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• Céline DUQUENNE November 2000

L'AUTONOMIE

• DE LA CLAUSE COMPROMISSOIRE

EN DROIT DU COMMERCE INTERNATIONAL


Faculty of Law, McGill University, Montreal

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0-612-70337-1

Canadl

La clause compromissoire, ou clause d'arbitrage, est la clause Par laquelle les
parties à un contrat s'entendent pour soumettre à l'arbitrage les litiges qui pourraient
naître relativement à ce contrat. A cette dciuse, est associé un principe d'autonomie,
principe qui recouvre deux réalités: d'une part, l'autonomie de la clause compromissoire
par rapport au contrat principal qui la contient et, d'autre ~ l'autonomie de la clause
compromissoire à r égard de toute loi étatique. Outre ces deux sens donnés au princiPe
d'autonomie, celui-ci est parfois rattaché à d'autres principes, tels que celui de
Compétence-Compétence. Il reste à se demander si le principe d'autonomie n'est pas en
fait la pièce centrale d'un régime spécifique à la clause compromissoire.

• The arbitration clause is the clause by which the parties to a contract agree to
submit the contlicts that May rise from their contractual relationship to an arbitral
tribunal. A principle of autonomy is associated to this type of clause: on the one hand,
the arbitration clause is separable from the main contract; on the other hand, it is
independent from any state law. To a certain extent, one may even link this principle to
other principles conceming the arbitration clause, such as the Kompetenz-Kompetenz
principle. The question is to know whether special rules apply to the arbitration clause.

Remerciements

Je remercie Madame le Professeur Geneviève SAUMIER

• pour l'aide et les conseils apponés il l'élaboration et il la rédaction de cette thèse.

2

Introduction

A 1'heure où le commerce international se développe, l'arbitrage international


est devenu un mode de règlement des conflits incontournable et prépondérant: il n'est


pas exagéré de dire que l'arbitre est aujourd'hui le juge de droit commun en ce domaine.

Au cœur du système, puisqu'essentielle à la mise en œuvre de l'arbitrage, la


convention d'arbitrage fait l'objet de nombreuses attentions. Ce mode d'attribution
conventionnelle de compétence est parfaitement adapté aux besoins des relations
internationales puisque, outre la liberté qu'il offre aux parties, professionnels du
commerce international, il permet d'arriver assez efficacement à des solutions qui
correspondent à ce que la pratique des affaires exige. Il convient dès à présent de

• distinguer « clause compromissoire» et « compromis ». Cette dernière notion désigne, en


effet, la convention par laquelle les parties à un litige né soumettent celui-ci à l'arbitrage
d'une ou plusieurs personnes. La clause compromissoire intervient au contraire en amont
du litige, puisqu'il s'agit de la convention par laquelle les parties à un contrat s'engagent
à soumettre à l'arbitrage les litiges qui pourraient naître relativement à ce contrat. Elle est
en général considérée comme plus grave que le compromis puisque susceptible d'être
insérée dans un contrat d'adhésion, et donc acceptée par une des parties sans que son
attention aux conséquences d'un tel engagement soit bien mesurée. Nous nous limiterons
dans nos propos au problème de la clause compromissoire, en privilégiant le cas où celle-
ci est bel et bien incorporée au contrat et ne fait donc pas l'objet d'une convention

• matériellement distincte.

3
• Lorsque l'on est amené ne serait-ce qu'à survoler la doctrine et la
jurisprudence relatives à la clause compromissoire, force est de constater que c'est la
question de son « autonomie» qui agite les Cours et les auteurs: le principe de
l'autonomie de la clause compromissoire a déjà fait couler beaucoup d'encre, mais le
débat, sans cesse renouvelé, est plus que jamais d'actualité.

Pourquoi ce débat est-il donc toujours en ligne de mire? Plusieurs raisons


justifient l'engouement que le sujet de l'autonomie engendre. D'une p~ la question
n'est pas circonstanciée à un Etat ou à une institution arbitrale spécifique: elle touche la
majeure partie des Etats, dans leur législation et/ou dans leur jurisprudence, mais aussi les

• conventions internationales, ainsi que les règles et la pratique arbitrales; il s'agit donc
bien là d'un phénomène de grande ampleur, à portée internationale. D'autre part, ce
principe ne soulève pas seulement des questions théoriques: il influence sur le plan
pratique les solutions à adopter. Ainsi le bouillonnement d'idées a un impact concret qui
encourage à trouver des réponses aux questions que pose la Théorie juridique. Enfin.,
comme l'écrit Catherine Blanchin., « le principe de l'autonomie de la clause
compromissoire se caractérise par un dynamisme propre qui rend difficile le brossage

• d'un tableau définitif de son contenu »1 : ainsi la notion en s'étendant à de nouveaux


concepts se prête sans cesse à de nouveaux commentaires.

En effet, à ce stade de l'évolution de la notion., on peut affinner sans se


tromPer que l'autonomie de la clause compromissoire recouvre plusieurs réalités, très
différentes les unes des autres, qui reçoivent un accueil variable, et rassemblent à des
degrés divers des opinions plus ou moins favorables.

C'est d'abord un premier asPect qui a été consacré: celui de l'autonomie


matérielle de la clause stipulant l'arbitrage par rapport au contrat qui la contient. Cette

• t C. Blanchin., L'autonomie de la clause compromissoire: UII modèle pour la clause allribrllive de


juridictio1l ?, Paris, L.G.O.J., Travaux et Recherches Panthéon-Assas Paris li, 1994, (spéc. P 38).

4

autonomie, qualifiée également d'« indépendance », de « severability », ou de
« separabilty» 1 « séparabilité », est la plus unanimement reconnue à travers le monde.
Elle consiste à voir, dans la clause compromissoire, une disposition qui, bien qu'intégrée
matériellement à un contra~ vient parfois à s'en détacher pour les besoins de sa mise en
œuvre. Si les conséquences qu'elle comporte ne sont plus réellement discutées, la
qualification qu'il convient de donner à la clause dans un tel contexte reste, en revanche,
problématique, et divise encore les auteurs.

Un second aspect, beaucoup plus controversé:- a fait son apparition plus


récemment: il s'agit, cette fois, de l'autonomie de la clause par rapport à « toute loi
étatique)}. Se pose alors le problème de savoir comment sélectionner les règles sur la

• base desquelles l'existence et la validité de la clause doivent être appréciées. En France,


cet aspect de la question de l'autonomie a été consacré par la jurisprudence, et les auteurs
y ont vu la reconnaissance d'une règle matérielle de droit international. Mais jusqu'à quel
point étendre cette conception au-delà des frontières du pays qui l'a adoptée? En effet,
cette autre approche de l'autonomie emporte de lourdes conséquences, et on peut
légitimement s'interroger sur l'existence d'éventuelles limitations à la règle ainsi posée,
mais aussi sur son aptitude à être reconnue de manière internationale.

• Comme l'a souligné Emmanuel Gaillard2, les deux règles regroupées sous la
même appellation de « principe d'autonomie» sont en réalité très différentes. C'est
pourquoi il conviendra de les envisager tour à tour, afin de se livrer à une étude poussée
de chacun des deux aspects de la notion, pour mieux les comprendre. La même approche
sera adoptée dans les deux cas. Elle consistera d'abord à exposer la signification de
l'autonomie, tantôt matérielle, tantôt substantielle. Ce n'est qu'après avoir bien cerné
l'acception envisagée dans sa complexité qu'il sera possible de dégager les limites
qu'elle comporte. L'analyse ne sera vraiment complète qu'en mentionnan~ dans chaque

• 2 E. Gaillard, sous l'arrêt Da/ico, Casso l.:n: civ., 20 décembre 1993, 1.D.I., 1994, P 432.

5
• hypothèse, l'écho que reçoit le principe d'autonomie dans les différents Etats, et sa
reconnaissance à travers le monde 3•

Mais il est possible de pousser l'analyse plus loin, et d'essayer de déterminer


jusqu'où le principe d'autonomie a étendu ses ramifications. En effet, certains auteurs
veulent découvrir pour ce principe de nouvelles conséquences, encore plus audacieuses. Il
pourrait ainsi être utile de rapprocher la notion d'autres grands principes en matière de
clause compromissoire, tels que la Compétence-Compétence, ou encore l'extension de la
clause à des tiers non signataires, afin de déterminer les rapports qu'ils peuvent
entretenir. En élargissant le débat, il serait d'ailleurs intéressant de s'interroger sur
l'éventuelle existence d'un système de règles propre à la clause compromissoire, et dont

• le principe d'autonomie serait le pivot. n ne resterait alors qu'à se demander


l'influence d'un tel principe ne va pas au-delà même de la sphère de l'arbitrage.
SI

Pour respecter la logique chronologique de l'apparition des significations


données au principe, l'autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat
principal sera étudiée en premier lieu (I). L'exposé de l'autonomie par rapport à toute loi
étatique interviendra ensuite (II). Ce n'est que dans un troisième temps que seront

• exposées les conséquences éventuelles du principe d'autonomie de la clause


compromissoire (m).

• 3A noter que dans la Deuxième Partie, consacrée à r autonomie substantielle. il sera surtout question de la
France. puisque ce pays est jusqu'à présent le seul à avoir pleinement reconnu cet aspect de la notion.

6
• le- L'autonomie de la clause compromissoire par rapport
au contrat principal

Cette conception du principe d'autonomie est ce qu'il est juste d'appeler la


conception traditionnelle de la notion.

• Prise dans ce sens, rautonomie a essentiellement deux conséquences. D'une


part, elle permet de relever l'absence de « contagion »4 des vices qui pourraient affecter
le contrat principal à la clause compromissoire qu'il contient. D'autre ~ elle autorise
la clause compromissoire à être soumise à une loi différente de celle qui régit le contrat
principal. (A)

Mais peut-on alors réellement parler d' « autonomie» de la clause? Certains

• auteurs ont voulu voir dans cette clause un second contrat à part entière, distinct du
contrat principal, auquel cas, le terme « autonomie» serait approprié. Mais il n'en reste
pas moins que cette autonomie a des limites, ce qui inviterait dès lors à envisager la
clause compromissoire comme un accessoire du contrat principal. (8)

Quelque soit la qualification retenue pour la clause compromissoire, un


constat s'impose de lui-même: son autonomie de principe remporte la quasi unanimité.
Ainsi de nombreux Etats appliquent ce principe, soit à travers les décisions de justice
qu'ils adoptent, soit même parfois par le biais de leur législation. Par ailleurs, au niveau
proprement international, tant les conventions internationales que la pratique arbitrale
reconnaissent le principe d'autonomie de la clause compromissoire. (C)

• 4 C. Blanchi~ note précitée 1, (spéc. p 25).

7
• AI Signification de l'autonomie matérielle

L'autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat principal est


également qualifiée d' « autonomie matérielle». Comme il a été dit, deux conséquences
se rattachent à l'autonomie ainsi entendue. Tout d'abord, la clause compromissoire survit
au contrat principal, de sorte qu'elle n'est pas atteinte par la nullité ou la résolution de
celui-ci (1°) ; ensuite, les lois qui régissent d'une part le contrat et, d'autre part, la clause
peuvent être distinctes (2°).

• 1°) Survie de la clause compromissoire au contrat principal

S'il est établi que la règle d'autonomie matérielle prémunit la clause


compromissoire contre un grand nombre de vices qui pourraient affecter le contrat
principal (a), des doutes subsistent quant à l'extension du principe en cas d'inexistence
ou de nullité ab initio du contrat en question (b).

• a) Absence de contagion des vices affectant le contTat principal

René David5 a parfaitement décrit le scénario à l'occasion duquclla question


relative à l'autonomie de la clause peut entrer enjeu:

« Il arrive souvent que le litige survenu entre les parties mette en cause
le point de savoir si le contrat conclu entre ces parties est ou non
valable ou s'il n'a pas été résolu. Une difficulté peut naître à ce sujet
lorsque ['arbitrage est prévu par une clause compromissoire insérée
dans un contrat. Une partie allègue que ce contrai est nul ou a cessé

• 5 R. David, L 'arhitrage dans le commerce international. Paris, Economica, 1992, (spéc. n° 209).

8
• d'exister.. n'est-ce pas dire en même temps que la clause
compromissoire contenue dans ce contrat est nulle ou a cessé d'exister,
et peut-on encore donner effet à cette clause? )J.

évidemmen~
7
Bien les parties peuvent rendre leur convention d arbitrage
réellement indépendante en concluant par acte séparé un accord en vue de soumettre
7

leurs litiges futurs à 1 arbitrage. Ainsi les vicissitudes du contrat n'affecteront pas
7

l'accord en lui-même, puisqu'il s'agira de deux conventions matériellement distinctes.


Pourtant M.Mezger6 estime que, même conclue par acte séparé, la convention arbitrale
fait corps avec le contrat auquel elle se rapporte, ce qui n'est pas totalement faux puisque,
comme nous le verrons, le contrat principal et les litiges relatifs à ce contrat sont l'objet

• même de la convention d arbitrage.7

Néanmoins, force est de constater que le plus souvent les parties insèrent la
convention d'arbitrage dans le contrat principal. Cependant, même dans cette dernière
hypothèse, l'autonomie peut parfois aller de soi. C'est le cas notamment si la clause a fait
l'objet d'une approbation expresse, ou lorsqu'elle prévoit expressément que la question
de la nullité ou de la résolution du contrat seront soumises à l'arbitrage, ou encore quand

• elle renvoie à des normes internationales qui reconnaissent l'autonomie. Mais que se
passe-t-il si la clause compromissoire se contente, en termes très
l'arbitrage pour les litiges qui pourront s'élever relativement au contrat?
généra~ de prévoir

Une tendance actuelle très nette se dégage en faveur de la reconnaissance de


l'autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat principal. « Les vices qui
ont pu affecter la validité de la convention de fond (et inversement) ne mettent pas en
cause les éléments correspondant de la convention d'arbitrage >/

6 E. Mezger, « Compétence-Compétence des arbitres et indépendance de la convention arbitrale dans la

• Convention dite Européenne sur l'Arbitrage Commercial International de 1961», Essais Minoli,
AIAlUTET, 1974, P 321.
7 1. Robe~ L'arbitrage: droit illterne, droit international privé, 6 ed, Paris, Dalloz, 1993, (spéc. P 250 5.).
c

9
• A vrai dire, rincidence de la nullité de la clause compromissoire sur le
contrat principal laisse la doctrine et la jurisprudence assez indifférentes sur le sujet: on
conclut rapidement à une nullité partielle, qui fait que la clause en question disparaît
tandis que le contrat subsisteS.

En revanche, la problématique inverse, celle qui ferait que la clause survivrait


au contrat, est beaucoup plus impressionnante et spectaculaire. II existerait, en effet,
certains cas d' ({ immunisation »9 de la clause compromissoire: la nulIité lO , la résiliation,
ou la résolution du contrat auquel la clause se rapporte, serait sans effet sur elle. De
même, la novation ne pourrait avoir pour effet de priver d'efficacité la clause
compromissoire insérée dans le contrat 11•

• Pour Pierre Mayer 12, les vices du consentement relèvent également le plus
souvent de [a séparabilité. II prend, en effet, l'exemple de l'erreur sur une qualité
substantielle de la chose objet du contrat, pour en conclure que cela n'a aucun rapport
avec la volonté de recourir à l'arbitrage. En revanche, il reste beaucoup plus réservé pour
ce qui est de la contrainte physique ou morale, ou encore des manoeuvres frauduleuses,
dans la mesure où le vice atteindra nécessairement la clause compromissoire. L'illicéité

• du contrat reste, pour lui, le domaine par excellence de la séparabilité, dans la mesure où
il estime que le fait que le contrat ait un objet illicite ne remet pas en cause le recours à
l'arbitrage.

Aujourd'hui, la survie de la clause compromissoire à la disparition du contrat


est globalement admise, mais il reste quelques points obscurs qui laissent place au débat
concernant le problème de l'inexistence du contrat et de sa nullité ab initio.

8 P. Simler, La nu/lité partielle des actesjuridiques, Paris, L.G.DJ., 1969, (spéc. P 102).
9 Expression empruntée à M. le Conseiller J.-P. Ancel, « L'actualité de l'autonomie de la clause
compromissoire», Trav. Corn. fr. dT. int. priv., 1991-1992, p 75.
10 Par exemple : Casso civ., 18 mai 1971,/mpex, J.O.I., 1972, P 62, note B. Oppetit.

• 11 Par exemple: CA Paris, 4 mars 1986, Cosiac, Rev. arb., 1987, P 167 ~ et: Casso lèf1: civ., 10 mai 1988,
Rev. am.,1988, p 639, avec à chaque fois une note de C. Jarrosson.
am.,
12 P. Mayer, « Les limites de la séparabilité de la clause compromissoire », Rev. 1998, p 359.

10
• b) Difficultés: nullité ab initio et inexistence du contrat principal

Que 1~ on dissocie le sort du contrat de celui de la clause compromissoire


lorsque le contrat principal vient à disparaître, personne ne semble s~y opposer. Par
contre, certains exigent, pour reconnaître l'autonomie, que le contrat ait au moins existé,
ou qu'il ne soit pas nul ab initio.

Le problème de la nullité ab initio a surtout été soulevé par les juridictions et


les auteurs anglais. En effet, le sens de leur jurisprudence, depuis un arrêt de 1942 13 ,
faisait du principe d'autonomie un principe reconnu mais limité aux contrats

• « voidable », à l'exclusion des contrats « void »14. Cette distinction avait été dénoncée par
le Juge Steyn ; il est d'ailleurs à l'origine du changement de position de r Angleterre sur
le sujet de la « separability». Dans une décision de 1990, Paul Smith Ltd 15, il invita en
effet à repenser le débat :

« the step of ruling fhat an arbitration clause. which forms part of a


writlen contracl. may he wide enough to caver a dispute as to wether

• Ihe conlracl was valid ah initio ... may he a logical and sensible step
that an English Court may he prepared 10 lake when il arises ».

Pourtant, dans Harbour Insurance l6 , le Juge Steyn s'était estimé lié par une
décision de la Cour d'appel 17 qui, selon lui, le contraignait à conclure autrement: même
s'il était d'avis que le principe de l'autonomie de la clause compromissoire pouvait
permettre au tribunal arbitral de se prononcer sur la validité ab initio du contrat, le

13 Heyman v. DarwitlS Lld, [1942] A.C. 356.


14 Notes de C. Svernlov: « What [50'1. Ain't », 1. lnt'l. Arb., 1991, P 37; et: « The Evolution of the
Doctrine ofSeparability in England : Now Virtually Complete? », 1. [nt'1. Arb., 1992, pliS.
15 Paul Smith Lld v. H & S International Holdings Co. IIlC., [1991] 2 Lloyd's Rep. 127.

• 16 Harbour Assurance Co. Ltd v. Kansa General IntenlationallnSltrance Co. Lld, [1992] 1 Lloyd's Rep.

81.
17 Taylor v. Sauns, [1953] 1 Lloyd's Rep. 181.

Il
• précédent Taylor l'en empêcha. Mais en appel, la Cour l8 jugea que le Juge Steyn avait eu
tort de conclure que l'arrêt Taylor appuyait la prétention de la partie intimée, et accueillit
l'appel, concluant que l'autonomie de la clause compromissoire pouvait pennettre au
tribunal arbitral de se prononcer sur la validité ab initio du contrat. Dès lors"} l'Angleterre
rejoignit les positions déjà acquises ailleurs en Europe, sur le problème de la nullité ab
initio du contrat La solution est désormais «officielle}} depuis l'adoption du 1996
Arbitration Act.

En revanche, l'inexistence du contrat semble toujours constituer un obstacle à


l'autonomie: cette remarque ne vaut pas seulement pour l'Angleterre. La Cour de
Cassation française a en effet décidé, dans un arrêt L. et B. Cassia, en date du 10 juillet

• 1990 19, que: «en matière d'arbitrage international, l'autonomie de la clause


compromissoire trouve sa limite dans l'existence, en la forme, de la convention
principale qui contiendrait la clause invoquée ». Mais il faut bien voir, comme le souligne
Eric Loquin, annotateur de l'arrêt., que le problème de l'inexistence est fort différent de
celui de la nullité. En effet, il explique:

« l'inexistence de la convention principale suppose l'absence totale de

• consentement, ou ce qui revient au même l'impossibilité de prouver


l'existence de celui-ci. Cette absence de consentement concerne aussi
bien la convention d'arbitrage que le contrat principal ».

Ainsi, aucune convention"} ni d'arbitrage, ni principale, n'a été conclue. C'est


d'ailleurs aussi ce que constate le Juge Schwebel 20 :

« ... ifthe agreement was never entered into. its arbitration clause never

came into force ».

• III
19
Harbour Assurance Co. Ltd v. Kallsa Generallnsurance Co. LId. (appeaJ), (1993] 1 Lloyd's Rep. 455.
Casso 1(rc civ., 10 juillet 1990, L. et B. Cassia. 1.0.1., [992. P 168, note E. Loquin.
20 S. Schwebel. Intenlaliollal Arbitratioll : Three Salient Problems, Grotius, 1987, (spéc. p 1 à 60).

12
• En revanche, toujours selon M. Loquin:

( la situation est différente lorsque le contrat principal est nul, en


raison d'un objet ou d'une cause illicite, ou lorsque le consentement
d'une des parties a été vicié. La nullité de la convention principale
n'affecte pas nécessairement la clause d'arbitrage, dès lors que les
conséquences de la nullité restent arbitrables »21.

MM. Boyd et Veeder estiment également que l'autonomie de la clause


compromissoire ne peut pas la sauver puisqu'elle est elle-même atteinte d'une maladie:
la non-existence. « Le principe d'autonomie de la clause compromissoire est alors hors


.,.,
propos »--.

On peut légitimement se demander si la solution retenue serait la même dans


le cas d'une convention d'arbitrage conclue par acte séparée. li va de soi que son
existence ne dépendrait pas matériellement, ni même légalement, de celle du contrat
auquel elle serait liée, puisqu'il s'agirait bel et bien d'un contrat distinct qui pourrait
exister alors même que le contrat principal n'aurait jamais existé juridiquement. Pourtant,

• cette convention conclue séparément deviendrait sans intérêt, voire même sans objet: en
effet, la convention d'arbitrage est établie afin de prévoir le mode de règlement des
conflits qui pourraient survenir à roccasion d'un contrat. Si ce contrat n'existe pas, alors
la convention devient sans objet.

Il faut pourtant souligner que cette position ne fait pas l'unanimité; certains
auteurs estiment que l'on devrait là encore examiner individuellement la question de
l'existence du contrat et celle de la clause23 .

21 E. Loquin, sous ['arrêt L el B. Cassia, note précitée 19.


22 S. Boyd et V.V. Veeder, « Le développement du droit anglais de l'arbitrage depuis la loi de 1979 », Rev.

• arb., 1991, P 209 (spéc. P 221).


23 E. Gaillard & 1. Savage, Fouchard. Gaillard, GoidmaJl0n In/erna/iollal Commercial Arhitralioll, The
Hague, K1uwer, 1990, (spéc. n° 411).

13
• Première conséquence de l'autonomie matérielle de la
compromissoire, l'absence de contagion des vices affectant le contrat principal est un
clause

aspect fondamental de la question. Cependant, une seconde conséquence, que l'on peut
d'ailleurs rattacher à la première, se dégage du principe d'autonomie: la clause peut être
régie par une loi différente de celle à laquelle est soumis le contrat principal.

• 2°) Différenciation des lois applicables à la clause compromissoire et au contrat

Cette question est relativement peu étudiée par les auteurs, même si elle est
toujours rappelée comme autre conséquence du principe d'autonomie dans sa première
signification. Deux situations sont envisageables: les parties peuvent choisir
délibérément une loi différente pour leur clause compromissoire (a) ; mais que se passe-t-
il si elles n'ont rien choisi? (b)

• a) Possibilité de deux lois différentes

La question est de savoir si la détermination de la loi applicable à la validité


de la clause compromissoire est elle-même influencée par la notion de séparabilité. On
peut assez facilement être porté à croire, dans la mesure où l'on considère que la clause
compromissoire est « autonome » par rapport au contrat qui la contient, qu'elle peut tout
à fait être régie par une loi différente de celle qui est applicable à celui-ci. Et, en effet, il
est admis que l'autonomie matérielle permet aux parties de choisir deux lois différentes
pour la substance du contrat et pour la clause d'arbitrage24 . D'après M. Maye(!5, ce

• 24 Par exemple: art. 3121 du Code civil du Québec.


2~ P. Mayer. note précitée 12.

14
• « dépeçage» est légitime selon les tendances modernes du droit international privé. fi est
vrai que la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations
contractuelles dispose~ en son article 3~ § 1~ que «par leur choix., les parties peuvent
désigner la loi applicable à la totalité ou à une partie seulement de leur contrat ».

D'ailleurs un tel « dépeçage» pourrai~ dans certaines circonstances~ être


justifié, notamment si l'on songe à la question de l'arbitrabilité du litige: la loi applicable
à la convention d'arbitrage pourrait bien être plus favorable que la lex contractus. Or, la

majeure partie des Etats cherchent à favoriser, dans la mesure du possible, le recours à
l'arbitrage.

