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Got article a été gerit en 1705 at publig d Howe @t lee sntren tome ( de I'Eucyelepédie dee Sciences de I'llomme 7 Li Aventure llumaine ~ Lai tions : Grange-atelidre, Purie; later, Gendve; Sequoia, Bruxelles — 1967. A Iexeeption do quelques points qui devralent ttre repris on consilé- ration on raison dea travaux de recherche effectués depuis, cette présentation globule dos probidmes po: ct pourra sorvir de base de réflexion A tous ceux qui «!intér; guietique. Inetitut d'anglais - Sous « par 1'étude dn langage eet toujours d'actualité ent hla Lin- tion de Linguistique Paris - Janvier 1969, ANTOINE CULIOLI la communication verbale On ne powvait guére laisser de cdté, dans um tome consacré aux relations interpersonnelles, Dinstrument le plus évident de ces rapporis; mais nous touchons ici d des problémes que la psychologie proprement dite aborde également sur le terrain génetique et expérimental et qui trowveront aussi leur place, d ce titre, dans le cinquiéme volume du présent ouvrage. Le chapitre gui suit est centré, lui sur les problémes dela linguistique, ceux qui abordent la connaissance de Phomme d travers ce systéme inate rnnel que forme la langue constituée, lexique de mots sans doute, mais aussi recueil de structures et par la, sans doute, trésor» de représentations et de pensées c'est d travers une ‘tude dela langue, au besoin formelle et statietique, que les auteurs des deux parties de ce chapitre invitent d cerner la pertonmalité et les rapports des «parlantss, Ws baignons dans le langage depuis notre naissance: clest le langage qui accompagne et fonde notre activité significative; grice & lui, nous nous Exprimons et nous communiquons; il est un comportement complexe, qui s'enchevétre avec nos perceptions et nos estes, une activité interhumaine, fondée sur un réseau habitudes psychophysiologiques et de structures in- conscientes. Le plus souvent, il faut le reconnaitre, nous ne prenons pas nos distances par rapport au langage: ll est si profondément enraciné dans notre étre biologique, ous nous le sommes tellement approprié qu'il semble Ste devenu un simple instrument docile qui obéit & nos intentions. D'od une ignorance de ce qu’est le langage, de sa structure et de son fonctionnement. Interrogez-vous soudain et vous verrez combien il est malaisé de se hausser au-dessus de la simple expérience vécue: nous sommes Persuadés que notre langue (et nous n'appréhendons le langage qu’a travers les langues) est le modéle de toutes les langues, nous sommes fascinés par le sens et nous nTarrivons pas a prendre au sérieux la forme, nout confon- dons aisément les catégories de la pensée et les categories de la langue, la réalité extra-linguistique et Voutil linguis- tique, comme s'il y avait une adéquation universelle et totale du langage 4 un monde d'objets et de concepts. Si nous essayons de dépasser ce réalisme naif, ce qui nous Fevient_ en mémoire, ce sont des lambeaux d'analyse scolaire: c'était une époque bienheureuse ois le langage n'était compose que de mots (analyse grammaticale) et de Propositions (analyse dite logique). Bien dressés, les mots se rangeaient en parties du discours heritées de la grammaire 1a: Thur de Rabel eepriene par Peter Nrephal MAnen® stolcienne et la langue éerite (qui se serait soucié d’étudier Ja langue orale?) était un jardin bien tenu, of rout était jueté. Pour beaucoup d'entre nous, I'étude du langage se raméne & cette grammaire de la langue écrite, de meme que la plupart des gens confondent lectres et sons parce qu'ils ont répété dans leur jeunesse que les voyelles du frangais sont a, ¢, i, 0, u, et y. 11 arrive que le langage soit remis en question et qu'il ne soit plus aussi transparent que nous I'imaginons parfois: un malentendu peut nous réveler l'ambiguite foncitre des langues naturelles; les mots, ces médiateurs par excellence, nous font ressentir leur opacité et nous révélent quill n'y 4 pas une relation immediate et nécessaire entre les termes ct les choses. Nous avons alors le sentiment que les mots nous trahissent, s'interposent entre nous et «l'indicible +, cet +indicible+ que nous n’arrivons pas & exprimer dans Ja chaine sonore. Que l'on songe de méme 4 la remise en question que suppose I'apprentissage d'une langue seconde: habitudes articulatoires et acoustiques nouvelles, nouveaux ‘agencements syntaxiques qui bouleversent les idées resuet (ainsi, en malgache, ce que l'on appelle traditionnellement lun complement circonstanciel pourra ére le swet d'une phrase; dans telle langue amérindienne, le mot qui signifie ‘arbres est un verbe; ete.), découpages de la réalite qui pparaissent aberrants (les termes de couleurs s'organisent fen systémes fort différents selon les langues; le russe ne distingue pas la main du bras et le pied de la jambe; le hongrois ne distingue pas le bois — matériau — de l'arbre ‘mais en revanche a deux mots pour I'amout)... 