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Lbbjet de cet article est de faire apparaTfre la singularite des liens qui unissent
i'histoire de /a pensée économique et la théorie économique. Une première partie
met en évidence ce qui est susceptible d'expliquer la pérennitd d8 la recherche
historique. L'accent se trouve ainsi placé sur I'« Met d'oubli u qu'engendrent les
mufafionsde la théorie économique. A travers une typologie slyiisée des démar-
ches traditionnelles en histoire de la pense économique (demarche 4 exten-
sive P et démarche .- rBtruspective M ) , la seconde partie montre que celles-cil&-
sent place A I'jdentifhtion des enjeux confemporainsdes problématiques ancien-
nes, c'est-&-direà I'exploçfation des ressources offertes par les n effets d'oubli *
(démarche intensive u). O n conclut alors que, si !a demarche intensive est
vouée d demeurer une heuristique, elle n'en contribue pas moins & expliquer
i'ancrage réciproque d'une théorie et d'une histoire de la pensée économique dont
les enjeux ne sont ni dans k pa#B ni dans un prdsent acquis, mais dans le pré-
sent & construire de la discipline.
L'immaturité de la discipline
Pourtant, nous avons comme économistes une tradition en la matière. Elle
remonte à l'époque des Lumières et s'inspire de l'idee d'un progrès des
connaissances qui en fixerait la forme et l'émanciperait de son passé. Ainsi, si
l'histoire de la pensée Iéconomique subsiste aujourd'hui,non comme sous-disci-
pline de l'histoire mais comme dimension de la demarche des économistes,
c'est 1' immaturité d'une discipline encore jeune qu'il conviendrait de 1' attri-
buer ou, pis encore, & ce mélange d'illusion et d'ignorance qui empêcherait cer-
tains d'entre nous de prendre conscience que leur discipline a changk, qu'ils
sont fautifs de n'avoir su le r e c ~ n n ~ rete qu'alors
, que la théorie éconornique a
atteint la maturité ils restent, eux-mêmes, confinés dans l'adolescence3.
lui-même un processus historique unique [...], si bien que, dans une large mesure, l'kono-
mie d'époques diffkrentes ûaite de séries differentes de faits et de problèmes. 3
3. C'est sous une forme dicalée que la thèse de l'immaturit4 se retrouve dans la
contribution de Margaret Schabas [1992] qui ouvre le « Minisymposium n organisé par
Hixtory of Political Economy sur les relations entre i'fiistoue de la pende 6çonornique et
1' histoire des sciences. S'interrogeant sur les curieuses raisons qui poussent les historiens
de la pensée econornique a negliger encore les possibilités de dialogue avec les historiens
des sciences, au bénéfice d'un dialogue privilkgié avec des théoriciens de 1'6conomie -dans
lequel ils sont, de plus en plus, les seuls à parler et écouter -, M. Schabas semble sug-
gerer qu'il s'agit 1à d'un CEdipe mai résolu :alors que les parents économistes théoriciens
tendent à se dispenser allègrement de la fastidieuse lecture de Marshall ou de Keynes, le
fils prodigue historien de la pensée dconomique continue à revendiquer une approbation
parentale trop chichement dispensée. Il reste donc a celui-ci à reconnaître que le cordon
ombilical a été coupé, que, s'il est encore jeune, ses parents ne le sont plus guère, et
qu'enfin s'ouvre a lui le vaste monde des historiens des sciences (voir, en particulier,
Schabas [1992], p. 196 et suiv.). L'immaturité a donc changé de camp. Elle demeure,
cependant, l'explication majeure de la coexistence de l'histoire de la pensée économique
et de La théorie économique.
La double réfkrence aux sciences naturelles et h la Scolastique témoigne clai-
rement de la métaphore dont se nourrit la W s e de 1 ' ~ t u i i :tde~ même qu'à
la fin du Moyen Age les sciences de la nature, balbutiantes, auraient 6té empê-
ch& de prendre leur essor1 par la chape de l'exég2se repétitive des textes
d'Aristote, la science kconomique contemporaine - ou, dans le nieilleur des cas,
certains de ses serviteurs - serait coupable, aujourd'hui, de la même faute origi-
nelle. Z'argument, cependant, semblera bien rnince à tous ceux qui ne sont pas
convaincus que l'évolution de la science 6conomique ait vocation 2i se calquer
sur celle de la physique ou, même s'ils partagent cette conviction, à ceux qui
refusent la caricature d'une science mbdi6vale ossifiée. C'est, sans doute, à
l'influence de Piem hihern2 que l'ni est redevable d'une réévaluation de la
pensée scientifique du Moyen Age. L'impehrs, chez Buridan, la représentation
fonctionnelle ou 1' héliocentrisme chez Oresme, portent témoignage que la
relecture méticuleuse d'un auteur dont I y ~ u v r&ait
e à l'époque vieille de dix-
sept sikles avait su produire cette exceptionnelle fécondité de la science médié-
vale. Pour tous ceux qui n' adhkrent alors ni h l'idde d'un profil identique de
l'économie et de la physique, ni a celle d'une résurgence tardive et localisée de
l'obscurantisme médikval, l'explication de la persistance de la réflexion histori-
que en économie doit être cherchee ailleurs.
