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ISSN 0985-9216 Société Alkan. 145, rue de Saussure 75017 PARIS Bulletin 22 - Janvier 1993 Huit ans d'existence L'assemblée générale du premier décembre 1992 marqunit huit ans de bons et loyaux servi- cea pour naire association. L'année éconlée nous a Inegement. payés des efforts cansentis. Si le centenaire de la mort d'Alian, en 1988, a’avait pas domné lieu A des événements sigaifi- catifs en Free, c*éait cans doute faute d’avoir su opérer une vraie synergie entre les die rents moyens de diffusion et de communication. Il est tout 4 l'bonseur de Brigitte Frangois- Sappey d'avoir réussi & mobiliser un éditeur de poids, et d'avoir fortemant impliqué France- ‘Musique (ce qui avait fait largement défut en 1988) dans une séric sions ct plusieurs concerts, Mensemble ayant bénéficié d'une bome couverture médiafique, La parution de plusieurs disques n'a fait que renforcer l'impression qu'Alkan avait désornmais une place dans te monde musical Frangais. Face & ce progris considérable, notre assemblée, comme toujours assez réduite, s'est in- terrogée sur la fagon dont l'association doit gérer cette situation nouvelle. I est clair que les adhérents d'une société Théodore Gouvy et ceux d'une société Hector Berlioz n': les mémes attestes. Dans le premier cas, 'y a une carence complbte de notoniaé, d'informa- tion accessible et d'enregistrements ; la popularité du second ext mienx assise, il est ainé de se constituer un fonds de livres, ‘partitions et disqnes le concemant. Bn echématisant A Vextéme, Alkan est passé d'tn statut 4 Yautre. Toute pervonne intéressée par ce camposi- teur est aujourd'hui A méme de se procurer livres ef disques qul sarisferont I'essentiel de ses appétits. Signe des temps : les marchands de partitions parisiens ont désormais tous en stock quelques-umes des ceavres majenres d' Alkan, ce qui était inimaginable il y a seulement denx ans. Pour autant, ainsi que le sculignail Monsieur Deeveaux, la cause n'est pas gagnée. a fit remarquer que cette nouvelle popularité d' Alkan ne rapporte paradoxalement que peu de membres & notre association. Mais est-ce si paradoxal ? Une partie de la réponse se trouve dans 'epposition exposée ci-dessus : sitét qu'il devient aisé de disposer d'une infor- tiation correcte, la Société Allcan perd son role de recours indispensable pour tous cenx qui voudraient découvrir ce compositenr. ‘Une des questions les plus débattues fut. celle de lonverture de notre association 3 d'au- tres sujets : car s'il existe un risque d'essoufflemest ou de radotage, la solution n'est-2lle pas dans une diversification de nos péles d’intérét ? Nous avons d’aillears toujours souligné 2 Bulletin 22 combiea nos membres étaient des gens curieux de nature, ot en général attinés par tout ce qui tort de lordinaire oa musique. Monsieur Dervoaux a fait romargher que ect élazginsc- ment était cependant dangereux, car Ia dispersion est une menace pour notre efficacité. En fait, sit est Clair que notte avenir n'est pas de nous recycler dans Chopin ou Brahms, ni méme dans un autre compositeur aégligé, on notera que les articles comme celui de Laurent Martin sur Ta psychologie du pianiste, ou celui aur Henselt, ont eu un gros succes en leur temps, Si élargissement il y a, il importe que ce soit dans le but de toujours mieux com. prendre Alkan’: quand Schumann, Gadewsky, Sorabji on Prokofiev permetient de micux cemer certains traits de notre musicien, ils ont, A ce titre, et progressivement, fleur place dans notre bulletin et wos actions ; mais il serait suicidaire de prétendre mous consacret avec antant d'assiduité & des sujets trop extérieurs A notre but initial. Sur cette question, Laurent ‘Martin propose d'envoyer un questionnaire & nos membres, comme cela avait déja