65 Ce soupcon devant le langage est, depuis quelques années, devenu plus marque: il se manifeste par un certsin refus du verbalisme (quand les mots tiennent seulement par un lien intrinseque, sans relation avec ta réalité extra~ inguistique) aussi bien’ que par la littérature de l'absurde et du nonsense. On s'était déja auparavant incerroge sur le langage, soit dans analyse rigoureuse d'une langue (on pourra mentionner ici Panini pour le sanskrit, ou encore Sibawayhi et Al Khalil pour I'arabe), soit dans la speculation philosophique, soit, plus humblement, dans les manipula- fions Iudigues de la langue (énigmes, anagrammes, calem- ours, etc.). Mais jamais Yon avait scrute et traque avec tant de force et de rigueur la pratigue du langage dans les livers champs oon la renconite. Et il n'est sans doute pas inutile de rappeler qu'il existe depuis environ un sigcle une science appelée linguistigue, dont lobjet est le langage sumain apprenende a travers les langues naturelles. Liexpression langage humain n'est pas redondante mais comporte une précision nécessaire si l'on veut éviter s malentendus. On parle en effet souvent du langage animal, du langage des astres, du langage de la_peinture fou des emotions, ou encore du langage scienufique, du langage-machine et du langage documentaire. Le langage des animaux, qui a été bien etudié ces derniéres années, se distingue radicalement du langage humain par certains traits essentiels qui apparaitront dans la suite de l'exposé, et lon aura intérét a parler plutét de communication animale. Le langage des astres n’est ainsi nommeé que par tun abus metaphorique: il s'agit en fait d'un jeu fruste de correspondances symboliques données par la tradition. Dans Te langage de la peinture ou des emotions, le mot langage nest employe que par analogie, de fagon vague et dan- gereuse, pour marquer le pouvoir d’expression immanent faux émotions ou 4 la peinture. Parler du langage scientifique, c'est simplement restreindre V'acception du mot, qui en vient 4 signifier «langue spéciale+; quant au ‘langage- machine (de méme que le langage documentaire), il est un langage artificiel, purement écrit, qui utilise un symbolisme és voisin de celui des mathématiques. Certes, il sera du plus haut intérét de comparer le langage humain 4 d'autres slangagese (codes, systemes de signes, signaux et symboles) soit pour des raisons pratique soit dans une reflexion théorique. En ce sens, le langage humain appartient a la classe des systémes de communica- tion, et Von appelle séniologie ou sémiotique la discipline gui se propose d'etudier les signes au plan le plus général Cependant, le signe linguistique a une spécificitéiréductibl et objet de la linguistique, c'est-i-dire le langage humain, n'est pas un systeme de signes parmi d'autres Langage et communication Si Von veut a la fois dégager et comprendre les carac- ‘éristiques du langage humain, on devra partir de la fonction centrale du langage, qui est de fonder et d'assurer la communication. Pour gull y a communication, fu Su moins deux interlocuteura, dont Tan, que nous 3 ferons le lcuteur, est emetreur, et V'autrey Vaucitear et reeepreur. Il ext bien emtendu que, au cours d'une conver sation, le locuteur devient audieur et Pauteur locutcur Bien plus, au moment ou il parle, le locuteur est son propre, puciteur et Tauditeut est un locuteur varuel gui a pst Encore exténiorise sa réponse. On pourra cepresenter lt situation par un schema (igure 1), et afin de bien maruet le caraciere complene de fa relation enue interlocuteu, on pourra completer par un autre diagramme (gut 2), Fig, 1 et 2 — Situations réciproques du locuseur et de Cauditu. Ce second schéma permet de dégager certains fats importants, quelque peu hétérogénes, il est vrai, mais dont ilest utile de faire l'inventaire: il y a toujours interference partielle entre émission et réception dans Vacte de com- munication; il existe en particulier une rétroaction de Maudition sur la phonation, et un effet des habitudes articulatoires sur le repérage acoustique des sons émis par la personne en face; dans un autre ordre d'idées les figures 1 et 2 montrent que le monologue est toyjours, en fin de compte, un dialogue; on voit également que le dialogue risque de vier au monologue, bref, qu'il y a toujours circulae rité partielle, clest-i-dire des pertes dans la communication. Cette communication n'a lieu que s'il y a intention de signification, et cette volonté d'utiliser le langage en tant qu'instrument de relation avec autrui est essenticlle a la pratique normale d’une langue. Mais on peut préciser que Tout echange vocal suppose une viste des interlocuteurs, le désir de s'exprimer, d’exposer, de jouer, de commander, agit, avoir un effet sur les autres (0 sur soi-méme en ant qu'autre). Ajoutons enfin que toute communication “insére dans une sisuation, au cour de laquelle se trouvent es sujets parlants. Cette situation, que [on ne saurait cerner dans sa complexité infinie, comporte ecpendant des ‘ariables, ou trans situationnels, qui sont de deux ordres: ertains ‘sont des traits du moment, particuliers a telle reeasion. Bien quiextra-linguistiques, ce sont eux qui Jonnent une partic de sa signification au message: quand e dis tu, cela veut dire «la personne que j'ai en face de noi quand je_parle+; hier signifie «le jour qui précéde Iwiourd’huis; Jean se réfere a telle personne bicn connue; i quelqu’un vient de sortir et si je dis: + Il a lair ennuyés, I renvoie 4 cette personne. Si vous voulez vous promenet xc qu'il pleuve, en regardant Je ciel, peut-dtre direz-vous Zute et votre interlocuteur aura repéré le trait situationnel qui est ici pertinent. D'autres traits sont, d'un point de vue enéral, des invariance qui caractérisent les sujets parlants m situation, mais, étant donné la diversité des langues, on peut considérer que ces invariants sont réalisés dans chaque langue naturelle de fagon variable: ainsi Ton est ‘Gr qu'il existera un systéme des personnes dans toutes ies langues; qui plus est, ces systémes pourront tous étre amends a une structure fondamentale. De méme, il existe ane différence foncitre entre ce qui est en situation (ow ‘ioment oft nous parions) et ce qui est hors situation ou que on pose comme tel: ainsi le style indirect, la modalité éventuelle, Vireéel, linterdiction, pour ne prendre