• Malgré cette motivation certaine en faveur du « dépeçage », il convient de


relativiser son importance dans la mesure où ce cas de figure ne présente en réalité que
peu d'intérèt pratique: il est en effet rarissime de rencontrer l~exemple d'une clause
compromissoire qui aurait été soumise par les parties à une loi autre que la lex
contractus. Cette question a pourtant fait l'objet de quelques décisions de justice dans
certains pays, notamment en France 26 • De même, quelques exemples apparaissent dans
des sentences arbitrales 27 •

• Il n'en demeure pas moins que l'application de deux lois différentes peut ne
pas toujours sembler très opportune, voire entraîner des conséquences pour le moins
surprenantes. L'exemple donné par M. M-ayer est en effet tout à fait convainquant:

« Ne serail-il pas curieux de déclarer prescrite "action en nullité du


contrat principal pour dol, absence de pouvoir ou absence de
consentement, cependant que la clause compromissoire serail annulée

Notamment: CA Paris, 25 janvier 1972, QllijolloAguero v. Marcel Laporte, Rev. arb., 1973, P 158, note


26
Ph. Fouchard; Casso I.:n: civ., 14 décembre 1983, EpotIX Convert, Rev. arb., 1984, P 483, note
M.-C. Rondeau-Rivier ~ et : Casso 1ère civ., 3 mars 1992, Sté SOlletex, Rev. arb., 1993, P 273, note P. Mayer.
27 Par exemple: Sentence C.C-l. No. 5730, EifAquitaine v. Orri, J.O.I., 1990, P 1029, note Y. Oerains.

15
• pour la même cause. la prescription prévue par la loi y applicable étant
plus longue ? »28.

Ce second aspect de l'autonomie est donc en retrait par rapport au premier et


présente un intérêt quelque peu limité, d'une part, parce qu'il trouve pratiquement
rarement à s'appliquer, ensuite parce que les solutions auxquelles il conduit sont parfois
surprenantes. Une question, toujours relative à la loi applicable à la clause
compromissoire, éveille en revanche davantage la curiosité: il s'agit du silence des
parties.

• b) Le silence des parnes

La question se pose alors dans ces termes: en cas de silence des parties sur la
loi applicable à la clause compromissoire, la lex contractus s'étend-t-elle à cette clause?
On serait bien évidemment tenté de répondre par l'affirmative puisque, s'agissant d'une
clause d'un contra~ elle devrait en principe être soumise, à défaut de disposition

• contraire, à la loi qui gouverne celui-ci. Pourtant c'est une solution toute différente
qu'adopte la Convention de New York 29 . L'article V.1.(a) de cette convention prévoit
effectivement qu'à défaut d'une indication sur la loi applicable à la clause, celle-ci est
soumise à la loi du pays où la sentence a été rendue, étant précisé que ce cas est limité à
l'aspect de l'exécution de la sentence.

A noter que d'après Yves Derains, qui a observé la jurisprudence


intemationale 30, différentes tendances apparemment inconciliables se dessinent en

28 P M
. ayer. ' .. 12 .
note precitee
29 Convention de New York du 10 juin 1958 sur la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales
étrangères. Les grandes nations commerçantes sont devenues parties à cette convention : Etats-Unis, Russie,

• Japon, France, Suisse, Allemagne. Canada, Royaume-Uni; ainsi que certains pays d'Afrique et d'Amérique
Latine.
30 Y. Derains, « Les tendances de la jurisprudence arbitrale internationale», lO.I., 1993, P 829.

16

matière de droit applicable à la clause compromissoire: les solutions oscillent entre droit
du contrat, droit du lieu de l'arbitrage, et volonté des parties. Mais dans chaque
hypothèse, c'est une plus grande faveur envers la validité de [a clause qui est
privilégiée 31 •

Au terme de cette première approche de l'autonomie matérielle de la clause


compromissoire, il convient de retenir que cet aspect de l'autonomie emporte deux
conséquences, l'une étant d'importance moindre par rapport à l'autre, conséquences qui,
globalement., ne posent pas de difficulté insurmontable. Plus problématique est la
question des limites qu'il convient d'apporter au principe: la clause compromissoire

• n'est pas toujours complètement autonome, ce qui pousse à s'interroger sur sa vraie
nature. Doit-on y voir une simple clause d'un contrat unique, un contrat à part entière qui
se surajoute au contrat principal ou encore un accessoire du contrat principal?

• 31 Voir également: art. J 121 du Code Civil du Québec.

17
• BI Limite au priDeipe d'autonomie: la séparabilité

Nombre d'auteurs dénoncent l'utilisation du tenne « autonomie », et estiment


qu'il existe des fonnules beaucoup plus appropriées pour désigner le principe qui sous-
tend une certaine distance de la clause compromissoire vis-à-vis du contrat principal.
Ainsi M. Mayer a fait sienne l'expression anglaise de « séparabilité »32, tandis que M.
Motulsky parle d' « indépendance »33 de la clause. Dans chaque hypothèse, il s'agit de
souligner que la clause, tout en étant détachable du contrat, dépend parfois de celui-ci.
Ainsi la « séparabilité » se situe à mi-chemin entre la conception qui voit dans la clause

• compromissoire un second contrat à part entière et celle qui se contente d'appréhender la


convention d'arbitrage comme une simple clause d'un contrat unique (1°). Ne devrait-on
pas en définitive renouer avec la notion d'accessoire pour comprendre et cerner la clause
compromissoire? (2°)

1°) Séparabilité: la clause compromissoire comme contrat ou comme simple clause?

• Concevoir la clause compromissoire comme un contrat autonome semble être


la tendance actuelle (a). Néanmoins, force est de constater que la clause compromissoire
est avant tout une clause ! (b).

• 32

J3
P M
. ayer, ' " 12 .
note precItee
H. Motulsky, sous l'arrêt Gosset, Casso civ., 7 mai 1963. Rev. crit. dr. int. priv., 1963, p 615.

18
• a) La clause compromissoire comme contrat alltonome

Lorsque l'on parle de l'autonomie matérielle de la clause compromissoire, il


est en effet tentant de l'envisager comme un second contrat, autonome et distinct, qui se
surajouterait au contrat principal :

« le mot 'autonomie', utilisé à propos des rapports entre la convention


d'arbitrage et le contrat auquel elle se rapporte, donne à penser que ce
sont deux entités dont les sorts ne sont en aucune façon liés »34.

• n y aurait par conséquent, d'une p~ le contrat principal énonçant les


obligations substantielles des parties, et, d'autre part, un « contrat parallèle» contenant
la clause compromissoire. Cette thèse, qualifiée d'artificielle par Pierre Maye~5, trouve
son origine dans des décisions anglaises, notamment dans l'arrêt Bremer Vu/kan 36 où il
est dit que « The arbitration clause constitutes a self-contained contract collateral or
ancillary to the shipbuilding agreement itself ». Elle est également approuvée par une
bonne partie de la doctrine.

• Ainsi cette position est tout à fait celle adoptée par le Juge Schwebel 37 ,
lorsqu'il affirme: « When the parties to an agreement containing an arbitration clause
enter into that agreement, they conclude not one but IWo agreements ». MM. Mustill et
Boyd38 décrivent la clause arbitrale comme « having a life of ifs own, severable from the
substantive contract, and capable of surviving il ». De la même façon encore, Alan
Redfem 39 considère qu'un contrat qui contient une clause d'arbitrage peut être vu comme

34 P M
. ayer, ' ., 12 .
note precItee
35 P. Mayer, sous l'arrêt Cotunav, CA Paris, 28 novembre 1989, Rev. arb., 1990, P 675.
36 Bremer Vu/kan v. South India Shippi"g Corp., [1981] A.C. 909, 980.
37 S. Schwebel, note précitée 20.

• 38 M. Mustill & s.e. Boyel, The Law alld Practice o/Commercial Arhilratioll in England, 2
Butterworths, 1989.
00
ed, London,

39 A. Redfern,« Thejurisdiction of an international commercial arbitrator», 1. [nt'l. Arb., mars 1986, p 22.

19
• constituant « two separate contracts ». Il étaye ensuite sa démonstration en distinguant le
« main or primary contract » du « secondary or 'collateral' contract ».

Il est vrai, comme nous l'avons vu, que la disparition de la clause n'a pas en
principe d'incidence sur l'existence du contrat, et qu'inversement, les vices susceptibles
d'affecter le contrat princiPal n'ont pas forcément pour effet de rendre la clause
compromissoire caduque. Est-ce à dire pour autant qu'il s'agit là de deux conventions
différentes? Oui, à en croire M. Motulsky40 qui explique, après avoir pris soin de
rappeler que la convention d'arbitrage peut être conclue par acte séparé ou bien incluse
au contrat, que l"unité matérielle de «l'acte-instrumentum» n'exclut pas la dualité
intellectuelle des « actes-negotia». Telle est l'argumentation qu'il développe à l'appui de

• sa position :

« 1/ Y a, de toute nécessité. deux conventions .. car, se/on sa rédaction

habituelle, la clause compromissoire entend régler 'les différends


auxquels le présent contrat pourra donner lieu' : c'est asse= dire que le
'contrat' consti/ue l'objet de la clause et que celle-ci se place donc,
logiquement à / 'extérieur ».

• L'auteur évoque ensuite un éventuel « lien de dépendance » entre les deux


conventions qui ferait que celles-ci seraient néanmoins indissociables en principe. Il est
d'ailleurs intéressant de souligner que pour cet auteur, la clause est hiérarchiquement
supérieure au contrat principal pour ce qui est de leur importance respective.

Mais Peut-on réellement se contenter de cette explication? N'est-il pas


quelque peu hâtif et même fictif de voir dans la clause compromissoire un autre contrat
qui viendrait s'ajouter au contrat principal? Car, après tout, la clause compromissoire est
bien une clause !

• 40 H. Motulsky, sous l'arrêt Gosset, note précitée 33 ; position partagée par B. Edelman.

20
• b) La clause compromissoire, cllUlSe d'lin contrat uniqlle

Adam Samuel, dans un article intitulé « Separability in English Law - Should


an Arbitration Clause Be Regarded as An Agreement Separate and Collateral to a
Contract in Which ft Is Contained ? »41, constate que la théorie qui fait de la clause
compromissoire un autre contrat «( collateral contract theory») remplace peu à peu
l'approche traditionnelle qui voit dans cette clause une simple partie du contrat «( one-
contract theory »). Il souligne pourtant que cette dernière n'implique pas que le sort de la
clause compromissoire doive suivre celui des autres dispositions du contrat et que, bien
au contraire, the one-contract theory est parfois plus à même de rendre compte des règles

• qui peuvent exister en Angleterre relativement à cette question.

Certes, on ne peut se contenter, en la matière, d'une VISIon purement


fonnaliste qui se limiterait à constater que matériellement la clause fait bien partie du
contrat. En effet, un même instrumentum peut parfaitement regrouper deux negotia. Mais
encore faut-il que «( l'unité formelle soit démentie par une volonté manifeste de
séparation intellectuelle );~2. Le simple fait que les parties n'aient conclu qu'un seul

• contrat suggère qu'elles voulaient unir les clauses qu'elles y inséraient, sinon pourquoi
n'auraient-elles pas conclu directement deux conventions par acte séparé?

En effet, il faut bien voir que deux negoti~ cela signifie que « chacun
constitue un toul se suffisant à lui même », avec toutes les conséquences qui peuvent en
découler, notamment au niveau de la durée, de l'inexécution, de la nullité de chacune des
conventions. On peut donc admettre qu'un même écrit abrite deux conventions, mais
encore faut-il que l'intention des Parties soit claire à ce sujet. Or, il semble impossible de
traiter la clause compromissoire comme un contrat totalement autonome: son existence
ne se justifie que pour et par le contrat princiPal, puisqu'il constitue l'objet même de la

• 41 A. Samuel, « Separability in English Law - Should an Arbitration Clause Be Regarded as an Agreement


Separate and Collateral to a Contraet in Which It [s Contained ?», 1. [nt'l. Arb, sept 1986, P 95.
42 P Ma
. ... 12.
yer, note precitee

21

clause arbitrale. « On ne peut prévoir le recours à l'arbitrage in vacuo » 43 : la clause se
propose en effet de soumettre à l'arbitrage tous les litiges qui pourraient naître à
l'occasion du contrat; elle ne peut dès lors pas être contractuellement «désintéressée»
par rapport au contrat. On peut même aller plus loin et dire qu'elle constitue « un élément
du régime contractuel voulu par les parties». Ainsi, tout en étant différente des
dispositions substantielles du contrat principal, elle en constituerait un élément à part
entière au même titre que les fonnalités de paiement ou de livraison. Pierre Mayer en
conclut que « la clause compromissoire est donc bel el bien une clause parmi d'autres,
.1 . 44
uans un contrat unique» .

M. Samuel 45, pour sa part, rejette également la « fiction» qui consisterait à

• traiter la clause compromissoire comme un contrat distinct, et insiste sur la nature


spécitique «( distinctive na/ure ») de l'obligation de soumettre les 1itiges à l'arbitrage. En
effet, la clause ne ferait pas partie des «primary obligations» puisqu'elle n'est pas
relative à la réalisation du contrat; mais elle ne constituerait pas non plus une
« secondary obligation », c'est à dire un devoir qu'une partie acquiert si et parce qu'elle
a manqué à une «obligation primaire »46, puisque cette clause impose des devoirs à
chacune des parties. C'est ainsi que l'auteur peut conclure que la clause compromissoire

• appartient à une catégorie distincte des autres termes du contrat.

Le recours à la notion d'accessoire permet d'apporter des solutions


satisfaisantes aux problèmes de qualification qui viennent d'être mis en lumière.

43 P M
. ayer, ' " 12.
note precItee

• 44
45
46
P. Mayer, note précitée 12.
A. Samuel. note précitée 41.
D'après la définition donnée par le Juge Diplock.

22
• 2°) La notion d'accessoire: fondement et limite de la séparabilité

Le tenne « séparabilité )) rend mieux compte de ce que constitue réellement


l'autonomie matérielle de la clause compromissoire: si la clause en question suit parfois
un destin différent du contrat principal, et même lui survit, il n'en reste pas moins qu'elle
dépen~ dans une certaine mesure, de lui. La notion d'accessoire exprime parfaitement
cette ambivalence, et c'est pourquoi elle constitue à la fois le fondement Ca) et la limite
de la séparabilité Ch).

a) Fondement de la séparabilité de la clause compromissoire

• Pierre Mayer est un des fervents défenseurs du recours à la notion


d'accessoire pour expliquer rautonomie matérielle de la clause compromissoire à régard
du contrat principal. Il est certes favorable au principe de séparabilité qu' il juge
« conforme au bon sens et aux prévisions raisonnables des parties» et dont la
reconnaissance s'impose vu « les avantages pratiques» que la séparabilité offre.
Néanmoins, il persiste à affinner que « la séparabilité n'indique que la possibilité de

• séparer lorsque la volonté présumée des parties est en ce sens .. il n'en demeure pas
moins que la clause compromissoire est partie intégrante du contrat, el l'accessoire des
· qu "
d rolts 11 ' 47 .
cree»

Cette position n'est pas isolée: M. Siro1er partage en effet ce point de vue 48 .
Quand bien même la clause compromissoire aurait une « réelle valeur autonome », cet
auteur exclut la qualification d'acte complexe au contrat assorti d'une clause
compromissoire; pour lui, celle-ci est « par nature même accessoire », puisqu'elle ( ne
se conçoit pas en dehors d'un contrat principal, même si elle est contenue dans un acte
distinct ». Il ajoute même que « les qualificatifs 'accessoire' el 'autonome' ne sont donc

• 47 P. Mayer, « L'autonomie de ('arbitre international », Rec. Cours La Haye, 1989, V, t 217. P 327, (spéc.
P 3465.).
48 P • S'ml . , . 8.
1 er, note precitee

23
• foncièrement pas antinomiques, du moins dans ce cas précis ». De la même manière, M.
Mezger, commentant l'arrêt américain Prima Painl 9, invoquait la logique juridique, qu'il
analysait comme une interprétation conforme à la volonté présumée et raisonnable des
parties, pour arriver à la solution suivante: « La convention arbitrale est à considérer
comme un accessoire du contrat de base ». n ajoute:

« Le caractère accessoire de /a convention d'arbitrage spéciale ou

limitée fait d'autant mieux ressortir pourquoi il faut souscrire à /a thèse


de /a dissociation, lorsque /a convention est générale, c'est-à-dire
lorsqu'elle vise (ous les différends susceptibles de naître d'un rapport
contractuel déterminé ou d'un autre rapport juridique »'0.

• C'est dire que « c'est précisément dans cette notion d'accessoire que la
séparabilité trouve ... sonfondemenJ », comme le conçoit par ailleurs M. Mayer').

C'est grâce à la notion d'accessoire que ce dernier explique le phénomène qui


veut que la clause survive à J'annulation du reste du contrat. Il estime, d'une part, que par
leur volonté même, les parties ont souhaité soumettre l'ensemble des litiges ayant trait au

• contrat, y compris ceux concernant sa nullité, à l'arbitrage; il va même jusqu'à écrire


qu'une telle volonté doit être présumée, « sauf clause rédigée de façon particulière et
étroite ». D'autre part, il évoque les conséquences pratiques dommageables si on
permettait à une partie d'invoquer la nullité du contrat dans le seul but de se soustraire à
l'arbitrage. Ainsi, « la clause compromissoire e.\·J séparable, et doit être séparée dans la
mesure précisément où elle contribue à définir le processus à l'issue duquel le sort du
contrat sera réglé, autrement dit dans la mesure où elle est un accessoire des clauses
. .,
substantielles du contrat »'-.

49 PrimaPaint v. FloodandCollklin, 388 U.S. 395 (1967).


so E. Mezger, « Vers la consécration aux Etats-Unis de l'autonomie de la clause compromissoire dans

• l'arbitrage international », Rev. crit. dr. int. priv., 1968, p 25 .


SI P
S2 P
M
. ayer,
M
' .. 12.
note precitee
' .. 12.
. ayer, note precatee

24
• Mais la notion d'accessoire constitue également la limite de la séparabilité de
la clause compromissoire.

b) Limite à la séparabilité de la clause compromissoire

Si la notion d'accessoire explique que la clause compromissoire puisse être


séparable du reste du contrat, elle justifie également sa non-séparabilité.

• En considérant la clause d'arbitrage comme véritablement autonome, on


pourrait légitimement s'interroger sur ce qu'il advient d'elle lorsque le contrat principal
qui la contient matériellement est cédé, ou encore en cas de cession de créance ou de
subrogation. Doit-on lui faire suivre le sort du contrat et par conséquent continuer à
rappliquer à la situation nouvellement créée, ou, au contraire, doit-on la laisser en
dehors, ne pas la transmettre, ni lui faire régir les nouveaux rapports? Cette dernière
option a parfois été retenue S3 . Pourtant, force est de constater que la clause

• compromissoire constitue bel et bien une modalité du contrat, ou même de la créance


cédée, et qu'en conséquence, elle ne saurait dans de telles circonstances être séparée du
contrat principal. M. Mayer en conclut que « le domaine de séparabilité doit donc être
restreint aux hypothèses où le refus de donner effet à la clause, par solidarité avec le
reste du contrat, soustrairait à l'arbitrage des questions que les parties ont voulu y
soumettre »54, et de reprendre les exemples déjà évoqués plus haut d'extinction et de
nullité du contrat principal, ainsi que ceux de la réalisation d'une condition résolutoire ou
la non-réalisation d'une condition suspensive.

• SJ
S4
Voir: Ph. Fouchard, « L'arbitrage et les tiers », Rev. arb. , 1988, P 429
P. Mayer, note précitée 12.
5., (spéc. p 469 et 472).

25
• fi est vrai que la position de M Mayer, qui considère la clause
compromissoire comme un simple accessoire du contrat principal, n'est pas la plus
répandue. D'ailleurs, r Angleterre a même récemment « officialisé» la reconnaissance de
l'existence de deux contrats, puisque la section 7 du 1996 Arbitration Act prévoit que la
clause d'arbitrage« shaH ... he treated as a distinct agreement ».

L'autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat principal


n'est pas absolue, c'est pourquoi d'autres expressions - « séparabilité », par exemple -
sont davantage appropriées 55 . n est évident que la clause d'arbitrage est plus qu'une
simple clause: elle se distingue par sa nature des autres dispositions du contrat. La

• distance qu'elle prend parfois à l'égard de ce dernier peut indiquer qu'elle constitue un
accessoire de celui-ci, ou même un contrat distinct. En réalité, la nature juridique exacte
de la clause compromissoire est devenue presque théorique, tant il est vrai que son
régime est désormais établi par le biais de lajurisprudence.

Tous les développements consacrés par les auteurs au problème de la nature


de la clause compromissoire visent davantage à expliciter une solution de fait, déjà

• existante, qu'à échafauder les fondations d'un régime qui permettrait à la clause
d'arbitrage d'être autonome. Certes, « accessoire» et « contrat» sont des notions fort
différentes, mais que constate-t-on? Le concept d' « accessoire» permet de faire de la
clause compromissoire un élément du contrat principal, mais un élément « séparable» de
ce contrat. Inversement, le recours à la notion de « contrat » fait de la clause un élément
en principe autonome, mais, dans une certaine mesure, « rattaché» au contrat principal..
puisqu'il est généralement admis que l'existence du contrat principal est un préalable
nécessaire à la validité de la clause. C'est dire combien la distinction entre les deux
qualifications est aiguë, et sans doute ni l'" une ni l'autre ne permet d'expliquer
parfaitement en quoi consiste l'autonomie matérielle de la clause compromissoire.

• 5S P. Mayer: « la séparabilité est IIne bonne chose, mais sorlS le "Dm d'autonomie elle est deve11lle lin
mythe conduisant à des so/lIlions caricatura/es et qu'il convient de dénoncer », note précitée 12.

26
• Ainsi~ quelque soit la qualification retenue pour la clause, les conséquences
pratiques qui en découlent sont sensiblement identiques. Ces conséquences, expression
du principe d'autonomie entendue comme autonomie par rapport au contrat principal,
sont largement accueillies à travers le monde.

• 27
• CI RecoDnaissance de l'autonomie matérielle

Le principe d'autonomie de la clause compromissoire, compris comme la


séparabilité de cette clause par rapport au contrat principal, est quasiment unanimement
reconnu aussi bien par la Doctrine que par la Jurisprudence ou même la Loi. Il est
consacré à tous les niveaux, puisqu'aussi bien les Etats eux-mêmes, que les conventions
internationales auxquelles ils prennent part, mais encore les règles et la pratique des
institutions d'arbitrage ont adopté ce principe d'autonomie. Pour la clarté des propos qui
suivent, la reconnaissance de l'autonomie matérielle sera étudiée d'abord à travers les

• décisions tant arbitrales qu'étatiques (l0), puis à travers les textes tant conventionnels
qu'étatiques (2°).

1°) Reconnaissance par les décisions arbitrales et étatiques

Premiers concernés, les arbitres se sont tout naturellement prononcés sur cette

• question d'autonomie. Puisqu'elle est en faveur de l'arbitrage, elle a bien évidemment


reçu un accueil positif, tant au point de vue des normes arbitrales que de la pratique elle-
même (a). Mais, de leur côté, les juges étatiques, à travers leurs décisions, ont également,
dans leur grande majorité, validé l'idée d'un principe d'autonomie matérielle de la clause
compromissoire (h).

a) Les normes et la pratique arbitrales

Les règles élaborées par les institutions arbitrales sont fort explicites, mais
d'une légitimité sans doute relative puisqu'elles sont d'origine privée.


28

Ces règles tiennent leur autorité de l'intention des parties qui s'y réfèrent dans
leur convention d'arbitrage: elles constituent alors une présomption que lesdites parties
ont voulu traiter la clause compromissoire de manière séparée. La Chambre de
Commerce International a été la première institution à reconnaître l'autonomie;
aujourd'hui, rarticle 6, § 4 des Règles de 1998 prévoit: « Unless otherwise agree~ the
Arbitral Tribunal shaH not cease to have jurisdiction by reason of any daim that the
contract is null and void or allegation that it is non-existent provided that the Arbitral
Tribunal upholds the validity of the arbitration agreement. ». Les Règles d'arbitrage de la
CNUDCI, adoptées en 1976, reconnaissent également clairement l'autonomie de la
clause compromissoire (article 21, § 2). De la même manière, des règles élaborées par
des institutions arbitrales des pays de Common Law on~ elles aussi, reconnu ce principe

• d'autonomie.

Pour ce qui est de la jurisprudence arbitrale sur le suje~ là encore la faveur


envers ('autonomie matérielle est très marquée. Plusieurs exemples utiles et détaillés sont
donnés dans l'ouvrage de Stephen Schwebel 56 , auquel il conviendra de se reporter.