éé fait il ya plusicurs ; Amdliorer la connaissance d'Atkan, c'est apporter toujours davantage d'information flable et & jour, et la diffuser de facon intelligente. La réédition régulidre de la discogra- hic, par cxemple, répond bien a cette altcatc. Suivant la méme idée, nous ticherons cctte année de rééditer le catalogue de l'ceuvre. Celui qui est inséré dans le livre paru en ~ bre 1992 reste une référeice, mais quelques améliorations et compléments peuvent déjt y exe apportés. Une bibHiographie, aussi exhaustive que possible, sem également établic, Alors qu'on commence tout juste 4 parier publiquement d’ Alkan ea France, un grand nom- bre de personnes nous font part d'anecdotes, de souvenirs ou de documents personnels, de riches fonds privés s'onvrent, toutes pistes qui feront l‘objet de rapports quand elles anront &é poussées au bout ; cela montre que la recherche allcanienne est encore en complet deve- nit. Dés lor, sur des outils aussl essentiels que les cataldgues et les repertoires, i est bon de conserver encore heancoup de souplesse, de passihiliiée de mises 2 jour faéquentes et peu cotitenses, ce qui est le cas de ces « annexes aux bulletins >. Chacun s'accorde ¢’ailleurs 4 soutigner l'importance de Faspect « société savante » de notre association qui est garant de notre réputation, plus que des investissements dans de multiples actions que nous ne maitri- sons pas toujours. ‘Monsieur Derveaux a insisté sur la nécessité d'une meilicare diffusion, par exemple par un envai systématique du balletin awx biblioth8ques, journaux, journalistes, écofes de mnsi- que, conservatoires. A ce titre, il nous propose de joindre au pmchain mailing des éditions Billaudot, qui touche plus d'un millier dVinstitntions musicales, une plaquetic. concereant Alkan et notre association. ‘Les éditions Billaudot préparent pour 1993 a réédition de Ja Sonate de concert op. 47 pour violoncelle et piano et de Petit conte, cette derniére pidce tant depuis longtemps épui- sée of recherchée. L'éditeur suisse Parzifal ayant, pour une exécution sans doute, saisi toute ta partition de la Marcia fimebre sulla morte d'un peppagalio sur ordinateur, il en a proposé le résultat aux éditions Billaudot, qui l'on racheté et vont I'éditer sous cette forme, tres su- périenre au fac simile actuellement disponible. ‘Pour clore cette solrée, le bilan financier fut approuvé, et les deux membres sortants du conseil d'administration réstus 3 I'unanienits. ‘Franvis Luguenot Manifestations et publications Ltorganisation de concerts nous a souvent ports Ia guigne. On se rappellera celui du centre musical BOsendorfer désené pour cause de manifestation sur le Trocadéro, Le mercredi 18 novenrbe, o sont les gréves des transports en commun couplées a des manifestations qui ont vidé l'anditozium Piano-Santé, ob Laurent Martin donsait un récital d'cuvres d' Alkan et de List, Le programme était pourtant alléchant, ot ceux qui ont pu patvenir sans eacom- bre jusqu'a la salle, ne sen sont pas repentis. En premiere partie, Laurent Mastin a imter- préid plusicars pitces tardives de Liset. Ce répertoire est un peu devenu étape obiligée dex Socttis Aliza 1993 Butletin 22 3 Bimistes, qui jovent & mon godt trop souvent les mémes cxuvres, Ceute fois nous avons eu dealt A Ba deuxibrue Mephisro-Waltz, la deuxteme Valse cubilée, un Pnprompm et la fameuse Baguelle sans tonalite, Ces couvres font partie d'un programme entiérement consacré au demicr Liszt, qui va bien au-delA des ctemels Nuages gris ou Lugubres gondoles, et a fait Tobjet d'un disque pour l'insant rnéseavé & une diffusion privée, mais qu'on peut espérer découvrir bientdt chez les disquaires, car il nous névele un Laurent Martin au sommet de sa foonc. Is Alkan Ctaicm des Sécowveres post Ja majorité de L'assistance. Si nous