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Perspective sur une maladl, une thérapeutique
Coeur et montagne
adaptation cardiovasculaire
a l’altitude
En altitude, la pression et les gradients d'O,
diminuent a tous les niveaux :
debit ventilatoires et cardiaques doivent
augmenter.
entraine des réactions cardiovasculaires variables
dans le temps et selon le niveau d'altitude [1].
En basse altitude Gusqu’a 1 000 m environ), aucun effet
nest ressenti nau repos nia exercce I faut notercepen-
dant que chez certaines personnes souffrant d'affection
s‘accompagnant déja d'une hypoxémie au niveau de la
mer (cardiopathies avec shunt droite-gauche),V'altitude
de 1.000 m peut aggraver les symptémes. En moyenne
altitude (1 000 a 2.000 m), le sportf ressent un effet
sur la performance maximale ; ainsi, la consommation
maximale d’oxygene diminue. Une tachycardie peut étre
Percue. En haute altitude (entre 2 000 et 5 500 m envi-
ron), es effets immédiats de ’hypoxie hyperventilation,
tachycardie) sont ressentis pour des exercices de plus
fen plus faible intensité, puis au repos. En trés haute
altitude (au-dela de 5 500 m environ), la vie humaine
permanente est, semble-t:il, impossible. Cependant,
Ithomme est capable, par des ajustements appropriés, de
vivre et meme d’avoir une activité physique parfois
intense & ces altitudes. Cela nécessite un temps incom-
pressible d’acclimatation
Le flux d'0, au sein de l'organisme dépend des gradients
successifs de pression o'0, et des débits de ga2 ou desang
| [Fexposition & environnement de montagne
qui transportent I'0, de l'air ambiant jusqu’a la mito-
chondrie. En altitude, la pression d'02 et donc les gra
dients d'0, diminuent 3 tous les niveaux. Ainsi, pour main-
tenir un flux d'O, adéquat au niveau cellulaire, les débits
ventilatoire et cardiaque doivent augmenter pour com-
penser la baisse des gradients dO,
Cceur et activation du systeme
sympathique
LVactvitésympathique augmente en hypoxie, comme en
témoigne l'augmentation de Iactivité nerveuse mesu-
rée directement dans lenerf tibial oupéronier. Laconcen-
tration plasmatique de noradrénaline augmente rapide-
ment puis se stabilise, voire diminue apres 28 3 semaines,
mais reste toujours supérieure & sa valeur du niveau de
la mer [2]. La fonction ehronotrope cardiaque est forte-
ment stimulée en altitude. I! faut ditférencier ce qui se
passe en hyporie aigué (quelques ours) et en hypoxie pro-
longée ou chronique. En hypoxie aigu®, la fréquence car-
diaque de repos augmente de facon proportionnelle au
degré d'hypoxémie. A chaque niveau absolu d’exercice,
Ia fréquence cardiaque est plus élevée en altitude. En
hyponie prolongée, la fréquence cardiaque de repos et
a lrexercice modéré diminue progressivement avec Vc-
‘AMC pratique | n° 143 novembre 2005, 15Ba SSS S|
Altium)
Ficune 1: Variations schématiques de la fréquence
‘ardiaque de repos et & rexercice maximal en
hhypoxie aigué (trait plein) et prolongée (trait
ppointillé) en fonction de Faltitude [1
climatation, mais reste supérieure aux valeurs corres-
pondantes de normoxie. A 'exercice maximal, la fréquence
cardiaque diminue & partir d'environ 3 000 m (fig. 1).
La diminution de la fréquence cardiaque maximale, en
hypoxie prolongée, constitue certainement un facteur
limitant du transport de roxygene 8 lexercice maximal,
car le débit cardiaque diminue de facon paralldle & la
fréquence, le volume d'éjection sys-
tolique variant peu en altitude.
ce phénomane soit lié & une modification de la trans-
duction du signal au sein des f-récepteurs adrénergiques
[5]. lI serait ig, d'une part a la stimulation chronique des
Berécepteurs elle-méme lige a l'activation permanente
du systéme sympathique, d’autre part a un effet spéci-
fique de I'hypoxie sur les récepteurs cardiaques et les
protéines G régulatrices [5].
