LA PERSONNE CHEZ LES BAMBARA
Les Bambara du Soudan frangais ont de leur personne une
notion A la fois précise et complexe. Ils distinguent, comme les
autres Noirs, le corps de l’homme des principes spirituels qui
Vhabitent ou l’accompagnent durant la vie et le quittent au moment
de la mort. Ces principes, difficilement. décelables, mais toujours
nécessaires, présents et actifs, se manifestent dans les rites religieux
comme dans le comportement quotidien des individus et s’expriment.
également de fagon symbolique dans la cosmétique.
La conception que les Bambara se font de leur personne s'intégre
dans leur métaphysique. Elle repose sur deux notions fondamentales,
notions qui ne sont d’ailleurs pas particuliéres & cette seule popula-
tion de I’Afrique : celle d’un « verbe » créateur et moteur du monde,
celle de la gémelliparité des étres vivants.
7
C'est, chez les Bambara, du Génie de l’Eau, Faro, maitre du
verbe et organisateur du monde créé, que dépend toute vie sur la
terre et dans l’au-dela : c’est done de lui que dépendent, corps et
ames, les hommes. Si, au moment de l’acte sexuel, le male donne a
Vembryon sa « condition d’homme », c’est le Faro qui forme effec-
tivement l'enfant dans la matrice féminine, Or, le Faro forme tou-
jours deux enfants 4 la fois dans la femme, a l'image des deux
jumelles, aux membres souples et non articulés qui naquirent de
lui au centre d’un tertre sur la terre nue, vierge de toute eau et de
toute végétation. A la suite de cette naissance, l’herbe poussa
autour des jumeaux mythiques, des gouttes de rosée, perlant sur
elle, formérent peu & peu une source, une mare, un fleuve, séjour
définitif du génie et de ses descendants : la végétation se déve-AG “JOURNAL DE PSYCHOLOGIE
f |
Toppa.» la pluie tomba et la vie animale apparut sur la terre’.
ase Mais, le > Lemps . des naissances gémellaires fut de courte durée.
Apres quelques eénérations, les hommes se révoltérent contre le
pouvoir et l’autorité du génie. Celui-ci les soumit, mais ne les aban-
donna pas. Il les punit en brisant leurs membres jusque-la lisses
pour les préparer au travail manuel qui devait assurer une subsis-
tance 4 laquelle il pourvoyait seul jusque-la. Il supprima également
la norme de la double naissance pour ne la réserver qu’a de rares
privilegiés : de l'un des embryons il fit le dya, ombre ou double qui
accompagne towt.étre humain. Si les jumeaux qui naissent aujour-
@hui sont toujours les véritables enfants du génie, tout étre unique
Vest aussi par la présence de son dya.
La fonction créatrice du Faro est actuellement matérialisée par
Vabsorption d’une tomate? par chacun des époux avant les rapports
sexuels. C’est le suc de ces fruits qui contient réellement le corps
du futur enfant. La vie se transmet par le suc de tomate selon un
meécanisme et un symbolisme clairs : le Faro recoit des offrandes de
tomates cultivées rituellement dans des champs consacrés, et le sang
des victimes égorgées en son nom au-dessus des eaux. Sang et suc,
répandus dans l'eau, agent de la fertilité, sont cueillis par l’hirondelle,
messagére aérienne du génie. Libérés dans l’espace, ils reviennent
au sol avec la pluie fécondante et pénétrent les graines de tomates :
chaque fruit qui marit contient ainsi une parcelle vivante génératrice.
Aprés l’absorption des fruits, voici done formé dans le sein
maternel l’embryon au corps lisse, aux membres souples. L’acte
sexuel est alors consommé rituellement deux fois de suite par les
époux, A ce moment la femme prend en elle le corps entier de son.
mari : le haut par les yeux, le bas par le sexe. La semence masculine,
qui siége dans les sept articulations principales (genoux, coudes,
chevilles et colonne vertébrale), transmet a l’embryon ces mémes
articulations. Le corps, originairement semblable & celui d'un génie,
devient celui d’un étre humain.
