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Mise à jour mars 2011.

III Q 316
RR
Cette question a fait l’objet d’une actualisation complète.

HÉMOGRAMME
Indications et interprétation
Orientation diagnostique
Dr Richard Delarue
Service d’hématologie adultes, hôpital Necker-Enfants-malades, 75015 Paris, France
richard.delarue@nck.aphp.fr

(PNE), des polynucléaires basophiles (PNB), des lymphocytes et


OBJECTIFS

ARGUMENTER les principales


des monocytes par mm3. L’étude du pourcentage de chaque
indications de l’hémogramme, type de cellule est inutile et peut même aboutir à des explorations
DISCUTER l’interprétation des résultats inutiles : seul compte le chiffre absolu et la trop célèbre « inversion
et justifier la démarche diagnostique de formule » est un terme à abandonner, car sans aucune valeur
si nécessaire. sémiologique.
Le nombre de plaquettes par mm3 est souvent accompagné du
volume plaquettaire moyen, qui n’a que peu d’utilité en pratique
quotidienne.
Trois autres éléments font partie intégrante de l’analyse de l’hé-
Généralités mogramme :
– le compte des réticulocytes (en nombre /mm3) : ils correspondent
Qu’est-ce qu’un hémogramme ? à des globules rouges jeunes contenant des résidus d’orga-
L’hémogramme étudie les éléments figurés du sang : globules nites cytoplasmiques, qui disparaissent dans les hématies plus
rouges, globules blancs, plaquettes. Cette analyse est à la fois âgées. Leur numération doit être demandée spécifiquement
qualitative et quantitative et est réalisée en routine par des auto- devant toute anémie non microcytaire et en cas de macrocy-
mates. tose isolée. Une anémie est arégénérative lorsque le chiffre de
Pour les globules rouges, sont indiqués leur nombre, le taux réticulocytes est inférieur à 150 000/mm3. L’augmentation du
d’hémoglobine en g/dL, l’hématocrite, le volume globulaire moyen chiffre de réticulocytes doit être interprétée en fonction de la
(VGM), la concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine profondeur de l’anémie. Plus une anémie est marquée, plus le
(CCMH) et le taux corpusculaire moyen en hémoglobine (TCMH). chiffre de réticulocytes doit être élevé : il s’agit d’une évaluation
L’hématocrite correspond au volume des globules rouges dynamique des capacités érythropoïétiques de la moelle ;
après centrifugation par rapport au volume total de sang prélevé – l’analyse du frottis sanguin : son intérêt est très grand dans
et est exprimée en pourcentage. deux situations : la recherche d’anomalies morphologiques
Le volume globulaire moyen, exprimé en m3 ou fL, se calcule en des globules normaux, essentiellement des globules rouges, et
divisant l’hématocrite par le nombre de globules rouges et est la recherche et la caractérisation de cellules anormales circu-
habituellement mesuré directement par les automates actuels. lantes. En théorie, le frottis sanguin devrait être contrôlé devant
La concentration corpusculaire moyenne en hémoglobine est tout hémogramme anormal. Les principales anomalies morpho-
définie par le taux d’hémoglobine divisé par l’hématocrite, et est logiques des globules rouges sont rappelées (tableau 1) avec
habituellement exprimé en pourcentage. leur signification ;
La teneur corpusculaire moyenne en hémoglobine, qui n’est – l’analyse d’hémogrammes antérieurs : ils sont souvent rappelés
d’aucun intérêt en pratique habituelle, s’obtient en divisant le par le laboratoire sur les feuilles de rendu des résultats. Ces
chiffre d’hémoglobine par le nombre de globules rouges. renseignements sont souvent très précieux pour éviter des
Le nombre de leucocytes total est accompagné de la formule explorations inutiles ou pour orienter la démarche diagnostique,
leucocytaire qui donne la quantité, en valeur absolue, des poly- en affirmant par exemple le caractère chronique ou récent
nucléaires neutrophiles (PNN), des polynucléaires éosinophiles d’une anomalie.

