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xtv® MENVEILLE. 53 croire ce que vous voyez, je vais vous donner un signa auquel vous reconnaitrez la vérité : Aujourd’hui meme est passé a la vie bienheureuse le grand serviteur do Dieu Jean de Nivelle, chanoine de Liége, lequel, ayant été toute sa vie le bienfaiteur dévoud des pauvees, qu'il secourait par d’abondantes aumdnes et par les consola+ tions du cour, a encore, aprés sa mort, obtenu de Dieu la grace de faire du bien aux Ames du purgatoire, dont il a délivré un grand nombre. Car, tandis que les anges le portaient dans la ccleste Jérusalem, il a apergu les malhcureuses ames souffrantes, au milieu des flammes expiatoires, et parmi elles beaucoup de ceux qu'il avait convertis & la pénitence; alors il s'est adressé 4 la divine miséricorde, au nom des mériles de Jésus-Cinist 5 ila élé exaucé lout aussitdt, ct une multitude de ces captifs, ' délivrés & instant, se sont joints au corlége de leur bienfaiteur. J'ai été de cette troupe privilégiée. Mais, avant de monter od mon Dieu m'appelle pour me cou- ronner, il m’a été accordé de venir 4 vous, de vous témoigner ma gratitude, puisque ce sont vos paroles bénies qui m’ont éelairée, et que vous avez eu souvenir: de moi dans vos oraisons. » ‘ Dés que la vision cut disparu, le pére s’empressa décrire a Liége, et il regut des chanoines assurance que ce jour-la méme, & Pheure od il avait vu ct en- tendu, le vénérable Jean avait quitté ce monde. Voyez donc, conclut ici 'historien qui rapporle ce trait, voyez de quelle gloire sont jugés dignes ceux qui emploicnt Je temps de leur existence 4 travailler au salut du prochain! , (V. ‘Thomas de Catimpré, dpum, tiv. Hy chap. 31, 5.) M.D. (Pos WS y oXV® MERVEILLE. a eae ceemeeteeeeereeme eee . XVe MERVEILLE, » EA PEINE TRANSFEREE D’UN DEFUNT A UN VIVANT. Condemnat justus mortuns vivos Smpios s ‘ Le juste condanmne du fond de sor stputere lus Imples qui vivent encore, (Sap, tv, 16,) On raconte qu'un chasseur laissa & son fils, en mou- tant, trois excellents faucons, lui recommandant d’en conserver deux pour lui et de vendre Io troisiéme, afin en donner fe prix aux pauvres pour l'ame de son parc. Le.fils.voulut choisir les deux meilleurs et réserver l'au- tre pour l'aymone. Mais pendant qu'il les éprouve, loiseau réservé s’échappe de ses mains ct vole de tonte sa force. Il le rappelle, le siffle de toutes les manidres, mais inulilement; ce que voyant, il dit tranquillement : « Va pour l’'ame de mon pére I» Vrai ou non, ce qui n'est quo trop exact c'est la con- duite de. bien des enfants & V'égard de leurs parents morts. Thomas de Catimpré nous offre encore ici une lecon que je lui emprunte. Pendant les guerres de Charlemagne, un valeareux soldat avait servi, de longues années dans des charges importantes et honorables. Sa vie avait été celle d'un chretien;.content de sa paie, il s'interdisait tout acte de violence et de rapine, et le tumulte des camps ne l'éloigoait d’aucun de ses devoirs essentiels. Toutefois, il lait tombé fréquemment dans quantité de petites > a fautes ordinaires aux gens de ss profession. Tl avail vicilli sous le drapeau, et était arrive ainsi 4 un age trés-avancé. La maladie mortelle le vint visiter. Alors il appela auprés de son Jit un neveu orphelin, dont il stétait fait le pore, et il lui dit : «Je n'ai aucun bien & te K¢guer, mon fils ; le testament que je pourrais faire n'aurait pour objct que mes armes cb mon cheval. Je te recommande, je te prie instamment, lorsque j'aurai rendu mon ame & Dinu, de vendre cet aniwal, et lary gent. qui en reviendra tu lo distribueras 4 des prdttes ct aux pauvres, alin que les premiers offrent pour mot Je divin sacrifice ct que les aulres ie secourent dv leurs prigres. » . Le neveu, touche de lascéne qu'il avail sous les yeux, promit avec serment d'accomplir aussitot cette dernigro volonté. Dés qu'il vit-son onele expiré, il prit le cheval avec tous ses harnaiset‘émmena. Celle béte était bonne et belle; elle lui plut dés labord. Il commenga par s'ep servir pour quelyues petits voyuges, ct, en etanl encore plus salisfait, il ne pensait pas 4 s'en priver de" si Lot; soit qu'il ne se crat point obligé Wexéculer aussi’ promplement sa prom suit parce qu'il estinait qu'il lui élait loisible Wintervertir Vordre et de consa- crer @ faumdne te prix des armes a la place de celui | do cheval, quoiga’l {Qt tres-inférienr 5 soit lout autre motif qu'il est inutile de rechercher. En tardant ainsi! de jour en jour, de semaine en semaine, de mois en mois, il finit par éloulfer les ré amations de sa con-— science et les remords qui oe manquaieul pas de Tagi- | ter; en sorte qu'il oublia entiérement sun parent et sun hienfaiteur, et se conduisit comme s'il ue Pavait