La pratique arbitrale n'est pas la seule à avoir reconnu le pnnClpe

• d'autonomie matérielle: les jurisprudences étatiques se sont prononcées dans le même


sens.

b) Jurlsp",dence des Etats

La tendance générale actuelle au niveau étatique est résolument en faveur de


la reconnaissance du principe de séparabilité. En effet, les Etats, de plus en plus
favorables à l'arbitrage international, ont massivement montré leur volonté d'offrir un
maximum d'efficacité à la clause compromissoire, si bien que son autonomie « semble

• S6 S. Schwebel, note précitée 20.

29
• être généralement admise aujourd'hui. aussi bien dans l'Europe continentale et
l'Amérique latine que dans les pays de common law et dans les pays socialistes »57.

Les pays cités ne constituent que des illustrations; la liste donnée n'a donc
pas la prétention d'être exhaustive.

En France, c'est l'arrêt Gosset58 , en date du 7 mai 1963, qui constitue le


précédent en matière d'autonomie matérielle de la clause compromissoire. La Cour
énonce en effet que « en matière d'arbitrage international, l'accord compromissoire, qu'il
soit conclu séparément ou inclus dans l'acte juridique auquel il a trait, présente toujours,
sauf circonstances exceptionnelles, une complète autonomie juridique, excluant qu'il

• puisse être affecté par une éventuelle invalidité de cet acte ». Cette solution a depuis été
réaffirmée à plusieurs reprises. En revanche, la référence aux « circonstances
exceptionnelles» a disparu du dispositif de la Cour. A l'époque où la décision avait été
rendue, ce point avait donné lieu à controverse: M. Motulsky considérait que cette
réserve correspondait à l'hypothèse où les parties auraient volontairement et
59
expressément « soudé» le sort de la clause à celui du contrat , tandis que d'autres
auteurs considéraient qu'il ne s'agissait là que d'une simple précaution rédactionnelle. La

• formule ayant disparu, le débat n'a plus lieu d'être. A noter que cette position
jurisprudentielle n'a pas été confirmée législativement
60

Mais, parmi les pays européens, la Suède est allée encore plus loin. En effet,
la doctrine de la séparabilité y a été fennement affinnée, notamment dans deux décisions
de la Cour Suprême. Il fut ainsi d'abord décidé que la clause arbitrale était valide sans

57 R. David, note précitée 5, (spéc. nO 211).


58 Casso lom: civ., 7 mai 1963, Gosset, I.C.P., 1963, lL 13405, note B. Goldman ~ Rev. crit., 1963, p 615,
note H. Motulsky ~ lD.I., 1964, P 82, note 1.-D. Bredin; Rev. arb. 1963, P 60 ~ D., 1963, P 545, note
1. Robert.
59 H. Motulsky, sous l'arrêt Gasset, note précitée 33.

• 60 Ph. LebouJanger, « Une codification plus explicite de l'arbitrage international? », Rev. arb., 1992, P 357.
L'auteur suggère à l'interprète de se référer au rapport du Premier Ministre sur le projet de Décret (devenu
le Décret du 12 mai 1981).

30

qu'il y ait lieu de tenir compte si le contrat pouvait être mis en œuvre ou pas61. Puis, dans
un second temps62 , l'autonomie fut reconnue même en l'absence de contrat principal
valide!

L'Angleterre a longtemps été beaucoup plus frileuse. Il a déjà été fait


mention de la jurisprudence anglaise sur la question63 , on se contentera donc ici de
rappeler les grandes étapes en renvoyant aux nombreux articles sur le sujet pour de plus
amples détails64.
La première trace du principe de separability peut être trouvée dans rarrêt Heyman v.
Darwins Lld. 65 , mais cela ne concerne pas alors la nullité ab initio. Cette approche
restrictive se retrouve dans d'autres décisions: Dalmia Dairy Industries Lld v. National

• Bank of Pakislan66 et Ashville Investmenls Lld v. Elmer Conlractors Lld


qu'avec l'obiter dictum du Juge Steyn dans rarrêt Paul Smith LletS et surtout rarrêt
d'appel dans l'affaire Harbour Insurunce 69 que r Angleterre avait
67
• Ce n'est

fini par rejoindre la


position communément admise ailleurs en Europe. C'est désonnais officiel avec
radoption du 1996 Arbitration Act. A noter que l'Australie avait adopté une position
similaire 70.

• Pour ce qui est des Etats-Unis, deux décisions fédérales retiennent


particulièrement l'attention. Le premier de ces arrêts, rendu en 1959 dans l'affaire
Lawrence7l , a consacré la thèse de l'autonomie. L'arrêt Prima Paint72 de 1967 a, par la
suite, confirmé cette position, en précisant que la clause d'arbitrage était séparable sauf

61 AB NorrkOpiIJgs Trikafabrik v. AB Per PerssoIJ, NJA 1936, 521.


62 HermanssoIJ v. AB Asfallsbeliigg11ingar, NJA 1976, 125.
63 voir supra l, A, 1°) b).
64 Voir notamment les articles de C. Svemlov, note précitée 14; et de A. Samuel, note précitée 41.
6S Voir références de l'arrêt, note précitée 13.
66 Dalmia Dairy Industries Ltd v. National Bank ofPakistan, [1978] 2 Lloyds Rep. 223.
67 Ashville /nvestmellls Lld v. Elmer Contractors Lld, [1988] 2 Ail ER 577.

68 Voir références de l'arrêt, note précitée 15.


69 Voir références de l'arrêt, note précitée 18.

• 70 QH Tours Lld v. Ship Design & Mallagement Ply Ltd, 105 ALR 371. (1991).
71 Roberl Lawrence Co. Inc. v. Devonshire Fabrics Inc., 271 f. 2d 402 (1959).
72 Voir références de l'arrêt, note précitée 49.

31
• intention contraire des parties73 • Prima Paint a été appliqué dans les décisions
Information Sciences /nc. v. Mohawk Data Science Corp.74 et Peoples Securiry Life
Insurance Company v. Monumental Life /nsurance Company75. Certains Etats américains
n'ont cependant pas adhéré à une position aussi libérale76 .

Ainsi même les pays angl~saxons, pourtant souvent plus en retrait en matière
d'arbitrage, ont fini par adopter le principe d'autonomie de la clause compromissoire par
rapport au contrat principal qui la contient.

Dans le très riche ouvrage retraçant les positions de MM. Fouchard, Gaillard
et Goldman 77 sur les questions de l'arbitrage, il est encore fait mention du Japon 78, de

• l'Allemagne79 et de l'Italie80 , comme exemple de pays qui auraient à l'origine reconnu


l'autonomie par des décisions de justice, avant d'incorporer ce principe dans leur
législation.

D'ailleurs il convient maintenant d'étudier la reconnaissance de l'autonomie


matérielle de la clause compromissoire à travers les textes.


73 Voir sur la question: 1. Périlleux.. « Propos relatifs à l'autonomie de la clause compromissoire », Rev. dr.
int. et dr. camp., 1978, p 185, ainsi que: E. Mezger, note précitée 50.
14 43 NY 2d 198 (1978).
1S 867 F. 2d 809 (1989).
76 J. Périlleux, note précitée 73.
77 E. Gaillard & J. Savage, note précitée 23, nO 388 s. (spéc. nO 402).
78 Sup. Ct., 15 juillet 1965, Kokllsan Kilrzokll Kogyo K. K. v. Guard-Life Corp., 29 Minshu 1061 ; lV Y.B.
Corn. Arb. 122 (1979).
19 Landgericht Hamburg, 16 mars 1977, Ita/ian company v. Germallfirm, III Y.B. Com. Arb. 274 (1978).

• Désormais: art 1040, § 1 ZPO.


80 Corte di Appello of Vernce, 26 avril 1980, S.p.A. Carapelli v. Di/ta Ote/lo Manlovani, VIT Y.B. Corn.
Arb. 340 (1982). Désormais: art 808, § 3 du Code de procédure civile.

32
• 2°) Reconnaissance par les textes conventionnels et étatiques

A l'heure actuelle, la reconnaissance du principe de l'autonomie matérielle de


la clause compromissoire apparaît clairement dans de nombreux textes, tant au niveau
international que national. Ainsi la Loi-Type de la CNUDCI ne laisse aucun doute à ce
sujet (a). Les Etats ont intégré ce principe dans leur législation (b).

a) Les conventions inte'lUltionaJes

Certaines conventions ne laissent aucun doute quant à leur position

• résolument favorable à la séparabilité de la clause compromissoire. Ainsi, l'article 16 § 1


de la Loi-Type de la CNUDCI de 1985, reprenant les termes de r article
Règles sur l'Arbitrage de la CNUDCI, est très claire puisqu'il dispose: « Le tribunal
21, § 2 des

arbitral peut statuer sur sa propre compétence, y compris sur toute exception relative à
l'existence ou à la validité de la convention d'arbitrage. A cette fin, une clause
compromissoire faisant partie d'un contrat est considérée comme une convention
distincte des autres clauses du contrat. La constatation de nullité du contrat par le tribunal

• arbitral n'entraîne pas de plein droit la nullité de la clause compromissoire».

En revanche, d'autres conventions ne traitent pas expressément du problème


de l'autonomie, ce qui fait que la notion n'apparaît qu'implicitement. C'est le cas de la
Convention de New York (10 juin 1958) sur la reconnaissance et l'exécution des
sentences arbitrales étrangères. Il en va de même pour la Convention Européenne sur
l'arbitrage commercial international (Genève, 21 avril 1961). Ces conventions traitent du
problème de la compétence de l'arbitre à statuer sur sa propre compétence, mais n'aborde
pas spécialement le sujet de l'autonomie de la clause compromissoire, même si l'on peut
supposer que l'un suggère l'autre.

• 33
• Par la suite, adoptant ou s'inspirant des règles conventionnelles, les Etats ont
intégré dans leur propre législation le principe d'autonomie matérielle.

b) Législations étatiques

Comme le constate Catherine Blanchin~ l , « certains lextes récents relatifs à


l'arbitrage international restent méfiants à l'égard de /a clause compromissoire, dont ils
consacrent juste la Iicéité de principe, sans admettre l'autonomie ». Ainsi certains pays
sont toujours très en retrait concernant la reconnaissance d'un principe d'autonomie de la

• clause compromissoire82 • Mais il est vrai que la tendance actuelle est davantage en faveur
de la protection de la convention d'arbitrage. [ci encore, il s'agit de donner un simple
aperçu non exhaustif des pays ayant consacré le principe d'autonomie matérielle au sein
de leur législation.

En Europe: L'article 1697, § 1 et 2 du Code Belge (loi du 4 juillet 1972)


consacre clairement le principe de séparabilité. De la même façon, l'article 1053 du Code

• de Procédure Civile des Pays-Bas (dans sa version de 1986) dispose que «an arbitration
agreement shall he considered and decided upon as a separate agreement ». La loi
fédérale suisse sur le droit international privé du 18 décembre 1987 confirme elle aussi
l'autonomie de la clause compromissoire, acquise depuis longtemps en jurisprudence
dans ce pays: l'article 178, § 3 déclare en effet que « la validité d'une clause
compromissoire ne peut être contestée sur le fondement que le contrat principal peut ne
pas être valide». En Espagne, là encore, l'article 8 de la loi de 1988 sur l'arbitrage
prévoit que le fait que le contrat soit nul, inexistant ou expiré n'invalide pas
nécessairement la clause d'arbitrage qui s'y rapporte. L'Italie, avec la loi du 5 janvier
1994, tout comme la Suède avec le 1999 Swedish Arbitra/ion Act (Sec. 3), vont dans le

• lU
82
C. Blanchi~ note précitée 1, (spéc. p 20).
Par exemple: l'Arabie Saoudite, l'Etat des Emirats Arabes Unis, la Colombie.

34

même sens. Fort significatif est le ralliement réalisé solennellement par l'Angleterre
dans la Section 7 du 1996 Arbitra/ion Ac/ qui va très loin en affirmant que l'arbitration
agreement doit être traité« as a distinct agreement ».

Au Canada, la Province du Québec consacre l'autonomie de la clause


compromissoire, aussi bien en matière interne qu'internationale, à l'article 2642 du Code
civil du Québec.

Dans les pays arabes, les nouvelles lois sur l'arbitrage en Algérie, Tunisie et
Egypte sont elles aussi favorables à l'autonomie matérielle de la clause.

• Cette tendance se retrouve encore en Amérique latine: on peut citer


notamment l'exemple du Brésil avec sa loi sur l'arbitrage du 23 septembre 1996 (art. 8) ;
ou encore la loi mexicaine du 22 juillet 1993.

La majorité des Etats est favorable à l'autonomie de la clause compromissoire


en matière d'arbitrage international: certains pays, notamment la France, ne
reconnaissent pourtant toujours pas le principe en droit interne.

• Le principe de séparabilité est donc accepté aussi bien par les Etats, à travers
leur jurisprudence, l'adoption de convention internationale ou leur propre législation, que
par les parties qui soumettent leurs litiges à l'arbitrage et admettent ainsi les règles
élaborées par les institutions arbitrales, tout comme la pratique observée par les arbitres.
C'est ce qui permet à Catherine Blanchin d'affirmer que « l'autonomie de la clause
compromissoire est donc un principe d'une valeur quasi universelle »83•

• 83 C. Blanchin, note précitée ., (spéc. p 17 s.).

35

Cependant, force est de constater que le principe d'autonomie ne fait pas
l'unanimité en ce qui concerne le second sens qui a été assigné à la notion: en effet,
l'autonomie de la clause compromissoire à l'égard de toute loi étatique est beaucoup plus
lourde de conséquences et soulève de nombreuses questions théoriques, ce qui fait qu'elle
est considérablement moins bien accueillie que l'autonomie matérielle dont il a été
question jusqu'ici.

• 36
• 11.- L'autonomie de la clause compromissoire par rapport
à toute loi étatique

Il s'agit cette fois d'une conception beaucoup plus novatrice du principe


d'autonomie qui diffère totalement de l'approche traditionnelle: il n'est plus question du
contrat principal, mais de la soumission de la norme à un droit.

• Jusqu'ici la loi applicable à la clause compromissoire était déterminée par la


méthode des conflits de lois; on pouvait alors juger de la validité et de l'existence de la
clause en question, grâce à la loi ainsi désignée. C'est désormais une règle matérielle
relative à la clause en matière internationale qui a été adoptée, notamment par la France.
Il s'agira d'établir la nécessité et le contenu de cette règle. (A)

• Mais, sauf à admettre le concept d'un « contrat sans loi », la clause


compromissoire ne peut être laissée sans contrôle. Ainsi ce second aspect de l'autonomie
trouve ses limites dans l'appréciation de la volonté des parties, mais aussi, et surtout,
dans le respect de l'ordre public international. (8)

Il reste que l'autonomie de la clause compromissoire par rapport à toute loi


étatique est bien moins reconnue que l'autonomie par rapport au contrat principal. Sans
doute la France est-elle le seul pays à consacrer pleinement cette conception, tandis que
certaines décisions arbitrales sont elles aussi dans ce sens. (C)

• 37
• AI Signification de l'autonomie de rattachement

L'adoption d'un principe d'autonomie de la clause compromissoire à régard


de toute loi étatique marque l'abandon de la méthode des conflits de lois au profit d'une
règle matérielle (l0). Encore fauL-iI s'interroger sur le contenu de la règle matérielle ainsi
dégagée (2°).

1°) Abandon de la méthode conflictualiste

• La méthode confl ictualiste (a) telle qu'elle existe encore dans de nombreux
systèmes pose, en effet, certains problèmes; problèmes qui ont parfois justifié son
abandon au profit d'une règle matérielle jugée simplificatrice par certains auteurs (h).

a) Inconvénients de la méthode conj1ictua/iste

• La méthode conflictualiste, qui pennet de trouver la loi applicable, est la plus


ancienne qui existe et reste encore, il faut le préciser, celle qui est le plus communément
rencontrée en droit comparé84 . En réalité, la quasi totalité des pays ayant reconnu
l'autonomie matérielle de la clause compromissoire se contente de la méthode classique
des conflits de lois.

La méthode consiste à rechercher le système juridique avec lequel un rapport


de droit précis entretient les liens les plus étroits, afin de déterminer quelle sera la loi
applicable à ce rapport. Mais une telle détennination concernant la clause

Par exemple: art. 1074 du Code de procédure civile néerlandais; art. 61 de la loi espagnole 36/1988 sur


84

l'arbitrage du 5 décembre 1988; sec. 48 du 1999 Swedish Arbitratioll Act; mais aussi en Angleterre:
Channel Tunnel Group Ltd v. Balfour Beatty Construction Ltd, [1992] 2 Lloyd's Rep. 291, puis le 1996
Arbitration Act.

38
• compromissoire n'est pas sans poser certains problèmes, que ce soit pour trouver quelle
catégorie légale est en cause, ou pour choisir les points de rattachement (connecting
factors).

S'agissant de la catégorie légale, force est de constater que divers éléments


variés, tels que la capacité des parties, leur pouvoir de signature, la forme ou encore le
contenu de la clause d'arbitrage, viennent parasiter l'identification précise du problème.

Mais la difficulté essentielle vient du fait que la clause compromissoire


semble se trouver à mi-chemin entre procédure arbitrale et contrat principal. En effet,
rhésitation est possible lorsqu'il s'agit de caractériser la clause d'arbitrage: est-elle à

• rattacher au fond ou à la forme? Est-elle « procedural » ou « substantive» ?

Dans un premier temps, la clause compromissoire a été rattachée à la loi


gouvernant la procédure arbitrale. En effet, un courant de pensées influencé par la vision
anglo-saxonne de la procédure, plus large que l'acceptation communément admise, avait
caractérisé la clause d'arbitrage comme étant procédurale. D'ailleurs cette position avait
été confirmée par les travaux de l'Institut de Droit [ntemationaI 85 . Mais différents

• arguments rendaient cette solution assez maladroite dans de nombreuses hypothèses:


notamment lorsque la loi gouvernant la procédure arbitrale n'était pas celle du lieu de
l'arbitrage, ou encore lorsque les parties préféraient ne pas décider de la loi applicable à
la procédure de façon définitive, réservant ainsi aux arbitres une marge appréciable de
flexibilité et de possibilité d'agir au cas par cas. Mais l'argument déterminant était celui
selon lequel, bien que concernant un aspect de la procédure, la clause d'arbitrage n'en
demeurait pas moins un contrat. C'est ce qui conduisit les auteurs et les cours à
abandonner l'assimilation de la clause à la procédure arbitrale.

• 85 Par des résolutions de 1957 et 1959, cet Institut avait décidé que la validité de la clause compromissoire
devait être soumise à la loi du lieu de l'arbitrage, faisant ainsi de la clause un élément de la procédure
arbitrale.

39

Mais, même en retenant comme catégorie légaje celle du contrat principal, les
hésitations sont toujours de mise. Si les parties ont décidé de la loi devant s'appliquer à
leur contrat, rien ne permet d'affirmer que cette même loi devrait régir la clause
d'arbitrage, puisque celle-ci est fort différente dans son objet du contrat qui la contient.
Dans l'hypothèse où les parties n'auraient rien prévu, la méthode des conflits de lois
invite à rechercher de quel système légal l'accord litigieux est le plus proche. Mais
encore faut-il savoir si c'est le contrat principal ou la clause compromissoire qui doit
entretenir les liens les plus étroits avec le système légal envisagé. La tendance générale
pousse à considérer que la loi du contrat principal pourrait intluencer celle applicable à la
clause d'arbitrage. C'est notamment le cas lorsque les parties ont choisi un pays dont la
loi serait celle qui gouvernerait leur contrat et qui serait en même temps le lieu choisi

• pour l'arbitrage. La difficulté est bien plus grande si cette identité de pays, et donc de loi,
n'existe pas.

Ainsi le choix de la loi applicable à la clause compromissoire ne peut se


contenter d'être guidé uniquement par la loi applicable au contrat principal. L'adoption
pure et simple de la lex contractus non seulement va à l'encontre de l'autonomie de la
clause dans sa première signification, l'autonomie matérielle, mais, en plus, constitue une

• négation de l'idée de neutralité qui prédomine au choix de l'arbitrage comme mode de


règlement des contlits 86 .

Le problème n'est pas moins épineux s'agissant des points de rattachement


Si l'on retient la loi du lieu où la clause compromissoire a été conclue, il est évident
qu'elle n'aura pas un lien de connexité révélateur avec la situation, puisque le lieu de
conclusion d'un contrat peut parfaitement être le fruit du hasard. De même, le lieu du
siège de l'arbitrage a parfois une faible valeur localisatrice. n n'en reste pas moins que
c'est bien souvent ce facteur de rattachement qui est retenu, non plus par rapport à la
nature procédurale de la clause, mais bel et bien comme point de rattachement le plus
révélateur.

• 86 E. Gaillard, sous l'arrêt Da/ico, note précitée 2.

40

En définitive, aucune solution arrêtée ne se dégage réellement, et René David
constate d'ailleurs, à propos des règles de conflit de lois applicables à la clause
compromissoire, qu'il « n'apparaît pas qu'en aucun pays la jurisprudence applique des
principes bien définis .. les formules que l'on trouve à ['occasion dans les arrêts ... ne
constituent pas autre chose qu'une motivation jugée opportune pour justifier la solution
donnée dans l'espèce »87. C'est dire combien la méthode conflictualiste entraîne des
soucis de prévisibilité. En effet, et Phocion Francescakis le souligne parfaitement dans
son article sur «Le principe jurisprudentiel de l'autonomie de l'accord
compromissoire»88, cette méthode traditionnelle présente deux inconvénients majeurs.
D'une part, les règles sur le choix de la loi interne applicable ne sont pas les mêmes d'un
Etat à l'autre. D'autre part, la diversité des lois internes en la matière est à la fois

• évidente et problématique.

En définitive, les parties, confrontées à la méthode traditionnelle des conflits


de lois n'arrivent pas à obtenir toute la sécurité nécessaire qu'elles seraient en droit d'en
attendre. L'adoption d'une règle matérielle est-elle dès lors plus avantageuse?

• b) Mé,ites de l'adoption d'une ,ègle matérielle

On pourrait se contenter de reprendre les mots de Mme Gaudemet-Talion,


dans le commentaire qu'elle fait de l'arrêt Dalico rendu par la Cour de cassation
française en 1993 89 :

« On pourra se réjouir de la mise à l'écart de la règle de conflit en

rappelant que les spécialistes de l'arbitrage ont souvent dénoncé la

K7 R. David, note précitée 5, (spéc. nO 242).

• 88 Ph. Francescakis, « Le principe jurisprudentiel de l'autonomie de l'accord compromissoire après l'arrêt


Hecht de la Cour de cassation », Rev. am., 1974, p 67.
Ir.) Casso lm: civ., 20 décembre 1993, Dalico, Rev. arb., 1994, P 116, note H. Gaudemet-Talion.

41

méthode conflictualiste comme étant compliquée et inadaptée en
matière d'arbitrage international. Adopter une règle matérielle de droit
international peut être considérée comme une simplification ».

n es.t vrai que la création de règles matérielles pennet d'apporter une solution
directe aux situations litigieuses, par l'application d'une norme substantielle, sans le
détour qu'implique la mise en œuvre de la méthode des conflits de lois. Sécurité et
prévisibilité en sortent renforcées, ce qui correspond d'ailleurs tout à fait aux souhaits des
parties. Comme l'explique Catherine Blanchin :

« la solution de type substantiel correspond à l'attente des opérateurs

• du commerce international et la pratique arbitrale révèle l'assentiment


donné par les tribunaux arbitraux à une réglementation proprement
internationale de la clause compromissoire »90.

La règle matérielle permet indéniablement d'échapper aux particularismes


des législations nationales, et elle « a le mérite d'accentuer le détachement de l'arbitrage
international du carcan des droits internes, trop peu nombrelL"C encore à ne pas s'être

• développés qu'enfonction des préoccupations d'ordre interne »91.

C'est une chose d'approuver l'adoption d'une règle matérielle concernant la


validité de la clause compromissoire, encore faut-il savoir quel est le contenu exact de
cette règle.

• 90
91
C. Blanchin, note précitée l, (spéc. p 28).
Y. Derains, obs. sous la sentence C.C.1. rendue en 1991 dans l'affaire No. 6840 : J.D.I., 1992, P 1030.

42

2°) Contenu de la règle matérielle

Le second aspect du principe d'autonomie de la clause compromiSSOire,


consacré en France par une règle matérielle, signifie que celle-ci est autonome par
rapport à toute loi étatique (a). Mais peut-on réellement s'affranchir de toute référence à
un droit étatique? (b)

a) Autonomie de la clause pa, 'appon à toUle loi étatique

Cette forme d'autonomie est très différente de celle évoquée dans la première
partie de cet exposé concernant l'autonomie de la clause compromissoire à l'égard du

• contrat principal. D'ailleurs M. Synvet doute « qu'il soit de bonne méthode de regrouper
sous un même concept juridique deux séries de règles qui, en réalité, sont nettement
différentes »; il ajoute en effet que « le glissement sémantique est dangereux dans la
mesure où il affaiblit la conscience de la nécessité d·une véritable réflexion avant que
d'accueillir ce qui constitue une nouvelle règle »92.