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RR Q 316 III HÉMOGRAMME
TABLEAU 1

Principales anomalies morphologiques des globules rouges

Anomalie Description des globules rouges situation pathologique

Anisocytose ❚ taille différente ❚ érythropoïèse anormale


Poïkilocytose ❚ forme différente ❚ érythropoïèse anormale
Polychromatophilie ❚ couleur différente (plus « bleutés ») ❚ hyperhémolyse
Schizocytes ❚ fragmentés ❚ hémolyse mécanique
Drépanocytes ❚ en forme de faux ❚ drépanocytose
(Micro-)sphérocytes ❚ ronds et petits, sphériques ❚ maladie de Minkowski-Chauffard
❚ autres hémolyses immunologiques
Corps de Jolly (résidus nucléaires) ❚ avec inclusion basophiles ❚ asplénie (réelle ou fonctionnelle)
Elliptocytes (ovalocytes) ❚ de forme ovale ❚ elliptocytose
Acanthocytes ❚ avec des « épines » ❚ cirrhose
Dacryocytes ❚ en forme de larme ou poire ❚ myélofibrose
Corps de Heinz ❚ hémolyse toxique
(agrégat d’hémoglobine oxydée) ❚ hémoglobinose H
❚ déficit en G6PD
Stomatocytes ❚ en forme de bouche ❚ stomatocytose
Hématies ponctuées ❚ ponctuations basophiles ❚ saturnisme
❚ myélodysplasie
Hématies en cible ❚ hépatopathies
❚ hémoglobinopathies
❚ carence en fer

Hémogramme normal – la présence d’adénopathie ou d’une splénomégalie ;


Les normales des différents paramètres de l’hémogramme – un ictère…
sont à connaître parfaitement (tableau 2). Ces normales doivent Dans certains cas, la réalisation d’un hémogramme est une
être adaptées à l’âge et à certaines conditions physiologiques urgence : hémorragie aiguë extériorisée (ou suspectée), syn-
(différences entre homme et femme, grossesse…). Toutes les drome infectieux ou hémorragique sévère.
valeurs ne sont pas importantes, et ne sont rappelées dans le
tableau que celles qui sont indispensables. Anémie
Il existe certaines particularités chez l’enfant (hors nouveau-né) :
une lymphocytose physiologique jusqu’à 6 000/mm3 peut exister L’anémie est définie par une diminution du taux d’hémoglobine
jusqu’à l’âge de 6 à 8 ans. Les autres paramètres hématologiques par rapport à la normale. L’enquête étiologique va dépendre suc-
sont le plus souvent les mêmes que ceux de la femme adulte. cessivement de l’analyse du volume globulaire moyen et du
compte des réticulocytes.
Indications et non-indications Anémie microcytaire
Un hémogramme n’est jamais un examen de dépistage, et sa La microcytose est définie par un VGM inférieur à 80 μ3. Le
réalisation n’est, en aucun cas, indiquée chez un patient asympto- mécanisme commun de ces anémies est un trouble de l’hémo-
matique ou lors d’un bilan systématique. globinogenèse : il s’agit donc toujours d’une anémie centrale, et
En revanche, c’est un examen d’orientation très important devant le compte de réticulocytes est donc ici inutile.
de très nombreux symptômes. Parmi ceux-ci, les principaux sont : Les deux principales causes sont la carence en fer et le syn-
– les différents éléments du syndrome anémique : pâleur, asthénie, drome inflammatoire chronique. Il faut donc réaliser, devant toute
dyspnée, tachycardie, œdèmes des membres inférieurs… ; anémie microcytaire, un bilan martial (fer et capacité totale de
– un syndrome hémorragique ; fixation de la transferrine ou ferritinémie) et un bilan inflammatoire
– un syndrome infectieux aigu ou chronique, compliqué ou non ; (CRP) [fig. 1].
– des symptômes évoquant une polyglobulie : érythrose, signes Si ces deux examens sont normaux, il faut alors réaliser une
neuro-sensoriels, thrombose… ; électrophorèse de l’hémoglobine à la recherche d’une thalassé-