que ces exemples, s'opposent 4 ce qui se déroule en ce moment, gue l'on décrit, que l'on constate. Cela ne signifie pas qu'il existe un stock universel de concepts, issus d'expériences communes a tous les humains, et que ces concepts seraient enfouis dans toutes les langues du monde of il suffirait de les déterrer! Le probléme est, nous le verrons, autrement plus complexe, pour la raison’ essentielle que ie langage n'est pas un décalque de la réalité. Mais il ne saurait exister tune théorie du langage qui nicrait l'ancrage des langues naturelles dans des situations. Patler, c'est utiliser une technique specifique qui permet de sadapter & des situations toujours nouvelles, c'est appliquer un systéme de signes généraux 4 des ‘problémes individuels et particuliers. D’oi le langage tire-t-il cette souplesse et cette puissance? Comment peut-il étre stracturé sans étre rigide, stable sans Gre labile? Une partie de la réponse découlera d'une analyse des invariants que, par-dela les variations, l'on retrouve dans toutes les situations. Ces invariants, qui sont constitués par les relations des sujets entre eux et avec le milieu, doivent étre en nombre élevé mais fini, et se com- binent vraisemblablement selon des régles que nous com- ‘mengons 4 peine a entrevoir. L’autre partie de la réponse ‘nous sera fournie par l'étude de la structure et du fonction nement des langues naturelles. Codage et décodage Poursuivant notre analyse du langage en situation, essayons maintenant de décrire ce qui se passe lorsque deux ee a sd eee sae eee Cet Peo ane ee See cee eae ia seer eae ate car oe ea ae par un schéma (figure 3). yesene 422. Expression (locuteur),; Fig.) — Pour poser du locate & Pandit lemesogee code dod La figure 3 marque bien que les opérations d'encodage et de décodage sont dissymetriques et non symétriques comme on imagine trop souvent. Cette dissymetrie ert évidente si l'on considére les canaux utilises: Te locuteur articule, lsuditeur écoute. Mais on peut aller plus loin encore: en effet, le locuteur, qui parle pour étre compris, utilise la. redondance inhérente au langage. Nous parions ici de redondance au sens strict du terme: toutes les langues naturelles, qui sont le produit d'une évolution millenaize, sont bities pour assurer la communication dans des condi tions diffciies. Que l'on pense en effet aux obstacles: bruits, interruptions, ruptures de construction, chute attention, distance, capacité restreinte de la mémoire immédiate, Emotion, sans comprer la nécessité de présenter en succession, done dans le temps et de facon linéaire, tun énoneé qui forme un tout et que I'on ne peut trop ramasser, car, a étre trop économique, on devient obscur. Or, admirable, c'est que l'homme s'est forgé avec le langage tun outil de communication tout a la fois maniable et sOr; toutes les langues, en effet, présentent un équilibre entre, d'un cété une économie dans lagencement qui faclite Vapprentissage ainsi que le maniement du langage, et, de lautre, une cedondance qui assure Ia sécurité et est un véritable systeme précorrecteur d'erreurs. Il existe ainsi, depuis la plus petite unité jusgu's la plus grande (du phonéme a T'énoncé) un jeu complexe de contraintes, Se relais, de combinaisons en chaine, de signes de demarca- tion, qui facilite le decodage. Ajoutons que, quand nous parlons, nous employons aussi la redondance au sens banal du terme, afin de nous faire mieux comprendre, par la simple reprise et la repetition, dans état actuel des recherches. Le code est ce qui, malgré des pertes inévitables, assure le passage de |, 414, ce qui est commun au locuteur e¢ a Pauditeur. 11 peut etre décrit comme un ensemble fini d'unités et de regles de combinaison qui permet de trans- former puis de véhicwler de l'information. Mais l'on Slapergoit aisément que le recours au concept de code ne permet pas de résoudre tous les problémes: si L, est le message (ou, en d'autres termes, la sequence sonore qu'un sujet émet et que l'autre regoit), lencodage (1, — L,) et le décodage (L, —1,) sont, eux, propres 4 chacun des intérlocu- reurs. En bref, nous possédons tous notre code & nous, qui ne correspond que partiellement a celui des autres. Doi des mal- entendus, un sentiment parfois douloureux d'incompréhen- sion, le mur que dressent certaines maladies mentales; mais aussi la possibilité de eréer dans et par le langage, qui, de simple instrument, devient alors materiau poetique. Comme on fe voit, le terme de code devrait étre employé avec une ceruine prudence, puisque nous ne savons rien sur les points 1, et ly entre lesquels se situe Lay et que le langage Comporie, oltre. une structure codique commune, une marge d'approximation, un +jeus, que l'on ne saurait, par simple commodité, mettre entre parenthéses! Ajoutons que cee structure codique est elle-méme une structure com- plexe, c'est-i-dire un ensemble de systemes de relations (par exemple, relation extrinseque des unités d'une langue avec la réalité extra-linguistique; relations intrinséques entre unites a 'intérieur d'une langue, cette classe de rela- tions se subdivisant elle-méme en un nombre élevé de sous-systémes). Pour cette raison, nous dirons, en employant Je pluriel, que le langage comporte des structures codigues. Unités distinctives et unités significatives Avant d'aller plus loin, il nous faut considérer quelques autres propriétés spécifiques du langage humain. En premier lieu, le langage comporte une double articulation: toute langue se compose d'un inventuire fini unter phonigucs, en clies-mémes depourvucs de sens, mais gut Setvent 4 former dos unites de rang supérieur’ qui, elles, Sont