1. Le Faro, doué du don d’ubiquité et qui prend des formes multiples quand
il veut se manifester, est « esprit » de Peau. S’il habite de préférence un fleuve,
Te Niger, son essence est partout présente dans eau. Un Faro hante chaque mare,
chaque puits, chaque source, chaque goulte de rosée et. la calebasse oi l'on boit ;
il tombe aussi du ciel avec la pluie.
2. Ils'agit bien entendu de la tomate dite «indigéne ».G. DIETERLEN. —'LA PERSONNE CHEZ LES BAMBARA 47
Le foetus se développe ensuite sans modifications dans la matrice
jusqu’a la parturition, époque a laquelle il recevra les principes
spirituels, ame ou force vitale (ni) et double (dya) qui seront siens
sa vie durant. C’est alors qu’interviennent les rapports internes
que chaque individu entretient avec le groupe social auquel il
appartient. Si le Faro donne & chaque enfant un corps neuf, en
revanche il anime ce corps de forces spirituelles puisées au réservoir
familial. L’enfant qui nait est lhéritier direct du ni et du dya d'un
défunt, précisément de celui qui est mort immédiatement avant sa
naissance et quel que soit son sexe.
Le décés avait eu, en effet, pour conséquences, de séparer du
cadavre les forces qui l’animaient : le ni avait été, par des rites
appropriés, conservé dans l’autel des ancétres* ; le dya avait quitté
le mourant pour retourner dans l’eau sous la garde du génie. Au
moment de l’accouchement, ils reviennent dans le nouveau-né, mais
inversés. Le dya est renvoyé dans le corps de l'enfant et formera
son ni; le ni du défunt vient se méler aux eaux de l’accouchement,
qui, s’étant déposées au sol, forment l’ombre, dya, qui ne le quittera
pas pendant sa vie et sera son double, son jumeau. Et si enfant
qui nait est un garcon, son dya sera femelle, si c’est une fille, il
sera male. Ceci indépendamment du sexe du défunt dont il a hérité,
le génie inversant, en cas de nécessité, les sexes. Chaque é¢tre humain
est 4 Ja fois male et femelle par son corps et par son dya. Cette
conception de la nature humaine, absolument fondamentale chez
Jes Bambara, s’exprime dans la symbolique des chiffres : le chiffre 7
qui additionne 3 (symbole sexuel male) et 4 (symbole sexuel femelle)
représente |’étre humain complet. Un Bambara porte trois anneaux
4 Poreille droite, quatre 4 Voreille gauche ; un huitiéme anneau,
celui du verbe, est placé au petit doigt de pied, extrémité de sa
personne et image de sa totalité?.
1. Chaque groupe social (enfants, adultes hommes, adultes femmes) forme une
société 4 laquelle correspond une grande institution religieuse (dyo) : chaque dyv
est dépositaire d’autels quiservent a la conservation des forces spirituelles dugroupe.
2. Nous ne saurions trop insister sur cet aspect de la conception de la personne :
elle n'est pas limitée aux seuls Bambara. La plupart des autres Noirs du Soudan
que nous avons étudiés (Dogon, Bozo) ont idée qu'un é@tre vivant complet est
double, 4 la fois male et femelle, et qu’il est: le réceptacle du verbe divin. Le
chiffre TI est celui du Faro, maitre du verbe. Le chiffre 8, chiffre de ce verbe,
exprime que l’étre vivant, 7, n'est complet que s'il I'a reeu.48 JOURNAL DE PSYCHOLOGIE
Le dya, double ou jumeau parfait de |’étre humain et de sexe
opposé, a un corps, l’ombre, et une Ame (ni) qui lui procure une
relative indépendance. Le dya peut se déplacer seul ou étre contraint
de quitter I’étre qu’il accompagne par décision du génie*. Le contact,
€troit qu'il assume avec la terre, siége de l’impureté, en fait le véhicule
de cette derniére : un homme est vulnérable par son dya. Certaines
fonctions religieuses nécessitent la prise en charge du dya par le
génie pendant la durée du ministére. On mesure le dya d’un individu,
on apprécie son tempérament et ses possibilités dans la vie, en mesu-
rant son ombre au sol 4 midi. L’unité de mesure employée est
Vauriculaire, symbole corporel du verbe. Ces calculs d’ailleurs trés
compliqués et accompagnés de priéres servent également d’instru-
ments divinatoires : en mesurant le dya d’une femme enceinte on
sait ce que sera l’enfant qu’elle porte.
