d'une importance prépondérante au scia de l'écono-
mie agricole ambiante. Comment celle situation des Juifs
changea telle? Comment furent-ils exclus de la propriété
foncière et des métiers?' Cette situation ne commence à se
.SYSTÈMES
KC0NOUIUUKS I167
modifier qu'au xn" siècle et elle ne semble pas s'être modifiée
en Orient ces doux faits ont conduit M. C. à supposer que
l'agent essentiel de cette transformation, ce sont les croisades.
Eh Orient et dans les pays où le sentiment national ne parvient
pas à se dégager, par exemple en Italie, les Juifs vivent
comme jadis les descriptions de Benjamin de Tudela nous
en fournissent des preuves abondantes..Mais, dans les pays-
qui ont collaboré à l'œuvre des croisades, quelles que soient
les causes sociales qui, avec d'autres, les y ont déterminés,
le sentiment catholique, fouetté par les expéditions en Terre-
Sainte et par la réforme ecclésiastique des grands papes du
xin" siècle, devient prépondérant il conditionne les nationa-
lités commençantes, en Angleterre, en France et eu Alle-
magne, et comme les Juifs refusent de se soumettre il cette
condition primordiale, ils se trouvent exclus des communau-
tés nationales, des formes normales de ta vie sociale, réduits
par les législations des états embryonnaires au commerce
exclusif de l'argent, qu'au même temps les régies de l'église
interdisaient, non sans difficultés(voyez un dernier lieu, à ce
sujet, L. Chiapelli, Dante m rapportaaile fonti fieldirilto, dans
YAreh.«for. Uni, 1008, t. XLII, p. aux Chrétiens. M. C.
a étudié en Angleterre, en France et en Allemagne ce qu'ont
été les Juifs par rapport à la société chrétienne jusqu'à la fin
du xiu" siècle; il étudiera dans son prochain volume leur
situation en Espagneet y donnerade nouveaux faits en faveur
d'une thèse, qu'on nn pourra évidemment juger que lors-
qu'elle aura été entièrement exposée. G. 13.

H1NDS (.WilliamAlfhkoj. – American communities and


cooperative colonies. Second revisiou. Chicago, Kerr
a. C", 1908,008 p. iu-8».

PRUDHOMMEAUXJaiss). – Icarifi et son fondateur


Etienne Cabet. Contribution à l'étude du Socialisme
expérimental. Paris, Coruély et G1-,1907, xl-088 p. in-8".

Que les systèmes économiques artificiels, généralement


eonçus et expérimentés dans l'enthousiasme de l'idéologie et
de la propagande, aient surtout inspiré des apologies, des
descriptions artistiques et littéraires, des œuvres de polé-
mique, cela n'a rien qui doive surprendre mais il était dé-
sirable qu'ils devinssent un objet d'étude scientinque, comme
508 l'a.NSKKSOUIQMKUQUK,
4WM49W

produits spécifiqueset peutôtre caractéristiquesde condi-


tloussocialesdéfiniesou à définir,ou commemotifsdétermi-
nants des expériencessocialesqu'Us ont introduites,et qui
réclamentuneétude analogue.considéréespourelles-mêmes
ou relativementa leur iuspiratiou théorique,h'icarie de
M. Prudhommeauxest le premiervolumed'une sériequi con-
tinuera par deux autres volumesen préparation,sur les
A'ssa.isfouriéristeaen Franceet û l'étrangeret sur Un&ihkde
communisme expérimentalauxÉtats-Unis la rééditiondu livre
de M. Hindssur les communautésaméricainesrenouvelle
et augmentel'intérêt scientifiqueet méthodologique des ques-
tions traitéesou poséespar M. P.
Extérieurement,lesdeux ouvragessontbiendifférents.S'il
n'y a pas une cohérence parfaite entre les deux partiesdu
livre de M.P., dont la premièretraite de Cabetet de sa doc-
trine, et la deuxième des colonies icariennes,du moins,
autour dela personnalité,de la doctrineet de l'influencede
son fondateur,l'histoire û'renriea beaucoupd'unité.Le livre
de M. Il., au contraire,est formépar uue successionde47mo-
nographies de dimensionstrès inégales.Ellesse composent
surtout desobservationspersonnellesde l'auteur,de ses con-
versations avec les principaux membresdes communautés,
tandis que M. P., sans négligerl'informationpersonnelleet
visuelle,a eu recoursà une énormedocumentationlivresque.
Et cependant,ces deux livresse ressemblentpar l'exactitude
et la précisiondes recherches, par le sérieuxde l'enquête,
donc par l'intérêt et l'utilité, mais aussi par une tendanceà
exprimer ou Indiquer des préférencesdoctrinales,qui révè-
lent d'ardentescroyances.Maisles deux auteurssont proté-
gés contre les périls du subjectivismepar leur parfaite pro-
bité.
L'étudede M. II. part de l'époquedes premièrescolonies
anglaises en Amérique il passe en revue les Shakers, les
Harmonistes, les communautésowenites,cellesdes Perfec-
tionnistes, les associationsfouriéristes,icariennes,puis les
différentessociétéscommunistes,coopératives,fraternelles,
chrétiennes,qui lui ont paru avoir le caractèrede « commu-
nautés » ou de « colonies». Sans prétentionexpresse à
l'unité, le livre se présente commeun recueil d'expériences
relativesà l'applicationartificiellede systèmeséconomiques
dont les conceptionssont analoguesou voisineset relèventdu
communismeou de la coopérationconsidéréscommesys-
sïmuga ÊCONOMJQUR* 569

tèmesd'oganisationtotale.En fait, il trace avecbeaucoupde


précision les traits particuliers de leur structure, de leur
fonctionnement,des idées et des sentimentsgénéraux de
leurs membres. – L'ouvragede M. P., après avoir exposé
l'histoirede Cabetet de ludoctrineicarienne,dontil analyse
et discute les sources, retrace l'histoire complèted'karie
immigrationdes Icariensau NouveauMonde,installationau
Texas, puis à Nauvoo,constitutionet fonctionnementde la
communauté,finances,budget, organisationdu travail, ré-
partition des biens, relationsmorales, éducation,débats et
disputes, criseset scissions,vieilleIcarieet nouvelleIcarie,
et enfindissolutionde la dernièrecommunautéicarienneen
1898.
On reconnaît,en résumé,danslesdeux ouvrages,la nature
et les caractèresd'une riche matière d'étude sociologique.
Mais la recherche,n'y a pas été orientée dans ce sens les
deux auteurs ont accordéle principal de leur enquêteet de
leur descriptionà ce qui est individuel, biographique,à ce
qui concerneles caractères,les goûts, les conceptions,les
actes des individus.Or,sansdoute, Icarie et lescommunau-
tés américainesont été fondées,inspiréesou géréespar des
hommesdontl'actionpersonnellea missa marquesur elles
mais il ressort de ces livreseux-mêmes,ainsi conçus,que
l'action de ceshommesaété constammentdépassée,préparée,
dirigée par quelquechosede commun,par un espritcollectif,
par un ensembled'aspirations,de croyances,de concepts,de
vouloirscommuns,quis'est manifestéet réaliséen eux et par
eux. C'est précisémentcela qui formaitle véritablesujet de
ces ouvragesrelatifsà des faits sociaux, à des expériences
sociales.
Conséquemmentparait Insuffisantel'étude des milieux
dans lesquelsces expériencesse sont faites, et d'abord des
groupesqui ont expérimentésur eux-mêmesle cabétisme,le
fouriérisme,les diversesformulesde communauté.Tandis
que M. P. a recherchéles origines doctrinalesde YIcarie, il
n'a pas pousséassezloinsonenquêtesur les conditionset les
résultatsde la propagandeicarienne.Surtout il n'a pas ana-
lyséd'assezprès lesélémentsconstitutifsdes groupesicariens
qui ont tenté l'épreuvede la réalisation(origine,situation
économique,affinitésde leurs membres, structure réelleet
caractères sociauxde ces groupes).Si la tâche est ardue,
si même elle doit parfoismener à la constatationd'irrépa-
itfQ I.ASNKK HHMMU09
SOCIOIMIQI'B.
rnlilns lacunes
râbles luminncou
on rl'imnimailiililûci
d'impossibilités ilmliu,iiinani«ii'nn
de documentation, les indi-
cations déjà fournies par ce premier volume et les suggestions
qu'elles provoquent font néanmoins présager l'importunée des
résultats qui pourraient être oblenuseu ce sensdaus les futurs
travaux.
L'eui|uôtetle Al.H., s'étendant sur un champ beaucoup plus
vaste, a rassemblé des éléments de comparaison et prtr suite
d'explication plus nombreux. Si brèveque soit la description,
les caractères principaux de ces petites sociétésse détachent
en relief, le dessin de leur constitution parait avec netteté.
Seulement, il chaque instant, on se sent arrêté au seuil d'une
psychologie collective où l'auteur n'a point pénétré d'un
regard assez intime. Ces traits demeurent «pars, ils se retrou-
vent ou disparaissent d'une monographie à l'autre. Plus élu-
borés, distribués sur un plan d'ensemble, classés, comparés,
estimés, les resuttats de l'analyse auraient fourni presque
d'eux-mêmes un commencement d'interprétation et d'expli-
cation. En tout cas, cette méthode aurait évité une bonne
part
des incertitudes qui subsistent quant il la réalité, la valeur, la
portée des causes psychologiques qui ont pu influer sur le
succès ou l'insuccès de lelle expérience sociale.
Maiscelte étude on appelait une autre, celle (les milieux
et en particulier des milieux économiques dans lesquels ont
été portées les expériences décrites, et dont la connaissance
est indispensable à l'appréciation objective et exacte do ces
expériences. M. P. expose avec beaucoup de soin le mécanisme
dé l'économieicarienne soit fonctionnement; mais il l'ex-
pose comme un mécanisme isolé.Par suite, surcette économie
« en action ». son jugement reste,. pourainsi dire, abstrait,
puisqu'il est privé de la considération des éléments extrin-
sèques, des conditions extérieures qui obligèrent le système
icarieu, eu vue d'une réalisation, à s'adapter aux systèmes
économiques en vigueur. De même, quand M. Il. décrit les
expériences fouriéristes, quand il examine les « phalanges »
établies aux États-Unis, s'il s'applique il en montrer l'organi-
sation et l'existence intimes, il néglige parfois complètement
les conditions extrinsèques dont nous attendions uno repré-
sentation précise. Car c'est de précision qu'il était besoin ici,
à défaat d'une étude approfondie sans doute inconciliable
avec le dessein et le plan do l'auteur. Dans l'état présent, ses
conclusions demeurentle plus souvent tout à fait incertaines
et notre jugement hésite finalement sur l'estimation des
BVSTÈMKS-
ttaoNOHIQUI» 571

expériences (par exemple, que tirer de lénumertiuoii de


« causes;assignées eu bloc à la dissolution de Bivok Furm,
et qui s'olïrent à nous, sans moyen de contrôle, comme des.
possibilités seulement,ou encore do l'indication donuée. snns
contact avec lu majeure partie de la réalité, sur les rapports
du mouvement communiste américain avec le mouvement
coopératif moderne?)
Il s'en faut toutefois que les livres de MM.H. et P. refusent
au lecteur la faculté d'en dégager un certain nombre rie con-
clusious positives de portée générale. Ce qui apparaît en pre-
mière ligne, c'est que presque toutes ces expériences ont eu
pour but lu réalisation d'idéologies où prédominaient tantôt,
les- élémentsrationnels et tantôt les éléments sentimentaux,
mais dont les constructeurs étaient, des esprits étrangers ou
rétractaircs à la méthode des sciences expérimentales. Idéolo-
giques, ces systèmes artificiels ne sont point parvenus à s'or-
ganiser, à fonctionner ou à subsister. Les sociétés expérimen-
tées se sont brisées ou heurtées à des obstacles qu'elles ont
trouvés en elles-mêmes ou autour d'elles. Leurs éclieesont mis
eu évidence le caractère a priori de l'art social qu'elles repré-
sentaient. Au contraire, chaque fois qu'elles ont réussi et dans
la mesureot'i elles ont réussi, il semble qu'on puisse constater
une adaptation plus ou moins consciente et plus ou moins
exacte aux systèmes établis, aux systèmes qui résultent de
l'évolution des inslitulionslvoyez, par exemple, comment cer-
taines communautés américaines se sont accommodéesaux
habitudes et aux règles de l'économie et de la législation cou-
temporaines en prenant la forme de société à responsabilité
limitée). C'est pourquoi les considérations de M.P. et de M.II.
sur l'avenir du communisme n'appellent ni une affirmation
ni uue négationpréalables, elles appellent le jugement positif
des expériences.
Dans leur étendue limitée, ces expériences ont par elles-
mêmes une réelle valeur. Klles montrent que plusieurs sys-
tèmes construits idéalement. expérimentés par la volonté de
quelques groupements humain», renfermaient des éléments
de vie. Plusieurs de ces sociétés ont duré longtemps, soit
qu'elles aient trouvé d'emblée des milieux favorables, soit
qu'elles se soient ajustées et reformées sur une réalité écono-
mique souvent très dillérente de leur idéal. Elles étaient dono
possibles et viables. Pourquoi l'cHaieut-eHes.elplus générale-
ment quelles sont les conditions do ce qui est, eu cette ma-
514 l'AN.NÉB 1906.(809
SOCIOLOOIOt'K.
tière, possibleet viable?de tellesquestionsréclamentl'étude
positiveque nos deux auteurs u'out point tentée. Mais par
leurs exemplesou par leurs suggestions,leurs livres font
apparaîtreque ces systèmes,produitssans doute des milieux
sociauxdans lesquelsils ontété conçus,admettent une infi-
nité d'agencements,qui peuvents'appliquer à des situations
infinimentdiverseset constammentvariables.Est-il possible,
avecles présentsouvrages,d'aller plus loin, d'apercevoirles
conditionsmoyennesauxquellesest subordonnéecette expé-
riencemôme?
Il sembled'abordqu'aucunsystèmeartificiet ne se réalise
sansla réunioud'uncertainnombrede facteursmoraux, puis.
sants et actifs, qui fournissentune Impulsionpresque impé-
rative. Les premièrescommunautésétudiées par M. H. ont
transmisà In plupartdes associationsultérieuresleur esprit
de croyanceet devoloutéconcentrésur la penséede la créa-
tionà réaliser. L'expérienceicarienneillustre ce mêmefait.
Eu secondlieu, cesfacteurssont des facteurs sociaux. Ils
sont caractéristiquesde chaquegroupe et de chaque expé-
rience. Le groupementet sonactionsemblentvarier en fonc-
tionde leur nombreet de leur force.La moindrede ces com-
munautés,de ces associations,suppose un lot considérable
de pensées,de représentationset de volontéscommunes;et
il semble qu'elles se réalisentaussi dans la mesure où les
motifscommunsd'action s'organisent,où le but communde
l'actionse définitet s'adapteaux conditionsde l'action choi-
sies par les membresde la collectivité.Puis, dans la vieéco-
nomiquede cette collectivité,son esprit commun ne s'ex-
primepas seulementdans des statuts, dans des règles, mais
danstouteune pratique,dont l'analyseméthodiqueet appro-
fondienous paraitundesobjetsessentielsdes recherchesque
nous concevons.
Enfin,la diversitéparait la conditiond'existenceet de réa-
lisationde ces systèmes.Elleest la conséquencedes besoins
d'ententepréciseque ces communautésmanifestent.Si des
systèmesartificielsdoivents'édifierdans la réalité, c'est à la
conditionqu'ils soientdifférentsdes autres,et surtoutde ceux
qui lesout précédés.L'expériencesocialehabitue l'esprit du
critique à tous les possibles or, parmicespossiblesdemeure
celuide représentationset de volontéscommuness'éteudaut
à des nombresde plus en plus grands d'individus.Et c'est
ainsi que se pose la questionde la conceptionet de la réali-
SYSTÈMES
ÉCONOMIQUES 673

communistes,à laquellelesdeuxouvrages
sation des systèmes
n'ontpasréponduet nepouvaientpas répondre.Nousla lais-
seronsnécessairementen dehorsdu cadrede cetteétude.
H. B.
P01N3ARD (Lkon). La production, le travail et le pro-
blème soolal dans tous les pays au début du XX'siè-
oie. Paris, F.Alean,1907,2vol. iu-8°,xvi-593etxi-768p.
Nousne donnerons pas à la critique de cet ouvrageune
étenduequi répondea ses dimensions, parce qu'il est trop
distantet trop volontairementéloignéde nosméthodespour
exiger une discussionde détail, et parce qu'il présentelui-
mêmede sa méthodeune applicationqui n'est point complè-
tornentni exactementdémonstrative.
Sa méthodeest cellede l'écolede Le Play.Donc,pourla
bibliographiede ces deux gros volumes, trois groupes
1° description générale du milieu géographique,Reclus,
Viviende Saint-Martin,Vidal-Lablache 2»histoiregénérale,
Lavisse;3" ouvrages« spéciaux», c'est-à-direouvragesde Le
Play et de son école rien d'autre n'est allégué ni signalé.
Maisdans les notes on trouve des références, assez nom-
breuses,soit à des ouvragesvraimentspéciaux, relatifsaux
questionsspécialestraitées ou rencontrées,soità desdonnées
statistiques.
Pourtant, à l'égard de la statistique, l'auteur exprimeuue
défianceillimitée et les plus graves reproches elle présente
les faits par masses,sans explicationsni distinctions; elle
fourmilled'erreurs et d'incertitudes. Et ces (critiques,aux-
quelles ont répondu tant de livres qui expliquent ou qui
appliquentla statistique à ,1ascience,n'empêchentpas l'au-
teur de s'en servir chaquefoisqu'il en a besoinpour l'unede
ses thèses,d'ailleurs sans profit réel, puisqu'iln'emploiepas
la méthodede rechercheet d'explicationpour laquellela sta-
tistiqueest un moyen,et l'un des plus surs.
La méthodequ'il préconiseest celledes monographiesde
lamilleetl'analysesuivantles classificationsdes phénomènes
sociauxde Henride Tourville.Cette méthodeest connue,et
a déjà été souventdiscutéeeu elle-même mais ce qui nous
frappe,dans cet ouvrage,c'est que la valeur méthodique,si
contestable, des monographies et des classificationsle-
playenness'effaceconstammentpour ne laisser à la famille
ouau typequ'une sortede valeur symboliquequi permetdes
ÎV74 U'AXXKfi 1900-1909
SûUlOLQlilQUK.

recherches ou des interprétations nouvelles. Et par les fis-


sures de cette méthodologie passent des prûoccupnUous, des
notions, des considérations qui, si coufuses qu'elles soient,
dénoncent l'influence de la sociologie sans épilhète entre
autres, par exemple, idée de type social déterminé par des
conditions sociales, idée de tendances et d'aptitudes sociales
qui eutrent en composition avec les milieux naturels, idée de
lois précises qui s'imposent aux formes diverses du tlévelop-
,pemeutdes peuples.
Dans l'application, du reste, se retrouvent toutes sortes de
difficultés. La méthode monographique n'est pas réellement
appliquée, et, daus lu plupart des chapitres, on cherche vai-
nement un développement qui s'y rapporte. La classification
des sociétésau point de vue du problème du libre échangeest
toute différente de la classification de H. de Tourville. D'autre
part, l'étude des éléments extra-familiaux qui pourraient être
à considérer pour la connaissance des relations sociales n'est
poursuivie d'aucune manière méthodique. Que reste-t-il?
Unerevue de toutes sortes de sociétés, si différemment con-
naissablesqu'elles soient, depuis les grands peuples pasteurs
de la Mongolie jusqu'aux États modernes et occidentaux
une revue qui, pour chaque nation ou chaque communauté,
est une revue des généralités ou des particularités géogra-
phiques et administratives. Aucun jalonnement d'investiga-
tion causale n'apparait, ni aucun moyen d'explication posi-
tive. H. B.

LEVA8SEUR<E.).– Questions ouvrières et industrielles


en Fra.noe sous la troisième république. Paris, Rous-
seau, 1907,lxxii-958p. in-8".
Par cet ouvrage considérable, M. Levasseur tenu la pro-
messe qu'il nous avait faite de donner un complément à Yllit-
toire desdimn ouvrières en France, conduite, on lésait, dans
la secondeédition jusqu'à 1870'. Il semble que cette œuvre soit
allée en s'élargissant à mesure qu'elle a progressé. Déjà, dans
la première édition de cette histoire, M. L. entendait « classes
ouvrières en un sens large qui ne limitait pas l'étude aux
ouvriers proprement dits ni même aux artisans, mais y com-
prenait toutes les personnes travaillant de l'industrie. Dans la

1.Ci.Anni?SociUotj'miie,
VI, p. 4bG-5!l
el VU!,p. 5ÎM-5K.
SYSTÈME*ikûNOUIgUES Û75

seconde édition, M. L. s'est délibôremment affranchi d'une


limitation à l'étude de lu condition économique de ces per-
sonnés (c'ost-à-di're à ce que nous appellerions une étude de
classes de répartition;, et l'a liée ù une étude directe de la
production même, ce qu'il a indiqué expressément dans le
titre complété ainsi Histoire des classes ouvrières et île l'in-
dustrie. Dans le présent ouvrage, cette tendance se marque
encore davantage et plus encore que dans l'œuvre refondue à
– à 1 exception
laquelle il apporte un couronnement, c'est
seulementdecequi concerne l'agriculture, -–à peu près toute
la vie économique de la société considérée qu'embrasse la
descriptiou entreprise. Le mot d'histoire disparaît du titre
c'est sans doute parce que l'auteur ne sent pas les faits tout
contemporains qu'il étudie ici, dans ce recul du passé qui
série, élimine, clarilie et permet au travail propre de l'hisloirien
de s'établir (cf. Introd., p. vu). Mais aussi, à la différence
des volumes précédents, la succession chronologique cesse
ici d'être le premier cadre où, avant toute autre distinc-
tion. étaient distribués, par tranches de temps, lés faits de
toutes les catégories embrassées; et, en même temps, le régime
politique n'ayant pas changé, le découpage de ces trauches
suivant les règues et les régimes n'a plus d'application. Ce
sont les classes de faits, distinguées surtout suivant des caté-
gories économiques, et étudiées chacune, successivement,
pour l'ensemble de la période, qui marquent les divisions du
volume; et l'on sait quece rangement nous parait plus propre
à faire ressortir les résultats de science les plus aisés à
atteindre. L'ordre suivant lequel les diverses classes de faits
distingués sont prises, encore qu'il semble avoiréveillé quelque
scrupule chez l'auteur ( « Il eut été plus logique peut-être. •>
lutrod., p. xij, nousparait être dans l'ensemble assez justifié.
C'est d'abord, dressé avec raison du point de vue surtout de la
production et de celui de l'économie nationale, un tableau du
développement de l'industrie française depuis 18;0, avec uue
étude spéciale des industries d'État ou municipales puis est
étudiée la législation propre de l'industrie et ensuite le déve-
loppement des moyens de transport, et le mouvement du com-
merce intérieur et extérieur. Le côté de la production ainsi
traité, l'auteur, avant de passer à celui de la répartition,
étudie de grands faits dont l'importance est notable popula-
tion, variation et répartition instruction primaire et profes^l
siounelle; mouvement des idées et des doctrines économique^. I
570 lAxXKKSOOIGLOMW.
1900-190*
et socialistes et actionde l'Étatsous la forme de législation
dite ouvrière.Viennentalors des études sur les élémentsdo
la répartition,salaires,.ojiyrierset
cotUde ja vie (etplus loin
conditiondes travailleurs),fortuneeTrêvenu de l'ensemble
des Français et sur les institutionsde la répartition, grèves
et syndicatsouvriers, institutionsde prévoyance(épargne,
mutualité,etc.), et d'assistance.Commedans les précédentes
partiesde l'Ilistoiredesclassesouvrières,un résuméprécieux
retraceà grands traitsles résultatsde toute la recherche.On
estimera,à cette seule indicationde toutes les matièrestrai-
tées, la variétéet la somme d'informationsréuniesdans ce
travail maisonn'en apprécieravraiment,l'abondance et l'uti-
lité qu'en lisant le livre lui- môme. Il complètefort heureuse-
mentl'œuvred'ensembleoù le précèdent les quatre volumes
considérablesde l'Histoiredesclassesouvrières. F. S..

LESCURE (Jka.n). Des crises générales et périodiques


de surproduction. Paris, Laroseet Tenin, 1907,«52 p.
iu-8\
La premièreet la plus grossemoitiéde ce livre estconsa-
créeà exposerhistoriquementtoutela suite descrisesqui se
sont produitesau xix"siècle (p. 16-376),en insistant tout par-
ticulièrementsur la crisede 1900en Allemagne(p.210-3715),
dont l'auteur a été étudier sur place le détail et les consé
quences.11s'agit de « démontrerl'identité,dans le temps,du
phénomène», que l'on déliait « le point d'intersectiond'une
périoded'essor d'une durée de trois à cinq ans avec une
périodede dépressionde durée analogue». Comme,d'ailleurs,
on distinguequatre espècesde crises(de production,de con-
sommation,de circulation,de répartition),et que, le plussou.
vent, la crisegénéralede surproductionoffreà la foistousces
aspects,il ne s'agit de rien de moinsque de nous décrire« le
mécanismedu développementdes sociétés économiques
modernes», par un examensimultanédes phénomènesdont
les banques, la bourse, le marché en général et l'industrie
sont le théâtre.C'estdirequ'on y retrouvebeaucoupdedétails
de l'histoireéconomique,mais que ni les faits ne sont rappro-
chéssuivant leurs ressemblances,ni les hypothèsesnesont,
à ce moment!formuléesavec assezde netteté pour qu'elles
puissent être vérifiéesou infirméespar des « expériences»
proprementdites.
SYSTÈMES HCUNOWyCBI 577

Aussi, la recherche des causes n'naf_e.ll.u


·nW nlnn nuuanu w.r.J~
n'est-elle, en somme, qu'une
revue et une classification des théories. On distingue celles-ci
suivant qu'elles expliquent les crises par des phénomènes de
circulation, – ou bien par des phénomènes de production, de
consommation, de répartition. – Les premières s'en prennent
à l'augmentation soit de lit monnaie métallique, soit de la
monnaie fiduciaire, suit des lettres de change 'théorie de Ju-
glur l'augmentation du portefeuille des grandes banques
d'émission et la diminution de leur encaisse, situes d'un abus
du crédit). L'auteur reproche il ces explications de ne se pas
accorder avec les faits, les phénomènes invoqués ne se présen-
tant point, parfois, alors qu'unecrise éclate, et une crise n'écla-
tant point ((lorsqu'ils se présentent. Cequi importe, c'est moins
l'expression monétaire, ousousformede papier, des prix, 'lue
les échanges eux-mêmes.
Lesecond groupe de théories se divise en deux sous-groupes.
Les uns expliquent la crise par un déséquilibre entre Ja pro-
duction et la consommation, issu de causes très diverses (divi-
sion du travail, ouverture de nouveaux débouchés, perfection-
nement du machinisme, excès de lu spéculation, paix pro-
longée, guerre, révolution, mode/, toutes explications très
arbitraires, et qui méconnaissent le rapport des crises au
régime capitaliste lui-même.
Les autres (théories organiques) rattachent au contraire la
crise aux conditions générales du marché dans les économies
modernes. Hicardoet Henri Georgeexpliquent par ïacanme-
ment de lurente foncièrela hausse des prix, la diminution des
salaires, et par suite des profils; en réalité, la part « non
seulement nominale, mais réelle » des ouvriers et capitalistes
dans la richesse totale a augmenté au xix" siècle. D'autres
contestent la loi des débouchés deJ.-lï. S;iy pour Sisinondi,
la répartition des richesses dans nos sociétés modernes
cutraine, citez les capitalistes, uu excès du pouvoir de con-
sommer sur les besoins, et l'inverse chor. les ouvriers soit
une double sous-cousommalion fcf. aussi l'argumentation de
Rodbertus et Bourguiuj. – Marx invoque la Immt tlu taux dit
profit (qui résulte de ce que le capital constant s'accroît plus
vite que le nombre des ouvriers or, c'est du travail de ceux-ci
seulsque nuit la plus-valuei ou augmente donc lu production,
d'où une crise. Mais la crise n'est pas précédée d'une baisse
du taux du profit. D'autres enfui Tttgan Harauowsky,
Spiethoflj insistent sur le développement disproportionné et
!). Duhkiieiu. – Ahiut sociol., l'Juli-lHUS». 37
078 iïioo-iooo
l'annéesociologiql'k.
unarchique d'une partie de la production, de la production des
moyeuxde production uue découverte récente, l'ouverture de
nouveaux débouchés, entralueruit une demandetemporaire,
à laquelle répoudrait une oflro permanente, d'où une crise;
ou encore l'épargne, après s'être précipitée fiévreusement dans
ces branches de production, no suffirait plus à les maintenir
en activité.
Ce sont ces explications auxquelles l'auteur recounalt le
plus de valeur mais, dit-il, ce n'est pas par insuffisance de
capital, c'est parcequ'il devient impossible de convertir le
capital en moyen de production avec espoir de profit, que la
crise éclate. Il retient donc, de la théorie de Marx, que c'est
la baisse du taux du profit, mais dans certaines branches,
celles qui produisent les moyens de production, qui explique
le phénomène et il ajoute que cette impossibilité peut se
rencontrer aussi dans des industries de consommation (le
textile). Les producteurs sout alors éliminés en proportion
de leur moindre aptitude a réaliser un profit la crise est
toujours le point de départ d'un processus de concentration.
Le dernier chapitre présente les remèdes car la crise est
un mal « elle viole la loi primordiale qui veut que l'homme
tende à réaliser un même degré de satisfaction de ses besoins
avec un effort toujours moindre m, puisque, pendant l'essor,
on emploie une main-d'œuvre inexpérimentée, et qu'on sur-
mène, et que, pendant la baisse, toute une partie de l'Outil-
lage, même perfectionnée, demeure inerte. Il énumère des
remèdes préventifs (statistiques; réglementation d'État; con-
centration des banques, mais répartition par elles des risques),
etcuratifs (création d'entreprises de travaux publics; éléva-
tion du taux de l'escompte; coustitution d'un portefeuille de
créances sur l'étranger, en particulier en valeurs d'État;
prime sur l'or, moyen de lafaire payer seulement à l'étranger).
Mais il croit à la possibilité de supprimer purement et simple-
ment les crises. Non qu'il y ait lieu de fixer légalement la part
du salarié au produit social total (Rodbertus), ou de limiter le
taux du profit (May;, ni d'attendre, comme les collectivistes,
l'effondrement final. Mais les carteHs ont été organisés en Alle-
magne en vue de cette fin. et les trusts semblent l'avoir atteinte
en Amérique. – Ce qui a empêché les cartells d'éviter la crise
de 1900, c'est qu'ils sont trop nombreux, qu'ils comprennent
trop de membres dont les intérêts sont différents, et qui n'ont
guère de moyens de contrôle. Les cartells de matières pre-
SÏ8TÈMBS
ÉCONOMIQUES U79

mières, qui ovaientplutôt modéréla hausse en période d'essor,


ont eu d'ailleurs le tort de maintenir, dès la crise, les prix
élevés à nntôrieuretd'exporteràba8prlx(dumpiug). En défi-
nitive, ils ont ainsi protégé les petits producteurs (Mittel-
standspolitik), et nui aux grands producteurs de fabricats.
Aux États-Unis, au contraire, les trusts sont à la fois produc-
teurs de matières premières, de produits demi-ouvrés, et de
fabricats, ce. qui les sauve de telles luttes internes; d'autre
part, ils oui poursuivi méthodiquement la réduction des coûts
de production, constitué des réserves, et éliminé les orga.
nismes de production inférieurs aussi, malgré certains
symptômes en 1903-1904,ou ne trouve pas aux Etats Unis, daas
les années suivantes, la période de dépression qui est uit des
éléments de la crise ils y ont donc échappé. « Sous l'angle de
cette expérience – isolée, il est vrai, – des Étals-Unis, nous
concluons à la disparition des crises dans les économies
organisées en trusts et associations de trusts >. Que, sur le
continent, lescartells se fondent,que les entreprises n'intègrent,
et. là aussi, les crises ne seront plus qu'uu souvenir.
Il est à regretter, pour l'auteur, qu'il n'ait point retardé
de quelquesmois la publication de son livre, puisque, dès 1907,
éclatait aux Ktats-Unis une crise exceptionnellement forte.
Xousn'abuserons point contre lui de l'immédiat démenti que
les faits ont apporté à ses prévisions. Notons seulement les
deux hypothèses sur lesquelles elles se fondent, et que l'au-
teur admet en somme sans les vérifier l'.Que les crises sont
un mal il ne veut d'ailleurs point dire, par lu, qu'elles n'ont
pus quelque utilité, puisqu'il reproche aux cartel ls allemands
d'avoir, pendantlu crise de 1900, protégé les petits entrepre-
neurs, ceux qui n'étaient pas à la hauteur de leur tâche mais
il leur reproche de contrevenir au grand principe d'économie
des forces. Plusgénéralement, c'est aux alternatives do hausse
et de baisse qu'il s'en prend, la hausse attirant dans les entre-
prises des inexpérimentés, la baisse immobilisautdes machi-
nes, etc. Bien que de telles idées soient trop générales et
vagues,on peut lui demander ce qui prouve que, dans un tel
développement par périodes de travail intense et de dépres-
sion. a côté de forces gaspillées, il ne s'en crée point d'autres
qui ne seraient pas intervenues autrement (car la baisse, non
moinsque la hausse, peut être le point de départ d'améliora-
tionséconomiqueset techniquesconsidérables). 2° 11croit aussi
que les crises sont évitables eu régime capitaliste. Comme
680 L'ASNKK SOCIOMMSIQUR, 1900.1901)

Jescrises éliminent les entrepreneurs incapables ou faibles, il


s'agit de trouver une organisation qui lie décourage pas l'es-
prit d'entreprise (douc, point de réglementation par l'État, ou
le moinspossible), et qui toutefois décourageles entrepreneur!)
à faibles capitaux et les spéculateurs. C'est chercher la qua-
drature du cercle. Il attache, sous ce rapport, une grande
importance nu développement des cartells et des trusts, et
il marqued'il il leursassez heureusemeutles insuffisances des
cartells eu Allemagne. Mais il neparait point s'apercevoir que
ces organisations lie font pas disparaître les luttes entre capi-
talistes, mais simplement los déplacent,qu'elles sont toujours
dirigées contre certaines catégories de producteurs non orga-
nisés ou mal organisés, ou de consommateurs, et que, du
jour où elles se généraliseraient, elles perdraient leur raison
d'être. Qu'elles décrètent lu hausse des prix ce sont les
«outsiders» qui pourront en profiter; qu'elles limitent la
production les grands producteurs, s'ils trouvent, uu avan-
tage momentané à produire beaucoup, sortiront du cartel!.
Eu toutes circonstances, les spéculateurs trouveront toujours
où se porter il y aura toujours des industries naissantes, on
de destinées incertaines, qui attireront les capitaux plus sou-
cieux de gros intérêts que de sécurité.
Cette double hypothèse, que ta crise est un mal, et un mal
évitiible. l'auteur ne s'y attache sans doute que parce qu'il
reste toujours placé au point de vue de la production (au sens
étroit). Mais,si le producteur souffre de ces brusques alterna-
tives de hausse et de baisse, et s'il se préoccupe de les éviter.
ne serait-ce point parce que les prix, au fond, ne dôpendenl
pas de lui? L'auteur s'oppose nettement à l'explication dos
crises par ce qu'il allpelle dus phénomènes de circulation, t«t
ne voit dans ta monnaie, le taux de l'escompte, etc., que dc>
expressions toutes relatives du mouvement de la production
et des échanges. Il se pourrait que ces faits aient au contraire
un caractère relativement autonome, qu'ils exercent sur lis
prix une influence décisive et propre, et que,si l'on remarque,
eu régime capitaliste, ces brusques variations des prix, c'est
en définitive parce qu'elles sont une condition nécessaire de
la spéculation. Il est. en somme, fort peu vraisemblable qui-
la fonction des producteurs soit non seulement de produire
les marchandises, mais encore d'en déterminer les prix. Au
lieu de s'en tenir à l'élude 'd'ailleurs surtout conceptuelle; de
la production (au sens étroit), l'auteur aurait du se demander
SVSÏKUBS KCÙNOMtOUES 581

quel est t'organe régulateur des prix, quels ageuts écono-


iniques remplissent cette fonctiou, et à quelles tendances ils
obéissent en lait. C'est seulement ensuite qu'il pouvait cher.
cher si et commentces tendances sont modifiables, et si la
même fonction ne pourrait pas être exercée autrement.
M. H.
SUPINO i'Camillo).– Le crlsi economiche. Milan, Dlrico
Hoepli, 1907, xn-iU2p., in-8».
On a prétendu, ici, éviter le double écueil où se heurtent
d'ordinairecoux qui traitent des crises, retenir et grouper les
faits au uomde principes scientifiques, élargir la théorie de
façon à ce qu'elle explique les causes très nombreuses de
ces troubles de l'économie. La définition de la crise où
l'on s'arrête est assezlarge on la distingue des progrès et des
décadences durables et étenduesdes peuples, et des secousses
qui atteignent quelques individus la crise est un trouble
profond subi par toute une région, toute une industrie, toute
une classe. C'est, plus généralement, toute ruptuise sérieuse
de l'équilibre entre lit production et lit consommation il ne
s'eu produit de telles que lorsqu'il y a un marché ntoudial,
une large concurrence, et surtout à mesure que la monnaie
intervient.
Les causes des crises sont exposées clans les cadres écono-
miques traditionnels. Des faits subjectifs >la mode.) ou objec-
tifs (les mouvements de la population, les changements dans
le revenu des classes sociales modifient la connùmmation, de
manière à troubler le rapport de l'ollre et de la demande.
Insuffisance ou excèsde la consommation, famines, guerres,
paix, sont ici successivementinvoqués. – bans la production,
il y a lieu de distinguer trois actes l'accumulation des capi-
laux, la production de nouveaux» biens productifs», leur em-
ploi pour uccrollre la quanlité des biens de consommation »,
qui peuvent très bien ue pas se correspondre. Il y a des diffi-
cultés à maintenir un juste rapport entre le capital-salaire, le
capital technique circulant et le capital fixe. Tous les progrès
techniques peuvent déterminer des crises. On objecte
l'impossibilité d'une suproduction générale (élasticité des
besoins et loi des débouchés). Mais c'est supposer un état
stationnais quand la population augmente, il faut ajouter
aux moyens productifs actuels ceux qui serviront pour les
générations nouvelles, et qui ne pourront être payés avec les
58a L'ANNÉE 190C-t9O9
SOCIOLOOIQL'K.
revenus de lu période actuelle. C'est oublier, encore,
que
lu monnaie permet de produire saus acheter aussitôt,
que
les produits ue sont pas, comme disait ce
Suy, dont l'utilité
est égale au coût de production (pure
tautologie), mais des
marchandises qui représentent de l'argent et doivent se trans-
former en argent. C'est négliger cette partie de
l'épargne qui
est laissée eu dépôt dans les
banques, placée en emprunts
publics, et qui peut brusquement rentrer dans l'industrie
nationale. Les moyens productifs et la production eu
général
peuvent donc être en excès sur la demande. – Des faits de
circulation représentent aussi des causes de crises le déve-
loppement des moyens de transport, par exemple, mais sur-
tout les variations de la valeur de la monnaie (le débiteur
gagne et le créancier perd à sa baisse; les entrepreneurs
gagneut à sa baisse les propriétaires de terres, sur
lesquels
pèsent des dettes de longue durée, soutirent plus que les
entrepreneurs de sa hausse, et gagnent plus à sa baisse; les
salaires subissentplus lentement ces influences).
L'exportation
de monnaie, ou indirectement aussi l'exportation des
pro-
duits, (lui s'y substitue, comme règlement de comptes, le cré-
dit, qui exagère la hausse ou la baisse des prix, sont aussi des
causes déterminantes ou aggravantes des crises. Une crise éco-
nomique est presque toujours accompagnéed'une crise moné-
taire. Dans la mesure où la répartition des biens altère les
rapports entre producteurs et consommateurs, elledétenniue,
elle aussi, des crises. Le profit du
capitaliste résultant do la
vente des marchandises, il doit désirer
que la 'masse soit
capable de beaucoup acheter. Or, les salaires sont loin de
croltre proportionnellement à la production. Même si l'ou ne
peut voir là la cause spécifique de crises, les effets de la dimi-
nution ou du faible accroissement de la consommation ou-
vrière peuvent s'accumuler. D'autre
part, les profits tendent
à diminuer, dans les pays les plus avancés
(accroissement
du coût du travail, Stuart MM).Les
capitaux se placent alors
dans des entreprises moins sûres. Enfin, comme la valeur
de la terre augmente de façon continue, l'agriculture absorbe
une bonne part des capitaux.
Après cette revue des causes, on envisage les aspects essen-
tiels du phéuomèue 1"Le développement des crises il u'est
régulier que lorsqu'elles proviennent de causes organiques,
c'est-à-dire non accidentelles, 2° Les symptômes des crises.
L'auteur critique la théorie de Juglar quand le
portefeuille
SYKTÈURl*
KCONOiHQL'IK 583
se gotille,c'est le signe non qu'une crise approche, mais que la
liquidation est déjà en bonus voie. Le taux de l'escompte est
plus instructif. 3" Lesdépressions économiques: elles diffèrent
des crises, et en sont parfois indépendante». La baisse géné-
rale et continue qui porte alors sur tous les produits (de
•1878à 1880par exemple), s'explique par la hausse de valeur
de la monnaie, par la baisse du coût de production, et par la
baisse de la valeur courante des produits. 4" La périodicité
des crises elle n'est pus u expliquer par un cycle normal de
développement du crédit, non plus que par les mauvaises
récolteset leur périodicité théorie de Jevous), mais par « le
processus d'accumulation de la richesse et des capitaux », et
les modifications qui en résultent dans les revenus des
diverses classes la baisse des profits et la hausse des salaires,
résultats de ('-accroissementde la richesse nationale, obligent
les capitalistes ù chercher toujours de nouveaux emplois
.plusprofitables pour leurs capitaux.
Après une indication rapide des conséquences des crises et
des remèdes possibles, ou passe à l'examen des crises spé-
ciales, qui n'atteignent pas l'organisme économique dans
son ensemble, mais seulement, du moins de façon directe,
une de ses parties, crises parfois liées à des crises générales, et
dont, en toutcas « dans la mesure où les crises générales sont
toujours une réunion de telles crises spéciales », l'élude est
un complément de la théorie générale elle-même crises'
agraires, crises immobilières, crises industrielles diverses,
crises commerciales pures, crises de bourse, crises moné-
taires, et crises de crédit proprement dites.
Si ce livreest assez touffu, et si l'attitude de l'auteur reste
indécise, cela tient à sou désir d'embrasser le phénomène en
sa complexité or la crise atteint toutes les parties du sys-
tème économique, et on a ou raison d'insister, non seulement
sur les changements de la production, mais sur les « faits de
circulation » qui caractérisent en général une économie ainsi
troublée, sur le rôle de la spéculation et des phénomènes
monétaires, et sur celui des commerçants. – • Mais,d'une
part, on ne devait pas confondre ici, sous le nom de « causes
des crises », des faits accidentels tels qu'une guerre, une
famine, et lestraits caractéristiques du développement écono-
mique normal, ni confondre avec les graudescrises générales,
oudu moins étudier comme si ellesétaientdemôme nature, les
« crises partielles », limitées à la banque, au commerce, etc.
584 i.'a\nkb socroumiotfE. 1906-iUûti
et dont les autres parties de l'économie nationale ne
subissent point le contre-coup Dans la mesure, en ellet, où
ces ac'cideuts n'ont qu'un elïel limité, et se heurtent aux
forces économiques qui, à peine troublées, reprennent leur
cours, et dans lu mesure où les crises « partielles » sont bien
réellement telles, il faudrait plutôt marquer combien les
crises générales de surproduction s'en distinguent. Kt, si ces
accidents, et ces crises partielles ont été le point de départ
efîectif de mouvements de crise générale, et dont l'allure et
les traits essentiels sont semblables, ce ne sont alors
que des
conditions et des circonstances, et il faut chercher les causes
déterminantes dans des forces ou tendances semblables
aussi, sous la diversité de leurs manifestations. D'autre
part, chercher les causes des crises, successivement, dans les
divers ensembles de faits et de rapports groupés sous les
termes consommation, production, circulation et répartition,
c'est d'abord s'exposer à des redites, puisque tout se tient,
puisque, par exemple, la répartition u'agit sur la production
qu travers te pouvoir d'achat des consommateurs et le pou-
voir d'épargne des capitalistes prêteurs. C'est, ensuite, donner
l'impression que toutes les causes décrites sont sur le même
que toutes sont à la fois déterminées et déterminantes
l'auteur insiste volontiers sur le rapport entre l'influence que
les mouvements de la production exercent sur le nombre des
ouvriers occupés, et lour pouvoir daelml, et t'influence que
les variations de ce même pouvoir exercent sur la
production mais alors, oit s'arrêter, et, si l'on cherche les
causes dans ces phénomènes, n'est-on pas obligé de
passer
indéfiniment de l'un à l'autre, puisque tout te lient? C'est
enfin, puisqu'on envisage successivement les mêmes hommes
en taut que consommateurs, producteurs, capitalistes, leur
prêter des tendances parfois contradictoires sous ces divers
points de vue. en se guidant sur ce que l'on considère comme
leur intérêt dans ces divers cas, au lieu de les rattacher aux
groupes effectifs louvriers, patrons, commerçants, spécula-
teurs/ dont ils relèvent le plus directement, et d'étudier
quelle est, eu fait, l'attitude et quelles soûl les tendances de
ces groupes c'est alors seulement qu'on atteindrait des
causes proprement dites. -Au reste, l;i méthode générale de
l'auteur reste assez « priori et incertaine; les faits viennent
à titre d'illustration des explications théoriques, et sont, bien
souvent, mal déterminés (voir, par exemple, p. 312 « Il estt
SYSTKMBS KlUlNÙUiyL'ES 885

difficile d'affirmer que beaucoup de salaires n'ont pas baissé


par rapport aux taux exceptionnellement élevés en vigueur
jusqu'à 1873 ».)• Quant aux explications elles-mêmes, que
valent-elles pour l'auteur? 11dit « L«s lois de la nature, à la
différence des lois économiques, expriment, uu rapport con-
stant entre cause et effet,- rapport absoluet éternel » (p. 128j.
C'est inexact, théoriquement,pour les lois de la nature; mais,
si les lois sociales sont moins constantes que te lois natu-
relles, que deviennent-elles donc f?i M. H.

AFTALION(AuiKHTi.– La réalité des surproductions


générales. Essai d'une théorie des crises générales et
périodiques. Extrait de la Herue d'reonomir poUtii/ite,
1008-1909,Paris, Larose et Teuiu, 190!»,1)9p., in-8".
La théorie qui nous est présentée dans celle élude prétend
rendre compte de la possibilité des crises générales de sur-
– Ce qui nous rend
production, et, ensuite, de leur réalité.
difficile de concevoir une réelle surproduction, c'est d'abord
la loi connue des débouchés (tout produit trouve toujours un
autre produit contre lequel s'échanger;; alors, puisque toute
surproduction en une branche signifie une sous-production
en une autre branche, comment attendre une baisse générale
des prix plutôt qu'une hausse ?Et comment, d'ailleurs,
admettre une surproduction générale, alors que les besoins
sont indéfiniment extensibles? – Il est vrai quesi le besoin
abstrait de richesses est illimité, le besoin des biens concrets
actuels peut et même doit décroître, puisqu'à chaque satis-
faction nouvelle l'utilité de chaque unité nouvelle du produit
diminue. On peut concevoir, en effet, alors que l'ensemble des
rapports des objets les uns aux autres reste constant, que le
rapport de chaque objet à nous-inéme, sa varleurd'usage, qui
est ce qu'elle est indépendamment de toute comparaison,
varie; que, comme le dit Wagner, de la foule des estimations
particulières résulte, a la manière d'une moyenne, une
valeur d'usage sociale; et que celle-ci, à un moment, par suite
rie mille fluctuations particulières, exprime une moindre
dôsirabilité d'ensemble des marchandises. – La baisse des
prix viendrait donc de ce que les marchandises sont moins
désirées, et inversement. Mais l'auteur rencontre ici la théorie
quantitative de la monnaie, qui explique la baisse des prix
par la diminution du numéraire, ou, au moins. par l'accrois-
580 L'aS.N|5bSOCIOLOGIQUE.
iMOO-iiM»

semeut du besoin dudit uuméraire. II pense pouvoir la mon*


trer contredite par les faits. Dans les périodes do dépression,
oi'i le stock métallique a crû, en même temps que baissait
l'utilité finale de la monnaie, baissait plus fortement encore
la valeur d'usage des marcliuudises, et, daus des périodes
inverses, de même, dans le sens de la hausse. Considère-ton
le besoin de numéraire? Si, en période de prospérité, les prix
ne baissent pas, malgré que ce besoiu augmente, et inverse-
ment, c'est qu'en même temps que croissait ce besoin, aug-
mentait plus vite la valeur d'usage des marchandises, et
inversement. La théorie quantitative de la monnaie reste
d'ailleurs exacte, pour un état d'équilibre, dans un régime
précapitaliste, a l'intersection des périodes de prospérité et
de dépression, et enfin pour les périodes cycliques globale-
ment envisagées (si, dans l'ensemble d'un cycle périodique,
la circulation monétaire a été plus ample ou la quantité de
marchandises plus restreinte que dans l'ensemble du cycle
antérieur, la moyenne des prix pour tout le cycle sera plus
élevée M. A. croit pouvoir le vérifier, en suivant les varia-
tions du stock métallique à partir de 873). Que, restant
exacte dans ces termes, elle soit ainsi contrariée en périodes
de prospérité et de dépression, c'est le signe le plus net du
rôle décisif joué alors par les fluctuations de la valeur
d'usage (ou utilité-limite) de l'ensemble des marchandises.
Pour les causes de la survenance et de la périodicité des
crises de surproduction générale,il faut invoquera la fois l'al-
longement du procès de production et la longue durée de
fonctionnement du capital en régime capitaliste. – II n'est
pas de l'essence des besoins de passer alternativement par des
phases de sùrsatumtion et d'insatisfaction mais il arrive, de
façon inévitable, que l'équilibre entre la quantité des pro-
duits et les besoins se rompt, et l'effort fait pour y revenir
dépasse le but. La production capitaliste no peut satisfaire
immédiatement les besoins accrus (de biens de consomma-
tion;. Il faut construire des machines, c'est-à-dire capitaliser
maison surcapitalisé et ce qui précipite la crise, c'est, une
fois le capital terminé, l'énorme diminution du temps néces-
saire à la fabrication de chaque uuit«. – D'autre part, les
machines représentent une plus grande valeur or, nu mo-
ment où elles commencent il fonctionner, les prix baissent.
Pour ne pas les laisser chômer, on travaille à perte d'où la
persistance de la dépression. Et, alors, on sous-capitalise
SYSTÈMESÉCONOMIQUES i
SgT

bientôt donc, la production va baisser, et une période nou-


velle de prospérité s'ouvrira. – Les industries qui produisant
les capitaux (machines, etc.) sont celles où la crise se uiaui-
feste avec le plus d'intensité et de même, pour la contrac-
tion. Toutefois, les industries qui donnent le branle sont les
industries de consommation le plus assujetties à l'action de
l'homme, le moins dépendantes des caprices de la nature (in-
dustries dontlit matière première est le métal), ou celles qui
satisfont de grands services publics (locomotion, éclairage,
eau).
L'auteur termine son exposé par l'examen des conséquences
économlco-sociales (sur la répartition) des crises. C'est en
période de prospérité qu'on capitalise le plus, parce que, la
consommation totale se restreignant, on peut consacrer du
travail à la formation de nouveaux capitaux. Les revenus en
monnaie, la rente différentielle des services producteurs, mais
surtout le profit, augmentent; le revenu ouvrier s'accroît de
façon absolue, mais diminue sans doute de façon relative, et
le revenu Met ouvrier augmente moins que l'intensité du
labeur. Le surtravail ouvrier permet l'épargne capitaliste
mal nécessaire en un régime où le patrimoine général de la
nation ne peut croître que par l'accroissement des capitaux
privés. – En revanche, la baisse des profits sera plus accon-
tuée que ta baisse des prix et des salaires les ouvriers ne
perdent rien comme producteurs, en apparence, et gagnent
comme consommateurs mais il y a en revanche beaucoup
plus de chômage.– 11 n'est pas prouve d'ailleurs que le socia-
lisme supprimera les crises périodiques, puisque l'illusion
d'où elles dérivent porte sur l'intensité actuelle du besoin,
difficilement mesurable.
On se demande d'abord, en présence des développements
théoriques louchant ht valeur d'usage et l'utilité-limite par où
s'ouvre ce livre, s'ils sont ici bien nécessaires, et si l'explica-
tion des crises y giigneeu précision elsûrelé. Du moins aident-
ils à définit' l'attitude adoptée par l'auteur. U s'oppose à la
théorie qui rond compte des crises par l'épargne, par la spé-
culation, et veut que le mouvement des prix s'explique uni-
quement par les variations de la quantité des marchandises
et de l'intensité des besoins. C'est dans les tendances psycho-
logiques des consommateurs qu'il en cherche le principe, et
pour bien marquer qu'il s'agit de tendances individuelles, il
veut que les besoins se déterminent en l'absence de toute
5*>» l'a.NSKK SOCIULOQIQUG.
1»UC-1'JU9

comparaison, que le besoin social dans son ensemble Desoit


que la résultantede tous ces besoins individuels. Mais d'abord,
c'est une conception bien artificielle eu fait. les besoins indi-
viduels, s'ils restent tels, ne jouent aucun rôle appréciable
dans la vie économique quant aux besoins
collectifs, ou ue
voit pas quelle existence objective teur attribuer, s'ils ne
reposent pus sur des comparaisons des biens, soit avec des
bieus présents d'uutre espèce, soit avec les mêmes biens envi-
sagés dans le passé, ou dans l'avenir, et, dans tous les cas,
accompagnés d'une représentation de prix. Si l'on s'en tient
au donné, a l'objectif, c'est le prix qui apparaît d'abord,
qui
contribue daus une large mesure à informer le besoin social,
et. par lui, ou en mêmetemps, les appréciations individuelles.
L'auteur préteud, il est vrai, que les faits
prouventl'exis-
tence de telles fluctuations de 1» valeur
d'usage ('qui expli-
queraient les dérogations constatées ù la théorie quantitative
de la monnaie;. Mais, même cette théorie admise, en
quoi
le terme « valeur d'usage » est-il, ici.
plus explicatif que le
terme demande » ? Kl eu quoi les faits
prouvent-ils (dans
cette hypothèse) rien d'autre que les mouvements de la
demande' en quoi fondent-ils à expliquer ces mouvements
eux-mêmes pardes changements dans tes besoins individuels
(toujours entendus en l'absence de toute comparaison) plutôt
que par d'autres causes non subjectives? Pourquoi ae pas
dire la demande (et nonta valeur d'usage, croit
plus viteque
n'augmente le besoin de uuméraire, cequi explique la hausse
des prix? Kl comment établir une telle comparaison, entre
un besoin collectif de dernier), et « ta
moyenne des besoins
«
individuels supposés croître et décroître/exister
par consé-
quent, de façon exclusive, dans le for intérieur des acheteurs,
si l'on ne possède pas une commune mesure de nature so-
ciale ? Or, il n'est pas concevable qu'il eu existe et c'est
pourquoi lu théorie de lutilitû-limite n'est, d'aucune façon
vérifiable.
Quanta l'explication présentée du mécanisme des crises, et
de leurs causes, elle est, comme théorie,
intéressante, et cohé-
rente en elle-même, mais ce n'est qu'une théorie.
Qu'il y ait
surcapitalisation en période de prospérité, sous-capitalisation
en période de dépression, ce peut être exact, et un
aspect
important du phénomène. Mais la spéculation ne joue-l-elle
iciqu'unrôleaccessoire.et se bornet elleâ intensifier la crise,
sans être responsable de la surproduction en elle-même ? Ce
S1&TlSN~ BCU~i0HI~tIB~ lie9

qui (rompe, est-ce seulement la représentation de i'intensilé


actuelle des besoins, et du caractère durable de cette inten-
sité, et ue se produit-il pas ici ce qui se produit parfois en
Bourse, savoir qu'où perde de vue rnoiiientauémeut les réa-
lités auxquelles correspondent les valeurs sur lesquelles ou
spécule, pour ne plus prendre garde qu'à leurs mouvemeuts
de hausse ou de baisse ?En d'autres termes, dès que les
entreprises fout appel aux capitaux en quête d'emplois
lucratifs simplement, et dès que ces capitaux affluent vers
elles, ne sout-elles pas soumises, par là, aux lois particulière»
de la spéculation eu général V f/auteur insiste sur l'im-
possibilité de mesurer et de prévoir l'intensité des besoins
mais peut-être cette impossibilité n'est-elle pas absolue
peut-être même n'existe-t-elle pas, en fait, pour les entre-
preneurs, au moins pour nombre d'entre eux; et l'impul-
sion, a ces moments, ne vient peut-être d'eux qu'en appa-
rence. – En d'autres termes, de môme que les producteurs
de matières premières ou de machines, plus éloignés des
consommateurs que les producteurs de biens de consomma-
tion, peuvent se laisser aller a dépasser la demande éventuelle,
à plus forte raison, tes capitalisteset spéculateurs, qui appor-
tent des capitaux aux producteurs de machines eux-mêmes, et
qui sont plus éloignésqu'eux encore des consommateurs, doi-
vent-ils trouver ailleurs que dans la demande de ceux-ci les
raisons de leurs démarches. L'auteur n'avait qu'a pousser
jusqu'au bout, ou qu'à reprendre ici son raisonnement.
Quand même, l'étude est solide et pûnétraute il n'eu faut
que plus regretter que l'auteur, qui montre heureusement,
dans son explication des crises par l'allongement du proces-
sus de production, quelle est l'importance ici du temps, n'ait
pas reconnu de façon plus explicite que la méconnaissance
(inconsciente ou non) de culte notion est à la base de la théo-
rie des débouchés. Il se serait moinspréoccupé de celle-ci, et
de s'accorder avec elle, et aurait pu pousser plus à fond la
recherche proprement positive, seulement amorcée dans son
livre. M. |j.

Hl'KCIHvh (Kam.). Die Entstohung der Volkswirtschaft. \'or-


Irilgftu. Vorsuchi».S1"slarb vrrm'ilirtuund vcrjicssf-rteAufl.ier;
Tiibinimn.l.aupp,Ifl00.xu403p., in-»0(H<>priso,d»ns
cette édition,
disdeux essai*surles villes.Autresremaniement1:
KIUSCIINKH ;I>ai:l).– Die Uazulaengliohkeit des privat-und
jilO L'a.NNKE 1900-190»
SÛCiOLUGIOUK,
gemeiûwlrtschafmdienOrganiBationsprinzips in der Volks-
wirtsohaft. Berlin, Jk-ymonn,1908,vi-08p., in-8°(Analyseet
importancedu système« cat-îtatita)
IIILDBIIANDT. – Reoht und Sitte auf ckw
primitlveren wirt-
sohaitliohea Kulturirtufen. 21"Auil.ltina, Fischer,in-8".
HACIU'AHI. (Kkmx).– Nomadentum und Aokerbau. Schmollev's
Jhb., 1908,2, p. 313-327(d'aprèslu i" ùdiliuude Uildbrnadt).
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FKCHNKH (Hehma.nn).
– Wirtsohaf tsgesohlohte der preusaischeu
Provins Sohlesien in der ZeitIlircr provinxiellen Sclbststttndig-
keit, 1741-1800.
liresluu,Scholll&nder,1907,x-736p., in-8«,
JACOBSSOIIX – Zur Entwickelung des Verhaeltnieaes
(A1.KBK1»).
zwisoben der deutsoben Volkswlrtsohaft und dem Welt-
markt in den lelctcn Jalirzelintr-n.Zeitsch.f. d. gc»,Staalswifs.,
1008,2, p. 248-292.
BOGART (KrxkstIxuutv). – Economio history of the United
States. London,Longinai», 1907,:>22p.,in-8»(Késuraéutile et
apprécié).

1IKKLKIN(\Vili,ihald; DasDorflebenlnseinergesohiohtllohen
Bntwickelung jçexeigtan der ficachiulit» eincseinzclnenDoifes
an den fSrniuenvon ISuyern,Frankcnund Scliwaben. Hegens-
burg, Maiu,1908,xv-20Vp., in-8°.
IIOL'NIATIAX (Uentoh).– Studien zur Théorie und Gesobichte
der Wirtaohaftskrisen. I. Wirtschaftskrisen und Ueber-
kapitalisation. Eine l'ntersuchungliberdie Krsclieinungsrcirinen
und L'rsaclien
der pcriodisclienWirtsclmrtskrisen.
H.Qesobiohte
der Handelskrisen in England in Zusammenliangmit der
KSl'ÈCESDK LA PIIODUCTIOX 501

lîntwicklungdes englUclienWïrtscliaflsleljens1040-1840.Mlin-
vh-188et 312 p., iu-H1'
i.'lit'i),Heinhardt,l'JOH, (Analyseaerieuse«t
utile, bien i{u'aboulissaiilà des formuIcK au fond un peu tauto-
logiques).

III. E3PÊCK8
DKLAMWDUCTIO.V

Peu nombreux encore cette fois sont les livres qui ont
pour sujet propre une des questions de spécification écono-
mique. Mais si, dans leurs principes, elles n'ont pas inspiré
d'œuvre systématique, elles surgissent du milieu des faits
étudiés par les économisteset sont fréquemment attaquées ou
frôlées par les auteurs, qui, sans s'y être assez préparés,
rencontrent, sur la voie de recherches différentes, leurs
difficultés et leurs obscurités préliminaires. Nous le consta-
terons plus d'une fois dans les analyses ultérieures. Nous
verrons, notamment, combien il serait utile de distinguer
positivement les espèces auxquelles s'appliquent les moda-
lités d'un même régime, comment devrait se poser le pro-
blème de l'intégration, qui n'est pasun phénomène de régime,
et qui ne saurait être élucidé comme phénomène morpltolo-
gique avant que les éléments spécifiques qui constituent la
structure intégrée aient été déterminés.
Qu'est-ce donc qu'une espècede la production, quels en sont
les caractères et les éléments, comment peut-on les déter-
miner ? Comment les espèces se constituent-elles, sous quels
rapports de l'une à l'autre, dans quelles conditions? Comment
varient-elleset commentse différencient-elles? Il y a là toute
une série de problèmes sociologiques,qui sollicitent des expé-
rimentations précises comme nous en entreverrons quelques-
unes dans les ouvrages analysés plus loin et qui ne peuvent
manquer, en tout cas, de soutenir la curiosité et l'intérêt de
la recherche.
Nous signalons, à cette place, un ensemble d'études sur des
économies d'industrie, considérées au point de vue de l'in-
fluence réciproque de l'économie et de let technique car ce
nous parait être avec les phénomèues de spécification que la
technique peut avoir les rapports les plus immédiats; mais
ces études intéressent aussi d'autres sections.

1IESSK (A.).– Gewerbestatistik (Grundrisszum Stiuliumder poli-


titwlivnOeUonoraie,
vonJ. Conrad. IV.ïeil. Slalislik.n. Teil.Die
09i l'a.NNKKSOCIOLOQIQL-K.
lUUO-1'JtiU

Stalistik dur uirlschuftltclieii Kullar. n. llaiïte. 1. UJ. \énn, Fi.


sclier. 190'J,x-37t)p. jjr. iu-S". ;Uouuorûuuiuu critique des infor-
mations statistiques, pursonnu:) employées, forces motrices, etc.,
sur les diverses industries eu AllemauiiKet dans les divers
pays.*
1IEHZ;llL(iu). – Die nationale Berufsgliederung in Maehren
und Sohlesien. Ztitsch.f. Vulktiv., Sosiulpot. u. Verwatt., I1JO9,V,
p. iioa-ois.
iE.SCI.HK (Jkan). – Aspects réoeiita de la oonoentration indus-
trielle. Lintêtîi-aliuii duus la uu-tullurpic. Hevuvikoaomique iuler-
iMtioiwle,août l'JO'J,p. SMi-i'Ji,

MALNIKII ;Hk\k La distribution géographique des indus-


tries. Paris, (Html et lirii-re (Kxtrail di- la Hnue inlenuitiomtk
de autialuyie hrocli. in-8". (T(>utaviveintéressante, mais
l'JOX,
travail liûlif.;

Tecinlsoh-volk8wirt8ch8ftliohe Monographiea. ligg. von Liu-


wiii SixziiEiitKii
Bd. I..SCUL'CIIAUT(Tiikuiuh;. – Die volkswirtschaftliolie Be-
deutung der teohnischen Entwicklung der deutsoben Zuoker-
industrie. l.c-ip/.ig,Kliukliardl. 1908. vm--ji;7p. ia-8".
lid. II. H.v.VUMAX.N
HIkhm. Jlsti.n). – Die oekonomisohe Bedeu-
tung der Technik in der Seesobiffahrt. lli<l.. l'JO», vni-103 1».
in-8".
Hd. III. CHOSSMAX.X ;Hobkiit). Die teohnisohe Entwicklung
der Glasindustrie in ihrer wirtsonaftlicher Bedeutung. Ibid.,
1UU8,vi-121 p. in-8".
Bd. IV. DRHK.SSER1-i.uxon'. Die teohnisohe Kntwieklung
der Schwofelsaeurefabrikation u. ihre volkswirtsohaftliohe
Bedeutung. Ml., l'JO». vm-220 p. in-fe".
Bd. Y. KItTKI.(JosHK;.– Die volkswirtsohaftliohe Bedeuttmg
der teohnischen Entwicklung der Zelluloidindustrie. Ibid.,
1009.13'J p. in-8".
UJ. VI. IIKI.\K.MA.N-B«Ai;XSUIIWEIi;
(Uiiirx. – Diewirtschaft-
liclte und soziale Entwioklung der deutschen Ziegelindus-
trie unter dem Einflusse der Technik. Ibid., 1000, 130 p. iu-8".
Wd. VU. WACII.SiAi.exa.w.k). – Die Tolkswirtsohaftliolie Be-
deutung der technischen Entwicklung der deutsohen Woll-
industrie. Ibid., l'JO'J, i:ij p. iu-8".
lid. VIII. llKHIt (Fhikohich;. – Die volkswirtschaftliohe Bedeu-
tung der teohniscbon Entwicklung in der Schuhindustrie.
lirid., 1009, 148p. in-8".
HKQIUES
DBLAPltODGCTIOH t>93
Bel.IX. SCIIARFRII(Fiuxï). Die wirtaohafUiohe Bedeutung
der teohnisehen Entwioklung in der Papierfabrikation.
Ml., 1U09,28*p. in-8"(Collection«\ suivre).
\VASSEl\MANN (Lnnviu). Die deutsohe Spirltusindustrie. Eine
wirtscliaftlieheMonographieuulcr k'sonderer llct-iicksiclitigunf,'
des Kinflussrsdes Toclinik. Leipzig,Dunukeru. Ilumblot,1908,
vui-218p. in-8°.
ESPINAS((jKoiuiKs). – Essai sur la teohnique de l'industrie
textile à Douai aux XVIII" et XIV sièoles (1229-1403).
Extrait des mémoires de lit Socii-lôîles antiquairesde France,
t. LXVII1.Paris, 1900,81 p. in-8"(Précisel intéressant}.

IV. DKLA PRODUCTION


RI&IMKS
l'ur MM.
(i. Uoi'iwi.v,
Il. Boruuixet F. Siuiand.

HARTIG (S). – Terminologie der Gewertoepolltlk,


zugleicli oiu Beitrag zur gewerhliciien Mittelstandsfrage.
Leipzig, Bohme, 1908,iv-121p. iu-8°.
Voici un ouvrage qui, au moment oit nous allons aborder
les questions de régime et de tonne, avec les définitions et
les distinctions qu'elles impliquent, soumet à la discussion
une terminologie et une méthode terminologique. L'attention
de M. H. a été spécialement attirée sur les inconvénients qui
résultent des erreurs et des confusions de la terminologie de
la politique industrielle, sur les incohérences, conflits de
juridiction, désordres de pensée ou de pratique causés par
l'emploi erroné, injustifié des termes par lesquels on désigne
les catégories industrielles, les institutions, les établissements
et les groupements, industrie petite ou grande, fabrique,
artisanerio, industrie ù domicile, classe moyenne(vices encore
plus frappants peut-être dans la langue allemande, aux
vocables si compréhensifs et souvent si indistincts).
Sans méconnaître la valeur de ces raisons pratiques, nous
voyons surtout à l'établissement d'une telle terminologie un
intérêt scientifique de premier ordre pour l'économie politi-
que, sieutravée par les maleutendus imputahles au manque
de terminologie universellement adoptée et universellement
valable. La nécessité d'établir une terminologie rationnelle,
c'est la nécessité d'adapter aux faits, au moyen de vocables
E. UuiiKHEiu.Anmiosudol.,1UOU-1909. 38
59i L'ANNÉE 19WM909
SOCIOtOOIOCB.

précis, des notions exactes. En ce sens, de la valeur de l'œuvre


terminologique dépend la valeur de l'œuvre scientifique elle-
mémo.
Mais si cette terminologie doit exister, elle sera le produit
du travail collectif des savants. Nous ne pouvons estimer
que
comme un essai partie! les propositions de M. II., en les
jugeant surtout par la méthode. Limitant son enquête aux
vocables usités dans les lois et les règlements, il s'est appliqué
à en donner des définitions précises, en déterminant le contenu
logique de chacun. Sa méthodeest celle d'une analyse déduc-
tive. Les termes les plus simples que fournit la langue admi-
nistrative, Gewat/e, Industrie, Uandicerk,une fois définis l'un
par rapport à l'autre, les définitions ultérieures s'ensuivent
ou s'excluent, et les vocablesde la terminologie industrielle
s'ordonnent en des séries, en des listes, en des classifications
qui doivent s'appliquer àla réalité. Maiss'y applique^- elles?
C'est ce que l'analyse ne saurait garantir. L'auteur n'ayant
même pas tiré ses définitions des textes, en estimant les été-
ments de réalité qu'ils représentent, c'est seulement dans la
seconde partie de son livre, après l'élaboration logique de la
première partie, qu'il cherche à établir l'accord de ses défini-
tions avec la pratique de l'administration, d'une part, et, de
l'autre, avec la pensée des économistes. Sur ce dernier point,
d'ailleurs, sa documentation est tout à fait insuflisante.
M.H. part de la notion de Gewfrbe,qui est pour lui celle d'un
travail productif d'utilités en vue d'un gain au profit du pro-
ducteur. Il y distingue deux espèces l'une, ifandincrk,
exige dans le travail des qualités spéciales l'autre, l'industrie
occasionnelle, Gelegenheitsgewerhe, n'en exige point. La notion
de llantlwerk, au cours du développement économique, se
dissocie en deux autres celle du Ilanéeerk stricto xenm et
celle de l'Industrie, qui adjoint, aux qualités spéciales ou pro-
fessiounelles du travail, des moyens de réalisation extrin-
sèques. Ainsi se différencient, dans l'économie contemporaine,
l'industrie, l'artisanerie et les industries non qualifiées.
Maisde nouvelles distinctions interviennent, qui
s'impliquent
dans les premières, celles de salariés et d'entrepreneurs, de
métier et de profession et il faut encore définir la notion
d'exploitation. Si bien que, pour chaque branche ^industrielle,
il y a lieu de déterminer la nature de l'exploitation, Getcerbe-
betrieb, son caractère d'industrie ou d'artisanerie, sa consis-
tance (avec ou sans établissement), sa grandeur. Alors
appa-
nliiuu8$ »& m i'itonucTiox 893
l'ait une notion nouvelle, celle de travail à domicile, qui doit
subir les mômes distinctions et lu même décomposition que
les précédentes. Cette analyse permet de définir les termes
usuels, depuis celui do Geictrbrjusqu'à celui de Ileimarbtilev
(p. 27-29).Après la deuxième partie du livre, dont l'objet est
d'établir l'accord des définitions avec la pratique administra-
tive et la langue économique, une troisième partie montre
l'application qu'un peut eu faire aux dillicultés d'interpréta-
tion de la loi du 26 juin 1897,concernant l'arlisanerie, et plus
généralement a l'intelligence (les lois industrielles.
On voit que cet essai de terminologie s'applique principa-
lement aux pays de langue allemande. D'autre part, le souci
do la pratique le retient aux notions de l'écouomic contempo-
raine. Parle défaut de toute analyse historique, l'auteur se
ferme la voie des explications réelles. Sa méthode d'analyse
logique et intrinsèque lui enlève la possibilité d'une inter-
prétation qui suive les variations et révolution des faits
auxquels s'appliquent les concepts et les mots. Non que son
analyse minutieuse ne conduise à des précisions et à des
distinctions utiles, qui du reste devraient déjà être classiques
(différenciation de l'artisanerie et de la petite industrie,
des caractères d'espèce et des caractères de grandeur; dans la
question de la classe moyenne ou des classes moyennes, dis-
tinction de plusieurs catégories économiques). Mais n'est-ce
pas qu'ici ses définitions initiales se rencontrent avec une
réalité économique qu'il a atteinte presque immédiatement,
au travers de ses classifications, sans doute parce que cette
réalité l'intéressait plus directement et qu'il la connaissait
mieux? Ailleurs, au contraire, nous pouvons constater à
chaque instant les vices d'une méthode qui ne comporte point
l'interprétation historique et positivede la réalité économique.
Ala base même du travail est la distinction de Wtrlimneiie
et de VimluUritt«ou qualifié? répond-elle à une différencia-
tion observée ou observable historiquement, à des moments
et dans des conditions détermiuables ? L'auteur l'a obtenue
en dissociant dans le genre Gewerbe,par une opération toute
logique, les deuxespèces llaudaerk (Gewerbeexigeant des qua-
lités spéciales) et Celegenheittgewerhe(Oewerhen'érigeant point
ces qualités). Mais comment a-t-il arbitrairement choisi ces
caractères? Quand l'industrie, à son tour, est par lui séparée
de l'artisanerie, c'est pour cette raison qu'elle recourt à des
moyens extérieurs de mise en couvre et sans nous demander
59$ L'ANNEE
SOCIOLOGIQUE.
1806-1909

loi si Indistinction terminologique répond à une réalité, nous


constatons seulement qu'elle est fondée sur des caractères
technologiques et non proprement économiques, ou du moins
dont la valeur comme caractères économiques appelle une
discussion. L'auteur croit, par ces moyens, avec ces principes,
éviter toutes les difficultés, toutes les contradictions logiques.
abstraites, sans doute réelles, de fait, non point. Par exemple,
il estime que le nom d'industrie doit s'appliquer à une indus-
trie du bois dont les conditions normales d'existence impli-
quent l'emploi du mécanisme teclmiqueappropriéà l'économie
contemporaine; mais, si on observe que cette même industrie
survit avec les caractères de t'artisaiierie dans certains dis-
tricts, à la faveur de certaines circonstances, devrons-nous
lui refuser le nom d'industrie qu'elle a gardé dans l'usage ?
Ainsi M. H- laisse fléchir sa méthode. Il admet que la
capacité d'existence d'une catégorie industrielle peut être
indépendante de la technique comme de la grandeur; mais il
maintient, pour conserver le principe de ses définitions, la
nécessité de capacités intrinsèques, spécifiques pour chaque
catégorie ou chaque espèce.Soit mais alors, comment déter-
miner ces conditions internes d'existence, si ce n'est relative-
ment aux différents milieux économiques dans lesquels est
observée l'existence de ces espèces et de ces catégories ?
M. H. lui-même, conduit par ses propres analyses à serrer de
près la définition de l'arlisanerieet de l'industrie, reconnaît, à
proposde l'iudustriedu vètemeut, de confection ou sur mesure,
t'importance que peut avoir pour la conception d'une indus-
trie celle d'un t ypenormal de fournitures dont elle est capable
d'assurer le service. Voilà une notion économique positive,
dont on prévoit le rôle et l'extension possibles, et noussommes
loin icides principes et des définitions de l'auteur; maisnous
allons y revenir pour tomber dans des tableaux de classifica-
tions compliquées, scolastiques, on des catégories disparates
sont présentées commerelevant de vocables communs, etdans
des séries de définitions qui rassemblent les notions les plus
hétérogènes, et d'ailleurs débordent hors des cadres logiques
de l'auteur.
M. H. fait la distinction du métier (Qewerhe) et de la
profession(Beruf), mais c'est pour introduire dans une termi-
nologie présentée initialement comme celle de l'industrie et
des groupes industriels la notion spécifiquement individuelle
de profession. Ainsi l'artisanerie est définie comme une
DB LA PRODUCTION'
WSgIURS S97
Mtt -%tft 1 j II III At _#_
profession (p. 13, 28;, laquelle peut d'ailleurs être exercée
comme industrie indépendante, mais conserve néanmoins
la détermination des capacités techuiques et individuellesde
l'artisan. Par de semblables définitions, ou fait bon marché
de cette solide réalité d'institutions familiales et corporatives,
d'institutions économiques multiples qui caractérisent le
régime de l'industrie, et qui montrent que l'artisaueiïe im-
plique groupemeut, classement, structure sociale déterminée a
par des éléments dont il n'est tenu ici aucun compte.
Demême pour la notion d'établissement. Jusqu'au moment
où elle apparaît, l'analyse développe des concepts, des défi-
nitions logiques mais la définition même de l'artisanerle
comme profession, amenaut avec elle la catégorie de cas où
l'artisanerie est exercée comme industrie in dépendante,
Uewerbe,amène aussi la notion d'exploitation industrielle,
Uetcerbebetrieb.Ainsi cette notion ne sort point de la réalité,
mais résulte du mouvement logique des concepts, et demeure
vide. La définition réaliste de l'établissement, la valeur pri-
mordiale de cette notion, les questions de situation, de con-
sistauce et de structure qu'elle implique,.toutcela n'est même
pas indiqué.
La méthode de M. H. ne le conduit donc pas à une termi-
nologie exacte et valable. Ainsi, sur les termes et les notions
qui se rapportent à la forme et au régime de l'industrie, elle
n'apporte que confusion. L'avlisanerie apparaît tantôt comme
un régime, compatible avec des formes, et eu particulier avec
des grandeurs d'établissement dilîéreules, tantôt comme une
iorme, liée à desconditions techniques d'existence et de déve-
loppement. De même Ja fabrique, notion morphologique pré.
cise, est définie comme impliquant uue opposition sociale
entre les entrepreneurs et les ouvriers, c'est-à-dire essentiel-
lement comme un régime (p. 28). De même, l'analyse des
rapports entre l'artisanerie et la petite industrie manquede
clarté et d'eflicacité, faute de distinction entre la forme et le
régime. Demême enfin, ta terminologiede l'industrie à domi-
cile demeure sans portée quand elle conduit il cette défluilion
purement négative d' uuecatégorieindustrielle admettant des
moyens techniques qui n'exigent pas nécessairementla consti-
tution de fabriques.
En réalité, ce livre implique toutes les questions de la
spécification économique qui conditionnent une terminologie
valable, mais il n'eu résout aucune et ne les pose même point.
598 l'asxkk suciotuutgus. luOK-i'Jût»

Toutefoisla réalité contemporaine s'y laisse entrevoir, et avec


elle le seus dans lequel l'investigation pourrait être poussée.
Les premières pages du livre, sans l'exprimer, appellent la
notion de fonction c'est parce qu'il répond à une fonction
déterminée que l'artisan peut survivre, dans certains cas, au-
dessous des conditions normales de son état, logiquement
déterminées (p. Ci. S'il est vrai qu'à la différence de ce que
l'auteur nomme industrie l'artisaoerie soit indépendante de
certaines conditious locales et différentielles d'établissement
et do développement, c'est que la fonction économique des
exploitations auxquelles elle s'étend diffèrede lu fonction des
exploitations industrielles; et si, contrairement aux asser-
tions de l'autour, ou peut observer des cas où l'arlisauerie
dépend de ces conditions, c'est qu'il existe une analogie de
fonction déterminée par des conditions extrinsèques, condi-
tions à découvrir par l'observation des milieux. Telle serait
l'étude positivedes eoudi tioasd'existeuceetde développement,
des foncliouset des variations, morphologiques coucoinitaules,
dont .M.11.,là où il s'en éloigne et là où il s'en rapproche
occasionnellement, montre la nécessité. H. 13.