vous déj2 pu enicadre sous kes doigts de ce pianiste les Afrs 2 5 er 7 temps, les quatre #0- (bes immpromptus de f'opus 32 son! beaucoup plus rares, et pouram. pas négligeaties. Ainsi me te souligns José Vianna da Motta dans un aril qui suit, Super fumina Babyloxis op. 52 est unc fresque d'une rare densité ; le pianiste avous avoir rarénent affronié une patce aussi sauvage ; kes changements brotaux de climat obligent une intense concentra Gon, comme pour kes Préludes ou les Motifs, Le Rondo chromatique op. ¥2 eet-il une satire ou Tocuvre d'un adolescent excore tout imprégné de l'air du temps ? Je pencheras pour la pacific solution. Pour clore ce concen, nous avons découvert Je lameux opus 1, compesi- toa délirame d'un gargon de quinze ans, qui ne fait pas toujours dans Je génie mais sait 6A éblouir par un incroyable brio pianistique. Toutes ces pitces ont ct enregisinées peu apts, f (cruut partic d'un disque a paraitre chez Marco Polo, En décembre, c'est la Sorbonne que l'on a parks d'Alkan. Il s‘agissait de la oérémnnie de récoption du volume de mélanges offert a Georges Lubin, anquel Jacques-Philippe Saint- Gérand ct moi-méme wons contribué. Ajoutous que notre chapitre, qui cal Te plus dére- loppé, est de plus placé on tear de l’ouvrage ! On trouvait dans la noble assemblés un grand nombre d'Gmincats dix-ncuvitmistes Pierre-Georges Castex, Madcleine Ambrltre, ctc.}, mais surtout te dédicanire de louvrage, a'vnc verdour cncore Gteammte, ct surout d'une Immilité et d'une ouverture d'esprit qui font micux comprendre I'excellence de son cdition de Ia comespondance de George Sand. Parmi les futures publications des ceatres d'etudes sur Jes comespondances du CNRS, le nom d'Alkan a &6 cité en bone place. Nous cspérons pouvoir disposer de quelques volumes supplémentaires, et surtout de tirés A part, pour ccux qui 5¢ sont enquis de ce livre apris les délais de souscription. Frangois Lagueaot Actualités discographiques Ce long trimestre éooulé nous a permis de voir parsitre quatre nouveaux disques compltte- ‘moat ct partiolloment conszorés f des cuvees d'Alina. Blouron de cas nouveaatts, fle ron de tome la discographie d Alkan, je voudras cer farsi, chez Pear, d'un enre- istrement ce Ja Symphonie op. int i. cit réguliérement son Som, mur cs de Soar de Ferolo Busbal, Raolt Gane ou ides Philp, panes Is eS pianistes du début de ce sidcle & avoir maintenu Alkan & leur épertoire. On sait égale- ‘meat qu'ea 1938, pour le cinguantenatre de a mort du compositenr, il avait enregistré pour a BEC la Symphonie et le Concerto op. 39, ainsi que plusieurs autres pidces. On avait meme po c7bire un temps que ces bandes seraient, a moins particliemest, reprises sur le dentier CD édité par Symposium Records (voir i précédent bulletin). ‘La pochette du disque nous explique qu’en fait, ces bandes sent anjourd'hni perdves. C'est done d'un en- Tegistrement de 1952 ou 1953 dont nous disposons, réalisé au Mills College. Prévenons tout Ue sulle les [uiucs acquéreury de vel merveille : fe son est particatitrement mauvais, Mais pas suffisamment pour nous priver du génie de Vinterpréte qui transcende cette Symphonie commie personne, excepté peut-étre Raymond Lewenthal. Avouerai-je que je ne tenais jusqu’a ce jour cette piece pour la quintesscnce d'Alkan ; ie premier mouremeat purticuli Tement me semblait une peu Statique et fragmentaire, Egon Petri nous plonge d'embiée dans Tomuvre, Ll nous saisit ot ne nous Jache plus, Ce premier mouvement est véritablement sym- phonique, consteuit, conéteat, & l'image de o¢ que Mare-André Hamelin a fait ou premier Sociést Atlan 1999 4 Bulletin 22 yolet du Concerto up. 39. Les autres mouvements sont @ l’avenant : tonjours vigourenx, tapides - mais tels sont Jes vrais tempos chez Alkan -. et jamais bouseulés ; la pulsation