Le ni qui anime le corps est visible pendant les semaines qui
suivent l’accouchement dans la fontanelle qui bat. De méme que
le dya, il n'est pas indissolublement lié au corps, car il peut le quitter
pendant le sommeil. Au réveil il revient, et le réve est. considéré
comme un souvenir de ce qu'il a vu. Tout réve est une vérité
annoncée et fait prévoir un événement intéressant la famille, l’indi-
vidu ou le groupe entier?.
Ayant recu le ni et le dya d’un défunt, un enfant remplace ce
dernier, utilisant les mémes forces éternellement réemployables.
Mais il y a une exception 4 cet ordre rigoureux ; ce sont les jumeaux,
Les jumeaux sont deux étres entiérement neufs donnés aux hommes
par le Faro et considérés comme nés de lui seul. Aussi leur apparition
dans la famille est-elle bénéfique pour cette derniére. C’est le Faro
qui, bien entendu, décide d’une naissance gémellaire, fayeur octroyée
4 certains couples privilégiés. Les jumeaux n’héritent ni du dya, ni
du ni d'un défunt dont la mort a précédé leur naissance : ceux-ci
1, Les Bambara font une différence essentielle entre le dya matérialisé par
Tombre de l'homme ou de Vanimal et Vombre d’un végétal (suma). Le dya est
indépendant et peut se déplacer seul, tandis que le suma n’existe que par l'effet
de la lumiére. Le dya a un ni, une vie propre qui l’anime, tandis que le suma
ne se meut que lorsque le vent agite la plante.
2. Si l'on réve de poissons en grand nombre, c'est. que la péche sera fruc-
tueuse ; si c’est de dispute, il y aura la guerre ; nager indique qu’il faut se purifier
d'une faute commise ; si des sauterelles passent au ciel d’ouest en est, c'est signe
de grande bataille ou de famine; tuer en réve des hirondelles donne la gale et
tuer un mange-mil fait périr le fils ainé.G. DIETERLEN, — LA PERSONNE CHEZ LES BAMBARA 49
seront attribués a l'enfant unique qui naitra dans Ja famille aprés
eux. Ils regoivent chacun ces mémes principes, mais originaux, le
Faro ajoutant ainsi des forces neuves au patrimoine familial. Les
eaux de l’accouchement ne se fixent pas au sol comme dans le cas
d'une naissance unique, mais retournent au fleuve : les dya des
jumeaux sont mis ainsi sous la garde du Faro, chacun d’eux étant,
quel que soit son sexe, le dya vivant de l'autre. De ce fait les jumeaux
sont protégés toute leur vie, car leur dya est a l’abri et non, comme
ceux des étres uniques, en contact avec le sol impur.
Les jumeaux ne se quittent pas, pas plus que le dya n’abandonne
le vivant auquel il est attaché ; ils se vétent de méme, mangent au
méme moment la méme nourriture. Deux jumeaux miles épousent
la méme femme. On n’importune jamais les jumeaux, car ce serait
manquer de respect au Faro lui-méme. On ne mesure, bien entendu,
jamais leur dya qui, retourné au fleuye 4 travers le sol dans les
eaux de l'accouchement, n'est pas dans leur ombre.
L’hermaphrodite est un cas particulier de l’attribution du dya:
étant & la fois male et femelle, il a en lui-méme son indispensable
jumeau. En conséquence il n’a pas de dya.
Qu’il soit jumeau ou né unique, toub nouveau-né est également
pourvu du tere qui siége dans la téte et se développe dans le foetus
pendant la gestation : le dere, ou « caractére » de l'enfant, est composé
de ceux de ses parents auxquels vient s’ajouter celui du défunt
dont il a hérité le ni et le dya.