DOREN(Alfred). Studien aus der Florentines Wirt-


schaftsgeschlchte. B. 2. Dus Florentiuer Zunftwesen vom
vierzelmten bis zumsechzehnten Jaltrhundert. Stuttgart u.
Berlin, Cotta'sche Buchhandlung, li)(J8,xxn-802 p. in-8.
Ce volume est le second de la série des études de M.Doren
sur l'histoire économique de Florence. Le premier, dont nous
avons rendu compte traitait de Vindustriedrapièreii Flomict
du xiv"au xvi" siècle; mais on a pu, dès ce premier compte
rendu, dégager, de l'œuvre complexe des éléments impor-
tants se rapportant au régime corporatif dans l'industrie du
drap. Toutefois nous attendions l'étude d'ensemble de ce
régime qui a en à Florence un développementsi considérable,
une vie si intense, une activité si multiple et si précise qu'il
fournit là un des cas typiques auxquels peut s'adresser l'ana-
lyse. A des conclusions générales sur le régime corporatif
M. D.se défend fermement d'avoir prétendu (p. ix; mais il
espère, et il a raison, que son travail sera une contribution
désormais indispensable à la connaissance du sujet.

1. Annéesociologique,
t. Y,li. i'i'J-M, M5420.
RlïfilUKS PK LA HIODUCTIDX Q9<J

Comme le précédent, il repose sur une très riche documen-


tation. Les archives de Florence out (;lé explorées avec la
môme intelligence et lu même sûreté. L'uuteurs'est aussi servi
des travaux historiques parus. H s'est d'ailleurs imposé de ne
point grossir son livre d'une vaine adjonction d'histoire poli-
tique, de ue point le rapetisser aux particularités locales, aux
curiosités d'archives. Et pourtant ce volume, si solidemeut
établi sur lu réalité concrète de l'économie, fait quelques
fâcheuses concessions it l'esprit des historiens généralisateurs,
à uti idéalisme vague. 11est regrettable que les conditions
proprement économiques (les(ail's et des changements décrits
soient relativement un peu estompées, et surtout que les causes
profondes, les causes réelles des phénomènes n'apparaissent
point démoustralivemeut daus une série d'inductions pré-
cises. Mais celle démonstration était-elle possible dans le
présentouvrage, tel qu'il été conçu?
Dans le livre sur l'industrie drapièie, l'étude de la corpora-
tion avait pour base une étude morphologique très minu-
tieuse, dont ou ue pouvait conclure l'existence d'un rapport
de causalité eutre la forme et le régime de l'industrie, mais
qui permettait, grâce à lit netteté de la double description, de
porter sur les institutions des deux ordres, régime et forme,
un jugement ferme et précis. Avec ce second volume, nous
abordons l'étude générale du régime corporatif. une étude
qui s'étend toute lit diversité des industries, eii prenant ce
mot dans le sens le plus large, et c'est précisément alors que
nous fait défaut l'étude morphologique. Nous constatons des
variât ionset des diflèmice* daus ce régime corporatif floren-
tin, nous voyous les mêmes problèmes se poser diversement,
et nous manquons d'une description morphologique compara-
tive, qui aurait pu ne pas élucider d'emblée les problèmes,
les causes des variations et des différences, mais qui eût dis-
sipé des obscurités, qui eut replacé dans la réalité des établis-
se montset des formes économiques les combinaisons et les
modalités des rapports juridiques, d'un caractère d'abstrac-
tion plus subtile. Ht si, pour des raisons de méthode et de
clarté, il fallait dissocier les deux éludes, la description mor-
phologique préalable eut rendu le plus grand service à la
description et à l'intelligence du régime.
Mais elle u'eût point suffi. Dans la matière complexe du
régime corporatif, on comprend mal ou môme on ne com-
prend poiut les phénomènes quand ils s'appliquent à des
600 I.'aSNBK SOUfOLOGIQUB. 4UO6-WJ

unités économiques, établissements ou groupements, dont


l'espècea /»«varier. Les institutions juridiques lui constituent
le régime corporatif ne s'appliquent pusici à des groupements
homogènes, il une industrie définie et circonscrite successi-
vement, ce régime s'étend à un nombre accru d'industries
diverses et sujettes a des transformations spécifiques. Dès
lors, peut-on se représenter exactement l'organisation réelle,
les valeurs réelles du régime corporatif, les conditions
internes de ses variations, de sou développement, si l'on
manque des éléments de connaissance que les documents
fournissent sur ces phénomènes de spécification? A chaque
instant, le livre même de NI. D., qui ne les truite point, qui
ne les recherche point, les indique, les évoque, mais de façon
trop incomplète et indéterminée pour apporter à l'interpréta-
tion le secours désirable et indispensable. Néanmoins lu con.
tribution de M. D. mérite une sérieuse considération.
Son premier chapitre traite des origines dit régime corpora-
tif à Florence. Origines obscures, mal connues, difficilement
connaissables. Il faut se rabattre sur des formules négatives
pas de traces d'une organisation corporative archaïque, de
source romaine ou byzantine. Au.vu' siècle apparaît l'organi-
sation du grand commerce, puis le régime corporatif se déve-
loppe rapidement, d'une industrie et d'un commerce à l'autre.
Presque dès leurs débuts, les corporations prennent une part
active à la vie politique. D'autre part, entre elles s'accusent
des différences, qui sont celles de deux classes; puis' s'accom-
plit le divorce des grandes corporations aristocratiques et des
corporations démocratiques, populaires. Au xm" siècle, les
corporations sont devenues des corporations politiques, aptes
à la direction de la cité, bases de toute l'architecture de la
constitution florentine (p. Goi. Mais leur organisation n'est ni
homogène, ni stable ••onobserve la tendance des grandes cor-
poratious centralisées et puissantes à conserver le pouvoir et
la direction, celle des petites corporations industrielles à se
grouper, à s'associer, pour conquérir le pouvoir politique,
tout en retenant le plus possible de leur indépendance et de
leur autonomie (p. "6). Et c'est en cet état que l'historien les
saisit au xiv* siècle, pour faire l'analyse du régime qu'elles
offrent, pendant deux siècles, à l'observation.
Il décrit d'abord, dans le chapitre second, les rapports de
Findiridu et de la corporation, en examinant la question de
l'obligation corporative et de l'immatriculation. Dans l'orga-
MioIMKS DR LA PUODUCTIOS 091

iiisiilion florentine l'obligation apparaît, non point comme la


manifestation d'un dogme et d'un système, imposé uniforme-
ment, abstraitement pur lu corporation à ses membres, mois
comme le produit d'un développementqui s'étend sur l'espace
d'un siècle. Etpourconiprendrecedéveloppernentet la notion
vraie de l'obligation corporative, il est nécessaire d'en disso-
cier tes éléments et de rechercher commentun droit cohérent
s'est constitué avec des obligations séparées, variées, les unes
imposées par l'Élut, comme règles organiques s'appliquant
non seulement aux membres des corporations, mais aux arti-
sans et ouvriers des industries, les autres résultant des droits
concédés ou reconnus par l'Étal aux corporations, droits
d'ordre financier, juridictionnel, économique. M. D. examine
tous ces faits, il montre comment les corporations s'efforcent
d'étendre leurs droits contre la résistauce des indépendants
et des isolés, les conflits entre elleset l'Ktat, qui peut leur être
opposé par d'autres considérations, d'autres intérêts ou
d'autres (onctions que les leurs. Puis il étudie les formes, les
procédures, les pratiques de l'immatriculation.
Dans le chapitre III, M. D. décrit la structure interne des
corporations; en premier lieu, leur extension locale, le clas-
sement administratif de leurs membres; en second lieu, leur
composition économique et sociale, c'est-à-dire la répartition
de leurs membres en membres de droits pleins et membres
de droits limités, travailleurs ruraux, colporteurs, travailleurs
industriels, compagnons, apprentis. Puis le chapitre IV décrit
les organes d'exécution, fonctionnaires ordinaires, consuls,
conseil corporatif, cumérier, notaire, et fonctionnaires extra-
ordinaires les assemblées générales, les'élections.
Vient ensuite une série de chapitres sur les fonctions et le
fonctionnementde la corporation. Administration financière
(chapitre V.) recettes, dépenses, budget, capitaux fonctious
judiciaires (chapitre VI) compétence des tribunaux corpora-
tifs, procédure et voies d'exécution police industrielle et
pénalités (chapitre VII.) police de la qualité, de la mesure et
du poids, du prix et de la quautité; police de lu voirie, de
l'hy-
giène et des impurs moyens de ctmlrôlc (dénonciations,
espions, fonctionnaires de surveillance, timbre, marque,
signes probatoires, etc. ordonnances concernant les rela-
tions corporatives, particulièrement entre les maîtres et leurs
ouvriers; politique sociale (prescriptions d'ordre religieux
concernant les fériatiousj. Le chapitre VIII traite des sta-
OT& t'ASSÉK SOCIOLOOIgUK.i'JU0-190!>

tuts et règlements corporatifs, le


chapitre IX des fonctions
militaires des corporations, le chapitre X de leurs fonctions
d'udministration des bâtiments et fondations. Enfin le cha-
pitre XI expose les conclusions de l'auteur, les résultats gé-
raux de son étude; et ce chapitre
important fp. 719-700) mé-
rite une analyse plus détaillée.
Les corporations florentines out en eu sommeà
remplir trois
fonctions générales elles ont eu à organiser les forces écono-
miques et sociales dans l'industrie et daus le commerce,dans
la cité et dans la campagne; elles ont été, a
partir du
xnr siècle, les piliers de lu constitution
politique; elles ont
été enfin des orgaues d'administration communale. Par
ces
fonctions différentes, elles représentent des forces et des ten-
dances diverses, auxquelles se subordonnent d'autres forces
et d'autres tendances particulières, dont le choc ou la
combi-
naison ont déterminé les variations du régime
corporatif et
de son exercice. Ce régime, tel
qu'on l'observe en plein fonc-
tionnement, est le résultat organique d'uu développement de
plus d'uu siècle, pendant lequel, dune part, il s'est succes-
sivement étendu, au delà de ses cadres originaires, ceux des
classes moyennes, à presque toutes les
parties de la popula-
tion, depuis l'aristocratie marchande jusqu'au
prolétariat, et,
d'autre part, a manifesté dans les
groupes uue tendance crois-
sante à la concentration.
La corporation florentine est, en première
ligue, comme
toute corporation est général, un organe de
réglementation et
de coordination de la vie
économique. Son œuvre de police
industrielle ne présente guère de caractères
particuliers il
«
n'y rien de spécial dans son opportunisme ni dans les
pro-
grès de cet opportunisme. Elle a pour fonction l'organisation
interne des industries, en ttint qu'elles se distribuent sur le
sol, qu'elles rassemblent des unités à administrer,
qu'elles
réunissent des individus socialementdifférents à coordonner
on hiérarchiser. A ce dernier titre, elle fournit un
cadre »ux
classes économiques qui finissent
par s'y superposer, après
un développement dont l'histoire, longue et en
grande partie
obscure, est celle de sa propre constitution. Mais à ces folle-
tions générales, auxquelles se reconnaît le
régime corporatif,
la corporation florentine on
ajoute d'autres, qui lui donnent
son caractère spécifique ce sont des fonctions mlministratices
et constitutionnelle*. De l'autonomie administrative
résultait
la nécessité d'assurer à lit corporation une certaine
activité
UKlUMKS
DE LA PRODUCTION 603

sur le domaine du droit pénal pour mettre eu vigueur ses


ordonnances et ses réglementations, particulièrement dans la
grande industrie capitaliste. elle accrut ses pouvoirs juridic-
tionnels aux dépens des propres organesde l'Étal. Sa fonction
judiciaire s'étendit aussi sur ie terrain du droit civil, no» plus
en raison d'une nécessité formelle, mais pour répondre à des
besoins pratiques, les plus impérieux pour les hommes de
l'industrie et du commerce, qui ont le souci d'aller vite et d'y
voir clair sans retord dans les difficultés techniques et dans
les ailuires d'argent. Ses fonctions s'accrurent encore avec le
droit do créer et de développer su propre constitution. qui
entretint une considérable activité législative et réglemen-
taire, avec celui d'appliquer tous les effets de l'autonomie
administrative à l'organisation et à lit gestion des finances
corporatives. C'est ainsi que lu corporation devint un organe
d'administration publique, participant arec l'Ktal à l'iulminis-
Iratiou des institutions d'Étal, des établissements publics que
favorisait et multipliait la vieflorentine. Organisée politique-
ment, elle fut réellement, sur beaucoup de domaines, et prin-
cipalement sur celui de l'administration économique, appro-
priée à la réalisation des nos de l'État. Elle ne se substitua
pas à lui néanmoins: il limita son activité et ses droits; il
demeura, en face d'elle, le repn'nen(ant îlesconsommateur*,qu'il
défendit contre sa tendance au monopole et pour lesquels il
assura la politique des subsistances publiques.
De toute l'analyse du régime corporatif à Florencese dégage
le caractère social des groupescorporatifs. A partir du milieu
du xm"siècle, les corporations se constituent, s'organisent eu
trois grands groupes qui prenneut part comme tels à la vie
politique et qui représentent les trois classes de la bourgeoi-
sie, grand commerce, banque et grande industrie <arti mag-
giori), petite bourgeoisie Uirli mezsunr), petit commerce et
artisans (arti minorinu sens propre). D'ailleurs, la répartition
dans ces trois groupes des différentes professions, industries,
commerces, par toutes les anomalies qu'elle présente, donne
à supposer qu'une multiplicité de causes diverses, écono-
miques, politiques, financières, etc., a déterminé le groupe-
ment. Mais, une fois formés, les groupes témoignent d'une
solidité, d'une force de résistance presque sans exemple
aucun changement dans les rapports économiques, aucun
événement n'a pu les rompre. A l'intérieur des trois groupes,
durant toute l'époque républicaine, apparaît la hiérarchie
OOi l'ASXKK SOCIOLOGIQUE.
1900-1909

officielle,conforme aux règlements. Mais, il cùté de lu hiérar-


chic officielle il y en a une autre qui, déterminée par des dif-
férences sociales et économiques, a une importance primor-
diale daus le seuliineiil populaire elle exprime les senti-
ments de lu cité sur la place respective qu'y occupent les
divers éléments corporatifs.
Cette constitution élémentairede la corporation, sous l'effet
des tendances centralisatrices, aboutit il la constitution d'un
organisme unitaire, lu Mercansa,uuiou des cinq corporations
du grand commerce, qui joint it ses fonctions de ligue corpo-
rative celles d'uu organe d'État, spécialement des fonctions
judiciaires relatives et tous les intérêts du grand commerce,
et en particulier du commerce international. Le développe-
ment de ces fonctions publiques porte l'organisme corporatif
central etdevenir le représentant de l'État en face des corpo-
rations, intervenir dans leurs réformes constitutionnelles, à
tenir lieudetribunalsuprêtne pour les corporaUonsinfûrieures.
Mais ce n'est là qu'une partie des fonctions de la corpora-
tion comme support de la constitution politique. Après le
règlement de 1293, toute la constitution florentine est fondée
sur le régime corporatif le droit de pleine bourgeoisie au
sens large, le droit d'entière participation au gouvernement
de la cité suppose t admissionà une corporation, ou tout au
moins, à partir de 1295, l'immatriculation dans une des
21 corporations politiques. Droit d'ailleurs tout virtuel sou
exercice dépendait des conditions politiques et sociales dans
l'ensemble des corporations et deleur forcepolitique relative.
Il y eut précisément entre les groupes corporatifs une lutte
pour le pouvoir, dont toutes les péripéties retentirent sur les
droits réels des individus. Les changements de régime, les
révolutions, les réformes qui se succèdent daus l'histoire de
la corporation et dans l'histoire de Florence Illustrent ce dé-
bat de plusieurs siècles. Au total, l'histoire montre que, par
son régime, la corporation remplissait avec exactitude, avec
sûreté, avec capacité, les fonctionsde l'État, dont elle formait
lu base constitutionnelle mais cette constitution fondée sur
le régime corporatif était celle d'un État île clam, où les inté-
rêts d'une classe donnaient la direction, taudis que d'autres
étaient maintenues esclaves ou sujettes. En ce sens, la consti-
tion monarchique, brisant ce régime, a permis l'application
d'une politique plus libérale et l'approximation d'un équilibre
entre les classes et les partis. H. B.
HÉailllU
DKLAPIIODUCTIOX 005

ALTMANN(Asiédkh). Le régime corporatif des mé-


tiers en Autriche et en Allemagne au XIX'' siècle.
Bordeaux, Cassignol, 1907, 304 p. iu-8.
Le sujet de ce livre présente uu double intérêt. D'abord, un
intérêt pratique qui se rapporte à l'action législative et régle-
mentaire daus deux grands fïtats modernes; en second lieu,
un intérêt théorique que nous devons considérer ici. Lerégime
corporatif des métiers eu Autriche et en Allemagne, est une
antique institution, ou plutôt un complexe d'institutions an-
ciennes. En durant, en se transformant ou en se reconstituant,
il a traversé des milieux divers et changeants qui fournissent
à l'étude sociologiquede nombreux éléments pour la recherche
et l'étude comparative des causes. Comment les corporations
se sont-elles adaptées n ces milieux, comment leurs cadres et
leurs rouages se sont-ils pliés, agencés ou transformés, quels
ont été dans ces phénomènes le rôle des individus et le rôle
des groupes, le rôle des organisations syndicales et le rôledes
institutions d'Étut, telles sont les questions que le sujet im-
plique et qui en lui nous intéressent.
Disonstout do suite que M. Altinauu ne l'a pas réellement
traité. Son livre se divise en deux parties indépendantes, la
première pour l'Autriche, la deuxième pour l'Allemagne.
L'étude des corporations autrichiennes part delà patente im-
périale de 1859, expose la crise subséquente de la petite
industrie, la persistance des corporations, leurs tentatives de
réorganisation. Puis l'auteur décrit le mouvement de réfec-
tion législativejusqu'à la loi du 15 mars 1883,la reconstitu-
tion des groupes corporatifs, groupements de fait pour la
défenseet l'entente et non corporations limitées, leurs diver-
sités locales et leurs œuvres annexes étudie la « preuve de
capacité», les règles, les distinctions et les transactions avec
lesquelles est prononcée l'admission ait métier et à la corpo-
ratiou; retrace l'activité corporative, les revendications du
parti des artisans et les réformes obtenues, enfin ce qu'il
appelle la protection positive de la petite industrie par l'État
(crédits, expositions,cours techniques, adjudications, prêts,
etc.). Pour l'Allemagne, après avoir examiné l'état de la
législation au début du xix° siècle, M. A. décrit l'agitation de
1848 et analyse les ordonnances de 1840, expose l'histoire
de la loi de 1869,montre la réaction contre le libéralisme et
analyse la loi du 18 juillet 1881, les réformes qu'elle a subies,
000 I.'a.\NÈKSOCIÛLUUIQUR.
VJOU-IWI!)

les résultats pratiques qu'elle a obtenus, puis les projets de


réforme qui aboutissent à lit loi du 20 juillet 1897,ses pre.
miers résultats, et l'essai tenté d'une protection de la petite
industrie par l'État.
Au long de toute cette analyse, l'auteur passe bien souvent
à côté des questions positives et des véritables problèmes.
et se contente de rapides affirmations, par exemple sur le
métier, qui « n'est ni mort ni mourant », qui « à aucune
époque ne pourra céder absolument place » (p. ), etc. Sur
beaucoup de parties du sujet, ses connaissances manquent de
profondeur et de sûreté. La documentation, trop souvent de
seconde main, est iusuflisaute elle omet les dates, les don-
nées quantitatives, notamment pour la description des métiers
au début des périodes considérées les statistiques, faute
d'élaboration et de discussion méthodique, sont incertaines,
difficilement comparables. Sur cette matière peu sure l'analyse
procède sans vigueur, souvent sans dépasser les textes légis-
latifs et réglementaires, la surface des institutions la réalité
humaine et sociale qu'elles expriment, dans leur fonctionne-
ment et leur activité échappe à la prise de l'auteur et ù notre
connaissance. Ce qui trop souvent en tient lieu, ce sont des
préjugés, ou tout au moins un développement de doctrine
scolastique, l'exposition des idées des théoriciens, des pro-
grammes politiques. Et à chaque instant percent les préfé-
rences subjectives, soulignées par des jugements de qualifica-
tion par lesquels l'auteur prend parti.
Il en résulte beaucoup d'insécurité dans l'exposition. Elle
part de lu description du corporatif en Autriche et en
Allemagne au début du xi.V siècle, sans que l'auteur
indique pour quelles raisons il L'a ainsi délimitée, ni précise
à quel moment de leur évolutionen sont des institutions sécu-
laires. Quand il en vient à la patente de I8S9 pour l'Autriche
et à la loi de 1869 pour l'Allemagne, il ne recherche point
quel est le sens profond de ces réformes, et, s'il insiste lon-
guement sur l'œuvre des théoriciens réformateurs, ce n'est
pas pour essayer d'estimer leur efficacité et leur action réelle.
Dans la reconstitution du régime corporatif, M. A. expose les
querelles de métiers et déclare que chaque métier est déter-
miné par sa « nature réelle ». A quoi cette notion correspond
elle dans les faits? A propos des distinctions de métiers et de
corporations, il parle de « logique » (p. 91) la logique n'a
rien à voir ici, elle ne peut se substituer au tait.
11KGIMKS
OtJ LA l'KODOCTION 007
»1 a « m.
Aussi rien de plus vague, de plus indécis que les conclu-
sions. Dire que les corporations restent des œuvres un peu
artificielles, ne peut suilire; les causes des faits exposés ou
indiqués nous échappent généralement. Pourquoi, aux
moments notés, se forme, s'organise et agit une doctrine de
réforme en faveur du régime corporatif ? Quelles sont les cou-
ditions d'où dépend la législation avec ses modalités? Qu'est-
ce qui détermine les « afliuités professionnelles » entre les
groupes corporatifs? Qu'est-ce qui explique ces mouvements
épars de corporatisme, ces réformes partielles, ces succès
divers? Faute d'une méthode satisfaisante, l'auteur a manqué
sur tous ces points les démonstrations que le sujet réclamait.
H. B.
MARTINSAINT-LÉON(f>iE.NNK).– Histoire des corpora-
tions de métiers depuis leurs origines jusqu'à leur
suppression en 1791, suivie d'une étude sur l'évolution
de l'idée corporative de 1791 à nos jours et sur le mouve-
ment syndical contemporain. Paris, F. Alcan, 1909, in-8«,
xxm-795pages.
Les remaniements apportés par M. Martin Saint-Léon à son
livre, dont la première édition remonte déjà à 1897,portent
sur les chapitres concernant les origines des corporations et
la réglementation du travail au moyen âge, la situation des
corporations en province, enfin l'évolution de l'idée corpora-
tive au xix"siècle ils ne lui enlèvent point son caractère de
manuel commode, chronologique et analytique, et M. Martin
Saint-Léon ne s'est pus plus que jadis soucié de grouper les
faits synlhétiquement et de proposer des explications scien-
tifiques aux transformations corporatives qu'il présente. Sur
la persistance des collegiu romain, ileûtpu emprunter quel-
ques faits aux travaux de Hartmann (Xur H'trUcluiftsgeach.
Italiens im friihen MitlthUer,Gotha, 1904),et de M"™ E. Casta-
gneri (Sulk permtensa tlri « collegi» romani nelle carporaxioni
tfnrti e tunlitri iiieilientli, Turin, Il adopte les critiques
faites par Pirenne et Keulge» à la théorie d'Eberstadt sur le
caractère domanial de nombreux métiers français, admet
entièrement le rapport supposé entre le développement du
droit public et l'organisation corporative, tout en voyant
dans la révolution urbaine, qui limita les pouvoirs des sei-
gneurs locaux, la cause essentielle du progrès des corpora-
tions. Ce qui est plus grave, c'est qu'il ne donne de celles-ci
1
008 i/AMKiSb
SOOIOUHMQUK.
WOtMW
que l'histoire externe, enregistrée dans les textes oflkiels je
sais bien qu'il n'eu existe guère d'autres encore peut-on les
interpréter de façonà fournir sur In réalité de la vie corpora-
tive des notions moins juridiques et moins vides il est éga-
lement fâcheux que, pour toute l'évolution corporative eu
France, l'auteur ne donne que des reuseignemoiits qui
touchent exclusivement Paris, rejetant dans un appendice
Informe les notions aujourd'hui acquises sur les corporations
de province, de sorte que ses timides généralisations sont par
surcroît précaires. Enfin, Fagniex, Hauser, Boissonnade, Pari-
set, (îermain Martin ont prouvé que la corporaliou ne cana-
lisait pas toute l'activité ouvrière de l'aucieune France; que
des métiers libres subsistaient, reconnus ou non qu'entre les
villes ù métiers organisés et le plat paya û métiers libres, la
lutte, si l'on en croit de Saint-Léger, a été vivace; que contre
les règles patronales de lu corporation, le compagnonnage
ouvrier a développédes pratiques de défense et d'attaque sur
lesquelles M. Martin Saint-Léon lui-mêmea fourniailleurs des
renseignements; et ainsi conçue unilatéralement l'Histoire des
corpomliotu peut fausser la connaissance qu'on peut avoir de
l'organisation du travail sous l'ancien régime (la preuve en a
été fournie par l'étude récente de M. Cli. Beuoistsur la Forma-
tion de la classeoucrière,dans la Itectiede* 'DeuxMomies,I" no-
vembre 1909). La fin du régime corporatif est mal analysée
(comparer l'exposé synthétique de M. G. Reuard dans le livre
ci-dessous recensé). Pas uue fois, M- Martin Saint-Léon ne
s'est soucié d'opposer par leurs définitions la corporation et
les régimes de l'ère moderne, et son étude de l'idée corpora-
tive semble demeurer en l'air, sans contact avec la réalité
objective, dont il eut pu trouver l'expression dans un grand
nombre de documents. Ces défauts de méthode sont toutefois
rachetés dans une certaine mesure par la conscience avec
laquelle l'auteur a employé les documents qu'il a choisis et
l'indépendance relative avec laquelle il a su les interpréter.
G. B.
RENARD(Grorgbs).– Syndicats, trade-unions et corpo-
rations (Encyclopédiescientifique publiée sous la direction
du 1)' Toulouse.),
Paris, Doin, -19u'J,413 p., in-t8.
Ce volume succinct, d'une collection encyclopédique, réu-
nit, dans la même étude, des institutions qu'à raisou de leurs
fonctions économiques bien distinctes, nous classons daus
nÈoruKs os u production 009

aeux sections uillerentes les syndicats ouvriers modernes,


institutions de la répartition, d'une part, et d'autre part, les
corporations (et aussi, mais ils no sont guère qu'indiqués,
les syndicats industriels, enrtells, trusts;, essentiellement
régimes de la production. Commecette dernière étude retien-
dra plus spécialement l'attention, nous rangeons donc ici
cet ouvrage, après avoir indiqué d'un mot que In seconde
partie présente un historique coudensé des trade-unions
anglaises et des syndicats français, et des vues sur l'évolution
du syndicalisme contemporain. La première partie, consacrée
toutentière aux corporations, porte, malgré les limitesétroites
où elle est resserrée, la marque des recherches personuelles
de l'auteur sur l'un des exemples où l'on peut étudier le mieux
cette institution, sur l'expérience florentine. L'exposé iie s'est
pas stérilisé dans un récit chronologique de pur historien
entre un chapitre sur leurs origines et un chapitre sur leur
fin, se place une étude analytique de l'institutiou à son plein
épanouissement, organisation, administration, fonction, puis
une étude, analytique encore, des raisons de sa décadence.
Ce précis ne manquera pas d'intéresser et de rendre des ser-
vices qu'à notre connaissance aucun ouvrage aussi résumé ne
nous offrait jusqu'ici. F. S.

FHÉMY(Eu'HKOKi.– Histoire de la manufacture royale


des glaces de France au XVir et au XVIIIe siècles.
Paris, Pion, l«09, in-8»,XII-444pages.
La monographie de M. Frémy n'est pas du tout une mono-
graphie d'industrie. On y trouvera des renseignements sur les
tentatives faites avant Colbert pour acclimater en France la
fabrication des glaces, dont Venise s'était jusque-là réservé
le monopole de fait, sur les négociations diplomatiques ou
plutôt extra-diplomatiques qui'permirent, aux environs de
1G65, l'installation d'ouvriers vénitiens au faubourg Saint-
Antoine, sur l'organisation de la première manufacture, con-
currencée par plusieurs établissements à demi privilégiés
jusqu'en 1C9S,date à laquelle commence le véritable mono-
pole en faveur d'une compagnie, qui, plusieurs fois transfor-
mée, subsista jusqu'en 1830, où elle prit la forme de société
anonyme. On y trouvera aussi une étude sur l'administration
de la compagnie, une autre sur la fabrication, une dernière
enfin sur les ouvriers mais ne s'étonnera-t-on
_i. pas de trouver
K. DuiiKiiEHi. Anw'i! soclol., 1U0n-l<iO-.t. 3'J
010 4WHMW»
[.V\RK *M!IOI,0liH)UB.

ce qui concerne la veutede» produits de ta manufacture,


prix et agencements coiiiineroiiiux, – doinèine que les capi-
taux et les actions et les dividendes dans lu partie consacrée
à l'administration, et ce qui concerne les salaires dans la der-
nière, où toutefois rien n'est dit sur lu nombre même des
ouvrier»? Desorte qu'il est radicalement impossible de suivre
le développement économique de l'entreprise, du calculer
même approximativement Je rendement de lu manufacture
dans les diverses périodes de sou histoire, et ainsi le travail
de M.F., nourri cependant de documents inédits d'ordinaire
inaeessibles aux historiens, reste externe, superficiel, sans
intérêt, – à l'exception du chapitre consacré nux contrats
de travail et à la condition des ouvriers encore les faits
y sont-ils présentés pèle-mèle, suus qu'on discerne une évo-
lution dans cette condition, et avec des préoccupations de
polémique moderne, un souci de faire le panégyrique des
institutions « humanitaires » de la compaguie, qui faussent
plus d'une page. Kn obéissant aux règles de l'analyse logique
en ce qui touche l'industrie des glaces, en replaçant cette
industrie dans les coiiditioiisgéuérales de l'industrie protégée
de l'ancien régime. M. F. pouvait faire un livre utile, qu'il
u'a pas fait.. G. H.

Municipal and Prlvate Opération of Public Utilities.


Report to the National Civic Fédération, Commission of
public ownership and opération. New-York, National
Civic Fédération, 1907, 3 vol.. -W5),xvi-1230et xvi-768 p.
in-8".
Aucune
étude sur le uiuuicipalisme ne pourra négliger les
trois volumes de l'enquête conduite de 1905à 1007 par, la
National Civic Fédération sur le municipalisme, comparé
dans sa gestion des services publics à la gestion privée aux
États-Unis et en Angleterre. Ces trois volumes rassemblent
une somme énorme de renseignements, recherchés avec un
soucid'information complète et exacte et présentés avec beau-
coup de soin par la commission d'enquête de la Fédération et
par les rapporteurs de la commission. Le premier volume,
après une introduction sur les conditions daus lesquelles
l'enquête a été entreprise et faite, expose les conclusions géné-
rales et les rapports d'ensemble sur la municipalité améri-
caine, la municipalité anglaise, les conditions du travail.
lUtaMKS
I)KU PBODL'CTION OU
1
l'exploitation municipale et l'exploitation privée dos mono-
poles, la propriété niuninlpnle des utilités publiques. Le tome
secondi part II, volume 1; contient les rapports du détail nou-
eertinnt les ftliits-t'uis feau. gax..électricité/, et le tome troi-
sième part II, volume Il les rapports de détail concernant
l'Angleterre igax, électricité, tramways). Le tout est rempli
de rapports techniques, do tableaux statistiques, de données
li is toriqueset quantitatives de première main, avec des
index complets et minutieux.' Donc rien de plus louable que
l'entreprise et la réalisation matérielle de cette enquête.
Sur les conditions psychologiques daus lesquelles l'eau vre
a été conçue et exécutée, quelques inquiétudes viennent
à l'esprit. Si de grandes précautions ont été prises par les
enquêteurs et par la commission qui les a choisis pour fissurer
leur impartialité et lit valeur positive de l'enquête, il est
néanmoins impossible d'oublier que la National Civic Fédé-
ration esf uue grande ligue politique à programme déter-
miné, soucieuse avant tout de problèmes politiques et 'de
solutious conformes à son idéal; il est à craindre que ses
membres, comme tels, ne soient disposés à apporter dans
l'estimation des faits économiques, non point des préventions
particulières, mais un préjugé général favorable à telle ou
telle politique économique, alors que chacune des institu-
tions qu'ils étudient peut leur suggérer des représentations
et des comparaisons précises de conduite politique et écono-
mique, des jugements sur les résultats financiers et sur les
répercussions politiques de telle ou telle institution, et que
chacun des détails qu'ils examinent peut se relier à des
observations de leur pratique journalière. D'autant plus que
l'enquête a été entreprise et conduite d'un point de vue tout
pratique. Les faits considérés ne le sont qu'en vue des juge-
ments à porter pour ou tatitn; soit en faveur de l'entreprise
privée, soit en favourdu municipalisme est-ce une question
scientifique qui se juge, ou un procès?`'
Sur le succès ou l'insuccès du municipalisme comparé it
l'entreprise privée, ce que fournit cette euquèle est présenté
(tu moins avec une extrême prudence. Le rapport général
reconnaît que les conditions locales des diverses institutions
soûl le plus souvent si purliculiëres qu'elles rendent impos-
sible une comparaison satisfaisanteit. I, p. ~1Y,elles doivent
être prises en considération chaque fois qu'il s'agit de porter
11 il jugement sur la valeur des institutions. Les conclusions
013 l'ASNÈB 1906-1909
SOUOLOU1UUR.
de l'enquête sont donc surtout négatives. Il en est pourtant
une série qui se présentent sous une forme prudemment
affirmative (p. 23 sqq.):leseutreprisesd'intérêt public gagnent
à être gérées sous un système de monopolelégal ou régulier.
que le régime de ta gestion soit privé ou public; Il n'y a pas
de raison pour que les résultats flnnuciers du régime public
soieut différents de ceux du régime privé, si les conditions
d'exploitation sont les mêmes l'hygiène publique doit être
soumise à la gestion publique; le mtinielpalisme ne semble
pas devoir être étendu à des opérations industrielles qui pro-
duisent un profit sans intéresser le bien public; le succès du
muuieipalisme dépend de la valeur du gouvernement muni-
cipal les compagnies privées doivent être soumises à des
contrats à terme; les pouvoirs de gestion des municipalités
doivent être étendus et consolidés.
Toutes ces conclusions sont de pratique et d'application.
Quelle que soit la vigueur des démonstrations ou la vraisem-
blance des opinions exprimées, elle ne nous paraissent pas
apporter une preuve scientifique. La question première à nos
yeux n'est pas de rechercher en quoi une institution de muni-
cipiilisme n'imit ou non, et d'appliquer a tort ou à raison les
conclusions de cette appréciation à telle ou telle cité. La seule
méthode sûre, c'est de considérer les institutions du tnunici-
palisme comme des organes économiques à fonctions définies,
et de rechercher comment ces organes se sont développés et
comment leur fonctionnement s'est organisé dans telles et
telles conditions à déterminer, et suivant divers types carac-
téristiques.
U s'agit d'abord, à partir de sociétés économiques où le
régime typique des gestions municipales est celui de l'entre-
prise privée, d'expliquer comment ce régime s'est transformé,
ou comment le régime du muuicipalisme a pu s'implanter et
s'étendre, en conservant ou en modifiant les fonctions primi-
tives du régime antérieurement observé.Parmi les conditions
de ces phénomènes, l'économiste sera surtout porté a consi-
dérer les conditions économiques dont il a pu estimer lit
valeur causale sur le développement d'autres régimes
l'attention du sociologue se portera plus généralement sur
toutes les conditions sociales qui peuvent contribuer à la
constitution ou au développement du régime nouveau. A cet
égard, l'enquête américaine montre, tantôt par les faits, tantôt
par les réflexions qu'ils suggèrent aux enquêteurs, l'impor-
REGIMES UK U PRODUCTION 013

tancedes dispositionspolitiqueset moralesdes groupesmu-


uicipaux(degrésde capacitéet de maturité pour lu gestion,
éducationet valeur politiqueet moraledes groupements,).
Detelles études permettrontde comprendreles obstacles
et leschances,les raisonsdeprogrèset d'extension,de ralen-
tissementetde reculdu municipalisme.Elles auront ù élu-
cidera lu fois lescaractèresdes institutionset lestendances
de l'opinion;et, s'il y a lieu (par exempledans les grandes
communes),les tendancesdes diversgroupeset desdiverses
opinions.Ainsi l'étude du municipalisrne,régimeadminis-
tratifet économique,ne seséparepointpour nousde l'étude
de l'esprit municipal;et chercherdans les variationsdocet
esprit,dansles combinaisonsde seséléments,les conditions
favorablesou non à l'établissement,au développement,au
fonctionnement du régime,est pournousune part essentielle
de l'œuvrethéorique,scientifique,explicative,d'où les pra-
ticiens,les administrateurset les hommespolitiquespour-
ront tirer desûres conclusions. II. |î.

PHEYER(W.-D.)- – Die russische Zuckerludustrie. Eln


Beitragzur Lehre vondeuSyndikaten. Staalsu. sozial-
wissenscliaftlichePorschutigen.ligg.v.Schmolleru.Sering.
H. 135. Leipzig,Dunckeru. Humblot,1908, xiv-218p.,
iu-8«>.
En traitant de l'industriesucrièreen Russie. M. Preyer
s'estproposéd'apporterà ta théoriedes syndicatspatronaux
unecontributionqu'il nousinviteh chercherdans son livre,
à côtédela descriptionmorphologique quesembleindiquerle
titre.Maisil arcivequ'en Russiele régimedes industrieset
leur formemêmesubissent l'actiontrès forte, sinondétermi-
nante,de l'État; l'interventionde l'État,par la réglementation
et la loi, est constante.Entrecestrois questionsdont chacune
a sonintérêtpropre,morphologie,régimesyndical,actionde
l'État,la confusionétait possible;l'auteur n'a pas su l'éviter
par unerigoureuseméthode,subordonnantles questionsselon
l'ordred'explicabililéoù la réalitépermet de les saisir.
Une première partie, en formed'introduction (p 1-19),
décrit sommairementles origineset l'extensiondes cartels
dansl'industrie russe,se risque à un jugement d'ensemble
sur le phénomènequ'ilsreprésentent,et exposeleur situation
légale.Ladeuxièmepartie(p.2O-48j traitedu syndicatsucrier:
et* l'annAk sokioloiïiqce. t9im-roi)«t

précédée d'uu sommaire sur te développement de l'industrie


du sucre en llussie depuis ses origines, l'histoire de cesytuli-
eut est conduite jusqu'à su ruine, La troisième partie aborde
la réglementation d'État (lui, eu vertu des lois du 20 novembre
189îîetdu 11 mai 18118,dispose de l'administration de la pro-
duction sucrière en Russie p. WAi). Knliu, la quatrième
partie ip. 73-179)a pour objet l'étal actuel elle rassemble
uue analyse et une appréciation de la loi du \i mai 1903,
l'étude de la convention de liruxelles, l'histoire de la conveu-
tion syudicule sous forme de cartel des raiïlneurs en IU03,
enfin (p. 137-17Ujl'étude socinle et administrative de l'indus-
trie du sucre, c'est-à-dire industrie et agriculture, questiou
ouvrière, coût de production, crédit et prix, commerce du
sucre. L'ouvrage se termine pur des appendices, tableaux,
diagrammes, qui se rapportent aux différentes parties.
Ces annexas ajoutent àla valeur documentairedu livre, qui
est grande. L'auteur «utilisé l«s statistiques que l'administra-
tion mettait sa disposition. Il a tiré bon parti du séjour qu'il
a fait eu ltussie pour se renseigner sur les hommes et sur les
choses. Il a dépouillé avec soin la littérature de langue russe
citée dans sa bibliographie ouvragesd'histoire, d'administra-
tion et d'économie, revues et journaux spéciaux,. Mais
quant à la méthode et au plan, la confusion initiale du sujet
est aggravée par la distribution de la matière. Les trois sujets
que nous avons distingués se purtageut inégalementet presque
capricieusement le livre avec les sujets annexes qu'on a
recQiinusa l'analyse question ouvrière, rapports de l'agricul-
ture et de l'industrie. La contribution à la théorie des'cartels
reste informe l'introduction sur le mouvement des cartels en
ltussie n'est qu'une préparation au sujet. toute provisoire; et
ce qui concerne les cartels sucriers, dans la deuxième et la
quatrième parties, est décousu et peu élaboré. La description
de l'industrie est également morcelée, découpée; malgré
l'abondance des sources, des témoignages, des nombres,
d'ailleurs trop souvent confinés dans les annexes, les faits ne
sont pas assez exactement classés et interprétés pour per-
mettre la recherche des relations et des séquences. L'élude
de ta législation et de l'administration pur l'État a plus de
continuité, mais c'est celle aussi dont la correspondance aux
faits est la moins sûre et qui se prête le mieux aux analyses
su perficielles.
Dans ces conditions, quelles démonstrations peut apporter
ntiiiiMKsbr i.\ PiwmrcTio» 6t!>

l'ouvrage? Il ne conclut mômepa»formellement, etHe termine


par un chapitre presque iiidépuiiduiil sur le commerce du
sucre. tëssayerous-uousde dégager nous-mêmes les conclu-
sious possibles de l'étude Les plus intéressante» dovrtiieut
être colles qui se rapportent à l'intervention de l'Élut, au
régime de l'administration d'une industrie par l'fclat; mais ce
régimeeut abordéd'emblée, comme si réellemnut il appnrtennit
à uu pouvoir suprême,à une iuiliiitive inconditionnée de l'État
d'instituer le contrôle de l'industrie, la luxation des prix. la
répartition des contingents de production. Ces faits sont relu-
tifs ù des états économiquesdéterminés). Si l'œuvre de l'Étui
en Russie au xix*siècle rappelle par certains aspects l'œuvre
de l'Élut eu France au xvii»siècle, c'est apparemment pour
des raisons, sinon analogues, puisqu'il n'en faut point préju-
ger, du moins comparableset dignes d'une recherchescienti-
lique. Quellessont ces rayons, ces conditions déterminantes?.°
Voilà un premier point sur lequel l'auteur ne renseigne pns.
.Peut-il prouver, d'ault-e part. quelle que soit l'inspiration
de l'wuvre del'Ëlat, qu'elle a eu une action dèteriuinnnlesur
la fonneousur le régimeinterne ciel'industriflY Le régimedes
syndicats, dans l'industrie du sucre, est antérieur à la régle-
mentation par l'Êlnt, et, s'il se reconstitue après la création et
le développementdecette réglementation, l'auteur ne tire pas
d'inductions précises de ces divers phénomènes. Mais pour la
(orme de l'industrie il déclare, cette fois avec précision, que
lu législation sucrière. tout en assurant l'existence des petites
fabriques, n'a pas empoché le mouvement général déconcen-
tration, et que les prescriptions de la loi ont été en somme
assez élastiques pour rendre possible un développement con-
forme à la direction générale du développement économique.
Ces deuxobservations nousparaissent très importantes, et les
questions qu'elles suggèrent mériteraient une étude appro-
fondie. D'abord, qu'une législation soit élastique, cela ne
siguifte-t-il point quela règlelégale est constamment modifiée,
en fait, par lu coutume qui résulte des rapports économiques
moyens1?Comment agit cette coutume, comment se forme-t-
elle cl peut-elleprévaloir sur les dispositions réglementaires?
D'autre part, il semble probable, d'après lit description de
M. IV,que le régime d'administration etde contrôle par l'État
ne déforme point le développement économique, et que l'in-
dustrie réglementée se coule en quelque sorte dans la [orme
communeaux industries placées dans les marnesconditionsiVo-
616 i/annkk sucioi.oiilQL'S.100B-IÙ09

nomiques.S'il en est ainsi, le régime,qui, les conditionsres-


tant les mômes,peut n'êtrepasle môme,n'est point condition
déterminantedesvariationsmorphologiques,et c'est toutun
renversementdes opinionscourantes.
Mais,devantde semblablesproblèmes,oune peut prétendre
à lu découverted'explicationsvalables avant d'avoir analysé
de très prèsles institutionsqui sont en somme l'objet des
réglementationsd'État ou des cartels, c'est-à-dire avant
d'avoiranalysé les rapports et les variationsde grandeur et
de structurede l'industrie.Il y a, semble-t-il,dans le livre de
M.P., les élémentsde cetteanalyse maisM. P. n'a pas uti-
lisé tous les moyensqu'il avaità sa dispositionpourla faire
(notamment beaucoupde donnéesstatistiques, laisséesen
annexes, qui pouvaientfournir des séries quantitatives!. Il
n'a ébauchéque l'étudedesconditionsexternes (notamment
des variationsd'étenduedu marché),mais de façon insuffi-
sante.C'estfauted'avoirpousséla rechercheen cesdivers sens
que M.P. ne s'est pas avancédavantagedans sa propre étude
et s'est fermédes perspectivessur d'autres phénomèneset
d'autres relations. H. B.

MACROSTY (HbxhyW.j. -The trust movement in british


lndustry. A studyofbusinessorganisation.London,Long-
mans, Greenand Co,1907,xvi-398p. iu-8u.
Ce n'est pas une nouvellethéorie du trust que présente
M.Macrosty,c'estuneapplicationà l'Angleterredes méthodes
d'investigationqui ontservià la connaissancedes trusts dans
les principauxpays où a été observéecette sorte de régime
économique.L'auteurprendle motde trust dans son sens le
plus général, celuide combinaison,d'entente forméepour la
réglementationde l'industrie(p.V, li; et, dans cette notion
d'entente il ne faitpas intervenirla considérationdes établis-
sements,maisil la restreintà l'entente des capitalistesréunis
pour former le trust. Dansces conditions,qu'est-ce exac-
tement que le trust? M.M. ne dissipe pas la confusion
lorsqu'il déclarequela variétédes trusts n'empêchepas leurs
objetsd'être identiqueset qu'enefletla réglementationinsti-
tuée"par eux a pour butle profitdeceux qui l'ont instituée
la notionde profit,qui est communeà d'autres régimeséco-
nomiques,n'ajouterienà la conceptiondu trust. D'autrepart,
M. M. maintientle trust sousla conditionde la libre concur-
IUÎOfMESDRU WtODl'CTION 017

rence(compétitive tradc)et le distinguedo tout monopolelégat


la distinctionvalait une discussion, car le monopolepeut
apparnttreen fait dans des industriesque la dénominationet
l'usagelaissentdans le cadre facticede la libre concurrence,
tandisqu'inversementla coutume et les institutions réelles
peuventopposerdes actes de concurrence biendéfinieaux
monopoleslégaux.Le terme de libre concurrencedésigneun
casabstraitqu'il faut oublier pour analyser la réalité chaque
fois qu'ils'agitd'entreprendre une étude déterminée sur les
conditionsdelu concurrence dans une industrie, dansune série
d'industries,dans une économiedonnée. De même,s'il faut
laisserde côté,commele fait l'auteur, la très grossequestion
des marquesde fabrique, c'est encore une limitationarbi-
traire qui fermeà la recherchetoute une voie possibled'ex-
plication.
Dansun chapitre introductifde généralités, M. M.fait la
classificationdes ententes, à terme ou permanentex;et des
phénomènesde combinaisonil distingue les phénomènes
d'intégration,qui sont plus anciens.Il discute à ce propos la
questionde savoirsi l'intégration est favorableou non à la
combinaison,et y répond que cela dépend de circonstances
individuelleset souvent de considérationspersonnelles.Que
cesclassifications,distinctionset discussionssoient traitées,
en une vingtainede pages,préalablementà l'étudedesphéno-
mènesdont l'analysedoit suivre, nous parait difficileîi con-
cilieravec une bonne méthode.Ce qui est pire est d'édifier
sur quelquespagesdescriptivesun jugement des avantages
des associationspermanentes,des « amalgamations», juge-
mentpréalable lui aussi, déductif et hypothétique; et d'ail-
leurs, relativement quoi ourelativementà qui concevoirces
avantages?De môme, préalablementà l'expositiondes cas
particuliers,et quand, dès l'introduction, se constituentau
moinssuperficiellementdes sériesde faits, où se laisseentre-
voir une apparenced'explicationgénérale,commentl'auteur
peut-ildéclarerque la valeurde l'intégrationcommecondition
des ententesdépend de circonstancesindividuelleset per-
sonnelles?
Venons-en à ces monographies,où l'auteur a mis le meilleur
de l'informationjournalistiquesi étendue que rendaitnéces-
saire, mais laborieuse, la multiplicationdes'gazettes et des
revues spéciales.Nous y trouvonsdes amas de renseigne-
ments utiles, mais trop souvent dénués de références.Les
<H8 LANNB8SOCIOLOGIQUE.
lUUtt-UHK»

chapitres n et in sont consacrés tï l'industrie métallurgique,


aciéries et construction îmiritinie, fer brut, mil», tôles, etc.:
le chapitra îv aux industries extractivos, surtout le charbon
et le ciment les chapitres v et vi aux industries textiles, le
chapitre vn aux industries chimiques, le ehtipitrc vin à lu
meunerie, lechii pitre i\au tab-.icetaux liqueurs, les chapitres.v
et xi aux commerces de détail 'droguerie, épicerie, boulan-
gerie, etc. le chapitre xu aux industries des transports 'sur-
tout maritimes). Le chapitre xnt <>stun chapitre du mélanges
où l'auteur a déversé tout ce qu'il n'a point clnssé papier,
industries électriques, glaces, fournitures de parapluie, ascen-
seurs, décoration, linoléum, etc. Le chapitre xiv pré
seille les vues générales et les conclusions. 11 n'y u rien.
semble-t il, qui puisse justifier II*désordre de ce rangement,
ni l'histoire et la chronologie, ni les iilfinitésdes industries et
des commerces, ni môme les classifications introductives de
l'auteur.
C'est que M..M- n'a pas étudié des groupes, des séries de
faits, maisdescaset des exemples. Avecbeaucoupdo précision,
d'intelligence, avec une information très sûre d'elle-même, il
a recensé ou institué des monographies industrielles, des
monographies de sociétés et d'établissements, et mômeet sur-
tout peut-être des biographies de capitalistes et d'entrepre-
neurs. Les exemples et les cas se succèdent, etde l'un à l'autre
les rapprochements sont indiques et lesexplications suggérées
mais sans méthode ni valeur probante: la matière de faits
sociaux inrwtonts se décompose en une poussière d'expé-
rieuces, sans valeur d'expériences véritables puisque les élé-
ments en sont rassemblés par des contingences dont les unes
viennent de la matière et les autres de l'auteur. A ces cas
M..M. met parfois des étiquettes ainsi, dans l'industrie mé-
tallurgique, la combinaison lui parait s'appliquer pour le fer-
blanc:à une industrie désorganisée, pour In fabrication des
tubes a une industrie fortement concurrencée, pour la galva-
noplastie à une industrie en période de bonnes conjonctures.
Mais ces déterminations sont-elles exactes? Ces cas sont-ils
typiques, ne ^ont-ils pas anormaux? Rien ne ledémontro.
[teste sans doute pour le lecteur, critique ou savant, la pos-
sibilité d'utiliser méthodiquement, eu la réparlissant dans les
cadres scientifiques, la matière rassemblée pur l'auteur; mais
dans ce livre qui abonde en dates, chiffres, citations précisas,
à chaque instant font défaut les données essentielles, celles
Hl'.OIMKSUE LA PRODUCTION (H*

qui pourraient prendre place dans des séries comparables.Les


nombres concernunt les firmes purtlculiàres-sunLprécis, mai»
les nombres globaux sont déficients, et lie peuvent être cons-
titués avec les éléments incomplets que fournit l'auteur. Les
dates d'événements particuliers inléresssint l'histoire d'un
établissement ou d'une société sont citées avec minutie. mais
ou ne trouve pas les dates caractéristiques, et il est très diffi-
cile de déterminer des séries de dates qui permettent de
rechercher, pour des phénomènes comparables, les aiitocé-
dents communs et les conséquences communes.
Aux explications, dune, l'auteur supplée par des sugges-
tions, des indications, des opinions souvent fort intéressantes,
mais surtout en ce qu'elles évoquent des démonstrations non
encore faites. Sans doute il recommande lui-même <p "A),
dans l'usage qu'on peut faire de soreexemples, une prudence
d'autant plus nécessaire qu'ils sont pour la plupart tout à fait
récents ot que le champ de l'observation est très raccourci.
Mais cette recommandation n'est-olle pas lu reconnaissance
d'un échec qui s'étend à lit méthode d'investigation et d'in-
terprétation des phénomènes? Ce que l'auteur se permet,
c'est par exemple de « hasarder » cette conclusion que,
durant les vingt-cinq dernières années, soit par l'effet de la
concurrence étrangère accrue, soit par l'effetdu développe-
ment d'intérêts communs, les conditions sont devenues plus
favorables aux tentatives faites pour contrôler la production
dans l'intérêt des producteurs 'p. îîOj c'est le type de celles
que fournit l'ouvrage. Peuvent-elles compter? D'autres sont
seulement de valeur pratique elles représentent, en face du
mouvement d'association et d'organisation dans l'industrie,
l'attitude d'un esprit cultivé, soucieux de précision et aussi de
progrès Industriel, sans passion et sans timidité, aviséet pers-
picace. et porté surtout à juger les institutions pour leurs cou-
séquences d'ordre nuancier et administratif.
Les conclusions qui font définit, ce sont les conclusions
explicatives, qui auraient- résulté de l'interprétation métho-
dique des phénomènes décrits etde'la détermination de leurs
conditions, lesquelles sont indiquées dans le dernier chapitre,
mais seraient à reprendre pour une étude positive concur-
rence, fonctionnement industriel et commercial,productivité.
prix. Par exemple, ce « surplus de capacité productive »,
dont M. M. fait une raison spéciale de la constitution d'une
entente, demeure dans son livre une pure abstraction hypo-
620 1908--1909
t'kXttt sociotOOtOfB-
tliétique,et non poiut lu traductiond'une réalité. De môme,
il netouchea la questiondes prixqu'en examinanttrès super-
ficiellementl'effetdu trust sur eux; mais uesont-ilspas eux
aussi,et plutôtmôme,conditionsdu trust?
Par cetteétude positiveseulement pourraient être réso-
lues les questionstrès importantesque M.M-soulèvesans
lesrésoudre.Le problèmedestrusts en Angleterrelui appa-
raît essentiellementcommeuu problèmed'organisation,de
technique(p. 343) le régimenouveauinstauré par eux n'a-
t-il doncpourobjetque l'adéquationd'une structure et d'un
fonctionnementéconomiques?S'il en est ainsi, pourquoi?
D'unautrecôté,dès le débutde soulivre, il signaleles rap-
ports dedeuxsortesd'associations,l'amalgamation ou « asso-
ciationhorizontale »etl'intégrationou « association verticale»
mais n'est-cepas là un rapprochementassezfaux de deux
.imagesqui ne sont point parfaitementjustes? La réaliténe
présente-telle pasdeuxordresde faits, les unsse rapportant
à des phénomènesde régime, tel que celui des trusts, les
autresà desphénomènesde structure, ou, plus exactement,à
desphénomènes de spécificationqui intéressentla structure? Et
si, entrecesdeuxordresde faits, il existedes relations,si les
variationsd'espèceet de formeentratnent desvariations de
régime,c'estunequestiondontle livre de M.M., après beau-
coupd'autres,montrel'intérêtsans avancerla solution.
H. B.
MACGREGOR (D.H.). Iadustrial comblnation. London,
Bella. sons,1900,ix-245p. in-8".
STEINITZER (Ehwis).– Oekonomische Theorie der Ak-
tlengesellsohaft Leipzig, Duncker u. Humblot, 1908,
xvi-litèp., in-8°.

Nousretrouvonscette questionavec les deux ouvragesde


MM.Macgregoret Steinitzer,qui, abordant d'une manière
plusgénéraleet avecdes prétentionsplus systématiquesdes
sujets relatifsau régimemodernede l'économie,y ont traité,
non point corrélativementet méthodiquement,mais plutôt
conjointement,des problèmesde forme, au travers desquels
apparaissent,à plusieursrepriseset sous des biajs différents,
des problèmesde spécification.
L'objetque s'est proposéM.Macgregorest d'analyser,plu-
industrielle en tant qu'ins-
tôt que de décrire,la combinaison
ItlîlJIMRSDB LA. l'HOpUCTION 621

titutiou économique et en tant que « méthode représentative»¡J


de l'industrie. Lu combinaison est pour lui une méthode d'or-
ganisa tiou collective, de contrôle commun, s'appliquant à des
unités économiques qui sont, non point des individus, mais
des établissements. La question est de savoir si la combinai-
son d'établissements, qui peuvent être considérés comme les
unités représentatives de l'économie du m" siècle, est elle-
même représentative de l'économie du xx*siècle. Mais n'y a-
t-il pas confusion en ce que M. Mucgregorentend étudier un
régime au moyen d'unités morphologiques ? L'établissement
est pour lui l'unité, à laquelle s'applique la méthode nouvelle
d'organisation, et constamment sou attention est dirigée sur
les phénomènes et sur les variations de fonction et de slruc-
ture mais l'observation de la structure, de la fonction, de l'or-
gauisation tend à la description età l'appréciation d'un régime.
Est-ce donc que les deux séries de faits sont liées nécessaire-
ment ? L'une contient-elle les conditions de l'autre ? Dans cet
ouvrage s'en juxtaposent deux, dont l'un 2e et 3eparties* traite
du régime de l'industrie combinée, et l'autre ('• partie) con-
duit, chapitre par chapitre, de l'analyse morphologique et
fonctionnelle de l'établissement représentatif d'une économie
donnée, à des conclusions relatives à lit valeur fonctiounelle
du régime représentatif d'une économie différente, celle de
l'industrie combinée mais le régime de la première écono-
mie n'a pas été analysé. Si donc les conditions auxquelles est
soumise la structure des établissements imposent' les modifi-
cations de régime constatées et la constitution du régime nou-
venu, il y a réellement confusion sur le caractère des phéno-
mènes, et. à la faveur de cette confusion, toute une partie des
conditions, celles qui se rapportent au régime initial, ne sont
pas établies.
Partant de l'analyse de l'établissement représentatif du
premier type, M. Macgregor se propose d'étudier l'influence
exercée par le régime de la combinaison sur sa force de con-
currence (p. 12), c'est-à-dire sur son activité et sur sa résis-
tance vitales. Il passe donc en revue ce qu'il appelle producti-
vité, risques, force de contrat, ressources, c'est-à-dire les
conditions intrinsèques et extrinsèques du développement de
l'établissement typique. Or le problème de causalité que
nous venons d'indiquer est tellement impliqué par les obser-
vations de cet ordre, et le régime de la combinaison apparait
à l'auteur dans une telle dépendance à l'égard des conditions
022 I.'ANNÉBSOtlIOLOiilyUE.
WHi-IDO!)

qui «'imposent au (ouctionocmeiit de l'établissement typique


que lu démonstration çà et là s'ébauche malgré les lacunes
de lu tuatière. Ainsi M-Macgregor lie se contente pas de mon-
trer comment lit combinaison augmente et améliore l'elHca-
cité productive des établissements, développe l'esprit do con-
duite et de direction, adapte l'économie externe il l'intérêt
commun mais il indique, très sommairement il est vrai,
qu'elle résulte des conditions do cette économie, de lu néces-
sité de rassembler de très grands capitaux qui permettent
l'accroissement de lu production, et qu'elle-même est cireom-
crile et limita1 par les diversités locales et par certaines cir-
coustauces qui échappent aux moyennes. L'analyse des effets
de la combinaison sur les risques fouctionuols est plus incer-
tuine et conduit à nue estimation que l'auteur juge lui-même
ilillicile. Heu est de môme pour sou influencesur la prédomi-
nance relative que les établissements peuvent obtenir ou cou-
server sur le marché, et sur ce que l'auteur appelle « re-
source a. terme très général sous lequel il réunit toutes les
circonstances, laissées de côté par les chapitres précédents,
qui peuvent faire varier la force d'action ou de résistance des
établissements ou des sociétés. La première partie du livre se
termine par un chapitre eu forme d'appendice sur le « fair
price «
Daus la deuxième, NI.Macgregor examine d'abord les causes
générales des trusts et des cartels, motifs subjectifs et condi-
tions objectives, puis les conditions particulières et les struc-
tures comparées. Il étudie ensuite comparativement la com-
binaison de l'industrie et la combinaison du travail, leurs
structures, leurs formes d'action, leurs méthodes, montre
leurs interactions, leurs caractères distinctifs, et conclut sur
lesdifférences de leur signification économique: ou ne peut
pas les regarder comme deux moments coordonnés d'un mou-
vement général de combinaison. La troisième partie, étroi-
tement reliée à la deuxième, décrit les « aspects natio-
naux » des trusts et des cartel», leurs effets sur I« marché
national, sur les prix, puis leurs rapports avec l'Étal, repré-
sentant de t'ordre public, et les mesures de sauvegarde de
l'État contre leurs dangers.
Cettedernière partie est la moius neuve, la moins intéres-
sante, celle que des préoccupations pratiques détachent et
entraînent le plus loin de l'wuvro de science Au contraire,
les deux précédentes renferment de nombreuses suggestions,
nfCUlUKS I)K LA PHODUCTIUX 083

non seulement sur les oflulset lescauses du régime des trusts


et dos cartels, mais aussi sur la question dont nous avons
montré lu place initl définie dans le dessein do l'ouvrage, celle
des rapports eutru le régime, la forme et lu fonction de l'in-
dustrie. Mais, u'éluul pas conçu pour lu démonstration rigou-
reuse dont nous avons indiqué les conditions, le livre n'y
mène pas mou plus, et l'auteur s'en lient le pi us souventà des
conclusions très indécises ou (tu moins très générales (sur ta
productivité, par exemple, sur la question complexe des
risques, sur lu mécanisme, le fonctionnement, le sens même
du régime).
Kt pourtant l'auteur rojette les préjuges éthiques qui gâtent
tiiut d'ouvrages d'économie (p. 118/, il s'attache aux avan-
tages d'une méthode comparative précise (p. 138^, il cherche
partout à défluir eL à distinguer avec exactitude. Miiis, ce
livre, oit la documentation est surtout de langue anglaise,
conserve l'allure d'une dissertation à la mode anglaise ou
américaine, refondue selon des habitudes et dans dos cadres
de pensée plus scientifiques (par exemple, le début de la
deuxième partie, relative aux trusts et aux cartels*. L'autour
prétend appliquer ta méthode comparative; mais, faute d'une
définition précise des conditionsdiverses, ou se contentant des
descriptions inégales ou iucomplètes faites par les auteurs,
elle tend ù devenir ici une méthode scolastique qui multiplie
les divisions et les distinctions et c'est ainsi qu'elle mène à
l'argumentation moins solide qui remplit une partie des deux
derniers chapitres.
Au total, il y a daus ce livre quantité d'observulions et
d'indications à retenir eu vue d'un traitement méthodique du
sujet. Étant donné le régime prévalant dans les établisse-
ments représentatifs de l'économie industrielle au \ix" siècle,
comment s'est-il adaptéaux conditions qui déterminaient la
structure et le fonctionnement de ces établissements com-
ment ces conditions, ayant varié, ont-elles déterminé dus
variations de structure et de fonctionnement, et, corrélati-
vement on consécutivement, des variations de régime; le
régime nouveau, à son tour, est-il représentatif de lit mor-
phologie contemporaine, ou implique-t-elle d'autres varia-
tions encore telles sont les principales questions qui sortent
d'elles-mêmes du volume de M. Macgregor.
Celui de M. Sleiuilzer uuvre de moindres perspectives.
M. Steiuitzer s'est proposé de faire, saus aucune intention de
624 i.'axnbe sociologique, W06-1909

pamphlet ou d'apologie, la théorie économique des sociétés


par actions, c'est-à-dire la théorie du phénomène économique
qu'elles impliquent. Après toutes les publications dout les
sociétés par actions ont été l'objet, leur étude théorique n'a
pas encore été réalisée jusqu'ici. Mais peut-on parler à leur
sujet d'un phénomène économique, et n'en ollront-elles pas
plusieurs à l'observation? M. Steinitzer prétend appliquer
une méthode qui soit un mélange d'induction et de déduction
(p. xiiu, et il s'excuse it l'avance de la prédominance qu'on
pourra lui reprocher d'accorder à la déduction du moins
a-t-il voulu être exacte précis, et, s'il a il s'est ellorcé
raisonné,
que ce fat sur des faits prouvés, à propos de valables motifs
économico-psychologiques, ainsi qu'il les appelle. Son but a
été de rechercher ce qui est principal et fondamental dans la
structure et dans la « physiologie Il des sociétés par actions.
Voyous comment l'ouvrage s'accorde avec ces intentions.
Le premier chapitre pose la définition, non juridique, mais
économique, de la société par actions, union de capitaux éta-
blie sur un règlement tel qu'une partie des capitalistes, la
moins nombreuse, ait la direction, tandis que lit majorité par-
ticipe seulement aux revenus variables de la société- Si cette
définition parait arbitraire, l'nuteur demande crédit jusqu'à
l'analyse qu'il annonce(mais pourquoi n'a-t-il pas procédé à
l'analyse avant de formuler la définition?;. Sur ces notions, il
commence Vhistoire des sociétés par actions. Il recherche
leurs origines dans l'économie médiévale, en Italie, en Es-
pagne, sous les formes de commandites spéciales qu'il décrit.
Au début des temps modernes, le commercede l'Inde orien-
tale provoque uu développement considérable de sociétés par
actions en Hollande et uu Angleterre, la nécessité de réunir
des capitaux, des forces productives capables de sulTtre aux
exigences nouvelles du trafic, appelle à l'existence les pre-
mières sociétés régulières, qui se propagent par imitation,
les premiers monopoles et les grandes compagnies. Le carac-
tère essentiel de ces institutions, c'est le grand nombre des
participants, armateurs, négociants, capitalistes bourgeois ou
nobles, qui organisent l'administration et le régime des assem-
blées, tandis que les sociétés se multiplient d'uupaysà l'autre
et s'étendent aux diverses formes de l'activité économique.
Les sociétés par actions sont devenues aujourd'hui un phéno-
mène universel et normal.
Le chapitre il auclyse Y menée et les força ilireelrim des
HÉfilUKS DK I, MWDUCTION C2S

sociétéspar actions.r.m. _1_1_


Ellesont pour objet uue entreprisecapi-
talistiquedont le but demeureun gain, un profit. Or, leurs
membresse répartissent en deux groupes,les uns touchant
une part variablede profit,et les autres produisautce profit
par leur activité.Théoriquementet initialement identiques,
ces deux groupesse sont différenciésà mesure que les prê-
teursà intérêtfixeont été remplacéspar des intéressésà part
variabledansle profit.Maisalors, comment s'est constituée
la directiondessociétéspar actions? Les premières compa-
gnies,hollandaiseset anglaises,héritèrent leur constitution-
ualismedes institutionscorporativessur lesquellesellesrepo-
saient mais elles étaient aristocratiques.Au xix"siècleont
prévalu des tendances libéraleset démocratiques,qui ont
entraîné des modificationsréglementaireset légales.Toute-
fois, sous les règles de droit, prévaut encoreréellementune
oligarchie,celle des fondateurs,qui conserventla direction
des sociétésqu'ils ont crééespar leur initiativeou par leur
influence,qui représententdes intérêts réels, qui coordon-
nent la directionet les affaires.Il y a duplicité de (aitet con-
tradictionpossibleentreles directeursde l'entreprise,dont la
notionpeuts'élargirjusqu'àembrassertout le complexed'af-
fairesayantpour but le profitdes membresde ces groupes
dirigeants, et les intéressésdirects, les actionnaires régle-
mentéspar lesstatuts.Telleest l'analysede l'institution c'est
avecles élémentset la méthodede cette analyseque M.Stei-
nitzerexaminedans le chapitre III la politiquedes sociétés
par actions,dans le chapitre IV leur organisation, dans le
chapitreV leurs caractère»juridiques,leurs rapportsavec le
droit.t.
Qu'il y ait des lacunesdansla documentationde cet ou-
vrage, c'est de quoi personnene s'étonnera, car la matière
mêmede l'institutiondont M.Steinitzera entrepris la théo-
rie, c'est-à-direla réalitééconomiquedes sociétéspar actions,
n'est pasencoredevenueun objetde connaissanceaccessible
pour beaucoupde pays et pourbeaucoupde périodes.Mais
l'auteur, qui n'a pas limitésa recherchethéorique à un objet
restreiut,a eu recoursà une documentationde secondemain
qui n'est pas toute excellenteet qui unit aux traités et aux
manuelsune part assezconsidérabled'informationjournalis-
tique sans références.
Néanmoins,voyonsle travail élaboré avec ces éléments.
H parait souventiucomplet,il s'arrêteà mi-chemindes expli-
K. Dihikueiu.– AiHUM'
sm-ii)! tOU6-l<IU'J. 40
M6 1:)lH~E 80ClO~(IGIIJUE. IIIUU.hI09

~< "&
caliuns. Tout au -1-
cours de rt.v, *v_
l'historique, les faits rapportés fout
lever des questions qui ne sont pas traitées. Ainsi, eu Italie
et eu Espagne, le régime a commencé pur des formes spéciales
de commandite quelles étaient les conditions intrinsèque»
et extrinsèques de leur constitution ? En Portugal, d'où vient
I» part du gouvernement dans l'administration et la conduite
des sociétés? Les uégociauts hollandais etanglais éprouvèrent
le besoin d'uuir leurs forces et leurs capitaux daus des socié-
tés de commerce d'où résultait ce besoin ? Les sociétés par
actious se propagèrent pur imitation quelles furent les
causes de cette imitation f!
Il en est de môme pour les chapitres qui font suite à l'his-
torique ils sont remplis d'incertitudes ou d'énoncés de pro-
blèmes non résolus. La recherche d'un profit, assignée par
l'auteur comme but à l'entreprise capitalistique, ne peut pas
être caractéristique du régime spécial des sociétés par actions.
En vue d'une interprétation plus Intime, l'auteur distingue
les deux groupes de capitalistes que nous avons déflnisd'après
lui, mais les circonstances qui pour lui expliquent ce grou-
pement ne sont pour nous en aucune mesure les conclusions
d'inductions valables. De même il croit expliquer les diffé-
rences de constitution des sociétés par actions, soit par la per-
niaueuce de règlements aristocratiques, soit par les transfor-
mation* d'idées générales et directrices de l'économie mais,
en admettant que les phénomènessignalés aient eu uùe force
de détermination précise et suffisaute, il reste à démontrer
pourquoi la constitution des sociétés par actions l'a subie,
quels motifs out décidé les groupements formés par elles.
pourquoi ces motifs ont tarie. Sousles changements d'admi-
nistration et de constitution ont eu lieu de puissantes modifi-
cations d'ordre économique, qui ne sont pas même indiquées.
Poursuivant son analyse, M. Steinitzer attribue le rôle eflicace
de direction, dans l'économie contemporaine, à une réelle oli-
garchie mais cette attribution est faite sans que l'induction
soit mêmeesquissée, et sans que l'auteur recherche lex motif*
qui fout agir, d'une part. les directeurs ainsi nantis de la direc-
tion efficace et, d'autre part, les petits capitalistes qui partici-
pent à la constitution financièrede la société sans participer à
sa direction. Cette duplicité de deux groupes, sur le fait de
laquelle il insiste tant, n'est pas vraiment expliquée com-
ment est-elle devenue possible? Quelles représentations sup-
pose-t-el le chez les individus qui constituent les groupes?
IIKOIUKS
1)KLAPKODL'CîiuN 02Î
Comment s'organise leur liction de yvoufes, et sous quelles
conditions?
Toutefois, à travers ces obscurités apparaissent bien des
notations utiles. D'abord, l'auteur est très soucieux de la réa-
lité économique qui souvent se dissimule sous les formes
légales ou traditionnelles. Deplus, il a vu qu'il avait alîaire
à des groupes, tantôt convergents et tantôt divergents, mus
par des désirs et des vouloirs divers et variables, que, sans
doute, il n'a pas bien analysés, mais dont il a reconnu l'exis-
tence et l'action. Et comme à chaque instant, entre les
pages de son livre, apparaissent les questions de sociologie
positive heurtées par le sujet, on peut dire qu'il en a indiqué
leséléments. H. B.

VECA(Salvatoiiej. La teoria economioa délia coope-


razione. Napoli, Pierro, -1907,xu-307p. iu-8\
Des aperçus intéressants ou brillants, des erreurs, des
lacunes, un jargon scientifique qui, sans modestie, accuse
l'insuffisance de la recherche et de la doctrine, voila ce qui
frappe dans cette dissertation inégale et assez vaine en plu-
sieurs de ses parties. Cequ'elle offre de meilleur, c'est J'affir-
mation répétée des nécessités de la méthode sociologique,
qu'elle applique peu, et l'affirmation des conditions sociales
comme facteurs déterminants des institutions, de leurs
formes, de leurs variations. Trois chapitres l°La coopéra-
tion et ses formes pratiques; 2° Développement de la coopéra-
tion Angleterre, Allemagne, Belgique, France, Italie: cou-
clusions générales; > Principes théoriques de la coopération:
valeur théorique, avenir et valeur sociale. Ce plan ne vaut
pas mieux'que la plupart des développements qui s'y appli-
quent. H. B.

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vou– Helte1-7.Itorlin,l'arey, fascic. (Série de recherches.
d'esprit positif.s* réclamantde la méthodede Thiinen.)

V. FORMES
DKLAPRODUCTION

PurM. If. Bot'HuiN.

Si l'importance des problèmes de morphologie économique


n'apparaissait pas d'elle-même, elle serait démontrée par les
résultats positifs et négatifs de plusieurs ouvrages qui vien-
nent d'être analyses. Par elle-même, cette morphologie si di-
verse et si compliquée, avec ses vastes séries de faits
compa-
rables et de variations, ses changements continus et ses
brusques bouleversements, ses institutions si permanentes ou
si instables, sollicite de toutes parts la curiosité et la ré-
flexion. Mais les recherches mêmes qui ne s'y rapportent pas
directement et dont on vient d'examiner plusieurs exemples,
relatifs à des régimes ou à des systèmes, ne peuvent le plus
souvent conduire à des résultats successifs qu'autant qu'elles
utilisent ou fournissent la solution de questions, parfois très
importantes, qui concernent la morphologie.
D'ailleurs, ce besoin est si généralcmeut senti qu'il est très
rare de voir une étude économique de cet ordre, quels qu'en
soient l'objet etle dessein,entreprise ou conduite sans toucher
par quelques points et de quelque manière aux problèmes
fOUSIE!!
I)K U(KOIH.'UTIO.V 031

morphologiques. Mainde ces abordsindirects résulte le grave


inconvénient que tous avous dû signalera plusieurs reprises:
entre les questions, entre les sujets, entre les catégoriesdefaits
s'établit ou subsiste uue confusion capable de compromettre
l'utilité et lu valeur dos ouvrages les plus sérieux. Au domeu-
rimt, les études de morphologie ne sont point d'uue simplicité
et d'une facilité telles quelles puissent être engagéescomme
des introduction» on des préparations secondaires et acces-
soires à des études d'uu ordre supérieur et d'une plus grande
conséquence; elles exigent pour elles-mêmes un traitement
complet et une élaboration approfondie. Mais pour les traiter
ainsi, quelle méthode convient-il de leur appliquer?
Les ouvrages qui concernent cette matière sont de deux
sortes Les uus, de beaucoup les, plus nombreux, sont des
monographies de sujet restreint, les autres sont des études
générales; encore est il très rare que ces études soient systé-
matiques et traitent des questions la plupart ne sont encore
que des monographies dont le sujet, ait lieu d'être limité à
une industrie, à une région, à une période courte, s'étend à
toute l'industrie d'un pays entier durant une longue période.
Nous ne nous prononcerons pas a priori sur ces différents
types de travaux nous les jugerons à leurs résultats. Nous
nous contenterons seulement de remarquer qu'il y a peu de
chances pour quedes monographies d'une prise étroite appor-
tent desconclusionsdècisivesen une matière où l'expérimen-
tation est manifestement multiple et complexe, et pourqu'une
œuvre de science puisse résulter de revues générales, inévita-
blement superficielles, procédant sans règle de choix entre
des objets disparates et très inégalement connaissables. Ce
qui ne veut pas dire que nécessairement tout ouvrage soit
important et utile quand il s'écarte de ces deux types pour
tenter quelque systématisation.