Cette atténuation des propriétés chronotropes cardiaques
maximales peut limiter la performance physique maxi-
male, mais elle peut étre également considérée comme
lun mécanisme protecteur du myocarde. En effet, la fré-
quence cardiaque est 'un des principaux déterminants de
la consommation d'oxygéne du myacarde et une hypoxie
severe pourrait étre incompatible avec|a fourniture d'oxy-
gene au myocarde nécessaire & une tachycardie intense
[2]. ainsi, 'organisme choisit de limiter ses performances
physiques pour protéger le coeur, organe vital, par une
veritable autorégulation,
Debit cardiaque et contractilité
myocardique
Le volume d' jection systolique varie peu en altitude. Au
repos ou l'exercice, ila tendance a augmenter ou a res-
ter stable en hypoxie aigué eta diminuer en hypoxie chro-
nique. Cette diminution est a mettre en relation avec
tne baisse du retour veineux, comme en témoigne la dimi-
rnution des pressions dans oreillette
droite [6]. Le débit cardiaque aug-
la quantité maximale d'oxy. activité sympathique mente au reposet pour des exercices
gine apportée par le sang vers les @ugMente en hypoxie, modérés, il diminue a lexercice
tissus diminve. avec tachycardie limitée maximal en hypoxie prolongee
Ce phénomene de limitation dela par Vacclimatation Le coeur ne semble pas souffrir en
fréquence cardiaque maximale est et diminution de la fréquence __ altitude, méme en altitude extréme
lig & une diminution de la réponse
chronotrope cardiaque & la stimu-
lation adrénergique, comme si 'al-
titude avait un effet « fbloquant » sur le cobur. I a été
rmissurle compte d'une hyperactivation parasympathique,
‘mais ls'agit surtout d'un phénomene de désensibilsation
es récepteurs radrénergiques[2, 3.
Aisi, on note une baisse en hypoxie de la réponse chro-
notrope cardiaque soit ors d'une activation adrénergique
endogéne (exercice, soit d'une stimulation exogene par
perfusion d'isoprénaline [4]. De plus, la densité des récep-
‘eurs radré-nergiques diminue en hypoxie [2,3]. Cette
esensibilisation des f-récepteursn'est pas completement
réversible par inhalation d'oxyaéne [4]. II semble que
16 | AMC pratique n° 143 novembre 2005,
cardiaque maximale a effort.
[6]. Ainsi, des échocardiographies
réalisées en altitude simulée jusqu'a
8.848 m montrent une augmenta-
tion des indices de contractilité,liée a I'activation du sys
‘téme sympathique : 7 500 m, la fraction d'éjection aug-
mente de 6 % au repos et de 10 % & I'exercice [7]. La
‘elation de Starling évaluée par la courbe volume d'éjec-
tion/pression capillaire bloquée n’est pas altérée en al
tude [6]. Des échographies cardiaques réalisées jusqu'a
Vraltitude équivalente de 8 848 m lors de 'Opération Eve-
rest Ill n’ont pas montré de modifications significatives
de la fraction d'éjection (fig. 2). Le diamatre télédiasto-
lique du VG était plus faible en altitude, traduisant une
diminution du remplissage VG, portant sur le remplis-
aafacure 2; Fonction cardiaque en haute altitude : données échocardiographiques obtenues lors de !'Opération
hy
sage précoce au profit du rdlejoue par la contraction auri-
culaire (comme en temoigne la baisse du rapport de vitesse
maximale de onde E sur onde A). Cette diminution est
probablement lige & une géne du remplissage du VG du
‘ait de la dilatation du VD qui refoule le septum vers la
‘gauche [8].
Lélectrocardiogramme ne montre pas de modification
notable, outre les conséquences directes de la tachycar~
die et de hypertension artérielle pulmonaire avec la sur-
charge ventriculaire droite quelle induit : axe droit (107°
28 800 m), augmentation de amplitude de l'onde P et
des ondes T aplaties ou inversées en précordiales droites.
Par ailleurs, quelques troubles du rythme a type d'extra-
systoles ventriculaires, des bradyarythmies nocturnes ont
pu étre occasionnellement notées[1, 9]. Aucun signe élec-
‘rique de sourfrance myocardique n’a jamais été noté chez
tn sujet sain en haute altitude.
