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Christian Delrue L‘ORIGINE DE LA RENAISSANCE DE L’ASSOCIATION DES AMIS DE PANAIT ISTRATI EN FRANCE ET EN ROUMANIE Bonjour a toutes et a tous, Je voudrais tout d’abord remercier M. Ioan Cristescu, directeur du Musée National de la Littérature Roumaine et le professeur Zamfir Balan de leur accueil. Mes remerciements vont ensuite a celles et 4 ceux qui participent a notre voyage d’étude « Sur les traces de Panait Istrati » ainsi qu’a celles et ceux présents dans cette salle auxquels je souhaite la bienvenue dans I’univers de celui qui s’est un moment dénommé lui-méme « I‘homme qui n’adhére a rien » et que Joseph Kessel surnommait « le pélerin du coeur ». Georges Longuet, qui était le premier trésorier de notre association fondééa la fin de l'année 1968 par Edouard Raydon et Jean Stanesco, avaitd’emblée souligné le paradoxe qu'il y avait a adhérer a l'association de « I’homme qui n’adhére a rien » en ces termes : Adhérer, étymologiquement cest étre attaché a, ou encore étre arrété. Dans ce cas, jouer sur le sens des mots devient un devoir et un sujet de méditation & répéter souvent afin de ne pas l'oublier quelque jour de fatigue. A ces conditions, nous nous pardonnerons peut-étre d’avoir « adhéré ». Aussi m’est-il apparu nécessaire de mettre en lumiére le rdle joué par Vamitié dans notre association dans sa renaissance en 9 Christian Delrue France et en Roumanie indissolublement lié 4 son histoire depuis son origine avec Jean Stanesco, émigré roumain a Paris comme son compatriote Istrati qu’il avait connu dans I’entre-deux-guerres. Les présidents Edouard Raydon, Marcel Mermoz, Georges Godebert, Christian Golfetto, Jean Hormieére, la présidente Dominique Foufelle ont toujours veillé a ce que ce lien par les études sur I’ceuvre d’Istrati s‘accompagne d’une amicale entente. Plus particuliérement a partir de 1975, dans des conditions parfois difficiles, sous l’impulsion de son président d’alors, Marcel Mermoz, notre association va nouer des relations étroites avec la Roumanie par Alexandre Talex, écrivain et journaliste qui fut le dernier ami de Panait Istrati, gardien, passeur et dépositaire de son ceuvre avec sa veuve, Marga Istrati. Les voyages qu’il effectua en Roumanie en compagnie de Christian Golfetto, ensuite ceux de Christian Golfetto aprés la mort de Marcel Mermoz en 1982 comme ceux de Dominique Foufelle et de Jean Hormiére, resteront toujours dans toutes les mémoires de nos amis de Roumanie. Corina Costopol vous évoquera plus spécialement et plus personnellement Christian qui a été le président de notre association de 1987 4 1991 et en a assuré la continuité de 1997 a 1999 aprés la mort prématurée de Jean Hormiére, puis des années 2000 4 2012 pendant lesquelles elle n’a plus eu d’activité. Les souvenirs de mes lectures adolescentes des récits de Panait Istrati me font adhérer a l'association en 1984, l'année de la parution de l’anthologie établie par Alexandre Talex, Le Pélerin du ceeur, chez Gallimard dont je faisais alors partie du service commercial, et celle du colloque de Nice auquel j‘assistais. Lors du colloque de Valence, « Panait Istrati et les révolutions » en 1989, Christian Golfetto, qui avait pressenti que se nouait la une amitié durable, me présente Frédéric Ranson avec la chaleur que certaines et certains d’entre vous ont pu apprécier. Et c’est ainsi que, grace a l’amitié entre Christian Golfetto, Frédéric Ranson, René Marchisio et moi-méme entretenue pendant les douze années de sommeil et d’inactivités de V’association de 2000 a 2012, la transmission de son héritage a pu étre assurée et que ces liens allaient contribuer 4 sa renaissance sans qu’aucun d’entre nous ne pouvait savoir alors ce qu’il en adviendrait. La mort 10 Lorigine de la renaissance de l’Association des Amis de Panait Istrati... de Frédéric en 2011 allait précipiter les choses. Je me rendis avec Christian Golfetto 4 son enterrement a Nantes. La perpétuation du souvenir de Frédéric me donna I’énergie de tenter de souffler sur les braises pour que le foyer et la flamme de Panait Istrati se rallume et qui trouvera sa concrétisation par une assemblée générale de renouveau en novembre 2012 et par la parution en 2013 du Haidouc comme bulletin d'information et de liaison de l’association. Les liens avec nos amis de Roumanie se sont immédiatement rétablis grace, entre autres, a Corina Costopol, Maria Cogalniceanu, Mugur Popovici, Liliana Somfalean et Camelia Stanescu. En octobre 2013 la Bibliothéque Nationale de Roumanie, le Musée National de la Littérature Roumaine a Bucarest et la Bibliotheque Régionale Panait Istrati de Braila m’invitent