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mie : une augmentation isolée de l’hémoglobine A2 (> 3,5 %) per-
Q RR 316

TABLEAU 2
met de porter le diagnostic de bêtathalassémie. En cas d’alpha- Hémogramme normal
thalassémie, l’électrophorèse de l’hémoglobine est normale et, si
un diagnostic positif est nécessaire, il peut être possible de réaliser
Paramètres Limites Limites
des tests génétiques (recherche de délétion des gènes d’alpha- de l’hémogramme inférieures supérieures
globine). Cependant, le plus souvent le contexte personnel et fami-
lial est suffisamment évocateur. Nombre de globules rouges pas d’intérêt pas d’intérêt
Il existe, enfin, de rares cas de myélodysplasies qui se manifestent Hémoglobine pas d’intérêt
par une anémie microcytaire : un myélogramme doit donc être ❚ homme 13 g/dL
réalisé devant une anémie microcytaire incomprise. ❚ femme 12 g/dL
➙ pendant la grossesse 10,5 g/dL
La conduite à tenir devant une microcytose isolée sans anémie
Hématocrite pas d’intérêt
n’est pas différente. Simplement, il ne peut dans ce cas-là s’agir ❚ homme 54 %
d’une cause inflammatoire (l’anémie précède la microcytose). ❚ femme 47 %
VGM* 80 à 83 μm3 95 à 97 μm3
Anémie normocytaire ou macrocytaire
CCMH 32 % pas d’intérêt
La conduite à tenir est déterminée par le chiffre de réticulocytes. Leucocytes pas d’intérêt pas d’intérêt
1. Anémie normocytaire ou macrocytaire arégénérative Polynucléaires neutrophiles 1 700/mm3 7 000/mm3
Il s’agit d’une anémie de mécanisme central. Cinq causes doivent Polynucléaires éosinophiles pas d’intérêt 500/mm3
être envisagées avant de réaliser un examen médullaire : Polynucléaires basophiles pas d’intérêt 100/mm3
– une hémodilution (fausse anémie) : grossesse, splénomégalie Lymphocytes 1 000/mm3 4 500/mm3
volumineuse, présence d’une IgM monoclonale. Le seul moyen Monocytes 100/mm3 1 000/mm3
d’affirmer le diagnostic est de réaliser une étude de la masse Plaquettes* 150 000/mm3 de 450 000
sanguine, en pratique rarement utile ; à 500 000/mm3
– une insuffisance rénale chronique : on peut considérer cette
cause à partir d’une diminution de la clairance de la créatinine * Les normes varient en fonction des laboratoires.
au-dessous de 30 mL/min. Le mécanisme de cette anémie est
essentiellement une carence en érythropoïétine. L’anémie est
normocytaire ; Une myélofibrose peut être suspectée sur le frottis sanguin par
– une inflammation chronique : avant que la microcytose s’ins- la présence de dacryocytes et d’érythroblastes.
talle, le tableau est celui d’une anémie normochrome normocy- Le myélogramme est souvent pauvre, lié aux difficultés d’aspi-
taire arégénérative ; ration.
– une hypothyroïdie ou un panhypopituitarisme : l’anémie est le plus La biopsie médullaire permet le diagnostic.
souvent modérée avec un VGM aux alentours de 95 à 100 μ3 et L’envahissement médullaire s’accompagne parfois d’une
jamais au-delà de 110 μ3 ; myélémie ou d’une érythromyélémie (tumeur solide).
– un alcoolisme patent : la macrocytose est toujours inférieure à Les myélodysplasies et carences vitaminiques se manifestent
110 m3, l’anémie peut être marquée, majorée par l’hyperplénisme souvent par une anémie fortement macrocytaire (> 110 μ3), associée
d’une cirrhose ou par le saignement de varices œsophagiennes. fréquemment à d’autres anomalies de l’hémogramme (neutro-
Ces causes éliminées, il faut envisager une exploration médul- pénie, thrombopénie).
laire par un myélogramme : il peut s’agir alors d’une anomalie 2. Anémie normocytaire ou macrocytaire régénérative
quantitative : érythroblastopénie, aplasie médullaire, myélofi- Les réticulocytes sont augmentés, et cette augmentation est
brose, envahissement médullaire (par une métastase ou une inversement proportionnelle à l’anémie.
hémopathie), ou qualitative (myélodysplasie, carence vitami- Trois situations sont à envisager :
nique) [fig. 2]. – l’anémie hémolytique, qui peut s’accompagner cliniquement
Une érythroblastopénie est à évoquer si l’anémie est isolée et le d’un ictère et d’une splénomégalie. Biologiquement, l’hémo-
chiffre de réticulocytes effondré, inférieur à 20 000/mm3. Le myé- lyse est caractérisée par une diminution de l’haptoglobine, une
logramme montre une lignée érythroblastique diminuée, infé- augmentation de la bilirubine non conjuguée et parfois des LDH
rieure à 5 %. Une enquête étiologique s’impose (parvovirus B19, (qui est surtout marquée dans les hémolyses intravasculaires) ;
thymome…). – la régénération d’une anémie centrale, quelle que soit sa
L’aplasie médullaire est souvent caractérisée par une pancyto- cause, qui s’accompagne d’une hyperréticulocytose limitée
pénie, l’anémie est rarement isolée. Le myélogramme est habi- dans le temps ;
tuellement pauvre, nécessitant le contrôle d’une biopsie médul- – la régénération suivant un saignement aigu, en particulier digestif,
laire qui permet le diagnostic. et retardée dans le temps par rapport au saignement.