1. Le destin des sciences morales et politiques au Moyen Age est appkié de la même
manihe par J.-B. Say. Mais, cette fois, I'c<observation très-juste » est de MacCulloch. Ti
est vrai que d' Aiembert est mentionné en note. Voir Cours, t. 2, p. 546, ainsi que le
e Discours préliminaire », p. 18.
2. En particulier dans b Système du mnde [1913].
s'empêcher de penser à ces savants du & siècle qui, comme Ad6Ihard de Bath
dkcouvrant une idée nouvelle, s'inventaient un philosophe arabe qui l'aurait eue
avant eux. Sans l'inventer pour autant, Marx avait trouvé son philosophe arabe :
c'était Fmçois Quesnay.
Mais il est clair que tout cela ne suffit pas. Si, en effet, on attend de ce cons-
tat, selon lequel des économistes se sont efforcés, avec plus ou moins de bonne
foi, de se chercher des prédkcesseurs ou de se dkfinir par rapport h eux, qu'il
fonde la recherche histurique comme partie prenante de l'édification théorique,
il est difficile de ne pas trouver l'argument spécieux : dans sa génkralitk, ce ne
sont pas seulement quelques cas importants dont il rend compte mais, plus
banalement, de la manière dont l'attention d'un économiste est sollicitée par un
problkme, puis nourrie des blérnents nécessaires pour le r6soudre. Il est, ainsi,
facile de reconstituer I'itindraire de Gkrard Debreu entre le moment oh il entre-
prend de prolonger ses 6tudes aux États-unis, à la fin de l'année 1949, et La
publication, en 1959, de ['ouvrage fond6 sur sa thèse de doctorat, soutenue h
Paris en 1956'. L'utilisation du théorème de Kakutani, afin de démontrer l'exis-
tence d'un équilibre 6conomique général, clôt en effetune decennie de recher-
ches conduites seul ou en collaboration avec Renneth h o w . Comme Debreu le
m e n t i m . c'est à la lecture d'un ouvrage de Maunce Allais2 qu'il doit son
n inrkrêt pour la théorie de l'École de Lausanne »3. Mais c'est 3 partir de juin
1950, lorsqu'il entre h la Cowles Commission, qu'il prend véritablement
connaissance des contributions sur lesquelles s'appuieront ses propres travaux :
la démonstration de Wald, d' abord, traduite en anglais en 1951, qui n'employait
pas encore de théorème de point fixe ;l'article de Kakutani 119411, génbralisant
le théorème du point fixe de Brouwer ;celui de Nash [1950],utilisant le théo-
rème de Kakutani pour démontrer que tout jeu de n personnes à somme nulle
possédait un équilibre ; celui de von Neumann, enfin, traduit en 1945, qui
employait un t h h è m e de point fixe afin de demontrer l'existence d'un equili-
bre. Ces quelques années nous paraissent, aujourd'hui, exemplaires de la
manière dont travaille un &onomiste thdoricien. Or, cette démarche qui fait pas-
ser du savoir disponible au début des années cinquante vers la dhnonstration de
l'existence d'un équilibre économique génkral dans Théorie de la valeur est-
elle d'une nature à ce point diffdrente de celle qui régit le passage de Smith à
Ricardo, voire de Quesnay à Marx ?
Rien de tel ne s'impose au premier abord, Au contraire, si l'exigence du pr6-
décesseur est véritablement contraignante, c'est sans égards particuliers pour
son ancienneté. Sous cet aspect, même si 1' institutionnalisation croissante du
savoir éconornique a comme contracté les délais de sa diffusion, il n'y aurait
aucune solution de continuité entre les auteurs des siécles passés et les contribu-
tions les plus &entes. Reléverait alors de l'histoire tout ce qui s'est écrit, sans
distinction, avant le moment présent. La simple reconnaissance de nos prkdk-
cesseurs ferait de chacun d'entre nous un historien de la pensée kconomique.