En effet, l'autonomie ainsi comprise, dans cette seconde acception., rend

• beaucoup mieux compte de son étymologie grecque qui signifie « faculté de se régir par
ses lois propres». Il s'agit de l'aspect le plus moderne, le plus
l'autonomie de la clause compromissoire.
« ambitieux »93, de

Telle que conçue par les tribunaux français, cette «nouvelle» autonomie
marquerait un affranchissement de la clause vis-à-vis des lois nationales: cet acte
juridique serait ainsi détaché de la théorie des conflits de lois, et il n'y aurait pas lieu de
rechercher si une loi, française ou étrangère, lui est applicable. Faut-il pour autant voir
dans la fonnulation de cette règle matérielle la consécration d'un « principe de validité »?

• 92
93
H. Synvet, sous l'arrêt Behar, CA Toulouse, 26 octobre 1982, J.O.I., 1984, P 603.
P. Mayer, sous rarrêt Cotrmav, note précitée 35.

43
• L'expression a, en effet, été utilisée dans certaines décisions françaises, mais
n'a heureusement jamais été adoptée par la Cour de cassation94 .
comprendre, et même d'approuver, la reconnaissance d'un« principe de licéité» qui met
n est aisé de

incontestablement la clause à l'abri des aléas des droits internes et de leur plus ou moins
grand libéralisme à régard de l'arbitrage: c'est grâce à ce principe que la France a fait
abstraction de l'interdiction de l'arbitrage dans les actes mixtes qui existe en droit
95
inteme • En revanche, la reconnaissance d'un «principe de validité» de la clause
compromissoire est toute autre et a de quoi choquer.

Ainsi, Emmanuel Gaillard met parfaitement en lumière l'ambiguïté que le


terme de « validité» peut induire:

• « la notion de validité, jointe à l'idée qu'il n y a pas lieu de recourir à

une loi étatique quelconque, peut laisser entendre que la convention


d'arbitrage ne serait soumise à aucune norme, qu'elle ne tirerait sa
validité que d'elle-même, ce qui serait évidemment absurde »96.

Mme Gaudemet-Talion affinne de son côté qu' « un acte ne peut être 'en

• principe valable' »97. Un acte ne peut être effectivement « valable» que s'il remplit des
conditions de fond et de forme établies par une norme forcément première par rapport à
1ui. Il est vrai que la thèse du « contrat sans loi» soulève bien des objections sur le plan
théorique. De surcroit, son éventuelle consécration par un tribunal donnerait lieu à un
curieux phénomène98 : « le contrat cesse d'être sans loi au moment même où le tribunal
énonce qu'il est valable indépendamment de toute loi étatique ». Cette seule réaction de
la part d"'lm juge crée en effet une fonne de norme juridique spécifique à un système de
droit.

94 Voir notes sous Cotllnav et Dalico, notes précitées 35 et 89.


9S Interdiction issue de la combinaison des articles 2061 du Code civil et 631 du Code de commerce.
96 E. GaiJ1ard, sous l'arrêt Da/ico, note précitée 2.

• 97 H. Gaudemet-Tallon, sous l'arrêt rendu dans l'affaire Dalico, CA Paris, 26 mars 1991, Rev. arb., 1991,
P 456.
98 P. Mayer, sous l'arrêt Colunav, note précitée 35.

44
• Outre les objections théoriques, on peut également se demander dans quelle
mesure une réelle excl usion de tout droit étatique serait parfaitement appropriée sur le
plan pratique.

b) Nécessité résiduelle des lois étatiques

M. Synvet reste dubitatif sur l'idée d'une réelle indépendance matérielle: (( fi


nous semble aventureux d'affirmer en termes généraux / 'autonomie de l'accord

• compromissoire par rapport à toute loi étatique »99. ns'explique de la sorte:

( Il Y a certes des hypothèses où /a soustraction de la clause


compromissoire à une règle prohibitive interne est bienvenue. Alais
l'exclusion totale de l'intervention des lois nationales est, en l'état
actuel des choses. difficilement concevable ».

• Cette vision des choses est partagée par d'autres


systématiquement les exemples donnés pour illustrer cette position sont les mêmes. Sont
ainsi évoqués :
auteurs 100, et

- les vices du consentement, quand ceux-ci affectent à la fois le contrat principal et la


clause compromissoire ;

- l'arbitrabilité: ( la question invite à s'interroger sur les limites de l'autonomie de


l'accord compromissoire lorsque, s'agissant de 1'orbitrabilité même du Iiiige, il est
difficile de faire abstraction de la loi applicable au contrat principal» sauf à recoMaître

• 99H. Synvet, sous l'arrêt Behar, note précitée 92.


100Voir notamment les notes sous l'arrêt Menictlcci, CA Paris, 13 décembre 1975: Rev. arb., 1977, P 147,
note Ph. Fouchard; et : Rev. crit., 1976. p 507, note B. Oppetit.

45

l'existence d' « une autre règle matérielle qui admette, en matière internationale, que les
dispositions d'ordre public dans l'ordre interne cessent de l'être dans J'ordre
international »10 1.

- et surtout, les questions de capacité et pouvoir: c'est en effet sans doute en cette
matière que la doctrine a manifesté la plus grande réticence à raisonner exclusivement en
termes de règles matérielles 102 •

Dans toutes ces hypothèses, on se demande en effet quelle sanction pourrait


être apportée, faute d'un système de référence. Comme le remarque Eric Loquin lO3 , « en
l'absence de règles matérielles régissant ces questions, la solution la plur; raisonnable est

• de revenir pour celles-ci au mécanisme normal des conflits de lois )).

Ces doutes exprimés à l'encontre de l'exclusion de toute loi étatique suffisent


à provoquer la méfiance de certains commentateurs à l'égard de la règle matérielle dont il
est question. Ainsi Bruno Oppetit écrivait dans sa note sous l'arrêt Meniccuci l04 : « c'est
sans doute dans ces conséquences extrêmes, et peu satisfaisantes, que la règle ainsi posée
appelle des réserves )). Il poursuit en se demandant si une telle autonomie, non plus à

• l'égard du contrat principal, mais à l'égard du droit, ne s'éloigne pas de ce qui semble
être la vocation fonctionnelle de la règle qu'il estime être d'assurer l'efficacité de la
clause conformément à la volonté des parties.

Beaucoup moins critique, Emmanuel Gaillard considère que les problèmes


évoqués à propos du consentement, de l'arbitrabilité du litige, de la capacité et du
pouvoir de conclure la clause, peuvent être tout à fait résolus en faisant appel non plus à
une quelconque loi étatique, mais PaT référence aux exigences de l'ordre public

P. Level, note sous l'arrêt Hecht, Casso Iên: civ., 4 juillet 1972, Rev. crit. dr. int. priv., 1974, p 82.


101

102 H. Synvet, sous l'arrêt Galoil, CA Paris, 17 décembre 1991, Rev. am., 1993, p 281 (spéc. P 295).
103 E. Loquin, sous ('arrêt Menicllcci, CA Paris, 13 décembre 1975, J.O. L, 1977, P 106.

104 B. Oppetit, sous l'arrêt Menicucci, note précitée 100.

46

international 105, ce qui pousse à s'interroger plus avant sur les limites de la règle
matérielle dont il est question.

En effet, le principe d'autonomie de la clause compromissoire par rapport à


toute loi étatique, d'après les solutions retenues par la jurisprudence française, comporte
deux limites.

• lOS E. Gaillard, sous l'arrêt Da/ico, note précitée 2.

47
• BI Limite au principe d'autonomie: le contrôle de la clause

L'existence et la validité de la clause compromissoire sont « contrôlées» d'un


106
double point de vue • Il faut d'abord tenir compte de la volonté commune des parties,
tout en sachant que si cette volonté est nécessaire, elle n'est pas suffisante (10). fi faut
ensuite vérifier que l'ordre public international est respecté (2°). Cette seconde question
demandera de plus amples développements.

• 10) Référence à la volonté commune des parties

L'arbitrage repose sur le consensualisme, la clause compromissoire


n'échappe pas à cette règle (a) ; pourtant la référence à la volonté des parties ne saurait
être suffisante Cb).

a) Nécessité de la volonté commune des parties

• Le processus même de l'arbitrage repose sur un principe de consensualisme.


En effet, les parties font le choix et la démarche de soustraire leurs litiges aux instances
étatiques pour les soumettre à une justice privée. Elles peuvent s'entendre par la suite sur
l'aspect qu'elles souhaitent donner à chaque étape de l'arbitrage: cela concerne aussi
bien l'identité des arbitres, que les règles qui régiront la procédure, ou encore le droit qui
va être appliqué au fond du litige. Ainsi l'arbitrage est à la fois issu de la volonté des
parties et soumis à celle-ci: les parties initient le procédé (par la conclusion d'une clause
d'arbitrage) et l'organisent. De manière générale, on peut constater, avec M. OPPeti~

• 106 C.Blanchi~ note précitée 1, (spéc. P 31). Concernant la limite relative à l'ordre public, voir: 1.-8. Racine,
L'arbitrage commercialinternatiolla/ et J'ordre public, Paris, L.G.DJ., 1999, (spéc. P 183 s.).

48

qu' « en matière d'arbitrage le domaine de la loi régresse constamment au bénéfice de
celui de la volonté» 107.

Il s'agit en réalité d'une tendance moderne qui se retrouve dans de nombreux


domaines juridiques, mais il est vrai que cette inclinaison est exacerbée dès lors que l'on
est en présence d'une relation commerciale internationale. En effet, il est désormais
établi que le monde des affaires se concilie mal avec une réglementation étendue et
rigide: ce type de relations requiert au contraire une marge suffisante de liberté, notion
fondamentale dans le secteur du commerce. Ceci est d'autant plus vérifié au niveau
international, puisqu'il faut alors composer avec des parties parfois originaires d'Etats
peut-être plus libéraux dans leur réglementation.

• C'est ainsi que M. Edelman 108 a pu parler de l' « Internationalisation de la


volonté », montrant suffisamment par cette expression que la question de la volonté prend
une dimension différente lorsque l'on quitte le niveau strictement étatique. n est
d'ailleurs intéressant de voir qu'il rattache, dans son article, l'internationalisation de la
volonté à l'accord compromissoire, estimant qu'elle est « révélée dans sa plus grande
extension» dans celui-ci.

• Même à admettre que le facteur de la volonté est fondamental et


incontournable, est-il pour autant suffisant? Peut-on voir dans l'autonomie prise dans sa
seconde acception « une pure norme contractuelle, se suffisant à elle-même » 109 ?

• 107
108
109
B. Oppetit, sous l'arrêt Hechl. Casso 1èn: civ., 4 juillet 1972. 1.D.I., 1972, P 843.
B. Edelman, « Accord compromissoire et internationalisation de la volonté ». lep, 1972. n° 2487.
B. Goldman, sous l'arrêt Hecht, Casso I~ civ., 4 juillet 1972. Jep. 1971, nO 16927.

49
• b) IlISIlfrlSllnce de la vololllé cOmmllne des parties

Il est certain que l'on ne peut se contenter de relever que les parties sont
tombées d'accord sur le principe de l'arbitrage en incluant une clause compromissoire
dans leur contrat. Quelque soit la valeur que l'on semble aujourd'hui accorder à
rautonomie de la volonté, elle ne peut, à elle seule, fonder rexistence et la validité de la
clause d'arbitrage. Ce serait là lui octroyer une importance que la majeure partie de la
doctrine ne semble pas prête à lui reconnaître. On retrouve, en effet, les oppositions
formulées à rencontre du « contrat sans loi». Un contrat ne peut exister en soi, per se.
Pour que son existence soit constatée, et son autorité reconnue, encore faut-il que ce

• contrat, en tant que processus de rencontre des volontés créatrice de droits et


d'obligations, soit « permis )), « autorisé », par une nonne qui lui est antérieure et justifie
sa légitimité: « laforce obligatoire du contrat ne se conçoit pas sans l'appui d'une règle
extérieure aux contractants, qui la consacre» 110. Mais peu importe après tout que cette
norme extérieure soit de nature étatique. Pourquoi ne pas reconnaître r efficacité de
l'autonomie de la volonté par le biais de normes internationales?

• M. Edelman semble consacrer cette position lorsqu'il dit que:

« la dernière instance juridique n'étant rien d'autre que l'ordre public,

la référence à cet ordre public est l'exacte mesure de l'autonomie de la


volonté - c'est ainsi que l'ordre public international détermine
l'autonomie de la volonté en droit international privé »111•

• 110
III
B. Goldman, sous l'arrêt Hecht, note précitée 109.
B. Edelman, note précitée 108.

50
• Cela invite tout naturellement à étudier à présent le second poste de contrôle
dont il faut tenir compte lorsque l'on traite de 1~ autonomie de la clause compromissoire
par rapport à toute loi étatique: l'ordre public international.

2°) Limite fixée par I~ ordre public international

L'affirmation selon laquelle l'existence et la validité de la clause

• compromissoire seraient acquises sous réserve du respect de l'ordre public international


oblige bien évidemment à s'interroger sur cet ordre public en question: est-ce un ordre
public international étatique ou bien un ordre public purement international,
transnational? (a) Est-ce un ordre public d~éviction ou de direction? (b)

a) Ordre public internatiolUll étatique ou transnational?

• « Ordre public international étatique» : à quoi peut bien correspondre cette


notion dont les éléments paraissent, au premier abord, totalement antithétiques? Chaque
Etat soumet en dernière instance les questions d~existence et de validité des droits et
obligations au contrôle de rOf(ire public, norme supérieure, pas nécessairement écrite,
mais dont l'autorité ne fait a priori aucun doute. Les règles d'ordre public sont
intimement liées aux lois et à la politique du Pays considéré: plus celui-ci est libéral, plus
l'ordre public qu'il adoptera et fera respecter sera « allégé». Mais, et le développement
du commerce international en est un parfait exemple, la matière « internationale» diffère
de la matière strictement « interne». Pour composer avec les autres Etats, il est sans
doute bienvenu de se montrer plus libéral, dès lors qu'il s'agit de relations avec des
parties issues de pays tiers. Et, dans ce sens, on peut facilement admettre que chaque Etat

• juxtapose à son ordre public visant l'ordre interne, un ordre public destiné au niveau

51

international. Il n'en demeure pas moins que cet ordre public international est étatique,
puisqu'il est propre à cet Etat en particulier, il lui est spécifique et ne se retrouve pas à
l'identique dans les autres Etats.

Al'opposé, un ordre public réellement international supposerait que les


limites qu'il pose, ou induit, seraient communes à tous les Etats, et qu'elles
s'imposeraient à e~ tout en leur étant extérieures. C'est dans ce sens que l'on peut dire
qu'il s'agirait d'un ordre public «transnational », puisqu'il s'affranchirait des
particularités étatiques, et existerait en soi sans passer par le truchement de chaque pays.
Mais force est de constater que le contenu de cet ordre public reste pour le moins ambi~
c'est du moins ce que relève Mme Gaudemet-Tallon dans sa note sous l'arrêt Dalico 112

• lorsqu'elle affirme:

« l'ordre public internationalfrançais (donc étatique) est susceptible de


réaction, par exemple, si l'objet du litige n'est pas arbitrable ou si le
consentement des parties a été vicié ... Quant à l'ordre public
réellement international, si c'est lui que la Cour Suprême a voulu
désigner, quel serail son contenu s'agissant de la clause

• compromissoire? Qu'apporterait-il de plus que l'ordre public


. . lfirançals!»
lnternatlona .") 113
.

Lorsqu'il s'interroge sur la nature des nonnes au regard desquelles les


juridictions françaises doivent apprécier l'existence et la validité de la convention
d'arbitrage, Emmanuel Gaillard" 4 insiste également pour ne voir dans l'ordre public
invoqué que des « exigences minimales de justice » propre à la France, donc étatiques:

« L'exclusion de toute 'loi étatique' ne doit pas faire perdre de vue que

l'existence et la validité de la convention d'arbitrage s'apprécie, pour

• 112
113
H. Gaudemet-Tallon, sous l'arrêt Dalico, note précitée 89.
Voir également H. Synve~ sous l'arrêt Gatoil, note précitée 102.
114 E. Gaillard, sous l'arrêt Dalico, note précitée 2.

52

le juge français, au regard de normes de source française, seules les
'lois internes', y compris la loi interne française, susceptibles d'être
désignées par une règle de conjlit, étant exclues par cette démarche ».

ns'agirait donc bien d'apprécier la clause au regard de règles, certes adaptées


aux exigences du commerce international, mais néanmoins de source étatique.

Pris dans ce sens, l'ordre public international a souvent été considéré comme
incluant la limite des « règles impératives» d'un droit donné. En effet, dans rarrêt
Dalico, la Cour de cassation française, outre la limite de l'ordre public international,
prévoyait la réserve des « règles impératives de droit français », et nombre d'auteurs se

• sont interrogés par la suite sur le contenu qu'il convenait de donner à cette expression.
Certains ront assimilée à ce qu'on appelle les« lois de police »115, Beaucoup ont
considéré qu'elle faisait simplement double emploi avec la mention de l'ordre public 116,
allant parfois jusqu'à dire que :

« cette redondance, qui n'a d'autre fonction que celle de rassurer ceux

qui verraient dans cette jurisprudence une tentative de la Cour de

• cassation de se faire l'oracle d'un droit véritablement transnational,


pourra être abandonnée à l'avenir au profit de la seule notion d'ordre
" mternatIOna»
puhlIC . 1 117.

L'ordre publ ic international, comme poste de contrôle de l'existence et de la


validité de la clause compromissoire, serait donc de source étatique ~ reste à savoir
maintenant s'il s'agit là d'un ordre public de direction ou d'un ordre public d'éviction.

• Ils J.-M. Talau, sous l'arrêt Abc/el Aziz, CA Paris, 24 mars 1995, Rev. arb., 1996, P 259.
116 Notamment: H. Gaudemet-Tallo~ sous l'arrêt Dalico, note précitée 89.
117 E. Gaillard, sous l'arrêt Dalico, note précitée 2.

53
• b) O,dre public de direction ou d'éviction?

Les auteurs l18 sont tombés d'accord pour écarter d'emblée la qualification
d'« ordre public d'éviction». En effet, il ne peut s'agir de l"onire public au sens
traditionnel du droit international privé, puisqu'il n'y a plus en l'espèce de règle de
conflit désignant une loi susceptible d'être évincée. Comme l'adoption d'une règle
matérielle en matière d'autonomie écarte du débat toute loi étatique, il n'y a plus lieu
d'en évincer aucune! Ainsi Mme Gaudemet-Tallon opte pour la qualification d' « ordre
public international français de direction». M. Mayer, quant à lui, s'en remet à
l'explication de M. Gaillard, explication qu'il qualifie d'« ingénieuse »119 :

• « l'expression d' 'ordre public international' permet de manifester la

réserve dont les juridictions françaises doivent faire prelNe dans


l'appréciation des contraintes dans lesquelles la convention d'arbitrage
international peut être enfermée, l'ordre public international étant
traditionnellement conçu en termes d'exigences minimales de
. . 120
justIce» .

• Il n'en demeure pas mOins que M. Mayer reste très critique en ce qw


concerne l"utilisation qui est faite, en la matière, des mécanismes de droit international
privé; il considère d'ailleurs que la tenninologie employée est défectueuse. En effe~ il
souligne que «ordre public interne» et « ordre public international» ont des fonctions
différentes; or, ici, pour lui:

« lafonction assignée à l'ordre public international est plus proche de

celle que remplit normalement l'ordre public interne: entraÎner

• 118
119
120
E. Gaillard. H. Gaudemet-Tallon. P. Mayer. H. Synvet.
P. Mayer. sous l'arrêt Dalico, Casso l.:rc civ.• 20 décembre 1993, Rev. crit. dt. int. priv., 1994, P 663.
E. Gaillard. sous ('arrêt Dalico, note précitée 2.

54
• l'annulation d'une convention (et non évincer une loi étrangère). Le
qualificatif' international' est nullementjustifié »121.

Mais il poursuit en soutenant que même sIon remplace le terme


« international» par le mot « interne », la fonction remplie par l'ordre public reste
inhabituelle puisqu'il est chargé de rendre compte de « toutes les causes de nullité et
d'inefficacité ». fi est effectivement d'usage de distinguer les nullités pour objet ou cause
contraire à l'ordre public, mais aussi pour vices du consentement, etc., et non de rattacher
toutes ces nullités à l'ordre public.

• Malgré cette critique qui ne peut laisser indifférent, force est de constater que
la solution actuelle retenue par les Cours françaises fait état de cette limite qu'est l'ordre
public international. Mais quelle valeur doit-on réellement attribuer à cette solution
française, dans la mesure où., à bien y regarder, la France est le seul pays à consacrer
totalement une telle règle matérielle d'autonomie de la clause compromissoire à l'égard
de toute loi étatique.

• 121 P. Mayer, sous l'arrêt Dalico, note précitée 119.

55
• CI Reconnaissance de l'autonomie de rattachement

Tous les développements qui précèdent ne trouvent pour le moment


d'illustration concrète que dans rexemple français; il convient d'ailleurs de s'interroger
sur la place de cette solution française en droit comparé (10). Néanmoins d'autres
tendances en faveur de [a reconnaissance d'une règle matérielle sont décelables tant dans
certains Etats, qu'au niveau de la pratique arbitrale (2°).

• 10) La solution française

II n'existe en réalité que peu de précédents en la matière, mais ['importance


respective des arrêts mérite que ron s'attarde un peu sur chacun (a). La question reste
ensuite de savoir quelle peut être la valeur de la solution française ainsi dégagée en droit
comparé (b).

• a) Apparition de la solution française

La France était, il faut le dire, en retard par rapport à ces homologues


européens pour consacrer l'autonomie de la clause compromissoire prise dans sa
première acception, mais elle a depuis rattrapé son retard et même dépassé le stade
auquel étaient parvenus avant elle des Pays comme l'Allemagne, la Hollande ou l'Italie.
Répondant aux voeux exprimés lors du premier Congrès international de l'arbitrage 122, la
Cour de cassation avait effectivement consacré l'autonomie de la clause compromissoire

• 122 Travaux du premier Congrès international de l'arbitrage, Rev. arb., 1961, P 37, avec l'article de F-E.
Klein: « Du caractère autonome et procédural de la clause compromissoire - Dissociation de la nullité de
cette clause et de celle du contrat principal », p 48.

56

l23
à l'égard du contrat principal qui la contenait • Moins de dix ans plus tard, elle franchit
un cap supérieur: dans l'arrêt Hecht l24 , elle valide en effet une clause compromissoire
insérée dans un acte mixte, alors qu'elle était nulle au regard de la loi française à laquelle
les juges du fond l'avait estimée soumise, au motif qu'« en matière d'arbitrage
international, la clause compromissoire présente une complète autonomie». Cette
décision avait quelque peu laissé les commentateurs sur leur faim: M. Level évoquait une
« prudence génératrice d'équivoque »125 ; M.Oppetit lui reprochait son « laconisme»126 ;
enfin, M. Loquin la qualifiait de « lapidaire »127. Mais tous s'accordaient à découvrir
dans cette décision un arrêt de principe inaugurant l'autonomie de la clause
compromissoire à l'égard de tout droit national.

• Confinnation en fût donnée avec un autre arrêt, de la Cour d'Appel de Paris


cette fois, en date du 13 décembre 1975, l'arrêt Menicucci l28• La solution est cette fois
limpide: «Compte tenu de l'autonomie de la clause compromissoire instituant un
arbitrage dans un contrat international, celle-ci est valable indépendamment de la
référence à toute loi étatique ». C'est à l'occasion d'une prise de position aussi tranchée,
et peut-être même extrême diront certains, que les questions de « principe de validité »,
de « contrat sans loi» ont été mises en exergue et ont donné lieu aux controverses

• exposées précédemment.

D'autres décisions de Cour d'Appel ont vu le jour sur ce problème


d'autonomie par rapport à toute loi étatique, mais l'arrêt fondamental 129 reste celui rendu
par 1ère Chambre Civile de la Cour de cassation, le 20 décembre 1993, dans l'affaire
Dalico. Chaque mot de l'attendu de principe est important: « Attendu qu'en vertu d'une

123 Casso civ. 7 mai 1963, Gosset, note précitée 58.


124 Casso civ. 4 juillet 1972, Hecht, 1D.I., 1972, P 843, note B. Oppetit; Rev. crit., 1974, p 82, note
P. Level ~ Rev. arb., 1974, P 89, avec l'article de Ph. Francescakis précité 88.
125 P. Level, sous l'arrêt Hecht, note précitée 101.
126 B. Oppetit, sous l'arrêt Hecht, note précitée 107.
127 E. Loquin, sous l'arrêt Menicucci, note précitée 103.
128 CA Paris, 13 décembre 1975, Menicucci, Rev. crit., 1976, p 507, note B. Oppetit; Rev. am., 1977,

• p 147, note Ph. Fouchard ~ 1D.I., 1977, P 106, note E. Loquin.