MACGREGOR(D.-H). – Industriel comblnation.


Ce livre, par les défauts que nous y avons déjà constatés
plus haut, ne nous offre qu'un exemple bien imparfait de
l'étude qui pourrait être faite sur la question fort intéres-
saute qu'il soulève les transformations morphologiques ou
fonctionnelles de l'établissement représentatif de l'économie
ait xrx" siècle ont-elles des effets transitoires ou durables?
ont-elles pour effet lu constitution d'un établissement repré-
i

633 l'aK.VÉBSOCIOtOGIQUR.
IU0O-I009

senlatifd'unenouvelleéconomie? – Mulheureusement l'ami-


lyseest ici plus conceptuelleet logiqueque sociologiqueet
positive,et elle ne fournit le plus souventque desschémas
qui ne dépassentpoint la possibilitéet la vraisemblance.Il y
aurait fallu une documentationtout autre, plusapprofondie
et plus méthodiqueà la fois, une analysequi, pour s'appli-
quer à un domainelimité mais choisicomme représentatifet
typique,n'auraitpas laisséde pouvoiratteindreà une valeur
généraled'explication.

VIALLATE (Achille). – L'industrie américaine, Paris,


F. Alcan,1908,492p. in-8».
Cetouvragemériterait une longueanalyses'il fallaitla me.
surer à son étendue, au nombreet à l'importancedesélé-
meutsde fait qu'il rassemble.M. Viallatea vouluexposor
« l'évolutionindustrielleet la politiquecommerciale» des
États-Unisdepuis1789jusqu'à nos jours puis leur « organi-
sation industrielle » le milieu, le personnel, l'usine, la
législationouvrière, les rapportsentre patrons et ouvriers,
les trusts, les moyensde transport, la finance;enfin« l'ex-
pansion industrielle », exportation, marchés couquis et à
conquérir. Mais,quels que soient l'intérêt et l'utilité de ce
livre, il ne pourra retenir longtempsnotre attention parce
que,d'intentionet de plan, il s'éloignetrop desméthodesque
nouspréconisons.
C'estune histoirequ'a écrireM.V. les faits y sont présen-
tés aucoursde la chronologieavecla présuppositionde leurs
effets.C'estaussi une descriptiond'ensemble,qui rapproche
chronologiquement dessériesde faits hétérogènes:il n'est pas
possibled'entirer des inductionsvalables.Cependantl'auteur
multiplie les explications mais, par exemple,quand il a
exposéce qu'il sait de la politiqueprotectionnisteoudes res-
sourcesnaturellesdu pays ou des besoinsdu marchéet des
événementséconomiques contemporains desfaitsqu'ilrapporte
aux diversesconditionsdu développement, connaissons-nous
la valeurdéterminantede ces facteurs? apercevons-nous des
causalitésdémontrées?'t
Celivre n'est donc pas un livre de science; mais il peut
rendre à la sciencedes servicesparce qu'il est richement
documentéet clairementcomposé.Même,quelques-unesdes
catégoriesde faits ici rassemblésne paraissentpas très dis-
PORUBS DE LA PRODUCTION 033

tantesd'une élaborationscientifique seulementil faut que


l'esprit les reconstitue en séries parmiles élémentshétéro-
gèneset les considérationsinapplicables.D'autre part, cer-
tains éléments d'explication,préseutégd'une manière qui
n'est pas méthodique,pourraientservirà jalonnerpour une
étude positivela recherchede plusieursespècesde phéno-
mènes,en particulier ceux qui concernentles variationsdu
marché. jj. g.

Nousabordonsmaintenantla catégoried'ouvragesqui res-


treignentaux conditionsde la monographiedes étudessus-
ceptiblesde résultats scientifiques.Par leur nombre,la va-
riété de leurs sujets, l'étenduede leur documentation,ces
ouvragesreprésententune sommedetravailconsidérable;en
particulier,ceuxqui nousviennentdes séminairesallemands
semblent,province par province, industrie par industrie,
époque par époque, conduire uue euqnête constamment
ouverte.Maisà ce vaste labeur voyons-nousrépondre les
résultatspour lesquelssans douteil a été entrepriset conti-
nué? On verra dans le détail quel déchetles mouographies
accusentdans l'information,dans l'interprétationdes faits,
dans la connaissance mais nous pouvonsdès à présent y
signaler un vice général, et commecongénital,qui est un
vie deméthode.
lïyà~"3eûxespècesde monographiesles unes sont limi-
tées, en raison, par la compréhensiond'une question,d'un
problème les autres sont limitées,en pratique,par les condi-
tionsd'une enquêtepartielleet d'un sujetparticulier. Autant
les premièrespeuventrendre de servicesà la sciencesi elles
sont exhaustives,autant les autres risquent d'être insigni-
fiantesou inefficaces,à moiusde circonstancesexceptionnel-
lemeutfavorables.Leur manquede portéen'est pas compensé
parleconcoursde questionshétérogènes,qui n'ont de com-
munquedese rapporter à la localité,à la période,à l'institu-
tionchoisiepar l'auteur (on en verradiversexemplesci-des-
sous dans les ouvragés de MM.Brauns, Greif, Heymann,
Mayersurtout); et il s'en faut de peuqu'on oublieles ques-
tionsimportantes.
Auxproblèmesqu'elles abordentou qu'elleseffleurent,plu-
sieursde ces monographiesfournissentdes réponsesou des
commencementsde réponses positives.Mais toutes, sans
exception,montrent qu'il est impossible,avec des expé-
034 l'axxke souioi.oaia.UK. luûu-iuuj

rieuces insuffisantes par le nombre, la sûreté et l'importance


des données, de résoudre ces problèmes; qu'au contraire il
est nécessaire pour lu science, avec la précision, l'exactitude
et lu rigueur dont les monographies fout une application par-
fois exemplaire, mais étroite, de traiter les vastes sujets qui,
par des expériencesdécisives, peuvent conduire aux résultats
attendus.

BRAUXS(HeiNRicn). Der Uebergang von der Handwe-


berei zum Fabrikbetrieb In der Mederrheinischen
Saint- und Seidenlndustrle und die Lage der Arbeiter in
dieser Periode. (Staats-u. sozialwissenschaftliche Forsehun-
gen. ligg. v. Schmoller u. Seriug, B. XXV, H. 4). Leipzig,
Duncker u. Humblot, xn-286 p. in -8°.
XI.Brauns s'est proposé d'étudier et d'expliquer le passage
de VartUunerieà la fabrû/iu dans l'industrie du velourset de
la soie de la région de Crefeld. C'est uu sujet précis de mor-
phologie, une expérience précise de variations morpholo-
giques à élucider. Écartons tout ce qui dans le livre se rap-
porte à d'autres questions, laissons de côté la description du
fonctionnement actuel de l'industrie.
Dansuue introduction de 9 pages, M. B. résume l'histoire de
l'industrie considérée jusqu'au moment critique qui marque
la victoire de lu fabrique, c'est-à-dire du xiv*siècle à 1880.
Ensuite, deux chapitres exposent les conditions techniques
de l'industrie, un troisième décrit l'introduction du machi-
nisme (p. 30-41) et ta régression du tissage à la main (p. 41-
47). Et c'est tout, sauf le chapitre VI, qui, eutre les autrescha-
pitres relatifs à des questions de régime et de situation
sociale, examine les conditions et les limites du développe-
ment de la production mécanique dans l'industrie à domicile
(surtout les pages 140 à ISO).Au total, c'est peu de chose
dans un volume de 2S(î pages, et l'auteur passe bien vite sur
de longues périodes et sur des moments qui paraissent déci-
sifs. Il a beau être exact et précis dans son exposition des
faits, des formes diverses de l'industrie, des conditions tech-
niques le problème morphologique essentiel n'est pas traité
Afond, il ne reçoit pas sa solution.
D'abord était-il possible d'expliquer le passage d'une forme
économique a une autre sans donner à la description et A
l'interprétation de ta première beaucoup plus de développe-
fOHMBS OK U PHQMWTIOK ffifô

.t.lt.uA. _t- 1.
meut et d'approfondissement que n'a fait 1 auteur?En parti-
culier, la phase do croissance de la fabrique, de 1830à 1872,
exigeait uue étude minutieuse, qui devait pourchasser dans
les documents officiels et privés tous les éléments utiles pour
établir une statistique continue et pour faire conuattre les
conditions du développement. Cesconditions ici sont déduites
eu quelque sorte de la considération d'un type moyend'établis-
sement, dout nous ne savonspas ce qu'il a de réel et de typique.
Si ce type a existé, il se peut, comme l'auteur l'avance, que la
petitesse du capital nécessaire à l'établissement d'une
fabrique, l'organisation du commerce entre les mains d'inter-
médiaires, l'extension des délais de paiement pour les ma-
tières premières, la division du travail, qui retient en dehors
des fabriques plusieurs portions importantes de l'industrie,
aient été autant de causes de l'augmentation du nombre des
fabriques; mais rien ne s'oppose, eu l'abseuce d'une démons-
tration expérimentale, à ce que les mêmes conditions aient
eu des effets inverses ou différents.
En second lieu, l'étude de lu transformation morpholo-
gique manque, elle aussi, de rigueur démonstrative. Ici
encore, l'étude statistique précise fait défaut. Devant les phé-
nomènes qui ont pour résultantes la réduction du nombredes
établtssetnentsd'artisans et l'augmentation, puis ta prépondé-
rance numériques des fabriques, M. B. parle de lutte. de
combat, de positions attaquées, défendues, emportées mais
les raisons mêmes de ta lutte et de la victoire ou de la défaite
ne sont pas expliquées par une analyse méthodique. Nonque,
pour la compréhension des faits et de leurs causes, des élé-
ments no soient fournis par l'auteur, notamment sur les
variations quantitatives ou qualitatives de la production et
sur les variations des prix comme conditions des variations
de structure ou de fonction. Mais ce ne sont que des linéa-
ments.
Renierait il examiner la question des rapports entre les
variations morphologiques et les variations technologiques.
M- B. montre ou suppose l'existence de ces rapports mais
prouvent-ils une causalité? en quel sens dans quelles con-
ditions?

GRRIFCWilphid;.– Studien ueber die Wirkwarenlndus-


trie in Limbach i. Sa, und Umgebung. i Volkswiitsehaft-
liebe Abhaudlungen der BadischeuHochschulen. IX. B., 2.
636 L'ASSKE <UQ«-i9<H>
SOUOLOOIOVIS.

Ergûnzungsheft).Karlsruhe,BraunschoHofbuchdruckerei,
vti.118p. iû-8u.
19OT,

L'objet de M. Greifn'a pas été d'étudierà fond tous les


détails qui se rapportentà l'industriedutricotdanslit région
de Limbach,mais plutôt de vérifierpar desexemplesprécis
lesrésultatsdesenquêteset des étudesantérieuresrelativesà
l'industrieà domicile.Aprèsuu résuméhistoriquedu déve-
loppementde l'espècechoisiepar lui, il décrit l'organisation
de la productionet de la technique,puis la structure des
formes diverses, enfin les débouchésde l'industrie.Avec
beaucoupde précision,Il exposeles procédésindustrielsdes
différentescatégories(tricots,bas,gants),analysela coustitu-
tutiondes fabriqueset de l'industrieà domicile,puis les rap-
ports des deux formes, enfin recherchequellesinfluences
peuventavoirsur l'industriela mode,les saisons,la concur-
rence, la législationdouanière.
Sa description, notammentpour l'industrieà domicile,
pénétredans le détail des structures, des cas typiques; elle
montrela diversitédes rapportsmorphologiques et technolo-
giquesentre les fabricantset les ouvrierset des mécanismes
industrielsoù ils se trouventen liaison.Cequi vaut mieux
encore, c'est que l'analysedégage,sur lesfaits mômes,des
indicationsde causalité(parexemple,dausquellesconditions
et avecquellessortesde produits résistele mieuxle tissage
manuel, commentse recrutentles fabricants,quelsrapports
il y a entre la grandeurdes établissements et la spécialisation
des industries,commentvarie le nombredes travailleursà
domicilerelativementà la grandeur desétablissementsaux-
quels ils sont attachés, quelleest l'influencede la'modesur
l'existenceou la formedes produits).
Siles preuvesne sont pas conduitesà leurachèvement, cela
tientaux erreursouaux défaillancesdeméthode.Lesmoyens
et les élémentsnécessairesde démonstrationque fournis-
sent l'histoire, la technologieet la statistiquesont retenus,
commeaccessoires,dans une introduction,dansune section
spéciale et dans des tableaux; ils ne sontni appliqués, ni
incorporésà l'œuvremême.Par suite, ni les évolutionsde
faits ne sont représentables,ni lesdatescritiquesdétermi-
nables, ni les causalitésscientifiquementdémontrables.Les
raisons donnéesdes phénomènesétudiés,par exemplede la
constitutionet du développementde l'industrieà domicile,
VOHMI»pe LA PRODUCTION «37

de son installationdans desimmeubles pris eu location,de


l'adaptationde l'industrie aux effetsde la mode ne sont pas
induites de variationsméthodiquementinterprétées.Lescon-
clusions qui prévoient le développementultérieur de la
fabrique,les progrèsde la spécialisation,la conservationde
l'industrie à domicilesont plausibles, mais non démontrées.
D'ailleurs,il n'est pas sans Intérêtde remarquerque, pour
rendre comptede certains changementsde structure ou de
fonction,M.G.recourt à des phénomènesqui n'ont rien de
technologique,mode, concurrence, capacité de logement,
capitaux,salaires,etc., c'est-à-diredes phénomènessociaux
d'économie.

FROMM(Max). Das Mûhlegewerbe in Baden und in


der Rheinpfalz. ( Volkswirtsehaf tliehe Abhaudluugen
der Badischen Hochscliulen,IX. B., 4. H Karlsruhe,
BraunseheHofbuchdruckerei, 1907,w-153p. in-8°.
Ce livre présentel'exagérationd'un des défauts du précé-
dent ouvrage entre un chapitred'histoire,qui suit la chro-
nologieet qui expose en la suivant les divers événements
technologiques,législatifs,douaniers, relatifs aux diverses
phaseséconomiques, avecquelquesindicationsde statistique,
et un chapitre de descriptioncontemporainequi, s'ouvrant
sur des donnéeset des interprétationsstatistiques, continue
par l'analysedétailléede lu structure et du fonctionnement
del'industrie,la placen'est pas laisséeà l'explicationscienti.
fique des phénomènesétudiés.Mais la force démonstrative
des faits eux-mêmeset l'évidence de certaines relations,
dégagées par une analyse probe, complète et minutieuse,
donnentà cette monographieune valeur qui dépasse beau-
coupcellede la méthodeet du plan.
Au terme de l'étude, les conclusions,malgré le vice de
méthode,résumentles élémentsessentielsd'explicationpro-
bable.La grandemeuneriecommercialeet capitalistea rem-
placé, à partir de 1860,la petite meunerieà clientèle res-
treinte, non point essentiellementen raisond'une supériorité
technique, mais en raison d'une adaptation meilleureaux
besoinsexpriméssur le marché(l'analysedes conditionsde
cette adaptationnesemblepas décisive).La petite meunerie
a pu ou peut se maintenir,en remplissantsa fonctionécono-
miquedanscertainesconditionslocales (maiscellesqu'indique
l>3H i/aKKAb sociiiLOGIgtili. 19O6.|fl09

l'auteur paraissent, non déterminantes du maintien, mais


seulement concomitantes de celles qui l'out déterminé;. La
nouvelle forme industrielle a pu devenir adéquate à sa fonc-
tion par sa perfection technique et par la production de
masse à bas prix (mais le sens dans lequel la causalité s'est
accomplie est-il bien celui que déduit l'auteur?).

GUETERMANNiEihikn). – Die Karlsruher Braulndustrle,


(Volk8\virtscliaftliche Abhnndlungen der Badischen Hoch-
schulen, X. B.,4. H.). Karlsruhe, Braunsche Hofbuchdruck-
erei, 1909, v-98 p. iu-8°.
Dans cette monographie, M. G.a rassemblé leséléments de
connaissauce relatifs à toutes les questions qui intéressent
cette industrie locale, organisation corporative, tecliuique,
législation, impôts. Sur chacune de ces questions, tantôt sou
analyse entre dans un détail miuutieux, tantôt sa description
se développe en perspectives générales et vagues. Cela choque
d'autant plus qu'il s'est limité à un territoire minuscule et,
dans le temps, ue remonte pas au delà du xvui" siècle. La
documentation, qui est parfois de seconde main, qui n'est
pas soutenue de références, qui est insuffisante et souvent
imprécise en matière statistique, qui souvent ne dépasse pas
l'analyse des textes de statuts et de règlements, apporte néan-
moins uu assez grand nombre de faits caractéristiques. Une
première partie étudie l'époque corporative (jusqu'en 1863;,
et passe en revue les catégories, maitres, compagnons, appreu-
tis. Une seconde partie expose le développement ultérieur
passage de la petite industrie à la grande, lutte de concur-
rence, technique de la vente, impôts, cartels.
Quanta la question qui nous intéresse ici et qui aurait pu
être la plus utilement traitée, la question de la transformation
morphologique, M. G. montre les changements techniques
survenus vers 1860,et en particulier l'organisation des caves
urbaines mieux installées que les caves suburbaines utilisées
précédemment mais quels faits stimulèrent alors un effort
d'amélioration, ou, si le désir d'amélioration, si môme l'effort
avait préexisté, pourquoi réussit-il à ce moment-là? Puis la
machine à vapeur s'introduit dans la technique déjà renou-
velée sous quelles influences, dans quelles conditions? La
lutte de concurrence après 1870 prend une plus grande
acuité et a pour effet la réduction du nombre des petits éta-
FORMÉS
DELA PKÛDl'CTrO.V G39

blissemeiits, incapablos d'augmenter leur production et


d'abaisser leur prix de vente jusqu'au degré nécessaire
qu'est-ce qui détermine ce degré. qu'est-ce qui le rendait
nécessaire, d'où résultait le changement des conditions de
productivité et de prix rI
?

WUPPERMANN(Hkhman). Die Industrie emaillierter


Blechgeschlrre in Deutsohland. (Volkswirtsehaftliche
Abbaudlungeu der Badischen Hochscliulen, IX. H., 4.
Ergiinzungsheft). Karlsruhe, Braunsche Hofbuchdruckerei,
1907, VH-100p. in-8°.
Voici le résumé de cette monographie, qu'on ne peut con-
sidérer que comme un recueil de faits, rassemblés avec soin
1° généralités: développement et technique; &la production
(y comprisles conditions du travail) 3" droits de douane sur
les matières premières; 4° les débouchés: marché local et
marché international 5° tentatives de syndicats et de cartels.

HEYMANN(Otto). Die Entwlcklùng des Pfaelzer


Tabakhandels seit den 70 er Jahren. (VolkswirlKChaft-
liche AbimndiuDgeu der Badischen Hochscliulen, X. B.,
S. H). Karlsruhe, BraunscbeHofbuctadruckerei, 1909, 108p.
in-8".
Considérant l'intérêt que présente l'étude, assez rarement
entreprise, de la situation et du développement des branches
particulières du commerce, M. Il. s'est proposé, comme il le
dit, d'ajouter une pierre à l'œuvre à peine ébauchée il a
pris pour sujet, en vue de la théorie et de la pratique, le
commerce du tabac dans le Palatinat depuis 1870. Ce sujet
semble, à première vue, bien resserré dans t'espace et dans
le temps en réalité, l'industrie et le commerce du tabac dans
le Palatinat, importants par eux-mêmes, sont reliés au .phéno-
mène, considérable par son volume et par sou extension, de
la consommationdu tabac en Allemagne. D'autre part, depuis
quarante ans, sur le territoire particulièrement cousidéré,
outeu lieu des phénomènes morphologiques qui paraissent
intéressants et dont le plus manifeste est la diminution du
nombre des établissements. M. H. s'est proposé d'étudier ces
phénomènes, celui-là en particulier, et d'en rechercher les
causes.
640 l'année sqciolooiqub. ifloa-190»

Le commercedu tabac en Allemagnecomprend deux


branches,le commercedu tabac indigèneet le commercedu
tabacexotique.Descentresde productionet de commercese
sont constituésdans le Palatinatet plusgénéralementdans
l'Allemagnedu Sud Munulieimest devenuune graudeplace
commerciale,dontles relations se sontétenduesà toutes les
régiousdel'Allemagneproductricesde tabac.Quantau tabac
exotique,il alimentedes centrescommerciauxqui sout les
ports d'importation,les grandes places commeBerlin, les
centres de productioneux-mêmes.Le phénomène capital
au xix" siècle a été le développementde l'importation et
de l'élaborationdu tabac exotique. L'importationest fort
ancienne,mais, jusqu'ausecondtiers du xix"siècle,la culture
indigènen'a cesséde se développersans que l'importation
exerce sur elle aucune influencedéprimante. Puis, entre
-1830et 1840,l'importationmanifesteune augmentationcon-
sidérableet le domainecultivédiminue,sans que d'ailleurs
le produit brut dela culture baisseni que les prix de vente
du tabac indigènesubissentune dépressionni que ce tabac
perdeaucunepartiedu marché.Cequi diminue,c'est la part
du tabac indigènedans la fabrication maisce fait demande
une analyse précise,dont les résultatssont que la culture
indigènea augmentépour la productiondu tabac à cigares.
En effet,depuis le milieudu six*siècle,le marché Intérieur
est devenu preneur de grandes quantités de cigaresà bon
marché,articledont l'exportation,autrefois considérable,a
décru pour compensercette perte, la fabricationpalatine a
pu, grâce à de bas salaires et aux dispositionsdu terrain,
satisfaire aux besoinsdu marché nationalen cigaresà bas
prix. Inversement,la culture a diminuédans les régionsqui
produisaient un tabac destiné à d'autres fabricationsque
celledes cigares.Il ne semblepas que,depuisquarante ans,
le tabacindigèneait été moinsemployépourcette fabrication
spéciale l'accroissementde fabricationdu tabac exotique
s'appliqueà d'autresespècesde produits.
Dansces conditions,à quellescausesfaut-ildoncattribuer
la diminutiondu nombredes établissementspalatins depuis
1870?Les changementsqui se sont produits sur le marché
ne peuventl'expliquer,puisque la fabricationd'une espècea
pu olïrir toutela résistancenécessaire.Maisil faut remarquer
d'abord que dans l'industriedes cigares s'est produite une
large extensiondu systèmedes filialeset de l'industrie dissé-
KOnUKS DB LA PBOVl'UTIOK Cil

miuée;d'autre part, quelesgrandsût'iltlïoanm^tita


rkllt*! ffim lac rmorwla
établissements se trouvent
sa ttwviiuaut

dans unesituation prépondéranteeu ce qui concernel'achat


direct aux producteurs; et, à ce propos,est-il possiblede
lutter par l'association,par l'impôt,par des mesuresdoua.
nièresou réglementaires,contrelescausesd'où provieutleur
supériorité?Y
La monographiede M.H. se terminepar l'examende ces
mesurespratiques, et pur des perspectivesassezconfuses.
Au totalelle présente biendes lacunes,D'abordM.H.passe
trop sommairementsur les origines, notammentsur les
périodesde monopole,qui ont pu être décisivespourl'avenir
de l'industrie, et sur les circonstancesqui ont pu fairede
Mannheimet de ses environsun centre de premièreimpor-
tance pour l'industrie et le commercedu tabac.Eu ce qui
concernele développementde la fabricationdes cigares, il
semblequ'ici la matière pouvaitse prêter à une iuductiou
qui u'a pas été entreprise.Lesdéfautssont encoreplus frap-
pants dans le, troisième chapitre (développementdu com-
mercedanslePalatinat depuis1870).D'unemanieregénérale,
lesdonnéesstatistiquestoutdéfautà la discussiondes rela-
tionsentre les variationsmorphologiques, en particulierles
variationsdu nombre des établissements,et les variations
concomitantes.
La plupart des questionsgénéralessoulevéesparla mono-
graphiene sont pas orientéesdans le sens d'une solution
positive.Quellesconditionsont déterminéla localisation de
l'industrie du tabac dans des pays qui s'y sont adaptés,
commedit l'auteur ? Commentle commerced'importation
a-t-ilsubi l'attraction deslieuxde production? Lesrelations
de l'importation et de la productionindigènesdépendent
de variationstrès mobilesdu prix et de l'estimationde la
qualité que signifient ces variations,dans quet sens ont-
elles pu agir et se combiner Des variationsgénéraleset
loaalesdans la culture du tabacont été déterminéespar des
variationsde production et de consommation de quelle
manièreont agi l'une sur l'autre ces deux séries de varia-
tions? Quellea été la valeursocialedes sortes,des prh, des
pratiqueset des formesde la venteau détail? Quellea été et
commenta varié l'organisationdu commerceentre produc-
teurs et consommateurs?Voilàdes questionsque le livre
suggèreet ne résout point.

Iv. DuMiuem. – Aiiiii'i! social I9U6-1U09. 41


Ci-1 I.'a.NXÉKSQCIul.uiilt.IlK. i')ufi.l9i)9

MAYERillouo). Rtkppurr, ein Bauern-und Xndustrie-


arbeiterdorf. (Volkswirtscliaflliclie Abhandlungen derBa-
dischen Hochschuleu, X. 11.,0. H,. Karlsruhe, Brauuschc
Ilofbuclidruekerei, 1909, vn-87 p., in-8\

llûppurr, village situé près de Kurlsrulie et aujourd'hui


iueorporé ù lu commune de Karlsrulie, a été soumis à l'iu-
llueucede la grande ville voisine, et en particulier à l'influence
d'une industrialisation croissante comment
s'y est-il adapté,
comment n-t-il réagi VTelleest la question que M. M. s'est
propose d'examiner, dans un intérêt théorique et aussi avec
des préoccupations pratiques qui se dénoncent
surtout quand
l'auteur expose les dispositions religieuses intellectuelles
et politiques des habitants et montre comment ils oui résiste
aux utopies social -démocratiques»,
Depuis 1895,sur le territoire de Rûppurr, le nombre des
propriétaires a augmenté en même temps que diminuait
l'étendue moyenne des propriétés et même l'éteudne totale
des plus grandes. La division des propriétaires en trois classes,
agriculteurs, ouvriers et autres, montre l'augmentation du
nombre des ouvriers propriétaires de petits terrains de
culture les ouvriers n'ont donc pas été prolétarisés par le
voisinage de la grande ville industrielle. Mais cette conclu-
sion ne serait admissible que si réellement était démontrée
l'accession des ouvriers à la propriété, car il se peut que des
agriculteurs aient été industrialisés et contraints d'amoindrir
leurs exploitations l'auteur uote lui-même (p. U)
l'absorp-
tion d'une partie de la population agricole par l'industrie.
En second lieu, la technique agricole a été modifiée
par
la condition industrielle d'une partie des exploitants l'ex-
ploitation a pris les caractères d'une exploitation annexe.
Hûppurr offre donc uu exemple d'association de l'agriculture
et de l'industrie mais c'est lu dénomination
vague d'un
phénomène dont il n'est pas démontré qu'il ait eu lieu de la
mauière et dans le sens indiqués. D'autre part, l'endettement
de la propriété pèse surtout sur celle des ouvriers mais ce
fait prouve-t-il, comme le soutient l'auteur,
qu'avec et par
l'hypothèque les ouvriers s'élèvent au premier degré de la
propriété, et l'endettement u'est-il pas la tare d'anciens agri-
culteurs industrialisés et relativement déchus comme
pro-
priétaires ?
Mais, si même l'auteur était arrivé à des certitudes sur ces
t'OUUK*
UKl.\ l'HODLXTIUN 043

points controversabics, quolle pourrait ôtre la valeur d'une


démonstration aussi restreinte, opérée sur des éléments si peu
nombreux et si peu importants? Les matériaux rassemblés
dans cette monographie, précis et bien classés, peuvent être
utiles comme tels ils ne sauraient fonder de conclusions
générales ai même particulières, car les douuées du problème
ne peuvent être posées dans les limites d'uuo expérience
aussi restreinte et isolée. « In speciatibus generulin », dit
l'auteur (p. 86-87) mais rien ne prouve que l'exemple eongj-
déré ait une valeur typique.Desemblables études ne montrent
que des possibilités l'auteur le reconnaît quand il conclut
que, dansles conditionsdéfinie*pour Ruppurr, un village peut
échapper à l'influence destructive ou absorbante de la grande
ville.

MENOLD(Heinkiui Huijim.– Der Elnfluss der Maschine


auf die Entwicklung der gewerblichen Betriebsfor-
men In der deutsohen Buchbinderei. Inaugural-Disser-
tation. Krlaugeu,Junge u. Sobn, 1908,iv-180 p. iu-8°.
M. Menold aborde par une expérience précise une des ques-
tions dont lusolution intéresse la compréhension des rapports
de la technique et de l'économie quelle a été ['influence du
machinismesur le développement des formes économiquesdans
l'industrie de la reliure en Allemagne? Mais cette question
est traitée ici avec les défauts habituels de ta méthode mono-
graphique. Le premier chapitre expose les variations de l'in-
dustrie et de sa technique, et le second les faits relatifs ù
!'iuuuence du machinisme travaux de l'artisan et spécialisa-
tion, machines employées et rendement, technique actuelle
daus la petite industrie etdans la grande. Le chapitre 111exa.
mine les industries spéciales qui se sont intégrées à la reliure
ou s'en sont détachées, et le chapitre IV, la situation relative
de la petite industrie et de la grande.
Sur ce plan, qui n'est pas clair, les questions s'enche-
vêtrent. et, dans le détail, les éléments de la démonstration
sont confondus. S'il en est ainsi, c'est sans doute parce que
le sujet n'est pas non plus clairement posé avec les questions
qu'il implique. Les notions sur lesquelles repose toute l'expo-
sition, celles (le petite indunlne et de grandi' indrcstrin,ne sont
pas définies; et, taudis que l'auteur montre quelles machines
sont employées dans l'un et l'autrecas, en quelle proportion,
Oit L'ANNÉESOCIOLOGIQUE.
W08-J909
avecquelle çttlcacitô,la questionest de savoir pourquoitelle
catégoried'établissementsadmet ou réclamele machinisme,
quellecapacitéil leur assure,quellesvariationsde structure
il rend possiblesou nécessaires.Lespropositionsde l'auteur
ne résolventpoint les problèmesréels.D'autrepart, sa docu-
mentationest insuffisanteou insuffisammentprécise.Si,dans
son résuméde l'histoiredela reliure, il remontejusqu'àl'an-
tiquité, il ne fournit généralementni faits ni référencesà
l'appuide ce qu'il avancesur les phénomènesde spécialisa-
tion et A'int<!grat
hn et quant aux exploitationsmêmes,il se
contented'exigus rudimentsde statistique.
Dès lors, la plupart des explicationssont viciéespar la
matièreou parla méthode.Lesprogrèstechniquessontexpli-
quéspar des besoinsdont l'action restedans l'ombreoudans
l'hypothèse à cesmêmesbesoinssontrattachéssansdémons-
tration les phénomènesde spécialisation.Ou nous montre
que le développementdes grands établissementstientà des
qualités techniquesqui mauquentaux petits établissements
dès lors le maintiende ces petits établissementsexigeune
explicationtiréede principesdifférents.On nous dit, sans le
prouver,que le machinismeaugmentela spécialisationmais
les premiersphénomènesde spécialisationsont antérieurset
étrangers à toute influencedu machinisme.Ainsi presque
toutes les thèses sont discutables, et les meilleuress'ap-
pliquent plus à des virtualitésqu'à des réalités moyenneset
démontrées.Si on les considère commetelles, commedes
hypothèsesou commedes indicationssommaires,le livrequi
les expose ne paraitra pas sans intérêt ni sans valeur sur
l'influencedéterminantedes besoinsdivers des consomma-
teurs, sur le rapport des phénomènesde spécialisationavec
les phénomènesde développementtechuiqueou de difléren-
ciationdes marchés, sur le caractèrenaturel et normaldes
phénomènesmorphologiquesintroduitspar les changements
detechnique,il montreou suggèrel'entrepriseutileounéces-
saire d'importantesrecherches.

BERNHARD (Ekxst).– Hoehere Arbeitsintensitaet bei


kuerzerer Arbeitszelt, ihre personalen undteehnlsoh-
sachlichen Voraussetzungen. (Staats-u. soziahvissen-
schaftlicheForschungen,bgg. v. Schmolleru. Sering,H.
138).Leipzig,Dunckeru. Ilumblot,1909,x-94 p. in-8°.
L'objet de cet ouvrage a été d'étudier, non point d'une
FOnMBS
DRLA PltODl'CTIOK 045

manière empirique, mais d'une manière systématique, Vin-


tmtification du travail correspondant à la diminution de sa
durée et les conditions « personnelles et techniques de ce
phénomène (p. vsqq.); il a semblé à M.B. que, par son intérêt,
non seulement pratique, mais théorique, cette question était
une des plus importantes que, l'économie contemporaine
propose à l'attention. Pour la résoudre, il s'est proposéd'exa-
miuer des cas typiques et d'analyser pur eux la tendance à
l'intensification, si elle existe, dans des conditions données.
Le but de sou travail est donc précis et scientifiquement
défini. La documentation en est étendue et solide.
La première partie du livre établit par des exemples bien
choisis le fait de l'intensification. Laseconde partie recherche
dans les conditions techniques et morphologiques d'indus-
tries prises comme types quels peuvent en être les facteurs
dans l'industrie textile, l'application et le développement du
machinisme laissent subsister un résidu de facteurs ouvriers
personnels (spécialisation, capacité pour servir la machine,
habileté de direction), qui agissent sur le total de la produc-
(
tiou dans la construction mécanique, les mêmes facteurs
apparaissent avec force, en s'adaptant à une production spé-
cialisée, faute de laquelle l'intensification parait impossible
ou très limitée. L'intensification est accrue par une extension
superficielle des établissements qui permet au nombre des
machines de croître plus vite que le nombre des ouvriers. Elle
parait aussi en relation avec l'organisation générale de l'élaA
blissemeut, la direction, la discipline, l'hygiène. Dans ta Irai- )
sième partie, M. Bernhard dégage ce qu'il appelle le facteur
personnel la technique est un facteur conditioniwl, qui rend
possible l'exercice d'une activité ouvrière plus habile et plus
intense. Par conséquent, l'artisanerie oppose des limites
étroites à l'intensification et par suite à la réduction de la
durée du travail; cette durée peut décroître à mesure que
croit la grandeur des établissements. Lit quatrième partie est ""
relative aux causes de l'intensification, qui sont essentielle-
ment pour l'auteur l'augmentation du repos etilesjoisirs, qui
permettent la réparation des forces physiques, et, en seconde
ligue, adventices et régulatrices, les dispositions psycholo-
giques des ouvriers. M. B. conclut dans la cinquième partie,
que lu diminution de la durée de travail est-un « postulat 1
technique », c'est-à-dire que le progrès mécanique, qui ne ]
diminue pas, mais accroît la valeur des facteurs personnels
646 l'a.N.VKK lf»0H-l9"i>
MltlOLOlilQL'K.
t.:
t: 1.
d'habileté, de conduite, d'intensité du travail, exige la rôduc-
tiou de la durée. Maiscette réduction intéresse l'éthique con-
tdbue-t-elle à l'amélioration physique et intellectuelle des
travailleurs? Dansla sixième et dernière partie, M. B. montre
qu'elle y contribue.
On voit que sur beaucoup de points M. B. est arrivé à des
formules précises et que son travail a eu des résultats posi-
tifs. 11décrit des pratiques et des institutions économiques
bien analysées il dégage les facteurs humains, les réactionset
les mobilex qui peuvent fournir l'explication des variations
économiques (tout le sujet comportait l'étude relativement à
la durée et à l'intensité du travail. Durée et intensité, ce sont
les variables et ce sont eu même temps les réalités écono-
miques que l'analyse poursuit avec précision en face, elle
met eu évidence les autres réalités explicatives qui sont les
dispositions mentales, les faits de conscience, et de conseimee
eollectiee. D'autre part, l'auteur montre quelles conditions
teciiuiques concourent ou s'opposent à l'action des facteurs
économiques ainsi l'intensification du travail, qui dépend
des volontés ouvrières, dépend aussi de conditions techniques
déterminées; les facteurs de psychologie ouvrière. causes
directes de l'augmentation de lit production, n'obtionneut
leurs effets que sous têt-laine*conditions de progrès technique
qui mettent certaines structures hors de lutte, hors de la pos-
sibilité de vivre.
HKVNR;.M.).– Das altdeutsohe Handwerk. Aus dem .Vacillas.
Strassburg,Trilbner, 1008,xv-218p., in-8".
TVSKA;Kahi,vus-).– Handwerk und Handwerker in Bayern
im 18. Jahrh. Miinclien,licuiiliardl,1907,vu-lliJp., in-8".
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ter'xHA., t',108.3, |j. -i'25-379.(D'upvùsl'enquête du Stutistisuhos
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docuineutûeet précise).
VORSlf.s
DI!1.\l'ROItL'C:TIU:>\ 6,~ï

ARNDT [Pu'r.). – Kurze Besohreibungen der Hetmarbelt tm


rhein-mainisohen Wirtsohaftsgeblet. Mouogfapliiuu huif. vuu–
I. K'im. Fischer, IU08viu4ii7 p. in-8".
DURCIMES(Kmii.k;.– L'industrie à domicile de la confection
des vêtements pour hommes dans la campagne lilloise. Lille.
Imp. centrale du N'nrd, 1007, 15" p., in-S".
WIl.WU.NUT(H.). ArbeiterinnenschutzundHeimarbeit. It'-na,
Fischer. l'JUO,in-S0 ;V<jir aussi il In wltou VI de-s(ruraux trai-
tant d« l'industrie ;'i domicileplus spûiMalomunt au point «icvue
de la condition des ouvriers)

CUOMiACII(Euk.). – Die oesterreiohiache Spitzenhausindustrie


(Wienersfaatswiss. studieiiJ.Wien, 1907. n-211 p., iu-8" (Soulève
des questions duim-tliode int(?ress:iiites: cf. Sl'mda, Connut'*Jlibb.,
nov. I9OH,p. 01)S\
CUO.NBACH (Hlsiî). – ZurFrage deslandwirtsohaftlicbes Oross-
und Kleinbetriebes. Xdtscli. Volksu:,Sosi«lpul. a. V'tTic.iyos,
p. !i.:i7-0U0. (Kevueet position des questions;.
liOHOWin, <iKu. WIM.K.N/ (KusAiimij. Beitraege zur Q&-
schlohte und gegenwaertigen Lage der Kieineisenindustrle
inRusslasd. SclwwtlerxJhb.m, 1, |>. 03-18'j.

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SCIIU.MACI1M1I
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in der engUsohen Industrie Jhbb. f. Nuii<mulôk.u. Nat.. 1008,
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– Ernst Abbes sozialpolitisclie Sohrif-
SCHMOI.I.EU((ii.-sT.vv).
ten. Kiu Beilrag zur \.ahvi: vom Wrsrii und lîtwiun di;r imidi-i'iien
Grossuntcrnchmung u. von d«r Stcllung der Arbi-itcr in ihr.
SehmoUer'tJkb.9tyi. 1, l-i9.

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xvki1.f. il. //«.<.Sttiattffl»* 30.11.).
M8 l'\S.NÉB SOCIOLOGIQUE.
W0IMVQ9

VI. l'RIX.MONNAIK
VALKUH,
Par MM.IUuiwwhs
cl V.Uihiakb.

TARDE (Aikbkddk).– L'idée de Juste prix. Essai de


psycho-
logie écouomique. Paris, F. Alcau, 1907, 372 p., in 8".
Cette étude, dominée par l'inspiration des idées
paternelles,
témoigne aussi d'un effort personnel d'information et de pen-
sée et d'un notable talent de forme. L'auteur entend
prendre
l'idée même de juste prix comme un objet d'observation Il
pense en moutrerrexistence.de fait, et l'action, par uue double
voie d'une part, en analysant les théories de la valeur éco-
nomique, domaine, pour lui, de conscience individuelle, et y
découvrant toujours, au fond, quelque afïlrmation de nature
éthique; d'autre part, en considérant, dans les faits extérieurs,
sur le marché, les prix ou du moins certains
prix, spéciale-
ment le prix du travail, et en notant la part qu'une idée de
justice a dans leur détermination. La première partie, dite
partie théorique, c'est-à dire l'étude et la discussion des doc-
trines (théorie canonique du juste prix, théorie
pliysiocra-
tique du prix naturel, théorie psychologique, théorie autri-
chienne, théorie de la Ilvaleur-travail », théorie « socialiste »
– sous ce nom à
peu près exclusivement la théorie marxiste;
est de beaucoup laplus étendue (p. 17-262;.La deuxième, dite
partie pratique, en considérant le juste salaire, le juste iu térôt,
le fermage usuraire. et les monopoles et le
juste prix, est
encore, pour une part, dialectique, et consiste surtout, sous le
nom d'étude des faits, à noter et discuter divers textes
légis-
latifs, sans rechercher quelleest, effectivement,l'action de ces
textes sur les prix, observés et étudiés en fait. Tout
l'exposé
est intéressant, la discussion vivante, adroite, l'utilisation des
données avertie et ingénieuse. Mais, dans lout ce travail,
nous ne trouvons pas une étude proprement
positive du rôle
d'un étémeatéthiquedanst'étabiissementdesprix: c'est-à-dire
nous n'y trouvons pas une analyse qui, se
prenant aux don-
nées de fait qu'on peut avoir, dans des conditions
appropriées
à unetelle recherche, sur les prix, sur leur formation,sur leurs
variations, et s'avançant, par delà ces données, ù travers les
concomitants que l'on peut atteindre valablement aussi par
des observations de fait, aboutirait à dégager les facteurs
qui
VALKL'H,l'IUX, MONNAIU 049

influent sur cette détermination des prix, et dans ces facteurs


à en découvrir un de nature éthique. Et l'auteur était, eu
effet, nous semble-t-il, empêché de concevoir et de faire ainsi
l'étude par deux grandes raisons.
D'abord il ne reconnaît pas lu nécessité, pour cette étude,
de s'attacher à de l'objectif. Citant la distinction que nous
avons indiquée ici entre psychologique et objectif, et, d'autre
part, les observations que nous avons présentées sur lit pré-
existence d'un prix de marché aux estimations individuelles
de valeur, qui n'expliquent donc pas ce prix, il estime, par
une argumentation singulière, que chercher d'abord l'objectif
dans une matière qui apparaît encore beaucoup toute subjec-
tive, serait se condamner d'avance à ne pas le trouver, et qu'il
vaut mieux, pour y préparer cette conquête de l'objectif, con-
tinuer de la traiter sans cette distinction ("p. 910) et il pense
que, si les estimations individuelles supposent un prix de
marché, ce prix de marché ne peut s'expliquer lui-même à sou
tour que par une ancienne estimation individuelle généralisée
(p, 7, 9, 251 et ffmim. P. 8 « La raison de toute valeur so-
ciale, c'est une valeur individuelle plus ou moins répandue
dans le cmur et généralisée par le moyen de la répétition
sociale ou imitation »). 11n'y a pas lieu de reprendre à cette
place, sous une forme générale, la discussion de l'idée qui est
au tond de cette thèse et oùle lecteur aura aisément reconnu
la pensée maîtresse de Gabriel Tarde, déjà bien des fuis cri-
tiquée et qui n'est pas appuyée ici de nouveaux arguments. Et
quant à l'application particulière de cette idée dans la ques-
tion de la valeur économique'et du prix, nous constaterons
simplement que notre auteur n'apporte aucune analyse ou
démonstration nouvelle du processus par lequel un prix, une
valeur sociale, pourrait bien résulter d'estimations iudivi-

4. <tObjectif,ce seraitêtre soumisà des loi: fixes,et susceptible,par


suite,d'éludéritriculiliijuo.
Dansce ras là objectifs'opposeraitalors sim-
ù Mais,
plement itiiprévisililo. précisément, lerôli><!<•lakIkuci-esttl'ugriui-
ilirli>domainedu prévisible,tinl'élat uctuelde nus connaissances, peu
du phénomènes de conscience peuvontêtre dits soumisù une prévision
emuiluntc, en vertudeluisdéfinie.C'estdonc chusserlimvde lu si-iencc
toutce qu'unappelleencore,– pcut-elroà lorl, – l'arbitraireindividuel:
c'estroitreiuilresanspreuvesle champfutur du la connaissance scienti-
fique,caril estpossible que toutsoit objectifuusein;qui-nousrrititftions,
quetouttiiiitsoumisil desloisli.ves seulementnousnecon-
c'est-d-dirc
naissonspastoute-:ceslois. Nouscroyonsdonc quecettedélinitiondu
termeobjectifestiHroile.Pournousobjectifreste ce qui calet ce qui
devienten dehorsdesconiii.-icuccs individuelles.»
650 1:SSr.K S(¡(:WI,QI.IIQUR. tU06.IUU9

duelles, Pi~PC;lèl~i~»oc
fttMt~Q elles-mêmes phénomène
némSn~rmhnn ~nnw..e. W :tA~A<t.t
premier et indépendant et
nous renverrons douc ù la critique que nous uvous
déjà pré-
sentée de la réalité d'un pareil processus. Notons-le soule-
ineut remarquer, comme le fait notre auteur, qu'un prix
courant, avant d'être cause, est effet.et qu'il faut reconnaître
une action des échangistes sur le prix aussi bien qu'une action
du prix sur les échangistes fp. 3511,n'est pas une objection a
cette critique; car nous w'avousjamais dit ni pensé ni
que le
prix courant préexistant n'uvait pas lui-même à être expliqué,
ni que les échangistes n'avaient pas d'action sur le
prix nou-
veau, mais bien que ce prix préexistant devait s'expliquer
autrement que par des estimations individuelles qui eu sup-
posent toujours un. qu'il devait s'expliquer par quelque anté-
cédent de même nature que lui, par quelque antécédent social,
et que, dans l'action des échangistessur lo prix, il y avait lieu
de reconnaître quelle part avilit, dans cette action, l'action
d'antécédents collectifs s'exerçant dans l'esprit des échan-
gistes, même à leur insu, la part de spontanéité propre, s'il y
en a une, étant le résidu.
Mêmeadmises la méthode et la position de notre auteur, sa
démonstration nous paraîtrait encore pour une autre raison
n'être pas établieeufait c'est que lu notion même sur
laquelle
elle tourne est équivoque, et que non seulement cette
équi-
voque n'est pasapercueuidiscutée, mais que la démonstration
même ne se tient qu'à la faveur de cette équivoque. Dans
« juste prix », que signifie exactement «
juste » ? Le mot juste
veut dire, à l'origine, « conformeit uue règle de droit », le
je
veux bien. Mais,souvent, il s'emploie pour signifier conforme
à une règle même non juridique (calcul juste, balance
juste)
il est alors synonyme d'exact et, par dérivation, de strict,
étroit en matière de prix, lorsque, par
exemple, un acheteur
demande à un vendeur de lui compter« au prix le plus juste »
ce qu'il lui fournit, cela souventne veut pas dire autre chose
que « le prix le plus réduit possible », et juste n'a que le sens
de strict, exact. Dans une directionun
peu différente du mémo
sens. juste est à peu près synonyme de normal or. même
en matière de prix, on peut avoir une notion de normal ou
n'entre absolument aucun élément juridique ni
éthique par
exemple, si l'on appelle prix normal d'une marchandise lo
prix qui, sur un certain nombrede constatations, serait ce que
les statisticiens appellent le mode ou la valeur
pléislique de
l'ensemble des prix de faitaiusi coustutés. Eu ce seua, normal,
V.M.KI'Il, l'ItIX, UOSNAIK 651

f.. ,a .vl.1 .v_a_


et pur suite juste, s'oppose à exceptionnel, de circonstance,
et non à illégitime ni injuste. Enfinet surtout, môme si juste
signifie coulurme une règle de droit, ou, plus largement
encore,conforme à unerèglede monde, il fautbieu distinguer
si c'est In constitution uieme du prix qui est l'objet de cette
règle, ou bien seulement l'application d'un prix, défini oucons-
titué lui-môme pur ailleurs; par exempte, l'urticle de notre
code pénal qui vise l'accaparement soumet à uue pûualitû
l'écluiuge à uu prix différant de celui qu'aurait détermiué le
libre jeu de l'oilre et de lit demande: mais le libre jeu de
l'offre et de la demande, ce n'est il aucun degré un facteur
éthique, et le prix sanctionné par cet article n'a donc rien
d'éthique en lui-môme. Le droit, la morale, dans certains cas,
déclare juste (conforme à une règle) do payer un certain prix
déterminé de telle façon délinie par exemple, de payer le
prix courant, ou bien un prix calculé suivant telle règle
mathématique eu partant de tels éléments) si, dans cette
façon dont est défini le prix qu'il est juste d'appliquer, n'entre
aucun élément de caractère éthique ou juridique, aucun de
ces cas lie prouve la moindre introduction d'un élément de
justice daus la détermination d'une valeur économique. Une
loi sur la vérification des poids et mesures n'est pas une
intervention d'un «•lément de justice daus la densité des
corps; un décret qui ordonnerait de confectionner les effets
militaires sur In taille normale des conscrits (et non sur leurs
tailles individuelles) ne serait pas l'introduction d'un élément
de justice dans la coupe des vêlements. Dans tous les exemples
allégués par M. T., nous ne trouvons pas un seul cas de prix
où ce soit la constitution même du prix qui comporte un
élémeut de justice. Cette iudistiuctloii u'est d'ailleurs pas
propre à M. T. mais. tant qu'elle subsiste, ou n'aperçoit pas
ia différence profonde qui existe entre tout cet ordre de faits
et la conception médiévale des cuiiouistes. El, quant à la
règle même (de droit ou de morale; prescrivant l'application
d'un certain prix l'en lui-même ni juste ni injuste/, il resterait
d'ailleurs voir si, au cas où le prix qu'elle recommanderait
d'appliquer serait un prix artificiel, «'écartant radicalement
des prix économiquement déterminés, elle aurait, sur les
faits, la moindre efficacité, Et la preuve de cette thèse subsi-
diaire, le travail de M. T. ne l'apporte pas davantage.
F.S.
032 L'ANNÉESOCIOLOGIQUE.490U.190O

FiOST(Bebnaiid). Die Wert- und Prelstheorie mit


Berûcksichtigungibrer dogmeugeschichtlicherEutwicke-
lung. Leipzig,Dunckeru. Humblot, 1908,vn-207p. iu-8°.
Ce n'est pas encore cet ouvrage qui nous apportera une
théorie positivede la valeurou des prix. Le gros du livre est
pris par une histoiresystématiséedes théoriesclassiques (de
l'ancienneécoleanglaiseet de l'école allemande,d'une part,
de l'écolenouvelleanglaiseet autrichienne, d'autre paru et
une critique de cesthéories;et l'histoiredesdoctrinesn'entre
pus daus notre cadre ici (remarquons,toutefois,qu'il u'est
peut-êtrepus très heureux,ni mêmeexact, d'exposeret criti-
querséparémentla théoriede la valeurdans les deuxgroupes,
puis la théoriedu prix daus les doux groupes,au lieu de les
présenter,pour chaquegroupe,dans la liaisonpropre où elles
outétél'une par rapport l'autre). Maissurtout,lorsqueM.R.
arrive à sa théorie propre, c'est encoreune thèsede forme
idéologiquequ'il nous présente, du mômegenreque celles
dontil vient d'opérerl'examen; et par exemple,les facteurs
(rapport des quantités offerteet demandée,capacitéde paie-
mentdes offrantset desdemandeurs, nombredeceux-ciet de
ceux-là,intensitéde l'offreet de la demande- ou, en un mot,
«offreet demandeau sensétroit »)dont, pour la détermination
de la valeur d'échangenormale, il insèrel'action entre les
deux limitesconstituéespar le dernier acheteuret le dernier
vendeur,héritagepartieldela théorieantérieure,ne paraissent
pas lui apporter en soi un perfectionnementbien notable, et,
en tout cas, u'enmodifientpas le caractère, radicalementcri-
tiquableà notre sens. F. S.

MITCHELL (WkslkïCi. Gold, priées, and wages under


the Greenback standard (Uuiversityof Californiapubli-
cationsin economics,vol. 1). Berkeley,
the Uuiversitypress,
marc!»1908,xvi-628p. gr. in-8'.
Auteur d'une histoire de Greenbacks1de 1862à 1865,
M. Wesley C. Mitchellprojetait de la continuer jusqu'en
1879(date de la reprisede la circulation métallique).Ayant
dû reculer l'accomplissementde ce dessein, il a du moins

i. Onsaitque-eutermea étéle nomcourantdonne'-


auxbillolsh cours
foret;
émisauxliUts-Unislors«lela guerreîleSécession.
V.UKL'R,PAIX,MONW.UK 053

voulu, en attendant, publier dansce volumeles matériaux


statistiques rassembléset élaboréspour ce travail. Et, telle
quelle. cette publicationest, en effet,d'un grand intérêt. Le
grosde l'ouvrageest occupépar de purs et simplestableaux
de chittres ils moutrent déjà, par leur seule masse, quelle
quantité de donnéesa réunies l'auteur; de plus, ce ne sont
pas des données brutes qu'ils contiennent, mais déjà des
donnéesù demi-élaboréeset adaptées aux besoinsde la re-
cherche conçue (par exemple, les chiffres sont calculésen
valeursrelativespar rapport à une baseconvenableaux com-
paraisonsà prévoir,);à simple inspection,ils témoignentdu
soinqui a présidéà leur établissementet décèlentla main
d'un économiste,et non d'un pur historien.Ils se distinguent
déjà,par là, desrecueilsde faits inutilisables'immédiatement
du moins) dont trop souvent encoreon croit, à tort, nous
enrichir.Maisil y a, en outre, des raisonsplus importantesde
signalerici cet ouvrage.Cestableauxsont précédésd'un texte
assezétendu qui contient uneindicationcritiquedessources
utilisées; un exposé et une discussion des procédésstatis-
tiquesemployés; enfin et surtout. une élaborationseconde
des donnéeset une analyse des variationsqui en ressortent
pour les difléreutesséries, élaborationet analysequi font
déjà la voie toute prête à la théorieexpérimentaledeces phé-
nomènes. Les sources paraissent être les meilleures,en
eftet,qui pouvaient être utilisées.Avecraisonl'auteur s'est
attachéà présenterdes séries continues,annéepar année, et,
dans certainscas, pour chaqueaunéetrimestrepar trimestre,
de données de mêmesource, exactementcomparablesentre
elles en valeurs relatives. Aux moyennesusuellementem-
ployées(arithmétiquesimple ou barique),M.M.a, de façon
générale, préféré la médiane, en y joignantl'indicationdes
déciles; il a penséainsi obtenirune représentationplus com-
plèteet plus expressivedes variationsétudiées.Les résultats
de tout ce travail sont présentésdans des tableauxrésumés
et traduits ende bons graphiques.Noustrouvonsainsi succes-
sivementétudiésen des chapitres substantielstous les points
intéressants du sujet valeurde l'or et coursdela monnaie
fiduciaire,prix de gros, prix de détail, salaires.Et nous avons
retrouvé, entre les variationsde ces divers éléments, des
corrélationsque nous avions personnellementdéjà aperçues
ailleurs. F. S.
654 l'anskjj MteiDtouiQi'R. t9WMS09

ENGELBRKCUT.Tu. H.V. Die geographlsche Vertei-


lung der Getreideprelse in Indien von 1881 bis 1905
U)ie geographische Verteiluug «ter
Getreidepreise. il.
Indien). Berlin, ftirey, 1908, viu-112 p. iu-8», 30 cartes et
t diagrammes.

Dansce volume, M. Engelbreclil fait pour l'Inde un travail


analogue à celui qu'il avait fait pour les États-Unis', il réunit,
d'aussi loin qu'ils sont fournis dans les dernières décades du
xix*siècle, les prix des céréales (et de
quelques autres plantes
aliraeutairesj sur les principaux Marchés. il en tire des
moyennes quinquennales, des moyennesdécennales, et insiste
surtout sur ces dernières. II dresse des cartes d'isolimes, ou
ligues réunissant les marchés de même prix, pour chacune
des céréales et pour l'ensemble, eu chacunedes
quatre décades
1861-1870,-1871-1880,1881-1890,181H-1900.Il dégage aussi et
étudie les variations au cours de la période. – Deux
purticu-
larités importantes se présentent ici,
auxquelles, à vrai dire,
M.E. ne nous parait pas avoir douuè assez
d'attention, et qui
constituent des difficultés préjudicielles à uue
comparaison
externe la présence d'un système monétaire
spécial et en
transformation, et le fait que la principale céréale de la con-
trée, le riz, ne soit pas à beaucoup près céréale mondiale
(comme étaient les céréales considérées aux
États-Unis). –
Mais, ces réserves faites, les résultats dégagés par M. E. ne
laissent pas d'être fort intéressants. Si certaines relations
remarquées dans le cas des États-Unis se retrouvent ici (par
exemple, l'influence d'ensemble de l'abaissement des frais de
transport, le rapprochement des prix hauts et des prix bas
par chute des prix hauts et faible.baisse des prix bas;, des
différences notables apparaissent. Alors
qu'aux Étals-Unisla
distribution des prix paraissait être très
simple, dépendant
manifestement de l'extension croissante des cultures, liée
elle-mêmeau développement des moyens de
transport, ici.
l'évoluliou considérée part d'une production,
déjà existante,
du type médiéval, c'est-à-dire destinée aux besoins locaux et
sans grands échanges, et ne va vers le
système moderne de
production avec échange que de façon inégale et. irrégulière,
dans la mesure, irrégulière aussi, où se
développent les
moyeus de transport. j,< g

). Cf.Année
Sodolo'jir/tie,VIII.ji. :,«i:,2.
VALKl'It,PIUX;MONNAIK 6SS

HALBWACHS(Mal-kick). Les expropriations et le prix


des terrains à Paris (1860-1900).Paris, Société nouvelle
de librairie et d'édition (E. Cornély), l'JOil,.HUp., in-80.
Nous rendons compte, dans la section Morphologiesociale.
de la première moitié de ce livre, et ne nous occupous
ici que des trois derniers chapitres (p. 233-39Uy,cousacrés à
l'étude économique. – On n'a pas prétendu embrasser tout
l'ensemble des phénomènes fonciers à Paris, et on indique
pour quelles raisons on les a abordés de ce biais. Le prix du
terrain, élément en un sens du prix de la maison, subit
d'autre part l'action du prix de celle-ci il exprime et permet
d'étudier à part l'influence exercée par les valeurs envi-
ronnantes sur la valeur de la maison à bâtir éventuellement,
c'est-à-dire ce qu'il y a de plus social dans cette valeur elle-
même. Le terrain est, de tous les aspects de la valeur maison,
le plus variable, et son prix est sujet à des variations bien plus
profondes et brusques que le prix des maisons. C'étaient là
autant de raisons pour entreprendre d'abord son étude. Si
l'ou a retenu et groupé, en ensembles différents des circons-
criptions administratives, les ventes de terrains atteints par
l'expropriation, ou continus, c'est que, l'expropriation jetant
eu même temps sur le marché des quantités assez grandes de
terrains similaires, les prix ainsi constitués ont chance de
représenter, mieux que des prix de terrains dispersés et
divers, le mouvement des prix en général, en sa forme de
fait social.
Des prix tirés de trois sources suflisamment valables, on a
calculé des moyennes annuelles, pour tout Paris, et pour cha-
cune des sept régions retenues pour l'étude. En comparant
la moyenne générale aux moyennespartielles, il est apparu
que, dans l'ensemble et le plus souvent, la moyenne est
bien représentative, « parce qu'elle répond à une diversité de
mouvemeuts et de tendances, parce que su direction et la
rapidité de ses variations, pour l'essentiel, s'expliquent par
l'action simultanée de plusieurs facteurs, et non par un ou
deux seulement ».
On a rapproché, alors, le mouvement des prix des terrains
à Paris du mouvement général des prix en France (le terrain
est, en eilet, une marchandise au même titre que les autres
l'idée de spéculation qui s'y attache ne le distingue pas de
beaucoup d'autres marchandises le terrain urbain a, en un
636 L'a.NSÉB
SOCIOLOUIQCB.
190(3-191)9
sens, uu coût de production sa plus-value est moins compa-
rable à la rente naturelle du sol qu'au bénéfice commercial
ou d'entreprise; euflt), il n'est pas plus l'objet d'uu monopole,
d'ailleurs limité, que les premières qualités d'autres marchan-
dises). Ou reconnaît alors que 1°aux baisses générales des
prix correspondent, dans la courbe des prix des terrains, des
mouvements de baisse ou de stagnation, que ceux-ci ont
donc subi l'influence des crises; 2° taudis que les prix, en
général, ont très nettement baissé dans l'ensemble de la
période, les prix des terrains ont fortement haussé. On a
cherché ensuite à rattacher cette hausse à l'accroissement de
prospérité industrielle et commerciale de tout le pays, dont
on a pris, comme indice, le mouvement des recettes des che-
mins de fer il est apparu, bien que non direct, un certain
rapport. Pour expliquer ce qui, dans ce phéuoinèue, est
spécifique, les hausses brusques, qui devancent l'évolution,
et ne se consolident qu'à la longue et eu partie, suffit-il d'in-
voquer la quantité de terrain vendue ? « Le rapport des deux
faits (mouvement des prix et quantités vendues) apparalt
plutôt comme celui de deux expressions, alternatives ou
simultanées, d'un mouvement complexe, que comme une
relation de cause à effet. «Peut-on, enfin, rattacher ces varia-
tions au mouvement de la construction? Mais, en raison sans
doute de la complexité de cette donnée, on n'arrive pas à des
résultats bien précis. On a toutefois, ici, le sentiment de
s'approcher des vraies causes le premier fait exprime l'ex-
tension ou la contraction des besoins de terrain (pour n'im-
porte quel dessein et le second, la prévision de l'avenir
réservé à telle rue, ou à tel quartier, c'est-à-dire des ten-
dances et représentations collectives qui doivent bien être les
causes. Mais c'est peut-être au moment de l'expropriation
qu'elles se dégagent le plus nettement et se formulent avec
le plus de clarté l'expropriation jouerait ici le rôle d'une
condition mon d'une cause) qui détermine la forme sous
laquelle agissent les causes véritables. – L'étude du rapport
entre l'expropriation et les prix nous apprend que l'action de
celle-là sur ceux-ci s'exerce soit de suite, soit après un certain
retard qui peut s'expliquer, et qu'elle peut se distinguer en
action locale, plus lente, et action générale, plus rapide
(étude détaillée des variations du prix des terrains dans les
principaux casi.«
Dans le dernier chapitre, enfin, on a présenté des conclu-
VALBL'n, PRIX, MONNAIE 057

sions théoriques, en accord avec les résultats de ces recherches


d'expérience. – Il faut renoncer à l'idée que tous les terrains
bâtis ou non bâtis d'une ville ont un prix, et que les prix des
terrains effectivement vendus n'en sout que des exemples;
à l'idée d'un mouvement continu de hausse de tous les prix
des terrains, que les hausses effectivement constatées dans
les ventes se borneraient à jalonner en réalité, la hausse du
prix des terrains paratt s'effectuer par bonds. – Ce qui attire
l'attention des acheteurs et vendeurs, ce sont les ventes
«.qui, par le haut niveau des prjx, par l'étendue des terrains,
par leur nombre même, ont une signification et une influence
majeures ». Au premier rang, celles effectuées à la suite
d'expropriations. Par l'expropriation, à du terrain sans
utilisation se trouve substitué du terrain de pleine valeur.
Cette valeur elle-même se détermine, dans le prix, d'une
façon particulière, en supposant le terrain pleinement uti-
lisé on s'inspire des prix actuels, en d'autres endroits aussi
importants et aussi mis est valeur, et on en dépasse le niveau,
puisqu'il est entendu que les prix haussent. Faut-il expli-
quer d'ailleurs par l'initiative de spéculateurs isolés cette
poussée des prix? La spéculation prévoit, plutôt qu'elle ne
crée, s'inspire de l'opinion, et devine des besoins collectifs en
voie de se formuler elle-même est d'ailleurs collective, et
plus prudente qu'on ne s'y attendrait. C'est ce qui explique
la diversité de la pratique des spéculateurs en quartiers cen-
traux, semi-excentriques, excentriques, et qu'ils se soient
désintéressés des quartiers ouvriers, où le terrain était à bas
prix. Leur attitude s'explique d'ailleurs, en bonne partie,
par celles des propriétaires de maisons et des locataires. En
quartiers riches, les propriétaires tendent d'abord à augmen-
ter le prix des loyers, ensuite seulement, et quand les résultats
acquis sont sûrement consolidés, à augmenter le nombre des
logements. Ils y sont d'ailleurs enfin contraints par les loca-
taires riches, chez lesquels le désir de logements meilleurs
est plus fort que la résistance à la hausse des loyers. Cette
lutte de tendances explique, par la victoire alternative des
unes et des autres, à la fois les retards et la soudaineté des
mouvements de hausse. D'autre part, chez les locataires
pauvres, la résistance à la hausse des loyers s'est manifestée
plus forte que le désir de logements meilleurs; les proprié-
taires auraient pu construire des logements à prix modéréen
de nouveaux quartiers, pour la population ouvrière, s'ils
K. Dihkiieim. Année sociol., 190G-I9O9. «
658 L'ANNÉE SOCIOLOUIQUK, lUOO-lilO!)

avaieut eu, réellement, de l'initiative ils ont préféré s'abste-


nir.
Si incomplète que reste cette étude (il faudrait étudier le
même pliénomèue en d'autres villes, en d'autres pays, et aussi
les autres aspects de l'évolution foncière, le prix des Maisons,
le prix des loyers;, elle porte du moins sur « le groupe de
faits qui éclaire le mieux les autres, parce qu'il dégage brus-
quement les teudauces en jeu, et parce qu'il dessine en traits
saillauts révolution des prix ». M. H.

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Par.M.M.mt.B\viciis.

Les industries à, domicile en Belgique i Royaumede


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et Société belge de librairie, 1909,i:lxxvji-378p., in-8o.
Dans le tomeX iet dernier; de cette enquête (1899-1908),
on a voulu, après toute la série des études monographiques,
dégager certains caractères généraux des familles qui com-
prennent des ouvriers à domicile on s'est appuyé sur les
données du Recensementgénéral des industries et des métiers
de Belgique en 1896 (18 vol., l'JOO-190-2j, en se limitant aux
industries qui ont été l'objet de monographies, mais en les
considérant dans le pays tout entier. Dans ces 22 industries,
les ouvriers à domicile représentaient 94, 42p. 100 du nombre
total des ouvriers. – Ou a adopté comme unité statistique la
famille, d'où l'on a exclu les étrangers et les collatéraux, et
on a reparti toutes les famillesen quatre « cadres » A) celles
où le père est ouvrier à domicile; B; celles où la mère est
ouvrière à domicile, le père étant absent, ou appartenant à une
autre forme économique; C)celles où ni le père, ni la mère,
mais uu ou plusieurs enfants sont ouvriers à domicile; Di
celles où aucun ascendant n'exerce une profession lucrative.
Les résultats sont présentés, dans ces cadres, et sousforme
de tableaux statistiques, par industries et communes dans la
première partie, par industries et arrondissements dans la
seconde.
Voici quelques-unes des remarques et des conclusions
présentées dans l'Introduction. Malgré la limitation indiquée
CLASH*KCOMJUKjUKS 603

du relevé, il comprend encore plus des trois quarts des


ouvriers à domicile, et leur répartition d'après le sexe, par
provinces, par localités urbaines et rurales, par industries.
est, de fuçou très approchée, la mémo que dans l'ensemble.
Le plus grand nombre se trouvent dans l'industrie dentel-
lière, puis (mais à une forte distance) dans celle des cordon-
niers, des tisserands de lin, des tuilleurs de vêtements pour
hommes, des armuriers, des tisserands de coton, et des gan-
tiers. Le nombre de personnes par famille varie d'une
industrie à l'autre faible pour les métiers qui s'exercent le
plus fréquemment dans les grandes villes, ou dont la locali-
sation est nettement wallonne, il est élevé en pays fliunuud.
La proportion des femmes aux hommes, qui est de 52 contre
48 au total (des personnes âgées de plus de seize ans), varie;i
elle est la plus forte daus les métiers exercés surtout par des
femmes c'est que le plus grand nombre des femmes adultes,
dans les familles où ou exerce ces métiers, y participent. La
proportion des enfants de moins de seize ans varie suivant
les régions. –Le nombre des personnes exerçant uue profes-
sion lucrative représente près de trois cinquièmes du nombre
des membres de ces familles; la proportion des hommes
exerçant une telle profession 'par rapport au total des hommes)
est très élevée et très stable; !es femmes exerçant une pro-
fession lucrative ne sont en très grande majorité que dans
les familles où le métier principal est une industrie féminine
(ailleurs elles sont le quart, ou la moitié au plus).
Ces personnes exerçant des professions lucratives entrent
dans diverses catégories professionnelles. – Un peu plus de
la moitié d'entre elles travaillent à domicile: dans cette caté-
gorie, la proportion des femmes aux hommes est de 178p. 100
(au lieu de 16 p. 100 comme ailleurs). Il y a une tendance
forte et générale à ce que l'industrie à domicile exercée en
ordre principal ne soit pas accompagnée d'une autre; la
femme exerce rarement une industrie à domicile différente
de celle de son mari. – lin cinquième de ces personnes sont
cultivateurs c'est qu'en Belgique ta localisation des indus-
tries à domicile est, le plus souvent, nettement rurale. C'est
dans les familles de couseuses de gants, de dentellières, de
brodeuses sur lingerie et detisserands en coton, que la propor-r>
tion d'agriculteurs est la plus forte. Kt c'est aussi en pays fla-
mand. – Environ le seplièmedes personnes à professionlucra-
tive sont ouvriers d'atelier. Cette proportion est la plus forte
064 l'annke socroLoarQi'g. mo-ioo'j

dans les industries(à domicile)féminines.Si losagriculteurs


rattachésaux famillesouvrièressout Plus nombreuxque les
ouvriersd'atelier de ces familles,les industries à domicile
auxquellesse rattachentsurtout desagriculteurs sout moins
nombreusesque cellesoù se rattachent surtout des ouvriers
d'industrie.Danscettedernière catégorie,les hommessontau
moinsquatre foisplus nombreuxque les femmes,et lit pro-
portiondesenfantsparait indiquerqu'ils se rangeraientplus
souventdaus le mêmegroupe économiqueque leurs parents
quandceux-cisontouvriers en atelier.Quantà la proportion
des artisans, parmi les travailleursde l'industrie à domicile
ou qui s'y rattachentindirectement,elle est très faible et à
peu prèsconstante.
C'était,évidemment,une tentativeiutéressaute que d'étu-
dier les rapportsde plusieurs formesd'industrie au point de
vuedesfamillesquicomprennentdes travailleurs domicile,
que de rechercher quel degré, dansces familles,intervien-
nent la grande industrie, l'agriculture, la petite industrie
Partisans/,pour entraînerdans Jeurorbite un ou plusieursde
leursmembres.Maisles auteurs du travail ne paraissentpas
êtrearrivésàdéfinirclairementleurobjet. – En premierlieu,
leurs cadres sont trop étroits, et artificiels,Ils écartent non
seulementles ouvriersisolés (cequi était naturel ici), mais
touteslesfamillesoùsont comprisdes étrangers ou des colla-
téraux or, biendesouvriersà domicile(tailleurs,etc.) s'asso-
cient,ou du moinsprennent un ouvrier il eût été facilede
les retenir. Et on écarte encorecelles où les enfants sout
employésdans des industries à domicile différentes,alors
quecescombinaisons nouvellesauraientété aussiinstructives
à envisager.Deplus, les quatre cadreschoisis semblentbien
a priori le casoù la mère travaillant à domicileest seule
avecses enfants,et lecas où, la mèreétant ouvrièreà domi-
cile, le pèreestouvrierd'industrie,sont confondus(cadre B)
en revanche,ceuxoù le père veuf,etceuxoù le filsainéftrphe-
lintravailleà domicile,pour nourrir un mêmenombred'en-
fantsou de frères,sont séparés (cadresA etC). Il eût convenu
d'adapter davantageles cadres aux faits, et de grouper en
ensemblesdistinctslescombinaisonsles plus fréquenteset les
pluscaractérisées. En secondlieu, une étudedesindustries
à domicileet de leurs rapports avecles autres formesd'in-
dustrie dansle cadrede la famille ne devait-ellepas avoir
surtout pourobjet de nous révélerla proportion du revenu
CI.ASSK*
KCONOM1QUBS 0(6

total de la famillequi provient dechacuned'elles? L'essen-


tiel ne serait-ilpas de connaltresi le travailà domicileest le
principal, dans quelle mesureles gains provenusd'ailleurs
lui servent d'appoint,et dans quellemesurec'est l'iu verse?
Sans doute, de ce que le père travailleà domicile,on peut
induire en généralqu'on se trouvedansle premiercas.Mais
les trois autres « cadres » ne correspondentpas nécessaire-
rement, ni sansdoute le plus souvent,au cas inverse.Or, ce
serait bien là le problèmede répartitionintéressant.– En
troisièmelieu, ou invoquesouventla localisationindustrielle
pourexpliquer,par exemple,que le nombredes enfantssoit
plus grand dans l'industrie à domicile ici que là, que le
nombredes agriculteursenveloppésdans cesfamillesy soit
élevé, etc. Maisontranche alors une gravequestion est-ce
que ce n'est pas la localisationindustriellequi, elle-même,
s'expliquepar l'existence,eu tellerégion,d'une populationà
forte natalité, ailleurs, d'une populationrurale assezdense?
L'étude de la seule distribution actuelle des industries ne
permet pasd'y répondre. Lesrésultatslesplus intéressants
de l'enquête sont relatifsau rapportdes sexes.11en ressort
qu'une distinctionfondamentaleest celle des industries à
domicileeu masculineset féminines,et que si, danscertains
cas, les femmestendentà exercerla mêmeindustrieà domi-
cile que leurs maris, ou à n'eu pas exercer,dansd'autres, la
grande majoritédes femmesadultesse portent,commesous
l'action d'une tendance collective,vers certains métiersà
domicileoù elles prédominent.C'estenexaminantde ce point
de vue les diversesindustriesétudiéesdansles monographies
des huit premiers volumesqu'on préciseraitet expliquerait
sans doute cesconclusions. M. H.