L’aspect du tere d'un enfant est déterminé par les vieillards au
cours de la cérémonie de la dation du nom exécutée publiquement
le huitiéme jour aprés la naissance. Ayant examiné trés soigneuse-
ment la fagon dont ses cheveux sont plantés sur le front, dont ses
sourcils se rejoignent, la forme de ses yeux ow siége l’intelligence,
de sa bouche, de ses pieds et de ses mains, le vieillard annonce d’une
voix forte les signes déterminants de son caractére. Leur position
permet de dire si l’enfant a un bon ou un mauyais dere, et de faire
des prévisions pour sa vie : une légére calvitie au milieu de la téte
annonce la richesse, un crane ample et profond la chefferie. Le
vieillard balance ensuite l’enfant en direction des points cardinaux
au-dessus des autels de familles et lui donne le prénom, doke, du
défunt dont il a hérité le ni et le dya, Une partie de ses cheveux
‘*50 JOURNAL DE PSYCHOLOGIE
rasés sont ensuite jetés au fleuve par le pére, qui, ayant dit sur
eux ee prénom, confie ainsi au ‘génie une part du dere du nouveau-né.
Le méme jour le forgerom ‘trace sur sa figure les scarifications du
front et des pommettes qui ont pour effet d’agir sur son tere, de lui
donner force, courage, vertu.
An fur et & mesure qu'il grandit, certaines particularités phy-
siques de l'enfant sont interprétées comme ‘caractérisant son tere.
S'il grince des dents en dormant il attaquera son pére et sa mére ;
s'il saisit souvent ‘son poignet gauche dans sa main droite il sera
toujours vainqueur. Une fille qui marche en balangant les mains
et en Jes rejetant en arriére veillera sur la fortune de son mari; si
elle souléve de la poussiére avec ses pieds en marchant, au contraire
elle le ruimera. Une grande bouche est l’indice d’un mauvais flere
pour uhe femme. Tous ces signes ont, dans la vie courante, une
importance d’autant plus grande que le dere est le siége de l'impu-
reté : quiconque a rompu un interdit est atteint dans son tere et
doit se purifier.
Pe
Lorsqu’un gargon ou une fille se marient, om dit, d’eux : « il
(ou elle) a épousé son dya ». Car il est impoli de dire qu'on épouse
un autre étre que celui donné par le génie. D/ailleurs, union des.
époux se double de l’'union de leurs dya qui sont, comme eux, de
sexe opposé. Les signes déterminant le tere des futurs conjoints sont
examinés de trés prés par les membres de la famille avant que
Vautorisation de se marier leur soit donnée.
Deux jumeaux males épousent la méme femme : le dya de cette
derniére va rejoindre ceux de ses époux dans le flewve et reste sous.
la garde du génie. L’enfant qu’elle concevra sera le fils des deux
hommes. :
Certains prétres ne se marient pas : ainsi le Soma, devin religieux
attaché aux grandes institutions bambara. Ge dernier, qui a été
initié aw cours d’un séjour solitaire en brousse en compagnie des
génies, leur a laissé son dya : c’est a la fois la condition des dons
de double vue octroyés par ceux-ci et une protection contre les
dangers que court le dya en restant en contact avec la terre ou en
s’approchant des autres hommes. Le véritable conjoint du Soma:G. DIETERLEN. — LA PERSONNE CHEZ LES BAMBARA 51
estson dya; il ne s’unit qu’avee lui i date fixe, le dya@ lui étant
envoyé & cette fin par les génies.
*
ROK
La mort. dissocie les divers éléments composant la personne =
les rites des funérailles, imprégnés du respect. qu’ils inspirent, ont
pour but de veiller 4 ce qu’ils ne soient point perdus pour la société.
Le ni, qui s’échappe avec le dernier souffle, sera capté par la famille.
Le flere se transforme en nyama, force émanant du cadayre lui-
méme, qui peut, cherchant un responsable du décés, devenir dange-
reux et s’attaquer aux vivants. Ils s’agit pour ceux-ci d’empécher
son action néfaste et de I’utiliser 4 des fins bénéfiques.
