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Le mouvement appelé Kraft durch Freude (KdF, en français La force par la joie) était une

vaste organisation de loisirs contrôlée par l'État nazi qui s'était substitué aux syndicats,
dissous le 1er mai 1933.

Le président du DAF, Robert Ley, avait découvert cette forme d'encadrement des activités
dans l'Italie fasciste de Mussolini (Dopolavoro, « après le travail ») et l'avait proposée à Adolf
Hitler. En 1937, des accords sont conclus entre les deux organisations.
Le 27 novembre 1933, le ministre du Reich du Travail créait l'organisation Kraft durch
Freude.
Cette organisation prend rapidement une forme imposante : subventionnée par le Front du
Travail (auquel appartient l'ensemble des salariés du Reich), elle hérite des biens et réseaux
de loisirs des organisations socialistes, et peut ainsi proposer, pour un prix modique, de
nombreuses distractions sportives et culturelles à la population, réservées jusqu'alors à une
élite.
Organisation de masse supervisant 30 millions de personnes, le KdF est alors en mesure de
subventionner les loisirs de ses membres parfois à hauteur de 75 %, ce qui crée alors dans
les régions touristiques du Reich, un essor économique important et un afflux de touristes
dans certains pays amis ou en passe de le devenir, esquissant ainsi les contours de
l'influence allemande en Europe et en Afrique.

L'Œuvre nationale du temps libre (Opera Nazionale Dopolavoro - OND) est une association
créée par acte du parlement le 1er mai 1925 par le régime fasciste dont l'objectif est de
s'occuper du temps libre des travailleurs. Par ses statuts, elle « soigne l'élévation morale et
physique du peuple, à travers le sport, les excursions, le tourisme, l'éducation artistique, la
culture populaire, l'assistance sociale, l'hygiène, la santé et le perfectionnement
professionnel ».

Ce programme était surtout destiné aux environnements urbains et industriels, à partir de


1929, le temps libre agricole se développa avec pour finalité de « ne pas distraire de la terre
» les paysans. Un programme spécial sera créé pour les femmes avec des cours de premier
secours, d'hygiène et d'économie domestique.

L'historienne Anne-Marie Thiesse note : « Le revivalisme folkloriste s'y épanouit, pour la plus
grande gloire de la tradition nationale et de la communion des classes dans la société
fasciste ». Au sein de l'OND est ainsi créé la Commission nationale des arts et traditions
populaires, qui dispose de relais en province organisés en comités. Les érudits locaux sont
chargés d'exhumer certaines traditions afin de les faire revivre, qu'il s'agisse de chants, de
défilés ou concours de poésie. Au milieu de ces festivités, le régime promeut sa propagande
contre l'analphabétisme, pour l'agriculture ou la guerre en Éthiopie. Lors des festivités (qui
peuvent être hebdomadaires ou mensuelles en fonction des régions), des compétitions
sportives sont aussi organisées (moto, vélo, football). Après une crise du secteur viticole est
institué en 1930 une « journée du raisin », fêtée le 28 septembre. Couplées au fond
historique de la Rome antique magnifiée par le cinéma, les traditions populaires sont
valorisées (notamment les villes au passé médiéval), dans un but patriotique mais aussi pour
stimuler le tourisme, source d'argent et de bonne image internationale1.

En 1937, des accords sont conclus entre l'OND et son homologue allemand, Kraft durch
Freude, qui amènent des touristes allemands en Italie issus de la classe ouvrière1.

La KdF met également en place la production d'une voiture bon marché, la KdF-Wagen,
ancêtre de la Volkswagen Coccinelle (voir Ferdinand Porsche). Une nouvelle ville, baptisée
KdF-Stadt, est construite à côté du village de Wolfsbourg près de Hanovre pour y abriter
usines et ouvriers. Le KdF organise un système d'épargne spécial pour permettre aux simples
ouvriers de s'offrir le luxe d'une voiture. Toutefois, à cause de la Seconde Guerre mondiale,
ces réalisations seront peu nombreuses, et les usines et KdF se concentreront sur les efforts
de guerre.

Son bureau Volkstum und Heimat se spécialise sur les questions de folklore et de protection
du paysage. À partir d'avril 1934, il édite une revue éponyme, poursuivant l'action de Das
Land, périodique créé en 1893 dans le contexte du mouvement appelé Heimatschutz (en) ;
cette récupération poursuit néanmoins des objectifs idéologiques différents. Ce bureau
travaille notamment à promouvoir certains thèmes, note l'historienne Anne-Marie Thiesse :
« chants et danses populaires, artisanat, excursions, fêtes, costumes traditionnels ». Le
bureau supervise notamment la Fête nationale de la moisson, initiée en 1933. Lors des
congrès du NSDAP à Nuremberg, les régions du Reich sont mises en valeur dans une
perspective unitaire, en particulier celles de pays étrangers où vivent des Allemands, qui
seront plus tard annexées militairement1.

Comme en Italie, le folklore est mis en avant, par opposition à l'« art dégénéré », afin de
célébrer la patrie, une communauté unitaire désormais présentée sans classes sociales, qui
en a prétendument fini avec le capitalisme et l'élitisme culturel. Au début du premier
numéro de Volkstum und Heimat figure ainsi une photo d'Hitler en habit traditionnel, et, par
la suite des clichés de citoyens du Reich en costumes régionaux ou des jeunes gens
dynamiques portés par l'esthétique mise en place par Leni Riefenstahl. Anne-Marie Thiesse
poursuit : « Les idéologues hitlériens assignent au travail sur la culture populaire une
fonction précise : non pas conserver pieusement le passé mais retrouver l'énergie primitive
et forger, à partir des forces qui jaillissent du sol et du sang, du Blut und Boden, un homme
nouveau, véritablement allemand, c'est-à-dire national-socialiste ». De nombreux films sont
produits en ce sens. Toutefois, contrairement à la mise en scène du folklore italien, le
racisme est particulièrement mis en avant en Allemagne. Au fil du temps, le bureau
Rosenberg et l’Ahnenerbe prennent de plus en plus du poids sur la gestion du folklore
allemand, en faisant primer le paganisme sur les fêtes chrétiennes traditionnelles1.

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