significatives. Aimsi, le mot pas, phonetiquement pa | est composé dep) et de 3:3 rameau ramoi se décompose en in vay 'm) sor. Comme, en outre, ces unites (ou phonemes) permettent de différencier des mots qui sont par ailleurs homophones, on les appelle des unites distinctive: (ainsi, c'est Ia distinction ix/-.g/~i$i qui permet de différen- Gier les mots rdieau, géteau, chdteau; respectivement, en graphie phonétique / ato), ‘gato), /Satol), Une deuxiéme caractéristique des unités phoniques est qu'elles ont une réalité articulatoire et acoustique: ce sont des unités discrétes, c'estni-dire discontinues, transmises pat ua continuum sonore. Un troisiéme point est fondamental: si les phonémes peuvent fonctionner comme unités dis tinctives, c'est parce qu’ilss'opporent les uns aux autres dans ‘un systeme de relations. Un phonéme ne vaut pas comme ‘unité isolée possédant une substance phonique, mais comme diement d'un ensemble structuré of chaque terme se distingue des autres par la présence ou absence d'un trait (ainsi, du point de vue articulatoire, /p/ et /b/ sont des cclusives labiales non nasales, 4 la difference de /f] et /v/ Qui sont des fricatives labiales non nasales, ou de /t) et /d! Qui sont des occlusives apicales non nasales, etc.; quant 4 Ip! il oppose a /b/ comme une consonne sans vibrations glottales par rapport a une consonne & vibrations glottales). Il importe de bien comprendre que seule existence d'une opposition fonde lexistence d'un phonéme: rien, en francais, ne permet de distinguer deux mots selon la prononciation du r (grasseyé ou roulé, pour employer des termes courants); fon n'a done affaire qu’a un seul phonéme, En arabe, 2u contraire, la distinction est pertinente, c'est-idire quelle permet de différencier deux mots: on posera donc deux Phonémes. Le caracttre économique du langage apparait ici rnettement: parmi les innombrables sons que les organes phonateurs permectent d’émecire et de repérer, parmi les mnilliess de combinaisons postibles, chaque langue exploite lun systéme phonologique qui comporte, en gros, une qua- rantaine d'unités distinctives. Ces unités sont, en régle générale, aussi distantes que possible les unes des autres, Ge qui assure une plus grande sécurité dans la transmission, Grice a ce systime phonologique et @ des régles de composition qui changent de langue 4 langue, il est possible de fubriquer par combinaison de phénoménes un nombre illimité dunités significatives. Crest parce qu'il comporte ces deux niveaux — unites distinctives ec significatives — ‘que lon parle de la double articulation du langage. On appelle signe toute unité significative, et Yoo prendra garde de ne pas confondre les signes et les mots. ‘Quand on décompose une séquence qui forme un rout, ‘on part d'un énoncé que l'on analyse en unites de rang inférieur, jusqu’d ce qu'on aboutisse & une unité insécable, (On aura ainsi la phrase, le groupe (par exemple: le livre qui cst sur la table); Ia proposition, le syatagme (par exemple: le chapeau de Pierre); le mot (souvent bien difficile & définir); jn le mondme, qui est la plus petite des unités signifi- Wes (ainsi la forme verbale chantions comporte trois vnemes, la racine chant-, le signe temporel -Ir et la ‘inenee personnelle -ons). Chacune des unités énumérées at ie appelée un signe. Signifiant et signifié Le signe linguistique comporte un sienifant (ou suite segments sonores) st un ngmife (ou valeur semantique), La relation entre le signifiant et le signifé est arbitraire, ne contingente; cest 1d que le signe linguistique se dis gue nettement’ du symbole, o@ i existe une relation Gessaire entre forme et contenu (que l'on pense par emple au Z qui indique un tournant dans le code de Ia tte), Est-ce a dire que les langues n’utlisent jamais de focédés symboliques? Certes non, car nous connaissons lis certaines imitations sonores, des formes expressives, ‘nous percevons vaguement que les sons recélent parfois se puissance eymbolique (0 évoque la rondeur, i la fitesse, etc). ID reste que Ja part du symbolique dans le gage humain est infime. Le signe se distingue en outre signal, car ce dernier est global et marque une relation jentée (on a d'un cété le signal déclencheur et de l'autre ffet; en ce sens, le signal est toujours signal de quelque of et sabolit dans le résultat produit). Aw contraire, Signe linguistique est un substicut auronome de la réalité tralinguistique. que le signe linguistique est autonome revient & jrement une correspondance ‘bjets+ du_-monde extra-linguistique, et ceci pour des isons muleiples: d'abord parce que chaque communauté vprehende la réalité de manitre différente selon ses soins, ses techniques, sa culture, ce qui incerdit de poser 1 gigantesque invencaire universel 'objets, dont chaque gue serait simplement la nomenclature; ensuite parce ae le langage a été construit & partir d'activités humaines Jon une combinatoire qui admet des solutions multiples es solutions se rencontrent dans es diverses langues iturclles); enfin, si Ton posait que le langage refiete, >int par point, univers, cela signiferait que le langage ne rit plus 4 V'abri des fluctuations. Que l'on s'imagine ce 2i se passerait si I'on eréait des signes pour chaque situation ouvelle! L'autonomie du langage fonde sa. cohérence; 1s autonomie, les langues seraient le jouet de histoire sa forme la plus contingente, le rcflet immédiat de Iriations imprévisibles qui détruiraient la compréhension, 1 alors, il faudrait que le langoge se fige dans la rigidité uun systéme de communication rudimentaire. En résumé, est de son autonomie que le signe tire sa puissance de ineralité, son caractére