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Certificats médicaux. Décès et législation.


Prélèvements d’organes et législation
D r Laurent Fanton, P r Daniel Malicier
Université de Lyon, Lyon, F-69003, France ; Université Lyon 1, Institut de Médecine Légale, Lyon, F-69008, France ;
Hospices Civils de Lyon, Département de Médecine Légale, Hôpital Edouard-Herriot, Lyon, F-69003, France
laurent.fanton@adm.univ-lyon1.fr daniel.malicier@chu-lyon.fr

Objectifs
• Préciser les règles générales d’établissement des certificats
CERTIFICATS MÉDICAUX médicaux et leurs conséquences médicolégales.
Définition • Préciser les principes de la législation concernant le décès
et l’inhumation.
Ce sont des attestations de constatation
d’ordre exclusivement médical concernant la
• Préciser les principes de la législation concernant les prélèvements
santé d'un patient et pouvant avoir des consé-
d’organes.
quences sur ses intérêts privés. Le code de
déontologie stipule que leur rédaction fait par-
tie intégrante de l'exercice de la médecine, et que le médecin a Différents types de certificats
une obligation réglementaire de les produire pour faciliter l'ob-
tention pour son patient des avantages sociaux auxquels son état 1. Certificats prévus par des textes législatifs
lui donne droit. Les conséquences de la rédaction des certificats ou réglementaires
médicaux vis-à-vis du secret médical, des relations entre les per- ✓ En matière civile, il s’agit :
sonnes, ou entre les personnes et des administrations expliquent — du certificat prénuptial : il est indispensable à l’officier d’état civil
qu’ils soient encadrés par de nombreux textes. Leur rédaction est pour publier les bans (fig. 1). Sa rédaction s’accompagne de la réali-
également soumise à des contraintes évoluant au gré de la société sation d’examens biologiques obligatoires lorsque la future conjointe
et des mœurs des patients. Les règles de rédaction communes des a moins de 50 ans. Depuis 1993, la loi précise que le médecin peut
certificats médicaux sont décrites, avant que ne soient envisagés les proposer à chaque futur conjoint une sérologie VIH. Le résultat
différents types de certificats et la question de leur remise au patient. positif de cet examen peut le confronter à un problème éthique
entre le respect du secret médical et les conséquences de la non-
Règles de production communes divulgation du résultat. Dans cette situation, le médecin doit utiliser
des certificats médicaux toute sa persuasion pour convaincre l’intéressé(e) de communiquer
Le médecin doit être certain de sa compétence dans le le diagnostic à son futur conjoint. Dans l’hypothèse où il s'y oppo-
domaine sur lequel il va certifier. Au moindre doute, il doit orien- serait, la loi ne laisse pas d'autre choix que de garder le silence ;
ter le patient vers un de ses confrères. Il doit toujours avoir vu — du certificat de sauvegarde de justice. La loi du 3 janvier 1968
et examiner le patient sur lequel porte le certificat, en respec- relative à la protection des incapables majeurs a défini trois régimes
tant les règles de rédaction figurant dans le tableau 1. La non- de protection : la sauvegarde de justice, la curatelle et la tutelle.
observance de ces règles est susceptible d’engager la respon- Le premier est une mesure de protection temporaire indiquée
sabilité disciplinaire, pénale ou civile du médecin, quel que soit dans l’attente de la mise en place d’un régime plus protecteur, ou
le domaine du certificat. Enfin, il est toujours utile de garder un en cas d’altération temporaire des facultés d’un patient. Le médecin
double d’un certificat, en cas de perte ou de contestation ulté- généraliste doit l’envisager chaque fois qu’il a le sentiment que
rieure par le patient. les intérêts matériels de son patient sont mis en jeu, soit du fait

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Figure 1 Certificat prénuptial.