129 Casso (Co: civ., 20 décembre 1993, Dalico, Rev. am., 1994, p 116, note H. Gaudemet-Tallon; 1.0.1.,
1994, P 432, note E. Gaillard; R.T.D. rom, 1994, p 254, noteJ.-C. Dubarry et E. Loquin.

57
• règle matérielle de droit international de l'arbitrage , la clause compromissoire est
indépendante juridiquement du contrat principal qui la contient directement ou par
référence et que son existence et son efficacité s'apprécien~ sous réserve des règles
impératives du droit français et de l'ordre public international, d'après la commune
volonté des parties, sans qu'il soit nécessaire de se référer à une loi étatique ».

De ces mots, se dégageaient clairement les trois aspects du pnnClpe


d'autonomie de la clause compromissoire: d'abord sa nature, puisque la Cour énonce ici
une règle matérielle; ensuite son contenu qui est double, autonomie par rapport au
contrat principal et autonomie à l'égard de toute loi étatique; enfi~ les limites
auxquelles il se heurte, à savoir essentiellement celles posées par le respect de l'ordre

• public international. Mais la Cour Suprême française est-elle expansionniste ou


impérialiste dans sa démarche? Les termes très généraux et les concepts qu'elle utilise
pourraient le laisser penser. Pour la plupart des auteurs, la Cour de cassation n'aurait pas
voulu aller aussi loin et poser une règle universelle; d'ailleurs en aurait-elle seulement eu
la compétence?

Tel est bien le problème en définitive: celui de la portée de la solution

• française en droit comparé.

b) Portée de la solution française

La solution adoptée en France, et notamment dans l'arrêt Dalico. a-t-elle


valeur universelle, ou n'engage-t-elle que ce pays et lui seul? Cela revient à se demander
si la règle matérielle ainsi dégagée est une « règle de véritahle droit international » ou si
elle ne constitue en définitive qu'une règle matérielle faisant partie intégrante de l'ordre
juridique français.

• 58

Comme il vient d'être dit, le doute est permis, vue la généralité des termes
employés par la Cour de cassation. Pour Eric Loquin, commentant cette fameuse
décision:

« la formulation de l'arrêt laisse en effet entendre que le principe de

l'autonomie de la clause compromissoire qui fonde sa validité serait


extérieur à l'ordre juridique français» 130. Ainsi, « le principe de
['autonomie de la clause compromissoire est une règle appartenant 'au

• droit international de l'arbitrage', et non pas au droit français de


l'arbitrage international ».

L'auteur justifie cette affirmation en expliquant que le droit international de


l'arbitrage ne peut appartenir à l'ordre juridique français puisque « cet ordre juridique
peut s'opposer à son application au nom de l'ordre public international, et dès lors que
les lois de police françaises peuvent interférer dans son application »131.

• M. Loquin évoque encore la possibilité d'un «

l'arbitrage appartenant à la 'Iex mercatoria'». L'idée n'est pas nouvelle, et M.


droit transnational de

Goldman, éclaireur de la résurrection de la lex mercatoria comme ordre juridique propre


au commerce international, évoquait déjà dans son commentaire sous l'arrêt Hecht 132 , la
consécration d' « une règle de véritable droit international, largement accueillie pour les
besoins du commerce international, par les nations qui y sont engagées ». Il incluait ainsi
la règle matérielle dégagée par la Cour française dans la lex mercatoria.

• 130
131
E.Loquin, sous l'arrêt Dalico, Casso ICn: civ., 20 décembre 1993, l.DJ., 1994, P 690.
E. Loquin, sous ('arrêt Dalico, note précitée 130.
132 B. Goldman, sous l'arrêt Hecht, note précitée 109.

59

Cependan~ une hésitation se fait jour: doit-on réellement traiter la lex
mecatoria comme une source extérieure à l'ordre juridique français, ou est-il préférable
de juger qu'elle est « incorporée » dans l'ordre juridique français? Dans cette seconde
hypothèse, le principe d'autonomie serait « nationalisé» et acquerrait alors une positivité
dans le droit français de rarbitrage international. En d'autres termes: chaque Etat aurait
la possibilité de « déclarer unilatéralement l'insertion d'un principe dans l'ordre
juridique international. tel que l'Etat français le conçoit », il s'agirait alors de « règles de
droit international étatique »133.

En réalité, une grande partie de la doctrine ne voit dans la règle matérielle


adoptée par la Cour de cassation française qu'une règle purement française. Ainsi, Mme

• Gaudemet-Talion, tout en relevant que la Cour fait référence au « droit international de


['arbitrage» et non au « droit français de ['arbitrage international », signale que, de toute
façon, cette juridiction n'avait « pas compétence pour poser une règle universelle,
totalement a-nationale »134. De la même façon, Emmanuel Gaillard estime qu' « il n'a
jamais été question pour la jurisprudence française de prétendre dégager une véritable
136
règle supra-nationale »135. Trois arguments iraient, en effet, dans ce sens : d'abord,
l'existence d'un droit transnational pour régir les rapports entre personnes privées est

• contestée par de nombreux auteurs. Ensuite, la validité de la clause compromissoire par


référence, validité qu'impliquerait la règle matérielle, est loin de faire l'unanimité en
droit comparé. Enfin, il est difficile d'imaginer que le droit français de l'arbitrage
international comporte des lacunes qu'il comblerait par recours à un supposé droit
transnational.

En définitive, tout porte à croire qu'il s'agit bien là d'une règle de droit
français à portée internationale 137. D'ailleurs MM. Grave1 et Peterson font bel et bien

133 Ph . Francescak'IS, note precitee


. . . 88 .
t34 H. Gaudemet-TaUon, sous l'arrêt Da/ico, note précitée 89.
13S E.Gaillard. sous l'arrêt Da/ico, nole précitée 2.

• 136 P. Mayer. sous l'arrêt Da/ico. note précitée 119.


137 Voir notamment les débats dans: Trav. Como fr. dr. int. pro, 1991-1992. p 75 So, et spécialement les
arguments développés par M. Mayer (p 111), Mme Toubiana (p 115) et M. Fouchard (p 117).

60
• référence à « a new ruie ofFrench law »138. Mais, même s'il s'agit d'une règle française,
il est néanmoins concevable que cette règle matérielle soit admise et adoptée par d'autres
Etats, alors qu'en est-il ?

2°) Reconnaissance du principe

Avec les solutions adoptées Par leur législation, certains pays combinent

• règles matérielles et règles de conflit (a). Par ailleurs, au niveau international, la pratique
arbitrale a consacré dans plusieurs sentences l'approche française (b).

a) Au niveau étatique

La plupart des droits continue d'appliquer à la convention d'arbitrage la loi


désignée par une règle de conflit classique: il s'agit alors de déterminer grâce à des

• facteurs de connexion quelle est la loi étatique applicable à la situation. La loi ainsi
désignée permettra de dire si la clause est valable ou non.

Néanmoins il existe quelques exceptions. Les observations qUI suivent


concernent essentiellement deux pays, la Suisse et l'Algérie, le second Etat ayant adopté
une législation très proche de celle du premier. En effet, par les solutions qu'ils ont
retenues tous deux, ils introduisent en partie des règles matérielles, règles qu'ils
combinent néanmoins à des règles de conflit

• 138 S. Gravel & P. Peterson, « French Law and Arbitration Clause», R.D. McGiIl, 1992, p 511
P 521).
S., (spéc.

61
• Ainsi, l'article 178, § 2 de la loi suisse de droit international privé de 1981
dispose que la convention d'arbitrage est valable « quant au fond [...] si elle répond aux
conditions que pose soit le droit choisi par les parties, soit le droit régissant l'objet du
litige, et notamment le droit applicable au contrat princiPal, soit encore le droit suisse ».
Plus récemment, le droit algérien a adopté une solution similaire dans un décret du 23
avril 1993 139 (article 458 bis 1, al. 3 nouveau du Code de procédure civile) :

« Ainsi, dans ces deux Etats, le juge saisi peut faire application, comme

le juge français, des dispositions matérielles de sa propre loi - le cas


échéant adaptée au caractère international de la situation - mais il peut
également valider la convention au fond par application de la loi

• choisie par les parties ou du droit régissant le fond du litige» 140•

Il est évident que c'est le sauvetage à tout prix de la convention d'arbitrage


qui est ainsi organisé. La combinaison des règles matérielles et des règles de conflit in
favorem validitatis vise en effet à multiplier les chances de valider au fond la convention
d'arbitrage. Mais est-ce aller assez loin? Dans son commentaire sur la nouvelle loi
relative à l'arbitrage en Algérie, Mohand Issad 141 semble regretter que la solution adoptée

• n'ait pas été «plus française», c'est à dire plus en faveur de la dénationalisation de
l'arbitrage international :

« Plutôt alors que d'obliger l'arbitre à partir à la recherche d'un droit

qui valide parmi les quatre ou cinq que lui propose le droit algérien, on
peut se demander s'il n'aurait pas mieux valu faire un pas de plus dans
l'indépendance de la convention d'arbitrage et la détacher de toute loi
nationale, pour peu que son existence soit certaine et dans la seule
limite de l'ordre public international ».

Décret algérien du 23 avril 1993, Rev. arb., 1993, P 479.


139
140 E. Gaillard, sous l'arrêt Da/ico, note précitée 2.
141 M. Issad, « Le décret législatif algérien du 23 avril 1993 relatif à l'arbitrage international », Rev. arb.,
1993, P 377.

62
• Mais la France justement ne se retrouve-t-elle pas, avec sa signature de la
Convention de New York 142, dans un schéma infavorem validitatis? L'article V, § 1 (a)
de cette convention prévoit que la reconnaissance et rexécution d'une sentence étrangère
ne peuvent être refusées que si la convention d'arbitrage n'est pas valable « en vertu de la
loi à laquelle les parties l'ont subordonnée, ou, à défaut d'une indication à cet égard, en
vertu de la loi où la sentence a été rendue». Cela voudrait-il dire que l'une de ces lois
pourrait « sauver» une convention d'arbitrage qui aurait été annulée par application des
règles matérielles du droit français? Sans doute non, et ce, en vertu de l'ordre public
d'éviction cette fois ~ c'est ce qu'explique M. Gaillard
l43
:

• « il Y a tout lieu de penser que les principes élémenfaires de jusfice au

regard desquels la convenfion d'arbitrage infernationa/ doif être


appréciée par un juge français consfituent à la fois le minimum et le
maximum de libéralisme que le droit français peut tolérer el qu'il n y a
donc pas lieu de compliquer. en fermes de rattachements alternatifs. la
formulation de /a règle posée de manière claire par la Cour de
cassation dans ['arrêt Dalico ».

• Après cet aperçu de la combinaison in favorem validitalis, il convient à


présent d'étudier la situation au niveau non étatique.

b) Au niveau non étatique

Une première remarque, avant de faire état de la pratique arbitrale en la


matière, concerne à nouveau la Convention de New York, mais relativement à son article

• 142
143
Note précitée 29.
E. Gaillard, sous ('arrêt Da/ico, note précitée 2.

63

il, § 3, cette fois. D'après cette dispositio~ le tribunal d'un Etat contractant doit déférer
aux arbitres les litiges visés par la convention d'arbitrage « à moins qu'il ne constate que
ladite convention est caduque, inopérante et non susceptible d'être appliquée ». D'après
Antonias Dimolitsa l44 :

cet article « peut être vu comme laissant une marge de liberté à la


théorie de l'autonomie complète de la convention d'arbitrage, c'est à
dire l'autonomie par rapport à toute loi étatique, puisqu'il n'impose
pas aujuge de suivre un procédé conflictuel afin d'apprécier la validité
de la convention d'arbitrage ».

• Cette remarque étant faite, il est temps d'étudier sur les solutions retenues par
la pratique arbitrale.

Comme l'affirme M. Loquin, « le principe de l'autonomie de la clause


compromissoire est depuis longtemps appliqué par les sentences arbitrales, dans tous ses
développements, au titre de la lex mercatoria » 145. M. Derains 146 explique en effet que
l'évolution des décisions arbitrales a été la même que celle de lajurisprudence française,

• et s'est donc appliquée à toujours consacrer une autonomie plus affirmée de la clause
compromissoire. Il constate que désormais « le pouvoir des parties de soumettre leur
convention à des normes anationa/es est de moins en moins contesté », et il est vrai que
certaines sentences n'hésitent pas à soumettre la clause d'arbitrage aux seuls principes
généraux du droit ou aux usages du commerce international, sans invoquer l'article 8 (3)
du Règlement de la CCI.

Ainsi, très explicite est la sentence nO 5065 rendue à Paris en 1986 147 : « quand
l'existence même de la convention est en jeu, alors que le prétendu contrat est à tout

144 A. Dimolit~ « Autonomie et 'Kompetenz-Kompetenz' », Rev. arb., 1998, P 305.

• 14S E. Loqui~ sous l'arrêt Dalico, note précitée 130.


146 Y. Derains, note précitée 30.

147 J.D.I., 1987, P 1039.

64
• point de vue un contrat international, qu'aucune question de capacité des parties n'est en
cause et qu'en plus les parties ont délibérément omis de choisir le droit applicable au
contrat, le droit le plus approprié pour régir la question de l'existence de la convention
d'arbitrage n'est pas celui d'un système national particulier mais les principes généraux
du droit et les usages acceptés dans le commerce international». Autre affaire, même
tendance, dans une sentence rendue en Suisse en 1990 148 alors qu'il était question de
l'application de la lex mercatoria: « l'autonomie de la clause d'arbitrage, largement
reconnue aujourd'hui, justifie cette référence à une règle non étatique déduite des seuls
usages du commerce international». Rappelant les trois tendances de la jurisprudence
arbitrale internationale en matière de détennination du droit applicable à la convention
d'arbitrage, à savoir droit du contrat, droit du lieu de l'arbitrage, volonté des parties et

• normes anationales, Yves Derains conclut :

« .,,·eu/e la dernière correspond aux besoins réels des opérateurs du

commerce international qui n'envisagent pas, lorsqu'ils décident de


soumeUre des litiges à venir à l'arbitrage que la validité et la portée de
leur accord puissent être subordonnées aux exigences d'un droit
,. /-19
etatrque» .

• L' « irrésistible extension du principe de l'autonomie de la clause


compromissoire », telle est l'expression retenue par M. Loquin 150 pour caractériser
l'élargissement de la portée donnée au principe étudié. Une fois que l'autonomie de la
clause compromissoire par rapport au contrat principal a été admise, ce fût au tour de
l'autonomie vis à vis de toute loi étatique de faire son apparition et d'agiter la doctrine.
Cet aspect de la notion est toujours un sujet de controverse, et alors que le débat sur la
question est loin d'être clos, s'annonce déjà de nouvelles querelles doctrinales relatives
aux implications éventuelles de l'autonomie.

• [48
[49

1SO
J.D.I., 1990, P 1020.
Y. Derams,
. note precitee
. .. 30.
E. Loquin, sous l'arrêt Dalico, note précitée 130.

65
• Ainsi les auteurs, incités parfois dans leur démarche par les décisions de
justice, se demandent dans quelle mesure d'autres principes dégagés au sujet de la clause
compromissoire ne se rattacheraient pas au principe de son autonomie. Celui-ci pourrait
bien en réalité constituer la pierre angulaire d'un véritable système spécifique à la clause
d'arbitrage.

L~ « effet d'entraînement »151 a-t-il dit son dernier mot?

• l.5l Ph. Francescakis, note précitée 88.

66
• 111.- L'autonomie de la clause compromissoire
et ses implications éventuelles

Une partie de la doctrine ne se contente pas d'associer au principe


d'autonomie les deux aspects, l'un classique, l'autre plus novateur, qui ont déjà été

• étudiés, et recherche au contraire de nouvelles implications de l'autonomie.

Ainsi la notion expliquerait l'existence d'une autre grand principe de


l'arbitrage international : le principe de Compétence-Compétence, principe selon lequel
l'arbitre est compétent pour statuer sur sa propre compétence. Cette « autonomie» du
juge arbitral est-elle réellement à rattacher à l'autonomie de la clause? (A)

De la même manière, a été émise l'idée suivant laquelle principe d'autonomie

• et extension de la clause compromissoire ne seraient pas étrangers l'un de l'autre. La


question de l'extension de la clause d'arbitrage est effectivement, elle aussi, d'actualité,
et ce, que l'on envisage l'extension de la clause à des tiers non signataires, ou son
extension dans le temps. Il sera donc intéressant de confronter les deux phénomènes. (8)

Ces nouvelles implications posent, plus généralement, la question du


positionnement de ce principe dans le droit de 1"arbitrage international. Cette
problématique soulève bien évidemment des interrogations quant à l'importance du
principe d'autonomie et à son aptitude à fonder un système spécifique à la clause
d'arbitrage. Elle invite également à réfléchir sur l'influence qu'il pourrait avoir en dehors

• du domaine de l'arbitrage. (C)

67
• AI Autonomie et ComlJétence-Compétence

Associer les principes d'autonomie et de Compétence-Compétence mérite


d'abord que ron explicite brièvement ce que recouvre la notion de Compétence-
Compétence (1°). Avec quelques données de base sur la notion~ il sera ensuite possible de
chercher à établir un lien entre les deux principes (2°).

1°) Le principe de Compétence-Compétence

• Le principe de Compétence-Compétence est une notion à deux facettes. Il est


en effet d'usage de dire que ce principe comporte deux aspects: l'un positif, largement
reconnu (a), rautre négatif, plus controversé (b),

a) Aspect positifde la Compétence-Compétence

• Le principe de Compétence-Compétence trouve son origine dans la théorie


allemande de la Kompetenz-Kompetenz I52 . Selon cette théorie, qui donnait du principe
son expression la plus pure, la plus extrême, l'arbitre désigné avait le pouvoir de se
prononcer sur sa propre compétence pour juger du litige qui lui était soumis, et la
décision qu'il pouvait prendre à ce sujet était sans appel: en d'autres termes, l'arbitre
décidait en dernier ressort s'il était compétent ou non, et liait ainsi les cours étatiques.
L'expression « Kompetenz-Kompetenz» a été conservée en France, alors que
curieusement la Grande-Bretagne utilise l'appellation française « Compétence-

• 152 A. Di mo l'ttsa, note precttee


. .. 144.

68
• Compétence ». Pourtant, la théorie allemande n'a jamais été mise en œuvre telle quelle,
dans aucun paysl53.

En pratique, l'aspect positif de la Compétence-Compétence, dans son


expression la plus achevée, signifie bien que l'arbitre a le pouvoir de se prononcer lui-
même sur sa propre compétence, mais sa décision pourra être remise en cause de manière
subséquente par des juges étatiques. L'arbitre n'a donc pas le dernier mot.

D'ailleurs il est sans doute utile de remarquer que la solution retenue pour
l'effet positif de la Compétence-Compétence n'a rien d'original. En effet, il appartient
bien à tout juge de statuer sur sa compétence. Or, « l'arbitre exerce une fonction

• juridictionnelle .. et l'arbitre international est même le juge ordinaire du commerce


international »154. n semble donc normal que l'arbitre se voit reconnaître ce pouvoir, qui
constitue une simple règle de procédure. Dès lors les critiques n'ont plus lieu d'être: il
n'y a pas plus de pétition de principe concernant la compétence de l'arbitre, que pour ce
qui est de la compétence d'un juge. n n'y a sans doute pas de raison de douter du
jugement de l'arbitre. Ce serait « faire preuve d'une méfiance injustifiée, que de l'obliger
à surseoir à statuer à la moindre contestation, peu/-être purement dilatoire, de sa

• compétence ) 155.

Ce qu'il faut retenir pour l'essentiel de l'effet positif de la Compétence-


Compétence, c'est qu'il induit deux conséquences pour les arbitres. D'une part, comme il
a déjà été dit, l'arbitre peut juger de sa propre compétence. Et, d'autre part, il n'a pas
l'obligation d'interrompre la procédure arbitrale pour se référer à la position des juges
étatiques sur la question.

1S3 Seul M. Schmitthoff semble considérer que les parties pourraient décider de donner à l'arbitre qu'elles


désignent le pouvoir de juger en dernier ressort: « The jurisdietion of the arbitrator », The Art of
Arbitralio", Liber Amicorum Pieter Sanders, K1uwer, 1982. p 293 .
IS4 P M
. ayer, ' .. 47 .
note precitee
ISS P M ' .. 47 .
. ayer, note precitee

69
• Ainsi entendu, le principe de Compétence-Compétence est quasiment
universellement reconnu. Certes il existe quelques réserves et réticences dans les pays
anglo-saxons156, la Chine semble ne toujours pas avoir admis le principet5?, mais
globalement l'aspect positif est favorablement accueilli par les Etats.

Tout aussi important, l'aspect négatif de la Compétence-Compétence est loin


d'être aussi unanimement reconnu.

• b) Aspect négatifde la Compétence-Compétence

Comme il vient d'être expliqué, l'effet positif de la Compétence-Compétence


consiste à s'interroger du point de vue de l'arbitre et de son pouvoir concernant sa propre
compétence. La question est de savoir si, réciproquement, les juges étatiques ont le devoir
de se déclarer incompétents jusqu'à ce que la décision arbitrale soit rendue. Il est
important de comprendre qu'il ne s'agit ici que d'un problème de priorité: l'arbitre

• prévaudra chronologiquement, et non hiérarchiquement, puisque les juges pourront par la


suite revoir la décision 158.

La notion de priorité est en réalité peu reconnue dans le monde. Ainsi,


généralement, les juges étatiques conservent le droit d'intervenir pour se prononcer sur la
compétence de l'arbitre, non seulement avant le déclenchement de la procédure arbitrale,

\S6 Pour l'Angleterre: P. Gross, « Competence ofCompetence : An English View n, Arb. Int'I, VoI.S, No. 2,
1992, P 205. Pour les Etats-Unis: W. W. Park, « The Arbitrability Dicta in First Op/ions v. Kaplan: What
Sort ofKompetenz-Kompetenz Has Crossed the Atlantic? », Arb InCL Vol. 12, No. 2, 1996, P 137.
\S7 D. Nedjar, ({ L'arbitrage international en Chine après la loi du 31 août 1994 n, Rev. arb., 1995, P 411 ;

• H. Yanming, « Sorne Remarks about the 1994 Rules ofCIETAC and China's New International Arbitration
Rules », Il 1. Int. Arb, 1994, P 105.
lSB A. Dimolitsa, note précitée 144.

70
• mais aussi pendant le déroulement de celle-ci 159. L'action portée devant les juges prend
alors la fonne d'une exception d'incompétence, utilisée comme défense. Mais certains
pays acceptent même qu'une action directe soit introduite pour contester la compétence
des arbitres 160.

En réalité, l'effet négatif de la Compétence-Compétence est surtout perçu


comme une particularité française. Cette position atypique de la France a été très
clairement rappelée dans un récent arrêt, l'arrêt Zan:/ 61 • D'après cette décision de la
Cour de cassation, il convient de distinguer procédure et fond

D'un point de vue procédural, d'abor<L il est affirmé que « la juridiction

• étatique est incompétente pour statuer à titre principal sur la validité de la clause
d'arbitrage ». Bien entend~

revue par les juges étatiques.


la décision arbitrale n'est pas irréversible: elle pourra être

Pour ce qui est du fon<L ensuite, les juges doivent se déclarer incompétents si
le tribunal arbitral a déjà été saisi, sachant qu'à la question de savoir à quel moment
considérer qu'un tribunal arbitral est effectivement saisi, la doctrine semble admettre que

• tel est le cas lorsque les arbitres ont accepté leur mission 162. Mais la règle de priorité
reconnue en France est encore plus affirmée puisque, même si les arbitres n'ont pas
encore été saisis, les juges doivent là encore se déclarer incompétents, sauf si la
convention d'arbitrage est « manifestement nulle ». D'après M. Fouchard 163, cette
dernière notion doit être strictement interprétée: il doit s'agir d'une nullité « évidente,
incontestable, qu'aucune argumentation sérieuse n'est en mesure de mettre en doute ».

IS9Conventions: art 8 Loi-Type CNUDCI, art Il (3) de la Convention de New York. Pays: loi belge (art.
1679, al 1), loi néerlandaise (art 1022, al 1), loi suisse (art 7 LDrP), loi anglaise (art 9.4 Arhitratioll Act
1996).
C'est le cas de la Grèce notamment, mais aussi de la Suisse dans certaines décisions.


160

161 Casso Iën: civ., 5 janvier 1999, Zanzi, Rev. arb. 1999, P 260, note Ph. Fouchard.
162 Ph. Fouchard, note sous l'arrêt ZmlZi, note précitée 161.

