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1. MEFAITS DE L'ANARCHIE J! gusiton Amie un eit peuple, appelé Trosledyte, qui descends de fee anciens Troglodyses 1 qui, si nous en eroyans les’ historiens, ressem- blaient plus a des bétes qu’d des hommes. Ceux-cin'étaient point ontrefuts, ils n'étaient point velus comme des ours, ils ne siffiaient point, Ils avaient deux yeux *; mats ils aient si méchants et si féroces, qu'il n'y avait, parmi eux aucun principe d'équité ni de justice ls avaient un roi d'une origine étrangére, qui, voulant corriger Ia méchanceté de leur naturel, les traitait séverement ; mais ils conjurerent * contre lu, le tuérent, et exterminérent toute la famille royale. re Le coup étant fait, ssemblerent pour choisir un gouvernement ; et, aprés bien des dissensions, ils eréérent des maistrats, Mais a peine les eurent-ils ‘Gus, qu'il leur devinrent insupportables; et ils les massacrerent encore ‘Ce peuple, libre de ee nouveau joug, ne consulta plus que son naturel sauvage ‘Tous les particulier: convinrent qu'le n’obéiraient plus & personne ; que chacun veillerait uniquement a ses intéréts, sant consulter ceux des autres © ‘Cette résolution unanime flattit extrémement tous les particuliers. Ils disaient « Qu'ai-je affare daller me tuer i travailler pour des gens dont je ne me soucie point ? Je penserai uniquement & moi. Je vivrai heureux : que m’importe que les ftutres le soient ? Je me procurerai tous mes besoins ; et, pourvu que je les aie, ao je ne me soucie point que tous les autres Troglodytes soient misérables. » (On était dans le mois ot 'on encemence les terres ; chacun dit: + Je ne labourerai mon champ que pour qu'il me fournisse le blé qu'il me faut pour me rnourrir; une plus grande quantité me serait inutile : je ne prendrai point de la ppeine pour rien. [Les terres de ce petit royaume n'étaient pas de méme nature : ily en avait Tarides et de montagneuses, et d'autres qui, dans un terrain bas, étaient arrosées de plusieurs ruisseaux. Cette année la sécheresse fut trés grande, de maniére que les terers qui étaient dans Tes lieux élevés manquérent * absolument, tandis que celles qui purent tre arrosées furent tr fertiles. Ainsi les peuples des montagnes se périrent presque tous de faim par la dureté des autres, qui leur refusérent de partager la recolte. L'année d’ensuite fut tris pluvieuse ; Jes Hieux élevés se trouvérent d'une fertiité extraordinaire, et les’ terres basses furent submergées. La moitié du peuple cria une seconde fois famine ; mais ces misérables trouvérent des gens aussi durs qu’ils I'avaient été eux-mémes... Ty avait un homme qui possédait un champ assez fertile, qu'il cultivait avec rand soin. Deux de seo voiting s'unirent ensemble, le chassérent de sa maiton, Sccupérent son champ j it firent entre eux une union pour se défendre contre fous ‘ceux qui voudraient I'usurper, et, effectivement, ils se soutinrent par Ti pendant plusieurs mois. Mais un des deux, ennuyé de partager ce qu'il pouvait Mroir tout seul, tua autre et devint seul maitre du champ. Son empire ne fut pas ong : deux autres Troglodytes vinrent Fattaquer; il se frouva trop faible pour se défendte, et il fut massacre. Cependasit une maladie erucile ravageait ta contrée. Un médecin habile ¥ arriva du pays voisin et donna ses remédes si propos qu'il guérit tous ceux aut fe mirent dans sex mains. Quand la maladie eut cess, il alla chez tous ceux qu'il Svait traités demander son salaire ; mais il ne trouva que des refus, Il retourna Gans son pays, ily arriva accablé des fatigues d'un silong voyage. Mais bient®t pres il apprit que la méme maladie se faisait sentir de nouveau et aftigeast plus ‘ue jamais cette terre ingate Ils allerent lui cette fois e¢n’attendirent pas qu'il int chez eux. » Allez, leur dit-il, hommes injustes ! Vous avez dans poison plus mortel que celui dont vous voulez guénir ; vous ne méritex pas Froceuper une place sur la ‘Terre, parce que vous navez, point d"humanité et que tes ules de T'equité vous sont inconnues : je eroirsis offenser les dieux, qui vous punissent, si je m'opposais 4 la justice de leur colére. » (Lettre XI) Ul, LES BONS TROGLODYTES TT ye, mon her Mira, comment le Tropadyts prinent par st michaneeté meme, et furent les victimes de leurs propres injustices, De tant de famille nen resta que deux qui échappérent aux malheurs de la nation. Il y avait dans ce pays deux hommes bien singulier’: ils avaient ‘Ue Thumanité; ils connaissaient Ia justice ; ils aimaient la verta autant liés par ta droiture de leur eur que par la corruption de celui des autres, ils voyaient la Uesolation * generale, et ne la ressentaient que parla pitié :c'éait le motif d'une Gnion ‘nouvelle. Ils travaillaient avec une sollcitude commune pour Pintérét commun ®; ils navaient de différends que ceux qu'une douce et tendre amitié faltait naitre ; et dens Tendtoit du pays le plus écarté, séparés de leurs compa- riotes indignes de leur présence, ils menaient une vie heureuse et tranquille In torte semblait produire d'elle-méme, eultivée par ces veriucuses, mains. is simaient leurs femmes, et ile en’ étaient tendrement chéris, ‘Toute leur attention était d'clever leurs enfants A la vertu. Tls leur représentaient ® sans ‘Cesse Tes malheurs de leure compatriotes, et leur mettaicnt devant les yeux cet ‘Exemple si triste; is Jeur faisaient surtout sentir que l'intérét des particuliers SS irouve toujours dans Pintérér commun ; que vouloirs’en séparer, c'est vouloir Se perdre | que la vertu rest point une chose qui doive nous cotter ; qu'il ne faut point la regarder comme un exercice pémible, et que la justice pour sutrui ‘st une charité pour nous" is eurent bientot la consolation des péres vertueux, qui est avoir des enfants qui leur ressemblent. Le jeune peuple qui s'éleva sous leurs yeux s'accrut par Sreureux mariages : le nombre augmenta, Punion fut toujours la méme ; et 1a Boa am. AIX ~ 1% (

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