Tableau 1 Règles de rédaction des certificats d’intérêts divergents dans sa famille soit du fait de la cupidité de
certains proches. La mise en place d’une sauvegarde de justice
médicaux
repose sur la rédaction d’un certificat adressé au procureur de la
République, et dont la conclusion doit mentionner que « ce (cette)
❚ Le certificat est établi sur papier libre patient(e) présente des altérations physiques et/ou psychiques
❚ L'écriture doit être lisible et aucune abréviation ne doit être utilisée (mentionner des détails) qui nécessitent qu’il (elle) soit protégé(e)
par une mesure de sauvegarde de justice conformément aux
❚ Le certificat doit porter l'identification complète du rédacteur
dispositions de la loi du 3 janvier 1968 ». Elle prend effet au jour
❚ Le certificat doit porter l'identification alléguée de la personne à qui de la rédaction du certificat.
se rapporte le certificat même lorsqu’il s’agit de certificats préremplis ✓ En matière pénale, il s’agit de
❚ Les déclarations de l'intéressé doivent toujours être rapportées au — la réquisition : les certificats en matière pénale sont souvent rédi-
conditionnel ou reprises entre guillemets gés dans le cadre d’une réquisition médicolégale. Il s’agit d’un for-
mulaire remis au médecin par un officier de police judiciaire, un magis-
❚ Le médecin doit rapporter uniquement les faits médicaux réellement
constatés trat, pour réaliser un acte médicolégal aux frais de la justice. Le
médecin a l’obligation d’y répondre sous peine de voir sa responsa-
❚ Les conclusions du certificat doivent toujours être suivies bilité pénale ou disciplinaire engagée. Il ne peut déroger à cette obliga-
de la mention : « certificat rédigé à la demande de l’intéressé, et remis
tion qu’en cas de maladie, d’obligation de donner des soins urgents au
en mains propres à lui pour faire valoir ce que de droit »
même moment, d'incompétence technique, de lien avec la personne
❚ Le certificat doit toujours être daté du jour où il a été rédigé à examiner, ou lorsqu’il est son médecin traitant. Les certificats aux-
❚ La signature du rédacteur doit être lisible quels donnent lieu les réquisitions doivent toujours mentionner le
nom de l’autorité requérante et les termes exacts de la mission ;

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— le certificat de coups et blessures : le premier objectif de ce
certificat est d’établir un état des lieux des lésions par une des- POINTS FORTS
cription la plus précise possible (nature, couleur, dimension, loca- à retenir
lisation). Cette description peut s’accompagner de photographies Les règles de rédaction communes des certificats médicaux.
réalisées avec l'accord de la victime. Tous les résultats des exa- La remise des certificats médicaux.
mens complémentaires et des avis spécialisés doivent également
Les indications et les conséquences de l’obstacle
être mentionnés. Le second objectif concerne la détermination
médicolégal à l’inhumation.
de la durée de l’incapacité temporaire totale de travail (ITT), qui
correspond à la période au cours de laquelle un traumatisme Les principes généraux régissant le prélèvement d’organes.
physique et/ou psychique va perturber les activités de la vie quo- La procédure concernant le donneur et le recueil de son
tidienne de la victime, sans forcément toutes les interdire. consentement.
La détermination de l’ITT est fondamentale, car elle détermine
la juridiction devant laquelle va être traduit l'auteur des faits, et (v. MINI TEST DE LECTURE, p. 428)
l'importance des peines encourues. En matière de violences
volontaires, c'est la règle des 8 jours qui prévaut : ITT 압 8 jours : procédure pénale définit les modalités de l'examen médical d'un
contravention jugée par le tribunal de police ; ITT > 8 jours : délit gardé à vue. Cet examen peut être sollicité par la personne elle-
jugé par le tribunal correctionnel. En matière de coups et blessures même, par les enquêteurs ou par le procureur de la République.
involontaires (accident), c'est la règle des 90 jours qui prévaut : Il est obligatoire au moins une fois par jour, pour les mineurs de
ITT 압 3 mois : contravention jugée par le tribunal de police ; moins de 16 ans, dans le cadre d'infractions sur la législation sur
ITT > 3 mois : délit jugé par le tribunal correctionnel. les stupéfiants, et d'actes terroristes. Dans ces deux derniers cas,
Le certificat de coups et blessures peut être sollicité directe- l'examen doit être réalisé par un médecin-expert désigné par le
ment par une victime, hors cadre de la réquisition. Dans ce procureur de la République ou par un juge d'instruction. La réqui-
contexte, il s'agit d'un certificat obligatoire auquel le médecin ne sition concerne l’aptitude médicale de la personne à être main-
peut déroger ; tenue dans les locaux des enquêteurs. Lors de son examen, le
— le certificat de garde à vue : la garde à vue est une mesure de médecin doit rechercher des traumatismes et les mentionner
privation temporaire de liberté au cours de laquelle un individu dans son certificat. Il peut également émettre des réserves secon-
est gardé dans les locaux de la police ou de la gendarmerie pour daires à un traitement habituel. Dans cette situation, il est pos-
les besoins de l'enquête. Sa durée habituelle est de 24 heures, sible de rédiger une ordonnance remise aux policiers ou aux gen-
renouvelable une fois (soit 48 h). Elle peut être prolongée de darmes, qui se procureront les médicaments et les remettront
48 heures dans le cadre d'infractions sur la législation sur les au gardé à vue. Ce certificat doit être rédigé avec la plus grande
stupéfiants ou d'acte de terrorisme (soit 4 jours). Le Code de prudence et au moindre doute mentionner que l'état de santé

QU’EST-CE QUI PEUT TOMBER À L’EXAMEN ?


