Jujutsu: (ap) = Beswrsu. « Technique de ta
‘souplesse », principe général appliqué au combat,
dans un systéme de combat au corps & corps éla-
bboré au cours du Moyen Age japonais ct intégrant
aussi bien des techniques & main nue que d'autres
faisant appel & des armes (notamment le sabre).
La référence & Ju®, souligne essence du pro-
‘e606; il Sagit, dans une confrontation, de ne pas
engager une force brute mais utiliser du micux
possible celle de ladversaire, de mettre la tech-
nique nécessaire a la victoire en harmonie avec la
situation. Souplesse dans esprit (tactique)
comme dans la forme (lechnique). Les ansiennes
techniques de Ju-jutsu ont .
thése faite par Kano Jigoro® i la fin du x1 siécle
dans une optique éducative ct sportive, le Judo*.
25
‘Aux origines
Les premiers styles, tout ékémentaires qu'ils aient
di 2tre & cette epoque, remontent & bien avant les
sources écrites que l'on peut trouver dans l'ancien
Japon (notamment les chroniques guerri¢res} ou
es archives laissées par les fondatcurs On trouve
g6néralement trois versions pour expliquer l'ork
gine du Ju-jutsu A partir d’éléments stric
se fonde sur des techniques
est une com-
Autour de Fan 23 av, J-C., 'Empereur 8
ordonna un combat entre les deux lutteurs Nomi
no-Sukune® ct Taema-no-Kuchaya, qui fut un
combat coups frappés, puisque le premier rem-
porta la victoire en défongant les c6tes du second
2 coups de pied. Ce serait 1a Forigine de la lutte
Sumai*,ou du moins une de ves premieres traces
historiques On connaissait également alors dans
le pays diverses épreuves de force pure (Chikara-
kurabe*) sur lesquelles on ne posséde aucune
précision technique, Mais il semble évident que,
soit par lintermédiaire de Japonais voyageant
en Ching, soit par celui de Chinois, souvent com-
mergants venus dans Fie, 'apport de Empire du
Milicu ait Ge fondamental, Cependant il est
¢ d’établir une filiation exacte:
liew au xile sidele, a la faveur du passage du
Bouddhisme Zen (Zen-shu*) de la Chine au
Japon :sans doute certains lettrés et moines chi.
nois apporterent-ils également des éléments de
(Quan-fa® (notamment le fameux Shaolin-kempo"
développé au monastere de Shaolin aprés la mort
de Bodhidharma), entrainement martial allant
chez eux généralement de pair avec leurs préoc-
tions philosophiques ou métaphysiques C'est
leurs au xt sidcle d’aprés un vieil ouvrage, le
« Gukansho ».que Minamoto-no-Yoritomo*
fondateur
meme, du gouvernement de
ilement le Jusjutsu ;
on Fappelait alors Tegiki ou Tedori (signifiant
« mains habiles » ou « maniement des mains dans
Je combat »). Ayant besoin d’hommes forts pour
asseoir son autorité, Minamoto exhortait ses
Samurai* a pratiquer toutes les formes darts
‘martiaux; allusion du « Gukansho » parait done
tres crédible,
‘Au cours de la période Kamakura (Kamakura-
jidai® 1192-1333) se développerent quantité
décoles de combat (Ryu*) avec et sans armes, qui
faisaient partie de la « Voie de l’Are et du
Cheval » (Kyuba-no-michi) telle qu'elle avait &é
définie a usage des guerriers professionnels en
ces temps particulidrement troublés. Les tech-
niques se perfectionnent sans cesse sur les champs,
de bataille. Il parait cependant évident que Tarme
étant la premidre garantie pour la survie du
mural, ce dernier n’avait recours aux tech-
niques & main nue que lorsqu’il n’avait plus
aucune autre possibilité ou lorsque, pour des rai-
sons tactiques, i ne cherchait qu’a désarmer son
adversaire pour le maitriser et en demander ran-
gon ou chercher A percer Tarmure Aide d'une
courte dague, Yoroi-doshi* (d’od, notamment, la
raison d’étre du Yoroi-kumi-uchi®, lutte de gue
riers en armures). ILest done impossible de par-
ler, pour 'époque, d’un Ju-jutsu systématique-
ment pratiqué & mains nues Ces écoles de com-
bat, encore tres empiriques, apparaissaient alors
sous quantités d’appellations recouvrant une
méme réalité: Chogusoku, Genkotsu, Gusoku,
Chikara-kurabe, Nakushi, Kogusoku, Kempo,
‘Toride, Yawara, Wajutsu, Kumi-uehi, Koshi-no-
mawari, Aikijutsu, Taijutsu, Hakuda,
L’époque Tokugawa
Le Ju-jutsu, intégrant toujours techniques & mains
nues ct techniques d'armes dans le Bujutsu* de
Mépoque, ne devint réellement majeur que pen-
dant la paix imposée au pays par les Shogun*
‘Tokugawa®, C'est pendant cette période dite
Edo-jidai (1603-1868) que les styles se constitue-
at réellement, plus ou moins originaux dans
leur éventail de techniques de saisies, de projec-
tions, de strangulations, de luxations, de coups
frappés, de combinaisons entre main nue et main
armée. L'origine du Ju-jutsu proprement dit,construction intelligente et non plus méthode
empirique, semble se situer entre 1600 et 1650,
méme si, semble-t-il, auparavant déja,
Jikiden-ryu et Tenshin Shoden Katori-ryu®.dis-
posaient déja dans leur panoplie de combat des
techniques de combat au corps i corps tres
borées (Yawara®), Et méme si nombre Whisto-
Fiens japonais voient le véritable acte de nais-
sance du Ju-jutsu dans la démarehe, des 15.