Bropre & chaque mouvement est toujours respeciée, et l'on se rend compte qu'en ce sens, Alkan est ts proche des compositeurs baraques qu'il connaissait si bien. Cet enregistre’ ment ne nous fait que davantage regretter Ia perte des hander de 1938, Tout le rete du pro- pramme est du méme niveau : que ce soit Liszt, Chopin on Bach/Busoni, Egon Petri nous donne une immense lecon de piano. Ja musique de chambre est en passe de devenir ba paris plus earegisings de Vcouree c’Alkan : Jes trois autres disques que nous critiquons lui sont consacrés. Disoas tout de suite qu'ils ne remottent pas en cause la suprématie de Vintégrale que Ganiou, Kang ; < suppliant > (2° theme, l'accompagnement étamt souligné du qualificatif « dur); «avec ir»; «déchirant > (© thdme) ; (1 thime) ; « le Seigneur » (choral) ; « avec bonheur » (2° théme) ; «avec dilives »; « sourd » ((* theme) ; « forte ef aver confiauce » (dural), 2 mouvement - 40 ans, Un heureux ménage, Lentement : « avec tendresse et quiétude » ( thime); «Jes enfants > (2° théme, passage 2 trois voix en doubles croches) ; « amoureusement > (retour du 1* thimc) ; « 10 heurve >; «la pritre» ; « tendrement > (fragment du 1 thime) ; « gentiment » (fragment du 2* thime), 4 mouvement - 5O'ans, Proméhée enchainé, Fotrémement lent. Quelques vers du Prométhée d'Pschyle tont placés en exergue. Tnsuite il est pls asé de comprendir les titres et indications d'exéeution : ). LS *, Souvenirs. Aime-moi 1, Le Vent, et Morte. Op. 27. Le Chemin de fer, étude : il s'agit d'une pidce descriptive, malgré les affirma- tions d'Alkan précédemment citées ; on entend le bruit lourd et cadencé des roves, le sif- flement de la locomotive, om passe sur un pont, dans une plaisante contrée, on entre finale- ment en gare, od le train furiex trouve une douce paix en majent ; Vhahillage wmsical, en forme de perpenuim mobile, est extremement spirituel. Op. 31. 25 Préludes (chez Brandus). Parmi eux : J'érais endormte mais mon coeur weillait (Cantique des Cantiques), et La Chanson de la folle au bord de la mer. Op. 35, 12 Enudes dans tous les tons majeurs. Parmi lesquelles : Allegro barbaro (sur Jes Wwuches blanches), Z'incendie au village voisin (successivement : romance amourense, lointsin bruit de tumulte, Vincendie, arrivée de la soldatesque. cantique d'action de grice). Op. 39. 12 Etudes’ dans tous les tons minews. On retiendra: Comme le vent (« assontighiato » : Mger, ddli), Marcia fimebre sulla morte d'un Uomo da bene 4, Le Festin a'Esope (theme et variations; dans’ I'une delle, une sctne de chasse, on trouve « abbajante >!) + Quand aucun éfinne n'est psi, lee emevres ent part cher Contallat 2 Pasta 4. [11s'aglt du mouvement leat de la Symphonie ; oe litre a disparu dans Jn réédition chez Billaudot] Socléit Alkan 1993 Bulletins 22 g ‘Op. 45. Salut, cendre du pauvre ! Puraphrase d'un podme. Op. 50.2) Cappricio alla soldatesca. Vers la fm, on peut lire : «come ua conqué- rach >. b) Le Tambour bat aux champs. Cette pibce a récemment &6 jouée, ever beat- comp d'effet, par Basen Variations @ la viele sur wn air de V'Elisire d'Amore. Ecsite dans te style d'un morceau Worgue de barburie, celte pide est une parodie raffinée, Sean oni pleure et Jean qui rit. Deux fogues ; la seconde, sur Vair du vin de Don Jucn, ‘eat presque injouable. ‘On trouve d'autres cxemples intéreswants dans les 48 Moiffs op. 63 et dans les 5 Recuells de Chanis. Le mélange d'idées ammsantes et naives d'une part, et d'une dérision exploitée avec maestria d'antre Part, produit un effet 2 la fois strange et captivant. Ce obté growsque ‘youl et sanvage apparenic Allan ax grand graveur espagnol Goya. Te caractore geil de Ia musique d'Alkan est suffisamment mis en lumitre par ce cui récade. Quant a ceux qui s'y intéressent, ils devront approfondir leurs connaissances dans es ceavres eller-mémes : ile ne s'en repentiront par, UI ne reste plus qu'a souligner que, imprégné qu'il est de la substance de Bach, Alkan inaitrise toralement les techniques de composition. 