Everest COMEX [1, 8]. NM: niveau de la mer ; RNM : retour au niveau de la mer aprés 30 jours en caisson
iypobare.
Lapression artérielle systémique varie peu en altitude. On
note cependant une tendance & une élévation des pres-
sions systoliques et diastoliques a I'exercice en hypoxie
prolongée. Certaines études trouvent une pression arté-
le legarement augmentée dés le début du séjour, mais
d'autres études ne trouvent aucune variation des pres-
sions systémiques, méme aprés un séjour prolongé en
hypoxie severe (1, 6].
La pression artérielle pulmonaire (PAP) augmente en alti
tude. La vascoconstriction pulmonaire hypoxique induit
tune hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). Cette
HTAP est particuligrement marquée a 'exercice en hypoxie
[6]. Elle est également majorée par la position allongee,
cen particulier au cours du sommeil. La PAP s'éleve apres
quelques minutes et se stabilise en 12.8 24 heures. Elle
augmente avec I'atitude mais peut étre trés variable sui:
‘vant les individu. A 4 500 m, la PAP est le double de sa
‘AMC pratique | n* 143 | novembre 2005 | 17
eeeSSE Sos a
valeur du niveau de la mer. La PAP mesurée par écho-
‘graphie lors de Operation Everest Il (COMEX'97) montre
tune augmentation avec altitude [8]. La pression ne
semble pas revenue ala valeur de base, pour tous essujets,
tun jour aprés le retour en normoxie (fig. 28).
En hypoxie chronique, inhalation doxygane entraine
tune diminution de débit cardiaque et de la PAP, les résis-
tances pulmonaires ne variant pas: cela sgnifie que s'ins-
tallent des modifications structurelles a type de muscu
larisation des artérioles d'environ 500 jim de diamatre,
comme chez le resident de haute altitude. UHTAP reten-
titsurla fonction ventriculaire droite, en créant une hyper-
‘trophie (quisemble cependant limitée chez homme alors,
qu'elle est trés importante chez le rat). Elle peut égale-
ment retentir indirectement sur le remplissage ventricu-
laire gauche par interaction entre les deux ventricules. Au
niveau de la mer, la PAP, élevée chez le foetus, chute brus-
quement apres la naissance ; en altitude, la PAP du nou-
veau-né ne diminue que trés lentement, car le stimulus
hypoxique de lave in utero persiste. Ce phénoméne pour-
rait expliquer l'incidence importante de décompensa-
tion de pathologies cardiaques chez les nouveau-nés de
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6, Reeves J, Groves BM, Sutton
Me al Operon Everest
certaines populations vivant en altitude (Chinois vivant
‘au Tibet). Le réle de I'HTAP dans la genése de l'cedéme
pulmonaire hypoxique est primordial [1]
La circulation coronaire réagit a I'hypoxie aigué par une
vasodilatation dont le médiateur pourrait étre I'adéno-
sine. En hypoxie chronique et chez le résident de haute
altitude, le débit coronaire diminue [1].
La circulation cérébrale est le siege d'un conflit entre la
vasodilatation induite par I'hypoxie et la vasoconstric-
tion induite par 'hypocapnie. La résultante va dans le sens
d'une augmentation du débit cérébral pendant les 3 pre-
riers jours en altitude, suivie d'un retour progressif aux
valeurs de base [10]
‘Au total, le systeme cardiovasculaire est aux avant-postes
dans les processus d'ajustement & I'hypoxie aigué et chro-
nique, particuliérement lors de exercice musculaire. La st
mulation permanente du systéme adrénergique est le méca-
risme principal de mise en jeu de ce syst#me. Cependant,
des mécanismes de protection du cceurse mettent en place
‘és rapidement qui font que le coeur sain est capable de
supporter des hypoxémies tres séveres sans dommage, pour
peu que lacclimatation soit progressive. .
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18 | AMC pratique | n° 143 | novembre 2005
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Apports de La Variabilité de La Fréquence Cardiaque Dans L'évaluation de La Charge D'entraînement Et Le Suivi D'athlètes - Aspects Méthodologiques Et Applications Pratiques