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Interview
20 juillet 2018
Le point de vue de Olivier de France
Brexit ou pas Brexit ? Michel Barnier et le nouveau secrétaire d’Etat britannique chargé
du Brexit, Dominic Raab, se sont rencontrés aujourd’hui pour reprendre les
négociations entre le Royaume-Uni et l’Union européenne, dans un contexte politique
de plus en plus tourmenté outre-Manche. Le point de vue d’Olivier de France, directeur
de recherche à l’IRIS, sur l’état des négociations.
heresa May a présenté cette semaine un Livre blanc pour l’après-Brexit qui
énonce ses propositions pour la future relation entre le Royaume-Uni et l’Union
européenne. Quelle analyse en faites-vous ?
Ce Livre blanc aurait pu être une base à la négociation, mais au fond il arrive un an et
demi trop tard. En réalité, si le Royaume-Uni avait conçu un plan pour sa sortie il aurait
présenté ce Livre blanc à l’activation de l’article 50.
La seule chose d’à peu près prévisible est que deux crises distinctes sont nécessaires
pour dénouer la situation. La première entre le Royaume-Uni et l’Union européenne est
nécessaire pour arrêter un compromis avant l’échéance finale. Mais pour cela, le
Royaume-Uni doit élaborer une position consolidée, ce qui n’est pas le cas à l’heure
actuelle. Dès lors, une crise politique interne au Royaume-Uni est nécessaire au
préalable. Cette crise a déjà débuté, mais jusqu’où et jusqu’à quand ira-t-elle ? Un
nouveau leadership au sein du parti conservateur ? De nouvelles élections
législatives ? Une position britannique consolidée ? Mais quid alors des délais ? Le cas
échéant, faudrait-il reprendre toutes les discussions de zéro – et l’UE le permettrait-
elle ? Rien n’est moins sûr.
Du coté européen, le plan présenté par Theresa May sera difficilement acceptable. Il
revient en effet à séparer les quatre libertés fondamentales (libre circulation des biens,
des capitaux, des services et des personnes) sur lesquelles l’intégrité du marché
unique repose. Sur cette question, ce n’est ni la position française ni la position
allemande qui sera cruciale, mais la position franco-allemande. Certes la solution d’un
« no-deal » peut avoir des conséquences économiques importantes sur la France ou
l’Allemagne, et l’on peut imaginer quelques aménagements à la marge, mais le
compromis franco-allemand restera probablement de faire passer l’intégrité du marché
unique avant les intérêts nationaux, et cela risque d’être également la position
européenne.