CHAPIN(ROBKRT Coït). The standard of living among


workingmen's familles in New York City. NewYork,
Charitiespublicationcommittee,1909,xv-372p. in-8".
Celivre contientles résultats d'une enquêteparbudgetsde
famille,par la « NewYorkStateConférenceof Charitiesand
Correction», en 1000.L'auteur, professeurà Beloit-College,
après une courteet substantielleélude historiquesur la inù-
tliodedes budgetsde famille,nousexposedans son rapport
tout le détail de l'enquête,et élaboreles donnéesrecueillies.
– 642 famillesouvrièresde NewYorkontété visitées(57par
66fr t90tï-!9ll9
l'ASSÉK SOHOLOaiQUB.

des enquêteurs volontaires, 34 pur des membres de trade-


unions, lesautres par des enquêteurs payés) mais 391 notices
seulement ont été retenues après examen. Toutes porteut sur
des familles, d'ailleurs prises au hasard, mais de composition
et de grandeur normale (père, mère, et de 2 à 4 enfants au-des-
sous de seize «us;. L'enquêteur, muni d'un questionnaire
très détaillé, a déterminé le revenu et les différents articles
de dépenses (le plus souvent il a obtenu le chiffre annuel en
multipliant par o£ le chillre pour la semaine; il s'est aidé,
quand il en u trouvé, du livre de comptes, mais a dû souvent
se contenter d'appréciations). Les ouvriers en question sont
pour la plupart non qualifiés, pour un tiers des manœuvres,
inducteurs, ou ouvriers en confection ils appartiennent à
des nationalités très diverses.
Un nombre considérable de tableaux, uù l'on a réduit tous
les chiffres absolus eu moyennes et pourcentages, sont alors
analysés- Voici quelques-tins des faits que M. Coit Chapin eu
dégage. Moins de la moitié des familles parviennent ou
consentent à vivre avec le seul salaire du père. et il est notable
que l'importance des gains supplémentaires fou complémen-
taires.) augmente, qu'ils proviennent du travail de la mère
et des enfants, ou de pensionnaires ilodgers), à mesure qu'on
passe à des revenus plus élevés. La proportion du loyer
dans l'ensemble des dépenses décroîtrait à mesure que le
revenu augmente fBngel disait qu'elle reste stationnaire, et,
en fait, on voit sur les tableaux qu'elle ne décroît que jusqu'à
1.000dollars, et que, de 1 .000à 1.600. elle reste stationnaire
comment M. C. ne l'a-t-il pas noté ?i Près de la moitié def
logements sont d'ailleurs surpeuplés, et notamment pour une
proportion particulièrement forte des familles qui équilibrent
leur budget, et de celles qui ont un revenu composite (non
limité au salaire du père). -La proportion de la dépense nour-
riture ià peu près la moitié de la dépense totalei reste à peu
près constante; du moins, elle ne commence à décroître, à
mesure que le revenu augmente, qu'à partir de 1000dollars (et
non plus tôt, comme le pensait Engeli. Le D' I>.Underliill,
de l'Université d'Yale, a déterminé par des calculs originaux
la nourriture normale, et il l'a traduite en prix sont insuffi-
samment nourries presque toutes les familles qui gagnent
moins de 600 dollars, et, pour les catégoriees de G00à 800, un
tierades familles. Ici, encore, les famillesà revenu composite,
et celles qui équilibrent leur budget, sont très mal placées. –
CI.ASSKS KCONOUiyUK< 6l»7

La proportion de lu dépense vôlemeut augmente avec le revenu


(Kngel disait qu'elle reste la même) il est vrai, il y u (les
vêtements reçus en don, eu particulier dans les catégories à
bas revenus la part de la dépense-vêtement pour les enfants
augmeuteavecle revenu. Estimation faite par l'uuteur des vête-
ments nécessaires chaque année à une famille normale i?» et de
leur prix, 40 p. 100 des familles étudiées sont mal vêtues, en
particulier (comme plus. haut) celles qui out un revenu com-
posite, et celles qui équilibrent leur budget. – Le nombre,
non pas des familles assurées, mais des personnes assurées
par famille, augmente avec le revenu (surtout dernière mala-
die et enterrement). La proportion des dépenses diverses
croit régulièremeut avec le revenu. Étudiant enfin le rap-
port des dépenses au revenu, on remarque qu'il y a des familles
dépensières et économes dans toutes les catégories; les
familles à revenu composite équilibrent mieux que les autres
leur budget mais est-ce bien une supériorité ?
il peut être intéressant de grouper ici les observations qui
concernentlés nationalités, et que l'auteur u dispersées comme
autant de remarques incidentes. C'est parmi les Bohémiens,
les Autrichiens et les Russesqu'ontrouve le plus de familles à
revenu composite (parmi les Bohémiens qu'on trouve le plus
de mères qui travaillent;. Les nègres paient beaucoup pourl'
leur loyer (peut-être les désire t-on peu comme locataires*, les
Bohémiens fort peu. Tous les immigrants de l'Europe du Sud
vivent dans des logements surpeuplés. Kn revanche, Bohé-
miens et Italiens dépensent le plus pour leur nourriture, au
contraire des Russes et des noirs (la proportion de mal nourris
est très forte chez les Russes). Ceuxqui dépensent le plus pour
leurs vêtements sont les lJobémieiis, Américains, Anglais
et Allemands; ceux qui dépensent le moins, les Italiens,
puis les Autrichiens et les Russes. Les Italiens ne s'assureut
presque jamais; ils vont peu au théâtre, et lisent peu de jour-
naux. – Italiens, Itusses et Autrichiens équilibrent fort bien
leur budget (plus de 80 p. 100ont un excédent i aucontraire.
on trouve le plus de familles avec déficit parmi les Améri-
cains, les Anglais et les Allemands. Il semble que le niveau
dévie des familles sud-européennes soit nettement distinct
du standard américain, et soit atteint à moins de frais.
C'est, en somme, la préoccupation de déterminer le niveau
de vie normal qui transparaît dans tout ce rapport mais.
d'abord, l'existence constatée de deux niveaux de vie, l'un
668 l'anskk socioi.oatouK. 190M90»

sud-européen, l'autre anglo américain, ast un élément de


coiifusioii. L'auteur déclare qu'un revenu inférieur à 800dol-
lars est iusufllsaut, qu'un revenu supérieur à 900 dollars est
suffisant pour garantir des conditions de vie normales et
convenables (décents). Entre 800 et 900 dollars, les faits ne
permettent pas de conclure la nourriture est mauvaise, mais
le logement est bon et d'ailleurs, dans ce groupe, les familles
le plus mal situées viennent du sud de l'Europe. M. Howard,
l'auteur d'un court rapport (imprimé dans le même volume)
sur une enquête conduite à Buflalo.àla mêmeépoque, déclare
que les dépenses de la catégorie de revenus de 800 dollars
n'atteignent pas le « standard », mais représentent un mini-
mum et il reproche à M. C. d'avoir déterminé à priori le
niveau des dépenses qu'il dit normales. Lu méthode de ce
rapporteur est, de fait, singulière il prétend, sans doute,
déterminer par l'expérience quel est le niveau de vie accepté,
adopté par les familles ouvrières; il déclare, par exemple,
simplement pour l'avoir constaté, que ce niveau de vie com-
porte l'éclairage au gaz, la consommation de glace, les
dépenses d'enterrement. Mais, à côté, il définit dépense nor-
male de nourriture, celle qui simplement assure la conserva-
tion physique il exprime en argent une quantité d'aliments
calculée par un physiologiste: on ne voit aucunrapport entre
cette somme, et les représentations, qui peuvent exister chez
l'ouvrier, de ce qu'il convient de consacrer à la nourriture. Et
on ne sait pas davantage sur quoi repose son estimation du
trousseau normal de la famille ouvrière. Entre le « standard »
qui résulte de l'expérience sociale, et celui qu'on fixe au nom
de la biologie et de la morale, il n'a pas su choisir.
Ce qui est plus grave, c'est que cette notion du normal ne
s'est pas seulement glissée, au cours du rapport, dans les
interprétations, mais qu'elle a dominé toute l'enquête, et
constitué les cadres dans lesquels celle-ci s'est effectuée.On a
subi ici, très manifestement, l'influence des méthodes ap-
pliquées lors de la grande enquête du Bureau du Travail
des États-Unis, en 1903 sur 28.440 familles enquélées, on
n'en considéra comme normales que 11.136; il est vrai qu'ou
/excluait, entre autres, celles qui avaient des pensionnaires,
qu'on a au contraire retenues ici; il est vrai aussi qu'on rete-
nait les familles ayant cinq enfants, exclues ici. Ce que nous
critiquons, ce n'est pas seulement ce qu'il y a d'arbitraire en
de telles définitions, c'est la sélection elle-même. On s'est
CUS8BS
KCONOAIIQUKS 669

préoccupé, on le voit bien, de retenir des cas comparables,


d'être en mesure (le faire abstraction de caractères différen-
tiels tels que le nombre des membres, et leur âge. Mais une
abstraction n'est scientifiquement légitime qu'à deux condi-
tions Il faut que les caractères sur lesquels on s'est appuyé
pour constituer un-groupe homogène soient importants, du
point de vue où on se place pour étudier le groupe, que leur
présence ou leur absence modifie radicalement la nature et
les propriétés des choses ainsi groupées or, ici, il n'en est
rien le nombre des enfants modifie-t-ilbrusquement, en deçà
ou au delà d'un certain chillre, les conditions de vie, les
besoins et les tendances de la famille ouvrière ? 11ne le
semble pas, ou, du moins, on n'en peut rien dire avant
d'avoir examiné les faits. 11 faut. d'autre part, que l'abstrac-
tion ne décomposepas, de façonfactice, et sans prendre garde
à ses réelles articulations, un tout naturel et complexe en des
parties tronquées, qui ne peuvent ni subsister ni se com-
prendre en dehors de lui. Ne retenir, dans une société quel-
conque, que.les famillesd'un certain nombre d'enfants d'un
certain âge, même si on veut en étudier seulement l'aspect
moral, les mœurs, c'est se retirer toute possibilité d'en
expliquer bien des caractères (car ce ne sont pas ces familles
seules qui contribuent à former le milieu social qui les con-
ditionne, et qui n'est ce qu'il est que parce qu'il résulte peut-
être d'un équilibre entre familles inégales en grandeur, iné-
galement âgées). Et moins encore pour l'étude économique,
et surtout dans uu pays et dans une ville si modernes, si
industrialisés. Sans doute, une classe sociale, une catégorie
professionnelle comprend des unités, caractérisées par l'indé-
pendance de leurs habitations, et de leurs budgets. Mais le
ménage avec trois enfants de moins de quatorze ans est-il le
type le plus répandu de ces unités, celui dont la force de
travail, les besoins, les exigences exercent sur les conditions
de vie du groupe entier (prix, salaires, loyers, répartition des
dépenses) la plus nette influence? Dans bien des industries,
ne semble-t-il pas que le salaire se détermine par ce qui est
nécessaire pour nourrir un ouvrier, si bien que là, l'unité
essentielle, ce n'est plus la famille ouvrière, c'est l'ouvrier
garçon ? Les ménages de diverses grandeurs, depuis le céli-
bataire jusqu'aux nombreuses familles, en passant par les
ménages sans enfants, se pénètrent en réalité, se confrontent,
s'influencent, au point que l'un ne se comprend que par tous
670 l'aXXKB EUClOLâUlQUK.IStÛti-ttKW

les autres une famille définie comme ci-dessus n'est ce


qu'elle est que pnrce que toutes les unités du groupe ne
sout pus telles.
Le classement, d'après leur revenu, des familles ainsi choi-
sies contribue encore ù noyer, dans des moyennespeu claires,
tous les traits que chacune d'entre elles tient du groupe d'où
elle est détachée. On a eu raison de nous indiquer, chemin
faisant, les caractères distinctifs de chaque naliouulité cette
diversité d'origine des ouvriers américains complique un peu
l'enquête, mais ta rend aussi plus instructive; on ne peut ne
pusen tenir compte, puisque la fusion de tous ces élémentsen
une nationalité nouvellen'est pas accomplie; mais puisqu'elle
est en train. on est en droit de les rassembler pour étudier eu
eux, en môme temps que ce qui les distingue, ce qu'ils ont
déjà en commun. Mais pourquoi sacrifie-t-ou toujours la pro-
fession au revenu'' Dans la catégorie de 000à 700dollars, on
trouve pêle-mêle I journaliste. 3 coilleurs, 3 garçons de
café, 6 manœuvres, des employés do commerce, des ouvriers
du textile, etc. Est-ce que la profession ne doit pas
expliquer
ici, dans une large mesure, la répartition des dépenses?
L'auteur admet, pour les bas salaires, que, la petitesse du
revenu limitant la dépense aux objets absolument nécessaires,
et les prix étant, par ailleurs, les mêmes, la répartition des
dépenses doit être à peu près la même. Mais qu'est-ce que le
nécessaire, et cette notion ne change-t-elle pas lorsqu'on
passe d'une profession à l'autre? Quant au revenu, il le
détermine d'après l'ensemble de toutes les ressources de la
famille c'est nous jeter en pleine obscurité. Il insiste sur la
coïncidence suivante les familles à revenu composite (fré-
quentes surtout dans les catégories de hauts revenus) sont en
même temps très mal placées comme nourriture et logement,
et très bien puisqu'elles règlentlour budget plutôt par uu
excédent. Il en conclut qu'elles sont obligées, pour subsister,
d'une part d'accroître leurs ressources par le travail de la
mère ou des enfants, ou en prenant des pensionnaires, d'autre
part. de ne pas satisfaire pleinement leurs besoins normaux.
Mais c'est toute une interprétation. Elle ne serait valable que
si la famille appartenait à un groupe social où est habituel le
niveau de dépenses auquel elle ne peut s'élever mais sou
revenu global ne nous apprendra rien là-dessus. Unrevenu de
l .400à 1.800 dollars ne correspond pas aux mêmes classes, ni
au même niveau, suivant que c'est un revenu composite, ou
CUSSKSKCONomyi'Ks q:j

le suluire du père seulement eu cette catégorie risqueut dune


de se confondre ceux qui oui le plus de charges de familles
dans la classe inférieure, et ceux qui en ont le moins dans la
classe supérieure.
Ce qui a obligé l'auteur il ces dècoupeiueuts et simplifica-
tions arbitraires, c'était son dessein de grouper les faits
recueillis en un certain nombre déclasses, en combinant de
façon variée leurs- divers caractères, et eu enfermant daus
chaque catégorie un nombre suffisaut de eus. C'est ici une
application de lu méthode exteusive, que les Américains
opposent aux méthodes intensives des Auglais et des Alle-
mands. Or, eu premier lieu, la nécessité de recueillir vite
beaucoup de détails par des enquêteurs privés conduit à des
appréciations très discutables par exemple, que la dépense
clel'année serait un multiple exact de la dépensede la semaine
ou du mois observé). Mais, d'autre part, s'en tenir à l'annlyse
des laltleaux ainsi dressés, c'est renoncer à la ressource
qu'offrent les enquêtes individualisées, sans se procurer les
avantages de lu méthode statistique propre car les cas re-
cueillis août trop peu nombreux pour que les accidents se
compensent, dans la mesure où ils sont des accidents iudivi-
duels/ et, étant recueillis au hasard, ils ne peuvent révéler
suilisamment les accidents ou irrégularités, de nature sociale
ceux-là, qu'il importerait de mettre en lumière. M- H.

KUKKTHiHënhiktte). Bln mittelbuergerliches Budget


ueberelnenzehnJaehrlgenZeltraum.uebst Anhang: die
Verteuerung der Lebenshaltung itu Licbte des Massenkon-
sums. Iéna, Gustav Fischer, 1907, 131p., in -8".
De toutes les (acous, cette application de la méthode des
budgets de famille s'écarte de l'enquête américaine ci-dessus
analysée. Plus de visiteurs interrogeant uue famille dont les
réponses sont peut-être calculées, et restent en tout cas le
plus souvent des appréciations mais le hasard a mis entre
les mains d'une femme d'employé uu livre de comptes très
détaillé, qu'elle a tenu sans autre dessein que d'utilité pra-
tique et le hasard encore a mis l'auteur même de l'emprun-
ter et de l'analyser. Au lieu de plusieurs centaines de mé-
nages ouvriers, une seule famille de petits bourgeois, et dont
ou peut suivre l'histoire, relever par le détail les revenus et
les dépenses non pour une, mais pendant dixannées. Enquête
672 l'an.nbk socioi.ouiyuK. 1900-1909

intensive,qui par sa durée, et lu classede ceux sur qui elle


porte, a en tout cas un méritede rareté.–Maisu'est-elle pas
exceptionnelle,mêmedans ce pays et dans sa classe, cette
famillede 8 personnes(8fils et 3 filles),dont les revenusdé-
passent 11.000marks, où le mari, d'abord commerçant,ne
s'est fait employé qu'à la suite de revers, où la femme,
ancienne couturière,a dû organisercitezelle un atelier, où
un fils et deux fillestravaillent.et le casest-ilbien typique?
L'auteur l'a senti, et s'est préoccupéde « corser » cettehis-
toire. C'esten termes pathétiques,et bien exagérés,qu'elle
nous montre cet employé,qui fagne fort bien sa vie, aux
prises avecles difficultésmatériellesconsécutivesà son pas-
sage du commerceindépendantà un emploi rétribué; il de-
vientle représentantde toute une catégoriesocialevictime
de l'évolutionéconomique:et, toutefois,on [n'aperçoitaucun
changementnet, à cette époque,dansses dépenses,sauf, une
année seulement,une légèrediminutionde la dépensenour-
riture. C'estlà, d'ailleurs, un des résultatsles plus intéres-
sautsde l'étude l'auteura calculépour toute la période, en
tenant compte des enfantset des invités la dépensenourri-
ture par tête et par jour la constanceassezapprochéede
cette dépense révèlequ'elleest très modérée,et sa baisseeu
une année indiquequ'enpériodedegéue,on la réduit encore
(peut-êtrepour ne pas restreindredesdépensesd'un caractère
plus social).Maisl'efforttrès apparentdecettefamillepourse
maintenirpar ses dépenses,au mêmeniveausocial,l'empêche
précisémentde représenterbienla classedesemployés,puis-
qu'elley a apportésesancienneshabitudes,et ce changement
de situation l'empêcheencorede représenterbien la classe
des commerçants,d'où elleémane.
C'estencore pourprêter à ce budgetun intérêt d'actualité
qu'ony rattachetouteuneétudede la dépressiondes prix dé-
terminéepar les nouveauxtarifs douaniers.Par exemple,la
diminutionde la consommationde viandeaété considérable,
mais la dépense corrélativeest loin d'avoir décru en pro-
portion. L'auleurcite beaucoupde statistiques(dessalaires,
de l'importation,des prix, etc.), et se livreà des calculstrès
compliquéssur la valeur nutritivedes aliments, sur le nom-
bre des unités nutritives entrées dans la consommationdu
ménageétudié, aux diversesépoques.Mais,d'une part, l'in-
fluencedu « Wuchertarif» s'étant faitsentir principalement
sur les objets de premièrenécessité,c'est par une étudesur
«t\»SRS ÉCONOMIQUES 073

des budgetsouvriersqu'il convenaitde la mettreen plein


jour,plutôtquepar le cas présent, où )a dépensenourriture
ne représenteguère que 28 p. 100du budget. D'autre part,
outreque le problèmede l'alimeutiiliourationnellerelèvede
la physiologie oude la médecine,et nonde la sciencesociale,
ce n'est pas nonplus à l'occasiond'un budgetpetitbourgeois
qu'il est à étudierlonguement:quelquesmenusdétaillés,qui
nousinstruiraientsur la qualité des metset leur variété,sur
les habitudesd'économieou les prétentions de la famille,
importeraientdavantage.Les chiffresrecueilliset groupéseu
tableauxn'entémoignentpas moinsd'un efforttrès couscien-
cieux, et n'en gardent pas moins leur prix. Rapprochés
d'autreschiffrestirés debudgetscomparables,ils fonderaient
sans doute quelquespropositionsgénérales. L'auteur, sans
doute, s'est figuréqu'un budget de dix annéesdevaitavoir
unevaleurproportionnelleau temps. Maisla raretéd'un do-
cumentn'est pastoujours, ni mêmed'ordinaire,une marque
de sonimportancescientifique.Et, à le présenteren moinsde
phrases,plusmodestement,ou nelui ôterait rien desa valeur l'
de curiosité. M. H.
NOVIKOW(J.). – Le problèmede la misèreet les phénomènes
éoonomiques naturels. Paris,Alcan,4908,in-8°.
WERMCKE (J.). KapttaUsmusund Mittelstandspolitik.Jéna.
Fischer,1007,1010p. in-8°(Beaucoup
d'informations
sur lesujel,
dontles élémentssontassezbiendégagés).
TARLE(Euokx). Studien sur Oesobiohteder Arbeiterklasse
in Frankre10hwaebrendderRévolution.DieArbeiterder
natio-
naienManufakturon nach UrkundenderfraiuOsischea
(1789-1799)
Archiv.Leipzig,Dunckeru. llumblol,1908,xv-128p. in-8".

Reportof anenqtrirybythe Board of tradeinto workingolass


rents,houslngand retail prioes together with the standard
rates of wages in the principalindustrialtownsof the United
Kingdom[Gd.3864].– oftheGerma»empire[Cd.4032]. –
of France[Gd.4512].London,Stationcryollice,1908-1909, :ivol.
in-4°(Compterendud'uneenquêtecomparative jmrsondages opé-
réedans uncertainnombrede villesde chaquepays.Asuivre^.
MOItE(txiuwKBm.mii>) –Wage earners'budgets.Astudyofstan-
dardsandcostofliviiigin NewYorkcity.NewYork,Iloll,1907,
x-280p. in-8°(Enquêtessur les conditionsde viedes familles
ouvrièresdesenvironsdu seulementGrcenwich liouse).
K.'OoBKHtiii. – Anm'o sociol.. 1900-1909. 43
074 t'AKHBK 19tl(i>i(l0»
SOUiOLOOIQQE.

Erbebung von Wirtschaf tsreohnungen minderbemittelten Fa-


milieu ira deutsohon Reicbe ii1<f" .Souderheftzum UekhcDArbcits-
blatt. fiei-lia, lleytnnnn. VJO'i.72-22Wp, ia-i" ;KnquÔ(e
sur près de
1000 familles dmis toulesles grandes villes d'Allemagne).

320 Haushaltungsreohnungen von Metallarbeiter. Stuttgart,


Sclilicku, 1909, 159 p. in-8" ;A signaler pour la rigueur et l'inté-
gi'iilil»'des obsoivatioiis).

U.VLBVVACHS (M.U.K1CK).– Budgets de familles.


Revuvîle Paris,
août l'JOS ilndivaliuns mi'thodulagiques et exemples).

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Vantii->,Lalol)«, Paris, Le Daulli, 1907, 1 vol. in-8n.
INSTITCTIONS
1)8LA. ItÈPAItTlTiON 07S

VIII. INSTITUTIONS
UKl.\ Hlîl'ARTITIO.N

l»ui-MM.
G.et ii. UoLiiiiiN
.•( 1'. Sisi.wu,

KULKMANN(W.). Die Berufsvereine. I. Abt, Geschi-


chtlichc Entwickluug (1er lierufsorganisulionen der Arbeit-
nehmer und Arbeitgeber aller Laender. 1., 1 u. 3. B.,
Deutschlnnd. leua, Fischer, lîJOS.xxxiv-SOT,ix-uO3,viu-327
p., ia-8».
Eu rééditant sous un titra nouveau sa CcwcrkHehaftabcu-i''
ijunij, M. Kulemaun a ajourné l'élude théorique! que la pre-
mière édition faisait espérer. En présence du développement
extrêmement rapide des institutions syndicales, il s'est cru
obligé de renouveler lu plus grande partie de ses matériaux.
Ua eu d'ailleurs la volonté de rechercher les faits pour eux-
mêmes et non pour confirmer telle ou telfe opinion sociale ou
politique (t. I, p. xxvi,. Il n'a pas prétendu décrire tous les
faits et toutes les tendances, mais il s'est ellorcé il l'exactitude
la plus rigoureuse. 11 n'a pas pu ni voulu tout dire; il a d'ail-
leurs éprouve dans sou investigation de très grandes difficul-
tés de la part des ouvriers mômes dout il retrace le mouve-
ment. Néanmoins, malgré ces lacunes et ces difficultés, il et
cru obéir au sentiment d'uu devoir social en faisant connaître
aussi complètement que possible un vaste mouvement dont' il
attend les plus grands progrès sociaux (p. xxxuj.
Ces trois premiers volumes traitent seulement du syndica-
lisme en Allemagne (syndicalisme ouvrier, syndicalisme pa-
tronal, tarifs et contrats collectifs) ce sont plusieurs séries,
plusieurs centaines de monographies très denses, bourrées de
renseignements et de chiffres. Quelle sera donc la dimension
de l'ouvrage total Quelle sera la valeur de plusieurs parties
au cas où l'auteur ne réussirait pas à obtenir les renseigne-
inents nécessaires? Si M. K. poursuit les faits pour eux-
mêmes et ne cherche pas essentiellement à connaître et à
expliquer les tendances directrices du mouvement, comment
pouvons-nous espérer le comprendre 1 Quanddonc pourra
être entreprise lit théorie, s'il faut constater dans dix ans.
daus vingt ans, coin nie c'est inévitable, que les faits sont
encore plus nombreux et que la matière s'est encorerenouve-
lée? Mais si réellement, pourtant, elle ne s'est pas transfor-
616 l.'AîtN&S )l)06-t909
8OCIOIOOIQUK.
môedaus sesélémentsessentiels,si parmi les conditionsdes
institutionsil y ena qui soient permanentesdans leur géné-
ralité,si dès maintenant nous pouvonsnous croire eu pré-
sencede groupessociauxcompréhensiblesdans leursacteset
dans leurs mobiles,n'y aurait-il pas lieu de choisir,dans cet
objetd'un immenselabeur, des sujets rigoureusementtrai-
tables,descas typiques,des expériencesqui pourraientêtre
concluantes?9 H. B.

DESMAREZ(G.).– Le compagnonnage des chapeliers


bruxellois. (Pagesd'histoiresyndicale.)Bruxelles,Lamer-
tin,1909,iu-8,113pages.
Le compagnonnagedes ouvriers chapeliersde Bruxelles.
crééau débutdu xvu*siècle,apparattcommeunedifférencia-
tionde l'anciennecorporatiou,groupementmixtede
patrons
et d'ouvriers,organiséeen 1876.M. DesMarezsuit l'histoire
de cecompagnon nlge jusqu'à nos jours, et sur son fonction-
uement,ses moyensd'action(grèves,interdictions),ses ser-
vicespermanents (apprentissage,placement,
viatique), ses
relationsavec les groupementssimilairesde
Belgiqueet de
France, sur les ellortsdes patrons et des autorités pour le
briser, il nous donnede nombreuxtaits les pluscaractéris-
tiquesconcernentla persistancedu groupementà traversles
bouleversements politiqueset nationauxde la Oudu xviii"siè-
cle et malgré les pénalités de la législation ouvrièrefrau-
çaise.Ceque les lois n'out pas réussià faire, la modeparait
l'avoirobtenu,du moinsen partie en 1891,une criseà
peu
prèspermanentes'est déclaréedans la chapellerie,et le com-
pagnonnage,réorganiséen 1887en une doublesociété(Société
(lel'unionykUanthropiqw et Sociétédesecoursmutuels),a vu
sesfondsderéserveengloutiset n'a puempocherles fouleurs-
feutriersde constituer,en 1901, un syndicat autonome;le
plusgrave,c'est que leschapeliersont cessé, eu raisonde la
crisemême,de formerdes apprentis or, dans uu métieroù
le machinismen'a pointde place, la formation
d'apprentis,le
maintiendes traditionsdu travail manuel sont parmi les
causesessentiellesdu groupementcorporatif,et l'on peutdès
lorsse demandersi le compagnonnagebruxellois
peut pré-
tendreà vivreoncore. q. nt
INSTITUTIONSDit LA RBMKTITIOX 977

BLOCH(Gauillk). L'assistance et l'État en France a


la veille de la Révolution (Généralités de Paris, Rouen,
Alençon, Orléaus, Ckalous, Soissous, Amiens), 1704-1190.
Paris, Alph., Picard, 1908,i.xiv-504p., in-8".
Voici une étude d'institution de lu répartition, documen-
tée, précise, telle que le meilleur du travail historique peut
nous en donner. Le livre se divise en trois parts étude du
paupérisme et des institutions d'assistance au xvnr siècle
analyse et histoire des réformes tentées de 1704à 1788 étude
de la formation de la doctrine que les gouvernements de la
Révolution auront sur l'assistance. On appréciera la somme
de recherches et le nombre de vues intéressantes contenues
dans ce travail, que nous n'avons pas la place d'étudier en
détail ici. F. S.

UEYFK(Maximum*). – Statlstlkder Streiks und Aussperrungen


1m In- und Ausland. Leipzig.Dunckuru. lliunblot,1807,in-K"
(Revuedossources,etrcuuiondes rûsultuts.Commencement d'uue
élaborationpositive).
ltlST (Ciiarlks).– La progression des grèves en France et sa
valeur symptomatique. Hev.itêoon.polit., 1907,p. 161-193 (Ana-
lyse intéressante, mais incomplète,decorrélationsentre la varia-
tion des grèveset le mouvementde t'industrie;.

Le droit de grève. Leçons professéesà l'Écoledes HautesÉtudes


socialespar MM.tili.Gide,Il. Herlliélemy,1».Bureau,A. Kcufer,
C. Perreau. Ch. Picqucnard,A.-E.Sayous,F. Fagnol,E.Vander-
velde. Paris, F. Alcan,1909,x-270p. in-8°.
liKOHGl (ëubrth). – Theorie und Praxis des Generalstreiks in
der modernen Arbeiterbeweguug. Icim,Fisclier,1908,144 p.
in-8°(Assezinforméet peu tendancieux).
FEST Y(Octavk) – Le mouvementouvrier au débutde la monar-
chie de Juillet, 1880-1884. Paris, Cornély, 1908,360 p. in-8u
(Travailconsidérablede recherches originales.Méthoded'histo-
rien averti).
l'L'ECH(Jl'lbs-L.j.– Le proudhoniame dans l'association inter-
nationale des travailleurs. Paris, F. Alcan,xiv-î8i p. in-8«.

i;astEIGEH(M.). Die ohristUohe Arbeiterbewegung in Sfld-


deatsohland. Mttnchen,Verbandsudd. Kathol. Arbeilervercinc,
1908,in-8».
8788 r/ANNlÏK SûCIOU)iJI0i;K. 1900-1909
,n.
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H«v«c(l'èi'uu. polit., 1SHI8.p. 575-S8»(c'est-à-dire syndicats de
petits L'ummeri-aiits,i(v classes moyennes).
l'KTITCOM.OT;.Malhk:i:). Les syndicats ouvriers de l'indus-
trie textile dans l'arrondissement de Lille. Lille, «l.;i (luten-
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xvi-720p., in-8'31
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V'IX'KULEH i.Vnon;. Die neuere Entwioklung des Verbandes
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ScAntuffri-'x
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IX. ÉTAT HT ÉLriMGNTSW. LA RIÎPARTITION

Pur MM.M. ll.u.nwACFis


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Dans cet ouvrage posthume, où sont rassemblés les cours


680 L'ASNÉK SOClQLOU«JUE..t90W««8

faits par M. Schuapper-Arndtà Francfort,de 1901 à 1904,


l'étude des statistiqueséconomiquesue tieut guère plus de
180pages(entre la statistiquedela populationet la statistique
morale, dont nous rendonscomptesous d'autres rubriques).
Commeil fallaits'yatteudre,cesleçons,rédigéestellesquelles,
ne sont pas très coordonnées on passe successivementeu
revue lesstatistiquesde la fortuneet du revenunational, les
statistiques agraires et commerciales,les statistiques des
salaires et les budgetsde famille.Ou y trouvebeaucoupde
matériaux, des indicationsde sources,des tableauxextraits
des publicationsofficiellesou autres, et commeuue histoire
en raecourci, et assez pittoresque,de la statistiqueécono-
mique. Lu forme viveet mouvementée,un peudébordante,
révèle chez l'auteur un tempéramentoriginal et d'ailleurs
vigoureux. Maisce qui, à travers cet exposéde données
déjà connues,et cetterevuede questionsbien débattues, re-
tient surtout, c'estla recherche,par l'auteur,d'une définition
adéquatede liafortuneet du revenunational,et de la fortune
privée, do façonà éviter à la foisles doublesemploiset les
lacunes.On peut employerà cet effetdeux méthodes,l'une
dite réelle, qui groupe les biens en catégorieshomogènes,et
les compte ou les mesuredirectement,l'autre dite person-
nelle, où l'on part des personnesphysiqueset morales,où
l'on retient le chiffrede leur fortuneet l'espècedes biens
qu'elle comprend les deux méthodesdoiventconduireà des
résultats qui secouvrent.En Prusse,on a calculéla fortune
nationale par la première méthodeet par la seconde (en
partant deschiffresde l'impôt sur la fortuneet de l'impôtsur
le revenu) maison a eu le tort, dansce dernier cas, pense
l'auteur, de mettreau comptedu capitaltoutesles créances
sur des nationaux,alors que, dans le premier,on en avait
purementet simplementfaitabstraction cela grossit la pro-
portion du capitalpar rapportà la propriétéfoncière,et très
illégitimement,car les hypothèques,par exemple,sont bien
des créances,maisreprésententcommerichessela terre elle-
même où le capital a disparu. Cettefautede méthodevien-
drait de ce qu'on s'attacheici à l'argent, et aux titres qui le
représentent,commes'il était la richessemôme,et non aux
biens matérielsdont il n'est qu'un signe. Croit-onqu'un dé-
placementd'argentsousformede dépensesoit une perte nette
pour ceux qui s'en séparent? C'estméconnaîtreque l'avan-
tage obtenu en échange, même s'il n'est pas réalisable en
ÉTAT KT ÉLÉMENTSDE LA HKPAHTmoN Ctit

argent, reste une richesse à ce compte, il faudrait presque


ranger dans la catégoriedes revenus des personnes (qui,
additionné»,donnentle revenu utitioual),outre les gains eu
argent du médecin,les soins qu'ils donnent aux malades;
commecontre-partie du moins, le problèmese pose.Croit-
on, encore,qu'il y ait correspondancepour une nation entre
l'accroissementde valeur(en argent) detousles biensrais sur
le marché, entre 1»haussede tous les prix, et l'accroissement
de sa richesse réelle? C'est oublier que ce qui déterminela
valeurdes biens,cesontd'une part les bienseux-mêmes(on
tant qu'ils ont demandéun temps de travail variable, et en
tant qu'ils sout rares),et, d'autre part, les variationspropres
de la valeur de l'argent. Alors, toutes les confusions sont
possibles;on compterala valeur d'un champ, plus la valeur
de l'hypothèqueprise sur ce champ double emploi on
comptera,dans une année, la valeurdes matièrespremières,
plus la valeur des produits fabriqués nombreux doubles
emplois. La déterminationdu revenu individuel par la
méthode des budgets de famille présente exactement les
mômesdifficultés: là encore, on ne peut s'en tenir aux en-
tréeset sortiesd'argent liquide, puisqu'un achat fait entrer
dansle ménageun objetqui a une valeur. L'auteur insiste,
ici, sur les méritesde la comptabilité en partie double (ita-
lienne),qui, pourchaquedépense,inscrit en même temps au
passif la sommedébourséeet à l'actif la valeur de l'objet
acquis. 11est vrai qu'ici, il faut distinguer entre l'acheteur
qui achètepour revendre(Erwerbswirtschaftjet qui voit, der-
rièroles biens,leur valeuren argent, et le simpleconsomma-
teur (Aufwandwirtschaft) qui voit,derrière l'argent, les biens
qu'il peut procurer. Ce dernier, souvent, s'il exprimait le
bien une foisachetéparle prix auquel il lo revendrait(valeur-
de réalisation),verraitsavaleur baisser au-dessousmêmedu
prixoù il l'a acquis. C'est pourquoi l'indicationde la valeur
en argent devra s'accompagnerd'une description détaillée
des objets eux-mêmes,et de leur rapport aux besoinsde la
famille.
Onvoit toutesles questionsque soulèvecette étude, plus
qu'elle ne les' résout. On fera bien, avant de se rallier aux
conclusionsde l'auleur,de les soumettreil une nouvelledis-
cussionattentive.
M. H.
682 l. ASNBK 190B19U9
SUUIOI.OtllQUK.

LEITER(FiunDHicii). Die Vertellung des Elnkommens in


Oesterreich, im Gesamlstaate und in den eiuzelnen Laen-
dora, uacli Kiukonmiensquelleu und Einkommeusstufen,
unter Berucksicntigung von lie ru und Geschlecht und der
Stelluug im Buraie. Nuch den Krgebuisseu der Persoualein-
komniensteuei' in donJahreu 189Sbis 1004.Wiou uud Leip-
zig, BrauinQller, 1907, vi-807 p. iii-8".
Un impôt personnel et progressif sur le revenu est appliqué
eu Autriche depuis I8ÎW.Outre les résultats annuels qui sont
publiés immédiatement, l'administration 'doit présenter tous
les cinq ans une revue des résultats de la période écoulée; la
première a paru en 11104;c'est l'occasion de la présente
étude.
De 1898à 1904,la proportion des taxés (revenus à partir de
i.^00 couronnes; à la population a passé de 7,28 à 10 p. 100,
ce qui Indique qu'on a réussi à mieux atteindre le revenu
imposable et le nombre des taxés a augmenté plus que le
revenu imposé. signe qu'on a atteint surtoutplus de petits re-
venus. Ces perfectionnements techniques dissimulent le mou-
vement mêmedes revenus durant cet intervalle. Il est pos-
sible de déterminer la proportion des revenus de diverse
origine. Toutefois, ta préoccupation de décharger autant que
possible l'agriculture a conduit à apprécier beaucoup trop
bas la valeur des terres. D'autre part, les traitements, sa-
laires, etc., sont au contraire très exactement déterminés. On
peut dire, en gros, que le revenu des capitaux est égal à deux
fois le revenu des fonds, et une fois et demii le revenu des bâ-
timents, que le revenu des entreprises indépendantes est plus
élevé que celui des fonds joint à celui des bâtiments, que les
traitements représentent un tiers du montanttotal du revenu
taxé.
On a groupé les revenus, d'après leur grandeur, en plus de
Sft catégories d'une comparaison des tableaux de ÎH'JHet de
4904, il parait ressortir que, seuls, tes revenusmoyenset assez
hauts (de 1.400à 40.0000/s'accroissent. La moitié du revenu
net taxé se répartit entre 83 p. 100des taxés, dont le revenu
est inférieur a 4.000 couronnes, et l'autre moitié entre
la p. 100des taxés, de revenu supérieur (il p. 100 des taxés
ont un revenu supérieur à 12.000 couronnes et détiennent
26 p. 100 du revenu net total;. Uneélude spéciale est faite des
millionnaires. Les campagnes, qui comptent cinq fois
ÉTAT KT iSUSUBSTS»B I.A BKPAUTITIOX 08*

autant d'habilituls que les villes, n'ont que trois fois autant
do taxés»et un revenu moitié moindre.
Cottemême statistique permet de calculer (donnée extrê-
mement précieuse et rare), pour chaque profession, et pour
chaque situation dans la profession «indépendants, employés,
main d'œuvre), d'une part le nombre des personnes de chaque
catégorie do revenus, d'autre part le revenu moyen. Dans
l'agriculture, les petits propriétaires ont un faible revenu, et
les salaires agricoles des ouvriers non qualifiés ne sont
jamais assez forts pour être taxés; dans l'industrie (qui com-
prend plus du tiers de tous les taxés), les employés sont en
uue meilleure situation que les indépendants; dans les plus
basses catégories, les ouvriers taxes sont presque aussi nom-
breux que les indépendants; dans le commerce, les petits
commerçants déclarent uu revenu moindre que les indépen-
dants de l'industrie; les employés y sont, commedans l'in-
dustrie, mieux situésque les indépendants, etla main d'œuvre
y parait mieux rétribuée; dans les banques, sociétés d'assu-
rances, etc., le revenu des employés est visiblement plus
élevé que dans les autres branclres. Si on néglige le service de
la cour (où les revenus sont élevés}et le service militaire (on
n'y est pas riche;, dans le service civil, le Hors environ des
fonctionnairesd'État ont uu traitement convenable; ils sont
d'ailleurs mieux payésque dans le serviceautonome (commu-
nal, etc.); dansl'église, les revenus sont bien faibles, mais,
dans les écoles privées, plus faibles encore 8/îî seulement
des médecins, très nombreux, sont taxés; les avocats et no-
taires sont plus fortunés; sous le nom de rentiers, on groupe
les pensionnésqui out un revenu très moyen, les propriétaires
de maisous, dont le revenu moyeu est intermédiaire «titre
celui des médecins et des avocats, les rentiers proprement
dits, moins riches que les médecins. Le revenu moyen des
employés, dans les professions libérales, correspond à peu
près à celui des indépendants de l'industrie et du commerce,
et dépasse celui des indépendants de l'agriculture.
Il est intéressant de reconnaître combien des membres de
chaque professionont, a côté du revenu principal de la profes-
sion, un revenu accessoire, quelle eu est l'importance relative,
et l'espace. Lit majorité des agriculteurs taxés tirent uu
revenu (d'ailleurs modéré) de leurs maisons; le revenu des
entrepreneurs de mines est, pour uu tiers, un revenu acces-
soire; la grande majorité des industriels ont uurevenu acces-
084 L'ANNKK
SOCIOUKUQUB.
1UQ0-19U9
soire de mêmeles commerçauts(environ le quart de leur
revenu)et encoreplus dans les bauques,assurances,etc. (les
quatre dixièmesaumoins);dans les servicesde la cour, mili-
plus des deux tiers des taxésont un re-
taire, ecclésiastique,
venu accessoire,au contrairedu servicecivil (à peineun ciu-
quièmedu revenu),et de l'écoleprivée(à peine un quart); les
médecins,commelesavocats,pour les quatre dixièmesenvi-
ron. Lerevenudela propriétéfoucièreest, pour un quart,
revenuaccessoire celuides bâtimentsl'est, pour deux tiers,
et celuidu capital,pour cinq sixièmes. – L'activitéprofes-
sionnelledes femmesne ressort pas bien de cesstatistiques
dans les catégoriesdes employéset de la main d'œuvre du
commerce,elles apparaissentà peine c'est qu'ellesy sont
particulièrementmalrétribuées.Lesfemmestaxéesont, bien
plus rarementque les hommes, un revenu accessoire.
Cependant,la moitiédes femmes,en Autriche, exercentune
profession.
Après ces analyses,l'auteur rappelle les rapprochements
tentésentre lesstatistiquesde l'impôtpersonnelsurle revenu
en Autriche,en Prusseet en Saxe (modèlede l'impôt autri-
chien)pouf voir si les résultatsse correspondentdans l'en-
semble(d'oùil résulteraitque l'impôtest exactementréparti), 4
et ce qu'ils nous apprennent sur la richesse relativede ces
pays. Entreles proportionsdes sourcesde revenu, et des ca-
tégoriespar grandeur (Stufen)des revenus, dans les trois
pays,il ne ressortquede très légèresdifférences.Lesrésultats
des statistiquessont donc très vraisemblables.D'autre part,
la proportion des taxés (l'exemptionsupposée au même
chilïre)estnettementplus forteen Prusse qu'eu Autriche,et
le revenumoyendestaxésde plus de 3.000marks y est aussi
plus élevé.La Prusseest nettementplus riche que l'Autriche
(l'écartseraitencoreplus grand, si l'on admettait, commeun
de ces auteurs, une correspondance de niveau de vieentre les
revenus auxquels commence l'exemption (900 marks et
1.200couronnes).Cettedifférencede richesse est d'ailleurs
surtout imputableà l'agriculture.– L'auteur analyseensuite
une étude d'A. Wagner (1903),d'où il résulterait que les
statistiquesde l'impôt directsur le revenu sont, pour la con-
naissancedes revenusindividuelset du revenu national.la
source la moins insumsante; l'ouvrage se terminesur des
considérationsde politiquesociale, empruntées aux auteurs
les plus divers.
KTAT ET JUMENTS t>K LA HKI'AUTITION 08S

Certainementdo telles statistiques,à mesurequ'elles se


multiplieront,nous apporterontsur lti répartitiondes for-
tunesdes renseignementsplus précisot plus valublesque
ceuxque noustirons, par des inductionsassez hasardeuses,
d'autres données.Il nous imported'autant plus de marquer
leurs lacunes, et leurs imperfectionsnécessairesou provi-
soires.D'abord,elleslaissenttoutafaitde côtélu musse la plus
considérabledes ouvriers, et une bonne part des employéset
indépendants(tous ceux qui ne s'élèvent pas au-dessusdu
minimumimposable),et ceux, plusou moinsnombreux,qui
bénéficientd'exemptionspour diversescauses(nombredes
enfants,soldedes officiers,etc.).Puis,suivantles professions,
suivantles régions,et suivant lesépoques,l'estimationn'est
pas la même; tantôt on charge,tantôt on allège telle ou
telle catégorie,et cesatténuationsou exagérationssystéma-
tiques,tendancieuses,déformentbien plus les résultatsque
leserreurs accidentellesinévitables.On a peineà surmonter
l'impressiondo scepticismeque l'auteur lui-mêmeéprouve
et qu'il communique, lorsqu'ilexpliquetel résiiltiitiiialteudu,
et le changementdes chiflreBd'uneanuéeàl'iiulre,parle per-
fectiounementde la « technique»de l'impôt.Néanmoins,on
peutespérerque c'en est bienla raison,et la comparaisonde
ces résultatsavec ceux des autres pays, par les correspon-
dancesqu'elle révèle,est un moyende contrôleappréciable.
Enfin,il y a un double motifdene pas trop s'attacheraux
rapportsdes chiffrespour les villeset la campagne l'impôt
u été établi en partie en vued'alléger l'agriculture; et les
richesagriculteurs,s'ils ont seulementun logementà Vienne,
sonttaxésdans cette ville.
N'insistonspas sur la tentativede l'auteur de comparerles
résultatsdes cinq aouéesécouléesdepuis le premierétablis-
sementde l'impôt; elleest prématurée,et, d'ailleurs,il ne la
poursuitpas. C'est surtout un tableaude l'état actuelde ré-
partitiondesrevenusqu'il nousprésente,dausles cadresoffi-
ciels. Maisces cadreseux-mêmessont-ilsbienchoisis?Au
nomde quelsprincipesles a-t-ouainsi arrêtés?9
On a réparti les revenus, ici en 50, là en 5 catégories,
d'après leur grandeur. On définit ainsi les catégories
1.200couronnesà 1.280, 1.250à 1.300, 2.000à 1200 (on
oubliede nous dire, du reste, si les revenus de 1.300,de
2.000,etc., rentrent dans le groupeinférieur, ou dans le
groupesupérieur,ce qui, précisémentparceque ce sont des
086 1,'AXNKESOCIOLUUIO.UB.
1SMKM909

chiffres ronds, auxquels un nombre plus grand do revenus


peuvent correspondre, n'est pus sans importance). Mais.au lieu
d'appliquer ainsi aux revenus ce procédé de groupement, n'yy
aurait-il pas lieu d'essayer de se buser sur des chiffres de
salaires, gages, traitements, honoraires, plus fréquents que
d'autres, correspondant par suite à certaines habitudes socia-
les, et de faire les coupures dans les intervalles de ces chiffres u?
Le tableau, surtout pour les professions qui donnent lieu au
paiement régulier d'une rétribution fixe, serait à la fois plus
intelligible et plus instructif. Les revenus moyens par caté-
gorie, qu'on calcule parfois, tant que nous ignorons si en eux
se confondent des cliillres extrêmes, ou des chiffres eux-
mêmes voisins de la moyenne, ne nous apprennent pas quels
revenus prédomhient, qui répondent par exemple, dans l'opi-
nion, à un niveau de vie défini, et déterminent la classe so-
ciale des titulaires. De plus, les tranches ne sont t paségales
(d'aborddeîiO, puis de 100, 200,400, etc.); et, sans doute, il se
peut qu'à mesure qu'où s'élôve dans l'échelle des fortunes, les
écarts de revenus, pour séparer des groupes réellement dis-
tiucls, doivents'accroître; mais il semble qu'ouue se soit pas
inspiré de cette idée, et qu'on ait élargi les cadres simple-
ment parce que le nombre des hommes concernés diminuait.
Nous n'insisterons pas sur les imperfections de la classifi-
cation professionnelle (par exemple, les mines, et les moyens
de transport mis à part, toutes les industries sont fondues en
un seul groupe, et tous les commerces de même). – Mais c'est
la distinction des membres de toutes les professions en indé-
pendants, employés et main d'œuvre, qui est équivoque ou
manque ddsouplesse. Dans l'agriculture, étant donnée l'iné-
galité des biens, le revenu moyen du propriétaire est une no-
tion bien flottante. Dans les industries ou commerces où se
rencontrent des sociétés, ou ne nous dit pas comment sont
classés le président, ou les membres du couseil d'administra-
tiou, pris individuellement. Dans les employés de l'industrie,
on confond les directeurs charges de l'exploitation, et les
caissiers ou comptables. Passant aux professions libérales,
on veut maintenir les mêmes cadres. Mais peut-on assimiler
aux employés du commerce et de l'industrie les officiers, les
fonctionnaires civils, les professeurs et instituteurs? D'autre
part, le prêtre, le médecin, l'avocat sont-ils des entrepreneurs
indépendants, au même titre que les commerçants, si l'on ne
veut pas seulement distinguer les personnes suivant que leur
KTATET KI.KS1BNTS
DRLA IllfPAHTITrOM 087
_· I.1l'.1-A 1-
revenu est aléatoire et variable, ou assuré et déterminé, mais
tenir comptede l'occupation, de la fonction oxercée, qui est
évidemment très différente ? Celui <|ui exerce uue de ces pro-
fessions est à la fois plus libre, puisque sa rétribution ne
dépend pas exactement du résultat de sou travail, et cepen-
dant plus dépendant, par rapport à l'opinion, que les com-
merçants, parce que sa fonction, sinon officielle,est d'intérêt
public il mérite une place part.
Eu somme, on le voit, les cadres imposés ici à la réalité
sociale sout impurla ils -pour deux raisons. D'abord, suivant
qu'une iudustric, ùue exploitation, un service est grand ou
petit, compliqué ou simple, les agents qu'on y rencontre se
distinguent en catégories économiques plus ou moins nom-
breuses pour avoir une idée exacte de la distribution des
revenus suivant l'ocCupatiou, il faudrait distinguer autant de
catégories qu'il existe de fonctions réellement distinctes.
D'autre part, les classes sociales où rentrent les individus de
ces diverses catégories sont riisliiicles de ces catégories, en ce
que la fonction économique n'est pas forcément ce qui les dé-
termine, mais plutôt le revenu, la culture, et la fonction éco-
nomique dans lu mesureoù, pour l'opinion, elle est jointe à ce
niveau de revenu et de culture pour avoir une idée exacte de
la distribution des revenus suivant les classes, il faudrait
constituer des groupes où l'on rapprocherait des hommes de
fonction économique différente suivantlit correspondauce de
leurs revenus. Tous autres classements restent plus ou moins
artificiels, AI. il.

•LIEFMANN (KonicRT). Ertrag und Einkommen auf der


Grundlage einer rein subjektiven Wertlehre. Ein
wirlschaftstheoretischer Versucb. léua, Fischer, -1007,72p.,
iu-8°.
Par réaction, nous semble-l-il, contre une tendance trop
fréquente, et qui cause dans les travaux économiques beau-
coup du mal, à confondre les phénomènes économiques avec
le substrat physique avec lequel ils nous apparaissent eu rela-
tion, M Liefniiiniiest retourné à une conception subjectiviste
qui représente l'autre danger. Dans le problème spécial où
cette disposition théorique se manifeste, cela le conduit à
éliminer, commetechnique plusqu'économique, la distinction
des revenus suivant les fonctions dans le processus productif,
088 i.'a.vnèb sociolookjue. 190(M9OO

et à chercher l'analyse des revenus dans l'appréciationdes


valeurs pour la consommationet jusque dans l'appréciation
de l'utilitédes objets-Maisceladépasselebut. Et c'està nou-
veausortir d'une scienceéconomiquepossibleque decher-
cher une théorie purementsubjectivede la valeur, de la for-
mation du prix, et de la constitutiondu revenu.Et en fait,la
théorie,explicite ou latente, de M.L. n'est pas pleinement
subjective,et je crois bien qu'ici encore subjectif est con.
fondu avec psychologique.Si M. L. a eu raison de vouloir
atteindreau phénomèneéconomiquepropre, il ne paraitpas
avoir aperçu que, dans l'économiequ'il étudiait et notam-
mentdans cette économiecontemporaineoù les valeurssont
monétaires,et où les appréciationsmêmesdes individussont
quantifiées,'ce phénomène,pour être psychologique,était
pourtant objectif.Transcritesainsi et dûment adaptées,les
idées que contient cetessai seraient loin d'être sans portée.
F. S.
F1SHERiIkving).– The rate of interest. Its nature, deter-
minaliouand relationto cconomicphenomena.NewYork.
Macmillan,1907,xxu-442p., in-8".
Cetouvrageprésentelu foisles diverscaractèresqui nous
paraissent marquer les travaux de l'économie américaine
actuelle,mais qui ne se trouvent pas souvent tous réunis
chezle mêmeauteur analyses idéologiquesde psychologie
individuellehypothétique,ne manquant ni d'intelligeuceni
d'adresse;emploide la méthodedite mathématique,nonsans
ingéniositéni élégance;et, eu mêmetemps, un certainsenti-
mentde la réalitééconomique,etde la réalitéla plusmoderne
et la plus avancée, procédant,à vrai dire, d'une influence
inconscientede l'ambiance plus que d'une attention voulue
etd'uneobservationréfléchie et tout de môme,enfin,uncer-
tain souci de rejoindre les faits et d'arriver à ce que la
« théorie » serveà quelque chose.Et étant donnéesles qua-
lités propres et l'autorité de M. Irving Fisher, ce dernier
ouvragepeut être pris pour représentatifde ce que cestra-
vaux peuvent donner de meilleur. (Nousavons précédem-
ment signalé, sans pouvoir l'étudier, l'ouvrage antérieur
auquel celui-cifait suite, sur le capital et le revenu, Année
Sociologique, X, p 621.)
La « théorie » de l'intérêt qui nous est ici présentéeappar-
tient à la famille de théories auxquellesla célèbreétudede
ÉTAT KT 9LÉUICXT$DR LA R~P"RTITSU1\ 689

BohmBawerk a servi d'initiatrice. La raison et la geuese


mêmede l'intérêt est cherchéedaus la différencede valeur
qu'entre les mômesbieus, suivant qu'ils sont présents ou
futurs, l'hommeéconomiqueétablirait au bénéficedes biens
présents. Maisles raisonset les modalitésde cettedilléreu-
ciation elle-mêmevarient avec les divers auteurs qui ont
repris cette théorie ou réforme,raffine,complètel'analyse
idéologiqueet hypothétiquequi constituecette explicatiou',
AI.I. F., après avoir briëvemeut,mais nonsans une netteté
nouvelle, refait la critique des théoriesantérieures (théorie
ditede la productivité,théoriedite du coût), s'attaque à son
tourà la théoriedeBûhinBawerket indiquesurquelles parts
il ne l'adopté pas. Sa théorie propre est alors présentée, eu
une suite de chapitres clairs et bien ordonnés, dont nous
n'avons pas In place de faire uue analyse détaillée. L'idée
essentielleet originalede cette théorieest de rattacher l'in-
térôtà la variationpossibledu retenu(et non pas du capital;
l'intérêt s'expliquerait par la dispositiondes individus à
modifier(respectivementeu sens inverse pour le prêteur et
pourl'emprunteur) la courbede leurs revenusdans le futur;
le taux de l'intérêt résulteraitdu jeu de ces dispositionscon-
traires, combinéessur le marchédes prêts et des emprunts.
La préférencedes biens présentsaux bieus futurs, « ou pré-
férencede temps», varieentre les individussuivant diverses
circonstances objectivesou personnelles. Une « première
approximation» se place daus l'hypothèsed'un ensemble
d'individusdont le revenufutur est à la fois pour eux certain
(ou prévisiblede façon sûre) et rigide (c'est-à-direnon sus-
ceptibled'être modifiéautrement que par des emprunts ou
des prêts). Une « secondeapproximation» nous place daus
l'hypothèsed'un revenufutur certain encore, mais flexible
<c'est-à-dire susceptibled'être modifiénon seulementpar des
empruntsou des prêts, mais par un choixentre des emplois
différentsdu capital, qui comportentchacunuue courbe dif-
férentedu revenufutur). Unetroisièmeapproximationenfin
introduitdans l'hypothèseque le revenufutur soit incertain
(c'est-à-direnon sûrement prévisible).A ce point la théorie
du taux de l'intérêt apparatt à l'auteur complète.Il peut alors
montrertout le rôle de l'intérêt dans la théorie économique

i. Cf.noJriiiHuile
«url'ouvragei)«M. A. tanilry, pour cxcni|>lf,
L'intérêt
du capitaldansl'Année Vlll,p. 372-87.
sociologique
E. nwwiiEM. – Année social., 4906-1099. U
6TO I.ASNÉE fOGIOKOOIQDB. t'JOO-tUUW

(théorie du prix, théorie des divers Momentsde lu répartition,


prix des services, salaires, théorie généralede la répartition).
Il fait une application île la théorie aux conditions présentes.
Et enfin il eu esquisse une « vérification iutluctive », d'une
part, en rétabli ssanl la considération, éliminée au début par
abstraction, de lu variation de la valeur monétaire, ri'autre
part, eu cherchant dans l'histoire si des phénomènes carne-
têristtques entre lesquels la théorie exposéeparaît établir une
liaison sont bien effectivement rencontrés ensembleet les phé-
nomènes inverses ensemble aussi.
Nous ne reprendrons pas ici les objectionsque nous avons
déjà présentées il diverses occasions sur le caractère idéolo-
gique de la méthode suivie ici encore, sur la valeur tout
hypothétique ou bien empirique ou arbitraire des proposi-
tious et analyses psychologiques on elle prend la base de su
construction dite théorique. Xous examinerons seulement si
cette idéologie arbitraire, fondamentale,qui ne luiest pas par-
ticulière, reçoit quelque valeur nouvelle de ce que M. F. y
apportée» propre une (onnulatiou mathématique (implicite
dans le texte, explicite en appendice), une prétendue vérifi-
cation par les faits, une thèse apiïorique originale.
a/ Quelle est la caractéristique des « démonstrations » de
M. F. ? Connue les économistes mathématiciens que nous
avons étudiés plus haut, il se contente de vouloir montrer
que. dans le problème tel qu'il se pose d'après les proposi-
tions auxquelles a abouti l'analyse, il y a autant de condi-
tions que d'inconnues, donc qu'il comporte des solutions
déterminées, l'renuus, par exemple, lit pierre angulaire de
'tout l'édifice théorique ultérieurement construit, la démons-
tration correspondant à l'hypothèse de la « première approxi-
mation », condition des approximations plus complexes qui
viennent ensuite. On suppose, dans l'hypothèse dite, des prêts
et emprunts faits entre un certain nombre d'individus et
l'équilibre établi. Il est apparu, en premier lieu, qu'il y avait.
une relation entre les taux des « préférences de temps » de
chaque individu, d'une part, et, d'autre part, les revenus res-
pectifs de ces individus dans le présent et le futur, modifiés
par les sommes qu'ils peuvent respectivementemprunter ou
prêter. On écrira donc ici, dans une équation par individu (I j,
que la préférence de temps de cet individu (inconnue) est
ionction de la somme dont il se trouve disposer cette année
et l'année suivante, le revenu de cette année et celui de
èr\T bt &,i!bbxts OR i.a K&r.wenrmx m\

l'année suivante étant respectivement accru et diminue fou


diminué et accru/ de lu somme empruntée uni prêtée. On
écrit ensuite, en une nouvelle série d'équations (2), ce qui est
apparu eu second lieu, à sa voir que ces taux de préférences
de temps (une fois les prêts faits et l'équilibre établi) sont
égaux entre eux et au taux de l'intérêt.. Onécrit en troisième
lieu (S) queI»somme des prêts balanceReliedes emprunts (ou
la somme des remboursements colle des rentrées;. Enfin on
écrit, dans une dernière série d'éqnalionsfi >, que,pour chaque
individu, les valeurs actuelles de la somme prêtée et (le la
somme rembourser sout égales. Ht, lus relations ainsi for-
mulées ^élimination faite d'une équation en double emploi).
M. F. trouve, comme pur eucbautemeul, autant d'équations
rjne d'inconnues. Douete problème admet des sol utions déter-
minées.
Est-il bien sur que les propositions de M. K. ne puissent
pas s'exprimer par un autre ensemble d'équations qui ne com-
porterait pas l'apparente déterminationde celui qu'il a ingé-
nieusement établi? Nouscroyons bien, pour notre part, que,
si, par exemple, l'on fait certaines remarques sur les incon-
nues, omet certaine convention adoptée pur M. K., et pose un
peu autrement les équations, ou peut obtenir uu ensemble
d'équations oit se retrouvent bien toutes les relations expri-
mées daus celles de XI.F. et où cette fois le nombre des incon-
uues dépasse celui des équations, Mais nous n'avons pas
besoin de faire ici cette discussion, car ce qu'au fond signi-
fierait ce résultat, nous pouvons le retrouver encore par une
autre voie.
Supposons qu'on veuille faire une application. Supposons
donc que, daus un cas donné, nous soient fournies en valeurs
numériques toutes les seules données que nous trouvons
écrites dans les équations de M. F., a savoir les revenus ùivnnl
emprunt ou prêt) prévus, cette année et la suivante, de ebacun
des individus d'un groupe, supposé dans les conditions de
l'hypotbèse dite s'il est exact que le problème, mis en équa-
tion comme il l'est, soit déterminé, il est certain que, toutes
les données inscrites dans les équations ayant une valeur
numérique, toutes les inconnues ici notamment t'inconnue
taux de l'intérêt; prennent, par là même, une valeur numé-
rique déterminée. Cependant M. F. ni personne scra-l-il
capable de nous calculer quelle sera, pour ces valeurs numé-
riques des donuées, la valeur numérique des inconnues (entre
692 t'ANNÈB SOUIOLOOtODK.
«06-4909

autres, du taux de l'intérêt)? Certainementnon, et la raison


en est évidente c'est que les équationsde la premièresérie
posentunerelationentre les revenusdechaque individucette
annéeet lu suivanteet les taux de « préférencesde temps»
de ces Individus,mais ne disent aucunementquelle est cette
relation;si bien que l'opérateur,munide toutes les données
que le théoriciendéclare suffisantesû déterminer les solu-
tions, n'eu est pas plus avaucédans la connaissancede ces
solutions.Et sans doute, l'impossibilitéde résoudrenuméri-
quementuu problèmen'est pas une preuveque ce problème
ne soit pas théoriquementrésolu.Maisici cette impossibilité
pratiquenousdégageuneraisonde douter que la démonstra-
tion fourniesoitsuflisaute elle met eu évidence,en effet,que
M.F. n'anullomeutdémontréqueses inconnues(tauxdespré-
férencesdetempsindividuelles,taux del'intérêt, montantdes
sommesprêtéeset des sommesrendues)soient déterminées,
si lesdonnéesportées(reveuusdes individuscette annéeet la
suivante)sont connues,tant qu'il n'a pas déterminédavan-
tagecettefonctionqu'il se contented'affirmerdans ses équa-
tiousH;. Supposonsque, par des hypothèseset des raisonne-
ments sur ces hypothèses,un théoriciende la météorologie
aboutisse,par exemple,à prétendre qu'il y a une relation
entre le jour de la lune et la température journalière; lui
sufflrat-ilde dire « soitn le jour de la luue, si x est la lem-
pérature, j'ai x = f (n) », pour avoir établi, ayant autant
d'équatiousque d'iuconnues(une),qu'étant donné le jour de
la lune la températurejournalière est déterminée, et que,
mêmesi pourtelle valeurnumériquede In donnéeil ne peut
calculer numériquementl'inconnue, le problème est néan-
moins théoriquementrésolu?Autrementdit, la formulation
mathématique,par elle-même,n'ajoute pas l'ombre d'une
preuveàl'appui de la théoriequ'elletraduit; mèmesiles équa-
tionsde M.F. ne peuventpasse réduireà un nombremoindre
que d'inconnues,elles ne nous montrentque le problèmeest
ainsi déterminéque ai nous admettonsce qui est nécessaire
pourqu'ille tait, à savoirque, dans l'hypothèsedito, les taux
de « préférencesde temps » des individus dépendent et
dépendentseulementdu montant prévu des revenus de ces
individuspourcette annéeet la suivante.Maisl'établissement
decette dernièrepropositionn'a rien de mathématique et, à
suivredansledétail l'analysenon mathématiquepar laquelle
M.F. l'établit,nousaurionspeut-être autant d'objectionsà y
ÉTATKT&.KBBNTÏ
os M BttPAMrmON 09*

opposer qu'il en Il présentées lui-même aux analyses anté-


rieures de même ordre qu'il prétend remplacer. Mais c'est la
possibilité môme d'une proposition comme celle que ces ana-
lyses se proposent d'établir qui nous parait faire question et
tant que cette objection préjudicielle n'est pus levée, il est
bien superflu d'en venir à ces autres. Une telle analyse con-
siste essentiellement à vouloir établir qu'existe une certaine
relation, de nature quantitative, entre certains, élémentsqui
sont des quantités objectives (en l'espèce, les revenus des indi-
vidus, en monnaie) et un facteur qui est un sentiment psy-
chologique individuel (en l'cspèce les « préférences de temps»»
individuelles) or, la question première est justement de savoir
si ce sentiment psychologique individuel, subjectif, est ou
peut être une grandeur en lui-môme, autrement que par illu-
sion ou par reflet, autrement que par le transport qui lui est
plus ou moins inconsciemment fait du caractère quantitatif
de ces éléments mêmes, entre lesquels et lui on suppose une
relation quantitative elle-même1. Autrement dit, il y a lieu de
se demander si les théories de cette sorte n'ont pas, à leur
point de départ môme, un vice radical, celui d'impliquer l'at-
tribution, à un phénomène psychologique essentiellement
qualitatif. du caractère quantitatif que possède un phéno-
mène objectif auquel ce phénomène psychologique est lié, et
de vouloir ensuite traiter de la relation entre eux comme d'une
relation quantitative détermiuable entre deux phénomènes
indépendamment quantitatifs, sans voir que c'est là une péti-
tion de principe fondamentale. Ce vice radical, latent daus
les théories de l'économie traditionnelle eu langage ordinaire,
la formulation mathématique a, du moins, le mérite de le
mettre en évidence.
De même, elle sert encore à dégager le caractère circulaire
de certaines interdépendances impliquées aussi dans les théo-
ries de cette sorte. La « seconde approximation » de M. F.
nous en fournit un exemple, Il y est reconnu, d'une part, que
le taux de l'intérêt dépend des taux individuels de préfé-
rence, et, d'autre part, que ces taux individuels de préférence

i. Eu fait.clansli<cas présont,ci' nous|>uniH,<liiivsti1,èlrc|ilntfililn


tauxilr liiiti'TiU
sur k>umrcliû,i>li<<noni<-m- si l'on vcul.
p.«yclioli)fiii|uc,
maissoiïiulniolijiidif.quece curuclèruqmuililntifa ••!»• incunsoicmiiionl
imnsri'Ti'niu « piï-Wrcncosdi>toiniw »inili.iilucllf. Mni*
ci'ln n'ost pus
essentielà noireiirtcuiuiml|iivscnlet *• retrouvi-pin»ti>|>ii|tii>ment en
unautrepoint<Cf.ri-drisu*Sci-t.I, C.H.Jcvuns,V,et vMvfson*).
694 r.'AS.NBKSUCIOUMIgUE.
WOli-WU»

dépendent de variables qui dépendent du taux de l'intérêt.


Mais, dit M. F., une double rotation inverse n'est pas forcé-
ment un cercle vicieux. Malheureusement, il donne à l'appui
de cette proposition générait' un exemple sophistique qui
uous.met iiussiiùt en défiance. Si, dit il 'p. Vil), ou nous
donne lu taille d'un père en fonction de celle de sou tifs 'par
exemple qu'elle i-giiletrois fois celle du filsi, et inversement
celle du (ils eu fonction de celle du père que multipliée trois
fois elle éjçale celle du pèrei, c'est uu cercle et ni l'une ni
l'autre u'est pur là déterminée. Mais si, la première proposi-
tion résinai la m^ine, l;i proposition inverse dit, par exemple,
que la taille dufils; multipliée cinq (ois égale hituille du père
plus quatre pieds, ce système de relations u'est nullement
un cercle et comporte uue solution hien déterminée (0 et
'2 pieds:Mais qui ne voit que, dans le second cas, lu secundo
proposition u'est plus simplement l'inverse du la première, et
que c'est l'introduction d'une tierce donnée (la longueur de
quatre piedsj indépendante, indépendamment connue, et en
relation définie avw les inconnues, qui perinel de sortir du
cercle? Or.dtms la théoriede ta seconde approximation, quelle
est donc lu donnée indépendante et indépendamment connue
qui permet d'éviter l'indétermination et le cercle vicieux f
M. V. se contente dédire que, dans su formulation mathéma-
tique, il trouve autant d'équations que d'inconnues mais cela
justement fait question.
La seconde caractéristique! du travail de M. F. que nous
l>,<
vouions relever est la vérification par les faits, qu'il présente
de sa théorie. Nous avons déjà noté plus haut les propriétés
assez contradictoires qu'il lui reconnaît de n'être pas indis-
pensable' à la théorie, qui vaut par elle-même, de ne pouvoir
être que grossière et jamais décisive, et de suf lire pourtant, si
elle ne s'obtenait pas. à réfuter une théorie vraiment inexacte.
Mais voyous eu quoi elleconsiste. M. F. commence par remar-
quer que qualrr; ordres de phénomènes doiveut pour cette
épreuve avoir la même signification intérêt élevé, emprunl,
dissipation du capital, caractère périssable des instruments
de production, d'une part; intérêt bas, prêt, accumulation do
capital, et caractère durable des instruments, d'autre part.
Et toute sa vérification consiste a prétendre, dans un certain
nombre d'exemples, pris sans règle définie en divers milieux,
temps ou pays, trouver présents ensembletels ou tels dos uns
ou des autres de ces phénomèneset ici ou tel des (acteurs qui,
KÏAT HT Kt.KMKNTS
UKI.A RÉPARTITION' «95

d'après la théorie, tendent ù élever ou à abaisser le taux de


l'intérêt..Mais I" beaucoup de ces soi-disant observations de
fait sont ou bieu coutesta Liesou bien trop « allairo d'impres-
sion » pour pouvoir être objectivement soit confirmées soit
iuflrmécs 2" les phénomènes pris comme tests sont telle-
iuent gros ou complexes qu'ils peuvent se trouver concomi-
tants avec bien d'autres facteurs encore que ceux de lu théorie
présentée, et par conséquent pourraient sans doute vérifier
tout autant Ses théories différentes; M"enfin et surtout, aucun
de ces exemples u'utleint et par conséquent n'apporte uue
confirmation à l'essence môme du cette théorie, nou plus que
de toutes les autres théories de môme ordre qui pourraient
être faites du môme phénomène eu aucun, il n'est'vérifiéque.
le taux clel'intéi-ôl, phéiiumeue objectif (et de nature sociale;,
résulte, comme un phénomène dérivé, des taux de préférences
individuelles, subjectives, phénomènes premiers: eu tous, les
facteurs psychologiques que la vériiiualiou altciut et dontelle
tire argument sont des dispositions collectives, constatées par
milieux, par classes, par pays, eu un mot, par catégories
sociales et par sociétés. Et il apparaît ainsi qu'automatique-
ment, sans que l'auteur l'ait voulu ai, semblet-il, senti, le ·
contact des faits aboutit à retourner les questions et à les
poser dans leur véritable réalité.
e) Nous voulons enfin noter, nous plaçant dans la théorie
même de M. F., une objection centrale qu'il nous fournit lui-
même l'originalité de sa théorie de l'intérêt est, entre les
théories de la même famille, de faire dépendre du retenu, de
déterminer par rapport au revenu l'existence et la quotité de
cet intérêt. Or, dans le chapitre qu'il consacre;au rôle del'in-
térêt dans la théorie économique, voici qu'il en étend l'im-
portance et eu généralise la notion jusqu'à y voir le fonde-
ment ou le type môme de tous les éléments de la répartition,
de tout revenu. Mais, si la notion même de revenu eu général
et la notion de l'intérêt tendent ainsi à s'équivaloir, comment
est-il concevable que, comme le suppose ta théorie exposée,
des individus aient un revenu déjà constitue, dont le coursest
détermine, antérieurement à l'existence d'un intérêt on indé-
peudainineulde ce que l'intérêt y vient modifier? Si la notion
même de revenu est une dérivation ou une extension de celle
d'intérêt, – et cela nous parattrait une idée très intéressante
il approfondir, – comment peut-on fonder la théorie du phé-
nomène premier sur le phénomène second, même plus géné»
090 L'ANNÉE SOCIOLOQIQUB. 1906-1909

rat? Et ne trouvons-nouspus ainsi, au cœur mêmede la


théorie propre à M. F., un ingénieux mais essentielcercle
vicieux? F. S.

HAIN1SCH(MiuiiAKL). – Die Entstehung des Kapltal-


zinses. Leipzig-Wien,Deuticke,1907,112p., iu-8».
'Voici,sur l'intérêt du capital, un travail biendifférentpar
la méthodede celui que nous venonsd'étudier. Cen'est plus
dans uue analyseidéologiquedestendancesd'une psycholo-
gie individuelle actuelle que l'on cherche l'explicationde
l'intérêt c'est par les faits concretset extérieurs que l'onse
proposededéterminerhistoriquement l'apparitiondece phéno-
mène, et c'est dans des notionset pratiques sociales, et de
sociétésrelativementprimitives,que l'on rechercheles anté-
cédents et concomitantsde fait auxquels il peut être lié.
M. tlainlschécarte«d'abord,par des argumentstirés de faits,
deux thèses,l'une (voloatiersadoptéepar les partisans de lu
théorie de la productivité)faisant dériver l'intérêt du prêt
des outilset des armes, l'autre le faisant nattredans l'entre-
prise de transport commerciale. Rappelant alors l'impor-
tance du bétail, et spécialementde la vache, aux degrésinfé-
rieurs de la civilisation,il attire fortementl'attention sur la
pratique du prêt de bétail,où le veaufait retour au proprié-
taire de la vache(alors que le luit est laisséà l'emprunteur)
il en montrel'existencechez beaucoupde peuplesdivers,lu
persistancemêmejusqu'ànos jours dans nos pays. Le prêt de
vache est acte de bon voisinage,et il est service gratuit,
commetouslesprêtset servicesentrevoisinsdans les sociétés
primitives; en un état de civilisationoù tout à la foisle lait
est nourritureessentielleet n'est pas objet de conservationou
de commerce,le propriétaire de nombreux bétail a du lait
dont il ne sait que faire, tandis que son voisinmoinsfortuné
peut n'enavoir pas à sa suffisance tout naturellementdonc,
il lui prêtede ses vaches,pour qu'il profitede leur lait; mais
le veau est un accroissementde bienmême pour le gros pro-
priétaire tout naturellementdonc aussi, te prêteur, pour ne
pas perdre au prêt, se le réserve.Il n'y a pointlà-dedansd'es-
timationen valeur, de valeurqui produit une autre valeur¡
il y a un produit natureld'une propriété,qui revientau pro-
priétaire le principedecette pratiqueest, en somme,que le
prêt, s'il ne rapporterien auprêteur, ne doit pasnon plus être
KÏAT ET tfliMK.'m l>8 LA UéMBTITlON 097

une perte pour lui. C'estpourtantdans ce fait essentiel,dans


ce prêt qui ne lèseni ne rémunèreque M.H.voitl'originedu
prêt à intérêt. 11s'eflorcede prouver, par des arguments
variés(parexempleen invoquantl'annalitéde l'intérêt,etc.),
que l'intérêt est bien dérivé de ce fait du croit du bétail
d'établir que la notion mêmede cette sortede gains'est bien
effectivement et lentementétendueduprôtdu bétailauxautres
sortesde prêt et il termineainsi par des vuessur l'originedu
fermageet louageà Rome.
Nousne discuteronspasici les basesde faitsur lesquelles
M.H. établit sa thèse nous remarqueronsseulementque,
mêmeadmises, ses preuvesse limitent à peu près aux pre-
mierspeupleshistoriquesde l'Europe ou de l'Asieocciden-
tale, au plusencoreà Babylnnoet à l'Egypte,et ne s'étendent t
que très vaguementet très peuil toutes les sociétésque nous
tenousaujourd'huipourplus proprement«primitives».Nous
ne discuteronspas non pluss'il a raisonde vouloiréliminer,
du prêt primitifqu'il analyse,toutenotion de valeurpropre-
ment dite (pourtant,si elle n'existe pas au début,comment
s'inlroduit-elleensuite)?C'estla méthode,la positiondu pro.
blèmeet la nature des résultats que nous voulonssurtout
noter,– et défendre.Sans doute, reconnaîtrecommentnatt
une institution,ce n'est pointpar là seul l'expliquer,ce n'est
passurtout,par ta seul, expliquerles formes,différentesde ta
formeoriginaire,qu'elle peutprendre ensuiteau coursde son
développement que les sociétésd'où notre civilisationest
issue aient pratiquéle prêt de la vache avecretourdu veau
au propriétairene suffitpasà expliquer lesopérationsde nos
banquesmodernes.Aussi bieu, personnene l'a prétendu.Ce
que nous demandonsà des études d'origine,c'est de nous
apprendred'où natt une institution,de nousen expliquerlit
genèse,et par là de nous en donner le sens premier nous
avonsensuite,certes, à suivre l'évolutionqu'a pu subir ce
sens premier; mais la connaissanceque nous avonsde lui
nousaide à débarrassernotre institutiondes interprétations
arbitraires ou subjectivespar lesquellesles hommesont pu
ultérieurementse l'expliquer,età à retrouversousellesla signi-
ficationvéritablequ'elle possèdeobjectivement,Il n'estcertai-
nementpas sans importance,pour notre intelligencedu phé-
nomènede l'intérêt, tel que nous le connaissonsaujourd'hui
dansnossociétésoccidentalescontemporaines,desavoirs!le
prêt à intérêtest né ou non, effectivement,d'un prêt désinté-
Ô98 I.'aSNKIÎSueirtUitilytK. i'JOU-1
',>[)'.(

ressé soumis seulement à la règle de un pas causer de perte au


prêteur; non plus qu'il n'est indilïéront a notre iulelligeuee
du pliônumÊticactuel de l'échange de savoir si l 'échangecom-
mercial est né ou non d'un échange de dons. Bien enteudu,
cette étude d'origine, pour avoir ce inérittiet ce rôle, ne doit
pas ôtre purement descriptive et extérieure; elle doit non
seulement constater des concomitances ou des successions,
mais dégager et dûment établir une relation causale propre-
mentcxplicalriee. Kt sans doute, comme causes proprement
dites, ou atteindra ici aussi, eu délinitive, des éléments psy-
chologiques'l'explication de M. H., par exemple, ou l'a vu,
est, en dernière analyse, une certaine mnffpUon, régnant dans
la société considérée, des conditions que doit remplir un
prêt) mais ces éléments psychologiques seront objectivementt
constatés dans leur extension et leur fonction exactes, et
objectivement reconnus dans leur rôle de cause effective du
phénomène étudié. Ni l'un ni l'autre ne peut ôtre dit, nous
l'avons vu, des éléments psychologiques dont les théories
idéologiques constituent leur explication du phénomène de
l'intérêt; aux critiques directes que nous y avons faites, nous
pouvons ajouter ici un iirgumenLn contrario si lu préférence
des biens présents aux biens futurs est un fait psychologique
d'observation générale et si elle sullit à rendre compte de
l'existence d'un intérêt, comment se fait-il donc que le prêt à
intérêt ait été nu inconnu 'non pratiqué; ou prohibé 'légale-
ment ou moralementcondamné dans de nombreuses sociétés?u
Est-ce que, dans la psychologie des individus de ces sociétés
la préférence des biens présents aux biens futurs n'existerait
pas ?ou que. dans ces sociétés, cette préférence des biens pré-
sents aux biens futurs serait légalement ou moralement con-
damnée ? Xi l'une ni l'autre de ces preuves ue nous est
fournie et ou serait peut-être bien embarrassé de la fournir
tant que nous ne les avons pas, cependant, toute cette théorie,
à supposer même qu'elle se tienne en elle-même, ne suint pas
plusi'iexpliquer l'existencei en fait et cmdroit; du prêt à inlé-
rèl dans nos sociétés occidentales contemporaines que n'y peul
suffire une recherche du typo de celle de M. Haiiiîsch.
F. S.