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RR Q 316 III HÉMOGRAMME

– faire la différence entre polyglobulie secondaire (hypoxie, sécré-


tion inadaptée d’érythropoïétine par une tumeur), et primitive
ANÉMIE MICROCYTAIRE
(maladie de Vaquez).
Certaines autres anomalies de l’hémogramme sont, dans ce
Bilan martial – Bilan inflammatoire contexte, évocatrices de polyglobulie primitive : hyperleucocytose à
polynucléaires neutrophiles, thrombocytose (v. question n° 165).
➤ carence ➤ normal ➤ syndrome
martiale inflammatoire
Anomalies des plaquettes
Thrombopénie
Bilan Électrophorèse Bilan
étiologique de l’hémoglobine étiologique La conduite à tenir fait l’objet d’une question spécifique du pro-
gramme (v. question n° 335).
Un piège classique est celui de la fausse thrombopénie liée à
➤ augmentation ➤ normale l’EDTA (anticoagulant présent dans le tube de prélèvement).
de l’hémoglobine A2
Dans ce cas, il n’existe évidemment pas de symptômes hémor-
ragiques, et la thrombopénie est toujours modérée, supérieure à
bêta- ◗ origine ethnique d’Asie du Sud-Est 50 000/mm3. Le diagnostic est porté par le compte des plaquettes
thalassémie ou d’Afrique
sur tube citraté et par la présence d’agrégats de plaquettes sur le
◗ microcytose ancienne/familiale
◗ anémie peu marquée (> 10 g/dL)
frottis sanguin qui doit toujours être contrôlé.