adaptable, son aptitude 4 se ombiner, @ étre hérité ct transmis, sans étre cependant amuable, Mais, objectera-t-on, n’existe-t-il pas un paral lisme socio-linguistique, une langue ne refiéte-teelle pas Le terme de langage applique 4 toutes sorter de réalits gd prévn erbale le point corm de sere tr Imatire im mestage. Pour prendre dx examples riparts par s0 deen, Tes idéogrommer der Exyptions clr rigneux du code de a route ont lu contenu semantiqu, cares, mais Wobeiiem pos ous loi dv dicour, dans son lexique et jusque dans sa grammaire une culture spécifique? Certes, chaque communauté se forge des termes qui récapitulent une expérience parsiculiere: par ‘exemple, le home des Britanniques, le gemilich et le ruchrig des Allemands, l'adjectif engagé ow le concept d'avantegarde fen francais, ou encore, en bulu, langue bantou du Cameroun, Te verbe si important -sée qui signifie «acquérir richesse ou influence ou pouvoir grice a la puissance d'un vis (are surnaturel qui hante un individu et peut devenir dangereux Si ce dernier Iui est ou lui devient inférieur en énergie Vitale), Mais l'on aurait tort de surestimer importance de tels faits, qui ne concernent ni la masse du lexique, ni la phonologic, ni la grammaire. On peut ne pas avoir de distinetion de genres dans sa langue et savoir pourtant due les sexes existent! Correspondance entre le langage et le réel Cependant, il serait aussi faux denier que le langage ccomporte des traces partiellement réflexes de son utilisation ‘quotidienne dant des siuations concrétes. Si les langues raient totalement autonomes, si elles étaient des consiruce tions arbitraires, elles ne pourraient pas s‘appliquer 4 la Liarbre géndalogique des langues humsines reste une hypotheve conceaée. réalité. II faut bien qu'il y ait une correspondance complexe entre ie langage et le +non-langages, pour que le premier porte et morde sur Je second. Nous retrouvons dans toutes les langues ces imbrications entre: 1) des structures formelles qui fonctionnent de fagon autonome; 2) des systémes de relations et de regroupements qui appartiennent aux logiques naturelles; et 3) des découpages notionnels qui proviennent tout droit’ de la réalité extra-linguistique. Ainsi, en frangais, certaines régles d’accord appartiennent au premier domaine, purement formel (par exemple: Je dis qu'il fait beau |’ je disais qu'il faisait beau). Mais le méme verbe + faisaite peut ére employé pour designer le non-actuel (s'il faisait beau en ce moment - mais hélas! il ne fait pas beau ~ je serais heureux; et de méme: Fil Jaisait beau demain, je serais heureux) et cette utilisation du Temps passé, c'est-i-dire non: présent, pour se référer au Ronvactuel, fait partie des groupements de la seconde ‘catégorie (est-il besoin d’ajouter qu'un tel emploi du passé fest attesté dans de trés nombreuses langues?). Enfin, dans la phrase: hier il faisait beau, V'imparfait renvoie cette fois & la sphére du passé et a donc un contenu notionnel qui représente la réalité extra-linguistique. La différence entre les points 2 et 3 apparait clairement si l'on considére Ménoncé suivant: Demain il faisair beau, énoncé complet, bien forme du point de vue grammatical, mais insemss 1 Suabe de le fare prccedse deny particule hypothetae Qui nous situe dana. le nonactueh pour qué. Venoket dlevienne’ sensé Gi demain il fasait Beau. mals aloes 2D ese mal forme dans la mesure ou il ew incomplee De mime, le genre eat un procedeclassifeatare Gul pest ire selon ngs pe ou moins forme aee er Fauteil jouter que cette urwture complexe maf frreneat scolaire, par Temploi une tcrmipolopc.inadegeste oe Ineertaine qui ose entre la forme, Ta fonction et le sens? On entrevoit maintenant la complexité des relations qui existent entre le linguistique et l'extra-linguisuque et Ton comprend le danger qu'il y a a dire que les langues refletent la réalité, puisque le concept de teflet est associé & Vidée d'une image symetrique et ponctuelle! Si "on veut Poursuivre la métaphore optique, mieux vaut poser que le Tangage est refringent, qu'il relracte la realite (Vangie de réfringence pouvant varier selon les classes et les catégories). On se gardera cependant de conclure que toute langue nous enferme dans une vision unique du monde et entraine avec tlle une philosophie. La philosophie peut prendre sa source dans une réflexion sur les structures et les catégories de felle langue, mais toute les expericnces mentrent que notre langue maternelle ne nous conditionne pas aussi fortement qu'on a bien voulu le dire, Une autre propriété du langage est de permettre les riations fines qui naissent du désir des locuteurs de S'adapter & autrui @ la situation, et de modeler leur message selon leurs intentions, Tour cela fait partie incégrante de la pratique du langage et nous avons toujours & notre dispos tion un jew de formes, de méme qu'un certain jeu dans la munipulatioa de ces formes: actif ow passif, intonation aux ‘courbes variables, mise en relief de tel élément de l'énonce, choix de tel terme, glissements méraphoriques, ambiguités volontaires, toute cette modulation ne serait pas possible si Jes langues naturelles n’avaient certains caractéres qui leur appartiennent en propre. Ainsi, routes les langues sont ambigués; on peut, selon l'occasion, étre rigoureux et aussi univoque qu’Euclide écrivant sa Géométrie, ou aussi habile et équivoque qu'un sophiste. Que l'on pense 4 l'ambiguité, par exemple, d'une phrase comme: Je lui fais écrire une Jetire (sje lui demande d’écrire une lettre» ou. +je demande qu'on lui éerive une lettre»); que l'on songe aux calembours et autres jeux de langue... De méme, le langage