‘Takenouchi Hisamori qui créa Takenouchi-ryu*.
Le tronc commun semble tout de méme se placer
Aaube de Vere des Tokugawa: partir de 1a, plu-
sicurs centaines de styles vont chercher 3 s'indi-
vidualiscr au cours des deux sidcles suivants. Dans
cette élaboration finale des styles de Ju-jutsu l'in-
fluence chinoise est indéniable. On trouve cn
effet deux impacts trés nets des techniques de
boxe chinoise (Quan-fa*) au mil
et au début du xvint sigele
w
Le premier est da au Chinois Chen-Yuan-Pin®
(Chin-Gempin) qui apporta ses connaissances
au Japon autour de 1659 et les enseigna & trois
Ronin® (guerriers restés sans maitre) au temple
Kokushoji de Yedo. Ces trois disciples formerent
par la suite chacun sa propre Geole de Ju-jutsu :ce
furent Fukuno-ryu (de Fukuno Masakatsu, ou
Shichiroemon), Miura-ryu (de Miura Yoshitatsu,
ou Yojiemon) et Isogai
Jirozaemon). Les trois hommes
son cOté, Ia synthese entre le Kempo* chinois
(ou Hakuda) apporté par Chen-Yuan-Pin et les
du Ju-jutsu japonais par de
nombreux styles qui prétendent en dériver. I
semble certain que, meme si d'autres ccoles de Ju-
jutsu eaistaicnt alors déja, plus ou moins organi
sées, Vappert de V expert chins (ut responsable
dune soudaine expansion de Fart du combat rap-
portant de cette Epoque,
ins la recherche de la paternité
du premier Ju-jutsu codifié, fut’ Akiyama
Shirobei®, un médeein de Nagasaki qui
étudié en Chine trois méthodes de Hakuda
techniques de Kwappo (ou Kuatsu: procédés de
réanimation). De retour au pays,il ful dégu par
superficialité de ses disciples et. mort
pour une longue méditation dans un temple
Apres 100 jours de contemplation intérieure. en
plein hiver. il eut soudain Villumination en voyant
une branche de saule ployer sous lan
de se détendre, libérée.
Cette défense naturelle et toute en souplesse de
arbre si fréle, Fimpressionna beaucoup: il appela
¢ avant
$4 propre méthode de Jujutsy Yoshin-ryu* (Ecole
du cocur de saule) en 1732. Celle-ci donna nais-
sance 150 aprés au Judo® de Kano Jigoro®.
On complait plusieurs ceataines destyiea =r be
‘kishaa-ryet, Kito-yu, Takenouchi-ryu®, Tenis
nyo-ryu®, Kushin-ryu®, Daito-ryu®, Sos
ruts Sckiguebi-ryus, Shibukswa-cru"
shingan-ryu®, Shin-no-shindo-ryu’, Shinkage:
ou encore, Tsuisumi-Hozan-ryu, Genkai-ryu.. I
convient d'ajouter a ceite liste, lin d’étre exhaus
live, de nombreuses écoles de Bujutsu, notam
ment de Ken-jutsu® et de lai-jutsu* (sabre) qui
incorporaient dans leur enseignememt des pro
dés de combat rapproché une fois que, pour une
on ou une autre, fe combatant devait continuer
cules mains nues:ainsi la eélabre
shin Shoden Katori Shinto-ryu’.
En fait, la grande diaspora des techniques se
sous une foule d’écoles baptisées des noms.
s. des centres d’instruction, des maitres
d'armes qui en ont établi les bases, ow des prin
cipes particuliérement mis en avant dans tel ou tel
style; une nouvelle école peut alors s’établir sim
plement parce que son initiateur, maitre authen-
jque ou Ronin désceuvré, juge bon d'apporter
quelques tres Kégtres modifications a des tech
niques apprises ailleurs, a tort ou a raison,
Par ailleurs, les confrontations sures
champs de bataille ont tout naturellement pro-
voqué des « échanges » superficiels de tech
niques dont te vainqueur a
rer profit afin de parfait
it aussi Evoquer les c:
centre maitres d°éco!
a propre méthode.