11 pense polyphoniquement. Formellement, il est attiré pat ‘e gigantieme (le wemier mouvement du Concerta op. 39 couvre 7? pages) ; pourtant, il faut bien semanquer qq’il suit toujours solidement le fil de sa pensée, et ne perd jamais do vue le résvltat d'en- szamble, Les dimensions sont souvent trés grandes, mais I'équilibres est toujours respect’. La minutie qu'il apporie & organiser clairement sa peasée, apparait Tremert dane les Betites pRces mélotienses. Chaque section est soulignée d'une double barre, les plus graa- dex divisions sont repéntes par une barre de mesure plus épaisse (par exemple dans ies Pridres op. 64 et les Chants op. 38). Ti reste & caractériser le pianisme de ses ceavres. Alkan passide une technique bien & h exploite I'instrument ct nous soumet des problémes tant techniques que sonores. Tl offre ‘ax pianistes un champ de travail extrémement riche ef profitable dans les deux cirectiors. Qn retiendra son amour particulier pour les octaves, les accords, les effets massifs, Les pas- rages on doubles notes sont plus mares. Au contraire de List, il a également rarment cours 4 la répartition d'un motif entre Jes deux mains. ‘Mais dans les morceaux comportant tne seule vou, chaque main. il est extraordinairement inventif, En outre, dang de tels pzs- sages, il aime & spécifier un doigter particulier, par exemple : eat sett ete (également la main gauche) aes KA AES aay Sacidté Athan 1993 10 Bulletin 22 ‘Souvent, on sere frappé par une combinaison intéressante et nouvelle + ta main droite Ja main gauche Ala main droite = (Gzalement &Ja main gauche) Allegeo, Po Ros Soop (Galement ala main gauche) On trouvera dans le Concerto en sol didse mineur (op. 39 07) un passage développé sur les notes répéites. D'un inigrét aussi vif sont les effets sonores qu'Atkan faisait tout particulidrement res- gern, et qui sont souvent complement nenfs. A tite d'exemple, voici un passage tnt de Vétude Le P eehe a 17. On remarquera les précises indications d'exécution : on doit jouer ~bien chants que les harmonies sonnent, comme soutenues par dex instruments 2 vent ; mais par dessus plane le vif scintillement d'wa theme mélodienx et ample. (Aitegre) Loa daar reine bin Bas eer bds 2h bien chante P. a td Dans La Chanson de ia folle au bord de ta mer (de V'opus 31), il obtient un effet pro- fondément poétique par tes moyens les plus simples : yegistre et écartement des 5. [Ende op. 522°2.3 ‘Sociésé Alkan 1993 Bulletin 22 it vorx. I évoque la sourde rumeur de I'ooéan, |'horizon sans fin et la sithquette seule sur la gee: Lotemnt Fadpemeste fed poo Tris aewiene Bn matibre d'effet sonore, a encore davantage harmonique, on retiendra le génial Allegretto de V'opus 38, deuxitme cahier *. Le fa de la voix médiane constitue une pédale d'orgue durant tout le oe snifcaton euesge tan ansi eae Permaneat avec I'har- momic, ce qui fait que sa ige sans cesse. excitation de voir avec combien de virtuosité ot de maitrise cote ccuvre d'art cst conduite, ainsi que le naturel ct Yaisance avec lesquels la mélodie plane sur le tout ! Cela commence de la faccn suivante : Miegetteld sm) = a Imagine-t-on maintenant ce, far qui vagabonde parmi tes diverses tonalités : ur majeur, ia majeur, sf bémol majeur, fa bémol majear, si bémol majeur, wt majeur, ré mineur, puis de wouvedu Ja miveur ef fa’majeur. Ces quelques exemples qui pourzaieat éue aisément mul- tipliés, ne prétendient qu’ sugpérer des éclairciscements sur son art, La‘ musique d’Alkan captivera tout musiciea. En ce qui concerne les pianistes, c'est meme unc étude obligatoire, Nous recommandons