permet des étagements compliqués, puisqu’on peut toujours I'utiliser pour parler sur le langage, Tapporter les paroles d’autrui grice au style direct, indirect ou indirect libre, reprendre un mot mal compris, retrans- mettre un message... C'est la un trait qu'on ne trouve jamais dans la communication animale. Une autre caractérstique du langage humain est d'éte génératif: avec un systeme d'unités distinctives en nombre Timité et un nombre également limite de régles de com- position, on peut »génerers un nombre illimité d'unités de ang croissant (mots, phrates, ee). Toutes les langues ont de méme, la propriété d'etre réeursives; co terme signifie quel’on peut insérer une suite, en théorie, indefinie, d'unites cn certains points de la chaine, Ainsi, a céte de: le garzon ue dans le jardin, je peus avoir: le garcon [de Thomme gud sbite la. maison gui se trouve prés du [ae (...)} joue dans le Jardin; ou encore: je vais chez moi pour chercher de Pargent (pour acheser um journal pour connaitre les nouvelles pour les annoncer (..|. Enfin, seuls les humains peuvent joindre eux unites, improprement appelées en francais suet et verbe, afin de former un message complet, seuls ils peuvent oncer un terme dont Wexistence est alors impliquée par |a situation (ainsi, dans de nombreuses langues, om pourra te simplement neige pour il y a de la neige, 4 la difference de lanimal qui devrait, Iui, apporter Mobjet concerné afin en indiquer existence), Le réle institutionnel du langage Instrument de communication, le langage est social par definition. TI n’existe pas de société humaine sans langage evil n'y a pas de langage la of il n'est pas possible de com= muniquer (chez les sourds-muets, I surdite entraine la mutite). Bien plus, le langage joue dans la vie sociale un réle médiateur: 1) Tl assure la cohésion du groupe (dont il véhicule la culture et qu'il distingue des groupes allophones); que l'on songe, 4 ce propos, 4 l'importance des questions linguistiques dans la vie des nations! De fagon inverse, on sait que Ia cohésion de la communauté se refléte dans la langue: dés que le groupe se distend, ou plus simplement, chaque fois que Ia communauté est diversifige (selon les classes sociales, les activités techniques, T'origine géo~ graphique), a langue se fragmente et devient plus hetcrogene, 2) Le langage 2 une fonction institutiennelle (communion, {ebou, magie, etc.) grice a la puissance attribuee a la parole ct a des codes stéréorypes de conduite rituelle qui allient le verbe et le geste. 3) Le langage permet Mintegration, ou du moins insertion, du sujet dans le groupe, socialise + etre humain, et, par son caractére transinaividuel, régularise nos conduites et notre adaptation a aurrui, Tout cela permet de définir le langage comme une instintion: comme toute institution, il est préetabli et ransmissible, il est une donnée que le nouveauené trouve devant lui et’ qu'on lui légue. Une langue est un véritable objet, un produit au sens fort du terme, qui accumule et _généralise l'expérience socio-historique d'un groupe dhhumains. Comme toute institution, le langage suppose lun comportement individuel 4 l'intérieur d'un cadre, une attitude de rejet_ou d'appartenance, une pratique par laquelle le sujet parlant s'approprie l'objet institutionnel, en Vadaptant a ses besoins, Par la, le langage, comme les auttes institutions, n'est jamais fixé, mais il évolue, 1 n'existe pas de langue qui ne change pas, une langue figée est tune langue mort. Marquer le caractére institutionnel du langage, c'est aussi faire ressortir que la pratique d'une langue implique 4 defini, car Pusage n'est jamais Romogene: nous changeone én effet tous de repstre ou de niveau de style, scion Is situation ou selon notte interlocuteur. Fautil alors secret aue la norme sera fondée sur Tusage moyen, cesteidire Tar Je conn de ts majorite? Comment eeabineson cette somme de comportements linguistiques? Pat des dénombrements? Ou demanderacr-on 4 un’ groupe de veiller a la pureeé de ta langue, de la proteger conve les Eears et let emprants? Av vrai dite, note langage. eat Gui puissent se permettre der deviations, neers: furl Aiouter que, méme dans ce cas, la sorieté opie ent Ta sanction (incomprehension, moquetie, punition) et fapices Sation lorsque Técare ext plaiant ou. produit un’ et esthetique). Entre ees deus Bornes, ise trouve une sone on aeeepte un. enone, meme’ s'il" ne correspond ‘pes tout a fait Ala penate coutumicre ou A ls grammatre atin En fait la orme implique tne marge de teletance, comment pourratsl en tre” autrement, puisque les Tanpuee. cont ij en conten ue ie, Sscn eles conaion changent, que les “géndrations.transforment le lane legue, et que parler, c'est justement pouvelr fabsiquar cee La description d’une langue Pour décrire une langue, le linguiste commence, dans Ja plupart des cas, par établir ce qu'on nomme un corpus, et qu'on definira comme un ensemble de textes (oraux ot crits) aussi homogene que possible. Il est vrai que homo- ggenéité est malaisée 4 définir et 4 atteindre, mais on doit eviter de mélanger les Epoques, les régions et les registress bref, on posera le concept d'une langue moyenne. Cet grice det deus 2 pu, seul de tout rmiguer set pons dss vibrant au fond de a gorge que homme ‘animans, edifier le rystome gut tnd permet de come {fitece les plus absirites fel. Dr Vallancien) On distingue souvent, inand de Saussure, la diachromie et la synchroniz, L'etude diachronique s'occupe de l'évolution d'une langue; quant 4 la synchronie, elle peut éire assimilée a une coupe horizontale. Décrire une langue d'un point de vue synchronique, c'est en étudier [a structure 