IlEUSCIILE(G.). – Die Ursachen der Schwankungen


des Geldzlnses im allgcmcincn und des Diskonts im bc-
sonderen. Berlin, Simion, l'JOK,viu-192p., in-8\
KTAT KT iiLKUKXTSOS LA HfrAHTfTtUJf 099
Née d'une préoccupation
pratique, de lu préoccupation de
rechercher les conditions propres à l'Allemagned'un
dévelop-
pement des moyens de production ou du « capital », corres-
pondant à l'accroissement de lu population, cette étude est
placé» tl'enililée sur le terrain des faits. el, autant que pos-
sible, des faits comparas entre les divers grands
pays occiden-
taux. Plutôt que Huténîl eu général, l'auteur considère
plus
spécialement la taux de rescoiiiplc.il «minière et examine
les causesqui peuvent paraître eu eiitnilner la
variation, traite
ensuite du règlement des comptes internationaux dans son
rapport avec l'escompte, enfin aborde la question du point de
vue monétaire, et des moyens de
paiement (billets de banque,
monnaie fiduciaire chèques, virements,
clearing». Nous
n'avons pas la place d'entrer dans
une analyse détaillée de
cet exposé. Nous noterons seulemeut
que. par le seul fait de
ce contact avec les données
positives, et par une réflexion sur
elles où n'a pas trop pesé une « doctrine »
économique, les
résultats auxquels aboutit l'auteur n'ont
pas lu forme sim-
pliste et assurée, ni la signification assez vaine des conclusions
données par uue recherche
conceptuelle. 11 resterait les
éprouver et ù les étendre, eu môme temps qu'à les dégagerd'un
souci d'application trop imniùdiut,
pour eu tirer une théorie
positive peut-être assez satisfaisante. F. s.

LEVASSKUH<B.).– Salariat et salaires,


i Encyclopédie
scientifique publiée sous la direction du D'Toulouse). Paris
Dolu, 1909, 484 p., in-18.
Dans ce volume succinct, partie d'une
encyclopédie, M. Le-
vasseur a condensé, avec les résultats de la doctrine écono-
mique sur les causes de détermination des salaires, nue abon-
dance d'Informations de fait sur le salariat en
général, dans
histoireetdans le présent, sur les variations du salaire depuis
le xix" siècle, sur le salaire des femmes, sur les salaires
com-
parés outre les divers pays puis il ya joint l'étude desautres
conditions du travail salarié, durée du travail,
irrégularité
d'emploi, logement et l'étude des prix de consommation et
du coût de la vie. Kiifiu, un troisième
groupe de chapitres est
consacré aux institutions de ta
répartition qui intéressent
directement le salaire et le salarie, grèves, syndicats,
patro-
nage, assistance, mutualité et aussi a la législation dite
ouvrière. SI. L. termine par un examen des
critiques doctri-
700 l'année socioumtocK. 1906.1900

nalesfaitesau salariatet une indicationdes perspectives


qu'il
voità son évolution. On retrouvera, sous cette formerésu-
mée,tous les caractèresqui marquentles travauxdeM.L., et
ce précis sera certainementun volumeutile d'initiationet
d'inturmatiou. F. S.

CORNÉLISSEN (Chhistian).– Théorie du salaire et du


travail salarié (Bibliothèqueinternationaled'économie
Paris, Giardet Brière,1008,704p., in-8°.
"politique.).
Cetouvragefait suiteà la théoiiedeta ealeurquenousavons
antérieurementrecensée Plusnettementqu'il ne l'avaitfait
dans cette précédeuteétude, et, en tout cas, beaucoupplus,
en principeet en fait, qu'il ne se rencontred'ordinairedans
ce qu'onappelle une théoriedu salaire, l'auteur s'y montre
soucieux,dans sontravail théoriquemême,d'êtreen contact
directavec la réalité.11 y réuuit un ensembleconsidérable
d'informationspositivessur des payset des tempsdivers et
son analyse cherche à s'appuyer d'argumentspositifs. –
Après une partie d'introduction,ou il présenteses défini-
tions de notions,en mêmetemps que des constatationsde
fait générales, il consacreune secondepartie à l'exposéet à
lacritiquedes théoriesdu salaire représentéesdansla littéra-
ture économique théoriesdu fondsdes salaires,de l'offreet
dela demande,théorieutilitaire ou de la productivité,théorie
du coût de production.La troisièmepartie est unesuite de
recherchesplus concrètessur les « conditiousdu travailsui-
vant les professionset métiers », divisésen deux groupes
métiers« où lesconditionsdu travail sonten rapport étroit
avecle coûtnécessaire&l'entretieude l'ouvrier,ce coûtvariant
avec les milieux sociaux » ( manœuvres, journaliersagri-
coles, femmes ouvrières,jeunesgens et vieux ouvriers,ou-
vriersà domicile) professionset métiersa oùla fixationdu
prix du travail dépenddavantagede la valeurd'usagedu tra-
vail que du coûtd'entretiendu travailleur» (ouvriersquali-
fiés, spécialistes catégoriesprivilégiées).Dansunequatrième
partie, l'auteur passe en revue un certain nombred' « in-
fluencesspécialesagissantsur les conditionsdu travailet eu
premier lieu sur la hauteur du salaire » milieu social,
urbain et rural grandeurde l'entreprise; mouvementde lu

1.Cf.Années
sociolof/VII.\i.:SJ.
ÉTAT HT tfUMKNTi DR LA IIÉPAMUTION 701
»

production modesd'établissements el de paiementdu salaire


législationouvrière formeindividuelleet collectivedu cou-
trat, organisationprofessionnelleouvrière,grèves,etc.; coo.
pératives, cnrtells et trusts, exploitationsde l'État ou des
communes.Dans uue dernière,partie, M. Gomélisseudégage
alors la théorie généraledu salairequi lui parait résulterde
toutesa rechercheprécédente il la constitueessentiellement
en combinantune action de la valeurde productionet de la
valeurd'usage du travail, et nous ne pouvonsmieuxen faire
saisir succinctementà la foisl'esseuceet le caractèrequ'en
reproduisant l'une des deux formulespar lesquelles il la
résume « La valeur d'échangeet le prix du marchédu tra-
vail tendent à coïncideravecle coûtd'entretien habituelà la
catégorie-limited'ouvriers qui réclameutla normede vie la
plus élevée,et oùlesentrepreneurscapitalistesdoiventcepen-
dant recruter la main-d'œuvrenécessairepour compléterle
personnelouvrierqui assurerala bonnemarchetechniquede
leurs entreprises. Ceci à l'intérieur de la marge entre les
limitesminimaet maximadu salaire, margeoù chaquetaux
de salaire est déterminépar la forceéconomiqued<»chacune
des parties en présence(p. 638)».
On trouveradanscet ouvrage,desinformationsdefait, nous
l'avons dit, très variées,uneconnaissancenotablede la litté-
rature du sujet dans lesdiverspays,et, au coursdu dévelop-
pement,beaucoupde remarquesou de thèses intéressantes,
que nous n'avons pas la place de releverici en détail. Nous
devons nous borner à quelquesobservationsgéuérales. –
1"L'emploi de faits, ou de groupesde faits, pris en divers
tempsetdivers pays et sousdiverseslimitationsd'industries,
de professionset mêmede conditionsparticulièreset indivi-
duelles, sans un inventaire général préalable de toutesles
données accessibles, sans un choix dégagé de tout arbi-
traire faitentre elles, sansque l'observateurse soitastreint à
embrasser,mêmedaus un cadrelimité,l'ensemble d'une éco-
nomietout entière, nous parait toujourssujet à réserves et
ne pouvoirse défendrecontre le reproched'être une expéri-
mentationincomplèteet non probante,qu'elle soit ou non
tendancieuse,ou purementempirique.– -2° Quantau choixdes
faits utilisés, l'auteur nous'paraità tort attacher uue impor-
tance et une valeur aux observationsà proportionde leur
particularité et de leur proximitédu détailconcret tout au
contraire,mômesi l'onn'a pasaperçuque la réalitéprofonde
702 L'ANNÉE
SOCIOLUUIOI.'K.
iUOCMXM

et explicative ici était collective avant et plutôt qu'iudivi-


duelJe, c'est une nécessité méthodologique, pour une simple
raison de fuit. – parce que le phénomène considéré est
trop
complexe et dépend ou peut di-peudre d'un nombre trop
grand de conditions, – de considérer d'alwnl des ensembles
d'observations, et. pour étudier des ensembles de faits numé-
riques, c'est une nécessita du notre esprit de recourir à des
expressions simples, dont les moyennes sont une t*phv le
préjugé contre les moyennes ne vaut soit que contre des
moyennes mauvaises ou mal établies, soit que contre un mau-
vais emploi de moyennes valables, c'est-à-dire un emploi de
ces moyennes eu dehors du sens exact qu'elles ont, ou sans
une interprétation convenable de ce sens. – 3ULe choix et
l'ordonnancement des faits étudiés nous paraissent être tan-
tôt dominés par des idées de nature «priurique, tantôt lait»
sans règle méthodiqueapparente le premier cas nous parait
être celui de la troisième partie 'où le critérium qui divise les
deux groupes faits entre lus métiers nous paraît préjuger,
avant que I» théorie ne soit faite, de ce qui devrait en être un
résultat, et de plus nous parait être en lui-même contestante
et conduire à étudier des cas spéciaux avant le cas type et nor-
mal; le second cas, celui de lu quatrièmepartie 'pourquoices
Influences et non telles mitres ? et que) est l'ordre suivi?). –
i" Et enfin la théorie terminale, telle que la formule plus
haut citée la condense, ne nous parait ni, en elle-même, être
très Plaire, ni, de nature, ôtre aussi différente que nous l'au-
rions désiré, de celles auxquelles elle s'oppose. Mais c'est
beaucoup d'avoir posé toutes ces questions et d'avoir apporté
sur toutes une contribution aussi personnelle. F. S.

SIMIAXD'Fhan-<;o!s.. –Le salaire des ouvriers des mines


de charbon en France. Contribution à la théorie écono-
mique du salaire. Paris, Société nouvelle de librairie et
d'édition (Cornély;, 1907, 520 p., in-8", 8 tableaux et gra-
phiques hors texte.
Cette étude est une partie, qui a paru mériter d'être déve-
loppée spécialement, d'un travail plus large qui paraîtra pro-
chainement. En elle-môine, elle présente uue contribution à ce
qu'on pourrait appeler la théorie expérimentale du salaire.
Si, malgré la limitation du cadre, ellu peut avoir cette préten-
tion, c'est, d'une part, que la qualité relativement exception-
ÉTAT KT KI.KUKNTS UK LA UKl'ARTITlMN "03

f<ii»rii'itinrit: ridont ou un
util nu se Irniivr»
trouve ïriici rliimmfH* donne
nulle des informations disposer, flnttm»
à l'analyso une sûreté et des Incultes de précision et d'appro-
fondissement dont il est légitime de tirer avunttige et c'est
que, d'autre part. cette analyse peut, môme dans une expé-
rience aussi limitée, se détourner des particularités pour s'at-
tacher à des élément»et à des relations de caractère général
quille à une juste critique de ne présenter les résultats de
forme générale obteuus sur celte hase qu'avec toutes les ré-
serves dues, et à uue étude ultérieure de reconnaître l'exten-
sion exacte de leur validité, (l'atteindre tout ce qui peut res-
ter en dehors d'eux, et de les intégrer dans uue théorie plus
èleudue et plus complète, niais qui ne sera pas d'une autre
nature.
Le chapitre premier (p. 3-48 1traite des notions et des
sources, qui y sont soumises à un examen et à un choix cri-
tiques. Dansîe chapitre II >p. 49-10-fy est abordée l'analyse des
données, sur l'ensemble de l'expérience iKrance eulièrei;
partant do suggestions courantes sur l'influence possible
d'une variation de l'ollre el de lu demande, ou dune variation
de la productivité du travail, cette analyse n'en trouve pas,
dans les faits, une confirmation mais, par les suggestions
tirées de ces résultats négatifs, elle dégage un système de rela-
tions, plusieurs fois reproduites avec la mêmeliaison, entre le
prix de vente du produit. le coût moyeu de la main-d'œuvre
par louue, la production moyenne par journée d'ouvrier, et le
salaire moyen par journée. Dans le chapitre III p. 103-180),
cette analyse est reprise séparément sur chacun des grands
bassins, Loire, Nord, Pas-de Calais, et, après une discussion
des exceptions et particularités rencontrées, aboutit a formu-
ler le cycle-lype de relations qui ressort de toute cette ana-
lyse, globale et spéciale. Le chapitre IV (p. 18"-3lKi est
consacré h interpréter ces résultats, c'est-à-dire d'abord à en
discuter la signification exacte i discussionnécessaire en raison
des différences entre les notions atteintes et les notions dési-
rables, et des actions diverses qui peuvent se confondre dans
les moyennes', puis à rechercher, sous le mécanisme cou-
staté, les facteurs qui 1 expliquent vraiment (cette recherche
procédant toujours par une élude positivedes faits quipeuvent
déceler les actions à constater! cette explication se résume
finalement (p. 290-307; en un jeu de tendances psycholo-
giques, communes à la collectivité ouvrière et à la collectivité
patronale, qui se détermine a) par rapport à des objets
704 l'axxéb sociûu»uique. 1000-180»

d'applicationprécis, b) en un petit nombre de formules


exprimantla nature, la forcerelativeet l'interaction doces
tendances,et c) moyennantdes conditionsde mise ou jeu
égalementprécisées; et de cette explication la critique
recherche(p. 307-318; la nature, la portéeet les limites.Dans
un chapitre V(p.319-480;sont réuniesun certainnombrede
recherchessecondessur certains phénomènesvoisins qui
peuventêtre éclairéspar les résultatsobtenus(duréedu tra-
vail, mode d'établissementdu salaire, grèves, action syndi-
cale) sur certains antécédentsmédiats(étude du profit ou
béuéficcpatronal, étude de la directionéconomiquede la
production),expliquanteux-mêmesles antécédentsexplica-
tifs immédiats,seuls atteintspar l'étudeproprementdite de
salaire; enfin, sur les prévisionsque pourront fonder la
rechercheprécédenteet les applicationsque la pratique eu
pourrait tirer. Un résumécritique(p. 487-498)terminel'ou-
vrage.
Pour la discussiondece travail, je crois ne pouvoirmieux
faireici que de renvoyer,d'une part, à l'examenqui en a été
fait du point de vue d'uneéconomiepositiveet spécialement
du point de vue sociologique(Hecuede synthèsehistorique,
1908,XVI,p. 99-10-4 et 181-487),d'autrepart, aux objectionset
critiquesqui ont été opposéespardesreprésentantsde l'éco-
nomiepolitiquetraditionnelle(Uetued'dconomiepoliUque.WQH,
p. 691-694;Hetuedu moi*,1908,p. 728-730 et 1909,p. 349-352)
et enfinà une étudeque j'espèreprésenterultérieurementsur
les théories traditionnellesdu salaire par ditlérencoavecla
théoriepositivequi peut enêtre tentée. F. S.

LAZARD (Max). Le chômage et la profession. Contri-


butiouà l'étudestatistiquedu chômageet de son coefficient
professionnel.Paris,Alcan,190'J,382pages, in-8°(tableaux
et graphiques).
Cen'est pas, croyons-nous, trahir les intentionsde l'auteur
que de rattachercetteœuvreaux tendancesméthodologiques
que nous défendonsici. Aulieu des considérationsa priori,
des remarques empiriques,bu des dissertationssentimen-
tales dont sont constituéesla plupart des prétenduesétudes
économiquessur le chômage,voiciun travail qui se donne
avant tout commeobjet de bien définiret de bien saisir le
phénomèneconsidéré,et, pour l'étudier, d'analyserde façon
ÉTAT ET ÉLKUms DK U HBt'AUTiTluN 705
.1.1.3.l..E.a..l_
réfléchie sans doute,mais expérimentale,_a.1_a_a
strictementscienti-
fique,la réalitédes faits. Avantde songerù discourirsur les
causesdu chômageet sur les remèdesà y apporter,ce travail
a l'originalité (car c'en est encoreune en ce domaine)de
chercher,d'abord,a savoireu quoi il consiste,commenton
peutl'observeret, si possible,le mesurer,dansquelles rela-
tions il se montre le plus propre à une étude de science,
quelles concomitancesparaissent être les plus révélatrices
des liaisons réelles auxquelles l'investigationexplicatrice
devra s'attacher. La considérationdes faits n'est pas ici,
commeelle l'est encoresi souvent,accessoire,invoquéeen
illustrationd'une théorieconstruiteeu dehorsd'elle,ni reje-
téeen annexecommeun alourdissementingrat de l'exposé:
elleest au cœur mômede l'œuvre; l'élaboration,longueet
patiente, des données fait partie intégrantedu développe-
ment à juste titre, non seulementparceque les résultatsde
fait qui en ressortentsont à la base de la théorie ultérieure.
mentteutée, maisencoreet surtout parceque, la natureet le
détail mômedes opérations dont est faite cette élaboration
conditionnantdans une large mesure ces résultats, il est
nécessaired'eu avoir suivi de près l'obtention pour pou.
voir en apprécier ,la signification et la portée exactes.
Enfin, et bien que ce trait ne soit peut-êtrepas assezmis
en évidence,– par l'emploi seul de cette façon positive
d'étudierle phénomène,les facteursindividuels,personnels,
auxquelsles considérationsa priori donnentd'ordinairetant
d'importance,se trouvent presqueaussitôt éliminés,et au
contraireles facteursde caractèrecollectifse trouventportés
au premier plan et ainsi l'étudese trouveêtre sociologique
en fait, avantmêmetout argumentqu'ellele soit endroit.Le
souciscientifiquequi transparaît dans tout ce travail, l'inté-
rêt de cette tentative,en ce domaineneufà une recherchede
ce type, méritent doncd'attirer l'attentionsur cet ouvrage
maisIls méritenten mômetempsque la critiqueen soitd'au-
tant plus rigoureuse.
Aprèsun exameucritique de la définitiondu chômageet
une revue des sources, l'auteur choisit, pour atteindreà la
relationentre le chômageet le facteur professionnel,d'étu-
dier les donnéesdes recensementsprofessionnelsrécentsde
Franceet d'Allemagne il en tire des sériesde coefficients du
chômagepar industries, qu'il compare,par des procédéssta-
tistiquesdont il a faitla critique, d'un recensementà l'autre
E.Duniiiigiu.AitiR-o soeiol.,1900-1109. 4$
-06 19UIMUÛ0
l/ASNBB«OCIOUKHOtHC.

dans le même pays, puis entre tes quatre recensements dos


deux pays. Nous n'avons pas la place d'analyser et de discuter
cette élaboratiou et ces résultats en détail. Nous ne pouvons
se à
que noter brièvement quelques points 1° L'étude limite
des corrélations statiques. Or nous croyons les relations dyna-
miques plus propres, sinon nécessaires à l'établissement pro-
bant d'un lien causal. – i° Ce n'est point par professions,
mais, eu lait, par industries et groupes d'industries que l'au-
teur établit ses coefficientsde chômage. – 3° Tout ce que ses
constatations peuvent, au mieux, établir, c'est qu'il se mani-
feste par professions une certaine constance (au moins rela-
tive.)du coefficientde chômage mais elles n'établisseul pas,
ipsofacto, une influencede la profession sur le chômage; la
moyenne des pluies par département est certainement assez
coustante et diflérentielle cela n'autorise pus à conclure à
une influence des départements sur la pluie. 11 y aurait donc
eu ici intérêt, croyons-nous, tant pour formuler eu rigueur
ces résultats mêmes que pour eu tirer ultérieurement le parti
corré-
qui convient, à distinguer avec soin eutre la notion de
lation et celle d'influence. – 4° Et enfin, cette étude n'est,
malgré les chapitres terminaux où l'auteur nous ouvre des
d'un tra-
perspectives fort intéressantes, que la première part
vail scientifique complet c'est la mise au point et l'aualyse
des données; il reste à en faire l'interprétation, à rechercher
les causes vraimentexplicatrices des régularités dégagées par
cette analyse. C'est cette seconde part que nous attendons de
l'autour, et qu'après uu premier travail aussi considérable
et aussi propre à une utilisation scientifique, il se doit de
nous donner. S'il est vrai, et c'est là sans doute le résultat
très intéressant bien établi par le présent travail, – que le
cadre de la profession ou plutôt de l'industrie soit particu-
lièrement propre à permettre d'apercevoir et de dégager les
facteurs explicatifs du chômage, M. L. se doit et nous doit
de montrer toute la fécondité d'une étude ainsi instituée.
F. S.

BEVERIDGE(\V. II..I. – Unemployment. A problem of


industry. London, Longmans, Green a. Co, 1909, xvi-
318 p., in-8'.

Ce livre est celui d'un homme mêlé à l'action et préoccupé


de fins pratiques, mais qui n'est cependant pas étranger ni
indifférent aux recherches de science proprement dite, et
litAÎ KT laÉlittNTÇ DE I.A BB>AirïfTION 707

mêmo semble apercevoir assez bien qu'une pratique, pour


être efficaceet sûre, doit être rationnelle, et, pour être ration-
nelle, doit être fondée sur des résultats de science. Son
apport à l'étude scientifique du elipuingn ou de ses causes
n'est donc pas négligeable et a le mérite d'être établi par des
analyses ou discussions soucieuses de se fonder ou de
s'appuyer sur des faits, ou tout au moins de rester en contact
avec eux et d'y chercher un contrôle. Le seul regret est, au
point de vue scientifique, que la préoccupation d'aboutir à
des conclusions d'application presse trop sur la recherche et
semble, en des points décisifs, par exemple lorsqu'il rejoint
d'autres théories plus larges encore, arrêter l'autour de pour-
suivre ou d'approfondir son investigation et d'atteindre à des
vues plus réellement explicatives. M. B. part de la thèse
très répandue attribuant le chômage à un manque général
d'ajustement entre l'offre et la demande de travail il l'écarté
en ne trouvant vérifiées, en fait, ni telles hypothèses ni lelles
conséquences que cette thèse comporterait. li est donc ramené
à considérer le chômage seulement comme un manque spécial
d'ajustement entre l'offre et la demande et, après avoir exa-
miné les sources d'information dont il peut disposer pour
une discussion par les faits, il étudie successivement les
causes auxquelles ce manque spécial d'ajustement a été ou
peut être assigné variations saisonnières, variations pério-
diques (expansions et contractions ou crises) daus l'activité
industrielle, présence d'une réserve de travail ouvrier, perte
ou manque de capacité technique, et enfin facteur personnel.
La thèse à laquelle il s'arrête, et qu'il fait sienne par une
extension ingénieuse et intéressante, est qu'une réserve de
travail ouvrier est, dans toute industrie, toujours existante, et
que, si elle est plus spécialement mise en évidence dans telle
ou telle, les conséquences que ce fait engendre se retrouvent
partout, partout où il n'y a pas une attribution méthodique
des travailleurs disponibles aux besoins manifestés de l'in-
dustrie. Et il part de là 'pourpréconiser, au point de vue pra-
tique, une organisation systématique du placement, comme
étant le remède essentiel aux inconvénients qu'entraîne cette
irrégularité d'emploi pour les ouvriers ou au moins pour
ceux d'entre eux qui y sont soumis. Mais cette thèse nous
parait, au fond, être une constatation plus qu'une explication
du phénomène et il resterait toujours à découvrir pourquoi
le système industriel présent comporte ce surnombre
pour
1
708 l/ANNliB 1008-1909
SÛCIÛUOOIQVJE.
ainsidirenormal,en tout cas toujoursexistant, dans la main-
d'œuvre.Ettaut que cette recherchen'est pasaccomplie,les
remèdesles plus ingénieuxne sont toujoursque de l'empi-
risme. F. S.

ÛUHEL(Franz). Zur Lehre von den Beduerfnlssen.


TheorelischeUutersuchungenüber dos Orenzgeblotder
Oekouomik undder Psychologie.Innsbruck,Wagner,190",
xxiv-320p., in-8°.
Unethéoriepositivedes besoins,dupoint devue de l'écono.
mique,. nous serait très nécessaire, immédiatementpour
l'étudemêmedes phénomènesessentielsde la répartition,et
médiatementaussipour l'étude de la productionà son terme.
La matièrequecettethéoriedevraitélaborerserait à chercher
dans touteslesdonnéesque nous pouvonsretrouverou rece-
voir, et que nous recevonsde plus en plus nombreuses,sur
lesconsommations et le mouvementdes consommations,sur
l'emploides revenuset les variationsde cet emploi, sur les
budgetsde ménage de différentes catégories sociales, de
diversessociétés,sur les tendanceset les habitudes qui s'y
rapportentet leur variation,etc. Par sa nature, cette théorie
atteindraità la frontièrede la psychologiesocialegénérale,et
se situeraitainsi,sansdoute, parmiles théoriesdominanteset
les plus explicatricesde toute la sociologieéconomique.La
théorie des besoinsque nous présente M. C. procèded'un
souciet d'un esprit tout diflérentset, en dépit du sous-titre,
n'a à peuprès rien de communavecce que nous concevons
sous ce nom. Pour cet auteur, la science économiquene
parait guère exister autrement qu'avecla méthodeet dans
les spéculationsillustrées par l'école autrichienne et c'est
exclusivement dans le sens de ces travaux, par des analyses
de concepts,par une psychologied'introspection,par des
distinctions,classificationset discussionsidéologiques,qu'il
traite sonsujet. Il y déploie, du reste,des qualitésd'analyse
et y montre une information assez variée qui rendent ce
livre assez intéressant en lui-même mais nous n'avons
guèreà en retenir ici. F. S.
w
PERSONS
(WarrrnM.).-The variability lu the distributionof
wealthand income.Quart.J. of econ.,mny1909,p. 416-440.
desméthodes
(Discussion deLorenz,Pareto,Watkins et exemples.)
KTATKTKI.KMBNTS
DELAHKPAnTITIOX 709
UNDEHWOOD (Jus.IIaudi.nu). The distribution of ownership.
NewYork,Macmillai), 1908,-219p., in-8".
IIOBSON(J.-A.).– The Industrial System-An cnquiryinlu eur-
nedunclunearned iocome-.kondon,Longmans, 4909,328p., in-8».
WATKINS (G.-P.). –The growth ôf large fortunes. A sludy of
économiecausesalîectingthe acquisitionunddistributionof pro-
perty. NewYork,Macraillan,1901,iv-170p., in-8>(Travailappré-
cié).
LAVEUGNE (A.m) et HENRY (PaciJ. La richessede la France.
Fortune et revenusprivés.Puris, Rivière,11108,
xiv-2l0p., iu-8».
MICHEL(Kdmonu;. La propriété. Évaluation de la fortune
privée. Enquêtesur la propriéténon batteet bâtie. Enqueteogri-
oole Paris-Nancy,Berger-l.evrauU,'
1908,vi-338p. gr. in-8"(Réu-
nionet analysede faits nombreux,dont certainsinédits).
IIEJCL(Johann). – Das alttestamentllohe Zinsverbotim Lichte
der ethnologischenJtiHsprudenzsowiedesallorioiilahsclien
Zins-
weseus.Freibg.i. B., Uerder,1007,viu-98p., in-8°.
KNGI,A[-UER (Oscah).- Zur Theorie des Produktivkapitalzin-
ses. Hallea. S., Niemeyer,1909,m-188p., in-8".
ItOitTKlEW1CZ (L.von) DerKardinalfehler der Boehm Bawer-
kschen Zinstheorie. Sckmoller's Jhb., 1900,p. 61-90(Contreditt
toute la thèsede iiôlimBuwerk).Voirla réponsequi y a été faite
et la réplique Oswalt (B).,Zur Zinstheorie.I. Zusohrlft von
BanTKiKwic7.,II.Kntgegnung. Ibid.,1907,3,p. 363-370et 370-385.
BOEIIM-BAWEIIK (E.). Oapltal and interest onoe more. I,
CapitalversusCapitalgoods;II, Arelapseofthe productivitytheo-
ry. Quart.1. of.econ.,XXI,nov. 1900,p. 1-21etfeb.1907,p. 217-282
(Contrela théorie assezspécieusede Clarkque H. B. accuse de
retomber dans la théoriede la productivité). Réponse Clark
(JohnBâtes).Oonoerning the nature of capital a reply, ibid.,
XXt,may 1907,p. 351-370. Héplique:BornmUawbhk(E).,The
nature of capital a rejoinder,<6frf.,
XXII,nov. 1807.p. 28-47.
TAUSSlli(F. W.). –Capital, interest anddiminishing returns.
Quart.J. of. econ.,XXII,may1908,p. 333-362.
JOHNSON (AlvisS.). The relation of monopolyprioe to the
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KREZOULS (P.). La thôoriede la rente. Montpellier,Firmin,1908,
'iOHp., in-8°(Surtouthistoiredes doctrines,etthéoriedans la mé-
thode traditionnelle,1.
710 l.*ANNéB 4006-1909
SOGIOLOOIQI'B.
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lungslenre. I. II. Sclunoller't Jltb., 1M07,i, p. 31-0(jet 2, p. 153-190
(Cf. l'ouvrage recensé plus haut, sect. I).
CARI.TON(Fhank T. ). –The rent concept, uarrowed and broade-
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CONRAD(Orro). Lohn und Rente. Leipsig-Wion, Deuticke,


• 1909, v-850 p. ,iu-8°.
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mais la théorie n'eu résulte pas).

LEVASSEUH(E. – Causes déterminantes du taux des salaires.


Rev. d'iicon. pol., 1008, p. 721-7U8(Repris dans l'ouvrage reccusé
plu» haut).
SPËRLIXG (Kiuch; Arbeltslohn Bntwioklung in Handwerk
und Industrie. Thttncn-Àrchie, 100", 3, p. 305-810 (d'après des
faits nombreux réunis sur Hostoek;.
WAXWKILEI1(1ÎHU.K'.– Sur le oonfllt des évaluations dans le
débat du salaire. lier, d'deuu. poi, iy09. \>.!>tH-!i95.
LINCOLN(Jiixathax Thavkr;. – The sliding scale of wageslntbe
ootton industry. Quart. J. of. econ. XXIII, rnay 1000, p. 450-409,
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seit der BegrOndung desdeutsobenReiabes. iierlin, U.Heimer,
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les diverses industries).
BRKNTA.NO(Lrj»} Versuob einer théorie der BedOrfhisse.
Mfinchen, Franz, 1908, 79 p., in-8°.
IfAISS (Cr..). -Die Arbeitszeit der Angestellten und Httlfear-
beiter in den Kontoren Deutsohlands. Schmoller's Jhb., 1U0U,
i, p. 320-380.
HSLATIOXS
AVBC
Mis«HSNOUK.NKS
.NON
fUjOJÎOJHUUgiS
7U

X. RKUT10SSKNTftK
I-ESPHÉNOMÈNES
ÉCONOMIQUES
KTLUSMUÎNOMKNES
SOCIAUX
IVAUTRK
CATliOOHJK

Nous modifions ainsi la rubrique de In section que nous


avons précédemment intitulée Action de l'État sur la cie éco-
nomiquetel où nous comprenions spécialement, d'une part, la
Législation et politique du commerce international, d'autre
part, ta Législationdite ouvrière ou sociale», a(iu d'en élargir
le champ comme il parait convenir, et d'y ajouter, à l'étude
des conditions d'ordre politique posées à la vie économique,
l'étude, s'il y a lieu, des relations que peuvent soutenir, avec
les phénomènes économiques, d'autres sortes encore de phé-
nomènes sociaux, phénomènes religieux, moraux, etc.

FOUILLÉE /Ât-FtiED). – Le socialisme et la sociologie


réformiste (Bibliothèque de philosophie contemporaine i.
Paris, F. Alcau, 1909, vtti-419p., in-8-.
« Nous voulons montrer, dans ce livre, déclare l'auteur au
début de sa préface, que la sociologie doit dépasser les deux
systèmes adverses de l'individualisme et du collectivisme:
il eu faut réunir les vérités en une large synthèse, au moyen
de principes plus élevés. Parmi ces principes, il en est deux,
sur lesquels nous Insisterons davantage l'idée A'argmmwe
contractuel, et l'idée de justice riparative. » L'ouvrage de
M. Alfred Fouillée est constitué par le développement de ces
deux idées, concurremment avec la critique de l'économisme
individualiste et surtout du socialisme. Le livre premier fait
connaître les fondements de la sociologie réformiste que
l'auteur oppose à la fois à l'éconoinisine et au socialisme; il
contient la critique du matérialisme historique, de la morale
socialiste, de la « déclaration socialiste des droits ». droit au
travail, droit auproduit intégral du travail, droit a l'existence.
Le livre H discute la conception socialiste de la justice et de
l'utilité sociale dans In production; le livre Ifl les théorie» de
la valeur de Marxet d'Effertz et plusieurs théories socialistes
relatives à la-population, à la guerre,à l'État, etc.; le livre IV
le communisme, le droit de propriété, le droit d'hériter et de
tester.
Nousn'entrerons point dans le détail de ces discussions. La
7(2 !ANXIÎESOCIOI.OOIQUK,
1900-t'JO!)

réflexionde l'auteur, qui vaut par elle-même,est nourrie


d'élémentstirés de très bous ouvragesde sociologie,de cri-
tique, d'histoire.Toutefois,la documentation,
qu'oùn'est pas
surprisde voir ici de secondemain, n'est pas complètesur
tous les points, et l'on pourrait opposerà l'auteur ou des
aflirmatiousdoctrinalesde textes socialistesqu'il n'a point
cités, ou des réalitéspositivementétudiéesdans des travaux
auxquelsil ne s'est point référé.Cequ'il a mis à la place,ce
sont desformulesetdesopinions,souventIntéressantes,mais
auxquellesnous pouvonsreprocherden'être point conformes
au titre et à l'intentiondo l'œuvre.Cette œuvreveut être
sociologique,d'une volontéferme,qui s'appuiedu moinssur
certainsrésultatset sur certainstravauxdesociologie,et qui
conduitle livre, par un courantde doctrinepersonnelle,à des
conclusionspositives,d'une précisioninégaled'ailleurs,ainsi
qu'onpouvaitle prévoir.
Par ce qu'il y a de plus net dans cesconclusions,M. F. se
trouveen accordà lafoisavecla sociologieoudu moinsavec
les résultatsde travauxqui s'iuspirentdesa méthode,et avec
le socialisme,ou du moinsaveclesidéesde théoricienset de
groupementssocialistes.La question sociale, dit-il, étant
chosed'expérienceetde sciencepositive,l'expériencemontre
un double mouvementd'individualisationet de socialisation.
j Entre ces deux mouvements,il n'y a pas contradictionet le
chocn'est pas nécessaire.Pourla pratique,la sociologieréfor-
miste aborde l'examende toutes les réformessans aucune
prévention.Onpeutdéterminerpar inductionuneformed'or-
ganisationdu travail « qui soit compatible la foisavecle
mouvementde socialisationet avecceluid'individualisation».
Cesera uneforme«d'associationlibreetde librecoopération»
(p.309),dont l'ossatureseraconstituéepar l'organisationsyn-
dicale,l'organisationcoopérative,l'organisationéconomique
et solidaristedes communeset de l'État. Et l'ouvragese ter-
minesur une vue harmoniquede la sociétéde t'avenir.
H. B.
WARSCHAUER (Otto;. Zur Entwioklnngsgesohichte
des Sozialismus. Berlin,Wahlen,1909,xvi-403p., in-8*.
Celivrene répondpas à son titre. Cen'est pas une contri-
butionà l'histoirede l'évolutiondu socialisme;c'estla juxta-
positionde trois monographies Saint-Simonet lesaint-simo-
nisme Fourier, sa théorieet son école; LouisBlanc.A vrai
ÉCONOUIBS
SPÉCULKS 3
713
dire, ni le choix de ces théoriciens, ni l'analyse des doc*
trines, ni l'histoire des écoles, ni la critique des théories ne
satisfont pleinement à ce que la sociologie pourrait attendre
d'un pareil ouvrage. Mais il vaut par la probité de la docu-
mentation et de l'exposition. H. B.

MAl'XJKR(ltoft).– Viereligieuse et vie économique. Ludivision


du travail. Paris, GinnletUrière,broch.in-8".
THIELE(Ottomah).–'Ueber wirtsohaftliohe Bewertung ethno-
logisoher Forsohungen mit besondoreritOcksichtnuf die ûko
nomischenBeziehungeader Ethnologiezur Industrie. TQbingen
Luupp.,1900,VU-S5 p., in-8".
STAUDIXGBR (Fiuxx) WirtsehaftlioheOrundlagen der Moral.
Darmstudt, Ha-tlie,1907,in-8».
HUSSEU.(ëdymA.). Ethics and prlnoiples of salesmansbip.
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FONTANA-RLSSO (L.). Traité de politique oommeroiale. Tra-
duit. p. FélixPoli. Paris,(Jiardet Brièrc,1008.in-8°.
a
IIAHMS (Behnhahd). Der Maximal-Arbeitstag. Vortrag.Tübin-
gcu, Laupp,1907,51p. in-8".
11UOADUEAD (Hbnrv).– State regulation of labour and labour
disputes in New Zealand. A descriptiona. criticism, London,
Witcomba. Tombs,1908,230p., in-8°.

XI. KCONOMIKS
Sl'KClALKS
ParMM.G.Bouniiix,
Il. Uoi-rgin,
vt K.Siuux-d.

MARTIN (Gebmai.niet MARTENOT(Paul). La Côte-d'Or.


Etude d'économie rurale (Contribution à l'histoire des
classes rurales en France au xix*siècle). Dijon, Damidot.
Paris, Champion, Rousseau, 1909, xiv-u72p., in-8".
Cetravail se rapproche, au moins au départ, des travaux de
7H L'ANNÉE 1MMM909
KOCIOLOGIQim.

géographie humaine régionale qui seront étudiés plusloiu il


commence par traiter du climat et de lu géologiedu pays dont
on veut étudier l'économie rurale; et à la vérité, personne ne
niera que, dans l'étude d'uue agriculture, ce soient là des eondl-
tions à considérer. Mais le plan et les intitulés seuls des cha-
pitres muuifestent ensuite aussitôt qu'il est, dans son dessein
et danssa portée, surtout travail d'économiste. C'estd'abord un
expose des espèces depropriété etuue recherche, par sondages,
sur l'extension relative de la grande ou de lu petite propriété;
puis une étude développée des modes d'exploitation, des
modes de culture, une analyse du rôle du capital dans l'agri-
culture (notamment rotation de ce capital) et des diverses
branches de la production. Une troisième partie traite du
poiut de vue commercial (vente des produits agricoles, vente
des bois, et une étude plus géuéralo des relations entre la
transformation du marché, la formation du prix, et la valeur
des terres). Dan»une quatrième partie, sont réunies une étude
de la coopération et des syndicats agricoles et une étude
descriptive de la condition des agriculteurs (habitations,
mœurs, autres professions, salaires des ouvriers.). Une
conclusion à la fois aiiU-iuterventiouniste et optimiste u'ùte
point, par son caractère un peu subjectif, à cette monograpbie
très élaborée sa valeur et son utilité. F. S.

MUELLNKRiAlfons). – Geschichte des Eisens inlnner-


Oesterreich von der Urzeit bis zum Anfange des XIX.
Jahrhunderts. Mit besouderer Berûcksichtigung der oko-
uoinisclien, sozialeu uud haudelspolilischeu Verhiilluisse
sowie des Eisenhaudels nacli samtlicheu europiiischeu
L/indern, der Levante und Xordafrika. 1. Abt., Kraio, GOrz
uud Istrien. Wien u. Leipzig, Halm u. Uoldmann, 1909,
ix-763, p. in-8».
La première partie de l' Hixtniwditfer de M. Mûllner montre
qu'il y a un minimum de préparation méthodologique auquel
doiveut satisfaire ceux qui entreprennent de semblables tra-
vaux. Cette histoire est limitée par le titre à l'Autriche jus-
qu'au début du xi.Vsiècle; maisla première partie, consacrée
à la Carniole et à l'Istrie, remonte, par une introduction de
caractère général, jusqu'aux origines de l'industrie du fer en
Egypte et en Chaldée.
Il y a dans ce gros volume une érudition admirable, ou
ÉCONOMIES
8PÉCUr.KS 7(8

plutôt étonnante, car elle est aussi hétéroclite que copieuse,


et s'étend à tout ce qui touche par quelque point au sujet.
L'énorme substance du livre n'est pas classée, mais répartie
en plusieurs compartiments inégaux entre lesquels déborde
la matière historique, technologique, juridique. Les digres-
sious et les discussionsparcellaires sont multipliées. Aucune
démonstrationn'est tentée des ra res phénomènes économiques
qui surgissent avec quelque clarté de ce fatras.
Faut-il considérer ce livre comme un regeste de faits utili-
sables par la science? Cela même est douteux car, si la
recherche n'est pas dirigée par la réflexion sociologiqueet par
lesouci expérimental, elle peut passer à côté des faits topiques
en ne recueillant que des curiosités. 11y a dans ce volume
plusieurs centaines de pages dont le sociologue n'a aucun
parti à tirer, mais telle proposition qui tient ici deux ligues
pourrait provoquer des recherches étendues. H. B.

J. LETACONNOUX. – Les subsistances et le commerce


des grains en Bretagne au XVIir siècle. Essai de
monographie Économique. Hennés, Oberlliur, 1909, iu-8",
xxxvn-896p. et 3 cartes.
L'Essaide M. Letacouuoux repose sur une vaste documen-
tation inéditeet constitue un travail tout à fait consciencieux;
la localisation géographique de cet Emit est d'autre part légi-
timée par la relative autonomie économique de la Bretagne
sousl'aucifn régime, Il y a cependant des parties assez faibles
dans cette monographie, et tout d'abord la première, où, en
étudiant les « conditions de la production », M. L. donne de
l'agriculture bretonne un tableau sans originalité, encore
qu'assez long, et où il parvient fort médiocrement à détermi-
ner l'origine de la surproduction des céréales qui seront
l'objet du commerce même. Ce commerce se présente sous
deux aspects le commerce intérieur, commerce d'approvi-
sionnement, dont les blaliers sont les agents, en procédant à
des achats auprès des petits producteurs et en vendant sur un
marché local très réglementé; le commerce extérieur, com-
merce d'exportation en gros, pratiqué par les négociants et
les grands propriétaires. Mais M. L. n'étudie pas ce commerce
lui-même il l'étudié à travers toutes les prescriptions régle-
meutaires, locales et générales, qui interviennent dans le
fonctionnement du marché, et dont, à plusieurs reprises, il
7t6 L'ANNÉE 1906-1909
SOClOLOlilyl'R.

nous assure que personnene tenait grand compte. Tout ce


qu'il dit de la capacitéd'achatdes consommateursbretons
est peu démonstratif;car il ne uousdonne pas d'indications
numériquessur les salaires,touten insistant sur leur médio-
crité, etnefournitdes renseignements sur le prix du pain que
dans un chapitre très éloigné,de sorte que la comparaison,
cependantnécessaire,entre les prix et les salaires, n'est pas
faite où il faut. Il réduitlu causedes variationsconsidérables
qu'au cours du xviii*siècleont subies les prix des grains à
l'iucertitudedans laquelleles contemporainssetrouvaientau
sujet de l'approvisionnement des marchés c'est une repré-
sentationqu'il ne justifiepas, croyant la justifier cependant
par les faits nombreuxqu'il donne sur le mauvaisétat des
routes, l'accaparement,les manœuvresdes blatiers et des
meuniers. L'étude du commerced'exportation est moins
pousséeque celledu commerceintérieur; ici, M.L. a su fort
bien montrer que t'organisationdu commerced'exportation
est liéeà l'existencedela grandepropriété religieuseet nobi-
liaire les redevancesen nature centraliséesentreles mains
des grands propriétairesconstituaientdes stocks d'exporta-
tion, sur l'importance desquels, toutefois, en raison des
fraudesdetoute espèceen usage,on n'a pas de renseignements
numériquesbiensérieux;maissi laconstitution de ces stocks
a cette origine purementjuridique, toute une partie de
l'introductionsur lesconditionsde la productionen Bretagne
sembledèslors bieninutile,puisque c'est par le seul jeu des
règles féodalesque paraitse constituerl'excédentde céréales
propresà l'exportation.Je laissedécote la quatrième partie
de l'Essaide M. L. c'est une série de chapitres à tiroir, où
l'auteur a accumulésurle « Régimedu commercede grains»,
sur les « Transports», lesIlPoidset mesures», les« Droitsde
circulation», des faitsdéjàutilisésdans les précédentespar-
ties, ou des faitslaissésjusque-làde côtécommetrop menuset
sans valeurdémonstrative. Ai-joraison, au demeurant,d'em-
ployercederniermot?L'Emiide L.reste une bonnemono-
graphiedescriptive;sur trop de points, l'auteur passeà cOté
des explicationspossibles,et, en négligeantde rapprocherles
phénomènes,il ne dégagepas les lois, qui permettraientd'or-
ganiser desmatériauxd'allurecontingente,variableet locale.
G. B.
WENCKSTERN (Hersuxxvos).– Exlstenz-Bediugungeusess-
hafter Landaxbeiter.I. (l-andwirtschafilicheAbhandl.des 1ns-
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SCKCIAI.BS 7(7
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(Hich.vhd
tanien, Frankreiob, Preussen. Leipzig,Hirschreld,1008,2 vol.,
in-8".
SIXIÈME
SECTION
MORPHOLOGIESOCIALE

I. BASKS DRLAVIESOCIALE
UéoaiUl'IHQUKS
ParMM.M.Uaibwachs
et F.Swuxo.

RATZEL(Fhikdrich). – Raum und Zeit in


Geographieund
Geologie. NaturphilosopliischeBetraelituugen.Leipzig,
JohanoAmbrosiusBarth, 1907,vnt-177p., in-8».
Cet ouvrage, où sont fondues, avec quelquesanciens
articles de revue, les notes du dernier cours professépar
Ratzel (1004),traite de l'importanceet du développement
progressifdesnotiousd'espaceetde tempsdanslessciences
c'est dire que la méthodede la géographie,en particulierde
l'anthropogéographie, n'est envisagéede ce point devue que
dans quelquespassagesdispersés mais il est intéressantde
reconnattrecommentses conceptions,touchant ces études
sociologiques,se rattachaientdans sa penséeà un système
d'idéestrès général.
La représentationdes choses dans l'espaceest bien une
nécessitéhéréditaire; mais, contrairementà ce qu'affirme
Kant, elle a évolué,et il est intéressantde noter en quel
sens. Déjàla pensée originellese représentel'espacecomme
large, libre, étendu « fairede l'espacesignifie défricher;
d'autre part, on ne conçoitpas l'espacecommedistinctdes
choses,si bien que l'étendue de nos représentationsspatiales
est en rapport direct avec le progrèsde notre connaissance
de la terre et du mondesensible. – Les découvertesde Co-
lombet deCopernicnousédifièrentsur la petitessedela terre
et la grandeurdu monde la mesuredes distancesde la terre
au soleil,et aux étoilesles plus éloignées,modifiaprofondé-
ment nosconceptionsgéographiques,en permettantde rat-
tacherla terre au monde.
UA*K»UÊoqiUWIIOUBi 1)8 U V|g ÏOUIAU. 12|

L'isolementcaractéristiquedesprimitifs,qui limitaitaussi
leurs conceptionsspatiales,s'expliquepar les lois de l'évolu-
tion. On remarquequ'en dehorsdes obstaclesréels formeet
distribution des régions, des lies, climat, etc., un instinct
inexplicablefait que les animauxou les hommess'arrêtent
devantdes barrièresqu'ils n'auraientpasde peineà franchir.
L'occupationcomplètede la terre est un phénomènetout
récent; les groupesd'abordéloignés,en se multipliant, se
sont disposésen une zoneétenduede peuples voisinsou en
contact,tout autourde la terre c'est à l'intérieur de
l'espace
ainsidélimité,sur des domainescontigus,que les hommesse
sont multipliés.La où des mouvementsinternes ne les met-
tent pas en relationsautant qu'en Europe, l'importancede
l'étendue territorialeest demeuréegrande au point de vue
politique là Ornaislà seulement)l'espace occupé, et le
nombredes habitantsdécidentde la puissanced'un
peuple.
Il y a des loisquiexprimentl'influencedes conditions
spa.
tiales sur le progrèshistoriquedes peuples.On en a douté,
parce que l'évolutionobéit aussià des tendances Internes,
qu'on ne peut détermineravecautant deprécisionque l'éten-
due du sol occupé,et dont l'actionse mélangeaveccelle des
circonstancesextérieures.Maisjustement, si la vie est en
mouvement,laterreest immobile ellejoue le rôle du cadran
sur lequel courentles;aiguilles,elle permet
d'appliquer la
mesurea l'évolutionhistorique.Delà troisgrandes catégories
de « lois spatialesde l'histoire» 1°Latoi des
espacescrois-
sants. Nous relevons,sur la terre, les traces et les délimita-
tions successivesdes peuplesancienset nouveaux,des états
et des villes Unequantitéde faits mesurablespermettentde
reconstituerla « série » despeuples,des petits états anciens
et des grands états modernes.Or, il apparaît
que l'origine
d'une grande famillede peuplesdoit se chercher dans de
vastesespaces;le « refoulementd'un peupleest le signede
son déclin. Une loi généralede la vie veut que certaines
espècestrouventleursalutdans l'étenduede l'espacequ'elles
occupent.2" Les lois de la situation(Lagegesetze), en parti-
culier la loi de « la séparationdans l'espace». L'observation,
en des régionsvoisines,d'espècescorrespondantes
(slellver-
trotend) indiqueque la migrationde l'espèceuouvelle,et sa
séparationde l'espècesouche,est souventune conditionde
sa subsistanceet de son progrès;elle échappeainsi à la con-
curreucede l'espècevoisine,se nourrit mieux son isolemeut
E. DriuuiBiH. Anniinsocial.. J906-I90!). «
72-1 l'an.nkb sociomhhqvb.ttt06-tsoo
lui permet aussi de fixer mieux ses caractères par l'hérédité.
C'est uue limitation a la lot de sélection naturelle: car, ainsi,
même les moins bien doués peuvent subsister. 3" Les lois
générales du mouvement des êtres vivants. Elles résulteraient
en partie de l'étude géographique des relations humaines.
On constaterait qu'une accélération, en un point quelconque
du grand système des voies de circulation, entraîne uue accé-
lération sur toutes les voles qui s'y rattachent (Harmonie des
Verkehrs), en tenant compte naturellement de la diversité des
conditions et des vitesses antérieures. Cen'est d'ailleurs qu'un
aspect de la tendance aux mouvements toujours plus rapides
qui se retrouve dans toute l'histoire.
Ce qui est intéressant ici, comme dans ses autres ouvrages,
c'est l'effort tenté par R. à la fois pour élargir et définir
les cadres de la géographie. L'expression de « lois spatiales
de l'histoire » est sans doute à critiquer; mais R. a bien le
sentiment que, dans la suite des faits étudiés par les histo-
riens, il y a lieu de retenir pour les rattacher à la géographie
ceux qui témoignent d'une action du sol sur les groupes,
qu'il «'agisse de l'étendue de leur territoire, du sens, de l'im-
portance et de la durée de leurs migrations, des formes de
leurs élu hlissetnents.Peut-être le rapprochement, à ce propos,
de la méthode des géographes, et de celle des géologuesou
paléontologues, préte-t-elle toutefois à uue confusion; et,
plus généralement, on peut se demander quelle raison il y a
d'appliquer à toutes ces sciences le nom de sciences histo-
riques. et deleur reconnaître il toutes, comme trait commun,
l'importance de premier ordre qu'elles attachent à la succes-
sion et à la durée des temps. Mais si la géographie, en parti-
culier l'anthropogéographie, doitétre autre chose qu'une pure
description, si elle veut expliquer scientifiquement, il faudra
bien qu'elle se soumette à la loi commune des sciences, qui
est de faire abstraction, dans la plus large mesure possible,
des circonstances de temps où se produisent les phénomènes.
Expliquer la genèse d'un groupement, d'un état, d'un pays,
ce n'est pas en raconter toute l'histoire, mais en montrer le
rapport avec des conditions, des forces qui ne sont pas
uniques, qui se sont répétées et peuvent (théoriquement au
moins; se reproduire. De ce point de vue, les questions d'ori-
gine et de chronologie apparaissent tout à fait secondaires. –
Ce qui eût été bien intéressant, mais qui n'est ici qu'à peine
suggéré, c'était de déterminer plus exactement les caractères
«ASI5SOKOOttAl'HlQUÏS
DU I,K VIE SOCIALE 1)Q

•de la représentation de l'espace chez les primitifs, et l'évolu-


tion réelle de cette notion. Ils considèrent l'espace comme
infini, nousdit R. mais en quoi cet infini diffère-t-il de celui
que nous ont rendu familier les cosmograpues et les mathé-
mutiuieus ? Ils n'uttribuoiit pas à l'espace uue existence dis-
tincte de celle des objets qui s'y trouvent mais ce n'est pas
dans le même sons que Leibniz ou Haut, sans doute il y a,
dans cette notion primitive d'espace, tout un ensemble d'élé-
ments affectifs, qui se retrouveraient dans les premières con-
ceptions géographiques des hommes, et dont l'étude consti-
tuerait tout un chapitre important d'une psychologie sociale
génétique. il. II.
DEMANGEON(Albert). La Picardie et les régions voi-
sines. Artois, Cambrésis, Beauvaisis, Paris, Colin, IMS,
496 p., in-8».
BLANCHARD(Raoul;. – La Flandre. Étude géographique
de la plaine flamande on France, Belgique et Hollande.
Paris, Coliu, îaOO,x-530p., iu-8u.
VALLAUXfC.\Mur.B). – La Basse-Bretagne. Étude de géo-
graphie humaine. Paris, Société nouvelle de librairie et
d'édition (Cornély), 1907,820 p., in-8".
VACHER(Aktumk). – Le Berry. Contribution à l'étude
géographique d'une région française. Paris, Colin, 1908,
548 p., iu-8°.
SION (Jules). -Les paysans de la Normandie orientale.
Pays de Caux, Bray, Vexin normand, Vallée de la Seine.
Paris, Colin, 1909, vm-544p., in-8u.
La rénovation des disciplines géographiques à laquelle
nous assistons, tout spécialement l'institutioirUe cette disci-
pline à grandes ambitions11 qui se dénomme, eWe-mémegéo-
graphie humaine, mériteraient ici, de notre point de vue, une
étude générale que le cadre de ce compte rendu ue comporte
pas. Nous voulons seulement, à propos de quelques-uns des
travaux récents de géographie régionale française-, examiner
1. Cf.parl'iemplrJi-imliniulii's,Qu'etl-ctque la yéoQritpliir hunmiite't
DansluSuisse<!i:onomiqup, Lausanne, l'uyul,1908, \i.2i:t-2.">0.
i. Cf.aussi J)«Fi>lk«Haoal,ImIluxxe-Sormandie, l;.linli>
<]>>
ui*>nm\ii\w
ri'Kiuualf, i«U".– U'vninvilli-
l'ui-U,ÎJaclii-tte, 4.1,Le Munun,
i(.'U|iituiiu.-
Eturk-de gi.;ugru|ilMO 1909,<-tr.
huinaini',l'uii>,Colin,
72* I-'aSSÈBK0C1OI.0UIQUB.
1900-1909
brièvementquelle est la natureexacte des faitssur lesquels
les géographes,auteursdeces travaux.fontporter leurétude,
quelleest, en fait, In consistancevéritabledes explications
qu'ils nous présentent, et quelle est enfin lu valeur scienti-
fiquedu cadre qu'ils ont choisipour les étudier.
L'ouvragedo M. Demangeonsur la Picardiea été, à juste
titre, considéré commeun prototype.L'auteur s'y propose
d'étudier, dans une région géographiquement définie (cette
définitionest l'objetdu premierchapitre))les rapports de la
nature et de l'homme. Une moitié du livre environ est
d'abordconsacréeà l'étudedesconditionsphysiquesde cette
région, géologiques(formationgéologique,relief, sol, sous-
soi,etc.), climatériques(vents,température,pluie,etc.), hy.
drologiques(régimedeseaux,nappes,coursd'eau,côtes,etc.). ¡.
Danslerestesesuccèdentdeschapitressur l'agriculture(amé-
nagementdu sol, cultures, bétail.), les industries (espèce,
développement,répartition), le commerce(et les voies de
commerce),l'établissementhumain(régimesde la propriété,
exploitations,–habitat, maisonset agglomérations),la po-
pulation(répartition,mouvements)et enfinles divisionster-
ritoriales(les « pays » et leurs limitations). L'ouvragede
M.Blanchardsur la Flandre, pour le choix,la distribution
et l'importancerelativedes matières,suit,.– bien entendu
avec des particularitésde développementappeléespar les
particularitésde la région, à peu près trait pour trait le
précédent(aveccette seule différenceque l'auteur, ici. trou-
vant que la régionembrasséedans sa recherchese diviseen
réalitéen deux, Flandremaritime,Flandreintérieure,rompt
l'unité de son étude pour la dédoublerà peu.près toute en
deuxsuitesdistinctes).– Dansl'ouvragede M.Vallauxsur la
BasseBretagne,expressémentqualifiéen soustitre d'« Étude
de géographiehumaine», l'étudeproprementphysiquen'oc-
cupeplus que l'introduction(soit une cinquantainede pages
sur plus de trois cents), et le livre lui-mêmes'augmente
d'étudessur diversescatégoriesde fails, mœurs,croyances,
langue, par exemple,qui n'étaient pas ou.n'étalentque peu
touchéesdans les deux ouvragesprécédents(et aussid'une
étude sur un grand fait particulièrementimportant pour
cetterégion-ci,l'inscriptionmaritimeet le rôle de défense),
en mêmetempsque s'ydéveloppeet particularisel'étude des
grandescatégoriesde faits déjà rencontréesplus haut (utili-
sation du sol par l'homme,culture, notammentmaraîchère,
BASES CHÎOURAPMQl'KS
DE LA VIE SOCIALE 72îi

pêcheries, industries diverses, – l'étude insistant, dans ces


diverses branches, sur la condition des hommes qui y sont
occupés, groupements, population). – Avec le livre de
M. Siou, Les paysans de la Normandie orientale, l'étude,*qui
continue de se dire « étude géographique », semble vouloir
s'appliquer à des hommes plus qu'à un sol elle se donne
pour objet une certaine catégorie économique de la population
d'une région donnée; et assurément elle débute comme les
précédents par une étude physique (climat, relief, géologie,
hydrologie); mais elle développe davantage encore l'étude
historique de cette population (origines, moyen âge, xviif siè-
cle, époque contemporaine) sous cette spécification et à ces
diverses époques, les catégories de faits considérés sont du
reste, à peu près commeplus haut, les modes d'utilisation du
sol, d'appropriation, d'exploitation, les industries rurales,
l'habitat, les groupements, la population. L'étude de M.Va-
cher sur le Berry, au contraire,'se spécialise en une tout
autre direction en s'attacha pi à une région qui a historique-
ment une individualité, le géographe se propose de détermi-
ner et d'expliquer les caractères physiques qui définissent
cette région; partant des limitations historiques, politiques
du Berry, l'auteur consacre l'essentiel de son travail à étu-
dier, dans la région ainsi délimitée, d'abord le modelé du
sol, dont il tente une « interprétation morphogénique », puis
l'hydrographie, avec un essai d'interprétation morphogénique
des vallées, puis le climat, le régime des eaux, souterraines et
courantes, et il sort à peine du domaine physique avec le der-
nier chapitre (où il étudie les noms de lieux, mais dans leur
relation avec la nature physique) ici aucune étude de l'agri-
culture, de l'industrie, de la population, ni même de l'habitat
humain. 1
I. On le voit à ces quelques exemples, chez des géographes
d'une môme école, la notion de ce qui est fait géographique,
de ce qui est et doit être l'objet d'une étude géographique,
apparaît ou bien fort diverse, si chacun de ces auteurs a
mis dans son livre ce qu'il considérait et tout ce qu'il consi-
dérait comme proprement géographique, ou bien fort
indéterminée, si nous devons intégrer en elle jusqu'aux caté-
gories de faits les plus distantes que nous trouverons visées
dans l'une ou dans l'autre de ces études. Prenons donc d'abord
le sens le plus large. -A première vue, nous n'apercevons à
tous ces faits qu'un caractère commun, c'est que tous, natu.
"26 L'ANNKB itMMVtt)
SOCtOlOOtQUB.
rels ou artificiels, physiques ou humains, sout localisés ou-
localisables à la surface (ou près de lu surface) do la terre, ou,
en d'autres termes, si {'on veut, sont inscrits ou peuvent
s'inscrire sur une carte ou représentation figurée de cette
surface Mais alors, si ce caractère est ce qui suffit à rendra
géographique uu fait, toutes les catégories de faits rencon-
trées plus haut dans nos divers ouvrages, même si nous les
ajoutons les unes aux autres, sont loin de recouvrir le champ
de la géographie. Rieti que relativement a l'homme, soit phy-
sique, soit moral, des espèces très importantes de faits man-
queut tout à fait ou sont à peiue effleurées, dont pourtant
l'observation se situe toujours dans un lieu et dont on dresse
des cartes par exemple, tout l'ensemble des données anthro-
pologiques, par exemple encore, tout l'ensemble des phéno-
mènes religieux (un peu touchés chez M. Yallaux seulement),
la matrimonialité, la criminalité, etc. Maisce n'est pas assez
dire si tout ce qui se,passequelque part à la surface de la terre
est fait géographique, il n'est, hormis les faits du domaine
de l'astronomie et de la géologieprofonde, aucun fait matériel
ou mental qui ne présente ce caractère et, en ce sens, ne res-
sortisse à la géographie. Pourquoi, à ce compte, la dilatation
du fer observée à Amiensserait-elle exclue d'une étude géo-
graphique de la Picardie, alors qu'y est comprise la transfor-
mation de l'industrie textile observée également à Amiens ?
Pourquoi le scorbut des marinsétudié en Bretagne ne serait i)
pas un fait géographique,si le salaire des ouvriers ruraux
étudié en Bretagne en est un? Ou bien la sélection de faits
localisés que retient l'étude géographique est arbitraire ou
capricieuse (ce qui expliquerait les divergences des auteurs),
suit une tradition irréfléchie justement ces travaux
prétendent à une rénovationde la gêographie.i, ou plutôt suit
une mode empirique la prédominance accordée aux phéno-
mènes économiques, conformeaux prénecupatious banales de
notre temps, eu serait un indicei; ou bien il faut définir plus
étroitement le fait géographique. Entendm-t-on par faits
géographiques ceux seulementdes faits localisés à la surface
de la terre dont cette localisationest un élément constitutif ou
explicatif essentiel? Soit. Maisil faut nous établir que c'est
bien le cas de tous les faits retenus plus haut par nos géogra-
phes. Or, dans cette preuve, il faut bien se garderd'une confu-
sion il ne suffit pas de montrer que ces faits sont esseutielle-
ment liés à des faits également saisis par une observation
1.

IUSK8 liKOGiUl'IUQUKHDE LA VIS SUCtALR 787

localisée (il ne suMt pas de montrer par exemple que le salaire


des ouvriers ruraux bretons dépend do telle ou telle habitude
rencontrée chez les Bretons, ni môme de telles ou telles cir-
constances économiques rencontrées dans lu Bretagne ou de
montrer que la transformation de l'industrie textile étudiée à
Amiens est étroitement liée à une disponibilité de main-
d'œuvre également rencontrée dans ce pays) car, pour ces
seconds faits, se reposera la même question il faut nous éta-
blir qu'à ces faits, ceux-ci ou ceux-là, la localisationest essen-
tielle commetelle.
Mais qu'est-ce qui constitue la localisation comme telle,.
sinon, en dernière analyse, les traits physiques qui caracté-
risent le lieu de la surface terrestre considéré? Si la géogra-
phie veut être autre chose qu'un répertoire empirique de faits
les plus divers ayant seulement ce caractère commun d'être,
notés avec leur localisation (et bien entendu personne ne nie,
du reste, l'utilité d'un pareil répertoire, pas plus que celle
d'une chronologie, ou celle d'un dictionnaire alphabétique),
si elle veut (et c'est bien la préteution de la jeune école)être
une science, c'est-à-dire une connaissance ayant pour objet
une catégorie spécifique de phénomènes et les relations expli-
catives où entrent ces phénomènes, c'est bien là, semble-t-il,
qu'elle trouvera son domaine. II suffit de relire la liste des
faits étudiés dans le travail de M. Vacher pour avoir le senti-
ment d'un ordre de phénomènes bien caractérisé, qui n'est,
de ce point de vue et dans cet ensemble, l'objet d'aucune des
autres sciences existantes, et qui peut donc, à bon droit, for-
mer le centre et nous donner la caractéristique de la science
que nous appelleronsgéographie. L'étude géographiquepourra
s'y borner; mais ello pourra légitimement aussi, commetoute
science, étendre sa recherche sur des phénomènes d'autre
catégorie, s'ils sont en dépendance essentielle des phéno-
mènes de son domaine propre, et en les considérant du point
de vue et dans la mesure de celte dépendance. Les phéno-
mènes de la vie cellulaire sont du domaine propre de la bio-
logie mais il lui appartient incontestablement aussi d'étu-
dier par exemple les phénomènes d'ordre mécaniquequ'im-
plique la contraction des cellules musculaires, ou les
phénomènes chimiques propres auxquels donne lieu l'acti-
vité cellulaire.
II. C'estbien ainsi, au fond, que, plus ou moins nettement,
nos auteurs entendent constituer le domaine de leur étude
1Ï» l'a.N.NKK
SOClOUHUOUK.
IBQIMIK»
géographique.Mémos ils ne se limitent pas, commea fuit
M.Vacher,aux phénomènesqui onructérisentphysiquement la
surfaceterrestre,môme si, commeM.Vallauxet encoredavan-
tageM.Sion,Usattachentsurtoutleur étudeàdesphénomènes
« humains»,à desfaitsde la vieet del'esprit des hommesexis-
tant à cette surface, ils euteudeut bien que leur étude est
géographiqueen ce qu'elle s'appliqueà des faitsoù se mani-
testeessentielleI'actiuudu milieu physique déflui par ces
caractéristiques.Maisnous apportent-ilsjustementla preuve
de cetteactionessentielledu milieu physique, et de l'im-
portancede cette action,-sur les phénomènesd'ordre tech-
nologique, économique, morphologique, démographique
qu'ilsconsidèrenten relationaveclui? Cettediscussion,pour
être complète,demanderaitun développementqui déborderait
le cadre de ce compterendu. Mais nous pouvonschez nos
auteursmêmes,et grâceà la sincéritéscienliflquedoutil faut
les louer,trouverla reconnaissanceque cette preuve,si même
ellen'est pas exactementretournée,demeure du moins eu
question.C'estM.Demangeonqui,au ternie et commerésul-
tat de toutesa recherchede géographe,constateque, dans le
cadredeson étude, dans une part d'un pays aussiaucieune-
mentcivilisé et peuplé par la France, l'homme a agi sur la
natureautant que la nature a pu agir sur l'homme Maisre-
connaîtrececercle de cause et d'effetalternatifs est, pour la
géographiecomme science explicativepropre, une défaite,
tan. qu'on ne nous établit pas quelle p-irl originairea bien
pu avoirle milieu physiquepremier,antérieur à toute modi-
ficationhumaine: sinon,et si la uatured'aujourd'huiest telle-
ment modifiéepar l'homme que la nature primitivene s'y
puisseplus reconnaître,la dépendancede l'hommeà l'égard
de la natured'aujourd'huiest en réalité une dépendancede
l'hommed'aujourd'huii l'égard desesancêtres,et l'onne peut
vraimentdire qu'expliqueressentiellementl'hommepar lui-
mômesoitun succèsd'explicationproprementgéographique.
Quelestdoncle facteuressentield'où M. Blanchardfait fina-
lementdérivertous les grands phénomèneséconomiquesqui
formentle centre de son étude («agriculture savante», « in-
dustrienécessaire»)? Un facteurphysique,tenant au sol, ou

i. Purexemple«Lesoluûno»cultivateurs creusentleurssillonsres-
sembleaussipeuausolquiportakmpremières que lesterres
inoissuii*
nouvelle»d«noscolonies
ressemblentkra qu'ilsserontaprèsunelongue
périodedecultureintensive
u (/,«Picardie.
\uî\i).
IIAg/lg fI~OIlIlAPIJlQUgg
IIK 1. \'1£ gO!:UI.E i29

dont lescaractèresphysiquesde larégionconsidéréesoientun


élémentessentiel? Nonpas c'eslta surpopulationqui est la
causede tout, qui expliquetout (p. 475),la surpopulation,
c'est-à-direun phénomènequi n'est pasplusproprementgéo-
graphique que peut l'être la tailleou la couleurdes cheveux
des habitants,ouleur religion,leurmoraleouleurconstitution
familiale,et qui,de.plus,demandelui-mêmeà être expliqué!
Or, par quoi lit trouvons-uousexpliquéeun peu plus loin`l
Oubien par le fait môme,ce qui n'est pas uue explication,ou
bien par « le commerce,l'industrie,l'agriculture,réagissant
les unes sur les autres » (p. 487;,ce qui n'estencorepas un
facteurgéographique(et ce qui, de plus,fait uncercle).
Toutl'essentieldes explicationspar la géographie,que nos
auteurs tentent d'apporter des faits ou institutionsécono-
miquesqu'ils considèrent,consisteen somme,on peutle voir,
à les ramenerà certainesde leursconditionstechniques(ma-
tièrespremières, instrumentsde production,etc.),et à mon-
trer quecesconditionstechniquesserameneutauxconditions
physiquesde la régionobservéeouen dëpendeolétroitemeut.
Maisd'abord c'est ne pas apercevoircombienle fait écono-
miqueest souventdistinctet mêmeindépendantde la condi.
tion techniqueet, eu tout cas, combienil est loin d'êtresuffi-
sammentexpliqué par elle il ne suffit pas qu'il y ait des
moulonsdans un pays pour expliquerque ce payspossède
une industrie lainière et c'est ne pas voir que le véritable
phénomèneéconomique(ainsi que son explication)n'est pas
dans les choses,maisdans l'esprit deshommes(parrapport à
ces choses;.En secondlieu, la dépendancedu fait technique
à l'égard du fait physique n'est pas davantageune explica-
tion il est bienévident quelesmoulinsà eausontsurdescours
d'eau, et qu'on ne cultivepas le blé dansdes champsde-cail-
loux mais il ne suffit pas qu'il y ait des coursd'eau pour
que les hommessachentet veuillentles utiliser,nides terres
arables pour que les hommessachentet veuillentles labou-
rer et ici encorele fait vraimentexplicatifest humain et
psychologique,et le fait physiquen'est,au plus.qu'une con-
dition.Et enfinnos géographesmêmesnous apportent des
exemplestypiquesqui vont exactementà contresens de la
thèsegéographique:c'est M.Demangeon qui (p. 286-90)nous
montreune industriedu fer s'installeret se développerdans
un paysoù il n'y a nifer ni charbon,et netrouveà l'expliquer
que par une disponibilitéde main-d'œuvre qui se rencontre-
730 fc'AXNÉfc
MClULOatWB.l'JOS-i'JOD

rait en bien d'autres pays où u'est née aucune industrie, et


qui, au demeurant, n'est encore qu'une condition possible, et
son une explication.
Si le milieu physique a une action sur des phénomènes hu-
mains, c'est bien, eutre tous, sur les faits d'habitat, sur les
manières de se fixer, de s'installer, do se grouper sur le sol,
qu'où doit la recounattre. Et nos géographes y donnent, en
effet, une juste attention Mais nous voyous un même sol
argileux, reudant eu temps de pluie le charroi très difficile,
expliquer, chez l'un de nos autours, que les formes soient pla-
cées le long des chemins (afin de profiter au moius de la tael-
lité relative de circulation qu'ils procurent, Demangeon,
p. 204), et chez un autre, que les fermes soient isolées au
milieu des champs (pour être plus près des champs à cul-
tiver), un terrain sablonneux expliquant, pour ce dernier
auteur, que les maisons soient placées le long des chemins
(Blanchard, p. 420, 42oi. – S'agit-il d'expliquer ces formes
si caractéristiques de l'habitation, ces dispositions si parlicu-
lières de la ferme picarde, de l'hofstéd flamand, de la cense
wallonne, de la ferme cauchoise, dont la limite d'emploi est
si nettement localisée? On nous dira que cette disposition est
commode (Demangeon, p. 303; mais d'autres sont aussi com-
modes et ce n'est pas une explication, du reste car pour-
quoi le paysan picard est-il seul à avoir aperçu cette commo-
dité?; ou qu'il faut bien reconnaître une influence ethnique
(Blanchard, |>. 41(i; mais lu race, ce n'est pas un facteur pro-
prement géographique], ou que « s'il n'estaucun des éléments
de la ferme cauchoise qui ne satisfasse à une nécessité de
l'exploitation, la géographie cependant ne suffit pas à expli-
quer l'uniformité si curieuse de ces fermes » (Siou, p. 490-97).
– Pourquoi, trouve-ton, suivant les régions, et selou des
lignes de démarcation très nettes aussi, ici les maisons éparses
une à une dans la campagne, et là les maisons groupées en
villages compacts? Nos géographes invoquent une grande
loi, la dépendance ot'tl'habitat humuiu serait à l'égard de l'eau
potuble; et ils cherchent donc à nous montrer qu'ici l'eau
aboude ou affleure partout, tandis que ià elle est rate ou pro-
fondeet difficile à atteindre. Et cette fois nous tiendrions, enfin
une explication vraiment géographique: est.elle satisfaisante?q
Déjà l'un de nos auteurs aperçoit à cette opposition dans la
répartition des maisons une autre raison possible (Deman-
geon, p. 372 l'élevage, pratiqué dans la première région, com-
IUSK4 GBtJURM'IUQUKS
DR bA VIB SOfilALK 731

manderait cette dispersion. explication, du reste, fort arti-


ficielle). Mais voici qu'un autre, avec sincérité, trouve dans
des conditions physiques à peu près identiques, avec une
possibilité égale d'avoir de l'enu isolémeut si l'on veut, et une
possibilité égale de se passer ou d'user de puits, ici une po-
pulation disséminée, et ù côté une population groupée en vil-
lages ou en gros hameaux, etuvoue que l'analyse géographique
ne permet pas de résoudre la question I.Sion,p. 494-4'JB).–
Que devient notre loi °
M. Commentse fait-il donc que, jusque sur les points où une
influence des conditions physiques, importante ou au moins
notable, est le plus admissible, des travaux aussi pleins d'ap-
plication, nourris d'une érudition solide et variée, inspirés
par la volonté de faire œuvre de science géographique'propre,
n'aboutissent pas a des résultats plus concluants ? Une part
de responsabilité nous parait revenir au cadre même choisi
pour ces études. Même avec une idée plus nette et plusstricte
du facteur proprement géographique, et respectivement des
diverses sortes d'autres phéiionièués dont on peut étudier la
relation avec lui, même avec une conception plus exacte de
ce que doit être une relation pour être vraiment explicative,
il n'y aurait guère à espérer, dans une recherche ainsi limi-
tée, d'établir, à la place de ces explications mises en échec,
des explications plus valides. Se limiter ù une région aussi
étroite, c'est se fermer la seule voie qui permette de distin-
guer entre les coïncidences accidentelles ou no» influentes et
les corrélations véritables, puisque c'est se fermer la voie de
la comparaison entre des ensembles différents assez nom-
breux eu une matière aussi complexe, se limiter à un seul
cas d'observation, c'est se eondamuer d'avance à ue pouvoir
rien prouver. Et de fait, ou bien nos auteurs se contentent
d'expliquer par ce qu'ils jugent être vraisemblable (par
exemple par ce qu'ils jugent devoir être la conduite raison-
nable des hommes), et nous u 'a vouspas besoin ici de redire
encore le vice radical d'une telle méthode ou bien ils se ser-
vent d'une relation générale préalablement établie ou pré-
sumée sur un champ plus vaste, ou encore ils étendent leur
regard hors de leur région et procèdent par comparaison
(malheureusement imparfaite et fragmentaire).
Et d'autre part enfin, à supposer que les régions consi-
dérées soient bien des uuUés à la fois géographiques et
humaines (souvent, d'ailleurs, plus humaines que géogra-
732 L'ANNlk AOaoMaiWR. 1908-190!)

phiques»),commencerpar étudier,le tout de celterégion,


vouloirtout y saisir et tout y expliquerà la fois,c'est vouloir
commencerpar le plus difficile,par ce qu'on peut tout nu
plus concevoircomme le terme de la science car c'est
vouloir,eu effet,expliquer un individudanstouteson indi-
vidualité complexeet eutière, au lieu de débuter,comme
danstoutescience,par l'analysede rapportsgénérauxsimples,
Imaginons,au contraire, qu'au lieu de s'attacherà un pro-
blème présentement (et pour longtempssans doute) aussi
insoluble, les mômes hommes, avec leur conscience,leur
facultéd'érudition, et leur soucide travailet de résultatsde
science,se soient appliquésà étudier, par exemple,l'un les
formesde l'habitation,un autre la distributiondesmaisonset
desagglomérations,unautre la localisationdetellesou telles
industries,etc., chacun dans toute la France,ou même, s'il
y a lieu, daus l'Europeoccidentale,dans le présent,et aussi,
commeil serait sans doutenécessaire,dansle passé crpit-on
qu'ils n'auraient pas aboutià apercevoiret mêmeà dégager
des relationsplus concluantes,et pénétré plus viteet plus
véritablement dans l'intelligence môme des phénomènes
qu'unesciencede la morphologie socialepeut légitimementse
donnerà tâched'expliquer? F. S.
SCHLÏTKR (0.). Ûber das Verhaeltol»von Natur und
Menschin der Anthropogeographie.Geogr.
Zeitschr.,
XIII,9.
HETTNBRf A.) –DieGeographiedesMenuchen.Geogr.
Zeitschr.,
1907,XIII,8.
FlltKAS(0.). AnthropogeographisoheProblemeans dem
Vtertelunterm Manhartsbergein Niederoesterreioh.
Stutt-
fart. Engelhorn, in-8<\
1007,p. 463-55Ô,

Il. DKLAPOPULATION
EXGÉNÉRAL,
l'ar M. IUuwaciis.