tout particulitremeat fes oeuvres suivan- fs, dont le travail nous semble vraiment profitable, car elles sont 2 ka fois plaisantes et fmouenses au pln wehique. Alkan nous Musse’solxanloseize cuvres aver ‘tuméro d'opus, onze sais numéro d'opus, et vingt et une transcriptions 7. Presque toutes sont écri- @s pour piano a deux mains. Deux concetios pour piano peuvent étre négliges (bien que le second, en un seul mouvement, soit formellement tits intéressant). De la musigue de cham- ‘bre - qui comprend une sonate pour violon comportant un admirable adagio : L'Enfer, dont mn passage se jouc « évangeliquement », une sonale pour violoncelle bavarde, ef un trio - sows reasons le Trio. Pianistiquement cependant, co sont Jes éaudes qui sont & privilé- Les Eindes A vrai die, Alkan sous-catcnd beaucoup sous oc vovable : il ne stagit pas simplement do Téude d'un point technique, mais surtout de 1'étude d'un caracttre, Parmi ies 12 Zrudes- Caprices op. 12, 13, 15 ef 16, on doit avant tout connaitre I'opus 15 Souvenirs, Trois mor- ces doe Te genre pathtique, Cos piece sont dices Lise ot ae cotisnsent peut cee est-oe Bun hommage au m: iano ~ pas Ia ples pctite indication de tempo ou de Stance, Tes promi ct tomntane pidves sont paricuiteaont patheiques ; la dourieane est une étude pique sur les gammes chromatiques, intitulge Le Vers. Cet opus a également pa- mu chez Hofmeister. Op. 17. Le Prewe, tude d'octaves ; Op. 27. Le Chemin de fer, mouvement perpétuel ; Op. 35, 22 Etudes dans tous fes tons majeurs (Brandus) ; on a pu lire la revue critique de von Billow dans ce journal §, 6. (Connu aujounl hui sous le titre de Fa, qui ne figure pas dans l'édition originale.] 17. JEa fay, sur les soixente-seize muméros d'opus, vingt semblent inattibués ; les couvres publiée par Alkan sans aunéy sont plutét au ombre de quinze ou seize ; nous complons uno ranscripion de prus que autcuc.] 8. [Dans le numéro 35 du 25 soft 1887.) Socitré Alkan 1993 i2 Bulletin 22 Op. 39. 12 Enudes dans tous tes tons mineurs, C'est la plus grande oeuvre d'Alkan, Fétis Vappellc « uae €popée pour piano », Le caractize ost ici particulitrement bica radu, Qualre des dudes constituent les mouvements done symphonic, trois autres forment un concerto pour piano (dont ke premier mouvement est la pitce pianistiquement la plus étincelante d'Alian) ; on trouve aussi unc ouverture, un théme avce variations au titre curicux, Ze Festin d'Esope : c'est une composition sombre, pleine de force et de passion. Op. 76. 3 Etudes. Celles pour la main gauche seale et pour la main divite seule (‘) sont presque injouables. Peut-Gire so trouve-t-il quelque ambilieux pianiste qui parviondra, en les travaillant, pouvoir exécuter deux éiudes de Chopin a la fois °, La trvistme dude, cczite pour les desk mains en mouvement paralltle, est cependant du plus grand inérét, tant techniquement que musicalement, Les pitces poétiques Ces pltoes ne sont en aucun cas & opposer aux éaides qui compronnce: aissi dc nombreux passages expressils. Op. 31. 25 Préludes (chez Brandus). Parmi cos petites piboes raffinées, le treizime Prélude, sur ua yors du Cantique des Cantiques ', ost un morceau magnifiquement éthéré et délicieusement réveur, Op. 33. Sonate (chez Brandus). Retenous ea particulier Ye second mouvement Quast- Faust, dramatiquemont agité o considérablomont développé, Op. 37. 