Les trois items de cette question, comme la plupart de ceux concernant violences volontaires et des violences
l’apprentissage de l’exercice médical, peuvent s’intégrer dans des dossiers involontaires, l’évaluation (et non la déter-
cliniques multidisciplinaires. mination exacte) en elle-même paraît être
une question de bons sens. Concernant
Les certificats médicaux semblent toute- plusieurs questions à partir de diverses l’item sur le décès, la principale question
fois pouvoir faire l’objet de plus de ques- situations cliniques : traumatisme, violen- concerne l’indication de l’obstacle médi-
tions, compte tenu de leur implication ces conjugales, divorce, droit de garde des colégal à l’inhumation et ses conséquen-
dans la vie professionnelle du médecin, enfants. La rédaction ou la critique sur la ces pratiques pour les proches de la vic-
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quels que soient sa spécialité et son mode forme et le fond d’un certificat pourraient time. Enfin, l’item concernant la législation
d’exercice. Une question ponctuelle peut constituer une première question avec le sur les prélèvements présente un intérêt
être envisagée sur la remise d’un certifi- piège de l’immixtion dans la vie privée du compte tenu du caractère récent des der-
cat obligatoire (arrêt maladie, accident du patient. Les autres questions pourraient nières lois de bioéthique. Il est plausible
travail, certificat prénuptial) ou facultatif porter sur l’évaluation de l’ITT dans le d’envisager dans un dossier portant sur
(certificat post mortem), en prenant en cadre de coups et blessures, les destina- une indication de greffe d’organe une ou
compte les particularités de chacun d’entre taires du document, avec des digressions plusieurs questions à ce sujet. Elles pour-
eux. Il est également possible d’envisager possibles sur la réquisition médicolégale. raient porter sur la qualité du donneur et
un dossier clinique avec une connotation L’écueil principal dans l’évaluation de sur le recueil de son consentement en
médicolégale plus marquée, comportant l’ITT concerne la différenciation entre des fonction du contexte. ●