MAVR(Georcvon;.– statistik und Gesellsohaftslehre.


3" Band Sasfafefatà
Jifc (Moralstatistik,
Bildungsstatistik,
I. Parexemple,
silesdeuxPhmlivx i<arM.Blanchard
dlstlngnùes sont
physiquement, aussiiHIKronUs
g&>gitt|>lij<|ueiiif!nl nous
l odit,
en qui constituel'unitédu la Flandre?C'estle<|u'il
Flamand,
quVst-
cVsWwlire
l'Iioiiirnc.
UB LA POMH.ATIOX
RNO1JNÉII.W. 733
Wirtschaflsstatlstik,Politische Statistik). 1° Ueferuntr.
J. C.B. Mohr,1909,1II-2OO
TCibingen, p. in-H».
J)u grand ouvragede M.von Mayr,deux volumesétaient
déjà parus le premiertraitaitde la statistiquethéorique (ou
théoriede la statistique) le second,de la statistique de la
population.11nous apprendque le troisième,qui doit être
consacréà ta statistiquepratique,comprendratroislivraisons
la première,dont nous rendonscompteici, contient (deux
premièressections.!cette partie de la statistiquemorale qui
esttiréede la statistiquede la populationelle-même(ellecom-
plète doncaussiet mettraà jour le premiervolume)et itroi-
sième section)l'étudedesstatistiquesdu divorce;la seconde
terminerata statistiquemorale,etétudierala statistiquede la
culture (Mldnnffxstathiik)',dansla troisièmerentreront enfin
le» statistiqueséconomiqueet politique. Nous discute-
rons les vues généralesdont s'inspirela répartition, en de
telles subdivisions,desmatériauxstatistiques.Nousrendons
compte,d'ailleurs,sousuneautre rubrique(sociologiecrimi-
nelleet statistiquemorale),dela troisièmesectiondu
présent
livre (statistiquesdu divorce)qui rentre exclusivementdans
la statistique morale tprinuïr-moraliitaMiehes). Mais nous
sommes fondésà retenir ici les deux premièressections,
puisquelesstatistiquesqu'ellesétudientsontbien«moralesi)',
sans doute, mais seulement« à la secondepuissance »
{*ekund<ïr-maralstatiKtkfos)t commedit l'auteur elles nous
présententl'occasiondedéflnirici le rapportde la statistique
morale et de la morphologiesociale, du point de vue de
celle-ci.
L'ouvragedébutepar des considérationsgénérales sur la
statistiquemorale.Cequi autoriseà la distinguerdes autres
études sociales,c'est qu'on reconnaît« l'existence,dans la
réalité sociale,en dehorsdes phénomènesde population,eu
dehorsdesfaitscollectifsspirituels,économiques et
de faitscollectifssociaux,qu'on peutcompteret politiques,
mesurer, et
qui sonten rapportscertainsavec des phénomèneset ten-
dancesde la viemorale» cesfaitspeuventd'ailleursêtre soit
des actes (crimes,etc.),soitdesévénementsconsécutifsà ces
actes, et où l'individuest passif (condamnations,acquitte.
ment), soit desétatspersonnelsdurables(prostitution,empri-
sonnement). On a prétendu qu'en réalité la statistique
ne peut être érigée en science indépendante,
qu'elle n'est
734 I/aNNÈK SOCIOLOGIQUE.
itKXMVO»

jamais qu'une branche ou qu'un instrument d'une autre


science. En particulier, une statistique morale impliquerait
une science de la morale préalable, et porterait surtout sur les
faits immoraux, ou moraux anormaux; mais il n'y a pas, eu
morale, de normal et d'anormal en un sens absolu. Sans doute,
répond v. Al. il y a en tout cas « pour une époque donnée de
la civilisation, et' pour le chercheur qui y vit, un criterium
tiré de l'opinion commune, sans lequel l'observateur serait
perdu dans le flot des événements sociaux ». Et il signale ici
l'opposition des points de vue administratif et scientifique
sans doute il n'y a pas d'administration de la morale; maig
bien des faits enregistrés dans les statistiques officiellesen
vue de tout autres fins révèlent au sociologue des tendances
et états de la moralité collective. 11y a lieu, d'ailleurs, de
distinguer deux catégories de ces faits les uns sont moraux
exclusivement, et par essence (crimes, divorces, dons et
legs, etc.) les autres ne le sont qu'indirectement, et relèvent
d'autres sciences sociales c'est surtout dans la statistique de
la population qu'on les trouve enregistrés ils consistent en
« des phénomènes et états [de la population;qui s'écartent, de
façon évidente, de ceux qui sont reconnus normaux du point
de vue éthique ». Les deux premières sections du livre ne
traitent que de ceux-ci.
La première section du livre présente les données de statis-
tique morale qui résultent de l'étude de l'élut th la population.
Le chiffre de la population d'un pays(densitéde la population)
peut nous édifiersur la politique d'un Étal, l'attitude égoïste
d'une classe (faible population dans certains districts de
l'Inde, est Irlande). – Plus instructif est l'examen du rapport
quantitatif des sexes, ou des divers groupes d'âge, dans une
société. Le mécanisme de la nature produit un léger excédent
de garçons (contre-partie à leur mortalité plus fortei. Mais il
y a une raison morale, peut être, à l'opposition, sous ce rap-
port, de l'Occident, où il y a plus de femmes, et de l'Orient,
où c'est l'inverse. En tout cas, l'équilibre des sexes parait nor-
mal à l'auteur. – II est anormal, d'autre part, qu'il y nit trop
d'enfants, ou trop peu, trop de vieillards, ou trop peu une
trop grande proportion de jeunes gens peut déterminer un
accroissement de la criminalité.Passant aux statistiques de
l'état civil, nous trouverons normal ilu'à mesure qu'on passe
à des groupes d'âges plus avancés, les gens mariés, plus
les veufs, soient en plus forte proportion il est moral que
CK LA POPULATIONEX dfo&RAL 73&
L.1 1.
les ménages prédominent (la part des célibataires tend au
contraire, en beaucoup de pays, à augmenter). 11 est anormal,
toutefois, que la proportion des mariages précoces soit trop
forte (comme aux Indes, où on marie les filles en très bas
âge, et déjà à la mamelle, pour qu'elles soient certaines de
trouver un époux de leur caste, où il y a des veuves de
moins de cinq ans).. – A propos des enfants illégitimes, on
note que leur criminalité parait plus forte ceux qui ont
perdu leur mère sont d'ailleurs mieux placés sous ce rapport
que les autres, et moins bien que ceux dont la mère s'est
remariée. Les mères de garçons illégitimes sont plus portées
à former une famille en se remariant que celles qui out des
filles.
On peut étudier la morphologie de la famille en portant son
attention l°Sur l'espèce du ménage. Lenombre des individus
vivant seuls est fort surtout en France, mais aussi eu Suisse
et en Allemagne il Paris, il représente presque 1/3 de tous
les ménages. Ils comprennent d'ailleurs plus de femmes
que d'hommes [en Allemagne, plus des 2/3 d'individus vivaut
seuls sont des femmes). i" Sur sa grandeur. Mlleest en
constante diminution dans tous les pays (sauf dans les Bal-
kans). Il y a d'ailleurs une opposition fondamentale outre la
France, où abondent les fa millus médiocres, la Russie et la
Bulgarie, où elles sont rares l'Allemagne occupe une situa-
tion intermédiaire. – 3° Sur le noyau de la famille (les époux).
L'auteur signale ici trois sortes de faits anormaux a) la rup-
ture de l'équilibre des sexes, dans les mariages existants, par
polygamie aux Indes la polygamie est faible, à cause de la
pauvreté; b) l'écart d'âge excessif entre les époux e) les
mariage» mixtes (au point de vue religieux), qui apparaissent
plus stériles. Eu Prusse, leur nombre, depuis 1864. a bien
plus augmenté que la population les mariages mixtes où
l'époux est juif ont passé de 1.100 en I8H!>il 2.242 en 1900,
avec 20 p. 100 d'enfants juifs en 1800, 27,7 p. 100en 1000.–
4' Sur le nombre des enfants. La proportion de mariages
stériles est plus forte dans les grandes villes, surtout pour les
habitants nés dans les dites villes elle est plus forte dans les
quartiers les plusfortunés. En France, en 1890,sur les familles
possédant des enfants en vie, plus de la moitié n'en avaient
qu'un (30 p. 100)ou deux (il p. IOOi. î>°Sur les éléments
étrangers dans lafamille. Cesont, pour la plupart, des ouvriers
de l'industrie et del'agriculture attachés à lu famille: c'est un
730 l/ANXÉRSOCIOLOOIQVR.
{908-1909

phénomènemoralpour les conservateurs,immoral pour les


socialistes.L'existenced'un trop grand nombre de Schlaf-
gaenger(pensionnairesqu'oncoucheseulement)est, en tout
état de cause,à regretter.
La confessionreligieuseestencoreà envisager.Aux Pays-
Bas,1 15.179 personnesont expressémentdéclarén'appartenir
à aucunereligion fait anormal,puisquel'immensemajorité
des hommesdes autres paysaccepteencoreau moins l'éti-
quette. Etanormalencoreestl'extrêmemélanged'hommesde
confessionsdifférentes.
La secondesectiondu livreest forméedes résultats, inté-
ressautsau pointde vue moral,tirés desstatistiquesdu mou-
renientdelu population,
II est intéressantd'étudier le chiffredes naissancesmois
par mois on y relève deux maxima,dont l'un correspond
auxconceptionsdemai, l'autreàcelles de décembre: lescauses
du deuxièmeseulementseraientsociales.Dansles naissances
illégitimes,le maximumde décembredisparait presque, et
l'autre est encoreplus élevé. La féconditépeut être exces-
sive elleest en rapports avecle mouvementde la mortalité.
On néglige les enfants, et, quandils meurent, on veut les
remplacer(lephénomèneseconstatetrèsnettementen Bavière,
et auxIndes).Avantd*nborderlescascontraires(natalitéinsuf-
santei, l'auteur envisageles morts-nés le phénomèneparait
sansdoutepurementnaturel maisqu'il y ait (proportionnel-
lement)plus de morts-nésparmilesillégitimes,que les villes,
en Franceet en Autriche,soient plus chargéesque les cam-
pagnes,qu'à Paris, de 1817à 1905,leur proportion se soit
élevéede 51à 84,1(pour millenaissances),celadonneà pen-
ser. Anormauxseront doncles chiffresde naissancesinfé-
rieurs « à ce qu'exige un développementrégulier (?) de la
population,et aussison expansionmodérée.» I)ans presque
tous les pays. surtout en France,mais aussi, très profondé,
ment, en Australie,I» natalitébaisse. S'agit-ild'un «fïaisse-
ment passager? Maislesbaissesantérieuresn'ont jamaisété
aussi constantes,et d'ailleurs (à la différencede la baisse
actuelle)étaient en rapports certainsavecla situation écono-
mique.– Lephénomèneest encoreplus net si on retient, non
pas le rapportdes naissancesà la population,mais leur rap-
port auxfemmesmariéesenâged'enfanter (féconditélégitime).
La limitationdu nombredesenfantsoffred'ailleurstous les
caractèresd'un phénomèneconscient elle provient surtout
DE LA POPULATIONRN QÈNISlUt 737

des ménagesoù la femmeest âgée de plus de vingt-cinqans


(de25à 29 ansen particulier).
Pour deux raisons, l'illégitimité est anormale elle révèle
jusqu'àquelpoint ne sont pas observéesles prescriptionsde
l'État et de l'Église;d'autre part, sous beaucoupde rapports,
lesenfantsnaturelssont des moindresvaleurs. Il y d'ailleurs
biendes catégoriesd'illégitimes l'auteur en dislinguesix r
ils peuventêtre le fruit derelationssans lendemain,ou d'une
durée éphémère;leur père, sans se déclarertel, peut s'occu-
per d'eux, ou ils peuvent recevoir les soins d'un père adop-
tif l'union d'où ils provienneut peut être assez sérieuse
pour devoircertainementaboutir, ou pour avoir abouti dès
avant leur naissance,à un mariagelégal. De ces groupes,
d'ailleurs, le premier et le dernier seulspeuventêtre déter-
minésdès la naissance. Les enfantstrouvéssont à étudier
distinctement.Il y a d'ailleurs, sous-ce rapport, uue diffé*
rence profondeentre l'Allemague,où l'enfantn'estreçu dans
un établissementqu'après examen de la situationde ses
parents(Findelkinder),et l'Italie où se pratiqueencore, sur-
tout dans certaines provinces (napolitaineet sicilienne),le
dépôtdes enfantsdans un tour (esposti);en Italie,l'habitude
est de se déchargersur l'assistancepubliqued'une large part
des soins maternels (2,21 p. 100 des uouveau-ués).Une
enquête fnite en Styrie sur la profession des mères des
enfantstrouvésnous apprend qu'elles étaientdomestiquesà
la campagne (38p. 100)ou dans les villes(31 p, 100)pourla
plus forte part, et que près de la moitiéd'entre ellesavaient
déjà à s'occuperd'unou plusieursenfantsvivants.Tandisque
la natalitéillégitimeest partout en décroissance,c'est seule-
ment en très peu de pays que la natalité illégitimeest en
recul net, eu Angleterrepar exemple (sausqu'on puisse dire
si celatient à uneaméliorationdes rapportssexuels,ou aux
tendancesnéomalUtusienues).Ailleurs, elle est plutôt sta-
tionnaire(en France, elle augmente mêmeunpeu) elle est,
eu somme,bien plus que la féconditélégitime,différenciée
suivantles pays.Si on étudie l'évolutiondu phénomènedans
le temps, on constate une diminution très seusibledès le
milieudu *ix*siècle,saufen Suède, en Belgiqueet en France
(à Paris, toutefois,les naissances illégitimesont beaucoup
plus diminué que les légitimes). Les changementsde là
législationqui ont rendu le mariage plus aisé (en Bavière
par exemple,
-Y_'a- en 1868)ont entraîné une baissetrès "v.
nette v..de
E. Dchkiuin. Année sociol., 1906-1900. 47
738 i.'annkksoiuomgiqur.tuoo.iao»
la natalité illégitime.. Dans les campagnes et les villes, des
causes différentes sont Ainvoquer ici, la vie décentralisée,
qui rend le mariage plus diftleile pour les cadets, et l'intimité
plus grande entre les compagnons de travail, hommes et
femmes; là, les relations et les occasions plus fréquentes, qui
expliqueut d'ailleurs qu'on trouve la plus forte proportion
d'illégitimes là oit c'est le plus peuplé. La religion agit moins
nettement que la race les Slaves produisent peu, et les Alle-
mands beaucoup d'illégitimes.– On a étudié en Autriche les
légitimations. en les groupant d'après ta profession de la
mère au moment de la naissance, et du père au moment de la
légitimation. On trouve que les salariées de la campagne sont
en meilleure posture que celles desvilles il en est autrement
des domestiques (qui, sans doute, se remarient plus souvent
avec un autre que le père). Les salariés légitiment plus
que les artisans ou commerçants indépendants, ceux ci plus
que les employés. Quant aux conceptions avant le mariage
d'enfants nés après, elles paraissent très fréquentes fa Amster-
dam, 26 p. 100des premiers-nés sont venus au monde dans
les six premiers mois du mariage: à Dresde, à Berlin, en
Australie, la proportion est égale ou supérieurei.
La mortalité est moins intéressante au point de vue moral
que la natalité. Les hommes paraissent plus exposés à la mort
que les femmes à tous les âges. ))u recul de la mortalité, très
net depuis cinquante ans. ce sont les femmes aussi qui ont le
plus prolité, et surtout les personnes jeunes ou d'âge moyen.
La mortalité infantile, là où elle dépasse la proportion de
7 à 8 p. 101)des nés vivants, est excesswe elle s'explique
sans doute par des causes naturelles ou économiques, mais
aussi par l'importance moindre qu'on attribue à chaque vie
humaine (les progressons ce rapport seraient à rattacher à la
baisse de ta natalité d'autre part, la mortalité des illégitimes
est excessive en Prusse, les illégitimes, de bonne heure.
disparaissent bien plus par la mort que par la légitimation;.
Si on rapporte le nombre des mariages au nombre total des
habitants, on trouve peu de différences, quant à leur fré-
quence. de pays à pays: le chiffre des mariages est, d'ail-
leurs, depuis 1891, stationnaire. Maissi on les rapporte à ta
population eu âge de se marier, certains chiffres se détachent,
très inférieurs (II p. 1000 en Irlande; ou bien supérieurs
(80 p. 1000 en Serbie) aux chiffres normaux indices d'étals
ou -de tendances pathologiques. Eu Angleterre et dans les
DE I.A POPULATIONBN OÉNÉItAI, J39

pays scandinaves, on note encore une légère décroissance. –


D'autre part, la proportion des remariages par rapport au
total des mariages a extrêmement décru mais cela s'explique
surtout par la durée plus longue de lit vie des gens mariés,
et par suite, l'élévation de l'âge moyen des veufs. – Sur les
mariages précoces ou tardifs (anormaux, d'après l'auteur) les
statistiques jusqu'ici nous apprennent peu.
L'analyse ci-dessus de l'ouvrage de M. v. M. ne donne
qu'une faible idée de l'extrême multiplicité des questions qui
s'y trouvent envisagées. 11ne s'est pus préoccupé seulement
de rassembler tous les résultats où on est arrivé dés mainte-
nant en ce domaine. L'intérêt principal du livre serait peut-
être dans la position d'un certain nombre de problèmes, et
l'indication des données statistiques, qu'il serait possible de
recueillir pour les résoudre (en particulier, il insiste sur l'im-
portance de combiner les données démographiques avec les
statistiques professionnelles, ce qui n'est guère pratiqué
encore, et avec des statistiques des revenus, qui sont jusqu'ici
bien rares et iucomplôtes). Enfin il soulève, de temps en temps,
quelques questions de méthode statistique i mportau tesipar
exemple sur la répartition des membres d'un groupe par série
d'âge, ou suivant toute autre catégorie, (iliederungxzahkn,
méthode distincte du calcul du rapport de leur groupe à des
groupes divers, plus étendus, où ils sont tous compris,
Besieltungiszahlert).Mais ce qui uous intéresse surtout ici,
c'est le groupement même et la classification des matériaux.
11faut signaler, d'abord, le caractère obscur de la distinc-
tion entre l'état et le mouvement de la population. Elle joue
ici un rôle capital, puisqu'elle détermine la division de l'étude
en deux sections. Mais, outre qu'elle oblige l'auteur à exposer
séparément (et à lung intervalle) des faits qui, sans doute;
s'éclaireraient mutuellement, on ne peut dire qu'elle soit
définie quelque part, ni même qu'elle soit toujours observée.
Il y a des répétitions. Surtout, pourquoi traiter, sous le titre
état de la population, de l'évolution du nombre des mariages
mixtes, du nombre des morts-nés, et, sous le titre mouve-
ment de la population, de la. répartition, suivant la profession
des parents, des enfants trouvés et des enfants légitimés, et
du rapport du nombre des mariages aux divers groupes
nationaux? Cela pourrait venir de ce que les travaux où
l'auteur puise ses données n'ont pas tenu compte de cette
distinction. Quaut à la division elle-même, elle serait fondée
740 L'ANNÉESOCIOLOÛIQVB,
W06-190»

sur cequ'il y a, eu fait, deux façonsd'enregistrerles faitsde


population soit qu'à uu momentdonne,à docertainsiuler-
valles,on procèdea uu dénombrement,soit qu'on note au
fur età mesurede leur productiou,a l'aide de registresper-
manents,les changementsde la population.Ce ne serait
d'ailleursque l'applicationà ce domainede la distinction
classiquede la sociologieeu statique socialeet dynamique
sociale. On pourrait, sans -doute, demanderalors si la
déterminationde l'état de la populationà unmomentdonné,
mêmeeu envisageanttoutes les régions, peut se détacher
ainsi de l'étude de son évolution.Qu'on déllnisseainsi un
certain nombrede types morphologiquespour une époque
donuêe,eu raison de la complexitédes forcessocialesen
présencedaus chaquerégion, on u'aura réussi qu'à poserun
certainnombrede problèmes,qu'où nepourrarésoudrequ'en
comparantla distribution et la uature de ces typesaujour-
d'huià ce qu'ellesétaient autrefois.On cuuçoit,surtout à
proposd'unesciencenaissante,que les faits soientainsi l'ob-
jet d'un doubleexposé,l'un synthétiqueet descriptif,l'autre
analytiqueet scientifique mais ce n'est pas ainsi que l'a
entendul'autour.
Aureste, commelesfaits de population ne sont présentés
ici que pour l'intérêt qu'ils ont au regard de la statistique
morale,tenons-uous-euà ceux que l'on a ainsidétachéset
groupés. La distinction que nous critiquons prend ici un
sensnouveau.Au fond,c'est moius une statistiquedes faits
morauxque des faits immoraux ceux-làseuls desfaits de
populationsonten efIetretenus qui s'écartentde la normale.
Il y aurait alors des états de population anormauxqu'on
pourraitcompareraux difformitésmorphologiquesétudiées
en tératologie(telles ces formationsfamiliales où entrent
unnombreexcessifd'étrangers),et des phénomènes de popu.
lationanormauxtels que les maladieslocalesou générales
qui relèventde la pathologie.Et ce n'est pas le lieu de sou-
lever nouveau,et de traiter en détaille problèmedu normal
ou du pathologiqueen sociologie.Mais,ici encore,les con-
ceptionsde l'auteur ne paraisseutpointparfaitementclaires,
ni déterminées.
Ontrouvechezlui, en effet,deux façonsde se représenter
J'anormal,dont on ne voit pas bien le rapport,Ii dira, par
exemple,que les naissancesillégitimessont auormales,parce
qu'ellestémoignentd'une méconnaissancecertainedes pres-
OK LA POPULATIONKN"UÉXêlUfc 7{| l'
41..5:a .1_ nrW _a..r_
criptionsde l'Église et de l'État; mais pourquoisignalera-t-il
alors la polygamiedes musulmansou desanimistesde l'Inde
comme un fait anormal,et, de môme,l'habitudede marier
les filles de très bonneheure, dans le mômepays,afin de
satisfaireà desrèglesreligieuses? Et pourquoieucoremet-il
sur le mêmeplan, considère-t-ilcommeanormauxau même
titre, les mariagesmixtes(qui sont eu effetcontraires aux
prescriptionsau moinsde certainesreligions),et le mélange
extrême,eu certainsdistricts, d'hommesdeconfessiondiffé-
rente (qui n'est l'objet d'aucune interdictionreligieuseou
juridique)? C'estqu'un autre principeintervient l'nuormal,
c'est l'exceptionà la règle mais la règle, ce n'est pas, pour
chaquepays,l'ensembledes coutumeset loisqui s'y trouvent
en vigueur; c'est bien plutôt, pourtous les pays,ce qui est le
plus fréquent,et mômece qui est le plus régulier au sens
mathématique,en d'autres termes, un ordre bien agencé de
termes formant une série continue, ou encore l'équilibre.
Pourquoi,autremeut,l'existenced'une forte proportionil in-
crédulesen Hollandeet en Italie (qui dénoterait,semble-t-il,
qu'une tendancerationalisteassezsérieusese développedans
ces pays) serait-ellequalifiéed'anormale?C'estplutôt l'exis-
tence de très petitsgroupesde ce genre,et non de groupes
étendus,qui devraitapparaîtretelle.Pourquoi,encore,l'équi-
libre des sexesest-il normal,et l'écartd'âgeentre les époux,
à partir d'un certain moment, anormal? Pourquoi définir
l'anormal:ce qui s'écarted'une moyennecalculéepour beau-
coup de pays différent» ? Sans doute, précisémentparce
qu'ellesse trouventsouventconfondues,ces deuxconceptions
ne paraissentpas aussiarbitrairesqu'ellesle sontau fond.Il
n'est pas anormalque les prescriptionsde l'Égliseet de l'État
soientparfoisviolées(et c'est mêmepour cetteraison qu'on
les formule),maisil l'est qu'elle le soient trop ou trop sou-
vent. D'autre part, les moyennes,si on les calcule pour des
groupescomparables,ont une valeurcertaineà titre d'indi-
cationdes tendancesmoralesou socialesconstitutivesde ces
groupes.Maistoute la questionest de savoiroù commence

1.Ost peut-iHreitpropos
dudivorce que«>Ue doubleconmplion «lul'u-
noimalapparaîtle mieux.Il dit on effet «lesdivoivcs
aprèsunetrop
courteou unittroplongueduréedu intiriux''fwineeption
iiiatUi-mallipii'
<lcI agi!moyendu divorce)sontdesfaitsanormaux «luammimI iloxi-r-,
suri-efaitanormal
K'i'iilti!» du premierdwn!qu'eutlui-inciiii'lu ilivorw
[conceptionmorale).»
7*2 L'ANNÉE 1906-1909
SUUIOI.OQIQUK.
l'excès, dans le premier cas, et à quels points de vue, dans le
second, il faut que les groupes soient semblables.
Pour un moraliste. lu violation d'une règle sera toujours
anormale, il quelque degré qu'elle se produise. Pour le socio.
logue, elle ne sera uuonnale que lorsqu'elle portera atteinte
à l'existence de la société. Mais c'est s'exprimer de façon
vague. Car ou peut concevoir de bien des façons les conditions
d'existence d'une société. Si la vie sociale ne se concevait
que dans un nombre bieu déterminé de cadres profondément
différenciés, si, entre ces types, comme entre les espèces
animales, on ne so représentait, comme intermédiaires, que
des formes bâtardes, incapables de se reproduire, et condam-
nées soit à dispurattre. soit à retourner a un des types dont
elles se sont écartées, celu ne dispenserait nullement de défi-
nir l'anormal d'une façon toute relative, par rapport aux
conditions d'existence des groupes eu question du moins, il
serait établi que ce qui est normal pour une société, c'est la
stabilité, lu fixité, la répétition, toujours dans le même ordre,
et au même degré, des mêmes actes fonctionnels. Mais il
pourrait, et il y a beaucoup de raisons de croire, qu'il doit en
être autrement. Il se pourrait que les sociétés se transfor-
ment, qu'elles passent, par voiesoit de lente évolution, soit de
variation brusque, d'un état de stabilité à un autre état de
stabilité. Or, s'il y a évolution lente, et pendant qu'olle dure,
le normal n'est-il pas que tout change, et la raison profonde
de l'évolution n'est-elle point, peut-être, que certaines fonc-
tions, en se développant, rompent constamment l'équilibre,
et qu'elles, ou que les autres, ou que toutes ensemble soient
obligées de se réadapter les unes aux antres et au milieu
(social)? S'il y a variation brusque, est-ce qu'on n'en doit
pas trouver la raison dans l'instabilité même de l'étluilibre
antérieur? Est-ce que ce n'est pas, peut-être, pour la société
jusqu'ici immobile, une raison de vie ou de mort que de se
transformer de fond en comble? [Csl-ceque les forces qui
travaillent, dans le sein du groupe, et sans le transformer
encore, à y déterminer une crise, ne sont pas davantage dans
le sens de sa croissance, et plus favorables à sa subsistance
même, que la régularité et la stabilité, qui dissimulent sous
l'apparence de la santé une consomption réelle ? Rien ne
prouve mieux la nécessité de ne pas séparer, mais d'étudier
en même tempset dans leurs relations, les conditionsstatiques
et dynamiques de la vie sociale. Mais surtout, rien n'indique
»K f.A POPULATION HN «MlUI, 743

mieux l'impossibilité de distinguer, a propos d'un phénomène
social, s'il est normal ou s'il ue l'est point,si on ue détermine
pas, d'abord et principalement, l'ordre des faits auxquels il se
rattache, avec lesquels il contribue à former uue des assises,
une section du plan déstructure, et une fonction vitale de la
société oi'iil se produit.
Or, ce qu'il importe surtout de critiquer, ce qui parait le
moins acceptable, dans la systématisation de M. v. Al., c'est
précisément cette réunion, sous le nom de données statis-
tiques morales du second degré, de faits collectifs uu fond
hétérogènes. – D'abord, il prétend détacher de l'étude de la
population, à titre de contribution à la statistique- morale,
toutes los variations, et celles-là seules, qui lui apparaissent
anormales, ou du moins tous les phénomènes susceptibles de
telles variations c'est dire qu'il s'engage à nous présenter
une étude d'uu très grand nombre de faits déjà étudiés du
point de vue démographique pour eu dégager la signification
morale car l'anormal ne se reconnaît que par rapport au
normal, comme la maladie (pour nous placer dans sa con-
ceplion) par rapport à la santé. Mais il faut aller plus loin
en réalité, il est conduit à étudier tous les faits sociaux que
nous groupons ici sous la rubrique: morphologie sociale, car
il u'enesl aucun qui n'exprime ou ne puisse exprimer, qui ne
détermine ou ne puisse déterminer, des tendances, démarches
ou attitudes morales. S'arrélera-t-il devant les faits qu'il
appelle naturels, ou qui témoignent d'un mécanisme appa-
remment iucouscieut et spontané de la nature, le rapport des
sexes, par exemple, le nombre des morts-nés, ta mortalité en
générai ? Sans doute,' il y a là une base posée eu dehors de
toute influencecollective humaine, une limite tracée à l'action
sociale mais dans la mesure où ces faits n'ont aucune signi-
fication morale, ils n'ont pas, non plus, de signification
sociale. Le biologiste, le médecin pourront s'y intéresser,
mais non le sociologue ils seraient donc il exclure aussi de
la théorie sociologique de la population. – Eu réalité, de
tels phénomènes ont quand même une influence indirecte sur
l'activité sociale,ou ce sens que celle-ci réagit uécessiii rement
sur eux. H en est exactement de même ici que quand il s'agit
des conditions géographiques, ou de géographie physique
l'étondue d'une région, des terrescluiy sont cultivables, l'oro-
graphie, l'hydrographie de la région constituent uu cadre
naturel préexistant. Mais les sociétés s'y adaptent, elles
3U 1,'anmSb
sociolouique.luue-iaou
superposent, à ces uceidentsdu terrain,des subdivisionster-
ritoriales, provinciales,des établissementshumainsqui sont
en partie déterminéspar le soi, maisen une largepart
égale-
ment par les sociétéselles-mêmes.Nonseulementla mort,
par exemple,creusedes videsqu'il faut bien remplir, mais
encore, de mêmequepardesdéfrichements onfaitreculerla
limite des terres habitables, de même par l'hygiène,la
science,et par uneplusjusteappréciationdela valeurde la vie
humaine (tousphénomènescollectifs),on diminuela morta-
lité. Mais tous ces faits collectifsont aussi une signification
morale. Et on se demandemôme,en dehorsde l'Intérêt
qu'ils
ont à ce titre, c'est-à-diredans leursrelatiousavecles
dispo-
sitions et coutumessociales, sous quel autre rapport un
sociologue aurait à les étudier. Par exemple, encore,
lorsqu'onclasse les hommesd'un pays par groupesd'âge, si
on poursuit un but scientifique,c'est biende cherchercom.
ment certains phénomènessociaux affectentces
groupes,
varient de l'un à l'autre, comment,en d'autres termes, dans
des cadrescréés surtout par le jeu des forcesnaturelles, se
développela vie sociale.
Maisil y a une confusionencoreplus grave. C'est là
que
notre classifications'oppose le plus nettementà celle de
M. v. M. il a raison de considérerles divorcescomme un
.phénomènemoraldu premierdégré.Maispourquoirattache-
t-il l'étudedu mariageà la théoriede la population,et, de
môme,l'étudedela natalitéillégitime?A proposde l'institu-
tion matrimoniale,il est naturel de se poserle problèmede
son fonctionnementmaisla fréquencedes mariagesne nous
instruit pas moinsà ce sujet que lonombredes séparations
(Eheschliessungen). Étudiercommentfonctionnentles règles
juridiques et morales,c'est une tout autre rechercheque
déterminerles formes,la grandeuret le nombredes groupe-
ments humains.Il est aussi peu rationnelde considérerles
naissancesillégitimes,et l'abandondes enfants (les enfants
trouvés) commedes phénomènesde population.On peut
encore ranger sous la rubrique morphologiesociale, une
étude sur la natalitélégitime,parceque les-naissanceslégi-
times sont de beaucoup les plus nombreuses,et qu'elles
exprimentassez exactementles variationsde la natalité en
général.Mais,outre leur petit.nombre(proportionnellement,
les phénomènes« anormaux» de natalitéci-dessusindiqués
n'oflrent-ilspas surtout de l'iotérêtcommeindicesde l'état
l>tt LA rOPl'UTIOK BN «BNKIWI. 715.

desmœurs,et aussidansleur rapport avec teslois,– qu'i Iseii


subissent l'influence,ou qu'ils contribuent à les modifier?
Sans douteon peut répondre,du moins à proposdes m«-
riages, que chaque mariage constitue un ménage, ou son
noyau,et que leur étude peut doue rentrer dans l'étude plus
généraledesgroupesenvisagésdu point de vuede leur quan-
tité. Muisl'iuversen'est pas vrai ce qui intéressela mor-
phologiesociale,c'est,bien plus que ta naturedu lien qui
unit les membresd'un ménage,l'existence, le nombre et lu
grandeurdesgroupementslocaux, ici desassocintioosréuuies
dans tin logementunique. Sans doute, indirectement, les
modalitésde ces groupementssont, pour elle aussi, instruc-
tives l'âgedes membresassociés,leurs relationsde parenté,
leur état civilpermettentd'augurer de la duréede leur rap-
prochementet desa solidité mais le nombredes mariagesen
lui-mêmea unetoutautre signification.Unchangementde lé-
gislationaccroitle nombredes mariageset diminuele nombre
des naissancesillégitimes n'est-ce pas, simplement,le signe
qu'un grand nombred'unions libres (et d'ailleurs solides)se
sont régularisées? Cephénomène,capital au point de vue du
fonctionnementmatrimonial,n'a aucun effetsur lit distri-
butionet le groupementdes hommesdans l'espace ce n'est
pas un fait depopulation.– Cetteconfusionest d'autant plus
regrettable que l'auteur semble, par moments,s'apercevoir
que les simplesrapports de quantité discernablesentre les
faits sociaux suffisentà constituer une étude sociologique
distincte il n'est pas loin de considérer la statistique, nou
commeun simpleinstrument,mais commeune scieuce.Etil
va sans doute trop loin.Ce n'est pas parce qu'on peut les
exprimerpar des chiffres,les compter et lesadditionner,c'est
parce qu'ils sont en eux-mêmesdes grandeurs dont toute la
nature apparentes'épuise dans leur quantité, que certains
faits collectifsfondent une morphologie sociale.Pour ces
raisons, l'œuvre de M.v. M. offre plutôt un recueil, d'ait-
leurs très précieuxet détaillé, de données statistiques an-
cienneset récentes,maistrès diverses, qu'une classification
scientifiquedesfaits sociauxenregistrés par les statisticiens.
M. H.

SCHNAPPER-ARNDT (Gottlieu).– Soaial8tatl8tlk(Koj7p-


xungen iihei-Betôlkerangdehre,Wirtschafts-undMarahtatis-
tik). Leipzig,W. Klinkhardt,1908,xm-Ui p., in-8\
746 r.'AXNÉB 40eiOr,0fi!0l'B. 1908-190»

ro~
Cet ouvrage, qui parait quelques années après la mort de
l'auteur. donne une idée assez exacte des
premiers tâtonne-
méats des fondateurs de la statistique, des
principales ques-
tions posées d'abord en ce domaine et des solutions diverses
qu'on en a proposées, et aussi, il faut bien l'avouer, au moins
pour quelques-unes, de la confusion qui règne encore dans ce
groupe d'études. La seule tentative de préseuter eu un seul
volume les trois « statistiques » iudiquées dans le sous-titre
est inattendue. La statistique, nous dit M.
Sehuapper-Arndt,
ne constitue pas une scieuce indépendante elle
comprend
plutôt des parties détachées de sciences diverses; toutefois il
convient de rapprocher certaines de ces parties, toutes celles
qui se rattachent aux sciences sociales, et d'eu constituer
sinon une science, du moins une étude distincte
[Sluilicn-oder
Lehrfach). Au fond, il n'attache pas grande importance à
cette classification; et il a raison
d'ajouter que les statis-
tiques démographique et morale diffèrent des statistiques
économique et politique en ce que ces dernières sont subor-
données à d'autres sciences (mais, si les
premières ne le sont
pas, cela n'a-t-il pas sa raison dans la nature des objets étu-
diés, et ne convient-il pas alors de les ériger elles-mêmes en
scieuces?) Voilà comment il définit ensuite le rapport de
ta démographie à l'économie
politique étudier les faits de
population, c'est étudier les sujets économiques, cOnsomma-
teurs et producteurs. Mais la biologie les étudie aussi.
Et
toutes les sciences sociales s'occupent bien de l'homme. de
même. Quant à la division de cette science en l'étude de
l'état et l'étude du mouvement de la
population, puisqu'il
reconnaît que la seconde seule recherche des lois, on
peut n'y
voir qu'un cadre provisoire nous l'avons
critiquée en elle-
même, à propos du livre de von Mayn."
Le problème de la population totale du globe terrestre a
toujours éveillé la curiosité. L'auteur nous explique comment
on la détermine (50 p. 100 des hommes sont réellement
dénombrés; 40 p. 100 sont l'objet d'évaluations;on sft guide
sur des rapports variables quand ou connaît le nombre des
familles. des mariages, des morts, des naissances, la unse des
appréciations est plus sérieuse que quand ou admet que,
pour chaque unité de surface, chaque maison, chaque guer-
rier '?. il y a tant d'habitants;. L'histoire des anciens dénom-
brements 'depuis celui d'Israël. i, la description desdifllcul-
tés rencontrées en des pays peu civilisés (aux Indes, dans les
ne r.A pormTiox ks oksôiui, 74?

Iles océaniennes), sont des morceaux assez pittoresques. L'au-


teur nous donne ensuite une liste très complète de tous les
dénombrements effectués en Europe. Il distingue les notions
de population légale, domiciliée. et présente (c'est la dernière
qui est le moins inexacte et où l'on s'arrête généralement). 11
dit l'essentiel sur les conditions de temps où sont et où
devraient être effectués les recensements (le mois et le jour
à fixer, la durée, la simultanéité dans les divers pays), et sur
les diversesméthodes de dénombrement (le système des listes,
ou des cartes individuelles!. Passant à la densité de la
population, et aux rapports d'agglomération, il note qu'entre
.les deux phénomènes il n'y a pas une relation constante des
pays très peuplés (Italie, Inde, Jupon) ont une faillie popula-
tion agglomérée, au contraire de certains pays peu peuplés
(États-Unis et Australie); des tableaux et graphiques inté*
ressauts illustrent l'évolution des divers pays sous ce rap-
port, L'équilibre des sexes est encore un des topiques de
la démographie. Au nord d'une diagonale tracée eu Europe
du nord-ouest au sud-est il y a excédent de femmes, et au
sud, excédent d'hommes l'Autriche-Hongrie ménage la tran-
sition. L'émigration, qui déplace surtout des hommes, en
serait la cause principale; toutefois l'Italie, d'où on émigré
beaucoup, offre un excédent d'hommes c'est que la morta-
lité infantile, au lieu d'y porter surtout sur les garçons,
comme partout ailleurs, y porte également sur les deux
sexes. – La composition de la population d'après l'âge per-
met de distinguer quatre grands types de structure uua
pyramide représentera les pays à natalité normale (Alle-
magne une cloche, les pays si faible natalité et faible morta-
lité France) puis viennent des figures irrégulières, avec
des nœuds et des ventres, en forme d'oignon 'population des
grandes villes où les adultes sont surtout nombreux), ou de
fuseau (populations agricoles qui envoient leurs adultes dans
les villes – Nos cadres de l'état civil sont mal adaptés à
certains pays, tels que Cubaet Porto-Rico, où. pourcent habi-
tants, on en trouve lG.fip. 100 mariés, et 8,8 p. 100« vivant
ensemble par consentement mutuel ». En Europe, l'auteur
remarque, avec raison, que le rapport des veufs et divorcés
aux mariés est plus représentatif que leur rapport aux
ménages (puisqu'il y a deux personnes pour chaque ménage)
et il note que la composition de la famille peut s'entendre en
deux sens, suivant qu'on étudie la fécondité (nombre des
.748. L'ANSRBSQCIOLOUIQUK.
MQ0.18QU

enfants nés du mariageactuel),ou les groupementslocaux


(nombredesenfantsissusde ce mariageou de précédents,et
vivantavecles parents).
Le mouvementde la population(l'auteur appelle mouve-
ment nuluiel celui qui résulte des naissances, morts, ma-
riages on ne sait pourquoi,puisqu'ilen étudie les causes
sociales)comprendd'abord les faits de natalité. L'équilibre
des sexesest étudiéde ce nouveaupoint de vue. Pourquoi
une proportionà peu près constante(légerexcédentde gar-
çons)? S.-A.examineles'explicationssuggérées(il nattrait
d'autant plus de garçonsque le père serait plus âgé que
la mère quand le père serait plus jeune, il y aurait
plus de filles; la naissanced'un garçontémoigneraitde lit
vigueurdu père; – les tribus primitives,ou il y avaitexcé-
dent de filles,auraientété éliminéespar les tribus produc-
trices de mates); et il mentionnece phénomène curieux,
constaté dans toutes les provincesd'Autriche et en Nor-
vège parmi les premiers-nés,il y aurait plus de Illlesque de
garçons; parmi les enfants légitimes,les premiers nés, et,
parmi les illégitimes,les autres (naeligehorene) auraient le
plus de chancesd'être garçons. L'étude de la mortalité
soulèveun problèmenon moins « classique », celui de la
duréede la vie humaine.Lesopinionset observationssur la
durée possiblede notre existencesont anciennes et nom-
breuses c'est unehistoiremêléede biendes légendes.Quant
à sa durée naturelle, Lexisl'a déterminéeen reconnaissant
la périodeoù (aprèsles annéesqui suiventla naissance)les
morts sont le plus tassées c'est entre 65 et 7oans. Mais
quellessont, pour chaqueâge, les chancesde vie? Ellesse
peuvent calculerpar deux méthodes;ou bien on suivra une
génération depuis le début, notant pour chaque année le
nombredes morts; maisune générationne se laisse pasainsi
isolerdans l'espace,des migrationsincessantesla diminuent
ou l'augmentent; ou bien (et c'est ainsi qu'on procèdele
plus souvent)on s'en tient aux groupesd'âge relevés dans
une populationlorsd'un recensement,et on calcule pourune
courte périodele nombredes morts qui se produisentdans
chacune à la générationréelle, on substitueainsi une géné-
ration idéale.On constateainsi que les morts se distribuent
avecune régularitéremarquable l'auteur y voit le résultat
d'un jeu très complexed'actionset de réactions, qui ne se
peut modifierbrusquement,et qui,entre des limites déter-
t)KU COPULATION
KK(JÉNËIUt 740
minées,produit les mômeseffets la mortalitéserait fonction
d'un milieuphysiqueet socialrelativementstable.– Cnrdes
causessocialesinterviennent.Ona calculéla mortalitéinfan-
tiledans les classesles plus favorisées,qu'onpeutconsidérer
comme la mortalité infantile normale, due à des causes
physiquesnaturelleset dont faction nese peut écarter elle
estde 8 à 13p. 100; or, en France,la mortalitéinfantileest
de \Q à I" p. 100, et danscertains pays, de 35 à 43 p. 100.
Autre cause sociale le célibat, ou le veuvage les gens
mariésseraienten meilleureposture, mais très légèrement.
Plus nette est l'influencede la profession.Dans les profes-
sions libérales,J'état ecclésiastique(surtout chezles protes-
tants) assure une vie notablementplus longue; de môme
l'état de mettre ou professeur(Lehrer).Les médecins,en
revanche, pas plus en Prusse qu'en Angleterre,ne vivent
plusque la moyennedeshommes.Lamortalitédes ouvriers
par professiona été moinsétudiée; il ne parait pas que les
tailleurset cordonniersmeurenttrop tût les domestiqueset
garçons employésdansles aubergeset les hôtelssont bien
plus vitedécimés.Lestravailleursdes ports viventpeu, mais
non les employésde cheminsde fer. – Passantenfinà la
nuptialité,après «voir indiqué que dans l'est de l'Europe
'notammenten Russie,par suite des conditionsde In vie
campagnardeouse mariebienplus tôt que dans l'ouest,l'au-
teur se livrea un calculassezcurieux il prétenddéterminer
le degréde l'inclinationéprouvéepar les hommesde chaque
âge pour les femmesde chaque âge, et réciproquement,en
rapportant le nombredes mariages effectifsau nombredes
mariagespossiblesdans chaquecombinaison il parvientk
des conclusionsde ce genre les hommesde 35 à 30ans ont
une tendanceplus fortede 50 p. 100à épouserdes femmes
plusjeunesqu'euxque les hommesde 35à 40ans.
On le voit,c'est là un livre extrêmementnourri et divers,
et qui révèle,chez son auteur, le senset le goût des réalités
concrètes,une abondanteérudition, et une curiosité inces-
santede tousles aspectsde la viesociale.Mais,si on en écarte
beaucoupde digressions- (citonsencoreun résuméde toute
l'histoire de la population, une histoire des compagnies
d'assurancedepuis le xvin"siècle et de leurs statistiques),
tout ce qui est surtout érudition, ou renseignementsrétro-
spectifs trop fragmentairespour qu'on en puissetirer parti,
et encore toute la partie physiologique(l'étudedes causes
750 l'année sociuloqiquk. ivw-iwi

physiques de mort, eu particulier des maladies, l'anthropo-


métrie, etc.) qui n'est nullement à sa place en une étude
de science sociale, que reste-t-il dune? Essentiellement une
série de réflexions, de douuées numériques et de calculs en
vue de déterminer des chances chance de mettre au monde
un garçon plutôt qu'une fille ou l'inverse, chance de survie
aux divers âges et dans les diverses professions, dans ou
hors le mariage, chance de se marier, et, si on se marie,
d'épouser une femme de telle catégorie d'âge. Cette préoccu-
patiou est si absorbante chez l'auteur, qu'il en oublie la
recherche des causes (pour beaucoup de faits, il nous doune
des tableaux de chiffres sans essayer d'en rien tirer), ou qu'il
se conteute ici à trop bon compte (sou explication de la régu-
larité dans la disposition des morts par âge est une puro
hypothèse philosophique). Par là, ce travail appartient bien
encore à cette période préscientifique des recherches sociales,
où ce qui passe au premier plan, ce ne sont pas môme les
questions les plus importantes pour la pratique, mais celles
qui, par leur étraugeté, sollicitent le plus la curiosité de la
foule. Al. H.

SUNDBAERG (Uustav). – Bevoelkerungsstatlstlk Schwe-


dens, 1750-1900. Einige Hauptresultate. Stockholm,
P.A.Norstedt,lï>07, 170 p., in-8".
La Suède est le seul pays qui possède une statistique offi-
cielle et régulière do la population depuis le milieu du
xvin' siècle (registres des églises;. Faute de données sufïl-
sautes dans les autres, ou ne peut établir de comparaison
entre les mouvements démographiques des divers pays que
pendant le xix*siècle; mais, même antérieurement, on peut,
des données suédoises, inférer approxinmtivenienl ce qu'ont
été ces mouvementsen Europe. La période favorable pour la
Suède s'étend de 1811 (après les guerres) à 1880 (avant le
grand mouvementd'émigrationi.
L'auteur, étudiant la répartition de la population par âge,
pose, commeprincipe essentiel, que le groupe de 15 à 80 ans
comprend uormalument, dans tous les pays, la moitié de la
population, il y aurait lieu, alors, de distinguer trois types
le progressif, où le groupe do Oàlu ans serait nettement plus
grand que le groupe de 80 ans et plus (États-Unis; le station-
naire, où ils seraient à peu près égaux .France; le régressif,
DU LA l'Ol'UUATJONKN lillNKlUl 75i

où le second serait plus important que le premier. Une forte


immigration, si les mariages et naissancesont une fréquence
normale, ne diminue pas le groupe de 15 à 00 ans, mais aug-
mente celui de Oà15, et, si les mariages et naissances sont
peu nombreux, surcharge le groupe de 18 à SU(les grandes
villes) d'autre part, une forte «migration peut diminuer
temporairement le groupe de lîi a SO(Suède). La population
des pays civilisés eu général, participe à la fois du type pro-
gressif et du type stationnaire (le groupe de 0 à 15 aus com-
prend un tiers, et le groupe de ou ans et plus un sixième des
habitants). La Suède, comme les pays de l'Europe occiden-
tale, est très voisine du type statiuuuaire, avec, comme parti-
cularité, une population très nombreuse dans le groupe de
G5ans et au-delà. – En suivant les changements de cette
répartition au cours du siècle, ou vérifie très nettement une
loi dite d'Eilert Sundt, d'après laquelle les années (excep-
tionnelles; à forte natalité sont l'origine d'une vague isolée,
qui reste visible daus toute la série des années suivantes, et
qui, de plus, se propage de génération eu génération, puis-
qu'une génératiou nombreuse procrée do nombreux enfants.
C'est ainsi que la période 1841-1850marqua pour toute l'Eu-
rope une augmentation de naissances, résultat de l'augmen-
tation des naissances après les guerres uapoléoiiieunes. Des
intervalles réguliers de 30 à 35 aus se relèvent entre ces mou-
vements successifs de flux ou de reflux.
Quelle est Ja relation des deux sexes daus celte population ?
On note un fort excédent de femmes au milieu du xvm"siècle
(sans doute en raison des guerres, mais aussi de la faiblesse
de l'excédent des naissances mâles, et de l'insulïisante. crois-
sance générale de la population), et une tendance leute et
continue a l'égalisation de 1810 à I80S (par suite de la très
forte mortalité des hommes, dans cette période où. l'alcoo-
lisme est le plus développé). Qu'à ce moment le grand mou-
vement d'émigration n'ait point rompu de nouveau l'équilibre,
cela tient à ce que, dès qu'il eut commencé, l'excédeut des
naissances mâles s'accentua i'eu particulier dans les provinces
d'où l'on émigrail le plus et aussi à ce que la mortalité des
mâles baissa (lutte contre l'alcoolisme;. La relation des deux
sexes parmi les non-mariés varie beaucoup de pays eu pays
en Suède, les femmes étaient de moitié plus nombreuses au
milieu du xvm" siècle, et le sont, maintenant encore, d'un
quart.
75a l'ankêb sociolomquï. 1306-190'J

Le rapportdu nombredes femmesmariéesde 115à 45aus à


la populationtotale est instructif. puisque c'est en raisonde
la fréquencedes mariagesque varie la rèpartion de la popu.
lation par âge. Eu Suède, où ce rapport était, au xvm'siècle,
plus élevéque daus l'Europeoccidentaleou du Nord-Ouest, il
est maintenant le plus bas (l'Irlande seule exceptée).La
moitié,environ, des femmesde cet âge sont mariées.– La
diminutionde la proportiondes mariésest d'ailleursun phé-
nomènecomplexe à côté des mariagesqui u'out pas lieu,
d'autressont simplementretardés(surtoutpour les hommes).
Ladiminutionporte,en effet,surtoutsur les mariésjeunes.
Quant au nombredes mariages(rapportéau nombredes gens
en âge de se marier), il a baissé très peu dans l'Europeocci-
dentale, il n'a pas baissédans l'Europe du Nord-Ouest (pays
germaniques;;sa diminutionest nette, au contraire,dans les
pays scandinaves,et particulièrementen Suède. – Cherchant
les causesdece phénomènetrès Important,l'auteur distingue
quatre périodesdans son évolution après que les mariages
ont été très fréquents, vers la (lu du xvm"siècle.vient une
diminution,à cause de mauvaisesrécoltes, maisaussiparce
que lesbesoinset les exigencesont soudain augmenté.Dans
les dernièresannées de ce siècle et pendant tout le premier
tiers du xix' siècle, les mariages augmentent la prospérité
économiqueest revenue,maisaussi descauses moralesinter-
viennent « les souffrancesdes annéesde la Révolutionet des
guerresnapoléoniennesont donné une tournure plus sérieuse
au caractèredes peupleseuropéens il se peut qu'ils aientdû
limiter leurs appétits ». Ensuite la baisse reprend elle
s'explique d'abord par le flux dont nous avonsparlé ci-
dessus, par le grand nombre des gens en âge de se marier
vers 1840 il aurait fallu un développementéconomique
exceptionnelpour permettretant de jeunesgens desecréer
une famille. Mais,ce flux passé, la diminutiondes mariages
contiuue c'est que la Suèdeest dans une périodede difficile
transition de 1861à 1870,elle renonceà sou isolementéco-
nomique,au régimepatriarcal, pour se mêler au mouvement
mondialdes affaireset de l'industrie elle n'y parvientqu'à
graud'peine.
Le chiffregénéraldes naissances (rapport des naissancesà
la population)EnSuèdeest inférieurà ce qu'il est en Europe,
et baissede plus en plus. Celatient surfont à la diminution
du nombredes mariages. Car la féconditélégitime(rapport
DK LA POPULATIONIX UI&liBAt» 753

des mères d'enfants légitimes aux femmes mariées) est plus


élevée en Suède qu'en Europe occidentale, et égale à ce qu'elle
est dans les pays germaniques. Il est vrai que, depuis 1888,
elle diminue (môme aux années de prospérité) le peuple
suédois, commetous les peuples civilisés, comme l'Allemagne
«Ile-môme en dernier lieu, s'est engagé dans les voies de la
restriction. Le chiffre des naissances va donc baisser de plus
en plus. Le nombre des naissances illégitimes en Suède
est élevé (le neuvième de tous les eufants) eu raison surtout
de la forte proportion des femmes non mariées, et, aussi, de
la diminution des naissances légitimes. C'est surtout à la fin
du xvmc siècle et au commencement du xi.v°siècle que leur
nombre s'est accru (avec le développement de l'alcoolisme).
Il tend, dans les dernières années, à diminuer (ea raison du
recul de l'alcoolisme et de l'émigration L'âge moyen des
mères d'enfants illégitimes a baissé (beaucoup-de filles sont
ouvrières de fabrique); toutefois, on en trouve plus qui ont
40 ans que 19 on met au monde des enfants naturels jusqu'à
un Agetrès avancé.
A côté du chiffre bas de ses naissances et de ses mariages,
la mortalité de la Suède se présente sous un aspect favorable.
Le nombre de morts était de 16 p. 100, et, maintenant, est de
37 p. 100 inférieur à la moyenne européenne la Suède s'est,
sous ce rapport, élevée au niveau de la Norvège et du Dane-
mark. Il n'est pas exact, d'ailleurs, que de cette faible morta-
lité profitent les seuls enfants en bas âge. Pour toutes les caté-
gories d'âge (de cinq aimées) comprises entre 15 et 73 ans,
avec une étunnante régularité, le chiffre annuel des morts est
inférieur à ce qu'il est dans l'Europe occidentale. La vaccina-
tion semble avoir exercé ici une influence décisive. La durée
moyenne de vie s'est élevée de plus de dix ans au cours du
siècle.
Quant a l'accroissement organique de la population ('diffé-
rence entre le chiffredes naissances et des morts), il a doublé
du xviii" au xix" siècle, eu Suède comme, selon toutes vrai-
semblances, en Europe. Au milieu du six* siècle, la Suède,
épargnée par le choléra, a pris do l'avance sur l'Europe main-
tenant, l'émigration l'a un peu retardée (bien que l'A migra-
tion soit maintenant très réduite). La Suède semble s'être
toutefois adaptée à ses nouvelles conditions économiques. •–
Mais, pour elle, comme pour l'Europe peut-être, ne faut il pas
attendre que le mouvement s'accélère. En Suède en parlicu-
I- Dtokhkiu. – Anm'o sociol., lfM8-l!io:i. W
754 l.'ASSKH SUCIULlHItQCK.
1900-tiW)

culier, l'arrêt de l'émigration,et mêmeun mouvementde


retourdes Suédoisémigrés,compenserontà peinel'effet dela
diminutiondes mariageset naissances quant à la mortalité,
elle n'est pas indéfinimentréductible.
Cesremarquesgênéralesserventd'iiiU'oductionaux tableaux
statistiquesqui remplissentplus dela moitiédu livre; elles
mettentbien en lumièrel'importancede posséderdes rensei-
gnementscouti dussur une périodeétendue,alorsmêmeque
l'objetdel'étudeest très limitédans l'espace,L'auteurcherche
à déftuirdes types; peut-êtreles pose-t-ilquelquepeu arbi-
trairement, trop « priori (ainsi,dansle type régressifaucun
payseuropéenne rentre). Sesexplicationscausalessontvrai-
semblables,maisil invoqueparfoistrop decirconstances hété-
rogènes(alcoolisme,vaccination,mauvaisesrécoltes,etc.):
il serait d'unemeilleureméthodede s'en teniraux faitsmor-
phologiquesabstraitementenvisagés.Le livrereste très inté-
ressant – (notonsune justificationingénieusede la valeurde
la donnée chiffre général de la mortalité,p. 53-56,– et
une défense,contrevonMayr,de la méthodedela statistique
officiellesuédoise,p. 161-103), et instructifsousbeaucoup
de rapports. M. H.
COLAJANNI !N.J. Demografia.Napoli,
L. Pierro,190».
PRINZINO. BevœlkerungstheoretisoheProblème.Zeitsehr.
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08 LA POPULATIONKN GKNÈIU!. 755

Résultats statistiques du recensement général de la popu-


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Statistique internationale du mouvement de la population
d'aprèsles registre*del'étatcivil,Réwmé'ritrospeotlf
depukl'origine
desstatistiquesdel'état civiljusqu'en1905(Ministèredu Travailet
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i$03in rapportodimodidi allatamenlo,e aileeondisionieconomiche
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rong, ihre gcograpbiscbeVerteilung,VergnngenheitundZukuiifl.
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lation. Eslralloda a Scientia»,Rivisladi Scienza,i 909,n. XI-3,29p.
MOMBRRT (P.). gtudlen sur Bevoelkerungsbewegung in
Deutsohland in don lolztenJahnsehntenmitbesondererHeruck-
siclitigungder ehellchenFrachtbarkeit.Karkruhe,1907.
750 l'AXXIÎK SOCIOIOGIQDE.1906-J909

III. – MOUVEMENTS
MIGRATOIRES
l'ai- M. IUuiwawis.

AUBERT(Louis). – Américains et Japonais (L'émigration


japonaiseaux Hawaï, en Californie,au Canada et dans
l'Amériquedu Sud le conflitéconomique,socialet poli-
tique les États-Unis,le Japon et les puissances).Paris,
ArmandColiu,1908,430p., in-18.
Les lies Hawaïsont dwenuesle principalbut de l'émigra-
tion japonaise.Annexéespar les États-Unisen 1898, elles
tiraient leur prospérité de la productiondu sucre d'où un
conflitentre les planteurs, qui veulent une main-d'ceuvreà
bon marché(la population indigènea diminué de plus de
moitiédepuiscinquanteans, lesBlancstravaillentmalet sont
exigeants)et les Américains,fidèles auxconceptionsnatio-
nales du gouvernementdu peuplepar le peuple, et hostiles
atout régimed'esclavage.Depuis1887surtout(mesuresrestrei-
gnant l'immigrationchinoise),les Japonaisaffluent.Le gou-
vernementjaponais,aprèslesavoirsurveillés,les livreà eux-
mêmes, à présent qu'ils constituentun groupe asseznom-
breux et résistant, Ils sont fortsde leur esprit solidaire ils
forment des compagniesde travailleursqui s'engagentpar
contrats.Bientôt,ceuxqui viennentnesont plus despaysans,
maisdes hommes plusinstruits,plusambitieux,pluscapables
de diriger un mouvement.Aussi,une bonne part des Asia-
tiquessedétournentdeschamps, font l'apprentissagede mé-
tiers plusqualifiés(seulsles plus compliquésleur échappent
encore),et quittent alors les lies pour la Californie.Aux
Hawaïmême,its s'installentenfin,et s'approprientle sol on
a dit qu'il conviendraitde morcelerles grandes plantations
qui appellent des serfs asiatiques,d'y substituer de petits
domainesqu'affermeraientdes Blancs indépendants mais
lesJauness'emparentdes fermes:leurs économies,leursoli-
darité leur permettramômede se risquerà la grandeculture.
Lu richesselégendairede la Californie,sa populationmé-
diocre(elle ne vient, par le nombrede ses habitants,qu'au
Vingtetunièmerangparmiles Ktats),trè9raélangôe(elleconipte
30,8p. 100d'Américainsvenantdes autres États, 24,7 p. 100
d'étrangers;,et très urbaine(l'accroissementurbainest aussi
MIGRATOIRES
«0UVBMBNTS 737
ecroiBsementrural)
rapidequel'accroissement rural) exnliaue ait besoin
au'on v ait
expliquequ'ony besoin
de travailleurs,surtout dans les campagnes.Mai»pourquoi
n'y vient-onpas desrégionsles pluspeupléesdes États-Unis?
C'est,pensel'auteur,que, pour un émigrant arrivéd'Europe,
elleserait un secondet plus lointain exil. MalIrriguée, mal
exploitéepar des « ranchers » qui pratiquent la culture
extensivesur de vastes « estates », elle réclame, pour être
miseen valeur,une populationrurale, adroiteet patiente, de
petitsfermiers.Sans« un noyaudosociétérésistantet capable
d'une puissanteassimilation», c'est une placeà prendre pour
les communautésde paysans japonais. Malheureusement,
ceux-cide restentpas à leur place domestiquesou employés,
Ils quittentleur patron dès qu'ils y ont quelque intérêt tra-
vailleursruraux,ils deviennentproprièûires les « coolies»
fontuneconcurrenceirrésistibleaux petits boutiquiers, res-
taurateurs,tailleurs, aux ouvriers groupés en trade-unions
exclusiveset farouches.Ils ne sont encore que bien peu en
Amériqueet eu Californie,mais ce qui inquiète, c'est que
ce ne soitlà que leur avant-garde.
Chinoiset Japonais ont l'instinct grégaire ni par leur
moralité, ni par leurs habitudes économiques,ils ne res-
semblentauxAméricains(il faut lire la très vivantedescrip-
tion de Cbinatownà San Francisco,p. 186sq., et toute une
curieusepsychologie du Japonais, p. 213-223;.Les Japonais
sont « une racede missionnairespatriotesenvoûtéedans une
tradition ». La fusion d'émigrauts de régionsd'Europe ei
différentesest la preuve qu'entre les Blancslesdistinctions
ethniquessontde surface maisl'impossibilité,pourle peuple
américain,d'assimilerles Japonais,si elle est reconnue,n'en
fait que mieuxressortirque l'oppositionde raceentre Jaunes
et Blancsest irréductible.Ésl-celà, commele prétendSpen-
cer, un fait physiologique? Eu tout cas, le Japonais, même
naturalisé,se rattacherait toujours au Mikado « la civilisa-
tionqu'ils vontchercherne prolongepas cellequ'ilsquitteut».
L'auteur,enfin,tente d'expliquer ces migrationsdes Japo-
nais par delàle Pacifique.En fait, le Japon aurait des raisons
de nelespointfavoriser la plupartdes émigrants,manœuvres
inférieurs qui passent aux Hawaï par un régime de demi-
esclavageet ne s'améliorentguèreen Amérique,n'accroissent
pas à l'étrangerle renomde leur pays au Japon,où40 p. 10b
des terres arablesseulement sont cultivées;où les salaires
haussent, on les utiliseraitau mieux la Corée,au reste, et
758 fc'ANNlig 1006-1900
SOCfOLOQIQ/BB.

la Mandchouriedu Sud, maintenantconquises,ue doivent-


ellespas être occupées? Maisil y a des raisonséconomiques
pour que l'ouvrierjaponaisse tourne vers les États-Unisses
qualitésde sobriété,de dureté, desolidaritésontneutralisées
quand il rencontrela concurrencedes Chinois.La grande
industrie, en voiede développementau Japon, forme des
ouvriersqui convoitentles salaires Industrielsaméricains.
Surtout,c'est bienmoinspar la densitéde la populationjapo-
naiseque par la pousséeimpérialisteconsécutiveà la victoire,
qu'une telle migrations'explique les Japonaissontanimes
d'une passionde revanchecontre les États-Unisqui, à Ports-
mouth,les ont empêchésde tirer tout le parti possiblede leur
victoire.
Celivre n'a pasqu'unintérêt d'actualité.Surces faitscom-
plexeset mouvants,l'auteura fortementréfléchi son œuvre,
riche et précise, doit être le point de départ et l'amorcede
recherchessociologiques des plus fécondes il Imported'au-
tant plus d'indiquerici à quellesconditions.– Il est certain
que lesgroupesdoiventêtreétudiésdans leurs relationsavec
le sol, et que les mouvementshumains se développentdans
descadres physiquesparfoisnon modifiables.Maisil fautse
défierd'un déterminismegéographiquequi expliqueraitces
phénomènessociauxuniquement,ou principalement,par ces
cadres(legrand«siphoncoudé» descourantstranspacifiques,
les montagnesqui séparentla Californiede l'Estaméricain).
Au fait, l'autourreconnaîtlui-mêmeque ces conditionsexté-
rieuresà l'hommeont perdu de leur importance.Quandil
nous explique la soudaine invasion des Japonais dans
l'Ouest américainpar un déplacementde leurs effortsqui,
contrariés d'un côté,se développentde l'autre, oh ne peut
s'empêcher de rapprocher le caractère indéfini de leurs
ambitions,aprèsleurs premièresvictoiressur les Russes,et
cet appétit actuel d'espacesillimitésoù s'étendre.Il estcer-
tain qu'ici, commelà, ce sont des représentationsspatiales
qui interviennent,que le sens de l'espace(commediraitRat-
zel) s'est brusquementdéveloppéchez ce peuple. Mais,en
mêmetemps,est-ceque les Japonaisdésirentannexerà leur
territoiretouteunepartiede l'Amériqueseptentrionale? Cer-
tainementnon.Bienplus, le gouvernementduMikadoengage
les immigrantsà s'américaniser,mêmeà se fairenaturaliser:
peu importe,si cesAméricainsjaponaisrestentgroupés,etsi
le lien qui les rattacheau Japon subsiste. Avecl'unité terri-
MOUVKUENTiMIUHATOIiUB 7!i'J

toriale, l'unité de la nationest désormaisloin dese confondre.


L'emprisede l'homme sur la terre est si forte, maintenant,
qu'il'la considèrecommeun instrument, qu'on peut trouver
partout, et non plus commeun ensemblede forcesphysiques
qui le domineraient,puisqu'il peut s'en passer sans perdre
sa patrie. Mais, sans doute, en est- toujours de même
c'est la réaction du groupesur les conditionsmatérielles,et
l'idée qu'il s'en fait, par conséquent, c'est la signification
socialedecesconditions,et non cesconditionsenelles-mêmes,
qui importeut. C'est entre des phénomènessociaux,et uul-
lemententre des faits physiques et des faits sociaux,que la
science socialedoit rechercherdes rapports.
L'étudede l'aspect économiquede tout ce mouvementest
la partie la plus instructivede l'ouvrage. Il est vrai que la
notion de race complique singulièrement ces faits « la
croyance générale en l'impossibilité d'assimiler les races
jaunes, dit l'auteur, inèue pratiquement'au même résultat
qu'une certitude scientifique». Cette croyance,sa profou-
deur et sou étendue, importentseules,en effet, ici. Maisjus-
qu'à quel point existe-t-elle, en particulier chez les agents
économiquesque la concurrencejaponaisemenace? Carleurs
affirmations,et mêmeleur convictionapparenteindividuelle,
n'en sont pas des indicescertains.En toutcas, lesouvriersdes
Trade-Uniouset petits boutiquierscaliforniensont évidem-
menttout avantageà entretenir ce préjugé. – Relevonsquel-
ques observationstrès curieuses de l'auteur, sur l'attitude
premièredes Blancsvis-à-visde cesJaunes. Ils leur abandon-
nent d'abord los métiersde manœuvres,de maçons,puisdes
métiers de plus en plus qualifiés, se cantonnantdans des
fonctionsde direction, et travaillant le moins possible« pour
affirmerlu supériorité intellectuellede leur race». Par réac-
tion, ajoute l'auteur, un Blanc, aux Hawaï, dépenseplus
qu'un salarié de mêmeclasseaux États-Unis,achètedes mar-
chandisesde meilleurequalité, etc. Etil on estde mêmedans
les campagnes il n'y a pas de classe intermédiaire« ana-
logue ces communautésde fermiersindépendantsdu Middle
West américain qui, entre les trusteurs et les prolétaires
immigrants,maintiennentencorel'idée démocratiqueet éga-
litaire». – Nousdemanderonss'il est nécessaire,pour
expli-
quer ces réactions caractéristiques, de faire intervenir la
notionde race, si ce ne sont pas plutôt, ouau moinsà la fois,
des manifestationsd'une consciencede classeprofessionnelle.
l.A.NXKK gnCKlLOUWK 490M009
7(J0

le mêmepays,
Rapprochonsde ces faitsd'autres relevésdans les ouvriers
soit par d'autres enquêteurs, par exempleque
très qualifiésde NewYork,plutôt qued'exercereu tempsde
mendier,
chômageun métierinférieur,envoientleursenfants
soit dansle livremême,que les éniigranlsd'Europe,qui ont
subi d'abordle méprisdes ouvriersaméricains,prennent, en-
Californie,leur revanchesur les émigrants asiatiques, et,
encore,que les cowboysdes ranchesde Californie,agricul-
teurs-cavaliersqui ue cultivent qu'en grand, méprisent le
fermierde type européenet la culture intensive, Il semble
que danscepaysneuf,oùdes couchessuccessivesd'émigrants
ont du lutter' pourse faire leur place,cetorgueil profession-
nel des premiers arrivés, des « parvenus», soit un simple
(l'exclusivisme actueldesTrade-
moyendedéfouseéeonomique
Unionsaméricainess'expliquepeut-êtrepar là), et que l'hos-
tilité desracesdéguiseet exprimeIci la simple concurrence
ait été souventun
quese fontlestravailleurs.Quece préjugé a étésou-
prétexte, cela ressortde ce que l'incidentdes écoles
levé, nousdit l'auteur, simplementpour amener l'Amérique
à trancherJa questiondel'immigration(questionéconomique):
ce
qu'il ne soit peut-êtrepas très profond,c'est que prouve
l'admirationtémoignéed'abord aux Japonaisvainqueursdes
Russes,et le refus,de la part du gouvernementet de la majo-
n'est pas
rité, de le partager. Nousdemandonsencores'il
de la science, d'ex-
possible,et s'il ne serait pas de l'intérêt écono-
primer tous ces phénomènesen termes purement
miques.
Éuflu,nous ne pouvonsrenoncerà l'idée que des phéno-
mènesmorphologiques, tels que les migrations,sont à expli-
et pour
quer par des phénomènesmorphologiques, Aséparer, le
l'étude,des phénomèneséconomiqueseux-mêmes.« Pour
de
trop-pleinde main-d'œuvre,la pented'écoulement l'aque-
duc à double arche s'incline du Japon aux Ifawaï. puis en
Californie;c'estladifférencedes salairesquicréel'écoulement
dans cesens » (p. 105;.D'accord,s'il s'agitseulementde chan-
la-nationalitédestra-
gementsde professions(quelleque soit
vailleurs,qui n'importeici que secondairement),du dévelop-
etc. Mais tout cela peut se
pemént de certainesindustries,
concevoirsans qu'il y ait migration que le nombredes ou-
vriers de telle catégoriese trouveaugmentéà San Francisco,
il importepeu (économiquement) que ce soit par l'arrivée
d'étrangers non japonais, d'Américainsd'autres Etats, ou,
MOUVEMENT*
MIGRATOIRES 76|

dans la vllle même, par le passage d'ouvriers d'une catégorie


dans une autre, par une plus forte natalité. Tous ces cas,
pour
la morphologie sociale, au contraire, cessent d'être des moda-
lités indifférentes, pour devenir le phéuomèue essentiel. L'au-
teur a pris soin de nous donner des'indications précises sur la
densité de la population aux Étals-Utils, en Californie, au
Japon; il note le moment où, aux iiawaï, les Japonais font
venir leurs femmes, où, à côté des hommes seuls, des familles
peu à peu s'installent: parallèlement, sans doute. des change-
ments économiques se produisent (aux Hawaï, en particulier,
les Japonais deviennent locataires, propriétaires) mais ces
deux séries de faits sont à examiner isolément, et à rattacher
aux faits de même nature. Dans une étude de morphologie
sociale, les phénomènes économiques n'ont place que quand
ils permettent de supposer derrière eux des faits morpholo-
giques concomitantsqu'ou n'a pu atteindre. – Cen'est pas une
simple question de vocable, mais une abstraction nécessaire
pour que les faits se puissent poser eu termes assez généraux,
pour qu'on les puisse comparer à d'autres (en d'autres pays,
à d'autres époques, dans des circonstances
économiques toutes
différentes), pour qu'on en puisse enfin tirer des lois.
M. H.
TONNBLAT(K.). L'expansion allemande hors d'Eu-
rope. États-Unis, Brésil, Chanloung, Afrique du Sud. Paris,
Armand Colin, 1908, Xl-277 p., in-18.
L'auteur de ce livre a visité les principaux établissements
d'hommes de nationalité allemande dans les deux Amériques.
Les deux premières parties, où il étudie des phénomènes de
« colonisation spontanée », nous retiendront seules.
I) est probable que, depuis 1820, le nombre des immigrants
allemands aux États-Unis a été de plus de 8 millions (soit un
quart du total). Les hausses fortes qu'on remarque dans ce
mouvement, en 1832, 18491854, 18C6-I870outdes causescer-
tainement politiques. Depuis quinze ans, la moyenne des
départs annuels a été très faible. LesAméricains nés en Alle-
magne ou dont un des, parents y est né sont au nombre de
10 millions et demi. Leur répartition
géographique est asset
définie. Dès le début ils sétablireul en bordure des territoires
défrichés, daus les « marches », guère au delà. C'est vers le
Nord qu'ils se sout concentrés, entre l'Ohio, le
Mississipi et
les grands lacs, en particulier dans l'Illinois et le Wisconsin,
768 l»Ofi-i'J0!>
l'ANMÎB SOCfOLOUIQCK.