Thrombocytose
oui non
La thrombocytose est définie par un chiffre de plaquettes supé-
➤ alpha- ➤ discuter une cause
rieur à 500 000/mm3.
thalassémie rare (comme une Trois causes secondaires sont à évoquer :
(myélodysplasie)
– la carence martiale : le bilan martial est à contrôler (ferritinémie
ou fer sérique et capacité totale de fixation de la transferrine) ;
Myélogramme – l’asplénie réelle (splénectomie) ou fonctionnelle (asplénie du
drépanocytaire par exemple). Il existe, dans ce cas, des corps
FIGURE 1 Conduite à tenir devant une anémie microcytaire. de Jolly au frottis sanguin ;
– l’inflammation aiguë ou chronique : un bilan inflammatoire est à
contrôler (CRP…). Il faut noter qu’un problème infectieux aigu
sévère est susceptible de faire monter les plaquettes à plus de
Macrocytose isolée 1 000 000/mm3 et qu’il est, en pratique, impossible de faire la diffé-
Les causes principales sont l’alcoolisme chronique, l’hypothy- rence entre inflammation et syndrome myéloprolifératif dans cette
roïdie, certaines prises médicamenteuses (zidovudine, chimio- situation, sauf si des hémogrammes antérieurs sont disponibles.
thérapie cytotoxique, cotrimoxazole). Le VGM est rarement très Ces 3 causes étant éliminées, il s’agit le plus souvent d’un syn-
élevé (< 110 μ3), sauf dans le cas de macrocytose iatrogène. drome myéloprolifératif : thrombocytémie primitive si la thrombocy-
Il faut toujours compléter l’exploration d’une macrocytose tose est isolée, maladie de Vaquez si l’hématocrite est élevé, leucé-
isolée par un dosage des réticulocytes, puisque celle-ci peut être mie myéloïde chronique s’il existe une hyperleucocytose avec une
le seul signe d’une hémolyse compensée. myélémie, splénomégalie myéloïde s’il existe une érythromyélémie
Ces éléments éliminés, le myélogramme est alors nécessaire, et des dacryocytes sur le frottis sanguin. Beaucoup plus rarement, il
et les diagnostics possibles sont les mêmes que ceux en cas pourra s’agir d’une myélodysplasie qui nécessite un myélogramme.
d’anémie associée.
Leucocytes
Polyglobulie Polynucléose
Le diagnostic est évoqué devant un hématocrite élevé, supé- Elle est définie par l’augmentation des polynucléaires neutro-
rieur à 54 % chez l’homme et 47 % chez la femme. philes supérieurs à 7 000/mm3. Il existe une polynucléose phy-
La démarche diagnostique consiste à : siologique pendant la grossesse.
– affirmer la polyglobulie et éliminer les fausses polyglobulies Il peut s’agir d’une polynucléose aiguë dans le cadre d’une
(hémoconcentration…) par la réalisation d’une masse sanguine infection, essentiellement bactérienne. Une myélémie et une
(mesure du volume globulaire total par méthode isotopique) ; monocytose transitoires et modérées peuvent l’accompagner.

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Q RR 316
ANÉMIE NORMO-/MACROCYTAIRE ARÉGÉNÉRATIVE NEUTROPÉNIE ISOLÉE

Créatinine ➤ insuffisance
rénale < 1 700/mm3
Bilan
inflammatoire ➤ inflammation

TSH ➤ hypothyroïdie < 800/mm3 > 800/mm3

➤ risque infectieux ➤ pas de risque infectieux


Myélogramme

Anomalie qualitative Anomalie quantitative Myélogramme Plusieurs contrôles

➤ anémie ➤ myélo- ➤ myélo- ➤ hémopathie ➤ blocage ➤ immunologique ➤ ethnique


mégalo- dysplasie fibrose
blastique ➤ aplasie
(carence médullaire
B12-folates)
➤ érythro-
blastopénie Faire BOM Transitoire Persistant
(réticulocytes
< 10000/mm3)

➤ médicament
Envahissement

Cellules hématologiques Cellules extrahématologiques


Congénital Immunologique

➤ leucémie aiguë ➤ tumeur solide


➤ lymphome ➤ LGL
➤ myélome (prolifération de grands lymphocytes à grains)

FIGURE 2 Conduite à tenir devant une anémie normo-/macrocytaire arégénérative. FIGURE 3 Conduite à tenir devant une neutropénie.