3 Marches quasi da Cavalleria (actamment 1a premitye). Chez, Alkan, les so8- nes militaires ont ua relief extraordinaire. Dans Je méme gearo, citons : ‘Op. 50. a) Capriccio alla soldatesea b) Le Tambour bat aux champs, Op. 38, Chants (Lieder olne Worte), en tout cing recueils de six pitces chacun 4, les deux premiers étant les plus précieux, Ba hommage 4 Mendelssohn, ils épousent la méme sucoession tonale que le premier recucil de Lieder olzte Worte do co demiet. ‘Op. 45. Salut, cendre du pauvre | C'est une pide profondément émouvante, Une grave complaints préctde le passage d'un convoi farce, sijet prissamment développé, apres quoi le premier théme conclut soloanellement, Op. $2. Super furnina Babylows, paraphrase du Psaume 137. La musique illustre file- lement le podme. Si ce n'est pas I de la musique & programme... La pidce est coastruite en phrases trés denses ; & Ja fin, I'éclat de haine fanatique est expriiné avec plein de feu, ‘Op. 61. Sonatine. Le tare en est trompeur ; Poouvre atteint dans le demier mouvement 4 une grandeur tragique, Op, 63. 48 Motifs. Ces esquisses sont du plus haut intérét ; Jes titres tSmoignent & eux seuls de Ia richesse des ides spiituelles. Le Début de quaruor est la plus exquise satire d'Alkan, Dew Fantasticherias. Les pidces religieuses pour pédalier On atteint ici au plus haut sommet de ce qu'Alkan a créé. Datant du crépuscule de sa dou- Ioureuse vie, ces ceuvtes proposent le plus intime épanchement d'une 4me profondément religieuse, une manifestation du mystire le plux intérieur. Ce sont presque des confessicns, des pages du joumal intime d'un homme dont les yeux se sont ouverts 2 la plus profonde douleur du monde. On voit presque le cwur encore palpitam et saignant sous le poids de Yunivers, qui se bausse bientdt jusqu’a la joyeuse confiatce en Diew (Benedicuss), ov se laisse transfigurer dans le pressentiment d'une rédemption (Prélude en 7é bémol majeur) ; unais celui qui parle ici est toujours un solitaire, qui ne dialogue qu'aver lui-mime. D'od une intense concentration, que l'on ne rencontre que chez les maitres. 9, [C'st ce geare de traltement monstrucux que Godowsky fit subir 4 quelques éudes de Chopin.] 10. [F'éeals endormie ricis mon cov wilait} 11, Seuls Lee deux premiers recuells portent Je numéro d'opus38.] Soctéré Alkars 1993 Bulletin 22 up Op. 54. Benedictus. Op. 64. 12 Pridrer. Dans ces pidees s'exprima, 3 ofté d'une profonde mélancolie, un dour et serein amour de Dieu, charmant et touchant. ‘Op. 66, 11 Grands prétudes. Celvi en ré bémol, déja Evoqué, respire une atmosphire digne ée Parsifal. Presque encore de ce mande, c'est a pidce la plus céleste d'Alkan : c'est Voeuvre d'un homme qui a triomphé du destin. D'autres préludes, tel celui en uf mineux, sont d'une grandeur tragique ; celui en fa ditse mineur, en forme de rcitatif, est une plinte Gloquente et saisiseante. Deux sont éorits A la manire de fa musique hébraique, dan. le entitrement original. Dans l'un, il indique explicitement : « dans le style juif » (alle gi ), Alkan avait atfentivement étudié Ja musique hébraique ancienae. Dans opus 31 aussi il use de ce style. A la fin du recueil il offre une transcription du Messie de Haendel, sur le texte : « Devant tous mes adversaires, 'insulte ma brisé le coeur, jusqu’a défaillic, T'eopérais 1a compassion, mais on vain, dcs consolateurs, je n'en ai pas trouvés, 8, Quel isitoire | Op. 72. 11 Pidces dans le style religieux (sans partie de pédale). Bien que plusieurs de ces pisces soient indiquées pour « Piano 3 clavier de Pédales ou Orgue », elles sont pensées si pianistiquement que C. Franck, 2 qui l'opus 66 est dédié, en x “Réalisé tine adaptation pour orgve. AU mieux, on peut les jouer & quatre mains, encore que arrangement ne soil pas toujours facile. Cela incita I'anteur du présent article 4 tanserire um choix de Pridret pour piano A denx mains, ce qui ouvre ainsi ure nouvelle opportunits ae ‘exécution. Enfin, il reste encore la grande cadence pour le premier moavement cn concerto pour piano en ut mineur de Beethoven. Bien que d'un développement trop important pour une exéoution en public, elle présente un grand inéré en tan que pide autonome. Une falls dmagination préside ‘aux métamorphoses