4 un moment dong, avec routes les innovations en train de poindre, les systémes en train de se defaire, Jes solutions de rechange qui s'amorcent: il faudra décrire Je rendement de telle opposition (par exemple 'opposition pi-ibi, qui fait partie d'une corrélation de sonorite, a plus importance en frangais que Vopposition é/-/a/ qu'on trouve entre brin et brun). A Vinterieur de ia synchronie, ‘on pourra distinguer pour tel réseau de formes (pronoms personnels ou systéme verbal par exemple) un tar dans lequel on fera abstraction des petits écarts pour étudier un, systéme ven équilibres. Les problémes que pose analyse des langues se situent a des niveaux différents. Il peut s'agir, dans le cas d'une langue rotalement inconnue, d'un veritable travail de décryptage, fondé sur des procédures rigoureuses de description. Nous n'entrerons pas dans le detail des pro- Dblémes méthodologiques et techniques: marquons simple ment que le descripteur commence d'ordinaire 4 tous les niveaux a la fois (premiére et deuxiéme articulation, grammaire et lexique), mais il s'efforce de degager le plus vite possible les unités dont Vinventaire est limite (pho- némes, pronoms personnels, formes verbales, etc.) ainsi que les schemas de combinaison. Ce qui est essentiel, Crest que le linguiste épure sa recherche de tous les pré- Supposés psychologiques et linguistiques qui risqueraient de fausser les résultats. Les seuls instruments dont il dispose sont (en commencant par les plus discutables) une ‘ule affinée, son flair, le sentiment des sujets autochtones Quill interroge, mais surtout s2 connaissance théorique des roblemes linguistiques et des procédures codifiges de Sécouverte, La seule référence au sens sera soigncusement réglée par un double critere: d'un cote, y ail presence fou absence d'un sens? (Question qui se scindera elle-méme en deux parties: a) 'énoneé est-il bien forme ou non du point de vue syntaxique? b) a-til un sens ou non? La reponse a la premiere question ne pourra étre fondée que SUr un consensus et comportera une marge de tolerance plus ou moins grande; quant 4 la réponse a la seconde Question, elle suppose une problematique plus complexe, que nous ne pouvons aborder ici). Le second eritére employe par le linguiste se résume en une question: quand on fait varier une unité dans un énoncé, ou quand on compare deux unités (phonémes, mots, phrases, etc.) identiques @ une variable prés, entraine-t-on une modification du message? En bref, a-t-on identité ou différence de sens? Le linguiste se contraint a pareille rigueur non point par purisme ou pour se donner des apparences d’exacutude Scientifique, mais parce qu'il sait combien la structure des langues peut varier d'une maniére inconcevable pour le profane, combien il est facile de projeter sur une autre Tangue des catégories qui appartiennent en propre a la langue maternelle du descripteur, ou encore des catégories de pensée que Ton croit universelles. Nous avons pour ccertaines langues des descriptions qui different partiellement selon que le descripteur est un missionnaire protestant (anglo-Saxon) ou catholique (de langue romane), Et maintcs fis, un ignorant a accuse de confusionnisme mental des indigenes qui avaient le malheur de ne pas posséder dans leur langue les catégories du descripteur européen! Liimportance de ces descriptions est immense, tant sur le plan pratique que sur le plan théorique. C'est grice a ces donnees, elaborces en fats scientques, que la lin- guistique pourra dépasser le stade de la simple collection Gevenir une science au sens fort du terme, En particulier, iWimporte de fonder une linguistique predictive qui, grice 4 des regles de déduction, pourra, par-dela la diversite foisonnante des langues, “dépager les invariants ct let combinaisons probables. Le probleme n'est pas ici dabou- tir & une grammaire générale gui serait fondée sur T'ilu- sion d'un paralléisme logico-grammatical dans les diverses langues, mais de rechercher s'il existe une combinatoire syataxique et une combinatoire sémantique grice auxquelles on pourrait faire des generalisations. Car enfin, le problime auquel doit faire face le linguiste est le suivant: d'un e816, chaque langue est structuree de fagon spécifiques de autre, le simple fai que nous puissions apprendre d'autres iangucs, gue la comparaison est possible, que on peut utiliser une Iingue pour parler d'une autre langue — tout cela moatre que les langues sont analogiques les unes par rapport aux atutres. D'oi la nécessité de régles de transfert (passage d'une langue 4 Mautre) et de comparaison, en vue d'établir une typologie linguistique. Pour ce faire, on a besoin d'une Tangue d'analyse — ou metalongue — aussi rigoureuse que possible, voire formalisée, afin d'eviter les contaminations e_sens (que Ton pense, par excmple, @ la redoutable ambiguite d'un terme grammatical comme le mot francais pritent, qui pour beaucoup de gens signifie uniquement tle temps du moment présent » alors que le prétent, temps grammatical, peut fonctionner au passé, aV'actuel, a Paver ou 4 l'intemporel: Hier, je me promenais quand je rencontre tum frér, il me dit; En ce moment, eras; Demis Je pars Ging heures. Le soleil se love’ Psst.) Ul faut done uuliser une terminologie qui soit fondee suc des systemes de relations, en se rappelant que le singulier n'est pas nécese Sairement Funigue ct le pluril le multiple, que’ de ute fagon le singulier n'existe et ne vaut que par rapport au plusiel et que, pour prendre un autre exemple, une langue ui n'aurait qu'un seul genre a'en comporterai aucun. Nous avons mis I'accent, ci-dessus, sur des langues ites