Mais, si l'on adopte ce point de vue, l'enjeu s'est déplacé.
passks < nei sont pas ce qu'il s'agit d'apprendre, mais ce qu'il faudrait
oublier B. Il n'est, en effet, pas absurde de soutenir que l'on n'apprendra pas
grand-chose en microbiologie en réfléchissant sur la génération spontanée, ou
en m6canique en s'inspirant de la th6orie aristotéiicienne des graves. Mais, en
théorie économique, ou sont ces erreurs que nous rejetterions aussi
unanimement' ?
Pour Say, au moins, la cause était entendue. La dénonciation des erreurs pas-
sées et présentes dans le << Discours pdliminaire » du Traité d'économie politi-
que en rkvéle le contenu : c'est d'une erreur de mk~hodequ'il s'agit, à tel point
que c'est h l'immunisation contre cette erreur qu'il attribue le rale fondateur
d'Adam Smith : ri Avant Smith, on avait avancé plusieurs fois des principes tri%
vrais. Il a fait plus : il a donne la vraie methode de signaler les emm ; il a
appliqué b l'économie politique la nouvelle manière de traiter les sciences, en
ne recherchant pas ses principes abstractivement, m a i s en remontant des faits
les plus constamment observés, aux lois génkrales dont ils sont une
conséquence r2. Cet inductionnisrne rigoureux, qui pèse non seulement sur les
1. Voir Cours, t. 1,p. 12, et surtout, dans le « Discours préliwnaire >> du Traité, p. 36,
la discussion de l'opposition entre « prédiction » et << explication n.
2. L'exemple en est donné par les sciences de la nature, où les conceptions de
« Leibniz et Newton, Linné et Jussieu n coexistent (ibid.,p. 15).
3. Ibid.,p. 18 et 55 ;voir kgalement Cours, t. 1, p. 45-46.
4. « Discours préliminaire » du Traité, p. 36.
5 . D. Levhari et P.A. Samuelson [1966], p. 518. Il s'agissait de l'utilisation inappro-
priée du théorème de non-substitution a h d'gtablir I'impossibilit6 du retour de techni-
ques lorsque la matrice de production est indécomposable,
Revue économique
La moisson semblera d'autant plus maigre que, pour des raisons parmi lesquel-
les les préoccupations pédagogiques ou pratiques jouent souvent un rôle dkisif,
l'analyse dichotomique et la fonction de production agrégée sont loin d'avoir dis-
paru de la littérature contemporaine. Au moins, ces deux exemples permettent-ils
de circonscrire la nature de ces <~erreucs n sur la reconnaissance desquelles
s'amorce un consensus. Dans les deux cas, eiles sont hées a une sorte d'impuis-
sance cognitive qui, à défaut d'une élaboration formelle suffisante, nous rend
incapables de saisir un réseau de relations complexes autrement qu'à travers ses
constituants, considérés indépendamment les uns des autres, Or la pertinence, par
exemple, de la loi de Say, du postulat d'homogénéid ou de la relation inverse
entre intensité capitalistique et taux de profit, ne p u t s'apprécier isolément, mais
au sein d'une stnicture complexe que notre connaissance des propri6es formeiles
des modkles interdkpendants permet, seule, de contrôler.
L'espace devolu aux (< erreurs » en économie apparaît donc comme conside-
rablement &duit - occupé seulement par quelques défaillances techniques ou
par les conséquences de nos difficultés à saisir des relations complexes. Suivre
les recommandations de J.-B. Say en nous débarrassant du fardeau de nos
erreurs passées semble alors bien peu contraignant : nous nous trompons si peu ;
ou plutôt : nous convenons si peu de nous être trompés.
Ii y a 18 de quoi rendre perplexe un épist6mologue, même amateur, En dépit
des efforts déployés, aucune recommandation méthodologique n'aura donc eu
d'effet. Sur le parcours de notre discipline, il n'y aura eu aucune fausse piste -
seulement des itinkraires contestés. Ainsi, ni le paradoxe dwlais, ni celui de
Ellsberg, ni les inversions de preférences n' auront eu raison de L'utilité espérke.
Tout au plus auront-ils contribué à faire émerger des compréhensions alternati-
ves des choix en incertitude.
Le même épistémologue amateur pourra alors caresser le rêve du profession-
nalisme, en consentant à affronter ces questions que lui pose sa discipline :
pourquoi les thkories y semblent-eIIes rebelles li toute dfutation ? Pourquoi ks
programmes de recherche y sont-ils au mieux mis en sommeil, mais ne dkgknè-
rent jamais ? À dbfaut de cette hardiesse, il pourra aussi changer de registre et
renoncer à donner des leçons si mal entendues, pour aborder les conséquences,
sur son &volution,d'une discipline dans laqueîle on ne se trompe pas.