Quellea étéjusqu'ici leurattitude vis-à-visde leurancienne


et de leur uouvellepatrie, et l'attitude de celles-civis-à-vis
d'eux- mômes?– C'estseulementaprès les guerresnapoléo-
niennesque les nouveauxémigrantsout apportéaveceux la
consciencedel'unité de leur race.A partir de 1830,le dessein
de demeurerallemands se fait jour, et se manifesteen des
congrèset des associations.Cequi nuit à cette propagande,
c'estd'abordl'oppositioninterneentreémigrantsd'avant1M8,
pour la plupart catholiquesdes pays rhénans,ou luthériens
intransigeants,et émigrantsd'après 1848, pour la plupart
révolutionnaires, et ensuitela guerre de Sécession,où ils
afflueutdans l'armée du Nord (pour des raisons géogra-
phiques,maismoralesaussi), et se fondentaux Américains.
La fondationde l'empireallemandet les victoiresde 1870
ébranlentà nouveaules Deutsch-Aroerikanermaisl'Union
nationalequ'ils fondenteu 1001repoussetoutesles avances
de l'Unionpaugermaniste son but est « d'éveillerdans la
populationd'origine allemandele sentimentde son unité,
pourdévelopper. toutes ses forces latentes, de défendre.
ses justesintérêts qui ne sont pas contrairesnu biengénéral
du pays».– En somme,ils s'américanisent ons'en aperçoit,
quandonétudielesreculsgraduelsde leur langue.Ellerésiste
pluslongtempsà la campagnequ'à la ville, parmi les protes-
tants que parmi les catholiques.C'est trop souventen vain
qu'ils réclamentqu'où enseignel'allemanddans les écoles
primaires.Les écolesallemandesvégètent les publicsclsoolx
d'État sont trop bien organisées.D'autrepart, le nombredes
journauxallemandsdiminue plutôt, – En somme,le mou-
vementde propagandeallemandea touchéles cercleslettrés,
maistrès médiocremeulla masse.Celle-cise composed'ou-
vriers et de petits bourgeoisqui étaient démocratesavant
mômede débarquer en Amérique,et qui sout maintenant
fiersd'être citoyens des États-Unis.Les plus sentimentaux
s'excusent « l'Allemagneest notre mère, l'Amérique,notre
fiaucée». Mais ils se laissent imposer l'empreinteanglo-
saxonne.Ilsont fourni à l'Unionde bons élémentsde popu-
lation.Maintenant,d'ailleurs,eu facedes nègresetdesjaunes,
l'uniondes blancs s'impose les Allemandsne sont pas les
derniersà le comprendre.
Lesétablissementsallemandsau Brésiloffreutun caractère
toutautre. Ils ne sont pas nés spontanément de 1823à 1860
environ,à traversbien des revirements,cesoutlesBrésiliens
UOUYKUBNT!»
UIGIUTOIIHS* 703
qui ont attire les immigrants,pour coutrebaluucerlu popu-
lation noire, et substituerdes bras libres aux bras esclaves.
LesAllemandsdu Brésilnesont pusplus de 350.000 maisils
sont groupésdansdeuxprovincesduSud(Hio Grande etSanta
Catharina),dans uu paysqui est moinscapableque les États-
Unisde leur imposersa langueet ses mœurs. L'iusutfisance
des moyensde transport les obligeà rester isolés; ils vivent
du sol, jouissent du bien-être,mais ne s'élèvent pas à la
richesse.– Sans doute, sur cesillettrés dont ta pensées'en-
gourdit vite, les prêtres et pasteurs venusd'Allemagneont
peu d'action; leursécolessont dérisoires sur une trentaine
de journaux dans leur langue,pas un seul n'est pangerma-
niste. Quandmême, ils ne s'assimilentpas. Les Brésiliens
leur sont hostiles ces populationsmétisseset mulâtresses
mettent leur orgueilde Latinsà ne passe laisser gouverner
par des Germains.Ils acceptentque le progrès matérielde
leur pays soit retardé par le manquede bras, pourvuque
l'immigrationallemandedécline ils essaientau contraire,
par tousles moyens,de développerl'immigrationitalienne.
Legouvernementallemand,deson côté,se souciedemoins
en moinsde se heurter, au Brésil, à l'oppositionrésoluedes
États-Unis,qui ont su y obtenirune situation commerciale
privilégiée.De bonneheure (en 18S9> il a interdit en Prusse
toute propagandeen faveurd uneémigrationdans ce pays.Il
est loinde caresserles projetsd'annexionque beaucoupde
Brésilienslui prêtent. – Les Allemandsont fourni au sud
du Brésiluue populationrurale; s'ils ne s'assimilentpoint,
ce n'est pas vers l'Allemagnequ'ils se tournent fauteur les
appelle des Yankeessud-américains.
C'estun des méritesde ce livre,qued'avoirindiqué, àcôté
et parfoisà la placedes circonstanceséconomiques,desfac-
teurs sociauxd'autrenature, politiques,religieux,ethniques,
comme propres à expliquer, dans leur direction et leur
intensité, les phénomènesmigratoiresinternationaux. Que
le contre-coupd'événementspolitiquestels que les décrets
réactionnairesde Metternichen 1832, la Révolutionde
1848,etc., se fit sentir de façonsi nettesur le mouvement
d'émigrationdes Allemandsaux Etats-Unis,on pouvait ne
pas s'y attendre.De môme,le rapporttrès net entre lesgros
chiuresde 1866-1873 et l'histoirepolitiquede l'Allemagneen
cette périodeest très suggestif.Mais (et celaest encoreplus
digue do remarque)ce qui,d'aprèsl'auteur,contribuele plus
764 l'ankéb sooiolooiqub.i'jooauou
ÀnUiHaii
à attirer «imv
auxh*l'4ilo-TTniii
ai àAîr
États-Unis et y AnnonlnûH
enraciner aniïfiamartt
solidement les Alle-
mands, ce sont les droits politiques plus étendus, le régime
de démocratie qu'ils y trouvent, et qu'ils y cherchent, puisque
pour In plupart ils sont démocrates avant d'y venir. A côté
de la perspective, en somme incertaine, de gagner leur vie
plus largement et à meilleur compte que dans leur pays (mo-
bile économique), le désir d'être citoyens de la plus grande
démocratie du monde, et peut-être leur faible attachement à
un Empire où ils se sentent sacri/iés, exerce ici une action cer-
taine. – L'influence des facteurs religieux n'est pas moindre,
qu'il s'agisse d'expliquer le progrès ou le recul d'un mouve-
ment migratoire ou d'une entreprise de colonisation. Il faut
lire dans la dernière partie de l'ouvrage (Allemands et Indi-
gènes dans l'Afrique du Sud) la part qu'out eue (inconsciem-
ment), dans la révolte des lierre ros, les missionnaires améri-
cains de l'Ethiopiau churcii, qui avaient apporté aux nègres
la doctrine à chaque race le pays qu'elle habite, l'Afrique
.doit appartenir aux noirs. Une des causes les plus profondes
du manque d'entente entre iramigrauts allemands aux États-
Unis, dans la période après laquelle il fut trop tard, ce fut
leurs divergences religieuses, ce fut que les uns étaient
demeurés luthériens ou catholiques, et que los autres res-
taient attachés à la libre pensée et à la révolution. Entre le
protestantisme officie!et le lulhérianisme allemand, bien des
groupes religieux, où Allemands et Américainsse confondent,
ménagent les transitions les pasteurs allemands ne peuvent
pas traiter en adversaires les Américains de leur confession,
ou de confessions très voisines. Mais peut-être la différence
des religions riccentue-t-elle aussi, au Brésil, l'antagonisme
entre Allemands et Brésiliens. – Enfin, ce n'est pas la race
comme ensemble de propriétés biologiques communes à un
groupe, mais l'idée, présente dans la consciencedudit groupe,
de ce qu'il est, de ce qu'il représente dans le passé et l'avenir,
c'est l'amour-propre ethnique, qui explique bien des traits
de ces évolutions. Quand un ministre du Brésil déclare « la
mentalité de ces hommes n'est pis la plus propre à seconder
nos progrès moraux », les Allemands protestent au nom de
toute la culture allemande. Mais le pasteur Frenssen, tirant la
conclusion de la campagne du Sud-Afrique, s'exprime ainsi
« Ces noirs ont mérité la mort devant Dieu et devant les
hommes, non parce qu'ils ont tué deux cents fermiers et se
sont soulevés contre nous, mais parce qu'ils n'ont pas bâti de
MOUVEMENTS
MIOMTÛIB» 7QS
maisonsni creuséde puits ». Les Deutsch-Amerilcaner des
États-Unis,ceuxdu moinsd'entreeux qui sontle plusproches
des pangermanistes,protestentde leur attachementquand >
mêmeà l'Unionaméricaine leurseffortstendent « à assurer
au conceptpeuplela placequi lui revientau-dessusdu concept
état ». L'auteurremarquequ'ici le mot peupleest bienvoisin
du motrace. Si, enfin,lesAllemandsde l'Amériquedu Nord
se détournentde plus en plus de l'Allemagne,n'est-cepoint
parcequ'ils entrevoientla possibilitéde fonderune racenou-
velleet supérieure,où,à côtéd'autrespropriétés,toutes celles
du vieuxfondsgermainse retrouveront.C'estune application
à la racede la doctrinenietzschéenne l'hommeest quelque
chosequi doitêtre dépassé.Ils nerenoncentà être Allemands
que pour être plus qu'Allemands,uberdtnttck.– C'est tout
cet ensembled'idéesoud'influencesqui expliquentl'assimi-
lation et son contraire,là on elles se produisent,en même
tempsqu'une bonnepartiedes faits migratoireseux-mêmes.
M.H.
GONNARD (René).– L'émigfatlon européenne au dix-
neuvième siècle. Angleterre,Allemagne,Italie, Autriche-
Hongrie,Hussie.Paris, Colin,1906,298p., in-18.
L'auteurde ce livres'est préoccupéde « rechercherce que
lesdonnéesque nousavonssur l'émigrationd'hier et d'aujour-
d'hui peuvent nous faire pressentiravec quelque certitude
des nationsde demain». – L'Angleterres'est trouvéepos-
séder, au début du xix*siècle,unequantitéillimitéede terres
à peupler, et en mêmetempsunemassed'émigrantspour les
occuper. On peut s'en étonner, puisque sa transformation
industrielle appelaitdans les villes cet excédentde popula-
tion. Mais.d'abord,l'accroissement du nombre des emplois
tut irrégulier; de plus,l'accroissement de la demandede tra-
vailrelevale tauxd'accroissement de la population enfin,dès
1830.le régime dulibreéchangey entraîna ledéclinde l'agri-
culture (surtout en Irlande, où la populationa diminuéde
moitiéau coursdu siècle).Toutefois,on peutdouter quel'An-
gleterre continueà envoyerdansle mondetantd'émigrants
la natalité y diminuenettement(36p. 1000en 1874-1878, 80,5
p. 1000en 1880-1900), et, bien que la diminutionde la mor-
talité y maintienneun excédentde population,cette dernière
baisse rencontreraune limite; d'autre part, la population
rurale, égale à la populationurbaineen 1880,ne représente
700 l'annkk sociologique, «ooa-1009

plus en 1901que 28 p. 100dela populationtotale; enfinla loi


agraire de 1903,qui supprimeen Irlandele landlordismeet y
organiselerachatdes terres parles paysans,réduiral'émigra-
tion Irlandaise.– Le type britauuiqueparaît-ildevoirprédo-
miner aux États-Unis?L'immigrationy diminuerelative-
ment, et elle est loind'être surtoutanglaise.Maissurtout,les
vieuxétats yankees(Nouvelle-Angleterre) sont rongésde mal-
thusianisme le taux de la natalitéy était, en 1890,inférieur
ù celui de tous les payscivilisés,mêmede la France;il en est
de mêmedans de nombreuxétats du Centreet de l'Ouest; la
moyennegénérale n'est relevéeque parce que les noirs des
états du Sud (danssix états ils représententplus de 40 p. 100
de la population)et les Espagnolsdu Nouveau-Mexique, du
Texas, de l'Arkansas, sont très prolifiques. II en est de
même, plus nettement encore,en Australieet en Nouvelle-
Zélaude la populationy est très faiblepar rapportau terri-
toire, et, bien que le nombre des mariagesy augmente,la
natalité a très nettementdiminué; enmêmetemps, ces pays
se ferment jalousementà toute immigration,mêmeanglaise
(bienqu'il s'y trouvevingt ou trentefoistrop de sot pour les
habitants 2Umillionsde Japouaisy pourraientvivre).– En
revanche,le Canada,malgrél'excédentdes naissancesqui lui
garantirait un progrès continu, appelle tous les étrangers,
Anglais,Français,Russes.Lanatalitéestsurtout forteparmi
les Canadiensfrançais,et n'est guère supérieure,parmi les
Canadiensanglais, à ce qu'elle est en France. Les Canadiens
françaisenvahissentl'est des États-Unis,tandis que lesimmi-
grants (presque tous Anglaisou Américains)se répandent
dans l'ouestdu Canada. L'Afriquedu Sud ne sera pas une
coloniede peuplementpour l'Angleterre.
L'émigrationallemandea été,plus que touteautre, un phé-
nomènede masse,de 1844à 1873,et surtout de1880à 1890.A
partir de 1896,elle a nettementfaibli. Cependant,la popula-
tion de l'Empireaugmentetoujours(ellea augmenté,de 1870
à 1900,de 80 p. K%etl'abaissementrécent dutauxdénatalité
est peusensible.Maisle surplusdela populationa étéabsorbé
par les villes, parce que l'Allemagneest devenue un état
industriel l'élément rural reste stationnaire,et, s'il dimi-
nue, c'est qu'il envoiedosémigrantsdans les grands centres
allemands.– D'autre part, les émigrésallemands ne sem-
blent pas devoir constituer, en aucun pays, une colonieou
une nation allemande.
MOlttBMENïïMllilUTOII\BS 70;

L'émigrationitalienne a été considérabledans le dernier


quart du dernier siècle feu 1901-1905, le chiffreannuel des
émigrésdépassaitle demi-million).Toutefois,seulementla
moitiéd'entreeux traversentl'Océan l'autre moitiése rend
en Europeet dans les pays méditerranéens.Surtout, l'émi-
grationpermanentene représenteque48 p,100de l'émigration
totale(c'estuntrait caractéristiquede l'émigrationitalienne),
Lesmassesémigrantessont surtout rurales (lescampagnards
représentent86,7p. 100du totalen Italie, 37,Bp. 100en Alle-
magne,16,1p. 100en Grande-Bretagne) certainesprovinces
d'Italie(Vénélie,Calabre,Basilicateoù la populationest très
peudense)en sont entièrementdépeuplées.Lescausesde ces
mouvementsseraient -1°la forte natalité (la populationita-
liennea passéde 27millionsen 1871à 33 millionset demien
1905,et la densitéde la populationy est plus fortequ'en Alle-
magne) 2°ladifficultéde se procurer les chosesnécessaires
l'Italie a besoin d'acheter du blé, et frappe de droits très
élevésles blésétrangers; en revanche,elle peut de moinseu
moinsécoulerau dehorsses produits(fruits,vins et soies).Il
est vraique ses progrèséconomiquessontcertainset rapides
l'Italiedu Nordsera bientôtle meilleur débouchépour les
produitsde l'Italiedu Sud. – Bienqu'ils ne se soientdirigés
versles États-Unisqu'assez tard, que le nombredes retours
annuelsparmiceux qui y vont soit extrêmementélevé, que
les lois restrictivesde l'émigrationdans ce pays soientdiri-
géessurtoutcontre eux (immigrants« undesirable»), ils ont
plusde chancesque les Allemandsde conserverleur carac-
tèrenational.Ils s'agglomèrent,seconcentrentdansles villes,
segroupentparprovinces,cantons,villagesd'origine.A New
York,400.000Italiens sont répartis en deux quartiers ceux
du Nord,dansla « little Italy », ceux du Sud, dans des rues
dela ville basse.Parmi ceux qui ne s'en vont pas de suite,
un grand nombrene restent que huit années ces alléeset
venuesmaintiennentle contactavec le paysd'origine.– Au
Brésil,mais surtout dans la RépubliqueArgentine,les Ita-
liens sont extrêmementnombreux. Ils y constituentce que
l'auleurappelledes« colonies sans drapeaux.– Dansl'Afrique
du Nord, ils forment le fond de la populationblanche en
Tunisie,et, bienque le colonfrançaisconservele sol, les Ita-
liensdeviennentaussi,de plusen plus, propriétairesfonciers.
Ilstardentun peu à immigreren Tripolitaine.
Cet exposé des divers mouvementsmigratoires est iait
708 l'annbb sociolooiqds.1908-lQp»

pour le grand publie c'est un tableau très large, aussi com-


plet qu'il était possible, et très précis presque toujours, où
l'on se préoccupe de mettre en relief les traits saillants, ou
plutôt ceux qu'il est possible de prolonger par la pensée (ou
l'imagination) en vue de prévoir l'avenir. De quoi demain
serat-il (ait? « Du triomphe exclusif d'un idéal national
unique, ou de l'épanouissement libre, harmonieux et varié
des tendances. qui entraînent chaque nation vers son idéal
particulier »? Yaura-t-il un Canada français, des États-Unis
anglais, allemands ou américains? Quelle sera lu part des
Latins. des Slaves, des Germains, dans la formation des nou-
velles nationalités? – Naturellement, nous n'avons pas cri.
tiquer les punirionsde l'auteur: lui-même a, sans doute, l'es-
prit trop scientifique, pour ne pas reconnaître combien elle»
sont incertaines. Ce qui nous intéresse plutOt, ce sont les
explication*qu'il présente d'un certain nombre de ces faits.
II dit très justement, à plusieurs reprises, que les phénomènes
démographiques et que le point de vue démographique sont
tout à fait distincts du point de vue et des phénomènes écono-
miques. Mais pourquoiexpliquet-il encoreassezsouveutceux-
là par ceux-ci?11dit qu'euîtalie, c'est le régime protectionniste
qui détermine l'émigration, et, en Angleterre, c'est le libre
échange qui a eu le mômeeffet. Alors, ce n'est pas uue expli-
cation. L'auteur reconnaît d'ailleurs qu'eu supprimant la pro-
tection en Italie, on ne supprimerait peut-être pas l'émigra-
tion.'On aurait voulu qu'il manifestât plus expressément son
scepticisme. Surtout, il explique l'arrêt de l'émigration alle-
mande par la transformation de l'Allemagne en Induslriestaal
(reste à savoir si c'est précisément en 1896, date de la baisse
de l'émigration, que cette transformation ou son effet est le
plus profond, ce que rien ne nous permet d'affirmer). Mais
pourquoi, alors, la transformation de l'Anglelerre en pays
d'industrie a-t-elle eu l'effet inverse? On invoque l'irrégula-
rité des emplois, l'augmentation de la natalité en suite de
l'accroissement do la demande de main-d'œuvre. lest-ce que
l'industrie allemande assure au contraire des emplois régu-
liers, et est-ce que la natalité n'y entretient pas les mêmes
rapports avec la demande de main-d'œuvre? C'est peu pro-
bable. Alors, ce n'est donc pas une explication. Peut être
l'auteur s'en rend-il compte, et peut-être cette façon d'iuvo-.
quer la même cause, pour expliquer un phénomène et son
contraire, n'est-elle qu'une marque de scepticisme. Mais on
MOUV8UKNTS
UlUKATOIltBS 789
peut s'y tromper. En tout cas, il faut apprécierl'effort
tentépur l'auteur pour étudierdans leurs rapportsdeux plié-
nomèuesmorphologiques,les migrationset la natalité. Tou-
tefois, la loi qu'il formule plus l'émigrationcrott, plus la
natalité (dansle pays d'oùTonémigre)augmente,et inverse-
ment, est beaucouptropgénérale,Parfois, quand la nata-
lité baisse(commeeu Angleterre)sansque l'émigrationdimi-
nue, l'autours'entire en Invoquantla diminutionde la mor-
talité, qui maintientun excédentde population mais c'est
passer à un tout autre ordre d'idées,et il est alors fort peu
probableque, si l'excédentde population(par baissede la
mortalité)déterminel'émigration,l'émigration,réciproque-
ment, abaissela mortalitédans le pays d'oùl'on part (car ce
sontsurtoutdesadultesbienportantsqui partent);i faudrait
choisir. – Le tableau qu'il nous trace des émigrationsita-
liennesle conduith mettreen rapports l'émigrationavec uu
autre fait morphologique,la densitésociale et il appelle
émigrationmaladivecelle qui se produitdansdes régiousoù
la populationest déjà très peu dense.Maisqu'est-cequi est
la maladie Est-cela faibledensité,est-cel'émigration?Est-il
normal que l'émigrationparte des pays à population très
dense?Et faut-ils'eu tenirà la notionmêmede densité,n'est-
il pas plus importantd'envisagerla façondont cettepopula.
tion peu denseest répartie, la formede ses groupements?
En somme, l'auteur n'a certainement pas eu l'illusion de
rendre compte des phénomènesqu'il présentait. Il n'a pas
voulu écarter quelques raisons qu'on en donne communé-
ment,dansles journaux et les revues,et queles statistiques,
trop rares et trop imparfaites,ne permettentpasde vérifier.
– Il fallait seulementmarquerici queces explications ne sont
guèreplus certainesque sesp récitions. M.H.
MEUMOT (Paul). Du oaraotèrenouveaude l'immigration
aux États-Unis.Journaldela Société de statistique
dePari»,oc-
tobre1900,p. 350-359.
IIAL'SEH (Hexhi).– L'immigrationaux États-Unisen 1906-
1007. Annale*de géographie, mars 1908,p. 171-170 le
(D'après
rapportduCommissaire généralde l'immigration).
DEKtS(t'iKHHK). Les migrationspériodiquesAl'intérieurde
l'Italie. Annalesde géographie,
janvier1908.p. 79-83(d'aprèsles
résultatsd'une enquêtede l'i.lllciodcl Uvorode Homeen
1005).
F.. DviKiinu. – Am»:-c weiul, 100G-1B09. i'j
r 770 VaSRÉÈ SOCIOLOGIQUE.4H0WBO9
.tI..I.n.~u"
DEMONTES -1- _1.1_- à- .1.1.-I.
(V.). – Le peuple algérien.Essaisde démographie
algérienne.Expositiongénéralede Marseille,
Gouvernement de
1906,in-8».
l'Algérie,
BERNARD (Augustin).– La oolonisationet le peuplementde
l'Algéried'après une enquêterécente.Annales (legéographie,
1908.

IV. GROUPEMENTS
RURAUX
ETURBAINS
Par M. 1I.UBWACH8.

HALBWACHS (Maurice).– Les expropriations et le prix


des terrains à Paris (18G0-1900). Paris, Sociéténouvelle
de librairieet d'édition(E. Cornély),1909,410p., iu-8°.
Lesexpropriationsdans une grandevilleont certainescon-
séquenceséconomiques(variationsdes prix des terrains, des
maisons,des loyers, entre autres); mais les tracésde voies
nouvellessont en eux-mêmesdésfaitsmorphologiques,puis.
qu'ils modifientla structure de la ville, la répartition, le
groupementet la densitéde ses habitants.Lesdeux aspects
du phénomèneont été successivementétudiésdansce livre;
nousavonsrendu compteplus haut de la secondepartie (éco-
nomique) il reste analyser icila première(p. 1-232).
Maisles expropriationsainsi entenduespeuvent-ellesêtre
étudiéesscientifiquement?Onserait plutôt portéà y yoir des
élémentsde perturbation, qui viennent troubler les séries
naturelles, des accidents, des événementshistoriques. En
effet,ne s'expliqueotellespointpar l'initiativearbitraire des
individus(administrateurs,souverains),qui ont décidé l'exé-
cutionde tellesvoies?D'autre part, les motifsde ces opéra-
tionsne sont-ils pas, bien souvent,extérieursaux données
étudiéesen morphologiesociale Parisauraitété ainsi trans-
formépourdesraisonsde stratégieurbaine(au lendemainde
la Révolutionde 1848),ou encoreen vued'assurer du travail
aux ouvriers,d'encouragerla spéculationà une époqueanté-
rieure,on aurait voulu utiliser ainsi les biensnationalisés
desémigréset du clergé. – Mais,d'abord, beaucoupde ces
opérationsse rattachentles unesaux autres, et des transfor-
mationsaussiétenduess'expliquentdifficilementpar des rai-
sonssi accidentellesou passagères d'autre part, la preuve
GROL'PBHEXTS
RUIUl'X
K'fliflBAINS T,i
que les individussont intervenueicicommetelsnepeutrésul-
ter que de l'impossibilitéd'expliquer les faits autromeut
enfin, lesraisonsaccidentellesque l'on invoquene sont par-
fois que l'enveloppeet l'expression(dontla formeest indiffé-
rente), de forcessocialesnaturelles,ou, peut-être,que des
prétextes invoquéspar les individusqui obéissentincons-
ciemmentà cesforces. L'étude positivepeut seulenous ren-
seignersur ces points.– Maissi les expropriationssontbien
des faits naturels, quelle raison y a-t-il de les détacherainsi
de l'ensembledesfaitsmorphologiquesurbains,etde lesétu-
dier isolément?C'estqu'elles représententdes modifications
beaucoup plus importantesque toutes les autres, en elles-
mêmes et dans leurs conséquencesimmédiates,c'est que
l'évolution « se peut le mieuxétudier aux époquesoù elle
s'accélère,alors que desforceslongtempscomprimées,et qui
n'ont pu se développerque partiellement,sousformede mo-
difications isolées, sans lien apparent, trouvent moyeu de
passer d'uuseul coupà l'acteo, c'estque, par teurétendueet
leur soudaineté,ellesreprésententle pointdevuele plusclair
sur l'ensembledes transformationsde la ville.
Pour déterminerle nombre et l'emplacementdescas d'ex-
propriation, l'auteur s'est servi des principaux plans de
Paris en ce siècle.et, surtout, il a retenu tous les tableaux
publiés par la GasetleilesTribunaux(décisionsdes jurysspé-
ciaux chargés de régler les indemnités;et les a vérifiéset
complétésen se reportant aux minutes(manuscrites,) de ces
jugements.
Le premier chapitre traite des grands travauxde Paris
dans la secondemoitiédu xix*siècle.Onles a classésen los
rattachant à leurs causes les plus apparentes. Ces causes
paraissent être 1° des phénomènesde circulation; 2° des
phénomènesde peuplement.On distingue,d'ailleurs, de la
circulationgénérale(en rapport avecla populationtotale, et
qui déterminedestransformationsd'une utilité générale),la
circulationlocale,et onrelèveles barrièresqu'ellerencontre,
naturelles (fleuve,élévationsde terrainsi et artificielles(mo-
numents, palais,églises,jardins, établissementsindustriels,
docks, etc., et certainsanciensquartierscompacts),d'autre
part, les centres ou forcesde rayonnementqui l'intensifient
(gares,places,terrainsnon bâtis et prochesde quartierstrès
peuplés).Mais,en dehorsde ces circonstances,c'estdans les
mouvementsdu peuplementqu'ona cherchél'explicationdes
772 U'AXKtKSOCIOLOGIQUE.
«OO-llK»
._I~'
tracesde voie (et même de quelques-unesde ces circons-
tanceselles-mêmes).
Ou a étudié d'abord les déplacementsde la population
dans Parisde 1830à 1900(parquartiers, et pour chaquepé-
riode quinquennale), en insistant sur deux phénomènes
généraux 1° le décroissementde lu population dans les
quartiers du centre, qui se présentecommeun tout en 4856
seulement,et devient de plus en plus net; 2" l'existencede
courantsprogressifsd'accroissement,orientésdu centrevers
la périphérie,ou parallèlesau coursde la Seinedansl'uneou
l'autre direction,qui apparaissentdès 1836et sont,au terme,
remarquablementnets. Ona cherché ensuite (et c'étaitlà
le point essentiel)quelles relationsexistententre ces phéno-
mènes, et les tracés de voiesnouvellesellectuésà certaines
dates. La conclusionde toutesces expériencesde détail,est
qu'il y a lieu de distinguerdeuxespècesde voies,voiesde cir-
culation(généraleon locale),et voiesdepeuplement,et quela
créationde cesvoiesrésultedesbesoinssociauxqui se rappor-
tent à cesdeux fins le dépeuplementdu centre et le déve-
loppementvers l'ouest s'expliquent,non par destendances
obscures,mais par les besoinscollectifsdéfinisqui détermi-
nent ces tracés, ou que ces tracés précisent et accroissent
(sans les créer;. – Ainsi, il n'est pas nécessaire,et il est
même toutà fait inutile, de chercher l'explicationdes tracés
de voiesnouvellesdans les volontésou intentionsdes indivi-
dus.
Dansle deuxièmechapitre, on a étudiéles expropriations
dans leur rapport avec le mouvementdes constructionset
démolitions il importait, en effet, après avoir expliqué
ces opérations, d'en mesurer l'importance et les répercus-
sions.

MEURJOT (Paui. –La petite ville française. Journalde


la Sociétélie statistiquede Paris, juillet 1908,p. 236-240,
août 1908,p. 245-283.
On a souvent étudié le double mouvementde croissance
ininterrompuede la populationurbaine, et de diminution,
absolueou relative, mais constante,de la populationrurale
en France.Ceque M.Meuriotsignaleici commeuneparticu-
larité française/c'estl'état statiounaired'une partiedenotre
population,celle qui habiteles petitesvilles. Il retient,pour
HUHAUXET UaUAt.NS
UKOUPKUENTS 773

lesenvisagerde ce pointde vue,les chefs-lieuxd'arrondisse-


ment de moinsde S.OOO habitants.
Mais l'explicationqu'il donne de ce stationnement des
petitesvilles (par leur caractèrede centres administratifs),
assezlogique,n'est sansdoutepas complète car l'accroisse-
ment de leur populationdansla premièremoitiédu sièclene
vient pas, sans doute, de ce que le nombre des fonction-
naires, etc., s'y est, d'annéeen année, élevé. Qu'elles aient
suivila populationrurale danssonmouvementdecroissance,
mais lion dans son mouvementde baisse, cela se rattache
sansdouteaux tendancesgénéralesqui expliquent l'accrois-
sement des villes. D'autre part, le seul trait communà
toutes cesvillesest-il le nombrefaiblede leurs habitants, et
leur rôle de chefs-lieuxd'arrondissement?SuiTH-ilde tenir
comptede l'étendueet do la densitéde populationdes arron-
dissements,et ne faut-ilpas s'attacheraussi à l'existencede
grandes villes prochesou lointaines,et à' l'importance en
généraldes villes environnantes? L'utilité de l'étude de
M.M.est surtoutde suggérerces distinctions,serait de pro-
voquercesrecherches: il n'existepas encore une classifica-
tionscientifiquedes villes. M.H.

FORNASARI (E.). Sulla distribuzionedella populasionein-


torno ai oontri.Giomalc fév.1908.
ilegliScoaom.,
PKLD(W)– ZurGesohleehtsgliederung der staedtisohenund
laendliohenBevoelkerong.AUgemvines StalùslUches
Arcltiv,
1907.vol.Vil.parte1.
MORTARA ((i.). Lo svUupodelle grandi oitta itaUane.Ri-
visladltalia,d»c.1900,avrilet août1007.
HEHT1LLOX (J.).– Des recensementsde la population,de la
nuptialité,de la natalitéet de lamortalitéa Paris, pendantle
xix"siècleet lesépoques(intérieures.Paris,Massoncl Gf" 1908,
in-8".
OANTMK (James). Physicaleffloiency. Areviewofthe delete-
riouseffectsof townlifeuponthepopulation of Brilain,wilhsug.
gestionsfoi-their arrest. Londres,Putnam'ssons,190»,216p.,
in-12(Insistesurle caractèrepeu hygiénique des conditionsde
viedanslesgrandesvilles,etsur l'utilitéde réagir).
MORTAIU (R.) Laforzadi attrasionedelle grandi cite. Riv.
ital.il.sociol.,XI.p. 41-68.
774 L'ANNlSKSOClÛLÛfllQUK.190M90tt

iSICOLAÏ(E.). La dépopulation des campagnes et l'accrois-


sement des villes. Bruxelles,Weissenbruch,1906,in-8'i
VIGOUROÙX (E.). La dépopulation des oampagnes. Rev.génér.
du droit, ik la Ugisl. et dela Jurispr., sept.-oct.1907.
MATER(A.)- Les origines des villages. Revuedu Moi»,mars
1908.
iIGHTENBBHG (H. von). Haus, Dort, Stadt. Eine Entwioke-
lungsgesohiohte des antiken Staedtebildes. Leipzig,R. Haupt,
1909,in-4°,ix-276p.
SKPTIKMKSECTION

DIVERS

I. HOCIOUOOIK
K8THÉTIQUE
ParMM,Mai-»!,
HubertptWrm.

S. CULIN. Games of the North Ameriean Indians.


94* Ammal Keportof tke Bureau of AmericanMhnologtj
(1902-1903).Washington,1907,846p. in-8°.
Ce remarquableouvragesuit la divisionnaturelledes jeux
eux-mêmesen deuxgroupes:jeux de hasardet jeux d'adresse.
Lespremiersse répartissentà leur tour en deux catégories
équivalentsdu jeu tle dé (bâtons à compter,etc. équiva-
lentsde la « ballecachée».
Cesjeux ne sont pas desjeux d'enfants. Même, les adultes
et les adolescentsy-sontseulsadmis les uns sont jouésde
sexe à sexe; les autres, par chaquesexe, chaqueâge. D'or-
dinaire, quand ils sont collectifs,ils ont lieu entre groupes
rivauxde la tribu, dela localité,du clan c'estce qui a lieu
le plusfréquemment.Deplus, eu général, ils se pratiquentà
dessaisonsbiendéterminées.Danslescasles pius intéressants
et les plus connus, ils sont l'objet de rites religieux,ou ils
sontdesrites religieuxeux-mêmes.
Toutesces observationsont conduit M. Culin aux conclu-
sionssuivantes
a Les jeux des Indiensde l'Amériquedu Nordpeuvent
être classésen un petit nombre de groupes apparentés.–
2" Leur forme est pratiquementidentique et se rencontre
dans toutesles tribus. – 8°Dansleur état actuel, ils sont des
instrumentsde rites ousont dérivés de rites, d'observances
cérémoniellesd'un caractère religieux. i" Leur unité et
leur identitése retrouveaussi dans celle du mytheou des
7îtiô L'ANNÉE 1U0O-I90O
SOOIOUIOIQUK.

mythes auxquels ils sont attachés. – &>Tandis que leur


objetvulgaire,séculier,sembleêtreun simpledésirde s'amu-
ser ou de gagner,ils sontcependantfaitscommedes cérémo-
nies religieuses,comme des rites destinésà conquérir la
faveurdes dieux, ou commedes procédésde magiesympa-
thique, pour chasserla maladie,écarterd'autres maux, ou
produirela pluie, la fertilitédes plantes,la reproductiondes
animaux,et d'autres bienfaits.– 0° Ils coïncident,en partie,
avec certainespratiquesrituellesdespopulationsdes autres
continents,pratiquesqui semblent,dansleursmanifestations
les plus primitives,presquecomplètement divinatoires.»
Ainsi une démonstration,qu'on peut considérercomme
provisoirementacquise,placel'originede tous les jeux d'un
des plus grandsgroupeshumainsqui existentdans le rituel,
et plusspécialementdansle rituel divinatoire.Cettedémons-
tration apporteuuetrès intéressantecontributionà la théorie
de la mentalitécollective.11y a peu de faits plus nettement
au centre de la vie intellectuelle,pratiqueet affectivedes
peuplesque leurscroyanceset leurs pratiquesrelativesà la
divination.Il ressort, à notreavis,des recherchesmêmesde
M. C. sur le jeu de balle, la courseen particulier,que nous
pouvonsvoirici, dans un fait typique,le groupeinquiet de
son sort chercherce qui va se produiredans la nature, en
cherchant ce qui va se produireen soi. La confusionde ce
qu'on appelleen termes philosophiques le subjectifet l'objec-
tif est donnéeici sous une formeextraordinaireet directe-
ment sociologique.
Nousn'adresseronsqu'unecritiqueau travail de M. C. Il
pense pouvoirindiquer, sous toutes réserves,le « foyer»
d'oùtouscesjeuxse sont répandusà traverstoutel'Amérique
du Nord précolombienne(p. 31).Il le situe à peu prés au
Nouveau-Mexique et au sud-ouestdes États-Unis. C'est
tout simplement,à notre avis,une sorted'illusiond'optique
historique.Parceque les faitsont de ce côtéune teneur, un
développementparticuliers,il nes'ensuitpas qu'ils y soient
à leur état originel, et ne soient, chez les autres peuples
qu'à l'état d'empruntset defaitsdérivés. M. M.

0. BOECKEL.– Psychologieder Volksdiohtung. Leipzig,


Teubner,1906,V-432p. in-8».
Le titre de « Psychologiede la poésiepopulaire» ne dit
soaoioum HifuénQUs 777

pas avec une parfaite exactitudece qu'a fait on réalité


M.BOckel.Il ne s'agit pas ici d'une « psychologie» au sens
techniquedu mot,maisbienplutôt de sociologie.Lapremière
partie du livre a tout particulièrementce caractère.Tout ce
qui concernela façon dont le chaut populairenaît, s'impro-
vise,les lieuxoù il s'invente,les liens qui le rattachent aux
différentestechniques,tellesque tissage,filature, etc. (p. 33
sq.), lesgroupeset corporationsqui le propagent(voir l'iuté.
ressaut paragraphesur les aveugles,p. 69 sq.), les voies
qu'il suit, les emprunts, les traditionsdont il est l'objet,tout e
ceciconstitueune excellenteétudede sociologie.
Lepoint de vuesociologiquereste égalementprépondérant
dans la deuxièmepartie de l'ouvrage. Elle est consacréeà
l'étudedes sentimentset des idéesprincipalesqu'exprimela
poésiepopulaire.Or il est très remarquableque les unes et
les autresne soientpas marquésau coinde ces individualités
fortesqui seraient,seloncertainesécoles, à l'originede tous
les phénomènessociaux.Bienau contraire,M. B. remarque
lui-même combien cette poésie est collective,commune
même elle a uu charme, une fraîcheur dont est souvent
dépourvuela poésiesavante.Elle ne recherchepas le rare et
le fantastique;elle traduit des penséessimples, des notions
élémentaires,descaractèresfrustes, des réactionsnaturelles,
des sentimentsmoyens.Il s'agit donc de représentationset
de sentimentscollectifs.Et par là encore, M. B. fait, en les
étudiant,œuvrede sociologue.Son chapitre sur la « vie sen-
timentale» dans la poésiepopulaire est même un excellent
travail, non pas simplementd'esthétiquesociologique,mais
d'éthologiecollective.Caril contientplusque des remarques
sur la façondont la poésiepopulairemeten œuvre les senti-
mentshumainspour en tirer oeuvred'art; il est plein, comme
celuiconcernant« l'optimisme», d'aperçusingénieuxsur les
différentesattitudes collectivesque les sociétésprennent vis-
à-visdes diverssentimentsnaturels, amour, haine, pudeur,
etc.De môme,les chapitresqui traitent de l' « Hommeet de
la Nature» (14),des rapportsde l'histoire et de la chanson
(18),des effetsdu poèmepopulaire(18)sont de très intéres-
santesétudessur les représentationscollectives.On trouvera
mêmebiencourtesles quelquespages(p. 194sq.) cousacrées
à l'efficacité,magique selon notre auteur, de nombreux
chants. Il y a sûrement là une lacune. Les relations des
chants du peuple avec les fêtes, que M. B. connaît bien
778 LYnUKE SOCIOLOGIQUE.
18M-1609

(p. 102), eussentdû attirer sou attentionsur cet ordre de


faits. plus considérablesqu'il ue croit. – Enfin,pour bien
marquerle caractèresociologique,nonseulementdu travail,
maisaussi des résultats,il suflira d'indiquerque des exposés
comme ceux qui sont consacrésà la lamentationfunéraire
(p. 100 sq.), aux chants nuptiaux (p. 389sq.), aux combats
de chants, auxchantssatiriques, aux chantsde guerre et de
soldats intéressent,outrela théorie des procédéspoétiques,
celledes rapportsentre certains phéuomènesesthétiqueset
certainesinstitutions.
Onne peut que louer l'art, la consciencede notre auteur
et l'étenduede ses connaissances.Si son érudition ethnogra-
phique est un peu sommaire,elle est approfondiepour tout
ce qui concernele folkloreeuropéen. D'autre part, il a un
sentiment très vifde la puissancecréatricedes massespopu-
laires. Le Volkslied, suivantlui, serait le produitanonymedu
Yolket mêmedu Naturwlk; il entend par là le peuple en
tant qu'il n'est pas touchépar la civilisation.L'absenced'au-
teur (p. 18),le caractère« naturel » des idées et des senti-
ments, leur liaisonà desmélodieset à desrythmes tradition-
nels sont pour lui des faits qui suffisentà démontrersa
thèse. Sans songera contesterla part importantede vérité
qu'elle contient,nouscroyonsque, si M.B.avaitconnule tra-
vail de M. Gummeresur les origines de la Poésie(cf. Année,
VI, p. 500 sq.), il se serait posé la question en d'autres
termes et eût trouvéle moyende faire sa place à l'individu
sansnier cellede la collectivité.La poésiepopulairesoulève
en effet le délicat problème de l'invention collective,elle
donnepeut être aussile moyende le résoudre.La rondeet le
solo, le refrain et le poème,le rythme, la mélodie et les
variations du soliste, la danse individuelle,puis collective,
permettentpeut-être,ense reportantà des faitssuffisamment
primitifs, de comprendreles actions et réactionsdu poète
sur la masseet de celle-cisur lui. M. M.

AXELOLRIK. – Epische Gesetze der Volksdiehttrag.


Zeitschriftfur deutteha Altertumund deuUcheLUtemtur,
1909,p. M3.
Cesquelquespages,courtes,mais si substantielles,ont été
communiquéesau IV Congrèsd'histoire,qui s'est tenuà Ber-
Jin en 1908.Ellesrésumentles résultats de recherchesque
socititouiB8sthj3tiq.dk 779
M.A. Olrik accomplitet dirige dans uu séminairede
Copen-
hague,
II veut superposer aux études particulières de littérature
ou de mythologiecomparatives,
auxqùellesont donnélieu
jusqu'à présent les diversessortes de poésie populaire,une
véritablebiologiedu mythe,du conte, de la légende,ou, pour
tout dire en un mot, de la « Sage », qui en fixe et
explique
les lois formelles.Il indiqueet énoncedéjà
quelques-unesde
ces lois
Loisdu début et de la conclusion,que j'appelleraisvolon-
tiers loisdu prologueet de l'épilogue,qui encadrent
l'action,
de
l'empêchant commenceret de finir brusquement;loides
répétitions, qui comporte un corollaire presque général,
celuide la trinité des motifsrépétés loides duos(les
person-
nagesne se présententjamaisque deuxà deux sur la scène)
loi des contrastes; loi de gémellité. Il nous est difficilede
traduire les expressionsfort imagées,empruntées la marine,
par lesquellesM.0. désignele principequi déterminel'ordre
hiérarchiquedes personnagesd'une mêmesérie (Toppgeiokht
et Acktergeicieht)les plus considérablessont, commeitva de
soi, présentésles premiers; ceux dont l'importanceépique
est la plus grande sout régulièrementprésentésles derniers.
M.0. insisteencore sur le caractère unilittéairedela
compo-
sition, plastiquedes situations,logiquedu développement et
enfinsur les différentesmanifestationsde l'unitéessentielle
qui est l'une des plus fortes caractéristiquesde ces chants,
épopées et poèmes de toutes sortes que l'on peut appeler
populaires, non seulement parce qu'ils renfermentune
énorme proportion d'élémentsélaborés par les foules,mais
surtout parce qu'ils ont été merveilleusementviableset par-
faitementconformesà la mentalité des hommes quandils
pensent, imaginentet sententeu commun. il. H.
MURRAY(Gii.bkkt). --TheRise of the Greek Epie.Oxford,
ClarendonPress, 1907,iu-8', XI-283pages
BÉDIER(Josbph).– Les légendes épiques. Recherches init-
la formationdeschansonsdegestes I. Le cycledeGuillaume
d'Orange, Paris, H. Champion, 1908, jn-8«, 429 p. î
II, La légendede Gérardde.liotmillon,etc., Paris,ibid,1908,
1 vol. in-86443 pages.
I. Du point de vue trèsdéterminéoù nous sommes,et
qui
780 J.*AN.Nl3e
S0UIUUH1IQU8.1UÛ0-I9Q9

est celuide la sociologieesthétique,ces deux ouvragessont


plus intéressantspour nous parce qui leur manqueque parce
qu'ils uousdonnent.Nous a 'a vouspas naturellementAparler
ici dutalent, delàbouuefoh ni de la sciencesûre desautours,
qui ont réaliséchacun un bon et savanttravail sur dessujets
tenus pouriugrats, et dont les conclusionsspécialesparais-
sent solides,autant du moinsque puisseeu juger le lecteur
incompétent.Ce qui nous frappe essentiellementchez tous
deux,et ce qui doit nous importer seul, c'est une sorte de
radicale impuissance sociologique,unie ù un sentiment
obscuret pourtantassezfort de In nécessitéd'appliquerà ces
étudesla méthodesociologique.Celad'ailleurs se manifeste
chezchacund'euxd'une manièredifférente.
Il. ChezM.Murray,la descriptiondu milieu socialoù se
réalisela poésieépique est l'objet de développementsconsi-
dérables c'est ainsi que, comme ouverture, il ne croit pas
devoirfaire moinsque d'envisagerla Grèceet« l'esprit grec»
au pointde vue généraldu «progrèshumain », et celafait
une très brillante introduction qui dut avoir le plus vif
succès à l'Université Harvard lorsqu'elle y fut donnéeen
« lecture». Demême, utilisanten hommeinforméles décou-
vertes archéologiquesles plus récentes, il trace tout un
tableaude la préhistoireet de l'histoireprimitivede la Grèce,
évoquela civilisationmycénieunc,raconteson écroulement
sous les invasionsseptentrionales,décrit le désordresocial
qui devait nécessairementles suivre, et cela fournit des
pagesabondantes,pleines de couleuret de science. Vient
ensuitel'étudedn la littérature, c'est-à-direde l'épopée.Quel
rapporty a-t-ilentre cette partie du livre et la précédente?
A notre avis,aucun, du moins quant à ce qui est l'essentiel,
c'est-à-dire,suivantle titre, quant à la naissancede l'épopée
dans le détail,l'auteurne manquepas,bien entendu, d'utiliser
les renseignements archéologiquespourla compréhensiondu
texte maisnulle part il ne fait apparaîtrede relation, nonpas
mômenécessitante,mais simplementconditionnante,entre
l'histoirequ'il vient d'exposerà grandstraits et le phénomène
plus spécialqu'il étudie et qu'ils'agiraitprécisémentdesituer
dans ce tableau.Faute de ce lieu. son livre demeureainsi
seulement faite, il est vrai, de bonne main la pure et
simple vulgarisationdes résultats acquispar les hellénistes
dans l'étudephilologiquedes textes et des autres monuments
de l'époqueépique.Cequi est scientifiquementancien,comme
SOC1OLÛG1K
JWTIlftTIQl'B 781
ce qui est neuf, y est utilisé avec convenanceet habileté
l'auteur montre, par exemple,qu'ilcomprendce quec'est que
dela littératuretraditionnelleet il l'exposeeu utilisanttour à
tour les chroniquesarabeset les textes bibliques il suit éga-
lementmontrer que l'Iliadeentre de toute évidencedans la
catégorie,et quels sont d'ailleurs, au milieudes autrestypes,
ses traits particuliers il mesure la valeur historique des
renseignementstournis par le poème;il parle d'Homère,etc.
tout celaest bien fait, le personnels'y trouve,mais nonl'ori-
ginal c'est la prolongation stérile de la stérile question
homérique.
111.M.Dédier,au contraire,fait des découvertes, ou du
moinsil nous présente dans son livre une découverte,et sa
preuve, plusieurs fois répétée. De plus, il pense baser sur
cette découverteune théorie nouvellede l'épopéefrançaise,
ou même, plus exactement,il croit qu'une telle théorie se
dégagespontanémentde la découvertefaite par lui. Nous
n'avonspas qualité, et ce n'est pas ici le lieu, pour critiquer
les faits exposéspar M.Bédier,c'est-à-direpour apprécieren
tant que telle sa découvertehistorique.Maisen l'acceptant,
commed'ailleurselle noussemble,pur valable,nous sommes
au contraire parfaitementdans le domainede la sociologie
esthétiqueen critiquant la théorie.
Celle-cise donnecommeune réactioncontrela doctrinede
GastonParis et commesa réfutationdefait. Onsait que Paris
(Histoirepoétiquede Charlemagne) imaginaitque les épopées
s'étaient forméespeu à peu, par une suite d'accroissements
successifs,s'amplifiant d'âge en âge, en partant d'humbles
canlilènes, pour ainsi dire improviséessous l'impression
immédiatedes hautsfaitsd'un hommed'armes contemporain,
pour aboutir aux grands poèmes et aux romans que nous
possédons.Cettethéoriedes cantilènesconstituece que l'on
appellela théorie des origines populairesde l'épopée.On l'a
déjà réfutée en demandant « Où sont ces cantilôues ?»et
en ne les trouvant pas. Et, soit dit en passant, on a réfuté
ainsi non pas, commeon le dit trop, la théorie des origines
populaires, mais seulement la théorie des cantilènes, qui
n'en est qu'une forme.M. Bédier continue l'attaque,d'une
manière plus positive.Il montre –c'est là la découverte
que leshérosde l'épopée,dont ona cherchél'originedans des
canlilènes imaginaires, la tirent en effet d'une source plus
prochainedes jongleursqui les chantaient,– à savoird'éta-
783 L'ANXtte
8QCIQfcOQiQC«.
1000-190»
Ht*
> tf «Ht
blissements cléricaux, églises ou monastères par l'analyse
de plusieurs chansons de gestes ou cycles de chansons.
M. Bédier établit que c'est seulement par des rapports avec
lés clercs que les jongleurs ont pu connaître, à une date tar-
dive, les noms des héros qu'ils célèbrent et les quelques
rares faits historiques que l'on connaissait d'eux. Ces rapports
se faisaient le long des grandes routes de pèlerinage, dans
les ubbayes ou églises importantes du trajet. Ainsi c'est aux
environs de Montpellier, à Aniane, que les jougleurs ont
trouvé, chez les moines de l'abbaye de ce nom, le nom de
Guillaume, personnage central de tout le cycle de Guillaume
d'Oraoge ainsi Ogier (de Danemark) tire son origine de
Saint-Faron de Meaux. Nous n'avons rien à dire sur les faits
mis aiust en lumière par M. Bédier. Sauf rectifications par
des historiens, Ils semblent exacts. Mais il y a beaucoup à
dire sur la prétention de tirer de là une théorie nouvelle de
l'épopée française.
Voyonsd'abord quelle valeur théorique l'auteur attribue à
sa trouvaille. C'est ce qu'expriment d'uue manière pittoresque
et suggestive quelques-unes des dernières ligues de l'étude
sur le cycle de Guillaume d'Orange
« Je crois avoir montré que, dans le riche lignage des Nar-
bouuais, un seul personnage n'est pas un pur héros de roman,
et c'est Guillaume, comte de Toulouse, le saint de Gellone. Je
crois avoir montré que les auteurs des chansons de geste ont
appris des moines de Gelloneet n'ont pu apprendre que de
ces moines les quelques faits authentiques qu'ils rapportent
de leur Guillaume, et qui forment le seul support historique
de leurs fictions innombrables.
« En d'autres termes, si par maladie ou par accident le
comte Guillaume de Toulouse était mort vers l'an 803 avant
d'avoir pu se rendre moine au monastère d'Art ianeet fonder
le monastère de Gellone, pas une descbausous de geste et pas
une des légendes de notre cyclen'existerait et pas une de ces
chansons ni de ces légendes n'existerait si par hasard, trois
sièclesou plus après la mort de cet homme dans l'abbaye de
Gellone, les moines de cette abbaye n'avaient eu le souci
d'attirer vers ses reliques les pèlerins de Saiut-Gillesde-Pro-
vence et de Saint-Jacques-de-Compostelle. «
En d'autres termes, qu'est-ce à dire, sinon que la contribu-
tion des moines de Saint-Benoît à la création du cycle de
Guillaume d'Orange s'est bornée à donuer aux jongleurs un
SOCIOUMIR
gSTIIÉTJQCK 783
nom de héros et quelquesrares faits historiques?Et, dans
tous les autrescasétudiéspar M.Bédier.il eu est de même
le clerc fournit au jongleur un nom de héros et quelques
rares faits historiques. Et sans doute,c'est là une décou-
verte importante,mais il faut bien voir de quelle sorte est
son importance si l'on croitavoirmisen relief,en la faisant,
une des conditionsde la formationde l'épopéefrançaise,
nous l'admettons,quitte d'ailleursà demanderque l'impor-
tance mêmede cette conditionsoit mesuréeà sou tour
mais, si l'on croit, par cettedécouverte,avoirtrouvéla pierre
angulaire, la solide base sur quoi fonder une théorie nou-
vellede l'épopéefrançaise– et partant une théoriede toute
épopée– nousnesaurionsl'admettre.Si nousne nous trom-
pons lourdement, c'est cependantce qu'admet1f. Bédier.
Sans les moines de Gelloneet d'Aniane,nous dit-il en
substance,il n'y aurait pas de cyclede Guillaumed'Orange.
Rien de plus vrai. Sans lesmoinesde Saint-Faronde Meaux,
Ogierne serait pas ce qu'il est.Riende plus vrai. Sans toute
une série d'accidentslocaux,qu'on peutétudier, et qu'il est
intéressantd'étudier,nos épopéesne seraientpas ce qu'elles
sont et mêmene seraientpas. Riende plusvrai.Maisà défaut
de cette série d'accidentslocaux,à défaut des moinesde la
route de Saint-Jacques,ou de ceuxde la routede Rome, il y
aurait eu d'autres séries d'accidents,d'autres moines,sur
d'autres routes, qui auraientfourni aux jongleursd'autres
noms de héros et d'autres rares faits historiques, autour
desquels se seraient forméesd'autres chansonsde gestes,
qui auraientété précisémentce que sontcellesque nous pos-
sédons.Car ce qui fait leur caractère,ce n'est pas qu'elles
aient pour personnagestel Guillaumeou tel Ogier,c'est que
ces personnages,qui leur sontfournispar accident,ellesles
modèlentsur tel ou tel typede héros,elles les fassentvivre
et se mouvoirdans tel ou tel type d'aventure,possédertel ou
tel type de sentiments.Expliquerl'épopée,ce n'estdonc pas
identifieruna un les hérosqu'elleemploieet montrer,un par
un, à quel monastèreou à quelleégliseon a trouvéleur nom,
c'est expliqueret montrerla nécessitéde tel type de héros,
de tel type d'aventure,de tel type desentiments.Si l'on ne
posepas ainsi la question,on confondl'occasiondu poème
avecsa matière, et l'on croitavoir comprisla dernièrelors-
qu'on a simplementdécouvertla première.C'estl'histoirede
la brancheque l'on plongedansla sourceincrustanteet qui
784 L'ANNÉESOClQUlOJQtlK.1006.1000

se couvrede cristaux qui croira quepourdécouvrirla cause


et le mécanismedu phénomène,iliaillo s'attacherà la brancbe
et non pas à l'état de l'eau dans la source? C'estpourtantce
que fait M. Bédier lorsqu'il croit nous expliquer l'épopée
françaiseen s'attachantaux hérosqu'elleemploieet non pas
à l'emploiqu'elle faitdeces héros.Et pourtant,ce qui est tout
le problème,c'est de savoir pourquoi un tel emploi s'est
trouvé, à la fois,nécessaireet possible,à un momentdonné.
L'erreurde M.Bédierne lui est pas d'ailleursparticulière
il la tient des maîtresmômesqu'il combat c'est parceque
trop d'importanceétait attachéeaux personnagesde l'épopée
qu'on a dû inventerla théoriedescantilènesfaisantboulede
neige au travers des siècleset aboutissantaux poèmesque
nous avons,et c'estpar la mômefautedepenséeque M.Bédier
croit avoir expliqué Guillaumed'Orangequand il a trouvé
dans quelleabbayeon a ramassésonnom.Nidans un cas ni
dans l'autre, ce vicieuxattachementaux individusne con-
duit à des résultatsen cequi concerneune théorieépique.–
Et cependant,au point où II la raffine,cette vieilleméthode
erronée que M. Bédier perpétue n'aboutit pas qu'à du
stérile. On peut dire de lui et de la lignée de probes tra-
vailleursà laquelle il appartient,ce que Duclauxdisait de
Pasteur ù propos de recherches sur la maladiedu ver à
soie, où il s'entêta longtempsdans des directionsabsurdes
« Il s'approchaitchaque jour de la vérité, mais c'était à
reculons».Un livre commecelui de M.Bédiermontreavec
plus d'éclatque tout autre, parcequ'il poussel'excèsjusqu'à
sa limite, la stérilité de la méthodede l'historicitéet do la
considérationdes individus,appliquéeà une étude où elle
n'a que faire. Quandon est allé jusqu'où il vient de nous
mener, on peut bien dire que l'erreur est épuisée on est
venu, sans le savoir, si près de la vérité qu'on n'a plus qu'à
se retourner pour la voir. Quanddécidément,commec'est
maintenantle cas, on aboutit à ne pas pouvoircomprendre
l'épopéeen se plaçantau point de vue individuel,c'est-à-dire
au point de vue des hérosdont ellese sert, il n'y a plusqu'à
tenter le dernier parti, se placer au point de vue de la
sociétéqui a sécrété l'épopée,chercherpourquoielleen avait
alors besoin,commentelle en étaitalors capable.
awie.

J.-P.L.
l n t
SOOIOIOQIB
KSTHKTIQUB 785

E. MALE.– L'art religieux de la fin du moyen âge en


France. Étude sur l'iconographiedu moyen âge et ses
sources d'inspiration. Paris, A. Colin, 1908, xii-558p.,
281fig., iu4°.
Dansl'étudedesconditionssociologiquesde l'art, celledes
influencesqu'il a subies et qui ont déterminé ses modes
d'expansionest une premièreétape. C'est cette étape que
M. Mâle nous aide à franchir et cette aide est efficace.
DansJ'art, M. M.s'est limité soigneusementl'objet de ses
recherches Il s'est attaché à expliquerl'iconographieet il y
a déjàconsacréun livre magistral,qui traitede L'art religieux
du XIII*siècleen France.La méthodequ'il a suivie dans cet
ouvrageest égalementcelledu présentlivre.
L'art du moyenâge est en majeurepartie un art religieux.
Lessujetsqu'il traite,car il traitedessujets,sontdes représen-
tationsreligieuses.A ce titre, ellesnosont pas indifférentes;
ellescomportentunetradition,uneorthodoxie,desrègles.Les
sourcesde l'inspirationde l'art étaientdonc canalisées.Telle
est, croyons-nous,l'hypothèseinitialed'où sont parties les
recherchesde M.M.Maisces règles,cesentravesde l'art for-
maient-ellesun systèmequi se puissedissocier? Pourl'art du
Mit*siècle,il a constatéque le nœuddu systèmeest formépur
cette littérature théologlco-didactique que résumeexcellem-
mentle Spéculum ntdjnsdeVincentde Beauvais.Examinantla
décorationdes cathédralesdu xni"siècleà la lumière de ce
Spéculum majtu, M.hi. a compriset faitcomprendreque cha-
cuned'ellesen était une éditionplastique. Elle comprendla
natureentière(miroirde la nature),la morale(miroirmoral),
la science(miroirscientifique), l'histoire profaneet sacrée
(miroirhistorique)letout représentépardes symboles dament
déterminéset traditionnels.
Apartir duxtvsiècle, l'art cessed'être uniquementle reflet
du Spéculummajus.Pourne parlerquede l'histoiresacrée,les
scènesessentielles,la Nativité,la Passion,présententdes dis-
positionsnouvelles,plus animéeset plus pittoresques:des
scènesnouvelless'y ajoutent. Mais,à voir de longuesséries
d'couvred'art représentantles mêmessujets, onconstateaisé-
mentquel'inspirationpersonnelledesartistesnes'est pasdon-
né plus libre carrière que cellede leurs prédécesseurs.Ils ont
eu des modèles et obéi à une tradition. M. M. démontre
que les scènes représentéespar l'art ont pour contre-partie
K. Dcnkiin». Anrniesoriol., 1906-190H. :>A
780 M«M009
l/ANXÉEBÛCIOLOGIOI'E.
nvnnt'A nnllnsAat»
exactecelles des munlÀn&nII
Il tVrtliiuiii
ili Isa0» ilAninnnlHnitn»
mystères. poui'su démonstration jusque
dans un tel détail, qu'il ne laisse place il aucun doute. Les
œuvres d'art, peintures et bas-reliefs, représentent dans la
composition générale, dans le choix des épisodes et des per-
sonnages, dans le choix môme des costumes, ce que présen-
taient les mystères aux hommes du xiv'et du xv° siècle. Aux
remarquables similitudes que la littérature des mystères
montre de pays à pays, correspondent les similitudes de l'art,
Or, c'est précisément au xiv"siècle que cette littérature com-
mence à s'épanouir. Lesartistes ont reproduit ce qu'ils ont
vu. Mais artistes et dramaturges étaient fidéles à la pensée
religieuse, qui prenait au même moment un nouveau ton.
AI. M. nous apprend que les auteurs de mystères, dès la fin
du xiv"siècle, ont puisé leurs inspirations dans un livre mys-
tique italien, qui datait de cent ans déjà et était attribué à saint
Bonaventure, las Méditations*«r in lie de Jtlxm-Chrkt Ces mé-
ditations ajoutent aux mille scènes, dont les apocryphes ont
enrichi ta vie mythique des personnages sacrés, nombre de
scènes et d'autres détails, naïfs, familiers et touchauts; l'nu-
teur leur donne précisément le nom de méditations. Le réa-
lisme de l'art du xv*siècle et celui du théâtre est de ce réa-
lisme où se plaisent les mystiques.
Outre les sujets, la littérature mystique commande les sen-
timents exprimés par l'art. Ils sont nouveaux. L'art didactique
et symbolique du xm"siècle donnait à ses ligures un air de
tranquillité sereine etd'abstraction, qui convenait précisément
au caractère dogmatique des représentations qu'il exprimait.
Avecles Franciscains et les mystiques, la sentimentalité chré-
tienne'débordait la connaissance chrétienne. L'art qui s'ins-
pire de leurs écrits et qui partage les émotions communes se
met à traduire des sentiments, pathétique, tendresse. La pas-
sion et ses douleurs deviennent le motif central du christia-
nisme. C'est d'alors que datent et le Christ de pitié et. la Vierge-
de pitié.
Les scènes et sujets hagiographiques ont les mêmes carac-
tères que ceux de l'histoire sacrée. Mais un autre (acteur entre
ici en ligne de compte ce sont les confréries et les corpora-
tions de métiers, avec leurs processions et leurs représenta-
tions dramatiques.
Ce n'est pas que les sources d'inspiration de l'art du
xm" siècle se soient soudain taries. AI.M.donne un nombreux
inventaire d'oeuvres d'art qui semblent prouver le contraire.
SOOlOLOGIgKSTIIKTKJDB 781

Mats tes uuivreacopient, et môme avec servilité, des recueils


qui remontent û l'âge antérieur ce sont la HihletienPaucrex,
qui date du nui' siècle, et le Spéculum humaine saluationix,
compilation nouvelle, qui date des premières années du
xiv" siècle. Si le symbolisme artistique parait B'enriciiir de la
représentation des Sibylles, il le doit au livre d'un bénédictin
italien, Filippo Barbieri, intitulé: DisconlantitenonmiUminlsr
sanetum lliernnijmuinet Augwtimtm (1401;, qui se répandit
aussi vite et autant qu'un livre pouvait se répandre à cette
époque.
La fin du moyen âge eut un art didactique comme le
xi»' siècle. Cet art exprime également des idées reçues, des
régies admises, qui, les unes et les autres, ont trouvé leur
expression dans des livres. Avecles tombeaux,les danses des
morts, les représentations de l'enfer, inspirées parles voyages
au Purgatoire de Saint Patrice, et les visions de Tundale,
M. M. a parcouru le cercle eutier de l'iconographie. Il peut se
Jlatter d'en avoir résolu presque toutes les énigmes. Dans le
temps, il arrête ses recherches au concile de Trente. Des
scrupules d'authenticité inspirés par la Réforme ont alors
modifié profondément les conditions de l'art religieux; il faut
y ajouter: une rhétorique nouvelle.
Chemin faisant. M. M. se plaît à montrer que des particu-
larités de l'art du xv*siècle que l'on attribue volontiers à
des tempéraments ethniques, comme celui des Flamands, chez
qui on plaçait à tort le berceau de cet art, résultent de la tra-
dition théologique et littéraire, des idées et des sentiments
dont il a dd être l'interprète. L'art est représentation. Mais
quand on compare, comme M. M. nous le fait faire à chaque
pas, la médiocrité des écrivains à la haute valeur des arts
du xv*siècle, ou n'est pas exposé à s'imaginer que tout le
problème, même sociologique, de l'art ait été par là résolu,
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Il.– LE LANGAGE
Par M.A. Meiu-er.

Bien que l'on ne conteste ni ne méconnaisse en principe le


caractère social des faits linguistiques, les linguistes conti-
nuent à étudier les laugueseu elles-mômes, aux divers points
700 l'axsiîe socior,aciguK. tuoo-ma
i» vue usuels, et ils n'envisagent que par accident les condi-
tion» sociales des phénomènes sur lesquels ils travaillent.
C'est ce qui l'ait que les livres de linguistique parus dans la
période embrassée par ce volume de l'Aimée n'appellent pas
en général de compte rendu ici.
Ce a'est pas qu'il n'ait paru plusieurs
ouvrages sur la lin-
guistique générale. Mais ou s'y est surtout proposé de ratta-
cher la linguistique à la psycliologie. C'est un trait commun
aux deux principaux de ces travaux, celui de M.
Séchehaye,
Programme et méthode* de ta linguistique théorique, psycholo-
gie tlu langage (Paris. Leipzig et Genève. 1308;, et celui du
P. Jac. van tiiuneken, Principes de
limjuislique psychologique,
essai de syntlihe(Paris,Leipzig et Amsterdam, 1907 volume IV
de la Ifibliothequede philosophie
expérimentale, dirigée par
M. Peillaube), ce dernier, traduction française, revue et amé-
liorée par l'auteur, d'une série de longs articles
parus anté-
rieurement dans un périodique hollandais. Le livre de M Sé-
chehaye a été complété ensuite par un article du mômeauteur
paru dans les Mélanges(lelinguistiqueofferts « M, F. de Sam-
surt-, p. 155-187, sur lu stylistique et la linguistique théo-
riques.
Les ouvrages de MM.Séehehayo et J. van Ginneken diffé-
rent du reste beaucoup l'un de l'autre. M.
Séchebayese home
à la théorie pure son unique objet est de (aire le
plan d'une
linguistique théorique,, en en marquant les rapports avec la
psychologiegénérale il ne touche presque jamais à des laits
linguistiques particuliers. Il vise surtout à mettre en évidence
la nécessitéd'uue théorie de la morphologie générale au point
de vuestatique, théorie qui est en ellel nécessaire. Mais, même
là où il se pose le problème, tout historique, de l'évolution du
langage, il ne sort pas des considérations purement psycliolo-
giques. LeP. J. van Ginneken.au contraire, se tient très près
des faits linguistiques; son livre représente assurément l'effort
le plus vigoureux qui ait été fait pour tirer des recherches
maintenant faites une doctrine générale sur ce qu'exprime
le langageet sur la façon dont il évolue. Maisle P. J. van Gin-
neken fait précisément abstraction de toute influence des faits
sociaux sur l'évolution linguistique. Il sufllt donc de mention-
ner ces deux ouvrages où la sociologie n'est
pas directement
intéressée.
M.R. Aferingera publié uu recueil intitulé Aus dm Léien
der Hpraée. Versprechen.
tCinderuprache Nachahmungstrieh
LKUXtjAUB ïH
(Berlin, 190!*)lesdeux premières parties, sur les fautes du lan-
gage et sur lu langue des enfants, n'ont pus à être examiuées
ici la troisième est très brève, elle ue comporteque des indica-
tions qui ne se prêtent pas à uue discussion approfondie.
II y ti moins encore lieu d'insister sur uu ouvrage de pure
philosophie, comme celui de M. Murty, ou sur la littérature
de M. 'Maulliner.
On Il pu trouver que la SpraeheAnM. Wundtne faisait puslu
part assez largo aux influences sociales les livres généraux
parus depuis marquout cependant encore un recul à cet égard.
M. H. l'aul adonneen 1909 une quatrième édition de ses l'rin-
zipirii der Sprachijexehiehleipura^iïUttv
la première foiseul880i
sans eu inodilier notablement lit doctrine ou l'économie geué-
rale le livre est reste un ouvrage de psychologie et de liu-
guistique historiques, eu somme l'œuvre d'un pur philologue
qui a étudié lit psychologie. Quand il vient à parler des cliaa-
gemeulsde seus, Ai 11.Paul rencontre l'inllueucedes langues
spéciales; il la sigualeeu termes très corrects mais il ne prend
pas positiou vis-à-isde la doctrine exposée ici même i vol. IX;,
quota principe de la plupart des changements de sens se trouve
dans la répartition des sujets parlants \sulre divers groupes
sociaux et dans le passage des mots d'un groupe social à un
autre.
Toutefois il y a uue direction des recherches linguistiques
où le caractère social des faits de langue se inuuifesle nette-
ment et où eu eflet la sociologie trouve sou compte. Cesout
les études sur le vocabulaire qui, après avoir été seusiblemeut
uégligées durant longtemps, sout revenues au premier plan.
Des dictionnaires élymologiquesde presque toutes les langues
indo-eurupéenues ont paru dans les dernières années quel-
ques-uus, comme celui de M. Walde pour le latiu, de M.Boi-
sacq pour le grec (eu cours de publication do M. Berneker
pour le slave i aussien cours de publication}, d'autres encore,
sont des iustrumeuls de travail vraiment utiles et donnent le
moyeu de suivre avec quelque précision l'histoire des mots
usuels. Du coup, on s'est aperçu quede simplesrapprochemeuts
eu deux ligues, comme ou en trouve souvent dans les diction-
naires étymologiques, n'enseignent presque rieu d'utile sur
l'histoire desemploisdes mots, qui serait le véritable objet d'un
bon dictionnaire étymologique. Dessavants comme M. Lidéa
sesouteulièrenieul consacrés à l'étude du vocabulaire. Une
revue, intitulée Wôrter undSachen,a été fondée par plusieurs
?W l'axnék sociologique, tsos-iuoo

linguistesqui se proposentsurtoutd'étudierJ'histoiredesmots
dans teurs rapportsavecles choses le programmedela revue
a seulementle tort de mettre trop uniquementeu évidence
les choses matérielles et de ne pas faireassez apparaîtrela
façondont les motssont employésparles divers groupesd'in-
dividus,ce quiserait le vrai problèmelinguistique les choses
n'ont, pour le linguiste, un intérêt que d'une manièreindi-
recte dans le premiervolume,maintenantparu tout entier,
l'actionde ta sociétésur le langagen'est nulle part envisagée
expressément.Unerevue spéciale, la 'titsehrift filr deutse/ie
Wortfonehnng,consacréeà l'étudedu seul vocabulairealle-
mand, et im certain nombredesarticlesquelle publieont un
intérêt au point de vue sociologique;on peut signalerentre
autres l'étude de M. H. Schulz, sur les euphémismes,in
volumeX, p. 129-178,où l'ou trouverade curieusesobserva-
tions. Connuele vocabulaireest l'espècede faits linguistiques
sur laquelle les faitssociauxagissentle plus manifestement,
la direction nouvelle prise par la recherche contribuedès
maintenant à mettre en évidence l'influence des actions
socialessur le langage.
L'étudedes languesspécialesa attiré l'attention.Lelivrede
M. Sainéansur L'argot ancien (Paris, 1907)est,
depuis les
travauxde Schwobet Guieysse,le premier qui fassefaireà la
connaissancede l'argotfrançais un progrèsimportant; mais
il est de caractère strictement
philologique,et l'auteur omet,
de propos délibéré, le côté.social de la question. Au con-.
traire, dansdeux articlesétendus,Il. R. Lasch (VeberSonder-
sprachentant ihre Entstehung,hlitteil.d. anthropologischen Ge-
in
selUehaft Wien,vol. XXXVIfen 1907;et M. A. vanGennep
(Essaid'unethéoriedeslanguesspéciales,Herniedeséludesethno-
graphique* 1,en 1908,p. 327et suiv.)ont posé
et sociologiques,
le problèmeau point de vue social; mais dans l'article de
M. Laschles faits sont énumérés.en très grand nombre,il est
vrai.sans êtredécrits en détail, et sansêtreanalysésàfondau
point de vue linguistique ou social; l'arlicle de M. A. van
Genneppose la questiond'une manièrepluspréciseet indique
plusieursconclusionsintéressantes,maisil est trop bref pour
être autre chose qu'un programmed'étude, qui resteà rem-
plir. Ona pu powssertrès avantl'étude dessons du langageet
celle des formepgrammaticalessans être gravementgêué
par
la connaissanceinsufrisantequ'on a des langues
spéciales;
mais on m peut faire la théorie des faitsde vocabulairesans
MC LANGAGE 793

connattreexactementl'influencedes languesspéciales,qui y
est décisive.
M.F. N. Fiuclta étudiéla languedes tsiganes arméniens
U)ieSprttehederarmenixchen Ziyeuner,Mémoire* de l'Académie
deSi.-Pétenbourg,vol.Vill, n°5, année1907.)il a misen évi-
dence l'existenced'un parler dont la prononciationet la
grammairesont purementarméniennes,mais dont le voca-
bulaireest toutentierétrangerû l'arménien.On aperçoit ici
bleu à plein une donnéequiest de#premièreimportancepour
l'étude des langues spéciales; le vocabulairepeut évoluer
indépendamment desdeux systèmesqui caractérisentchaque
langue le systèmede la prononciationet le système des
formesgrammaticales.
Dansun articlesur Lelangagede l'Écolepolytechnique(Mé-
moiresdela sociétidelingmxlique, XV,p. 160et suiv.),M.Mar-
cel Cohena montrécommentun petitgrouped'individus pla.
césdans des conditionsparticulièrespeut se constituer un
vocabulairespécial(la prononciationet la grammaire étant
purement et simplementfrançaises),vocabulaireconstitué
tout entier avec des éléments-français altérés ou employés
d'unemanièreparticulière.
M. Jules Blocli,étudiant les Casteset dialectesen tamoul
(Mémoires dela Sociétéde linguistique,XVI,p. 1 et suiv.), a re-
connuque, dansledomaine étudié, les sujetsparlantsprésen-
tent des diftérencessensiblessuivantla casteà laquelleils ap-
partiennent.Nonseulementlevocabulairediffèresensiblement
d'une casteà l'autre, maisil y a ausside fortesdifférencesde
prononciation û tel phonèmed'une caste, uue autre caste
répond,dans les mêmesmots,par un phonèmetout autre.
C'estseulementquandon aura poursuividans le détail des
recherchesdece genrequ'onpourra déterminercommentse
constituentlesvocabulairesdesdiverses langues. Un germa-
niste éminent,M.F. Kluge.auteurd'un dictionnaireétymo-
logiquede l'allemandtrès remarquableet dont le succèsa été
éclatant(uneseptièmeéditiona paru au coursde l'année1910),
voulantmontrercomments'estforméle vocabulaireallemand
dans sou petitouvrageUnserDeutsch(Leipzig,1907 2° édit.,
1910),s'est attaché presqueuniquementà montrer l'apport
de languesspéciales languedu christianisme,argot, parler
des étudiants,des marins,etc.
D'autrepart, les recherchessur la répartitiongéographique
desmotsse poursuivent.Lapublicationde YAtlasde MM.Gil-
"Wr L'ANMÉK tU(J«-tUU9
SOCIOLOGIQUE.
Héron et Edmunt continue régulièrement elle donne lieu à
la composition de divers mémoires dus lesuusà M. Gilliéron,
en collaboration avec M. Mario Roques, les autres à divers
auteurs. D'autres travaux du mémo genre se préparent ou
paraissent pour la Roumanie, la Suisse romaude, l'Allemagne.
Surtout pour la Frauee, l'histoire du vocabulaire est peut-être
celle qui profite le plus largement de ces recherches (voir l'ar-
ticle de M. J. Huber, Sprackgeogiitphie,UuUetinde ttiulectoloyie
romane, 1, p. 89 et suivw.
D'une manière générale, on constate en linguistique une
tendance à serrer de près les faits, qu'il s'agisse de parlera
actuels ou de langues anciennes. Quautatix langues anciennes,
il est tait un trèsgraiululïort|>our nijeutiir la grammaire com-
parée par une utilisation précise de toutes les sources et par
une exactitude philologique piirfaite les travaux de Al.Wac-
keruagel se sont toujours distingués par cette rigueur philo-
logique, en même temps que par la pénétration de l'auteur;
Ai. Solmsen, dans ses Heitruyezitr ijrinhUehtn IVortfomhuug
(Strasbourg, -1909,1, se montre philologue largement informé
autaut que bou linguiste M. Krelschmer et M. Skutsch
ont fondé (à Grotlingiiej une excellente revue nouvelle, (îlot ta,
dont l'objet est de concilier ht linguistique et la philologie;i
tandis que l'éniiueut professeur de Berlin, AI. \V. Schulze,
donne lu môme orieu tatiou à la vieille Zi'itscltriftde Kuhu, dont
il a pris en partie la direction. Cette étude attentive de tous les
faits attestes a, entre autres mérites, celui de faire
apparaître
comment les choses se sont développées en réalité, beaucoup
plus que l'emploi exclusif des méthodes comparatives. – Eu
môme temps, les éludes précises sur les parlers actuels se
multiplient; quelques-unes ont nu véritable intérêt au point
de vue sociologique, môme sans que les auteurs fassent inter-
venir de considérations sociales. En particulier, les observa-
tions de AI.Ceddes sur le canadien français (Study
a fan aca-
ttien frmch dialect, 1908)sont précieuses, parce qu'on voit
y
comment a évolué le parler d'un groupe de colons qui appar-
tenaient originairement à diverses provinces françaises et
avaient par suite des parlers divers AI. \V. Meyer-Lûbke
a montre'1l'intérêt qu'oflreut ces recherches dans un article de
la Ueruiànueh-romunuche Monatmhrilï, I, p. 133 et suiv.,
(en -1900); on voit comment les tendances déjà existantes au
xvn*siècle dans l'ouest de lu France out agi au Canada comme
dans los pays d'origine et comment môme les innovations
l.B UNOAliE 1%

auraient été plutôt plus complètes et plus rapides au Canada


qu'en France.
Ces observations générales une fois faites, il suffira de
discuter brièvement deux ouvrages qui uppelleut quelques
remarques particulières.