Les chiffres se normalisent avec le problème infectieux. Une Neutropénie


nécrose tissulaire, quelle qu’elle soit, peut aussi s’accompagner La situation d’agranulocytose est une urgence et est abordée
d’une augmentation des polynucléaires neutrophiles (pancréa- dans la question n° 143.
tite, infarctus du myocarde…). Les explorations dépendent de la profondeur de la neutropénie
L’exploration d’une polynucléose chronique exige d’éliminer (fig. 3) et de son caractère isolé ou non.
2 causes médicamenteuses (prise de corticostéroïdes et prise En l’absence d’autre anomalie, un examen médullaire est
de lithium) et d’éliminer une inflammation chronique (VS, CRP…). requis si les polynucléaires sont inférieurs à 800/mm3 : le diag-
Dans ce cas, d’autres anomalies de l’hémogramme peuvent nostic redouté est celui d’une hémopathie maligne. Les autres
exister : anémie inflammatoire, thrombocytose. causes possibles sont l’origine toxique (médicamenteuse), auto-
Elle impose aussi d’étudier le frottis sanguin à la recherche immune ou congénitale.
d’une myélémie qui évoquerait un syndrome myéloprolifératif Si les polynucléaires sont supérieurs à 800/mm3, il faut avant tout
(leucémie myéloïde chronique essentiellement) et de rechercher vérifier le caractère chronique de la neutropénie (et donc contrôler
une tumeur solide (polynucléose « paranéoplasique ») ou plus à distance 1 mois après l’hémogramme) et son caractère isolé.
souvent une hémopathie lymphoïde (lymphome de Hodgkin). Deux situations sont particulières :
La polynucléose liée au tabagisme est un diagnostic d’élimina- – l’hypersplénisme, où la neutropénie est souvent associée à une
tion et est caractérisée par une polynucléose modérée, inférieure thrombopénie et à une anémie modérée, normocytaire arégé-
à 15 000/mm3, et régressant à l’arrêt du tabac. nérative ;
Lorsque l’ensemble du bilan est négatif, un myélogramme est – la neutropénie ethnique, chez les patients originaires des Antilles
nécessaire à la recherche de la rarissime leucémie à polynu- et d’Afrique noire. L’analyse d’hémogrammes antérieurs est
cléaires neutrophiles. très importante, puisqu’elle montre une parfaite stabilité des

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chiffres dans le temps. De même, l’anamnèse ne retrouve


jamais de problèmes infectieux récidivants. Hémogramme

Plus fréquemment, il s’agit de l’exploration d’une neutropénie POINTS FORTS À RETENIR


chronique et isolée, sans autre anomalie biologique.
Un frottis sanguin doit toujours être réalisé pour rechercher, en Les valeurs limites d’un hémogramme normal sont
particulier, la présence d’une population de lymphocytes anor- fondamentales à retenir.
maux appelés grands lymphocytes à grains (LGL), qui peut être Le frottis sanguin est souvent un examen complémentaire
ou non associée à une polyarthrite rhumatoïde (syndrome de important devant une anomalie de l’hémogramme.
Felty).
Il faut toujours s’enquérir d’hémogrammes antérieurs.
Monocytose
Un hémogramme n’est jamais un examen
Une monocytose aiguë peut accompagner une polynucléose de dépistage, mais c’est un examen d’orientation initial
lors d’un syndrome infectieux, ou la régénération d’une aplasie devant de nombreuses situations cliniques.
médullaire.
En dehors de ce contexte, une monocytose chronique est le
Une anémie microcytaire nécessite dans un premier temps
le contrôle d’un bilan martial et d’un bilan inflammatoire.
plus souvent le signe d’une hémopathie myéloïde (leucémie
myélomonocytaire chronique) nécessitant un bilan spécialisé. Le raisonnement devant une anémie non microcytaire
nécessite le dosage des réticulocytes.
Monocytopénie
L’ « inversion de formule » n’existe pas.
Si elle est isolée, et plus encore si elle est associée à une pan-
cytopénie plus marquée sur les polynucléaires neutrophiles, le Devant une anomalie des plaquettes et des leucocytes,
diagnostic à évoquer est celui d’une leucémie à tricholeucocytes la démarche est souvent : rechercher une cause non
nécessitant un contrôle du frottis sanguin et un myélogramme. hématologique avant une cause hématologique, qui nécessite
le plus souvent un contrôle d’un examen médullaire.
Éosinophilie
(v. question n° 311)