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du gardé à vue n'est pas compatible avec le maintien en garde Tableau 2 Certificats prévus par le code
à vue. La cause médicale de cette inaptitude ne doit pas être de la santé publique
mentionnée ;
— le certificat lié à l’usage d’alcool au volant : la conduite en état ❚ Certificat prénuptial
alcoolique constitue un délit si l’alcoolémie est supérieure à 0,5 g/L,
ou si le taux d'alcool dans l’air expiré est supérieur à 0,25 mg/L.
❚ Certificat d’interruption volontaire de grossesse
Le dépistage de l'alcool peut être réalisé de façon aléatoire, ou ❚ Certificats prénataux
systématiquement en cas d'accident avec dommage corporel ou ❚ Certificats de naissance
d'infractions énumérées dans le code de la route. Dans ces situa-
tions, un dépistage de l’absorption de substances ou de plantes ❚ Certificats de santé de la naissance à l’âge de 6 ans
classées comme stupéfiants est également réalisé. Le médecin ❚ Certificats de vaccinations obligatoires
est réquisitionné pour procéder à l'examen clinique et à une prise
❚ Certificats d’hospitalisation en milieu psychiatrique
de sang. Les constatations cliniques sont relevées sur la fiche B d'un
triptyque, qui est remise à l'autorité requérante. Le prélèvement ❚ Toxicomanie
sanguin est réalisé à l'aide d'un matériel fourni par l'autorité ❚ Alcooliques dangereux
requérante, et en présence de cette dernière. Le prélèvement ne
❚ Certificats de décès (v. 1.3)
peut être effectué qu'avec l'accord de la personne. En cas de refus,
il n'est pas possible de le réaliser contre la volonté de la personne ;
— le certificat de non-admission : la réglementation précise que responsabilité professionnelle pour immixtion abusive dans la
toute personne en état d'ivresse manifeste peut être conduite au vie privée de ses patients mais également pénale pour violation
poste pour y être retenue 6 heures, jusqu'à ce qu'elle ait retrouvé du secret professionnel. Le médecin doit toujours s'assurer de
sa raison. Cette rétention est toujours précédée d’une visite médicale l’objet du certificat et de l'utilisation que va en faire le patient. Il
pour s'assurer de la compatibilité de l'état du sujet avec son main- reste juge de l'opportunité de sa délivrance, et peut refuser sa
tien dans les locaux de la police ou de la gendarmerie. L'examen production si elle va à l’encontre de la déontologie ou de l’intérêt
clinique doit être complet et systématique, car l'alcoolisation s'ac- du patient. Il n’encourt aucune sanction dans le cas du refus de
compagne parfois de traumatismes pouvant passer inaperçus. délivrance d'un certificat médical non obligatoire.
La prise d'alcool peut également être associée à celle de médi-
caments ou de produits stupéfiants. Le certificat remis à l'auto- Remise des certificats médicaux
rité requérante est un certificat de « non-hospitalisation » ou Lorsque la personne concernée est vivante, le certificat médi-
« d’hospitalisation ». cal doit toujours lui être remis en mains propres. Il peut toute-
✓ Les certificats destinés à obtenir des avantages sociaux sont en fois être donné à un proche, si elle est inconsciente ou incapa-
particulier des certificats d’arrêt maladie, d’accident du travail, ble. À l’exception de ces circonstances, le certificat médical n’est
de maladies professionnelles destinés à la Sécurité sociale. Leur jamais transmis à un tiers, quel qu’il soit : conjoint, ami, admi-
établissement est fondamental, car ils conditionnent le verse- nistration, notaire, avocat, compagnie d'assurances... sous peine
ment d'indemnités financières à l’assuré social. Le code de déon- d’engager la responsabilité disciplinaire et pénale du médecin.
tologie précise que le médecin est autorisé, sauf opposition du Pour les mineurs ou les incapables majeurs, c’est le tuteur légal
patient, à communiquer au médecin-conseil les renseignements qui est le destinataire du certificat. La loi du 4 mars 2002 autorise
médicaux strictement en rapport avec le versement des presta- sa remise directement au mineur lorsque celui-ci est apte à com-
tions. Dans le cas où le patient s’y opposerait, il s’expose au refus prendre les informations qu'il contient ou qu'il ne souhaite pas
de leur versement par la caisse. Le médecin doit être objectif et qu'elles soient dévoilées à son tuteur légal. Si la personne concer-
rigoureux dans la rédaction de ces certificats, car elle peut enga- née est décédée, la loi autorise la remise d’un certificat men-
ger sa responsabilité disciplinaire en cas de prescription d'arrêts tionnant la cause du décès aux ayants droit du défunt dans les
de travail injustifiés ou mal rédigés (antidaté ou postdaté). cas suivants :
✓ Dans le domaine de la santé publique, le Code de la santé publique — décès d'un pensionné militaire, d'un sujet atteint d'une mal-
prévoit également la rédaction de nombreux certificats, de la adie professionnelle ou d'une victime d'un accident du travail
conception au décès de l’individu (tableau 2). lorsque le décès est en rapport avec les lésions ayant motivé la
pension ;
2. Certificats non obligatoires ou certificats facultatifs — annulation d’une rente viagère lorsque la personne est décé-
Le médecin peut être sollicité pour rédiger une kyrielle de cer- dée d'une maladie dans les vingt jours ayant suivi la signature
tificats non prévus par la loi ou par des règlements. La principale du contrat ;
difficulté consiste à éviter la rédaction de document n'ayant pas — sujet atteint de démence lors de la rédaction d’un testament.
d’objet médical, ou pouvant le mettre dans une situation embar- Lorsque la famille a besoin d’un certificat post mortem pour
rassante vis-à-vis du secret médical. Il s'agit d'une des situations faire valoir ses droits, le médecin peut rédiger un certificat de
les plus fréquentes où le médecin risque de voir engager sa mort naturelle ou de mort violente sans mentionner la cause