L'illusion serait d'imaginer que le temps s'en serait retire avec la possibilité
d'y commettre des erreurs, de sorte que le savoir économique contemporain pla-
cerait sur le même plan les sédiments qui l'ont constimk. L'histoire, au
contraire, continue à le structurer, et son empreinte la plus manifeste réside en
ses omissions'. Si 1'erreur ne represente pas la voie privilégiée par laquelle des
théories sont 6vacu6es de notre mkmoire, des pans entiers du savoir economique
n'en ont pas moins disparu. À ce niveau de généralité, la raison en imp~rtepeu
- sauf à rappeler, une fois encore, que l'erreur n'y a joui5 aucun rôle, et que les
potentialités théoriques de ces savoirs oubliés demeurent intactes. Aussi est-ce
dans le passé d'une discipline qui oublie mais ne se trompe pas que son savoir
présent peut trouver à s'alimenter. Et à la singularité de cette conjonction que
tient la persistance de l'histoire de la pensk économique.
Sous des formes diverses, l'idée d'un savoir oisif, que les soins attentifs d'un
historien de la pensée bconomique remettrait 21 l'ouvrage, trouve un &ho chez
de nombreux auteurs. La perspective fut d'abord etroite, chez Schumpeter
119541, par exemple1.C'est ainsi qu'il notait que n beaucoup plus qu'en physi-
que, des résultats se sont perdus en chemin ou restèrent inemployds pendant des
siècles. [...] L'6conomiste qui etudie l'histoire de sa science a beaucoup plus de
chances d'y trouver des propositions stimulantes et des leçons utiles, mais
déconcertantes, que le physicien enéralement assuré qu'aucun apport notable
5'
de ses prédécesseurs n'a kt6 perdu B .
La perspective s'est élargie lorsqu'à partir des annees soixante-dix surtout,
une sensibilité croissante, qui n'était pas toujours de frtçade, aux investigations
de nature épist6mologique a conduit h mettre en doute 1' intuition d'une cumula-
tivité rigoureuse des connaissances. Ainsi, l'idée selon laquelle même une
i<convergence » des théories ne prejuge pas de la manière dont celle-ci s'effec-
tue, laisse-t-elle la place des éclipses provisoires de certaines théories, dès lors
que leur évolution présente des oscillations. C'est l'argumentation que retient
F- Cesarano [1983], en illustrant son propos par l'histoire des théories monétai-
res, afin de préciser le rôle de l'historien de la pensée konomique : certes pas
assurer la convergence des théories, mais Lisser le profil de leur évolution. Bien
que les sources explicites ne soient pas les mêmes, Ie point de vue développe
par S. Hollander [1987] n'est pas si différent. Il relève, en effet, quhne th8orie
peut en remplacer une autre à la suite de ce qu'il nomme un changement dans la
« concentration de l'attention3 ». De la sorte, à la fois une résurgence du pro-
blkrne initial peut lui rendre sa @nence4, et un changement ddlilibéré dans la
« concentration de l'attention », de la part de l'historien de la pensée économi-
que - identifiant, par exemple, un micanisrne d' allocation au caeur de la tradi-
tion classique - a pour effet dkctualiser une analyse ancienne.
De même, l'évocation rituelle des idées de Popper, Kuhn et Lakatos par
T. Negishi [1989], précède une tentative d'explication de l'histoire de la penske
konomique en termes lakatosiens. Cette dernière y est perçue c o r n e un conflit
entre programmes de recherche concurrents, dont certains passeraient par des
La fidélit6 au présent :
demarche extensive et démarche r6trospective
La démarche extensive correspond sans doute le mieux h ce que nous imagi-
nons être l'attitude d'un historien honnête. EIle consiste Zï interpréter un ensem-
ble d'énoncb anciens en fonction de problématiques en vigueur h l%epaqucou
ils ont et6 etablis. Ainsi, les contributions respectives de Malthus, Ricardo et
1. Voir, par exemple, E. Cannan [l892]. L'argumentation est reprise dans Cannan
(19171, p. 116 et suiv.
2. On citera, par exemple, les tentatives de L,Birken 119881 ou J. Lipkis [1993] qui
privilégient (de maniéres d'ailleurs opposées) une explication « culturelle » de I'émer-
gence du marginalisme.