thématiques, l'andace de ce point d’orgue est exal tame, Tingénisité- doiton parier & génie ou d: raiveté? - atejenamt des somme's inége- ables, quand, aprés une longue préparation, Atkan introduit un theme du finale de la sym- phonie en uf mineur, qui a assurémeni une indéniable parenté avec le théme principal da concerto, et surtout ensuite lors de l'extraordinaire développement du trille final 4 travers Acs modulations da deuxibme thime. Nous espGroms avoir donné, dans nou esqusse, une nourelleimpulsion la désouverts de ce maitre du clavier méconnw, toujours aussi singulier et riche 4'i (traduction : Francois Liguenoi) Nouvelles diverses + Mare André Hamelin n'est pas uniquement M'interpitte d'un Concerto d’Alkan dont nous avons dit tout lo bien que nous pensions. Plusicurs autres disques nous scmblent d'un intérét majeur, et montrent d'ailleurs unc curiosité d'esprit tout & feit remarquable. Ajoutons gue, contrairemeat & combien d'autres pianistes cn quéte d'inédit - les noms abondeat... -, Marc- André a lea moyens techniques ct mentaux de telles scdécourertes. Bn premier lica, citons Ja premi@re Sonate pour piano de Sorabji, que toute la critique a saluée en France (para chez Altar). Veil un compositeur extavegant gui ‘commento jouir de quelque populc- xité en France, et que Mare-André Hamelin nous montre sous son meilleur jour. Qui entend. citer le nom de Sorabji pense avant tout 4 des couvres colossales. Cette sonate cn cst tout ke contraire ot ne mangue Pas d'intérét, Autre curiosilé : hes six sonates pour piano de Sophie- Carmen Bskhardt-Gramatté (également chez Altarus, deux disques) ; quoi qu'en pense le grussicr Jean Vormei] dans la revue Répertoire, ces sonates, si elles ne respirent pas le gé- nie & chaque page, distillent souvent une grande force expressive ; inutile de préciser que Marc-André Hamelin a toute ta technique et surtout Pintelligenes névossaire pour ex tier meitlenr, Je suis moins couvaincy par son disque consacré & Godowsky (pars chez CEC), qui oomprend des transcriptions de Chopin, de Schubert, de R. Sleauss, ele, a des asuvees 12. (Teadnetion de In Bible de Térusatem_] Sooldid Athan 1993 it Bulletin 22 originales ; mais j'ai toujours grand mal & trouver intértt 4 o2¢ « tripotages » qui me seat- bdlent piutét tuer l'art de Chopia qu'autre chose, Un disque d'couvres de Linz! a enfin né. cemment paru chez Music & Ars ; la critique I'a accueitli avec quelque tiédenr ; je lui trouve pourtant une teoue remanquable ; j‘en retiendrai tout particulirement les deux pidces extrémes : Ins Réminiscences de Norma et les Réiminiscences de Don Juan, jouées avec un feu extraordinaire. * On cite tra souvent les voyages musicaur A travers 1'Europe de Charles Bumey, mais quant & pouvoir fire l'ouvrage, il n'en était josqu'alors pas question, C'est désonmais pos- sible yrive 4 L'édidon par Flamuarion dans la remarquable collection Harmoniques, agré- mentie de notes savantes par Michel Noir sous lettre Vovage musical dans I Europe des * Nous disions ci-dessus qu' Alkan éiait en passe de devenir un élément - presque - incon- tournable du romantisme. Dans un récent et excellent disque que le pianiste Josep Colom a consaers a César Franck (Le Chant de monde), Jo3l-Marie Fauquet entame le texte de pré- sentation en citant le nom d'Atkan, Voila une référence qui eut laissé songeur autefois { EL. Dans le prochain numéro, 4 paraitre au deuxidme trimestre 1993 : # Des compies rendus de concerts du jeune Alkan # Les deux critiques de Schumann, précédemment annoneges pour ce bulletin déji épais © Compte rendu des réactions & la publication du Charles Valentin Alkan, sous la direction de Brigite Franzois Sappey Dip6t Iigal : f6vrier 1993 ISSN 0995-5215 Socidié Alkan 1909

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