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exacte du décès ou de la maladie. Quelles que soient les cir- La case doit être cochée en cas de :
constances, la date du début d'une affection, le traitement en — mort violente : crime, suicide, accident ;
cours ou la cause médicale du décès ne doivent jamais être trans- — mort suspecte : décès posant un problème du fait des circons-
mis à un tiers (assurance, avocat ou notaire). Dans le cas parti- tances ou de la personnalité de la victime, qui ne permettent pas
culier d’un certificat post mortem demandé par une assurance, d’écarter une mort violente ;
le médecin peut uniquement indiquer qu’il s’agissait d’une mort — mort susceptible de poser un problème de responsabilité
naturelle ou de cause étrangère aux risques exclus par le contrat médicale.
qui lui a été communiqué. Dans cette situation, toutes les opérations funéraires sont
La rédaction des certificats médicaux engage la responsabi- suspendues jusqu’à leur autorisation par l’autorité judiciaire. Un
lité disciplinaire, pénale et civile du médecin. Le médecin doit médecin légiste peut être requis par un officier de police judiciaire
donc toujours rester d'une grande rigueur et d'une grande objec- pour procéder à un examen externe du cadavre (levée de corps
tivité dans leur rédaction. médicolégale). À son issue, le procureur de la République, ou un
juge, ordonnera ou non une autopsie médicolégale. In fine, c’est
le magistrat qui délivre le permis d’inhumer.
DÉCÈS ET LÉGISLATION Le médecin doit toujours signer le certificat de décès avec un
La mort est le sort inéluctable de tous les êtres vivants, et sa obstacle médicolégal à l’inhumation chaque fois qu’il n’est pas
constatation en revient naturellement au médecin à travers la certain du caractère naturel du décès. Enfin, il ne doit jamais
rédaction du certificat de décès. Le mode de rédaction de ce cer- oublier que l'autopsie médicolégale est le seul examen qui per-
tificat est fondamental, car il conditionne en partie le déroule- met d'établir le lien de causalité entre un accident du travail ou
ment des opérations d’inhumation. une maladie professionnelle et le décès.

Certificat de décès Transport des corps et inhumation


Le transport sans mise en bière au domicile du défunt ou d’un
1. Description des membres de sa famille est autorisé par l’officier d’état civil
Le certificat de décès est un imprimé bleu (fig. 2) comportant si l’état du corps le permet, en l’absence d’une des maladies conta-
deux volets et plusieurs rubriques. Le volet supérieur nominatif gieuses précédemment évoquées et en l’absence d’obstacle
comporte la date et l’heure précises où le décès a été constaté. médicolégal à l’inhumation. Il doit avoir lieu dans un délai maxi-
Il présente également plusieurs rubriques permettant d’autori- mal de vingt-quatre heures, et de trente-six heures si le corps a
ser ou de refuser des opérations funéraires du fait d’un mauvais subi des soins de conservation. Ce dernier délai a été porté à
état du corps ou de certaines maladies contagieuses précisées 48 heures si le transport sans mise en bière est effectué vers
au verso du certificat, et de vérifier la présence de prothèse fonc- une chambre funéraire.
tionnant au moyen d’une pile. Le volet inférieur du certificat de
décès contient des renseignements médicaux confidentiels des-
tinés aux statistiques nationales, elle doit être cachetée. Tableau 3 Critères diagnostiques de la mort
2. Règles de rédaction
1 / Signes négatifs de la vie
✓ Le diagnostic de la mort est le préalable à la rédaction du cer-
tificat de décès et il faut s'assurer que la mort est bien réelle et
❚ Disparition de l’état de conscience
❚ Disparition de l’activité respiratoire
constante. Répondre à cette question nécessite la réalisation ❚ Disparition de l’activité cardiovasculaire
d’un examen rigoureux, afin de ne pas méconnaître un état coma-
teux d’origine toxique par exemple (tableau 3). Cet examen permet 2 / Signes positifs de la mort
aussi de rechercher la présence d’une prothèse fonctionnant au ❚ Précoces
moyen d’une pile (stimulateur cardiaque par exemple), qui devra ➙ Refroidissement
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être enlevée par le médecin ou un thanatopracteur agréé en rai- ➙ Lividités : taches « lie de vin » secondaires à l’accumulation
son du risque d’explosion en cas d’incinération. Enfin, lors de cet de sang dans les zones déclives et épargnant les zones d’appui
examen le médecin doit rechercher tous les éléments en faveur (45 min 앐 30 min après le décès)
d’un obstacle médicolégal à l’inhumation. ➙ Rigidité : contraction post mortem des muscles triés et lisses
✓ La case « obstacle médicolégal à l’inhumation » n’est pas cochée (3 h 앐30 min après le décès)
en cas de mort naturelle. La mort naturelle est par définition la ❚ Tardifs
mort attendue survenant au terme d’une maladie connue et trai- Putréfaction : tache verte abdominale, gonflement, circulation pos-
tée, dont on pouvait prévoir l’issue dans un certain délai. L’acte thume, phlyctènes
de décès est alors dressé par l’officier d’état civil, qui délivre le
3 / Diagnostics différentiels
permis d’inhumer en autorisant des opérations en fonction des ❚ États comateux : intoxications, hypothermie profonde
indications portées dans le certificat de décès.