163 Ph. Fouchard, note sous l'arrêt Zanzi, note précitée 161.

71
• A l'heure actuelle, seule la France consacre pleinement le principe de
Compétence-Compétence dans son aspect tant positif que négatir 64 . Pourquoi une telle
réticence face à l'effet négatif du principe de Compétence-Compétence ? Une première
explication est sans doute à trouver dans la crainte qu'inspire le pouvoir des arbitres:
peur de leur manque d'objectivité, peur que le juge étatique ait plus d'hésitation à annuler
une décision arbitrale qu'une simple clause compromissoire. Mais la raison principale
invoquée est la perte de temps et d'argent: l'intervention immédiate du juge permet de
réaliser des économies considérables en ces domaines l65 .

Ainsi, le Juge Delvin explique:

• « La loi n'exige pas que les arbitres dont la compétence est contestée
ou mise en cause suspendent sur le champ leurs activités en attendant
que la contestation soit définitivement tranchée par un tribunal étatique
compétent. La loi n'exige pas non plus que les arbitres poursuivent leur
tâche sans examiner le bien fondé de cette contestation et tranchent le
fond du litige en laissant ouverte la question de leur compétence
jusqu'à ce qu'un tribunal étatique ayant l'autorité voulue puisse se

• prononcer sur elle. Ils risqueraient alors de perdre tout simplement leur
temps et de le faire perdre à tout le monde. Rien ne les oblige à
s'engager dans {'une ou l'autre voie. » 166

D'un autre côté, l'argument en faveur de l'effet négatif de la Compétence-


Compétence est de poids: plus encore que l'aspect positif: il permet d'éviter toute
l67
pratique dilatoire, et ainsi de rendre la convention d'arbitrage plus efficace .

164 Voir aussi la Convention européenne de 1961 sur l'arbitrage commercial international.
16~ Sinon, on doit attendre la fin de la procédure arbitrale avant de pouvoir réagir, d'où une perte de temps et
d'argent, voir P. Mayer, note précitée 47.
166 Juge Delvin, dans l'arrêt Chrislopher Brown Lld v. Gellossellschaft Oesle"eichisher Waldbesit=er
Hollzwirlschaftsbetriebe Registrierte Genossenschaft Mit Beschrallkler Haftung, [1954] 1 Q.8. 8, 12 & 13

• (Traduction E. Robine pour l'ouvrage cité en note 111).


167 E. Gaillard, « Les manoeuvres dilatoires des parties dans l'arbitrage commercial international », Rev. am.,

1990, p 759.

72
• L'efficience de la clause compromissoire es~ là encore, au cœur des
préoccupations comme elle l'était concernant le principe d'autonomie, d'où l'utilité de
s'interroger sur les rapports qu'entretiennent « Autonomie» et « Compétence-
Compétence».

2°) Liens possibles avec le principe d'autonomie

• Les principes d'autonomie et de Compétence-Compétence présentent à n'en


pas douter des similitudes, et peuvent facilement être perçus comme intimement liés (a).
Pourtant ils restent différents, ne serait-ce que de par leur nature (b).

a) Deux principes appa,emment intimement liés

Rares sont les auteurs qui estiment que les principes d'autonomie de la clause

• compromissoire et de Compétence-Compétence sont étroitement dépendants l'un de


l'autre, voire parfaitement indissociables 168.

Mais il est vrai que la « confusion» 169 entre les deux notions est possible tant
il existe entre elles des similitudes troublantes. Si l'on en juge seulement par le but
poursuivi par la mise en œuvre de ces principes, par exemple, force est de constater qu'ils
vont tous les deux dans le même sens. L'objectif de la Compétence-Compétence, comme
celui du principe d'autonomie, est bien d'assurer à la convention d'arbitrage son
efficacité maximale, et partant de là, de faire de l'arbitrage un mode efficient de

168 E. Mezger s'oppose farouchement à l'analogie des deux principes: « SlIrtoul, il Ile faut pas les
confondre », dit-il dans «Compétence-compétence des arbitres et indépendance de la convention arbitrale

• dans la Convention dite Européenne sur l'Arbitrage Commercial International de 1961 », Essays in
memoriam Eugenio Mino/i, AIAlUTET, 1974, P 315.
169 A. Dimolitsa, note précitée 144.

73

règlement des conflits internationaux. Parler d'efficacité en ces circonstances renvoie non
seulement à l'efficacité propre de la clause compromissoire, mais aussi à sa protection vis
à vis des pratiques dilatoires auxquelles seraient tentées d'avoir recours les parties.

En effet, d'une part, «Autonomie» et «Compétence-Compétence »


permettent d'appréhender la clause seule, in abstracto, pour juger si elle est valable et si
l'arbitrage peut être mis en œuvre. Ainsi la clause est séparable du contrat principal qui la
contient et lui survit De la même façon, la clause autorise en elle-même le tribunal
arbitral qu'elle désigne à se déclarer ou non compétent, sans saisine préalable des cours
étatiques.

• D'autre part, grâce à ces deux principes, les parties à la procédure arbitrale ne
pourront pas retarder celle-ci en faisant intervenir abusivement les juridictions étatiques.
En matière de Compétence-Compétence, cette proposition se vérifie pour l'effet positif,
et plus encore pour r effet négatif Puisque si, dans la première hypothèse, le tribunal
arbitral est compétent pour statuer sur sa propre compétence, dans la seconde hypothèse,
il est même prioritaire: toute tentative des parties de saisir une cour étatique sera donc
avortée puisque celle-ci devra attendre que la décision arbitrale soit rendue avant de

• pouvoir intervenir. De la même manière, pour ce qui est du principe d'autonomie cette
fois, toute manœuvre dilatoire sera nonnalement écartée puisque la clause est supposée
être autonome par rapport à toute loi étatique, rendant ainsi tout recours préj udiciel
auprès des juges étatiques superflu.

Au vu de ces éléments, « Autonomie» et « Compétence-Compétence» sont


incontestablement jumelles dans l'objectif qu'elles poursuivent. D'ailleurs, ces questions
constituaient les deux problèmes abordés lors du Congrès de 1961 17°, ce qui montre
suffisamment combien parler de l'un de ces principes amène inévitablement à
s'interroger sur l'autre. Les travaux préparatoires de la Loi-Type de la CNUDCI
évoquaient également les deux principes, suggérant d'ailleurs que le principe

• 170 Congrès International de l'Arbitrage de 1961, Rev. arb., 1961, P 48.

74
• d'autonomie pourrait, d'une certaine façon, avoir pour objectif de donner au tribunal
arbitral une base pour statuer sur sa propre compétence 17l .

Au-delà de leur similitude de finalité, les deux notions jouissent d'une


reconnaissance semblable au sein de certains Etats. En réalité, l'objectif poursuivi et la
manifestation effective des principes sont intimement liés: si l'arbitrage a la faveur d'un
Etat, l'Etat en question fera tout le nécessaire pour assurer l'efficacité de la convention
d'arbitrage. II admettra donc aussi bien l'autonomie de la clause compromissoire que le
fait que l'arbitre puisse se prononcer sur sa propre compétence. Le parallélisme de
reconnaissance des principes est surtout notable en ce qui concerne le cas de la France.
Non seulement ce pays reconnaît les deux principes dans leur aspect classique, mais de

• surcroît il est, pour le moment, le seul à les consacrer tous les deux dans ce qu'ils ont de
plus novateur l72 . Comme si le raisonnement imbriquait les deux notions à un degré
similaire.

Dernier argument en faveur de la gémellité des principes: chacun d'eux


concerne le pouvoir juridictionnel de l'arbitre l73 . C'est évident lorsqu'il est question de
Compétence-Compétence: il s'agit de déterminer si l'arbitre est juridictionnellement

• compétent pour juger de sa propre compétence. Mais c'est également vrai concernant le
problème de l'autonomie de la clause compromissoire: en s'interrogeant sur la validité
de la convention d'arbitrage, on se demande indirectement si, au final, l'arbitre sera
compétent pour connaître du litige, même si le contrat principal a été annulé par exemple.

Les principes d'autonomie de la clause compromissoire et de ComPétence-


ComPétence présentent bien un certain parallélisme: ils ont une même finalité, et

171 A. Redfem, M. Hunter, M. Smit~ Droit el pratique de l'arbitrage in/erlla/ional, Paris, L.G.D.J., 1994,
(spéc. P 144). Cet ouvrage est la traduction de l'édition: Law alld Practice of IllIernational Commercial

• Arbitra/ion, t ld 00., London, Sweet & Maxwell, 1991 (traduction E. Robine).


172 Arrêts Dalico et Zanzi, notes précitées 129 et 161.

75
• permettent tous deux de déterminer le pouvoir de l'arbitre. Est-ce à dire pour autant que
les deux notions sont indissociables, voire assimilables ? n semble en réalité qu'il faille
faire un distinguo entre Autonomie et Compétence-Compétence, même s'il existe un
certain rapport entre elles.

b) Deux principes diffé,ents de pa, leu, ""Iu,e

Il est incontestable, comme il vient d'être vu, que le principe de Compétence-


Compétence et celui d'autonomie de la clause compromissoire concernent tous deux le

• pouvoir juridictionnel de l'arbitre. Mais il est tout aussi évident que la problématique ne
se situe pas au même niveau dans chaque cas.

Lorsqu'il est question d'autonomie, il s'agit de savoir si la clause


compromissoire demeure valable, même si le contrat qui la contient tombe ou si elle est
contraire à une loi étatique, et, par là même, si elle peut permettre de déclencher la
procédure arbitrale en rendant les arbitres compétents au détriment des juges étatiques.

• L'issue du principe d'autonomie de la clause compromissoire conditionne la facuIté pour


l'arbitre de se prononcer sur la substance même du litige.

A l'inverse, le principe de Compétence-Compétence ne pose qu'une question


préalable au règlement du conflit. Il autorise les arbitres à se prononcer eux-mêmes sur
leur compétence à connaître du litige. Ce n'est que si, et seulement si, le tribunal arbitral
se déclare compétent, et si cette décision n'est renversée par aucune décision étatique
subséquente qu'il pourrajuger au fond.

• 173 A. Dimolitsa, note précitée 144.

76

C~est ce qui fait dire à l'auteur René David 174, que les deux règles se
distinguent par leur nature juridique~ car l'autonomie de la convention d~arbitrage serait
une question de fond, tandis que la Compétence-Compétence serait une question de
procédure.

Substantielle ou procédurale : chaque règle requiert donc un examen séparé.


Il suffit d'ailleurs de rappeler que, bien qu'opérant dans le même domaine, celui du
pouvoir juridictionnel de l'arbitre, les deux principes ont des objets différents :

« L'autonomie consiste à voir dans la clause d'arbitrage un contrat

différent, séparé du contrat principal, tandis que la compétence-

• compétence consiste à accorder aux arbitres le pouvoir de juger de leur


propre compétence sans obligation de leur part de surseoir à statuer en
cas de saisine parallèle d'unjuge étatique »175.

Par ailleurs, comme le souligne encore M. Dimolitsa, (( l'évolution de ces


règles et le degré de leur consécration internationale actuelle ne sont pas nécessairement
concordantes »176. L'exemple de la France serait donc trompeur. Mais il est vrai que les

• avancées législatives et jurisprudentielles dans chacun des domaines envisagés - et la


nouveauté relative de l'arbitrage comme mode usuel de règlement des conflits l'explique
parfaitement - sont assez récentes, elles ne sont pas exactement simultanées à y regarder
de pl us près.

L'écart temporel qUi existe entre les décisions à rattacher à chacun des
pnnClpes démontre que « Compétence-Compétence» et « Autonomie» ne sont pas
totalement imbriquées. li s'agit bel et bien de deux notions distinctes. Mais comment
expliquer dès lors qu'on les rapproche si souvent?

• 174
175
R. David. note précitée 5. (spéc. nO 209).
A Dimolit~ note précitée 144.
176 A. Dimolit~ note précitée 144.

77
• overlap
L'explication tient sans doute dans cette proposition: « it is cleor that while
the IWo princip/es are closely /inked and have
»l77.
0 similar objective. they only partially
En effet, il existe bien un rapport, parfois qualifié de « direct »178, entre les
deux principes qui fait qu'ils ne peuvent pas s'ignorer totalement. Le principe
d'autonomie se situe en amont: c'est un préalable à la mise en œuvre du principe de
Compétence-Compétence. En effet, la clause compromissoire est ce qui investit les
arbitres du pouvoir d'intervenir dans un litige donné. Rendue séparable par rapport au
contrat principal, voire même autonome par rapport à toute loi étatique, son efficacité est
renforcée et permet, même dans ces hypothèses, à l'arbitre de se prononcer. Ce n'est
qu'une fois réglé le problème de la validité de la convention d'arbitrage que se pose la
question de la compétence des arbitres pour statuer sur leur propre compétence. Ainsi

• rautonomie passe en premier dans l'analyse. Mais pour nécessaire qu'elle soit, elle n'en
est pas moins insuffisante. C'est ce qu'exprime parfaitement M. Dimolitsa lorsqu'il dit :

« Si le pouvoir de l'arbitre de statuer sur la validité du contrat


principal avec la possibilité de le déclarer inefficace, nul, ou même non
avenu, présuppose l'acceptation de l'autonomie de la convention
d'arbitrage par rapport au contrat principal, celte autonomie ne suffit

• pas à fonder le pouvoir de l'arbitre de statuer sur la validité de la


convention d'arbitrage elle-même, quand c'est celle-ci qui est
,
contestee» l79
.

Ainsi dans certaines hypothèses, le principe d'autonomie serait nécessaire à la


mise en œuvre de la Compétence-Compétence. Mais cette dernière aurait une portée plus
large que l'autonomie.

• 177
178
Fouchard Gaillard Goldman on ImenlDüonal Commercial Arbitra/ion, note précitée 23, (spéc. nO 4(6).
A. Redfe~ M. Hunter, M. Smith, note précitée 171, (spéc. P 145).
179 A. Dimolitsa, note précitée 144.

78
• Autonomie de la clause compromissoire et Compétence-Compétence ne sont
donc pas totalement indépendantes l'une de l'autre. C~est sans doute une erreur de
confondre ces deux notions dans la mesure où elles demeurent intrinsèquement
différentes; néanmoins, le rapprochement entre elles n~est PaS superficiel. Qu'en est-il du
rapprochement parfois effectué entre le principe d~ autonomie et un autre principe
d~origine jurisprudentiel: J'extension de la clause compromissoire.

• 79
• BI Autonomie et extension de la clause

Lorsqu'il est question de l'extension de la clause compromissoire, il faut


prendre en compte deux dimensions: l'extension de la convention d'arbitrage à des tiers
non signataires, d'une part (1°), et, d'autre p~ l'extension de cette même convention
dans le temps (2°).

1°) Extension de la clause compromissoire à des non signataires

• L'extension de la clause compromissoire à des non signataires mérite que l'on


s'interroge d'abord sur le fondement de cette extension (a), avant de pouvoir en déduire
ses liens éventuels avec le principe d'autonomie (b).

a) Fondement de l'extension de la clause à des non signataiTes

• Evoquer l'extension de la clause compromissoire à des tiers non signataires,


c'est d'abord se demander au nom de quoi une telle extension est-elle possible. Car enfi~
quelques soient les circonstances, c'est à dire qu'il s'agisse d'une convention d'arbitrage
conclue par acte séparé, ou d'une clause compromissoire - que celle-ci soit considérée
comme un contrat autonome ou comme une simple clause d'un contrat -, il est toujours
bel et bien question d'un contrat, et, à ce titre, le principe de relativité des conventions
devrait pleinement pouvoir s'appliquer: l'accord en vue de soumettre les litiges à venir à
rarbitrage plutôt qu'aux juridictions étatiques ne devrait concerner et lier que les parties
qui l'ont effectivement signé, sans pouvoir être étendu à des tiers extérieurs.


80
• Pourtant comme le signale Mme Blanchin 180,

« Une nouvelle règle matérielle semble se dégager d'une série d'arrêts

de la Cour d'appel de Paris, en ces termes: la clause compromissoire


serait opposable à toutes les parties concernées par le litige soumis à
l'arbitrage, même si certaines d'entre el/es ne sont pas formellement
signataires de la convention d'arbitrage ».

A noter que cette problématique se rencontre essentiellement à propos des


groupes de sociétés. L'un des premiers cas à faire état de cette solution fut, au début des
années 80, la célèbre affaire Dow Chemical 181 • Des filiales de Dow Chemical avaient

• contracté pour la distribution de produits d'isolation thennique avec différentes


compagnies dont les droits relevaient en dernier ressort de la société française [sover-
Saint-Gobain. Chaque contrat contenait une clause d'arbitrage. Lorsqu'un litige
concernant la qualité des produits apparut, les deux filiales de Dow Chemical engagèrent
la procédure arbitrale, de concert avec d'autres sociétés du groupe qui, elles, n'étaient pas
signataires du contrat. De ce fait, la défenderesse, [sover-Saint-Gobai~ contestait la
compétence du tribunal arbitral. Par décision provisoire en date du 23 septembre 1982 182 ,

• les arbitres se déclarèrent compétents: vu la réalité indivisible du groupe, et malgré la


personnalité juridique distincte de chacun de ses membres, la clause compromissoire
signée par certaines sociétés devait s'étendre à d'autres, étant donné le rôle que cel1es~ci

avaient joué dans la conclusion du contrat; en outre, il ressortait de la commune


intention des parties que les sociétés non signataires apparaissaient être de véritables
parties au contrat. En 1983, la Cour d'appel de Paris confirma cette solution 183 : « suivant
la volonté commune de toutes les sociétés intéressées, deux sociétés d'un groupe avaient
été parties à ces conventions bien que ne les ayant pas matériellement signées, et que la
clause compromissoire leur était dès lors applicable ».

180 C.Blanchi~ note précitée 1, (spéc. P 34).

• 181 Sentence C.C.I. No. 4131, Dow Chemica/ v. lsover-Saint--Gohain, 1982, Rev. arb., 1984, P 137.
182 Tribunal arbitral composé de P. Sanders, B. Goldman et M. Vasseur.
183 CA Paris, 21 octobre 1983, Dow Chemical, Rev. arb., 1984, p 98, note A. Chapelle.

81
• Déduire de la seule existence d'un groupe de sociétés l'extension de la clause
compromissoire à des membres non signataires du groupe serait sans doute une erreur.
C'est davantage l'intention des parties qui semble justifier une telle solution 184.

Pourtant dans plusieurs décisions, la Cour d'appel de Paris utilisa


expressément un autre fondement: celui de la validité et de l'efficacité propres de la
clause compromissoire. Ainsi les juges du fond français étendent la clause
compromissoire « aux parties directement impliquées dans l'exécution du contrat, dès
lors que leur situation et leurs activités font présumer qu'elles avaient connaissance de
l'existence et de la portée de cette clause »185. Ce raisonnement invite à penser que

• l'extension à des tiers non signataires est un corollaire au principe d'autonomie entendu
dans le sens d' « efficacité propre ». Mais il n'est pas celui systématiquement retenu par
les cours 186.

A noter que l'extension de la clause compromissoire à des non signataires


n'est pas une exclusivité française. Elle se retrouve dans la pratique arbitrale. Là encore
c'est l'intention des parties qui semble être la raison de l'extension de la clause comme

• en témoigne l'affaire CCI No. 5721 187 . La jurisprudence arbitrale accepte également
l'extension de la clause à un groupe de sociétés quand son engagement dans les
négociations ou dans la mise en oeuvre du contrat laisse croire qu'il a souhaité être lié par
la clause 188. Quelques rares décisions arbitrales font même état du devoir moral du
groupe à ne pas essayer de se soustraire à ses engagements véritables de façon
artificieLle 189.

184 Opinion appuyée par M. Fouchard et M. Vasseur.


185 CA Paris, 30 novembre 1988, Kormas, Rev. arb., 1989, P 691, note P.-Y. Tschanz ~ et: CA Paris,
Il janvier 1990, 0";, Rev. arb., 1992, P 95, note D. Cohen.
186 Exemple: CA Paris, 7 décembre 1994, V 2000 , Rev. arb., 1996, P 245, note C. Jarrosson.
187 Sentence C.C.!. No. 5721, European company v. American and Egyptian parties, 1990, J.D.I., 1990,

P8~~~:~ence C.C.1. No. 5103, Three european companies v. Four Tinisain companies, 1988,1.0.1., 1988,
• P 1206.
189 Sentence C.C.I. No. 8385, UScompany v. Belgiallcompany, 1995, J.D.I., 1997, P 1061.

82

Ces solutions ne doivent néanmoins pas être généralisées pour tous les Etats.
« Le droit suisse n'est ainsi, et de loin, pas favorable à une extension de la clause
arbitrale )}190. fi en va de même pour d'autres pays qui restent réticents à l'idée
d'impliquer des tiers dans le mécanisme arbitral 19 1.

Si différents fondements ont été proposés pour justifier l'extension de la


clause compromissoire à des tiers non signataires, c'est semble-t-il la volonté des parties
qui est le plus souvent utilisée. Mais quelle est la place de l'efficacité propre de la clause,
de son autonomie, dans cette problématique?

• b) Lien avec le principe d'autonomie

Comme cela a été dit, les juges du fond en France ont, à plusieurs reprises,
fondé l'extension de la clause compromissoire à des tiers non signataires, concernant les
groupes de sociétés notammen~ sur le principe de validité et d'efficacité propres de la
clause. Mais il est sans doute utile de préciser que cette solution n'a pas été reprise par la

• Cour de cassation. En etfe~ celle-ci a eu l'occasion, au moins par deux fois, de consacrer
ce fondement si elle l'avait vraiment souhaité. Au lieu de quoi, elle a, à chaque fois
qu'elle a été saisie d'un pourvoi contre les arrêts de la Cour d'appel de Paris concernés,
rejeté la demande, mais pour un motif différent consistant non pas en l'efficacité propre
de la clause, mais plutôt en la ratification présumée du contrat principal contenant la
clause 192 . Comme le souligne fort justement Mme Blanchin l93 , cela revient davantage « à
lier le sort des deux actes qu'à dégager une nouvelle application du principe
d'autonomie de la clause compromissoire )).

190 l.-f. Poudret, « L'extension de la clause d'arbitrage: approches française et suisse », 1.D.L, 1995, P 893.
A.Redfern, M. Hunter, M. Smith, note précitée 171, (spéc. P 239).


191
ère
192 Casso lèn: civ., 25 juin 1991, Comnav, Rev. arb., 1991, P 453, note P. Mayer; Cass 1 civ., Il juin 1991,
O"i, Rev. arb., 1992, P 73, note D. Cohen.
193 C. Blanchin, note précitée l, (spéc. p 34).

83
• En effet, la Haute juridiction française décide que le tribunal arbitral est
compétent parce que, compte tenu des circonstances particulières de l'espëce, et
considérant le rôle et rattitude des non signataires, ceux-ci se sont en réalité comportés
comme s'ils avaient effectivement été parties au contrat, et, par là-même, signataires de
la clause insérée prévoyant le recours à l'arbitrage. C'est donc grâce à une forme de
solidarité avec le contrat principal, et non grâce à son autonomie, que la clause
compromissoire est étendue à des personnes non matériellement signataires.

Malgré ces solutions jurisprudentielles, certains auteurs maintiennent leur


position et soutiennent que la possibilité d'étendre rarbitrage à des tiers est le corollaire

• du principe d'autonomie de la clause compromissoire. C'est le cas notamment de M.


Robert
l94
. De la même manière, d'après M. Ance1 195, l'extension à un « tiers, au sens du
droit français des contrats» serait justifié par l'effet mobilisateur de l'autonomie:
l'autonomie, entendue dans son acceptation la plus novatrice, celle qui détache la clause
compromissoire de toute loi étatique, offrirait ainsi la possibilité de ne plus soumettre la
clause au principe de 1"effet relatif des conventions.

• Mais ce point de vue est loin de faire l'unanimité. D'après l'ouvrage très
foumi sur l'arbitrage commercial international de Messieurs Fouchard, Gaillard et
Goldrnan l96 , il ne peut être dégagé aucune règle générale en matière d'extension de la
clause à des non signataires puisque cette extension dépend au contraire exclusivement
de l'intention des parties qui ne peut être déduite que des circonstances de la cause:

« We are therefore ofthe view that the Paris Court ofAppeals wrongly

based the extension ofthe arbitration agreement in a number ofcases.


conceming groups of companies in part;eu/ar. on the purported

• 194
195
1. Robert, note précitée 7.
P Ance1, note precitee
J .-. ... 9 .
196 Voir note précitée 23, (spéc. n° 505).

84
• principle of the arbitration agreement's 'own effectiveness and
validity' ».

Et de conclure que les réserves exprimées par la Cour de cassation française à


ce sujet son~ à leurs yeux., tout à fait justifiées.