point connu, eb comme s'il ne lui restail ricn de lu. XV° MERVEILLE. SLY 56 XV° MERVEILLE. il y avait six mois que cela durait, lorsqu’un matin Je défunt lui apparait et lui adresse les plus amer: Yeproches. « Malheureux! lui dit-il, ta n’as eu aucun soin de faire pour l'dme de ton oncle ce a quoi tu tétais ' engagé a son lit de mort! ct 4 cause de ton infiddlité, de ton coeur plus dur que la pierre, i m’a fallu endurer des supplices inexprimables dans le purgatoire. Que te + dirai-je pour te punir? Maintenant Drev a eu pilié de moi, il a pris en considération mes souffrances; mon Ame sort de sa prison et monte au glorieux s¢jour. Mais toi, par un juste jugement, tu ne tarderas pas 4 mourir, et ton ame ira au méme licu pour souffrir 4 ma place autant do temps qu'il m'en restait & faire sila divine mistricorde n'avait usé envers moi d'indulgence; et cela outre le temps réservé a tes propres fautes. » A ces mots, il disparut. Les choses se passérent comine il I'avait prédit. Bien peu de temps aprés, ce jeune homme tombe gravement malade : il appelle promptement un prétre, se confesse avec larmes et raconte sa vision. [1 lavait & peine finic, qu'il expire, allant sans doute accomplir la seconde partie de ce qui lui avait été annoncé, ct souffrir dans le purgatoire les tourments dont il n'avait pas délivré son oncle. Apprenez de 1a, ajoute Vhistorien que nous copions, combien une telle ingralitnde déplait au Seigucur, ct a quel point il se montre sévére & légard des enfants ov des parents qui manquent au saint devoir de la recon- naissance. Comment perdre le souvenir de ceux qui nous ont fait du bien, qui nous ont aids et que nous pouvons si fucilement soulager? (V. Thomas de Catimpré, Apum, liv. n, ch. 53, bh. 25, ‘ XNVIS MERVEFLLE. wee eee XVIe MERVEILLE. CEST SE DELIVRER SU-MEMB QUS DE SECOURIR LES AMES DU PURGATOIRE, Reatus qui intelligit super eqenun et pau- perem! indie maid liberabit enm Dominus ¢ Bienheureux celui quia Vintelligence des hesoins du pauvre ! au jour mauvais Diea Te detivrera, (Ps. xty 2+) Co ne sont pas sculement les saints docteurs, c'est l'Eglise clle-méme qui, dans son oflice des morts, ap- plique a Ja miséricorde envers les défunts le passage des psaumes que nous venons de citer. Ces pauvres Ames sont en effet les plus indigentes, les plus dignes de com- passion, pnisqu’elles no peuvent rien pour clles-inémes. Elles réclament avec inslance nos sulfrages, nous pro- mettant d'ailleurs qu’elles s'acquilteront envers nous * avec usure dés qu’elles pourront le faire. Nous avons rapporté plusicurs trails de cette reconnaissance : en voici un nouveau. , Guillaume Freyssen, fameux libraire de Cologne, apras avoir obtenu du Ciel deux graces signaltes, en Tan 1649, écrivit au R. P. Jacques Montfort, de la Compagnie de Jésus, grand promotour de celle dévotion par son précieux livre De imisericordia fidelibus defunc- tis ehibendd, une Iellre que veus donnons dans son entier : ion 53 XV" MENVEILLE. « Je vous éeris, mon Pere, poor vous faire part de [a double ct miracnteuse gucrison de mon fils et de moa femme. Pendant les jours de féle of ma maison 6tait fermée, je me suis mis a liro Io livre dont vous maviez confié l'iimpression, touchant lo zale envers les Ames du purgatoiro. J’étais encore occupé d celle lec- ture, ‘lorsqu’on vint m‘avertir que mon petit enfant, do quatre ans, éprouvait les premicres alteintes d'une maladie singulidre, laquelle s'aggrava rapidement et le mit en danger de la vie. Les médccins en désespé- raient, et déja on faisait par avance Jes préparatifs des funérailles. La pensée me vint que je pourrais peut- élre le sauver en faisant un voou en faveur des dmes du purgatoire. De bon matin donc je me rends a l’église, et je supplie avee une grande ferveur le Bon-Dieu de mexaucer, m’engageant par vou a distribuer gratui- tement cent exemplaires du livre qui apprend a s‘inté- resser aux membres de I'Eglise souffrante, et de les donner & des ecclésiastiyues et a des religieux, afin qu'ils s'acquittassent avec plus de fruit des pratiques qui y sont enseignées. » J’étais plein d’espérance. Quand je rentraia la mai- son, je trouvai mon fils en meilleur état; il demandait d¢ja de la nourriture, quoique depuis plusicurs jours il he pat avaler méine une goutte de liquide. Le lende- main il était parfaitement guéri; il s¢ leva, sortit pour Ja promenade et mangea comme s'il n’avait jamais souf- fert. Pénétré de gratitude, je n’eus rien de plus pressé que d'accomplir ma promesso. J’allai au college de la Compagnie, je priai les Pares d'accepter de louvrage antant d’exemplaires qu’ils voudraient, et de bien von- loir distribues eux-mémes les autres aux ordres reli-

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