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Figure 2 Certificat de décès (recto).

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Figure 2 Certificat de décès (verso).

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L’inhumation a lieu 24 heures au plus tôt et 6 jours au plus, Tableau 4 Maladies infectieuses dépistées
après le décès s’il est survenu en France, 6 jours au plus, après avant tout prélèvement d’organe
l’entrée du corps en France si le décès a eu lieu à l’étranger ou
dans un territoire d’outre-mer. En cas d’autopsie médicolégale, ❚ Infection par les virus de l’immunodéficience humaine VIH 1 et VIH 2
le corps est rendu à la famille une fois que le magistrat est cer-
❚ Infection à virus HTLV I
tain que toutes les opérations nécessaires à la manifestation de
la vérité ont été réalisées. ❚ Infection par le virus de l’hépatite B

Cas particulier des enfants mort-nés ❚ Infection par le virus de l’hépatite C


L’enfant né vivant mais non viable et l’enfant mort-né de plus ❚ Syphilis
de 22 semaines d’aménorrhée (SA) et de plus de 500 g. Ils font ❚ Infection par le cytomégalovirus
l’objet d’une déclaration d’enfant sans vie reportée sur les registres
de décès. Ils peuvent être inscrits sur le livret de famille à la ❚ Infection par le virus Epstein-Barr
demande des parents. Lorsque l’enfant est un fœtus de moins ❚ Infection par l’agent responsable de la toxoplasmose
de 22 SA ou de moins de 500 g, il est considéré comme pièce
anatomique. Les pièces anatomiques sont des organes ou des
membres aisément identifiables recueillis à l’occasion des acti-
vités de soins devant être incinérés. Dans tous les cas de figure, 2. Chez le sujet majeur
des obsèques civiles ou religieuses sont possibles. Le donneur peut être le père ou la mère, le conjoint, les frères
ou les sœurs, le fils ou la fille, les grands-parents, les oncles ou tan-
tes, les cousins germains et cousines germaines, le conjoint du père
PRÉLÈVEMENTS D’ORGANES ET LÉGISLATION ou de la mère, et toute personne apportant la preuve d’une vie com-
La première greffe de rein eut lieu en 1951, elle fut suivie 17 ans mune d’au moins deux ans. Ce lien de parenté n’est pas exigé
plus tard par la première greffe de cœur. Ce ne fut cependant pour le don de moelle osseuse. Le donneur doit être informé des
qu’avec la découverte de la ciclosporine en 1978 que l’on assista bénéfices escomptés de la greffe mais également des risques
à une augmentation considérable de la demande de greffons. qu’il encourt à l’occasion du prélèvement. Cette information est
Parallèlement, le développement de cette nouvelle thérapeu- dévolue à un comité d’experts constitué par trois médecins, une
tique a posé des questions éthiques, qui ont justifié un encadre- personne qualifiée dans le domaine des sciences sociales et
ment législatif particulier. En 1976, les lois Caillavet ont organisé humaines et un psychologue. C’est seulement à l’issue de cette
cette activité, et introduit la notion de consentement présumé information que le donneur peut exprimer oralement son consen-
chez le donneur décédé, d’anonymat et de gratuité. En 1994, les tement devant le président du tribunal de grande instance (ou
lois de bioéthique ont défini des principes fondamentaux pénale- un magistrat désigné par lui), ou en urgence devant le procureur
ment sanctionnés : la gratuité des dons, l’anonymat entre le donneur de la République. Ce consentement reste révocable sans justifi-
et le receveur, le consentement libre et éclairé du donneur, et la cation et à tout moment.
sécurité sanitaire (tableau 4). Elles avaient pour principal objectif
d’éviter toute dérive mercantile de cette activité. Les lois de bio- 3. Chez le sujet mineur
éthiques du 6 août 2004 se sont inscrites dans la continuité des Le prélèvement de moelle osseuse est autorisé par la loi au
précédentes en ayant pour objectif de répondre à la pénurie de bénéfice du frère ou de la sœur, du cousin germain ou de la
greffons. Elles ont élargi le champ des donneurs vivants et confié cousine germaine, des oncles ou des tantes. Le mineur reçoit
au médecin généraliste une mission d’information chez tous ses également une information d’un comité d’experts, comportant
patients âgés de 16 à 25 ans. Ces lois ont également mis en place un pédiatre. C’est ce comité qui donne l’autorisation du prélè-
l’Agence de la biomédecine, dont l’un des domaines d’activité est vement avant que les deux titulaires de l’autorité parentale
le don, le prélèvement et la greffe d’organes et de tissus. expriment leur consentement devant les mêmes magistrats
que pour l’adulte. Ce consentement est également révocable
Prélèvements d’organes chez le sujet vivant à tout moment.