a parler de la renaissance del‘association. Je fais la connaissance de Zamfir Balan qui me fait visiter la Maison mémorielle Panait Istrati de Braila. Depuis une conjonction et un alignement des planétes favorables a la diffusion de lceuvre de Panait Istrati accompagnent, tant en France qu’en Roumanie, le renouveau de I’association par de nouvelles parutions : pour n’en citer que quelques-unes, en 2013 le témoignage d’Eleni Samios-Kazantzaki, La Véritable tragédie de Panait Istrati, parait simultanément en France et en Roumanie, en 2015 l’ouvrage de Nicoleta Redinciuc, L’écriture et ses langues : la littérature de Panait Istrati. Une analyse stylistique et poétique, est édité en Roumanie par les Presses académiques francophones, en France Youvrage de Monique Jutrin, Panait Istrati Un chardon déraciné, est réédité en 2014 et la monographie de Jacques Baujard, Panait Istrati Vamitié vagabonde, parait en 2015. Je ne peux citer ici toutes les rééditions de I’ceuvre du prince des vagabonds ni toutes les études qui lui ont été consacrées depuis ces derniéres années. Vous les trouverez référencées sur le site de l’association. Je ne rappellerai que les récits graphiques des dessinateurs Golo et Simon Géliot. En mai prochain paraitra chez Gallimard une édition de la Correspondance Istrati-Rolland établie et annotée par Daniel Lérault et Jean Riére pour la premiere fois dans l’intégrité des lettres autographes, un événement capital pour la compréhension et le développement des études istratiennes. 1 Christian Delrue En 2016 la Bibliotheque Diderot de Lyon organise avecles Amis de Panait Istrati une rencontre ot est présentée la numérisation des Cahiers Panait Istrati édités de 1987 a 1996 a V'initiative de Christian Golfetto, numérisation réalisée par la Bibliotheque Diderot en partenariat avec notre association. Pendant ce temps Le Haidouc a servi de chambre d’écho a tous ces travaux et a publié des inédits de Panait Istrati comme son appel de 1933 a la libération de Victor Serge ou des articles inédits en langue francaise d’auteurs étrangers qui, comme José Carlos Mariategui et César Vallejo, ont fait connaitre son ceuvre en Amérique latine. Notre prochain bulletin qui paraitra a la fin du mois va publier un texte roumain d’Istrati inédit en langue francaise, Comment j'ai débuté. Cet article est paru dans le journal Rampa en mars 1925 avant d’étre repris laméme année dans le premier ouvrage de Panait Istrati publié en Roumanie. Il se termine par ces mots toujours d’actualité tant en Roumanie qu’en France et dans bien d’autres pays : [...] en Roumanie, ce ne sont pas les critiques sentencieuses qui m’intéressent, mais la confiance profonde du monde opprimé dans Vétoile d’un opprimé, qui s’est élevé victorieux du néant des éternelles défaites. Pour conclure je voudrais rapprocher ces propos de Panait Istrati de ceux qu’Albert Camus tiendra prés de 30 ans plus tard, comme un hommage a notre président d’honneur décédé en 2017 qui était un ami de PanaitIstrati et d’ Albert Camus, et dontla discréte attention et la délicate sollicitude ont accompagné la renaissance de notre association. Albert Camus écrivait ceci en 1953 : [...] séparer la liberté de la justice revient a séparer la culture et le travail, ce qui est péché social par excellence. Le désarroi du mouvement ouvrier en Europe vient en partie de ce qu’il a perdu sa oraie patrie, celle ott il reprenait force aprés toutes les défaites et qui était la foi dans Ia liberté. Mais de méme le désarroi des intellectuels européens vient de ce que la double mystification, bourgeoise et pseudo-révolutionnaire, les a séparés de leur seule source dauthenticité, le travail et la souffrance de tous, les a coupés de leurs seuls alliés naturels, les travailleurs. Je n‘ai jamais reconnu quant @ 12 L’origine de Ia renaissance de l’Association des Amis de Panait Istrati... moi que deux aristocraties, celle du travail et celle de l'intelligence, et je sais maintenant qu’il est fou et criminel de vouloir soumettre l'une 4 Vautre, qu’a elles deux, elles ne font qu'une seule noblesse, que leur vérité et surtout leur efficacité sont dans l'union, que, séparées, elles se Iaisseront réduire une 4 une par les forces de la tyrannie et de la barbarie, mais que réunies au contraire, elles feront la loi du monde. Je vous remercie de votre attention. Rezumat Prezenta comunicare, revazuta pentru publicare, se vrea 0 scurta si, desigur, incompleta evocare a rolului pe care l-au jucat relatiile de prietenie in continuitatea si in renasterea Asociatiei ,Prietenii lui Panait Istrati” in Franta si in Romania. 13

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