A. ERNOUT. – Les éléments dialectaux du vocabulaire


latin. Paris, Champion, 190»,in-H-,iuii p. /volume 111de
la Collection Ihujuiilititte publiée par ta Société de liuguis-
Lique de Paris).
La cité romaine, qui parait avoir été dès le début composée
d'éléments complexes, s'est de bonne heure étendue à tout le
Latlum, et une grande partie de l'Italie y est entrée peu à peu.
Dès lors, la langue a subi des influences diverses. S'il est
malaisé de déterruiuerdaiis quelle mesure cette diversité a pu
influer sur la prononciation et la grammaire qui forment
chacune un système fermé, on voit du moins que le vocabu-
laire comprend des éléments appartenant à des dialectes ita-
liques autres que le latin. On sait d'ailleurs que c'est surtout
sur le vocabulaire que se manifeste l'existence de
groupes so-
ciaux distincts à l'intérieur d'une population
parlant une
même langue. Lalangue qu'on connaît sous le nomde latin s'est
fixée dans la ville de Rome; c'est proprement du romain;
mais cette longue comprend des éléments de vocabulaire
qui
ne sont pas romains. Ceque M. Krnoiit s'efforce de mettre en
évidence, c'est 1»part qui est due à des parlers italiques non
romains dans le vocabulaire latin. Par italiques, on entend
ici les parlers immédiatement apparentés au latin de Rome,
à savoir les parlers latins ruraux et les parlers osco-ombriens.
M. E. ne touche ni aux emprunts – très importants, on le
sait – que le latin de Rome etfaits au grec, ni aux emprunts
qu'il a faits a des idiomes non indo-européens, ces derniers
n'étant sans doute pas négligeables lion plus, mais étant tout
it fait indéterminables pour la plupart dans l'état actuel des
connaissances.
Les emprunts du latin de Rome aux parlers latins ruraux
et à l'osco-ombrieii se reconnaissent de deux manières quel-
ques-uns sont indiqués par les anciens eux-mêmes d'autres,
en plus grand nombre, se trahissent par leur forme extérieure,
qui n'est pas conforme aux règles de la phonétique latiue. Ce
soûl les seuls que M. E. ait pu déterminer; il y a eu certaine-
7% i/aNKÉR WCIflLODIOL'C.iV0(f-iR09

meut bien d'autres mots empruntés,mais ils ne sont


plus
recoonaissables,soit quela formeait été dès le début sensi-
blementidentiquela formeromaine,suit que la « romanisa-
tion » (l'adaptatiouà lu phonétiqueromain»)ait été
par-
faite. Il sera sans doute difficile,a moins de découvertes
imprévues,d'ajouter beaucoupaux listesde M.E. On pourra
discutersur la valeurde quelquesexemples.Mais,dans l'en-
semble,il apparaît que M.E. a bien montré que, commela
populationmême,le vocabulairede Romecomprenddes élé-
meutstrès divers.Ala campagneromaine,Romea dû notam-
ment des nomsd'animaux,de plantes,de notionsrelativesà
l'agriculture fenum paraltêtre un emprunt au latin rural,
tout commefoi»(qui continuele latin fenum)est à Paris un
empruntun parler rural dontla phonétiquediffèrede celle
du parisien. Il n'y a rien là de bien surprenant. Il est
plus
remarquableque Home doiveà la campagnelatineet à l'osco-
ombrienun bon nombrede termesreligieuxet determesde la
langueofficielledont l'empruntcontribueilétablirle caractère
complexede la cité romaiue.
M.E. a eu le méritede marquer,d'une façonencoreun
peu
trop brèveet sommaire,lescausessocialeset historiquesdes
particularitésde vocabulairedont il a fait d'autre part une
étude philologiqueet linguistiquepréciseet serrée.

CH. BALLV. – Traité de stylistique française, Paris (chez


Kliocksieck)et Heidelberg(chezWinter),2 volumes,1909,
xx-331p. et vn-264pages.
Ce traité, qui continueles publicationsde M.
Bail relatives
a la stylistique, a un caractèrequelquepeu scolairedansla
forme sorti d'un enseignementpratique de la langue fran-
çaise,il vise un but pédagogique. Maisil procèded'une obser-
vationtrès Onede la réalité;il met en évidenceun ordre de
faits que les liuguistesontletort detropnégligerai ainsi
les basesde tout un typed'étude,qu'il ue poursuit posesur le
que
français,mais qui doit s'étendreà toutesles langues.
Deuxcausesont beaucoupcontribuéet contribuentencore
à faire que les conditionssocialesdes faits
linguistiques
tiennent trop peu de placedans les recherchesdeslinguistes.
L'unees! que, sortiede l'étudedes langueslittéraireset
géné-
ralement des languesécrites, la linguistiquea continué
par
tradition à envisagerle langagepresqueuniquementcomme
un moyend'exprimerdesidées;ona oubliéque le
langageest
1.8 unûaob 707

avant tout un moyend'actionet que l'impératif est la forme


verbale par excellence la longueest apparue ainsi comme
quelquechosede presquepurementintellectuel, alors que,
on fait, dans l'usage courant, elleest toute pénétréede sen-
timentsdivers,qu'on ne dit à peu près rien sans y mêlerou
mêmesansy mettreau premier plan l'expressiond'un senti.
ment, et que, d'ailleurs, on ne parle guère d'habitude pour
communiquerdes Idées, mais simplementpour provoquer
certainsacteschez autrui; le caractèresocialdu langagene
se manifestepresque pas dans les recherches ordinairesdes
linguistes,parcequ'on l'a éliminéde l'objet à étudier dès le
début. – L'autrecause qui teudà produire le mômeeffet,
c'estque les linguistess'attachentd'ordinaireà cequi se prête
le plusàêtrefixéet rigoureusement défini danschaquelangue
le systèmephonique,c'est-à-direla prononciation,– le sys-
tèmemorphologique, c'est-à-direla forme grammaticale.Or,
touteuadmettantde notablesvariations,le systèmephonique
et le systèmemorphologiquesontdans le langagece qu'il y a
de plus constant,de moinssoumisà des influencessociales
particulières.
L'objetde M.B. n'est ni ta langueécrite, fixée,ni la pro-
noucialionet le systèmedes formesgrammaticales.Il se pro-
posed'établircommentou tire parti des ressourcesoffertes
par la langue.Il avaitpu paraîtreque,dans son Précisde
liëlique(\WNi),M.B.négligeaitdeconsidérerles faits sociaux;i
c'était une grave lacune.Cettefois, il met, au contraire, en
évidencecombienle langagevaried'un groupe social à un
autre, et, chezle mômeindividu,d'une situationà une autre.
La définitionqu'il donne de la stylistique prête encore à
objection la stylistiqueaurait pour objet l'étudedosfaits de
sensibilitédans le laugage.En réalité, ainsi qu'on l'a dit, le
langageest un moyend'action et Il y aurait plus d'inconvé-
nient encoreà en mettre au premier plan l'élémentaffectif
que l'élémentintellectuel.Maisla pratique de M.B. est plus
largeque sa définition,vraimenttrop étroite.
Onauraitpeut-êtreune meilleuredéfinitionde ce que M.B.
entendpar stylistiquesi l'on disaitque la stylistique étudie
le langageorganiséen tant que le sujet parlant l'emploieà
agir sur d'autres individus.Tousles faits étudiés par M. B.
entrentaisémentdans cette définition,et l'examende toutes
lesvariationsdu langagesuivantles conditionssocialesserait
appelépar cettedéfinitiontrès compréhensive.
"i* l/AXXÈKSOOWtOÛlOBB.
1000.190!»

Du reste, Indéfinition n'aurait d'importance que si elle nui-


sait à l'exposé de M. B.j or, elle ne l'a pas empêché d'écrire
les meilleurs chapitres de linguistique
sociologique qui aient
sans doute été écrits tous les linguistes devront lire et médi-
ter le chapitré sur la langue commune et les milieux. 11 a là
y
des suggestions importantes et dont la
linguistique historique
devra tirer grand parti. C'est la première fois
que la langue est
examinée systématiquement au point de vue de
l'usage qui
en est fait suivant les cas, la première fois que les
répercus-
sions de cet usage sur Je développement des
langues sont,
sinon étudiées systématiquement, du moins envisagées d'une
manière expresse. M. B. a eu le grand mérite de poser les
questions à propos d'une langue, le français il reste à les
traiter en détail et l'on peut attendre de là un grand
progrès
pour la linguistique géuérale.
TORREND{}.). Nouvelles études bantoues, comprenant sur.
toutdes recherchessur les principesde lu dassiikation des sub-
stantifs dans les languesde l'Afrique nuslrale.I* Utisendzide
Têteou Clûnyungwo. SludlgtoUobyieitiulùmi, de Gregorio, IV
Turin, Loeiclier,1907,in-8".

III. TBCHîtOLOUIB

WEN'DT.– DieTeohnik als Kulturmaeht in aczialer und gels-


tiger Beziehong. Berlin,G. Heimer, i'J00,in-8°,yiiï-328p.
KOCHGRUENBEHfi (Th.). Das Haus bei den Indianern Nord-
brasiliens. Arehiv
f. Anthrop.,1908,vol. Vil,rase. 1.
BUIKIIAM ;w.). The anoient Hawaliaa houses. Honolulu
|yO8,in-4».
MUHKO. Znr Geschichte d. volksthomliohen Haeuser bei
den Sûdslaven. (tfilleHunyend. uiuhropoi Oeselhch.in Wieu,
XXXV-XXXVIj. Wieu,Anthropol.Geseliscli.,97 p. gr. iu-4°.
15HAMM (K.i. – Ethnographische Beltraege zur aetmaniaoh-
Slavi8ohenAltertumskunde. 1.Die(irosshur<:iidei-tNordgerma-
nen. Il. L'neUliclieUauernhûfein Germaniscli-SlaviscliomWald-
«ebiet i. AllgermanischeBnuernhofeim l'élu' rgiingvorn Saal »i
KleltnerStubo.Braunsuhweig,IUOS-19OS,853-1H"p., jn-8°.
PRSSLEH.– Das altsaeohsisohe Bauernhaus in seiner
geogra-
phigohenVerbreitung. Brannschweig,Viewegu.Soltn,l«00.
SCIIUI.TZ(A.). Das haeusllohe Leben der europaelsobes
Kulturvoelker, vom Mittelalter bis znr zweiten Haelfte
des XVIH"» Jahrhuadérte. Miiiitheii, Il. Oldenburg, J900,
vnr-432p.
TABLEDESMATIÈRES

1)I\EMlI~IŒSIW1'JON. Sociologiegén8rale.

l, COXCHfTKM
U1:1$IiALK
UKLASm.~).0(i))'. MKTUOMLOOt:
14r51.9lxcax.
8XOHL6. Zur Grîindung oiner bouchroibondon$osiologie. i
l(oTII:1I8 t
Il. TRAm'iS C~NUt'X. )')tn.OSOpn(E.Sf)t;)At.E
Par MM.Dtyt-s;tirin,
1,!I'1r., Mocf.ft,
1101'1111"0. Aorn~.
MeYtK. Ge80hlohtedes Altertums, 2- AnOa~t' n
ItATZE~rtiovitn.8o!:0t09ie i3
GKMfto~.–t.aetraetureaAntMledeBMeitt&B. 15
StOM)! SMietoaie. if
Wottus. Philosophie des Sciences sociales, 111. :o
NoTtCE~ 21
tn. Ql'RS1'IU:'SfiÈXtttAMSt)!VmSES
Par 3131.
Htvit.I'xuuur,Hnc~m'tAL'c'mtï.Aca~s.
V'RIlKANllor. Pfihreado Individuen bei den Naturvoslkern. 22
Die &tetigkeit im Rulturwandel St
C'UTTBRTON llilt.. Beredity and Seleotlonln Soctology 29
BAKtitt. Essai sur les Révolutiois 31
SooiologioalPapers. Vol. 111. se
ANMtMde!'tMMtat!)<ternatt<)Mtde8<<cMoj}ie.t.Xt. 35
NOTICES, 37
IV. P¡I.CIIfJI,OGŒ SOOAt.E
t~arMU.fiun.r.C.
el 0.
3)!
MAcDoee*–AntotroductiontoaocMtPtyehetogy.
AMwoKTaRoss. Social PeyeMogy <?'.
NOTMES 41

V. LES CO?))))WXS S(ICIOI~0(.IQUHS URLAr:O:IAI8s.\Xl:S


l'at MlI.livitgliriv
et iinmt.t.
JexMAt.m. – Sosiologie des Erkennons 42
-RoositTy
(o)t). Sociologiede l'aotion 46
NOTICES 1 47
600 TABLK DUSUATIÈHK»

VI. KTII.NUGIUPI1IB.
HISÏOIHB
ETS0CIOLU0IB
Par .MM. M»u.» et Pahom.

Smxmrra. – DeStudioder Volkenkunde 4»


– De Beteokeuis der Volkenkunde voor de Studie van
HenBohenMaatsohappij «
Xênopol.La théorie de l'histoire 49
Notices w

DEUXIÈMESECTION. Sociologie roUg/eum.


TKAITÉS
GÉNÉRAUX,PHII.OR0PHIK REUOIKUSK
Par MM.Mit»»et Dura.
Wundt. – Voelkerpsyohologie.Il. Mythus und Religion 83
Mabiiktt.– The Threshold of Religion 68
Mœrchci. – Die Psychologie der Heiligkeit. 70
Um. – The origine of Religion and otuor ea8&Y8 71
Heis.vch.– Orpheus 75»
Notices 7Î
II. SYSTÈMESRKLIOIEIJXDESSOCIÉTÉS l.NKÉHIEUHES
A. – le système tûtémit/ue.
l'ar MSI.OonKiinti
et Mai»..
Stheulow. – Oie Aranda und Loritja-Staenmto in Zentral-Austra-
««» 76
Kyu»\nx. – Die Eingeborenen der Rolonie Sûd-Aostratten si
X.-W.Tiiomai.– Native Tribes ol Australia m
Notihes jjjj
B. – Systèmes religieux à totémismeévolué.
Par U. Mm:m.
Haudon(et ses collaborateursj. – Reporte otthe CambridgeAnthro-
pologioal Eapedition to Torres Straits. vol. VI 86
Paukisson. – OreissigJahre in der Sfidsee 93
Hivebj. Totemismin Polynesia and Melanesia lot
Maiuan(db). te Totémisme aux lies Fiji. w*
Bivebs. Totemismln Fiji tes
SeuGiiANN.Note on the Totemismin New Goinea )o<)
Mai;Cali,Tiikal. History and Ethnography of Alrioa. South ofthe
Zambesi, Vol. I f00
Webnkr. The native Raoes of British Central Alrioa 108
1 Swanton.– Contributions te the Etbnology of the Haida. Vol. V
par'le I 110
Social condition. Belieisand Linguistio
Relationshipot
the Tlingit Indiane. m
– Haida Tests and Hyths m
Kkau»k.– Die Pneblo Iudianor HU
8TBV8N80H. –The Zatti Indians .HO
Votii. The Traditions et the Hopi Hfl
Eicïirow. Die lultar der Pueblos in Arkona an ' N«.w-Mexico. 110
TA1II.K DKS MATJKItKS BOi
.t. 19 iJ3
KK(MM.–TheArapaho.)')'ft.t)<!t)V.
I)ohsxy. The Choyenrie. 1 et il !as
NOTU:I\B 1:»

C.–.S'~<W«'t;f<)~ffMtjf/t&(t<U'.
l'a. )1,)I>e.
SftMH.–DieBwe-Staemme. ~6
LMXAKo.– The lower Niger and its Tribes. 131;
Ofttt'MtixM.–LePtatMueentratNtgMen. i3(t
MeuMMe. Le peuple SiAnaou Sénoufo. 136
BoMHAa.–TheChuttehM.n. 16e
JOCHIU.IO:C. The Koryak. 1. !iR
tUvtiM.–TheTodM. jM
1G8

Ut.-SYSTEMES MEtJGtBMKATtuXAL'X
Par)1)1.Il.lÍr1., c'I IIC"I'IIT.
J4CSSr.X<t.B)'.). – Coutumesdes Arabesau pays de Atoab. 1611
))M«.–A<'a!tiaPet)fe6)t.))t. 100
lt~urt. Die Religion d08 Alten Testaments unter don Religionen
des vétéran Orients 16:1
CMttxe. – Traditions and 8eliets of Ancient brae) tes
BAEKTtct. Altoriantalisohar und isractitloober Monothaiamae iut
1'Ol'n1N. Les Cultes palenl dans l'Empire romain. 1,* partie, t.. ias
CUMOIIT,Les religions orientales dans le paganisme romain 106
NoTtCM. les
r
!V.-SYSTEMES ttBUGtEtiXL.WKKSAt.tSTHS
ParMa.litatz et et Fuict.
11'rxarscu.Taule und Blindeim aoltesten Chriatantum bis aul
OritfenM. 169
Garoumwac~M). – ï.'EgH<e chrétienne au temps de saint Ignace
d'AnUoehe. n:1
XtMtCM tii

V. 85'ST$~IRS
RBJ.lGlI!t.:X
III!Sat101;1'kS
88COYI)AIRP.S.
:I!CTJ1,S
t'tt'MH~McMmotMt'tSt.tM.
l3oussar. Hanptprobleme der Baotit. j7l
180
Y). CL't.TE!!
SPÈOAUX
PMM.M~m.
FR4Z1R, The Golden Dough. Part. 1\ t81
NOTtCM. IM

Vif. CKOYANCES
KTIIRATIQUES
11111'.5
POPUJ,AlIIY.S
)'MM.K~)nM.
GOllle, Folklore as an historiaal Setenee <8:t
NOTICES 181
E. Deniciirtu. Année sociol., )M6-MO~. 51
802 TAttU UK1MXTISltKS

"11\, CROYA:l:1!S
hT IIITESCOXCEXSAXT
LES).IOR11'1
31. lii!l,rgtT.
FtucE (De). L'autre monde mythes et légendes; le Purgatoire t..
deSeiat-Patt-ioe. tttx
i 119
IX. LA31AIiIE
('at Mil.tbe. IIC"T01lit:
C~~u.–AtUndiMheZaaberei. 190
Jut': (<;<!).– Da antlko Mysterienw88en in reU9ioB<geMhieht)i-
oher, ethnologilcher und payohologtaoherBaleuchtung 191
UofTr~. Magie et religion dans l'Afrique du Nord 194
NoTtCt: 198
X.-KtTLBh
l'ar MM.11" III' Httm.
\'MCM'if!)'.–tt9$Rtte9dePaMa9e. 200
A. Les <'a~«/<-<f)-! el dea/crtea.
redi,rlieux
UMM.–tttdm.02
ScttmcT. – Geburtstag im Altertutn SOI
XoTtCES. 206
B.– Cf't~meMtMcomplèteset rilec manuels.
Scanuatigti(voit). Myaterinm und.Mimusim Rig Veda !O.
NMMs. !i6!)
C. ltécanisn:esritaeGrdirera. "1
i;cna.cA. HabylonieohoSahnrtten 2io
:OTICE5 212
.t).–Mf<'<<0'N<.
liturgiques ~)2
NoTtCES. 2):<
XI.OBJBT! ETLIEUX
DECUI.TH
XCTfCM. :II"
XII. RIWIlj¡$I!~TATIO:-l!lIlf.LIGI8(j$I!
i'ar ~ll. ))*< Rwr:uwr; HctmT.
A. Repréasntationad`r·lrcaet rle plienomc~nea
nrslru·eda.
Ji¡lru'f. Het Animiamein den Indisohen ArcMpet. ~t4
Die Loango-Expedition.III. j!
)')!M):)!L<)K!!C))K. 218
Gnoor !be). The Religions System of Cbiaa, Il,2, rr,i. V ~i!j
Ro<c))t!'t.–Bnneaditt<)heStudien. 233
ttM~. – StebeMtht und Sabbat bei den Babyloniernund im Alten
Testament. 3:ttl
KACM. DieZeit-und Foetroohaung der Jo~en 3:3i
CMMXT. Le mysticisme astral dans l'antiquité fa7
MMx.EWAtr. –Theortgia of the Turkiah CreMeet ~8
NOT";M. MM«.)
Ikait DÉSBATIBHHS 8OÏ

B. – Hepréwnlallon»U'élret spirituels.
FAitmt.. – The cuits ot th« Qreek State* gjo
Usexkh. Der Heiltge Tyonon a«
NoTICIt gw
G. – Le»Mythe».
SrvcusK. Aetralmythen d«r Bebraeer, Babylonier und
Aegyp.
tM •' v 8t7
Sieckk. – Draohenkaempte 24»
B(eki.bx.– Adamund Gain »«
SciiiiinT. – Jona 250
Staiix. – Oie Çimson Sage 2^3
FmEDi.AExnKit. – HeraWes
Notkk* • • ^7
D.– Ugendu, conta, épopées.
Uaïsiuiidt. – Natnrsagen 2SÏ
Notices ^gj
K. – Dogme».
Drpix.– Le. Dogme
de la Trinité dans les trois premiers «idoles.. 204
Notices ggg

XIII. US SOClêTÉS
HBLIUIKISES,1.BIÎHDROIT BTIBUIlJIORALB
ParMil.ft. Ilwrcol n. Houcia.

Benskwitz. – Die Sûnde im altsa Israël goo


Tiioiu.; (P.). Le droit de propriété des laïques sur les Églises.. 267
NûTICKS ujj

TKO1SIÈMESECTION. Soc/o/o|/e moi-a/e et juridique.


'Élude des règles morale»et juridiques considéréesclousleur
genèse)
1. DUCHOtT ET»BU VORALB EX«ÉXÉI1AI.
l'ar SIM.Unr, Davih,Boluu,Faixohsut,
Hciit/.
Fouiuke. – Morale des idiea-foroe» ses
Ciiai'UanSharp. – A study ot the InQuenoeot onstom on the moral
judgmdiit. 2ii
Tokkxiks. – Die Sitte 2;j
Westekhauck. – The origio and derelopment oi the moral ideas.
Vol. II 274*
llomioi'SB.– Horals in évolution 270~>
NoTiun gjy
II. I1UIUINK KELICIELSEUESIDÉEdMOH.VI.HS ETJl'RIINUl'l»
Car MM..Mam<
cl IUvil.
Fiiwer. – Psycbe's Task 279
llniy.Ki..– Themis,Oike und Verwandtes i«ï
Sotick» 28(i
804 TA1H.E
DESMATIÈRB*

III. 8YSTKMK8 ETMORAUX


JUIUDIQURS
A.Des tysttmesjuridiques en général.
Par M. Paicokmtt.
Mahuhella. – les type» «totaux et le droit 288
B. Systèmesjuridiques de»sociétésindifférenciéesà basede «laits
totémiques.
ParM.Oliwhiiii.
WrcsuT.– Die'Antongeder Besellsohaft 291
Rotii. Notes on Ooverament,Moral»and Crime 203
Notice» m
C. Systèmesjuridiquesdifférenciésà basede clans Mimiques.
Par M.IIaih».
Swantok. Contributionste the Ethaology of the Haida 294
– Sooial condition,Beliefs,of the Tlingit Indiana. 204
Reporte ot the Cambridge anth'ropological Expédition te Torres
Straits VI 29i
OveoBEMiii
kt es Jonoiib. Les Bangala 304
– Les Mayombe304
– – Les Baspngos 304
Notices 304
I). Systèmesjuridiques frlbaux.
l'ir MM.Biaxcosi,
lltmz,Mai»»ptOavv.
Pichuel-Loeschb.– Oie LoangoExpédition III, i 306
Roscoc. – The Babima. 307
Rkbhs. The Todas 309
Mo!2kows«i. – Sitten und ffebraeuobe m 0»t und West Sumatra 314
Kobleb. – Qeber das Reoht der Urataunmevon Malakka 316
Spietii.– Dis Ewe-Staemme 317
Leonaho. Tbe lower Niger and ita Tribas. 317
DWW.A0NB*. Le plateau oentral Nigérien 317
Deiafosse. Le Peuple Siéna ou Senovlo 317
Le p. Jaussen. Coutumesdes Arabes au pays de Moab. 323
JIdhl. – Arabia Petraa. III 323
Noticu 387"
E. Systèmesmorauxet juridiques nationaux.
Pu HM.FAi'couxtr et OiB»tr.
I)ak8»tb. – Nouvellesétudes d'histoire du droit. 328
Jonbs.– Oreek morality in relation to Institutions 330
Caoïter. – Les dtoooraties antiques 331
Notice» 33t
IV. l'oroanïsatiox nomhstiul'bkt MATRIMONIALB
ParMM.Diukhiv,Davt,Booi.u.
A. La Famille.
N. W. Thouas. Klnsbip organisation and ftronp marriage in Aus-
t««a 335
Staniscmitscii;– Ueber.donOrsprong der Zadruga 343
TAttLRDBSMATIÈRES Bon 1..
GACR6PACII. State and Famlly in early Rome. 3t7
1~IIIJlI.\SN,Die l1u\wlokluo!l der Tsstierirolhoit im r08WBOh\ln
880h\ 3'8
OexMT.– Essai sur les origines du testament américain 3fi!!
HooKMT' Desfan)iUen-SMaven-uadErbrochtim Qt)r&n. 35U
NOTlcK8 3S7
li. Le mariuae, l~erortdilionde la femme.
Ko)<t.t<t. Ueber Totemismus und Urehe 3~9
Eskimo und (iruppeaoho. 3M
Noohmalaueber Qruppoaeho und TotlllllÎlmu8 359
CmwnY. – Exogamyand the matting 01 cousins 3GI
Lvr.a.–AuttratianPMMetne :161
EIlIlr.~7.I\'BIO,
DieSchaiaohe la ouropaolocheuHochaeitsbraeaohen. 3M
WEBM.–BhetmunndNttterinderRechtsentwicMMg. se8
RtOtAM. La femmedans l'blatolr8. 3G9
LArlr.. La femmedans la famille :171
NoTfCKS :Jî3
C. La nt0!'lllesea'aellr.
STot.).. DasGesohieohtslebenin der Voelkerpsyohologto. 315
Norlr.gx 30

Y. OMiAXtSATtOf UE~GRUGI'13fiSMCOXUAtMES
(Castes.dill.jell,groulbmeolc
Ufbtiut.)
ParMM.lin"1 0<
Bouote. Essais sur le régime des Castes. 38i
CxA)t)!)). Die Vertaseungogeschichteder Comanon and Heitea. 387
8cuwËmx(\ox). – Die aitourmaiiische Runder\80halt 387
Pae''< – Die BntwloklunlJdes deuttchen Staedtoweseas 396
NOTICES, ~ut

VI. OIUiA)¡I:'A110X
t'0).)T)ULE
Par M.Gr.1t.%Icy.
fttAXHOTT)!.La Polis grecque. M2
MAttïts. – Notes sur l'ostracisme dans Athénes 4M
Càncopixo.– Histoire de l'ostracisme alhénien d8t
IIOf'FU.\5!f
(v<Mt). Die Bntteheidunj ueber Kriegund Frleden naoh
gennani80hemReoht -ion
GitAooA)i-NV4Lt,AS.
-HullW1 Nature in Politlos 407
BtHnr'.Er. The Prooess of tbvennnettt 4<)8
NoT)C~)t 410

VII, l.ti DltOlTMEl'it0l'itiÉTi.


l'ar MM.Uawet Un.

BtiMt.zMEtMM.–SyttemderReehtB-undWiTttchafttphMcMpMe. IV. 4H
GoMMA! 8igoatamserwerb duroh Sp81Ulkationim jlldilohen
Recht 4)3
OAfF.–MtdaenbehenOemeindeReehte 4)<i
NoDCM. 419
80$ TABLE DUS UATIÈMIK

Vtli. DROIT 0UU1TCOMMERCIAL


CONTUACTUEL.
l'or MM..Mact», Oavv, H.rru*.

Rai-m. – Blnt-und Speiohelbuendebei den Wadsobagga 420


Lascii. Cas Barktwesen ant den primitiven Kultursttiten 42t
HmCl. Das alttestamentisobe Zinsverbot 422
I'ahtsch. OrleaMeenesBurgsehattsreoht. I 425
Bhitomsi. Appunti didattici di diritto romano. 438
Priuaga. – Nexum und Manoipinm 132
Rmtschum. Daa Nexum und «gin VerhaeltniB ina» Mandpium 433
BUmacx. – Le vadtmenium 4M
Notices 447
IX. DROITl'ÉXAI.ETRE8l'0SSABIt.rrÉ
l'ar H. Fiucuixct.
Bkholihiimer.– Systemder Reoht»-und WirteohaltsphUoMphie.V. 448
Tksah.– Die symptomatisobe Bedeutung des verbreoheriBoben
Verbaltent 450
Pabmbi.ee. The piinoiples ol anlhropology and toeiology in their
relations to osiniaal procédure 454
Grasset. Demi-touset demi-responsables 450
La responsabilité des orlmlnels 45(1
Notices 45»

X. LAl'ROCÉDUUli
fut MM.DmiKatiM
et Piccoxict.

,d,*ir.B. Der Bid 4U0


(in. – Der Zweikamplim traenkisonen Prozell. 4<M}
eooLix. Der geciohUiobe Zweikampt im altfransoesisoben Pro-
cess. 1" Teii 46S

DmAREUiL. A propos de quelques travaux rôoents sur le duel
jndioiaire 46»
5otic:k« 400

XI. MORALE INTEKNATIONALE


ParMil.BtBKiiHu
et ligcuO.
Priîoebici. – Der Traenengrnss der Indianer 46U
GoxsT.nm.T. Le rôle sociologique de la guerre et le sentiment
national 470

0UATR1ÊMKSECTION. Soc/otogfeoriminolle et statistique morale.


{Éludedes rigle*juridiques et morales considérées
dîna leur fonctionnement)

I. SI.'PTIAUTft
KTDIVORCES
P»rMM.Hauiwauii»
et Rit.
Haïb (vox). Statistik und Oesellsohattslehre, III 472
Bosco. – Dlvorri e separasioni persoaali dlconjngi 477
ROtickx 485
TAI1I.KUKSUATIKHKS 807

u. )tELACltt~llNALITB
J't CMKA).
NOTICES, tM
LÀ CtttMtXAUTf!
S);t\ AXfDMl'A1S
ParMM.Htvel F.nM.~tT.
JnLY.–ï,aBe<9iqo9<ftmtae!)9 tM
XIlIIIII
(ut:). La dolinquenta in Italia dal H90 al iM8 4X<
W~Mt-tif.– Die Verbreobensb8wegung im o8sUiohenBaropa, t ~i9U
N')T)C)!!(. 4M
IV. LACK!H!XA).[TÉ
St-tYAXT1;(l1!ETLE8K!;R
ParaUl.Ilunwusm
et Itar.
8tiSCII.\N.
– GMtMecht und Verbreohen. 4US!
T.tMowsKf.–I.MtemmMhomioMM. 4M
Fmt-txt. Delinquenlla e oorrezlone doi minorenni 4gi
4M
V. NACTftI!Ra UtVSKS CHLA~:R)!))~At.)T6
(Contes~clon, faclaar
prokssiou, hco~wa~6pu,
alcoolisme).
ParM. FUC"KSn' el RAy.
W~!B)!M.~x.– Berut. KOllrOS8ioli und Verbreohea t90
tiocat. Verbreohen und Verbreohertum in OAeterroioh. 50:!
P)9TOL)!st:. Alooolismo e delinquellza SOS
\ortcax no?
\'1, TYPES lit: UHLITS
,OIV/!RS ET IIB))tU~AX'R
l'or NI.RAY.
1sdr.uSIIROI. Nuova olassificasionedei de1inquenU' 507
7
M.\RIF.
et MMXtM.–ïtM vagabonds. ¡¡OS
509
\'H.–t.ËSL'tC«)H
l'er AI~1.Dew
rt Uruxuetu.
STBMMETx.
– Der Selbstmord bei den afrikanisch'lI Naturvoelkera Btt)
KMM.–BieCMaohenderSetbBtmordhaeutgkeit. SU
N'TMt! ¡¡Iii

f:)XQL'ft;ME1U:CTIO~. Sociologie économique.


1. ÉTUDES
Gf:Sf:HA).Ë~.
THAtTf:
P.. )1, SIVIU,

JEvexit. La théorie de l'économie polit4que Si6


1>IITO.–MaMetd'ëeonemtepottttque 5t6
Prinoipe8 d'économie politique. t. 1 et il 516
t'ou)!K.–Ce)tMd'ëo«Mtni<peUttqMe. !i45
t.A)tntty. Manuel d'économique !¡4ft
PtiOtO)'. Das Problem des Normalon in der NaUonaloekonomle. S:iC
i3cuempFTza. Des We8en und Hauptinhalt der theoretiach8DNa-
ttonateettonomie. ¡¡52
808 TAUI.K DUS UATIÈHKS

Piidket Rist. – Histoire des doctrinos économiques 552


Bsxm. – Prinoipiidi StatiBtioametodologica S55
Notices MO

Il. SYSTÈMES KCO.NOMUJIKS


*l F. Simisu.
(i et II. Boiikis,Cmsir,». ll.i.nwMii»,
CarM>1.
Rihzi.eu.– Ueber Finamen und Monopolelin altgn Grieohenland.. SS«j
Sonia. Der Qutervorkenr in der VrgeselUchaft M-
(Ikiixet. L'approvisionnement d'Athènes en blé au Vg et au
VI»siècles «03
oi.iveh. – Romanoconomioconditions te the olose of the Republio 5<w-
Vixoiiii.iDon-,– English societ; in the eleventh century 563
C.tKu. Soïial- und Wii'tsohaltsgeacWoliteder Juden tm Mittelal-
ter und der Neuceit 308
Ilivos. – Auierioancommunities andaooperaUve colonies !><">*
l'nLmiouHKvrt.–Ioarie et son fondateur Etienne Cabet. 3«7
l'oixsAiiu.– La production, le travail et le problème soolal dans
tous les pays au début du XX"siéole ST3-4
I.KVAssKiii. Questionsouvrières et industrielles en Franoe sous
la troisième République ">>'
i.Esciut. – Descrises générales et périodiques de surproduction. 576
.SrpiNo.– Le orisi eoonomicha 581
Amuo.v. La réalité des surproductions générale? 58S
Noticbs 58!)

III. ESI'KCKS
DEI.Al'KODLVJTION
.Nonces 591
IV.– ItÉliUIKS m LAl'KOUfCTION
CarMil.ri. !l.i,u, II. ll.,m,ii l\ Si»iw>.
lUnTiii. Terminologie der Oeworbspolitik £93
DonK.v. Studienaus der Florentiner WirtschaltsgBSohiohte,B. S. SUS
Au* m. – Le régimecorporatif des métiers en Autriohe et en
Allemagneau XIX»siéole
M.vrtinSaint t^ov. Histoire des corporations de métiers depuis
leurs origines jusqu'àleur suppression en 1791 OUi
Riiiunu. Syndicats,trade-unions et corporations 608
Kréuv. Histoirede la manufacture royale des glaces de Pranoe au i
XVII' et au XVIII' siècles 60'J
Municipaland Private Opération ol Publio Utilitlea 610
l'iiEiEti.– Die russische Zuokerindustrie et!)
M.tcnosrv. The trust movementin British industry. 010
MAi:i.i\K«on. – Industrial oombinatlon f'-û
Steixuzrh. – OekonomisoneTheorie der Aktiengesellsohaft 630
Vwa. – La teoria oconomicadélia cooparazione t»-"
Xoticbs 0»
V. FOKMKS
ItKU PHODLCTIOX
Car 31. II. IJuii.

Macureuor.– Indostrial combination631


– L'industrie américaine
ViAUATii. »3i
TAIILK
UBSHATltoES 800
XxAt'M. Der Uebergang von der Handwabarai>:ataPsbrikbetrIeb
III der Nlederrhelnllohen &amt-und 8etdea-Iaduatrie. C3t
(iHBtY.-8tudien ftber dte Wlrkwareulndustrie ln Limbach 1. Sa.
uad Nmgabnng oar,
1·amttt. Das Mfthlegewerheln Baden und in der RheiJIpfalz, 631
fjMn:n)t~s!f.–Dt9Karts)'Mh9!'BrauiadMetrte. rS8
W''H'KMitM!<.Die Industrie emailtierter Rlanhgeaohirra·iaDeut-
aehtand 039
lits,lxx~ Die Bntwloklung dos Piaalaer Tabakhandels soit deb
70" Jahren. C:i9
0
M~M.–Mpput-r.einBauern-undtndMttleMtMiterdort. <;i2
~tesor.n. Der Eintlusa der Maschine aut die Entwloklung der ga-
wetM.BetrteMormeoind.detttMh.BuchMnderat Gis
Isamntxau. Boehere Arbaitaiatansiteet bel kUraererArbeltazeit. 6t4
XuTf'JKS. uto
\'L Y.tt.KUft. )')()X.)1U;\iXAŒ
l'ar )1)1.))u.Mt..<'tt'. ·muxu.
'r.\nllp.()'E).– L'idéede juste prix Gt8
I~nAT. –DieWert-undfreittaeorie. 1;52
Mm:HKn..– Octd. prices and wagoyModerthé areenboek Standard. 6:i;1
I:xneGUnrcuT. Dia geographilobe Verteilul1gder Getreldepreise
in Indien von 1861bis' ~l906.1( t)5t
Il %LIJWA(.119. Les exproprlatione et le prix desterrains 1\Paris, G~5
NIIT!1I!; 65g
vit, t;).ASSK~ tKO~UMtQCfiS
l'ar M.ttAtMWA':M4.
Les Indu8trles 1\ domlol1een. Belgique GG3
Ca.u'tc. The standnd of living among worklngmen'sfamilies in
New York City 6M
\"O:IITII. Einmittelbürgariichea Rudgotabereinenzehnjaehrigen
Zeitranm 67l
1
X.T)C)!!t 07a
1'lll. 1;\i~TIT¡;TIU;\i;;
I/I!1. Jtfjt'AKTtTtOX
l'ar 5111.
(.. etil. et F. AxtMt..
KrL)!MAx; – Die Rerafavereiae.t. 2et a 6K
Du!IIARI!¡. Le oompagnonnage desohapelienbrulel10la 676
IILOCII, L'assistanoeet t'Etat en France. G77
U77
I:TAT HTf!t.~)-:XTS
uc I.A1I~I'AI\TITIO:'i
l'ar a111.
)1.et F. SMuM.
ScMi«.ff)!(t.At)!t)'T.–8othtttatittik. U;9
LifTE8, Die Vartaüung des Elnkoalmeas in Oeaterreioh. 6M
LIaPBxa\. Ertrag und Einkemmen. 6117
)~ts))K)).– The rate ot interest 688
MAtxtMK.– Die Bntatehung des Iispitalafaees eue
itr.o~r:nl.e. --Dia Ureaoheader Sohwaaguagen
das (iold$inaea 698
t.tit .t!ti!K))t).
– Salariat et salaires 690
810 TABU DKv aATIKHBS

CoaxtMwcx. Théorie da salaire et du travail salarié 7ou


fcinuxt>.– Légataire de» oovriers des mines 7°*
"Oi
Lmam>. – le ohoroage et Ja profession
Beyshiduk.– Unemployxnent
Ci-iiïi.. Zar Lehre von den Bedfirfnissen 708–
siam m

X. LKSl'IlÊXOMÈXKS
BXTUK
REI.ATHI.XS ÉCONOMIES
IT l.«*IW«Sll»l»t*.»«l*<t »'M't»t r.ATÉliUMf.
i
h'oiiLLÉe.– Le socialisme et la »ooiologi«réformiste "H
.7*2
Waiischaibb.– Zur BntwioklungsgasoWohtedes SoiialiBmus
Notices T|3

SI'Kl.llAIJi»
XI. •• KCONUUIHS
PavMM. II. Hurkiinet F. Smi»»i>.
G. Wmwiis,
Mvhtinbt JUrtmot. – La CÔte-d'Or. 713
714
Mi-Etuw. ftesohiobt* des Bise»» in !nBef-OeBterreioh
Leticonsoiîx. Les subsistances et Je-oommeroe des grains en
715
Bretagne.
Notices

SIXIÈME SECTION. – Morphologie sootal*.

1.BASESOÉOfitUPIIIOl'KS OEl.AVIBSOCIAI.K
Par MU.et Siun.ii'
730
Rvnun.. – Bau» und Zeit in fleographie und Seologie
Jj®
Demanoww. La Picardie.
Blancbaud. – La Flandre
V\i.u«x. La Basse-Bretagne 7!
™*
Xxenm. – Le Berry

Siox. Les paysans de la Normandie orisntale.
m
Notice»
11. DKI.Al'OPL'UTIOS K.N(iÉXÉRAI.
ParM.Haibbam».
T.iî
Mayb(vos). – Statistik und Gesellsohattslehre. III
– SosialstatoUk
8cii»*pwa-A«»oT. •• • • • • 7*»
«601900. 1M>
Husmmsm.-BevoelkerungwUtisUkSohweden*
154
NM)Ct!
III. MOI-VEMKXTS JIIG1IATOIKBS
ParM. IIaldwack.
AtiiKBT. Américains et Japonais. • • 25?
TOSXW.AT.– L'expansion allemande hors d Europe '«i
Gwmnii. L'émigration européenne au XIX»siéole 765
Notice» m
IV. (JllOUl'KMKST* UIÎIUUXRT UKBA1SS
Par 11. ItAuttuai*

Hauwac». Les expropriations et le prix des terrains â Pari» 170 (


TADIRDKSMATrèUKS Bit
Mrubiot. – La petite ville française "72
Nonce» 773

SEPTIÈMESECTION. Divers.

I. SOCIOUlUIl; l'STIIËTIUl'K
VuMil.Hui'i, lliotRTi.| Unrre.
Cilin. Gamesolthe North AmerioauIndians. "S
Botcun.. – Psyohologleder Voltedlohtttng 77G
Ouiik. – Eplsohe Oesatzeder Volksdiohtung 778
Mcma>.– The Rite ot the Oreek Bpio 779
DéDiKn. – lies lôgendei épiques 779

.Mai.b. L'art religieux de la fin du moyen âge en France 785
Notices 787
II. I.EI.A.NGAGK
Paril. A.tlnucT
Khxout.– Les éléments dialectaux du vooabulairelatin 7U5
lUur. –Traité de stylistique française. 790
Notice 798

III. Ti:Cll.NI)l.(IOIK
NOTICM 798
INDEXALPHABÉTIQUE DESNOMSD'ALTKUKS
SONTL'OBJETD'ANALYSKS
IJONTLES TKAVAl'.V
00 D'INDICATIONS
BIHLlUURAIMlHillKS

Abbotl, G7i Barra, 4


Abram, 37.1 Uurone, 557
AW, 109 Barlon, 78«
Aclialme, >•'» BuBsel, U7
Aflullon, S85 llauchet, »S»
Aimes, 627 iiauer (A.), 31
AUmann, eo$ Bauer |W.|, «S
Amairlc, 37S
b Bauingarlcn, 208
Améllneau, 108 liaumslark, HQ
Anderson, 486 Uauustark, î'ôi
André, G79 Bayet (A.). -'»
Andrée, 2*0,789 Beauvais. 187
Andrew, 0C1 Bcchterew (von). 41
AnesaklMasalinr, 174 Beck, 74
Anslaux, 4 Becker, i«S
\Apollinary Konn, 510 Bédier, 779
Arndt, 0J7 Bebr, S'J3
Arner, 488 Bek, 374 4
Arnold, 374 Bel. 187
Ashley, 550 IJ.;lliiK, 4S9
Aston, 190 licllûii, IW
Asluraro, i Bellucci, 187
Aubert, 7û0 Itclow (von), 5S7
Aucuy, SOI Béourd, 671
Augé-Larlbé, 718 Beninl, 555
Autenrleth, 308 Bennewitz, 260
Avebury(Lord), G30 Benlk-y, 40S
Bcrkiisky, 459
Bab, 383 Bernard (Aug.), 770
Babelon. «00 Bernhard, Gi4
Bach, 237 Bernharcll, «S»
Baentscb, lot Ucrnba-ft, 419 ·
Baggc, 48 BeroUht-lmer, 411,448, M"
Bagiieuxdo Villeneuve, 3S3 Berllllon, 7S6,7Î.J
Bailey, 485 Dertolini, «i
Balnes, 7SS Beveridso, "00
Batlod, «59 Biormann, AS8
Bally, 790 Btgwood, 717
bar, 078 Blrkmcyer, 459
Baraduv, :ts» Billmann, 048
Barbâtdo Olosel. 030 Black. 074
814 INDEX UES NOMSu'AUTBtnB

Itlanc, aM Burlp, 278-


Blanchard, "-* BubcIibii, 4'Jâ
Blau. *»
Bloch (C.|, 617 C«l>rol, SIS
Hochet, i81 CadK-re. 839
Bloetar. »»» CaftKiîBe, 717
Blydeu, 80& CaUlumcr. 368
BJus (K.|, 168 Calus0* P:). 358
Bon»(K-i. SU? Caland, l'JO
Bowkenhoff. i«8 Calnndcl Henry, ilO
Boevkul, 776 Uilderoni, 4G0
Bocbm-Bawerk. ÏW Camlioni, VIS
Bogart, 69U Canllle, 773
liogoras, 1^8 Cnrcoplno, Wl
Boeklen. 249 Carllun, 637,710
Botte, 780 Curo, ùO(i
Bonifncy, 15».398 Carpc-ntor, 48n
Borlkluwtcz'vont, 6B0,"OU Car|jenli(?r-Alling, 45»
Bosco. 4T7 Cartatlimci-t Ureull. 788
Boswcll, £ii! Carier, 378
Botgford. 4M Curver. 37, «58
Bougie. Mi, SW Cuseella, SQU
Boulanger. 448 Caspari, 214.20(1
BotmtaliHn, WM 'îassnu, 878
liourgain, (174 Uliulaliunz, 368
Bourgln (II.), 6*" (ilwiice, 809
Uoussct (W.), 17* Cliapln, 60S
fiowditch, Hi, ïi<) ChapmunSharp. 371
Bralg, '4 Olmslln, 628
Brandlloone, 374 ClrallcrtonIIIII, 29
Brassioff, 3« Cheync, 163
Bratley, ïi» Cboleau, 071
Braun"(A.). 63« Cliwostow, 719
Braun U.), il* Cto. fi78
Braun (Th.). 74 Clapham, 718
Braims i.H.|. f-!4 Uark, S57
Brenlano, 7)0 Colojanni, 689, 7S4
Hrottauvr, 662 Collier, 3i
30i ColHn. SOU
Brt!vsi(f
Briel, ri ~$ Collinel, 447
BrilTuul.
l, W2,il» itolson. 5.!i8
Brigham, 79» ComUarieu, 788
Brinkniann, < 717 Conanl, 6tiO
Broadliead. 718 Conrad, 710
Brodnitz, 6i" Conslnntln, 470
Brooks. «7 Cook IA.-B.), 217
Bros, 83 Cook(S.-A.), 188
Brnwu'A -X.). 86 Corncjo, ii
Brown (ll.-E.). 85K CoriiKlisuen, 700
Bn>wn(4.-M.), M7 Corrtatt, «29
Brun, J9» 'Corso, »3S
Bnini), 4, 239 UoDqitln, 2SK
Iluedier. S89 Couard. 867
Oum-Uner. 71" Coiilln, *03
lliillard, 627 CmiiK-T. 387
Buonaiiiti. 181 Crnsscll, 373
Btirkettet Poe, 718 Crawlcy, 301
IKitKX»ÏX NOM»b'AOTEUBS S13

Cro«e, iSé Droessur, 593


CrolHBl. 331 Drysdulu, iî
Cronbiich, «« Ufibi, £63
Cruuke, 187 Dubois(A.). 278
fiuhol, W* Dubois |CG.j, 13«
"75 Dunota, iiurxliardt. '«'>
C.Ulill.
Cumonl, l«0, 181, S3Ï, 840 Dildlielrl. 735
33*. *•• DudleyKidd. 3K»
Cu(|,
Curtis, "8'J Dulmiie, 3K3
Uinniis, 37if:
et Dubreufl, 373 Duiiilas, 401
Dahmcn(Rcv.), 15'J Dunkmnnn, 174 4
tJolwi, 41*{ Iliinn, 4SU
Dûlmlmrdt, 289, i62 Diipin. 2IH
Dallari, 4 lu Unpoiil ll-i. 718
Dan M'Krnzlc, 358 Dupunl (l'.l. 07!i
Dangern(von), 40-1 Uupral. 8H,4'J»
Dtnnerl, 30U Durand, i»9
Durestc, 328, 419 Durliam. 338
Duvcnporl, 038 Uussiiud. 40»
DovIh. 190
Ocbray, MB Kl.i'is. 208
Bcclicsne, 628,678 Kbfltttfldl, B59
Decluruiiil, 4<>SEchblcln. 3D8
Dccoiiniumonchi!. 187 K.'ksteiii, 557
Defcbaiigh, "18s Edinonl, <*«
Ut-«root, Ï27i KlieviiberK, "9». »3U
Dulofossc, !!)«,317 KlircMizweiiç, 302
Demangeun, "î'< Ehrliardl. 278
IJemonibyiR's, 37.J Klirmann, iKG
UomoutbK, 770 | Kickhoir. 1«9
I)(!iii[)wollT. 13S | Kickinanii, £47
Denis III.), 518 Klbogun, 21*
Denlu(K|. 7«!> Kloiilllenipoulos, SI. 22
Oeslamlres, Ï77 Klhvood, 4
DmMarra, C7O I!î Kiifîd, 180
Despkigni's, 130,317j | KiiRfll)ri'cht, 684
UessiTtcuux, 4'1 | KtiKliiender, 709
OedultiK. -°" I Krdnianu, 348
l)eulsch(ll.\ 718 Krdmuiis, 1«X
Deuls.-hil.), HT8 Krixiiit, 79îi
Dliuriiic, i*0 KrU'l, 592
Dickson, 2i1 K&plnns, ;>9Ï
DicranAslunlan, 37 Kspinussc. 674
Dlelil, »J" | Kvnns. "88
Dielricb, "*H I Kyliiutiin. 8t
IMrr, 1«'
llolH, JOîl Fiiirlio, H-M
Uomnszewski(von), i»i, 2u7. itO Fnlk, 37i~i
Douill!ngi.T. 717 i Partiel). 74,169,810
Dorudo, 486 Kii'lim-r. SMO
Dorcliies, l>47| I Fw, 48;i
Dorcn. «98 Keblinger. WS
Dorscy, <S3 KvillMMrfr. 18»
UoultiS IWi Kcld. 773
Dowil, oO.'i HclliM! Idc-, 188
Oraglik-osco, Hi Keni.Ui'i. 374
810 1KDSXDBS NOMSu'AUïËUn*
I. au.
forrand, 20r Glbsoii,' BS8.ûOl
t'esty. 07 UldclinifS, 4. î\ 7$
Fcwkw, 13(
9~ i Ui(l(!, JiiK '
Klndlay, *« Uiduet Rist, DM ¥:
KImI/ 30!I lilliioetes, 159 i:'
Firhas. 73; Giraldos(Le 1'.), 108
Pishcr (II.-A..L.), 51 Ulusenupp(von|, 373
Flslier U.) 081 î Olosci', 182
Flach, « lilolz, 159, 409
J-'Idsciimann, 71'
Il, Uoldinann, 413,447
FMnden Pctrle, M tioMicbnildt, 333

riinluiix, 44i UoUlsIher, 210, 314


Fluegler, 67S Uummc, 483
Fontaine, i (jonnard, 674, Ttïiï
Fontana-Rusto, 713 (jonzHlre, 4)12
Forcliheimer, OiS Oorowilz, 047
Forci, 383 Gollidn, 469
Fornasarl, 773 Ootlschewski, 028
FOrsIemann, 800 Uougmid. J80
Fouillée. 269,111 ISrabrin, 039
Fourquet, MO UrUbner, 29 i, 305
Fovillo (de), 7»l Urabowsky, 410
Francolte, 402 Urnltam Wiillas, 407
Frank, 840 Gross, 180
Frauensiadl. 492 Urusserlu (île In), 278
Froïer. 168, 181,247.27«J UrHtsfl, 6
4S(!
Fréroy. 009 (irasso, 894
Frezuuls, 709 Gri-cf(dc), in
Fribourg. Si Greif. 63S
Frlcdericl, 212, 40» Grossinnnn, i'M
Frledlander, 168, 233 Oriinme. 207
Kriedrlchowlkz, î
717 Uracinwtti), 21i'
Fricdrlclis, Ml Groppali, 878
Froeuhlling, G39 (Jrosmolard, SU9
Fromm, 037 Urossmunn, 592
Fubig, 246 (iiunzel, 719
Puelis, 558, 65'J Gryzanovvski, SSII
Fiierlh, 6711 Uuarnli-ri'VenlImlglIa, 409
Furlanl, 495 Uuenllier, 6S!I
Fynn, 305 Guelcrmann, 638
(jum|ilowlez, 4, 23
Gaidoz, 203 Gurdon, 358
Gai, 405 Oulesmann, 207
Galle, m
Galli, 3S7 llannniinn. S92
Gand, 411f imircrlin, 190
Garriguel, H'J llaberl, 73
Garslang. 180 Iluddon, 86, 198,789
Gnsleiger, i llaenlïscliel,
677 646
GefTcken(IL). 4111 HulT, 41li
GefTcken(J.), H6 Ha«ar, 3S«
Genoulllac(de), 173 Ilulin, 264
George, 661 llaigh, Ifi'.i
Georfti, 077 Ilsinisch, 6Uli
Gerncl, £5.1 llnlss, 7ii)
Gerould. 303 ilulbwaclis. 065,074, 77.'i
Ucrtsncr, 719 ilulkin; 130
INDEX
DBSNOUS
D'AUTKURï 817
Hanauor, 187 Hoelselior, 480
Handelsman, 489 Hoffmann(von), 400
Hansen, 199 Hoffmann-Krayer, 240
Harms, 718 Holmes(Rev.l, 789
Uarnack. 480 HGllcr. £li
Uarper, 458 HOgel, C09
Horrlson, 74 HolUmunn, les. 2S8
llarllg, M>3 Hoppe, S07
Hasbach. 747 Hoseet Shclford, 788
Uasllng». 74 Howltt, 357
llaupt, 202 Hoxlo. S
Hauser, 769 Hrdllckâ, 499
Hawley, 628 Hubert et Slauss, 74
llayom, 278 Hugueney, 660
ilayes. 6 finit, 490
Hébert, 85 Hfttlng, 283
lleck, 404 Hyde, 200
Ileeke, 63»
Hchn, 230 Ignace, 4S8
llellborn, 678 Imbuscli, 678
Heimann (H.), 629 Ingfgnicros. B07
lieinemann, 1»8 1no. 48
Heinemann-Braunschwelg, 892 lodl et Pulcl, 279
Helzmann. 669
4Ï2, 709 Jacohasohn, 590
Iicjcl, Jacobstein, 718
Heller, 813, 203
507 Jacoby. 662
HellwlR, 515
Hennlcke, 061 Jacquart,
246 James (W.), 866
Henry, Jastrow (J.i, 402
Henry (J.-M.), 2*6
Herbert. 264 Jastrow (M.), 240
710 Jaussen (Le I'.]. 460,823
Herbig.
6B0 JeromlaB, 468
Herlein,
628 Jérusalem, 42
Hermandung,
Hermann, 267 Jesser, 646
Jelté (Rev.). 198,2S7
Itermant, 358
Jevons(F.-U.i, 73, 198
lien, 508,«07.592 Jevons (W.-S.), 546
Herzog, 210
Hesse (A.), S91 Joaclilm, 401
liesse (A-A.), 718
8 Joelielson, 148
J,
732 Joël, 130
Hettner,
Heuster. 263 Johnaon, 709
Hewllt, .212 Joly, 686
039 Joncs, 330
Heymann(O.), m
lleyne. 610 Jong (de),
090 Jonghe (dei. 48»,206
Hlldbrandt,
499 Junod, 135
Hildburgh,
1IU1Tout, 135,305 Kaalz, 168
Ilinds, 567 Karscb-Haack, 383
llirechfeld, 678 Karsl, 335
Illrl, 338 Kaufmann (von). 749
Hlrzel, 282 Kaulzscb, 240
Hobhouse. 2*0
0 Kellner, 207
Hobley, Wj Kenimer«r, 560
Hobson(J.-A.|. 709 Kern(0.), 848
Ilobson IT.-C.), SIS Kern (R.-A.). 263
Hochmann, 807 Keutgen, 719
– Auntfc»
E. Oi'RKtEiii. Boeiol.,1900-1909. 32
818 tSOKX
DesNOM»
U'AUTtBWW
.rt.ili
Khtd, n 3311
Léo,
KlrschniT, 581) LuunarU, I3flt.3l7
Klottl. m, m Laonhartl, 688
ttlelnort, 78» Lerouxcl Longlon, 717;
KJeiiitltscImu, 134 Leroy, 279
Kluge, 401 Li'sscure, 570, 8(«
Klitlmann, 4M Lessmann, 8S7-
Knapp, 001) Lefuconnoux, 715,710'
Knopp, 638 Leuba, 19»
Kobcr, 118 Ui-iilf, 384-
Koeli-tjruenberg, 4US,788,708 Levassuur, 574,05<J,6UU,710'
Rohler, 806.318,828,33y. 3M.15» Lvvi II.). 260.
Koppol, 028 Levl (L.), 373;
Kotusul, 419 Lévy (Kmm.), 277.
KowulcwSky, iiUO Levy (KniBl), 447
Krause (P.). 410, 135 Levy (H.), 63U
Krauss(K.-S.). 187. 335,383 Lewis (A.), 37.
KruusB(S.), £12 U'wU (A.-H.), 30S
Kreemer, lut) Lewis (G.-R.), 074-
Kretzschmar, 40Ï, 433 Uyens (von (1er), Ï6»
Kltubcr, 133,136, 238,337 Ltcliteabcrg (von), 774
Kronfold, £14
· Llcfrnann, 028,687
Krose, :l Lirschllz, ûuO
Kruegei'{11.-E.), 713 Llmentani, 38
Kraegor-Kelniar, 13S Lincoln, 71(1
KrQger(P.), 108 Llndlitiim(von). 7S4
Kruijt, il) Llng ltoth. W
Kucxynskl, 710U Liptis, 37
Ruehlmunn (von), G&9 Lipsiti», 335
Kulemnun, u7ii Liszt (von), M7
Kan et Laday, 409 Llllmunn, 298
Kupka, 1»U Lizlcr, 717
Lotigvi-orthDames, 78»
Eabrlola, Ï78 Loria, 4, a
Lacomho, 4{<j Louis, 74
Lalo. 7«8 Loupins (Le I'.), 238
Lanibrechts. C7S
d LCnc, 347
Landor, 16!) LOwenstuin, 207.
ISondry, «48, 7)0, 75ii Lowcnlliul, 7SS
Lai)K(A.), 71, 86, i«0, 361, 373 Lucu (di'j, 278, 4U0
Lang (A.) et Van Ounncj), 29J Liigg, 20»
Laple, 371
1 LumliolU, 787
Lappe, 401 Lw^alto, 408
Lnacli, 42t, 4(50
Uaiinspacli, 347 .Miiass, 240
Lavergne, «ï» MacCall Tlical, 1U6
IiavergneIde) et Henry, 709 MueOnugull, 38
Lawrenceet IlewlH, 240 .Mucgregor(D.-H.j, 020,631
Lazard, 704 Macgregor(J.-K.), "88
icdl, 411 JluckeiiBle^ i>1<)
Lee Coultor. 485 Macli-r, 19«
Lefeljvre, 374 Macmillan, 373
Lelimann (P.), Oïl Mncrosly, 01U
Lelitnann (W.), S4U Mtigny (du), 3iiU
bêlai, 460 M«knr«wlc«, 459
Lcllcr, «te .Mflli-, 783
L»Li-u, ISU .Mullicr, 200, 307.
INDEXDES«OMS d'AIJTBOHS »U

Mitreh, *3S Mol), 02»


Mnrcune, W» Momhcrt. 7£G
Marie et Meunier, (08 Montgomerv, 180
Markowltscli. 419 Mciore, SOT
Marplltero, 402,7SI More, Wa
Mam-U, 08 Mornt, 100, 210
Marshall, SIS Morey, IBS
Marti, 163 Moricc (U-P.), 306
Martin U.), m Mnride, 081
Martin (G.), «60 MoirUon, 48C
et
Martin Mnrlenol. 71;i Mortiira, 778
Martin Sninl-LOon, 807 MoBzkowskl, 310. 314
Martrou. 21S MftlIpnliofT, 302
Maraan (de). 10- 180 Mnller (.K.I.. 2«
MhbIu. 373 Mnllcr (K.| lii9
Masson, 718 MQIIer(II.). 3S8
Mater, 77» Mucller (J.), 719
MatiicwK(R.-It.). 86, 208.2U3,337 Muellner, 7«
Mallllon, 678 Muller Uyer, 37
Mallhew»et Uoddard, SI» Miiraford, *H
Mauczku, 270 Mmikacsl, S4li
Mauer, 7i7 Munro, «2»
Maunier, M2, 713 Mttfko. 389, 798
Mauror (F.). *«8 Murrav, "79
Maurcr IK.|. S3ii Musll," 180.3Ï»
Muyer (B.-W.). Ï44
Maycr (U.|, et* Nacke, *M
Mayer (O.). ï«« Nuffel, W
Mayr (von), 472, 732 Narijeslmlier, 1*7
Muzzulorso, S7'l Nurdi-Greco. 278
Mazziirclla. 2S« No(fri(de), 488
Mcadc, 629 Nestlé, 2*«
Moier (J.), 210,5i7, 789 Nfcolal. 7W
Blelllol, 2(7 Nigmann, *"0
Mâtine, H Msscn, -1*
Monold, 013 NoK»ro, 860
Moray (de), S Nontonltolt, 2ï
Merriam, 3U£i Northcole,
Meuriol. 789, 7ÎÏ NovnkovIlHi. 358
Meyer (KJ.), 5 Novikow. 6"s
Mcyer (Il.-H.). 030 Xyog t:hing Tsiir, 647
Mever (Max.). 077
Meyer (n.-M.), 214. 239, 258 OBrien. »«
MlJeli. *W Ubriât. S5*
Michel, M!" O'Coimor, 2(!*
Miche».. 180 Odenwald-Ungor, 37
Michels, 029, 7SI Oertel,
Mielke, IH'l Oesterlcy, ïu*
Mli.lschull, 0S9 Oelker. *«»
Milhaud, 074 Ohmnnn, 6°0
Millikiii, iXU oiln'rta, ISO
Minovici, VJ8 Oldenberg, *<*
Mloni, SU Oliver, 5<*«
Mlrantia, i'J2 Online, *«•
Mitchell, 0»i! (llrik, 778
70 Orsicr Suarez, 3S8
Mocrchcn,
«M Oswutil Saint-Clair, 71»
Mohr,
r,
820 IND8XDESNOUS
û'aUTBUHS
Ollolenghl, 710, 734 Rappard, 'la» l
Ovecbergli(v.) et Jonghe (de), 804 Kallrey, sus
Italzel, 720
l'agqno, 47, 278 Hateoniiurcr, 13
Pagnlcr, MB Kamn, 420
Parelo, DIO,356 Rauschen. ses
I'ûHb, 204 Reinach (A.J.), 209, 214
Parker, las Hcinach (8.), 7î, 240
l'arkinsun, «3, isy Relier(Le P.), ît>i
Pnrmclcc, 454 Renard (G.), 008
Parpagllolo, aoy Rcnsmoro, 7gg
Parlscb, 4g& Reusclile, 608
Passarge, 135 Hi'vllk-, ma
Patten, 38 Ilcvllloul, 37g
Paullre, dio Heyniond, 187
Pcchuel-Loesche, 2)S, 306 Hhanim, 798
Peckel, 35g Richard (O.), 36»
Pelskor. 18» Rldgeway, 38, 1Î5, 238
Pellot, 389 Htcdcl, 7g8
Pereons, 708 Rlczler, 559
Pessler, 7US RJsl, 880,077
Petltcollol, 078 BIvors IW.-H.), WJ, 103, 164, 278
Pfleghart, "lu SOU,387
l'Ilelderor, 7*, m Robci'18, 3ss
PflOger, 432 Roberlyide), 40, 47
Philippovlch(von), S58 Rodocanachi, 373
Pic, 028, 6ia Roscher (W.-H.), 233
%om. S57 Itoscoc (Rev.|. Î09, 307
Pinard, 661 B««e, ïi2, 373
Pinkus, 550 Ross (Kd.-A.), 37, 10
Pionnier (Le P.), m Rosi, 052
Ptontek, 174 Rolh, 293,373
Plstylese, 505 Houglcr, 198
Planiol, 4)k Robin, 358
l'ienker, (80 Riisscl, 135
Ploss et Bnrlels, 3744 Itiissi-ll, 7)3
l'olnsard, îi73 Uuescllet Rlgby, 480
l'oller, £45
Pons, «SB Sabalier, r,b»
Piwada, 21, 410 SuIjuUiiI, 4gii
Poussai*), 419 iinliagiin, S06
Pradcl, lou Suiiit-I'ille(Le P. do), m
Preuss ill.), 390 Salvloll, 402
Prcus» (T.j, 135,213 Sanitcr, 240
Preyer, 013 Baplr, 305
Price, 6si Siirlorl, 189
Prictee, 2«3 Suvorgiian. 38
Prlnzlng, 734 ScliHursclimldl, 74
Prudhommeaux, &67 siliudee, 159
Pucch, 077 Schaefer, SW3
iiliaeffer, 028
Quiros(de), 4»2 «lialz, ssg
Siiliaiibe, 71g
Rabinsolin, 174 M'Iielliis, 20«
Hnclifahl, :,9o icherrer, tî
Kadermacher, 213 kliloss, 07»
Bagon, 210 iclilossmann, 447
INDBX DE» NOMSd'aUTBOBS J)»l

Spnnn, 336
Schlftter, gr
ilS, '50 sperling, 710
Sdlmldl(It.t,
'l'£0,? Spicer, 718
Bchmldl(Lo H-i. f\ splogelberg. 373
gchmldt(P..W.). 1W
SrhmldIIW.), i4· %of Spless (von),
»" Spioth, 130, î
317
BcImKMMI.). 861
Rchmoller, 3»»>«*• ij» SpictbofT,
«»TO..43 Spoer, 19»
Schnapper-ArmU, IiID SprugUV, 1)58
Schneider (CK.).
««J* Squillace, 4, 41, 278
Schneider(H.), 283
«/ Slahn,
8cholter(LoP.}. 208
Bchrank, **ï Slunge.
-Ol BtanlsehiUch, 343
Schroedcr(von).
°81 starr. 334
Bchioetter (von).
wi Slaudlngor, 713
SchuehBrt,
W5 Sleln, 37,62
Schiller,
'»« Stelnhausen, 401
Suhultï (A.), 020
BchttlMW.]. ;ï9 9 Hlolnllzer,
Schultee(g.), 3'* Steinmann, t80
Schullze (H.|, J*« Slelnmete, 48. 5)0
Schullze(L.), J3B SteiliE, 187
«* «8* Stephan, "8"
Schumacher,
Schumpeler. 382, 710 Stepliaii und Graebner, 134
Kchiwter, J80 Siephingcr, M6
20- Slorn, 384
ScliOlte,
Schwarb, î(i* Stevenson. 119
Schweigc^erclienfrld (von), ?7 Biewarl, 200,240
Si:hwertn (von), 387 Slieda (von). 719
Beliwlcdland, 27W, 6?.) BlinlzinK. 447
18"j Stoll. 3755
Sebillot,
8i:lcr, ^06, 258 Stoltmann, 687
Heligmann, 108,134 j Slosch, 180,iH
SC-nùclial, 047li Strchlow, "0
i, «09 Slruyf, 2W
Sergccvski,
W Sluckcn, 247
Serlng,
'88 Sumner, 3*9
Sharp,
1«9 Bundbaorg. 750
Shlpley, B81
Siccku. 248 Supino,
!>9O Sutlierland, iiOft
Bleveklng,
SIghele, 480 Swttiton, 110,111, i»i
Simiand, 5B6,702 Sydney-Harlland. 339
Slmroel, 17
ï SzomlA, 1
Sinclair, 788
204 Takalshl, 375
Singer.
Sinzheimer, 079 TakébÈ(T.), «»
filon, 723 Taroon, «0
Hkipwilh, 108 Tarde (de), «48, 7S4
Small (A.-W.). 4, 5 Tarte. 073
*«*
Smilli (J.-C). 661j TarnowsW, 717
Smilll(H.-G.), 187 Tarufll,do NQbili,Lori,
Smith (W.-B.), 247 Taiisslft. 638-"09
Soda, 660 Tavlor, 600
SOderblom, 23» Tesar, 450
Solmi, 402 Tewhaucr, 258
Sollnu, 73 TeTohnngu, 288
Homtorl, 402 Thiele. "1*
Somlo. 562 Thomas (N.-W.), 84, 189, 335
8ÏÎ mORX CK8 NOUS o'AfOTBUBS
~r~ee ln -.t.
Thomas(P.),. se? Votli, ut
Thomas (W..I.J, 874, 383 Vfirllielm, |8î
Thompson, }99
Thoms, 027 Wiidis, 59»
Thnniaoïi, 317 Waiilor. 490
ThorscJi, ï7 Wagner(A.), $88
Thrum, les Wagner fW.), âSB
Tliulin. 218, £40 Wallcnskold, m
Thursloi), 189, 199,210,358, 873 Wnrd, 4
ffdltlo, gtt Warncek, i5»
Tonnclat, 751 Wursclmuer. 713
punies, 4, m Wnssermann &,), 593
el
Torday Joyce, 308,388 Wusscnnann(R.), 499
Turrend, 79g Walklns, 709
Tosli, 460 \Va.xwoller, 710
0
'loutalii, 80, liib, 469 Webcr |A.), ÏB7
Tuvo et Rola, 4«o WcberI.M.), 303
Tozzcr. «s Webster, îgo
Tregear, 4U0 Weeks, 135
Tronnier, 735 WvlnberK, 4m
Tappcr, 4to WcIbs, 374
Turmann, 6.10 Weiickslcrn (von), 7)o
Tyrtcu (von), (iili Wnndland. m
Wenlger, ifto
Ulrich, 38* Wendl, 198
Underwood, 709 Worner, 108, 134
Urbun, 0» Wernicke. 673
L'senor, 74, 244 Wurasdorf, jji
l'slar.r, 4)0 Wcstermarck, 2"t
212,
Wcslcrniarcket Partrldge, 212
Vacher, 7^3 We.ston. 2100
Valat. 4,9g Wcstphal (0.1. 24D
Vallaux, 723 Westphul(M.), Mo
Van lirukel, 638 West Kheone, las
Van Bruysscl, 38 Whlsller. 187
Van Coll. 263 Wldc, 339
Vnnderinarcq, ar>0 Wleland, 214
Van fier Sandc. -134 Wilbrniult, (147
Van Gwincp, 86, iHO,iOii.788 Wilhclm. 263
Van Hassell, «Ct Wilkinson, ISO
Van Thiel, j«9 Wlllouifhby(Rev.). 20'J
Veblon, 5S8.Bfil Wilson, 590
Veca, «27 WiliwnKlwang, 73
Veedilo (del), 278 Wlnillsch, 189
Vclardita, si Wilhers, 661
Vorrey, ;aj» Witle, 4uu
Vliillute, 032 Woclkoff, 7S5
VJcrkandl, 5, 2î, Î4, 3B7 WoelblInK. 679
Vlgouroiix, 774 W0I1M11. 0S8
Vincent, 5 Wolff(J.l, 6S8
VtaofçwidoH', 566,«27 WolffIH.-W.). m
Vlsscher, g5 Worum |R.), 4,20
Vogel. 67«u Worcll, I9y
Vogt, ;|8 Wundl, 33, 291
Volpe, 717 Wiippcrmann, 639
Vok, m Wygodzinski, aso
Von Thol, 331
IHOBXDES NOUS d'AUTEUJU '823

2«teck, SW
Xénopo», 37,49,51,8*
ZOckler, 360
YvornCs, «2, K07 >ZOpf, 208
Zorelll, r-
Zucharlao, tV>> 2«3 Zucker, 48i.
Zimmermann, 67u Zwiedlneck
7 (von), 688,QC'i

*«CC
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raine- f v.r t. r. n- •'. I~ T. II.I.
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lut n Ltfee *» taeu -r " t.r,:i.. Injiïijuact svu.ulrotl'uiue. '-••
ll.tiuii.M~4 Lu lie |Kri,jnttelle 'i :r. !•~ lndte»ol.O|)poségar*yolut."Ir..V
Magique et inconscience. ">fr >.i > '•' Esthét. musicale scient. "> It.
But" Et<iA«nilam(irulB|iaslt»«. (- '< :t fi
– l'stluH. «perlât contewp.
i:iii,«:uiii. L.111. L^iunqage ' tr .'i fr.
– Seutloiiiiits estlbétfquos
H>;i<>.v Jl:tlière alliMiuulie 'î" • i ': l. -v Horalc railgiiiK-Ile fr
Données luirmSil. a« la «oimlenee..( Ir. V. 1.\m.in Mfr.
La morale des religions
révolution erMrloe." . f>. ''J la morale naturelle. (r. M
lli'ir. le» révélations de l'écriture, "i fr. lu;. 1\1 l'dgar Poe io fr.
IMH-U.m.~tJ.-ll'J,-Ill(.i..i,, 1»~11.. ..il. – 10 Blo- I.i li.» ,ii. Psyciiol. ilusociol. •;•:> ï f: -A
ralismu -i fr. ï.k:-i M-\ Lld«alduXlX'g|«ole. Mr.
:>f-.
ii.i.inc. tu psychologie liKounue. I.ei:ii.w.a< ni. i. – Etoile» oathéUques. fr
Hi.rui.ii. tei idées 4gillinlre» :••; 1. Lespace et le temps. • i. r, ft
Kéntaie <l«scastes. :i fr. l.i:ty»'i:,i: L'imltédcins! étr« vlfnot. 'M
Hr.-iti^t-v Etude* il'hlstolre de I» phi- Let Itiuiles du t-onuolsiable, !! J. i 'r.
losophie. " - ' I' ''' l.«i. Vav..r.. Vlilloilui>lile ils Viomoliilr.
!ii,i,.i m.lj lo ilroitti la sociologie.:;fr. i.i .v ln.i m. -Pbll.d'Auq. Comte*•.•• 7 fr.r.'
Canut, le nioblllsiiic niodeiui. " fr. In morille et la sciencede»niunnn. '> <<
i:m.xi:i Usooiolo9i«ï«u*ll<iu« 'ifr. r Touct. mentales des <oc. primitives. "•It. '*>
.v. !-i. Dieu et «cloue» î tr. :m :.umi. Sescartes. - 5 fr.
ïlB»OC10l8BléllUCaUoU- Jf- T."
il,: -1,1. -i.. -Science positiva atmélapli. •• ir. >
m-- te de rMucation. r. <r. ;.ic:hvi,hii.i..ii i II.
problème fllolmnl Wogaer |i?r ~r
liru. Lu lr|al«BS« et la IO1O Henri Seliiii peaiear..< ir.
Psycliol d«J»uiW85sie3iio»ili7lst«3 '•' r.nrr
r' i.v n – Idées aéner. de p.iycliulocjio.
>M!>u»t>.»M OlfltlOHtllIIruVKtHJOlill. r. Id<aIlsuiean«lalsauXVIII'iiléele^ fr.r.i.
L«kUlClllO.rttfi-ï In '»_'n!U' \> EnsUc/nement et religion. 'i h. V
*mio«»ociul i *»: .1.«.»-. i. :«• !••'•r. y. psycii sociale dij T«rde. 'i Ir.
»iin.: -l'.i'l i i lr"J. '. '. . lï- >. Mi'-ii ..r-. i. Aine de l'nrtolesceat fi.
ï..|im; VI l'.w.-ï»* l.fr. : \U\. Béseuerescmica. : fi.rm
rriiviii k.-t.i> Probl.<ler:icoosoieuci) .T' les mensonges conventionnels de notre
1>A-Ki.<>* irviM*, SjrnthG&emeutnle. !r. ClvllotiOll"• .II!. r, fr.
Ks U science et ta logique. » fr. î:> Vus du dehors fr.
K">iK< km Précis de psychologie *>fr. – le soiia de l'histoire. fr.0
tKius.. la ruiion pure. r Nimniw. Justice eieipuusion de Iiiile 'r
h'iwn. • 18 »rèiuoé dttraots : 7 ir.Ml Critique du Darwinisme social. fr. f»'i
Philosophie de la longévité. I "In. *>t Oss, il. l'un:. Pliilos. russe coul. !*(.
KiHX\rl.T. L«t'éK«. 'i <T. Psycliol des romaticlen russes 7 Ir. r»)
Kduiiiki.. liberté et liéwruiliilsoi». Wr ".» Pai.anti.. '.iit.'l
CoinhiitpourJ'iutllvlilu.
Syslfom JtnioraloconlomporolDS. Tli.o 0 I'»bliu« les ontaotéres. .-I. r. fr
:Ur.7;. – les mensonges du cnmctùre fr
• Uoralo. nttetr«llglon.l"(i!>iu.
l'atanlr d»luai*lapliy«lque. > *>fr. – le mensonge de l'art. d.
L'éfolot. des ld««-s lorc»s f .• "iU l'iïui. i. r.iio de la volonté. :!•>• AI r
PiTohologl» d«* Idées loro»». «<.l ir. fr. La oroyanee. V ta. :,tt.
Tempérament et caractère '!• :! 'r. W l'i.u il).. la morale du lionheur. '< (v.
U œoaummt |iosltW»te. 'i' 1 Jr :>li l'u.i.u." U'aunaeiihilos. l-« •" I Jj'j,. n. (r
U mouvement Idéollite. ï1 <l. Ir U) IUi.i.iii. le uuccùs ;< (r. ::>
du peuple français U. ~n. K*ch. iViiiérleree -li>. u
Ptjrohologte
la franco au point d. me moral ? fr 5<j IIlsahii i 'a r!n' > mue de
Ejiiulmo psycli. dan peuple» europ Ui '.r. l'histoire lllld'-ij.; Mil,.
Btétneuts sociot. u» la morale 1 fr. i.v> i|«a ua. •. r.W
fr. :.» Hiw.l. -M-oillW
Morele det Mén-lorMi Psj :«d« >“ :,<j
Soclnllsme et sociologie rélormtste. f r .» ,1" :~u
Danooratla polit. et soc. cn Frauce. ">!r. l.'é
i~l"
L'I:. • dajIl 1", .;}Iv..
rnuiiiiKi r. Théories socialiste*. Tfr. r.i La lo(:o' U.' lemhi'i'
i.i.kï Pjyouolo<jte|iuy5iol. oi palliai. '>' Essais s les uassitn: v
.«lin-. 0«uiilottietdeinirespon9:il)le> Hk.v'. Trau- nl-i. •: rfirac' '«-
Inlrort phyilol. à lu philosophie. *<fr Mm .Mm lepriihlèmoitel'aotloii.
ii-tai:. Uaraleanglitlsecontenip/ 'r.<- Iti- L.iplnlo'ioiihiedoLeilinir..i.i
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