Revue économiqise
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Simon ». It'efficacité pédagogique appwAtalors comme cette aptitude à faire
ressortir un énoncé ancien comme une question ouverte h laquelle k savoir
contemporain permettrait, enfin, d'apporter une dponse. C'est vraisemblable-
ment en ce sens que, selon le mot de Mark Blaug, « 1' histoire de la pensée éco-
nomique est irrépressible, et si son étude &ait déclarée illégale, il y a peu de
doute qu'elle se poursuivrait clans des sous-sols, demière des portes
verrouillées' ». La sécurité intellectuelle en procède : notre savoir englobe le
passé et ses précurseurs ne sont grands que pour autant que nous le sommes plus
encore. A l'inverse des clercs du Moyen Age qui pensaient ne voir si loin que
parce qu'ils prenaient appui sur le savoir des Anciens, parce qu'ils se voyaient
nains juchés sur des épaules de géants (l'image est de Bernard de Chwtres), la
démarche rktrospective nous invite à nous reconnaître nous-mêmes comme des
géants, et les frêles dpaules de nos précurseurs ne nous aident guère à élargir
notre vision.
Bien sfir, il serait abusif de voir dans la démarche extensive comme dans la
demarche rktrospective autre chose que des pôles de reference entre lesquels
viendront s'insérer des contributions en histoire de la pensée économique qui
reléveront de l'une et de t'autre dans des proportions variées. Pourtant, leur
coexistence ne tient pas seulement à notre insuffisante vigilance qui nous prive-
rait de la rigueur nbcessaire pour exclure l'une ou l'autre au sein du même tra-
vail. Il est trivial de dire qu'elles ne s'excluent pas par principe et qu'un savoir
ancien peut aussi bien répondre ii une problématique ancienne que préfigurer
des énoncés contemporains. Mais surtout, à leur rnanih, chacune d'entre elles
consacre notre fidelid au présent de la science économique. En aucun cas, en
effet, ce dernier n'est menacé : la démarche rétrospective le retient comme seule
nome d'évaluation ; la démarche extensive le respecte d'autant plus quklle
tend ii en faire abstraction lorsqu'il s'agit de rendre compte d'un savoir pass6.
longe pas, chez les historiens de la pensée économique,jusqu'a lui accorder une
place comparable b celle des deux autres démarches. Le signe le plus manifeste
en est 1' absence de traités génkraux d'histoire de la pensée économique relevant
de la dkmarche intensive : tandis qu'il était aisé d'illustrer par l'un de ceux-ci
les démarches extensive ou dtrospective, on serait bien en peine d'en kvoquer h
1' appui de la d6marche intensive. Ainsi est-ce le contraste entre la fdcondité ana-
lytique que l'on est enclin à prêter à la démarche intensive et son inaptitude à se
fixer autre part que dans des contributions ponctuelles, qui demande & être élu-
ci&.
Cette &lucidationpasse par une analyse plus détaillée de l'heuristique qui
caractérise la dlémarche intensive. C'est 1' interprktation de Ricardo par SrafTa et
la théorie des prix de production qui l'illustreront en fourniront la matière.
Lorsqu'en 195 1 Piero Sraffa publie, en collaboration avec Maurice Dobb, le
premier volume de l'édition compl5te des œuvres de Ricardo, il renouvelle sen-
siblement la m u r e dont on se reprksenbit la pensée éconornique ricardienne.
Comme on le sait, l'introduction, redigée par Sraffa, incite a privilégier, dans
l3tinéraire intellectuel de Ricardo, un problème et un moment. Le problème est
celui de la répartition du revenu ; le moment est celui de la publication de
l'Essai sur les profits, en février 1815. La section IV de l'Introduction repd-
sente la pièce rnaîîesse de l'édifice, en ce qu'elle est consacde à la @riode qui
va de la gestation de l'Essai B la première édition des Principes. Lisant l'Essai
de Ricardo, Sraffa y décrit une économie dans Iqudle l'agriculturejoue un rôle
prépondérant :I'homogénéité physique entre produit agricole et moyens de pro-
duction - dans les deux cas, le blé - klirnine la question de l'évaluation de celle
de la ddtennination du tawt de profit. Ce dernier appmAtalors comme un rap-
port entre quantites de meme dimension, que la concurrence entre les capitalis-
tes impose ii l'ensemble de l'économie. De ce fait, les modalit6s de répartition
entre salaires et profits pouvaient être connues avant les valeurs relatives des
diffdrentes marchandises produites. C'est cette sorte d'âge dbr théorique que,
selon Sraffa, Ricardo se serait efforcé de retrouver au fil des éditions successi-
ves des Principes, après l'abandon de l'hypothèse d'une homogénéité physique,
A travers la quête d'une mesure invariable des vdeurs, dont une marchandise
produite dans des conditions moyennes donnerait une approximation1.