Le raisonnement consistant à rapprocher l'extension de la clause


compromissoire à des non signataires du principe d'autonomie pourrai~ il est vrai., à
certains égards, se révéler dangereux., et porteur de solutions inadaptées. En effet., un tel
rapprochement tendrait à généraliser, voire même à systématiser l'extension dans des cas
197
comme ceux impliquant des groupes de sociétés. D'après M. Tschanz , il est évident

• que « prise trop liltéralement laformule pou"ait aboutir à étendre les effets de la clause
compromissoire à des personnes qui n y ont pas consenti, même implicitement
justement ce qu'on vise à éviter avec le principe d'autonomie : celui-ci cherche avant tout
». Or c'est

à sauvegarder l'efficacité de l'accord compromissoire 198. Etendre systématiquement la


portée de cet accord à des tiers, qui n'ont pas exprimé leur volonté de soumettre leurs
litiges à l'arbitrage, ne pourrait que nuire à celui-ci, dans la mesure où les acteurs du
commerce international se méfieraient davantage d'un mécanisme de règlement des

• conflits susceptible d'entraÎner des non signataires contre


incontestablement aller à ["encontre de la sécurité juridique qu'offre la relativité des
conventions. n semble
leur

dès lors plus sage de ne faire de cette extension de la clause


gré. C'est

compromissoire qu'une exception., devant en cette qualité être interprétée strictement et


étroitement.

A l"issue de cette analyse, il apparaît que c'est définitivement l'intention des


parties, explicite ou implicite, qui fonde ]a mise en œuvre de l'arbitrage même à l'égard
de personnes n'ayant pas signé le contrat. Mais si l'autonomie de la clause

• 197
198
Sous les arrêts: CA Paris, 30 novembre 1988 et CA Paris, 14 février 1989, Rev. arb., 1989, P 691.
C. Blanchin, note précitée 1, (spéc. p 35).

85
• compromissoire n'est pas à même de justifier rextension de celle-ci à des tiers, peut-elle
en revanche expliquer l'extension dans le temps des effets de cette même clause?

2°) Extension de la clause compromissoire dans le temps

L'étude de l'extension de la clause compromissoire dans le temps conduit à


s'interroger sur cette extension à deux moments distincts: d'une part, après le prononcé

• de la sentence (a), et, d'autre part, après la fin du délai d'arbitrage (b).

a) L'extension après le prononcé de la sentence

La question de rextension dans le temps de la clause compromissoire après le


prononcé de la sentence ne se pose bien évidemment pas dans tous les cas. En effet, qu'il
suffise d'imaginer les nombreuses hypothèses où le tribunal arbitral tranche le litige au

• fond, force est de constater que la question ne pose pas ici problème. Les arbitres règlent
le litige, les parties peuvent s'en satisfaire ou non, et donc faire ou non appel aux
juridictions étatiques, mais quoiqu'il en soit, la clause continuera à s'appliquer pour les
litiges à venir, conformément à ce que prévoit la clause elle-même.

La question de son extension après que la sentence ait été prononcée se


présente donc dans une circonstance bien particulière: celle où le ou les arbitres
prononcent la résolution ou la résiliation du contrat principal. Qu'advient-il ensuite de la
clause compromissoire qui y est insérée?

Il convient avant toute chose de bien distinguer cette problématique de celle

• évoquée en détail plus haut sur l'autonomie matérielle de la clause d'arbitrage. La

86
• solution qui veut que la clause compromissoire est autonome, séparable du contrat
principal qui la contient, n'est plus contestée, ni contestable, même si des hésitations
subsistent encore quant à son fondement. C'est grâce à ce principe d'autonomie ainsi
entendu que les arbitres saisis d'une demande de constat de nullité ou de caducité du
contrat de base peuvent se prononcer même si la clause qui leur donne pouvoir fait partie
du contrat en question. En d'autres termes, le tribunal arbitral peut décider de la rupture
du contrat principal, la clause d'arbitrage survivant à ce dernier et étant dès lors
applicable malgré la résolution (ou la résiliation) de la convention de fond qui la contient

Deux suites possibles sont alors envisageables. Les arbitres peuvent, d'une
part, constater la validité du contrat principal: la clause compromissoire sera alors plus

• que jamais utile pour régler les litiges à venir. Mais ils peuvent également prononcer sa
rupture, et c'est ici que se pose la question de l'extension de la clause compromissoire
après le prononcé de la décision arbitrale : la rupture du contrat principal constatée PaT
une sentence arbitrale prive-t-elle pour autant la clause d'arbitrage de ses effets pour
l'avenir?

La solution française adoptée par la Cour de cassation peut sans doute fournir

• des pistes de réflexion. Dans un arrêt du 16 juin 1993 199, la 2éme Chambre civile a rejeté le
moyen tiré de l'autonomie de la clause compromissoire et refusé ainsi l'extension, au
motif que « le prononcé de la sentence marquait l'expiration de la convention
d'arbitrage ». n est néanmoins important de préciser qu'en l'espèce le litige concernait le
paiement de prestations postérieures à la fin des relations contractuelles entre les parties.
n est donc plus que probable que tout litige ayant eu son origine avant la rupture du
contrat principal aurait été soumis à l'arbitrage, et ce, en vertu du principe d'autonomie
matérielle de la clause compromissoire. Mais ceci n'est qu'une supposition puisque la
Haute juridiction française qui a eu à se prononcer sur cette issue a soigneusement évité
de prendre parti.

• 199 Casso 2.:mc civ., 16 juin 1993, Rev. arb., 1994, P 312, note D. Cohen.

87
• C'est ce que relève très justement Mme Blanchin2°O :

« la Cour de cassation ne prend pas position quant à une autonomie de


la clause compromissoire à l'égard de la sentence, autonomie qui
signifierait la survie de la clause jusqu'à ce qu'eussent été épuisés tous
les litiges pouvant entourer le contrat principal, alors même que les
arbitres auraient statué sur sa résolution ».

C'est, si l'on peut dire, une nouvelle illustration de la méfiance qu'inspire le


principe d'autonomie. Sa portée peut être aisément étendue, et justifier de nombreuses

• solutions. Le doute plane donc encore au-dessus de cette question de l'extension dans le
temps de la clause compromissoire après le prononcé de la sentence. Qu'en est-il de son
extension après la fin du délai d'arbitrage?

b) L'extension après la fin du délai d'arbitrage

• L'incident qui pourrait cette fois hypothéquer la pérennité de la clause


compromissoire n'est plus d'ordre substantiel, comme le prononcé de la rupture du
contrat qui la contient, mais procédural puisqu'il s'agit de l'expiration du délai
d'arbitrage. Que se passe-t-il si les arbitres ne rendent pas leur sentence à temps, s'ils ne
se décident pas dans le délai qui leur était imparti? Il va de soi qu'en de telles
circonstances, l'instance arbitrale prend fin. Est-ce à dire pour autant que les parties ne
peuvent plus prétendre avoir recours à l'arbitrage comme mode de règlement de leur
litige? Doivent-elles s'en remettre aux juridictions étatiques?

• 200 C. Blanchi~ note précitée 1. (spéc. p 37).

88
• A révidence, cette solution serait injuste puisqu'elle aurait pour conséquence
de faire payer aux parties le prix de la lenteur ou de la négligence du tribunal arbitral. il
semble donc falloir en conclure que la clause d'arbitrage demeure valable, même après
l'expiration du délai prévu pour le prononcé de la sentence arbitrale : en effet, « la clause
compromissoire ne s'use pas, même si l'on s'en sert ),20/. Ainsi elle dictera toujours le
mode de règlement des conflits existants ou pouvant survenir entre les parties, « il suffira
2
de la mettre à nouveau en oeuvre en reconstituant un tribunal arbitral i0 .

Cette extension de la clause compromissoire au-delà du délai d'arbitrage


expiré a d'ailleurs déjà été retenue par des décisions étatiques203 . L'une d'entre elles
retenait de manière expresse, quoique ambiguë, le principe d'autonomie pour fonder sa

• décision : « le principe de l'autonomie de cette clause ne peut faire échec à la volonté des
parties telle qu'elle résulte de la convention »204. Une fois encore, autonomie et volonté
des parties sont étroitement associées en faveur d'une efficacité optimale de la clause
d'arbitrage. Les parties ont décidé d'un commun accord - la clause compromissoire - de
renoncer à saisir les juges étatiques: cette intention explicite, conjuguée au principe
d'autonomie de la clause, justifie à elle seule que la clause compromissoire survive à la
fin de l'instance arbitrale. Les effets de la clause seraient maintenus du fait même de son

• indépendance.

n semble donc que cette fois rextension de la clause dans le temps après
l'expiration du délai d'arbitrage soit à rattacher au principe d'autonomie pris dans sa
seconde signification. Ce qui est en cause ici n'est plus le problème de la séparabilité de
la clause par rapport au contrat principal qui la contient puisque rexistence et la validité
de ce dernier ne sont pas remises en cause. En revanche, il est question de la volonté
véritable, et en roccurrence affichée, des parties. Or, rautonomie entendue comme
l'indépendance de la clause à l'égard de toute loi étatique renvoie, comme il a été vu, à

Note sous l'arrêt CA Colmar, 21 septembre 1993, Rev.jur. corn., 1994, p 154.


201
202 C. Blanchin, note précitée 1, (spéc. p 37).
203 CA Colmar, note précitée 201 et CA Paris, note suivante 204.
204 CA Pari~ 25 juin 1991, S.A. Jellmolll Schneider, Gaz. Pal., 25 décembre 1993, somm., p 578.

89
• l'importance accordée à l' intention des cocontractants. Sans que celle-ci fonde à elle
seule la validité de principe de la clause compromissoire, elle reste néanmoins un facteur
détenninant et prépondérant dans rappréciation de son efficacité lorsqu'il s'agit de
rautonomie conçue comme autonomie « substantielle ». D'après M. Fouchard, « cette
règle de validité a pour conséquence immédiate de prolonger les efftts de la clause
compromissoire et de lui donner en quelque sorte une permanence dans le temps, qui
joue enfaveur de l'arbitrage »205.

C'est donc bel et bien au nom de la volonté des parties, exprimée à son
paroxysme dans le principe d'indépendance de la clause compromissoire, que cette
dernière doit être maintenue et étendue au-delà du délai d'arbitrage expiré: elle permettra

• en effet de désigner de nouveaux arbitres qui seront chargés de régler le litige opposant
les parties conformément à ce qu'elles avaient prévu en établissant de concert la
convention d'arbitrage.

A l'issue de cet examen sur les rapports, les liens, que le principe
d'autonomie tisse avec d'autres règles et principes, force est de constater qu'il occupe

• une place particulière dans le droit de r arbitrage international. Sans que dans chaque cas
son incidence soit toujours évidente ou même directe, ce principe apparait
indéniablement comme une pièce centrale dans le mécanisme arbitral. Il est donc temps
de s'interroger sur le positionnement du principe d'autonomie dans le droit international.

• 20S Ph. Fouchard, « l'arbitrage et les tiers ». Rev. arb., 1988, P 431.

90
• CI Positionnement du
international
principe d'autonomie dans le droit

Nul ne peut plus mer rinfluence du principe d'autonomie sur le droit


international de l'arbitrage. Certains vont même jusqu'à découvrir rexistence d'un
système propre à la clause compromissoire et dans lequel ce principe jouerait un rôle non
négligeable (1°). Tandis que d'autres découvrent dans le principe d'autonomie une source
d'inspiration pouvant servir de modèle à d'autres clauses, en dehors même du cadre de
l'arbitrage (2°).

• 1°) Un principe, élément d'un système propre à la clause compromissoire

Le principe d'autonomie de la clause compromissoire serait au cœur d'un


système propre à l'arbitrage et constitué d'un ensemble de règles matérielles (a). Mais ce
système, dont l'existence est loin d'être établie, présente certaines faiblesses (b).

• a) Un système constitué d'un ensemble de règles motérielles

Il suffit de considérer le principe d'autonomie en lui-même pour que l'idée de


l'existence d'un système propre à la clause compromissoire apparaisse. L'acception
traditionnelle, et dont la reconnaissance à travers le monde est quasi unanime, n'est pas
celle la plus à même de mettre sur cette voie. En effet, dire que la convention d'arbitrage
est séparable du contrat alors même qu'elle y serait matériellement insérée, pennet certes
d'accroître refficacité de l'arbitrage, mais elle ne permet pas à elle seule de tracer les
contours d'un régime dérogatoire et spécifique à la clause compromissoire.


91
• Bien au contraire, le second aspect de rautonomie, avec la reconnaissance
d'une règle matérielle, va tout à fait dans ce sens. La clause compromissoire est
autonome par rapport à toute loi: même si, comme il a été vu, il semble difficile
d'exclure toute référence à une loi étatique, l'idée est quand même l~ latente. Il s'agit bel
et bien, de manière globale, de rendre la clause indépendante des particularismes des
différentes législations, et donc de la soumettre à un régime à part entière. C'est d'ailleurs
robjet même de la consécration d'une règle matérielle que de simplifier la recherche de
la loi applicable en la supprimant, la méthode des conflits de loi étant écartée. n est
d'ailleurs frappant de voir apparaître assez souvent, dans les commentaires d'arrêt
mettant en œuvre cette règle matérielle, la référence à un « régime juridique propre» ou
encore un « ensemble de règles matérielles». Ainsi M. Goldman évoque « ['existence

• d'un régime juridique propre à cette 'matière' »206.

Premier élément possible d'un ensemble de règles créatrices d'un régime


particulier, rautonomie de la clause compromissoire se conjugue, d'une manière ou
d'une autre, avec d'autres règles déjà évoquées.

Sur le terrain procédural, le principe de Compétence-Compétence permet de

• renforcer la clause puisque les arbitres restent compétents pour se prononcer sur leur
propre compétence, ce pouvoir pouvant aller jusqu'à leur donner une stricte priorité sur
les juridictions étatiques. Autre pièce qui vient s'ajouter au puzzle, la règle d'extension
de la clause compromissoire aux tiers non signataires qui se sont comportés comme des
contractants va là encore, dans le sens d'une spécificité concernant le régime de la clause
- et c'est d'ailleurs ici flagrant puisque cette extension contrarie le principe
d'indépendance des personnes morales, du fait de leur personnalité juridique distincte,
ainsi que celui de relativité des conventions207 .

• 206
207
B. Goldman, sous l'arrêt Gosse/, note précitée 58
Voir Partie m, B, 1°).

92
• Mais au-delà du principe d'autonomie lui-même et des autres règles qu'il
peut influencer ou justifier, la clause compromissoire dans le contexte international, et
avec elle le droit de l'arbitrage international en son entier, est, dans certains pays,
soumise à d'autres règles matérielles, dérogatoires par rapport au droit commun.

La première de ces règles qui mérite d'être mentionnée est sans doute la
capacité reconnue à l'Etat de compromettre au niveau international. Le pouvoir d'un Etat
ou de l'une de ses émanations de passer une convention d'arbitrage ne fait pas l'objet de
loi ni de partique unifonnes entre les Etats : dans de nombreux pays, aucune restriction
n'existe; à l'inverse, d'autres pays interdisent une telle pratique. La France a adopté une
« ligne moyenne »208 : l'Etat ne peut compromettre au niveau national, tandis que cette

• question de capacité au niveau international a été soulevée dans l'arrêt Galakis


cet arrêt, la Cour de cassation estima que les juges du fond avaient seulement à se
prononcer sur le point de savoir si la prohibition édictée pour les contrats internes devait
209
• Dans

s'appliquer également à un contrat international passé pour les besoins et dans les
conditions conformes aux usages du commerce maritime. Il fut décidé en définitive que
la prohibition n'était pas applicable à un tel contrat et que, par suite, en déclarant valable
la clause compromissoire souscrite par une personne morale de droit public, la Cour

• d'appel avait légalement justifié sa décision. La Haute juridiction française édictait ainsi
une nouvelle règle matérielle, dérogatoire du droit commun français. A noter que les
juridictions ont ensuite étendu cette solution à des entités étrangères21O • Cette règle a été
expressément consacrée par la Convention européenne de 1961 211 , ainsi que par la Loi
fédérale suisse212 • D'après Mme Blanchin, « un problème d'arbitralité 'subjective' des
litiges est ainsi réglé de manière directe et définitive »213.

208 A. Redfern, M. Hunter, M. Smith., note précitée 171, (spéc. P 61).


209 Cass 1.:n: civ., 2 mai 1966, Ga/akis, D., 1966, P 575, note 1. Robert; Rev. crit., 1967, P 553, note
B. Goldman.
210 CA Paris, 17 décembre 1991,Ga/oi/, Rev. arb., 1993, P 281, note H. Synvet.

211 La convention adopte une solution appréciable: les personnes morales de droit public ont le droit de
passer des conventions d'arbitrage, tandis que si l'Etat veut limiter cette possibilité d'une manière ou d'une

• autre, il doit le dire au moment où il signe, ratifie ou adhère à la convention.


212 Art. 177, al 2.

213 C. Blanchin, note précitée 1, (spéc. p 32).

93
• Autre difficulté,
compromissoires par référence.
autre règle: concernant le problème des clauses
n arrive fréquemment, dans la pratique des contrats, que
la clause ne soit pas directement incluse dans le corps du contra~ mais dans une annexe
(conditions générales, contrat type). La question est alors de savoir à quelles conditions
admet-on que les parties sont liées par cette clause. naurait été naturel d'exiger un renvoi
exprès, spécifique ou général, du contrat au document qui contient la clause, et ce, afin
d'éviter toute erreur sur le consentement et de favoriser la sécurité juridique. Pourtan~
214
c'est une autre solution qu'a retenue la Cour de cassation française • A l'issue d'une

longue procédure judiciaire, la Haute juridiction saisie pour la seconde fois dans cette
affaire, a décidé qu' « en matière d'arbitrage international, la clause compromissoire par

• référence écrite à un document qui la contient [...] est valable à défaut de mention dans la
convention principale, lorsque la partie à laquelle la clause est opposée, a eu
connaissance de la teneur de ce document au moment de la conclusion du contrat et
qu'elle a, fut-ce par son silence, accepté l'incorporation au contrat ». Ainsi, d'après cette
règle matérielle, seule l'intention réelle des parties est à rechercher.

A la lumière de ces rapPels et de ces nouveaux exemples, force est de

• constater que la clause compromissoire est entourée de règles matérielles et de principes


qui lui sont propres, e~ panni eux, le principe d'autonomie occupe une place importante,
tout comme la volonté des parties de manière générale. Est-ce à dire pour autant que cette
réglementation spécifique constitue un système cohérent?

b) Faiblesses d'un tel système

Un consta~ évident, s'impose: s'il existe un système propre à la clause


d'arbitrage, celui-ci est lacunaire à bien des points de vue. En se contentant des principes

• 214 Casso 1(te cïv., 9 novembre 1993, Bomar Oif 1/, Rev. arb., 1994, P 108, note C. Kessedjian.

94

énoncés plus haut, le système ne serait pas complet Mais sans aller jusque l~ il convient
de souligner que toutes ces règles n~ont pas été massivement admises par les Etats. La
France a consacré ces principes à leur degré le plus achevé~ cela ne veut pas dire que tel
est le cas dans tous les pays.

D~ailleurs même en admettant et en reconnaissant toutes ces règles


matérielles, il subsisterait inévitablement des zones de vide juridique si l'on acceptait
l'idée d'un système autonome. En réalité, la jurisprudence, qui est à l'origine de
l'élaboration de ces règles, n'a jamais eu la prétention de mettre en place un tel système.
Son œuvre créatrice s'est faite lentement, au cas par cas, en fonction des problèmes
rencontrés. Les juges essaient de répondre au mieux aux exigences de l'espèce en

• essayant de trouver les solutions les plus adaptées, celles qui favorisent en général
l'arbitrage. Cette casuistique constitue indéniablement un « obstacle de fait à
l'achèvement normatif», dans la mesure même où « certains problèmes relatifs à la
validité de la clause d'arbitrage n'ont, semble-t-il, jamais été tranchés enjw.tice »215.

Ainsi s'il existe bien plusieurs principes, plusieurs règles relatives à la clause
compromissoire, elles ne sont pas encore assez nombreuses, ni assez cohérentes entre

• elles pour pouvoir prétendre constituer un système autonome. Le recours à la méthode


des conflits de lois est toujours nécessaire, au moins de manière résiduelle. Même en
France o~ comme nous l'avons vu, le système est l'un des plus complets, le recours à une
loi étatique s'avère toujours indispensable, et ce, à plusieurs points de 'Vue: pour la
détermination de la validité en la forme du contrat principal qui contient la clause, ainsi
que pour I~appréciation de la capacité des parties ou de leur pouvoir à conclure le contrat
et la convention d~arbitrage. Mme Blanchin résume ainsi la situation: le juge
« continuera parfois à déterminer la loi applicable à la convention d'arbitrage, qui se
trouve à l'origine de la sentence soumise à son contrôle, même si cette loi ne sera vouée
qu'à une fonction subsidiaire et de plus en plus réduite »216.

• 21.5
216
C. Blanchin, note précitée 1. (spéc. P 32).
C. Blanchin, note précitée 1, (spéc. p 33).

95
• Ce qui est vrai à l'échelle d'un pays se vérifie d'autant plus au niveau
international. En ce domaine, en effet, les règles matérielles dont il a été question sont
loin d'avoir reçu une approbation unanime. Certains pays refusent toujours de faire de
l'arbitrage le mode de règlement des conflits libéral que beaucoup d'autres appellent
pourtant de leurs voeux. Quant à ceux qui cherchent au contraire à favoriser l'arbitrage,
leurs positions sur ces problèmes restent divergentes dans le détail, même si leur objectif
final est bien l'efficacité maximale de la clause compromissoire. Ainsi, si la France et la
Suisse sont souvent audacieuses dans leurs solutions, les anglo-saxons sont davantage
réservés et modulent leurs décisions en fonction de cette réticence. C'est dire si la
reconnaissance d'un système spécifique à la clause compromissoire, difficile au niveau

• national, s'annonce pour l'heure impossible au niveau international.

Les partisans et les opposants à la reconnaissance d'un système autonome


sont souvent ceux qui défendaient ou critiquaient la lex mercatoria comme ordre
juridique à part entière. On peut d'ailleurs sans doute calquer les arguments invoqués en
cette matière sur la problématique dont il est question ici. n était en effet reproché à la
lex mercatoria son aspect lacunaire et son mode d'élaboration non rigoureux, critiques

• qui peuvent être adressées tout aussi bien aux règles matérielles consacrées pour la clause
compromissoire. D'ailleurs, il a même été proposé de voir dans les règles particulières
dégagées en matière d'arbitrage une expression de la lex mercatoria : «( Mode d'accès à
l'ordre juridique de la lex mercaloria el même, de ce point de vue, mode de création de
normes à l'intérieur de celle-ci, l'arbitrage est aussi un mode d'in~\'ertion des normes de
la lex mercatoria dans l 'ordre juridique étatique »217.

fi vient d'être montré qu'au sein du droit international de l'arbitrage, le


principe de l'autonomie de la clause compromissoire occupe une place particulière qui la

• 217 P. Lagarde, « Approche critique de la Lex Mercatoria », dans l'ouvrage: Ph. Fouchard, Ph. Kahn,
A. Lyon-Cae~ Le droit des relations économiques inJemationales : Eh/des offertes à Berthold Goldman,
Paris, Librairies tecchniques, 1982, p 125.

96
• placerait au cœur d'une fonne de régime spécifique à la clause d'arbitrage qui, bien
qu'incomplet, rassemble déjà potentiellement plusieurs règles matérielles. Qu'en est-il si
l'on sort ce principe de la sphère de l'arbitrage? Est-ce que le principe d'autonomie peut
servir de modèle et être reproduit pour d'autres clauses?

2°) Un principe, source d'inspiration pour d'autres clauses

• L'autonomie de la clause compromissoire n'est pas un principe ajustable à


tout type de clause: la question de son influence ne peut se poser qu'à l'égard de
dispositions qui sont dans le même ordre d'idées, telles que la clause attributive de
juridiction (a). Ce n'est qu'une fois admis ce préalable que ron peut tenter d'examiner en
quoi le princiPe d'autonomie peut servir de modèle (h).

a) Un modèle pou, la clause anributïve de juridiction

• Il semble évident que le principe d'autonomie ne peut concerner toutes les


clauses d'un contrat. Les dispositions qui forment le corps de celui-ci, en constituent le
fond, expriment les modalités même de la transaction, ne peuvent bien évidemment pas
bénéficier de ce principe. Seules des clauses « comparables» à la clause compromissoire
peuvent y prétendre. Il a déjà été VU218 que la clause d'arbitrage est une clause originale,
de nature différente : elle fait partie matériellement du contrat, mais son objet est de
soumettre les litiges pouvant naître relativement à ce contrat à un tribunal arbitral. Ainsi
elle n'est pas une modalité de fond, elle est davantage tournée vers la procédure, ce qui
explique qu'on puisse la « séparer» des autres dispositions sans briser rhannonie
contractuelle.


97
• A bien y réfléchir, un seul type de clause semble se rapprocher suffisamment
de la clause compromissoire pour pennettre une quelconque assimilation : la clause
attributive de juridiction. Cette clause, appelée aussi clause d'élection de for, est la clause
par laquelle les parties prorogent la compétence de juridictions étatiques au détriment des
juridictions étatiques nonnalement compétentes.