1. Principes 4. Chez l’incapable majeur


Le prélèvement d’organes chez le sujet vivant repose sur trois Le prélèvement de moelle osseuse est autorisé au bénéfice
conditions : l’intérêt thérapeutique direct du receveur (excluant des mêmes personnes que pour les enfants, avec en plus les
tout prélèvement à finalité scientifique), le lien de parenté et le neveux et les nièces. En revanche, la loi distingue deux situations
consentement du donneur. Concernant les deux dernières, la loi concernant l’information et le recueil du consentement en fonction
différencie les sujets majeurs, des sujets mineurs et des incapables du régime de protection. Pour le majeur sous sauvegarde de jus-
majeurs. Elle précise également qu’ils peuvent faire don uniquement tice ou sous curatelle, le prélèvement est autorisé par le même
de leur moelle osseuse. comité d’experts que pour les adultes, après vérification par le

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juge des tutelles que la personne a la faculté de consentir. Pour Tableau 5 Le diagnostic de mort cérébrale
le majeur sous tutelle, c’est ce juge des tutelles qui autorise le
prélèvement après avoir entendu la personne et pris l’avis du Signes cliniques
tuteur et du comité d’experts. ❚ Absence totale de conscience et d’activité motrice spontanée
❚ Abolition de tous les réflexes du tronc cérébral
Prélèvement chez le sujet décédé ❚ Absence totale de ventilation spontanée vérifiée par une épreuve
1. Principes d’hypercapnie

Le prélèvement chez un sujet décédé repose sur 5 conditions : Signes paracliniques


le constat de la mort, la finalité du prélèvement, le consentement ❚ Deux électroencéphalogrammes nuls et aréactifs effectués à un
du donneur, l’anonymat et la gratuité. Quelle que soit la finalité intervalle minimal de 4 heures, réalisés avec amplification
du prélèvement, la loi précise que les médecins doivent s’assu- maximale sur une durée d’enregistrement de trente minutes et dont
rer de la meilleure restauration possible du corps. le résultat doit être immédiatement consigné par le médecin qui en
fait l’interprétation
2. Diagnostic de mort cérébrale (tableau 5) ❚ Une angiographie objectivant l’arrêt de la circulation encéphalique
Il aboutit à la rédaction d’un constat de mort cérébrale établi et dont le résultat doit être immédiatement consigné par le radiologue
par 2 médecins n’appartenant pas à l’équipe de prélèvement. qui en fait l’interprétation
Dans l’hypothèse où le décès pose un problème médicolégal, le
prélèvement ne peut être réalisé qu’après un examen médico-
légal et la non-opposition du procureur de la République. — organiser les comités d’experts autorisant le prélèvement sur
donneur vivant ;
3. Finalité du prélèvement — donner un avis en vue des autorisations des établissements de
Le prélèvement d’organes chez le sujet décédé ne peut être santé et des suites de préservation d’organes et de tissus ;
réalisé qu’à des fins thérapeutiques ou scientifiques (recherche — veiller au respect des règles de sécurité sanitaire ;
biomédicale, recherche des causes de la mort). Pour la recherche — participer à l’information en vue du don. ■
biomédicale, il ne peut l’être que dans le cadre de protocoles sou-
mis préalablement à l’Agence de la biomédecine (v. infra).
Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts
4. Consentement du donneur concernant les données publiées dans cet article.
✓ Si le sujet est majeur, en théorie, le prélèvement est possible
uniquement si la personne n’a pas fait connaître de son vivant
son refus en s’inscrivant sur le Registre national de refus insti-
Pour en savoir plus
tué par le décret du 30 mai 1997. En l’absence de connaissance
sur cette volonté, le médecin doit s’efforcer de recueillir auprès
des proches l’opposition au don d’organes éventuellement ◗ Don d’organes
exprimée par le défunt de son vivant et informer la famille de la et greffes
Monographie
finalité des prélèvements.
(Rev Prat 2007;57[3]:247-310)
✓ Lorsque le sujet est mineur ou incapable majeur, le médecin doit
recueillir le consentement écrit de chacun des titulaires de l’au-
torité parentale ou du tuteur. En cas d’impossibilité de consulter
l’un des titulaires de l’autorité parentale, le consentement écrit
de l’autre est suffisant.
◗ Articles 4, 28, 50, 51 et 76 du code de déontologie médicale
Organisation
R Q8