Basophilie Hyperlymphocytose
Ce signe a peu d’intérêt sémiologique puisqu’il n’est retrouvé Dans tous les cas, une analyse soigneuse du frottis sanguin est
quasiment que dans le cas d’un syndrome myéloprolifératif nécessaire.
avancé (surtout leucémie myéloïde chronique) mais n’est jamais Devant une hyperlymphocytose aiguë, il s’agit le plus souvent
isolé. d’un problème infectieux, essentiellement viral. Au frottis sanguin,

Qu’est-ce qui peut tomber à l’examen ?


Il est difficile d’imaginer ceci justifie la connaissance par exemple, il est nécessaire
un dossier entier autour parfaite de ses normales dans la question « lupus
de l’analyse seule et de la conduite à tenir érythémateux disséminé »
d’un hémogramme. en cas d’anomalie. de connaître parfaitement
On peut aussi conseiller les anomalies habituelles
En revanche, on ne peut que pour chacune des questions de l’hémogramme
constater la grande fréquence de réfléchir aux différentes et de pouvoir les intégrer dans
de cet examen dans les énoncés anomalies possibles lorsqu’un une réflexion sur les diagnostics
habituellement proposés : hémogramme est nécessaire : différentiels possibles.

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il s’agit d’une lymphocytose polymorphe avec des cellules hyper-
Q RR 316
Toute autre exploration paraclinique devant ce simple symp-
basophiles, caractéristique d’un syndrome mononucléosique tôme biologique s’il est isolé est inutile.
(v. question n° 334). L’analyse du frottis sanguin doit s’attacher à
éliminer la présence de blastes leucémiques. Cette hyperlym- Myélémie
phocytose s’amende avec la résolution du problème infectieux.
Une hyperlymphocytose aiguë à petits lymphocytes d’aspect Il s’agit de passage sanguin de cellules médullaires myéloïdes :
normal peut accompagner une coqueluche, la cytologie est alors promyélocytes, myélocytes, métamyélocytes.
moins polymorphe. Elle est appréciée sur des critères quantitatifs (pourcentage de
Une hyperlymphocytose chronique doit être explorée par ana- cellules) et qualitatifs (type de cellules ? anomalies morpholo-
lyse du frottis sanguin, complétée par immunophénotypage des giques ? équilibre de maturation ?).
lymphocytes circulants. Par argument de fréquence, il s’agit le Une myélémie transitoire peut accompagner une infection
plus souvent d’une leucémie lymphoïde chronique, mais toute sévère ou la régénération d’une aplasie médullaire, par exemple
autre hémopathie lymphoïde peut s’accompagner d’une popula- secondaire à une chimiothérapie.
tion circulante. Dans tout autre cas, une pathologie médullaire doit être évoquée :
Cas particulier, le tabagisme peut s’accompagner d’une hyper- syndrome myéloprolifératif (en particulier la leucémie myéloïde
lymphocytose qui est le plus souvent caractérisée au frottis san- chronique), envahissement (leucémie, lymphome, métastases).
guin par une population polymorphe de lymphocytes souvent Cas particulier, la présence d’érythroblastes (érythromyélémie)
binucléés. Cette lymphocytose se résout à l’arrêt du tabac. Cette évoque particulièrement la métastase d’une tumeur solide ou
situation est un diagnostic d’élimination. une myélofibrose.•

Lymphopénie
Hors contexte d’une chimiothérapie cytotoxique, seule une
R. Delarue déclare n’avoir aucun conflit d’intérêts.
sérologie VIH doit être contrôlée.

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