Dans un premier temps, cette analyse semble donc relever de ce que l'on a
dksigné comme une démarche extensive. Et c'est, d'abord, à ce titre qu'elle est
discutable - et fut effectivement discutée. L'idke d'une homog6n6itts physique
en agriculture, dPjh avancée par Mitchell dans ses cours de Chicago, est à la fois
le point le plus original et le plus fragile de 17interpr6tationde l'Essai. Car, ainsi
qu'en convint scmpuleusement Sraffa, « aucun des écrits ou des lettres qu'on
ait conservés de Ricardo [et surtout pas l'Essai ; A.L.] ne comporte cette
argumentation2 ». La conjecture imaginée par Sraffa afin de contourner
l'absence d'6léments matdriels - des notes perdues, datant de mars 1814 ; ou
une conversation dont aucune trace n'aurait subsisté - n'empkha donc pas les
remises en question de la thèse de l'hornogc?néitéphysique en agriculture en lui
substituant, chez S.HoIlander 119733 par exemple, la proposition selon laquelle
Les variations des salaires nominaux se répercutaient sur le taux de Faute
d' arguments textuels décisifs, la discussion peut se poursuivre aujourd'hui
encore4, et rien ne laisse présager qu'elle doive, un jour, cesser.
Mais il y eut un deuxihme temps, de sorte que la controverse se saisit d'autres
enjeux que ceux d'une demarche extensive en histoire de la pende bconomique.
En 1960, P.Sraffa publiait Production de mnzhundises par d a marchandi-
ses. Comme cm ne l'ignore plus, cet ouvrage présentait un modéle de production
linéaire et désagrégd, dans lequel chaque marchandise était produite à l'aide de
quantitds non négatives des mêmes marchandises et de travail. Il permettait de
dkkminer - au moins dans le cas élémentaire de la production simple oii cha-
que branche produit une marchandise differente et ou chaque marchandise est
produite par une seule branche - pour des taux de profit non négatifs et infé-
rieurs B une valeur maximale, un systhe de prix de production associd 3 un
taux de salaire. La singularité de ce modèle tient à ce que, en s'appuyant sur la
C'est là, bien entendu, le meme probkme qui avait été soulevé plus t6t [dans le
1. i<
cadre de l'Essai ;A.L.] A propos de la théorie ficardienne du profit fond6 sur le rapport
entre quantités de blé. » (Sraffa [1951], p. 105.)
2. Sraffa [ 19511, p. 89.
3, A la suite de S. HoIlander [1973], la thèse sraffaïenne de l'homogénéité physique
en agriculture fut mise en cause de multiples manières. Voir,par exemple, A. Lapidus
[1981], G. Faccarello [1982], D. Tosato [1985], A. Béraud [1985] et il9901 et, plus
récemment encore, T. Peach [1993].Le point de vue sraffakn, au contraire, a été n o m -
ment développé par J. btwell [1975] ou P. Garegnani [1982].
4. Voir, par exemple, la recension de - et la participation à - ce débat dans T.Peach
[1993]. R.Arena [1989] a cependant noté que plusieurs contributions relevant d'une
perspective sraffai'enne apportaient au débat des éléments plus consistants, en relevant
l'existence de discussions de la thèse de l'homogénéité physique chez des contemporains
de Ricardo - en l'occurrence, Malthus et Totrens ;pour une bibliographie, voir R. Arena
[1989], p. 97-98, Mais l'argument peut aussi bien alimenter l'interprktation inverse (voir,
par exemple, à propos de Malthus, Lapidus il98 11 et [1986]). La découverte récente, par
Samuel HoIIander, d'un manuscrit antérieur h l'Essai, dont la paternité semble encore
discutable, est aujourd'hui susceptible de relancer le debat.
Revue économique
1. La structure de la a réponse B est, cependant, moins claire - quel que soit son
contenu intuitif. C'est ce problème qu'essaie de résoudre Christian Schmidt, en prenant
à la lettre la lecture sraffaïenne de Ricardo, et en analysant les caractéristiques & la réé-
crime de Ricardo par Sraffa dans Production de marchandises. Voir C . Schmidt [1984],
p. 61-79.
de Ricardo - d'une « ébauche des propositions du début de cet ouvrage1 r .
Quelles étaient les limites du << d6but de cet ouvrage D et jusqu'à quel point
1' (< kbauche » co'hcidait-elle avec les propositions du texte achev6 ? La suite de
1' avant-propos permet de cerner de plus prhs l'ensemble des réponses possibles.