exotiques, c'est-i-dire des langues qui apparaissent insolites 4 I'Européen moyen, mais il faut souligner avec vigueur que des langues telles que le francais, anglais, le’ russe, allemand, sont, tout compte fait, aussi mal connues que les langues lointaines. Parce que ce sont des langues de grande diffusion, depuis longtemps fixées dans lune forme écrite, nous les croyons décrites: leur importance culturelle, en particulier dans le domaine littéraire, une tradition de l'analyse grammaticale, Vabsence méme de distance a leur égard ont conduit les linguistes, les ensei- Bnants ou les médecins (pour ne prendre que ces trois Broupes) d de singuliéres illusions! Les modéles d’analyse linguistique Les modeies qu'emploie le linguiste dans son analyse sont de trois ordres. Le premier comporte deux axes ortho iponaux, avec un axe premier horizontal (ave synlagmatigne) ui est axe de combinaison des unités. On comprendra aisé~ rent que chaque unité pourra étre définie par lordre qu'elle Sccupe dans T'énonce ct par sa distribution (c'est-8-dire la propriéte de pouvoir ou de ne pas pouvoir se combiner avec felles autres unités), L'agencement des unités dans les sequen tes est regi par un jeu de dépendances et de contraintes fregles d'accnrd par exemple) ainsi que par des régles de coniraste (par exemple syllabe accentuée-syllabe inaccen- fc). L’axe vertical (axe paradigmatique) est au contraire Vraxe des substitutions; en effet, cn un, point donné de la chaine, on peut, par substitution, commuter une unité avec d'autres (figure q/. Cos unités sont mutuellement exclusives, puisqu'il faut choisir Pune d’entre elles, et elles forment une classe d'équivalence dont les léments ont ‘une proprieté commune (syntagmatique, semantique, etc.) Chaque clement se distingue des autres par un trait (trait de determination, trait de personne, ctc.). Ces classes peuvent comporter un nombre illimité d'éléments (par smple chat, chien, ete.) et l'on parle de classe ouverte; ou au contraire un nombre fini d’eléments (mon, tom, son) et on parle alors de classe fermée. Chaque élément a une valeur par rapport aux autres, et l'on appelle systéme un réseau de valeurs, I] nlexiste pas de difference essenticlie fentee grammaire et lexique, mais on peut, pour simplifier, poser que les unités grammaticales s’organisent en systémes clos, tandis que les unités lexicales appartiennent 4 des inventaires illimites et forment done des systemes ouverts. ia a8 pleure [9 | mange He a ja mange | men tare mange b = enfant BET, ete. ae T Fig. 4 — Modéle d'analyse ner axes ‘ymtegmatigue et paradigmatique, Le second modéle peut étre comparé 4 un emboitement 4 plusieurs niveaux d'unités de plus en plus petites; cet agencement de régles forme un ordre partiel que l'on peut représenter au moyen d'un arbre (gure 5). Comme on le voit, une phrase est, en francais, constiruée par la jonction d'un groupe nominal et d'un groupe verbal. On appelle tchéma la feprésentation formelle de toute unité a un niveau donné; ainsi, la phrase a pour schéma: phrase = groupe nominal + groupe verbal. Quand on fait entrer une unité de rang inférieur dans une unité de rang infétieur, on définit ainsi la fonction de la premiére unite. Nivea Phrase ‘Niveau 2: Groupe (réduit ici a'un syntagme) Niveau 3: Syntagme Niveau 4: M Le frére de Jean mange la pean4: Montene soups Fi. § — Modele danolyselngrstigue suru arbre plusieurs nicecus Le troisitme modéle, ou modéle transformationnel, est fondé sur le fait bien connu que l'on peut, en partant d'un Enoneé tel que Jean mange la soupe passer au négatif Jean ne mange pas [a soupe), & Vinterrogatit (Jean mangestal fa Joupe2), 4 Vinterrogatif négatif, au passif affirmatif, au passif négatif, ete, On partira donc de schémas primaires (par exemple lénoncé minimal du francais sous sa forme asscritive, active, au présent) et Ton dérivera des rrani- formées pat V'application de régles de transformation. On. ercoit l'économie réalisée, puisqu'au lieu d'un nombre Hlevé d'énoncés, on n'a désormais affaire qu’a un nombre fini de schemas primaires et de régles de transformation. Mais comment décide-ton qu'un schéma est primaire? Grice a des critéres objectifs, mais assez complexes, qui se fondent sur Je concept de margue: dans un systéme & deux termes, il existe une relation dissymétrique de marque entre les termes si l'un dTentre eux (terme non marqué) et employe soit comme élément eneutres, soit comme le pendant du second terme. Ce dernier comporte une infor- mation supplementaire par rapport au eneutres. En bref, le terme non marqué inclut le terme marque. Ainsi homme (terme non marqué) signife: 1) ére humain (mile ow femelle); 2) fre humain de sexe masculin; tandis que femme (terme marqué) signifie seulement étre humain de ‘sexe féminin, Le concept de marque est fondamental et la présentation trés schématique qu’on a da en donner ici ne Goit pas en cacher la puissance. Disons simplement que le présent est, en francais par exemple, non marqué par rapport au passé, indicat’ par rapport au subjoncuif, I'affirmatif par rapport 4 Pinterrogatif et au négatif, etc.” Une trans- formation est done une opération qui, dans de trés nombreux cas, consiste & introduire une marque. Ces trois modéles, de complexité et de puissance croissantes, permettent explorer et d'expliquer tous les fits de syntaxe et la production de séquences sonores. 1 resterait enguite & érudier les problémes de significa tion, dans une seince,sémantique qui nen ext qua ss debuts, mais qui doit étre au cteur de la linguistique comme la signification est au cur du langage. ‘A.C.

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