Le ni et le nyama sont donc guettés par le chef de famille qui,
dés qu’il est prévenu de la grayité de l'état d’un malade, ne quitte
plus son chevet, ni jour ni nuit, jusqu’é l’expiration du dernier
souffle. I] apporte un petit autel portatif appartenant 4 la famille
dont il est le gardien. A linstant ot le moribond rend le dernier
soupir, l’objet, qui a été posé sur sa poitrine, recueille le ni et le
nyama. Sans se retourner, sans adresser la parole 4 quiconque, le
patriarche va déposer l'objet dans le sanctuaire ot: sont conservés
les divers autels de famille dans lesquels le ni et le nyama seront
rituellement introduits et témoigneront du décés pour le Faro.
Le dya, quia quitté le moribond quelques instants avant la
mort, retourne au fleuve et restera sous la garde du génie jusqu’au
moment ai une naissance permettra son retour dans la famille.
Mais les parents du défunt en ont aussi la charge : trois jours aprés
le décés, s'il s’agit d’un homme, ils se rendent au bord du fleuve
et jettent 4 l’eau les habits du mort qui serviront A vétir le dya,
ainsi qu’un plat de nourriture qui servira a l’alimenter, en disant :
« Mon pére Faro, une personne de ma famille est morte, voici son
offrande ; fais qu’elle revienne 4 nous dans le ventre d’une femme. »
L’offrande de nourriture est ensuite renouvelée tous les trois jours
jusqu’a la naissance attendue. S’il's’agit d'une femme, le rité est
exécuté le quatriéme jour aprés le décés et renoduvelé tous les
quatre jours. ! mo
Au bout d’un temps variable, lorsqu’un' enfant est né, il’ décoit52 JOURNAL DE PSYCHOLOGIE
le ni, le dya et le prénom du mort selon le processus décrit plus
haut. Le cycle est clos.
Seuls des décés anormaux, preuve pour les Bambara de courroux
justifié du Faro, ne permettent pas la réincarnation des principes
spirituels : ainsi les hommes tués au cours des cérémonies religieuses
pour sorcellerie, les foudroyés pour rupture d’interdit du Faro.
Leurs corps sont jetés 4 la fosse commune ; leur ni et leur dya,
abandonnés, sont 4 jamais perdus pour leurs descendants. $’il
s’agit d’un noyé, le dya est conservé dans Peau, mais une telle mort
étant considérée comme une punition émanant du génie, des sacri-
fices sont nécessaires pour demander au Faro le retour du ni et du
dya, et la permission de rendre au corps les derniers deyoirs.
Le sentiment est intense de la responsabilité des hommes,
devant la société comme devant le Faro, de toute vie donnée par
lui. @’est ainsi que les parents d’un mort-né, tenus pour coupables
du décés, sont astreints 4 des rites longs et douloureux ; il leur
faut reprendre corporellement les principes de l’enfant et mettre
au monde un remplagant dans lequel ceux-ci se réincarneront.
*
Dans cette économie, rien ne se perd d’un étre vivant : 4 l’excep-
tion des jumeaux qui augmentent d’étres neufs 1a liste des humains,
un individu en remplace exactement un autre. Mais ce réemploi
des forces spirituelles n’exclut pas la réalité de existence tempo-
relle et spatiale de chacun des étres qu’elles ont tour 4 tour animés.
Bien au contraire. Du corps qui est, «pour le termite », selon l’expres-
sion bambara, il reste les os dans la tombe. Visités rituellement
chaque année, ils sont les témoins qu’un étre a vécu ; on leur rend
4 ce titre hommage. Dans l’autel des ancétres ob a séjourné le ni
d'un défunt avant son passage dans un nouveau-né, il reste la
« mue » (mana ou-folo) de cette dme, témoin du mort pour le
Faro. 5
La vie se transmet ainsi intacte, sans que son énergie soit en
rien diminuée. Bien au contraire, le passage du dya dans la demeure
du Faro est. concu comme un rafraichissement, une purification,
un renouvellement profitables. De méme le passage du ni dansJOURNAL aston
PSYCHOLO GIE
NORMALE EY PATHOLOGIQUE
FONDATEURS :
P, JANET er G. DUMAS
DIRECTEURS :
P. GUILLAUME er I. MEYERSON
XL’ ANNEE
1947
PRESSES UNIVERSITAIRES DE FRANCE
108, BouLevarp Saint-Germain, Paris