Sraffa y note que si « les propositions centrales avaient pris forme à la fin des
années vingt, des points particuliers, comme 1 ' étalon-marchandise
~ »,les pro-
duits conjoints et le capital fixe furent achev6s dans les d e s trente et au dkbut
des années quarante2 ». Si on suit Sraffa à la lettre, cela signifie que l'ébauche
soumise Keynes comportait soit exclusivement les deux premiers chapitres
(dont l'objet est de présenter le système de prix de production dans le cadre de
la production simple, de subsistance ou avec surplus) soit, en outre, les sections
du chapitre m qui introduisent le problème des effets de répartition dans le cadre
d'un modele linéaire désagrkg&.
A l'appui de la prerniére interpretation, on mentionnera le laconisme du seuI
commentaire de Keynes ue rapporte Sraffa : ne devait-on pas ri prtcsuppser
des rendements constantsB s ? C'est, sans doute, ce que pouvait suggérer la
compréhension de la production - relativement originale h Cambridge, vers la
fin des années vingt - comme processus circulaire et non plus univoque. Mais
on peut également soutenir qu'entre Keynes et Sraffa la communication sur le
plan scientifique etait a sens presque unique. Keynes avait, à maintes reprises,
soutenu et publié son ami ;il l'avait fait intervenir à des moments décisifs (dans
le débat avec Hayek, par exemple) ; il avait, aussi souvent que nécessaire, sou-
mis ses propres textes à sa sagacité ;mais leur seul travail scientifique qui résul-
tait d'une élahration commune fut l'édition de l'Abrégé du Truité de la nature
humaine, dont Ils avaient découvert que lkuteur était David Hume et non,
comme on le supposait, Adam smith4. Le caractère laconique du commentaire
de Keynes thoignerait alors seulement qu'il était plus prkoccupé de faire lire
par Sraffa l'esquisse du Treatise on Money que de hscuter en profondeur le
texte qui lui diait soumis.
Mais il est surtout étonnant que Sraffa n'ait pas rangé la marchandise-&talon
panni les « propositions centrales » de son ouvrage, élaborées dès la fin des
années vingt. C'est pourquoi je comprendrai cette aflfirrnation comme voulant
signifier que la caracterisation prkcise de la marchandise-&talon,telle qu'elle
ressort du chapitre W,avait fait l'objet d'une elaboration tardive5 ; mais son
intuition ne pouvait pas être absente de l'ébauche de 1928, soit sous la forme
d'une marchandise moyenne, soit - ce qui me semble plus vraisemblable encore
- sous la forme d'une marchandise composite dont le contenu restait en
suspens.
Si cette conjecture est correcte, l'essentiel des innovations théoriques asso-
cikes it la première partie du livre de Sraffa se serait trouvé esquissk avant 1930,
« TeIle est du moins l'interprétation donnée dans notre introduction aux principes de
Rcardo. Mais on pourrait peut-être soutenir que ce ne fut qu'après que le systeme-étalon
et la distinction entre produits fondamentaux et non fondamentaux eurent pris corps dans
le cours de la présente recherche, que l'interprétation ci-dessus de la théorie de Ricardo
fut suggérée elle-même comme une conséquence naturelle1. >z
Au premier abord, la cause est donc entendue, et ce qui semblait être un cas
exemplaire de démarche intensive en histoire de la pensee économique prend
dksormais la forme d'un avatar de la démarche r&rospective : pour P. Sraffa, en
1930 - et probablement pour lui seul à cette date - le savoir économique
contemporain s'est déjà modifie ; dans les deux décennies qui suivent, il le
retrouverait progressivement chez Ricardo. Et la démarche extensive dont le
lecteur crédule pensait qu'elle animait l'Introduction de 195 1 se doublerait
d'une demarche r6tmspective qui devait exiger encore dix ans avant d'être
démasquée.
Mais au deuxiéme ahrd ? Peut-on sérieusement imaginer qu'au printemps
1930 Sraffa n'avait de Ricardo qu'une connaissance nidimentaire ? C'est peu
vraisemblable et, quel que fit le goQt de Keynes pour les paris tbrneraires, on
peut penser que, sans autres garanties sur la culture ricardienne de Sraffa, il
n'efit jamais m i s son crédit en jeu afin d'obtenir d'Herbert Foxwell, président de
la Royal Economic Sociev, qu'il décharge Thedore Gregory - pourtant kditeur,
avec Jacob HoIlander, des Notes on Malthus en 1928 - de la responsabilité de
l'édition complète des œuvres de Ricardo qu'il assumait depuis cinq ans, pour
la confier à un jeune immigré italien dont le talent ne s'&ait, jusqu'alors, illustré
par aucune publication sur le sujet. Tout laisse h penser, au contraire, que
lorsqu'il accepte cette charge, Sraffa possède une connaissance approfondie de
l'c~uvrede Ricardo. Son premier article la concernant paraît la même année
dans le Quarterly Journal of Ecommics. Ii s'agissait de la réponse à un article
d'Einaudi de 1929, qui relevait une erreur qu'aurait commise Ricardo dans le
calcul des cofits comparatifs. La r6ponse de Sraffa mettait en kvidence la res-
ponsabilité de James Mil1 et attribuait la these défendue par Einaudi h
l'influence de John Stuart Mill, soucieux de préserver la réputation de son père.