◗ Articles 222-11 , 222-12 , 222-13 , 222-19 , 222-20 , 441-8


et 313-2, 642-1 du Code pénal
L’organisation des activités de prélèvement d’organes et de
◗ Articles 60, 74, 706-23, 706-29 du Code de procédure pénale
tissus a été confiée à l’Agence de biomédecine, dont les missions
◗ Articles 63 et 81 du Code civil
sont notamment les suivantes :
◗ Loi n° 2004-800 du 6 août 2004 relative à la bioéthique
— gérer la liste nationale des malades en attente de greffe ;
— gérer le registre national des refus au prélèvement sur lequel
◗ Intervention du médecin auprès des personnes en garde à vue.
Conférence de consensus ANAES collégiale des médecins
l’inscription est possible à partir de l’âge de 13 ans ; légistes hospitaliers et hospitalo-universitaires
— élaborer des règles de répartition des organes ; Société de médecine légale et de criminologie de France.
— coordonner les prélèvements d’organes, répartir et attribuer 2 et 3 décembre 2004. Paris.
Ministère des Solidarités, de la Santé et de la Famille.
les greffons en France et à l’international ; Textes et recommandations.
— évaluer les activités ;

L A R E V U E D U P R AT I C I E N , V O L . 5 7, 2 8 F É V R I E R 2 0 0 7 427
I-1-Q8
Certificats médicaux — Décès et législation — Prélèvements d’organes et législation

MINI TEST DE LECTURE


A / VRAI OU FAUX ? C / QCM
1 La rédaction d’un certificat médical ne constitue Parmi les propositions suivantes, lesquelles
jamais une obligation pour le médecin. caractérisent les prélèvements d’organe ?
2 Les faits rapportés dans un certificat médical 1 Chez le donneur vivant capable majeur,
peuvent avoir été constatés à distance du jour le consentement est précédé par une information
de sa rédaction. dévolue à un comité d’experts.
3 Le médecin a l’obligation de répondre 2 Un incapable majeur peut faire don de son rein
à une réquisition. à son frère ou sa sœur, son père ou sa mère, son
4 Le certificat prénuptial mentionne les résultats grand-père ou sa grand-mère.
des examens biologiques réalisés. 3 L’inscription sur le Registre national de refus
5 Le certificat médical peut être dans certaines de prélèvement d’organe est possible à partir
circonstances remis à un tiers. de l’âge de 13 ans.
4 Le procès verbal de constat de mort cérébrale est
B / VRAI OU FAUX ? rédigé par deux médecins n’appartenant pas aux
1 Le médecin délivre le permis d’inhumation après équipes de prélèvement.
avoir rédigé le certificat de décès. 5 Un prélèvement d’organe est toujours précédé
2 Le certificat de décès d’une femme de 65 ans sans par le dépistage chez le donneur de plusieurs
antécédent, découverte décédée dans sa baignoire, maladies infectieuses.
est signé sans obstacle médicolégal à l’inhumation.
3 Un cadavre putréfié retiré d’un fleuve impose une
mise en bière immédiate.
4 Gratuité, anonymat et sécurité sanitaire
constituent les principes sur lesquels repose
le prélèvement d’organe.
5 En matière de don d’organe, le consentement Réponses : A : F, V, V, F, V / B : F, F, F, F, F / C : 1, 3, 4, 5.
du donneur vivant est irrévocable.

MINI TEST DE LECTURE de la question 201, p. 441

A / VRAI OU FAUX ? C / QCM


La détresse circulatoire aiguë est due : Pour effectuer le diagnostic de certitude d’une rupture
1 le plus souvent à l’hémorragie, sous-adventielle de l’aorte, l’(es) examen(s) suivant(s)
est(sont) nécessaire(s) et suffisant(s) :
2 peut être secondaire à un pneumothorax compressif,
1 TDM,
3 rarement à un hémopéricarde. 2 TDM injectée avec reconstruction,
3 échographie transœsophagienne,
B / VRAI OU FAUX ? 4 radiographie pulmonaire,
5 aortographie.
Le bilan lésionnel du polytraumatisé à l’admission
aux urgences :
1 doit toujours être effectué par la tomodensitométrie
corps entier,
2 peut être limité chez le patient instable à une radio-
graphie pulmonaire, du bassin et une échographie
abdominale, Réponses : A : V, V, V. B: F, V, V / C : 2, 3, 5.
3 nécessite une imagerie du rachis cervical.

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