<« espionage »
es rivales, toujours prompts
A sattribuer les mérites d'une nouvelle décou-
verte technique, ce qui explique notamment le
secret dont était généralement entourée l'ins-
truction (voir sous Okuden®, Gokuhi*, Hiden,
Kagemusha"). Iest certain également que liso-
lement géographique. le manque de contacts en
raison des distances ou de
guerres ines
recherches paralldles et de 1
n
ement étran.
UX autres, chaque fondateur
é de son originalité.Le déctin puis la renaissance au xx' siécle
La fin du Shogunat des Tokugawa et l'avéne
ment de la nouvelle ére Meiji-jidai® en 1868, avec
les nouveaux choix de société pris par le jeune
Empereur Muts furent un véritable coup
Warrét pour les arts martiaux traditionnels,
témoins d'un Japon médiéval auquel on voulait
par tous les moyens mettre fin, La suppression des
clans féodaux, ouverture a 'étranger, rinter-
diction du port des deux sabres (Daisho*), signe
distinctif et privilége du Samurai, furent autant de
es condamnant une Epoque et une hiérar-
chic sociale désormais dépassées. Les temps furent
alors durs pour les arts martiaux et les maitres qui
les enscignaient, Le désintérét pour l'éthique des
Budo* fut pendant une vingtaine d’années quasi
général, De nombreux Dojo® étaient désertés,
de
notamment par une jeunesse avide de sports
modernes venus de I'Occident, ¢t durent fermer
alors plus d'intérét pour la
lo
130i dutatendre des mots avant voir venir
ses premiers éleves.
Mais Fintérét pour les choses anciennes revint
avec la fin du xr ‘et la montée du
onais (le Japon avait vaineu la Chine
en 1895 et allait en faire de méme avec la Russie
en 1905). Le développement du Kodokan* de
Kano et les défis auxquels durent faire face ses
elves, lancés par diverses écoles de Ju-juts
jalouses de 'aura du Judo (qui, justement, sac
ux besoins de lattrait qu’éprouvait la jeu-
esse nippone pour Mori
310 Tacaiqoes de Fane Jos,talent } temps Fart martial ancien d'un oubli qui
lait en passe de devenir total,
lement chargée
ct de classifier les divers styles et
darts martiaux dans un cadre légal, a
rédit gouvernemental nécessaire a l'en-
ireprise, Les arts du Bu-jutsu et du Budo étaient
sauvés. Le Ju-jutsu put également renaitre a tra-
vers ses nombreux Ryu, Judo®, Aikido* puis
Karaté*, dont quantité de techniques sont direc-
iement issues de ce fantastique ercusct technique
-qu’était devenu le Ju-jutsu au cours des sidcles
(avec une réserve pour le Karaté, dont lessenticl
viendra de Chine, par l'Okinawa-te*), se déve-
Joppirent alors ent 'intéricur et horsdu
Japon, sans jamais faire oublier leur trone com-
mun, qui resta dans leur sillage. Au Japon, le Ju-
jutsu cut méme deux reconnaissances officielles
particuligrement gratifiantes: en 1947, le gouver-
nement japonais ayant rendu obligatoire la pra-
tique dun art martial dans les unités de la polic
esteréé le Taiho-jutsu*, qui devint le Ju-jutsu offi-
pparut Ie Toshu-
fficiel de Farm
De nos jours,d travers les innombrables ramifica~
tons et adaptations du Su-jutsu japonais a sravers
Je monde entier, on peut distinguer trois grands
groupes: - les Ju-jutsu anciens, plongeant leurs
racines dans 'époque Tokugawa, voire dans les
Epoques antérieures (ex. Takenouchi-ryu, Yoshin-
ryu, Muso Jikiden-ryu). Purs et durs, farouche-
ment traditionnels et contre toute forme d'adap-
tation sportive, ces styles connaissent de réels
problimes d'audience, done de survie. - Les Ju-
jutsu modernes, ne remontant pas plus loin gu’
Iépoque Meiji (ex. Goshin-jutsu, Hakko-ryu,
‘Taiho-jutsu).~ Les Ju-jutsu apparus hors du. Japon
& partir de 1930. Hs sont Légion, et il s'en erée
encore des nouveaux, éternelle synthése chan-
zeante & partir du Judo, de I Aikido et du Karaté,
aux USA, en Angleterre, en France, en Allemagne.
et jusqu’au Ju-jutsu brésilien (Gracie Ju-jutsu).
N’étant pas des Ju-jutsu classiques (traditionnels)
ils ne sont pas référenoés dans cet ouvrage. Une
Fédération internationale de Ju-jutsu organisa sa
premigre Coupe du Monde en 1990 et son premier
Championnat du Monde, 4 Paris, en 1996 sous
Végide de la Fédération frangaise de Judo, Ces
styles, fortement médiatisés car souvent specta-
cullaires méme si pas toujours tts réalistes, com-
posant largement avec les besoins sportifs et
ludiques de notre temps, connaissent un aceroi
sement constant de leurs pratiquants,