Si l'enjeu de ce bref débat2 semble aujourd'hui insignifiant, il n'est manifes-
tement pas de ceux qu'une connaissance superlîciellle des 6crits concernés per-
met de disputer. La feuentation de Ricardo &tait une affaire ancienne pour
Sraffa. Elle avait commencé avec l'enseignement d'Einaudi à Turin, pendant la
Première Guerre, et s'était poursuivie, en 1921 et en 1922, h la London S c b E
i<Ce domaine de la théorie économique a perdu plus qu'aucun autre la plupart des
implications immédiatement pratiques (notamment poux ce qui est des doctrines des
changements sociaux), que jadis Ricardo, puis M m et, en réaction, les économistes
bourgeois lui attnbukrent : tel est le processus qui explique cette indifférence. De plus en
plus, la thdorie de la valeur a été réüuite h une consaniction de l'esprit [...]. Instniment
essentiellement pédagogique, comparable B l'étude des auteurs classiques [...], elle ne
peut g&e susciter, pour cette raison, la passion des hommes, même s'ils sont
universitairesl . »
que l'ktude des théories de la vdeur pouvait paraître aussi vaine que celle des
auteurs classiques.
Le parallèle est saisissant, et deliber6rnent ou non, le programnie de recher-
che était trac6 : investir cette double vanitt?, des auteurs classiques et de la thé*
rie de la valeur, afin de la rendre, de nouveau, féconde. Et c'est précisement ce
que fit Sraffa. Dès 1926, la &flexion sur la théorie de la valeur, qui devait abou-
tir à la théorie des prix de production, était comprise non seulement comme ana-
logue SI une rbflexion sur les auteurs classiques, mais comme subordonnh B ce
retour aux classiques, Le changement de perspective pouvait donc s'accomplir
à ces deux niveaux : Ricardo devenait important non plus pour une double for-
mulation des rendements décroissants en agriculture, mais pour la slpécificité de
la production agncole dans l'Essai et la recherche d'une mesure invariable des
valeurs dans les Principes ; le consensus sur la théorie marshallienne de la
valeur était non plus miné par la critique de la courbe d'offre, mais annulé par la
construction alternative des prix de production et de la marchandiseétalon.
L'opération est complexe. À tort ou à raison, les deux articles de 1925 et
1926 paraissaient épuiser les ressources de la critique. Et c'est dans la curieuse
conséquence de cette impasse théorique que se trouve le principe de la dérnar-
che intensive :pour Sraffa, Ricardo devenait un contemporain ;non parce que le
temps qui l'en séparait se serait indiiment contracté, mais parce que le present
qui lui était familier était désormais stérile et qu'il n'y avait pas d'autres options
que de rechercher dans le passé ce point d'appui permettant de transformer un
savoir prksent, auparavantrebelle h toute transformation décisive.
Si l'histoire de Sraffa est exemplaire, elle est loin d'être unique1. Mais
l'addition de récits exemplaires peut sans doute servir h l'histoire de la démar-
che intensive en histoire de la pensée économique ; elle n'est d'aucun secours
pour expliquer que l'histoire de la pensée économique ne s'organise pas selon la
démarche intensive. Le succès ou l'échec de cette deniiére en livrent la clé.
Imaginons l'échec. Supposons que Sraffa n'ait pas rencontré, à Cambridge,
le support mathématique qui lui a été offert. Supposons encore, bien que cela
soit plus difficile 5 admettre, qu'en dépit de sa connaissance de Pareto, Marx et
~ u e s n ail~ n'avait
~, su acceder a une compréhension suffisante des processus
interdépendants pour en esquisser la formalisation.Production de marchandises
par des marchandises n'aurait alorsjamais kte &rit et 1' on retiendrait essentiel-
lement de 1' œuvre de Sraffa la critique de la fonction d'offre marshallienne et,
bien sûr, l'interprétation de Ricardo - peut-être moins systématique que ce que
nous en connaissons. C'est à un autre chercheur - on pense à Garegnani, ou à
Pasinetti, par exemple - que nous devrions, à travers une démarche intensive
passant par la découverte de la lecture sraffaïenne de Ricardo, la théorie des prix
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