L'analogie entre clause compromissoire et clause attributive de juridiction


peut sembler audacieuse. En effet, la clause d'élection de for, du fait qu'elle porte
atteinte à la souveraineté d'un Etat au profit d'un autre Etat, et non pour la mise en œuvre
d'une justice privée, apparaît sans doute comme plus dangereuse, ce qui irait dans le sens

• d'un contrôle plus étroit de la clause attributive de juridiction. Par ailleurs, et d'un point
de vue procédural cette fois, la clause attributive de juridiction participe du
« fonctionnement du service public de la justice »219, tandis que la clause compromissoire
est au contraire du domaine de l'individuel, de la liberté des parties d'organiser de bout
en bout le déroulement de la procédure.

Les deux types de clause sont donc bien différents. Pourtant, et c'est ce qui

• rend une tentative de rapprochement envisageable, elles se ressemblent étrangement pour


ce qui est de leur nature et de leur fonction :

« Ces delLt types d'accord sur la compétence ont un point commun

essentiel: ils se caractérisent par un objet fondamentalement distinct


du contraI qui peut les contenir. Contrairement aux autres stipulations,
il s'agit d'un engagement portant, non sur des éléments de fond. mais
~'ur des questions procédurales »220.

• 219
220
C. Blanchin, note précitée l, (spéc. p 65).
C. Blanchin, note précitée 1, (spéc. P 66).

98
• Sur ce point précis, clause compromissoire et clause attributive de juridiction
présentent des similitudes certaines : elles ont toutes deux un caractère hybride. Elles font
d'abord et avant tout partie d'un contrat, ce qui implique leur nature contractuelle. Mais,
parallèlement, elles prévoient chacune une attribution de compétence autre que celle des
juridictions étatiques normalement compétentes: dans un cas, un tribunal arbitral
indépendant des cours étatiques est désigné; dans l'autre, c ~ est un transfert de
compétence qui est exercé entre deux ou plusieurs Etats. Mais à chaque fois, il s'agit de
définir comment seront réglés les conflits dont fait l'objet le contrat. Ainsi la séparabilité
de la clause est plus qu'envisagt:able dans un cas comme dans l'autre, et l'autonomie de
la clause compromissoire pourrait parfaitement servir de modèle à la clause attributive de
juridiction.

• D'autant qu'on assiste actuellement à un rapprochement entre justice étatique


et arbitrage221 , qui se manifeste, d'une part, Par l' « arbitrabilisation» de la justice
étatique du fait d'une coopération et d'une certaine complémentarité entre tribunaux
arbitraux et étatiques, et, d'autre part, par une «j uridictionalisation » de l'arbitrage due à
un « alourdissement du formalisme el une 'institutionalisation' des organismes
d'arbitrage », traduisant un mimétisme de l'arbitrage par rapport aux tribunaux étatiques.

• Rien ne s'oppose donc en théorie à ce que le principe d'autonomie soit


appliqué à la clause attributive de juridiction, et même, d'un point de vue pratique, tout
l'encourage. Les accords portant sur la compétence ont en effet l'avantage d'offrir aux
opérateurs du commerce international une prévisibilité quant au déroulement de la
procédure en cas de conflit, mais aussi une sécurité certaine puisque tout risque de
manipulation ou de forum shopping de la part de 1"adversaire est écarté. Clause
compromissoire et clause attributive de juridiction répondent donc aux mêmes besoins du
commerce international, elles requièrent par conséquent aussi d'être pleinement efficaces
à ce niveau international: l'autonomie est à ce titre un moyen radical pour mettre à t'abri

• 221 C. Dlanehin, note précitée 1, (spec. p 66 s.).

99
• la clause des différentes causes d'invalidation qui peuvent toucher le contrat qui la
contient et écarter les interdictions internes.

Mais en admettant que le principe d'autonomie serve de modèle pour la


clause attributive de juridictio~ quelles en seraient les conséquences?

b) Les conséquences du principe d'autonomie


pou, la clause attributive de juridiction

• Certains éléments montrent, tant au niveau international qu'au niveau des


Etats, que le principe d'autonomie pourrait tout à fait être appliqué aux clauses
attributives de juridiction.

En effet, il existe au sem des conventions internationales, un courant


favorable à une plus grande efficacité de la clause d'élection de for. Ainsi la Convention
de Bruxelles222 consacre une « règle matérielle unifonne » qui élude la question de la loi

• applicable pour détenniner la validité de la clause attributive de juridiction. Par ailleurs,


plusieurs conventions interétatiques fixent des règles de compétence internationale
semblables, ce qui va dans le sens d'une uniformisation des juridictions étatiques ou
encore de leur « interchangeabilité». Les arguments contre la clause attributive de
juridiction perdent alors de leur poids puisque la souveraineté de chaque Etat est moins
mise en porte à faux: c'est au contraire vers une forme de coopération entre Etats que
tendent ces conventions.

• 222 Convention du 27 septembre 1968, art. 17.

100
• Il reste à dire que la doctrine est en général en faveur de la reconnaissance de
l'autonomie de la clause attributive de juridiction, au moins concernant l'autonomie par
rapport au contrat principal 223 .

Cette tendance favorable à l'autonomie de la clause d'élection de for se


retrouve d'ailleurs en droit comparé. En effet, plusieurs Etats ont admis, dans leur
jurisprudence, ce principe en matière de clause attributive de juridiction. La Suisse a sans
doute été la pionnière en ce sens. D'autres Etats, comme les pays ex-socialistes224 ou
encore la France225 , ont également consacré de manière expresse l'autonomie. Les
décisions anglo-saxonnes sont plus ténues dans leur position, mais vont indubitablement
dans le même sens. Malgré tout, et comme le souligne Mme Blanchin226 :

• «Contrairement à ce que nous avons pu constater au sujet de la clause


arbitrale, l'indépendance de la prorogation volontaire de compétence
n'est pas un principe répandu d'une manière quasi universelle: il reste
encore à l'étal embryonnaire dans de nombreut pays. »

Quoiqu'il en soit, il est permis de penser que la pleine consécration du

• principe d'autonomie de la clause attributive de juridiction signifierait pour cette dernière


les mêmes conséquences que celles mises en évidence pour la clause compromissoire.

Dès lors, le premier effet de l'autonomie serait bien évidemment la


séparabilité de la clause attributive de juridiction à l'égard du contrat principal qui la
contient. Ainsi la clause d'élection de for ne pourrait être affectée que de ses propres

223 J. Jodlowski, « Les conventions relatives à la prorogation et à la dérogation à la compétence


internationale en matière civile », Rec. cour~ La Haye, 1974, t m, p 510.
Mais aussi: E. Mezger, « Du consentement en matière d'electio juris et de clause compromissoire », Rev.
crit., 1971, P 37 ~ et: H. Gaudemet-Tallon, lA prorogation vololl/aire de juridiction dans le droit
illtenltl/iollal privé, Paris, 1965, p 53.
224 J. Rajski, « L'influence de la volonté des parties sur la compétence internationale des tribunaux en matière
civile dans le droit de quelques pays socialistes », Mélallges Ch. Fragis/as, Publication de l'Université

• Aristotélicienne de Thessalonique, 1969, p 175.


22S Casso 2
Gnc
civ., Il janvier 1978, Société A. Brivio, R. T.D. civ., 1978, P 921, note 1. Nonnand.
226 C. Blanchin, note précitée l, (spéc. p 73).

lOI
• vIces. Les vices touchant au contrat ne la mettraient pas en péril, puisque le contrat
pourrait être annulé ou résilié sans que la clause devienne caduque pour autant. Comme
dans le cas de la clause compromissoire, cette solution ne peut être que souhaitée
puisque, là encore, les objets de la clause attributive de juridiction et du contrat principal
qui la contient sont bien distincts: « celle-ci ne devient réellement utile que lorsqu'une
difficulté surgit à propos de celui-là >,227.

Autre conséquence, toujours liée à l'autonomie matérielle de la clause: celle-


CI ne sera pas nécessairement soumise à la même loi que celle qui régit le contrat
principal. Cela se comprend si l'on estime qu'il est question de deux conventions
procédant de deux actes de volonté distincts. Sans aller jusque l~ il est évident que la

• clause attributive de juridiction et le contrat principal sont suffisamment différents dans


leur objet et dans le but qu'ils poursuivent pour pouvoir être régis par deux lois distinctes.
Cela voudrait néanmoins dire que la clause d'élection de for serait soumise, quant à sa
validité, aux exigences étatiques. La tentation est grande, là encore, de vouloir la
soustraire à toute loi étatique.

C'est ici qu'intervient le second effet du principe d'autonomie, conçu cette

• fois comme une véritable indépendance de la clause attributive de juridiction. Ainsi la


prorogation conventionnelle de compétence serait tenue a priori comme valable. Premier
avantage évident: les manoeuvres dilatoires des parties seraient déjouées puisque le juge
désigné pourrait statuer lui-même sur sa compétence. Ce juge serait d'ailleurs en principe
en mesure de connaître de tout litige relatif au contrat, sauf disposition expresse des
parties: cet aspect de l'autonomie est donc à même de leur garantir une certaine sécurité
juridique, en même temps qu'elle permet, par un gain de temps, une meilleure
administration de lajustice.

Tous ces avantages seraient bien peu efficaces s'ils n'existaient qu'à l'échelle
d'un pays. D'où ridée de rendre la clause d'élection de for au moins Partiellement

• 227 E. Metzger, note precitee


... 223 .

102

indépendante de toute loi étatique afin de lui reconnaître une efficacité maximale,
efficacité ne pouvant être remise en cause par un droit étranger plus sévère.

Beaucoup d'arguments sont donc en faveur de la reconnaissance complète


d'un principe d'autonomie en matière de clause attributive de juridictio~ principe qui en
est encore, pour le moment et en cette matière, à ses balbutiements.

Confiné au domaine de rarbitrage, et plus précisément de la clause


compromissoire, le principe d'autonomie se fait chef d'orchestre d'un système qui se
voudrait lui-même autosuffisant, sans y parvenir réellement. Confronté à des contextes

• différents, le principe d'autonomie se veut source d'inspiration et sert de modèle. C'est


dire combien sa place est prépondérante et centrale tant au niveau du droit international
de rarbitrage qu'au niveau du droit international dans son entier, et même de la
technique juridique en général.


103

Conclusion

« Le pnnclpe d'autonomie de la clause compromissoire»? Sans doute


vaudrait-il mieux parler DES principes d'autonomie de la clause compromissoire, tant les
réalités que cette expression recouvre sont distinctes. Il n'y a sans doute rien de commun


entre ridée de « séparabilité » de la clause et celle de son « indépendance », si ce n'est
que ces deux notions s'inscrivent dans une logique favorable à l'arbitrage international en
général.

Les débats et prises de position auxquels la question de rautonomie a donné


jour ont été, et sont encore, très enflammés. La raison? Elle est simple: la question de
l'autonomie est une véritable problématique théorique : quelle est la nature exacte de la
clause compromissoire? Est-ce un accessoire, un contrat? Est-ce un contrat sans loi?

• Doit-elle bénéficier d'un régime différen~ au besoin dérogatoire? Mais toutes ces
interrogations sont loin d'être des questions d'école. Elles appellent des réponses
fondamentales pour la pérennité d'un mode de règlement des conflits qui est celui
désormais privilégié par les acteurs du commerce international. Elles s'inscrivent dans le
cadre de préoccupations pratiques et tangibles de professionnels qui s'orientent de plus
en plus vers des relations internationales et donc des litiges internationaux.

L'engouement incontestable des auteurs, des tribunaux, des cours, pour ce


vaste sujet qu'est l'autonomie de la clause compromissoire est sans doute justifié, et en
tout cas aisément explicable, encore faut-il veiller à ne pas aller trop loin et à ne pas voir

• dans ce principe la source des réponses à l'ensemble des questions que posent encore
l'arbitrage et la clause compromissoire. Les notions de Compétence-Compétence, ou

104
• d'extension de la clause compromissoire ne peuvent sans doute pas être expliquées Par ce
simple biais: l'autonomie de la volonté est peut-être plus à même de les expliciter. De
même, la mise en place d"un système autonome, propre à la clause compromissoire et
commun à tous les Etats semble davantage relever de Putopie que de la réalité.

En se montrant plus critique encore, il semble que les deux significations


données au principe d'autonomie méritent elles aussi d'être relativisées. L'autonomie de
la clause compromissoire par rapport au contrat princiPal est sans doute, dans les faits,
largement accueillie, mais des pays restent toujours en retrait par rapport à cette
approche, ce qui fait que le principe n'est toujours pas absolu. Cette assertion est encore
plus vraie quand il est question de l'autonomie de la clause compromissoire par rapport à

• toute loi étatique: les développements qui y ont été consacrés ne doivent pas masquer le
fait que la méthode conflictualiste reste celle communément admise; en comparaison,
radoption d'une règle matérielle par certains Pays, et en premier lieu la France, est quasi
anecdotique.

Anecdotique, certes, mais uniquement d'un point de vue pratique. En effet,


théoriquement, une telle autonomie, qui fait resurgir la problématique de la force de la

• volonté des parties, ne peut être que source de nombreux développements. Et c'est là
toute la dialectique du sujet: le théorique renvoie au pratique et inversement.


105

Bibliollranhie

Ouvrages consultés: (par auteurs et par ordre alphabétique)

• • c. Blanchin~

attributive de
L'autonomie de la clause compromissoire: un modèle pour la clause
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• Liber Amicorum Pieter Sanders, The Art ofArbitration, The Hague, Kluwer, 1982.
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• E. Mezger, « Compétence-Compétence des arbitres et indépendance de la convention
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• J. Robert, note sous ("arrêt Ga/akis (1966), D., 1966, P 575.
• H. Synvet, note sous rarrêt Behar (/982), J.D.L, 1984, P 603.
• H. Synvet, note sous rarrêt Ga/oil (1991), Rev. arb., 1993, P 281.
• P.-Y. Tsehanz, note sous l'arrêt Korsnas (1988), Rev. arb., 1989, p 691.

• Arrêts mentionnés: (par ordre chronologique)

Décisions étatiques

• AB Norrkopings Trikafabrik v. AB Per Persson, NJA 1936, 521 .

• • Heyman v. Darwins Lld, [1942] A.C. 356.


• Robert Lawrence Co. [ne. v. Devonshire Fahrics [ne., 271 F. 2d 402 (1959).
• Casso l cre civ., 7 mai 1963, Gosset, J.C.P, 1963, Il, 13405, note B. Goldman; Rev. cril,
1963, P 615, note H. Motulsky; J.D.I., 1964, P 82, note J.-D. Bredin; Rev. arb., 1963,
p 60 ; D., 1963, P 545, note J. Robert.
• Sup. Ct. 25 juil. 1965, Kokusan Kinzoku Kogyo K. K. V. Guard-Life Corp., 29 Minshu
1061 ; IV Y.B. Corn. Arb. 122 (1979).
crc
• Casso l civ., 2 mai 1966, Ga/akis, D., 1966, P 575, note 1. Robert, et: Rev. crit., 1967,
P 553, note Goldman.
• Prima Paint v. Flood and Conklin, 388 U.S. 395 (1967).

• • Casso Civ., 18 mai, 1971, Impex, J.D.i., 1972, P 62, note B. Oppetit.

111
• • CA Paris, 25 janv. 1972, Quijano Aguero v. Marcel Laporte, Rev. arb., 1973, P 158,
note Ph. Fouchard.
• Casso Civ., 4 juil. 1972, Hecht, 1.D.I., 1972, P 843, note B. Oppetit ; Rev. crit., 1974,
p 82, note P. Level ; Rev. arb., 1974, P 89, note Ph. Francescakis.
• CA Paris, 13 déc. 1975, Menicucci, Rev. crit, 1976, P 507, note B. Oppetit; JD.L,
1977, P 106, note E. Loquin; Rev. arb., 1977, P 147, note Ph. Fouchard.
• Hermansson v. AB Asfaltsbeliiggningar, NJA 1976, 125.
• Landgericht Hambourg, 16 mars 1977, /talian company v. German jinn, III Y.B. Corn.
Arb. 274 (1978).
• Dalmia Dairy Industries Lld. V. National Bank ofPakistan, [1978] 2 Lloyd's Rep. 223.
• Information Sciences Inc. V. Mohawk Data Science Corp., 43 NY 2d 198 (1978).

• • Casso 2
éme

J. Normand.
civ., Il janv. 1978, Société A. Brivio, R.T.D. civ., 1978, P 921, note

• Corto di Appello of Venice, 26 avril 1980, S.p.A. Carapelli v. Dilta Otello Mantovani,
VII Y.B. Corn. Arb. 340 (1982).
• Bremer Vulkan v. South lndia Shipping Corp., [1981] A.C., 909, 980.
• CA Toulouse, 26 oct 1982, Behar, J.D.I., 1984, P 603, note H. Synvet
• CA Paris, 21 oct. 1983, Dow Chemical, Rev. arb., 1984, p 98, note A. Chapelle.

• • Casso 1
ère
civ., 14 déc. 1983, Epoux Converl, Rev. arb., 1984, p 483, note
M.-C. Rondeau-Rivier.
• CA Paris, 4 mars 1986, Cosiac, Rev. arb., 1987, p 167, note C. Jarrosson.
• Ashville lnvestments Ltd. V. Elmer Con/ractors Ltd, [1988] 2 Ali ER 577.
• Casso 1cre civ., 10 mai 1988, Cosiac, Rev. arb., 1988, p 639, note C. Jarrosson.
• CA Paris, 30 nov. 1988, Korsnas, Rev. arb., 1989, p 691, note P.-Y. Tschanz.
ère
• Casso 1 civ., 6 déc. 1988, Sté Navimpex, Rev. arb., 1989, p 641, note B. Goldman.
• Peoples Security Life Insurance Company v. Monumental Life Insurance Company, 867
F. 2d 809 (1989).
• CA Paris, 28 nov. 1989, Cotunav, Rev. arb., 1990, P 675, note P. Mayer.

• • CA Paris, Il janv. 1990, Orri, Rev. arb., 1992, p 95, note D. Cohen.

112
• • Casso 1ère civ., 10 juil. 1990, L. et B. Cassia, J.D.I., 1992, P 168, note E. Loquin.
• Paul Smith Ltd v. H & S International Holdings Co. Inc., [1991],2 Lloyd's Rep. 127.
• QH Tours Lld v. Ship Design & Management Pty Lld., 105 ALR 371 (1991).
• CA Paris, 26 mars 1991, Dalico, Rev. am., 1991, p 456, note H. Gaudemet-Tallon.
• Casso Iën: civ., II juin 1991, Orri, Rev. am., 1992, p 73, note D. Cohen.
• Casso lën: civ., 25 juin 1991, Colunav, Rev. am., 1991, p453, note P. Mayer.
• CA Paris, 25 juin 1991, S.A. Jeumont Schneider, Gaz. PaL, 25 déc. 1993, somm., p 578.
• CA Paris, 17 déc. 1991, Galoil, Rev. arb., 1993, p 281, note H. Synvet.
• Harbour Insurance Co. Lld V. Kansa General Inlernational Insurance Co. Lld, [1992],
1 Lloyd's Rep. 81.


• Casso 1ën: civ., 3 mars 1992, Sté Sone/ex, Rev. arb., 1993, p 273, note P. Mayer; J.D.L,
1993, P 140, note B. Audit.
• Casso 2éme civ., 16 juin 1993, Rev. arb., 1994, p 312, note D. Cohen.
• CA Colmar, 21 sept. 1993, Rev.jur. Corn., 1994, p 154.
• Casso 1ën: civ., 9 nov. 1993, Romar Oilll, Rev. arb., 1994, p 108, note C. Kessedjian.
• Cass 1ëre civ., 20 déc. 1993, Dalico, Rev. arb., 1994, p 116, note H. Gaudemet-TalIon;
J.D.I., 1994, P 432, note E. Gaillard; R.T.D. corn., 1994, p 254, note J.-C. Dubarry et
E. Loquin.

• • CA Paris, 7 déc. 1994, V 2000, Rev. arb., 1996, p 245, note C. Jarrosson.
• CA Paris, 24 mars 1995, Abdel A=i=, Rev. arb., 1996, p 259, note J.-M. Talau.
• Casso 1ère civ., 5 janv. 1999, Zan=i, Rev. arb., 1999, p 260, note Fouchard.

Décisions de la Chambre du Commerce International

• Sentence No. 4131, Dow Chemica/ v. [sover-Saint-Gobain (1982), Rev. arb., 1984,
p 137.

• • Sentence No. 5103, Three European companies v. Four Tunisian companies (1988),
J.D.I., 1988, P 1208.

113
• • Sentence No. 572 t, European Company v. American and Egyptian parties
J.D.I.~ 1990~

• Sentence No.
P 1024.
5730~ El[Aquitaine v. O"i~ J.D.I.~ 1990~ P 1029~ note Y. Derains.
(1990)~

• Sentence No. 6840~ J.D.I.~ 1992~ P I030~ note Y. Derains.


• Sentence No. 8385~ US company v. Belgian company (1995)~ J.D.L~ 1997~ P 1061 .

• 114

Table des matières

• Introduction ...............••.••••.•••.••••••.•••.•••..•...•......••.••...•....•....•................•••.••...•••.••••.•.••••••............••. P 3

1.- L'autonomie de la clause compromissoire par rapport au contrat principal p7

• AI Signification de l'autonomie matérielle p8

1°) Survie de la clause compromissoire au contrat principal p8


a) Absence de contagion des vices affectant le contrat principal
b) Difficultés: Nullité ab initia et inexistence du contrat principal

2°) Différenciation des lois applicables à la clause compromissoire et au contrat p 14


a) Possibilité de deux lois différentes
b) Le silence des partie.{j

• 115

BI Limite au principe d'autonomie: la séparabilité •••_ p 18

1°) Séparabilité: la clause compromissoire comme contrat ou comme simple clause ? .. p 18


a) La clause compromissoire comme contrat autonome
b) La clause compromi.vsoire, clause d'un contrat unique

2°) La notion d'accessoire: fondement et limite de la séparabilité p 23

• a) Fondement de la séparabilité de la clause compromis~'oire


b) Limite à la séparabilité de la clause compromissoire

CI Reconnaissance de l'autonomie matérielle p 28

• 1°) Reconnaissance par les décisions arbitrales et étatiques


a) Les normes el la pratiques arbitrales
b) Jurisprudence des Elats
p 28

2°) R '
econnalssance par 1es textes conventionne
. 1set etatlques
,. .. ..
p-'-'
a) Les conventions internationales
b) Législations étatiques

• 116

IL- L'autonomie de la clause compromissoire par rapport à toute loi étatique ......__...._ p 37

AI Signification de l'autonomie de rattachement p 38

)0) Abandon de la méthode'conflietualiste p 38


a) Inconvénients de la méthode conflictualiste
b) Mérites de l'adoption d'une règle matérielle

• 2°) Contenu de la règle matérielle


a) Autonomie de la clause par rapport à toute loi étatique
P 43

b) Nécessité résiduelle des lois étatiques

• BI Limite au principe d'autonomie: le contrôle de la clause

1°) Référence à la volonté commune des parties


p 48

p 48
a) Nécessité de la volonté commune des parties
b) InsujJisance de la volonté commune des parties

2°) Limite fixée par r ordre public international P 51


a) Ordre public international étatique ou transnational?
b) Ordre public de direction ou d'éviction?

• 117

CI Reconnaissance de l'autonoBlie de rattachement ••••••••••_ p 56

1°) La solution française p 56


a) Apparition de la solution française
b) Portée de la solution française

2°) Reconnaissance du principe P 61


a) Au niveau étatique

• b) Au niveau non étatique

01.- L'autonomie de la clause compromissoire et ses implications éventuelles p 67

• AI Autonomie et Compétence-Compétence p 68

1°) Le principe de Compétence-Compétence P 68


a) Aspect positifde la Compétence-Compétence
b) Aspect négatifde la Compétence-Compétence

2°) Liens possibles avec le principe d'autonomie P 73


a) Deux principes apparemment intimement liés
b) Deux principes différents de par leur na/ure

• 118
• BI Autonomie et extension de la clause pif)

1°) Extension de la clause compromissoire à des non signataires p 80


a) Fondement de l'extension de la clause à des non signataires
b) Lien avec le principe d'autonomie

2°) Extension de la clause compromissoire dans le temps p 86


a) L'extension après le prononcé de la sentence
b) L'extension après lafin du délai d'arbitrage


CI Positionnement du principe d'autonomie dans le droit international •• p 91

1°) Un principe, élément d'un système propre à la clause compromissoire p 91


a) Un sy.vtème constitué d'un ensemble de règles matérielles

• b) Faiblesses d'un tel système

2°) Un principe, source d'inspiration pour d'autres clauses p 97


a) Un modèle pour la clause attributive de juridiction
b) Les conséquences du principe d'autonomie pour la clause attributive dejuridiction

ConclllS;on ••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••••.••••••••••••••••••••••••• p 1(W.

• Bibliographie •••••••••••••••••••.•••....••.•.•••••.••••.•••••••••••••••••••••••.••••••.••••••••••.•••••.•••••••..••........••••••.••••••• P 1()6

119

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